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UNIVERSITE MOHAMMED V-AGDAL Faculté des Sciences Juridiques, Economiques & Sociales – Rabat
L’INDEPENDANCE DU POUVOIR JUDICIAIRE AU MAROC
Travail encadré par : Pr. Hassane HABTE réalisé par : Sara LOUALI
Hamza RAJI Omar AGUENDICH
SOMMAIREINTRODUCTION......................................................................................................................................4
I- L’INDEPENDANCE DU POUVOIR JUDICIAIRE........................................................................................5
1-Les garanties constitutionnelles et institutionnelles.......................................................................5
2-Débat autour de l’indépendance du ministère public.....................................................................8
a. Le ministère public en droit comparé.....................................................................................9
b. Le ministère public en droit marocain..................................................................................11
II- L’INDEPENDANCE DES MAGISTRATS ET DU PERSONNEL JUDICIAIRE..............................................15
1- L’indépendance des magistrats................................................................................................15
2. L’indépendance des auxiliaires de justice....................................................................................16
a. Les huissiers de justice..........................................................................................................17
b. Les notaires..............................................................................................................................19
b. Les traducteurs agréés..........................................................................................................20
INTRODUCTION
La justice et son indépendance suscitent constamment des débats nourris et
passionnés. Le sujet, il est vrai, est sensible puisqu’il touche à la fois le droit et la famille
judiciaire, la politique avec ses usagers et la société et ses concitoyens.
Curieusement, toute approche sur l’indépendance de la justice se décline invariablement
vers deux autres sujets : l’indépendance du pouvoir judiciaire et celle des juges.
La question qui d’emblée, se pose, est si l’on parle d’indépendance de la justice ou
indépendance du pouvoir judiciaire. Le concept de justice indépendante et de pouvoir
judiciaire est entretenu de façon confuse par un public qui peine à les dissocier. Pourtant, la
distinction est d’importance.
Parler de la justice c’est appréhender le système dans son ensemble. La justice, dans son
acception classique, c’est un corps de magistrats, mais aussi d’auxiliaires et d’officiers
ministériels. C’est toute une organisation matérielle et c’est encore un dispositif d’ensemble
mis au service public !
La justice peut être multiforme. Ainsi peut-elle avoir une connotation scientifique ?
civile, pénale, militaire ou internationale. La justice n’est pas seulement celles des juges et
des juristes. Elle peut, en effet, revêtir un caractère philosophique, religieux ou encore
clanique.
La justice c’est encore un acte banal de vie courante : ainsi lorsqu’il s’agit de réparer une
injustice tel le fait d’avoir mal partagé la part du gâteau aux enfants … Le thème de
l’indépendance de la justice est très extensible. Dès lors dans le contexte qui nous occupe, la
logique commande de s’intéresser plus particulièrement à l’indépendance du pouvoir
judiciaire.
Depuis Locke et Montesquieu aux 17ème et 18ème siècles, la notion d’Etat s’inspire
de la théorie de la séparation des pouvoirs entre le législatif, l’exécutif et le pouvoir
judiciaire. Toutefois, Locke 1690 relevait une nuance dans la déclinaison des pouvoirs,
s’agissant de distinguer entre le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir fédératif
ou droit de faire la guerre et de signer les traités. Montesquieu (1748), pourtant considéré
comme l’inspirateur des trois pouvoirs, énonçait dans son " Esprit des lois" : « il y a dans
chaque Etat trois sortes de pouvoirs : la puissance législative, la puissance exécutive des
choses qui dépendent du droit des gens et la puissance exécutrice de celles qui dépendent
du droit civil ». Cette hésitation à sanctifier le pouvoir judiciaire et son indépendance n’a
cessé de perturber. Ainsi, en France, la Constitution de 1958 n’a institué, aux côtés d’un
pouvoir exécutif et d’un pouvoir législatif, qu’une "autorité" judiciaire.
Au demeurant, ainsi que le faisait remarquer récemment un haut magistrat lors d’un
colloque international, " l’indépendance de la justice est toujours proclamée mais reste
soumise, dans beaucoup de pays, à l’omnipotence de la souveraineté de l’Etat".
On remarquera que les termes "d’indépendance de l’autorité judiciaire" et "d’indépendance
de la justice" sont indistinctement employés
Cette confusion persistante n’altère en rien ce qui est au cœur des enjeux, c’est-à-dire la
nature des relations entre l’exécutif et le judiciaire.
L’intrusion réciproque des deux pouvoirs – exécutif et judiciaire – dans leur sphère
d’influence respective est souvent stigmatisée. L’Etat politique parle de "pouvoir des juges "
pendant que les juges dénoncent "l’interventionnisme de l’Etat". En fait, tout dépend du
régime applicable et du concept que l’on adopte, lequel postule pour deux options, l’une
instaure un véritable pouvoir judiciaire où le président de la Cour Suprême est à la fois chef
de la juridiction la plus élevée et l’ordonnateur qui préside au fonctionnement de tout le
corps judiciaire. Il dispose d’une grande autonomie et occupe un rang hiérarchique dans
l’Etat, égal à celui du chef du gouvernement. Et l’autre, institue une juridiction suprême à
savoir la Cour de Cassation dont la fonction consiste uniquement à juger en droit. A côté,
subsiste un ministre de la justice qui dispose de pouvoirs accrus dans l’organisation judiciaire
et dans la nomination des magistrats, particulièrement ceux du parquet. Un Conseil de la
magistrature décide de la carrière des juges et un Conseil Constitutionnel veille au respect de
la constitutionnalité des lois.
Cette formule est loin de donner satisfaction, car elle remet sans cesse en cause la ligne de
démarcation entre le pouvoir politique et l’indépendance des juges.
I- L’INDEPENDANCE DU POUVOIR JUDICIAIRE
1-Les garanties constitutionnelles et institutionnelles
Au Maroc, il y a toujours eu une disposition constitutionnelle sur l’indépendance du
pouvoir judiciaire et la séparation des pouvoirs. Ainsi l’article 82 de la constitution de 1996
et l’article 107 de la Constitution de 2011 prévoient que « Le pouvoir judiciaire est
indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif ». Néanmoins, malgré cette
consécration constitutionnelle des principes de la séparation des pouvoirs et de
l’indépendance du pouvoir judiciaire, plusieurs obstacles, en droit et en pratique, ont
souvent compromis l’indépendance du pouvoir judiciaire.
L’une des grandes innovations introduites par la Constitution marocaine du 29 juillet
2011 demeure sans nul doute l’élévation de l’autorité judiciaire au rang de véritable pouvoir,
aux côtés des pouvoirs, exécutif et législatif, participant ainsi à l’établissement d’un réel
équilibre des pouvoirs.. Ce nouveau statut accordé au pouvoir judiciaire participe
directement au renforcement de son indépendance. En effet, puisqu’il s’agit désormais d’un
pouvoir à part entière, il ne peut subir de subordination de la part d’aucun autre.
L’indépendance de la justice ne peut se concevoir sans une institution gardienne de
cette indépendance. Vu sa composition, ses compétences et son manque d’indépendance, le
Conseil Supérieur de la Magistrature, prévu par le cadre législatif marocain actuel, ne peut
jouer ce rôle.
Le manque d’indépendance du Conseil Supérieur de la Magistrature vis-à-vis de
l’exécutif s’exprime, entre autres, par le fait que le Ministre de la Justice, en tant que vice-
président du Conseil, joue un rôle important dans la nomination, la promotion et la discipline
des magistrats. Bien que le Conseil supérieur de la magistrature soit une institution
constitutionnellement indépendante, il dépend financièrement du Ministère de la justice et
s’assimile, dans la pratique, à un de ses départements.
En outre, l’inspection générale des services judiciaires est aussi rattachée au
Ministère de la Justice et non au Conseil Supérieur de la Magistrature. Selon l’article 13 de la
loi fixant l’organisation judiciaire du Royaume1, « le ministre de la justice désigne un ou
plusieurs magistrats (…) pour procéder à l’inspection des juridictions autres que la Cour
suprême ou pour enquêter sur les faits déterminés (…) les rapports d’inspection sont
transmis sans délai au ministre de la justice avec les conclusions des inspecteurs ainsi que
leurs suggestions. Pour remédier à cette situation où le pouvoir exécutif joue un rôle
déterminant dans la carrière des juges, la Constitution marocaine de 2011 prévoit
l’établissement d’un Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire dans l’objectif est de limiter la
représentation du pouvoir exécutif au sein du Conseil Supérieur de la Magistrature, le
déséquilibre de sa composition et le caractère restreint de ses attributions.
L’article 115 prévoit que : « le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire est présidé par
le Roi. Il se compose du Premier-président de la Cour de Cassation en qualité de Président-
délégué ; du Procureur général du Roi près la Cour de Cassation ; du Président de la
première chambre de la Cour de Cassation ; de 4 représentants élus, parmi eux, des
magistrats des juridictions du premier degré. Une représentation des femmes magistrats
doit être assurée, parmi les dix membres élus, dans la proportion de leur présence dans le
corps de la magistrature ; du Médiateur ; du Président du Conseil National des Droits de
l’Homme, de 5 personnalités nommées le Roi, reconnues par leur compétence, leur
impartialité et leur probité, ainsi que leur apport distingué en faveur de l’indépendance de la
justice et de la primauté du droit, dont un membre est proposé par le Secrétaire général du
Conseil Supérieur des Ouléma »
Cette disposition écarte le Ministre de la Justice de la composition du Conseil
Supérieur du Pouvoir Judiciaire. De plus, les compétences du Conseil ont été explicitement
revues et élargies dans l’article 113 de la constitution : « Le Conseil Supérieur du Pouvoir
Judiciaire veille à l’application des garanties accordées aux magistrats, notamment quant à
leur indépendance, leur nomination, leur avancement, leur mise à la retraite et leur
discipline ».
En plus des mesures précitées, un certain nombre de dispositions constitutionnelles
1 Dahir portant loi n°1-74-338 (24 Joumada II 1394) fixant l’organisation judiciaire du Royaume (B.O 17 Juillet 1974)
encadrant le statut des magistrats participent au raffermissement de leur indépendance.
Qualifié de « bouche qui dit la loi », le juge n’est soumis à aucune autorité à même de
compromettre son indépendance et son impartialité. L’inamovibilité du magistrat instaurée
par l’article 108 de la Constitution consolide davantage son indépendance vis-à-vis des
autres pouvoirs.
Toute personne a droit d’être jugée par un juge indépendant et impartial, dans le
cadre d’un procès équitable. Ce qui explique le fait que des dispositions de valeur
constitutionnelles soient adoptées afin d’immuniser le juge contre toute ingérence ou
immixtion. L’article 109 de la Constitution dispose, à juste titre, qu’ « Est proscrite toute
intervention dans les affaires soumises à la justice. Dans sa fonction judiciaire, le juge ne
saurait recevoir d’injonction ou instruction, ni être soumis à une quelconque pression ».
Ainsi, l’indépendance du juge le met à l’abri de toute pression, dans la mesure où il ne reçoit
d’ordre de quiconque, encore moins de ses semblables.
En outre, les magistrats jouissent de la liberté d’expression, en compatibilité avec
leur devoir de réserve et l’éthique judiciaire. Ils peuvent adhérer à des associations ou créer
des associations professionnelles, dans le respect de devoirs d’impartialité et
d’indépendance de la justice, et dans les conditions prévues par la loi. En revanche, ils n’ont
pas la possibilité d’adhérer à des partis politiques ou à des syndicats, puisque leur
indépendance peut être mise à mal en cas d’appartenance à une formation partisane. Le
principe de séparation des pouvoirs risque, dans un tel cas de figure, d’être sérieusement
remis en cause.
Il apparaît donc clairement, au vu des diverses garanties constitutionnelles et
institutionnelles mises en place afin de garantir et de renforcer l’indépendance du pouvoir
judiciaire marocain, que ce dernier a été pensé dans le cadre global de la construction et de
la consolidation de l’Etat de droit, puisque l’idée essentielle se dégageant de ce qui précède
est que ce pouvoir indépendant est toutefois soumis au caractère souverain de la loi, dans la
mesure où même les décisions émanant de l’autorité hiérarchique, pour être exécutées par
les magistrats, doivent être conformes à la loi.
Or, il se trouve que le corps de la magistrature, au delà de son unicité institutionnelle
et constitutionnelle conforme à la tradition juridique et judiciaire marocaine depuis 1913 ,
est en fait constitués de deux organes, le ministère public et le siège.
2-Débat autour de l’indépendance du ministère public
En réalité, si les magistrats du siège ne sont astreints qu’à la seule application du
droit. Les magistrats du parquet eux, sont tenus à l’application du droit et doivent se
conformer aux instructions écrites émanant de l’autorité hiérarchique conformément aux
dispositions de l’article 110 de la constitution de 2011
Dans l’état actuel du droit, cette autorité n’est autre que le ministre de la justice .Un
membre de l’exécutif, chargé de l’établissement de la politique pénal général conformément
aux dispositions de l’article 51 du Code de procédure pénal. Et de surcroit, fondé à donner
des instructions aux magistrats du ministère public, et de requérir la mise en mouvement de
l’action public auprès de ces derniers
L’on peut donc s’estimer fondé à penser que dans ces conditions, l’indépendance du ministère public, n’est pas garantie, et lèse l’indépendance du système dans son ensemble.
En ces moments de profondes réflexions autour de la refonte du système judiciaire
que connait notre pays, ce débat est de loin celui qui attise les passions et renforce les
antagonismes, entre ceux qui proposent tout simplement de mettre fin à cette tutelle du
ministre de la justice sur la parquet, et ceux, plus nuancés, qui demandent d’abord à avoir
les garanties à même de permettre de passer ce cap. L’on s’efforcera à l’occasion de cette
section, d’analyser ces deux positions à travers la statut du ministère public dans le régimes
de droit comparé, avant d’en tirer des conclusions pour le cas marocain
a. Le ministère public en droit comparé
Il existe en la matière, trois grands régimes de droit :
Régime dans lequel les magistrats du ministère public sont soumis au contrôle et à
l’autorité du pouvoir exécutif (le ministre de la justice dans la plupart des cas) :
Un grand nombre de pays partagent ce régime avec plus ou moins de spécificité, il
s’agira notamment de la France, qui connait également le même débat que nous
connaissons, et qui a modifié récemment son code de procédure pénale dans le sens de
l’allégement de l’autorité qu’a le ministre de la justice, garde des sceaux sur le ministère
public. Cette réforme fait suite à la condamnation de la France par la Cour Européenne des
Droits de l’Homme qui énonçait dans son arrêt du 23 octobre 2010 dans l’affaire Moulin C
France que « du fait de leurs statuts (…), les membres du ministère public, en France, ne
remplissent pas l’exigence d’indépendance à l’égard de l’exécutif » Ainsi, la Cour de
Strasbourg a constaté, par cette décision, que les magistrats du parquet « dépendent tous
d’un supérieur hiérarchique commun, le garde des sceaux, ministre de la Justice, qui est
membre du gouvernement, et donc du pouvoir exécutif », qu’ils « ne sont pas inamovibles
en vertu de l’article 64 de la Constitution », qu’ils « sont placés sous la direction et le
contrôle de leurs chefs hiérarchiques au sein du Parquet, et sous l’autorité du garde des
sceaux, ministre de la Justice » et qu’enfin, « le ministère public est tenu de prendre des
réquisitions écrites conformes aux instructions qui lui sont données (…), même s’il développe
librement les observations orales qu’il croit convenables au bien de la justice ».
En Belgique, l’autorité du ministre de la justice, si elle reste de mise, et beaucoup plus
modérée est reste cerné par la seule exigence du suivi de l’exécution de la politique pénal,
d’autant plus qu’il existe un collège de procureur généraux, et un collège de procureurs du
Roi, qui sont des conseils consultatifs qui contribuent à l’élaboration des instructions
adressés aux différents parquets
En Allemagne, les choses sont tout à fait différentes, puisque si les membres du
ministère public sont soumis à l’autorité du ministère de la justice certes, ils ne le sont pas
en tant que magistrats, mais en tant que fonctionnaires publics, membres à part entière de
l’exécutif.
Les pays bas, l’Autriche et la plupart des pays scandinaves, ont opté quant à eux pour
un régime où le procureur général est un magistrat désigné à vie par décret royal, parmi
trois magistrats proposés par le ministre de la justice. Ce procureur général, est en réalité la
véritable autorité sous l’égide de laquelle pratiquent les magistrats du ministère public, le
ministre de la justice, peut seulement, après avoir été habilité à cet effet par le parlement,
saisir le procureur général par instruction écrite afin de mettre en mouvement l’action public
à l’occasion d’un cas d’espèce, ou le ministère public a décidé de classer l’affaire. Il est
toutefois bon de noter que cette hypothèse s’est réalisé une seule fois en 100 ans.
Régime dans lequel le ministère public est indépendant du pouvoir exécutif :
Les régimes Espagnol et Italien sont ténors en la matière :
En Espagne, le ministère public est placé sous l’autorité du procureur général de l’Etat
(Fiscal General Del Estado) et ce en vertu de la loi 124/2007 publié en date du 09/10/2007
qui a modifié l’organisation judiciaire en Espagne. Le procureur général est en vertu de cette
loi , nommé par le Roi sur proposition du gouvernement , et peut être un magistrat ou tout
autre personnalité ayant pratiqué un métier de Droit pendant au moins 10 ans. Il lui est
attribué la prérogative de préparer et d’exécuter la politique pénal général, et le ministre de
la justice, ne peut tout au plus, que l’informer des infractions dont il a eu écho, sans pouvoir
lui adresser aucune sorte d’instructions.
En Italie, le procureur général de la république joue quelque peu le même rôle.
Le régime anglo-saxon :
Le régime anglo-saxon ne connait pas du ministère public tel que nous l’apprécions
au sens classique. Il propose toutefois pour son indépendance, une solution médiane qui se
présente le plus généralement ( aux états unis et en grande Bretagne notamment ) comme
suit :
Le procureur général (The Attorney General) est un haut fonctionnaire, ayant
officiellement le statut de ministre au sein du gouvernement, même s’il ne siège pas au
conseil des ministres. Ce dernier n’est pas uniquement chef du parquet général , il est
également conseiller juridique du gouvernement , et chargé de défendre l’Etat et ses
institutions au cours de différentes audiences ou il peut être suppléée par des avocats
généraux. En grande Bretagne, il est nommé par le Roi ou la Reine sur proposition du
premier ministre et aux Etats Unis, il est nommé par le président de la république.
b. Le ministère public en droit marocain
S’il fallait catégoriser le statut du ministère public au sein des trois grandes familles
ci-haut esquissées, il est clair qu’il est actuellement, à l’instar du régime français, dans la
première catégorie. Cependant, à l’issue du débat national sur la réforme du système
judiciaire, il a été recommandé que le ministère public soit séparé du ministre de la justice,
et qu’il soit placé sous l’autorité et le contrôle du procureur général près la Cour de
Cassation. Le projet de loi organique relatif aux statuts des magistrats va d’ailleurs
clairement dans ce sens, en ce qu’il dispose dans son article 20 que « Les magistrats du
ministère public sont soumis à l’autorité et au contrôle du procureur général près la Cour de
Cassation et de leurs chefs hiérarchiques ». Ce qui vient clairement lever le voile sur cette
autorité énoncée au terme de l’article 111 de la constitution, si le texte est approuvé en
l’état.
L’idée a certes le mérite d’être séduisante. Elle l’est en effet, dans la mesure où elle
sépare de manière radicale le pouvoir judiciaire du pouvoir exécutif, non sans nous rappeler
les idéaux de la pensée des lumières. Mais cela pose un certain nombre de problèmes, et
s’arrêter à ce simple constat de bon sens, serait bien trop simpliste.
En réalité, l’ampleur qu’a prise cette question dans le débat public est trop grande.
Elle part d’ailleurs d’une idée reçue, conséquence certainement d’un choix terminologique
galvaudé. En effet, bien trop nombreux sont ceux qui continuent à plaider que le ministre de
la justice, est actuellement, le « Chef du parquet », seulement, aucun texte juridique
n’emploie ce terme. On pourrait penser que malgré cela, de part ses attributions, le ministre
de la justice l’est de facto. Or, ses attributions sont forts bien limitées. Aussi, le ministre de
la justice, dans l’exécution de la politique pénale générale, n’a que le droit de requérir du
parquet général, par instruction écrite uniquement, de mettre en mouvement l’action
publique dans tel ou tel cas d’espèce, ou émettre des instructions d’ensemble afin de rendre
unanime la réponse du ministère public au phénomène criminel. Et ce, en adéquation avec
la politique pénale établie par le gouvernement, légitime en cela puisque issue d’élection, en
partie grâce à son programme électorale relatif à la question. Précisons encore qu’il s’agit là
des limites des prérogatives du ministre de la justice, et qu’il ne peut s’agir que
d’instructions positives. En d’autres termes, rien ne permet au ministre de la justice de
demander l’arrêt des poursuites, il ne peut que demander leur engagement, et de surcroit,
en donnant ces instructions, il engage sa responsabilité politique, et celle de son
gouvernement, devant le parlement.
Si demain le ministère public est soumis à l’autorité du procureur général du Roi près
la Cour de Cassation, devant quelle autorité devra il rendre compte ? Aucun mécanisme de
contrôle n’est pour l’heure proposé, et on imagine mal ses contours. Encore plus incohérent,
les recommandations prescrivent de sauvegarder au ministre de la justice l’attribution de
préparer la politique pénale générale, l’exécution de cette politique étant dévolue au
procureur général près la Cour de Cassation. Le parlement pourrait-il alors évoquer la
responsabilité du ministre de la justice, en cas d’échec dans l’exécution de cette politique
pénale ? On l’imagine mal encore une fois, puisqu’il n’en a plus les moyens. Enfin, le
procureur général devra-t-il rendre compte de cette exécution au ministre ? auquel cas, le
rapport qu’il lui déférera concernant l’état de cette exécution ne sera d’aucun intérêt , à
moins de supposer que le ministre de la justice aura autorité et contrôle sur le procureur
général du roi prés la cour de cassation , ce qui serait le comble de cette réforme.
Ensuite, il faut bien dire que les attributions du ministère public, dépassent de loin
l’exigence de la simple application de la loi. En effet, il est un principe fondamental
régissant la pratique des magistrats du ministère public, dans le cadre de la protection de
l’intérêt général, qu’est le pouvoir d’appréciation dont découle le principe de l’opportunité
de poursuite, qui leur permet de mettre en balance , l’intérêt de la mise en mouvement de
l’action publique , de la classification d’une affaire , ou du choix d’une voie alternative , à
savoir la prise d’une décision qui permette de protéger la société , tout en sauvegardant
d’autres intérêts , les situations étant complexes. (phrase trop longue, je n’ai pas bien
compris)
En effet, il est des cas d’espèces ou la stricte application de la loi n’à point d’intérêt
pour la société, nous pensons à l’affaire de ce touriste homosexuel britannique, gardé à vue
et poursuivi par le parquet de Marrakech pour atteinte à la pudeur. Cette affaire a suscité
des remous diplomatiques insensés entre le Maroc et la Grande Bretagne et ont terni les
relations bilatérales entre les deux pays. Le ministre de la justice, s’il avait été avisé, aurait
pu prendre contact avec les services diplomatiques britanniques, son collègue au
gouvernement chargé des affaires étrangères et de la coopération, et opter pour une
solution médiane, qui tout en protégeant les intérêts de la société marocaine, ne mettrait
pas en péril inutilement les intérêts stratégiques du Maroc. (On se souvient que le parlement
britannique avait appelé à boycotter la « destination Maroc ». Une période de garde à vue
suivie d’un refoulement conformément aux dispositions de la loi 02-03 aurait pu être une
solution qui, tout en intimidant les touristes malveillants, veillerait à ne pas froisser les
intérêts du pays. D’autant plus qu’aucune partie civile ne souffrirait d’un quelconque
préjudice.
D’autres pays, disposant d’un poids diplomatique considérable, peuvent aussi
souffrir de cette indépendance poussée à l’extrême de leur autorité judiciaire. La France n’a-
t-elle pas souffert de la suspension unilatérale par le Maroc des accords de coopérations
judiciaires entre les deux pays, suite à une grossière transgression par une juge d’instruction
parisienne des conventions de Viennes relatives à l’immunité diplomatiques, après avoir
indument convoqué à l’instruction, le directeur de la DST marocaine par voie de compagnie
républicaine de sécurité ?
Si aujourd’hui le ministre de la justice ne peut plus jouer ce rôle d’assistance, au vu
des moyens de renseignements dont il dispose, le procureur général du Roi devra
certainement le faire (parce que penser qu’il n’aura pas à le faire est juste utopique).
L’institution prestigieuse du parquet général près la Cour de Cassation, devra donc coopérer
très étroitement, avec les différents services du pouvoir exécutif, ce qui revient à créer l’effet
inverse de celui recherché en séparant le ministère public du ministre de la justice. Ce sera
rendre la plus haute autorité judiciaire du Royaume (la cour de cassation) tributaire du
renseignement, de la chancellerie, et la mêler à des prises de décisions inéluctablement
sensibles aux influences politiques, diplomatiques et stratégiques. Ce qui n’est pas le
meilleur moyen de consacrer l’indépendance de la justice, et le prestige de sa plus haute
institution. Sans parler encore une fois du fait, que les mécanismes de contrôle et de
responsabilité, ne sont toujours pas clairs, alors qu’ils le sont relativement aujourd’hui.
En réalité, le problème réside à notre sens ailleurs. Si on a aujourd’hui le sentiment
d’une forte ingérence du ministère de la justice dans les prérogatives du ministère public,
c’est en très grande partie lié au conflit d’intérêt au sein même du Conseil Supérieur de la
Magistrature, qui rappelons le, est vice-présidé par le ministre de la justice, toujours influant
en son sein. Les magistrats du parquet, conscients de ce fait, ont souvent du mal à refuser
des instructions orales, à résister à des pressions subtiles, souvent liées à leur amovibilité, et
autres prérogatives dont dispose le ministre de la justice, lui permettant de se faire entendre
en dehors de ce qui lui est dévolu par la loi. Nous pensons que la nouvelle composition
hétéroclite et indépendante du ministre de la justice, et du Conseil Supérieur du Pouvoir
Judicaire, pourrait mettre fin à de telles pratiques et conforter le ministère public dans ses
choix et dans ses attributions.
D’autres solutions peuvent nous paraitre envisageable cependant, entre autre la
dotation de la direction des affaires pénales et des grâces d’un statut particulier lui
permettant d’avoir autorité sur le ministère public, en ne gardant avec le ministre de la
justice qu’un lien de subordination de tutelle administrative et non hiérarchique . Nous
penserons aussi à cette institution du collège des procureurs consacré par le droit belge, au
risque de ne pas évoquer la proposition radicale qui voudrait décliner aux magistrats du
ministère public, leur statut de magistrat.
Mais nous pensons qu’en tout état de cause , pour les quelques raisons ci-haut
déclinées, que la réforme proposée dans son état actuel ne présente pas suffisamment de
garanties permettant de mettre le ministère public sous l’autorité du procureur général du
Roi, et que si ce transfert venait à être opéré , il porterait outrageusement atteinte à
l’institution du procureur général du Roi près la Cour de Cassation, qui devrait rester au
dessus des déboires quotidiens de la politique pénale.
II- L’INDEPENDANCE DES MAGISTRATS ET DU PERSONNEL JUDICIAIRE
1- L’indépendance des magistrats
L’on pourrait perfectionner au paroxysme l’ingénierie des structures
organisationnelles de l’autorité judiciaire afin de pérenniser son indépendance, mais il n’en
reste pas moins que la qualité de la justice étatique dépend en grande partie des qualités
morales et intellectuelles de ceux qui la rendent. D’où l’importance des conditions de leur
recrutement, de leur formation, et de leur nomination. Le préambule du code de procédure
pénale l’exprime fort bien, il ne sert à rien de disposer d’un droit sophistiqué si celle et ceux
qui sont amenés à le pratiquer ne sont pas intègres d’un point de vue éthique et
déontologique, mais aussi performant d’un point de vue technique et professionnel.
Cependant, même si l’on réussit de par la loi, à protéger les magistrats de toute sorte
d’ingérence et de pressions subtiles et indirectes qu’ils peuvent subir, par des mécanismes
de mutation-sanction, de délégation-sanction, d’avancements, et tout ce qui peut influencer
leur carrière, il n’en restera pas moins que les magistrats ne seront pas à l’abri d’un certain
nombre de facteurs exogènes d’influence qu’on peut difficilement cerner.
Au premier rang desquelles, l’on ne peut passer outre la pression que fait planer
l’opinion publique et les médias, parfois peu scrupuleux d’ailleurs, sur les magistrats, surtout
dans le cadre de procès pénaux. En effet, certains médias ne prêtent aucune attention aux
exigences du secret de l’instruction en matière d’enquêtes préliminaires et d’instructions
préparatoires, la présomption d’innocence est bafouée, et l’étalage de tous les éléments et
pièces de dossier en cours d’instruction est devenu norme. Des commentateurs n’éprouvent
par la suite aucune réticence à rédiger des articles de nature à diriger l’opinion publique vers
un sens ou un autre , avant même que les juges ne se soient prononcés sur la question. Le
plus souvent, ces commentaires sont fait sans réelle connaissance des pièces versées au
dossier, de manière profane, dans un profond attrait idéologique, ou uniquement en quête
de sensation (et de bénéfices). Mais quelqu’en soient les raisons, ces infractions à la loi
(puisqu’il s’agit bien d’infraction), finissent par avoir raison de l’opinion publique, et les
magistrats en charge du dossier, peuvent plier sous le coup de ces pressions, sous peine de
donner à cette vindicte populaire l’impression d’une justice soumise et qui ne rend pas le
droit. Des coupables sont alors innocentés, et des innocents condamnés.
Cette pression peut aussi être le fruit de certaines associations et autres
groupements de la société civile, qui, souvent de bonne foi, s’empressent de faire pression
sur les juridictions s’agissant d’un cas d’espèce précis. Parfois même, des associations aux
premiers rangs des appelants à l’indépendance de la justice, sont les premiers à égratigner
cette indépendance qu’ils appellent de leurs vœux, par la pression illégale qu’ils pratiquent
sur l’autorité judicaire saisie d’une affaire avant même qu’elle ne se soit prononcée.
2. L’indépendance des auxiliaires de justice
Les auxiliaires de justice sont des personnes qui facilitent la tâche du juge et des
justiciables. Sous cette appellation on peut ranger des juristes professionnels ou des
praticiens du droit autres que les magistrats.
On distingue généralement les officiers ministériels, les experts (ou techniciens) et le
personnel de la police judiciaire qui joue un rôle d'information du juge pénal. Il s'agit ici
d'auxiliaires du juge comme le personnel du secrétariat-greffe et le corps des huissiers de
justice. A côté de ces personnes, il existe une seconde catégorie d'auxiliaires de justice dont
la tâche consiste à assister et à représenter les plaideurs. Ce sont alors des auxiliaires du
justiciable et on pense en particulier aux avocats.
Cette classification n'en reste pas moins artificielle et très formelle. Les experts,
séquestres ou administrateurs judiciaires et d'autres techniciens ainsi que les huissiers de
justice, les notaires, les Adouls, les Oukils judiciaires…peuvent valablement être considérés
comme des auxiliaires des parties autant que des auxiliaires du juge. Mais sans tenir compte
de la distinction ainsi faite, on traitera ici, dans le cadre de notre étude, que de quelques
catégories d'auxiliaires de justice.
On examinera brièvement, et en relation avec notre sujet de la situation des notaires, des
traducteurs agréés, des experts, des Adouls et des huissiers de justice.
a. Les huissiers de justice
L'huissier de justice libéral et indépendant, cela a été maintes fois démontré, est un
gage d'indépendance de la justice. Que serait une justice qui se proclamerait indépendante
si les jugements, une fois rendus, devaient s'empiler dans les placards faute d'être
exécutés ? La question n'est pas innocente car les faits sont réels et connus.
Un Etat qui n'assure pas l'exécution de ses jugements est un Etat qui fragilise sa
sécurité juridique, cultive le terreau de la corruption et éloigne les opérateurs économiques.
Pour garantir une exécution efficace et de qualité l'huissier de justice libéral et indépendant
devient, dès lors, un maillon indispensable de la chaîne judiciaire. L'huissier de justice, à
l'image du juge, doit être - disions-nous - indépendant : c'est à dire à l'écart de tous les
pouvoirs et à l'abri de toutes les sources d'influence. Un huissier de justice indépendant
n'est soumis à aucune hiérarchie. Il doit seulement se plier à son autorité de discipline et
agir sous le contrôle du ministère public. Le juge ne doit pas interférer dans l'action de
l'huissier de justice car ses prérogatives doivent être limitées à trancher les litiges et
ordonner les mesures seulement lorsqu'il est saisi.
La procédure d'exécution doit être laissée au libre arbitre des parties. Pour qu'une justice
soit digne de son indépendance il importe de proscrire toute ingérence entre le pouvoir
exécutif et l'huissier de justice.
Il est intolérable qu'aujourd'hui encore, dans nombre de pays, les autorités de l'Etat,
au mépris du principe de la séparation des pouvoirs, interviennent sous des prétextes
fallacieux, pour arrêter le cours des exécutions ou en modifier la portée. Il est inadmissible
que des membres de gouvernement d'Etat, dont la devise en fronton de leur blason porte
en lettre d'or les mots de démocratie, Etat de droit, et droit de l'homme, sanctionnent de
suspension ou de destitution des huissiers de justice qui refusent de céder à la pression de
dresser un acte illégal.
Il faut condamner avec la plus extrême vigueur les décisions de gouvernements qui
décrètent unilatéralement l'extinction de toutes les procédures d'exécution, ou qui poussent
la population à résister aux injonctions des huissiers de justice. Combien de nos confrères
ont-ils eu à subir les vexations, les sanctions, voire à connaître les geôles de leur pays, pour
avoir résisté à des manœuvres intimidantes et hors la loi, alors qu'ils s'honoraient de remplir
la noble mission qui leur incombait : celle d'exécuter un jugement rendu au nom du peuple
ou de la République. Oui, l'indépendance de la justice passe par le respect de la décision
rendue et le soutien à l'huissier de justice qui est le seul agent en charge des opérations
d'exécution. Le nier conduirait à méconnaître la jurisprudence de la Cour européenne des
droits de l'homme, proclamant dans un arrêt du 22 juin 2004, que l'huissier de justice " était
un élément essentiel à l'Etat de droit ".
Enfin, là où les décisions de justice restent lettres mortes faute d'un corps d'huissiers
de justice libéral et indépendant, là - dis-je - s'instaure l'insécurité et là s'installe la justice
privée, autrement dit la loi du fort contre le faible et du puissant contre l'impécunieux.
L'inexécution des décisions devient alors une véritable atteinte à la démocratie.
Pour parvenir à une justice indépendante, il convient donc d'avoir non seulement un pouvoir
judiciaire indépendant mais encore un corps d'huissiers de justice lui aussi indépendant et
libéral.
Contrôle et discipline :
Afin de s'assurer, autant que faire se peut, de l'intervention effective et efficace des
autorités judiciaires et fiscales plus ou moins perméables à la corruption, on commence
d'abord par deux sortes de contrôle avant de poursuivre disciplinairement, voire
pénalement, l'huissier de justice défaillant quant à ses missions et obligations.
Contrôle judiciaire doublé d'une inspection par le parquet :
En premier lieu, le président de la juridiction compétente ou le magistrat délégué par
lui à cet effet contrôle l'activité et les actes des huissiers de justice de son ressort. Ce
contrôle a pour objet de vérifier notamment les formalités des actes et leur
accomplissement dans les délais ainsi que la régularité des manipulations des valeurs et
biens auxquelles a procédé l'huissier de justice.
Mais lorsque le président de la juridiction constate, à l'occasion de son contrôle, des
manquements aux obligations professionnelles, il dresse un rapport à cet égard et le soumet
au ministère public. L'huissier de justice est également soumis au contrôle des agents de
l'administration fiscale chaque fois qu'il en est requis, sans qu'aucun document ne soit
déplacé ou qu'il ne sorte de son bureau. Les agents du fisc exercent leur contrôle sur place.
Pour sa part, le procureur du Roi près le Tribunal de Première Instance compétent
procède à l'inspection des bureaux des huissiers de justice de son ressort au moins une fois
par an et chaque fois que l'intérêt (public/privé ?) l'exige, en espérant que lui ou surtout l'un
de ses substituts accomplissent consciencieusement leur inspection et dans les délais
prescrits.
De même, le chef du parquet compétent peut, lorsqu'il constate lors de ses
investigations de graves manquements aux obligations professionnelles (ou déontologique),
suspendre provisoirement l'huissier de justice pour une durée ne dépassant pas deux mois
et engager des poursuites disciplinaires à son encontre. Il avise directement le ministre de la
justice des procédures ainsi engagées.
En outre, lorsque l'examen de la poursuite disciplinaire est subordonné au résultat de
la poursuite pénale, la suspension provisoire se prolonge jusqu'à la révocation définitive de
l'huissier. Il lui est cependant permis de se défendre par voie de recours portée à la chambre
du conseil près le tribunal ordinaire compétent, dans un délai d'un mois (au lieu de trente
jours) à compter de la date de notification de la décision de suspension provisoire, en vue de
réclamer la levée de ladite suspension. La chambre du conseil doit, à son tour statuer dans
un délai maximum d'un mois à compter de la date du dépôt de la réclamation, sans être
certain qu'un tel délai soit impératif à son encontre, d'autant plus qu'il s'agit d'un recours
définitif car statuant sur la seule mesure de suspension provisoire.
b. Les notaires
Fonctionnaires publics rétribués par l'Etat et par une allocation sur taxe :
La situation des notaires est réglementée par le Dahir du 4 mai 1925 relatif à l'organisation
du notariat au Maroc. A la différence des notaires en France, ceux du Maroc sont surtout des
fonctionnaires publics rétribués par l'Etat et intéressés, en plus, à l'exercice de leurs
fonctions par l'allocation d'une remise proportionnelle sur la taxe qu'ils perçoivent pour le
compte de l'administration.
Fonctions essentielles :
Ces agents ont pour fonctions essentielles de recevoir les actes auxquels les parties
doivent ou veulent conférer le caractère authentique. Ils peuvent en outre rédiger sous seing
privé les actes pour lesquels la loi n'exige pas la forme solennelle. Outre leur mission de
rédiger des actes, les notaires doivent aussi donner des conseils aux parties sur la portée et
les conséquences des actes qu'ils dressent.
Ils sont enfin responsables pécuniairement des dommages causés par leurs fautes
professionnelles et celles de leurs employés. Pour couvrir ces dommages, il a été institué un
fonds d'assurance destiné à réparer, en cas d'insolvabilité du notaire, le dommage qu'il peut
causer aux parties. Ce fonds d'assurance est alimenté par certains prélèvements sur les
sommes perçues par le notaire en guise de taxe notariale.
b. Les traducteurs agréés
Le texte législatif principal, à savoir la loi 50.00, fixe successivement les conditions
d'exercice de la profession (chapitre 2: articles 3 à 9), le stage (chapitre 3: articles 10 à 23),
les droits et obligations du traducteur agréé (chapitre 4: articles 24 à 38), l'association entre
des membres de la profession s'ils le décident volontairement (chapitre 5: articles 39 à 43),
le contrôle exercé par le procureur général du roi près la cour d'appel ( chapitre 6: articles 44
et 45), les mesures disciplinaires prises par une commission ès qualité (chapitre 7: articles 46
à 59), les dispositions pénales en cas de poursuites (chapitre 8: articles 60 à 62) , l'association
professionnelles (chapitre 9: articles 63 à 66).