conversion douloureuse

16
GABRIEL BURLOUX La conversion douloureuse hystérique Ce faisant, je m’entroublié, Dont le sensitif s’esveilla Et esvertua Fantaisie, Qui tous organes resveilla, Et tint la souvraine partie En suspens et comme amortie Par oppression d’oubliance. FRANÇOIS VILLON, Le Lais (1456) Villon, poète et chenapan, n’était sûrement pas hystérique, mais sa géniale intuition a su saisir, au ras de son émergence, cet état de disso- lution de la conscience qui est celui de la conversion, qu’il appelle « entroubli » et qui laisse l’organe parler à la place du sujet et de la « sou- vraine partie », la pensée consciente, quand le dire se dissout dans son insuffisance, et laisse parler le corps et aussi la douleur. Le monde de l’hystérie comporte des territoires bien hétéroclites. Pourtant il nous apparaît unifié et nous savons reconnaître instantané- ment l’hystérique, dès que nous la voyons, au travers de son comporte- ment, de sa séductivité, de son mode de fonctionnement et, bien évidemment, lorsque que le cas se produit, de ses bruyantes conversions. Le féminin que j’ai instinctivement accordé (c’est bien le terme gram- matical qui convient) à l’hystérique et qui est fautif car l’hystérie est aussi masculine, je ne le corrigerai pas, faisant ainsi confiance à l’instinct. Je pourrai toujours me réfugier dans le féminin de l’homme et me justifier avec Jacqueline Schaeffer et son travail sur « Le refus du féminin ». J’aime bien ce monde de l’hystérie. Je l’ai rencontré souvent, soit dans ma carrière de praticien, interloqué par elle, soit au cours du long Rev. franç. Psychosom., 25/2004

Upload: maxz-gavrilita

Post on 01-Jul-2015

101 views

Category:

Documents


2 download

TRANSCRIPT

GABRIEL BURLOUX

La conversion douloureuse hystérique

Ce faisant, je m’entroublié,…

Dont le sensitif s’esveillaEt esvertua Fantaisie,

Qui tous organes resveilla,Et tint la souvraine partie

En suspens et comme amortiePar oppression d’oubliance.

FRANÇOIS VILLON, Le Lais (1456)

Villon, poète et chenapan, n’était sûrement pas hystérique, mais sagéniale intuition a su saisir, au ras de son émergence, cet état de disso-lution de la conscience qui est celui de la conversion, qu’il appelle« entroubli » et qui laisse l’organe parler à la place du sujet et de la « sou-vraine partie », la pensée consciente, quand le dire se dissout dans soninsuffisance, et laisse parler le corps et aussi la douleur.

Le monde de l’hystérie comporte des territoires bien hétéroclites.Pourtant il nous apparaît unifié et nous savons reconnaître instantané-ment l’hystérique, dès que nous la voyons, au travers de son comporte-ment, de sa séductivité, de son mode de fonctionnement et, bienévidemment, lorsque que le cas se produit, de ses bruyantes conversions.

Le féminin que j’ai instinctivement accordé (c’est bien le terme gram-matical qui convient) à l’hystérique et qui est fautif car l’hystérie est aussimasculine, je ne le corrigerai pas, faisant ainsi confiance à l’instinct. Jepourrai toujours me réfugier dans le féminin de l’homme et me justifieravec Jacqueline Schaeffer et son travail sur « Le refus du féminin ».

J’aime bien ce monde de l’hystérie. Je l’ai rencontré souvent, soitdans ma carrière de praticien, interloqué par elle, soit au cours du long

Rev. franç. Psychosom., 25/2004

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 53

parcours que j’ai fait à l’hôpital général dans un service de rhumatolo-gie où j’étais psychanalyste consultant. Là, je me suis trouvé face à laconversion douloureuse et souvent dans une situation analogue à celle deFreud, son génie en moins, mais avec son expérience en plus.

Bien évidemment, nombreuses aussi auront été les hystériques qui sesont allongées sur mon divan et qui y sont restées. Je me suis souventdemandé si ces dernières, les hystériques de divan, étaient de la mêmerace que les hystériques de conversion.

Elles font, en tout cas, partie du même monde ; il ne faut donc pas lesséparer, mais pas non plus les confondre. La conversion opacifiel’énigme de l’hystérie et Freud disait encore en 1909, à propos del’Homme aux rats, qu’il manquait « au langage des obsessions ce bonddu psychique à l’innervation somatique – la conversion hystérique – quiéchappe toujours à notre entendement ». Et j’ajouterai que ce que mespatientes allongées ont pu m’apprendre n’a pas servi à grand-chose,pour ma propre intelligence du phénomène.

Dans cet article, j’entendrai par douleur de conversion tout le soma-tique de la conversion : la douleur elle-même, ainsi que ses antonymes,telles la paralysie ou l’anesthésie, qui sont des atteintes au corporel, maisaussi tout ce que le patient allègue comme intrusion dans son corps – ges-tuelle étrange, sensations bizarres, motricité incompréhensible, senso-rialité non recevable, mais pourtant émises –, et également malgré sonnom, la « belle indifférence ».

À ce sujet, on doit comparer la violence des affects libérés lors desgrandes crises hystériques et son apparente disparition dans « l’indiffé-rence » de la conversion, mais les affects éprouvés par les témoins de cesdeux événements psychiques ne sont pas moins intenses, quoique diffé-rents, dans un cas comme dans l’autre.

Retour à Villon

Il ne faut jamais pousser trop loin la métaphore, mais on peut essayerde l’utiliser. Villon venait de participer au vol du coffre du collège deNavarre et se savait recherché quand il connut cet épisode de « l’en-troubli », cité plus haut. Il était menacé par deux dangers : l’un interne,le remords, ou plutôt, en bon psychopathe qu’il était, un certain regretde son acte ; l’autre externe, le réel danger que constituait l’enquête poli-cière et le risque, mortel, d’être pris, car son crime était punissable demort. Il s’est donc « entroublié », dans cette indécise sensation où l’être

54 Gabriel Burloux

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 54

croit disparaître, en partie. Cette défense n’était pas suffisante. On saitque Villon a préféré la fuite : « Je m’en vois à Angiers » (Le Lais).

En matière de psychisme, la fuite n’est pas, nous dit Freud, une solu-tion possible, car on emporte avec soi la chose à fuir. La phobie est unetentative de faire fuir le danger ailleurs. Il est d’autres défenses, tellesque clivages, dénis, etc. ; cependant, c’est à partir de l’hystérie queFreud a inventé la névrose et, avec elle, le principe même du fonction-nement mental humain fondé sur le refoulement qui est une défense surplace, la pulsion, et donc le sexuel et l’inconscient. Mais la conversion,autre fuite et arme absolue de l’hystérique, est peut-être la défense laplus difficile à comprendre.

Car le mystère de la conversion demeure. Freud disait en 1894 qu’ily a une « prédisposition à la conversion » et il pensait, un an plus tard(1895), pouvoir en « déchiffrer les hiéroglyphes ». Nous ne sommes guèreplus avancés de nos jours.

Si l’hystérie a servi de modèle pour l’invention de la névrose, ellen’est pas toujours une névrose. Elle l’explique, elle la suggère, mais sou-vent ne fait que l’imiter, en prendre les formes et l’apparence, sans enavoir la structure.

L’hystérie est pourtant le modèle de la névrose, la vraie, sexuelle,génitale et refoulée. Elle est aussi une sorte d’unité de mesure pour esti-mer les autres entités nosographiques. Certes, j’ai connu des hystériquesnévrotiques et, parmi elles, beaucoup ont entrepris une analyse avec moi.Mais pas toutes. Par contre, la majorité de celles que j’ai rencontrées,surtout celles qui « convertissaient », ne l’étaient pas. Et qui pourraitcroire de nos jours que les patientes de Freud, dans les Études sur l’hys-térie, étaient « névrotiques » ? Comme le dit J. Bergeret, Freud a énoncédes théories justes sur des figures fausses. Mais est-ce si important ?

Poursuivre ainsi me ferait quitter mon propos, qui est celui de la dou-leur chez l’hystérique. Je me contenterai de citer l’importante réflexiond’André Green (2000) dans son travail intitulé Le Chiasme et qui réin-terroge la place nosographique de l’hystérie par rapport aux états-limites.

Quelle que soit sa place nosographique, un questionnement surgit àpropos de l’hystérie :

Névrose ou état-limite, pourquoi cette évasion hors psychisme vers lesomatique de la conversion ?

S’il y a conversion, pourquoi s’accompagne-t-elle de douleur ?Et, puisqu’il y a douleur, pourquoi l’indifférence ?Je ne saurais qu’esquisser quelques débuts de réponses.

La conversion douloureuse hystérique 55

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 55

CLINIQUE

Le petit épisode clinique que je vais présenter n’est pas le point dedépart de ma réflexion, mais au contraire un point d’arrivée illustrantmon expérience, l’authentifiant et, me semble-t-il, la confirmant. Il s’agitdu cas d’une jeune femme en analyse depuis environ trois ans, dont l’ha-bitus hystérique est évident, mais dont le comportement et le psychisme debon aloi m’avaient fait accepter la demande d’analyse qu’elle m’avaitfaite. Elle se plaignait de la phobie d’aller dans les « espaces officiels »,par exemple la mairie, phobie liée à la peur de rencontrer des personnages« haut placés » et à la pensée un peu obsessionnelle de leur dire des pro-pos déplacés ou des insultes du type : « Le sénateur-maire est un c… ! »

Elle était aussi parfois capable d’« extravagances », m’avait-elle dit,sans les préciser. Sa problématique œdipienne trop affirmée cachait unehistoire compliquée et elle attestait d’assez solides connaissances théo-riques analytiques.

Elle avait raconté au début de l’analyse des scènes de séduction de lapart d’un jeune voisin (attouchements et exhibition), mais sans y atta-cher d’importance excessive. Je pense que sa structure était suffisam-ment névrotique ; d’ailleurs le déroulement de son analyse, à partquelques secousses, fut de bon aloi.

Le rêve

J’ai fait un rêve, me dit donc cette déjà vieille routière de l’analyse :– Je suivais dans la rue un homme que je connaissais, peut-être mon

amant, et l’accompagnait, pour ainsi dire, jusqu’à une maison de plaisir. Ilentrait dans une chambre avec une femme et lui faisait subir une sodomie.Je m’identifiais à elle et au plaisir, heu… à la douleur qu’elle ressentait.

– Plaisir ou douleur ?– J’étais sûre que vous diriez ça…Elle se tait, puis triomphante :– C’est l’indifférence des sexes !– La sodomie… oui ?– De toute manière, je vous ai menti. Ce n’était pas une sodomie mais

une fellation : donc tout ce que vous avez dit ne vaut rien !– Tout ce que j’ai dit ne vaut rien.

56 Gabriel Burloux

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 56

J’ai répété sa phrase sur un ton très neutre, en la prenant, en quelquesorte, à mon compte ; mais cela va provoquer un effet extraordinaire.

La séance continue, j’interviens peu et surtout pour lui faire remar-quer que le travail d’auto-explication psychanalytique, à laquelle elle selivre autour de la scène primitive, est une défense. Elle a horreur que jelui dise cela. Elle se tait, puis :

– Votre « ce que j’ai dit ne vaut rien » m’a fait comprendre que mon« vous avez dit ne vaut rien » n’était pas un pluriel de politesse mais uncollectif. Je parlais sans m’en rendre compte à ceux qui savent, auxgrands, au fond à mes parents, qui pourtant s’étaient séparés quandj’étais jeune. Avec votre phrase, vous avez surgi comme un individu par-ticulier. Je vous ai retrouvé ! Je suis contente et j’ai envie de pleurer.

– Plaisir et douleur, lui dis-je pour terminer.Elle était très émue. Quant à moi, j’avais l’impression d’un tournant

dans la cure et ce n’était pas faux ; mais j’étais trop optimiste ou troppressé. Ce qui était là, prêt à parler, fut interrompu par un intermède quimélangea, dans la séance qui suivit, une grande crise hystérique et un épi-sode de conversion.

La grande crise

À la séance suivante, elle arrive bouleversée, escortée par un « étu-diant en médecine » qui, très ému, me demande de bien m’occuperd’elle, car elle est très angoissée. Je la fais attendre dans la salle d’attentel’heure de sa séance. Elle me raconte alors, très agitée :

– J’avais vu devant moi la voiture de l’étudiant et son caducée affiché(c’était en fait un kiné). Il a freiné, mais moi, non. Je savais que je devaisle faire. J’étais à trois ou quatre mètres, mon pied n’a pas bougé. Je suisentrée dedans. Je l’ai enculé.

Puis elle éclate en sanglots et cris inintelligibles. Elle profère desdébuts d’insultes. J’entends « pute » et « enculé » (ou enculée ?) et unesorte de brame plaintif.

Je la vois s’arquer dans un magnifique opisthotonos, comme on ditqu’il n’y en a plus. Elle repose sur la nuque et les talons, s’agite et émetdes bruits étranges. Je ne bouge pas. Au bout d’un temps assez long, ellese calme, se lève et va frapper à une porte dont elle ne peut savoir surquoi elle donne. Puis elle revient, se rallonge et demande un verre d’eau.J’hésite, mais le lui fais porter. Je ne suis pas très à l’aise. Elle reprend,progressivement, le ton à peu près habituel de son discours et essaie ànouveau d’interpréter en termes analytiques, ce qui, à ses yeux, a eu lieu.

La conversion douloureuse hystérique 57

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 57

Or, ce qui a eu lieu n’est pas ce qu’elle a vu, mais ce qui s’est passé, lepetit événement psychique qui lui a permis de me retrouver lors de la séanceprécédente. Retrouver est le mot qu’elle emploie lorsqu’elle évoque, aprèsune longue période de haine à son égard, haine partagée avec sa mère, ledésir qu’elle a eu, en fin d’adolescence, de revoir son père. Ce qu’elle a vu,le caducée sur la voiture du kiné, a brutalement ramené dans son espritmon personnage. Celui du médecin qui s’occupe d’elle (elle m’appelle sou-vent docteur) et qui a pris de nouvelles couleurs transférentielles, pater-nelles, en s’extirpant d’un brouillard parental qui confondait les images del’homme et de la femme, du père et de la mère – voir, d’ailleurs, les imagesandrogynes : sénateur-maire (mère), qui est aussi un petit c…

La conversion

La séance continue. Elle parle normalement et poursuit son auto-ana-lyse rassurante, toujours autour de la scène primitive, son thème favori,puis passe à des propos anodins, mais associatifs. Je remarque alors quesa main droite s’anime de façon bizarre. Elle se dispose en « main d’ac-coucheur », c’est-à-dire en tête de serpent. Puis le bras droit s’élèvepour la porter lentement vers la bouche. Crise de tétanie ? Pas vraiment.La main d’accoucheur est peut-être d’ordre tétanique, mais l’intention-nalité du bras atteste de l’aspect conversif. Ma patiente me dit qu’elle amal au bras et à l’épaule et son regard se porte sur sa main, qui poursuitson mouvement vers la bouche. Elle voit donc cette main, apparemmentvécue comme étrangère, s’avancer vers elle et me demande calmement :« Vous avez vu ? » Son bras tordu et sa main d’accoucheur, figés dansune posture anormale, ainsi que la douleur, subsisteront dans une par-faite indifférence, jusqu’à la fin de la séance, que j’indique comme àl’accoutumée. Tout rentre alors dans l’ordre.

Cette femme avait commencé sa crise hystérique à la vue du caducée etdu jeune conducteur, puis l’avait reprise et aggravée pendant la séance.Son père avait quitté sa femme et sa fille quand elle avait sept ans. Et ellene l’avait vraiment revu que neuf ans après, en pleine adolescence.

Me retrouver, c’était aussi retrouver le monde d’affects vécus lors-qu’elle était toute petite. Revivre la perte, le manque, et le deuil qu’elleavait dû faire lors du départ de son père, sans compter la souffrance dene plus le voir et la difficulté de partager la haine de la mère à l’égard deson mari. C’était affronter le spectre de la dépression et de la souffrancemorale, sans l’outil pour les traiter.

58 Gabriel Burloux

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 58

La chaîne signifiante « J’ai dit… retrouver… père… » déclenche un« trop » d’affects, même s’ils étaient joyeux au début. Ma patiente a butésur une impossible élaboration psychique et c’est un autre enchaînement,faisant intervenir le comportement et le corps, qui s’est imposé dans l’ur-gence. La perception du caducée, « entrer dedans » par-derrière, repre-nant l’idée de sodomie (ou de fellation, car elle ne se souvenait plus si lecaducée était sur le pare-brise de la voiture ou sur la vitre arrière, maiselle savait bien où était ma place pendant la séance), bref toute une vio-lence incontenable pour un psychisme précipité dans son traumatisme.

Ma patiente ne fit aucun autre épisode de conversion. Le travail ana-lytique, aussi prudent qu’il ait pu être, l’avait amenée, pour qu’ait eulieu l’épisode que j’ai présenté, à un point de vérité psychique qui ne luipermettait pas d’alternative. C’était là son chemin obligé.

LES DOULEURS PSYCHOGÉNIQUES

L’hystérie est-elle, en même temps que celui de la névrose, le modèledes douleurs physiques psychogènes ? J’ai écrit un livre, Le Corps et laDouleur (2004), qui traite abondamment ce sujet. Si la conversion dou-loureuse de l’hystérique implique, nous dit Freud, une « prédisposition àla conversion », dont il ne précise d’ailleurs pas la nature (peut-être est-ce ce qu’il appelait la constitution), il ne fait aucun doute que l’aptitudeà la conversion est consubstantielle à l’homme. Tout être humain peut yrecourir dans certaines occasions et, de façon générale, quand nousaccompagnons le flux de nos affects d’une gestuelle ou d’une mimique.

Mais il vaut mieux poser autrement la question :Pourquoi certains patients, tels les hystériques, les hypocondriaques,

et certains névrosés post-traumatiques (par exemple, les lombalgiquesdits psychogéniques), se plaignent-ils de douleurs alors qu’ils n’ont pas,ou presque pas, de lésions somatiques ?

Et, d’autre part, pourquoi certains malades psychosomatiques, danscertaines conditions (vie opératoire, dépression essentielle…), ne se plai-gnent pas, ou très peu, alors qu’ils souffrent d’affections graves etpotentiellement douloureuses ? Je pense aux patients atteints de polyar-thrite rhumatismale, ou de recto-colites hémorragiques, qui souffrentindiscutablement mais ne posent pas de problèmes particuliers auxsomaticiens, qui savent très bien les soigner.

La conversion douloureuse hystérique 59

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 59

Il y aurait ainsi, chez certains sujets, une nécessité de plainte, qui lesamènerait à exprimer une douleur et à demander des soins, alors que cen’est pas le cas des psychosomatiques au sens de Marty et de l’École deParis.

J’ai développé dans mon livre une théorie que je ne fais qu’esquisserici, la théorie de la névrose algique ou algose, afin d’essayer d’éclairer,sinon de comprendre, le phénomène de la genèse psychique de la douleurphysique et de la plainte qui y est associée ; mais aussi, a contrario, derendre compte du mystère de l’absence de douleur ou, du moins, deplainte des patients psychosomatiques.

L’algose, ou « névrose algique », consisterait dans le fait d’investir dansun premier temps une douleur existante, un ressenti douloureux ou unesimple cénesthésie, en percevant ou en y attachant un certain degré d’in-tensité douloureuse, puis, dans un deuxième temps, de se livrer à une véri-table culture du phénomène douloureux. Le premier temps correspond àune nécessité humaine fondamentale, partagée par tous. Le deuxième, pluscomplexe, fait intervenir l’organisation psychique du sujet.

Le cas des lombalgiques et celui des hypocondriaques éclairent cettepossibilité de retour et de recours au corps, au corps douloureux, commedéfense. La douleur somatique devient, dans ces cas, l’équivalent d’unsymptôme psychique, comme nous pouvons le voir dans l’hystérie, maisdans une configuration différente.

Les lombalgiques – je ne parle ici que de ceux dénommés psychal-giques par les rhumatologiques – ont un profil caractéristique : après unaccident bénin, même insignifiant, ils ressentent une douleur invalidante,rapidement chronique, et inguérissable. Avant leur accident, ils étaientdes travailleurs infatigables, dévoués, consciencieux, et se livraient à unehyperactivité impressionnante. L’accident qui a mis fin à cette périodeest l’occasion, pour eux, d’évoquer une prime enfance catastrophique,marquée par la misère, les abandons, les deuils, les privations affectives.Bref, ils avaient contre-investi la détresse et la souffrance des origines.Ils essayaient de réparer la mère qu’ils n’ont pas eue, en réparant lemonde. Mais la faille originaire était l’avant-coup d’un accident qui étaiten quelque sorte au rendez-vous, une répétition. Ils étaient traumato-philes, victimes d’un destin « démoniaque » qui devait les rattraper.

Quant à la scène inlassablement racontée par l’hypocondriaque aumédecin, elle est à l’image de sa relation avec une mère très précocementtoxique, et c’est pourquoi d’ailleurs cette scène, physiologique, est sou-vent digestive. Elle est l’objet d’une théorie que le patient oppose, defaçon têtue, à celle du médecin. Il fait avec ce dernier ce qu’il n’a pu

60 Gabriel Burloux

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 60

faire avec la mère. Son but n’est pas de guérir mais de triompher. Danscette scène, la mère est à la fois maîtrisée, avalée et fécalisée, donc neu-tralisée, mais elle est aussi conservée. La scène sans cesse représentée estcelle d’un caveau : celui de l’éternel enfant mort, pourtant victorieuxdans sa destruction et sa douleur.

Ce qui est séparé en deux temps, chez le lombalgique, est confondu enun seul, chez l’hypocondriaque, triomphe et défaite, sous le sceau dutraumatisme et de la nécessité d’exprimer la douleur.

Et le psychosomatique ? C’est ici l’occasion d’en parler et de tenterde comprendre pourquoi, lui, ne se plaint pas. Je pense que lombal-giques et hypocondriaques ont « préféré » la vivance de la douleur à lamortification du pare-excitations (le pare-excitations freudien est,métaphoriquement bien sûr, une partie du psychisme qui a perdu saqualité de vivant, à titre protecteur). Ils ont investi la douleur et essayéd’en faire quelque chose. Le psychosomatique futur, lui, a pris très tôtet de plein fouet la violence des excitations. Il est devenu en grande par-tie lui-même un pare-excitations mortifié. Je pense ici à ce que G. Szwec(1988) a décrit, à la suite de L. Kreisler, sous le nom de « comportementvide du jeune enfant », enfant « non câlin » qui investit le comporte-ment factuel et non pas créatif, comme le lombalgique, pour combler levide fantasmatique.

L’algose, cet investissement nécessaire et maintenu de la douleur,serait important chez les psychogéniques, faible voire inexistant chez lespsychosomatiques. J’ajoute que l’investissement « algique » assure defortes assises narcissiques, masochiques évidemment mais triomphantes,aux patients.

RETOUR À L’HYSTÉRIQUE

On sait qu’en 1920 Freud a remanié sa théorie de la névrose en pre-nant en compte la névrose traumatique et en l’opposant à la névrose hys-térique, son premier prototype. Il écrit : « Le tableau clinique de lanévrose traumatique se rapproche de celui de l’hystérie par sa richesseen symptômes moteurs similaires ; mais en règle générale il le dépassepar ses signes très prononcés de souffrance subjective, évoquant par làl’hypocondrie ou la mélancolie, et par les marques d’un affaiblissementet d’une perturbation bien plus généralisés des fonctions psychiques. »

La conversion douloureuse hystérique 61

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 61

J’ai souligné en règle générale pour pointer qu’entre les deux entitésnosographiques la frontière n’est pas nette. L’hystérie est tout un monde,cosmopolite, qui s’étend depuis la misère du corps jusqu’à l’arbores-cence du plus complexe des psychismes. Ce kaléidoscope lui permet desurgir là où on ne l’attend pas, et en particulier dans la conversion quiest un retour au corps mais aussi, d’une manière ou d’une autre, à ladouleur. Cette possibilité la rapproche donc des névroses traumatiques etl’éloigne de l’étiologie traumatique « sexuelle » dont elle s’est affubléelors de ses débuts dans l’analyse, aidant ainsi Freud dans sa génialeinvention (tout dépend d’ailleurs de ce que l’on appelle le sexuel).

Les douloureux psychogéniques proposent une réponse plus immé-diate à la question du retour-recours à la douleur comme solution psy-chique – solution psychique à une difficulté qui devrait plutôt mobiliserle psychisme. En effet, chez eux, la trace qu’a laissée la douleur des ori-gines est particulièrement criante, si on sait écouter un peu. Il faut par-tir de l’idée freudienne de l’Hilflosigkeit, de la détresse originaire dunouveau-né humain, qui n’implique pas, comme le disait Rank, unenécessité de la surmonter toute la vie, à chaque occasion d’angoisse, maisqui constitue un état originel de besoin d’aide. C’est à la mère, au senslarge, qu’il appartient de faire ce travail avec son enfant, travail dedédolorisation de cet état primitif, qui se répète si souvent au début de lavie d’un nourrisson, et qui s’accompagne de l’œuvre de psychisation dupetit homme, de son humanisation. Il subsiste un reste, une trace et il seforme un destin. Entgegenkommen, la complaisance somatique seraitune de ces traces.

Comment a vécu la petite hystérique

Dès 1973, J. Lubtchansky remarquait que l’intuition de Freud luiavait permis d’apercevoir, derrière le sexuel tapageur du traumatisme misen avant par ses patientes hystériques, bien des drames et des misères.Histoire d’amour, demandait-elle dans son bel article, ou histoire demort ? Et elle insistait sur la nature narcissique des traumatismes subis.

Masud Khan (1974), lui, tranche le problème et affirme que s’il y abien eu un trauma réel dans l’histoire de l’hystérique, il n’est pas denature sexuelle. La mère de la future hystérique s’occupe du corps deson enfant, pas des besoins de son moi. L’enfant se soigne elle-même dece traumatisme par l’exploitation sexuelle des expériences du moi-corps.« Les souvenirs que l’hystérique garde de sa première enfance sont des

62 Gabriel Burloux

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 62

souvenirs principalement somatiques ». Un clivage se crée entre l’expé-rience sexuelle et l’utilisation créative des capacités du moi.

F. Brette (1982, 1985, 1986, 2000) a interrogé la qualité du lien primaireet montre comment le trauma apparent d’une perte d’objet vient réactiver,après coup, le deuil non fait des objets œdipiens. « Du traumatisme et del’hystérie pour s’en remettre », dit-elle. Un trauma peut en cacher un autre.

J. Schaeffer (2000), avec un autre angle d’approche, axé sur le refusdu féminin, serre de très près le désarroi de l’hystérique devant la pous-sée constante et effractrice de la pulsion, ses difficiles et nombreuxcontre-investissements, ses refus, et l’utilisation défensive de son corps.

Chez l’hystérique, le travail insuffisant de symbolisation a laissé detrop nombreuses traces dont la représentativité déficiente n’assure pasun épanouissement homogène du psychisme. Ces traces, traumatiques,viseront à la répétition, à la réminiscence. Mais pourquoi dans le corps ?

Sans doute est-ce parce que le corps est un refuge pour ce que ne peutintégrer ou recevoir le psychisme, et on le conçoit facilement. Mais aussipour la raison inverse : une sorte d’appel venant d’un corps qui se sou-vient. La complaisance somatique est grosse de ces souvenirs. Un fan-tasme du moi-corps pour un fantasme de l’esprit. Nous reverrons cela.

Décharge fantasmatique et décharge corporelle

Il y a bien des manières de lire et relire « On bat un enfant », l’articleécrit par Freud en 1919, surtout réfléchi par Freud dans sa versionféminine.

Il s’agit d’un fantasme en trois actes. Le premier acte est tiré du sou-venir d’une scène réelle : quelqu’un (qui s’avérera être le père) bat unenfant, haï par le sujet, par exemple un frère ou une sœur plus jeune ouqui le représente. Il n’est pas anodin, comme l’a souligné M. Fain, qu’à cetinstant l’adulte qui bat est furieux. Le fantasme est sadique ou imprégnéde sadisme. Le deuxième acte, lui, reste inconscient et ne peut être qu’uneconstruction de l’analyse. Il est devenu masochiste : « Je suis battue parle père ». Il apaise ainsi la conscience de culpabilité. Il est la « punitionpour la relation génitale prohibée avec le père, mais aussi le substitutrégressif de celle-ci ». Il sera la source de l’excitation libidinale qui sedéchargera dans les actes onanistes. Quant au troisième, il subsistera sousla formulation « on bat un enfant », qui gardera son potentiel excitant etsa décharge masturbatoire. Les fantasmes associés auront une apparencesadique mais permettront d’obtenir une satisfaction masochiste.

La conversion douloureuse hystérique 63

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 63

C’est là un bel exemple de rapatriement de la pulsion sur le moi, avecla complicité du masochisme, et de l’utilisation de ce dernier pour épa-nouir le psychisme et le monde fantasmatique. On sait à quel point AnnaFreud était hantée par ce fantasme, mais son analyste de père n’était pasle mieux placé pour l’apprivoiser.

Or, j’ai souvent pensé que les hystériques pouvaient être très près dece type de fantasme, qui n’avait pas cependant, chez elles, un aspectstructurant et unificateur de la psyché, bien plutôt un aspect chaotiqueet non pas inorganisé ou désorganisé, mais mal organisé. L’hystériquepréfère, semble-t-il, la conversion, simple retournement sur le moi, audouble retournement qui permettrait l’éclosion du fantasme.

De même, le souvenir-écran, à la fois résultat et source du travail psy-chique et qui s’épanouit dans sa propre transformation au cours dutemps, ne se constitue que parcimonieusement et comme à regret chezl’hystérique. Il répugne à se fondre avec d’autres impressions mnésiquespour nourrir le monde fantasmatique. Il est un peu dilacéré, ou struc-turé en îlots, il manque d’unité. Si bien que le cours du flux imaginairese coupe, rebondit ailleurs, comme attiré par des éléments rebelles. L’af-fect en devient capricieux.

Je serai, pour ma part, d’accord avec M. Khan. Le monde des cénes-thésies, des éprouvés corporels précoces, de toutes les sensations de l’en-fant, n’a pas suffisamment trouvé de sens dans la relation mère-enfant.Il n’a pas été accompagné d’un flot d’affects joyeux, consolateurs oucompassionnels, en tout cas vivants, alimentant l’enfant au ras de sesdécouvertes et de son évolution, et favorisant les identifications.

Une sexualité comme plaquée à coups de truelle sur un narcissismesouffrant, un corps qui n’a pas été authentifié, une pulsion plus effrac-trice que nourricière pour parler comme J. Schaeffer, une excitation,enfin, qui reste trop souvent sans retour satisfaisant, tout cela permet decomprendre la tendance à régresser vers un somatique, finalement ras-surant. C’est là le chemin de la conversion.

Régression et dépression

De même que les images d’un rêve s’imposent au rêveur, les formes dela conversion ne sont pas choisies par les patients. Je pense que les deuxrégressions, celle du rêve et celle de la conversion, sont comparables. Larégression se fait vers des points de fixation qui, à leur tour, l’orientent.Ce sont des expériences infantiles revisitées qui témoignent de l’expres-

64 Gabriel Burloux

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 64

sion d’un désir toujours présent. Est-ce aussi vrai pour la conversionque pour le rêve ? Pour ce qui concerne les douleurs hystériques, Freuddit qu’elles sont symboliques, témoignant donc d’une trace, mais aussique « ce sont les douleurs les plus communément répandues parmi lesêtres humains » que l’on retrouve dans les conversions. Il dit aussi que« dans la plupart des algies hystériques une douleur d’origine réellementorganique avait réellement existé au début ». Notons la redondance. Ilévoque donc une sorte de tronc commun des douleurs humaines et,d’autre part, la nécessité d’une empreinte douloureuse organique pourmordancer le phénomène de la régression.

Lors de l’épisode conversif de ma patiente, j’avais été frappé pardeux aspects bien différents. La main d’accoucheur est une position clas-sique des crises de tétanie, et on connaît la proximité entre tétanie etconversion. Ma patiente n’avait jamais fait de crise tétanique. Mais l’in-tentionnalité de diriger la main vers la bouche n’est pas, elle, classique.Quant au bras bizarrement tordu, qui ne ressemblait à rien, il visait, audébut de son mouvement, quelque chose situé en arrière, c’est-à-diremoi. Que penser de tout cela ?

Plus tard, les associations de la patiente se sont d’abord portées surla masturbation, puis ont repris les idées de devant et derrière, de fella-tion et de sodomie, bref le discours que Freud attendait de ses hysté-riques, à l’époque des Études.

Cependant, le clivage entre l’hémicorps gauche, en accord avec le tontranquille d’un discours bien ordonné, et l’hémicorps droit, tordu danssa conversion, ne pouvait que me faire penser à celui de la patiente deFreud, d’une part homme arrachant le vêtement féminin et, d’autrepart, femme le retenant. Ce clivage témoigne de la bisexualité psychique.C’est pourtant différemment que j’ai compris les choses, en constatantque j’étais bien plus affecté par le bras que par le discours. J’imaginaisdonc, au-delà de ce premier clivage homme/femme et plus en profondeur,un autre tableau : celui d’une mère sourde à son enfant et lui parlantsans s’occuper de ce qu’elle ressentait. Un clivage mère/fille, donc, plusà prendre en considération que le clivage bisexuel. J’assistais bien là àun tournant de la cure.

Je considère la régression qu’implique la conversion non seulementcomme une solution somatique pour un psychisme mal défendu par lerefoulement, mais aussi, mais surtout, comme une réponse à l’appel d’unmoi-corps nostalgique, qui réclame une satisfaction autrefois refusée. Larégression est donc l’alliée, et peut-être le moteur, du retournement del’énergie pulsionnelle sur le moi et aurait donc une intentionnalité ambi-

La conversion douloureuse hystérique 65

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 65

valente au service, à la fois, des pulsions de mort et de vie. Elle voudraitréoccuper une position ancienne de déception, pour la retrouver dansune satisfaction masochique, satisfaction de non-satisfaction comme ledit J. Schaeffer (2000). Il y aurait donc chez l’hystérique, outre la néces-sité, un désir de conversion.

La douleur, qui n’est qu’une traduction, hic et nunc, d’un état autre-fois flou, non qualifié, et surtout pas par la mère, aide à effectuer cetteconversion. Elle est, de plus, une violente protestation narcissique, uneprotestation d’existence.

Lors de ces moments, où il serait bon de se laisser aller à un certaintravail psychique, au prix d’un certain degré de dépression, certes, maisd’une dépression maturante, l’hystérique ne peut accepter cette régres-sion d’un autre type. Elle préfère se jeter dans la conversion qui évitel’élaboration. Freud (1895) avait découvert, avec Elisabeth von R., quela douleur physique survenait chez l’hystérique afin d’éviter une douleurmorale. Je le cite : « en lieu et place des douleurs morales évitées, desdouleurs physiques survinrent, la transformation fournissait un bénéficedu fait que la malade échappait à un état moral insupportable ».

Le rôle et les fonctions de la conversion apparaissent alors : éviter lepsychisme redouté, « réanimer la douleur pour éviter le vide », commel’a écrit A. Jeanneau (1985), renouveler l’appel muet qui n’a jamais étéentendu, le tout sur un fond de forte revendication narcissique.

L’hystérique préfère donc la douleur physique à l’angoisse ou à ladépression. Son aptitude et sa prédisposition à la conversion, son incapa-cité à l’élaboration psychique, du moins dans certaines conditions, en sontla cause. On a vu ce que ma patiente ne voulait ni revivre ni affronter. Avecbeaucoup de difficultés, elle l’a pourtant fait, dans le cours de sa longueanalyse. Longue, difficile mais dont la fin heureuse est une raison d’espoir.

Entre oppression d’oubliance et pression de souvenance.

GABRIEL BURLOUX120 rue Sully

69006 Lyon

BIBLIOGRAPHIE

Brette F. (1982), « Du traumatisme et de l’hystérie pour s’en remettre », in J. Guillaumin, QuinzeÉtudes psychanalytiques sur le temps, Toulouse, Privat, p. 41-54.

Brette F. (1985), « Plaidoyer pour une certaine hystérie », in Revue française de psychanalyse,49, 1, p. 469-470.

66 Gabriel Burloux

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 66

— (1986), « De la complaisance somatique à la complaisance dépressive », in Revue française depsychanalyse, 50, 3, p. 961-970.

— (2000), « Hystérie et traumatisme », in Hystérie, Monographie de psychanalyse, Paris, Pressesuniversitaires de France, p. 81-106.

Burloux G. (2004), Le Corps et la Douleur, Paris, Dunod.Freud S. (1909), « Remarques sur un cas de névrose obsessionnelle (L’Homme aux rats) », in Cinq

Psychanalyses, Paris, Presses universitaires de France, 1966, p. 199-262.— (1894), « Les psychonévroses de défense : essai d’une théorie psychologique de l’hystérie

acquise, de nombreuses phobies et obsessions et de certaines psychoses hallucinatoires », inNévrose, Psychose et Perversion, Paris, Presses universitaires de France, 1973, p. 1-14.

Freud S. (1919), « Un enfant est battu. Contribution à la connaissance de la genèse des perver-sions sexuelles », in Névrose, Psychose et Perversion, Paris, Presses universitaires de France,1973, p. 219-244.

Freud S. (1920), « Au-delà du principe de plaisir », in Essais de psychanalyse, traduction de J.Laplanche et J.-B. Pontalis, Paris, Payot, 1981, p. 41-115.

Freud S. et Breuer G. (1895), Études sur l’hystérie, préface de Marie Bonaparte, traductiond’Anne Berman, Paris, Presses universitaires de France, 1967.

Green A. (2000), « Hystérie et états-limites : chiasme. Nouvelles perspectives », in Le Guen A.,Anargyros A., Janin C. (dir.), Hystérie, Monographie de psychanalyse, Paris, Presses uni-versitaires de France, p. 139-162.

Jeanneau A. (1985), « L’hystérie. Unité et diversité », Rapport au 44e Congrès des psychanalystesde langue française, Lisbonne, 1984, in Revue française de psychanalyse, 49, 1, p. 107-326.

Khan M. (1974), « La rancune de l’hystérique », in Nouvelle Revue de psychanalyse, 10, p. 151-160.

Lubtchansky, J. (1973), « Le point de vue économique dans l’hystérie, à partir de la notion detraumatisme dans l’œuvre de Freud », in Revue française de psychanalyse, 37, 3, p. 373-405.

Schaeffer J. (2000), in Hystérie, Monographie de psychanalyse, Paris, Presses universitaires deFrance, p. 107-138.

Szwec G. (1998), « La vie, mode d’emploi », in Revue française de psychanalyse, 62, 5, p. 1505-1517

Villon F., « Le Lais », in Poésies complètes, Le Livre de Poche, 1972.

RÉSUMÉ — L’énigme de la conversion, que nous a léguée Freud, a gardé son mystère. Àpartir d’un exemple clinique dans lequel, au cours d’une séance d’analyse, on voit coexis-ter un discours associatif libre, une grande crise d’hystérie, puis un phénomène deconversion, l’auteur se risque à des considérations théoriques qui tentent d’éclairer cephénomène de la conversion, à la fois nécessité de retour nostalgique au corps, doncaccomplissement de désir, mais également nécessité de ce qui est aussi un recours pour fuirune réalité psychique inélaborable.

MOTS CLÉS — Conversion. Psychogénie de la douleur. Psychosomatique. Traumatismeprécoce. Régression.

SUMMARY — The enigma of conversion which we have inherited from Freud, has kept itsmystery. From an analytical session during which free association, an hysterical crisis,and a phenomenon of conversion are observed as coexisting, the author risks some theo-retical considerations attempting to clarify the phenomenon of conversion which is both a

La conversion douloureuse hystérique 67

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 67

necessity to nostalgically return to the body, therefore fulfilling a wish, and a necessity toescape intolerable psychical reality, impossible to elaborate.

KEY-WORDS — Conversion. Psychogenesis of pain. Psychosomatics. Early trauma. Regression.

ZUSAMMENFASSUNG — Das Rätsel der Konversion, das Freud uns hinterlassen hat, hatsein Geheimnis gehütet. Von einem klinischen Beispiel ausgehend, bei dem eine frei asso-zierende Rede, ein großer hysterischer Anfall, dann ein Konversionsvorgang im Laufeeiner analytischen Stunde koexistieren, versucht der Autor theoretische Betrachtungenzur Erklärung der Konversion vorzuschlagen. Die Konversion erscheint dabei nicht nurals Notwendigkeit einer nostalgischen Rückkehr zum Körper, also als Wunscherfüllung,sondern auch als notwendiges Hilfsmittel, um einer nicht zu verarbeitenden psychischenRealität entfliehen zu können.

STICHWÖRTER — Konversion. Psychogenese des Schmerzes. Psychosomatik. FrühzeitigesTrauma. Regression.

RESUMEN — El enigma de la conversión, que Freud nos ha legado, guarda su misterio. Apartir de un ejemplo clínico en el que, en una sesión de análisis, vemos coexistir un dis-curso asociativo libre, una gran crisis de histeria y un fenomeno de conversión, el autorse arriesga a consideraciones teóricas que intentan aclarar el fenomeno de la conversión,a la vez la necesidad de la vuelta nostálgica al cuerpo, luego realización del deseo, peroigualmente necesidad de lo que es también un recurso para huir de una realidad psíquicainelaborable.

PALABRAS CLAVES — Conversion. Psicogenia del dolor. Psicosomática. Traumatismo pre-coz. Regresión.

68 Gabriel Burloux

RevPsy25_p053p068_AL 22/04/04 10:05 Page 68