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mar

ino

édition française

La baie d’Algésiras est parée

d’un impressionnant bleu tur-

quoise et sa beauté remar-

quable s’impose aux bateaux

traversant le détroit, au pa-

quebot arrivant à Gibraltar et

aux rares travailleurs de la mer

pratiquant encore la pêche cô-

tière en fin de matinée. Certains

riverains parcourent le Paseo

de Poniente de La Línea de la

Concepción pour vivre inten-

sément les journées venteuses

du printemps. En toile de fond,

à quelque quatorze kilomètres

au sud de l’arche de la Baie,

les montagnes Hacho et Musa

dessinent les contours du conti-

nent africain à ce qui semble un

jet de pierre.

L’APPEL DE LA NATURE

Lorsque l’Atlantique et la Mé-

diterranée s’embrassent, la

vie explose dans cette enclave

unique qu’est le Campo de

Gibraltar. Le mélange, la diver-

sité des cultures, l’histoire, le

soleil et les plages, la nature, le

tourisme rural et actif, les sports

nautiques et de voile, le golf, le

polo… Des possibilités infinies

s’offrent à ceux qui souhaitent

explorer cette contrée dans ses

moindres recoins.

« La situation stratégique du

détroit de Gibraltar fait de

cette zone un lieu à la diversité

unique », affirme Valle Belizón,

une technicienne de l’orga-

nisme Turismo de la Mancomu-

nidad del Campo de Gibraltar.

Les plages sauvages du parc

naturel du détroit et l’envi-

ronnement des Alcornocales

constituent l’un des plus grands

atouts de cette région : la na-

ture. Nous nous trouvons d’ail-

leurs au milieu d’une réserve de

la biosphère. En effet, le détroit

de Gibraltar, comme Messine

en Italie, comptent parmi les

sites d’observation ornitholo-

giques les plus importants du

monde. On y assiste au passage

de milliers d’oiseaux migrateurs

chaque année. On peut égale-

ment y observer des cétacés.

Avec sa situation stratégique, son mélange de cultures, sa richesse naturelle et son histoire, cette contrée andalouse est unique.

CAMPO DE GIBRALTAR LE JOYAU CACHE

On apercevra des dauphins, des

orques et des baleines nageant

à l’état sauvage au cours d’une

simple sortie en bateau dans la

baie ou le détroit.

SPORT ET CULTURE

Mais quelques navigateurs

s’adonnent également au tou-

risme nautique à La Línea ou à

San Roque : on verra ainsi des

centaines de cerfs-volants de

kitesurf et des planches à voile

glissant sur les vagues de Tarifa ;

des sportifs jouant au golf ou au

polo ; des touristes actifs sur les

routes de VTT de l’arrière-pays

ou d’autres jouissant du haut

standing d’un hôtel luxueux

ou d’un appartement à Soto-

grande. Enfin, certains se laisse-

ront caresser par le soleil et la

mer, allongés sur une plage ca-

chée comme celle de Bolonia, à

Tarifa – l’une des dix meilleures

plages européennes aux dires

de certains. Et les plus curieux

arpenteront de long en large les

Les plages de Tarifa sont idéales pour faire du surf et d’autres sports analogues.

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Indiana Jones, Lawrence d’Arabie ou le baron de Münchausen : trois personnages de la plage de Mónsul.

ALGESIRAS REND HOMMAGE A PACO DE LUCIA

La Route de Paco de Lucía retrace sa carrière artistique. De la calle San

Francisco, où il vit le jour, jusqu’au Cementerio Viejo, où il repose, la

Route traverse les enclaves d’Algésiras qui inspirèrent ses œuvres. Ce

parcours permettra également de découvrir la ville verte après le quar-

tier du Cobre et en direction de la naissance du río de la Miel, un petit

fleuve côtier.

villages immaculés de Castellar

et Jimena de la Frontera, ou ce-

lui de Guzmán el Bueno à Tarifa

; les ruines romaines de Carteia

à San Roque, ou encore celles

de Baelo Claudia à Bolonia éga-

lement, à côté de la dune. Ces

deux sites offrent de splendides

témoignages de la préserva-

tion de ces villes et comptoirs

romains. De ce fait, l’état de

conservation de Baelo, une im-

portante cité de conserves et

salaisons, en surprendra plus

d’un. Cette ville nous a légué

sa délicieuse sauce garum qui

assaisonne et accompagne de

grandes quantités de mets, et

qui fut utilisée comme cosmé-

tiques par les Romains.

NOMBREUSES

PERSONNALITES

La beauté et la richesse du

Campo de Gibraltar prennent

tout leur sens quand on arpente

ses rues et que l’on rencontre

ses habitants. Les gens du Cam-

po de Gibraltar sont ouverts et

cosmopolites. Ils sont fiers des

attraits de leur région et dési-

reux de partager les atouts de

leur terre, trop souvent malme-

née par l’histoire, les circons-

tances et les lieux communs.

Le Campo de Gibraltar est la

terre où le guitariste Paco de

Lucía vit le jour (Algésiras) ; le

chanteur de flamenco Camarón

de la Isla passait ses journées à

La Línea ; le mythique Antonio

El Chaqueta et sa grande fa-

mille d’artistes y vécurent aus-

si pendant longtemps ; c’est là

que Lola Flores tint pendant des

mois l’affiche des théâtres de

La Línea ; où le danseur David

Morales s’entretient avec ses

voisins ; où le peintre José Cruz

Herrera dessina passionnément

les femmes et Luis Ortega Brú

sculpta une piété à donner la

chair de poule (elle est expo-

sée dans le musée de la ville de

San Roque) ; c’est aussi là que

le psychiatre Carlos Castilla del

Pino, l’acteur Juan Luis Galiar-

do, le sociologue Salustiano del

Campo, le sculpteur Nacho Fal-

gueras naquirent… C’est la terre

d’un artiste de Tarifa comme

Guillermo Pérez Villalta, et le

lieu où tant de personnes ta-

lentueuses firent leurs premiers

pas. Il nous faudrait allonger dé-

mesurément la liste pour leur

rendre justice à tous.

Le flamenco est, d’ailleurs,

l’une des plus grandes valeurs

du Campo de Gibraltar et par-

mi les moins exploitées par le

tourisme même s’il commence

à se développer. Algésiras a ba-

lisé une Route de Paco de Lucía

pour faire connaître l’histoire

du plus grand représentant de

la guitare espagnole. La Línea de

la Concepción s’efforce égale-

ment de promouvoir son patri-

moine flamenco à travers son

musée et la Cuadra, espace du

compositeur Juan Mesa, tous

deux situés dans les locaux de

l’association la Peña Flamenca.

En mai, les associations de la

contrée fêtent le Mayo Flamen-

co avec de nombreuses activi-

tés de diffusion dans une zone

connue pour son précieux et

vaste vivier de jeunes artistes.

Le Campo de Gibraltar réunit

à la fois la pêche thonière et

la technique de la madrague

pratiquées dans l’Atlantique et

la Méditerranée. Sa Route du

Thon élabore des délices gas-

tronomiques entre les villes de

La Línea et de Tarifa, une zone

où règnent donc le chinchard

et les brochettes de sardines,

les tapas, les fumets de cuisine

maure et les effluves des mati-

nées de foire. C’est également

le berceau de ceux qui possé-

dant peu dégagent une lumière

et une gaieté infinies conscients

de vivre dans un véritable joyau

caché où ils brûlent la vie par les

deux bouts. ■

La porte de Jerez, à Tarifa, donne sur les rues les plus typiques de la ville.

Vue sur le Rocher de Gibraltar depuis l’une des plages de La Línea de la Concepción.

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édition française

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Algésiras-Ceuta Algésiras-Tanger

Liaisons quotidiennes Haute Vitesse/Ferries

Information, réservation e vente.Tel. 902 45 46 45

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Comment arriver

LA LINEA OUVRE LE MUSEE CRUZ HERRERA

Le musée Cruz Herrera a ouvert ses portes. Il s’agit d’une pinacothèque

consacrée au peintre de la région José Cruz Herrera (1890-1972), spé-

cialisé dans les portraits de femmes andalouses et arabes. Il se distingue

par sa peinture coloriste et proche du costumbrisme. Il est situé dans la

Villa de San José, un hôtel particulier du XIXe siècle entouré par les jar-

dins Saccone. La ville, également pierre angulaire des amateurs de tou-

risme nautique, compte plus de 11 kilomètres de merveilleuses plages.

SAN ROQUE : DU GOLF, DU POLO ET BIEN PLUS.

San Roque est connue pour le

tourisme de haut standing de

Sotogrande, ainsi que pour ses

terrains et ses tournois de golf

et polo. Cependant, cette ville

a une longue histoire comme

l’atteste Carteia, un site archéo-

logique du VIIe siècle av. J.-C. où

l’on découvrira des vestiges de

l’époque phénicienne, cartha-

ginoise, romaine, wisigothe,

byzantine, arabe et chrétienne.

San Roque fut fondée par 5 000

habitants espagnols de Gibral-

tar le 4 août 1704. Ces derniers

avaient abandonné le Rocher

après que l’amiral Rooke eut

pris la Place de Gibraltar et hissé

le drapeau anglo-saxon pen-

dant la guerre de succession.

DE LA NATURE A LOS BARRIOS

Au centre du Campo de Gibraltar et à la porte d’entrée du parc des

Alcornocales, outre la randonnée, l’écoute saisonnière des bramements

de cerf et l’écorçage du chêne-liège, Los Barrios dispose de 426 ki-

lomètres de routes à parcourir en VTT. D’autre part, la ville propose des

routes aquatiques sur le fleuve côtier Palmones et des routes à cheval.

JIMENA DE LA FRONTERA, UNE LEÇON D’HISTOIRE

Peuplé depuis la préhistoire, l’établissement de la Laja Alta abrite

les uniques peintures rupestres d’Espagne dépeignant des scènes

maritimes de l’âge du bronze. Avec l’invasion musulmane, Jimena se

consolida et devint une enclave stratégique. Son héritage patrimo-

nial est surtout composé de son château des XIII-XIVe siècles, avec

ses remparts crénelés, son donjon, sa tour Albarrana, ses citernes et

ses portes d’entrée à l’image de l’arc de l’horloge.

CASTELLAR DE LA FRONTERA, UNE CITE MEDIEVALE

Sa forteresse (xiie-xve siecles) se trouve dans la vieille ville ; elle

est en parfait etat de conservation quoique renovee. Le chateau

abrite l’un des rares exemples d’habitat amenage a l’interieur d’une

enceinte. Cette forteresse a un fort caractere medieval, avec un tra-

ce sinueux de rues propres et blanchies a la chaux. Son autre grand

attrait est sa cuisine de gibier (chevreuil, lapin et perdrix).

TARIFA, LE ROYAUME DE LA LIBERTE

Connue dans le monde entier pour ses plages de sable blanc et ses eaux transparentes, Tarifa est le paradis

des surfeurs et kitesurfeurs. Outre ses plages, Tarifa offre un éventail d’activités dans la nature et de tou-

risme ornithologique, les châteaux de Guzmán el Bueno et Santa Catalina, le site archéologique de Baelo

Claudia et la Route des églises.

Un exemplaire de chêne-liège du parc des Alcornocales. Vers le bas, les ruines de Baelo Claudia sur la plage de Bolonia.

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édition française

L’île de Malte est si minuscule

qu’elle n’apparaît pas sur les

cartes. Dix fois plus petite que

La Réunion, il faut zoomer sur

Google Maps pour distinguer

cet archipel de couleur argileuse

posé au centre géographique de

la Méditerranée.

Sitôt posé un pied dans la ca-

pitale, le visiteur se souviendra

de Malte tout le reste de sa vie

en raison de l’odeur caractéris-

tique qui s’en dégage. Car il est

fort probable qu’il ne retrouve-

ra ce parfum nulle part ailleurs.

La Valette embaume en effet

l’imqaret. À mi-chemin entre

le biscuit et le gâteau frit, cette

douceur fourrée aux dattes est

servie encore toute fumante.

C’est la spécialité des étals de

produits alimentaires installés

près de la place des Tritons, la

porte d’entrée de la vieille ville.

Ce lieu est aussi le point de dé-

part et d’arrivée des autobus qui

couvrent les 30 kilomètres que

l’île principale mesure du nord

au sud. Les routes locales sont

d’ailleurs assez peu recomman-

dées aux conducteurs étrangers.

Depuis quelques années, les bus

se sont modernisés et n’ont

plus rien à voir avec les minibus

vintage, jadis points de mire des

photographes.

UNE MANHATTAN EN

PIERRE CALCAIRE

Les arômes, le faucon maltais,

les templiers, la Seconde guerre

mondiale et un match de foot-

ball épique sont les motifs qui

hanteront les ruelles rectilignes

et dénivelées de La Valette. En

entendant parler espagnol, un

vendeur fait même ressurgir

cette rencontre footballistique

épique de 1984 où Malte s’était

inclinée 12 à 1 face à l’Espagne.

Fondée il y a 500 ans pour ser-

vir de refuge aux chevaliers de

l’ordre de Saint-Jean, instiga-

teurs des croisades, La Valette

témoigne avec ses murs quasi

intacts de la fierté d’une île ha-

bituée à se défendre contre les

envahisseurs venus des quatre

Rares sont les pays qui peuvent être entièrement sillonnés au cours d’une même escapade. Malte est l’un d’eux.

MALTE SECRETS DE LA MEDITERRANEE

Le panorama urbain de La Valette avec la cathédrale anglicane

Saint-Pierre et l’église carmélite de Sliema qui se détachent.

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points cardinaux. Pour la plus

grande joie du visiteur, ses fa-

çades ont été tracées au carton

et à l’équerre, style que l’on re-

trouvera plus tard à New York et

dans le quartier de l’Eixample à

Barcelone. Comme il fera cer-

tainement beau et chaud, il ne

faudra pas hésiter un instant à

profiter des innombrables fon-

taines bruissant dans la capi-

tale. La très élégante fontaine

construite dans le Freedom

Square est une source d’eau

fraîche et potable… Ici, l’anglais

est la langue officielle, l’île ayant

été régie autrefois par l’Empire

britannique. Une raison qui ex-

plique pourquoi des milliers de

jeunes viennent y perfectionner

la langue de Shakespeare, et

donnent cette touche festive

aux nuits de La Valette qu’ils ani-

ment. God save the Queen, af-

firme-t-on. On ne saurait mieux

dire. Isabelle II vécut en effet sur

l’île quand elle était princesse.

Quand l’ouïe se sera acclimatée,

l’œil se familiarisera aussi avec

la pierre calcaire de couleur miel

utilisée dans toutes les églises,

ce qui n’est pas une broutille.

Cette île fut un jour baptisée «

Saint-Pierre du Vatican en jaune

» ; on comprendra pourquoi. Des

Ave Maria et des christs entou-

rés de cierges en occupent bel

et bien chaque recoin. Et Malte

est l’un des pays les plus catho-

liques du monde. Contrastant

avec la couleur de l’adobe, les

jardins vert chlorophylle d’Up-

per Barraca se penchent vers le

port le plus profond de la Mare

Nostrum : le Grand Harbour. Le

panorama y est saisissant, no-

tamment quand un soleil rou-

geâtre et crépusculaire vient

enjoliver sa palette de couleurs.

Le jour suivant, nous découvri-

rons un secret entre les pierres

tombales étonnantes du cime-

tière de la co-cathédrale Saint-

Jean : La décollation de saint

Jean-Baptiste, une œuvre ma-

jeure du Caravage. Le palais des

Grands Maîtres nous rappelle

que la maçonnerie est monnaie

UNE SACREE NATURE

Un bleu tout droit sorti des Caraïbes, des voiliers mouillés dans des

criques comme aux Baléares, des baignades, du soleil, de la bière et des

promenades. Que demander de plus ? Voici Comino, le plus petit îlot de

l’archipel maltais, à l’exclusion des îles absolument inhabitées de Filfla,

Cominotto et Saint-Paul. Comino n’est habitée qu’en été. On vient

y plonger ou s’y laisser voir sur un yacht ancré dans son Blue Lagoon.

L’eau de ce bassin irréel et peu profond ne peut être plus cristalline.

Des falaises improbables et un seul hôtel-restaurant agrémentent une

cachette sans asphalte, végétation ni bousculade. Plonger les pieds dans

l’eau de mer en regardant des petits poissons colorés s’attrouper alen-

tour y est une pratique très prisée. Ici, on commence la journée en sau-

tant du ferry car il n’y a pas de port. Et on la termine en dégustant une

glace achetée dans l’unique établissement possible, assis sur sa serviette

de plage à défaut d’autres endroits. A-t-on vraiment besoin de plus ?

À gauche, une rue de La Valette. Ici, les amulettes

turques veillent sur la navigation des

pêcheurs.

La plage de Blue Lagoon sur l’île de Comino.

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courante dans cette région du

monde. Et les entrailles de la

Casa Rocca Piccola révèlent que

les habitants de La Valette se

réfugièrent sous terre lors des

bombardements assourdissants

qui éreintèrent Malte pendant

la Seconde guerre mondiale. Ce

lieu n’est accessible qu’à travers

une visite guidée sur réserva-

tion. Le fort Saint-Elme atteste

que l’empire ottoman ne put

franchir cette limite, et le mu-

sée de la guerre nous explique

comment et pourquoi. À l’heure

du dîner, on peut déguster du

poulpe au Guze Bistro ou du

lampuki au Palazzo Preca encore

que la jeunesse dorée préfère

se rendre au Paul’s Sea Breeze

où pour un prix conséquent, on

pourra laisser sa serviette de

plage sur des gradins et nager

entre des yachts. Si les Anglais

eurent le privilège de voir leur

langue s’imposer, les Maltais

conservèrent la cuisine italienne

pour le plus grand plaisir de

tous. Les fourneaux conservent

également l’empreinte des

cuisines turque et grecque : ba-

silic, tomates séchées, câpres,

épices… Des saveurs et encore

des saveurs. Pour prendre congé

de la capitale, pourquoi ne pas

réaliser une balade nocturne à la

lumière ténue de ces réverbères

jurant avec des torches. Les plus

chanceux entendront peut-être

les cahots d’un carrosse tiré par

des chevaux. Un peu plus et on

se croirait à Séville.

L’EXTERIEUR DE LA CAPITALE

Pour dormir, Sliema, moins

bruyante, reste toutefois proche

de la capitale. Une fois sur place,

le Fortina Spa Resort propose un

break mérité sous forme d’apé-

ritif composé de pistaches et

bière Cisk. De Bugibba à Sliema,

il est possible de faire une halte

pour se baigner dans des criques

LA SŒUR CADETTE

Une petite demi-heure de ferry sépare Cirkewwa, au nord de l’île de

Malte, de Mgarr, le port de la voisine et plus petite île de Gozo. Passer

en bateau sous la fenêtre bleue, une sculpture naturelle creusée dans

le rocher par la mer, est une expérience très plaisante. Un bus monte

jusqu’à la ville fortifiée de Victoria, la capitale dominée par une statue

de Jean-Paul II. Ggantija, un mégalithe antérieur à Stonehenge, se

trouve sur le chemin, ainsi que quelques moulins donquichottesques

et Ramla Bay, la meilleure plage pour réaliser une courte baignade.

De retour à la capitale, que l’on appelle également Rabat (à ne pas

confondre avec la Rabat de l’île de Malte), la façade de la cathédrale

attire les regards avec ses couleurs et ses balcons travaillés. Plus à

l’ouest, le sanctuaire de Ta’ Pinu, entouré de palmiers, est générale-

ment la dernière image que le voyageur imprimera dans sa mémoire

avant de reprendre la route pour La Valette. L’île de Gozo est vraiment

pleine de réjouissances et tentations.

rocheuses, des bassins naturels

très peu fréquentés. Plus en di-

rection du centre, Mdina, avec

sa situation de mirador, offre les

meilleures vues sur l’île. Témoi-

gnage flagrant de son isolement,

Mdina est appelée la « ville du

silence ». Les somptueux palais

Falson et Vilhena constituent

des détours obligatoires. Saint

Pierre résida dans la proche ville

de Rabat d’où la présence d’une

grotte portant son nom. Enfin,

des catacombes romaines para-

chèvent ce voyage dans le passé.

Le road trip se poursuit sur la

Cottonera, une route reliant

Cospicua, Senglea et Vittoriosa

(Burgi), les Trois Cités de Malte,

et le cœur de l’atoll. Une vie

nocturne surprenante pourrait

amener les visiteurs à prolonger

leur séjour. Inutile de regarder

l’horloge. À Malte, on est tou-

jours près de son hôtel. L’Eno-

teca del Borgo donne une très

bonne idée des vins locaux mé-

connus servis en bouteille.

Marsaxlokk, au sud, est un

petit village de pêcheurs. Ses

péniches colorées et ornées

d’amulettes turques qui portent

bonheur en haute mer invitent

à une promenade dans ce port

discret. Le village dépend tel-

lement de la mer que sa plus

célèbre statue rend hommage

à un pêcheur inconnu. Aucun

guide ne le conseillera, mais

s’aventurer sur un marché où

l’on ne parle que maltais est la

meilleure manière de se fondre

dans le paysage. Après avoir dé-

gusté les prises du jour sur l’une

des terrasses du front de mer,

St. Peters Pool nous prouve qu’il

existe également des plages de

sable fin dans ce recoin de la

Mare Nostrum. Surnommée «

le petit trou », cette retraite pro-

pose aux baigneurs des trampo-

lines naturels et des eaux aussi

tempérées que paisibles. ■

Deux images de l’île de Gozo. En haut, la basilique Saint-Georges, à Rabat. En bas, la fenêtre bleue.

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La directrice de la Mission archéologique espagnole à Héracléopolis Magna raconte une journée de fouilles.

MARíA DEL CARMEN PéREz DIE

« LES EGYPTIENS SE SONT POSE LES MEMES QUESTIONS QUE NOUS »

María del Carmen Pérez Die

(Madrid, 1953) est la directrice

de la Mission archéologique es-

pagnole à Héracléopolis Magna,

l’actuelle Ehnasya el Medina,

une ville à environ 120 kilo-

mètres au sud du Caire. Avec ce

docteur en histoire antique en

poste au musée archéologique

national, nous allons entrer de

plain-pied dans la culture des

pharaons.

La Mission archéologique es-

pagnole d’Héracléopolis Ma-

gna a 50 ans. Qu’a-t-on décou-

vert pendant cette période ?

Nous avons pu réaliser une

étude globale passant par dif-

férentes approches afin d’ap-

précier la vie quotidienne et

l’histoire de cette ville parmi les

plus importantes de l’égypte

antique.

Quel était son rôle ?

C’était la capitale de l’égypte et

la cour royale y était installée.

Elle dominait théoriquement

tout le pays à l’exception de la

partie sud, plus récalcitrante.

Avec sa situation privilégiée

dans la Moyenne-égypte, cette

cité voyait défiler les caravanes

et constituait le point de pas-

sage que tous désiraient contrô-

ler. Elle revêtait une importance

stratégique énorme.

Que disent les restes qui ont

été mis au jour ?

Ils nous parlent d’une civilisation

très avancée en son temps qui

bâtit une série de monuments

Vase canope exposé au musée archéologique

national de Madrid.

encore que nous ne sachions

guère comment. Cette culture

est beaucoup plus proche de

nous qu’on pourrait le penser.

Les égyptiens se sont posé les

mêmes questions que nous :

la mort, l’origine de la vie, les

relations avec les divinités,

la famille, les hommes et les

femmes, le travail… Il s’agit des

mêmes problèmes mais les ré-

ponses sont distinctes. Les re-

liefs égyptiens présentent des

correspondances avec le monde

d’aujourd’hui.

Depuis combien de temps diri-

gez-vous cette mission ?

Cela fait 32 ans. Nous y avons

travaillé tous les ans depuis

1984, à l’exception de 2011. Il

y a énormément de travail à ef-

fectuer sur le site.

Comment se déroule une jour-

née à Héracléopolis ?

Comme les campagnes ne

durent pas plus d’un mois et

demi, les journées sont très

longues. Nous commençons à

6 heures du matin et terminons

à 18 heures. Quand on s’arrête

de travailler, on est très fatigués

et on n’a plus le temps pour rien.

On dîne. S’il y a la Wifi, on lit les

journaux ou on écrit un e-mail

à la famille. Puis, on s’endort en

l’espace d’un quart d’heure.

L’équipe compte-t-elle un

grand nombre de membres ?

Il y a une dizaine de personnes

dont beaucoup sont espagnoles.

Des spécialistes internationaux

nous accompagnent dans cer-

tains cas concrets. Cette année,

50 ouvriers locaux ont participé

aux fouilles.

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édition française

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Comment coordonne-t-on un

groupe aussi varié ?

C’est un travail d’équipe au

cours duquel les techniciens,

spécialistes, restaurateurs, ar-

chéologues, égyptologues et

ouvriers exécutent méticuleuse-

ment leur travail. Il est essentiel

qu’ils creusent avec précaution.

On ne peut rien abîmer parce

qu’aucun retour en arrière n’est

possible.

À quand remonte votre en-

gouement pour l’Égypte ?

Ma mère était professeur à l’uni-

versité et donnait des cours sur

l’égypte. Dès mon enfance, j’ai

eu des livres d’égyptologie à ma

portée. À l’école, je choisissais

toujours l’égypte comme sujet.

De plus, je suis née à proximité

du musée et je l’ai découvert

avec mes grands-parents. Je

suis restée fascinée par les salles

consacrées à cette culture et j’ai

dit un jour à mon grand-père : «

Quand je serai grande, je veux

être égyptologue. » Imaginez

la tête de mes grands-parents.

À cette époque, la discipline

n’existait même pas en Espagne.

Après avoir étudié l’histoire an-

tique, j’ai eu une approche plus

directe du monde des pha-

raons… J’ai fait des stages au

département égyptien du mu-

sée. J’ai obtenu une bourse pour

aller étudier à Paris et au Caire.

Et voilà comment tout a com-

mencé. J’ai déjà consacré plus de

la moitié de ma vie au musée et

à l’égypte.

Qu’éprouve-t-on en décou-

vrant des vestiges ?

Une grande émotion. C’est un

moment passionnant. Mais

il faut souvent garder la tête

froide. Ce qui compte c’est la

manière d’appréhender ces dé-

couvertes via leur protection,

restauration, étude et la com-

préhension de leur signification.

L’euphorie peut-elle causer la

perte d’une découverte ?

Si le travail n’est pas bien fait

et que la restauration est ina-

daptée, on peut tout perdre. Un

jour, nous avons découvert une

tombe remplie de peintures.

Nous avons dû la sceller pour

qu’elle ne se détériore pas. Nous

avons attendu une année en-

tière avant de vérifier son état. Il

faut être très patient et mesuré

si l’on veut préserver les choses.

Quels sont les dangers qui me-

nacent les vestiges ?

Il s’agit de peintures très déli-

cates, de pigments naturels…

La lumière même peut les al-

térer en l’espace de deux jours.

Il existe tout un processus pour

qu’elles s’acclimatent aux nou-

velles conditions de tempéra-

ture, humidité et lumière… Pa-

rallèlement, il faut commencer à

les nettoyer dans un site où elles

seront protégées.

Pourquoi la civilisation égyp-

tienne nous plaît-elle tant ? Il

semble qu’elle exerce sur nous

une sorte d’attraction.

Il faut vraiment être insensible

pour n’être ni touché ni attiré.

Tout est très beau et impres-

sionnant. De plus, on ne cesse

jamais de faire des découvertes.

Sitôt rentrés, on a envie d’y re-

tourner tant il reste de choses à

découvrir. À chaque fois que je

vais au musée du Caire, je vois

quelque chose de nouveau, de

différent, ou quelque chose qui

peut être expliqué et interprété

autrement. Pour les experts, ce

champ est inépuisable.

Est-ce votre passion ?

C’est ma profession et mon

travail. Je m’y consacre et je

ne m’en lasse pas. L’égypte me

transporte et me séduit. J’ai de

la chance car je suis aussi en-

thousiaste qu’au premier jour,

comme si le temps n’avait pas

de prise. Chaque campagne me

plaît encore plus que la précé-

dente. Je suis complètement

sous le charme.

Croyez-vous que les musées

européens restitueront un jour

certaines de leurs antiquités

égyptiennes à l’Égypte ?

Non. En plus, ils n’ont aucune

raison de le faire si ces pièces

ont quitté l’égypte avant 1980.

Car, dans ce cas, leur sortie était

légale. Mais je comprends que

l’égypte souhaite récupérer des

pièces phares comme Néfertiti

ou la pierre de Rosette compte

tenu qu’il s’agit de chefs-

d’œuvre. Mais qu’en feraient-ils

? Ils ne possèdent pas de lieu

d’exposition sur place. On

trouve des milliers de vestiges

dans les entrepôts. Dans les mu-

sées européens, il est possible de

faire connaître la culture égyp-

tienne aux visiteurs à travers ces

antiquités.

Quelles sont vos pièces préfé-

rées ?

Il existe beaucoup de très belles

pièces, mais la tête de Néfertiti

et les pyramides me semblent

fantastiques. .

Et au musée de Madrid ?

Il y a un cercueil de la XXIe dy-

nastie dont l’iconographie est

très intéressante et qui permet

d’expliquer de nombreux as-

pects de cette culture. Une pièce

possède différentes lectures –

ornementale, pratique… ■

TRAVAIL SUR LE TERRAIN

Le chef du département des antiquités égyptiennes du musée

archéologique national et directrice de la mission explique

comment les chantiers ont été mis en œuvre dans la ville

égyptienne : « Nous nous sommes focalisés sur trois points.

Deux nécropoles : une de la XXIIe à la XXVe dynastie, aux VIIIe et

VIIe siècles av. J.-C. Et une seconde, plus ancienne, des IXe et XIe

dynasties, de l’an 2000 av. J.-C. Nous travaillons désormais dans

le temple du dieu local Hérychef ; nous fouillons et restaurons.

Nous n’avons pas abandonné le projet général de recherche et

d’étude de la cité, qui comporte des aspects aussi importants

que l’urbanisme, l’orientation des temples, ses monuments et la

religion. » Les premières fouilles à Héracléopolis Magna remontent

à 1966. Elles furent menées par l’archéologue Martín Almagro.

María del Carmen dans la tombe d’Hotepuadyet