Écrit et la bibliothèque dans la civilisation musulmane du moyen-âge
TRANSCRIPT
ECOLE NATIONALE SUPERIEURE
DES BIBLIOTHEQUES
L'Ecrit et la bibliothdque
Dauis la civilisation musulmane du moyen-ige
Essad. de synth^se.
MEMOIRE
Pr6sent6 par
d® •» : eMohaiiied SAID
Sous la direction de Nikita ELISSEEFF.
/I3g0
1980
166me Promotion
SAID(Mohamed).-L'Ecrit et la bibliothdque dans
la civilisation musulmane du$moyen-tge:6ssai de
synthdse:m6moire /pr6sent6 par Mohamed ^SAid i;
sous la direction de Nikita Elisseeff.-
Villeurbanne:Ecole nationale superieure des
biblioth&ques,1980.-54p.;30cm.
Bibliographie de bibliologie historique arabo-musulmane.
Ecri>/civilisation musulmane,moyen-Sge.
Bibliothdque/civilisation musulmane,moyen-ige.
O Essai de synthdse et de refl^xion svir le role
et la place de 1'ecrit et de la bibliotheque
dans la civilisation musulmane du moyen-Sge.
R E M E R C I E M E N T
Nous remercions tous ceux qui ont contribud
de prks ou de loin k la r^alisation de ce travail.
Notamment :
ftotre ami ROMDAN HAMDI aui, par sa connais-
sance de 1'histoire de la civilisation arabe, a facilite
nos recherches ;
Nos professetirs HICHEM DJAIT et OMAR SAIDI
aui sont k 1'origine de notre devoument pour 1'histoire
de la civilisation arabe ;
Madame Frangoise AZEMA, responsable du ser-
vice de pr§t interbibliotheque d. la bibliothfeque inter-
Universitaire de Lyon (quai C. Bernard), aui nous a fait
parvenir les ouvrages necessaires a 1'accomplissement
de notre travail ;
Notre professeur NIKITA ELISSEEFP qui, par
ses conseils et sa gdnerosite d'esprit, nous a aide a
mener bien notre etude.
Nous tenons, enfin, a remercier Madame
MADELAINE WAGNER, directrice des etudes k 1'Ecole Natio-
nale Superieure des Bibliothdcaires, pour ses encoura-
gements.
SAID MOHAMED
1
I N T R O D U C T I O N
Ce travail est un essai de synthkse sur la place
de 1'^crit et de la bibliothkque dans la civilisation arabe
Chronolog-iqueraent, il se limite & 1'^poque du myen fige :
la pdriode la plus florissante de cette civilisation. Par
son champs d'etude m§me, il ne peut §tre qu'un travail am-
bitieux. Mais son seul merite est d'etre une initiation &
une bibliologie historique arabe.
Les difficultds devant un tel travail sont evi—
dentes. Nous sommes devant ure civilisation ecrite tr£s
diverse en ses manifestations, tres dense en sa quantite.
C'est en fait l'ere arabio-musulman qui etablit le lien en-
tre 1'antiquite gr6co-romaine et la renaissance europ^enne.
Sa limitation geographique n'est pas sans int^rSt pour sou-
lever son importance : le monde musulman s'etendait des
confins de 1'lnde jusau'&. 1'Espagne, du centre de 1'Africjue
jusqu1^ 1'Asie Centrale. Mais paradoxalement, les etudes
entreprises pour mettre en valeur cette richesse ne sont
pas au niveau de son importance et sa contribution k la
civilisation humaine. On peut affirmer sans etre pessimiste
que les travaux entrepris daris 1'histoire du livre arabe
n'ont fait que grignoter le terrain. La bibliologie his-
torique arabe n'etai.t jamais une discipline a part. Elle
est une preoccupation secondaire des historiens. Cette re-
alite oriente les recherches effectuees (l). Ces recherches
touchenfc des asnects particuliers du probleme. Nous trou-
vons surtout des essais sur une bibliotheque a une epoque
determinee, un ev^neraent historique et son rapport avec
une bibliotheque, le fonds d'une bibliotheaue et son impor-
tance pour 1'histoire. Motives surtout par une volonte et
une curiosiitd dlidactique, ces travaux sont loin de cerner
les problemes de 1'histoire du livre arabe. La majoritd
de ces travaux est faite par des chercheurs et orientaliste
1- voir bibliographie exaustive &. la fin de ce travail.
3
europdens. Bour des raisons ou pour des autres n'ont con-
tribue que d1une fagon limitde k 1'histoire du livre arabe.
Leurs contributions sont beaucoup plus importantes dans
d1autres branches de la recherche, comme c1 est le cas en
arch^ologie par exemple. Non seulement par leur orienta-
tion, mais aussi par leur contenu, ces travaux repr^sen-
tent des divergences importantes, parfois meme des resul-
tats contradictoires (l). tieul 1'ouvrage de Youssef Eche
(2) essaye de placer la recherche au niveau des sources
pour degager un point de vue coh^rent, mais fanit & notre
avis, par ndgliger quelques aspects du problfeme, k sav.oir
les rapports de 11institution avec 11ext^rieur et son role
comme element. dynamique d'une culture.
Si on prend en consideration les trois axes du
travail biblioiogique :
- 11histoire du livre et des bibliothfeques,
- les catalogues des manuscrits,
- 11imprimerie,
nous trouvons que 11ensemble du travail effectud ne degage
pour le momeut que quelques verit^s essentielles. Alors
que pour la civilisation europeenne 1'evolution du livre
est d^jk definie : les manuscrits - incunables - livre mo-
deme. Les dates de transition sont ddjSi fixees. Cet etat
de chose dans le monde arabe et musulman tient & toute la
situation de ces pays 1& k 1' dpoque modeme et contemporai-
ne. Ces pays faibles, affaiblis et arri^res n'ont pu se
pencher sur les humanit^s. Cette realite se renforce par
le developpement et 11expansion d'une Europe industrialisee
et forte. Les premiers pas vers le rassemblement m§me des
manuscrits ne sera entrepris que tardivement. En Tunisie,
1- Les divergences et des polymiques sur le rapport entre
bibliotheques (Dar al Ilm, Dar al tiikma, etc .. .) et la
Madrasa (coll&ge). Aussi entre bibliothfeque et Masdjid
(mosqude) .
2- Les bibliothfeques arabes au Moyen Age. Institut franpais de Damas, 19o?. Nous revenons sur ce point au 1° partie.
4
par exemple, un d^cret pr^sidentiel des anndes 70 a ras-
sembl^ les manuscrits arabes. Au iviaroc, des initiatives
sont prises par les autoritds publiques marocaines en vue
du recensement et de la collecte des manuscrits et docu-
ments dispers^s. Ces initiatives sont fflicitdes par les
participants au colloque organisd par le C.N.R.ti. (1) sur
les archives arabes. Quant au catalogage (2) et peut-§tre
1'^dition, elles sont les tfiches des g^nerations futures,
bien que ce travail ait dej& commencd, les difficult^s ne
se limitent pas & ce fait 1& mais s'etendent k d'autres.
A travers la diversitd des probl&mes que pose la bitilio-
th&que, nous sommes convaincus que tout travail sur ce
sujet doit faire appel & une bonne eonnaissance de l'his-
toire. En Islam plus que dans d'autres civilisations, la
bibliotheque en tant qulinstitution se situe au "coeur"
de 1'histoire (3^« Notre r^flexion doit "ddpasser" la chro-
nologie pour etudier 1'dvolution id^ologique culturelle.
Cette eonnaissancce necessite une ^ruditrion de
la part de 1'auteur, mais aussi un certain d^veloppement
des ̂ tudes de civilisation et de 1'humanisme, ce qui n'est
pas toujours dvident. Ces travaux sont & notre connaissance
trop limit^s. Ce n'est qu'&. quelques ecrits de Mohamed
ARKOuti et de Louis GARDET qu'on a pu se refdrer (4). Cette
obligation s'affii*me quand on est convaincu. que la biblio-
theque arabe etait une arae id^ologique. Ce caractfere est
precoce par rapport au moment ou il s'est produit. En Europe
la bibliothfeque ne va servir d'arme iddologique qu'au 19°
si&cle. Certaines tendances politiques vont essayer d'uti-
liser la bibliothkque comme moyen de popularisation des idees.
1- Colloque du CNRS : les Arabes par leurs archives. Paiiis
9-11 avril 1974.
2- En Tunisie sur 25000 manuscrits & la Bibliothkque Natio-
nale, 5000 sont catalogues.
3- Nous revenons sur ce point & la premikre partie.
4- Louis GrAtiDriT : La Cit£ Musulmane. ^ciriS : 3" vriny UiS
ARKOulN Mohamed et GiiRUtii' Louis : L'riumanisme musulman.
5
Dans la eivilisation musulmane, la biblioth&aue
^tait la seule infra-structure de savoir et de recherche
- ou au moyen la plus importante - avant 1'emergeance de
la Madrasa (college) (1). Parmi les branches de sciences
figuraient les scienoes religieuses et c'est d.ans la bi-
blioth&que que vont germer les mouvements d'opposition et
le pouvoir politique va avoir tendance k r^cuperer cette
institution tsrntot pax 11encouragement, tantot par la rep-
ression, mais toujours pour des raisons politico-religieuses.
De ld. se comprend' 1'histoire vivace et riche de la biblio-
thdque arabo-musulmane. Elle a £t^ livrde aux al^as de la
politique et des changements des Califes. A notre sens un
travail reste k entamer par les historiens du livre qui
consiste a placer le livre dans 1'histoire pour le voir
dans son moment ou il est apparu.
Ce moment ddtermine aussi bien le contenu que
la forme. Cette idee s'oppose aux iddes negatives domi-
nantes dans les pays arabes faisant de 1'histoire arabe
un ensemble pour 1'opposer & un prdsent non satisfaisant.
On finit souvent par banaliser le probleme et conclxire par
une grandeur arabe dans 1'histoire. Ces tendances non scien-
tifiques sont representees surtout par certains ecrivains
du Moyen Orient arabe, en g^neral. On distingue mal entre
la mise en valeur du patrimoine dans tous aspects objectifs
et une lutte anti-imperialiste qui polarise la reflexion.
Pour montrer le sens de la recherche aui nous
parait utile nous signalons k titre d'exemple les travaux
de H. J. MAR'flIN sur le livre europ^en. Pour ̂ tudier le pro-
bleme de 1'imprimerie par exemple, il le place dans ses
prolongements dconomiques, sociaux et ideologiques. II a •
ete Mlicite par M. Cohen pour cette t§.che si d^licate (2).
1- Ce point est trop controverse entre les historiens. Est-
ce aue la Madrasa a emerg^ de la bibliothfeque Y Est-ce
au'elle a cornmence k la Masdjid' ? wuel rapport entre les differentes institutions ?
Z- Colloaue du Centre lnternational de synthese : Ecritures et tisprits des peuples. Contribution de n. J. iviAR'illN. L'imprimerie
Pour revenir aux difficxiltes, nous signalons aussi
que le travail sur 1'histoire du livre arabe presente des
difficultes partioulidres. Les informations des sources sont
breves. II nous a et6 impossible de parcourir les sources
arabes, tSche qui a fait 33 ans de travail pour Eche. On
s1est suffit de certains ouvrages anciens sous-formes de
catalogues ou d1essai de bibliologie (1). Pour orienter
notre reflexion, le travail de Y. Eche nous a ete trfes u-
tile. Mais un probleme majeur place le chereheur devant
une incertitude absolue auant k 11objectivit^ des sources.
Le fait que la bibliothkque a servi d1arme ideologique pla-
ce le chercheur devant une incertitude absolu parceque toute
information peut avoir une intention politique : pour re-
pondre k une volonte de propagande religieuse, pour augmen-
ter le prestige d1un Oalif, pour montrer la pi£te d'un per-
sonnage. Donc il faut connaitre 11appartenance des ecrivains
et leurs motivations.
Ce n'est pas 1& la seule difficultd. La civilisa-
tion musulmane est caracterisee par la popularite de 1'idee.
Ce caractere s1affirme auand on etablit des comparaisons
avec d1autres moments de 11histoire. Dans les eivilisations
anciennes un "isolement" de ceux aui pensent. est dvident.
Far conseauent 1'idee ne trouve sa resonnance que dans les
milieux cultives et isoles du reste de la population, c-e
au-i rend 11 heritage intellectuel tout k fait symbolique
pour comprendre la structure ideologique. Dans la civili—
sation arabo—musulmane s1est amorce de un processus de
"culture pour tous". Cet aspect trouwe ses racines dans
le fondement ideologique de la societe & savoir la reli—
gion. L1Islam pretend §tre - et il a 6te - une religion
mais aussi une politique et une ligne de conduite. Les
arabes se sont unis par une religion. Mais les contradic-
tions du developpement social vont evidemment montrer que
le CORAM est loin de repondre k toute 11organisation de
la socidte et aux problemes qui endecoulent. Une polemique
1— On site surtout Al—Fihrist : Ibn Khalifa (Abu Bakr b.Hayr) Kashal-Znun : Halifa (Haggi Halifa).
7
sur le vrai et le faux, la bonne et la mauvaise voie, le
religieux et l'her£tique. II n'est pas par hasard que le
premier problfeme posd soit le probl&me du Califa : le pou-
voir politique ! Cette polemique est religieuse, mais aussi
sooiale car la religion engage la vie de tous et la mosqu^e
rassemble tous. On peut avec beaucoup de r^serve dire que
cette relation sacrd-culture-individu est plus accentu^e
en Islam qu'au Christianisme.
De 1& le fait que ce qui est religieux passe pour
§tre discute et finit par §tre politique donc social. Le
chercheur ne doit pas §tre "trompe" par 1'aspect religieux
des choses. La bibiiothfeque est une arme politique mais
"la logique" de 11epoque tend d. etablir une couverture des
positioiis sociales ̂ conomiques cx>ncr&tes. Bref, un dlar-
gissement k la base de la culture ^crite s1est amorcee (l).
Toutes ces particularites int^rieures ne doivent
pas nous faire oublier les apports anti£-islamique et anti-
arabes. Cela est evident. En effet les arabes ne sont pas
partis de rien. Ils ont synthetise les apports des civi-
lisations anterieures, dont la civilisation greco-romaine.
Nous allons m§me remarquer que la bibliotheque va §tre le
vase ou les arabes vont recueillir 11 heritage des anciens.
La biblioth&que va eberger le mouvement de traduction en-
courage par les califes. C1est pour ga qu1elle ne va vivre
son §ge d'or qu'apres passe une longue maturation des struc-
tures de 1' dtat. A la biMiothkque et k la traduction va
s1ajouter 1 *enseignement pour donner a la bibliothfeque
11importance qu'elle a eue.
Pour finir, on doit dire que les arabes n'ont
pas subi seulement les apports des civilisations anciennes,
1- Voir a ce propos C. CAHEN. Les peuples musulmans dans
11histoire m^dievale. Institut Frangais de Damas, 1977•
8
Ils ont syhth^tise aussi les h^ritages des peuples islamisds
(1). Importance du sujet et difficultes multiples de
le traiter, tels sont les deux traits de la bibiLioth&ciue
et de 1'^crit arabo-musulmans. En effet la recherche sur
1'histoire du livre arabe se heurte k une difficult^ cen-
trale qui resume tout ce qui a dtd dit i le livre n'est
pas une cons^quence d'un certain ddveloppement, comme e'est
le cas dans d'autres conjonctures historiques. Le livre,
dans l'ere arabe, est & la base de 1'evolution. II va res-
ter, toujours, support de toute orientation que prend la
societd. II n'est pas une simple consequence d"un d^velop-
pementb social'. Ne perdons pas de vue que 1'unitd et l'ex—
pansion arabe s'est faite autour d'un livre, le Coran.
Pour ceraer le problkme, nous avtins pu distinguer
deux axes, formant ainsi deux parties :
1- le livre et 1'expansion : la bibliothkque non institu-
tionnalisee,
2- le livre et la stabilite : la bibliotheque institution—
nalis^e.
Enfin ouvrir des perspectives de recherche nous
avons etabli une bibliographie de bibliologie historique
arabo-musulman, qui se divise en trois parties :
- les biblioth&ques et les archives,
- 1'imprimerie dans le monde arabo-musulman,
- les manuscrits arabes et leurs catalogues (2).
1- Nous revenons sur ce point.
'd- Voir introduction de la bibliographie k la fin.
p R E 1V1 1 E R E P A R T 1 E
L I E c R I T E 'J L' L 1 I S L A M
L A B I B L I 0 T H E Q U E N 0 N
I N S T I T u T I 0 N N A L I S E E •
10
Avant d'aborder le problkme de 11dcrit dans la
societ^ arabe du Moyen Age, nous allons nous attarder sur
une d^finition. L'ecrit est une formulation par des signes
variables d'une culture, d'un ensemble d'iddes acquises
par 1'homme & un moment de son existance. Cette formula-
tion est le signe d'un stade evolue du ddveloppement et
de conscience de l'utilit£ de la transmission. C'est pour
cela que la densitd de 1'^crit va en parallfele avec Mla
complication" de la vie de 1'homme et de sa civilisation.
Nous retenons 1'idde de M. Cohen : "1'emploi de 1'dcritture
est fonction de son utilite dans une socidtd donnde" (1).
Cette idde centrale sur 1'dcrit s'affirme dsns la civili-
sation arabe du moyen-SLge. L'empleur de 1'dcrit va en pa-
ralldle avec son utilit£ pour 11organisation sociale. On
peut m6me dire que cette civilisation offre un bon exemple,
car avant 1'Islam et la mise en route du"projet politique"
de 1'empire, 1'ecrit etait trfes limitd, aprfes a peine deux
siecles nous remarquons la generalisation de 1'ecrit dans
11administation mais egalement dans 1'erudition et la re-
cherche scientifique. Nous n'avons pas a nous attarder sur
1'origine de l'£crit dans la societe arabe prd-islamique,
mais il est utile de donner quelques points de rep&re pour
saisir 1'evolution d'aprks.
A— L'ecrit et 1'histoire de 1'Arabie : avant et apres
l'Islam :
Les plus anciemies ̂ critures arabes sont materia-
lisdes par des graffitis^sur le mur du temple de Ramm au
Sinal et remontert £? %0G aprks J.-C. (2). C'est & cette
epoque m§me au'a ddbute 1'utilisation du papier (3). Le
cuir etait, egalement, connu et employe dans 1'Arabie prd-
1- M. COHEN, La grande invention de l'ecriture et de son
evolution. Paxis 1950-
2- lilncyclopddie de l'Islam. Article : ARABIYYA. T.l, p.5D2.
3- tincyclopedie de 1'Islam. Article : KAGHAD. 'f.4.
11
islamique. Le parchemin de peau de mouton , de chfevre et
de veau ̂ tait connu dfes le V° si&cle. A. Grrohmann affirme
que "les arabes connaissaient la fagon de colorer les peaux
en jaune avec du sofran et ils perfectionn&rent par la sui-
te, k A1 Kufa, le traitement des peaux, en ce sens qu'ils
remplacdrent la chaux vive (qui rendait les peaux trks
sfeches) par des dattes afin de les assouplir" (l). Ces mo-
yens techniques dtaient utilises pour le commerce et les
dchanges. Le grand p&re du prophete - peu avant 1'Islam -
posskde un document mentionnant la reconnaissance d'un
tiimyarite d'une dette. Ue document conserve dans le Tresor
du Calif al-Ma mun est en cuir.
II est important de conclure que les moyens tech-
niques dxistants n'emp^chaient pas une grande diffusion
de 1'ecrit. Mais les condiTions economiques et sociales
n'etaient pas tres favorables. L'utilisation de ces moyens
se limitait a 1'activitre commerciale et n'a pas provoque
une ideologie ecrite. Pour saisir cette r^alite nous de-
vons revenir k 1'histoire d'Al Djazire pre-islamique.
Ce qui a oriente 1'dvolution de cette partie du
monde, est - plus qu'ailleurs — ses conditions climatiaues.
Vivant dans un pays sec, les arabes ont ete contraints &
une vie nomade. Le deplacement vise k profiter EBU maximum
d'une pluviometrie irreguliere. A c6te de cette activite
pastorale, les arabes surtout dans les villes, ont profite
de leur position strategique pour assurer le commerce entre
le sud et le nord de la peninsule.
Cette vie dconomique si difficile, limitait au
maximum la stabilite, condition necessaire pour une ac-
cumulation de 1'effort humain. Cela s,:est repercut^ evi-
damment sur les manifestations de civilisation. L'Islam
1- (jrohmann. tinc.ycloprdie de 1'Islam. Article : DJILD. T . 2 .
12
qualifie cette p^riode m§me de Jahiliyya (epoque de l'ign-
orance). Pour 6carter toute mystification de la civilisa-
tion ecrite, nous affirmons que les arabes ont eu leur
"civilisation" mais d1une maniere non dcrite. En effet la
socidtd arabe pre-islamique peut §tre qualifide de litte-
raire. Pas dans le sens de notre temps, mais il est toujours
vrai que cette soci^td donnait a la bonne expression une
grande importance. Les arabes voht m§me organiser des ma-
nifestations collectives pour mettre en competition leurs
oeuvres littdraires. Ce sont les Souk Oukad. Les meilleurs
peesies etaient reconnus comme telles par tout le mande
et suspendues sur les murs de la Ka ba. Le don oratoire
£tait aussi tres bien vu. Les sources nous conservent en-
core quelques Khotba dont la plus connue est un certain
Koss b. Sa ida.
Ce caractkre enracine dans la mentalit^ arabe
va se perpetuer et se manifester dans le Coran. Le miracle
du Coran est sa langue litt^raire inimitable car il est
parole de Dieu. Ce miracle stylistique est au meme niveau
que la conversion du baton en serpant et de la rdsurrection
des morts chez les peuples primitives. Le Coran comme oeuvre
d1art reconnu par tous va cimenter la croyance des arabes
dans le miracle litteraire et oratoire et va lui ajouter
son caract&re sacre.
Apres la conqu§te, nous remarquons que ce mira-
cle va s'etendre m§me a la graphie arabe. Cette graphie
va vaincre toutes les autres graphies qu'elle va rencon-
trer au moment de 1'expansion. A l'6poque moderne cettre
graphie m§me va resister pour des raisons secrees, k l'ex-
pansionnisme de 1'^criture latine occidentale. De ce fait
que nous venons d'expliquer va se tracer le premier carac—
tfere de la civilisation arabo-musulmane mddievale ; l£
sacre et 1'ecrit passent sous le m§me angle de vue.
A cela s'ajoute une verit^ pas moins importante
qui est la suivante. Le Coran comporte des elements d'une
13
constitution sociale. II porte en lui le projet d'une so-
cidtd nouvelle. II stipule le comportement de 11individu
k 114gard de Dieu et k 1'egard de la societd : A1 Djama a
(la communautd).
Pour r^sumer tous ces aspects 1&, on affirme que
le Coran r^pond chez 1'arabe k trois aspirations diffdren-
tes mais importantes : 11 esthdtique, le sacr<5 et le soeial.
Ces traits ld. ne sont que rarement rdunis dans une seule
representation dcrite. Cela nous aide k comprendre 11im-
portance que va prendre le livre dans le devenir de cette
societ^. L'histoire arabe va reconnaitre la valeur de 11e—
crit. De 1& va dmerger une tendance d. ecrire tout ce qu'on
juge important. L1ecrit est teinte d'une certaine sacra-
lisation.
Que va-t-il se passer aprfes 11Islam ? L1Islam
se d£finit par ses ambitions internationalistes. Rous n'al-
lons pas traiter du pourquoi de cette vdritd mais nous al-
lons chercher le comment. CJomment 11 dcrit a evolue dans
11histoire musulmane ?
II va se passer un temps ou les musulmans - sur-
tout des arabes - seront pris par les conqu§tes. Le but
^tait d1islamiser les peuples voisins. Ce qui est impor-
tant pour notre sujet c1est le fait qu1il y aurait une per-
iode ou les caracteristiques de 1'Arabie-pre-islamique vont
se prolonger. Les conquStes vont emp§cher encore une fois
toute stabilisation. Cette phase bien qu'elle couvre une
longue periode, va pour 1'ecrit surtout jusau1k la fin du
reigne des premiers Califes : les Rachidun (Abu Bakr, Omar,
Othman, Ali). Le Coran sera un guide pour 1'action et la
pr^sence des compagnenj/s du prophfete va ecarter la n£c£s-
site de 11ecrire.
La parole du proph&te et sa conduite etaient trans-
mises oralement : La Sira (la conduite).
14
Mais 11evolutior de la societe musulmane et les
problemes qui en d<Scoulenc vonc ouvrir la porxe & 1 'hdrdsie.
Le Coran ne sera plus sufiisanx pour rdpondre & tout.
L1 horesie vr- ne mr.nif cntrr par des def orwati ons volontaires
de c-ertr-ins paragraphes du Coran. La parole du prophfete
sera livree aux opportunites des groupes en lutte. Cela
va contre le but premier de 1'islam oui est de creer le
maximum de cohesion ideologique de la societe islamique,
condition necessaire pour tout etat fort. (1)
L1 lslarn a vise en effet a la constitution d1 une
societe a une seule classe, cimentee par une seule ideolo-
gie : "the one class society" pour reprendre 1'expressior
de Gibb. Le chef de la communaute puise toutes ses direc-
tives dans le Coran et la Sira (conduite du proph&te) d'ou
une lutte contre 11effriteraent et 11heresie. C 1 est le 3°
Calife : Othman oui va faire fixer par ecrit le Coran et
va bruler tous les exemplaires du temps. C1est 11exemplaire
m§me d'aujourd'hui connu sous le nom de Moshaf Othman.
Blachere prefore 11 appeler le&i~onnaire de Othman.
Quant k la Sira (la parole du prophete), l'evo-
lution etait un peu differente. II semble aue 11ampleur
de la parole du prophete a pousse certains de ses compa-
gnons i prendre notes. Le prophete n'a pas ete favorable
a 11ecriture de sa parole. Cela est stipule m§me par des
Hadiths, bien qu'il y a des traditions contraires aui in-
forment aue le prophfete a ordonne d1ecrire sa parole. II
est probable que le prophete craigneit une confusion entre
le Coran : parole d1Allsh et sa parole a lui. 11 est pro-
bable aussi aue le prophete imaginait aue le Coran peut
constituer une constitution sociale suffisante et que sa
parole n1 est aue secondai re. Le prophete craigrait proba-
1- Voir a ce propos : Maxim Rodinson: Le morde islamiaue
et 11extersion de 11ecriture arsbe. in : Ecriture et
er-pri t des peuples . *. r •
15
blement d'6crire des paroles conjoncturelles et poavant
etre par consequent contradictoires.
Les notes prises par les compagnants du prophfete
v.ont §tre la base des livres du Hadith qui ne v.ont voir
le jour ulterieurement. Les sources parlent souvent de
Sahifa (pages) dcrits par 1® compagnants. Le plus connu
de ceux est un certain Urwa b. al Zubair de m^dine,
ayant transmis des traditions du prophete. II etait favo-
risd par sa tente Alcha, femme du prophete.
Les initiatives les plus serieuses pour la col-
lecte du Hadith ne vont voir le jour que plus tard a la
fin du premier si&cle. On prend comme exemple 1'ouvrage
de Tayalisi et d1Ahmed b. Hanbal (mort 241 h./855). Oes
ouvrages sont m§me mal classes et mal indexes. Four cher-
cher un hadith il faut tout lire. Et ce r1est qu1au 3° sie-
cle que vont paraltre les grands ouvrages de Hadith : les
Musannaf, les plus connus et reconnus par tous soht les
Sahihs d' al-Bukhari etc de Muslim. Ces ouvrages serofit mieux
classes et indexes et v.ont repondre a un souci d' orienta-
tion ideologique dicte par 1'evolution historique de la
communaute. A part la religion ils traiteront d!u commerce,
de 1'agriculture et des relations sociales (1).
Le Coran et le Hadith vont rester donc essen-
tiellement k 1'etat oral jusqu1 & fin du reigne des Rachi-
duns : les quatre premiers califes. Cela doit Stre encore
plus vrai pour les autres representatiohs culturelles :
la poesie, les discours, etc... . L'ecrit se limite tou-
jours a 1'extrfeme necessite : les correspondances du pro-
phete, les dettes entre les commergants, etc... . Les sour-
ces nous informent clairement que le prophfete adressait
1- A1 i^ihrist. Ibn Halifa. Introduction.
G-ardet : Humanisme musulman d1 hier et d1 a u j ourd1 hui .
IBLA.7(1944).
des lettres aux rois et utilisait le cuir (1). On site sur
tout des attributions de puits et de terres faites par le
prophkte k des personnalit^s de 11dpoque (2).
Pour conelure & propos de 11ecrit dans 1'Islam
primitif, 6n soutient aue, bien que les conditions tech-
niques etaient pr§tes k une utilisation intense de 11^crit
et que la soci£t£ musulmane a eu "sa constitution", le
pouvoir theologique et politique personnifi6 par le pro-
phfete n1etait pas favorable au developpement de 11^crit.
Par conseauent, se repand la diffusion "par coeur", mo-
dalitd pratiquee jusqu'aux derniers temps. Ce n'est aue
des raisons d1unite et de cohdrence qui vont 11imposer
plus tard. On remarque que les raisons ideologiques et
politiques 11emportent sur les moyens techniaues. Cela
est un trait important de la civilisation arabo-islamiaue.
B- La bibliothfeque et 1'Islam primitif i
Qu'on est-il, alors, de la collecte des docu-
ments et leur conservation ?
Comment va dmerger la bibliothkque arabo-isla-
miaue dans cette situation ?
Pour aborder ce second point, on avance auelaues
precisions :
1- Cette institution de d^finit par sa place dans la super
structure de son temps. Car la biblioth&q ue comme toute
institution occupe un r6le limite dans la propagation de
la culture et dans sa conservation. De 1&, on ne doit s'ar
r§ter au niveau de 11appelation par exemple. II arrive que
les sources parlent de 11institution alors au1elle n'a pas
encore pris une veritable place influante. .J 1autre part
11 appelation peut se propager dans le temps et effa.ce les
limites des etapes differentes dans 11evolution.
1- Ibn Halifa (Abu Bakr b. Hayr), Pihrist, introduction.
2- ilncyclopedie de 11 Islam. Article DJILD.
17
2- II serable aue les etudes effectuees sur 1'histoire des
biblioth&ques et qu1on a eu la chance de consulter (l),
s1arrete beaucoup sur ce que donnent les sources. Eche
fait m§me de 1'appelation uhe base de classification. II
distingue entre 11epoque de Dar al Hikma et 1'epoque de
Dar al Ilm. Quajit k nous, nous allons essayer de saisir
la bibliotheque par sa nature dvolutive et par son rdle
dans la propagation de 11iddologie du temps.
En effet, la v^rite dominante pour 11evolution
de 1'institution de bibliothfeque est la m§me que pour 1'ec-
rit avec une difference : on ne peut parler de bibliotheque fivm->
La conservation etait tres limitee k des ecrits personnels *
et trfes restreints et n'a rien k avoir avec une conserva-
tion bibliophilique. Apres 1'Islam et pour une longue pe-
riode, il n1y aurai pas de bibliothfeaue. La raison est e-
vidente. La societe arabe etait instable, la culture ecri-
te est fsiMe, etc... . II faut attendre le Califat de
ivio awia (41 h-6bl/60h-6ti0) pour entendre parler de Bayt
al Hikma (maison de la sagesse). Eche soutient que "sous
ce calife le Bayet al Hikma etait definitivement institu^"
(2). Ainsi il s1arr§te au niveau de 11appelation que don-
nent les sources et ajoute m§me que cette appelation etait
le resultat d1une influence du contact des arabes avec les
peuples islamises. "lls durent constater que les institu-
tions monarchiquee alors en vigueur comportaient 1'usage
de ddposer les livres en une institution portant un nom
qu'ils traduisirent par le mot bayt al Hikma ou hizanat
al hikma..." (3)•
1- Voir bibliographie & la fin.
On site ce propos surtout Eche (Y.) et Lammens (H. ) .
2- Les Bibliotheoues Arabes au Moyen-Sge. p. 13.
3- Les Biblioth&aues Arabes au Moyen-Sge. p. 11.
Nous revenons sur ce point dans la 2° partie.
18
II n'est pas question de contester le fait que
Moi^ awia avait une biblioth&que. Mais ce que nous a joutons
c1est aue cette institution est loin d'avoir 11importance
qu'on lui accorde. Ce calife £tait un politicien intelli-
gent. II est connu par §tre un Dahia (homme ruse). II £tait
le premier & rompre avec 1* id^alisme islamique de 1'Etat
th£ologique, pour instituer sa monarchie et accorder la
succession k son fils. II est probable qu'il s1interessait
aux ouvrages des Ayyam al Arab (les jours des arabes) :
des ouvrages de narration sur les guerres, etc... Rien
n'impgche de croire que sa bibliothfeque contenait des pages
de Hadith bien que la source de la Sira sont les compagnants
du prophfete encore en vie. Mais ce qui est important est
que cette bibliothfeque est loin d'§tre une insti"tu1tion so-
ciale. ̂ lle etait une bibliotheque S. utilite personnelle
et par 1& sa signification historique est absente. Si les
sources place cette bibliotheque 'k 11 origine, c 1 estr parce-
qu1ils sont ecrites posterieurement k cette p^riode et veu-
lent donner le maximum d•informations. Quant a 11influence
des monarchies islamis^es, il est trop t8t d1en parler.
En ce temps 1&. les aonqu§tes dtaient en cxiurs. La commu-
naute musulmane etait div.isee et 11 instabilite emp§che
toute influence positive. Nous remarquons que le sort de
la bibliotheque de Mo^awia confirme notre hypothfese. En
effet le pouvoir de la premifere branche Omeyyade : la bran-
che sofyanide, ne va pas durer longtemps au pouvoir. Le
fils de Mo^awia n1dtait pas un brillant monarque. Le fils
de Yazid etait lui aussi une faible personnalite et abon-
donnera le pouvoir en faveur de la branche Marwanite. La
bibliotheque de Mo^awia - consideree comme bien personnel -
ne passera pas & la nouvelle branche au pouvoir. (1). Elle
ne sera transmise aue plus tard pendant la vente du palais
k Abdelmalik Ibn Marwan (65h.-6b5/b6h.-705), par Halid b.
1- Al-Munajjid (S. ) : Dirasat fi tarikh al khatt a.l arabi
mundhu bidayatihi ila nihayat al-asr al umawi. Beyrouth :
197^. p. 112. Aussi LAMMENS : Dur al Ilm... p. 9•
19
Yazid Ibn Mo awia (1). Ce dernier n'a jamais acced^ au
pouvoir mais il est connu par son amour des livres. II
s 1 interessait k 1'Alchemie, & la m^decine, k 1'astronomie
et a m§me entame un mouvement de traduction du grec et du
copte (2). L'auteur de 1'article de 1'encyclop^die de 1'Is-
lam fait de lui le fondateur de la bibliotheque dans 1'Islam.
Mais cette exagdration est moins grave que 1'affirmation
de Eche qui fait de Mo^awia le fondateur de cette institucion.
En effet IChalid rompt de ja svec la personnalite lA
bedoine conqudrante et devient un homme de science et de
savoir. C1 est dej& le premier signe d'dvolution. Cela se
comprend bien. Khalid avait ete ^leve k la cour de ses
parents et a eu des eontacts avec des personnalites non
arabes. Comme les philosophes de 1'antiquitd, il vivait
hors de la coercition sociale. II a eu les c-onditions et
le temps de penser. Toutefois cette realisation n'est pas
encore institutionnalisde, mais est le signe de sa necessite.
Comment va se manifester cette ndcessite ?
Quand les arabes avaient enta.me les eonqu§tes du nord, ils
avaient un heritage culturel scientifique limite, exception
faite du Coran. Le Coran m§me etait compris schematiquement,
le Tafsir ne se developpe aue plus tard. II representa.it
plus une ideologie de ligitimation de la domination aue
de liberalisation des peuples non-arabes. Ces directives
sont assimilees par ces marchands guerriers aue leur ins-
tabilite a emp§ciie de ddvelopper une civilisati on fixe et
durable (j). On peut m§me affirmer que 1'Islam portait en
1- Voir article KITAB HAMA, dans : Encyclop^die de 1'Islam.
Ancienne edition.
2- Voir article Khalid b. Yaz.id, dans : Encyclopedie de
1'Islam T. 4. p. 962, nouvelle ^dition.
j- Lombard (M. ). L'Islam dans sa premifere grandeur. Trad.
arabe, Beyrouth 75-
20
lui beaucoup plus un projet politique qu'autre chose. Sans
nous dloigner trop de notre sujet, on signale que les ara-
bes ont tent£ d£j& des projets de ce genre avant 1'Islam.
On site surtout la monarchie des Manadira & A1 Hira et des
Ghassanides au Sham. Les arabes vont "profiter" d'une cer-
taine faiblesse politique des empires Sassanide et Byzan-
tine. Ils vont entrer en contact aveai des peuples non-ara-
bes ayant un passd riche. Comment les arabes v.ont-ils af-
fronter et contacter ces peuples ? Et quelles consdouences
va subir 1'ecrit k cet epoque a travers ce contact ?
On remaraue que la faiblesse ideologiaue des con-
au§tes arabes et de leur apport culturel, sera compense
par 1'aspect theologique et sacre. En effet, la langue du
Coran est 1'arabe , la langue du Coran est sacr^e. Elle
constitue m§me son miracle. Le prophete est arabe. Donc
pour acceder & 1'Islam les non-arabes doivent connaitre
le Coran et 1'assimiler. Un effort d1arabisation est fait
dans ce but surtout au croissant fertile et en Egypte (1).
L1enseignemenfc religieux assurait cet objectif. Mais cet
enseignement et cette arabisation ont un but latent, "0'est
d'assurer le maximum d'unitd ideologiaue" (1). L'iddologie
coraniaue ligitimait ces pratiques. Le prophfete etait tr£s
attentif 1'unite de la communaute. (Jela se comprend,
1'Islam a vu le jour dans une societe tribale fragmentee.
Les rdsultats vont §tre sp^ctaculaires au niveau
de la prpagation de 1'ecriture et de la langue arabe. Les
arabes r^ussissent en peu de temps a arabiser une bonne
partie des peuples islamises. Nous n'avons pas d'arguments
tr&s d^veloppes sur ce point mais on avance qu'& cdtd de
1'aspect sacrd de 1'Islam, il y a une situation favorable
pour ce ddveloppement de 1'arabe. Les resultats les plus
1- Voir Rodinson (M. ). Le monde islamiaue et 1'extension
de 11^criture arabe. Colloque du Centre International de synth&se : 1'ecriture et la psychologie des peuples.
Paris, 19bj.
21
spectaculaire vont §tre surtout au niveau de la graphie
(l). Les graphies nationales vont reculer en faveur des
graphies arabes, bien que la langue parl^e reste, parfois,
la langue nationale. L'Iran, par exemple, au moment de la
conquSte a son ecriture nationale : l'6criture Pahlevi (2).
Aprks une courte rdsistance cette ^criture c^dait pour
11arabe (3)•
Dans les territoires soumis aux tribus turques,
il y avait des graphies nationales, dont 1'ecriture fibd-
rienne, 1'^criture de 1'Orkhou, 1'ecriture Sogdienne et
Brahmi qui finissent, apr&s une longue resistance, par ce-
der a 1'arabe. Le m§me sort sera suM par 1'^criture Copte
en Egypte. Rodinson ecarte tout argument technique dans
ce recul des graphies nationales et avance 1'argument des
facteurs sociaux. II definit m§me l'ecriture comme "des
signes dans un syst&me social, c'est le signe d'appartenance
& une civilisation centree sur une ideologie" (3). Cette
ideologie dans ce cas 1& est la religion.
Comment va etre donc le resultat de ce contact ?
II en resulte aue les arabes vont prendre conscience de
la pauvret^ de leur langue en mati&re de sciences et de
savoir, d'ou un ample mouvement de traduction (4) , l'ins-
titution qui vaheberger ce mouvement sera la bibliotheaue.
Pour conclure, on peut dire que les arabes vont
encadrer des civilisations anciennes au nom de 1'Islam,
mais vont absorber le contenu de ces cultures et ces ci-
vilisations des peuples islamises. Le potentiel arabe etait
surtout le sacre, mais le sacre est loin d'§tre tout pour
une societe en evolution. Cet aspect 1& va faire le devenir
de la biblioth&que arabe au temps de la stabilite.
1- tiodinson : op» cit.
2- 11 sera peut-etre utile de dire que dans ces dernikres annees m§me, il y a certains milieux universitaires iraniens favorables au retour a cette graphie.
3- Rodinson : op. cit'.
4-- N"us revenons sur ce point.
D E U X I E M E P A R T I E
1 E L I V R E E T L A S T A B I L I T E
L A B I B L I 0 T H £ Q U E
I N s T I T U T I 0 N N A L I S E E .
23
A- La stabilisation et les nouvelles donn^es
du probleme :
Chronologiquement, on peut fixer les efforts
d1 organisation et d1 ouverture de 1'iitat arabo-islamique
au regne de Abd al Malik Ibn Marwan (65h.- 685/86h.-705"),
le second calife de la branche marwanite (l). C1est aprks
un grand effort de stabilisation de 1'empire qu1Abd al Malik
pourra elaborer les institutions de 1'Etat. C1est sous
son regne qu1aura lieu 11arabisation totale de 1'admi-
nistration (2). C1est lui qui reedita le Coran. La pre-
mifere edition datait du temps d1 Othman( 2). Hepute paa:
son amour pour 3es livres Abd al Malik va mettre fin h
une periode de confusion au sujet de 11arabe. Les autres
langues vont definitivement ceder sur plan officiel, et
11arabe dominera pour une longue periode.
On peutr affirmer aue le veritable Etat mu-
sulman etait 1'oeuvre de Abd al Malik. Les problemes
politiques sont resolus. L'empire sera centralise. Les
provinces seront bien tenues en main par des gouverneurs
forts, choisis souvent hors des grandes subdivisions tri-
bales. La monarchie absolue s1instaure. C1est dans le
cadre de cette monarchie que sera re<?u une veritable in-
fluence des peuples islamises et m§me d1autres foyers
non moins importants.
Les efforts de Abd al Malik vont donner ̂ eur
resultats Sl la pdriode du rfegne d'A-1 i/Valid Ibn Abd al Malik
(85h.-705/96h.-715). La biblioth&que aura tous ses ca-
dres permanents : des copistes, un biblioth^caire par
exemple.
1- Voir a ce propos Wikita Elesseeff : Histoire de 1'Orient
m u s u l m a n . n < , ; / A . C o \ ^ l W
2— Voir 11Encyclopedie de 11Islam. Article Abd al Malik
b. Marwan. p. 78-79• 1. Fouvelle edition.
24
Le Halif nous informe sur le nom du premier biblioth^-
caire dans 1'Islam. II s'appelle Sa d surnomm^ Sahib al
Masahif:. (1) (possesseur des livres), Ces details sont
tr&s significatifs parcequ'ils forment la preuve sur
1'institutionnalisation de la biMiothkque avec ses fon-
ctions annexes^
Cette bibliotheaue aura desormais deux sour-
ces essentielles d'enrichissement :
1- ouverture sur les h^ritages culturels des peuples ;
islamijses,
2— ^volution ideologique religieuse interieures a la so-
cietd musulmane. Ce deuxi&me ^ldment a eu pour moteur
la polemique sur les problkmes que pose la vie soedale.
Ce qu'on remarque & ce propos est que la
premiere fonction 1'emportera pour une bonne pdriode.
Le but conscient ou latent des califes etait d'enrichir
la langue arabe par un grand mouvement de traduction.
U'est la continuation logique des donndes de 1'dpoque
anterieure. La bibliotheaue doit contribuer a renforcer
la position de la langue arabe.
Le mouvement de traduction sera actif sur-
tout & partir du regne d'Al Walid Ibn Abd al1 Malik, bien
au'il a commence avant.
La traduction touche surtout les ouvrages
scientifiques. On parle surtout d'ouvrages d'alchimie.
Ce m§:ne effort a deja commence timidement avec Halid Ibn
Yazid (2). Un effort e«t entrepris aussi pour la multi-
plication des exemplaires du Coran.
Ce mouvement va se renforcer tout le long
du regne des Omeyyades. II vise & ouvrir 1'arabe k la
science et a la"civilisation". Halifa parle d'un grand
1- Pihrist. ilalifa p. 466. 2- tinc.vclopedie de 1'lslam. Article : Halid
25
norabre d'ouvrages de sciences traduits & la fin du califat
des Omeyyades (l). Eche donne une bonne information qu'il
a prise des Tabaaat d1Ibn Sa d : les biblioth&aues omey-
yades s1enrichissent si bien qu'apres la mort de Vfcalid II
(l25h.-74J/126h.-744), les blocs notes que contenait sa
bibliotheque furent transportds sur plusieures montures
(2).
Quant k la culture arabe proprement dite,
elle aura egalement sa place : histoire, poesie, hadith
(parole du prophete). En 132h., c'est la fin de 1'empire
omeyyade. II s'agit d'un tournant historique important
qui n'est pas sans conseouence sur la bibliothkoue arabe.
II ne s'agit pas d'un simple changement dynastiaue. Les
Omeyyades ont bien represente le pouvoir arabe. Leur
empire etait plus arabe au1islamiaue. Les historiens
sont qus.si-unanimes & ce sujet, bien au'il y a auelaues
points de divergence. La these welhausenienne rest vala-
ble dans ses grandes lignes (3)«
Avec la dynastie Abbaside, un nouveau sou-
ffle prend essor. Tous les mouvements politiques d'op-
position vont appuier la famille du prophete pour mettre
fin au regne des Omeyyades. Le but declare est une de-
mocratisation de 1'Islam. La realite latente est que les
conauBtes se sont arrgtees et le regime de conqu§te re-
presente par les Omeyyades va succomber a ses propres
contradictions.
Pour notre sujet, ce aui est important est
qu'un processus de "democratisation" sociale s'engage.
Des cadres non—arabes seront utilisds dans 11administra-
1- Fihrist p. 245.
2- Eche, p. 20.
3- Wellhausen : 1'empire arabe et sa chute.
26
tion. Les Abbasides seront moins mefiants envers les au-
tres peuples. Cela ne correspond plus k un recul de l'a-
rabe. "Cetait trop tard", 1'arabe a. dej^ pris place
comme langue officielle.
La deuxieme source d1enrichissement de la
bibliothkque est la polemique religieuse. Les divergences
entre les musulmans sur certains probl&mes politico-re-
ligieux remonte a la fin du califat des Hachidims. Le
scMsme aura pour une longue periode un caractdre poli-
tique. II se manifeste surtout sous forme de mouvements
d'ihpposition polxtique au pouvoir Omeyyade. Mais avec
11epanouissement des institutions culturelles, le schi-
sme va prendre un caract&re academique. Les mouvements
de traduction ont fav,oris£ la propagation des traditions
philosophiaues antiques. Des problkmes religieux seront
discutes comme des problemes philosophiques, tel que
la creation du Coran, la nature de Dieu, etc...
Ainsi la bibliothkque devient de plus en
plus une academie en relation vivante avec son milieu.
Ges mouvements ne vont pas manquer d'avoir une influence
sur les califes. Certains d'eux vont assister a des se-
ances de polemique & beyt al Hikma. A1 Ma mun,speciale-
ment porta un grand interet auxmouvements religieux-» II
accorde des pensions a des savants de 1'^poaue. II finit
m§me par adopter la doctrine Mo tazilite. Ainsi, prend
forme et s1institutionnalise la bibliotheque arabe au
Moyen Age. Sa fonction ideologiaue se clarifie. Esaayons
de suivre de pres les modifications au'elle a subi par
rapport a la periode anterieure.
Le premier changement est d'ordre politioue.
Avec les Abbasides la monarchie absolue est institu^e.
Les califes ne seront plus simples heritiers. Ils seront
des personnages k. bonne education princikre. Ils connais-
sent, par conseauent, la valeur de la science et son poids.
27
En effet, le second Qalife Abbaside, A1 Mansour
sera trfes ddvou^ pour la science. II encourage le mouve-
ment de traduction des ouvrages scientifiaues et anciens
(1). L'acte le plus significatif entrepris par ce Galife
est le suivant s il demande k un savant de 1'dpoque de
eomposer un ouvrage sur 11histoire de 11humanit^ depuis
Adam. Une volontd d'un travail exaustif se manifeste dans
1'acte de ce Calife (2).
Ec-he cite une information d1 Ibn Khaldoun
selon laauelle : "A1 Mansour ecrivait h 1'emp^reur de
Byzance, le priant de lui envoyer des ouvrages traduits
traitant des sciences pures. Celui-ci lui adresse le li-
vxe d'Euclide et auelques ouvrages de sciences physiaue"
II accorde uhe grande importance a 1'astro-
logie. Ce mouvement ne fait que se renforcer sous ses
fils Al Mahdi et Al Hadi et plutard sous son petit fils
Harun al Rachid. A1 Ma mun represente le sommet du devou-
ement pour la science. II est un calife savant. II est
m§me 1'auteur de queloues ouvrages. II s1interesse sur-
tout aux sciences ancienner. et entre en confce.ct p.vec
l1empereur de Byzance et de Chypre pour acquerir .des
ouvr&ges (3). Plus c ue sec predccesse urs, il a accordd
une grande pla.ce a 11 astrologie. II a encourage la corn—
position danE'- ce domoine. Un certein Uiner Ibn al ?arrutian
lui avait tra.duit un livre de Ptolemee " 11 enterte t-t
le desaccord des philosophes au sujet des axes astrolo-
£irues (4). Certains historiens soutiennent m@me aue le
Beyt e.l Hikms a son observatoire astrologique k 1'epoque
d'Al Ma mun (5). L'astrologie arabe au Moyen Age etait
1- Pihrist p. 244•
2- Fihrist p. 314.
3- Fihrist p. 243•
4- Fihrist p. 273• 5- Encyclopedie de 1'Islam. Article : ARABIE. T. 1. p.421.
1' EcWe C p. Clh • p ̂
28
plus une superstition et une pr^voyance de 11avenir, k
travers les mouvements des astres, qu1une science d'ap-
plication.
Le travail de traduction a atteint une gran-
de perfection. Eche arrive & distinger quatre etapes (1).
1-"Etudier les ouvrages acquis pour choisir parmi eux
ceux qui devaient §tre livres k la traduction.
2- Distinguer les ouvrages k traduire entre les traducteurs.
3- Contrdler le travail de ces traducteurs et y etablir
11harmonie necessaire.
4+- Le prdsenter, definitivement agre6, au bayt al Hikma".
oii il devait §tre copid par les calligraphies et ddfi-
nitivement d£pos£.
D1apres les informations de Halifa, une hi4-
rarchie a existe au sein du corps de traduction. II y
avait les traducteurs, puis les kuttab-tarjama (secr£-
taire de traduction). Un dief dirige tout ce corps : le
amin al tarjama (responsable de traduction). II y a m§me
un relieur qui travaille specialement pour la bibliothfe-
aue aui est cite par Halifa, il s1 agit de Ibn Ab-l-Haiiis (2).-
Une specialisation est etablie, quant aux
travaux k effectuer. U'h certain Al-Hadjaj Ibn Matar etait
spdcialise dans la-.traduction des ouvrages de mathkma-
tiaues. II a traduit les principes de la g^ometrie d'Euclide.
Un correcteur ̂ tait nomme aussi, c1 est un certain Hunayn.
II corrigea la traduction d1un ouvrage d1Aristote et un
ouvrage de Platon traduits par Yahia Ibn al Batriq (3;).
1- Eche p• 23•
2- Voir pour ces iridications les pages 10,11 et 12 du Fihrist.
3- Fihrist p. 244.
29
B- La biblioth&que et 11ouverture sur les
clvilisations :
Le deuxikme grand changement que va subir
la bibliothfeque sous les Abbasides, c1est son ouverture.
Cette ouverture s1est faite dans deux directions :
1- vers un public plus large, form^ essentiellement par
des savants, des hommes de lettres,
2- vers les cadres non-arabes envers lesquels les Omeyyades
avaient une grande mefiance.
Pour le premier point, Halifa nous rapporte beaucoup de
noms de savants qui frequentaient la biblioth.eq.ue (1;.
Quant & 11ouverture vers les cadres non-arabes, c'est
le caractere le plus marquant de 11histoire de la biblio-
theque ara.be & cet epoque. Certains d'eux occuperont m§me
des hauts postes de responsabilite. Deux sont cites par
Halifa . Le premier est Sahl Ibn Harun d'origine persane.
Un contact prolonge avec la cour du Calife lui a valu
le poste de Sahib bayt al Hikma (directeur) (2). Le se-
cond est un certairr Salm dont sa connaissance du grec
lui a valu la responsabilite des acquisitions des ouvrages
byz.antins (2).
A ce propos les sources offrent beaucoup
d 1 informations, bien qu' elles soirt eparpillees. II n'est
pas dans notre intention de nous attarder sur 1'aspect
chronologique et historio-geographique bien qu'il soit
important. La bibliotheque arabe a 1'epoque abbaside ne
fait aue se renforcer. Les activites anzrexes se multipli-
ent. L'oeuvre de Eche constitue un excellent sondage
dans les sources & propos des oeuvres des differents
califes (j). Seul le Fihrist fournit les eldments neces-
sa.ires pour une ref lexion d 1 ensemble .
1- Pihrist p. 5.
2- Pihrist p. 120. Lammens p. 48. 3- II est peut-etre utile de dire que Eche a mis 33 ans
pour le feire. (Introduction).
30
Quelle consiquence aura-t-elle 11ouverture
de la bibliothkque ? Essayons d'estimer son importance
sur la culture arabe. Gette ouverture s'est faite dans
un premier temps sur la culture byzanto-syriaque. Cetait
en fait, une ouverture sur la culture grecque qui a trop
influencd cette derniere. Cette influence se manifeste
surtout dans le droit applique, la philosophie, la scien-
ce (les mathdmatiques et m§me 1'architecture (les basi-
liques)).
Dans un deuxi&me temps s'amorcera 1'ouver-
ure directe sur la culture grecque. Ce mouvement bien
qu'il a commence des la fin des Omeyyades ne prend son
importance que des le calii|at d'Al Mansour. Ces deux
influences ont eu pour foyer le Bayt al Hikma et pour
partisaris les traducteurs Nestoriens de Baghdad.
Le duxieme foyer d'influence est le foyer
iranien. Ce mouvement ne va s'amorcer veritablement que
au temps de la dynastie abbaside. Les grandes person-
nalites persanes, que nous avons mentionne, vont acceder
a 11administration. Les plus representatifs, & cet £gard,
sont les Bamekides, bien que nous n1avons pas de preci—
sion sur leur participation au mouvemer>"G scientifique
de 11^poque, leur pr^sence est surtout politique. Cette
famille est devenue tellement influente qu'elle souleve
la mefiance du Calife Harun al Rachid qui n'h£sitera
pas k les dliminer.
Dans ces conditions 1k, le Bayt al Hikma
sera m§me un foyer de Su abisme repr^cente, surtout, par
Sahl Ibn Harun qu'on a cite plus haut comme Sahib dar
al Hikma. 11institution va heberger des traducteurs per-
sans et c'est par leur labeur que leur hdritage scienti-
fique sera trensmis -?ux arnVi°".
31
11 reste un probl&me difficile & trancher
c1est le rapport de cette institution avec les biblio-
thSques antiques. Eche affirme que 11organisation m§me
de la bibliotheque arabo-islamique correspond k 11id£e
que les arabes se sont fait des institutions de l'an-
tiquit^. II avance que les sources arabes relatent que
les anciens peuples d1Orient z les Hindous, les Persans,
les Grecs, les Chinois se sont interesses k la science
a travers la traductlon, la composit i on, la conserva-
tion et 11astrologie. Mais pour etre prudent a ce sujet
nous ne deveons pp.s nous perdre de vue le fpit que toute?
lep sctivites qu'a entratenu le beyt sl Hikma ne d.oivent
ps.s §tre vu sous 11 angle d'une simple imitation.
La forsuntion de la bibliotheque se coraprend
toujours dans son cpdre historique et de civilisetion.
II f 1 explio.ue per ur certein stade de developpement idd-
olojic ue et culturel de la societe arabo-islaraic ve. Cette
societe a connu une grande evolution, lf structuration
d ' une ideologie ecrite d'un Etet. II est neeessaire ci u' une
institutdor. ener^e pour heber^er les ectivites intellec-
tueller-.
Le fait que la bibliotheque institutionnalisee
a vu le jour sous les Omeyyades est tres significatif a
cet egard. AU temps de Abd al Malik l'hdritage antique'
n'est pas encore bien connu par les arabes. L'influence
des peuples islamises ne s1est pas concretisd. Une com-
paraison entre les bribliotheq ues a.rabes et les institu—
tions de ce genre doit aller dans le sens d'une analogie.
Cela est valable, surtout, pour les d^buts de 1'histoire
de la bibliotheque. 11 s1agit pratiquement d'un m§me sta-
de de d^veloppement qu'a fait la biblioth&que qui dtait
le centre de toutes les activites scientifiques de 1'e-
poque : la traduction, la composition, "la lecture pub-
lique", etc... C1est la seule conclusion qui nous parait
sensee k ce propos.
32
33
Quelle conclusion peut-on tirer sur un sujet
si tranciie ?
Comme elements dynamiaues de 1'histoire,
1'ecrit et la bibliothfeque ne peuvent se comprendre que
dans leur cadre historique. Le livre arabe, comme on l'a
signal^ plus haut, occupe une place centrale dans la. ci-
vilisation arabe. Les £l6ments qui les definient sont :
1- les facteurs techniques,
Z- 1'heritage arabe,
3— 1'Islam en tant au'ideologie politique en evolution,
4- 11apport des peuples islamises et voisins.
Dans l'Arabie pre-islamique, le stade de
developpement de 1'ecrit et de ses moyens techniques
n'empechaient pas sa propagation. Mais la socidte arabe
pre-islamique n'etait pas assez favorable au develop-
pement d'une grande civilisation ecrite.
Avec 1'islam, on peut distinguer deux per-
iodes nettement distinctes :
Premiere periode caract£ris£e par la predominance de
1'heritage arabe, favorisee par un regime de conau§te
instable aui va jusqu'au regne de Abd al Malik.
Deuxieme pdricde : ouverture sur les peuples islamis^s.
Des facteurs dynamiques vont entrer en jeu :
- la garantie de la suprematie de 1'arabe,
- la contribution des peuples islamis^s et voisins au
potentiel culturel et scientifique ecrit,
- la remise en cause de 1'id^ologie fermde de 1'Islajn.
La bibliothfeaue sera le foyer de cette lutte.
Elle sera institutionalisde pour accomplir un f^le. Les
arabes par 1'Islam vont dominer, mais en absorbant les
apports des peuples islamises. La bibliotheque a eu pour
t§.che d'encadrer ce mouvement d'ouverture mais en renforgant
1'arabe. Elle encadrera dgalement la polemiqme qui s'enga-
gera pour adopter la religion aux nouvelles donn^es de la
vie sociale.
C1est pour tout cela qu'elle est une bonne
clef du probl&me de la culture musulmane au Moyen Age.
oo
xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx:.xxxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx
BIBLIOGRAPHI^ SEC0NDAIR3 DE BI3LI0L0GIE EISTORIQUE
ARABO^msULMAXE
: ::xxx::xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx
36 glBLIOGRArHIE S^CONDAIRE
Suite a recherche eteaii© bibliographique etendue sur le sujet
ie la bibliotheque arabo-rausulmane ,il est utile de reproduire (g,tte
)6bliographie .ftlous etions motiwe^ nar plusieurs raisons:
1°)Pour avancer la recherhce dans un domaine,il est necessaire de
connaitre les travaux deja entreoris .Ces travaux sont -comme
nous 11avons sgnaler a 1'introduction de ce travail-faits
dans un ontique complementaire al'histoire generale,souvent
sous forme d'articles et de contributions.La bibliologie historioue
arabe a ete toujours une science d'occasion
2°)Le fait que la biblioihogie historique arabe est souvent Brisonniere &
d'une langue ou dcux, ce qui est un handica^L'expan$ion de
1'islam ne correspond pas a 1'ere arabe actuel .des contributions
faites dans d.'autres langues sont tres utiles.
3°)La bibliotheque est inseparable manuscrits et^ de 1'imp-
rimeria . Nous avons remarque la difficulte que rencontre le
chercheur lors d'une rechcrhef bibliographique sur ce sujet .
Les contributmons sur le? nanuscrits sont tantot classees sous
1'anple de la religion tantot sous 1'angle de lascience z parfois ?
meme SOUP 1'angle de la ohilosophie! ou du nom du nays.
4°)Ce travail neut tre -oour nous une initiation ajla recherhhedqns
ce domaine.
Les bibliogra^hies utilisee-> sont les suivantes;
-Bibliograahie internationale de 1'histoire des religions.
Fub .Asrociation Internationale de 1'histoire des religio^is,
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1 Q "7Q-1 r:7T
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elarged edition by Diana Grimwood-jones.
uub. par Interdocumentatiori compagny AG Swetzerland, 1979.
B ̂ ncyclo-oedie de 1'islam , ancienne et nouvelle edition.
ed. Brill.
Pour finir on signale que cette bibliographie s'etend sui^tou^
les oays musulmans et 41 est oarfois difficile de comprendre
s'il sAgit d'un travail sur la graphie arabe ou autre.
Elle b s se limite au^langues a caractjres latines:frangais,
anglais, italien^ ,espagniol,russe, et quelques langues des
pays de l'est .
Nous avons classe les reftirences en^C 3 oarties ojiclassement
alphabetique: 1°)Lesd bibliotheques et les archives.
2°)L'imprimerie dans le monde arabo musulman.
3°)Les manuscrits et les catalogues.
(l..a nartie-faute de temps ne sera nas reproduite
xxxxxx. xxxxxxx. xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx
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i'ABLE DE MATIERE
X In*troduc1iioTi ••• ••• ••• • • • ••• ••• 01
¥ La premi&re partie : L'^crit et 1'Islara : la biblio-
theque non institutionnalisee.
A— L1ecrit et 1'histoire de 11Arabie (avant et aprfes
1'Islam ••• ••• ••• ••• ••• ••• ••• 10
3- La bibliotheque et 11ecrit dans 11Islam primitif• 16
¥. La deuxikme partie : Le livre et la stabilite :
la bib3.ioth.kque institutionnalisee •
A- Stabilisation et Nouvelles donndes ... ... ... 23
B- La bibliothfeque et 11ouverture sur les civili-
sations ... ••• ••• ... ••• ••• ••• 2 9
x Conclusion ... ... ... • •. ••• •.. .-. • 3 2
x Bibliographie 35