le sens de l’expression tete,lestai · 2009-02-09 · dnt dictionnaire du nouveau testament dtbi...

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Campus adventiste du Salève Faculté adventiste de théologie Collonges-sous-Salève Le sens de l’expression tete,lestai en Jn 19.30b Mémoire présenté en vue de l’obtention du Master en théologie adventiste Par Georges SALVADOR Directeur de recherche : Roland MEYER Assesseur : Enrique TREIYER Juin 2008

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Campus adventiste du Salève

Faculté adventiste de théologie

Collonges-sous-Salève

Le sens de l’expression tete,lestai

en Jn 19.30b

Mémoire présenté en vue de l’obtentiondu Master en théologie adventiste

Par Georges SALVADOR

Directeur de recherche : Roland MEYERAssesseur : Enrique TREIYER

Juin 2008

2

REMERCIEMENTS

Ce mémoire a largement dépassé le cadre d’une recherche théologique. C’est

une véritable aventure spirituelle qu’il m’a été donné de vivre. Il ne s’est pas réalisé

sans quelques difficultés et luttes mais à chaque étape de sa rédaction, Dieu m’a

assisté et soutenu. Ma gratitude s’adresse d’abord à mon Père céleste.

Ma reconnaissance va ensuite à mon directeur de recherche, Roland MEYER.

Ses qualités humaines, ses compétences et sa disponibilité de chaque instant m’ont

permis de mener à bien ce travail.

Je remercie également Enrique TREIYER qui, comme assesseur, a accepté de

critiquer ce travail malgré le peu de temps dont il disposait. Je lui en suis

reconnaissant.

C’est l’ensemble du corps professoral qui est également l’objet de mes

remerciements pour avoir contribué à ma formation théologique.

Deux femmes m’ont énormément soutenu durant mes études et la rédaction de

ce mémoire :

- Mon épouse, Béatrice, qui par son amour et son intercession permanente, a

permis que ce mémoire aboutisse. Son travail, sa disponibilité et ses

encouragements m’ont été extrêmement précieux ;

- Ma maman qui m’a soutenu et encouragé durant ces cinq années d’études.

Enfin, mes pensées vont vers mon père terrestre, Jean, Dieu fait grâce. Ce

mémoire lui est dédié. Ce travail m’a fait prendre conscience, à mon niveau, de ce que

sont d’authentiques relations filiales, fondées sur l’amour, entre un père et un fils.

3

REMARQUES MÉTHODOLOGIQUES

MÉTHODOLOGIE

La méthodologie suivie sera celle professée par R. MEYER, Méthodologie de la

recherche (GSEM 603), Version numérique, Collonges-sous-Salève, Faculté

adventiste de théologie, 2007.

BIBLE DE RÉFÉRENCE

NBS, Nouvelle Bible Segond (La), Paris, Villiers-le-Bel, Alliance Biblique

Universelle, Société Biblique Française, 2002.

Les textes bibliques cités le seront à partir de cette Bible sauf mentions

contraires en notes de bas de page.

Les versets seront précédés de l’abréviation « v. » et nous écrirons « verset »

en entier lorsqu’il ne sera pas suivi d’un chiffre comme référence.

ORTHOGRAPHE ET CITATIONS

Nous écrirons Évangile avec un « É » majuscule lorsqu’il sera

dénominationnel : « Évangile de Jean », « Évangile de Matthieu », etc. en gardant le

nom en entier. Nous mettrons une minuscule lorsqu’il s’agira des « évangiles » dans

leur ensemble. Dans la même logique, les « synoptiques » prendront une minuscule.

Lorsqu’il s’agira de Dieu en tant que Père, nous l’écrirons avec un « P »

majuscule, de même pour Jésus-Christ, le Fils, avec un « F » majuscule.

Les expressions latines seront écrites en italique.

Les mots grecs et hébreux seront écrits en italique ainsi que leurs traductions

en français. Lorsqu’il s’agira de versets en grec ou en hébreu, ils ne seront pas mis en

italique mais leurs traductions en français seront entre « guillemets » attendu qu’elles

seront tirées de la NBS et donc considérées comme des citations, sauf mention en

note de bas de page.

Les prénoms composés d’auteurs francophones prendront un tiret (-) entre les

deux prénoms.

Les citations courtes seront conservées en continuité du texte pour ne pas en

rompre l’harmonie.

4

ABRÉVIATIONS

Les abréviations des livres bibliques seront celles de notre Bible de référence. Il

nous arrivera de supprimer l’abréviation « Jn » devant une référence biblique pour ne

pas multiplier les répétitions ; nous comprendrons qu’il s’agit de l’Évangile de Jean.

Les abréviations des auteurs dans les citations seront respectées.

Pour les abréviations bibliographiques nous utiliserons les normes

internationales tirées de l’ouvrage de S. M. SCHWERTNER, IATG2 : Internationales

Abkürzungsverzeichnis für Theologie und Grenzgebiete, Berlin, New York, Walter de

Gruyter, 1992. En l’absence d’abréviations dans cet ouvrage, nous contracterons

nous-mêmes les références.

Les abréviations, ci-dessous, seront réservées aux instruments de travail, aux

collections de livres et aux revues qui seront cités au moins une fois et

préférentiellement destinées aux notes de bas de page bien que certaines soient

inévitables dans le corps du texte.

Les abréviations latines seront écrites en italique.

5

ABRÉVIATIONS

AnBib Analecta Biblica

AT Ancien Testament

CEv Cahier Évangiles

CFi Cogitatio Fidei

CJJC Jésus et Jésus-Christ

CKNTG Computer-Konkordanz zum Novum Testamentum Graece

CNT Commentaire du Nouveau Testament

DEB Dictionnaire encyclopédique de la Bible

DELG Dictionnaire étymologique de la langue grecque

DGFNT Dictionnaire grec-français du Nouveau Testament

DiCT Dictionnaire critique de théologie

DNT Dictionnaire du Nouveau Testament

DTBi Dictionnaire de théologie biblique

EHPhrR Études d’histoire et de philosophie religieuses

EtB Études bibliques

GBDGF Le Grand Baily : Dictionnaire Grec-Français

INT Introduction au Nouveau Testament

INcNT Introduction critique au Nouveau Testament

LeDiv Lectio Divina

LiBi Lire la Bible

LXX Septante (Version grecque de l’Ancien Testament)

MoBi Le Monde de la Bible

NRT Nouvelle Revue Théologique

NT Nouveau Testament

ParD Parole de Dieu

RSR Revue des sciences religieuses

SeVeTe Septuaginta Id Vetus Testamentum graece iuxta LXX interpretes

TDNT Theological Dictionary of the New Testament

TOB Traduction œcuménique de la Bible

VOb Vocabulaire biblique

VTB Vocabulaire de théologie biblique

6

« L’œuvre johannique est une tunique sans couture, quelles que soient les

circonstances dans lesquelles elle a été tramée. Elle forme dans le Nouveau

Testament un univers à part. »

J. GROSJEAN, Bible (La), Nouveau Testament (Bibliothèque de la Pléiade), Textes traduits et annotés par Grosjean J., Léturmy M., Gros P., Paris, Gallimard, 1971, p. 267.

7

INTRODUCTION GÉNÉRALE

8

A la croix, Jésus prononce sept paroles1 que les évangiles relatent. L’auteur de

l’Évangile de Jean reprend la parole, « Quand il eut pris le vin aigre, Jésus dit : ‘Tout

est achevé’. » (Jn 19.30).

Mais qu’est-ce que Jésus a accompli en mourant à la croix ? Est-ce un

accomplissement définitif ou y-a-t’il quelque-chose d’autre à espérer ? Cet

accomplissement, en définitive, est-il achevé et le chrétien d’aujourd’hui en est-il

bénéficiaire alors que l’évènement s’est produit plus de deux mille ans en arrière ?

Telles sont les questions qui ont motivé notre recherche.

C’est donc cette parole, 19.30b, que nous avons choisi d’analyser pour en

découvrir2 la signification.

A bien des égards, notre travail présente des aspects de la christologie, de la

sotériologie et de l’eschatologie3 ; La personne du Christ est indissociablement et

irréductiblement liée à sa préexistence et à son incarnation, à sa vie et à son œuvre, à

sa mort et à sa résurrection et à l’offre de salut qui en résulte.

Notre propos n’est pas de rédiger un traité systématique sur l’Évangile de Jean

pas plus qu’une analyse chronologique qui se voudrait exhaustive ni un commentaire

suivi. Notre cheminement théologique se veut essentiellement biblique et

synchronique4.

Nous n’avons pas non plus choisi l’option de développer la théologie

paulinienne sur le thème de la nouvelle création bien qu’à certains endroits de notre

développement nous nous essaierons à certaines incursions.

Cette étude ne sera pas davantage un recensement complet des

correspondances entre l’Ancien Testament et l’Évangile de Jean ; nous retiendrons les

plus significatives. Un tel récolement aurait largement dépassé les limites imparties à

notre travail.

Au regard de ces préliminaires, notre parcours sera rythmé par le principe de la

vie tel qu’il est contenu au trentième verset du chapitre vingt.

1 Cf. annexe I, p. 71 : « Les paroles de Jésus en croix ». .2 L’utilisation du verbe « découvrir » n’est pas anodine. La recherche nous a entraînés dans un processus de découverte auquel nous ne pensions pas aboutir ; nous ne détenions pas les résultats des fouilles avant d’avoir creusé.3 La christologie a essentiellement pour thème la personne de Jésus-Christ. La théologie, à des fins systématiques et didactiques, a distingué la christologie de la sotériologie (l’œuvre de salut opérée par Jésus-Christ) et de l’eschatologie (évènements qui concernent la fin). Cf. l’introduction, p. 2-9, au cours de R. MEYER, Sotériologie (THST 646), Version numérique, Collonges-sous-Salève, Faculté adventiste de théologie, 2007-2008.4 Nous ne pouvons, malgré tout, faire l’économie d’une approche diachronique dans notre premier chapitre.

9

Nous examinerons, dans un premier temps, les questions d’introduction

inhérentes à toute problématique biblique. Parcours faisant, nous établirons les

premiers linéaments de notre étude qui nous seront utiles.

Nous procèderons à l’analyse exégétique en contexte du verset 19.30 dans le

deuxième chapitre qui devrait nous amener à découvrir ce que Jésus a accompli à la

croix, pourquoi et comment. Pour enchaîner, il sera utile de considérer les implications

théologiques de ce qui précède et voir si cet accomplissement est achevé ou s’il va au

delà. Ce sera l’objet de notre troisième chapitre.

Nous nous risquerons à une conclusion générale après étude.

Chaque chapitre héritera des acquisitions précédentes de sorte que la

synthèse finale révèlera une connaissance globale et donnera au lecteur une

perspective plus élevée que ne l’est la lecture linéaire de parties qui se succèdent.

Dieu, incarné en Jésus-Christ, descend auprès des hommes pour y accomplir

son œuvre et une fois cette mission terrestre effectuée, il retourne auprès du Père

pour la parachever. Il y a donc un double mouvement descendant et ascendant. Cette

sotériologie par « en haut5 » sera perceptible en toile de fond.

5 Nous reprenons ici l’expression de B. LAURET, « Christologie dogmatique », Initiation à la pratique de la théologie, LAURET B., REFOULÉ F. (dir.), t. II, Dogmatique I, Paris, Cerf, 1982, p. 267s. B. LAURET développe le fait de « Dieu vers l’homme » ou fait incarnationnel du Verbe. Il donne la chaîne suivante issue de la théologie scolastique : « Trinité – Création – Chute (péché originel) –Incarnation du Verbe, Dieu et homme parfait, qui restaure l’humanité dans son statut primitif d’avant le péché pour lui procurer la vie éternelle. », p. 267. L’approche par « en bas » a trait au Jésus historique.

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Premier chapitre

QUESTIONS D’INTRODUCTION ETCONTEXTE LARGE DE L’ÉVANGILE DE JEAN6

Tau/ta de. ge,graptai i[na pisteu,ÎsÐhte o[ti VIhsou/j evstin o cristo.j o uio.j tou/ qeou/( kai. i[na pisteu,ontej

zwh.n e;chte evn tw/| ovno,mati auvtou/Å

Jn 20.31

6 Nous n’aborderons pas toutes les questions d’introduction, ce n’est pas notre propos. Cette partie amènera progressivement notre développement en posant des repères auxquels nous aurons besoin d’avoir recours ultérieurement.

11

Introduction

Ce premier chapitre établit le contexte large de l’Évangile de Jean avec les

considérations d’ordre diachronique usuelles pour un tel travail. Ces prolégomènes

nous permettront, d’entrer progressivement dans le texte de manière centripète et

approcher par cercles concentriques notre sujet. Il est capital de connaître le terreau

sur lequel a germé le quatrième évangile, c’est la raison pour laquelle nous avons

établi le rapport qui existe entre l’AT et l’évangile johannique. L’auteur biblique au une

intention théologique en s’adressant à ses contemporains7 ; nous essaierons de

déterminer laquelle. Nous terminerons ce chapitre par des propositions de plans qui

préparent l’exégèse du chapitre suivant.

I. GÉNÉRALITÉS SUR LE LIVRE DE JEANLa tradition johannique est constituée de l’Évangile de Jean, des trois épîtres

de Jean (1Jn, 2Jn, 3Jn) et du livre de l’Apocalypse8. Seul nous intéresse ici l’évangile.

A. Authenticité de l’Évangile de Jean

Durant la seconde moitié du IIe siècle, l’Évangile de Jean circule sous le titre

« Évangile selon Jean».

Ce sont les cercles gnostiques du IIe siècle qui attestent de l’authenticité de

l’Évangile de Jean. « L’Évangile de Vérité » (140-150) et « l’Évangile de Philippe »

connaissaient Jn, Héracléon le commente9. »

La réception de cet Évangile en Église est attestée par le papyrus10 Egerton 2.« Le texte de Jn est aussi bien conservé que celui des évangiles

synoptiques. Non seulement il apparaît dans les grands onciaux des IVe/Ve

siècles (Sinaïticus, Vaticanus, codex de Bèze), mais, avant cela, il est également transmis par des papyri. Le P52 qui est le papyrus

7 Et au-delà, aux hommes jusqu’à aujourd’hui.8 Nous n’ouvrons pas le dossier johannique ici car l’identification de l’auteur pose problème. Cependant, nous partons de l’a priori que les épîtres johanniques et le livre de l’Apocalypse ont été écrits par l’apôtre Jean. Pour un approfondissement du sujet, cf. les ouvrages d’A. GEORGE, A. GRELOT (dir.), La tradition johannique (Introduction critique au Nouveau Testament), vol. IV, t. III, Paris, Desclée, 1977 ; D. MARGUERAT (dir.), Introduction au Nouveau Testament : Son histoire, son écriture, sa théologie (MoBi 41), 3e éd. (1re éd. 2000), Genève, Labor et Fides, 2004.9 J. ZUMSTEIN, « L’Évangile selon Jean », Introduction au Nouveau Testament : Son histoire, son écriture, sa théologie (MoBi 41), MARGUERAT D. (dir.), 3e éd. (1re éd. 2000), Genève, Labor et Fides, 2004, p. 349. Nous n’avons pu retrouver la source primaire de ces évangiles apocryphes dont parle J. ZUMSTEIN.10 R. DUPONT-ROC, « Le texte du Nouveau Testament et son histoire », Introduction au Nouveau Testament : Son histoire, son écriture, sa théologie, p. 475-496, approfondit l’origine des papyri et de leur transmission ; R. DUPONT-ROC, PH. MERCIER, Les manuscrits de la Bible et la critique textuelle (CEv 102), Paris, Cerf, 1997.

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néotestamentaire le plus ancien (=Jn 18,31-33.37-38) prouve que l’évangile de Jn était en circulation en Égypte vers 130. Les papyri P66 (=Jn 1-14 ; extraits des chapitres 15 ; 16 ; 19 ; 20,25-21,9) et P75 (=Jn 1-12 ; extraits des chapitres 13 ; 14 ; 15), qui datent respectivement du milieu du IIe siècle et du début du IIIe siècle, nous font découvrir l’état du texte de l’évangile à cette époque reculée11. »

B. Auteur et destinataires

1. Auteur

L’Évangile de Jean ne décline pas explicitement l’identité de l’auteur.

a) Attestation interne

Le texte fait allusion à la figure du « disciple que Jésus aimait » (Jn 19.26, 20.2,

21.7, 21.24).

Il y a un consensus général pour accepter Jean, fils de Zébédée et le disciple

que Jésus aimait (Jn 19.26), comme étant l’auteur de cet évangile. Selon Ph.

Rolland12, la logique interne corrobore cette thèse. En Jn 6.70 ; 13.18 ; 15.16, Jésus

affirme qu’il a choisi les douze et qu’il est normal de rester dans ce cercle pour

l’identification de Jean.

Toujours, selon Ph. Rolland, Jean, avec son frère Jacques, faisait partie des

trois disciples témoins de la Transfiguration de Jésus en Mt 17.1 ainsi que de l’agonie

de ce dernier en Mt 26.37. Par ailleurs, Jean jouissait d’un certain prestige que lui avait

conféré Jésus13.

R. E. Brown n’est pas de cet avis et pense qu’il peut s’agir d’un personnage

secondaire, disciple du disciple bien aimé, qui pourrait être le fondateur de la

communauté johannique, ce qui accréditerait la thèse de la communauté

johannique14. Ce n’est pas, non plus, l’opinion de H. Conzelmann et A. Lindemann

lesquels pensent qu’ « il est hautement improbable que l’auteur de Jn ait été un témoin

oculaire15.»

11 J. ZUMSTEIN, « L’Évangile selon Jean », Introduction au Nouveau Testament : Son histoire, son écriture, sa théologie, p. 349.12 PH. ROLLAND, « Et le Verbe s’est fait chair » : Introduction au Nouveau Testament (Biblik), Paris, Presses de la Renaissance, 2005, p. 323-325.13 Ac 3.1 ; 8.14 ainsi que Ga 2.9 où Jean est considéré, avec Jacques et Céphas « comme des colonnes » de l’Église. 14 R. E. BROWN, Que sait-on du Nouveau Testament ? 3e éd. (1re éd. 1997), Paris, Bayard, 2000, p. 412. 15 H. CONZELMANN, A. LINDEMANN, Guide pour l’étude du Nouveau Testament (MoBi 39), Genève, Labor et Fides, 1999, p. 396. Pour eux, le « disciple bien-aimé » n’est pas l’auteur du texte là où il est mentionné.

13

b) Attestation externe

Le titre du papyrus P66 serait l’attestation la plus ancienne que cet Évangile soit

attribué à Jean16.

Au cours de la deuxième moitié du IIe siècle, le disciple bien-aimé (Jn 21.20)

est identifié au disciple Jean17 par Irénée18 . Son témoignage est capital car Jean,

originaire de Smyrne, avait connu dans son enfance Polycarpe, évêque de cette ville

qui était disciple de Jean. Toujours à cette période, le lien entre la rédaction de

l’Évangile de Jean et les traditions johanniques d’Éphèse est établi19.

Les premiers Pères comme Justin Martyr, Polycarpe et Ignace reconnaissent

également le quatrième évangile « comme un ouvrage digne de confiance et revêtu

d’autorité20. »

Quant aux auteurs gnostiques comme Ptolemaeus (env. 150), Héracléon,

Basilides et les hérétiques Valentiniens, ils reconnaissent la paternité de l’Évangile à

Jean21.

c) L'école johannique

D’aucuns des critiques attribuent la paternité de l’œuvre finale à une

communauté ou école johannique qui aurait colligé les traditions de Jean pour les

assembler après un lent processus de retouches, d’additions et de diverses

rédactions22. La rédaction et la publication finale auraient été réalisées par ses

disciples après la mort de Jean23.

16 F. VOUGA, « Jean : auteur, destinataires, perspective », La Bible et sa culture : Jésus et le Nouveau Testament, QUESNEL M., GRUSON Ph. (éd.), Paris, Desclée de Brouwer, 2000, p. 414-415.17 Frère de Jacques et fils de Zébédée (Jn 21.2 ; Mt 4.21). Le grec a transcrit le mot hébreu Yôhânân par Iôannes, Dieu fait grâce. 18 « Ensuite Jean, ‘le disciple’ du Seigneur, le même qui reposa sur sa poitrine, a publié lui aussi l’ÉVANGILE pendant son séjour à Éphèse. », IRÉNÉE DE LYON, Contre les hérésies : mise en lumière et réfutation de la prétendue « connaissance » (Sources chrétiennes), Livre III, Texte latin, fragments grecs, Introduction, traduction et notes de SAGNARD F., Lyon, Paris, Emmanuel Vitte, Cerf, 1952, p. 97. EUSÈBE DE CÉSARÉE cite également Jean dans son Histoire ecclésiastique,(Sources chrétiennes), Livres V-VII, Texte grec, Traduction et note de BARDY G., Paris, Cerf, 1955, p. 62.19 F. VOUGA, art. cit. p. 415.20 F. BASSIN, F. HORTON, A. KUEN, Évangiles et Actes (Introduction au Nouveau Testament), Saint-Légier, Emmaüs 1990, p. 323.21 Ibid.22 Ainsi, La Bible de Jérusalem, Traduite en français sous la direction de l’École biblique de Jérusalem, Paris, Cerf, 1998, p. 1813 ; B. LINDARS, B. RIGAUX, Témoignage de l’évangile de Jean : Pour une histoire de Jésus, V, Paris, Desclée De Brouwer, 1974, p. 87 ; J. ZUMSTEIN, « Évangile selon Jean », Introduction au Nouveau Testament : Son histoire, son écriture, sa théologie, p. 352, 362.23 Les apories de l’Évangile pourraient s’expliquer ainsi. Les disciples auraient inséré, après coup, des fragments de textes comme 3.31-36 et 12.44-50.

14

Mais pour les tenants de la critique historique comme H. Conzelmann, A.

Lindemann :« Toutes ces suppositions, y compris en particulier celle qui associe le

nom de ‘Jean’ avec Jn, ne peuvent s’appuyer sur aucune attestation textuelle. Par conséquent, comme dans le cas des synoptiques, la question de l’auteur reste sans réponse24. »

Malgré cette dernière observation, et bien que nous n’ignorions point les

problèmes d’identification, nous nous rangeons du côté des évidences intrinsèques au

livre et de la tradition pour reconnaître en Jean, le disciple, l’auteur de l’Évangile selon

Jean25, en nous appuyant sur la finale de l’œuvre : « C'est ce disciple qui témoigne de

ces choses et qui les a écrites. Et nous savons que son témoignage est vrai. » (Jn

21.24).

2. Destinataires

Ce sont des Juifs hellénisés26 qui sont restés dans le milieu juif et qui

constituent essentiellement le noyau des cercles johanniques qui « s’est développé

paisiblement à l’intérieur des synagogues jusqu’à la reprise en main du judaïsme par

les pharisiens27 ».

C. Lieu et date de composition

1. Lieu de rédaction

Il y a peu d’indices pour localiser le lieu de rédaction. Les spécialistes

modernes ont suggéré Antioche en Syrie et Alexandrie comme lieux de rédaction mais

aucunes ne présentent d’arguments solides. Il n’y a pas d’attestation interne à

l’évangile pour situer le lieu de rédaction mais la tradition28 s’accorde pour montrer qu’il

aurait été rédigé à Éphèse en Asie. R. E. Brown29 soutient cette piste. L’influence

johannique était connue dans la région d’Éphèse et l’idée du Logos y a été introduite

au VIe siècle avant J. -C. par Héraclite30. Selon F. Vouga, l’école johannique se serait

déplacée de Syrie en Asie31.

24 H. CONZELMANN, A. LINDEMANN, Guide pour l’étude du Nouveau Testament, p. 396.25 Dorénavant, lors de notre étude, nous conviendrons par défaut que l’auteur du quatrième évangile est Jean le disciple. 26 Jn 12.20s.27 F. VOUGA, « Jean : auteur, destinataires, perspective », La Bible et sa culture, p. 416.28 IRÉNÉE DE LYON, Contre les hérésies : mise en lumière et réfutation de la prétendue « connaissance » (Sources chrétiennes), Livre III, Texte latin, fragments grecs, Introduction, traduction et notes de SAGNARD F., Lyon, Paris, Emmanuel Vitte, Cerf, 1952, p. 97.29 R. E. BROWN, Que sait-on du Nouveau Testament ? p. 377.30 F. BASSIN, F. HORTON, A. KUEN, Évangiles et Actes, p. 347-348.31 F. VOUGA, art. cit. p. 416.

15

2. Date

Elle se situe au plus tôt dès l’an 68 mais la plupart des commentateurs optent

pour la fin du premier siècle, soit entre 90 et 10032. Le processus rédactionnel se serait

échelonné des années 80 à 110 pour R. E. Brown33.

Deux indices forts étayent la datation des chapitres 1 à 20, l’image du judaïsme

et la triple mention de l’expulsion34 de chrétiens johanniques hors de la

synagogue35, avposunagwgoi ge,nwntai.

Les Pères de l’Église36, quant à eux, situent sa rédaction à la fin du premier

siècle.

D. Style, langue et vocabulaire

1. Style et caractéristiques littéraires

Le terreau linguistique de Jean est hébraïque de sorte qu’A. Chouraqui peut

dire que « Même quand ils s’expriment ou écrivent en araméen, les Hébreux pensent

dans la langue de la Bible, c'est-à-dire en hébreu37. »

Le style de Jean est solennel en même temps que simple. Les discours

répondent à la technique des inclusions, des chiasmes, du double sens, du

malentendu et de l’ironie. Il faut y voir également des paratextes et des parallélismes.

Pour J. -M. Blanchard, il faut y voir une succession de logia.

J. Grosjean résume ainsi le style johannique : « Les lois du style johannique sont connues : solennité du ton, agilité

de la pensée, parallélisme en spirale, amplifications successives, alternance entre l’affirmation brutale qui s’explicite ensuite peu à peu et les lentes préparations qui aboutissent à une parole péremptoire ou à un brusque accomplissement ; sans compter le goût des inclusions et des septénaires38. »

32 Ainsi, F. BASSIN, F. HORTON, A. KUEN, Évangiles et Actes, p. 348-350 ; H. VAN DEN BUSSCHE, Jean, commentaire de l’évangile spirituel, Paris, Desclée de Brouwer, 1967, p. 16-17 ; B. LINDARS, B. RIGAUX, Témoignage de l’évangile de Jean, p. 14.33 R. E. BROWN, Que sait-on du Nouveau Testament ? p. 377.34 L’adjectif grec avposuna,gwgoj, « exclu de la synagogue », est utilisé en Jn 9.22 ; 12.42 ; 16.2. Or, il n’est possible de parler d’exclusion de la synagogue que lors de la résurgence du judaïsme, sous l’impulsion des pharisiens, après la destruction du Temple. Avant cette date, le centre du judaïsme est focalisé sur le culte du Temple. 35 F. VOUGA, « Jean : auteur, destinataires, perspective », La Bible et sa culture, p. 416.36 Justin, Irénée de Lyon, Origène, Clément d’Alexandrie et Eusèbe de Césarée.37 La Bible Chouraqui, Traduite et présentée par CHOURAQUI A. Paris, Desclée de Brouwer, 1985, p. 2059.38 La Bible, Nouveau Testament (Bibliothèque de la Pléiade), Textes traduits et annotés par GROSJEAN J., LÉTURMY M., GROS P., Paris, Gallimard, 1971, p. 268.

16

2. Langue

C’est le grec de la Koinè39, bien que pauvre mais correct, qui a été utilisé mais

les sémitismes y sont fréquents. La mentalité et la syntaxe sémitiques caractérisent

l’œuvre.

La TOB mentionne l’hypothèse d’érudits pour lesquels un original araméen

aurait été traduit en grec du fait de certains aramaïsmes mais cette hypothèse a été

abandonnée. Cependant, l’origine sémitique de l’auteur et l’influence de la LXX ne

serait pas étrangers à son style. Ainsi, A. Chouraqui n’hésite pas à dire que : « Le génie de Jean consiste justement à employer le grec pour

exprimer le mystère d’une vision hébraïque. Il y réussit en créant une langue nouvelle, sorte d’hébreu-grec où le ciel hébraïque se reflète dans son miroir hellénique40. »

3. Vocabulaire

Le vocabulaire est majoritairement tiré de la vie quotidienne et se différencie de

celui des synoptiques41. Bien que simple et pauvre42, il est cependant compréhensible

par tous ; il est peu banal et Jean le charge d’une connotation subtile hautement

religieuse43.

Le vocabulaire de Jean détaché de l’intention théologique du livre et du

contexte des parties perd de sa force44. Nous utiliserons précisément certains

vocables propres à Jean dans notre développement ultérieur.

G. D. Kilpatrick45 a effectué une étude comparative du vocabulaire de Jean et

celui de la LXX. Le vocabulaire est rigoureusement identique dans les deux livres

exception faite de vingt-quatre mots. Cette comparaison est l’un des jalons

fondamentaux que nous posons pour la suite de notre propos.

39 X. LÉON-DUFOUR, DNT, (Livre de vie 131), Paris, Seuil, 1975, p. 330, en donne la définition suivante : « Adjectif grec signifiant : ‘commune’. Désigne la langue grecque communément parlée (koinè dialektos) dans l’Empire romain du temps du Nouveau Testament. » 40 La Bible Chouraqui, p. 205941 Les mots comme « par ex. aimer, la vérité, connaître, la vie, les juifs, le monde, juger, témoigner, le Père, envoyer, garder, manifester, la lumière, demeurer, etc.) » sont propres à Jean et peu usités dans les Synoptiques. Cf., B. RIGAUX, « Lumière, vérité et vie dans le quatrième évangile », Témoignage de l’évangile de Jean, p. 120, 121, établit une comparaison entre le vocabulaire des synoptiques et du quatrième évangile. Nous reproduisons ses deux tableaux en annexe IV, p. 75s.42 É. COTHENET, « Langue et style du IVe évangile », La tradition johannique (Introduction critique au Nouveau Testament), GEORGE A., GRELOT A. (dir.), vol. IV, t. III, Paris, Desclée, 1977, p. 120, recense 1011 mots dans Jn, 1691 dans Mt, 1345 dans Mc et 2055 dans Lc.43 Ainsi, A. FEUILLET, Le Mystère de l’amour divin dans la théologie johannique (Études bibliques), Paris, Gabalda, 1972, p. 27 : « être, devenir, vivre, naître, aller, venir, partir, voir, connaître, croire, dire, parler, témoigner, aimer, donner, recevoir… »44 C’est le point de vue de B. RIGAUX, « Lumière, vérité et vie dans le quatrième évangile », Témoignage de l’évangile de Jean, p. 117.45 G. D. KILPATRICK, « What John tells us about John », Studies in John : Presented to Professor Dr. J. N. Sevenster on the Occasion of his Seventieth Birthday (Novum Testamentum Supplements), vol. 24, Leiden, E. J. Brill, 1970, p. 75-87.

17

4. Langage

a) Langage antithétique

Il permet de révéler l’opposition à l’encontre du message de Jésus et de sa

personne : « Lumière et ténèbres », « vérité et mensonge », « vie et mort »46. Le

dualisme est présent dans le quatrième évangile.

b) Métaphorique

Le langage est essentiellement métaphorique. La métaphore ne se veut pas un

décalque exact de la réalité mais il en exprime les vérités essentielles sans

préoccupation de détails. Le destinataire reçoit des vérités qui sont évidentes parce

qu’il vit au quotidien les images évoquées par le langage métaphorique. Les

enseignements métaphoriques font appel à l’arrière-fond culturel et cultuel du juif qui

ne manque pas d’établir des relations.

Le langage de Jean est lié au milieu culturel de sorte que le vocable et les

concepts sont le reflet de ses préoccupations.« La métaphore est destinée à mettre en lumière les éléments

communs au comparé et au comparant, tout en approfondissant la réalité

spirituelle par l’esquisse d’affinités multiples, et déclenchant des résonances

de valeur esthétique, intellectuelle et morale47. »

c) Langage symbolique

Penser en symboles permet de saisir des concepts et des rapports qui seraient

difficilement accessibles. Les symboles sont omniprésents dans la Bible48 et Jean ne

fait pas exception.

Il suit la tradition vétérotestamentaire comme les synoptiques mais dont il fait

une lecture christologique. Jean utilise les symboles de l’AT qu’il adapte en leur

imprégnant une signification renouvelée. Les orientaux sont familiarisés au procédé

symbolique pour qui les images sont évocatrices. Il use de ce procédé pour faire

saisir des réalités célestes à partir de faits terrestres49. Il n’use pas de procédés

allégoriques issus de données fictives. Son récit est un témoignage de faits

authentiques à double face, terrestre et céleste50.

46 R. WINLING, La Bonne Nouvelle du salut en Jésus-Christ : Sotériologie du Nouveau Testament, Essai de théologie biblique, Paris, Cerf, 2007, p. 321-322.47 H. MORIER, Dictionnaire de poétique et de rhétorique (1re éd. 1961), Paris, PUF, 1981, p. 670-680.48 Cf. G. STEMBERGER, La symbolique du bien et du mal selon saint-Jean (Parole de Dieu), Paris, Seuil, 1970. p. 12-21. 49 H. VAN DEN BUSSCHE, Jean, commentaire de l’évangile spirituel, p. 42-44. 50 Idem, p. 50-51.

18

Pour B. Lindars51, le symbolisme, emprunté aux formulations vétérotestamentaires,

est déjà eschatologie réalisée et eschatologie future.

E. Arrière-plan et influences de l’Évangile

La pensée johannique a probablement été influencée par les différents

courants philosophico-religieux qui traversaient son époque : judaïsme, hellénisme,

gnosticisme, docétisme. Mais il n’en reste pas moins original, sa pensée libre et non

inféodée à un courant particulier52.

1. Jean et la tradition synoptique53

a) Connaissance des synoptiques par Jean

H. Van Den Bussche écrit :« Il importe peu au fond de savoir si Jean a connu ou non les

synoptiques ; il importe bien davantage d’établir, en partant de son texte, si le quatrième évangile dépend littérairement des trois autres54. »

Dans la chronologie55 que Ph. Rolland propose, Jean n’a pas pu ignorer les

autres évangiles puisqu’ils avaient été écrits plusieurs décennies avant le sien.

Il semble que Jean n’ignore pas les évangiles synoptiques mais il retravaille les

matériaux avec beaucoup plus de liberté que ses homologues56. Jean opère un tri des

données dans une intention théologique résolument christologique.

b) Comparaison littéraire

Le quatrième évangile se caractérise par une forme différente de celle des trois

autres. Les unités narratives sont courtes chez Jean tandis que l’on trouve de longs

discours de Jésus dans les autres évangiles.

D’après J. Zumstein57, L’Évangile de Jean présente quatre caractéristiques

communes aux synoptiques :

- Le genre littéraire qui est celui de l’évangile ;

51 B. LINDARS, « Lumière, vérité et vie dans le quatrième évangile », Témoignage de l’évangile de Jean, p. 128.52 La Bible TOB, Traduction œcuménique, 10e éd. (1re éd. 1988), Paris, Villiers-le-Bel, Cerf, Société Biblique Française, 2004, p. 284-286. 53 Cf. F. NEIRYNCK, et al., Jean et les synoptiques : Examen critique de l’exégèse de M. -É. Boismard, Louvain, Leuven University Press, 1979, pour un examen approfondi de cet aspect.54 H. VAN DEN BUSSCHE, Jean, commentaire de l’évangile spirituel, p. 24-25.55 « Avant 40, Matthieu Hébreu et sa traduction en grec […] ; 63 ou 64, Évangile de Luc et Actes des Apôtres ; 66 ou 67, Évangile de Marc […] ; Vers 100, Évangile de Jean. », PH. ROLLAND, L’origine et la date des évangiles : Les témoins oculaires de Jésus, Paris, Saint-Paul, 1994, p. 163-164. 56 La Bible TOB, p. 282-283. 57 J. ZUMSTEIN, « L’Évangile selon Jean », Introduction au Nouveau Testament : Son histoire, son écriture, sa théologie, p. 345-347.

19

- Quelques unités narratives : la purification du Temple (2.13-22), la guérison d’un

fonctionnaire royal (4.46-54), le miracle des pains (6.1-13), la marche sur la mer (6.16-

21) et l’onction de Béthanie (12.1-8) ;

- Quelques logia : les plus caractéristiques sont : 1.27.33,51 ; 2.19 ; 3.35 ; 4.44 ; 12.25

et 15.20 ;

- La Passion : la structure narrative est identique.

Mais son originalité se révèle dans les différences suivantes :

- Son plan ;

- Les récits johanniques ;

- Les discours ;

- Les thèmes.

Alors que les synoptiques présentent des sections brèves, Jean relate des

évènements ou des signes qui trouvent leurs significations dans les entretiens ou les

discours. Il y a absence de paraboles comme dans les autres évangiles et de discours

de type allégoriques. Jean met en œuvre des matériaux différents de ceux des

synoptiques.

Au plan littéraire, il est peu probable que Jean ait été tributaire des synoptiques

même s’il n’en ignorait pas l’existence.

L’Évangile de Jean ne poursuit pas le même but en cherchant à donner autant

d’informations que les trois autres évangiles. Il a pour but de renforcer la foi au Fils de

Dieu par qui l’homme obtient la vie éternelle.

2. Judaïsme contemporain et hellénisme

a) Judaïsme

Jean baigne dans le milieu culturel et religieux juif et sa foi est issue de cet

arrière-fond. Il n’ignore pas les grands thèmes des patriarches, des prophètes et des

sages. Les évènements de la création et de l’Exode sont d’autant de figures58, de

types et de métaphores qui lui permettent de délivrer son message à connotation

résolument christologique.

b) Hellénisme

La désignation de Jésus comme Logos fait penser à des affinités avec la

pensée hellénistique mais il n’y a pas d’utilisation philosophique chez Jean. Ce qui est

58 Comme par exemple, les thèmes de l’agneau pascal, la manne, l’eau, la lumière, la vigne, le berger, le serpent d’airain, etc. Développer ces thèmes nous mènerait trop loin.

20

important pour lui, c’est la connaissance pratique du Fils incarné. Les mêmes termes

n’ont pas la même signification pour lui. Le logos n’est pas un intermédiaire entre Dieu

et l’univers mais comme étant le Fils préexistant parfaitement uni au Père.

II. UTILISATION DE L’ANCIEN TESTAMENT PAR JEANEn dépit de ce que nous venons de dire, il semble que ce soit l’AT qui soit la

source d’inspiration principale de l’Évangile johannique. Le ferment de l’Évangile de

Jean se trouve dans l’AT même si l’utilisation qu’en fait Jean est libre59 et que les

citations ne soient pas explicites60. Il est impossible de faire l’économie du substrat

vétérotestamentaire ; le faire serait lui ôter sa substance et toute consistance. Jean a

un goût prononcé pour les thèmes vétérotestamentaires dont il fait une utilisation libre

et qu’il réinterprète dans l’optique de sa théologie.« C’est dans l’Ancien Testament que s’enracinent des thèmes aussi

fondamentaux que ceux de la Parole, la Lumière, le Pasteur, la Vigne, la Vérité, etc. ; les arracher à leur milieu d’origine, c’est leur enlever leur force particulière et glisser sur la pente des méditations notionnelles61. »

Ici, il nous faut nous assurer de la continuité et de l’harmonie entre AT et NT.

Notre développement dépend de ce continuum sans lequel notre argumentation

devient caduque. Chez Jean, Jésus est annoncé par tout l’AT.

Tout l’AT s’accomplit en Jésus qui révèle magistralement le Père. Jésus est

comparé aux grandes figures bibliques de l’AT, notamment les patriarches62 : Jn 4.12 ;

8.53,59 ; 3.16 ; 1.29.36. Il est également considéré comme prophète à l’instar de

Moïse : Dt 18.18 ; Jn 1.21.25 ; 6.14 ; 7.40 ; 11.27 ; 5.46. Jean a une certaine

prédilection pour Esaïe dont il fait une lecture christologique : Jn 1.23 ; 12.38-41.

L’Évangile de Jean compte dix-neuf citations explicites de l’AT63 et foisonne de

concepts, d’images, de termes et d’expressions qui en sont tirés.

Le Nouveau Testament est la reprise globale de l’Ancien64 et Jean en est

complètement imprégné de sorte qu’É. Cothenet peut dire :

59 « Jean est plus soucieux du sens global d’un texte que la littéralité de la citation. », É. COTHENET« Le quatrième évangile », La tradition johannique, p. 205. Pour avoir une idée de l’utilisation du texte de l’AT, traduit par la version grecque des LXX, nous renvoyons à G. L. ARCHER, G.CHIRICHIGNO, Old Testament Quotations in the New Testament, Chicago, Moody Press, 1983.60 Par exemple, les thèmes de la littérature sapientale comme l’eau, la nourriture céleste et la manne, le berger, la vigne, le Temple. Cf. La Bible TOB, p. 284.61 H. VAN DEN BUSSCHE, Jean, commentaire de l’évangile spirituel, p. 44.62 Cf. L. DEVILLERS, « Jean, un récit en deux temps », La Bible et sa culture, p. 425-426.63 F. -M. BRAUN, Jean le théologien : Les grandes traditions d’Israël et l’accord des écritures selon le quatrième évangile (Études bibliques), p. 3s. ; F. HORTON, « L’Évangile de Jean », BASSIN F., HORTON F., KUEN A., Évangiles et Actes, p. 307, compte pour sa part vingt-sept citations explicites de l’AT.

21

« L’évangéliste semble lire l’Écriture à partir de la tradition juive, ou du moins suivant une méthode semblable à celle des homélies synagogales : l’unité de l’Écriture lui permet d’expliquer ses textes les uns par les autres, en prenant pour clef la lecture la personne de Jésus en qui l’Écriture s’accomplit65.

Par ailleurs, F. -M. Braun66 relève la forte utilisation de la LXX par

l’Évangile de Jean.

III. INTENTION THÉOLOGIQUE DE JEANLe Christ joue une fonction révélatrice de Dieu dans le monde. Cela se

manifeste par le fait incarnationel et le thème de l’envoi.

Un mouvement descendant de Dieu le Père le révèle auprès des siens en la

personne du Fils unique. C’est le Logos préexistant auprès de Père qui vient en la

personne de Jésus de Nazareth et vit parmi les hommes. Les hommes sont placés

devant un choix de vie ou de mort en sa présence.

Un deuxième mouvement horizontal fait du Fils l’envoyé du Père parmi les

hommes.

A. But de l’Évangile de Jean

La fin du prologue en Jn 1.18 : « Personne n’a jamais vu Dieu ; celui qui l’a

annoncé, c’est le Fils unique qui est sur le sein du Père. » Nous relions ce verset à Jn

20.31 où l’intention de ce livre y est résumée : « pour que vous croyiez que Jésus est

le Christ, le Fils de Dieu, et que, par cette foi, vous ayez la vie en son nom. »

Les signes choisis par Jean ont pour but d’amener les destinataires auxquels il

s’adresse à approfondir davantage leur foi au Christ pour une meilleure communion

avec Dieu. La théologie de Jean est jalonnée de signes qui amènent et préparent le

dernier signe capital qui est la résurrection de Jésus.

Le quatrième évangile ne se place pas sur le même plan que les synoptiques.

Son but est de fortifier la foi en Jésus-Christ67. « En réalité, le quatrième évangile vise à explorer en profondeur le

mystère de Jésus envoyé par le Père pour sauver les hommes : ce faisant il ne veut pas supplanter les synoptiques68. »

64 C’est l’idée que développe P. BEAUCHAMP dans son œuvre ; L’un et l’autre Testament : Essai de lecture, t. 1, Paris, Seuil, 1976. Elle en est le centre de gravité.65 É. COTHENET « Le quatrième évangile », La tradition johannique, p. 205.66 F. -M. BRAUN, Jean le théologien : Les grandes traditions d’Israël et l’accord des écritures selon le quatrième évangile. Nous ne pouvons reprendre ici l’étude de l’auteur mais nous invitons le lecteur à lire son premier chapitre : « Lorsque Jean cite la Bible », p. 3-21.67 R. WINLING, La Bonne Nouvelle du salut en Jésus-Christ, p. 305-306.68 R. WINLING, La Bonne Nouvelle du salut en Jésus-Christ, p. 306.

22

Le Fils est envoyé dans le monde afin d’attirer à lui et d’introduire à la

communion du Père et du Fils tous les hommes que le Père lui aura donnés (Jn

12.32). Il y a un double mouvement de descente et de remontée de la part du Fils vers

le Père afin que ce dernier soit révélé aux hommes.

L’intention de Jean est de montrer que Jésus est le Fils de Dieu et qu’il est Dieu

lui-même descendu parmi les hommes. Cette présence du Christ au milieu des

hommes doit les amener à faire un choix. Un clivage cristallisé dans le verset 12.3769

s’opère parmi les « Juifs ».

En présence de Jésus l’homme peut développer un système défensif jusqu’à

durcir sa carapace et en être aveuglé. Jésus veut rendre la vue aux hommes afin

qu’ils aient « la vie en son nom. » Rejeter cette offre de la présence de Jésus, donc de

Dieu, dans sa vie, c’est, selon le quatrième évangile70, se couper de la source de vie71

et se placer sous le jugement.

Jésus est venu révéler le Père mais il se trouve également confronté à leur

hostilité à l’encontre de sa personne, au rejet de sa proposition de vie en abondance.

Le prologue de l’Évangile fait déjà état de l’aveuglement des hommes qui ne

veulent pas voir la lumière laquelle révèlerait leurs œuvres mauvaises (Jn 3.19,20).

Pour B. Rigaux72, le thème central du livre est indubitablement contenu dans Jn

20.30,3173.

B. Les thèmes chez Jean

Les différences entre les thèmes doctrinaux des synoptiques et de l’Évangile

johannique sont significatives selon B. Rigaux74. Le « Règne » ou « Royaume de

69 La NBS, Paris, Villiers-le-Bel, Alliance Biblique Universelle, Société Biblique Française, 2002, p. 1389.70 Mais également pour les synoptiques.71 Se séparer de Dieu, passer à côté de sa volonté, manquer le but, c’est littéralement être dans le péché. La rupture d’alliance d’amour avec Dieu a entraîné l’homme dans un double état de maladie ou de blessure intérieure et une situation de servitude, d’aliénation. Avant d’être des actes (le faire), le péché est un état (l’être), les premiers étant la conséquence du deuxième. Nous y reviendrons lorsqu’il sera question de la solution à cet état. X. LÉON-DUFOUR, DNT, p. 417, donne la définition suivante du péché : « Selon Jean, le péché du monde est la puissance d’hostilité à Dieu qui préexiste à l’homme, le diable homicide de menteur. Jésus enlève ce péché, car il triomphe du Prince de ce monde. L’homme est, à l’origine, dans un état indifférencié qu’on peut appeler ténèbres ; le péché consiste à préférer les ténèbres à l’irruption de la lumière. »72 B. RIGAUX, « Lumière, vérité et vie dans le quatrième évangile », Témoignage de l’évangile de Jean, p. 119.73 Cf. annexe V, p. 79, où la colonne « Passion » est révélatrice à ce sujet.74 B. RIGAUX, « Lumière, vérité et vie dans le quatrième évangile », Témoignage de l’évangile de Jean, p. 122-129. Il y a unanimité parmi les auteurs consultés pour reconnaître que Jn 20.31 est l’objectif de l’Évangile de Jean.

23

Dieu » n’est présent qu’une fois dans Jean (3.5 et 18.36) tandis que ce thème est

central chez ses homologues. C’est le thème de la vie éternelle75 qui le remplace.

Le qualificatif « Fils de l’homme76 » est synonyme d’envoyé de Dieu chez Jean

et utilisé dans un contexte de souffrance dans les autres évangiles.

La thématique de la vie prédomine avec Jean et supplante celle du règne

présente dans les synoptiques.

A. Chouraqui, pour sa part, relève les thèmes suivants : Jésus le Messie est le

logos de la création ou la Parole (Dabar) de la création, il est source de lumière

comme au début de la Genèse, il est le témoin et le chemin qui mène à la foi77 à Dieu

et il est la source de la vérité.

IV. PLAN DE L’ÉVANGILELe nombre de structures proposées concernant l’Évangile de Jean est

considérable78. Nous avons retenu les caractéristiques communes, et qui font l'objet

d'un consensus, qui nous seront nécessaires pour le développement de notre étude.

A. Division classique bipartite entre le Livre des Signes et le Livre de la Gloire

Deux grandes sections sont généralement reconnues. L’une, de 1.19 à 12.50,

nommée traditionnellement le « livre des signes » et la seconde, de 13.1 à 20.31, le

« livre de la gloire ». Un prologue, de 1.1 à 1.18, un épilogue, de 21.1 à 21.23 et une

nouvelle conclusion, de 21.24 à 21.25, introduisent et clôturent ce dyptique.

Le double mouvement spatio-temporel destiné à révéler le Père induit

l’armature du livre. La première partie (1-12) traite de l’envoi dans le monde tandis que

la seconde (13-21) concerne le retour vers le Père79.

75 Ce thème sera abordé dans le troisième chapitre. Disons, d’ores et déjà que, chez Jean, les biens eschatologiques sont disponibles dès maintenant et pas seulement repoussés à la fin des temps.76 Uio.j tou/ avnqrw,pou. Nous relevons onze occurrences dans Jean et soixante-six emplois dans les synoptiques. CKNTG, von Nestlé-Aland, 26., H. BACHMANN, W. A. SLABY (ed.), Auflage Und zum Greek New Testament, 3nd Edition, Berlin, New York, Walter de Gruyter, 1980, p. 142-156.77 A. CHOURAQUI utilise le terme d’ « adhérence » pour signifier la foi dans sa traduction.78 Il nous est impossible, dans le cadre restreint de notre recherche, de citer tous les plans. Nous retenons ce qui fait l’objet d’un consensus parmi les spécialistes. En annexe I, p. 70, nous reprenons quelques plans de Bibles et d’auteurs consultés que nous considérons comme importants pour notre travail. L’annexe III, p. 74, quant à elle, est le découpage schématisé que nous avons retenu. 79 F. VOUGA, « Jean : auteur, destinataires, perspective », La Bible et sa culture, p. 410-411, voit dans ces deux parties l’annonce d’un jugement du monde. Face à l’envoi du Fils pour sauver l’humanité (1ère partie), se manifeste l’incrédulité du monde (2e partie). Pour lui, les charnières des deux volets se trouvent en Jn 12.44-50 qui « résume le résultat de la révélation publique du Fils de

24

La première partie est en rapport avec la vie publique de Jésus, de son

baptême à sa dernière prédication. La deuxième partie est l’heure de la croix : repas

d’adieux avec ses proches (13-17), sa Passion (18-19) et sa résurrection (20.1-29).

L’épilogue (21) semble être une addition ultérieure80 qui traite de questions

d’ecclésiologie.

B. Autres propositions de plan

Certains auteurs repèrent dans le texte un découpage selon les six fêtes

liturgiques mentionnées : 2.13 ; 3.1 ; 6.4 ; 7.2 ; 10.22 ; 11.5581.

A. Chouraqui 82 y voit une « composition ‘symphonique’ » de la même teneur

que celle du Cantique des Cantiques83.

Quant à J. Goettmann84, son plan suit le rythme des sept jours de la Genèse,

les symboles de l’Exode et les fêtes liturgiques juives et chrétiennes.

C. Trames selon le motif de la vie

C’est le plan quadripartite proposé par H. Van Den Bussche que nous retenons

comme architectonique85 de notre étude et qui nous paraît harmoniser les différents

découpages séquentiels86.

Le motif de la vie retiendra particulièrement notre attention par sa haute

fréquence dans les différentes propositions de plans.

Synthèse

Les questions d’ordre diachronique ou historique font débat. Nous n’avons pas

toutes les réponses à certaines « énigmes » johanniques, à tout le moins avons-nous

ébauché quelques pistes de réflexion.

Dieu dans le monde » et en Jn 13.1-3 qui « annonce les discours d’adieu aux disciples, l’élévation sur la croix et le retour vers le Père », p. 411. 80 La quasi majorité des auteurs consultés optent pour une addition ultérieure. Cf. annexe V.81 Ainsi, J. GROSJEAN dans sa « notice », LA Bible, Nouveau Testament (Bibliothèque de la Pléiade), p. 267-269.82 La Bible Chouraqui, p. 2059.83 Selon lui, il faut voir dans cette œuvre le trait du génie littéraire oriental plutôt que de vouloir la conformer à notre logique occidentale issue de la pensée grecque.84 J. GOETTMANN, Saint Jean : Évangile de la nouvelle genèse (Initiations bibliques), Paris, Cerf, 1982, p. 22,23.85 Par architectonique nous entendons une structure technique et dynamique de l’œuvre. 86 Au risque de nous répéter, nous ignorons le plan originel de l’Évangile de Jean, aussi concevons-nous qu’il y ait une part d’arbitraire dans cette option.

25

Cependant, ce sont les aspects d’ordre littéraire qui retiennent notre attention

comme les influences décelables dans l’Évangile de Jean, l’intention théologique et les

propositions de plans.

Précisément, ces deux derniers aspects nous permettent d’amorcer notre

deuxième chapitre.

26

Deuxième chapitre

ACCOMPLISSEMENT DE L’ŒUVRE DU PÈRE

o[te ou=n e;laben to. o;xoj ÎoÐ VIhsou/j ei=pen\tete,lestai(

kai. kli,naj th.n kefalh.n pare,dwken to. pneu/maÅ

Jn 19.30

27

Introduction

Le premier chapitre nous a mis en contact avec les généralités de

l’Évangile de Jean et précisément avec l’intention théologique de Jean.

Ce deuxième chapitre aborde maintenant le prologue, l’analyse exégétique

de Jn 19.30b puis ses implications théologiques comme corollaires.

I. LE PROLOGUENous avons volontairement laissé de côté le prologue87 dans notre premier

chapitre que nous voulons traiter sans en faire une étude complète88. Jean lui assigne

une place particulière au début du livre ; sa reconnaissance détermine l’interprétation

du texte.« Le très beau, mais difficile ‘prologue’ contient toutes les clefs du

quatrième évangile89.

A. Sa structure90

La structure chiastique91 est révélatrice pour son interprétation et, par voie de

conséquence, pour celle de l’Évangile johannique en entier. Nous proposons le

chiasme suivant92 :

87 Nous orthographions « prologue » avec un « p » minuscule malgré l’importance qu’il a prise parmi les commentateurs au fil de l’histoire. C’est un procédé littéraire qui ne peut être personnifié bien qu’il mette en valeur la personne du Christ et sa mission.88 « Le prologue du quatrième évangile est un texte à la fois fascinant et redoutable : fascinant à cause de sa richesse doctrinale, redoutable en raison des difficultés de toutes sortes, textuelles, exégétiques, théologiques, auxquelles se heurte le commentateur. La littérature énorme que cet hymne au Logos a suscitée est un obstacle supplémentaire.» écrit A. FEUILLET, Le prologue du quatrième évangile : Étude de théologie johannique, Paris, Desclée de Brouwer, 1968, p. 15, 16. Cf. également l’étude exégétique et théologique de M. -É. BOISMARD, Le prologue de saint-Jean(LeDiv 11), Paris, Cerf, 1953 ; l’analyse d’É. COTHENET, « Le quatrième évangile », La tradition johannique, p. 138-144 ; l’étude exclusive qu’en fait M. GAUDIO, L’arrière-plan de la représentation du « LOGOS » dans le Prologue de Jean, Mémoire, Strasbourg, Faculté de théologie protestante, 2002 ; J. JEREMIAS, Le message central du Nouveau Testament, Paris, Cerf, 1976, p. 75-93. Nous retiendrons dans cette partie les éléments qui servent notre propos.89 La NBS, p. 1390.90 D’aucuns considèrent que le prologue serait une hymne primitive. Ainsi, M. -É., BOISMARD, op. cit. p. 99s, pense que le prologue est de la même veine que les livres sapientiaux et pour qui les v. 6-8,15 concernant le témoignage de Jean-Baptiste auraient été ajoutés du fait qu’ils scindent l’harmonie de l’hymne. En les enlevant, l’enchaînement serait correct : v. 9 suit le v. 5 tandis que le v. 16 s’enchaînerait au v.14.91 L’Évangile de Jean, comme l’ensemble de la Bible, a une structure réticulaire sous forme de chiasmes. Cf. à ce sujet G. MLAKUZHYIL, The Christocentric Literary Structure of the Fourth Gospel (AnBib 117), Roma, Editrice Pontificio Instituto Biblico, 1987. 92 Nous empruntons ce découpage à CH. L’ÉPLATTENIER, L’évangile de Jean, Genève, Labor et Fides, 1993, p. 16 qui est sensiblement identique à celui de M. -É. BOISMARD, qui fait autorité en la matière, op. cit. p. 107. Nous livrons également la proposition de J. JEREMIAS, op. cit. p. 76 :« - 1-5 : le Verbe de Dieu ;

- 6-8 : le témoin qui le désigne ;

28

« A. La Parole auprès de Dieu, sa divinité éternelle v. 1-2.

B. Tout advint par elle : la création v. 3-5.

C. Le témoignage de Jean v. 6-8.

D. La Parole venue dans le monde : méconnue v. 9-11.

E. L’œuvre régénératrice de la Parole v. 12-13.

D’. La Parole faite chair : glorifiée v. 14.

C’. Le témoignage de Jean v. 15.

B’. Grâce et vérité par Jésus-Christ : nouvelle création v. 16-17.

A’. Le Fils unique dans le sein du Père, sa divinité éternelle v. 18. »

Le climax du chiasme se situe aux v. 12 et 13 (E) :

v. 12 : soi de. e;labon auvto,n( e;dwken auvtoi/j evxousi,an te,kna qeou/ gene,sqai( toi/j

pisteu,ousin eivj to. o;noma auvtou/,

« Mais à tous ceux qui l’ont reçue, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de

Dieu – à ceux qui mettent leur foi en son nom. »

v. 13 : oi] ouvk evx ai`ma,twn ouvde. evk qelh,matoj sarko.j ouvde. evk qelh,matoj avndro.j avllV evk

qeou/ evgennh,qhsanÅ

« Ceux-là sont nés, non pas du sang, ni d’une volonté de chair, ni d’une volonté

d’homme, mais de Dieu. »

Ce centre est l’œuvre du Logos, ou Verbe-incarné, dont la mission est de

donner la vie d’enfants de Dieu aux hommes. En cela, nous suivons M. -E.

Boismard93 et R. Brown :« Servant de préface à l’évangile, le Prologue est un hymne qui

résume la conception johannique du Christ. Un être divin, le Verbe de Dieu 1, 1.14, qui est aussi la lumière 1, 5.9 et le Fils unique de Dieu 1, 14.18, vient en ce monde et se fait chair. Bien que rejeté par les siens, il donne à tous ceux qui l’acceptent le pouvoir de devenir enfants de Dieu, de sorte qu’ils partagent la plénitude de Dieu : ce don, qui reflète l’amour éternel de Dieu, va bien au-delà du don par amour de la Loi dont Moïse fut l’intermédiaire94. »

L’incipit du prologue de Jean, VEn avrch/| h=n o` lo,goj( kai. o` lo,goj h=n pro.j to.n

qeo,n( kai. qeo.j h=n o lo,goj, est identique à l’incipit du livre de la Genèse. Jésus est

identifié au Verbe, o lo,goj, qui est la Parole de Dieu présidant à la création. Jn 1 fait

clairement allusion à Gn 1, donc à la création de Dieu95.

- 9-13 : le destin du Verbe dans le monde ;- 14-18 : la confession de la communauté des croyants. »

93 M. -É. BOISMARD, Le prologue de saint-Jean, p. 107.94 R. E. BROWN, Que sait-on du Nouveau Testament ? p. 381.95 Nous traitons cet aspect dans le troisième chapitre.

29

Le v. 14 marque l’expression souveraine du Verbe créateur venant

s’incarner dans la condition humaine. Le Fils, associé au Père dans l’œuvre de

création, vient révéler le Père (Jn 1.18) et le rendre accessible96.

Sa vie entière, paroles, actes et œuvres, sont l’expression d’une

soumission volontaire et indéfectible à la volonté du Père afin de mener à terme

ses desseins (Jn 4.34). Il est mandaté par le Père (Jn 5.30,36).

B. Sa fonction

A l’instar des synoptiques, le prologue de Jean prépare le lecteur à la suite en

proclamant la foi97. Il stimule l’intérêt pour le livre en même temps qu’il lui en dévoile

les grandes lignes sous forme synthétique et ramassée98. Pour la majorité des

exégètes et théologiens99, le prologue constitue la clé de sol qui permet de lire la

partition musicale qu’est le quatrième évangile. Il joue un rôle d’ouverture de l’évangile

où la christologie johannique est condensée. Le Christ apparaît pour révéler la

relation personnelle que Christ entretient avec le Père et pour montrer le rôle

révélateur du Christ auprès des hommes.

Ce qui est annoncé dans le Prologue et la conclusion de Jn 20.31100 sont

étroitement liés. Jean affirme que Dieu est la source de vie et que le monde a été

créé par Lui. « La clé de lecture, celle qui permet de ne pas être dérouté par les

discours de Jésus en saint Jean, est donc l’acceptation dans la foi que la vie humaine de Jésus n’est dominée ni par la mort, ni par le péché ; elle apparaît comme la vie qui, en lui, sort du Père101. »

96 J. -M. BLANCHARD, « Les discours dans l’Évangile de Jean», La Bible et sa culture, p. 446. 97 L’Évangile de Matthieu fait remonter la généalogie de Jésus à Abraham en passant par David dont il est fils, celui de Marc débute par « Commencement de la bonne nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu. », Luc ne donne pas de généalogie tandis que pour Jean, Jésus est préexistant à la création du monde. 98 Le prologue joue le rôle d’une captatio par des mots-clés. Ainsi, K. HELLER, Avoir la vie en son nom (LiBi 119), Paris, Cerf, 1999, p. 13-14, cite les suivants : « exister, devenir, parole, Dieu, vie, lumière, ténèbres, Père, Fils monogène. » Ces mots suscitaient un intérêt chez les contemporains de Jean car dans l’empire romain les différents mouvements philosophiques, religieux et les religions à mystère étaient connus. Un même vocabulaire ne véhicule pas les mêmes philosophies aussi Jean exprime-t-il sa conception du salut de l’homme face aux philosophies qui prônaient le salut par la connaissance. L’homme antique pense atteindre les dieux par des pratiques ésotériques et religieuses. Il entend rendre les dieux favorables par des oblations et des sacrifices humains. La perspective du prologue est tout autre. Jean rompt avec cette vision du monde et de Dieu. Il affirme d’emblée que Dieu, en personne, vient habiter au milieu des hommes.99 Ainsi, CH. L’ÉPLATTENIER, L’évangile de Jean, p. 34 ; X. LÉON-DUFOUR, Lecture de l’Évangile selon Jean (ParD), t. I, Paris, Seuil, 1988, p. 38 ; H. VAN DEN BUSSCHE, Jean, commentaire de l’évangile spirituel, p. 66.100 Cf. supra p. 21.101 K. HELLER, op. cit. p. 26.

30

Le début du prologue précise que le logos incarné est le médiateur de la

création par lequel Dieu mène à terme sa volonté salvatrice102.« Le Prologue de Jean, c’est la geste de la Parole de Dieu, du Verbe,

envoyé par Dieu sur la terre pour y accomplir son œuvre divinisatrice, et retournant au Père une fois sa mission accomplie103. »

C’est précisément le sens de cet accomplissement que nous voulons

découvrir dans le propos qui suit, notamment au travers de l’analyse

exégétique.

102 Ainsi, O. CULLMANN, Le salut dans l’histoire : L’existence chrétienne selon le Nouveau Testament (Bibliothèque théologique), Neuchâtel, Delachaux et Niestlé, 1966, p. 281.103 M. -É. BOISMARD, Le prologue de saint-Jean, p. 108.

31

II. ANALYSE DE Jn 19.30b

Le premier chapitre nous a immergés dans le contexte diachronique large du

livre qui nous permet maintenant d’appréhender l’analyse de Jn 19.30b :

o[te ou=n e;laben to. o;xoj Îo`Ð VIhsou/j ei=pen\ tete,lestai ..

Tels des cercles concentriques centripètes, nous continuons avec le contexte

littéraire large, le contexte littéraire proche puis le contexte littéraire immédiat pour

atteindre le cœur du verset et, in fine, nous risquer à une interprétation en ayant pris

soin, au préalable, de vérifier l’établissement du texte.

A. Critique textuelle et traduction de Jn 19.30b

Îo`Ð VIhsou/j est absent de deux manuscrits mais le verbe tete,lestai est bien

attesté104. Le verset ne présente aucune difficulté textuelle.

Nous traduisons donc le verset 19.30 ainsi : Quand donc il prit le vinaigre

Jésus dit : c’est achevé105.

B. Contexte littéraire large du quatrième évangile

La structure du livre est déterminée par l’intention théologique de l’auteur. La

narration du livre prépare le lecteur à la mort de Jésus (chap. 19) qui va s’avérer,

paradoxalement, féconde. Tout au long de sa vie terrestre, Jésus rencontre de

l’opposition et de l’hostilité106. Elle va crescendo pour aboutir à la mort de Jésus.

1. Le livre des signes (1.19 à 12.50)

L’heure de Jésus est le moment de sa mort qui est présenté comme le grain de

blé qui doit d’abord mourir pour pouvoir porter beaucoup de fruit107 (12.23-25). A partir

de l’heure ultime de la croix, le compte à rebours108 est commencé dès le verset 2.11 :

« Tel fut le commencement des signes de Jésus.» Les heures sonnent comme des

104 E. NESTLE, K. ALAND, Novum Testamentum Graece, 27e éd. (1re éd., 1898), Stuttgart, Deutsche Bibelgesellschaft, 1995, p. 313.105 La Bible de Jérusalem, Traduite en français sous la direction de L’ÉCOLE BIBLIQUE DE JÉRUSALEM, Paris, Cerf, 1998 ; La Bible, Nouveau Testament (Bibliothèque de la Pléiade), traduisent correctement en ne rajoutant pas le « tout », pa,nta, avant le verbe. L’adjectif indéfini pa,nta n’apparaît qu’au v. 19.28 pour le même verbe, tete,lestai, et c’est par extension que les traducteurs ont traduit le v. 19.30b par « tout est accompli » ou « tout est achevé ». Ainsi, la NBS ; la TOB ; La Bible, présentée par P. DE BEAUMONT, Paris, Fayard-Mame, 1981. Dorénavant, la traduction qui sera adoptée pour tete,lestai est c’est achevé.106 Elle est déjà manifeste et anticipée par le prologue lequel synthétise les évènements qui suivront : Jn 1.5,10-12.107 La métaphore est explicite. La mort de Jésus est féconde, elle n’est pas une fin en soi et annonce, comme l’épi de blé qui résulte du grain, que la vie reprend ses droits.108 Cf. annexe V, p. 77s.

32

marqueurs chronologiques qui vont en s’intensifiant pour, à un moment donné,

signifier que le moment de l’accomplissement est réalisé. L’heure est alors synonyme

de pleine révélation et tout prend sens par rapport à cet accomplissement. L’une des

caractéristiques de l’Évangile de Jean est le thème de « l’heure109 de Jésus ». C’est

le temps chronologique où Jésus accomplit son œuvre de salut. « Tout l’évangile tend vers cette heure unique, l’annonce, en prépare

la venue. Car c’est à cette heure qu’est suspendu le salut du monde110. »

Le livre des signes est jalonné du mot « heure » avec une gradation et une

intensité dramatique. Cette première partie met en évidence le fait que Jésus est

constamment pris à partie. La violence à son encontre, qui sourd déjà depuis 2.13-22,

s’intensifie en 5.18 et 7.1 où les Juifs veulent le tuer mais « son heure n’était pas

encore venue. » (7.30 ; 8.20). Devant son offre de vie en 8.58, les Juifs veulent le

lapider une nouvelle fois pour blasphème. Sa mission, Jésus la reçoit du Père (10.18)

et il a le pouvoir de donner sa vie et de la reprendre, affirmations qui suscite de

nouveau le désir de tuer Jésus (10.31-33).

La résurrection de Lazare est le signe par excellence qui suscite des

conversions. Le Sanhédrin prend la décision irrévocable d’en finir avec lui (11.53). Il

est alors « l’heure » pour Jésus de donner sa vie (12.23,27). La mission de Jésus est

explicite : « Père, glorifie ton nom : Une voix vint donc du ciel : Je l’ai glorifié et je le

glorifierai encore. » (12.28,29).

Jésus indique alors comment il va mourir (12.31-33). C’est l’heure où Jésus va

accomplir son œuvre salvatrice pour l’humanité.

2. Le livre de la gloire (13.1 à 20.31)

La deuxième partie commence à nouveau par le thème de l’heure (13.1) de

Jésus qui est échue et qui va être réitéré en 16.25,32. Puis, de 17.1-5, qui fait écho à

12.28,29, Jésus renouvelle le sens de sa mission : glorifier le Père et manifester son

nom au monde (17.6,26).

109 Pour la traduction des LXX, l’heure a une connotation eschatologique dérivée de l’apocalyptique juive. C’est l’heure où les ennemis du peuple de Dieu sont défaits (LXX, Dn 8.17-19 ; 11.35). L’apocalyptique synoptique reprend cette thématique (Mt 24.36 ; Mc 13.32).110 S. DIÉTRICH (de), L’heure de l’élévation : A l’écoute de saint Jean, Neuchâtel, Delachaux et Niestlé, 1966, p. 12.

33

L’auteur introduit alors le récit de la Passion (chap. 18-19) amené

progressivement111 depuis le prologue. Dans cette section, l’heure de Jésus est

échue.« Le cheminement terrestre de Jésus tend vers le but qui est atteint au

moment de sa mort sur la croix (19,30). C’est vers cette heure qu’afflue tout ce qui a été relaté au sujet de son activité112 ».

Mais, selon L. Caza, Jésus connaît son « heure » ; il a la maîtrise du temps et

de l’événement en parfaite harmonie avec le Père qui dirige l’un et l’autre. Jésus

n’ignore pas son destin à la lumière des Écritures113.

C. Contexte littéraire proche

Deux péricopes, tel un étau, insèrent le verset, lui-même contenu dans une

péricope, en formant un contexte littéraire élargi :

La première, est constituée de 19.23,24 et la deuxième de 19.31-37. Ces deux

passages font explicitement référence à l’accomplissement des Écritures.

D. Contexte littéraire immédiat

Le v. 19.30b est partie intégrante d’une péricope constituée des v. 28,29,30.

Dans ces versets, nous trouvons deux fois l’expression tete,lestai, et une référence

également explicite à l’accomplissement des Écritures, comme la péricope qui

suit.

E. Synthèse contextuelle

Ces trois péricopes (19.23,24 ; 19.28-30 ; 19.31-37) sont donc situées dans

la deuxième partie114 du livre, et plus précisément celle de la Passion (chap. 18-

20) que notre contexte large a amenée progressivement.

Trois marqueurs narratifs, « Le jour de la Préparation », englobent les trois

péricopes aux v. 19.14, 19.31 et 19.42. Par ailleurs, les mentions

d’accomplissement de l’Écriture aux v. 18.9 et 20.9 font également office de

marqueurs.

111 Cette approche progressive s’est faite dans la tension « mort-vie ». La proposition de Jésus d’offre de la vie, voire de vie éternelle, et le rejet de celle-ci avec projet de mort de la part de ses opposants. 112 E. LOHSE, Théologie du Nouveau Testament (Le monde de la Bible), Genève, Labor et Fides, 1987, p. 203.113 L. CAZA, Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? Montréal, Paris, Bellarmin, Cerf, (Recherches, Nouvelle série 24), 1989, p. 434-437.114 Selon le découpage bipartite que nous avons vu au premier chapitre p. 23.

34

L’ensemble se trouve ainsi articulé de manière concentrique et parallèle

autour de la mort de Jésus :

v. 23-24 : A. Les soldats romains et les vêtements de Jésus.

L’accomplissement des Écritures

v. 25-27 : B. La mère de Jésus et les disciples

v. 28-30 : C. Tout est achevé

L’accomplissement des Écritures.

C’est achevé

v. 31-37 : A’. Les soldats romains et le corps de Jésus (non respect).

L’accomplissement des Écritures

v. 38-42 : B’. Les disciples et le corps de Jésus (respect).

F. La péricope de Jn 19.28-30

Nous proposons le chiasme suivant de cette section :

v. 28 : a. Meta. tou/to eivdw.j o VIhsou/j

A. b. o[ti h;dh pa,nta tete,lestai(

c. i[na teleiwqh/| h` grafh,(

B. le,gei\ diyw/Å

v. 29 : B’. skeu/oj e;keito o;xouj mesto,n\ spo,ggon ou=n mesto.n tou/ o;xouj

aa ussw,pw| periqe,ntej prosh,negkan auvtou/ tw/| sto,matiÅ

v. 30 : o[te ou=n e;laben to. o;xoj

a’. Îo`Ð VIhsou/j

A’. b’. ei=pen\ tete,lestai(

c’. kai. kli,naj th.n kefalh.n pare,dwken to. pneu/maÅ

35

Nous le traduisons littéralement ainsi :

v. 28 : a. Après cela, Jésus sachant

A. b. que déjà tout a été accompli,

c. pour que soit accomplie l’Écriture,

B. il dit : « j’ai soif. »

v. 29 : B’. Un vase se trouvait plein de vinaigre ; On fixa donc à une

une éponge pleine de vinaigre et on l’approcha de sa

bouche.

V. 30 Quand donc il prit le vinaigre,

a’. Jésus

A’. b’. dit : « c’est accompli. »

c’. et inclinant la tête, il livra l’esprit.

A-A’ sont en parallèle où Jésus est sujet en a-a’ et le verbe accomplir,

tete,lestai, est en b-b’. Grammaticalement, tete,lestai, est le parfait115 à la voix

passive du verbe tele,w116. Cette forme exprime qu’un acte qui a été accompli dans le

passé a encore des conséquences dans le présent.

En c, l’écrivain utilise un autre verbe, teleiwqh. C’est la forme passive au

subjonctif de l’aoriste117 du verbe teleio,w qui signifie compléter, finir, accomplir,

amener à terme118.

Le climax du chiasme se trouve en B-B’ où Jésus exprime sa soif.

G. Interprétation théologique de Jn 19.30b

Les schémas d’interprétation de la mort de Jésus font l’objet de vifs débats

parmi les théologiens119.

115 Le parfait correspond, grosso modo car il n’a pas d’équivalent en français, au passé composé de la grammaire française. Il indique que l’évènement a eu lieu, à un moment de l’histoire, mais les effets continuent à se déployer dans le temps. Cf. J. W. WENHAM, Initiation au Grec du Nouveau Testament (Les classiques bibliques), 3e éd. (1re éd. 1965), Paris, Beauchesne, 1994, p. 144 ; B. GUY, J. MARCOUX, Grec du Nouveau Testament, [s. l.], Béthel, 1985, p. 219, 220.116 Le verbe tele,w signifie achever, accomplir, finir, mener à terme, réaliser, s’acquitter de, payer une redevance. A. BAILLY, GBDGF, 27e éd. (1re éd. 1894), Paris, Hachette, 2000, p. 1911.117 L’aoriste représente un temps ponctuel qui correspond au passé simple ou passé composé français. Il n’exprime pas de répétition ou de durée dans le temps. Cf. J. W. WENHAM, op. cit. p. 101, 102 ; B. GUY, J. MARCOUX, op. cit., p. 92.118 A. BAILLY, GBDGF, op. cit. p. 1909, met les deux verbes sur le même plan. L’entrée à teleio,wrenvoie à tele,w.119 Relevons cependant des pistes d’études pour un approfondissement du sujet : B. LAURET, « Christologie dogmatique », Initiation à la pratique de la théologie, p. 363-378 ; X. LÉON-DUFOUR, Face à la mort Jésus et Paul (ParD), Paris, Seuil, 1979, p. 175-336 ; B. SESBOÜÉ, Jésus-Christ

36

1. Bref état de la question

Jésus est l’aboutissement, l’éclosion des écrits en germe le concernant dans

l’AT120. Les textes de l’AT étaient une préfiguration du ministère du Christ dans ses

différentes phases. La dynamique sous-jacente à l’AT est résolument tendue vers

l’avènement du Messie qui accomplit le salut en adéquation avec les promesses, la

geste rituelle, typologique et prophétique.

Les nombreuses références au verbe accomplir dans les évangiles prouvent

que l’AT est résolument préfigurateur du ministère terrestre de Jésus voulu par Dieu.

En lui se cristallisent tous les accomplissements. Cependant, de ces

accomplissements, seule la mort de Jésus peut être considérée comme un

achèvement121 selon A. Vanhoye. « Ces notations de détail visent à nous faire comprendre que tout l’AT

était orienté vers la révélation de Jésus ; les accomplissements qui y étaient soulignés n’étaient qu’une lente préparation à la pleine réalisation du dessein de Dieu dans l’existence terrestre de Jésus122.»

Le terme accomplir est à mettre en relation avec les prophéties

vétérotestamentaires concernant l’œuvre de Jésus-Christ. Le NT voit leur réalisation et

leur accomplissement à savoir le méta-récit du salut et l’Écriture n’a de sens qu’en

fonction de Jésus-Christ pour F. Baudraz car ce dernier est la personnification des

promesses de l’AT. Dans la perspective de la parousie, l’essentiel a déjà été accompli

par Jésus-Christ.« L’accomplissement des Ecritures signifie plus que la

correspondance de telle parole de l’A.T. à tel évènement de la vie de Jésus. C’est l’Ecriture dans sa totalité qui témoigne de lui (Jn. 3. 39-47). L’A.T. a été écrit en vue de Jésus (Jn. 5. 46-47 ; 8.56) et de l’Eglise (Rom. 15. 4 ; 16.26 ; 4. 23-24)123 .»

l’unique médiateur : Essai sur la rédemption et le salut. Problématique et relecture doctrinale (CJJC 33), t. I, (1re éd., 1988), Paris, Desclée, 2003, p. 255-392 ; P. WELLS, De la croix à l’Évangile de la croix : La dynamique biblique de la réconciliation (Théologie), Charols, Excelsis, 2007, l’ouvrage entier qui reprend en synthèse les différentes problématiques.120 Nous n’avons pas abordé les prophéties concernant le Messie et qui se sont accomplies dans le NT. Nous invitons le lecteur à consulter G. STÉVENY, Jésus l’envoyé de Dieu : Pourquoi est-il venu ? Dammarie-Lès-Lys, Vie et Santé, 2001, p. 11-152 ; R. SCHROEDER, Le Messie de la Bible :Sa divinité selon les Écritures, Braine-L’Alleud, Éditeurs de littérature biblique, 1974, p. 37-40, qui donne une liste complète des prophéties en rapport avec leur accomplissement dans le NT.121 Ainsi, A. VANHOYE, « Accomplir », VTB, LÉON-DUFOUR X. (dir.), Paris, Cerf, 1964, p. 5-7.122 Ibid.123 F. BAUDRAZ, « Accomplir »,VOb, VON ALLMEN J. -J. (dir.), Neuchâtel-Paris, Delachaux et Niestlé, 1954, p. 9.

37

Il est suivi en cela par G. Stéveny qui ne soutient pas la thèse selon laquelle la

parole de Jésus à la croix, tete,lestai, est un constat que Jésus a rigoureusement

satisfait aux prophéties point par point124.« Gardons-nous d’enfermer Jésus dans une orchestration trop rigide

de la mission sacrée, où la vie spontanée conserve tous ses droits125. »

Par contre, J. Zumstein est partisan de la théorie qui veut que Jésus accomplit

les prophéties successivement et intégralement126. L. Marcel partage cette opinion et

pense que toutes les prophéties, jusque dans le moindre détail, doivent être

accomplies pour que Jésus « s’autorise » à mourir127. Quant à S. Légasse, il affirme

qu’ « Ayant ainsi réalisé jusqu’au bout le programme dicté dans les Écritures, Jésus

peut mourir128. »

2. Notre interprétation

Notre interprétation se restreint aux champs lexicaux et contextuels.

La péricope précédente, 19.23-24, et la suivante, 19.31-37, qui entourent la

péricope 19.28-30, mentionnent clairement une citation de l’Écriture129. Ici, les v.

28-30 ne font référence à aucune citation. L’écrivain parle simplement de

« l’Écriture » comme s’il voulait signifier que ce qui est accompli, ce sont les

Écritures dans leur ensemble et non un passage particulier de l’Écriture.

Le verbe utilisé dans les péricopes précédente et subséquente pour

signifier que les Écritures sont accomplies aux v. 24,36 est plhro,w. Il est

également utilisé au subjonctif de l’aoriste à la forme passive, plhrwqh/|, comme au

v. 28. Plhro,w signifie également, à la voix passive, être plein, être rempli, une

promesse réalisée ou achevée130. Ce verbe est utilisé dans les versets suivants :

124 G. STEVENY, Jésus l’envoyé de Dieu. Pourquoi est-il venu ? p. 138. Pour lui, la réussite parfaite de sa mission est moins dans l’adéquation à une liste que dans la communion avec son Père qui lui a permis d’amener à terme le plan du salut. Cette mission est l’œuvre qui lui a été donnée par le Père en tant qu’envoyé de Dieu et qu’il a achevée (Jn 17.4,5). En ce sens, le c’est achevé de Jésus est un cri de soulagement et de satisfaction. C’est « un mot qui n’a rien d’un rapport administratif, mais qui porte la joie d’un sans faute », p. 138.125 Ibid.126 J. ZUMSTEIN, L’évangile selon saint-Jean [13-21] (Commentaire du Nouveau Testament IVb), Genève, Labor et Fides, 2007, p. 253s. Selon lui, Jean voit dans la mort de Jésus une victoire qui s’intègre harmonieusement au plan de Dieu. Il accomplit la volonté du Père et sa mission est menée à terme en toute souveraineté et maîtrise de son destin. Tete,lestai correspond à l’heure de la fin mais également celle de l’accomplissement de la révélation.127 L. MARCEL, Regard sur Jésus à la lumière de saint Jean, Paris, Fribourg, Saint-Paul, 1993, p. 340.128 S. LÉGASSE, Le procès de Jésus : La passion dans les quatre évangiles (LeDiv), Commentaires 3), Paris, Cerf, 1995, p. 556.129 Le Ps 22.19 pour le v. 24 et Za 12.10 pour le v. 37.130 A. BAILLY, GBDGF, p. 1572.

38

1.38, 13.18, 15.25, 17.12, 18.9 qui concernent également des citations précises

de l’Écriture ou parole de Jésus annonçant sa mort (18.32).

Le parallélisme a-a’ met en évidence Jésus comme auteur de cet

accomplissement ou achèvement, tete,lestai. Jésus n’est pas un condamné passif

à la croix, pas plus qu’il ne constate simplement les évènements. Il a une

conscience claire de sa mission et maîtrise cet instant131. Le Père et le Fils ne font

qu’un et la connaissance qu’a Jésus tire sa substance de celle du Père : 5.19 ;

8.28 ; 17.5. Il a, par ailleurs, le pouvoir de donner sa vie et de la reprendre (10.18).

Il est maître de son destin.

L’auteur utilise donc trois verbes pour signifier un accomplissement ou

achèvement : tele,w, teleio,w et plhro,w. Nous les resituons maintenant dans la

synthèse contextuelle précédente132 :

v. 23-24 : A. Les soldats et les vêtements de Jésus.

L’accomplissement des Écritures, plhro,w

v. 25-27 : B. La mère de Jésus et les disciples

v. 28-30 : C. Tout est achevé, tele,w

L’accomplissement des Écritures, teleio,w

C’est achevé, tele,w

v. 31-37 : A’. Les soldats et le corps de Jésus (non respect).

L’accomplissement des Écritures, plhro,w

v. 38-42 : B’. Les disciples et le corps de Jésus (respect).

Le verbe plhro,w concerne donc la réalisation des Écritures attendu qu’il est

en relation avec cette mention et des citations claires à l’Écriture. Tandis que le

verbe tele,w est en relation avec un évènement réalisé à une certaine heure du

temps chronologique et dont les effets se poursuivent et se déploient encore dans

le temps133. Par ailleurs, le verbe teleio,w,, nous l’avons vu, n’est rattaché à aucune

131 R. E. BROWN, La mort du Messie : Encyclopédie de la passion du Christ, de Gethsémani au tombeau, Paris, Bayard, 2005, p. 1177, soutient cette interprétation : « Mais il est douteux que Jean ait voulu présenter Jésus apprenant quoi que ce soit, car tout ce que le Jésus johannique fait ou dit découle de ce qu’il a vu avec le Père avant son incarnation, et même avant la naissance du monde (5, 19 ; 8, 28 ; 17, 5). »132 Cf. supra p. 33.133 Pour A. VANHOYE, VTB, p. 5-7, les effets de l’œuvre que Jésus accomplit à la croix se font sentir jusqu’à la parousie.

39

citation de l’Écriture comme pour signifier que Jésus ne vient pas réaliser les

Écritures comme une fin en soi mais que les Écritures se sont accomplies, voix

passive, en dépit de l’opposition, parce-que Jésus a mené à terme ce pour quoi il

est envoyé par le Père.

Pour comprendre quelle est cette mission, il faut donc s’orienter vers le

verbe teleio,w, qui est encadré par le verbe tele,w. Ce verbe est utilisé par Jean à

trois reprises :

- v. 4.34 : e,gei auvtoi/j o VIhsou/j\ evmo.n brw/ma, evstin i[na poih,sw to. qe,lhma tou/

pe,myanto,j me kai. teleiw,sw auvtou/ to. e;rgonÅ

« Ma nourriture, c’est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé et d’accomplir

son œuvre. »

- v. 5.36 : ta. ga.r e;rga a] de,dwke,n moi o path.r i[na teleiw,sw auvta,( auvta. ta. e;rga a] poiw/

marturei/ peri. evmou/ o[ti o path,r me avpe,stalkenÅ

« En effet, les œuvres que le Père m’a données à accomplir, ces œuvres mêmes,

que je fais, me rendent témoignage, attestant que le Père m’a envoyé. »

v. 17.4 : evgw, se evdo,xasa evpi. th/j gh/j to. e;rgon teleiw,saj o] de,dwka,j moi i[na poih,sw\

« Moi, je t’ai glorifié sur la terre ; j’ai accompli l’œuvre que tu m’as donnée à

faire. »

Or, le verbe teleio,w,, dans ces trois versets, a pour sujet Jésus et pour

complément « l’œuvre », to, e;rgon (sg.), ou « les œuvres du Père », ta. e;rga (pl.).

Ici, il est employé à l’actif fait remarquer F. Grob134.

Il apparaît clairement que c’est l’œuvre du Père que Jésus a accomplie sur

terre et qu’il proclame à la croix135. Cette œuvre il l’a réalise en respectant la

volonté du Père et en le glorifiant136.

Les verbes teleio,w et tele,w sont synonymes et participent du même champ

sémantique137. Par ailleurs, nous avons relevé que le Livre de la Gloire (13.1-

134 F. GROB, Faire l’œuvre de Dieu : Christologie et éthique dans l’Évangile de Jean (Études d’histoire et de philosophie religieuses 68), Paris, PUF, 1986, p. 96.135 D’après X. LÉON-DUFOUR, Lecture de l’Évangile selon Jean (ParD), t. IV, Paris, Seuil, 1996, p. 151 : « Le verbe *teleioo*, que l’épître aux Hébreux utilise volontiers pour dire qu’une chose est amenée à sa perfection (He 2,10 ; 5,9 ; 7,19…), sert à Jn pour dire l’aboutissement de l’œuvre du Père (4,34 ; 5,36 ; 17,4) ou la perfection de l’unité des croyants (17,23). »136 Le climax de la péricope de Jn 19.28-30 se situe en B-B’ où Jésus dit qu’il a soif, le,gei\ diyw/ÅCe logion n’est pas l’objet de notre mémoire. Cependant, nous pouvons émettre l’hypothèse, sans être catégorique et en laissant le débat ouvert, que la soif de Jésus est téléologique, c’est-à-dire qu’il a hâte de parfaire l’œuvre de son Père, celle pour laquelle il a été mandaté. Nous pouvons penser que son humanité s’est manifestée jusqu’au bout par ce besoin physiologique mais peut-il être désaltéré avec du « vin aigre » ? Par ailleurs, Jésus manifeste son désir de réaliser la volonté de son père et d’accomplir son œuvre prioritairement à la nourriture (Jn 4.34).

40

20.31) commence par l’heure qui est venue pour Jésus de retourner au Père, Pro.

de. th/j e`orth/j tou/ pa,sca eivdw.j o VIhsou/j o[ti h=lqen auvtou/ h` w[ra i[na metabh/| evk tou/

ko,smou tou,tou pro.j to.n pate,ra (13.1a). Cette heure correspond à la Passion du

Christ. Le v. 13b, avgaph,saj tou.j ivdi,ouj tou.j evn tw/| ko,smw| eivj te,loj hvga,phsen auvtou,j,

« Jésus, qui avait aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au

bout » correspond également à ce moment crucial par l’emploi de te,loj qui signifie

achèvement, accomplissement, réalisation, but, fin, terme138. C’est le substantif

dénominatif des deux verbes évoqués. La préposition eivj est directionnelle et

signifie jusqu’à la fin, sans fin. L’amour de Jésus pour les hommes est sans

limites. Le v. 13b est à mettre en rapport avec le v. 19b où Jésus, en mourant à la

croix, a achevé, mené à terme, accompli, en toute lucidité, les œuvres du Père

avec amour.

3. Synthèse

En définitive, nous pensons que ce qu’exprime Jésus à la croix par

tete,lestai n’est pas l’accomplissement d’un programme, établi par le Père, qu’il

aurait suivi point par point pour accomplir les Écritures. Les Écritures se sont

accomplies parce-que Jésus est mort sur la croix139. De même, il ne meure pas

pour accomplir des prophéties mais c’est parce qu’il meure, par amour pour

l’humanité, qu’elles s’accomplissent.

Quelle est la dynamique qui sous-tend cet accomplissement ? Le Fils accomplit

l’œuvre du Père en le révélant puisqu’ils ne font qu’un. Il va donner des preuves

évidentes, au travers des signes, de l’amour du Père (Jn 3.16) parce qu’il est en

parfaite communion avec lui.

137 P. CHANTRAINE, DELG, A-O, (1re éd. 1968), Paris, Klincksieck, 1984, p. 1102. ; X. LÉON-DUFOUR, Lecture de l’Évangile selon Jean, t. IV, p. 151, confirme notre lecture de ces deux verbes : « Par le jeu de ces verbes apparentés où domine l’idée de complétude, Passion du Fils et accomplissement de l’Écriture ne font qu’un. Leur emploi pourrait refléter l’expression sur laquelle culminait l’exorde du second livre de l’évangile : Avant la fête de la Pâque, Jésus, sachant que son heure était venue de passer de ce monde-ci auPère,ayant aimé les siens qui étaient dans le monde,il les aima jusqu’à l’extrême (*eis télos*). »138 A. BAILLY, Le GBDGF, p. 1912, 1913 ; P. CHANTRAINE, op. cit. p. 1101, 1102. Jésus est également le te,loj dans l’Apocalypse, v. 21.6 ; 22.13. Il est partie prenante comme origine et aboutissement de l’histoire humaine. Ce qu’il est, il le fait, son être et son agir se confondent. Le troisième chapitre traitera cet aspect.139 Nous ne voulons pas confondre les causes et les conséquences.

41

III. ACCOMPLIR L’ŒUVRE DU PÈRETete,lestai exprime l’accomplissement de l’œuvre que Le Père a donnée au

Fils. Le verbe donner, di,dwmi, caractérise les relations qui existent entre le Père et le

Fils. Il exprime les dons que Dieu fait aux hommes mais également celui du Fils au

monde (3.16,17) qui équivaut à son envoi.

Le don du Père qui conditionne les autres est celui de la vie (5.20).

Le salut est présent dans le monde du seul fait de la venue du Christ sur la

terre c’est que le Père vit et agit dans le Fils (10.37,38 ; 14.10,11).

A. Les œuvres du Père

Les œuvres de Dieu désignent chez Jean140 l’ensemble du salut que Dieu

accomplit en Jésus-Christ. Le mot e;rgon chez Jean laisse suggérer que les miracles

de Jésus sont attribués à Dieu. Tout ce que Jésus dit, fait et vit est en parfaite

symbiose avec le Père de sorte que ce dernier est reconnu à travers le Fils141.« Jésus est l’agent des affaires divines. Dieu lui a confié la tâche

d’opérer le salut. Cette mission exige une entente parfaite, elle suppose une communion sans faille. Aussi Jésus connaît-il exactement les événements de sa vie par lesquels Dieu exécutera son plan de salut142. »

Ce que Jésus a mené à terme, c’est l’œuvre du Père au bénéfice des hommes.

Cette œuvre transpire par l’emploi des verbes faire ou travailler dans la bouche de

Jésus. Le Père, le Fils et le Saint-Esprit œuvrent ensemble pour la restauration de

l’homme. Le Père envoie le Fils, le Fils envoie le Saint-Esprit. L’initiative est divine, le

Fils la réalise et le Saint-Esprit la continue dans la vie du croyant. Il y a un continuum

qui ne se dément pas au travers des Écritures.

Dès 4.34, Jésus insiste sur le fait qu’il est venu finir l’œuvre du Père ; son

ministère a terminé ce travail (17.4) et sa mort a couronné son ministère comme un

acte créateur. Par ailleurs, Jean parle de l’œuvre créatrice de Jésus dans le contexte

de l’œuvre créatrice de Dieu continuée même durant le sabbat (5.36).

Jésus doit achever une œuvre déjà commencée par son Père. L’utilisation du

singulier, to, e;rgon, suggère ici que l’activité de Jésus est en symbiose avec le projet

divin. Le singulier apparaît en 17.4 où Jésus dit qu’il a accompli l’œuvre que son Père

lui a donné à faire.

140 Les synoptiques ne font pas un tel usage du mot to, e;rgon (sg.) et ta. e;rga (pl.), l’intention théologique est différente. Ce mot se trouve vingt fois dans l’Évangile de Jean pour signifier« l’œuvre » ou « les œuvres du Père ». CKNTG, Col. 683.141 G. H. TWELFTREE, « Signes et prodiges », DTBi, ALEXANDER T. D., ROSNER B. S. (dir.), Charols, Excelsis, 2006, p. 944.142 O. CULLMANN, Le salut dans l’histoire, p. 271.

42

En réalité, l’entière activité de Jésus, dans le quatrième évangile, est présentée

comme lui étant donnée par le Père.

Le projet du Père est de donner la vie éternelle à l’homme à travers la foi en

Jésus-Christ. Par conséquent, l’œuvre du Christ est de conduire l’homme à lui pour lui

donner la vie éternelle. En accomplissant cette œuvre, Jésus agit en parfaite harmonie

avec et en continuité du Père lui-même.

La première partie du discours de 5.19-30 est une introduction théologique au

thème de l’œuvre de Jésus. Il y a une dépendance étroite du Fils à l’égard du Père

dans tout ce qu’il fait.

Donc, l’œuvre que Jésus effectue est celle du Père lorsqu’il restaure la vie ; il a

la même activité eschatologique que le Père en Jn 5.21 : « En effet, tout comme le

Père réveille les morts et les fait vivre, ainsi le Fils fait vivre qui il veut. »

Jn 5.24 ; 5.25 ; 5.28,29 montrent que Jésus exerce là une activité

eschatologique et qu’ainsi l’escaton est arrivé143.

L’œuvre de Jésus, qui est également l’œuvre du Père, est résumée en 17.6 :

VEfane,rwsa, sou to. o;noma, « J’ai manifesté ton nom aux hommes que tu m’as

donnés du milieu du monde.» L’œuvre de Jésus est la révélation du Père aux

hommes. Il l’a réalise en parole, en action et dans sa personne. Cela est confirmé en

Jn 14.9-11 et nous ne pouvons pas faire de distinction entre ces trois aspects de son

œuvre. Tout aboutit à la seule révélation de 14.9, o e`wrakw.j evme. e`w,raken to.n pate,ra\,

« Celui qui m’a vu a vu le Père », et de 17.6. Selon J. Terence Forestell :« L’Évangile tout entier est organisé dans ce dessein : ’pour que vous

croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et que, par cette foi, vous ayez la vie en son nom144. »

Et pour P. Wells :« La sixième parole de Jésus sur la croix est aussi une parole

d’accomplissement : ‘Tout est accompli’ (Jn 19.30). Ces expressions véhiculent l’idée que Jésus avait le sentiment d’avoir accompli avec succès sa mission sur la terre, en parfait accord avec le plan de Dieu. En fait, toute sa vie a été consacrée à faire la volonté de son Père et à ‘accomplir l’œuvre’ (Jn 4.34) qui lui a été confiée (Jn 5.36). La parole d’accomplissement prononcée sur la croix est l’acte ultime qui scelle l’accord entre le Père et le Fils, conclu pour le salut des hommes ‘avant que le monde fût’ (Jn 17.5)145. »

143 J. TERENCE FORESTELL, The Word of the Cross : Salvation as Revelation in the Fourth Gospel, Rome, Biblical Institute Press, 1974, p. 49-56.144 Idem, p. 57. 145 P. WELLS, De la croix à l’Évangile de la croix, p. 46.

43

B. L’œuvre du Fils en conformité avec la volonté du Père

Les œuvres ont une place centrale dans l’Évangile. L’œuvre du Fils est

indissociablement liée à celle du Père et reflète scrupuleusement l’œuvre du Père.

L’affirmation que Jésus accomplit l’œuvre du Père est au cœur de la mission de

Jésus, celle de donner la vie.

A ses détracteurs, dans l’épisode où les Juifs veulent le tuer suite à la guérison

du paralytique, « Jésus leur répondit : Mon Père est à l'œuvre jusqu'à présent, et moi

aussi je suis à l'œuvre » (5.17). Jésus apprend tout du Père et son comportement est

calqué sur celui du Père. Jésus utilise un langage familier de ses opposants, celui de

l’apprentissage d’un métier146 (5.19, 8.28). La volonté du Fils est fusionnelle avec celle

du Père de sorte que l’œuvre de celui-ci est en adéquation avec celle du Père.

En définitive, l’œuvre du salut est accomplie dans le Fils : « Car le Père est ami

du Fils, et il lui montre tout ce que lui-même fait ; il lui montrera des œuvres plus

grandes encore, pour que, vous, vous soyez étonnés » (5.20). Jésus se révèle être

Fils de Dieu, il en est l’égal (5.18), et, à ce titre, peut prétendre être maître de la vie et

de la mort (5.21)147.

Jésus adhère complètement à la volonté du Père. Ses paroles et ses gestes

glorifient Dieu. Son assujettissement, ou obéissance, à la volonté du Père est l’une

des caractéristiques de la présentation johannique de Jésus. La volonté du Père est

présentée dans deux logia parallèles :

6.39 : tou/to de, evstin to. qe,lhma tou/ pe,myanto,j me(

i[na pa/n o] de,dwke,n moi mh. avpole,sw evx auvtou/(

avlla. avnasth,sw auvto.

ÎevnÐ th/| evsca,th| h`me,ra|Å

6.40 : tou/to ga,r evstin to. qe,lhma tou/ patro,j mou(

i[na pa/j o qewrw/n to.n ui`o.n kai. pisteu,wn eivj auvto.n e

; ch| zwh.n aivw,nion( kai. avnasth,sw auvto.n evgw.

ÎevnÐ th/| evsca,th| h`me,ra|Å

La communion entre le Père et le Fils est intime mais on ne peut pas les

confondre : Jn 14.10, 17.21-23148. Selon R. Winling, le Fils a les mêmes prérogatives

et la même puissance que le Père (Jn 5.21) qui ne fait pas de son Fils un « agent

146 F. GROB, Faire l’œuvre de Dieu, p. 118-120, compare Jésus à un apprenti auprès du Père : « Si l’on s’en tient à la parabole de Jn 5/19s., on est placé dans l’ambiance d’un atelier familial où le père artisan initie son fils aux secrets de son art. », p. 119.147 J. -M. BLANCHARD, « Les discours dans l’Évangile de Jean », La Bible et sa culture, p. 439-438.148 R. WINLING, La Bonne Nouvelle du salut en Jésus-Christ, p. 324-325.

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d’exécution149 ». Tout procède du Père et le Fils en a la pleine jouissance en accord

avec celui-ci.

C. L’œuvre du salut

Le moteur de l’œuvre de salut est l’amour de Dieu envers l’humanité (3.16150).

Cet amour est personnifié dans son Fils envoyé pour le manifester concrètement et le

révéler. Jésus ne dissocie pas son être de son agir, les deux sont étroitement corrélés.

Ce qu’il dit, il le fait et ce qu’il fait émane de sa substance151.

L’œuvre du Père est clairement explicitée dans les v. 3.16 et 6.39 et Jésus

accomplit l’œuvre du Père en révélant sa mission de salut aux v. 3.17 ; 5.34 ;12.47.

L’offre de salut proposée par Dieu est universelle et s’adresse à tout le monde

(3.16,17 ; 10.36 ; 17.18), c’est-à-dire à toute personne sans aucune distinction152.

D. L’envoyé révèle le Père

L’envoi153 du Père par le Fils constitue l’un des thèmes fondamentaux de

l’Évangile de Jean. La mission du Fils-envoyé est le salut du monde (3.17). « L’envoyé du Père est venu apporter aux hommes la révélation du

salut et leur ouvrir le chemin d’accès au Père. La révélation est un aspect essentiel de l’œuvre salvifique, car qui connaît le Père et croit en celui qu’il a envoyé, a la vie éternelle (Jn 17, 3)154. »

Jésus est le relais entre Dieu et l’homme155.« En lui se rejoignent les deux lignes – descendante et ascendante –

de Dieu vers l’homme et de l’homme vers Dieu156. »

Pour E. Lohse, le Fils fait connaître le Père au travers de son activité terrestre ;

cela se traduit au travers de ses œuvres, de la volonté du Père qu’il exerce, de l’amour

du Père qu’il manifeste. Il a toute latitude et confiance du Père et c’est précisément ce

qui scandalise les Juifs. « Cette prétention trouve son expression la plus acérée dans les

sentences en ego eimi (c’est moi)157 ».

149 R. WINLING, La Bonne Nouvelle du salut en Jésus-Christ, p. 324.150 Ce verset fait écho aux suivants, contenus dans la première épître johannique : 1 Jn 4.8,16. 151 Tout est cohérent, conflue et coïncide en Jésus. En cela, il imite le Père. Lors de la création (Gn 1), « Dieu dit» pour créer. La parole de Jésus est également créatrice.152 Cependant, chez Jean, le « monde » a le plus fréquemment une résonnance péjorative. Sont entendus par ce terme les personnes qui rejettent délibérément l’offre de salut et vont jusqu’à persécuter Jésus et ses disciples. 153 La mention de l’envoi du Fils par le Père, avposte,llw,, pe,mpw, se trouve plus de quarante fois dans l’évangile. CKNTG, Col. 205, 206, 1494, 1495.154 R. WINLING, op. cit. p. 323.155 A. JAUBERT, Approches de l’Évangile de Jean (ParD), Paris, Seuil, 1976, p. 166.156 Ibid.157 E. LOHSE, Théologie du Nouveau Testament, p. 202.

45

Le but de cette mission est d’accomplir les œuvres ou l’œuvre de Dieu.

Les hommes entrent en contact avec le Père par l’intermédiaire de Jésus car lui

seul a vu le Père (6.46). Cependant, c’est le Père qui initie la mission de Jésus.

Jn 10.36 affirme « que le Père a consacré et envoyé dans le monde158 » son Fils. Ce

dernier a été mis à part par le Père préalablement à son envoi. Cela signifie que Jésus

est l’exécutant du dessein salvifique de Dieu. Jésus n’accomplit pas seulement notre

salut, sa personne est déjà présence salvifique.

L’envoyé d’un roi est son représentant159. Il lui est totalement dévoué de sorte

qu’il incarne la mission dont il est chargé. « Il mérite d’autant mieux les marques de respect et de déférence qui

sont dues à son maître qu’il entre plus complètement dans ses intentions160. »

Jésus s’en réfère constamment au Père qui l’a envoyé. Jésus à son tour envoie

le Saint-Esprit comme envoyé161.

1. Le Fils révèle le Père

En révélant le Père, lors de son ministère terrestre, Jésus montre les premières

manifestations d’une nouvelle économie du salut.

La symbiose entre le Père et le Fils est d’une telle intensité qu’ils partagent le

même nom, c’est ce que Jésus est venu révéler aux hommes parce que le nom dans

la mentalité sémitique caractérise la personne162.

158 o]n o path.r h`gi,asen kai. avpe,steilen eivj to.n ko,smon umei/j le,gete o[ti blasfhmei/j( o[ti ei=pon\ uio.j tou/ qeou/ eivmiÈ159 Dans le Proche-Orient ancien, l’envoyé était représentant de son souverain. Il était ambassadeur du roi sans se confondre toutefois avec lui. Par délégation, il reçoit les honneurs dus à son mandant ainsi que son autorité. La fidélité, l’obéissance et la soumission sont les qualités requises pour l’envoyé qui est médiateur entre deux souverains. Le refus du mandataire implique le refus du mandant, de même qu’infliger un camouflet à l’envoyé, c’est, par procuration, l’infliger au maître. L’ordre de mission du souverain est le mandat qui rend l’ambassadeur plénipotentiaire. Sans cela, sa mission n’a pas de sens. Cf. M. CARREZ, « Envoyer », VOb, p. 89-90 ; G. STÉVENY, A la découverte du Christ, p. 147-148 ; G. STÉVENY, Jésus l’envoyé de Dieu, p. 55 ; J. ZUMSTEIN, « L’Évangile selon Jean », Introduction au Nouveau Testament, p. 365. 160 A. FEUILLET, Le Mystère de l’amour divin dans la théologie johannique, p. 26.161 M. CARREZ, art. cit. p. 89-90.162 A. JAUBERT, Approches de l’Évangile de Jean, p. 166.

46

La finale du Prologue montre que seul le Fils unique, du fait de son intimité et

de sa coexistence, peut faire connaître163 le Père. Le climax du prologue est une claire

invitation à devenir enfants de Dieu164 (1.12) par « communion de l’homme à la vie

divine et de sa filiation adoptive165. »

2. Le Fils témoigne du Père

Le but principal de Jean est de montrer que Jésus, comme envoyé du Père, est

venu le révéler et amener les hommes à croire que Jésus est bien son Fils venu les

sauver et qu’ils aient la vie en son nom (20.31) ; L’envoyé témoigne166 du Père. Pour

ce faire, il introduit une série de témoins censés favoriser ce processus.

Les versets 1.6-8 et 21.24 forment une inclusion où le témoignage167 traverse

en longueur et en largeur l’Évangile de Jean.

Jean-Baptiste est présenté comme le premier d’une chaîne de témoins ; il en

draine d’autres168 dans son sillage. La fonction de Jean-Baptiste est de « rendre

témoignage à la lumière, afin que tous croient par lui. » (1.7). Sa mission est de

préparer le ministère de Jésus en proposant un baptême de conversion à Israël. Il

présente Jésus comme lui étant antérieur (1.15). Jésus montre un acte d’abaissement

en se faisant baptiser comme un pécheur et, ce faisant, se rend solidaire de tous les

163 Jn 1.18 : Qeo.n ouvdei.j e`w,raken pw,pote\ monogenh.j qeo.j o` w'n eivj to.n ko,lpon tou/ patro.j evkei/noj evxhgh,satoÅ Le verbe evxhge,omai signifie interpréter, expliquer, décrire, faire connaître quelque-chose ou quelqu’un, conduire pas à pas ou jusqu’au terme. A. BAILLY, GBDGF, p. 706.164 Pour A. FEUILLET., Le Mystère de l’amour divin dans la théologie johannique, p. 20, l’homme devient enfant de Dieu par conversion morale ou imitation de la générosité de Dieu dans les synoptiques. 165 Ibid.166 Dans les synoptiques cette thématique est peu mise en avant. Dans l’AT, le témoin assiste à des faits (Es 8.2 ; Jr 32.10, 12,25 ; Rt 4.9s) de manière oculaire ou auriculaire qu’il peut rapporter lors d’un procès (Ex 20.16 ; 23.1 ; Lv 5.1 ; Nb 35.30 ; Dt 17.6 ; 1 R 21.13 ; Ps 35.11 ; Jb 16.8) en tant qu’accusateur ou défenseur. Seuls les hommes peuvent être témoins, par voie de conséquence, cela exclut les femmes, les mineurs et les esclaves. Au moins deux témoins sont indispensables pour une accusation capitale (Nb 35.30 ; Dt 17.6 ; 1 R 21.10-13) et, si l’accusation est fausse, le témoin subit les conséquences censées punir l’accusé (Dt 19.18,19 ; Dn 13.62). En tout état de cause, le témoin jette la première pierre en cas de lapidation (Dt 17.7). Dieu lui-même peut être accusateur (1 S 12.5 ; Jr 6.10, 22.23, 42.5, Ml 2.14) ou défenseur (Es 43.9 ; Ml 2.12). Les victimes devaient rechercher des témoins pour corroborer leurs plaintes auprès du juge. Dans ces conditions, il est évident que le témoin prenait partie pour le plaignant. Nous nous restreignons ici au contexte biblique. Pour l’arrière-plan antique, nous renvoyons à É. COTHENET, La chaîne des témoins dans l’évangile de Jean : De Jean-Baptiste au disciple bien-aimé (LiBi), Paris, Cerf, 2005, p. 12-16.167 Idem, p. 8, établit un tableau comparatif que nous reproduisons :

Mt Mc Lc Jn Actes 1 Jn ApocMarturein 1 1 33 11 10 4Marturia 3 1 14 1 7 9Marturion 3 3 3 2 1Martus 2 1 2 5

168 Jn 1.36 : « Les deux disciples entendirent ces paroles et suivirent Jésus. »

47

pécheurs afin de leur ôter leurs péchés (1.29). Le témoignage de Jean-Baptiste est

primordial et prépare les autres en ce qu’il annonce le Saint-Esprit en réponse à

l’abaissement du Fils. Ce mouvement du Saint-Esprit, nous le verrons plus loin, est

préfigurateur de l’élévation de Jésus et de vie nouvelle pour l’homme.

Jean est témoin oculaire ; il a vu l’Esprit sur Jésus et cela est fondamental pour

la compréhension de ce qui suivra.

Jean baptise d’eau (v. 25-26) et annonce que Jésus baptisera du Saint-Esprit.

Ce baptême est préfigurateur d’une vie nouvelle, d’une nouvelle créature.« Qu’il soit plutôt le précurseur à la manière des synoptiques ou, dans

l’éclairage johannique, avant tout le témoin : d’une manière ou d’une autre, l’histoire du salut lui donne pour tâche de venir en premier169. »

Le prologue parle du logos préexistant, associé à la création, et y associe

immédiatement Jean-Baptiste qui, chronologiquement, témoigne avant Jésus-Christ.

3. Le Fils est médiateur

Comme médiateur entre Dieu170 et les hommes, Jésus accomplit une œuvre

de réconciliation entre Dieu par son intime communion avec son Père.

Au titre de médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus peut prétendre être le

sauveur de l’homme.

Par son incarnation171, le Christ accomplit une mission terrestre avant que

celle-ci ne soit céleste. Le prologue (1.1-18) initie un mouvement de descente vers

l’homme tandis que le v. 20.17 signifie un mouvement de retour au Père. En

s’adressant à Marie, Jésus, dans ce passage, utilise dit qu’il « n’est pas encore monté

vers le Père. », a.r avnabe,bhka pro.j to.n pate,ra\. Ce faisant, il s’assimile au Père, il est

sur un pied d’égalité. Mais, comme médiateur humain et divin, il va s’assimiler à

ses « frères » en disant qu’il monte « vers celui qui est mon Père et votre Père,

mon Dieu et votre Dieu. », avnabai,nw pro.j to.n pate,ra mou kai. pate,ra umw/n kai. qeo,n

mou kai. qeo.n u`mw/nÅ Jésus accomplit le plan d’adoption172 en disant qu’ils ont le

même Père. C’est son œuvre de médiation terrestre qui a permis cela, œuvre qu’il

veut continuer auprès du Père en préparant une place pour les hommes (14.3,4).

169 O. CULLMANN, Le salut dans l’histoire, p. 279.170 C’est à dessein que nous inscrivons Dieu en premier car l’acte réconciliateur est à l’initiative de Dieu et non de l’homme bien que l’acte de séparation soit le fait de ce dernier ; c’est un acte gracieux.171 Nous ne traitons pas des deux natures du Christ dans son incarnation. Sur la question, cf. P. WELLS, De la croix à l’Évangile de la croix, p. 186s.172 C’est la raison pour laquelle nous avons assigné un rôle d’ouverture à ce chapitre au prologue. Son climax se situe au v. 12 et 13 : « mais à tous ceux qui l’ont reçue, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu – à ceux qui mettent leur foi en son nom. Ceux-là sont nés, non pas du sang, ni d’une volonté d’homme, mais de Dieu. »

48

A la question de Thomas qui ignore le rôle de médiateur de Jésus, ce dernier lui

répond qu’il est « le chemin, la vérité et la vie. Personne ne vient au Père sinon

par moi. » (14.6). Ces qualificatifs attachés au médiateur lui permettent de révéler

le Père (14.9,10).

C’est ce même Thomas, au v. 20.24, qui se montre sceptique. Sa

confession au v. 20.28 est paradigmatique de celle qui permet à l’homme

d’accéder à cette réconciliation opérée par la médiation terrestre et céleste de

Jésus.

L’invitation de Jésus qui s’adresse aux hommes, par Thomas qui en est le

type, est claire : « deviens un homme de foi ! » (20.27). Le v. 20.31, dont nous

avons vu qu’il est le but de l’Évangile johannique, réitère le choix que doit opérer

l’homme pour accéder à un nouveau commencement avec le Père.

4. Le Fils donne des signes de la vie173

Pour Jean, les miracles174, duna,meij, de Jésus sont des signes, shmei/a, ou des

œuvres, e;rga. Les signes175 ont pour effets de le manifester comme le messie aux

yeux du peuple juif tandis que les œuvres renvoient à l’envoyé de Dieu qui effectue les

œuvres du Père. Par Jésus, Dieu est révélé et se révèle lui-même de façon

eschatologique. Les signes sont, pour les Juifs176, une garantie, une attestation de foi

que l’envoyé est bien chargé de mission et que Jésus, en l’occurrence, est bien le

Messie177. « Chaque évènement, chaque miracle a valeur de signe. Mais les

interlocuteurs de Jésus ne voient que la matière du signe, non la réalité signifiée. D’où ces quiproquos constants, forme johannique du secret messianique. Jésus se déclare ouvertement, mais seule la foi saisit le sens de ses paroles178. »

173 Dans le cadre restreint de notre travail, il n’est pas possible de traiter les signes. Nous les mentionnons ci-après sans en développer le sens :- Le signe de Cana (2.1-12) ;- La guérison de l’officier royal (4.46-54) ;- La guérison du paralytique (5.1-18) ;- La multiplication des pains (6.1-15) ;- La marche sur les eaux (6.16-21) ;- La guérison de l’aveugle-né (9.1-41) ;- La résurrection de Lazare (11.1-54) ;- La pêche miraculeuse (21.2-8).174 Dans les Synoptiques les miracles ne sont pas nommés shmei/a mais duna,meij, actes de puissance.175 L’identité d’une personne, notamment d’un envoyé de Dieu, est caractérisée par un signe, ta ,que la LXX a rendu en grec par shmei/on. Cf. Ex. 3.12, 4.8 ; Jg 6.17 ; 1 S 10.1-7.176 Cf. 1 Co 1.22. Les Juifs réclament des signes, shmei/a.177 « L’univers des Hébreux est jalonné de ‘signes’, otot, qui sont autant d’attestations de la volonté de IHVH. », A. CHOURAQUI, La Bible Chouraqui, p. 2060.178 S. DIÉTRICH (de), L’heure de l’élévation, p. 11.

49

Les œuvres et les signes ne peuvent être dissociés et ne sont pas une fin en

soi. Ils sont annonciateurs d’événements. Les différents discours et signes de Jésus

ne sont jamais neutres. Ils opèrent un tri entre ceux qui résistent à Dieu et

s’endurcissent davantage et entre ceux qui voient en lui le Fils de Dieu. En

définitive, les incrédules prennent leurs responsabilités face aux signes qui leurs

sont donnés pour susciter leur foi.« Le quatrième Evangile précise que chacune des guérisons

rapportées accomplit le dessein salutaire de Dieu179. »

5. Synthèse

La révélation biblique contenue dans le quatrième évangile insiste sur un

accord180 entre le Père et le Fils qui accepte volontairement, et en parfaite adéquation

avec la volonté de son mandant, d’accomplir la mission de sauvetage de l’humanité.

En poussant le cri sur la croix, tete,lestai, Jésus achève parfaitement l’œuvre

du Père qui est une œuvre de salut mue par l’amour. Une économie s’achève et une

autre est inaugurée par Jésus ; une histoire est clôturée mais une autre s’ouvre.« En conséquence, son ‘C’est fini’ renvoie à la fois à l’œuvre que le

Père lui a confiée et à l’accomplissement de l’Écriture. En tant qu’’agneau de Dieu’, il a enlevé le péché du monde, accomplissant ainsi le rôle de l’agneau pascal dans la théologie de l’Ancien Testament181. »

Paradoxalement, il apparaît que cet accomplissement est inachevé, bien qu’il

soit déjà effectif, et que la mission de Jésus se poursuit au-delà de la croix ; dans sa

mort, il y a le germe pour davantage de vie.

Le troisième chapitre devrait pouvoir nous ouvrir d’autres perspectives.

179 O. CULLMANN, Le salut dans l’histoire, p. 272.180 Des textes comme Ps 40.7s ; He 9s. ; Ga 4.4 ; Jn 17.4 ; 1 Jn 4.9,10 semblent suggérer que le Fils est soutenu par le Père dans cette mission de salut. 181 R. E. BROWN, La mort du Messie, p. 1186.

50

Troisième chapitre

L’ACCOMPLISSEMENT DU SALUT COMME NOUVELLE CRÉATION

Kai. ei=pen o` kaqh,menoj evpi. tw/| qro,nw|\ ivdou. kaina. poiw/ pa,nta kai. le,gei\ gra,yon( o[ti ou-toi oi` lo,goi pistoi. kai. avlhqinoi,

eivsinÅ 6

kai. ei=pe,n moi\ ge,gonanÅevgw, ÎeivmiÐ to. a;lfa

kai.to. w=( h avrch. kai. to. te,lojÅ

Ap 21.5,6

51

Introduction

Jusque là, nous avons posé des jalons et il nous faut maintenant relever

quelles sont les conséquences théologiques de ce verset à partir des matériaux

prélevés.

Le livre entier de Jean est imprégné de l'AT. En fonction de ce qu'il a dit et

de ce qu'il a fait nous pensons que Jésus réalise quelque-chose de plus que

accomplissement des Écritures. Il propose à l'homme de devenir enfant de Dieu

mais davantage, une nouvelle création.

Cette nouvelle création passe nécessairement par sa mort et par sa

résurrection qui est la garantie pour l’homme d’en être au bénéfice.

Lors de son accomplissement terrestre Jésus est homme parmi les

hommes et en processus complet d’abaissement182. Nous analysons maintenant

le processus inverse d’élévation que nous avons entrevu au précédent chapitre.

La vie est fragile, elle est soumise à une fin aussi Jésus est-il celui qui se

propose à l’homme de la renouveler pour qu’elle ne soit plus soumise à la

corruption.

Dans le prologue, Jésus est co-créateur, préexistant à la création. Comme

créateur, il peut prétendre restaurer l’être humain, le ressusciter. Jésus présente la

vie nouvelle comme vie éternelle déjà acquise en sa présence. Il est la Vie

personnifiée et, à cet égard, il l’offre. A différents endroits, il se présente comme la vie :

Jn 11.25 ; 14.6 ; 6.35-38,51. Il garantit la résurrection au dernier jour en Jn 6.54.

La Passion s’intègre dans le dessein de Dieu et dans la perspective de

l’accomplissement des Écritures. La Passion peut être alors comprise comme une

œuvre d’amour à l’initiative du Père (3.16 ; 15.9) et réalisée par le Fils (10.11-15 ;

13.1). A la croix est révélé l’amour suprême de Dieu pour l’humanité aussi

pouvons-nous comprendre, dans cette optique, l’attitude de Jésus :« Cela explique aussi deux traits significatifs du comportement de

Jésus pendant sa passion : son entière liberté et sa parfaite conscience. Jésus accomplit l’œuvre du salut, non pas comme une victime impuissante et résignée, mais dans l’attitude souveraine de celui qui connaît le sens des événements et les accepte librement183. »

182 Nous l’avons vu, cet abaissement va jusqu’à se dévêtir et laver les pieds de ses disciples, tâche dévolue aux serviteurs ou aux esclaves. L’acte kénotique est l’une des thématiques pauliniennes, aussi renvoyons-nous à la lecture de CH. RÉSON, Esquisse d’une théologie de la kénose : Étude systématique de Philippiens 2.6-11, Mémoire, Collonges-sous-Salève, Faculté adventiste de théologie, 2007.183 A. VANHOYE, et al., La Passion selon les quatre Évangiles (Lire la Bible 55), Paris, Cerf, 1981, p. 76.

52

I. LA PÂQUELa Pâque se comprend au travers de la vie terrestre de Jésus. L’Écriture se lit

dans son enseignement.

L’œuvre de réconciliation accomplie par le Christ est gratuite pour l’homme

mais a coûté cher à Jésus. Elle résulte d’un combat victorieux contre le Prince de ce

monde qui le fait passer par la croix.

La Pâque est un retour au Père qui garantit notre retour vers une nouvelle

création. En cela, Jésus va traverser et vaincre la mort vers la vie. La Pâque devient

un passage vers une nouvelle économie, vers de nouveaux horizons au-delà de la

mort.

Comme envoyé et médiateur du Père, il se donne aux hommes puis, comme

assimilé à l’homme, dans son incarnation, il se donne à Dieu. Lorsqu’il retourne à

Dieu, il entraîne dans son sillage toute l’humanité, c’est ce passage vers le Père qui

est la Pâque.

A. Origines de la Pâque184

Son origine vient probablement du temps où les Israélites étaient nomades. Il

pourrait s’agir d’un rite de transhumance au cours duquel le sang d’une bête était

censé protéger hommes et animaux des dangers inhérents à leur activité.

Par la suite, ce rite a été assimilé à la délivrance de l’esclave des Hébreux par

le Seigneur. Tandis que les premiers-nés des demeures égyptiennes sont frappés de

mort185 (Ex 12.29), le Seigneur épargne les premiers-nés des Israélites qui ont

badigeonné les linteaux de leurs maisons avec le sang d’un mouton ou d’une chèvre

(Ex 12.3). Le sang est le signe qui préserve ceux qui ont choisi de se mettre sous la

protection du Seigneur (Ex 12.13).

B. Signification de la Pâque

Il semblerait que la Pâque juive soit supplantée par Jésus qui devient l’antitype

de la Pâque. Les versets de Jn 13.1 ; 2.13 ; 6.4 ; 11.55 laissent le suggérer. Cela est

moins explicite en 8.14 ; 8.21.

A Pâque, Le Père est révélé par le Fils et l’humanité est mise en présence

de Dieu tout comme lors de l’Exode où Dieu pose un acte sauveur en se révélant

à Moïse.

184 Cf. X. LÉON-DUFOUR, DNT, p. 405-406 ; R. MARTIN-ACHARD, Essai biblique sur les fêtes en Israël, Paris, Labor et Fides, 1974, p. 31-32.185 Les instructions relatives à la célébration de la première Pâque sont contenues dans Ex 12.1-27.

53

Par Jésus-Christ, Dieu renouvelle sa solidarité avec l’humanité et la

résurrection du Fils est prémices de la résurrection de l’homme. Dieu a choisi de

créer des êtres vivants qui répondent à son alliance aussi la mort ne peut-elle

rompre cet engagement. Dieu s’y oppose.

A l’instar de la Pâque durant l’exode du peuple hébreu, le sang de Jésus

joue le même office lors de sa mort. Jésus est présenté par Jean-Baptiste comme

« l’agneau186, qui enlève le péché du monde. » (Jn 1.29,36).

Sa mission continue après sa mort. Ce n’est pas terminé ; l’accomplissement

continue ses effets dans le futur et dans le présent. Dans cet accomplissement il y a le

germe pour davantage de vie.

II. LA RÉSURRECTIONNous avons signalé que la fin de la première partie du livre de Jean se

terminait par le fait que Jésus est conscient que son heure est arrivée. Il est significatif

que dans cette partie, qui comporte une offre de vie à qui met sa foi en Jésus, le

narrateur fait dire à Jésus au v. 12.24 : « Amen, Amen, je vous le dis, si le grain de blé

ne tombe en terre et ne meurt, il demeure seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de

fruit187. » Cette métaphore tirée du vocabulaire agricole est une offre de régénération

ou de recréation. Le v. 25 corrobore cette invitation et les v. 32 et 50 sont clairement

une invitation à la vie éternelle.

186 L’Apocalypse présente deux cantiques de victoire qui évoquent le sang du Christ sur arrière-fond vétérotestamentaire : Ap 5.8-9 ; 14.3,4.187 Ce verset est à rapprocher avec le v. 8.58 du même évangile où Jésus affirme explicitement à ses opposants, qui en veulent à sa vie, que Dieu et lui ne font qu’un seul Dieu. Dans un contexte d’hostilité, Jésus stigmatise l’intention d’homicide et de rejet de la vérité de ses auditeurs. Puisqu’ils se réfèrent à Abraham, celui qui a cru à la Promesse, Jésus leur dit qu’ils ont un comportement opposé. Jésus déclare qu’il était déjà à l’œuvre lors de la sortie d’Égypte (Ex 20.2). Cette œuvre de libération de l’esclavage – d’un autre ordre, spirituel et moral celui-là – il veut la continuer dans le cœur de ses contemporains en leur offrant un nouveau départ dans leur vie. Aussi bien les v. 8.58 que 12.24 contiennent un redoublement du mot amen, avmh.n avmh.n le,gw umi/n.Le mot avmh.n signifie « ‘se montrer ferme, stable’. Il signifie non seulement un souhait : ‘Ainsi-soit-il’ mais une affirmation : ‘C’est vrai ! C’est ferme ! » selon X. LÉON-DUFOUR, DNT, p. 110. Le redoublement signifie une vérité absolue. Nulle part ailleurs que ces deux versets, dans le NT, l’on ne retrouve cette répétition exclusive du mot avmh.n propre à l’Évangile de Jean (vingt-cinq fois). Les synoptiques mentionnent plusieurs versets avec un seul avmh.n seulement (quarante-sept fois). Il y a une insistance, une certitude de Jésus. Bien plus, ses paroles sont l’assentiment des paroles de son Père avec lequel il est en parfaite adéquation. Non seulement il dit l’amen mais il est l’Amen(Ap 3.14). Dans le livre de l’Apocalypse, Jésus est associé à l’acte créateur, comme dans le prologue du quatrième évangile. Si l’auteur de cet évangile prend un soin tout particulier à mettre l’emphase sur le mot avmh.n c’est que cette déclaration revêt une solennité et une importance capitale : Jésus déclare être auprès du Père de toute éternité et qu’il est également créateur.

54

L’œuvre de rédemption accomplie par Jésus-Christ l’a conduit à la croix mais

sa mort s’est soldée par la victoire sur les forces du mal et, s’est scellée par la

résurrection.

La résurrection du Christ n’est pas sans lendemain. Sa mort est en faveur de

l’homme et sa résurrection inaugure la résurrection de l’homme en vertu de la

communion étroite du Père et du Fils. L’homme, bénéficiaire de la médiation du Christ,

participe à la victoire du Christ sur la mort. Il est hic et nunc réintégré à la vie mais

appelé à une vie nouvelle. « La résurrection du Crucifié par Dieu établit que Jésus a été mis à

mort par fidélité aux promesses de Dieu et donc qu’il accomplit les Ecritures par son obéissance en leur donnant une nouvelle cohérence, un corps renouvelé. Le corps de la lettre se réalise d’abord en Jésus, premier-né de la nouvelle création, puis en autrui dans l’acte par lequel chacun répond à l’interpellation divine, dans l’Esprit188. »

Pour Jean, la vie éternelle est déjà présente, hic et nunc. Le Christ offre la vie

abondante au croyant, sur la terre déjà, et cette offre se poursuit en dépit de la mort,

au-delà d’elle (11.25,26).

Si la mort est déjà active, la résurrection est déjà opérante chez le croyant

pourvu qu’il accepte cette invitation qui lui est faite par le Christ de venir féconder sa

vie afin qu’elle se perpétue en vie éternelle.

Pour B. Sesbouë :« La résurrection est un acte de salut. Elle apporte du nouveau. Elle

achève ce que la croix accomplissait en transformant le Christ lui-même189. »

A la résurrection, Jésus accomplit sa victoire sur la mort. Cette dernière est

vaincue190 : « Le tombeau vide est le signe donné du salut qui est arrivé au corps

du Christ, ‘corps parlant’ et parole faite chair. Ce corps n’est pas voué à la décomposition du tombeau. Or ce signe est pour nous : ce que fut la résurrection de Jésus indique la loi de notre propre résurrection. Le tombeau vide dit à sa manière que le salut intéresse tout l’homme191. »

La résurrection de Jésus est paradigmatique de la résurrection de l’homme.

Elle est un acte192 de salut eschatologique. B. Sesboüe parle de « Parabole en acte

188 B. LAURET, « Christologie dogmatique », Initiation à la pratique de la théologie, p. 306.189 B. SESBOÜÉ, Jésus-Christ l’unique médiateur, p. 236-237.190 Comme le « Prince de ce monde » l’a été à la croix.191 B. SESBOÜÉ, op. cit. p. 241.192 La résurrection n’est pas un évènement historique. Il n’y avait pas de témoins oculaires à la résurrection de Jésus. Les chrétiens se basent sur les expériences des disciples de Jésus qui, par la foi et après coup, ont reconnu Jésus et en sont devenus les témoins (Jn 20.26-29).

55

de notre propre résurrection, elle nous dit en même temps qu’elle accomplit notre

avenir, celui au-delà duquel il n’y a plus rien193. » Jésus affirme en Jn 11.25 qu’il est

« la résurrection et la vie » et, à ce titre, il est médiateur jusqu’à la résurrection des

hommes et pas seulement durant son ministère terrestre. En ce sens, le salut est

également eschatologique ; ce qu’il a commencé, il l’achève. C’est parce qu’il s’est fait

homme et qu’il a vécu une existence humaine jusqu’à sa mort, qu’il peut être le

principe de la nouvelle création.

« Parole et Esprit de Dieu planent sur le corps mort de Jésus comme au-dessus du chaos primitif qui précède la création du monde. La résurrection de Jésus apparaît alors comme recréation d’un homme nouveau194. »

La résurrection est déjà active chez l’homme de même que la mort fait son

œuvre. Le croyant doit s’inscrire dans une démarche d’espérance pour voir au-delà de

la réalité ; c’est ainsi qu’il peut inverser le cours des choses.

Comme le dit R. Meyer :« Par la foi, le chrétien entre dans la dimension eschatologique,

définitive et dernière de la révélation divine. Il est appelé à prendre conscience de sa propre résurrection. Cette résurrection n’est pas seulement un événement passé, elle touche le croyant de très près parce que, par la foi, le chrétien entre dans la dimension eschatologique. De là découle une situation nouvelle qui appelle le croyant à une rencontre personnelle avec le Christ195. »

Jésus exprime au Père son désir de retourner auprès de lui (Jn 17.5) après

avoir accompli l’œuvre qu’il lui a donné d’accomplir.

Il considère le Père comme étant plus grand que lui (14.28), il lui a obéit jusqu’à

l’aboutissement de sa mission aussi aspire t’il à retrouver sa position pour, à son tour,

envoyer l’Esprit aux disciples196.

Du fait de sa résurrection, Jésus accomplit une nouvelle création mais pas

seulement à cause de cela. Il est le Verbe créateur au même titre que le Père (Jn 1.1-

18), il est générateur de vie (Gn 2.7) et peut donc recréer.

193 B. SESBOÜÉ, Jésus-Christ l’unique médiateur, p. 244.194 B. LAURET, « Christologie dogmatique », Initiation à la pratique de la théologie, p. 391.195 R. MEYER, L’herméneutique paulinienne de la résurrection d’après 1 Corinthiens 15, thèse, Strasbourg, Faculté de théologie protestante, 1987, p. 243. Pour sa part, D. MARGUERAT,Résurrection : Une histoire de vie, Poliez-le-grand, Moulin, 2001, p. 88, résume ce qu’est la résurrection chez Jean : « Dans son évangile, la vie éternelle a son centre de gravité dans le présent ; c’est la plénitude de vie offerte par le Christ, que le croyant goûte ici-bas, et qui se poursuivra au-delà de la mort. »196 R. WINLING, La Bonne Nouvelle du salut en Jésus-Christ, p. 343-346.

56

Une fois sa mission terrestre accomplie, pour laquelle il était descendu, Jésus

remonte auprès du Père. Le retour vers le Père est désigné par les verbes, et

katabai,nw (6.33,50) et descendre, avnabai,nw (6.62), monter. Un lien est clairement

établi entre la montée vers le Père et la résurrection en Jn 20.17.

III. UNE NOUVELLE CRÉATION

A. Toute la création est portée à son accomplissement

L’exégèse du v. 19.30b du deuxième chapitre nous a permis de déceler que ce

que Jésus a accompli à la croix, c’est l’œuvre de salut du Père qui opère de concert

avec le Fils en parfaite communion.

En reprenant le chiasme de cette péricope, nous voulons maintenant nous

interroger sur le sens du v. 19.28b qui est, indubitablement, à mettre en relation avec

le v. 19.30b (b-b’) :

57

v. 28 : a. Meta. tou/to eivdw.j o VIhsou/j

Après cela, Jésus sachant

A. b. o[ti h;dh pa,nta tete,lestai(

que déjà tout a été accompli,

c. i[na teleiwqh/| h` grafh,(

pour que soit accomplie l’Écriture,

B. le,gei\ diyw/Å

il dit : « j’ai soif. »

v. 29 : B’. skeu/oj e;keito o;xouj mesto,n\ spo,ggon ou=n mesto.n tou/ o;xouj

Un vase se trouvait plein de vinaigre ; On fixa donc à une aa ussw,pw| periqe,ntej prosh,negkan auvtou/ tw/| sto,matiÅ

une éponge pleine de vinaigre et on l’approcha de sa

bouche

v. 30 : o[te ou=n e;laben to. o;xoj

Quand donc il prit le vinaigre,

a’. Îo`Ð VIhsou/j

Jésus

A’. b’. ei=pen\ tete,lestai(

dit : « c’est accompli. »

c’. kai. kli,naj th.n kefalh.n pare,dwken to. pneu/maÅ

et inclinant la tête, il livra l’esprit.

Jésus a une claire conscience qu’il a mené à terme, et parfaitement, la

mission confiée par le Père, eivdw.j o VIhsou/j, « Jésus sachant » (19.28a). Ce

dernier verset est à relier avec 18.4, Ihsou/j ou=n eivdw.j pa,nta, « Jésus, sachant

tout » ; il maîtrise la situation. Le pa,nta de 18.4 est annonciateur et anticipateur

tandis que le pa,nta de 19.28b est le constat récapitulateur que la connaissance

globale des événements qu’a Jésus s’est effectivement accomplie.

Par ailleurs, avec les v. 3.35, 5.20, 13.3, 14.26, 15.15, 16.15, 16.30, 17.7,

17.10, le narrateur veut clairement signifier que l’œuvre du Père est entièrement

confiée à son Fils en utilisant l’adjectif indéfini pa,nta197.

197 Il ne suffit pas de relever les occurrences d’un même mot pour faire le lien entre les versets. Ce sont les contextes qui donnent la signification des mots. Les contextes, en l’occurrence, ne laissent

58

Par cet adjectif pa,nta, nous pensons que Jésus est récapitulateur de la

création entière puisqu’il en est le commencement, à l’origine, avrch/|.

C’est l’idée que développe également X. Léon-Dufour :« Ce ‘tout’ qui s’achève peut avoir une plus ou moins grande

extension. Il pourrait se référer à l’œuvre entière confiée à l’Envoyé du Père198. »

Nous avons un éclairage supplémentaire avec le prologue où, au v. 1.3a, pa,nta

diV auvtou/ evge,neto, peut vouloir dire que c’est toute la création, terre et individus compris,

qui est sujette à la rédemption. Ce qui est porté à sa plénitude, c’est l’intégralité de la

création.

La régénération chez Jean a pour arrière-plan la création199 de l’AT. G.

Goldsworthy parle à raison de : « Génération, dégénération et régénération200. » qui

résument le déroulement biblique. P. Wells va dans le même sens :« Plus que cela, tout comme Dieu a travaillé six jours et s’est reposé le

septième, Jésus, en confiant son esprit au Père, est entré dans le repos divin après son labeur. La rédemption va un pas plus loin que la création et la complète. En Genèse 1, six fois, nous lisons ‘Dieu dit’. Jésus a parlé une fois de plus sur la croix pour introduire la création dans une nouvelle création, mais la septième parole de Jésus est le commencement d’une nouvelle création, et Jésus est le premier à y entrer201. »

Dieu est présenté comme un Dieu en constante création et rédemption. Cette

activité déploie l’étendue de sa bonté envers sa créature mais également le rapport

qui existe entre un Dieu puissant sans cesse en train de sauver l’homme

constamment en train de se perdre. Les auteurs de l’AT veulent souligner cet état de

dépendance de la créature au créateur.

Par ce parachèvement de la création initiale par Jésus, la création peut se

répéter dans l’histoire afin que l’individu202 accède au Dieu créateur.

Pour X. Léon-Dufour, Jésus mène à son terme ce qu’avait commencé le Père,

c’est-à-dire « la nouvelle création par le don aux hommes de la communion

divine203. »

aucun doute sur l’œuvre commune du Père et du Fils. En cela, nous sommes en cohérence avec ce que nous avancions au deuxième chapitre.198 X. LÉON-DUFOUR, Lecture de l’Évangile selon Jean, t. IV, p. 150.199 Ainsi que ses différents rappels qu’il serait fastidieux de reprendre ici. Nous citons, par exemple, Es 65.17-20 où il est question d’un nouveau ciel et d’une nouvelle terre.200 G. GOLDSWORTHY, « Régénération », DTBi, ALEXANDER T. D., ROSNER B. S. (dir.), Charols, Excelsis, 2006, p. 859.201 P. WELLS, De la croix à l’Évangile de la croix, p. 238.202 Par individu, nous entendons l’être humain non divisé. La chute a fait de l’homme un être divisé, sci,zw, schizophrène. Jésus redonne son intégrité à l’individu. 203 X. LÉON-DUFOUR, op. cit. p. 156.

59

« La bonne nouvelle de Christ abonde en mots commençant par ‘ re ‘ : renaissance, rédemption, réconciliation, régénération, renouveau et, finalement, re-création204. »

La rupture d’alliance que l’homme a initiée l’a entraîné dans un état de péché.

Dieu rétablit le dialogue interrompu par l’envoi de son Fils qui offre le pardon205 soit un

deuxième don après le premier refusé. Il propose une nouvelle vie à sa créature à

vivre dans une nouvelle création.

Dans le livre des signes, Jésus a manifesté les prémisses d’une nouvelle vie,

de nouvelle naissance, de nouvelle création. L’Esprit est continuateur de cette œuvre

régénératrice.

Jésus parachève la création, il la mène à son plein accomplissement, son but,

son te,loj. Est-ce à dire que la création était incomplète, inachevée ? Si vice206 de

création il y a, il n’est pas dû au créateur mais à l’utilisateur. Le fait que Jésus

parachève la création ne sous-entend nullement que Dieu n’a pas terminé la

première création mais que Jésus vient lui redonner sa pleine signification, son

véritable sens207.

B. Parallèle entre Gn 1.1 et Jn 1.1

Le récit johannique a comme substrat208 la théologie de l’AT. Ainsi, l’incipit du

quatrième évangile, au commencement, VEn avrch/| , est-il identitique à celui de la

Genèse, tyviÞarEB. , que la traduction des LXX209 traduit, VEn avrch/|. Plusieurs

exégètes et théologiens210 ont relevé cette concordance révélatrice du dessein de

Dieu.

204 P. WELLS, De la croix à l’Évangile de la croix, p. 12-13.205 M. LODS, « Pardon », DEB, ABBAYE DE MAREDSOUS, CENTRE INFORMATIQUE ET BIBLE (dir.), 3e éd. (1re éd.1960), Turnhout, Brepols, 2002, p. 974, donne la définition suivante du pardon : « Pardonner, c’est remettre une faute quel qu’en soit le contenu ou l’origine ; tandis que la rémission des péchés est considérée surtout comme le fait de dieu, on peut dire que le terme de ‘pardon’ recouvre aussi bien le p. mutuel des offenses que celui de Dieu envers les pécheurs. Le mot ‘pardon’ a un sens très fort ; il signifie donner ou accorder entièrement ; il implique donc une disparition de la faute, sans réticence de la part de celui qui pardonne et sans laisser de traces chez le pardonné. »206 Nous utilisation une métaphore du domaine de la construction.207 B. REY, Créés dans le Christ Jésus : La création nouvelle selon saint Paul (LeDiv 42), Paris, Cerf, 1966, p. 245, va dans ce sens lorsqu’il écrit, dans une perspective paulinienne : « Cependant il ne s’agit pas d’un ‘ recommencement ‘ mais d’un ‘ accomplissement ‘ : de toute éternité, Dieu a voulu – veut – ce monde où il permet le péché par respect de la liberté des hommes. Il n’a pas ‘manqué’ sa première création, le lien qui relie la créature au Créateur ne s’est pas rompu. La création nouvelle n’est pas une réitération de l’œuvre initiale : elle en est une reprise mais pour l’élever à un niveau supérieur. ». 208 Cf. supra p. 20.209 SeVeTe, edidit Alfred Rahlfs, vol. I, Leges et historiae, 9e éd (1re ed. 1935), Württembergische Bibelanstalt, Stuttgart, 1971, p. 1.210 Ainsi, M. -É. BOISMARD, Le prologue de saint-Jean, p. 17 : « Saint Jean a donc voulu expressément commencer le Prologue de son Évangile par une allusion à l’œuvre créatrice

60

Le prologue démontre le rôle créateur du Christ dans la création. La Parole

créatrice de Gn 1 s’est incarnée en Jésus (1.14). Dans l’activité salvifique que

Dieu déploie, Jésus-Christ est impliqué.

L’œuvre entière du Christ est médiation en faveur de l’homme : pro-

existence, préexistence, existence terrestre, résurrection et post-existence. Il est

médiateur à la création. Création et rédemption prennent tout leur sens en la

personne du Christ.

Christ étant le centre de la création, Jean exprime implicitement la promesse

d’une nouvelle création211. Pour O. Cullmann, « Dès les premiers mots, le prologue

johannique établit le parallèle avec le début du livre de la Genèse : Ven avrcn = bereshit.

L’intention de l’auteur saute aux yeux212. »

Pendant six jours, Dieu crée par sa parole, « Dieu dit » (Gn 1), ~yhiêl{a/ rm,aYOæw:,traduit par la LXX, kai. ei=pen o qeo,j, et constate que « cela était bon213 », voire

« c’était très bon214 » le sixième jour (Gn 1.31).

C. Parallèle entre Gn 2.2 et Jn 19.30

Le texte en hébreu de Gn 2.2, ‘tBov.YIw: hf'_[' rv<åa] ATßk.al;m. y[iêybiV.h; ~AYæB; ‘~yhil{a/

lk;Ûy>hf'([' rv<ïa] ATßk.al;m.-lK'mi y[iêybiV.h; ~AYæB;,, est rendu par la LXX215 par, kai. sunete,lesen o`

qeo.j evn th/| h`me,ra| th/| e[kth| ta. e;rga auvtou/ a] evpoi,hsen kai. kate,pausen th/| hme,ra| th/| e`bdo,mh|

avpo. pa,ntwn tw/n e;rgwn auvtou/ w-n evpoi,hsen. Or, le verbe grec, sunete,lesen, présente

une forte similarité avec celui de Jn 19.30b, tete,lestai. Les deux verbes signifient,

accomplir, achever, porter à terme, de tele,w.

Tandis que Dieu achève la création de l’homme (Gn 1.28) – le récit est

repris et amplifié en Gn 2.7 – et tout son travail de création, ta. e;rga, Jésus, lui, va

accomplie par Dieu. » ; F. -M. BRAUN, Jean le théologien, p. 21 : « Ainsi l’avrch/| de Jn I, 1, correspondant au resit de Gn I, 1, montre que, pour le quatrième évangéliste comme pour l’auteur du premier chapitre de la Genèse, le déroulement de la durée est subordonné à un dessein que Dieu seul est capable de réaliser, non sous la pression d’une nécessité intérieure, comme s’il avait besoin du monde pour s’accomplir, mais gratuitement, de plein gré. » ; X. LÉON-DUFOUR, Lecture de l’Évangile selon Jean, t. I, p. 66.211 L’apôtre Paul développe la même idée en 2Co 5.17. Cette thématique fait l’objet de l’ouvrage de B. REY Créés dans le Christ Jésus, particulièrement aux p. 237-240.212 O. CULLMANN, Le salut dans l’histoire, p. 282.213 La création qualifiée par Dieu est bonne en tant qu’elle est indivise et soumise aux lois d’harmonie du créateur. Il nous est difficilement concevable d’imaginer un Dieu découvrant lerésultat de son œuvre comme si l’issue était dépendante du hasard. 214 Nous franchissons un degré supplémentaire avec l’homme qui est « très bon ». Il s’agit ici d’un état relationnel avant la chute qui intervient au chapitre trois de la Genèse. C’est cet état relationnel rompu que Jésus, comme médiateur, vient rétablir.215 SeVeTe, p. 3.

61

achever son œuvre de salut216 (Jn 17.4), to. e;rgon. Le sixième jour, par sa mort il

inaugure une nouvelle création.

Le parallélisme laisse suggérer que la création continue. Elle est un

aboutissement, un accomplissement inachevé. L’œuvre de salut effective à la

croix est pourvoyeuse de vie et elle se manifeste maintenant par une nouvelle

création dont Jésus est les prémisses et dont il se porte garant.

Le septième jour217 constitue un intermède (Gn 2.3) avant que ne se

déploie l’activité humaine. « Dieu se repose de tout le travail qu’il avait fait en

créant » tandis que Jésus passe le sabbat au tombeau. Le narrateur insère cette

phase intermédiaire dans une inclusion contenue entre les v. 19.31, « C’était le

jour de la Préparation. » et 19.42, « A cause de la Préparation des Juifs. », du

quatrième évangile.

Pour Jésus, ce jour constitue un prélude à sa résurrection (ré)génératrice

de vie nouvelle. Le « c’était très bon » de Gn 1.31 peut à nouveau être prononcé.

La qualité de relation originelle entre Dieu et l’homme est reconfigurée par Jésus.

D. Parallèle entre Gn 2.7 et Jn 20.22

Gn 2.7 peut éclairer Jn 6.63 avec Jn 20.22 et le prologue.

Après la parole tete,lestai’, Jésus rend l’esprit218 (19.30b). Il peut, dès lors,

donner l’Esprit, une fois auprès du Père. Le Père fait don du Fils (Jn 3.16), le Fils

ayant achevé sa mission avec succès, retourne dans la communion avec le Père

et fait don de l’Esprit à son tour : « Après avoir dit cela, il souffla sur eux et leur

dit : Recevez l’Esprit saint. » (Jn 20.22)219. Le terme grec utilisé pour « souffla »

est evnefu,shsen220 et pour « Esprit saint », c’est pneu/ma a[gion. C’est le même Esprit

que Jésus reçoit à son baptême (Jn 1.32), pneu/ma, qui demeure sur lui et qui doit

agir sur ses disciples. « C’est dans une perspective semblable qu’il convient de lire Jn 20,22,

verset qui, au cœur du récit johannique de l’apparition du Ressuscité aux disciples, suggère que, en leur accordant le Saint Esprit, le Christ inaugure en fait une nouvelle création. Au moment où il leur dit : « Paix à vous !

216 Ainsi, X. LÉON-DUFOUR, Lecture de l’Évangile selon Jean, t. IV, p. 156 : « Le *tetélestai* dit par le Fils répercute la finale du récit de la création : ‘Dieu acheva (*synetélesen*)’ (Gn 2,2). Jésus a mené à terme l’œuvre par excellence que poursuivait le Père (cf. 5,17), celle de la nouvelle création par le don aux hommes de la communion divine. »217 Nous n’avons pas pris l’option de développer cet aspect.218 Le narrateur ne dit pas que Jésus meurt comme pour suggérer que la mort n’a pas le dernier mot. 219 CH. GRAPPE, De la création à la résurrection et à la nouvelle création : Lectures et relectures de Genèse 2.7, Notes de la leçon donnée à la Faculté adventiste de théologie, Collonges-sous-Salève, 20 mars 2008.220 Le verbe evmfusa,w, souffler, est utilisé ici à l’indicatif et à la 3e personne du singulier de l’aoriste.

62

Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie » (Jn 20,21), le Ressuscité insuffle l’Esprit Saint aux disciples (evnefu,shsen kai. le,gei auvtoi/j\la,bete pneu/ma a[gion\) (Jn 20,22). Qui perçoit, derrière l’emploi du verbe rareevmfusa,w, l’allusion à Gn 2,7, ne peut manquer de discerner ici l’amorce d’une économie nouvelle placée sous le sceau de l’Esprit Saint, générateur de Vie221. »

C’est ce même Esprit, qui est actif à la création (Gn 2.7). Dieu souffle,

evnefu,shsen222, dans les narines de l’homme afin qu’il devienne vivant. En

renouvelant cet acte créateur, Jésus insuffle l’impulsion nécessaire pour une

nouvelle création, un nouveau départ. Il inscrit ses disciples dans le cadre d’une

nouvelle création ou d’une nouvelle économie en leur donnant le Saint Esprit.

B. Lauret va dans ce sens :« Jésus, ressuscité, nouvel Adam, recrée une nouvelle humanité : il

est le « Logos » et la « Sagesse » qui a présidé à la création, l’image de Dieu ». Il insuffle l’Esprit Saint à ses disciples comme Dieu le fit pour Adam (Gn 2, 7 ; Jn 20, 22)223. »

C’est également la lecture qu’en fait Ch. Grappe pour qui le texte de Gn 2.7 est

l’hypotexte qui permet des relectures de la nouvelle création même si l’allusion n’est

pas explicite. Ainsi, Jn 6.63, « C’est l’Esprit qui fait vivre. La chair ne sert de rien. Les

paroles que, moi, je vous ai dites sont Esprit et sont vie. », To. pneu/ma, evstin to.

zw|opoiou/n( h` sa.rx ouvk wvfelei/ ouvde,n\ ta. r`h,mata a] evgw. lela,lhka u`mi/n pneu/ma, evstin kai.

zwh, evstinÅ

En Jn 3.17 le Père envoie le Fils et maintenant, le Fils envoie les disciples

en Jn 20.21. Les discours avant la Passion avaient insisté, au préalable, sur l’œuvre

de l’Esprit Saint qui peut révéler aux disciples la vérité relative à Jésus224. Jésus lègue

aux disciples le Saint-Esprit qui est indissociable de sa mort et de sa résurrection225.

La présence de Jésus-Christ ressuscité est ensuite assurée par le Paraclet.

221 Ainsi, CH. GRAPPE, De la création à la résurrection et à la nouvelle création, p. 3 ; A. J. KÖSTENBERGER, « Jean », DTBi, p. 312.222 Cf. note précédente. 223 B. LAURET, « Christologie dogmatique », Initiation à la pratique de la théologie, t. II, p. 392. D’autres auteurs développent ce rapprochement dont CH. L’ÉPLATTENIER, L’évangile de Jean, p. 385 : « Le geste par lequel maintenant celui qui est le Verbe incarné inaugure en somme la nouvelle création, rejoint celui de la création de l’homme. »224 J. -M. BLANCHARD, « Les discours dans l’Évangile de Jean», La Bible et sa culture, p. 451. 225 Nous ne trouvons pas chez Jean de théologie de la Trinité mais nous pouvons voir dans l’action du Saint-Esprit, annoncé et donné par Jésus à ses disciples, l’assurance d’une continuité dans l’œuvre de régénération du Père et du Fils.

63

E. Une nouvelle créature

Le but de l’acte réconciliateur de Dieu, par la mort de son Fils, est le

rétablissement de l’humanité dans une relation appropriée avec lui. L’acte rédempteur

est l’établissement d’une relation harmonieuse avec toute la création et principalement

avec ses créatures.« Tous les hommes que le Christ porte en lui sont réconciliés avec

Dieu ; le Christ ‘les réconcilie avec Dieu, tous deux ensemble, en un seul corps, par la croix : en lui il a tué la haine’226. »

La répétition emphatique de eivj to. o;noma auvtou, « en son nom », evn tw/| ovno,mati,

mou, « en mon nom », evn tw/| ovno,mati, sou, « en ton nom » est particulièrement

concentrée227 dans la section des adieux (13.1-17.26) et montre que cette harmonie

est rendue possible par le Christ ; c’est par l’union228 avec le Christ, en Christ, que les

croyants peuvent accéder à la rédemption et à la vie nouvelle. Le v. 20.31, qui résume

le but de l’Évangile johannique, entérine cette assimilation à laquelle le croyant doit

procéder : « Mais ceux-ci sont écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le

Fils de Dieu, et que, par cette foi, vous ayez la vie en son nom. », evn tw/| ovno,mati auvtou /Å

S’incorporer, s’identifier au nom de Jésus, en lui, par lui, c’est s’incorporer en lui

ou plutôt se laisser s’incorporer en nous afin que le créateur puisse agir en nous de

l’intérieur. C’est ainsi que la vie nouvelle, la nouvelle création peut être effective.

Le Christ va jusqu’à l’extrême de la condition humaine, la mort, or Dieu refuse

« la mort de celui qui meurt – déclaration du Seigneur DIEU. Revenez donc et vivez ! »

(Ez 18.32). Il redonne la vie à Lazare parce ce qu’il ne peut accepter cette condition.

En s’incarnant, il octroie à l’homme un salut de l’intérieur parce qu’il accepte le même

itinéraire, la même condition, les mêmes souffrances. Il donne sa vie pour l’humanité.

Ce faisant, il devient le ferment d’une nouvelle vie, d’une nouvelle humanité. Afin

que l’homme puisse bénéficier de ce levain229, il faut qu’il s’incorpore en lui afin qu’il y

ait identification.

226 B. REY, Créés dans le Christ Jésus, p. 138.227 Cf. annexe V, p. 77s.228 La préposition evn, suivi du datif tw/| ovno,mati, signifie « en union avec, en rapport avec (en Christ). ». M. CARREZ, F, MOREL, DiGFNT, 2e éd., Neuchâtel, Paris, Delachaux et Niestlé, Cerf, 1980, p. 66.229 Ici, nous n’employons pas le mot « levain » dans le sens biblique de corruption et d’impureté. Bien au contraire, la puissance de la métaphore biblique peut être rendue positive pour signifier la puissance de vie qu’un seul être peut féconder dans l’humanité entière. Sur la signification biblique du terme, cf. C. EPPING, J. ARGAUD, « Levain », DEB, p. 743.

64

F. Un nouveau ciel et une nouvelle terre

Le thème de la nouvelle création trouve son expression aboutie et accomplie

dans les trois derniers chapitres du livre de l’Apocalypse230.

Tandis que les trois premiers chapitres du livre de la Genèse décrivent la

création de l’univers, de l’homme, l’introduction du mal par le serpent puis, le premier

couple d’humains chassés du Jardin d’Éden par Dieu, les trois derniers chapitres du

livre de l’Apocalypse décrivent « le serpent d’autrefois, qui est le diable et le Satan »

(20.2) lié pour mille ans, la première résurrection qui est une recréation de l’être

humain (20.6), la victoire sur la mort (20.13,14), la destruction définitive du mal (20.15),

la nouvelle création (21.1s.).

A trois reprises, aux v. 20.3,5,7, se trouve le verbe tele,w,, achever, accomplir ou

mener à terme, à la forme passive, telesqh/|231, en rapport avec les mille ans écoulés.

Cet achèvement des mille ans, pendant lesquels le diable est inoffensif, déclenche

le jugement (20.11-15) et la manifestation de la nouvelle création (21.1s.).

Jean utilise une autre expression pour signifier la fin du mal et la nouvelle

création, « C’est fait » (21.6), kai. ei=pe,n moi\ ge,gonanÅ Ce cri de victoire est proclamé

par le Christ dont l’identification est explicite232 au v. 21.6 : « C’est moi qui suis

l’alpha et l’oméga, le commencement et la fin. », EVgw, ÎeivmiÐ to. a;lfa kai. to. w=( h` avrch.

kai. to. te,loj, et au v. 22.13, Evgw. to. a;lfa kai. to. w=( o prw/toj kai. o e;scatoj( h` avrch.

kai. to. te,loj, « L’alpha et l’oméga, le premier et le dernier, le commencement et la

fin, c’est moi. »

Ces deux versets font partie de l’épilogue du livre de l’Apocalypse dont le

thème est l’avènement de Jésus. Ils sont une conclusion répondant à l’introduction

du livre. Le prologue du livre contient des expressions similaires. Or, il apparaît

que dans le prologue de l’Apocalypse ces mêmes expressions sont des

qualificatifs attribués au Père, alors que dans l’épilogue, ils sont utilisés pour

définir le Fils. Par ce rapprochement, l’auteur veut démontrer l’unité constante du

230 Nous ne nous livrons pas à une étude exhaustive de l’Apocalypse. Nous relevons seulement quelques parallélismes entre ce livre et ceux de la Genèse et de l’Évangile johannique qui concernent notre sujet.231 Le verbe tele,w est à la troisième personne du singulier du subjonctif de l’aoriste qui correspond au passé simple ou composé de la grammaire française et qui exprime un évènement unique par rapport à son accomplissement. B. GUY, J. MARCOUX, Grec du Nouveau Testament, p. 89, 90. C’est un constat qui est important attendu que l’écrivain répète trois fois la mention telesqh/|. C’est l’affirmation souveraine que le mal a pris fin définitivement.232 Dans le NT, chaque titre christologique appliqué à Jésus laisse entrevoir un aspect de sa vie et de son œuvre. O. CULLMANN, Christologie du Nouveau Testament, Neuchâtel, Paris, Delachaux et Niestlé, 1958, p. 15, déclare : « Pour exprimer pleinement la richesse infinie qui s’est manifestée dans la personne de Jésus-Christ, une seule désignation de sa dignité ne suffisait pas. ».

65

Père et du Fils. Entre le Père et le Fils les titres sont interchangeables233. Le Christ

est véritablement l’avrch. de la création et le te,loj, celui qui a les « clefs de la

mort234 » (Ap 1.18) donc de la vie. La structure chiastique suivante235 souligne

cette identification du Fils au Père :

A B B’ A’

1, 8 1, 17 21, 6 22, 13

fin du prologue début de la vision fin de la vision début de l’épilogue

Dieu le Christ Dieu le Christ

Alpha et Oméga Alpha et Oméga Alpha et Oméga

Premier et Dernier Premier et Dernier

Principe et Fin Principe et Fin

lien avec la parousie avec la vie nouvelle avec la vie nouvelle avec la parousie

(1, 7) (1, 18) (21, 5-6) (22, 12)

Synthèse

Par la nouvelle Pâque, qui constitue un passage de la mort à la vie, que Jésus

représente et par sa résurrection, qui est l’assurance que celle de l’homme aura lieu,

Jésus entraîne dans son sillage tout homme qui met sa foi en lui. Quiconque met sa

foi en lui (Jn 20.31) se voit accorder la vie en abondance et de devenir une nouvelle

création.

Dans la perspective johannique, le salut opéré par Jésus est déjà agissant mais

pas encore totalement achevé. O. Cullmann décrit ce paradoxe ainsi :« Ce qui est nouveau dans le Nouveau Testament n’est pas

l’eschatologie, mais ce que j’appelle la « tension » entre le présent et l’avenir, entre l’évènement décisif par quoi ‘tout est accompli’ et dénouement final qui montre bien que ‘tout n’est pas encore achevé’236. »

B. Rey va dans le sens d’O. Cullmann. Pour lui, il y a un paradoxe :

l’ « eschatologie déjà réalisée et encore à venir !237 » pour P. Beauchamp,

l’eschatologie, c’est l’espérance qui est « l’attente d’une terre transformée, transportée

233 R. BAUCKHAM, La théologie de l’Apocalypse (Théologies), Paris, Cerf, 2006, p. 69-73. 234 Cela veut dire qu’il a le pouvoir de mettre fin à la mort.235 Nous empruntons ce chiasme à R. BAUCKHAM, op. cit. p. 73.236 O. CULLMANN, Le salut dans l’histoire, p. 173.237 B. REY, Créés dans le Christ Jésus, p. 130.

66

dans un monde hyperbolique où il n’y aura que paix et abondance, tous les maux

étant bannis238. »

238 P. BEAUCHAMP, Testament biblique, Paris, Bayard, 2001, p. 63.

67

CONCLUSION GÉNÉRALE

68

Au terme de cette étude, nous avons été amenés à en établir les fondations par

des prolégomènes d’ordre diachronique pour définir que Jean est l’auteur de cet

évangile en nous appuyant sur la tradition et sur les évidences internes. Nous avons

souligné que la critique historique est en débat sur la question de l’auteur.

Jean assoit son évangile sur un terreau culturel et cultuel juif, avec des buts

précis qui sont contenus aux v. 1.18, Jésus est venu faire connaître le Père, et 20.31,

ceux qui croient en son Fils peuvent bénéficier de la vie en son nom. Pour ce faire,

Jean est tributaire de la LXX dont nous retrouvons d’évidentes connexions dans son

livre.

Nous avons délibérément délimité le cadre de notre recherche à l’Évangile

selon Jean bien que nous ayons fait quelques incursions dans l’AT pour finir sur le

livre de l’Apocalypse. Ce sont les quelques concessions que nous avons faites.

L’établissement d’un plan à partir du vocabulaire et des marqueurs littéraires

étaient indispensables pour avancer sur terrain stable tout en ayant à l’esprit que,

selon l’optique choisie, le plan pourra être différent d’un auteur à un autre.

Sur ces fondations, nous avons pu élaborer une analyse contextuelle littéraire,

de manière centripète et chiastique de Jn 19.30b qui a révélé que ce que Jésus a

accompli sur la croix n’est pas un parcours jalonné d’obstacles ou d’épreuves à

franchir une à une. Il est venu, comme envoyé du Père, dans une communion parfaite

régie par un amour mutuel, réconcilier Dieu avec l’humanité. Cette mission de

sauvetage (Jn 3.16), a été constamment dictée par un amour qu’il a porté à l’extrême

(Jn 13.1) qu’il est difficile à concevoir pour l’être humain, si tant est que nous puissions

en percevoir une parcelle.

Cette œuvre de médiation, Jésus l’a accomplie en quittant sa gloire divine pour

vivre comme un homme et sauver l’humanité de l’intérieur. Par son ministère terrestre,

sa vie et ses œuvres, Jésus a montré comment l’homme est appelé à devenir enfant

de Dieu et en mourant sur la croix, il accomplit l’acte réconciliateur qui rend celui qui

adhère à lui, fils adopté par Dieu.

Par conséquent, les Écritures se sont réalisées, et lues comme telles

rétroactivement, par les évangélistes et Jean en particulier.

La structure bipartite et quadripartite de l’annexe V a contribué à l’édification du

projet. Elle nous a permis de visualiser les principaux événements du ministère

terrestre de Jésus en constatant qu’il y a offre gratuite et gracieuse de vie pour que

l’homme s’en empare par la foi qui opère, de la même manière que la vie, en arrière

plan de l’évangile.

69

Ce faisant, chez Jean, cette offre de vie est déjà effective, sur terre, et c’est

spirituellement que l’homme la saisit afin que sa vie, comme nouvelle création, soit

féconde au plan vertical, avec Dieu, et de manière horizontale, avec ses

contemporains. C’est la proposition de nouvelle création qui a constitué la toiture de

notre édifice, au troisième chapitre.

En définitive, le chrétien doit rendre vivante, active et effective cette nouvelle

création dans sa personnalité, son comportement et ses relations aux autres.

C’est le résultat de l’acte réconciliateur que Jésus a accompli à la croix.

L’accomplissement de Jn 19.30b est récapitulateur et anticipateur car ses effets

sont au bénéfice des croyants du XXIe siècle. Le ministère terrestre de Jésus est

complet, parfait mais à son retour, l’accomplissement sera définitif, le jugement définitif

et la nouvelle création effective pour la vie éternelle.

Tout est semé, tout est en germe à l’intérieur du chrétien. La seconde venue du

Christ inondera alors la terre entière pour qu’explose la vie nouvelle et éternelle,

comme lors de la création. Alors, Dieu pourra dire de nouveau : « C’est très bon. »

70

ANNEXES

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Annexe I – Les paroles de Jésus en croix239

MATTHIEU / MARC LUCJEAN

[Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font.][Lc 23.34]

Amen, je te le dis, aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis.Lc 23.43

Mon Dieu, mon Dieu,pourquoi m’as-tu abandonné ?Mt 27.46 // Mc 15.34 Femme, voici ton fils. / Voici ta mère.

Jn 19.26sJ’ai soif.Jn 19.28

Père, je remets mon esprit entre tes mains.Lc 23.46 Tout est achevé.

Jn 19.30

D’après P. Wells, il y a unanimité pour l’ordre des sept phrases prononcées par

Jésus à la croix240. Pour notre part, nous ne nous prononçons pas sur l’ordre exact

des paroles.

239 La NBS, p. 1326.240 P. WELLS, De la croix à l’Évangile de la croix, p. 165.

72

Annexe II – Plans de l’Évangile de Jean

La NBS distingue cinq parties241 :

- Le grand prologue : 1.1-18 ; - Les actes significatifs de Jésus : 1.19-12.50 ; - Le testament de Jésus : chap. 13 à 17 ; - Le récit de la passion ou « élévation » de Jésus : chap. 18 à 20 et le post-scriptum (ou épilogue) : chap. 21.

La Bible de la Pléiade découpe le texte selon les six fêtes liturgiques242 :

« La structure de cet évangile comporte plusieurs étages. Un ou plusieurs paragraphes forment une péricope dont souvent le dernier verset reprend les termes du premier et souligne l’objet principal du passage inclus. Ces péricopes sont groupées autour de sept dates :La Pâque de l’an 28 (I à IV) – La Parole, le Baptiste, premiers disciples, premier signe (à Cana) ; les vendeurs chassés, Nicodème ; la Samarie, deuxième signe (à Cana). La Pentecôte de l’an 28 (V) – troisième signe (l’infirme), querelle sur le sabbat (le travail du Fils).La Pâque de l’an 29 (VI à VII, I) – quatrième signe (les pains), cinquième signe (marche sur la mer), prédication à Capharnaüm (le pain du ciel).Les Tabernacles, en octobre 29 (VII, 2, à X, 21) – venue secrète, prédication dans le temple (la lumière), sixième signe (l’aveugle), prédication hors du temple (le berger).La Dédicace, en décembre 29 (X, 22, à XI, 54) – discussions dans le temple, Transjordanie, septième signe (Lazare), le désert.La Pâque de l’an 30 (XI, 55, à XIX, 42) – onction à Béthanie, les rameaux ; lavement des pieds, discours après la Cène ; arrestation, jugement, crucifixion, ensevelissement.Le premier jour de semaine, après la Pâque 30 (XX et XXI) – le tombeau vice, Marie Madeleine, les dix, les onze, les cinq, les deux. »

A. Lion repère trois parties équivalentes en longueur et dont chacune véhicule un vocabulaire qui sert l’intention de l’auteur243 :

- L’annonce de la vie : 1 à 6. Le mot « vie » et ses occurrences est majoritaire (56 mots) ;- La vie refusée par le monde : 7 à 12. Le mot « mort » et ses dérivés prédomine (35 mots) ;- La vie donnée à ceux qui croient : 13 à 20. Les occurrences du mot « amour » sont significatives (40 mots).

Ch. L’Éplattenier scinde le texte ainsi244 :

241 La NBS, p. 1390.242 La Bible, Nouveau Testament (Bibliothèque de la Pléiade), p. 268-269.243 A. LION, Lire saint Jean, 3e éd. (1re éd. 1972), Paris, Cerf, 1984, p. 24, 25.244 CH. L’ÉPLATTENIER, L’évangile de Jean, p. 419-421. Nous ne reproduisons pas les subdivisions pour ne pas alourdir le plan.

73

- Prologue – La Parole, vie et lumière du monde : 1.1-18 ;- Première partie – La vie manifestée : 1.19-6.71 ;- Deuxième partie – La lumière refusée : 7.1-12.50 ;- Troisième partie – Les testament de Jésus : 13.1-17.26 ;- Quatrième partie – L’heure de la glorification : 18.1-20.31 ;- Épilogue – En Galilée, Pierre et le disciple bien-aimé : 21.1-25.

Ch. Dodd propose un découpage bipartite245 :

- Préambule : chap. 1 ;- Livre des signes : chap. 2-12 ;- Livre de la Passion : chap. 13-21.

Quant à J. Goettmann246 :

« Les sept rythmes de l’évangile de Jean réparent, accomplissent les jours de

l’ancienne Genèse. Ce sont les sept jours nouveaux de la nouvelle création. Ils font

germer un monde neuf au sein du vieux monde.

1. Les épiphanies lumineuses (1,19-2,12), du Jourdain à Cana.

2. Les sources de l’homme vivant (2,13-4,54), du temple et du puits de Jacob à

l’enfant rendu à la vie.

3. Le vrai pain, travail et fruit de la vie (5,1-6,71), du travail de guérison à l’annonce du

Pain de Vie.

4. La lumière du pèlerin des sources (7,1-9,41), de la fête des Tentes à l’illumination

de l’aveugle-né à la source de Siloé.

5. Le berger des vivants (10,1-11,54), du Bon Berger au réveil de Lazare.

6. La Pâque du Fils de l’Homme (11,55-19,42), de la Cène à la Croix, l’heure des

douleurs d’accouchement d’un homme nouveau (16,21).

7. L’aurore d’un monde nouveau (20,1-21,25), du jardin pascal et de la Pentecôte au

cénacle vers le rivage de la terre nouvelle, par le double chemin de Pierre et de

Jean. »

245 C. H. DODD, L’interprétation du quatrième évangile, Paris, Cerf, 1975, p. 371.246 J. GOETTMANN, Saint Jean : Évangile de la nouvelle genèse, p. 22, 23.

74

Annexe III – Plans en synoptique

75

76

Annexe IV – Comparaison entre le vocabulaire des synoptiques et

l’Évangile de Jean247

1 – Vocabulaire théologique des synoptiques peu ou non usité dans Jean :

Mt Mc Lc Jnbasileia, règne 55 20 46 5dunamis, puissance 11 13 23 6*dikaïos, juste (homme) 17 2 11 3Avoir pitié, pitié 16 7 13 0évangile, évangéliser 5 8 10 0katarizein, purifier 7 4 7 0kalein, appeler 26 4 7 0kêrussein, proclamer 9 14 9 0laos, peuple 14 23 36 2parabole 17 13 18 0prier et prière 19 12 22 0scandale, scandaliser 19 8 3 2sauver 15 15 17 6* Une seule péricope.

2 – vocabulaire théologique récurrent dans Jean et peu utilisé dans les synoptiques :

Mt Mc Lc Jnagapê, amour, aimer 9 6 13 43aiônios, éternel 6 3 4 17vérité, vrai, véritable, vraiment 5 5 7 55voir (bleipein, theorein, horan) 37 31 39 78contempler (theasthai) 1 4 18guennan, engendrerguinöskein, connaître 20 12 28 56graphê, écriture 4 3 4 12doxa, gloire 7 3 13 18eïmi, je suis 14 4 16 54esti, il est 120 75 100 170œuvre, faire 10 3 3 35erôtan, demander 4 3 15 27zoê, vie, vivre 13 7 14 57jésus 150 81 89 237Les Juifs 5 6 5 71kosmos, le monde 8 3 3 78krinein, juger 6 0 6 19

247 B. RIGAUX, « Lumière, vérité et vie dans le quatrième évangile », Témoignage de l’évangile de Jean, p. 120, 121.

77

lalein, parler 26 21 31 60marturein, témoigner et de même racine 6 7 7 47menein, demeurer 3 2 7 40nun, maintenant 4 3 14 28paraclet 0 0 0 14pater, Père (Dieu) 45 4 16 120pempein, envoyer 4 1 10 32têrein, conserver 6 1 0 18tithenai psuchên, donner sa vie 0 0 0 8hupaguein, remonter 19 15 5 32phaneiroun, apparaître 0 3 0 9philein, aimer 5 1 2 13phôs, lumière 7 1 7 23

78

Annexe V – Répartition du vocabulaire selon le plan bipartite et

quadripartite248

248 Nous avons utilisé les concordances grecques suivantes pour établir ce tableau : CKNTG ; M. S BUSHEL., M. D TAN., BibleWorks for Windows, Version 5.0, Big Fork, Hermeneutika, 2002.

79

LIVRE DES SIGNES LIVRE DE LA GLOIREPrologue1.1 – 1.18

Signes1.19 – 4.54

Œuvres5.1 – 12.50

Adieux13.1 –17.26

Passion18.1 – 20.31

Épi-logue249

21Écrit, écrituresgra,fwgrafh,

1.452.172.22

5.466.316.457.387.428.1710.3410.3512.1412.16

13.1815.2517.12

19.24 19.2819.3619.3720.9

Accomplis. plhro,w

3.29 (tps pas encore acc.)

12.38 13.18 (Écrit.)15.25 (Parole)17.12 (Ecrit.)

19.24 (Ecrit.)19.36 (Ecrit.)

Accomplis.teleio,w250

4.34(œuvre P.)

5.36(œuvre P.)

17.4 (œuvre ac.)

19.28251

(pour que l’Ecr. Soit ac.)

Accomplis.tele,w

19.28(achevé)19.30 (tout est ach.)

Œuvre(s) du Filse;rgon e;rga

4.34(acc. son o.)

5.36 x 2 (le P. donne aux F.)7.37.219.410.2510.32 10.3310.3710.38

14.1215.2417.4(œuvre ac.)

Œuvre(s) du Pèree;rgon e;rga

5.20 (montrera o. plus gdes au F.)6.286.29 (o. de D. = mettre sa foi en Jésus)9.3

14.10 (O. du P. à travers le F.)14.11 (idem)

249 Bien qu’il ne soit pas possible d’intégrer dans ce tableau le vocabulaire propre à Jean, il est significatif que la colonne de l’épilogue soit singulièrement vide. Cela laisse supposer pourrait s’agir d’une addition ultérieure. 250 Le verbe teleio,w est directement associé aux œuvres ou à l’œuvre du Père, e;rgon, e;rga .251 Pas de citation de l’Écriture dans ce verset.

80

9.4Amour du Père ou/et du Fils pour les hommesavgapa,wavga,ph

3.16 13.115.915.10 x 217.23

Amour réciproque du Père et du Filsavgapa,wavga,ph

15.915.1017.2317.2417.26

Vie, vivant,vivrezwh,za,w

1.4 x 2 3.15 (v. ét.)3.16 (v. ét.)3.36 (v. ét.) x 24.10(eau vive)4.11 (eau vive)4.14 (v. ét.)4.36 (v. ét.)4.504.514.53

5.24 (v. ét.) x 25.255.26 x 25.39 (v. ét.)5.406.27 (v. ét.)6.336.356.40 (v. ét.)6.47 (v. ét.)6.51 x 26.536.546.57 x 36.587.386.63 (Esprit et v.)8.1210.10 (v. en abondance)10.28 (v. ét.)11.25 (rés. et v.)11.2612.25 (v. ét.)12.50 (v. ét.)

14.6 (ch., v. et v.)14.19 x 217.2 (v. ét.)17.3 (or la v. et.)

20.31

Vie252

(donner sa)yuch,

10.11 (b. b. se défait de sa v.)10.15 (idem)10.17

13.38 (se défaire de sa vie)15.13 (idem

252 Les nombreuses occurrences de la vie, concentrées dans les sections centrales des signes, des œuvres et des adieux, sont à mettre en corrélation avec les occurrences de la foi et celles de l’envoyé, cf. infra. La foi en l’envoyé est pourvoyeuse de vie. A partir du chap. 18, il sera question de la mort de Jésus et le vocabulaire de la vie disparaît, sauf en 20.31 qui est le but de ce livre, comme pour signifier que les choix devaient être opérés avant sa Passion.

81

(idem)12.25 x 2 (perdre sa vie)

Envoyé, envoyeravposte,llw

1.6 (JB) 1.33 (JB)3.17 (de D.)3.28 (de D.)3.34 (de D.)

5.36 (de D.)5.38 (de D.)6.29 (de D.)6.57 (de D.)7.29(de D.)8.429.7 (Siloé=envoyé)10.36 (de D.)11.42 (de D.)

17.3 (de D.)17.8 (de D.)17.18 (de D. et de J.17.2317.25

20.31

Envoyé, envoyerpe,mpw

1.33 (JB)4.34 (de D.)

5.23 (de D.)5.24(de D.)5.30(de D.)5.37(de D.)6.38 (de D.)6.39 (de D.)6.44 (de D.)7.16 (de D.)7.18 (de D.)7.28 (de D.)7.33 (de D.)8.16 (de D.)8.18 (de D.)8.26 (de D.)8.29 (de D.)9.4 (de D.)12.44 (de D.)12.45 (de D.)12.49 (de D.)

13.1613.20 x 2 (de D.)14.24 (de D.)14.26 (SE e. par le P.)15.21 (de D.)15.26 (SE e. par le F. e t le P.)16.5 (de D.)16.7 (SE e. par Jésus)

20.21 (comme le P. m’a e., moi aussi je vous e.)

Sauver,salutsw,|zw

3.17(…soit s. par lui)

5.34(…soyez s.)

82

swthri,a 4.22 (s. vient des Juifs)

10.9 (…sera s.)11.12 (…s’il s’est endormi il est s.)12.27(P., s. moi de cette heure)12.47(…pour s. le monde)

Croire, foipisteu,w

1.7 1.12 (mettent leur f. en son nom)

1.502.11 (mirent leur f. en lui)2.122.222.23 (idem)2.243.12 x 23.153.16 (c. en lui…)3.18 x 3 (foi en lui…)3.36 (f. ds le Fils)4.21 4.39 (f. e lui…)4.414.424.484.504.53

5.24 (c. celui qui m’a envoyé)5.38 (idem)5.44 (idem)5.46 x 25.47 x 26.29 (idem)6.30 6.35 (idem)6.366.40 (idem)6.476.64 x 26.697.5 (idem)7.31 (idem)7.38 (idem)7.39 (idem)7.48 (idem)8.24 (idem)8.30 (idem)8.31 (idem)8.458.469.189.35 (idem)9.36 (idem)9.3810.2510.2610.37 10.38 x 210.42

13.19 14.1 x 2 (idem)14.1014.11 x 214.12 (idem)14.2916.9 (idem)16.2716.3016.3117.8 (idem)17.20 (idem)17.21

19.3520.820.2520.29 x 220.31 x 2

83

(idem)11.1511.25 (idem)11.26 x 2 (idem)11.27 (idem)11.4011.4211.45 (idem)11.48 (idem)12.11 (idem)12.36 (idem)12.37 (idem)12.3812.3912.42 (idem)12.44 x 2 (idem)12.46 (idem)

Volontéqe,lhma

1.13 x 2 4.34 (v. du Père)

5.30 (idem)6.38 x 2 (idem)6.39 (idem)6.40 (idem)7.179.31

En son nom (de Jésus)eivj to. o;noma auvtou/En mon nom evn tw/| ovno,mati, mouEn ton nom (du Père)evn tw/| ovno,mati, sou

1.12 2.233.18

5.4310.2512.1312.28

14.1314.1414.2615.1615.2116.2316.2416.2617.617.1117.12

20.31

Donner, dondi,dwmidwrea,

1.12 (enfants de D.)1.17

3.16 (Fils)3.343.35

5.22 (tt jugement au Fils)

13.3(d. du P.

au Fils)

18.9 (h. d. par le P. au Fils)

21.13 (Jésus d.

84

(grâce et vérité)

(l’Esprit)4.10 (d. de D.)x 24.14 x 2 (eau vive)4.15 (idem)

5.26 (la vie au F.)5.27 (le jugem.)5.36 (œuvres que le P. a d.)6.27 (la vie éter.)6.31 (le pain viv.)6.32 x 2 (idem)6.33 (la vie au monde)6.34 (pain)6.37 (ce que le P. d. au Fils)6.39 (d. des hommes au Fils)6.51 (pain)6.52 (d. sa chair)6.65 10.28 (la v. éter.)10.29 (d. du P. au Fils)11.22 (idem)12.49

13.15 (je vous ai d. l’exemple)13.34 (un cmdt nouveau)14.16 (un défenseur)14.27 x 3 (la paix)17.4 (acc. l’œuvre donnée)17.6 x 2 (hommesdonnés

par le P.)17.7 (ce qui d. par le P. au F.)17.8 x 2(les paroles)17.9 (hommes donnés au P.)17.11 (nom donné au F. par le P.)17.12 (idem)17.14 (ta parole)17.22 x2 (d. la gloired. par le P.

17.24 x 2 (gloire d. avant fondation du monde)

18.22253

(garde d. gifle)19.3 (idem)

18.11 (coupe)19.11 (pouvoir donné d’enhaut à Pilate)

le pain et le poisson)

Ressusciter, résurrectionavna,stasijavni,sthmi

5.29 x 26.39 (au dernier jour)6.40 (idem)6.44 (idem)6.54 (idem) 11.2311.24 x 2

20.9 (… devait se relever d’entre les morts)

253 Cette répartition du vocabulaire, dans l’évangile johannique, met en évidence, au plan narratif, que le Père et le Fils donnent le meilleur aux hommes, jusqu’au chap. 18, puis à partir du chap. 18, les soldats donnent une gifle à Jésus. La haine envers Jésus est cristallisée à cet endroit.

85

11.25(Je suis la

r.)Ressusciter, résurrectionevgei,rw

2.19 (temple)2.20 (temple)2.22 (r. d’entre les morts)

5.21 (le P. rév. Les morts…)12.1 (Lazare rév.)12.9 (idem)12.17 (idem)

21.14 (depuis qu’il s’était rév. d’entre les morts)

Ressusciter, faire vivre, vivifierzwopoie,w

5.21 x 2

Ressusciter, éveillerevxupni,zw

11.11(Lazare)

« Je suis »evgw. eivmi,

5.177.347.368.238.248.28

8.58 (avt qu’Abr.fut je s.)9.5 (je s. la lumière…10.36 (s. le Fils de D.)

13.1914.10 (je s. ds le P.)14.11 (idem)14.20 (idem)16.27(s. sorti du P.)16.28(idem)17.8(idem)

18.37 (je suis roi) x 319.21 (idem)

Christ254

Cristo,j1.17 1.20

1.251.413.284.254.29

7.267.277.317.417.429.2210.2411.2712.34

17.3 20.31

Fils de Dieuo` uio.j tou/ qeou/

1.341.495.2510.3611.411.27

19.720.31

Fils de l’hommeo` uio.j tou/ avnqrw,pou

1.523.133.14

6.276.536.628.289.3512.2312.34

13.31

254 Jésus est Christ, majoritairement jusqu’au chap. 13, fils de Dieu dans la section des signes, fils de l’homme principalement dans la section des œuvres et devient roi dans la section de la Passion.

86

Roibasileu,j

1.49 (Nathanaël)

6.15 (le faire r.)12.13 (entrée Jérusalem)12.15 (idem)

18.37 (Pilate)18.39 (idem)19.3 (moqueries)19.12 (Pilate)19.14 (Pilate)19.15 x 2 (rejet)19.19 (Pilate)19.21 x 2 (rejet)

Heurew[ra

1.39 (10e h.)2.4 (h.pas venue)4.6 (6e h.)4.21 (l’h. vient)4.23 (idem)

5.25 (h. vient)5.28 (idem)7.30 (son h. pas venue)8.20 (idem)12.27 x 2 (h. venue)

16.25 (h. vient)16.32 (idem)17.1 (idem)

19.14 (6e h.)19.27 (dès cette h. là…)

87

BIBLIOGRAPHIE

(Les références mentionnées dans cette bibliographie ont été consultées)

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99

TABLE DES MATIÈRESREMERCIEMENTS.........................................................................................................2REMARQUES MÉTHODOLOGIQUES..........................................................................3ABRÉVIATIONS ..............................................................................................................5

INTRODUCTION GÉNÉRALE………………………………………………………….....7

Premier chapitre – QUESTIONS D’INTRODUCTION ET CONTEXTE LARGE DE L’EVANGILE DE JEAN..................................................................................................10

Introduction.....................................................................................................................11I. GÉNÉRALITÉS SUR LE LIVRE DE JEAN ...........................................................11

A. Authenticité de l’Évangile de Jean......................................................................11B. Auteur et destinataires ........................................................................................12

1. Auteur...............................................................................................................12L’Évangile de Jean ne décline pas explicitement l’identité de l’auteur..................122. Destinataires ....................................................................................................14

C. Lieu et date de composition ................................................................................141. Lieu de rédaction .............................................................................................142. Date..................................................................................................................15

D. Style, langue et vocabulaire................................................................................151. Style et caractéristiques littéraires...................................................................152. Langue .............................................................................................................163. Vocabulaire ......................................................................................................164. Langage ...........................................................................................................17

E. Arrière-plan et influences de l’Évangile...............................................................181. Jean et la tradition synoptique.........................................................................182. Judaïsme contemporain et hellénisme............................................................19

II. UTILISATION DE L’ANCIEN TESTAMENT PAR JEAN ......................................20III. INTENTION THÉOLOGIQUE DE JEAN...............................................................21

A. But de l’Évangile de Jean....................................................................................21B. Les thèmes chez Jean ........................................................................................22

IV. PLAN DE L’ÉVANGILE..........................................................................................23A. Division classique bipartite entre le Livre des Signes et le Livre de la Gloire ....23B. Autres propositions de plan.................................................................................24C. Trames selon le motif de la vie ...........................................................................24Synthèse ....................................................................................................................24

100

Chapitre II – ACCOMPLISSEMENT DE L’ŒUVRE DU PERE....................................26

Introduction.....................................................................................................................27I. LE PROLOGUE .....................................................................................................27

A. Sa structure .........................................................................................................27B. Sa fonction...........................................................................................................29

II. ANALYSE DE Jn 19.30b .......................................................................................31A. Critique textuelle et traduction de Jn 19.30b.......................................................31B. Contexte littéraire large du quatrième évangile ..................................................31

1. Le livre des signes (1.19 à 12.50) ...................................................................312. Le livre de la gloire (13.1 à 20.31) ...................................................................32

C. Contexte littéraire proche ....................................................................................33D. Contexte littéraire immédiat.................................................................................33E. Synthèse contextuelle .........................................................................................33F. La péricope de Jn 19.28-30 ................................................................................34G. Interprétation théologique de Jn 19.30b..........................................................35

1. Bref état de la question....................................................................................362. Notre interprétation ..........................................................................................373. Synthèse ..........................................................................................................40

III. ACCOMPLIR L’ŒUVRE DU PÈRE ......................................................................41A. Les œuvres du Père............................................................................................41B. L’œuvre du Fils en conformité avec la volonté du Père .....................................43C. L’œuvre du salut..................................................................................................44D. L’envoyé révèle le Père.......................................................................................44

1. Le Fils révèle le Père .......................................................................................452. Le Fils témoigne du Père.................................................................................463. Le Fils est médiateur........................................................................................474. Le Fils donne des signes de la vie ..................................................................485. Synthèse ..........................................................................................................49

101

Chapitre III – L’ACCOMPLISSEMENT DU SALUT COMME NOUVELLE CRÉATION…………………………………………..……………………...50

Introduction.....................................................................................................................51I. LA PÂQUE .............................................................................................................52

A. Origines de la Pâque...........................................................................................52B. Signification de la Pâque.....................................................................................52

II. LA RÉSURRECTION.............................................................................................53III. UNE NOUVELLE CRÉATION...............................................................................56

A. Toute la création est portée à son accomplissement .........................................56B. Parallèle entre Gn 1.1 et Jn 1.1 ..........................................................................59C. Parallèle entre Gn 2.2 et Jn 19.30 ......................................................................60D. Parallèle entre Gn 2.7 et Jn 20.22 ......................................................................61E. Une nouvelle créature .........................................................................................63F. Un nouveau ciel et une nouvelle terre ................................................................64Synthèse ....................................................................................................................65

CONCLUSION GENERALE..........................................................................................67

ANNEXES......................................................................................................................70Annexe I – Les paroles de Jésus en croix.................................................................71Annexe II – Plans de l’Evangile de Jean. ..................................................................72Annexe III – Plans en synoptique. .............................................................................74Annexe IV – Comparaison entre le vocabulaire des synoptiques et l’Evangile de

Jean................................................................................................................................76Annexe V – Répartition du vocabulaire selon le plan bipartite et quadripartite. .......78

BIBLIOGRAPHIE...........................................................................................................87

TABLE DES MATIÈRES................................................................................................99