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    Le quotidien des affaires europennes Lundi 7 Novembre 2011 Supplment au N 4299 39e anne

    www.europolitique.info

    EUROPOLITIQUE

    Quelle Europe de la dfenseaprs la Libye ?

    Scurit - Dfense

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    SDA CO-PRESIDENTS

    Cyber-attacks are making headlines daily. The Security & Defence Agenda (SDA) separates fact from hype in

    cyber-security, with topics spanning cyber-governance, nancial and political consequences of cyber-attacks,

    threat perceptions, US-EU cooperation, critical infrastructure protection, and freedom vs. security.

    The SDA is the only regular forum in Brussels devoted to analysing and debatingthe future of defence and security policies. The SDA brings clarity and new

    ideas to the rapidly changing security and defence policy scene through its

    regular roundtables, debates, reports, international conferences and

    press dinners.

    Cyber has redened the frontlines of national security

    Willam J. Lynn III,US Deputy Secretaryof Defense

    The internet has becomea national asset

    Suleyman Anil,Head of the CyberDefence Section, NATO

    The internet is a blank page

    for Europe to reinvent itself onRobert Madelin,Director Generalfor Information Society and Media,

    European Commission

    The defences that we have todayare defences against the threatsof yesterday

    Jakub Boratynski,Head of Unit, DG Home,European Commission

    Any future conict willinclude a cyber dimension

    Tunne Kelam,Member of the Subcommitteeon Security and Defence, European Parliament

    Jaap De Hoop Scheffer,formerNATO Secretary General

    Javier Solana,former EU HighRepresentative for CFSP

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    BRINGING THE CYBER-DEBATE DOWN TO EARTH

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    EUROPOLITIQUE N 4299 Lundi 7 Novembre 2011

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    Sommaire du supplment au n 4299

    UE/OTAN: Lopration en Libye aaussi confirm les limites de la PESD ....4

    Entretien avec Arnaud Danjean,dput europen, prsident de lasous-commission scurit et dfense(SEDE): Il faut viter les caricaturesde la dfense europenne ....................6

    Tribune libre: Civil-military capabilities :the cornerstone of the CSDP .................... 7

    Entretien avec Tomasz Siemoniak,ministre polonais de la Dfense: LEurope de la dfense a besoin duneimpulsion politique forte et constante ... 8

    Antiterrorisme: Dix ans aprsle 11/09/2001, les menacessont plus complexes ................................9

    Entretien avec Giles Merritt,directeur du Security andDefence Agenda: Libye etcyberscurit au cur des dbats ........10

    UE/Mditerrane: Refontedes relations euro-mditerranennes,un test pour lUE ..................................11

    UE/OTAN: Les Europens tirentles leons de lintervention en Libye ....12

    Renseignement: LUE doitrenforcer son autonomie .......................13

    Cyberdfense: Une dfense quicommence sorganiser........................13

    Tribune libre: Eurocybex, premierexercice de cyber-crise europen ..........16

    Pooling & sharing : il esttemps de passer laction .....................17

    Marchs publics de dfense:La transposition de la directiveest sous haute surveillance ....................18

    Scurit maritime: La scurit passepar la coordination et linteroprabilit ... 19

    Tribune libre: Scurit maritime,la valeur ajoute europenne ...............20

    Scurit maritime: LAgenceeuropenne monte en puissance ..........21

    Statistiques: Les dpenses dedfense dans les pays de lOTAN .........23

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    PRODUCTION

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    Dossier coordonn par Paul Ames

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    4 Lundi 7 Novembre 2011 N 4299 EUROPOLITIQUE

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    Le 19 mars dernier, lorsque les huit Rafa-les et les quatre Mirages de lArme de lAirfranaise ont survol le littoral nord-afri-cain avant danantir des vhicules blindslibyens, marquant ainsi le dbut de la campa-gne arienne internationale lencontre duColonel Mouammar Kadhafi, daucuns ontpens que cet vnement marquerait lav-nement dune re nouvelle pour la dfenseeuropenne.

    Pour la premire fois de leur histoire, lestats-Unis nont endoss quun rle de sou-tien dans ce qui allait devenir une oprationde lOTAN, passant la main aux Europens.Les attaques ariennes, orchestres, en pre-mire ligne, par des avions de guerre britan-niques et franais, ont rapidement chang lecours du conflit libyen, renversant la contre-attaque de Kadhafi sur les rebelles de lEst dupays et prcipitant, au final, la chute de sonrgime.

    Les Europens semblaient avoir rponduavec une nettet sans faille aux plaintes misespar Washington depuis des dcennies quant

    au dsquilibre du partage des charges enmatire de scurit au sein de lOTAN, exor-cisant du mme coup le spectre des annes1990, au cours desquelles la force arienneamricaine avait mis un terme aux affronte-ments dans la rgion des Balkans aprs desannes de diplomatie europenne infruc-tueuse. Avec les actions dcisives menespar les troupes franaises en Cte dIvoire etle maintien de milliers de soldats europensen Afghanistan, les Europens se montraientapparemment la hauteur.

    Toutefois, alors que la campagne ariennesternisait sans aboutir, en trois mois, lef-fondrement rapide tant attendu des forcesde Kadhafi, Robert Gates a dcid de cltu-rer ses quatre annes et demi de mandat latte du ministre amricain de la Dfensepar un discours dnonant avec virulence lafaiblesse militaire de lEurope, affirmant quelopration en Libye navait fait que mettre nu le foss bant sparant les tats-Unis delUE en termes de capacits de dfense : Laplus puissante alliance militaire de lhistoire est

    engage depuis peine 11 semaines dans uneopration contre un rgime pauvrement arm,dans un pays faiblement peupl. Et pourtant,de nombreux allis commencent manquerde munitions et demandent aux tats-Unis,

    une fois de plus, de combler la diffrence. Afin

    dviter la possibilit trs relle dune inutilitmilitaire collective, les tats membres doiventexaminer de nouvelles approches pour accrotreleurs capacits de combat. Daprs M. Gates,de nombreux allis europens ne disposaienttout simplement pas du matriel militaire etdu personnel qualifi ncessaires une par-ticipation significative la mission libyenne.Ceux qui y ont pris part se sont rvls sous-quips dans des domaines cls tels que lesrenseignements, lapprovisionnement en volou les armes de prcision et ont t contraintsde demander laide des tats-Unis.

    DES BUDGETS RABOTS

    Autant de lacunes qui trahissent un malaiseau sein des forces armes europennes insuf-fisamment finances et rformes.

    La part des tats-Unis dans le budget delOTAN est actuellement de 77 %, contre63 % en 2001. Au vu de la crise laquellesont confrontes les finances publiqueseuropennes, la dfense est frappe, une foisencore, de compressions budgtaires. Depuis2008, dix-huit membres de lOTAN ont revu

    la baisse leurs dpenses militaires, a rappelFrank Boland, directeur de lAlliance pour laplanification des forces, aux participants lAs-semble parlementaire de lOTAN doctobredernier. En 2011, seuls trois pays atteindrontlobjectif fix par lAlliance de consacrer 2%de leur produit intrieur brut la dfense. Nous nous trouvons actuellement sur unemauvaise pente , a confi M. Boland auxparlementaires runis en assemble Buca-rest. Nous sommes confronts une situa-tion srieuse en termes de partage des tches.

    DES LACUNES POLITIQUES

    Les oprations en Libye ont galementrvl les lacunes politiques de lEurope.Labstention de lAllemagne lors du vote duConseil de scurit de lONU sur la rsolu-tion franco-britannique autorisant linter-vention militaire ne cadrait pas vraimentavec lide de politique trangre et descurit commune de lUE. Lopposition duRoyaume-Uni et de lItalie a rduit nantles espoirs franais de mener une campagne

    arienne portant ltendard de lUE et nonde lOTAN et les tentatives de mise sur pieddune mission terrestre europenne visant faciliter lacheminement de laide humani-taire nont abouti rien.

    Mme si le Royaume-Uni avait approuv

    la participation de lUE la gestion du voletnaval de lopration, le chef dtat-majorfranais a dclar que lUE, et notamment lahaute reprsentante pour les Affaires trang-res, Catherine Ashton, ntait pas prte ou nesouhaitait pas relever ce dfi. En Libye, lapolitique europenne de scurit et de dfensecommune a incontestablement manqu loc-casion de jouer un rle, a renchri lamiraldouard Guillaud. Nous tions un cer-tain nombre de pays, dont le Royaume-Uni, estimer que la mise en uvre de lembargomaritime pouvait tre assure directement parlUE , a prcis lAmiral Guillaud devantlAssemble nationale, en octobre dernier. LOTAN et les tats-Unis taient daccord.Mais la Haute reprsentante na pas saisi laballe et la microstructure militaire de lUnion aestim que proposer cette solution ne ressortaitpas de son mandat. Il ne faudrait pas manquerla prochaine occasion.

    Ds lors que lOTAN a pris en charge lamission libyenne, 2011 a t une anne tran-quille pour la politique europenne de scu-rit et de dfense (PESD) commune. Lini-

    tiative lance fin 2010 visant coordonner lamutualisation et le partage des capacits mili-taires entre les tats membres de lUE et ce,en vue de rduire les cots lis la dfense,doit maintenant dboucher sur des rsultatsconcrets. Linitiative du Triangle de Weimarpar laquelle la Pologne, la France et lAlle-magne ont tent de revigorer la PESD, sestheurte une ferme opposition des Britan-niques qui refusent la cration dun quartiergnral oprationnel propre lUE.

    Certains pays dEurope souhaitent que

    lUE joue un plus grand rle dans la scurit enEurope, a soulign le secrtaire britannique la Dfense de lpoque Liam Fox, lors dela confrence annuelle du parti conservateur,le 5 octobre dernier. Laissez-moi vous direque lEurope a dj un garant de sa dfense,qui sappelle lOTAN. Cest un non-sens dedupliquer et de se dtourner de lOTAN unmoment o les ressources sont rares en Europe.Et la dernire chose dont nous avons besoin estplus de bureaucratie europenne.

    M. Fox, un eurosceptique acharn, a dmis-

    sionn peu aprs ce discours. Nanmoins, leschances que Londres se montre plus ouverte lide dun quartier gnral europen, quele Royaume-Uni considre depuis toujourscomme une dpense inutile et une menace

    Par Paul Ames

    UE/OTAN

    Lopration en Libye a aussi confirm les limites de la PESD

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    EUROPOLITIQUE N 4299 Lundi 7 Novembre 2011

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    pour lOTAN, semblent bien minces.

    PESD : PAS UNE PRIORIT DE MME ASHTON

    Les espoirs de redynamiser la PESD par

    le biais du Trait de Lisbonne ont t dus.Si lon sen rfre la politique europenneen matire de communication, la PESDne semble pas faire partie des priorits deMme Ashton et de son quipe du Serviceeuropen pour laction extrieure (SEAE). Le20 octobre dernier, les dernires nouvelles enmatire de scurit et dfense publies sur lesite du SEAE ont annonc que Mme Ashtonprsiderait un Conseil europen des Affairestrangres le 18 juillet prochain. Et lUE nedispose toujours pas dun porte-parole de ladfense attitr bien quun adjoint au porte-parole du SEAE coresponsable des questionsde dfense ait t nomm en septembre.

    Malgr les lacunes rvles par la missionen Libye, les Europens peuvent se prvaloirde succs remarquables dans la lutte contre lecolonel Kadhafi. Les Europens ont t capa-bles de mobiliser leurs forces ariennes peude temps aprs que la mission a reu laval delONU. Le nombre de victimes civiles seraitpeu lev, ce qui prouve que lEurope a tirles leons des oprations menes en Irak et enAfghanistan. La coopration entre les armes

    europennes au plus fort de lopration aimpressionn les stratges de lOTAN et lesforces ariennes de plusieurs tats membresde lUE se sont illustres au combat. M. Gatesa ainsi salu laction des avions de combat dela Norvge et du Danemark qui, alors quilsne reprsentaient que 12 % des forces alliesen prsence, ont touch un tiers des cibles.De mme, les pilotes de F-16 de la Belgiqueauraient atteint 97 % de leurs cibles. Il sagit-l du meilleur taux de russite parmi toutesles nations participantes.

    Lobjectif premier de la mission, savoirempcher Kadhafi dexercer des reprsailles lencontre des rebelles a galement tatteint. Enfin, lUE a jou un rle cl dans lachute du rgime du dictateur.

    STABILISER LA LIBYE DE LAPRS KADHAFI

    La politique europenne de scurit vamaintenant tre confronte un dfi detaille : fournir un soutien conomique et poli-tique en vue de stabiliser la Libye de laprsKadhafi. LUE, forte de son exprience dans

    divers pays tels que le Congo, la Gorgie oulAfghanistan, pourrait mettre sur pied desmissions de la PESD destines la mise enplace de services judiciaires, dune police etde forces armes dmocratiques.

    Malgr ces points positifs, les responsablesde la dfense sinquitent du dsquilibredes capacits que lopration a mis au jour,dont le manque de moyens sophistiqus de

    renseignements, de surveillance et reconnais-sance tels que des aronefs non habits quifont aujourdhui partie de larsenal amricainde base, des missiles de croisire ou encorelapprovisionnement en vol.

    Le secrtaire gnral de lOTAN AndersFogh Rasmussen a dclar que la mission enLibye tait un succs et a salu le rle joupar les Europens. Toutefois, il a averti cesderniers quen labsence dune gestion plusefficace du budget de la dfense, il leur seraitdifficile de mener une autre mission de cetype lavenir. Lopration Unified Protectora montr que les pays europens, mme silsdpensent moins pour leurs armes que lestats-Unis ou les puissances asiatiques, peu-vent encore jouer un rle central dans une op-ration militaire complexe, a affirm M. Ras-mussen dans un article paru rcemment dansle magazine Foreign Affairs. La question estcependant de savoir si lEurope sera en mesurede garder cette avance dans cinq ou dix ans.Et M. Rasmussen dajouter : Au rythmeactuel o vont les rductions, il est difficile deconcevoir comment lEurope pourrait mainte-

    nir suffisamment de capacits militaires poursoutenir des oprations de ce type lavenir. Etcela pose une question fondamentale lEu-rope et lAlliance dans son ensemble, savoircomment viter que la crise conomique nedgnre en crise scuritaire.

    Reconnaissant que lenvironnement co-nomique actuel est peu propice laugmen-tation des budgets de la dfense, M. Rasmus-sen appelle les allis adopter ce quil appelleune dfense intelligente faisant un meilleurusage des maigres ressources disponibles en

    renforant la coopration internationale, unconcept en accord avec la mutualisation et lepartage voulus par lUE.

    MUTUALISER LES MOYENS

    Dans un rapport au Conseil Affaires tran-gres de lUE de juin, Catherine Ashton asoulign que la mutualisation et le partage ne sont plus quune simple option mais bienune ncessit (...) la coopration multinatio-nale doit devenir un rflexe (la rgle plutt quelexception) si nous voulons prserver et dve-

    lopper les capacits de dfense de lEurope.Sur le papier, les ministres europens de laDfense sont daccord. En mai, ils ont rdigune dclaration appelant lapplication de lamutualisation et du partage de manire sys-

    tmatique et durable. En pratique, toutefois,ce sujet savre politiquement sensible. Lidede mutualisation et de partage sous-entendque les tats-membres ne chercheraient plus

    se munir dun arsenal de dfense completmais devraient compter sur lassistance deleurs voisins.

    Certains tats membres de lUE appli-quent ce principe depuis longtemps dj.Par exemple, les Pays baltes ont dcid de neplus affecter les maigres ressources alloues la dfense lachat et lentretien davionsde combat onreux ; ce sont leurs partenairesde lOTAN qui leur fournissent des forces depolice ariennes tour de rle. Les Nerlan-dais et les Belges partagent leurs ressourcesnavales depuis les annes 1990. Et la Franceet le Royaume-Uni, deux poids lourds de ladfense europenne, ont conclu lan dernierun accord historique de coopration quiprvoit le partage de porte-avions et la cra-tion dune force expditionnaire commune.Cependant, au niveau europen, les progrssont lents et de faible envergure. Cest pour-quoi certains appellent une approche plussystmatique en dfinissant clairement desobjectifs et des dlais.

    La France, la Pologne et lAllemagne ontsoulign limportance de la mutualisation

    pour redynamiser la politique UE de dfense. Nous souhaitons que lUnion utilise les trsnombreux outils dont elle dispose pour renfor-cer sa participation la paix et la scuritau niveau international et pour dvelopper sacapacit rsoudre les dfis de sa scurit ,ont dclar les ministres des Affaires trang-res et de la Dfense du Triangle de Weimardans une lettre Mme Ashton fin 2010.

    Plus tard, lItalie et lEspagne se sont ral-lies cette opinion. Mais, bien que le Trian-gle ait soulign la ncessit dune compl-

    mentarit complte avec lOTAN, son idede cration dun quartier gnral opration-nel permanent charg de mener des missionsau nom de lUE a t fermement rejete parle Royaume-Uni. Les suggestions selon les-quelles les autres tats membres pourraientpoursuivre ce projet sans la participation desBritanniques, en faisant appel loutil de coo-pration structure permanente prvu par leTrait de Lisbonne, sont restes lettres mortestant donn le rle de premier plan jou parle Royaume-Uni en tant que premire puis-

    sance militaire de lUnion.Alors que les tats membres sont en butte ce dilemme, la coopration bilatrale semblepromise de plus grandes avances que lapolitique europenne de dfense.n

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    La relation franco-britannique a t aucentre de la dfense europenne au coursdes douze derniers mois avec laccordde coopration militaire historique du12 octobre 2010, son rle cl en Libye,puis le bras de fer entre laGrande-Bretagne et le Trian-

    gle de Weimar sur lEurope dela dfense et la cration dunsige oprationnel de lUE. De

    votre point de vue, quelle est lasignification de cette relationpour la dfense europenne ?Il y a un contexte gn-ral en Europe qui nest pastrs favorable aux efforts dedfense : dune part en raisonde contraintes budgtairesfortes, dautre part en raisondinterrogations, dhsitationspolitiques de certains pays considrer la dfense et, le cas

    chant, le recours loptionmilitaire, comme une dimension strat-gique conserver dans nos instrumentsde politique trangre et de scurit.Le trait franco-britannique de 2010 estune rponse ce contexte. Deux payseuropens montrent ainsi quils restentdtermins agir (comme cela a t misen application dans la crise libyenne)et conserver des capacits militairesimportantes. Bien sr, je comprendsque certains pays aient regrett que ce

    rapprochement franco-britannique nese soit pas inscrit explicitement dansune logique europenne. Comme ce futle cas avec Saint-Malo en 1998. Mais ilfaut tre raliste et pragmatique : si deuxpays europens ont la volont et la capa-cit de travailler plus ensemble dans ledomaine de la dfense, cela va dans labonne direction. Cest aux autres paysqui veulent et peuvent faire un effort desinscrire dans cette logique. La Francene donne dailleurs pas dexclusivit

    absolue la relation franco-britannique,puisquelle tient galement donnerplus de visibilit la Politique euro-penne de scurit et de dfense (PESC) travers des initiatives de mutualisation

    capacitaire portes par le triangle deWeimar (Pologne, Allemagne, France)largi lItalie et lEspagne.

    Quelles sont vos ides sur linitiativedu groupe de Weimar ? LUE a-t-ellebesoin dun sige oprationnel ? Est-il

    possible pour lUE davancer sur unepolitique de dfense plus troite sans leRoyaume-Uni ?Je pense que la cration dune structurede planification et de conduite dop-rations est une ncessit pour lUnioneuropenne. Il ne sagit pas dune ques-tion doctrinale ou idologique, mais dunconstat pragmatique sur le plan opration-nel et budgtaire. Au lieu dactiver descentres dopration nationaux avec des

    pertes de temps et des cots importants, ilserait plus logique de disposer dune petitestructure permanente Bruxelles. Cela neduplique en rien ce qui existe lOTAN,il ne sagit pas de la mme chelle. Je nesuis pas pour autant favorable ce quele Royaume-Uni reste en dehors de cettevolution. Il faut poser le dbat dans lesbons termes et sortir des caricatures : il nesagit pas de crer un Etat-major plthori-que qui dirigerait une vaste arme euro-penne dnationalise et concurren-

    ant lOTAN.La Libye a t la premire opration delOTAN dirige par les Europens. tait-ce positif compte tenu du fait quelle

    devait tre mene par le biais de lOTANplutt que par des structures de dfensede lUE ?Je pense que le cas libyen a, avant tout,montr deux choses essentielles pour biencomprendre lvolution stratgique :- nos amis et allis amricains ne veu-

    lent plus et ne peuventplus soccuper en premireligne de toutes les crises,particulirement de cellesde relativement basseintensit intervenant danslenvironnement prochede lEurope.- des pays europens doiventtre capables de mettre enuvre des oprations mili-taires, donc de disposer dela volont politique, de ladtermination diplomatiqueet des capacits opration-nelles pour agir.Cela peut passer par

    lOTAN, mais il serait utilede ne pas tre exclusivement dpendantde lOTAN, dans lhypothse o lundes membres de lOTAN non-membrede lUE par exemple sopposerait uneintervention.

    La Libye a galement rvl certaines fai-blesses des capacits militaires de lEu-rope par rapport son besoin de se tour-ner vers les Etats-Unis dans des domainescomme lintelligence, la reconnaissance

    ou le ravitaillement en vol. Quelles sontles leons militaires que lEurope doittirer de cette opration ?Le processus de retour dexprience esten cours dans les Etats-majors, et je nesuis pas le mieux plac pour commentercela ce stade. Je note toutefois que sides manques connus ont t confirms(intelligence, ravitaillement en vol...),dautres domaines ont montr lexcel-lence de certains quipements euro-pens : le Rafale et sa polyvalence, les

    hlicoptres, les missiles de prcisions,autant de russites remarquables quilconvient aussi de mettre en avant !

    Une autre question qui a pes lourd sur

    Propos recueillis par Paul Ames

    ENTRETIEN AVEC ARNAUD DANJEAN, DPUT EUROPEN, PRSIDENT DE LA SOUS-COMMISSIONSCURIT ET DFENSE (SEDE)

    Il faut viter les caricatures de la dfense europenne

    Un contexte gnral en Europe qui nest pas trs favorable aux efforts de dfense

    DR

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    la dfense europenne cette anne, cestlaustrit budgtaire. Comment lEu-rope peut atteindre le double objectif deconstruire des ressources militaires plus

    fortes et mettre les finances en ordre ?Le pooling and sharing sera-t-il larponse ? Quels sont les succs de cettepolitique jusqu prsent ?Cest un processus qui samplifie natu-rellement sous la contrainte budgtaire,mais qui tait dj engag, notammentpar les travaux de lagence europennede dfense. Beaucoup dinitiatives, mmemodestes, existent et sont concrtises.La formation est un domaine qui doit semutualiser, ainsi que lutilisation de cer-tains quipements (les progrs sont djtangibles en matire de transport stratgi-que). Les Etats doivent rapidement identi-fier les secteurs o cet effort est faisable.

    Cette anne a galement vu lentre envigueur de la directive sur les marchspublics de dfense. Quelle est limpor-tance pour les tats membres douvrirleurs marchs de dfense une concur-rence accrue ? Quelles seraient les autresmesures ncessaires ?

    La transparence et la fluidit du marcheuropen sont videmment importantes.Mais il faut aussi savoir ce que nous vou-lons, nous Europens, en tant conscients

    de deux choses :- la dfense ne saurait se rduire des mca-nismes de march, un march commeun autre. Les enjeux vont bien au-del dela seule comptitivit conomique.- voulons-nous vraiment disposer duneautonomie stratgique et ne pas devenirdes sous-traitants industriels mais gale-ment militaires et politiques ? La politiqueque nous choisirons en matire dindus-trie de dfense doit aussi - et mme surtout- rpondre cette question !

    Pour lUE la mission anti-piraterie aularge de la Somalie reste la plus impor-tante, mais malgr les succs, les piratessemblent devenir de plus en plus auda-cieux, avec par exemple les rcents enl-

    vements de citoyennes europennes surla cte du Kenya. Que peut-on faire pourrendre les actions contre les pirates plusefficaces ?Il sagit dun problme majeur et extrme-ment complexe. Nous savons tous quil

    trouve largement son origine dans linsta-bilit qui rgne en Somalie mme. Nouspouvons agir, comme nous le faisons avecAtalante, contre la piraterie, mais il est

    illusoire de croire quon va rgler ce flausans avoir de stratgie globale ambitieusepour la Somalie avec tous nos partenai-res occidentaux et surtout africains. Lesefforts militaires sont indispensables, jesuis tout fait favorable des actions plusrobustes, y compris terre, le cas chant,ponctuellement, mais il faut un accom-pagnement conomique et diplomatiqueencore plus dtermin.

    La sous-commission SEDE a travaillcette anne sur la cyberscurit. Pensez-

    vous que les autorits europennes pren-nent cette menace suffisamment ausrieux ?Nous allons amplifier le travail et les propo-sitions sur cette menace, qui progresse trsvite et qui est perue de faon encore tropvirtuelle par les Etats. Voil un domaine ola mutualisation des efforts de recherche,entre organisations (UE/OTAN), entrepays, mais aussi entre civils et militaires,devrait se matrialiser trs vite ! n

    As present-day crises and security threatscan rarely be considered from neither apurely military nor civilian viewpoint, effec-tive responses need to draw on both, civilianand military capabilities.

    This perception is not new, and still - des-

    pite a number of coordination efforts - civilianand military structures have to agreat extentremained two different worlds. Civilian andmilitary crisis management missions are stilloperated separately. In its plenary session on23 November 2010, the European Parliamentadopted its report on civilian-military coope-ration and the development of civilian-mili-tary capabilities. It aims at identifying areasin which Common Security and DefencePolicy (CSDP) policies and capabilities canand should be improved : The European Par-

    liament calls on Member States to honourtheir official commitments and proposedimprovements of CSDP structures, proces-ses and capabilities. It demands the ExternalActionService to play a key role in the coor-

    dination of civilian and military structures,permanent operational headquarters - withthe appropriate separationof the chains of command- to take over the operationalplanning and managementfor both civilian and militaryoperations, and better usabi-

    lity and flexibility of the EUbattle groups.One year after the adop-

    tion of the report in plenarywe are faced with the sobe-ring reality. Many issues stillremain unsolved. Despite thecreation of a High Represen-tative for Foreign Affairs and Security Policyas well as the European External Action Ser-vice, external action of the European Unionremains a domain largely determined by

    intergovernmentalism. In the light of finan-cial constraints on Member States and theensuing tightening of defence and securitybudgets, civilian and military capabilities stilllag behind Member States commitments.

    Yet, this is not the only reason defence andcrisis prevention and intervention structures

    have not developed as anti-cipated. Member States arestill holding widely divergentviews in thisrespect.

    The Weimar Triangle ofPoland, France and Germany

    has shown a strong interest inconstituting a core CSDPgroup within the EuropeanUnion and to push for aunited approach on matters ofCSDP now, during the PolishPresidency, and in the future.The lack of civil-miltary capa-

    bilities impairs the credibilty of the CSDP :The Polish Presidency thus provides a uniqueopportunity to achieve new impetus for civil-military cooperation. A permanent civil-mili-

    tary planning and conduct capability, reformof the EU battle groups, and pooling andsharing these are the priorities that shouldtranslate into tangible results before the endof the Presidency.n

    Dr Christian Ehler, MEP

    TRIBUNE LIBRE

    Civil-military capabilities : the cornerstone of the CSDP

    Christian Ehler

    DR

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    8 Lundi 7 Novembre 2011 N 4299 EUROPOLITIQUE

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    La Pologne, qui assure la prsidence tour-nante du Conseil de lUE, fait partie avecla France et lAllemagne de linitiativeWeimar qui milite pour un renforcement dela politique europenne dedfense. Dans cet entretienaccord Europolitique, leministre polonais TomaszSiemoniak explique queles rticences britanniques linitiative ne sont pasinsurmontables et quelide de coopration ren-

    force nest pas exclure.

    Comment convaincre les Britanniquesde la ncessit de renforcer la dfenseeuropenne ?Je pense que cest possible, condition deporter le dbat un niveau trs concret. Silon entend par cette initiative la hausse des

    capacits militaires des diffrents pays, alorsje pense que la position britannique peuttre diffrente. A la rencontre informelledes ministres de la Dfense en septembre Wroclaw, ce sujet tait central et la discus-sion a fait un pas dans la bonne direction.Nous avons enlev un peu dmotion audbat. Les discussions concrtes sont tou-jours les bienvenues, car le dficit de la poli-tique europenne de dfense est ressenti partous les Etats membres.Il nest pas question de mettre en place des

    nouvelles structures bureaucratiques, ceque redoutent principalement les Britanni-ques. Je pense quils comprennent de mieuxen mieux que cette initiative na pas pourbut dentrer en collision avec les intrtsde lOTAN. Bien au contraire, la Polognesoutient activement aussi bien le poolingand sharing de la dfense europenne[mutualisation et partage des capacits mili-taires] que linitiative smart defense delOTAN. Il ny a pas dobstacles pour quedes pays participent aux deux programmes.

    La question est revenue sur la table lors dela rencontre des ministres de la dfense delOTAN Bruxelles. Le secrtaire dEtatamricain la dfense a clairement signal

    que dans les dix ans venir, le budget mili-taire des USA sera en diminution constanteet que lEurope doit se faire cette ide. Lacrise conomique et la situation financiredes diffrents Etats incitent faire certaineschoses en commun. Les difficults budg-

    taires nous aident avoir une approcheplus rationnelle.Face lchelle deces problmes finan-ciers, notre projet esttrs raliste. Nos res-sources ntant pasillimites, il faut lesconcentrer.

    Vous allez donc poursuivre cette impulsionpolitique ?Je considre que la Pologne, en tant quallisolide dans lOTAN, devrait tre intressepar la dfense europenne, compte tenu desa situation en bordure de lUE et de lAl-

    liance Atlantique. Nous voulons mettre lesujet de dfense europenne au cur dudbat europen. Cette impulsion politiquedoit tre forte et constante, car cest danslintrt de la Pologne et de tous les Etatsmembres de lUE.

    Si les rticences persistaient, une coopra-tion renforce est-elle envisageable ?Sur des questions comme le poolingand sharing , la coopration renforce estsouhaitable aussi bien pour lUE que pour

    lOTAN, condition quil y ait des rsultatsconcrets. Quelle que soit la dimension decette coopration, trois, cinq ou plus,ce serait clairement positif. La questionnest pas de crer un cercle ferm au seinde lUE ou de lOTAN. Notre initiative estouverte, et il peut y avoir des configurationstrs diverses.

    Dans les priorits de la prsidence polo-naise figure le renforcement de la coopra-tion entre lUE et lOTAN. Quelle forme

    doit prendre cette coopration ?Cest une question trs importante pournous. Il faut clarifier les missions qui sontde la responsabilit de lOTAN et celles

    qui sont de la responsabilit europenne,selon une logique de bonne coordinationet de soutien mutuel. A linformel dfense,nous avons beaucoup parl de petitesmissions , cest--dire que lUE devraittre capable de mener des missions de pluspetite taille, laissant lOTAN les opra-tions de grande ampleur. LUE devrait treen mesure dassurer des missions jusqu unniveau limit dhommes sur le terrain. Enplus de cet indicateur numrique, il doit yavoir un indicateur politique. LOTAN nestpas bien vue partout dans le monde, et lEu-rope peut constituer une meilleure ensei-gne pour mener certaines oprations. Parailleurs, lUE et les USA nont pas toujoursles mmes priorits. Il faut garder lespritque lOTAN ce nest que lUE et quelquesautres pays, il ny a donc aucun secret entreles deux institutions, nous sommes confron-ts aux mmes problmes et aux mmesresponsabilits. La nouvelle infrastructureque nous prnons devrait justement perfec-

    tionner cette coopration politique.

    La prsidence polonaise veut galementrenforcer la coopration en matire dedfense entre lUE et les pays du Partena-riat oriental. Que peut-on attendre concr-tement de cette initiative ?Je pense quil faut mener une politiqueouverte vis--vis de lextrieur, notammentpour des initiatives comme le poolingand sharing . Les perspectives sont mul-tiples, comme par exemple des forma-

    tions communes ou la coopration desindustries militaires. Mais il doit y avoir enpremier lieu une forte volont politique.Nous sommes engags dans une coop-ration politique avec ces pays, mais nousne sommes pas encore dans une phase ounous pouvons passer des actions concr-tes. Ces Etats sont souverains et ils doiventsavoir ce quils veulent vraiment. Jai lim-pression quil y a une volont de coopra-tion, mais que certaines choses ont besoinde temps, car ce nest pas une question

    facile. Il y a une diffrence claire dappro-che de la politique de la dfense entre lespays de lUE et ceux de lex-URSS, et cestune difficult quil faudra surmonter. n

    Propos recueillis par Jakub Iwaniuk Varsovie

    ENTRETIEN AVEC TOMASZ SIEMONIAK, MINISTRE POLONAIS DE LA DFENSE

    LEurope de la dfense a besoin dune impulsion politique

    forte et constante

    Porter le dbat un niveau trs concret .

    DR

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    Dix ans ont pass, le discours dAl-Qadaa perdu en crdit aprs la mort dOussamaBen Laden, les rvolutions arabes, les op-rations en Afghanistan et la cooprationinternationale Et le monde parat plussr. Mais la menace terroriste est devenue plus complexe et plus diversifie , commelanalyse le coordinateur antiterrorisme delUE, le Belge Gilles de Kerchove, unedcennie aprs les attentats du 11 septem-bre 2001 contre les Etats-Unis. Un constatque lon retrouve ct amricain.

    Ce que craignent dsormais de concertEtats-Unis et Europe, ce sont la fois desgroupes affilis Al-Qada , en ArabieSaoudite, au Ymen, en Somalie, au Nig-ria, en Irak, dans le Caucase. Des groupesqui continuent de recruter, certains ayantprofit des vnements en Libye pour sali-menter en armes et en combattants. Maisce sont aussi des citoyens locaux, mcon-nus des services de police, qui inquitent.Dans le cas de lUE, ceux-ci rejoignentle jihad en Afghanistan, au Pakistan, au

    Ymen, en Somalie, pour sentraner etrevenir en Europe. Des tentatives datten-tats ont ainsi t diriges contre le Dane-mark, la Sude, le Maroc.

    Constat similaire aux Etats-Unis : Depuis les attentats du 11 septembre2001, les menaces ont volu, soulignaitJohn D. Cohen, sous-responsable de lacoordination antiterrorisme au Dparte-ment amricain de la scurit intrieure(DHS), dans une rcente interview accor-de Europolitique. Venant dabord de

    personnes situes lextrieur du pays, ellesproviennent dsormais de plus en plus din-dividus ou de groupes dindividus installsdans le pays (vis) , sans forcment deliens tablis avec ltranger.

    RADICALISATIONS

    En Europe, sil y en a dautres formesde radicalisation, on peut, comme lindi-que Gilles de Kerchove dans une rcenteinterview galement accorde Europoli-tique, en voquer deux principales : celle

    lie Al-Qada, un phnomne vraimentcomplexe comprendre et prvenir etcelle dextrme-droite islamophobe, anti-globalisation, tristement illustre par latuerie norvgienne de cet t (76 morts).

    Sur la radicalisation islamiste, pour

    sadresser aux audiences de lOuest, etplus tellement au monde musulman, Al-Qada essaie de jouer sur des frustrations,notamment dimmigrs mal intgrs, deleur parler dans un langage de jeunes(cf. le magazine anglophone et en ligneInspire publi par lorganisation terroristedans la pninsule arabique) pour dclen-cher en eux une envie de passer unstade plus violent. Cela suppose quonsoit trs attentif et que lon dispose dunepolitique de raction contre-narrative. Ilexiste beaucoup de documents disponiblesen arabe montrant combien la rhtoriquereligieuse dAl-Qada est fausse. Malheu-reusement, ces documents sont assez peudisponibles en franais, en anglais, enallemand , explique M. de Kerchove.Lun des projets de lUE passe ainsi parla cration dune bibliothque virtuellecompose de tmoignages, soit de repentisjihadistes qui ont chang davis, soit depersonnes trs respectes dans la religionmusulmane, qui montrent la fausset dudiscours dAl-Qada .

    Sur la radicalisation dextrme-droite,certaines tudes nationales ont montrque des membres de partis extrmes,comme le British National Party (BNP),prenaient la tangente, faute dun dis-cours jug suffisamment radical, auprofit de la violence. Cest un sujet surlequel lUE travaille depuis maintenantcinq-six ans. On a une stratgie sur laprvention de la radicalisation, une autresur la communication aux mdias pour

    faire en sorte que la manire dont sex-

    priment les responsables politiques nali-mente pas le processus de radicalisation,car, souvent, on utilise des formulationsqui ne sont pas adquates , poursuitM. de Kerchove. Par exemple, le terme islamiste - au lieu d islamique pour renvoyer la religion musulmanesuggre un lien entre religion et terro-risme. Un lien dont souffrent les com-munauts musulmanes, par ailleurspremires victimes du terrorisme li Al-Qada.

    Mais cest surtout le travail policierqui doit tre amlior, sur le suivi desdiscussions en ligne et celui des tran-sactions financires. Mme chose pourla lgislation (cf. les rgles europennes

    en voie dadoption contre les prcurseurs

    des bombes artisanales). Les Allemandsont une grande expertise, les Britanniquesaussi. Cest vrai quon doit faire plus. Cequi sest pass en Norvge, ce nest pas leconstat quon navait pas travaill, maisquon doit faire encore plus. Cest dautantplus vrai quau-del de la ralit du pro-blme de lextrme-droite, il y a la nces-sit de montrer que nous ne sommes pasobsds par le terrorisme li Al-Qada ,conclut M. de Kerchove.

    TRAVAIL SUR LE TERRAIN

    Etats-Unis et Union europenne veu-lent donc mieux comprendre les diversprocessus de radicalisation susceptiblesde mener des actes de violences et deterrorisme. Le prsident amricain BarackObama a lanc, le 3 aot, une stratgienationale pour renforcer les partenaireslocaux dans la prvention de lextrmismeviolent. Et la Commission europennevient de crer un Rseau europen desensibilisation la radicalisation . Dotde 20 millions deuros sur quatre ans, ce

    dernier doit rassembler dautres acteursque ceux de la rpression, comme lestravailleurs sociaux, les responsables reli-gieux, les animateurs de jeunesse, leschercheurs, la police locale.

    Bref, des deux cts de lAtlantique, ct du travail denqute policire et derpression, on entend btir des partena-riats locaux pour comprendre ce qui peutbien pousser des individus, seuls ou engroupe, se retourner contre leurs conci-toyens. Internet est au cur des proccu-

    pations. Une utilisation de plus en plussophistique dinternet, des mdias, desrseaux sociaux et des technologies de com-munications par des extrmistes violentsajoute la complexit (du phnomne) ,rsume le DHS.

    Demandeur dune collaboration aveclUE, Washington vient dapprocher lesresponsables europens et les Etats mem-bres afin de trouver le meilleur mca-nisme pour apprendre des expriences vcues des deux cts de lAtlantique, se

    pencher sur des tudes de cas , examinerdes indicateurs et des comportementscommuns . Une collaboration qui pour-rait inclure des rencontres rgulires,selon John D. Cohen. n

    Par Nathalie Vandystadt

    ANTITERRORISME

    Dix ans aprs le 11/09/2001, les menaces sont plus complexes

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    Suite lopration en Libye, quellesdevraient tre les priorits europennes enmatire de dfense ?Ces trois derniers mois, la comprhen-sion collective de la mission libyenne etdes lacunes europennes a donn lieu de profonds changements. Ce qui ntaitalors quun problme thorique a revtuun aspect trs pratique. Les gouvernementsont ralis quils ne disposaient plus de lapuissance militaire ncessaire la gestiondune opration denvergure restreinte lencontre de forces armes trs archaquescomme celles des partisans du colonel Kad-hafi. Comment rconcilier ce constat avecles rductions de dpenses dcides dansle sillage de la crise de 2008, je lignore.La Libye nen demeure pas moins uneillustration pratique de notre dpendancevis--vis des tats-Unis et de limpuis-sance de fait dun grand nombre darmeseuropennes.

    Et quen est-il du volet scurit ?

    Leffet dentranement de la cyberscurita connu une escalade extraordinaire cessix derniers mois. La cyberdfense restela priorit des gouvernements. De nom-breuses choses sont faites pour permettreaux diverses agences et aux divers acteursnationaux de mieux communiquer. Laprochaine tape consistera amliorerconsidrablement la structure informativede lOTAN. Au-del de cette amlioration,nous devrons consentir un effort lgislatifglobal. Jai limpression que la cyberscu-

    rit a clips de nombreux autres thmesde scurit tels que linformation aux pas-sagers, le bio, les produits chimiques, lesADM, etc.

    Limportance accorde aux menacescyberntiques est-elle exagre ?La distinction entre les cyber-attaqueset la cybercriminalit est trs confuse.Cependant, les techniques ncessaires la lutte contre la cybercriminalit et cellesemployes pour amliorer la cyberscurit

    contre les attaques visant, notamment, desinfrastructures critiques sont assez similai-res. Il est trs difficile de rpondre cettequestion. Rcemment, les attaques de cetype sont devenues plus frquentes et plus

    graves. Paralllement, bon nombre dentre

    elles sont motives par lappt du gain etnon par une revendication politique. Il estdonc malais de savoir dans quelle mesureelles constituent un problme de scuritau sens strict. Dici la fin de lanne, leSDA doit publier un rapport capital quipermettra de sparer le bon grain de livraieen matire de cyberscurit.

    LUE prend-elle la cyberscurit suffisam-ment au srieux ?Pas encore. De manire gnrale, la Com-mission nest pas prompte ragir. LaCommission est confronte une srie deproblmes internes, notamment son obli-gation de mnager la chvre et le chou...ou plutt un trs grand nombre de chvreset de choux. Dune part, elle sefforce desoutenir lusage dInternet afin de tenterde faire de la rvolution informatique lemoteur de lactivit entrepreneuriale et dela croissance. Dautre part, elle est en butteavec lide de limiter efficacement touteutilisation dInternet destine entamer ou affaiblir le tissu social. Les eurocrates ont

    besoin de beaucoup de temps pour adopterune position commune qui satisfasse cesdiffrents intrts. Je crains que ce proces-sus ne soit de plus longue haleine au seinde lUE, de lOTAN ou des tats-Unis.

    Comment lide de mutualisation et departage volue-t-elle lheure o la dfenseest frappe de restrictions budgtaires ?Ce concept semble faire recette dans lespays scandinaves. Ces derniers ont, appa-remment, une vision plus cohrente de

    ce qui doit tre mis en commun et de cequi doit rester national. lheure actuelle,laccord franco-britannique qui, je lesp-rais, devait servir de modle de mutuali-sation et de partage, est un fiasco. Depuisle Trait de Lancaster House, ce projetest au point mort. Jignore dans quellemesure cette stagnation est imputable leuroscepticisme du ministre britanniquede la dfense. Jai peine croire que cetteattitude a t de nature stimuler le par-tenariat franco-britannique. Son impact

    sur lefficacit de la coopration entre lesdeux nations en Libye reste, par ailleurs,obscur. Jusqu prsent, la mutualisationet le partage tiennent plus du slogan quede la ralit. Aucune proposition ressem-

    blant un plan daction ne sest fait jour.

    Personne nen a mme formul lide.Je crois que ce concept requiert linter-vention dune autorit et je pense quenous devrions demander au Secrtairegnral,Anders Fogh Rasmussen dlabo-rer un plan daction clair pour les paysmembres de lOTAN. De toute vidence,il sagit dune question trs sensible poli-tiquement. Mais, dautre part, maintenirle dsquilibre entre allis europens delOTAN et amricains est galement unsujet politiquement trs sensible. Reste savoir laquelle de ces deux sensibilitspolitiques lemportera sur lautre.

    Linitiative du Triangle de Weimar derelancer la dfense europenne avec unquartier gnral europen a t rejete parle Royaume-Uni. Comment contournerces divergences ?Je trouve quil est difficile de prendreau srieux la proposition du Triangle deWeimar. En effet, les intentions de lAl-lemagne, non seulement en matire dedfense mais galement de politique tran-

    gre et de scurit commune sont beau-coup plus claires. Suite la crise libyenneet son incapacit dagir, les intentions duTriangle restent assez vagues. Si le Trian-gle de Weimar tait renforc par un enga-gement clair de la part des Allemands, lesBritanniques nauraient pas faire valoirleur droit de veto. Personnellement, jepense que les Britanniques font fausseroute. Je ne comprends pas pourquoi nous,les Britanniques, investissons tant dner-gie et de ressources dans notre arme.

    Malgr les rductions budgtaires, nousrestons, en effet, avec la France, la seuleforce militaire effective de lUE. Cettepuissance militaire ne sert en aucunefaon de monnaie dchange et na,apparemment, aucune influence sur leprocessus lgislatif de lUE. Jaurais cruque disposer la fois du commandementet de lautorit renforcerait la position bri-tannique et son engagement au sein de ladfense europenne. Mais cette appro-che est clipse par celle des atlantistes

    qui disent non, non, non, cela nuirait lOTAN et mcontenterait les Amricains.Cela compromettrait la relation trs sp-ciale qui unit Londres Washington . mon sens, cette mentalit est dpasse. n

    Propos recueillis par Paul Ames

    ENTRETIEN AVEC GILES MERRITT, DIRECTEUR DU SECURITY AND DEFENCE AGENDA

    Libye et cyberscurit au cur des dbats

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    Les rvolutions qui se jouent dans lespays arabes ont rvl lchec des politi-ques de lUnion europenne lgard deson voisinage du Sud, jusqualors focali-ses sur la stabilit, la lutte contre limmi-gration illgale et le terrorisme ou encorela dfense des intrts conomiques euro-pens. Mal laise, lente ragir, lUnionnest toutefois pas reste inerte : la Com-mission et le Service europen dactionextrieure (SEAE) ont rapidement pro-pos une refonte de la politique de voisi-nage dans deux communications1. Reste savoir si lUnion - Commission, SEAE ettats membres - va dlaisser sa ralpolitikdhier, principalement guide par les int-rts nationaux des Vingt-sept, pour se doterdune politique trangre europenne lahauteur des ambitions dclares.

    Jusqu prsent, la Politique euro-penne de voisinage (PEV) est reste rive la stabilit, elle na pas dinstitutions com-munes, demeure une offre unilatrale delEurope et cest une politique vers et pour

    les voisins. Cest en somme une politiquedu dedans pour le dehors afin de prvenirles risques du dehors sur le dedans, avaitindiqu EuropolitiqueBichara Khader,professeur luniversit catholique deLouvain, lorsque les rvolutions ont claten Tunisie puis en gypte.

    De nombreux observateurs pointentgalement du doigt ltroite cooprationentre lUnion et les rgimes autoritaires audtriment des socits civiles et du respectdes valeurs fondamentales de lUnion.

    Est-ce toutefois le fait de laction commu-nautaire ou de la prvalence des relationstroites entre les tats membres et les paysdu Sud, linstar de la France avec laTunisie ou de lItalie avec la Libye ? PourHugues Mingarelli, le directeur gnralMoyen-Orient et pays du voisinage mri-dional de lUE au SEAE, il est certainque lorsque la Commission proposait dediminuer laide octroye la Tunisie ou lgypte pour non-respect des droits delhomme, certains tat membres fai-

    saient en sorte quune telle proposition nesoit pas propose une deuxime fois.Le poids prdominant des relations inter-

    gouvernementales a dailleurs eu raison dela capacit de raction de lUnion. Tel a t

    le cas, par exemple, lorsque les Vingt-sept

    ont mis un certain temps adopter des sanc-tions lencontre des autorits gyptiennes,responsables de la violence de la rpression lgard des civils, en fvrier 2011. Et ce,principalement en raison dune certainerticence qui sest manifeste, au dbut, duct de certains pays du Sud, savoir lIta-lie et Malte, inquiets de voir un afflux demigrants et de rfugis dbarquer sur leursctes, face aux dclarations de MouammarKadhafi douvrir les vannes .

    Plus gnralement, la politique tran-gre de lUE doit tre davantage que lasomme de ses parties. Un point de dpartserait de voir le bassin mditerranen commeun espace dans lequel lEurope appartient

    plutt que celui partir duquel elle doitse protger , souligne Rosa Balfour, cher-cheuse au think tank European PolicyCentre2.

    MISE LPREUVE

    Une fois cet chec constat, la Commis-sion et le SEAE ont ainsi propos une nou-velle orientation de la politique europenne

    lgard des pays mditerranens (en marset en avril 2011) : incitative et fonde sur laconditionnalit dmocratique, celle-ci viseun approfondissement des relations incluant les partenariats de mobilit pour favo-riser la circulation des personnes) et laconclusion daccords de libre-change glo-baux. De nombreux observateurs craignentnanmoins que cette politique ambitieusene dpasse pas le stade des belles dclara-tions politiques et que lUnion poursuive sapolitique de deux poids, deux mesures

    lgard de ses voisins du Sud.Plus spcifiquement, les tats membresseront-ils prts mandater la Commissionpour la ngociation de facilitations de visaset travailler sur la rglementation en matirede migration lgale ? Car, pour lheure,lUnion reste focalise sur la seule coop-ration dans le domaine de la lutte contrelimmigration illgale. En atteste la ngo-ciation des accords de radmission (un paystiers sengage radmettre des migrants ensituation irrgulire). Si les tats membres

    ont accept de conditionner de facto cetype daccords des accords de facilitationde visas avec certains pays voisins de lEst(Ukraine, Gorgie, Moldavie), ces arrange-ments sont compltement absents du ct

    mditerranen. Se pose aussi la question de

    la volont des Vingt-sept douvrir le marcheuropen aux pays du Sud notammentpour les produits agricoles.

    QUELLE VISION ?

    La responsabilit datteindre un partena-riat euro-mditerranen rnov incombe-t-elle, toutefois, aux seuls tats membres ?

    Selon un fonctionnaire europen, ceschangements offrent aussi au tout nou-veau SEAE une opportunit historique dejouer un vritable rle et lenjeu rsidesurtout dans la capacit de la Hautereprsentante de lUnion pour les Affairestrangres, Catherine Ashton, dpasserson rle de simple porte-parole desVingt-sept et duser de son droit dinitiativeconformment au trait de Lisbonne. Endautres termes, de prendre le leadershipdes politiques extrieures de lUnion, icides relations euro-mditerranennes, envue de coiffer ces dernires dun vritabledialogue politique europen et non devingt-sept politiques trangres.

    Certes, Mme Ashton a propos une nou-

    velle orientation pour la politique euro-penne lgard du voisinage Sud, misen place une task force en Mditerrane,nomm un envoy spcial de lUnion pourla rgion, Bernardino Lon, un fin connais-seur des problmatiques euro-mditerra-nennes, et plus rcemment, initi la pre-mire task force UE-Tunisie.

    Mais dans les faits, rien nest acquiset de nombreux observateurs allant desfonctionnaires europens aux reprsen-tants du secteur priv lui reprochent de

    ne pas avoir initi, encore, une nouvellevision des relations euro-mditerranen-nes, globale, quitable et suffisammentlisible. Comme le souligne, nouveau,Rosa Balfour, il reste voir si la Hautereprsentante accompagne du SEAE etde la nouvelle task force pourra mener leprocessus conduisant une refonte strat-

    gique globale en Mditerrane . n

    (1) Partenariat pour la dmocratie et uneprosprit partage (8 mars 2011) et Une

    stratgie nouvelle lgard dun voisinage enmutation (25 mai 2011).(2) The Arab Spring, the changing andthe EU : tools as a substitute for strategy ? ,juin 2011, EPC

    Par Manon Malhre

    UE/MDITERRANE

    Refonte des relations euro-mditerranennes, un test pour lUE

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    12 Lundi 7 Novembre 2011 N 4299 EUROPOLITIQUE

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    Les dirigeants europens saluent la vic-toire des forces dopposition en Libyecomme un succs militaire et diploma-tique majeur, et une justification de leurintervention en faveur du mouvement pro-dmocratie. Alors que commencent pourde bon les analyses approfondies de la cam-pagne mene par lOTAN, les opinionsdivergentes ne manqueront pas dabonder lgard des leons militaires tirer delopration, et appliquer lavenir.

    Les points de vue civils devraient se par-tager en deux camps : ceux qui appuientlEurope pour sa volont de promouvoirles droits de lhomme et protger unepopulation vulnrable quopprime un dic-tateur violent ; et ceux qui sopposent cetype dopration, cause de sa dure et deson cot, et doutent des mrites de menerpareille opration contre un rgime faibleaux dfenses trs amoindries.

    Les conclusions militaires seront plusdiversifies et guideront la perspective etla politique de lEurope : faut-il encore

    mener des campagnes expditionnaires,et dans laffirmative, comment ?

    Nous sommes dtermins, demble, mener cette campagne de la bonne manire,et tirer les leons dinterventions rcen-tes, a dclar le Premier ministre britan-nique David Cameron au parlement.

    Lintervention en Libye tait la premireopration denvergure de lOTAN qui nesoit pas mene par les Etats-Unis, mais parles membres europens de lalliance.

    Plus de sept mois de bombardements ont

    impliqu 26 000 sorties et plus de 9 600 mis-sions de frappes pour la force arienne de huitmembres de lOTAN, avec le concours dequatre pays partenaires. Des frappes amricai-nes de missiles ont dtruit la dfense arienneet les centres de commandement au dbutde la campagne, en mars. Depuis lors, desavions principalement britanniques et fran-ais, avec lappui de la Belgique, des Pays-Bas,de la Norvge, du Danemark et de lItalie, ontmen la majorit des frappes ariennes contrelarme du colonel Kadhafi. Les attaques ont

    dtruit un millier de chars, vhicules arms etpices dartillerie, et la capacit du dictateurde commander et contrler ses troupes sestprogressivement rduite nant. Une attaquearienne franaise, qui a tu une dizaine de

    gardes du corps de Mouammar Kadhafi, a

    permis sa capture puis son excution.LEurope a toujours t le petit frre au sein de lOTAN, suivant au sein delorganisation la politique trangre desEtats-Unis. Cette victoire en Libye va ren-forcer la confiance en soi et le moral delEurope. Malgr la crise de la dette, lescoupes sombres et les plans daustrit,

    les populations des pays dEurope quiont pris part cette coteuse campagney sont restes favorables, et les militairesont dmontr leur capacit mener eux-mmes une opration ltranger.

    Malgr les commentaires dsobligeantsdes Amricains sur lefficacit militaire euro-penne - lon se souvient que le secrtaire laDfense Robert Gates avait explos lt der-

    nier - les forces ariennes et maritimes enga-ges ont fort bien travaill. Elles ont neutra-lis les forces de Mouammar Kadhafi, maiselles ont surtout caus des dgts collatrauxminimes et nont enregistr aucune perte, cequi contraste fort avec les oprations que lesEtats-Unis mnent en Irak et en Afghanistan.

    La dcision de ne dployer aucune forceau sol a t tactiquement et diplomatique-ment judicieuse : elle a empch la machinede propagande libyenne de qualifier linter-vention de nouvelle invasion occidentale

    dun pays arabe ou musulman.Si lopration en Libye sest faite sousles auspices de lOTAN et avec une forteassistance des Etats-Unis, elle a dmontrquune coalition purement europenneoprant de manire indpendante ou dansle cadre dune mission europenne, auraitdbouch sur des rsultats similaires - bienquavec une efficacit un peu moindre.

    Cette conclusion devrait entrouvrir laporte une participation la carte desinterventions ou missions de pacification

    futures. Cette approche pourrait affaiblirla raison dtre de lOTAN parce quellepermettrait aux nations europenneset non europennes de se joindre desmissions militaires au cas par cas, et pas

    ncessairement sous le commandement

    de lalliance.Le fait que la Sude, le Qatar, les Emiratsarabes unis et la Jordanie se soient rallis la campagne en Libye cre un prcdentpour dautres arrangements de coalition lavenir. Paradoxalement, la guerre en Libyea dmontr de manire clatante leffica-cit dune collaboration sans ce degr accrudintgration, dans le contexte de la cam-pagne de lOTAN, soucieuse des relationspubliques, pour une mise en commun etun partage accru de lquipement militairenotamment entre militaires europens -une version moderne de la conviction de laGuerre Froide quil fallait davantage de nor-malisation entre armes de lOTAN.

    La guerre a aussi dmontr que la tendanceactuelle rendre les forces europennes plusmobiles et lgres - tendance qui sinspire dela guerre contre la gurilla en Afghanistan- pourrait ne pas ncessairement tre unestratgie davenir. Sans les armes lourdesqui avaient t conues pour impressionnerle Pacte de Varsovie, comme lEurofighterTyphoon et les Mirages de Dassault, la vic-

    toire en Libye naurait pas t possible.Les consquences les plus ngatives de la

    guerre sont peut-tre quelle a mis en avantles fortes divergences entre nations europen-nes en matire de priorits militaires. Seulshuit des 28 membres de lOTAN ont dcidde prendre part aux frappes. Les dirigeantsde plusieurs membres dEurope de lEstauraient tir la tte concernant ce quilsont qualifi dobsession franco-britanniquede la Libye, alors que lOTAN sefforce dedgager les 140 000 soldats embourbs dans

    dix annes de guerre en Afghanistan. Seloneux, se braquer sur un pays du Proche-Orient a permis aux puissances militaires lesplus fortes dEurope de dtourner lattentionpar rapport leur souci majeur en scurit :la rsurgence de la Russie.

    Enfin, si la longue campagne a dbou-ch sur un triomphe dcisif pour lEurope,elle na pas prouv que les forces euro-pennes taient capables doprer hors deleur voisinage immdiat, ou de sortir vic-torieuses contre des adversaires militaires

    plus forts. Aprs tout, le budget militairede la Libye ntait que 0,1 % de celui delOTAN, et il a quand mme fallu septmois lOTAN pour lemporter. LIran oula Syrie nont donc pas sinquiter. n

    Par John Strait

    Cette guerre a mis enavant les fortes divergencesentre nations europennes

    en matire de prioritsmilitaires

    UE/OTAN

    Les Europens tirent les leons de lintervention en Libye

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    EUROPOLITIQUE N 4299 Lundi 7 Novembre 2011

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    RENSEIGNEMENT

    LUE doit renforcer son autonomie

    Avec une dpendance 75 % des moyensamricains pour lopration en Libye, les mili-taires europens se sont rendu compte de lancessit de dvelopper des moyens propresde renseignement ou de reprage des cibles.Mme si, jusqu prsent, au niveau militairele rle de lUE tait limit lalerte prcoceou lvaluation de la situation, il y a deschances que lUnion commence saffirmersuite aux besoins identifis dans ce domaine.

    LAgence europenne de Dfense(AED) a dj inclus le dveloppement decertaines de ces capacits dans les prioritsles plus urgentes, en insistant sur le renfor-cement de linteroprabilit entre les dif-frents systmes dimagerie en Europe.

    Le plus souvent, les centres qui reoi-vent des donnes ne peuvent fonctionnerquavec un seul systme, explique lAgencesur son site. Une rflexion est aussi en courspour rendre disponibles une partie desinformations recueillies par le programmedobservation militaire de la terre avec le

    centre satellitaire de lUE Torrejon (Espa-

    gne). Celui-ci a des analystes mais pas desatellites ; linterconnexion des deux permet-trait lUE davoir accs linformation laplus fiable, remarque un expert.

    Repris par lAED en 2009, le programmeMUSIS (Multinational Space-based Ima-

    ging System) prvoit de remplacer desconstellations europennes actuelles desatellites (Helios, Pleiades, CosmoSky-Med et SAR Lupe) et dassurer une cer-taine interoprabilit entre les nouveauxsystmes qui les remplaceront. Aprs desngociations animes, la Pologne a adhrau programme en dcembre dernier, en sejoignant, dune manire pour le momentlimite, aux six pays fondateurs du pro-gramme (Belgique, Allemagne, Espagne,Grce, France, Italie).

    Le dveloppement davions sans pilotesou de systmes maritimes sans pilote lesdeux en recherchant des synergies avec lesprogrammes de la Commission europenneaxs sur les applications civiles de telsmoyens renforcerait galement lautono-

    mie de lEurope dans lacquisition dinfor-

    mations. Sans oublier le domaine o lUEexcelle, savoir, la recherche et lanalyse delinformation partir de sources ouvertes.Grce au caractre non classifi de ces der-nires - ce qui permet de rpondre aux crain-tes de la plupart dEtats membres rticentsau partage des informations classes secr-tes - lanalyse des informations partir dessources ouvertes est devenue une pratiquecourante que la Commission europenne,avec des universitaires et lindustrie, cherche prsent optimaliser.

    Lanc en 2010, le projet Virtuoso (Versa-tile InfoRmation Toolkit for end-Users orien-ted Open-Sources exploitation) est lun desmoyens pour y parvenir. Le projet, selonles dernires informations, est au milieu desa mise en oeuvre et devrait devenir opra-tionnel ds avril 2013. Une fois termin, ilassurera aux institutions europennes, auxadministrations publiques et aux particuliersun accs une information structure et per-mettra dinterconnecter les diffrents outilsde recherche de donnes.n

    CYBERDFENSE

    Une dfense qui commence sorganiser

    Seule une dizaine dEtats europens(dont France, Royaume-Uni, Pays-Bas,Allemagne, Rpublique tchque) ontrcemment labor des stratgies nationa-les de cyberdfense, impliquant la foisdes aspects civils et militaires.

    Au sein des institutions europennes, letravail de coordination bat son plein. LaCommission europenne a mis en placedes quipes dintervention rapide et a pro-pos la cration dun centre de cybercri-minalit pour 2013. Le Service europendaction extrieure collabore avec les direc-tions gnrales Affaires intrieures et Informatique ; lAgence europennede la dfense (AED) assure linterface auniveau europen entre les initiatives ayanttrait aux rseaux militaires et de dfense.

    Ce ne sont que des dbuts, mais nousne sommes pas en retard : le Canada esten plein appel doffres ce sujet, les Etats-Unis viennent de publier leur stratgie, les

    Australiens aussi, la Core est en train de

    travailler dessus. On sent que a sorga-nise surtout parce que les acteurs ont prisconscience de lensemble des dimensions dudomaine. Ce nest pas que technique, cestaussi juridique et politique, explique unexpert de lUE Europolitique.

    Les Etats sorganisent diffremment. LaFrance a cr en 2009 lAgence nationale

    de la scurit des systmes dinformation(ANSII) et publi en fvrier la stratgienationale en matire de dfense et de scu-rit des systmes dinformation. Lun desquatre objectifs est de garantir la libert dedcision de la France par la protection delinformation de souverainet. Le Royaume-Uni a dbloqu 650 millions de livres en2010 pour protger les rseaux informati-ques gouvernementaux. La Pologne vientdamender sa lgislation pour pouvoir dcla-rer un tat de guerre ou durgence en cas

    de menace cyberntique. LEstonie, outreun centre ddi la dfense cyberntique, acr la Ligue nationale de la cyberdfense ;son ministre de la Dfense, Mart Laar, a, enjuin Bruxelles, demand la cration des

    normes communes europennes pour laprotection de lensemble du rseau internet. LOTAN se concentre uniquement sur lesaspects militaires, or 85 % de linfrastructureinternet est entre les mains du secteur privet 80 % des attaques taient diriges contre lesecteur priv, a-t-il expliqu au sminairede lEuropean Security Round Table.

    Selon lAED, la premire protectionconsisterait liminer tout ce qui est d la ngligence pour se concentrer ensuitesur les menaces telles que les actes deterrorisme ou de lespionnage. Uneorganisation ou un Etat se doit dleverson niveau de protection face peut-tre98 % des menaces et puis avoir des qui-pes ddies, des pompiers informatiques,pour les 2 % qui peuvent tre des attaquescibles, estime un expert.

    Actuellement, lOTAN dit dtre la cible

    denviron 100 attaques par jour. Selon laCommission, les pertes subies par lesentreprises europennes victimes datta-ques cyberntiques slvent environ750 milliards deuros par an. n

    Par Sven Gateque

    Par Sven Gateque

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    VIRTUOSO, an end-user centric project

    VIRTUOSO is a European project co-funded by the European Union under its FP7 Programme.

    The objective of the project is to develop a technical platform for the integration of tools for

    collection, processing, analysis, visualization and decision-support of open source information.

    This middleware platform enables "plug-and-play" functionalities that will improve the ability

    of open source information professionals to utilize data from across the source and format

    spectrum in support of the decision-making process. Upon completion of the project, the

    VIRTUOSO platform will be released as open-source-code software.

    As a proof of concept and to highlight the efficiency of the VIRTUOSO platform, a demonstrator

    with functionalities provided by the consortium partners is being built. This demonstrator is

    validated using operational scenarios.

    The VIRTUOSO project complies with legal regulations and enforces the principles of privacyand data protection. By doing so, the project ensures that the interests of the citizens of the

    European Union are being respected.

    Designing the next-generation

    integration platform for open source

    information management

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    Designing the next-generation integration platform for open

    source information management

    The project aims at providing European end-users with a platform based on an open-source

    software solution, which is able to integrate advanced information acquisition and processing

    tools.

    The aim of the VIRTUOSO platform is to allow end-users to easily plug-in different software

    solutions and, by doing so, create their own customized and modular open source information

    management solution.

    Furthermore, the platform will ensure greater interoperability among information and

    technological providers.

    Key advantage for end-users

    To drive the developmentof a platform that meets their needs.

    To exchange best practises, needs and requirementswith other European end-users andwith the partners of the consortium.

    To improve the know-howof their organisation at technical and operational levels.

    To have the possibility to implement the open-source-software framework developed

    during or after the project in their own information system.

    To test during the project the solutions developedby the partners of the Consortium.

    The End-User Community is open to all European security stakeholders

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    16 Lundi 7 Novembre 2011 N 4299 EUROPOLITIQUE

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    Eurocybex est un exercice de cyber-criseeuropen impliquant plusieurs Etats-Mem-bres. Ce projet, coordonn par CEIS sestdroul avec le support de lENISAet un co-financement de la DirectionGnrale HOME de la CommissionEuropenne dans le cadre du Pro-

    gramme CIPS. Pleinement intgrau programme europen dexerci-ces de cyber-crises, Eurocybex sestappuy sur les rsultats de lexerciceCyber Europe 2010. Les objectifs dece projet sont lamlioration et le testdes procdures de coopration faceaux cyber-crises, au niveau euro-pen.

    Au-del de la cybercriminalit,un activisme numrique particu-lirement violent (dfigurationsde site, dnis de service distri-bus...) se dveloppe. Ces opra-tions, souvent menes par des cor-saires agissant en service plus oumoins command, constituent dj une

    relle menace pour la souverainet desEtats. Une menace dautant plus grandeque limbrication croissante du virtuelet du rel ( informatique ubiquitaire ,nanotechnologies...) accentue notredpendance linformatique.

    Le 27 septembre 2011, lexerciceEUROCYBEX a simul un cas decybercrise impliquant quatre agencesnationales europennes en charge dela scurit des systmes dinformation,

    dont lAgence Nationale de la Scurit

    des Systmes dInformation (ANSSI)franaise. Pendant une journe, desreprsentants franais, allemands,hongrois et autrichiens ont test les

    procdures de communication sous

    lil dune trentaine dobservateursde lENISA et des Etats membres.Lexercice, organis et coordonn parla socit de conseil en stratgie fran-aise CEIS a t prpar et men avecla participation dISDEFE, la socitpublique espagnole de conseil et din-gnierie du Ministre de la Dfense.Lobjectif dEUROCYBEX, atteint auvu des valuations faites par les partici-pants et observateurs, tait de tester et

    valider les procdures de communica-

    tion et la mise en place dun groupede crise face une attaque. Le scna-rio, inspir de faits rels, simulait desfuites dinformation de sites officiels en

    Europe et la diffusion sur un siteactiviste de ces informations.

    Lexercice a t conduit en uti-lisant la plate-forme dentrane-ment CRITIS, mise au point parCEIS. Cette mme solution a ga-lement permis aux observateursde suivre en temps rel tant lesvnements que les ractions despays joueurs . Lexercice a tsuivi dune phase dvaluation etde retour dexprience associantles joueurs et les observateurs. Cesretours dexprience portent tantsur lamlioration apporter auxexercices futurs qu lenrichisse-ment des procdures de coopra-tion entre les Etats.

    Co-financ dans le cadre duprogramme CIPS (Prevention,

    Preparedness and Consequence Mana-

    gement of Terrorism and other Security-related risks) de la DG HOME, le projetEUROCYBEX sinscrit dans la conti-nuit du 1er exercice pan-europen decybercrise CyberEurope 2010 ) orga-nis par lAgence europenne pour lascurit des rseaux et des systmes din-formation ENISA. Partant des conclu-sions et pistes damlioration identifieslors de CyberEurope 2010, les partici-pants au projet ont prpar depuis dbut2010 cet exercice dont les rsultats doi-

    vent contribuer lamlioration des pro-cdures, notamment dans la perspectivede lexercice UE-US qui doit avoir lieufin 2011 et de CyberEurope 2012 , leprochain exercice pan-europen quisera conduit par lENISA.

    Les retours dexprience dtaillsdEUROCYBEX vont tre transmis auxEtats Membres et Institutions Euro-pennes concernes, mais ne feront paslobjet dune diffusion publique pourdes raisons de scurit. n

    Axel Dyvre et Guillaume Tissier (CEIS)

    Professionnalisation et dveloppement doutils cls en main : telles sont les deuxtendances observes par le Livre Blanc sur Les marchs noirs de la cybercrimi-nalit publi par CEIS en juin 2011. Un site de revente de numros de cartes ban-caires voles (via une escroquerie physique ou via internet) permet ainsi de dgagerainsi un chiffre daffaires mensuel de 200 000 euros, ce qui rend lactivit attractiveau regard des risques encourus. La cybercriminalit prospre ensuite grce au sou-tien logistique apport par des hbergeurs, des intermdiaires financiers (monnaievirtuelle, socits dchanges...) et de pays peu regardants quand ils ne sont pastotalement complices. Au point que lon peut aujourdhui parler de vritables paradisnumriques.Pour tlcharger le livre blanc : http://www.secuinsight.fr/livre-blanc-blackmarkets/

    TRIBUNE LIBRE

    Eurocybex, premier exercice de cyber-crise europen

    Europolitiqueouvre ses colonnes ses abonns et leur permet dexprimer un avis, dapporter une information ou une analyse dans une page Tribune libre . La taille de toute contri-

    bution ne doit pas dpasser 4.500 signes ou caractres (trs important : espaces comprises). Elle doit tre accompagne dune version traduite en anglais et dune photo de lauteur au

    format jpg en haute dfinition (300 dpi), et envoye : [email protected]. La rdaction dEuropolitiquese rserve le droit de ne pas publier une contribution.

    Un activisme numrique particulirement violent se dveloppe

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    Un an aprs le lancement de linitiativede partage et de mutualisation des moyens(pooling & sharing), lAgence europennede Dfense (AED) juge que les Etats mem-bres sont prts sengager dans les premiersprojets concrets. La runion des ministresde la Dfense de lUE du 30 novembre seradcisive, avec le lancement envisag dequelques programmes dans les domainesdu ravitaillement en vol, de lentranementdes pilotes, des munitions, du mdical ainsique de la surveillance, du renseignement etde la reconnaissance (ISR).

    La conviction politique est acquise, ilfaut passer maintenant aux ralisationsconcrtes court terme et prparer lappro-

    fondissement moyen et long terme, adit Europolitique la directrice de lAED,Claude-France Arnould.

    Des cooprations spcifiques ont notam-ment t discutes lors dun sminaire dex-perts en Pologne les 19-20 septembre ainsiqu la runion informelle des ministres dela Dfense de lUE le 22 septembre Wro-

    claw. Il y a t confirm que les meilleuresincitations pour les armes se lancer dansdes projets multinationaux sont celles dic-tes par les besoins oprationnels ou par larduction des cots.

    Les rticences persistent cependant dsquil sagit dune mise en commun de cer-tains moyens. Il faut avoir lesprit, quelapprofondissement de la coopration inter-nationale, mme si elle est profitable dunemanire gnrale, peut entraner () unedpendance lgard de nos partenaires.

    Les actions ultrieures dans ce domainedoivent donc tre menes avec pru-dence, prcise un document qui rsumeles travaux.

    Il sagira ainsi de projets modestes, ra-lisables court terme, mais qui jettentles bases dune rponse aux lacunes dela dfense europenne, confirmes entreautres par lopration en Libye. Cest le casdu ravitaillement en vol, o la France, quisapprte renouveler son parc des ravi-tailleurs, propose de mettre disposition

    sa base arienne dIstres pour mutualiserles cots de la maintenance et du soutienlogistique. Un autre projet qui a des chan-ces aboutir prvoit un systme de partagedes heures de vol non utilises entre les

    Etats qui participeront au programme.

    FORMATIONLAgence propose aussi de lancer de

    nouveaux programmes de formation, afindacqurir un savoir faire dans tous lesdomaines , confie un diplomate euro-pen. Outre la poursuite de la formationdes pilotes dhlicoptres lance en 2010sous lgide du Royaume-Uni, lItalieserait prte proposer un programme deformation des pilotes davions de combat,et la France un programme pour les pilo-tes davions de transport. La Belgique etle Portugal ont dj dclar quils organi-seraient des exercices pour des pilotes deshlicoptres en 2012. La France, lItalieet lEspagne en ont organiss ces deuxdernires annes, la Sude en accueilleraun cet hiver. Le nombre dheures den-tranement sur les simulateurs sera pro-bablement accru dans le cadre du pro-gramme, vu les conomies que cela peutapporter (une rduction de 40 % par rap-port aux prix de lentranement sur le ter-rain grce aux conomies en carburant et

    en personnel). LIrlande propose pour sapart une formation en matire navale.

    INFORMATIONS

    Les Etats devraient aussi approuver lamise en place des premiers postes de com-mandement du rseau de surveillancemaritime, qui permettra de coordonner leschanges dinformations et lobservation dela situation en mer.

    La dmonstration du projet a t faiteen juin dernier par six pays (Finlande,

    France, Italie, Sude, Espagne et Royaume Uni). On doit passer de six huit dicile 30 novembre, on pense mme que dautresEtats membres se rallieront, note Mme Ar-nould. La France, la Pologne, le Royaume-Uni, lItalie et la Roumanie (cette der-nire doit encore confirmer sa dcision)devraient aussi dvelopper ensemble unecellule dacquisition des communicationspar satellite, lItalie proposant, elle, un pro-gramme de dveloppement dhpitaux decampagne standardiss de campagne.

    Des cooprations plus pousses pour-raient tre lances moyen et longterme, mais la condition en est le renfor-cement de la confiance entre Etats. Ungroupe dexperts de lAED termine ainsi

    un tour des capitales, pour voir encore

    une fois quelles sont les opportunits decoopration (y compris) court terme,selon quelles conditions et comment onpeut aider les Etats membres trouver lesincitations ou lever les blocages , a souli-gn Mme Arnould.

    RTICENCES

    Les blocages ne sont pas seulement finan-ciers. Le problme nest pas au niveau poli-tique mais il y a des rticences trs fortes auniveau militaire o lon craint que la mise encommun des moyens soit aboutira la pertede souverainet, soit servira dexcuse auxministres des Finances pour oprer dautresrductions dans les budgets de dfense,selon un expert proche des dossiers.

    Les ministres de la Dfense notent aussique ni le partage, ni la mise en communnassureront le dveloppement de certai-nes capacits cls qui doivent tre absolu-ment maintenues au niveau national.

    Une autre question difficile est desavoir comment assurer que les moyensmis en commun restent disponibles

    quand on en a besoin, mme si, pour desraisons politiques, un des participants nesouhaite pas sengager dans une opra-tion. Il y a des clauses qui ont t dve-loppes, notamment dans le cadre ducommandement europen de transportarien (mis sur place par les Pays-Bas, laFrance, lAllemagne et la Belgique) quirpondent ce besoin, assure Mme Ar-nould. Certaines de ces clauses ont tmises en oeuvre dans le cadre des opra-tions existantes et elles peuvent tre les

    solutions pour dautres capacits commele ravitaillement en vol ou lentranementdes pilotes, a-t-elle ajout.

    La mise en place de cette cooprationest galement coordonne avec lOTAN. Ce quon sattache faire maintenantavec nos collgues de lOTAN cest devoir au cas par cas, sujet par sujet quelest le cadre de coopration prfr par lesEtats, dit Mme Arnould. A partir deces premiers progrs qui montrent quonpeut enfin entrer dans le concret, on conti-

    nuera la feuille de route jusqu la runionde second semestre (), ce qui concideavec le calendrier de lOTAN qui nousmne au sommet de Chicago de mai , a-t-elle conclu. n

    Par Sven Gateque

    Pooling & sharing : il est temps de passer laction

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    Depuis le 21 aot 2011, le marcheuropen des quipements de dfenseest cens devenir une ralit. Cettedate correspond au dlai laiss auxEtats membres pour transposer en droitinterne la directive sur les procdures depassation de marchs publics dans lesdomaines de la dfense et de la scurit(2009/81/CE) qui, en partie, met fin aurgime drogatoire de ces marchs sp-cifique vis--vis des rgles communau-taires de la concurrence. Cependant,seuls huit Etats membres ont respectleur obligation et certains pas compl-tement. La Commission a clairementannonc son intention de suivre de prscette transposition.

    Bien que la Directive 2004/18 sur lesmarchs publics classiques sappliqueen principe la passation des marchsdes quipements de dfense et de scu-rit, elle sest dveloppe selon les rglesnationales et quelques rgles issues dac-cords intergouvernementaux relatifs aux

    programmes darmement mens en coo-pration. Les Etats membres arguaient,en effet, du fait que cette directive neprenait pas en compte les spcificits etla complexit de ce secteur sensible pourmettre en avant, quasi systmatiquement,les exemptions quils pensaient tirer delarticle 346 TFUE (mesures en matirede scurit et intrts essentiels des Etats).Cela a abouti un march europen dela dfense fragment avec des degrsde transparence variables, favorisant les

    industries nationales.La Cour de justice a clarifi les choses,en interprtant de manire restrictivetoute possibilit de drogation qui nepeut concerner que des hypothsesexceptionnelles dtermines, et ne se pr-tent pas une interprtation extensive enraison de ce caractre limit (arrt Com-mission contre Espagne C-414/97). Cequi a permis la Commission, qui sou-haitait mettre fin ces pratiques quelleestimait dltres pour la comptitivit

    industrielle et les dpenses publiques, defaire avancer lide dun paquet lgislatifpropre ce domaine qui renforce lunifi-cation du march intrieur en y favorisanttransparence et ouverture, tout en res-

    pectant le principe de subsidiarit. Lob-

    jectif est aussi de renforcer la Politiqueeuropenne de Scurit et de Dfense(PESD) par la construction progressivedun march europen comptitif pourles quipements de dfense, conciliantla garantie des approvisionnements desEtats membres et les impratifs conomi-ques lis la performance industrielle et la concurrence extra-europenne.

    Ce paquet dfense se composeen outre dune directive sur les trans-ferts intra-communautaires de dfense(2009/43/EC) visant harmoniser lecommerce et lindustrie de matriels dedfense et dune communication num-rant les actions possibles pour amliorerla comptitivit du secteur au niveau dela Commission, des tats membres et delAgence europenne de dfense (AED).

    SOUPLESSE

    La nouvelle Directive 2009/81 admettoujours de possibles restrictions surla base de larticle 346 TFUE mais enprcise les conditions. Les spcificits

    du secteur : respect de lindpendancenationale, clients finaux quasi-exclusive-ment tatiques, quipements mobilisantde nombreux actifs spcifiques, cyclesde vie trs longs, etc. requirent unecertaine souplesse dans la passation desmarchs publics. Aussi la directive gn-ralise-t-elle la procdure ngocie avecpublication pralable, et prvoit-elle laconfidentialit de renseignements relatifsaux secrets techniques ou commerciaux.Elle introduit des mesures visant scuri-

    ser tant les informations sensibles que lacontinuit dun approvisionnement dansle temps au cours du processus de slec-tion des candidatures ou des offres et aucours de lexcution du contrat. Pour lesmmes raisons, un pouvoir adjudicateura la possibilit de rejeter un sous-contrac-tant propos par le titulaire.

    Certains observateurs estiment queces mesures, reposant sur un systmedhabilitations de scurit accordesaux soumissionnaires qui ont fourni des

    gages de respect de ce caractre sensi-ble, ne seront rellement oprationnel-les que lorsque sera mis en place un sys-tme paneuropen de reconnaissancemutuelle de ces preuves. Pour Christo-

    pher R. Yukins, professeur la George

    Washington University Law school, cesdispositions permettront en pratiquedvincer les entreprises amricaineset de conduire un renforcement duprotectionnisme europen et donc des frictions dans les changes entre lesEtats-Unis et lEurope.

    Nanmoins la directive oblige recourir lappel doffre public ou langociation de gr gr avec des assu-rances de transparence pour les marchsimportants de dfense et de scurit.Elle introduit, par ailleurs, la procdurede recours, garantissant une protectionjuridique efficace des soumissionnaires.Autant dlments qui vont contribuer modifier la pratique des passeurs dordre,gouvernements et ministres europensde la dfense.

    TRANSPOSITION DLICATE

    Bien plus, ce sont toutes les partiesprenantes qui vont, dans la mise enuvre de cette directive, passer une sortedpreuve du feu puisquelles auront

    appliquer des rgles communautai-res auxquelles elles ne sont pas habi-tues. La transposition de la directiveelle-mme est assez dlicate, le retardpris par la majorit des Etats membresen tmoigne. Sept Etats ont notifi lamise en oeuvre : la Grce, la Sude,le Portugal, la Rpublique Tchque etla Lituanie (qui ont transpos dans lestemps et compltement la directive) ; leDanemark et la France lont fait plus tar-divement. Le Royaume-Uni a annonc

    une transposition partielle car Gibraltarpose problme. LAllemagne a indiquun retard jusqu la fin de lanne.

    Ces retards sexpliquent par le manquedexprience quant aux dispositions nova-trices et par un quilibre difficile trouverentre souverainet nationale et intgrationeuropenne. Mais la Commission a mis e