th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

42
Th´ eorie quantique des champs Vincent Thibeault 111 100 580 Xavier Roy-Pomerleau 111 103 661 epartement de physique, de g´ enie physique et d’optique Facult´ e des sciences et de g´ enie, Universit´ e Laval 5 avril 2017 1

Upload: others

Post on 27-Nov-2021

4 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Theorie quantique des champs

Vincent Thibeault 111 100 580Xavier Roy-Pomerleau 111 103 661

Departement de physique, de genie physique et d’optique

Faculte des sciences et de genie, Universite Laval

5 avril 2017

1

Page 2: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Table des matieres

1 L’echec de la mecanique quantique a une particule (Vincent Thibeault) 4

2 Oscillateur harmonique (Xavier Roy-Pomerleau) 8

2.1 Operateurs de creation et d’annihilation de l’oscillateur harmonique . . . . . . . 8

2.2 Oscillateurs couples, phonons et espace de Fourier . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

2.3 Nombre d’occupation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

3 De l’espace de Fock aux operateurs de creation et d’annhihilation : elaborationd’un cadre mathematique pour la theorie quantique des champs (VincentThibeault) 20

3.1 Rappel de certaines structures mathematiques et operations . . . . . . . . . . . . 20

3.2 Espace de Fock . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22

3.2.1 Espace de Fock bosonique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

3.2.2 Espace de Fock fermionique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

3.3 Seconde quantification (Xavier Roy-Pomerleau) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

4 Notions elementaires de theorie quantique des champs 33

4.1 Theorie classique des champs (Vincent Thibeault) . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

4.2 Theorie quantique des champs et quantification canonique (Vincent Thibeault) . 36

4.3 Application de la theorie quantique des champs (Xavier Roy-Pomerleau) . . . . . 38

Bibliographie 42

2

Page 3: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Introduction

Il est indeniable qu’avec un tel nom, la theorie quantique des champs fasse tourner la tete desphysiciens. De plus, sachant qu’elle regit les fondements de la physique des particules moderneou, si vous preferez, de la physique des fondements de l’univers, il etait immanquable d’explorerce sujet a l’interieur de notre parcours. Au premier abord, cette theorie est souvent percuecomme extremement complexe, voire decourageante, d’ou l’apparition de plusieurs livres visantun public plus general. En effet, malgre toute sa puissance, la theorie quantique des champs resteun mariage entre de la physique peu intuitive et des mathematiques avancees et peu connuesde la populace (incluant la majorite des physiciens !). Malgre tout, nous avons la conviction quel’elaboration d’un ouvrage plus mathematique, ou tous les concepts juges les plus importantssont definis de maniere precise, permet d’etablir des bases suffisamment solide pour contemplerla beaute de cette theorie. Considerant l’etendu du sujet, la majorite de la theorie sera laisseede cote, comme par exemple toute l’approche integrale de chemin, pour se concentrer sur lesmanifestations des operateurs de creation et d’annihilation dans la theorie et sur la quantificationcanonique, tout en etablissant certaines bases mathematiques formelles. Avant toute chose, lebut est d’introduire les elements qui nous permettent de faire un pas de plus vers la theoriequantique des champs. Nous explorons d’abord d’ou provient (en partie) la necessite de cettetheorie dans le premier chapitre et, dans le second, nous reactivons certaines notions de physiquepour finalement en arriver a la piece de resistance, c’est-a-dire l’espace de Fock, sur lequel estbase la theorie. Ce dernier chapitre etant tres mathematique, nos esprits de physiciens peuventrester sur leur faim. C’est pourquoi nous finirons avec un exemple concret prenant pour appuiles constructions mathematiques et les intuitions etablies dans les sections precedentes.

3

Page 4: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

1 L’echec de la mecanique quantique a une particule (VincentThibeault)

Bien que la mecanique quantique a une particule soit un progres ideologique extraordinaire dansl’histoire de la science, elle ne parvient pas inclure une autre avancee d’importance majeure : larelativite restreinte. Pour le montrer, il suffit de faire evoluer une particule dans l’espace-temps.Effectivement, si la particule a une probabilite non nulle de se propager a l’exterieur du cone delumiere, alors cela sonnera la mort de la theorie a une particule [6]. Tout d’abord, l’evolutiontemporelle d’un systeme quantique est donnee par l’equation de Schrodinger

i∂

∂t|ψ(t)〉 = H |ψ(t)〉

ou H est l’hamiltonien. La solution a l’equation de Schrodinger pour une particule evoluant d’untemps t0 a t est de la forme

|ψ(t)〉 = e−iH(t−t0) |ψ(t0)〉

ou e−iH(t−t0) est l’operateur d’evolution temporelle. En representation position, la fonctiond’onde s’ecrit

ψ(x, t) = 〈x|ψ(t)〉.

De plus, une particule positionnee a l’origine de l’espace-temps est notee

|ψ(0)〉 = |x = 0〉 = |0〉 .

Ainsi, l’amplitude de probabilite de trouver une particule a une position x apres avoir evoluependant un temps t est

ψ(x, t) = 〈x|ψ(t)〉 = 〈x| e−iHt |0〉

Comme on exprimera l’energie relativiste selon la quantite de mouvement, soit Ep =√

p2 +m2,on change de representation. Pour ce faire, on utilise la relation 〈x|p〉 = 1

(2π)3/2eip·x dans laquelle

on assume une certaine normalisation. Ce choix ne nous fait pas perdre de generalite etant donneque l’on veut prouver que l’on obtient une probabilite non nulle. On se servira aussi du faitque Ep est la valeur propre de H en representation quantite de mouvement, c’est-a-dire queH |p〉 = Ep |p〉. En ecrivant l’amplitude de probabilite sous la forme integrale et en y inserantune relation de fermeture

∫|p〉〈p| d3p, on a

4

Page 5: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

ψ(x, t) =

∫∫∫ ∞−∞〈x| e−iHt |p〉 〈p|0〉d3p

=

∫∫∫ ∞−∞〈x|p〉e−iEpt 〈p|0〉d3p

=1

(2π)3

∫∫∫ ∞−∞

eip·xe−iEpte−ip·0d3p

=1

(2π)3

∫∫∫ ∞−∞

eip·xe−iEptd3p

=1

(2π)3

∫ ∞0

∫ 1

−1

∫ 2π

0|p|2ei|p||x| cos θe−iEptdφ d(cos θ) d|p|

=1

(2π)2

∫ ∞0|p|2

[ei|p||x| cos θ

i|p||x|

]∣∣∣∣1−1

e−iEpt d|p|

=−i

(2π)2|x|

∫ ∞0|p|(ei|p||x| − e−i|p||x|

)e−iEpt d|p|

=−i

(2π)2|x|

∫ ∞−∞|p|ei|p||x|e−it

√|p|2+m2

d|p|

Cette derniere integrale peut se resoudre avec les methodes de l’analyse complexe. Tout d’abord,on introduit la fonction f(|p|), ou |p| est etendu au plan complexe, que l’on peut manipulercomme suit :

f(|p|) = |p|ei|p||x|e−it√|p|2+m2

= |p|ei|p||x|e−it√|p|+im

√|p|−im.

Le defi sera donc d’evaluer l’integrale complexe∮C f(|p|)|d|p| sur un contour C. Avant de choisir

le contour d’integration, regardons les singularites de cette fonction. On voit bien qu’il n’y a

aucun pole. Cependant, la fonction est multiforme en raison du terme e−it√|p|+im

√|p|−im et

possede donc des points de branchement a |p| = ±im. En effet, soit |p|i = im+ reiθ un contourautour de la singularite a im et soit |p|f = im + rei(θ+2π) un meme contour, mais apres avoirparcouru un cycle. Alors, on a que

f(|p|i) = |p|iei|p|i|x|e−it√|p|i+im

√rei

θ2

f(|p|f ) = |p|fei|p|f |x|e−it√|p|f+im

√rei( θ2+π)

= |p|iei|p|i|x|eit√|p|i+im

√rei

θ2 6= f(|p|i)

On a donc bel et bien un point de branchement (il est d’ailleurs d’ordre 2), car la fonctionne revient pas a sa valeur initiale apres un cycle (on change donc de feuillet de Riemann). Defacon analogue, on sait que −im est aussi un point de branchement. Pour rendre la fonctionuniforme, on introduit une coupure entre nos deux points de branchement en passant par l’infini(cela s’imagine bien en termes de plan complexe compactifie sur la sphere S2). On choisit doncle contour de la figure 1 de sorte qu’on puisse l’etendre de −∞ a ∞ (evidemment, on veutretrouver l’integrale reelle de notre probleme)[6] [7].

5

Page 6: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Figure 1 – Contour d’integration C pour trouver l’amplitude de probabilite ψ(x, t).

Puisque la fonction f(|p|) est analytique a l’interieur du contour, le theoreme de Cauchy nousindique que, ∮

Cf(|p|)|d|p| = 0.

En developpant le contour d’integration, on a{∫C→

+

∫CR1

+

∫C↓

+

∫Cε

+

∫C↑

+

∫CR2

}|p|ei|p||x|e−it

√|p|2+m2

d|p| = 0.

Quand ε→ 0, la longueur totale du parcour sur Cε, LCε , tend vers 0 . Puisque∣∣∣∣ ∫Cε

f(|p|)d|p|∣∣∣∣ ≤ max

Cε|f(|p|)| · LCε

par l’inegalite de Darboux, alors necessairement l’integrale sur Cε doit tendre vers 0 [10]. De plus,le terme ei|p||x| decroıt exponentiellement lorsque l’on a de grandes valeurs imaginaires de |p|.En effet, si on ecrit |p| = px+ ipy, si ipy est grand et puisque |x| > 0, alors ei|p||x| = e−py |x| → 0.

Pour ce qui est du terme e−it√|p|+im

√|p|−im, il decroıt si on augmente la partie imaginaire

de |p| a gauche de la coupure et donc, par le lemme de Jordan, l’integrale sur CR1 est nulle.

Sur le contour a droite de la coupure, le terme e−it√|p|+im

√|p|−im croıt. Heureusement, cela ne

cause pas probleme etant donne que le terme ei|p||x|e−it√|p|+im

√|p|−im decroıt. En effet, cette

6

Page 7: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

decroissance s’explique par le fait que la particule se propage a l’exterieur du cone de lumiere etdonc |x| > t. Autrement dit, l’exponentielle ei|p||x| decroıt plus rapidement que l’exponentielleen t augmente. Ainsi, par le lemme de Jordan, encore une fois, l’integrale sur CR2 est nulle [6][7]. Il en resulte que {∫

C→

+

∫C↓

+

∫C↑

}|p|ei|p||x|e−it

√|p|2+m2

d|p| = 0

−{∫

C↓

+

∫C↑

}|p|ei|p||x|e−it

√|p|2+m2

d|p| =∫C→

|p|ei|p||x|e−it√|p|2+m2

d|p|

=

∫ R

−R|p|ei|p||x|e−it

√|p|2+m2

d|p|

=

∫ ∞−∞|p|ei|p||x|e−it

√|p|2+m2

d|p|

ou, a la derniere ligne, on a utilise le fait que R tend vers l’infini. On retrouve donc, a uneconstante pres, l’amplitude de probabilite ψ(x, t) et on peut donc ecrire

ψ(x, t) =i

(2π)2|x|

{∫C↓

+

∫C↑

}|p|ei|p||x|e−it

√|p|2+m2

d|p|

=i

(2π)2|x|

{∫ im+ε

iR+

∫ iRe2π

im+ε

}|p|ei|p||x|e−it

√|p|2+m2

d|p|

=i

(2π)2|x|

{−∫ iR

im+

∫ iRe2π

im

}|p|ei|p||x|e−it

√|p|2+m2

d|p| (∵ ε→ 0)

=i

(2π)2|x|

[−∫ iR

im|p|ei|p||x|e−it

√|p|2+m2

d|p|+∫ iRe2π

im|p|ei|p||x|e−it

√|p|2+m2

d|p|]

D’une part, on pose z↓ = |p|2 +m2 = yeiπ2 et d’autre part, on pose z↑ = |p|2 +m2 = yei(

π2

+2π) =z↓e

2πi. Aussi, d|p| = dz↓/(2√z↓ −m2). On a donc

ψ(x, t) =i

(2π)2|x|

[−∫ −R2+m2

0

1

2ei√z↓−m2|x|e−it

√z↓ dz↓

+

∫ −R2+m2

0

1

2ei√z↑−m2|x|e−it

√z↓e

iπdz↓

]

=i

(2π)2|x|

[−∫ −R2+m2

0

1

2ei√z↓−m2|x|e−it

√z↓ dz↓

+

∫ −R2+m2

0

1

2ei√z↓−m2|x|eit

√z↓ dz↓

]

7

Page 8: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

En revenant en fonction de |p|, on arrive donc a l’expression :

ψ(x, t) =i

(2π)2|x|

∫ iR

im|p|ei|p||x|

(eit√|p|2+m2 − e−it

√|p|2+m2

)d|p|

En prenant R→∞ et en posant |p| = iz, on obtient

ψ(x, t) =i

(2π)2|x|

∫ ∞m

(iz)e−z|x|(et√z2−m2 − e−t

√z2−m2

)idz (∵ |p| = iz)

=−i

2π2|x|e−m|x|

∫ ∞m

ze−(z−m)|x| sinh(t√z2 −m2

)dz

=−i

2π2|x|

(m|x|+ 1

|x|2sinh

(t√z2 −m2

))e−m|x|

6= 0

La probabilite |ψ(x, t)|2 d’avoir une particule en dehors du cone de lumiere est donc non nulle.La demarche etait assez ardue, mais le resultat qui en decoule est tres important : la mecaniquequantique a une particule echoue a inclure la relativite restreinte puisqu’il y a une probabilitenon nulle de retrouver une particule a l’exterieur du cone de lumiere [6] [7]. Evidemment, onne s’avouera pas vaincu ! Notre cheval de bataille sera la theorie quantique des champs : unetheorie a plusieurs particules ou les champs sont definis localement de sorte qu’il n’y ait pas depropagation plus rapide que la vitesse de la lumiere. En effet, plus loin dans cet ouvrage, ondevra trouver des operateurs qui sont definis aux differentes positions dans l’espace-temps etaussi un espace dans lequel il est possible de faire varier le nombre de particules. Par contre,avant de s’attaquer a la theorie quantique des champs, il est pertinent de faire un leger detourvers l’oscillateur harmonique.

2 Oscillateur harmonique (Xavier Roy-Pomerleau)

Afin de progresser tranquillement vers cette theorie, nous pouvons analyser un concept fonda-mental et tres pratique en physique, c’est-a-dire l’oscillateur harmonique. En effet, ce dernierest un element cle a l’interieur de nombreuses spheres de la physique. La mecanique quantiqueet meme la theorie quantique des champs n’y echappent pas. Plus precisement, le traitement del’oscillateur harmonique nous permet d’arriver a une version de base des operateurs de creation etd’annihilation. Comme le present ouvrage se concentre sur l’obtention de ces memes operateurspour la theorie quantique des champs, il est pertinent d’aborder le sujet graduellement en partantde certains resultats de la mecanique quantique.

2.1 Operateurs de creation et d’annihilation de l’oscillateur harmonique

Il existe une panoplie de processus physiques qui, de pres ou de loin, possedent un regime danslequel nous pouvons modeliser l’ensemble du probleme par des resultats propres aux oscilla-

8

Page 9: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

teurs harmoniques [1]. Dans le cas de la mecanique quantique, on peut facilement penser auxresonateurs de Planck dans une cavite [1]. N’ayant pas un desir particulier de reinventer laroue, nous utiliserons le bon vieux systeme masse-ressort afin d’arriver aux resultats escomptes.Comme cette rubrique se veut seulement une simple reactivation des notions de base, nous uti-liserons des formules sans les demontrer. Neanmoins, nous obtiendrons des resultats qui nouspermettrons d’apprivoiser graduellement la theorie quantique des champs. Commencons alorspar l’hamiltonien classique de l’oscillateur harmonique qui s’ecrit comme ceci :

H =p2

2m+

1

2mω2x2. (2.1)

Or, comme nous souhaitons travailler dans le formalisme de la mecanique quantique, nous avonsque H, p et x sont des operateurs. Nous les rebaptiserons alors respectivement H, p et x, desorte que nous obtenons :

H =p2

2m+

1

2mω2x2. (2.2)

L’equation aux valeurs propres correspondante s’ecrit alors comme :

H |ψ〉 = E |ψ〉 . (2.3)

ou E =(n+ 1

2

)~ω [1].

Afin d’aller plus loin, nous allons maintenant factoriser le cote droit de l’hamiltonien commececi :

1

2mω2

(x− i

mωp)(x+

i

mωp). (2.4)

Or, comme les operateurs de position x et de quantite de mouvement p ne commutent pas, laderniere expression donne plutot :

1

2mω2x+

p2

2m+iω

2[x, p]. (2.5)

ou la valeur du dernier commutateur est [x, p] = i~ [1].

Ainsi, si une telle factorisation est utilisee, nous devons plutot ecrire :

H − ~ω2

=1

2mω2

(x− i

mωp)(x+

i

mωp). (2.6)

Il est a noter que cela correspond a la soustraction de la valeur de l’energie pour n = 0. Souscette forme, nous voyons donc apparaıtre les fameux operateurs de creation et d’annihilation,qui sont contenus dans les parentheses [6]. Pour aller plus loin, on met en evidence ~ et ω pourobtenir :

H − ~ω2

= ~ω[ 1

2~mω(x− i

mωp)(x+

i

mωp)]. (2.7)

9

Page 10: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Sous cette forme, nous pouvons donc extraire les operateurs tant convoites que nous nommons,de facon standard, a et a† :

a ≡√mω

2~

(x+

i

mωp),

a† ≡√mω

2~

(x− i

mωp). (2.8)

En utilisant ces deux resultats, il est possible d’inverser les relations pour trouver x et p afinde recrire l’hamiltonien en fonction des operateurs a† et a. En effet, de la premiere relation, ontrouve : √

2~mω

a− x =i

mωp, (2.9)

que l’on peut injecter dans la seconde relation pour obtenir :

a† =

√mω

2~

(x−

√2~mω

a+ x),

⇒√

~2mω

(a† + a) = x. (2.10)

Effectuons alors un travail similaire pour p. De la definition de a, on a :√2~mω

a− i

mωp = x, (2.11)

qui une fois placee dans l’autre definition donne :√~

2mωa† =

√2~mω

a− i

mωp− i

mωp,

⇒√

2~mω

(a† − a) = −2i

mωp,

⇒ −i√

~mω2

(a− a†) = p. (2.12)

A l’aide de ces resultats, nous pouvons alors ecrire l’hamiltonien en fonction de ces operateurs :

H − ~ω2

= ~ω[ 1

2~mω(x− i

mωp)(x+

i

mωp)],

H − ~ω2

= ~ω[mω

2~

(x2 +

i

mω[p, x] +

1

m2ω2p2)],

ou le terme ~ω2 s’est annule avec le terme contenant le commutateur a droite laissant :

H = ~ω[mω

2~

(x2 +

1

m2ω2p2)],

10

Page 11: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

H = ~ω[mω

2~

( ~2mω

(a† + a)2 − 1

m2ω2

~mω2

(a− a†)2)],

H =~ω4

[(a† + a)2 − (a− a†)2

)],

H =~ω4

[a†a† + a†a+ aa† + aa− aa+ aa† + a†a− a†a†

],

H =~ω2

[a†a+ aa†

]. (2.13)

Nous avons alors besoin de la relation de commutation entre les operateurs a et a† :

[a, a†] = aa† − a†a,

=mω

2~

[(x+

i

mωp)(x− i

mωp)−(x− i

mωp)(x+

i

mωp)],

=mω

2~

[ 2i

mωpx− 2i

mωxp)],

=i

~

[px− xp

],

=i

~

[− [x, p]

],

=−i~· i~ = 1. (2.14)

De sorte que, dans l’hamiltonien, nous pouvons utiliser la relation aa†−a†a = 1⇒ aa† = 1+a†a.Ainsi, l’hamiltonien devient finalement :

H =~ω2

[a†a+ (1 + a†a)

],

H = ~ω[a†a+

1

2

]. (2.15)

En regle generale, on renomme l’operateur a†a comme n [1][6], ce qui fait en sorte que l’hamil-tonien peut s’ecrire sous la forme tres elegante suivante :

H = ~ω[n+

1

2

]. (2.16)

Evidemment, comme il s’agit toujours de l’hamiltonien, l’equation aux valeurs propres prend laforme :

H |ψn〉 = ~ω[n+

1

2

]|ψn〉 . (2.17)

11

Page 12: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

A l’aide de toutes ces expressions, nous pouvons finalement nous concentrer sur l’interpretationdes operateurs a et a†. D’abord, considerons le vecteur defini par a† |ψn〉. Si nous lui appliquonsl’operateur n et que l’on utilise la relation de commutation entre a et a†, on trouve :

na† |ψn〉 = a†aa† |ψn〉 = a†(a†a+ 1) |ψn〉 = (n+ 1)a† |ψn〉 , (2.18)

ou nous avons considere que la valeur propre de l’operateur n sur |ψn〉 est n [1][6].

Cela nous indique alors que le vecteur a† |ψn〉 est bien un vecteur propre de l’operateur n, maisdont la valeur propre est plus elevee d’un entier. De plus, a† |ψn〉 etant un vecteur propre den, il l’est aussi pour l’hamiltonien. Il est alors possible de faire un pont entre cette derniereexpression et l’application de l’operateur n sur |ψn+1〉. En effet, n |ψn+1〉 = (n+1) |ψn+1〉, ce quilaisse presager une correspondance entre a† |ψn〉 et |ψn+1〉. On peut effectuer un travail similaireavec l’operateur a [6] pour obtenir une equation de la forme :

na |ψn〉 = (n− 1)a |ψn〉 . (2.19)

A l’inverse de a† |ψn〉, on constate donc que a |ψn〉 correspond a un vecteur dont la valeur propreavec l’operateur n et reduite d’un entier. Ces deux derniers resultats nous permettent alors depercevoir un peu plus pourquoi nous avons utilise les termes � creation � et � annihilation �.En fait, afin de comprendre reellement d’ou ces termes proviennent, il ne reste qu’a normaliserefficacement ces operateurs. Partant des resultats precedents, on ecrit :

a† |ψn〉 = c |ψn+1〉 , (2.20)

ou c est une constante qui reste a determiner. Trouvons alors la norme au carre de cette expres-sion :

〈ψn| aa† |ψn〉 = 〈ψn| (a†a+ 1) |ψn〉 ,

= 〈ψn| n |ψn〉+ 1) |ψn〉 = 〈ψn| n |ψn〉+ 〈ψn|ψn〉,

= 〈ψn|n |ψn〉+ 1 = n+ 1. (2.21)

Or, nous avons aussi que :|a† |ψn〉 |2 = |c |ψn+1〉 |2,

〈ψn+1| c2 |ψn+1〉 = c2. (2.22)

En egalisant les equations 2.21 et 2.22 on tire que c =√n+ 1. On peut effectuer le meme

traitement pour l’operateur a et obtenir que la constante est egale a√n [6][1].

Nous sommes fin prets a observer pour une premiere fois la puissance des operateurs de creationet d’annihilation. Soit |ψ0〉, l’etat fondamental de l’oscillateur harmonique. Alors, si nous utilisonsl’operateur de creation, nous obtenons :

a† |ψ0〉 = |ψ1〉 .

12

Page 13: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

De meme, si nous l’appliquons de nouveau sur ce nouvel etat :

a†a† |ψ0〉 = a† |ψ1〉 =√

2 |ψ2〉 .

Si nous effectuons cette operation n fois, nous obtenons alors :

(a†)n |ψ0〉 =√n! |ψn〉 ,

ce qui nous permet d’ecrire n’importe quel etat de l’oscillateur harmonique en utilisant :

|ψn〉 =(a†)n√n!|ψ0〉 (2.23)

Autrement dit, au sein de notre oscillateur, nous ajoutons ou creons des quanta d’energie,puisque l’energie est quantifiee ! A l’inverse, si nous appliquons l’operateur d’annihilation surl’etat ψn, nous obtenons :

a(a†)n√n!|ψ0〉 = a |ψn〉 =

√n |ψn−1〉 =

√n(a†)n√n!

|ψ0〉 =(a†)n−1√(n− 1)!

|ψ0〉 . (2.24)

Des lors, en appliquant a sur l’etat n de notre oscillateur harmonique, nous avons retire ouannihile un quanta d’energie ! Il est a noter que cette demarche est generalisable pour un systemepossedant plusieurs oscillateurs harmoniques non-couples [1][6]. Le cheminement pour y arriverne sera pas fait ici, mais permet d’obtenir une forme similaire.

Ce tour de piste nous a donc permis d’apprivoiser les operateurs de creation et d’annihilationqui reviendront prochainement, mais dans un dessein plus grand que celui de l’oscillateur har-monique.

2.2 Oscillateurs couples, phonons et espace de Fourier

Apres l’oscillateur harmonique, il est pertinent d’etudier le cas des oscillateurs couples. Ces der-niers nous permettent de nous familiariser avec des notions importantes pour etre confortablesavec les elements de la theorie quantique des champs. Malgre son importance, l’oscillateur har-monique ne peut pas tout resoudre et les resultats trouves precedemment tombent un peu a platlorsqu’il est question d’etudier des systemes complexes. En effet, il n’est pas rare de se retrouverdevant un systeme qui comporte plusieurs particules ! Nous avons donc besoin de quelque chosed’un peu plus substantiel pour analyser les situations ou des corps interagissent entre eux. Nousdevelopperons donc des resultats en utilisant une analyse standard dans la physique de l’etatsolide, c’est-a-dire l’etude de la chaıne lineaire [5]. A l’image de ce que nous avons fait dans larubrique precedente, nous allons donc utiliser une chaıne de N spheres de masse m reliees pardes ressorts de constante K. Lorsque ces masses sont a leur position d’equilibre, on peut ecrireleur position comme na, ou a est la longueur entre deux masse et n est l’indice de la sphere en

13

Page 14: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

question. L’hamiltonien total de ce systeme ou chaque sphere est couplee avec ses deux premiersvoisins s’ecrit alors comme :

H =∑n

p2n

2m+

1

2K(xn+1 − xn)2, (2.25)

ou xn correspond au deplacement de la masse n par rapport a son point d’equilibre.

Comme nous avons un arrangement periodique de spheres, il peut etre interessant d’analyser leprobleme dans l’espace de Fourier. Comme nous avons une somme sur des elements distincts,nous utiliserons la transformee de Fourier discrete ayant la forme suivante pour les variables xnet pn [6] :

xn =1√N

∑k

xkeikna, (2.26)

pn =1√N

∑k

pkeikna, (2.27)

Les fonctions inverses associees sont donc [6] :

xk =1√N

∑n

xne−ikna, (2.28)

pk =1√N

∑n

pne−ikna. (2.29)

Si nous ajoutons des conditions periodiques a notre chaıne, nous devons imposer le fait que [6] :

eikna = eik(n+N)a = eiknaeikNa ⇒ eikNa = 1. (2.30)

Or, pour que l’exponentielle en question soit bien egale a 1, nous devons ajouter une conditionsupplementaire sur k. En effet, comme l’exponentielle donne 1, nous devons regarder les cassuivants :

eikNa = 1⇒ cos(kNa) = 1⇒ kNa = 2lπ ⇒ k =2lπ

Na, (2.31)

ou l ∈ N. En physique de l’etat solide, il est toutefois coutume de limiter l’indice l de cettemaniere −N2 < l ≤ N

2 [5]. Cela limite donc notre analyse dans ce que l’on appelle la premiere zonede Brillouin [5]. Au-dela de ces valeurs, nous ne faisons que repeter le cycle des valeurs possibles,d’ou l’interet de ne travailler que dans la premiere zone. La somme sur les n de l’exponentiellepossede alors un comportement particulier selon la valeur de k. En effet, de maniere generale,nous pouvons ecrire : ∑

n

eikna =∑n

(eika

)n, (2.32)

14

Page 15: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

ou nous reconnaissons la forme d’une serie geometrique. Si l 6= 0, nous pouvons utiliser lesresultats connus des sommes partielles finies [10]. Par exemple :

N∑n=0

rn =1− rN

1− r. (2.33)

Si r = eika et si n commence a 0, nous avons :

N∑n=0

(eika

)n=

1−(eika

)N1− eika

,

=1−

(e

2πliN

)N1− e

2πliN

=1−

(e2πli

)1− e

2πliN

,

=−eiπl

(eiπl − e−iπl

)−e

iπlN

(eiπlN − e

iπlN

) ,= e

iπl(N−1)N · sin(lπ)

sin(lπN

) . (2.34)

Comme l prend des valeurs entieres, on remarque que ∀ l 6= 0, le numerateur est nul, ce quinous indique que la somme de l’exponentielle l’est aussi. Toutefois, si l = 0, l’exponentielle estequivalente a l’unite, ce qui fait en sorte que la somme ne peut etre traitee avec l’equation 2.34[10]. En effet, nous devons plutot revenir a l’equation 2.32, qui nous donne plutot N , a conditionde sommer jusqu’a N − 1, ce qui est le cas si nous avons N spheres et que nous commenconsnos indices a n = 0. Le tout permet alors d’ecrire :∑

n

eikna = Nδk,0, (2.35)

relation dont nous nous servirons plus loin. Cela etant fait, nous pouvons substituer les variablessous leur forme transformee dans l’hamiltonien. Commencons d’abord par traiter le terme d’im-pulsion : ∑

n

p2n =

∑n

( 1√N

∑k

pkeikna

)2,

=1

N

∑n

∑k

pkeikna

∑m

pmeimna,

=1

N

∑n

∑k

∑m

pkpmei(k+m)na. (2.36)

15

Page 16: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Afin d’aller plus loin dans notre developpement, nous pouvons utiliser notre fameuse expressiondu delta de Kronecker, soit l’equation 2.35. En effet, si nous effectuons la somme sur n avant lesautres, on a : ∑

n

p2n =

∑k

∑m

pkpmδk,−m. (2.37)

Nous pouvons alors utiliser les proprietes du delta de Kronecker pour obtenir la forme finale,c’est-a-dire : ∑

n

p2n =

∑k

∑−k

pkp−k. (2.38)

Nous pouvons maintenant effectuer le traitement des variables x. De maniere analogue, on trouve[6] : ∑

n

(xn+1 − xn)2 =1

N

∑n

∑k

∑m

xkxmei(k+m)na(eika − 1)(eima−1),

= 4∑k

xkx−k sin2(ka

2

). (2.39)

L’hamiltonien final peut donc s’ecrire comme :

H =∑k

[ 1

2mpkp−k +

1

2mω2

kxkx−k

], (2.40)

ou ωk = 4Km sin2(ka/2). Sous cette forme, il semblerait que nous n’avons pas tout a fait regle

le probleme. Or, puisque les operateurs pn et xn sont hermitiens, nous avons que p−k = p†k et

x−k = x†k [1][6][12]. En effet, en utilisant les definitions en transformee de Fourier, on obtientbien ce resultat [12] :

x†k =[ 1√

N

∑n

xne−ikna

]†=

1√N

∑n

x†n(e−ikna)† =1√N

∑n

xneikna =

1√N

∑n

xne−i(−k)na = x−k.

(2.41)A l’aide de ces expressions, on peut alors ecrire :

H =∑k

[ 1

2mpkp†k +

1

2mω2

kxkx†k

](2.42)

Sous cette forme, les termes de l’hamiltonien ne sont donc plus couples ! Ainsi, a partir d’unsysteme couple dans l’espace reel, nous obtenons un systeme decouple dans l’espace des frequencesen utilisant une transformee de Fourier discrete. Or, nous pouvons aller encore plus loin, puisquecette forme ressemble grandement a celle de l’oscillateur harmonique developpee dans la sectionprecedente. Nous pouvons donc utiliser une approche similaire pour recrire le tout a l’aided’operateurs d’annihilation et de creation. En effet, prenons [6][12] :

a†k =1√

2~mωk(−ip†k +mωkx

†k) =

1√2~mωk

(−ip†−k +mωkx†−k), (2.43)

16

Page 17: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

et

ak =1√

2~mωk(ipk +mωkxk) (2.44)

De la meme maniere qu’avec l’oscillateur harmonique, on peut inverser les relations de sorte que[6][12] :

xk =

√~

2mωk(a†−k + ak), (2.45)

et

pk = i

√~mωk

2(a†−k − ak) (2.46)

De cette maniere, on peut ecrire l’hamiltonien comme [6][12] :

H =∑k

[−~ωk4

(a†−k − ak)(a†k − a−k) +

~ωk4

(a†−k + ak)(a†k + a−k)

],

=~2

∑k

ωk(a†−ka−k + aka

†k). (2.47)

Nous pouvons alors utiliser le commutateur suivant [6][12] :

[ak, a†k] = 1, (2.48)

et l’equation devient :

H =~2

∑k

ωk(a†−ka−k + (1 + a−k†, a−k))

H =∑k

~ωk(a†−ka−k +1

2),

et si nous effectuons un changement d’indices :

H =∑k

~ωk(a†kak +1

2) (2.49)

Nous avons donc obtenu une forme identique a celle de l’oscillateur harmonique. Toutefois,puisque nous sommes dans l’espace des frequences, nos operateurs de creation et d’annihilationcreent ou retirent maintenant des quanta que l’on appelle phonons [5][1][6][12]. De plus, l’interetici n’etait pas seulement de montrer qu’il etait possible de travailler avec un hamiltonien decouplelorsque nous sommes en presence d’un systeme possedant des composantes couplees, mais ausside montrer l’espace des frequences. En effet, il n’est pas rare que les resultats et operateursutilises se situent dans cet espace lorsque nous faisons de la theorie quantique des champs ! Nousreverrons donc cet espace apparaıtre dans les prochains chapitres.

17

Page 18: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

2.3 Nombre d’occupation

Les deux derniers cas traites permettent d’en arriver a un autre element important. En mecaniquequantique, il est coutume de representer les particules par des fonctions d’ondes sous une notation|ψ〉. Or, un avantage de la theorie quantique des champs reside dans le fait que tout est ecriten terme d’operateurs. Par exemple, dans le cas de l’oscillateur harmonique, nous avons utilisela notation |ψn〉, ce qui signifiait que nous avions une fonction d’onde ψ se situant dans le n-ieme niveau d’energie de l’oscillateur. Si nous avions eu plusieurs oscillateurs harmoniques noncouples, nous aurions pu avoir des oscillateurs contenant le meme nombre de quanta d’energieet d’autres dans des etats differents [1]. Pour de telles situations, la notation devient vite lourde.De ce fait, nous favorisons plutot une notation appelee nombre d’occupation. Dans le cas del’oscillateur harmonique simple, au lieu d’ecrire un ket de la forme ψk, il est plutot coutumed’ecrire un etat du systeme comme :

|k〉 , (2.50)

ou k ∈ N represente le nombre de quanta dans l’oscillateur. De plus, lorsque l’oscillateur setrouve dans son etat d’energie minimale, on ecrit :

|0〉 , (2.51)

qui represente le vacuum state, ou etat du vide. Cet etat se retrouve d’ailleurs implicitement dansnotre developpement de l’oscillateur harmonique. En effet, nous ecrivions l’etat d’une particulecomme 2.23, que nous rappelons ici :

|ψn〉 =(a†)n√n!|ψ0〉 . (2.52)

Or, le fameux |ψ0〉 ne represente que l’etat du vide que nous avons ecrit comme |0〉. Quoiqu’ilen soit, nous sommes alors en mesure d’ecrire tous les etats de notre oscillateur simple comme :

|k〉 =(a†)k√k!|0〉 . (2.53)

De ce fait, si nous avions un oscillateur contenant 3 quanta, nous aurions :

|ψ3〉 =(a†)3

√3!|ψ0〉 = |3〉 .

Evidemment, cette notation prend tout son sens lorsque nous travaillons plutot avec plusieursparticules. De plus, il est possible d’utiliser la notation pour exprimer un nombre de particulesdans d’autres sortes d’etats bases sur des unites differentes de celle de l’energie. Par exemple,nous pouvons creer des particules a une certaine position dans l’espace ou possedant une quan-tite de mouvement precise. Afin de mieux illustrer ces propos, developpons rapidement la theorie

18

Page 19: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

associee a un systeme constitue de plusieurs oscillateurs harmoniques sans interaction. L’hamil-tonien du systeme correspond donc a la somme des hamiltoniens de chaque oscillateur [6] :

H =∑n

[ p2n

2mn+

1

2mnωnx

2n

], (2.54)

ou n est l’indice de l’oscillateur considere. Sans surprise, nous pouvons definir des operateursde creation et d’annihilation qui agiront sur le n-ieme oscillateur [6]. Respectivement, nous les

appellerons a†n et an. De ce fait, si nous appliquons a†n, nous ajoutons un quanta dans le n iemeoscillateur. Avec un peu de travail, nous pouvons donc ecrire [6] :

H =∑n

~ωn[a†nan +

1

2

], (2.55)

et

|k1, k2, ..., kN 〉 =1√

k1!k2!...kN !(a†1)k1(a†2)k2 ...(a†N )kN |0, 0, ..., 0〉 . (2.56)

De maniere generale, nous ecrivons plutot l’etat du vide comme |0〉, meme s’il y a plusieursoscillateurs. De cette maniere, on voit que l’on doit appliquer kn fois l’operateur de creationsur l’etat du vide pour creer kn quanta dans le n ieme oscillateur. Avec les exemples donnes,nous arrivons aussi a un resultat fort interessant. En effet, dans tous les cas, nous sommes partisd’operateurs appliques sur l’etat du vide pour obtenir l’etat desire. En tant que tel, il n’estdonc pas necessaire d’avoir plus que des operateurs et l’etat du vide pour exprimer la physiquederriere une situation ! Par contre, il faut rester vigilant, car bien que nos exemples soient debons representants du nombre d’occupation, il faut savoir que le type de particule affecte lamaniere d’ecrire le nombre d’occupation [6]. En effet, la formule avec l’operateur de creationest modifiee avec la nature de particule. Nous en parlerons plus en detail prochainement, maisil est bon d’avoir en tete que les bosons possedent une fonction d’onde symetrique et que lesfermions possedent une fonction d’onde anti-symetrique [14]. Cela nous met alors deja la puce al’oreille pour la forme de la formule de creation des fermions que nous verrons dans les sectionsqui suivent.

19

Page 20: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

3 De l’espace de Fock aux operateurs de creation et d’annhihi-lation : elaboration d’un cadre mathematique pour la theoriequantique des champs (Vincent Thibeault)

Le but ici est d’etudier certains fondements mathematiques de la theorie quantique des champspour pouvoir mieux comprendre comment agissent les operateurs de creation et d’annihilationdans une theorie a plusieurs particules. Pour ce faire, on introduira un espace dans lequel onpeut manipuler non seulement les etats a une seule particule, mais aussi a plusieurs particules :l’espace de Fock [6]. En effet, cet espace a la particularite de pouvoir decrire les etats quan-tiques d’un systeme pouvant avoir un nombre variable de particules identiques a partir d’unecombinaison d’espaces d’Hilbert identiques. Le chemin pris pour atteindre ce but sera plutotnon conventionnel, mais a l’avantage d’etre particulierement elegant mathematiquement.

Etant donne que l’on considerera des systemes a plusieurs particules, il faudra tenir comptede la nature de celles-ci, c’est-a-dire des bosons ou des fermions. En effet, les bosons et lesfermions se distribuent de maniere differente. Les bosons sont des particules de spins entiers,indistingables et qui respectent la statistique de Bose-Einstein. Ceux-ci peuvent se trouver dansle meme etat quantique. Dans les bosons connus, on retrouve les photons, les gluons, le Higgs etles bosons lourds W±, Z0. Les fermions sont des particules de spins demi-entiers, indistingableset qui respectent la statistique de Fermi-Dirac. Selon le principe d’exclusion de Pauli, deuxfermions identiques ne peuvent pas etre dans le meme etat quantique. Les leptons, les quarks etles baryons sont des fermions.

Considerant ces differences fondamentales entre ces types de particule, on parlera separemmentde l’espace de Fock bosonique et de l’espace de Fock fermionique en introduisant du meme couples relations de commutation des operateurs de creation et d’annihilation respectives.

3.1 Rappel de certaines structures mathematiques et operations

Tout d’abord, pour mieux voir la place de l’espace de Fock dans les espaces et structures plusconnus telles que les espaces vectoriels et les espaces d’Hilbert, examinons la figure 2.

Il ne faut pas se perdre ici : la discussion sur ces structures pourrait durer tres longtemps.Attardons-nous donc rapidement et hierarchiquement a la ligne directrice schematisee en vert.On sait tout d’abord qu’un groupe est un doublet (G, ?), soit un ensemble muni d’une loi decomposition respectant trois proprietes (associativite, element neutre et element inverse). Il estabelien si sa loi de composition est commutative.

Un anneau est un triplet (A, ?1, ?2) ou (A, ?1) forme un groupe abelien, ?2 est associative,il existe un element neutre multiplicatif et les axiomes de distributivite sont respectes.

Un corps est un anneau avec un inverse multiplicatif et qui possede au moins deux elements.

20

Page 21: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Figure 2 – Place de l’espace de Fock dans le reseaux des structures algebriques et hybrides. Les flechessimples A → B signifient que A ⊂ B alors que les doubles fleches representent une construction de deuxsous-structures.

Un espace vectoriel est un quadruplet (V,K,+, ·), soit un ensemble V sur un corps K (on utiliseaussi beaucoup F) muni d’une loi de composition interne additive (V ×V → V : (u,v) 7→ u+v),une loi de composition externe multiplicative (K×V → V : (a,u) 7→ au) et les 8 proprietes sui-vantes : commutativite de la somme, associativite de la somme, existence d’un element neutre,existence des elements opposes, identite multiplicative, associativite de la multiplication, distri-butivite scalaire, distributivite vectorielle.A cette structure d’espace vectoriel, il est possible d’ajouter la notion de produit scalaire, c’est-a-dire une application

〈 | 〉 : V × V → K

(u,v) 7→ 〈u|v〉

qui respecte les trois axiomes suivants ∀u,v,w ∈ V et ∀a, b ∈ K :

(1) 〈u|u〉 ≥ 0 et 〈u|u〉 = 0⇔ u = 0 (positivite)

(2) 〈u|v〉 = 〈v|u〉 (symetrie de la conjugaison)

(3) 〈u|av + bw〉 = a〈u|v〉+ b〈u|w〉 (linearite) Si K = C, la conjugaison est hermitienne

21

Page 22: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

et le deuxieme et le troisieme argument impliquent la sesquilinearite, soit 〈au + bv|w〉 =a∗〈u|w〉+b∗〈v|w〉. La structure d’espace vectoriel muni d’un produit scalaire est un espace vecto-riel prehilbertien (on dit aussi simplement espace prehilbertien). D’ailleurs, l’espace prehilbertienest aussi un espace norme, puisqu’on peut toujours definir une norme a partir du produit scalaire‖u‖2 = 〈u|u〉 qui respecte l’egalite de Pythagore, l’inegalite de Cauchy-Schwartz et l’inegalitedu triangle en raison des proprietes (1) a (3) du produit scalaire [3].

En completant l’espace prehilbertien, on arrive a l’espace qui est probablement le plus importanten physique : l’espace d’Hilbert. En effet, l’espace euclidien Rn et les espaces de fonctions decarre integrable (de Lebesgue, L2 par exemple) sont des exemples d’espaces d’Hilbert utilises enmecanique classique et quantique. Completer un espace prehilbertien P , cela veut dire que toutesuite de Cauchy de P a une limite dans P . Autrement dit, toute suite de Cauchy de P converge[2]. Ici, pour ne pas entrer dans les details techniques, on invite le lecteur a lire sur le sujetdes suites de Cauchy pour avoir plus d’informations. En mecanique quantique, les etats d’uneparticule appartiennent a un certain espace d’Hilbert. Puisque l’on veut etudier un systeme aplusieurs particules, on peut deja imaginer que l’on aura a combiner plusieurs espaces d’Hilbert.L’essentiel est maintenant etabli pour introduire l’espace de Fock.

3.2 Espace de Fock

Avant de definir l’espace de Fock, concentrons-nous davantage sur l’espace d’Hilbert qui seracentral pour la suite des choses : L2(R4n) equipe du produit scalaire complexe

〈ψ|φ〉n ≡∫R4n

ψ(x1, ..., xn)†φ(x1, ..., xn)d4x1 . . . d4xn

ou n = 1, 2, 3, . . . et avec lequel on definit la norme ‖ψ‖n ≡√〈ψ|ψ〉n telle que

‖ψ‖2n =

∫R4n

|ψ(x1, ..., xn)|2d4x1 . . . d4xn

On travaillera donc ici dans l’espace-temps (4 dimensions) dans lequel on ecrit un point de celui-ci comme x = (x0, x1, x2, x3) avec x0 = ct (c est la vitesse de la lumiere, que l’on prendra commeegale a 1 et t est le temps) et x1, x2, x3 les coordonnees spatiales. L’espace L2(R4n) contienttoutes les fonctions

ψ : R4n → C

dont la norme est finie. Ceci dit, considerons deux fonctions ψ, φ : R4 → C (donc appartenanta L2(R4)) afin d’introduire quelques operations non triviales sur ces fonctions. Tout d’abord, leproduit tensoriel entre les fonctions est tel que

(ψ ⊗ φ)(x1, x2) ≡ ψ(x1)φ(x2)

22

Page 23: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

ce qui fait que ψ ⊗ φ ∈ L2(R8). On voudra eventuellement traiter le cas bosonique et le casfermionique separemment. Pour ce faire, on peut separer l’espace d’Hilbert L2 en deux espacesd’Hilbert contenant d’une part les fonctions symetriques (bosons) et d’autre part les fonctionsantisymetriques (fermions) (technique analogue a la separation d’une matrice ou d’un tenseur enpartie matrice/tenseur symetrique et antisymetrique). Par fonction symetrique (respectivementantisymetrique), on entend une fonction ψ = ψ(x1, ...xn) (avec x1..., xn ∈ R4) de L2(R4n)symetrique (respectivement antisymetrique) par rapport a l’argument x1, ..., xn. De facon plusexplicite et generale, un tenseur T (0,m) est symetrique s’il est identique sous une permutationdes elements sur lesquelles il agit et il est antisymetrique si la permutation change son signe :

T (v1, . . . , vi, . . . , vj , . . . , vm) = T (v1, . . . , vj , . . . , vi, . . . , vm) (symetrique)

T (v1, . . . , vi, . . . , vj , . . . , vm) = −T (v1, . . . , vj , . . . , vi, . . . , vm) (antisymetrique)

Sans entrer dans les details, on a les memes regles de symetrisation avec un tenseur (p, 0)prenant p covecteurs. Si on combine un tenseur d’ordre m avec un tenseur d’ordre n via leproduit tensorielle, alors le tenseur resultant est d’ordre m + n que l’on peut symetriser. Defacon particuliere, pour les tenseurs d’ordre 1 ψ, φ qui resultent, par le produit tensoriel, en untenseur d’ordre 2, on introduit les operations de symetrisation S+ et d’antisymetrisation S− :

S+(ψ ⊗ φ) ≡ 1

2(ψ ⊗ φ+ φ⊗ ψ)

S−(ψ ⊗ φ) ≡ 1

2(ψ ⊗ φ− φ⊗ ψ) =

1

2(ψ ∧ φ)

et on obtient la decomposition

ψ ⊗ φ = S+(ψ ⊗ φ) + S−(ψ ⊗ φ)

du produit tensoriel. De plus, en etant plus general ici, on ecrit L2sym(R4n) ≡ S+L

2(R4n) etL2antisym(R4n) ≡ S−L2(R4n) ce qui nous permet de faire la separation

L2(R4n) = L2sym(R4n)⊕ L2

antisym(R4n)

De plus, on a S+(ψ ⊗ φ) ∈ L2sym(R8) et S−(ψ ⊗ φ) ∈ L2

antisym(R8). Puisque le produit tensoriel

de deux espaces d’Hilbert donne un autre espace d’Hilbert, on a 1

L2(R8) = L2(R4)⊗ L2(R4) = L2(R4)⊗2.

C’est la regle pour l’ajout de degres de liberte : on prend le produit tensoriel d’espaces d’Hilbert.Egalement, on a introduit la notation de puissance tensorielle V ⊗n ≡ V ⊗ · · · ⊗ V︸ ︷︷ ︸

n

.

Le produit scalaire de ce nouvel espace d’Hilbert est

〈φ1 ⊗ φ2|ψ1 ⊗ ψ2〉 = 〈φ1|ψ1〉〈φ2|ψ2〉

1. Pour l’espace d’Hilbert antisymetrique, on peut ecrire L2antisym(R8) = L2(R4) ∧ L2(R4) = L2(R4)∧2.

23

Page 24: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Lorsque nous avons separer l’espace d’Hilbert en sa partie symetrique et antisymetrique, l’operation⊕ a ete utilisee. Celle-ci s’appelle une somme directe. Cette operation est le dernier element decasse-tete pour construire l’espace de Fock. Soit deux espaces vectoriels U et V sur un corpsK. On peut donner une structure d’espace vectoriel au produit cartesien U × V en definissantses lois de composition internes et externes composantes par composantes, c’est-a-dire telles que∀u, u1, u2 ∈ U , ∀v, v1, v2 ∈ V et ∀a ∈ K+: (U × V )× (U × V )→ (U × V ) : ((u1,v1), (u2,v2)) 7→ (u1 + u2,v1+,v2)

et · : K × (U × V )→ (U × V ) : (a, (u,v)) 7→ (au, av).

On peut montrer que les axiomes de l’espace vectoriel sont bel et bien respectes. L’espacevectoriel resultant s’ecrit U ⊕ V et on dit que c’est la somme directe entre les espaces U etV . De la meme maniere que pour une somme de plusieurs elements on ecrit

∑iXi, on note la

somme directe de plusieurs elements⊕

i=0Xi. Etant un espace vectoriel, l’espace d’Hilbert peutainsi etre combine par somme directe a d’autres espaces d’Hilbert pour former un autre espaced’Hilbert 2[2].

Or, en regroupant toutes les dernieres notions presentees, on a que l’espace de Fock est la sommedirecte de tous les etats composites ou non de particules ou autrement dit, la somme directe desespaces d’Hilbert pour une particule, deux particules, trois particules, ..., soit

Fν(H) =

∞⊕n=0

SνH⊗n = C ⊕ H︸︷︷︸

1 particule

⊕ (Sν (H ⊗H))︸ ︷︷ ︸2 particules

⊕ (Sν (H ⊗H ⊗H))︸ ︷︷ ︸3 particules

⊕ . . .

ou ν = +,− ce qui nous donne nos operateurs de symetrisation et d’antisymetrisation dependantde si on a un systeme de bosons ou de fermions. Aussi, H est l’espace d’Hilbert pour une particuleet C represente les scalaires complexes, soient les etats correspondant a aucune particule. Il esta noter que l’espace de Fock est lui-meme un espace d’Hilbert, ce qui decoule des operationsde produit tensorielle et de somme direct effectuees sur les espaces d’Hilbert a une particulequi preservent la structure de L2 comme mentionne precedemment. Malgre tout, l’utilite del’espace de Fock ne vient pas de son identite propre, qui n’est en fin de compte qu’une autremanifestation de L2, mais bien de sa construction en tant que somme directe infinie denombrable,laquelle permet d’interpreter un element de la somme comme un sous-espace avec un nombreprecis de particules (ou de modes d’excitation). De plus, l’espace de Fock nous permettra debien definir les relations de commutation et d’anticommutation des operateurs d’annihilation etde creation. Ceci dit, traitons maintenant le cas bosonique.

2. En fait, la demarche est similaire aux espaces vectoriels, mais une etape supplementaire doit etre effectueeafin d’assurer la completude de l’espace d’Hilbert resultant.

24

Page 25: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

3.2.1 Espace de Fock bosonique

Puisque les fonctions sont symetriques, on ecrit

F+(L2) =∞⊕n=0

S+L2(R4)⊗n

=

∞⊕n=0

L2sym(R4)⊗n

= C⊕ L2sym(R4)⊕

(L2sym ⊗ L2

sym

)⊕(L2sym ⊗ L2

sym ⊗ L2sym

)⊕ . . .

avec le produit scalaire

〈ψ|φ〉 ≡ ψ0φ0 +∞∑n=1

〈ψn|φn〉

Il faut ici souligner que ψ0 est un nombre complexe arbitraire, les fonctions a une particuleψ1 : R4 → C sont de la forme ψ1 = ψ1(x) et les fonctions de n particules ψn : R4n → C (n > 2)sont de la forme ψn = ψn(x1, x2, ..., xn) et sont symetriques par rapport aux permutations deselements x1, x2, ..., xn puisque ce sont des bosons.

On se rappelle aussi que l’on a defini la somme directe en donnant une structure d’espacevectoriel au produit cartesien, qui represente l’ensemble des couples ordonnes. Ainsi, la sommedirecte d’espace d’Hilbert est aussi un ensemble de couples ordonnes. Puisqu’il y a une infinited’elements, on a des suites infinies. Autrement dit, les elements de l’espace de Fock sont tous lestuples infinies de type

ψ ≡ (ψ0, ψ1, ψ2, ψ3, ...)

Cette notation est tres generale. Effectivement, le tuple contient tous les etats possibles a plu-sieurs particules appartenant tous a un certain espace d’Hilbert. Lorsque l’on agira dessus, onagira sur tous les etats a plusieurs particules en meme temps. On a donc la liberte d’avoir unsysteme avec des etats lies a 2 particules et 4 particules par exemple, l’etat de Fock associe seraitdonc du genre (0, 0, ψ2, 0, ψ4...). Cependant, en pratique, on prendra plutot un etat de Fock avecun nombre precis de particules (par exemple ψ = (0, ..., ψn, 0, ...)) et puis on agira dessus avecun operateur de creation par exemple (on aurait alors l’etat (0, ..., ψn+1, 0, ...)). Bref, les etatsde Fock nous permettent la variation du nombre de particules 3 dans le systeme de bien desmanieres, ce qui n’etait pas possible dans l’ancien formalisme quantique.

Nous sommes maintenant en mesure de faire les premiers pas pour construire les operateursd’annihilation et de creation. Tout d’abord, on se rappelle que pour ajouter des degres de libertea un systeme, il faut utiliser le produit tensoriel. Or, pour chaque fonction ψn ∈ L2(R4n) a nparticules, il est possible d’ajouter une particule en la composant d’une fonction φ a une particulevia le produit tensoriel. Dans un systeme de bosons, on symetrise evidemment cette operation

3. Ce qui sera fait par des operateurs qui seront introduits plus loin dans cette section et aussi a la prochainesection.

25

Page 26: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

de composition de fonctions et comme il est commode de faire en mecanique quantique, onnormalise (en effet, on voudra que notre operateur de creation genere un etat supplementairetel que l’etat final du systeme est normalise). On definit donc la fonction composee comme

%n+1 ≡√n+ 1 · S+(ϕ⊗ ψn)

Pour preciser l’idee encore legerement, la composition d’une fonction a une particule avec unefonction a n particules revient donc, physiquement, a creer une particule dans le systeme qui encontenait deja n. Ainsi, il en resulte un systeme a n+ 1 particules. De facon plus explicite, on a

%n+1(x1, ..., xn+1) =√n+ 1 · S+(ϕ⊗ ψn)(x1, ..., xn+1)

=

√n+ 1

(n+ 1)!

∑π

ϕ(x1)ψn(x2, ..., xn+1)

ou, comme on s’en attend avec le produit tensoriel, l’on somme sur toutes les permutations πdes arguments x1, ..., xn+1. De facon particuliere, on a

%1(x1) = ϕ(x1)ψ0 , %2(x1, x2) =ϕ(x1)ψ1(x2) + ϕ(x2)ψ1(x1)√

2

Soit la fonction a une particule ϕ. L’operateur de creation bosonique est un operateur lineaireque l’on definit comme

a†(ϕ) : F+(L2)→ F+(L2)

(ψ0, ψ1, ψ2, ...) 7→ (0, %1, %2, %3, ...)

7→ (0, S+(ϕ⊗ ψ0),√

2S+(ϕ⊗ ψ1),√

3S+(ϕ⊗ ψ2), ...)

Pour chaque element du tuple, on ajoute une particule via l’operateur de creation. Necessairement,il faut faire une translation des elements du tuple pour qu’il y ait conservation de la forme del’etat de Fock, c’est-a-dire pour que le premier element du tuple soit un nombre complexe (ici, cedoit etre 0 puisqu’il n’y a pas d’etat plus rudimentaire que l’etat du vide qui, lorsque l’operateurde creation lui est applique, devienne un etat a une particule. Autrement dit, il n’y a pas defacon d’appliquer l’operateur de creation tel que l’etat ait 0 particule, ce qui explique ce 0.), ledeuxieme soit un etat a une particule, etc.

Il est d’usage de plutot definir l’operateur de creation sur son unique application sur un etatψn a n bosons appartenant a l’espace d’Hilbert L2

sym(R4n). L’ajout de la particule devient plusexplicite dans l’espace qui gagne 4 degres de liberte (une particule en 4 dimensions) et il enresulte que l’on peut ecrire [8] :

a†(ϕ) : L2sym(R4)⊗n → L2

sym(R4)⊗(n+1)

ψn 7→ ψn+1

ou l’on voit l’apparition dans le systeme d’une particule supplementaire suite a l’application del’operateur.

26

Page 27: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Maintenant que l’operateur de creation est bien defini, on aimerait avoir un operateur qui faitexactement l’action inverse, c’est-a-dire annihiler des particules. Pour ce faire, on construiral’operateur d’annihilation bosonique comme l’operateur adjoint a l’operateur de creation, c’est-a-dire un operateur a(ϕ) tel que la relation suivante est respectee :

〈φ| a†(ϕ)ψ〉 = 〈a(ϕ)φ|ψ〉

Tout d’abord, considerons les etats de Fock simples φ = (0, 0, ..., φn+1, ..., 0) et ψ = (0, 0, ..., ψn, ..., 0).On peut manipuler la partie de gauche plus aisement en utilisant la definition du produit scalairepour un seul etat a n+ 1 particules :

〈φ| a†(ϕ)ψ〉 = 〈φn+1| a†(ϕ)ψn〉= 〈φn+1|ψn+1〉=√n+ 1 〈φn+1|S+ (ϕ⊗ ψn)〉

=√n+ 1

∫R4(n+1)

φ†n+1(x1, ..., xn+1)ϕ(xn+1)ψn(x1, ..., xn) d4x1...d4xn+1

=√n+ 1

∫R4n

(∫R4

φ†n+1(x1, ..., xn+1)ϕ(xn+1)d4xn+1

)ψn(x1, ..., xn) d4x1...d

4xn

=√n+ 1

∫R4n

(∫R4

ϕ(xn+1)†φn+1(x1, ..., xn+1)d4xn+1

)†ψn(x1, ..., xn) d4x1...d

4xn

= 〈a(ϕ)φn+1|ψn〉= 〈a(ϕ)φ|ψ〉

On obtient donc

a(ϕ)φ =√n+ 1

∫R4

ϕ(xn+1)†φ(x1, ..., xn+1)d4xn+1.

On peut etendre cette definition pour un etat de Fock quelconque ψ = (ψ1, ψ2, ψ3, ...). De ceci,definissons tout d’abord

χn(x1, ..., xn) ≡√n+ 1

∫R4

ϕ(xn+1)†ψ(x1, ..., xn+1)d4xn+1.

Intuitivement, il semble etrange que l’on ait une integrale pour retirer une particule du systeme.Cependant, ce n’est pas sorcier, l’integrale est definie par rapport a l’endroit ou se trouve laparticule de fonction d’onde ϕ. Il en resulte donc un scalaire a cette position ! La particulen’est plus. Cela etant dit, on obtient finalement que l’operateur d’annihilation bosonique est unoperateur lineaire tel que

a(ϕ) : F+(L2)→ F+(L2)

(ψ0, ψ1, ψ2, ...) 7→ (χ0, χ1, χ2, ...)

avec (χ0, χ1, ...) =(∫

R4 ϕ(x1)†ψ(x1)d4x1,√

2∫R4 ϕ(x2)†ψ(x1, x2)d4xn+1, ...

). Ici, on remarque

que les elements de l’etat de Fock ont subi une translation vers la gauche. En effet, a(ϕ)ψ1 = χ0

27

Page 28: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

est un nombre complexe puisqu’il n’y a pas de particule, a(ϕ)ψ2 = χ1 un etat a une particule,etc. Egalement, on peut definir l’operateur pour un seul etat a plusieurs particules ψn comme[8]

a(ϕ) : L2sym(R4)⊗n → L2

sym(R4)⊗(n−1)

ψn 7→ ψn−1

ou l’on voit la disparition d’une particule dans le systeme suite a l’application de l’operateurd’annihilation.

Sachant comment sont definis les operateurs d’annihilation, il est maintenant possible de trouverleurs relations de commutation. Comme la demarche est assez pedestre pour trouver ces relations,nous nous contenterons de les exposer. Il est important, toutefois, de rappeler que le commutateurest une operation telle que pour deux operateurs A et B, on a [A,B] = AB − BA. Dans le casbosonique, on parle de commutation des operateurs etant donne que nous avons des fonctionssymetriques. Cela s’imagine bien ainsi : si les operateurs commutent, c’est-a-dire [A,B] = 0,alors AB = BA, ce qui illustre bien la symetrie sous la permutation des operateurs. Ainsi, ontrouve que pour deux fonctions f, g ∈ L2

sym(R4) et une fonction ψ ∈ F+(L2) on a[a†(f), a†(g)

]ψ = 0

[a(f), a(g)]ψ = 0[a(f), a†(g)

]ψ = 〈f | g〉1ψ

Ces relations pour les operateurs de creation et d’annihilation sont generales et rigoureuses,mais ce ne sont pas du tout les plus pratiques en physique : on aimerait avoir des relations plusconcretes. En quelques etapes, on pourra retrouver des relations plus familieres et par le faitmeme, on pourra faire la connection avec le chapitre 2. Tout d’abord, on peut construire un etatde Fock bosonique a partir des operateurs de creation appliques sur l’etat du vide |0〉 :

ψ = a†(ϕ1)a†(ϕ2)...a†(ϕs) |0〉

ou les ϕ1, ϕ2, ...ϕs ∈ L2sym(R4) sont des etats normalises a un boson. Ainsi, l’etat de Fock ψ

contient s bosons crees avec s operateurs de creation. De facon particuliere, on observe que

a†(ϕj) |0〉 = (0, ϕj , 0, ...)

a†(ϕj)a†(ϕk) |0〉 = (0, 0,

√2S+(ϕj ⊗ ϕk), ...)

Considerons maintenant un systeme de fonctions ϕ1, ϕ2, ϕ3, ... telles que ϕi : R4 → C etqui forment une base orthonormee de l’espace d’Hilbert L2

sym(R4), c’est-a-dire que 〈ϕi|ϕj〉 =δij ∀i, j = 1, 2, 3, ... On peut alors definir

a†i ≡ a†(ϕi) et ai ≡ a(ϕi)

28

Page 29: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

avec j = 1, 2, 3, ... Avec j, k = 1, 2, 3, ..., on peut finalement ecrire les relations de commutationcomme [

a†j , a†k

]ψ = 0

[aj , ak]ψ = 0[aj , a

†k

]ψ = δjkψ

ou l’on remarque que la derniere relation de commutation est celle qui a ete utilisee au chapitre2 avec j = k [14]. Si 1 ≤ j1 < j2 < ... < ji et k1, ..., ki = 1, 2, ..., on obtient aussi de facon plusgenerale

ψ = (0, ..., ψk1+...+ki , 0, ...) =(a†j1)k1√k1!

(a†j2)k2√k2!

...(a†ji)

ki

√ki!|0〉 .

que l’on peut ecrire de facon plus compacte avec la notation du nombre d’occupation comme

|k1, k2, ..., ki〉 =

i∏m=1

(a†jm)km√km!

|0〉

ce qui est tout a fait analogue au resultat obtenu au chapitre 2, cependant, cette fois-ci, on peutajouter que l’on a un etat normalise de l’espace de Fock bosonique dans lequel on peut creer unnombre arbitraire km de bosons dans un meme etat quantique en raison de l’aspect symetriquede leur fonction d’onde. Bref, on retombe sur nos pattes : on ne perd pas nos intuitions acquisesavec l’oscillateur harmonique et on gagne au passage une bien meilleure vision mathematique etde la generalite. Il reste maintenant a aborder le cas fermionique.

3.2.2 Espace de Fock fermionique

La facon d’obtenir les resultats pour l’espace de Fock fermionique est totalement analogue aucas bosonique. Nous serons donc beaucoup plus concis dans cette sous-section pour eviter laredondance.

F−(L2) =

∞⊕n=0

S−L2(R4)⊗n

=

∞⊕n=0

L2antisym(R4)⊗n

= C⊕ L2antisym(R4)⊕

(L2antisym ⊗ L2

antisym

)⊕(L2antisym ⊗ L2

antisym ⊗ L2antisym

)⊕ . . .

avec le produit scalaire

〈ψ|φ〉 ≡ ψ0φ0 +∞∑n=1

〈ψn|φn〉

On a que ψ0 est un nombre complexe arbitraire, les fonctions a une particule ψ1 : R4 → C sont dela forme ψ1 = ψ1(x) et les fonctions de n particules ψn : R4n → C (n > 2) sont de la forme ψn =

29

Page 30: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

ψn(x1, x2, ..., xn) et sont antisymetriques par rapport aux permutations des elements x1, x2, ..., xnpuisque ce sont des fermions. Les etats de Fock sont tous les tuples infinis ψ ≡ (ψ0, ψ1, ψ2, ψ3, ...).Dans un systeme de fermions, on antisymetrise la composition de fonctions de sorte que l’onpeut definir

%n+1 ≡√n+ 1 · S−(ϕ⊗ ψn)

Cette fois-ci, on a

%n+1(x1, ..., xn+1) =√n+ 1 · S−(ϕ⊗ ψn)(x1, ..., xn+1)

=

√n+ 1

(n+ 1)!

∑π

sgnπ ϕ(x1)ψn(x2, ..., xn+1)

ou sgnπ est 1 pour un nombre de permutations pair des arguments x1, ..., xn+1 et −1 pour unnombre impair de permutation. Concretement,

%1(x1) = ϕ(x1)ψ0 , %2(x1, x2) =ϕ(x1)ψ1(x2)− ϕ(x2)ψ1(x1)√

2.

Ainsi, pour une fonction a une particule ϕ, on peut definir l’operateur de creation fermioniquecomme un operateur lineaire tel que

b†(ϕ) : F−(L2)→ F−(L2)

(ψ0, ψ1, ψ2, ...) 7→ (0, %1, %2, %3, ...)

7→ (0, S−(ϕ⊗ ψ0),√

2S−(ϕ⊗ ψ1),√

3S−(ϕ⊗ ψ2), ...)

La definition plus particuliere et intuitive est telle que [8]

b†(ϕ) : L2antisym(R4)⊗n → L2

antisym(R4)⊗(n+1)

ψn 7→ ψn+1

Pour annihiler des fermions, on construit l’operateur d’annihilation fermionique comme l’operateuradjoint a l’operateur de creation, c’est-a-dire un operateur b(ϕ) tel que la relation suivante estrespectee :

〈φ| b†(ϕ)ψ〉 = 〈b(ϕ)φ|ψ〉

On obtient donc

b(ϕ)φ =√n+ 1

∫R4

ϕ(xn+1)†φ(x1, ..., xn+1)d4xn+1.

et on peut etendre cette definition pour un etat de Fock quelconque ψ = (ψ1, ψ2, ψ3, ...). Avec

χn(x1, ..., xn) ≡√n+ 1

∫R4

ϕ(xn+1)†ψ(x1, ..., xn+1)d4xn+1.

on peut ecrireb(ϕ) : F−(L2)→ F−(L2)

(ψ0, ψ1, ψ2, ...) 7→ (χ0, χ1, χ2, ...)

30

Page 31: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

et applique uniquement sur ψn, on a [8]

b(ϕ) : L2antisym(R4)⊗n → L2

antisym(R4)⊗(n−1)

ψn 7→ ψn−1

Il est maintenant possible de trouver leurs relations d’anticommutation (les fonctions sontantisymetriques !). On definit l’anticommutateur {·, ·} comme une operation qui prend deuxoperateurs A et B et qui donne {A,B} = AB + BA. On obtient donc que si {A,B} = 0, alorsAB = −BA ce qui illustre bien l’antisymetrie sous la permutation des operateurs. Ainsi, ontrouve que pour deux fonctions f, g ∈ L2

antisym(R4) et une fonction ψ ∈ F−(L2) on a

{b†(f), b†(g)}ψ = 0

{b(f), b(g)}ψ = 0

{b(f), b†(g)}ψ = 〈f | g〉1ψ

Trouvons maintenant les relations plus familieres comme pour le cas bosonique. Tout d’abord,on peut construire un etat de Fock fermionique par l’application d’operateurs de creation fer-mionique sur l’etat du vide :

ψ = b†(ϕ1)b†(ϕ2)...b†(ϕs) |0〉

ou les ϕ1, ϕ2, ...ϕs ∈ L2antisym(R4) sont des etats normalises a un fermion. Ainsi, l’etat de Fock

ψ contient s fermions crees avec s operateurs de creation. De facon particuliere, on observe que

b†(ϕj) |0〉 = (0, ϕj , 0, ...)

b†(ϕj)b†(ϕk) |0〉 = (0,

ϕj(x1)ϕk(x2)− ϕk(x2)ϕj(x1)√2

, 0, ...)

Or, on remarque que si deux fonctions ϕj et ϕk sont egales, alors

b†(ϕ1)b†(ϕ2)...b†(ϕs) |0〉 = 0

On voit donc apparaıtre le principe d’exclusion de Pauli : deux fermions ne peuvent pas setrouver dans le meme etat quantique. On verra que cela a une influence majeure sur la faconde construire un etat de Fock fermionique. Cela etant dit, considerons un systeme de fonctionsϕ1, ϕ2, ϕ3, ... tel que ϕi : R4 → C et qui forment une base orthonormee de l’espace d’HilbertL2antisym(R4), c’est-a-dire que 〈ϕi|ϕj〉 = δij ∀i, j = 1, 2, 3, ... On definit

b†i ≡ b†(ϕi) et bi ≡ b(ϕi)

avec j = 1, 2, 3, ... Avec j, k = 1, 2, 3, ..., on peut finalement ecrire les relations d’anticommutationcomme

{b†j , b†k}ψ = 0

{bj , bk}ψ = 0

{bj , b†k}ψ = δjkψ

31

Page 32: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Plus generalement, si 1 ≤ j1 < j2 < ... < ji, on obtient l’etat normalise de l’espace de Fockfermionique [14]

ψ = (0, ..., ψ1+...+1, 0, ...) = (0, ..., ψi, 0, ...) = b†j1b†j2...b†ji |0〉 .

que l’on peut ecrire de facon plus compacte avec la notation du nombre d’occupation comme

|..., 1, ...〉 =i∏

m=1

b†jm |0〉

ou la position du ou des 1 dans la representation du nombre d’occupation depend de quelle(s)fonction(s) ϕjm ont ete applique sur l’etat du vide. Nul besoin de s’etendre longtemps sur ceresultat, c’est une autre manifestation explicite du principe d’exclusion de Pauli : on ne peutajouter que des fermions de differents etats quantiques dans l’etat du vide. Par exemple, si onveut creer les fermions de fonctions d’onde ϕ2, ϕ3 et ϕ5, on ecrit

|0, 1, 1, 0, 1〉 = b†j2b†j3b†j5 |0〉

Nous sommes maintenant d’heureux detenteurs des operateurs de creation et d’annihilationbosonique et fermionique. Tout cela est bien beau, mais il est temps d’avoir une discussion plusphysique.

3.3 Seconde quantification (Xavier Roy-Pomerleau)

Au terme de toutes ces sections, nous sommes maintenant en mesure d’attaquer un elementimportant qui revient sans cesse en theorie quantique des champs, c’est-a-dire la seconde quan-tification. A premiere vue, il peut etre tentant d’utiliser le raccourci trop facile de penser qu’ils’agit de quantifier deux fois quelque chose ! Or, il ne faut pas se meprendre, car nous sommesplutot loin de cette realite [13]. Afin d’avoir une vue d’ensemble de ce concept, analysons d’abordla premiere quantification. De facon intuitive, plusieurs textes considerent simplement que lapremiere quantification correspond a trouver la fonction d’onde d’une particule [6] [4]. Ainsi, ensolutionnant l’equation de Schrodinger pour une situation donnee, nous effectuons la premierequantification [6] [4]. Autrement dit, la matiere vue dans les cours pre-gradues de mecaniquequantique correspond a la vision de la premiere quantification. Toutefois, ce formalisme n’estpas tres pratique lorsque nous tentons d’analyser des situations a plusieurs particules ! En effet,comme nous l’avons vu dans la derniere section, il est beaucoup plus avantageux de travailleravec les operateurs de creation et d’annihilation dans l’espace de Fock.

A cet egard, nous avons donc necessairement besoin de nouvelles techniques pour resoudre lesproblemes et, grosso modo, cela se traduit par la seconde quantification. Dans un premier temps,considerant que les particules, que ce soient des bosons ou des fermions, sont indiscernables,il n’est pas pertinent d’utiliser une fonction d’onde indiquant que la particule 1 se trouve atel endroit tandis que la seconde se trouve a un autre. En effet, ces dernieres considerations

32

Page 33: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

ne sont pas physiques, ou pertinentes, en raison de l’indiscernabilite des particules [4]. A cetegard, on preferera alors la fameuse notation en nombre d’occupation, qui prend seulement encompte le nombre total de particules dans un etat sans pourtant les differencier inutilement. Afind’avoir une intuition de la seconde quantification, nous pouvons utiliser une approche un peunaıve. En effet, au terme de notre developpement de l’oscillateur harmonique, nous avons obtenul’hamiltonien en fonction des operateurs de creation et d’annihilation. L’etat resultant, lorsquenous avions un nombre N d’oscillateurs harmoniques non couples pouvait d’ailleurs s’ecrire al’aide du nombre d’occupation. Rappelons ces deux resultats ici :

H =∑n

~ωn[a†nan +

1

2

], (3.1)

et

|k1, k2, ..., kN 〉 =1√

k1!k2!...kN !(a†1)k1(a†2)k2 ...(a†N )kN |0, 0, ..., 0〉 . (3.2)

Le fait d’avoir decrit ces situations en fonction d’operateurs d’annihilation et de creation cor-respond a une seconde quantification [6]. Or, la seconde quantification prend un sens encoreplus fort lorsque nous introduisons les champs quantiques et des situations a plusieurs particulesutilisant necessairement l’espace de Fock. Dans les faits, nous avons donc effectue une secondequantification dans la section precedente en obtenant les operateurs de creation et d’annihila-tion ainsi que leurs relations de commutation. Tous ces objets nous permettent alors d’ecrirenos operateurs, comme l’hamiltonien, a l’aide des operateurs de creation et d’annihilation. Nousallons d’ailleurs voir un exemple un peu plus detaille dans les prochaines pages.

4 Notions elementaires de theorie quantique des champs

Maintenant que nous avons les bases mathematiques et intuitives pour les operateurs de creationet d’annihilation en theorie quantique des champs, on voudrait mettre en evidence leur impor-tance dans un cadre plus general de la theorie. En effet, nous n’avons pas encore elabore l’ideede champ et nous n’avons pas encore donne d’applications propres a la theorie en prenant pourappui les sections precedentes. Tout ceci pourrait faire l’objet d’un tres grand travail et doncces objectifs seront repondus plutot rapidement. Commencons donc cette escapade en abordantle sujet de la theorie classique des champs.

4.1 Theorie classique des champs (Vincent Thibeault)

Un champ est une quantite definie a chaque point de l’espace-temps (x, t) 4. Autrement dit, c’estune application qui prend un point de l’espace-temps et qui retourne un objet mathematique. Sicet objet est un scalaire, alors on a un champ scalaire, s’il est un vecteur, alors on a un champ

4. Evidemment, ce pourrait etre d’autres espace que l’espace-temps, mais c’est celui qui nous interesse ici.

33

Page 34: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

vectoriel et s’il est un tenseur, alors on a un champ tensoriel. Il ne faut donc pas s’eloigner troploin des notions elementaires en mathematiques pour comprendre ce qu’est un champ. Plutotque de s’interesser a la mecanique classique des particules dont la dynamique est decrite pardes coordonnees generalisees qa(t), indexees par a, on s’interessera plutot a la dynamiques deschamps φ(x, t) [13]. On a donc une infinite de degres de liberte (au moins 1 pour chaque pointx de l’espace) et on parlera de systemes continus. En effet, un champ est comme une infinited’oscillateurs harmoniques, cela se verra plus explicitement sous peu. Pour l’instant, au chapitre1, nous avons souligne un probleme majeur de la mecanique quantique a une particule que l’onpeut enoncer ainsi : la theorie est non locale ce qui resulte en une violation de causalite [6]. Avecles champs, nous n’aurons pas vraiment 5 ce probleme : ce sont des objets definis localementdans l’espace-temps. On dit � local � dans le sens que le champ n’est pas defini ailleurs danscet espace. On reviendra brievement sur le principe de localite. Un exemple de champ est lechamp electromagnetique decrit par les champs E(x, t) et B(x, t). Bien que, de facon commune,on elabore l’electromagnetisme selon ces deux champs (representes par des trivecteurs) via lesequations de Maxwell, il est plus sophistique d’utiliser la formulation covariante des equationsde Maxwell qui s’expriment selon le champ a 4 composantes Aµ = (φ,A) (alias un quadrivecteurcontenant un potentiel scalaire et le potentiel vecteur) [13] [10]. De cette maniere, on voit bienque le concept de position (qa(t)) a ete relegue au titre de simple argument ou autrement dit,d’etiquette pour le champ.

Pour decrire la dynamique d’une particule, on exprime le lagrangien par rapport aux variablesqa et qa. De la meme maniere, pour un champ, on exprime le lagrangien comme

L(t) =

∫L(φ, ∂µφ)d3x

ou L est appele la densite lagrangienne (malgre tout, on l’appelle souvent simplement le lagran-gien) qui elle est exprimee selon φ et ∂µφ. Sachant que l’action est donnee par l’integrale dulagrangien L(t), on obtient

S =

∫ t2

t1

dt

∫Ld3x =

∫Ld4x

De plus, en partant du principe de moindre action (δS = 0), on arrive aux equations du mou-vement d’Euler-Lagrange pour les champs φ.

∂µ

(∂L

∂(∂µφ)

)− ∂L∂φ

= 0

5. On pourrait faire le meme travail qu’au chapitre 1 pour le champ de Klein-Gordon dans l’espace-tempset on se rendrait compte que la probabilite qu’il y ait propagation en dehors du cone de lumiere est non nulle !Cependant, il faut faire attention ici : pour vraiment parler de causalite, il ne faut pas explorer si les particulespeuvent se propager en dehors du cone de lumiere, il faut se demander si la mesure effectuee a un endroit dansl’espace-temps peut affecter un autre point de l’espace dont la separation avec le premier est de type espace. Or,il se trouve qu’aucune mesure peut affecter une autre mesure a l’exterieur du cone de lumiere dans la theorie deschamps de Klein-Gordon [11].

34

Page 35: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Ici, il faut souligner que le lagrangien est local, c’est-a-dire qu’il n’y a pas de terme couplantdirectement les champs φ(x, t) et φ(y, t) pour x 6= y (exemple : L =

∫φ(x)φ(y)d3xd3y). Le prin-

cipe de localite est l’une des raisons principales d’introduire la theorie des champs en physiqueclassique [13]. Ceci dit, bien que le formalisme lagrangien soit d’une grande utilite en theoriequantique des champs, ce ne sera pas dans celui-ci que l’on travaillera pour la suite des choses.En effet, le formalisme lagrangien est utilise via les methodes de l’integrale de chemin qui neseront pas discutees ici. Nous porterons donc notre attention sur le formalisme hamiltonien quinous permettra de faire la quantification canonique. Avant d’en dire plus sur le sujet, introdui-sons le formalisme en question classiquement. Commencons par definir la densite d’impulsion(moment conjugue de φ), soit

π(x) =∂L∂φ

.

Cette quantite emerge de l’equation suivante

p ≡ ∂L

∂φ=

∫π(x)d3x

a laquelle on peut encore trouver son equivalent pour les systemes discrets, soit l’impulsioncanonique pa ≡ ∂L

∂qa. Ensuite, il est essentiel de se rappeler que l’on peut exprimer, de facon

classique, l’hamiltonien selon le lagrangien :

H = pa(x)qa(x)− L

ou l’on a utilise la convention de sommation d’Einstein. De facon analogue, la densite hamilto-nienne s’ecrit

H = π(x)φ(x)− L

et l’hamiltonien est donc

H =

∫Hd3x =

∫(π(x)φ(x)− L)d3x

ce qui nous permet d’obtenir les equations du mouvement dans le formalisme hamiltonien, soit

φ =∂H

∂π(x, t)

π(x, t) = − ∂H

∂φ(x, t)

Les variables canoniques sont donc plutot φ(x, t) et π(x, t), ce qui explique pourquoi on dira quela quantification est canonique. Tout est en place pour passer enfin au vif du sujet : la theoriequantique des champs.

35

Page 36: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

4.2 Theorie quantique des champs et quantification canonique (Vincent Thi-beault)

En mecanique quantique, la quantification canonique est une methode permettant de passer de lamecanique classique hamiltonienne a la theorie quantique. En effet, on promeut les coordonneesgeneralisees qa et leur moment conjugue pa au rang d’operateur et on en retire les relations decommutation suivantes 6 (avec ~ = 1) :

[qa, qb] = [pa, pb] = 0 et [qa, pb] = iδba

Ce qui est merveilleux dans tout ceci, c’est qu’on peut proceder exactement de la meme manierepour les champs classiques φ(x) et π(x) pour les rendre quantiques. Effectivement, on promeutces champs 7 au rang d’operateur. Ainsi, les champs quantiques sont des operateurs de l’espaceobeissant aux relations de commutation (ou d’anticommutation) 8 suivantes :

[φa(x), φb(y)] = [πa(x), πb(y)] = 0 et [φa(x), πb(y)] = iδ(3)(x− y)δba

ou δ(3)(x − y) est le delta de Dirac. Il est important de remarquer que l’on a abandonne ladependance temporelle des champs. Cela se justifie par le fait que nous travaillons dans larepresentation de Schrodinger, c’est-a-dire une representation dans laquelle les etats |ψ〉 evoluentselon l’equation de Schrodinger i ddt |ψ〉 = H |ψ〉[13].

Comme la theorie porte sur ces champs quantiques, elaborons un peu cette idee, car la notionde champ quantique est loin d’etre une notion evidente au premier abord. Intuitivement, d’unepart, on se rappelle qu’un champ scalaire classique est simplement une fonction qui prend lescoordonnees de l’espace et qui retourne une valeur scalaire, une amplitude. D’autre part on vientd’introduire un champ quantique qui est une fonction qui associe a chaque endroit dans l’espaceun operateur. Mathematiquement, si on est dans l’espace-temps R4, on ecrit respectivement

φ : R4 → R vs φ : R4 → Ox → φ(x) x → φ(x)

ou on a note l’ensemble des operateurs (champs) comme O. Pour le montrer encore autrement,a la figure 3, nous avons mis en evidence la difference entre un champ scalaire classique etquantique par un exemple en deux dimension de l’espace. Notre intuition de champ doit doncetre changee pour etre adaptee a la theorie quantique.

Maintenant que nous avons une meilleur idee de ce qu’est un champ quantique, il est maintenantinteressant d’expliciter comment ils operent et sur quoi. Les champs quantiques operent locale-ment sur l’espace qui peut contenir un systeme de particules dont l’etat est decrit par un etat de

6. Classiquement, ces relations sont donnees par les crochets de Poisson7. ...qui sont des applications, on ne l’oublie pas...8. En effet, cela depend encore une fois de la nature des particules dans le systeme traite. Pour des bosons, il

y aurait commutation et pour les fermions, anticommutation.

36

Page 37: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Figure 3 – Comparaison intuitive d’un champ classique scalaire versus un champ quantique.

Fock. Par consequent, un champ agit sur un etat de Fock et en donne un autre. Explicitement :

φ(x) : Fν(L2(R4n))→ Fν(L2(R4n))

Ψ → φ(x)Ψ ≡ Υ

ou Ψ est un etat de Fock quelconque et Υ est l’etat de Fock resultant de l’operation du champφ(x). Ainsi, on remarque, en se rappelant du chapitre sur l’espace de Fock, que les operateursde creation et d’annihilation sont des champs quantiques ! La prochaine section en dira encored’avantage sur ceux-ci.

L’information typique que l’on veut obtenir en theorie des champs quantiques est le spectrede l’hamiltonien. D’ailleurs, il est important de noter qu’en quantifiant les champs, nous avonspromeut, du meme coup, les fonctions des champs, comme par exemple le lagrangien et l’hamil-tonien, au rang d’operateur. Il en resulte que pour l’hamiltonien, on pourra trouver l’energie toutcomme dans le cas de l’oscillateur harmonique. Cependant, cette tache s’avere en general tresdifficile puisque l’on a une infinite de degres de liberte. C’est pourquoi on abordera seulement latheorie des champs libres (sans interaction) dans laquelle il est possible d’ecrire la dynamiquetelle que chaque degre de liberte evolue independamment des autres [13]. De plus, bien que latheorie puisse inclure la relativite restreinte, cela ne sera pas traite dans l’ouvrage. Finalement,

37

Page 38: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

la technique elaboree pour la quantification ne sera pas fonctionnelle pour toutes les theories deschamps, mais demeure tout de meme tres puissante. Sans plus tarder, elaborons cette techniquede quantification des champs. La quantification canonique s’effectue sommairement en 5 etapesqui vont comme suit :

Etape 1 : On ecrit la densite lagrangienne classique en fonction des champs. Cette partie estplus creative etant donne qu’il y a plusieurs possibilites de lagrangien. Dans le present ouvrage,nous nous contenterons d’utiliser les lagrangiens deja bien connus.

Etape 2 : On calcule la densite d’impulsion et on trouve la densite hamiltonienne en fonctiondes champs.

Etape 3 : On traite les champs et la densite d’impulsion comme des operateurs et on impose lesrelations de commutation.

Etape 4 : On developpe les champs selon les operateurs de creation et d’annihilation. On pourradonc utiliser la representation du nombre d’occupation introduite precedemment.

Etape 5 : Dans plusieurs cas en theorie quantique des champs, on obtient des divergences, commepar exemple lorsque l’on veut effectuer l’integrale pour l’hamiltonien d’un champ scalaire libre.On peut donc, le cas echeant, utiliser la methode de l’ordre normal pour remedier a la situation.

Une fois cela fait, on detient enfin entre nos mains une theorie quantique des champs [6] !.Clarifions et elaborons davantage cette methode par un exemple simple relie a l’oscillateurharmonique. Ceci fait l’objet de la section suivante.

4.3 Application de la theorie quantique des champs (Xavier Roy-Pomerleau)

Partons d’un exemple � simple � pour illustrer la methode. Ecrivons alors la densite lagrangienned’un champ scalaire massif comme ceci :

L =1

2[∂µΦ(x)]2 − 1

2m2[Φ(x)]2. (4.1)

Nous devons alors trouver la densite d’impulsion donnee par :

Πµ(x) =∂L

∂(∂µΦ(x)), (4.2)

de sorte que nous obtenons en derivant :

Πµ(x) = ∂µΦ(x), (4.3)

dont la premiere composante est Π0(x) = π(x) = ∂0Φ(x). De cette maniere, il est possible detrouver la densite hamiltonienne que l’on peut ecrire comme :

H = Π0(x)∂0Φ(x)− L

38

Page 39: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

=1

2[∂0Φ(x)]2 +

1

2[∇Φ(x)]2 +

1

2m2[Φ(x)]2. (4.4)

A cette etape, il est necessaire de considerer nos champs Φ(x) et Π0(x) comme des operateurs.Ils deviennent alors des objets qui prennent un point dans l’espace-temps et qui retourne unoperateur a cet endroit comme nous l’avons repete maintes fois a la section precedente[6]. Paranalogie avec ce que nous avions dans la section de l’oscillateur harmonique, nous allons coiffernos variables d’un chapeau pour denoter leur nature d’operateur. A ces derniers nous attribue-rons aussi les relations de commutation suivantes :

[Φ(x), Φ(y)] = [Π0(x), Π0(y)] = 0, (4.5)

et[Φ(t, ~x), Π0(t, ~y)] = iδ3(~x− ~y). (4.6)

De cette maniere, si nous exprimons la densite hamiltonienne en fonctions de ces operateurs,elle devient aussi un operateur [13]. Afin de poursuivre, nous devons exprimer les champs enfonction des operateurs de creation et d’annihilation, a l’image de ce que nous avons fait aplusieurs reprises dans la section de l’oscillateur harmonique, c’est-a-dire aux equations 2.10,2.12, 2.45 et 2.46. Pour le probleme auquel nous nous interessons, nous avons alors [6] :

Φ(~x) =

∫d3p

(2π)3/2

1√2ω~p

[a~pe

i~p·~x + a†~pe−i~p·~x

], (4.7)

avec ω~p = (~p2 +m2)1/2. Il est temps d’en dire encore un peu plus sur les operateurs de creationet d’annihilation. Effectivement, dans la premiere section, les operateurs de creation et d’an-nihilation permettaient d’ajouter des quanta dans les oscillateurs. Dans la deuxieme section,nous avons introduit le formalisme mathematique de ces operateurs et nous en avons conclu queceux-ci permettaient d’ajouter une particule ayant une certaine fonction propre ϕi (donc etantdans un certain etat quantique). A la derniere sous section, nous avons realise qu’ils etaient enrealite des champs quantiques. Maintenant, en passant a l’espace de Fourier de notre champφ(p, t) il est possible de justifier notre affirmation du debut de chapitre, c’est-a-dire que l’onpeut considerer chaque mode du champ comme un oscillateur harmonique independant[9]. Cela

justifie donc l’introduction des operateurs a†p et ap qui permettent de creer et annihiler des

particules avec une certaine quantitee de mouvement. D’ailleurs, il en decoule que les etats a†pappliques sur l’etat du vide ont pour nombres quantiques E, p et m et on dit que ces etats sontles excitations des particules [9].

Nous pouvons alors ecrire l’hamiltonien comme :

H =1

2

∫d3x[(∂0Φ(x))2 +

1

2(∇Φ(x))2 +

1

2m2(Φ(x))2

]. (4.8)

Connaissant Φ(x), nous avons donc les relations :

∂0Φ(x)) =

∫d3p

(2π)3/2(−i)

√ω~p2

[a~pe

i~p·~x − a†~pe−i~p·~x

], (4.9)

39

Page 40: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

et

∇Φ(x) =

∫d3p

(2π)3/2

i~p√2ω~p

[a~pe

i~p·~x + a†~pe−i~p·~x

]. (4.10)

Avec ces relations, on peut developper l’hamiltonien sous les deux formes suivantes, soient [6] :

H =

∫d3pω~p

[a~pa†~p + a†~pa~p

], (4.11)

et

H =

∫d3pω~p

[a†~pa~p +

1

2(2π)3δ3(0)

]. (4.12)

Nous nous heurtons toutefois a un probleme, car l’integrale∫d3pδ3(0) est divergente a l’infini,

ce qui n’est pas coherent ! Heureusement, ce probleme peut etre regle. Il est toutefois importantde s’interesser au sens physique de l’integrale que nous venons d’ecrire. En fait, si nous evaluonsde la sorte l’hamiltonien, nous allons tomber directement sur l’energie totale, ce qui se traduitpar l’infinite obtenue avec l’integrale [6]. Il aurait ete plus propice de calculer une differenced’energie au lieu de calculer l’energie totale [6]. C’est d’ailleurs ce qui est fait experimentalement[11]. Afin de resoudre ce probleme, il est necessaire d’etudier l’ordre normal. Par exemple, sinous avons un ensemble de champs, il est possible de l’ordonner en mettant a gauche tous lesoperateurs de creation. Par exemple, si l’action d’ordonner s’ecrit comme :

N{ABC†X†Y Z}, (4.13)

on obtiendra := {C†X†ABY Z}. (4.14)

Il est a noter que, pour des champs associes aux fermions, de telles permutations dans l’ordredes champ fait apparaıtre des facteurs (−1). Sachant maintenant ordonner nos champs, nouspouvons repartir de la forme 4.11 que :

N [H] =1

2

∫d3pω~pN

[a~pa†~p + a†~pa~p

],

=1

2

∫d3pω~p · 2a†~pa~p,

=

∫d3pω~pa

†~pa~p. (4.15)

Nous avons donc atteint la fin de la cinquieme etape qui etait d’obtenir une expression bienordonnee ! Cette derniere expression pour l’hamiltonien permet donc d’eviter d’obtenir uneintegrale divergente. On a donc maintenant notre premiere theorie quantique des champs pourles champs scalaires !

40

Page 41: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Conclusion

La theorie quantique des champs s’impose comme l’outil par excellence pour batir une phy-sique des particules solide et feconde. Au terme de toutes ces pages, qui ne representent qu’unefraction de la pointe de l’iceberg, nous avons pu toucher plusieurs concepts qui permettentd’avoir de meilleures bases pour s’attaquer a une eventuelle comprehension plus globale decette matiere qui, disons le, fait habituellement objet de cours gradues extremement denses.Pour mettre en valeur ces nouveaux acquis, une eventuelle suite du travail aurait pu etrel’etude de l’electrodynamique quantique. Effectivement, il serait possible, a partir des notionsacquises et quelques autres notions, de construire les espaces de Fock des photons et deselectrons/positrons. En plus de pouvoir refaire le travail pour obtenir les operateurs d’anni-hilation et de creation, on aurait pu consolider le lien entre les oscillateurs harmoniques et leschamps libres electromagnetiques. Dans cette perspective, il n’y a sans doute pas de meilleuresfacons de boucler la boucle qu’ainsi :

Hphoton =∑p

3∑s=1

ωp(a†p,sap,s +1

2I) + ωp(

1

2I − a†p,0ap,0)

Helectron =∑p

∑s=± 1

2

p(b†p,sbp,s +1

2I)

Hpositron =∑p

∑s=± 1

2

p(c†p,scp,s +1

2I)

41

Page 42: Th eorie quantique des champs - feynman.phy.ulaval.ca

Bibliographie

[1] Claude Cohen-Tannoudji, Bernard Diu et Franck Laloe. Mecanique quantique I. Her-mann, 1998. isbn : 2 7056 6074 7.

[2] John B. Conway. A Course in Functional Analysis. Springer, 1990. isbn : 0-387-97245-5.

[3] Patrick Desrosiers. Physique mathematique I : Notes de cours. Universite Laval, 2015.

[4] Mike Hermele. Second Quantization. url : http://www.colorado.edu/physics/

phys7450/phys7450_sp10/notes/2nd_quantization.pdf.

[5] Charles Kittel. Introduction a la physique de l’etat solide. Dunod University, 1972. isbn :2 04 005248 8.

[6] Tom Lancaster et Stephen J. Blundell. Quantum Field Theory for the Gifted Amateur.Oxford University Press, 2014. isbn : 978–0–19–969932–2.

[7] Micheal Luke. PHY2403F Quantum Field Theory I - Lecture Notes. url : https://www.physics.utoronto.ca/~luke/PHY2403F/References_files/lecturenotes.pdf.

[8] Laboratoire de recherche en mathematiques Lyon/Saint-Etienne. THE ALGEBRA OFCANONICAL COMMUTATION RELATIONS. url : http://math.univ-lyon1.fr/

~attal/Mescours/fock.pdf.

[9] Luc Marleau. Introduction a la physique des particules : Notes de cours. Universite Laval,2017.

[10] Pierre Mathieu. Methodes mathematiques en physique : Notes de cours. Universite Laval,2017.

[11] Michael Peskin et Daniel V. Schroeder. An Introduction to Quantum Field Theory.Perseus Books, 1995. isbn : 0-201-50397-2.

[12] Glenn Rowe. Coupled oscillators in terms of creation and annihilation operators ; pho-nons. url : http://www.physicspages.com/2014/12/13/coupled-oscillators-in-terms-of-creation-and-annihilation-operators-phonons/.

[13] David Tong. Quantum Field Theory. Cambridge University, 2007.

[14] Eberhard Zeidler. Quantum Field Theory II : Quantum Electrodynamics. Springer, 2009.isbn : 978-3-540-85376-3.

42