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Septembre / Octobre 2018 29 Protection Sécurité Magazine SOMMAIRE w L’IA : utile mais sous certaines conditions 30 a Concrètement, l’IA, c’est quoi ? 31 a L’IA est-elle dangereuse ? 33 a Une vraie utilité 33 a D’autres marchés ? 35 a Et l’homme dans tout ça ? 38 dossier L’IA au service de la sécurité L’IA et ses possibles applications dans le monde de la sécurité sont plus que jamais d’actualité. Et le seront de plus en plus. Alors, certes, on en parle beaucoup, mais que recouvre concrètement l’IA et que permet-elle ? Que permettra-t-elle demain ? Et dans quelles limites ? © Getty image

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Septembre / Octobre 2018 29 Protection Sécurité Magazine

SOMMAIRE w L’IA : utile mais sous certaines conditions 30 a Concrètement, l’IA, c’est quoi ? 31 a L’IA est-elle dangereuse ? 33 a Une vraie utilité 33 a D’autres marchés ? 35 a Et l’homme dans tout ça ? 38

dossier

L’IA au service de la sécurité L’IA et ses possibles applications dans le monde de la sécurité sont plus que jamais d’actualité. Et le seront de plus en plus. Alors, certes, on en parle beaucoup, mais que recouvre concrètement l’IA et que permet-elle ? Que permettra-t-elle demain ? Et dans quelles limites ?

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30 Septembre / Octobre 2018 Protection Sécurité Magazine

L’IA : utile mais sous certaines conditionsL’IA dans la sécurité n’est pas qu’une vue de l’esprit ou un outil marketing. Ses applications sont réelles et vont sans doute se généraliser. Mais cela ne doit pas empêcher tous les acteurs concernés de se poser la bonne question : l’IA, pour quoi faire ?

dossier

On en parle de plus en plus. Et le monde de la sécu-

rité ne cesse de bruire de ses possibles applica-

tions et des bouleversements qu’elle devrait

engendrer tant du point de vue des solutions pro-

posées que des services ou du rôle de l’homme dans la

chaîne sécuritaire. Qui est ce « elle » ? C’est l’IA ou « intelli-

gence artifi cielle » que d’aucuns défi nissent comme l’en-

semble des techniques qui doivent permettre aux machines

d'imiter une forme d'intelligence réelle. Et l’IA est aujourd’hui

utilisée dans un nombre, toujours plus important, de

domaines d’applications. La sécurité est évidemment l’un

d’eux.

L’intelligence artificielle va profondément bouleverser le monde de la sécurité dans les années à venir. Des solutions de plus en plus intelligentes pourront nous surveiller. Se pose donc la question du respect de nos libertés individuelles…

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Septembre / Octobre 2018 31 Protection Sécurité Magazine

LA CERTIFICATION EST INDISPENSABLE !dossier L’IA AU SERVICE DE LA SÉCURITÉ

Mais sous cette apparente simplicité de la définition, on peut

mettre de nombreuses choses. Et il ne faut pas croire que l’IA est

si nouvelle qu’elle en a l’air. En effet, la notion d’IA apparaît dans

les années cinquante grâce aux travaux du mathématicien Alan

Turing dont le livre Computing Machinery and Intelligence pose

déjà la question de la possibilité d’apporter aux machines une

forme d’intelligence. Alan Turing va plus loin puisqu’il conçoit un

test – le célèbre test de Turing – dans lequel un sujet interagit à

l'aveugle avec un autre humain, puis avec une machine program-

mée pour formuler des réponses sensées. Si le sujet n'est pas

capable de faire la différence, alors la machine a réussi le test et,

selon Turing, peut être considérée comme « intelligente ».

Concrètement, l’IA, c’est quoi ?L’acronyme IA signifie couramment intelligence artificielle, mais

pour Vincent Le Cerf, docteur en intelligence artificielle il est

plus juste de parler d'« informatique avancée ». Ce qui fait que la

définition de l’IA évolue au fur et à mesure des avancées sur

l’algorithmie.

« Si l’IA cherche à reproduire l’intelligence humaine, elle reste avant tout un ensemble de logiciels conçus pour réaliser des instructions prédéterminées. À l’heure actuelle, on est encore loin de reproduire le travail du cerveau humain qui est capable de sentir, d’analyser, d’interpréter et d’agir, en s’adaptant à son environnement. » note Vincent Le Cerf.

Pour Pascal Pech, directeur général solution sécurité chez Onet :

« Le concept d’intelligence artificielle recouvre plusieurs techno-logies, c’est pourquoi il est parfois difficile de faire la part des choses entre des innovations structurantes pour le futur et des applications plus basiques. Les effets d’annonce ajoutent d’ail-leurs à la confusion. Il est donc important de clarifier le

PAROLE D’EXPERTYVES ACKERMANNConsultant business développement chez Teamworking.pro

« NOS MÉTIERS VONT CHANGER. »« Fantasmes ou réalité encore méconnue, on parle de plus en plus d’intelligence artificielle, de ces robots et autres drones qui gèrent des situations qui, auparavant, étaient réservées aux seuls êtres humains. Nous sommes surpris de voir la reproduction de processus complexes, de fonctions nouvelles comme la perception, l’apprentissage et même le raisonnement. L’intelligence artificielle laisse espérer de nombreuses avancées en matière de sécurité. Que ce soit en vidéosurveillance, en contrôle d’accès, etc. Mais si on veut rester pragmatique, quels sont les exemples d’applications qui feront le futur du contrôle d’accès ? En résumé, en permettant au système d’être

mieux en mesure d’estimer le risque, l’intelligence artificielle augmentera le niveau de sécurité tout en améliorant l’expérience utilisateur. Mais comment ? La personne est prise en compte bien avant qu’elle ne demande l’accès et jusqu’à bien après qu’elle n’ait quitté la zone protégée. Plus que son identification classique code/badge/empreinte, elle est également identifiée par les différents aspects de son comportement, sa manière de marcher ou la familiarité de son visage et leur concordance avec les “facteurs à risque” et la “connaissance” que le système a de son profil, c’est-à-dire son historique comportemental. Sa première prise de contact à l’entrée ne se fait plus uniquement par la présentation d’un badge mais par des facteurs tels que son heure d’arrivée, la reconnaissance de son visage, de son état de stress ainsi que par un échange vocal dont la longueur et le contenu pourra varier en fonction du niveau de risque estimé. Mais l’intelligence artificielle sera également précieuse pour l’optimisation des rondes par la reconnaissance de formes et la prise en compte de “signaux faibles”, la prise en compte du zonage, du comportement des visiteurs, l’aide à la décision sur demande mais surtout pour l’assistance dans l’exécution de réponses adaptées en cas de menace ou d’intrusion de jour comme de nuit. Pouvant intégrer automatiquement des informations provenant de plusieurs sources, en local (vidéo, gestion horaire, alarme ou domotique), le système apprendra et sera en mesure de privilégier les actions qui se sont avérés les plus efficaces. Chaque “expérience” de l’ensemble des systèmes connectés enrichira une base de données partagée. Notre métier va changer, avec des systèmes autonomes connectés, mobiles et polymorphes, capables d’apprendre à diagnostiquer un niveau de risques en fonction de profils et d’effectuer des actions complexes ayant prouvé leur efficacité ailleurs. Pour quand me demanderez-vous ? Tout de suite après que les véhicules autonomes seront autorisés sur nos routes. »

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32 Septembre / Octobre 2018 Protection Sécurité Magazine

dossier

Le concept d’intelligence artificielle semble un peu « fourre-tout ». Pouvez-vous nous expliquer ce qu’il recouvre pour vous ?Si l’abréviation IA est

généralement employée en lieu et place d’intelligence artificielle, je pense qu’elle n’est pas adaptée à ce que recouvre vraiment ces technologies. Je préfère parler d’« informatique avancée » qui permet de rendre l’idée que l’IA évolue constamment en fonction des progrès et avancées de l’algorithmie. Par ailleurs, il ne faut pas croire que l’IA est nouvelle.

Cette discipline remonte aux années cinquante et aux travaux, entre autres, d’Alan Turing. Son but est de concevoir des « machines » qui seraient capables de simuler, reproduire l’intelligence humaine. Mais cela reste un logiciel conçu pour réaliser des instructions prédéterminées. Cela n’a rien à vois avec l’intelligence humaine qui est capable d’analyser, de sentir, d’interpréter et d’agir, selon notre expérience…

On parle beaucoup d’IA dans le monde de la vidéosurveillance. Qu’en pensez-vous ?Je pense que pour ce type d’application sécuritaire, le recours à l’IA est souhaitable

et utile. Afin de prévenir et dissuader. Les outils d’IA devront accompagner l’opérateur et l’aider à agir au mieux avant l’acte, donc permettre de dissuader pendant, après et au cours de l’enquête. C’est évidemment en matière de réactivité pendant l’acte qu’on espère que l’IA permettra de faire des progrès car c’est à ce moment que la vitesse de compréhension d’un phénomène est vitale, mais aussi pour les actes très graves – comme les attentats – pour lesquels la récidive rapide est à redouter. Le besoin d’élucidation ultra-rapide est une nouvelle nécessité.

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VINCENT LE CERFDocteur en intelligence artificielle

2 QUESTIONS À

concept. Pour commencer, je dirais que l’intelligence artificielle recouvre aujourd’hui un ensemble de techniques, ma-chine learning, computer vision, natural language processing qui sont utilisées pour de nombreuses applications, telles que le data mining, les chatbots et assistants virtuels, les capteurs intelligents ou

encore la robotique. » Mais il tient à préciser que « certaines tech-niques sont matures comme le natural language processing pour les chatbots, quand d’autres commencent juste à être utilisées – comme le deep learning – dans des applications limitées avec la reconnaissance de forme dans une photographie, par exemple. »

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Septembre / Octobre 2018 33 Protection Sécurité Magazine

L’IA est-elle dangereuse ?Parler de l’IA et de ses possibles applications ne doit pas

nous interdire de nous poser certaines questions. Comme le

souligne Genséric Cantournet, Pdg de Kelony : « L’IA n’est pas un sujet neutre dans la mesure où il ne laisse pas indifférent. L’IA est porteuse de craintes : accentuation du chômage, im-plications en matière de protection de la vie privée ou bien d’éthique, etc. Ces craintes sont le fruit d’un biais cognitif concernant la manière de percevoir et d’aborder aujourd’hui les enjeux de l’IA. Ce biais s’étend d’un extrême à l’autre : omnipotence thaumaturgique supposée d’un côté et suréva-luation anthropomorphique de l’autre. Ces derniers sont sup-posément dus à des formes d’autonomisation potentielle hors d’un quelconque contrôle. En réalité, ces risques sont moins ceux de l’IA que ceux de sa conception par l’Homme. Ce biais n’est pas propre à l’IA, c’est celui d’une innovation galopante sans précédent. »Cela posé, les enjeux de l’IA sont bien réels. En matière de

développement et de problèmes d’application pratique opéra-

tionnelle. « Au premier rang desquels, celui de la gouvernance des modalités de contrôle sur l’évolution inférentielle des algo-rithmes et l’anticipation des risques systémiques. C’est en par-ticulier prégnant pour les algorithmes auto-évolutifs à appren-tissage rétroactif, capables d’apprendre à apprendre. Ces derniers sont capables d’apprendre à partir de leurs échecs et d’évoluer en mode “dégradé” le cas échant. Les algorithmes de type Proximal Policy Optimization ou Hindsight Experience Replay permettent à la machine qui serait dans l’incapacité d’exécuter une tâche d’en choisir une autre en toute autono-mie », ajoute le dirigeant de Kelony.

Cette question de l’autonomie de l’IA est aussi une de celles

que se pose maître Alain Bensoussan, fondateur du cabinet

Lexing Bensoussan Avocats et qui réfléchit depuis plusieurs

années sur les questions de robotiques, d’intelligence artifi-

cielle, de responsabilité juridique des machines : « L’intelli-gence artificielle oblige les professionnels de sécurité, les pou-voirs publics et les utilisateurs de solutions à se poser des questions cruciales quant à notre rapport à la machine et sa capacité à décider à notre place. Nous sommes en effet au-jourd'hui confrontés à des questions inédites en matière de res-ponsabilité face à la généralisation de ces technologies ». Car,

jusqu’à maintenant, la décision incombait à l’opérateur. Mais

demain qu’en sera-t-il puisque désormais les machines et

autres robots sont capables d’apprendre par eux-

mêmes ? « Quid de leur capacité de résistance face à une at-teinte, dans l'éventualité où, confrontés à des données fausses ou mal interprétées, ils seraient susceptibles de déclencher une action ou une réponse erronée face à un incident ? », s’in-

quiète donc Alain Bensoussan.

Vous avez peut-être vu le film amércain I-Robot dans lequel un

androïde, après analyse d’une situation dramatique – un

homme et une petite fille sont en train de se noyer – décide

de sauver l’homme car, après analyse froide, le robot juge

que l’homme a plus de chances de survivre… Choix cho-

quant ? Certes. Mais qui est responsable ? La machine ou

l’ingénieur qui l’a programmée ? Les professionnels de la sé-

curité qui développent les outils que nous voyons se généra-

liser aujourd'hui, principalement dans la vidéosurveillance, ne

se posent pas tous forcément encore ces questions. Ils vont

pourtant devoir le faire, tout comme le législateur et les pou-

voirs publics.

dossier L’IA AU SERVICE DE LA SÉCURITÉ

Une vraie utilité« L’intelligence artificielle est très intéressante pour le monde de la sécurité. Les capacités d’auto-apprentissage sont très utiles pour la reconnaissance faciale, par exemple. Mais cela requiert d’importantes bases de données comme celles dont disposent aujourd’hui Google ou Facebook. Il faudra aussi disposer d'outils qui permettront d’analyser ces bases données. Comme le deep-face de Facebook qui conçoit le modèle qui lui permet de recon-naître les personnes. On peut d'ailleurs s’interroger sur l'avenir des bases de données des grandes sociétés de l’inter-

PAROLE D’EXPERTLAURENT DENIZOTPdg d’Egidium

« IL NE FAUT PAS QUE LA SÉCURITÉ ÉCHAPPE À L’HOMME. »« De 1984 à Minority Report, le défi d’une intelligence artificielle à des fins d’une sécurité sans partage alimente les fantasmes d’un monde orwellien

dans lequel toute humanité serait finalement vouée à disparaître. Pourtant, et plus encore dans ces périodes troublées, la sécurité reste un besoin indispensable à la stabilité et au développement de nos sociétés. Comment donc concilier les multiples opportunités offertes par ces algorithmes toujours plus intelligents et la préservation légitime d’une véritable liberté des individus ? Des capteurs de plus en plus précis, un monde digital de plus en plus généralisé, des robots de plus en plus présents, peuvent faire craindre une dérive vers un monde au sein duquel sa propre sécurité échapperait au contrôle de l’homme. Alors que faire ? Interdire les applications de l’intelligence artificielle au domaine de la sécurité, ce qui aurait pour effet immédiat de limiter la protection de nos propres infrastructures ainsi que d’exclure notre pays, sa filière des industries de sécurité et ses emplois, de la course mondiale aux marchés de la sécurité ? Ou bien, au contraire, ne donner aucune limite à l’utilisation de ces nouvelles capacités technologiques et se diriger tout droit vers un univers sans règles tout entier soumis à des délires sécuritaires sans fin ? Le débat n’est pas facile et le sera encore moins demain. Il faut, en conséquence, trouver la voie de la raison et un cadre pour le faire vivre, sans polémiques inutiles. Par exemple, le CoFIS (Comité de la filière des industries de sécurité), offre une gouvernance adaptée qui permet un dialogue public-privé efficace pour l’ensemble des acteurs étatiques, collectivités, opérateurs et industriels du secteur, et des moyens pour le faire vivre. Par des démonstrateurs, au sein de Lab’s dédiés et adaptés au contexte de la sécurité, le croisement des besoins, des nouveaux usages et des technologies émergentes de l’intelligence artificielle appliquées à la sécurité pourraient se mettre en place de façon durable, harmonieuse et ambitieuse. Dans un cadre sûr et contrôlé, la réponse aux enjeux de villes sûres et intelligentes, du traitement de l’identité et de la traçabilité, pourraient, par exemple, bénéficier du droit à l’expérimentation avant qu’un cadre réglementaire ne fasse émerger peu à peu les outils d’une sécurité à la fois plus humaine et plus intelligente. Bref, celui d’une “AI for humanity & security” ! »

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34 Septembre / Octobre 2018 Protection Sécurité Magazine

SUR LE TERRAIN

En Chine, l’IA vous surveille tout le tempsLes habitants des grandes villes chinoises n’échappent jamais à l’œil

des 170 millions de caméras déjà installées dans l’Empire du milieu.

Et 400 millions de nouvelles caméras doivent venir compléter

le réseau national dans les années à venir. Certaines d'entre elles

sont dotées d'un dispositif de reconnaissance faciale permettant

d'identifier les passants avec une marge d'erreur infime. En effet,

pour renforcer la sécurité sur le territoire, les autorités chinoises

utilisent la reconnaissance faciale pour prévoir et prévenir les

crimes. Les mouvements et les comportements des citoyens sont

analysés et recoupés aux autres données accumulées par le pouvoir

pour avertir rapidement les autorités en cas de signaux suspects.

La technologie est aussi utilisée pour obliger les citoyens

à respecter les règles. Par exemple, à Shangaï ou Shenzhen,

les visages des piétons traversant au rouge sont projetés

sur des écrans géants aux coins des carrefours jusqu'à ce qu'ils

règlent l’amende prévue pour ce « délit ».

dossier

net et des réseaux sociaux. Elles ne sont encore utili-sées que par ces sociétés. Mais s’il leur prenait l’envie de les monétiser un jour ? Actuellement, les systèmes qui utilisent de l’IA fonctionnent soit à base de règles qui leur sont inculquées par l’humain afin de simuler des raisonnements simples sur des données soit par des processus d’auto-apprentissage à partir de bases de données d’exemples. Ils sont alors capables d’analyser, corréler et déduire l’information afin de potentiellement déci-der », explique Marie-Claude Frasson, directrice technique chez

Digital Barriers.

Pour que cela tourne cependant de manière correcte, il faut

beaucoup de capacités CPU et des algorithmes puissants. On

peut aussi imaginer que l'IA pourra être utilisée dans des applica-

tions de contrôle d'accès pour reconnaître la signature visuelle

d'un individu afin de la comparer avec les signatures visuelles

des individus contenus dans une base de données. L'IA peut

aussi être appliquée pour identifier des “pattern of life”, des com-

portements individuels qui se modifient sans raison apparente.

Tout cela pose donc la question primordiale de la gestion des

bases de données. Qui en dispose ? Comment sont-elles consti-

tuées ? Pour quelles utilisations ? Il faudra veiller à faire attention

aux problématiques des libertés individuelles et publiques…

« L’IA ne sera utile que si elle nous permet de gagner du temps pour intervenir face à un délit, martèle Dominique Legrand, pré-

sident de l’AN2V. Elle doit donc s’inscrire dans un contexte global pour permettre à l’opérateur d’agir en temps réel. C’est-à-dire, de détecter une anormalité grâce à des outils d’analyse vidéo et au-dio, de transmettre l’information et de l’analyser – 24 h/24 et 7 j/7 – pour permettre aux forces de l’ordre d’intervenir. C’est grâce à cet apport de l’IA que la sécurité privée pourra aussi s’inscrire

LE POINT DE VUE D’UN FABRICANTJEAN-MARIE BAILLYPrésident d’Aquilae

« DES APPLICATIONS TRÈS NOMBREUSES ! »« Les applications possibles de l’IA dans la sécurité sont nombreuses. Elles vont de la reconnaissance d’un comportement suspect lié à l’individu au comptage automatique

des personnes en statique et dynamique, en passant par la détection et la qualification fiable des intrusions sur les sites sensibles, l’identification rapide d’une situation anormale comme le risque incendie, par exemple, la géolocalisation et le tracking de toute cible sur un réseau de caméras fixes et mobiles, la reconnaissance faciale – en respectant évidemment les règles de la Cnil – ou de caractères pour les plaques d’immatriculation, la télévidéosurveillance, la vidéosurveillance en temps réel, le tracking des objets ou de personnes en temps réel… Dans un avenir proche, si nous parvenons à développer l’IA, elle nous permettra aussi de diversifier les applications du système, pour satisfaire la demande des utilisateurs des secteurs tertiaire et industriel et leur proposer de nouveaux services et prestations, en offres packagées. »

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Septembre / Octobre 2018 35 Protection Sécurité Magazine

dossier L’IA AU SERVICE DE LA SÉCURITÉ

dans le continuum de la sécurité tant souhaité par les pouvoirs publics et les acteurs privés du secteur. »Mais pour arriver à cela, il faut anticiper la rupture technologique

que représente l’IA. « Beaucoup de gens parlent de l’IA, surtout dans le monde de la vidéosurveillance, mais peu se sont réelle-ment préparés au saut technologique qu’elle représente, regrette

Laurent Scetbon, responsable d'équipe grands comptes et pro-

jets chez Hikvision. Se préparer à l’IA, comme nous l’avons fait puisque nous proposons déjà des solutions qui intègrent ces technologies, implique de gros investissements en matière de R&D pour concevoir des solutions que pourront réellement ap-porter une plus-value à l’opérateur derrière son écran. L’IA devra être capable d’apprendre et de reconnaître des cibles différentes et d’aider, a posteriori, à la recherche d’individus selon leur sexe, âge, vêtements, couleur de cheveux, lunettes, etc. »La vidéosurveillance n’est pas le seul marché de la sécurité concer-

né par le développement de l’IA. Le contrôle d’accès y réfléchit

aussi. « Avec l’IA, on peut raisonnablement envisager d’accroître les capacités des lecteurs de contrôle d’accès pour leur permettre de devenir de véritables capteurs à l’instar des caméras, souligne

Vincent Dupart, Pdg de STid. En y intégrant des algorithmes, nous pourrons leur permettre d’identifier des comportements suspects (attitudes, gestes, reconnaissance faciale, port d’armes…), à l’en-trée d’une banque par exemple. Par ailleurs, associer de l’IA à un drone - ce que nous faisons déjà avec notre partenaire Novadem – nous offre l'opportunité de proposer un autre type de contrôle

SUR LE TERRAIN

À Toulouse aussi…Depuis 2017, 50 caméras du surveillance sont dotées

d’intelligence artificielle afin d’être capables de repérer

des comportements douteux et l’éventuelle attitude menaçante

des passants grâce à l’analyse de plusieurs critères comme

la température corporelle, les expressions faciales, la démarche

des badauds… Si une des caméras repère un comportement

ou un mouvement inhabituel, le système est capable d’envoyer

une alerte à un opérateur de la Ville afin qu’il puisse évaluer la scène

et prendre la décision de demander l’intervention de la police.

d’accès et de gestion des flux sur un site. On peut identifier les personnes lorsqu’elles se déplacent sur une zone sensible, vérifier qu’elles ont le droit d’accéder à telle ou telle zone et éventuelle-ment les interpeller en cas de nom respect des droits d’accès… »

D’autres marchés ?Il est indéniable que l’apport de l’IA dans les services, solutions

et prestations de sécurité ouvre aux acteurs du marché de for-

midables opportunités en matière de développement d’activités

et de diversification. « Bien entendu ces nouvelles technologies vont avant tout nous permettre d’améliorer la sécurité

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36 Septembre / Octobre 2018 Protection Sécurité Magazine

Partagez-vous l’enthousiasme général sur le développement de l’intelligence artifi cielle ?L’IA connaît un essor peu commun ; l’accélération de

son évolution semble conforter les théories de Ray Kurzweil. Les réseaux neuronaux artifi ciels du machine learning et ses différentes versions que sont l'apprentissage supervisé ou non et l'apprentissage par renforcement sont l’objet de développements permanents. Ils ne cessent d’être perfectionnés, notamment par le biais de combinaisons de solutions. Les algorithmes de type Random Forest qui mettent ensemble plusieurs techniques de prédictions à partir de différents arbres de régression/classifi cation, en sont un exemple. Ce type d’évolution modulaire crée des systèmes à l’imprévisibilité croissante qui peuvent être perçus eux-mêmes comme une nouvelle source de risques. Paradoxe peu banal compte tenu du fait que l’objectif primaire déclaré de l’IA est d’aider l’Humanité ! Peut-on alors imaginer que l’IA puisse nous aider y compris dans notre besoin primaire de sécurité ?

Au-delà des craintes que vous évoquiez à l’instant, le développement de l’IA n’implique-t-il pas un progrès ? Comme pour d’autres technologies passées...Les progrès exponentiels de l'IA conduisent à des percées radicales qui sont de prime

abord perçus comme source de risques. Il est néanmoins bien plus probable qu’au bout du compte, de tels progrès profi teront au monde entier, comme cela fut le cas dans d’autres domaines. L’avènement des chemins de fer entre le XIX

e et le XX

e siècle fut une source d’inquiétudes permanentes. Ce n’est pas un hasard si le train devient le lieu de l’incertitude et du meurtre dans certains romans ou fi lms. Il s’agit pourtant aujourd’hui du moyen de transport le plus sûr au monde. En réalité, on craignait moins le train, comme aujourd’hui l’IA, que la trop rapide transformation du monde. C’est donc moins l’outil qui compte que l’usage qu’on en fait. Autrement dit, le sens qui sera donné à une innovation dépendra de l’usage dont le spectre s’étend du bien de l’humanité à son exact contraire : la destruction de celle-ci. Aucune innovation n’est un bien ou un mal en soi. La poudre à canon peut donner au choix, les feux d’artifi ce ou les armes à feu. Nier toute chance de développement de l’IA pour notre sécurité est non seulement illusoire, mais ce serait se priver d’opportunités que nous ne sommes même pas en mesure d’évaluer.

Sous quelles conditions l’application de l’IA sera-t-elle utile à la sécurité ? Et à la société d’une manière générale ?Le principal obstacle à la réalisation du potentiel de l'IA pour le bien mondial est actuellement l'organisation socio-

économique de l'industrie de l'IA, qui est centrée sur quelques grandes entreprises technologiques et quelques thèmes. D'autres applications tentent bien d’émerger, mais elles ne le font qu’à la marge, comme des effets collatéraux secondaires des objectifs principaux. L’application de l’IA aux processus de sécurité sera favorable à condition de prendre en compte le caractère paradoxal des points de rupture dans l’évolution technologique. Les robots ménager promettaient de « libérer la femme » selon certains slogans publicitaires. Promesse non tenue selon l’Insee en 2012 : « (…) l'inégalité du partage des tâches

domestiques continue d'être d'autant plus

forte que les ménages comptent

des enfants. » Ils ont contribué à faciliter les corvées ménagères, tout en créantune certaine aliénation sur le plus long terme en renforçant les stéréotypes.L’IA dans le domaine de la sécurité connaîtra fort probablement le même type d’évolution. Elle ne dégagera probablement pas de temps pour la stratégie dans la mesure où sa mise en œuvre sera elle-même chronophage mais elle changera les lignes de défense et d’attaque, en particulier en multipliant le « champ des possibles » et en rendant plus dense le « brouillard de la guerre ». Le véritable risque n’est pas tant les développements inappropriés de l’IA que les retards que l’Europe et la France en particulier pourraient cumuler par rapport à l’Asie ou les États-Unis.

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GENSÉRIC CANTOURNETPdg de Kelony

dossier

3 QUESTIONS À

L'IA appliquée à la vidéoprotection permettra-t-elle aux forces de l'ordre de réagir plus vite, en temps réel, en cas d'incident ?

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Septembre / Octobre 2018 37 Protection Sécurité Magazine

dossier

Surveillance des espaces réduits : Hanwha Techwin se démarque

WPour plus d’informations rdv sur notre site :

www.hanwha-security.eu

PUBLI-RÉDACTIONNEL

Les 5 nouvelles caméras compactes Wisenet sont les suivantes : • Wisenet XNV-6012 : caméra réseau anti-vandale compacte 2 Mpx. Objectif fi xe de 2,4 mm.• Wisenet XNV-6012M : caméra réseau anti-vandale compacte résistante aux vibrations 2 Mpx. Objectif fi xe de 2,4 mm.• Wisenet XNV-6013M : caméra réseau anti-vandale résistante aux vibrations 2 Mpx. Objectif fi xe de 2,8 mm.• Wisenet XNV-6022R : caméra réseau IR anti-vandale compacte 2 Mpx. Objectif fi xe de 3,6 mm.• Wisenet XNV-6022RM : caméra réseau IR anti-vandale compacte résistante aux vibrations 2 Mpx. Objectif fi xe de 3,6 mm.

PAROLE D’EXPERTMARC PICHAUDDirigeant de Just Do IP

« L’IA POUR ASSISTER LES OPÉRATEURS. »« Le débat sur l’apport de l’IA dans la sécurité – et plus particulièrement dans la vidéosurveillance – s’inscrit dans un contexte général qui voit se multiplier le nombre de caméras dans certaines villes et l’accroissement exponentiel des capacités des caméras de surveillance avec, en parallèle, un nombre d’opérateurs derrière les écrans qui n’est pas extensible à l’infi ni. On se retrouve avec des installations de plus en plus chères au coût/caméra mais avec un degré d’exploitation très faible par caméra. L’être humain, n’est pas destiné à rester les yeux rivés sur un écran, lui-même affi chant 4 à 16 caméras, pour essayer de détecter que quelque chose se passe.

Par conséquent, je partage l’opinion de Dominique Legrand de l’AN2V, comme quoi nos caméras sont plus des caméras d’élucidation post incidents que des caméras de vidéoprotection qui protègent en temps réel. Il faudrait améliorer l’analyse temps réel, faute de paires d’yeux suffi santes et de niveau d’attention maintenu. L’IA nous permettrait de signaler uniquement aux opérateurs ou aux forces de l’ordre les anormalités, avec un taux d’erreurs extrêmement faible, offrant une véritable confi ance dans le système. Son rôle serait donc d’assister les opérateurs dans leur tâche de détection, mais en pouvant appliquer une analyse sur beaucoup plus de caméras que ne le permettent leurs seuls yeux… Elle permettrait aussi de remplacer un l’opérateur quand celui-ci est absent ou fait défaut, et appliquer des scénarios. Le rêve serait un écran noir qui ne s’allumerait que quand un véritable délit se produit et qui marcherait aussi bien le jour que la nuit, quelles que soient la météo et la saison. L’analyse comportementale est évidemment la plus complexe car relevant du contextuel (menace du poing, coup de poings, chute de personnes, détection d’armes, comportement agressif, expressions du visage, etc.). Et il est diffi cile de différencier une vraie agression d’un échange de coup de pieds sous forme de jeu entre des copains. Idéalement, le système devrait être capable de s’autocalibrer, de s’autodiagnostiquer en matière de performances, d’auto-apprendre, c’est-à-dire continuer d’apprendre sur le site du client et non pas être fi gé dans un “deep learning” réalisé il y a trois ans dans des conditions peut être fort éloignées de mes conditions actuelles… On en est encore loin mais je reste très positif sur les apports de l’IA à terme. »

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RL’IA AU SERVICE DE LA SÉCURITÉ

Toutes anti-vandales, elles fi lment en haute défi nition à 2 Mpx, intègrent un processeur très puissant et des technologies éprouvées en matière gestion de contre-jour (WDR) à 150 dB.

Les cinq nouvelles caméras dômes qui intègrent la gamme Wisenet X ont été conçues pour les environne-ments où l'espace est limité, comme dans les ascenseurs, les halls d'en-trée, les cages d'escaliers et les pe-tites boutiques. Trois des quatre nou-veaux modèles sont également conformes aux normes anti-vibration en vigueur pour le marché des trans-ports ferroviaires.

Reconnaissance des sonsPar ailleurs, ces dômes proposent de nouvelles fonctions dont l’ana-lyse audio qui détecte des sons comme les coups de feu, les explo-sions, les cris et les éclats de verre. Ils intégrent également de nom-

breuses analyses vidéo telles que les détections de perte de mise au point, de visages, de brouillard, de maraudage, de sa botage, de fran-chissement de lignes virtuelles ainsi que l'apparition/disparition d'objet.Le PTZ numérique 24x, l'audio bidi-rectionnel, le mode couloir, la détec-tion de mouvement et l'asservisse-ment de PTZ sont également intégrés sur tous les modèles, tout comme la possibilité d'enregistrer jusqu'à 256 Mo de données sur une carte SD/SDHC/SDXC pour pour-suivre l'enregistrement en local en cas de panne du réseau.

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38 Septembre / Octobre 2018 Protection Sécurité Magazine

dossierglobale des sites, celle de nos agents et la

performance économique de nos prestations, recon-

nait Pascal Pech. Mais le couple homme/machine va aussi nous conduire à aborder la sécurité de manière différente, en proposant de nouveaux services et en adoptant de nouveaux business model. Chez Onet, le développement de l’IA nous permet d’envisager des synergies inter-activités : des données obtenues à partir des capteurs sécurité pourront par exemple se révéler utiles pour adapter nos prestations de net-toyage aux flux des usagers. Des solutions de smart cleaning sont d’ailleurs déjà en place sur plusieurs sites client. D’autres synergies sont possibles avec notre activité de logistique, comme des solutions de traçabilité mixte. L’interopérabilité entre nos métiers est un véritable axe de développement. »Point de vue que partage Laurent Scetbon : « L’IA nous permet déjà et nous permettra encore plus de s'adresser à d’autres marchés comme le commerce de détail, la grande distribution ou le marketing afin de leur proposer des outils d’aide à la gestion des magasins, des stocks, des effectifs et de la clientèle. »

Et l’homme dans tout ça ?Avec le développement des applications IA et leur

généralisation se pose une question : va-t-on,

comme le pensait le Pdg de Securitas, de manière

un peu provocante certes, vers une sécurité sans

homme, sans opérateur ? « Le marché est très de-mandeur mais il faut garder à l’esprit que, dans nos métiers, la machine ne remplacera jamais ni l’expé-rience, ni la pertinence de l’humain. Les compé-tences de nos opérateurs de télévidéosurveillance ou de nos agents de sécurité devront bien sûr évo-luer pour leur permettre de mieux interagir avec l’ensemble de ces outils : analyser la donnée, mani-puler un drone ou un robot nécessiteront d’adapter les formations. Mais notre conviction est que l’homme est incontournable dans le domaine de la sécurité, et nous misons sur ce couple homme/ma-chine plus que sur des systèmes autonomes », tient

à rappeler le directeur d’Onet Sécurité.

La robotique et les drones sont évidemment un des

axes de travail majeur en matière d’IA dans la sécu-

rité. « Dans nos drones, nous mettons de l’IA pour que la machine soit capable de présenter à un opéra-teur qualifié une information crédible et utile, ex-

plique Grégoire Linard, directeur R&D d’Azur Drones,

leader européen du drone de surveillance. Notre but n’est pas de remplacer l’homme, mais de lui per-mettre, grâce à l’apport de l’IA, de se concentrer sur des tâches plus valorisantes, tout en ne l’exposant pas inutilement à certains risques. L’IA nous permet d’effectuer automatiquement de la levée de doute et des rondes automatiques mais pas uniquement. Nos drones sont capables aussi de modéliser un site afin de faciliter, par exemple, l’accès à certaines zones en cas d’incident ou les déplacements des secours pour éviter qu’ils soient contraints de traverser une zone dangereuse ou interdite. L’IA au service de l’homme et de sa sécurité… »

Que recouvrent concrètement les termes « intelligence artificielle » dans le monde de la sécurité ? Quelles sont les technologies qui y sont intégrées ?Concernant le secteur de la sécurité, le marché en est encore aux prémices et il s’agit

principalement de R&D. De nombreuses applications auront vocation à faciliter le travail des agents sur le terrain et à les sécuriser. Par exemple, les technologies de machine et deep learning dans la vidéosurveillance vont permettre de mieux détecter les anomalies de comportement et de générer des alertes plus pertinentes. Il est important de rappeler que, dans nos métiers, les fausses alertes représentent un coût important. Grâce à ces technologies, les agents pourront agir de manière plus fiable et plus efficace.

Comment un groupe comme Onet parvient-il à introduire de l’intelligence artificielle dans ses solutions et prestations ?Notre démarche consiste d’abord à bien identifier les sujets sur lesquels l’intelligence artificielle va apporter une réelle valeur ajoutée à nos agents et nos clients, en termes de sécurisation ou de performance économique, dans un contexte où les types de risques évoluent en permanence. Par exemple, on observe aujourd’hui plus d’incivilités dans les agences bancaires que de vols. L’intelligence artificielle pourrait contribuer à prévenir ces incivilités. Pour nos projets de recherche nous avons choisi de mettre en place une démarche complète d’open innovation : notre équipe R&D est constituée d’experts en sécurité électronique, en innovations technologiques et en applicatifs opérationnels. Elle s’appuie sur plusieurs organismes de notre écosystème, comme le pôle de compétitivité Safe, basé à Aix-en-Provence, qui est dédié à l’innovation dans la sécurité (sûreté et environnement) et qui regroupe 400 entreprises. Être intégré dans cet écosystème d’innovation nous permet d’identifier les structures susceptibles de proposer des solutions d’IA. Nous travaillons également avec une école d’ingénieurs, et nous recrutons actuellement des chercheurs pour travailler sur la modélisation des données. Enfin, des prototypes sont régulièrement testés avec nos clients.

Quels sont les apports de l’IA dans vos métiers ? Que vous permet-elle de faire qui vous était jusqu’à maintenant impossible, voire difficile ? En quoi vous fait-elle gagner en efficacité ?Tout d’abord, l’apport de l’IA consiste en une meilleure détection des risques d’intrusion et de leur prévention, jusqu’à la prédiction des comportements, ce que nous faisons difficilement aujourd’hui. Dans le domaine de la maintenance, l’IA peut permettre de prévenir un défaut de système non visible à l’œil nu et accroître ainsi la disponibilité de nos matériels pour une meilleure sécurité. Nous souhaitons aussi développer la maintenance prédictive, pour effectuer l’acte de maintenance juste à temps, avant la mise en défaut des systèmes.En télésurveillance, on verra apparaître des systèmes de rondes automatiques dont les algorithmes de détection fourniront un premier niveau d’alerte. À terme, les robots et les drones vont gagner en autonomie et deviendront des alliés précieux dans la surveillance et la levée de doute. Et, plus globalement, j’insiste sur l’importance de la réduction des fausses alertes.

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3 QUESTIONS ÀPASCAL PECHDirecteur général d’Onet sécurité