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1 La relation d 'objet 1956-57

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    La relation d 'objet

    1956-57

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    Table des sances Leon 1 21 novembre 1956 Leon 2 28 novembre 1956 Leon 3 05 dcembre 1956 Leon 4 12 dcembre 1956 Leon 5 19 dcembre 1956 Leon 6 09 janvier 1957 Leon 7 16 janvier 1957 Leon 8 23 janvier 1957 Leon 9 30 janvier 1957 Leon 10 06 fvrier 1957 Leon 11 27 fvrier 1957

    Leon 12 06 mars 1957 Leon 13 13 mars 1957 Leon 14 20 mars 1957 Leon 15 27 mars 1957 Leon 16 03 avril 1957 Leon 17 10 avril 1957 Leon 18 08 mai 1957 Leon 19 15 mai 1957 Leon 20 22 mai 1957 Leon 21 05 juin 1957 Leon 22 19 juin 1957 Leon 23 26 juin 1957 Leon 24 03 juillet 1957

    Sigmund Freud : Analyse der Phobie eines fnfjhrigen Knaben (Hans ) Sigmund Freud : Eine Kindheitserinnerung des Leonardo da Vinci Documents(vidos)http://www.youtube.com/watch?v=SgYQMSX_CCYhttp://www.youtube.com/watch?v=T9_g2cATDfIhttp://www.youtube.com/watch?v=KkVqw2T87H8

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    FREUD et le petit HANS

    Ce document de travail a pour sources principales : - La relation dobjet, sur le site E.L.P. (stnotypie au format image). - La relation dobjet : photocopies relies au format thse universitaire . Les rfrences bibliographiques privilgient les ditions les plus rcentes. Les schmas sont refaits. N.B. : - Ce qui sinscrit entre crochets droits [ ] nest pas de Jacques LACAN.

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    21 Novembre 1956 Table des sances

    Nous parlerons cette anne d'un sujet qui n'est pas, dans ce qu'on appelle l'volution historique de la psychanalyse, sans prendre d'une faon articule ou non, une position tout fait centrale dans la thorie et la pratique. Ce sujet, c'est La relation d'objet. Pourquoi ne l'ai-je pas choisi, ce sujet dj actuel, dj premier, dj central, dj critique, quand nous avons commenc ces sminaires ? Prcisment pour la raison qui motive la deuxime partie de mon titre, c'est--dire parce qu'il ne peut tre trait qu' partir d'une certaine ide, d'un certain recul pris sur la question de ce que FREUD nous a montr comme constituant les structures dans lesquelles l'analyse se dplace, dans lesquelles elle opre, et tout spcialement la structure complexe de la relation entre les deux sujets en prsence dans l'analyse : l'analys et l'analyste. C'est ce quoi par ces trois annes de commentaires des textes de FREUD, de critiques, portant :

    - la premire anne sur ce qu'on peut appeler les lments mmes de la conduite technique, c'est--dire de la notion de transfert et la notion de rsistance,

    - la deuxime anne sur ce qu'il faut bien dire tre le fond de l'exprience et de la dcouverte freudienne, savoir ce qu'est proprement parler la notion de l'inconscient, dont je crois vous avoir assez montr dans cette deuxime anne que cette notion de l'inconscient est cela mme qui a ncessit pour FREUD l'introduction des principes littralement paradoxaux sur le plan purement dialectique que FREUD tait amen introduire dans lau-del du principe de plaisir

    - enfin au cours de la troisime anne, je vous ai donn un exemple manifeste de l'absolue ncessit d'isoler cette articulation essentielle du symbolique qui s'appelle le signifiant, pour comprendre, analytiquement parlant, quelque chose ce qui n'est autre que le champ proprement paranoaque des psychoses.

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    Nous voici donc arms d'un certain nombre de termes qui ont abouti certains schmas, dont la spatialit n'est absolument pas prendre au sens intuitif du terme de schma, qui ne comportent pas de localisation mais qui comportent d'une faon tout fait lgitime une spatialisation, au sens o spatialisation implique rapport de lieu, rapport topologique, interposition par exemple, ou succession, squence.

    Un de ces schmas o culmine tout ce quoi nous avons abouti aprs ces annes de critique, c'est le schma que nous pourrons appeler par dfinition par opposition, celui qui inscrit le rapport du sujet l'Autre en tant qu'il est au dpart dans le rapport naturel tel qu'il est constitu au dpart de l'analyse : rapport virtuel, rapport de paroles virtuelles, par quoi c'est de l'Autre que le Sujet reoit, sous la forme d'une parole inconsciente, son propre message. Ce propre message qui lui est interdit, est pour lui dform, arrt, capt, profondment mconnu par cette interposition de la relation imaginaire entre a et a', c'est--dire de ce rapport qui existe prcisment entre ce moi et cet autre qu'est l'objet typique du moi, c'est--dire en tant que la relation imaginaire interrompt, ralentit, inhibe, inverse le plus souvent et profondment mconnat par une relation essentiellement aline, le rapport de parole entre le Sujet et l'Autre, le grand Autre :

    - en tant qu'il est un autre sujet, - en tant que par excellence il est sujet capable

    de tromper.

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    Voici donc quel schma nous sommes arrivs, et vous voyez bien que ce n'est pas quelque chose qui n'est pas [] au moment o nous l'avons repos l'intrieur analytique, tel que, de plus en plus, un plus grand nombre d'analystes la formulent, alors que nous allons remettre en cause cette prvalence dans la thorie analytique :

    - de la relation d'objet, si l'on peut dire non commente,

    - de la relation d'objet primaire,

    - de la relation d'objet comme venant prendre, dans la thorie analytique, la place centrale,

    - comme venant recentrer toute la dialectique

    du principe de plaisir, du principe de ralit,

    - comme venant fonder tout le progrs analytique autour de ce que l'on peut appeler une rification du rapport du Sujet l'objet, considr comme une relation duelle, une relation nous dit-on encore quand on parle de la situation analytique excessivement simple, cette relation du Sujet l'objet qui tend de plus en plus occuper le centre de la thorie analytique.

    C'est cela mme que nous allons mettre l'preuve. Nous allons voir si on peut

    partir de quelque chose qui dans notre schma se rapporte prcisment la ligne a-a

    construire d'une faon satisfaisante l'ensemble des phnomnes offerts notre observation, notre exprience analytique, si cet instrument lui tout seul peut permettre de rpondre des faits, si en d'autres termes le schma plus complexe que nous avons propos doit tre nglig, voire cart. Que la relation d'objet soit devenue - au moins en apparence - l'lment thorique premier dans l'explication de l'analyse, je crois que je vous en donnerai un tmoignage suivi.

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    Non pas prcisment en vous indiquant de vous pntrer de ce qu'on peut appeler une sorte d'ouvrage collectif rcemment paru1, pour lequel en effet le terme collectif s'applique particulirement bien. Vous y verrez d'un bout l'autre la mise en valeur

    d'une faon peut-tre pas toujours particulirement satisfaisante dans le sens de l'articul, mais assurment dont la monotonie, l'uniformit est tout fait frappante

    vous y verrez promue cette relation d'objet donne expressment dans un des articles qui s'appelle volution de la psychanalyse, et comme dernier terme de cette volution vous y verrez dans l'article Clinique psychanalytique une faon de prsenter la clinique elle-mme, toute entire centre sur cette relation d'objet. Peut-tre mme en donnerai-je quelques ides auxquelles peut parvenir une telle prsentation. Assurment, l'ensemble est tout fait frappant, c'est autour de la relation d'objet que ceux qui pratiquent l'analyse essayent d'ordonner leurs esprits, la comprhension qu'ils peuvent avoir de leur propre exprience Aussi ne nous semble-t-elle pas devoir leur donner une satisfaction pleine et entire. Mais d'un autre ct, ceci n'oriente, ne pntre trs profondment leur pratique, que de concevoir que leur propre exprience dans ce registre ne soit quelque chose qui n'ait vraiment des consquences dans les modes mmes de leur intervention, dans l'orientation donne l'analyse, et du mme coup dans ses rsultats. C'est ce que l'on peut mconnatre simplement lire, commenter, alors qu'on a toujours dit que la thorie analytique et la pratique ne peuvent se sparer, se dissocier l'une de l'autre. Ds lors qu'on la conoit dans un certain sens, il est invitable qu'on la mne galement dans un certain sens, si le sens thorique et les rsultats pratiques ne peuvent tre de mme qu'aperus.

    1 La PDA comme disait Lacan , i.e. La psychanalyse daujourdhui , sous la direction de S.Nacht, Puf 1956.

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    Pour introduire la question de la relation d'objet, de la lgitimit, du non fond de sa situation comme centrale dans la thorie analytique, il faut que je vous rappelle brivement tout au moins, ce que cette notion doit ou ne doit pas FREUD lui-mme. Je le ferai non seulement parce que c'est l en effet une sorte de guide, presque de limitation technique que nous nous sommes imposs ici de partir du commentaire freudien, et de mme ai-je senti cette anne quelques interrogations, sinon inquitudes, de savoir si j'allais ou non partir des textes freudiens, mais il est trs difficile de partir propos de la relation d'objet des textes de FREUD eux-mmes, parce qu'elle n'y est pas

    je parle bien entendu de quelque chose qui est trs formellement affirm ici comme une dviation de la thorie analytique

    il faut donc bien que je parte de textes rcents, et que du mme coup je parte d'une certaine critique de ces positions. Mais que nous devions nous rfrer en fin de compte aux positions freudiennes, par contre ceci n'est pas douteux et du mme coup nous ne pouvons pas ne pas voquer

    ne serait-ce que trs rapidement ce qui dans les thmes proprement freudiens fondamentaux, tourne autour de la notion mme d'objet. notre dpart nous ne pourrons pas le faire d'une faon dveloppe, je vais essayer de le faire aussi rapidement que possible. Bien entendu, ceci implique que c'est prcisment ce que nous devrons de plus en plus, la fin, reprendre, dvelopper, retrouver et articuler. Je veux donc simplement vous rappeler d'une faon brve, et qui ne serait mme pas concevable s'il n'y avait pas derrire nous ces trois annes de collaboration d'analyse de textes, si vous n'aviez pas dj avec moi rencontr sous des formes diverses ce thme de l'objet.

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    Dans FREUD on parle bien entendu d'objet, la division des Trois essais sur la sexualit s'appelle prcisment la recherche, ou plus exactement la trouvaille de l'objet. On parle de l'objet d'une faon implicite chaque fois qu'entre en jeu la notion de ralit. On en parle encore d'une troisime faon chaque fois qu'est implique l'ambivalence de certaines relations fondamentales, savoir le fait que le sujet se fait objet pour l'autre, qu'il y a un certain type de relation dans lequel la rciprocit pour le sujet d'un objet est patente et mme constituante. Je voudrais mettre l'accent d'une faon plus appuye sur les trois modes sous lesquels nous apparaissent ces notions relatives l'objet. C'est pourquoi je fais allusion l'un des points o dans FREUD nous pouvons nous rfrer pour prouver, articuler la notion d'objet. Si vous vous reportez ce chapitre des Trois essais sur la sexualit, vous y verrez quelque chose qui est dj l depuis l'poque o ceci n'a t publi que par une sorte d'accident historique

    FREUD non seulement ne tenait pas ce qu'on le publie, mais qui a t en somme publi contre sa volont

    nanmoins nous trouvons la mme formule propos de l'objet ds cette premire Esquisse de sa psychologie. FREUD insiste sur ceci : que toute faon pour l'homme de trouver l'objet est, et n'est jamais, que la suite d'une tendance o il s'agit d'un objet perdu, d'un objet quil s'agit de retrouver. L'objet n'est pas considr, comme dans la thorie moderne, comme tant pleinement satisfaisant :

    - l'objet typique, - l'objet par excellence, - l'objet harmonieux, - l'objet qui fonde l'homme dans une ralit

    adquate, dans la ralit qui prouve la maturit, le fameux objet gnital.

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    II est tout fait frappant de voir qu'au moment o FREUD fait la thorie de l'volution instinctuelle telle qu'elle se dgage des premires expriences analytiques, il nous l'indique comme tant saisie par la voie d'une recherche de l'objet perdu. Cet objet correspond un certain stade avanc de la maturation des instincts, c'est l'objet retrouv du premier sevrage, l'objet prcisment qui a t d'abord le point attache des premires satisfactions de l'enfant, c'est un objet retrouv. Il est bien clair que :

    - la discordance instaure par le seul fait que ce terme de la rptition : ce terme d'une nostalgie qui lie le sujet l'objet perdu et travers laquelle s'exerce tout l'effort de la recherche et qui marque la retrouvaille du signe d'une rptition impossible, puisque prcisment ce n'est pas le mme objet, a ne saurait l'tre

    - la primaut de cette dialectique qui met au centre de la

    relation sujet-objet une tension foncire qui fait que ce qui est recherch n'est pas recherch au mme titre que ce qui sera trouv, que c'est travers la recherche d'une satisfaction passe et dpasse que le nouvel objet est recherch et trouv et saisi ailleurs qu'au point o il est cherch,

    - la foncire distance qui est introduite par l'lment

    essentiellement conflictuel qu'il y a dans toute recherche de lobjet, c'est la premire forme sous laquelle dans FREUD apparat cette notion de la relation d'objet.

    Je dirais que c'est mal l'articuler dans les termes qui seraient philosophiquement labors, qu'il faudrait ici nous rsoudre pour donner son plein accent ce qu'ici je souligne

    je ne le fais pas intentionnellement, je le rserve pour notre retour sur ce terme, pour ceux pour qui ces termes ont dj un sens de par certaines connaissances philosophiques

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    toute la distance de la relation du sujet l'objet dans FREUD, par rapport ce qui le prcde dans une certaine conception de l'objet comme tant l'objet adquat, comme tant l'objet attendu d'avance, coapt la maturation du sujet. Toute cette distance est dj implique dans ce qui oppose une perspective platonicienne

    celle qui fonde toute apprhension, toute reconnaissance sur la rminiscence d'un type en quelque sorte prform

    une notion profondment diffrente, de toute la distance qu'il y a entre l'exprience moderne et l'exprience antique, celle qui est donne dans KIERKEGAARD2 sous le registre de la rptition, cette rptition toujours cherche, essentiellement jamais satisfaite en tant qu'elle est de par sa nature non point jamais rminiscence, mais toujours rptition comme telle, donc impossible assouvir. C'est dans ce registre que se situe la notion de retrouver l'objet perdu dans FREUD. Nous retiendrons ce texte, il est essentiel qu'il suffise dans le premier rapport que FREUD fait de la notion d'objet. Bien entendu, c'est essentiellement sur une notion d'un rapport profondment conflictuel du sujet avec son monde, que les choses se posent et se prcisent. Comment en serait-il autrement puisque dj cette poque c'est essentiellement de l'opposition entre principe de ralit et principe de plaisir qu'il s'agit ? Que si principe de ralit et principe de plaisir ne sont pas dtachables l'un de l'autre, je dirais plus : s'impliquent et s'incluent l'un l'autre dans un rapport dialectique, si bien que comme FREUD l'a toujours institu, le principe de ralit n'est constitu que par ce qui est impos pour sa satisfaction au principe de plaisir, il n'en est en quelque sorte que le prolongement.

    2 Sren Kierkegaard : La rptition, in uvres compltes, t.5, trad. Tisseau ; d. de LOrante, 1972. La reprise, trad. Viallaneix, Coll. GF, Flammarion, 1990. La reprise, in Sren Kierkegaard, trad. Tisseau, Coll. Bouquins, d. Robert Laffont, 1993.

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    Si inversement le principe de ralit implique dans sa dynamique et dans sa recherche fondamentale la tension fondamentale du principe de plaisir, il n'en reste pas moins qu'entre les deux

    et c'est l'essentiel de ce qu'apporte la thorie freudienne

    il y a une bance qu'il n'y aurait pas lieu de distinguer s'ils taient l'un simplement la suite de l'autre :

    - que le principe de plaisir tend se raliser en formation profondment irraliste,

    - que le principe de ralit implique l'existence d'une organisation, d'une structuration autonome diffrente et qui comporte que ce qu'elle saisit peut tre justement quelque chose de fondamentalement diffrent de ce qui est dsir.

    C'est dans ce rapport

    qui lui-mme introduit dans sa dialectique mme du sujet et de l'objet

    un autre terme, un terme qui est ici pos comme irrductible :

    - de mme que l'objet tout l'heure tait quelque chose qui tait fond dans ses exigences primordiales comme quelque chose qui est toujours vou un retour, et par l mme vou un retour impossible,

    - de mme dans l'opposition principe de ralit et principe du plaisir, nous avons la notion d'une opposition foncire entre la ralit et ce qui est recherch par la tendance.

    En d'autres termes la notion : que la satisfaction du principe de plaisir, en tant qu'elle est toujours latente, sous-jacente tout exercice de la cration du monde, est quelque chose qui toujours plus ou moins tend se raliser dans une forme plus ou moins hallucine.

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    Que la possibilit fondamentale de cette organisation qui est celle sous-jacente au moi, celle de la tendance du sujet comme tel

    est de se satisfaire dans une ralisation irrelle, dans une ralisation hallucinatoire, voil l'autre terme sur lequel FREUD met puissamment laccent, et ceci :

    - ds la Science des rves, - ds la Traumdeutung - ds la premire formulation pleine et articule

    de l'opposition du principe de ralit et du principe du plaisir. Ces deux positions ne sont pas comme telles articules l'une avec l'autre. C'est prcisment du fait qu'elles se prsentent dans FREUD comme distinctes que ceci est bien marqu que ce n'est pas autour de la relation du sujet l'objet que se centre le dveloppement. Chacun de ces deux termes trouve sa place en des points diffrents de la dialectique freudienne pour la simple raison qu'en aucun cas la relation sujet-objet n'est centrale, elle n'apparat que d'une faon qui peut apparatre comme se soutenant d'une faon directe et sans bance. C'est dans cette relation d'ambivalence

    ou dans celle d'un type de relations qui sont appeles depuis prgnitales, qui sont les relations : voir-tre vu , attaquer-tre attaqu , passif-actif ,

    que le sujet vit ces relations qui toujours plus ou moins implicitement, d'une faon plus ou moins manifeste, implique son identification au partenaire de cette relation, c'est savoir que ces relations sont vcues dans une rciprocit

    le terme est valable ici d'ambivalence de la position du sujet et du partenaire. Ici s'introduit cette relation entre le sujet et l'objet qui elle, est non seulement directe, sans bance, mais qui est littralement quivalence de l'un l'autre et c'est celle-l qui a pu donner le prtexte la mise au premier plan de la relation d'objet comme telle.

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    Mais qu'allons-nous voir ? Cette relation qui en elle-mme dj annonce, prcise, mrite le terme de relation en miroir qui est celle de la rciprocit entre le sujet et l'objet, ce quelque chose qui pose en lui-mme dj tellement de questions que c'est pour essayer de les rsoudre que moi-mme j'ai introduit dans la thorie analytique cette notion de stade du miroir

    qui est bien loin d'tre purement et simplement cette connotation d'un phnomne dans le dveloppement de l'enfant, c'est--dire du moment o l'enfant reconnat sa propre image, savoir : c'est que tout ce qu'il apprend dans cette captivation par sa propre image et tout prcisment de la distance qu'il y a de ses tensions internes celles-la mme qui sont voques dans ce rapport la ralisation, l'identification cette image

    c'est l pourtant quelque chose qui a servi de thme, de point central la mise au premier plan de cette relation sujet-objet comme tant, si on peut dire l'chelle phnomnale laquelle pouvait tre rapport d'une faon satisfaisante et valable ce qui jusque l s'tait prsent dans des termes, non seulement pluralistes, mais proprement parler conflictuels, comme introduisant un rapport essentiellement dialectique entre les diffrents termes. ceci qu'on a cru pouvoir

    et un des premiers y avoir mis l'accent - mais non pas si tt qu'on le croit - est ABRAHAM

    essayer de recentrer tout ce qui est introduit jusque l dans l'volution du sujet d'une faon qui est toujours vue par reconstruction d'une faon rtroactive partir d'une exprience centrale qui est celle de la tension conflictuelle entre conscient et inconscient, de la tension conflictuelle cre par ce fait fondamental :

    - que ce qui est cherch par la tendance est obscur, - que ce que la conscience en reconnat est d'abord

    et avant tout mconnaissance, - que ce n'est pas dans la voie de la conscience que le sujet

    se reconnat.

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    Il y a autre chose et un au-del, et cet au-del pose du mme coup et par l mme la question de sa structure, de son principe et de son sens, tant fondamentalement mconnu par le sujet, hors de porte de sa connaissance. Ceci est abandonn par l'initiative mme d'un certain nombre, d'abord de personnalits, puis de courants significatifs l'intrieur de l'analyse en fonction d'un objet dont le point terminal n'est pas le point dont nous partons. Nous partons en arrire pour comprendre comment est atteint ce point terminal, qui d'ailleurs n'est jamais observ, cet objet idal qui est littralement impensable. Il est au contraire conu comme une sorte de point de mire, de point d'aboutissement auquel vont concourir toute une srie d'expriences, d'lments, de notions partielles de l'objet partir d'une certaine poque, et tout spcialement partir du moment o ABRAHAM3 en 1924 le formule dans sa thorie du dveloppement de la libido, et qui fonde pour beaucoup la loi mme de l'analyse, de tout ce qui s'y passe. Le systme de coordonnes l'intrieur desquelles se situe toute l'exprience analytique, est celui du point d'achvement de ce fameux objet idal, terminal, parfait, adquat, de celui qui est propos dans l'analyse comme tant celui qui marque par lui-mme le but atteint, la normalisation si l'on peut dire, terme qui dj lui tout seul introduit un monde de catgories bien tranger ce point de dpart de l'analyse, la normalisation du sujet. Pour vous illustrer ceci, je crois ne pas pouvoir mieux faire que vous indiquer que de la formulation mme, et du mme coup de l'aveu de ceux qui sont engags dans cette voie

    c'est assurment l quelque chose qui se formule dans les termes trs prcis

    ce qui est considr comme le progrs de l'exprience analytique c'est d'avoir mis au premier plan les rapports du sujet son environnement.

    3 Karl Abraham : Esquisse d'une histoire du dveloppement de la libido base sur la psychanalyse des troubles mentaux, 1924, in Oeuvres compltes, T. III , Payot.

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    Cet accent mis sur l'environnement, cette rduction que donne toute exprience analytique quelque chose qui est une sorte de retour la position bel et bien objectivante qui pose au premier plan l'existence d'un certain individu et d'une relation plus ou moins adquate, plus ou moins adapte son environnement, c'est quelque chose qui, de la page 761 la page 773 de l'ouvrage collectif [ La PDA ] dont nous parlions, est articul dans ces termes. Aprs avoir bien marqu que c'est l'accent mis sur les rapports du sujet son environnement dont il s'agit dans le progrs de l'analyse, nous apprenons incidemment que ceci est particulirement significatif dans l'observation du petit Hans : Dans l'observation du petit Hans, les parents apparaissent nous dit-on, sans personnalit propre. Nous ne sommes pas forcs de souscrire cette opinion, mais l'important est ce qui va suivre : ceci tient ce que nous tions : avant la guerre de 1914, l'poque o la socit occidentale, sre d'elle-mme, ne se posait pas de questions sur sa propre prennit. Au contraire depuis 1926 l'accent est mis sur l'angoisse et l'interaction de l'organisme et de l'environnement, c'est aussi que les assises de la Socit ont t branles, l'angoisse d'un monde changeant est vcue chaque jour, les individus se reconnaissent diffrents. C'est l'poque mme o la physique se cherche, o relativisme, incertitudes, probabilisme semblent ter la pense objective sa confiance en elle-mme. Cette rfrence la physique moderne comme le fondement d'un nouveau rationalisme me parat devoir se passer de commentaire. Ce qui est important c'est simplement qu'il y a l quelque chose qui est curieusement avou d'une faon indirecte : c'est que la psychanalyse est envisage comme une sorte de remde social, puisque c'est cela qu'on met au premier plan comme caractristique de l'lment moteur de son progrs. Il n'y a pas besoin de savoir si ceci est ou non fond, ce sont des choses qui nous paraissent de peu de poids, c'est simplement le contexte des choses qui sont admises l avec une trs grande lgret qui en lui-mme peut nous tre d'une certaine utilit.

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    Ceci n'est pas unique, car le propre de cet ouvrage collectif communiquant l'intrieur de lui-mme d'une faon bien plus, semble-t-il, faite d'une sorte de curieuse homognisation que d'une articulation proprement parler, c'est celui aussi qui dans le premier article auquel j'ai fait allusion tout l'heure, marque d'une faon dlibre, par la notion vraiment formule qu'en fin de compte ce qui nous donnera la conception gnrale ncessaire la comprhension actuelle de la structure d'une personnalit, c'est l'angle de vision que l'on dit tre le plus pratique et le plus prosaque qui soit : celui des relations sociales du malade, (soulign par l'auteur). Je passe sur d'autres termes qui, propos de la nature de l'aveu, nous disent que l'on conoit, que l'on puisse voir comme mouvante, artificielle, une telle conception de l'analyse. Mais ceci ne dpend-il pas du fait que l'objet mme d'une telle discipline ait

    ce que personne ne songe contester marqu des variations dans le temps ? C'est en effet une explication pour le caractre tant soit peu foudroyant des diffrents modes d'approche donns dans cette ligne, mais ce n'est peut-tre pas une explication qui doit entirement nous satisfaire, je ne vois pas quels sont les objets d'aucune discipline qui ne soient pas galement sujets des variations dans le temps. Sur la relation du sujet au monde nous verrons affirm et accentu une sorte de paralllisme entre l'tat de maturation plus ou moins assur des activits instinctuelles et la structure du moi chez un sujet un moment donn. Pour tout dire, partir d'un certain moment cette structure du moi est considre comme la doublure, et trs exactement en fin de compte comme le reprsentant de l'tat de maturation des activits instinctuelles.

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    Il n'y a plus aucune diffrence, ni sur le plan dynamique, ni sur le plan gntique entre les diffrentes tapes du progrs du moi et les diffrentes tapes de la progression instinctuelle. Ce sont des termes qui peuvent certains d'entre vous ne pas paratre en eux-mmes trs essentiellement critiquables, peu importe, la question n'est pas l, nous verrons dans quelle mesure nous pourrons ou non les retenir. La consquence en est leur instauration au centre de l'analyse d'une faon tout fait prcise qui se prsente comme une topologie : il y a les prgnitaux et les gnitaux . Les prgnitaux sont des individus faibles, et la cohrence de leur moi dpend troitement de la persistance de certaines relations objectales avec un objet significatif . Ceci est crit et articul. Ici nous pouvons commencer poser des questions. Nous verrons peut-tre tout l'heure au passage, lire les mmes textes, o peut aller la notion de ce significatif non expliqu. C'est savoir le manque absolu de diffrenciation, de discernement dans ce significatif. La notion technique que ceci implique est la mise en jeu, et du mme coup la mise en valeur l'intrieur de la relation analytique, des relations prgnitales, celles qui caractrisent le rapport de ce prgnital avec son monde dont on nous dit que ces relations leur objet sont caractrises par quelque dficit : la perte de ces relations, ou de leur objet, ce qui est synonyme puisque ici l'objet n'existe qu'en fonction de ses rapports avec le sujet, certains entranant de graves dsordres de l'activit du Moi, tels que phnomnes de dpersonnalisation, troubles psychotiques.

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    Ici nous trouvons le point dans lequel est recherch le test du tmoignage de cette fragilit profonde des relations du moi son objet : le sujet s'efforce de maintenir ses relations d'objet tout prix, en utilisant toutes sortes d'amnagements dans ce but - changement d'objet avec utilisation du dplacement ou de la symbolisation qui, par le choix d'un objet symbolique arbitrairement charg de la mme valeur affective que l'objet initial, lui permettra de ne pas se trouver priv de relation objectale. Pour cet objet sur lequel est dplac la valeur affective de l'objet initial, le terme de Moi auxiliaire est pleinement justifi, et ceci explique que : Les gnitaux au contraire possdent un Moi qui ne voit pas sa force et l'exercice de ses fonctions dpendre de la possession d'un objet significatif. Alors que pour les premiers la perte d'une personne importante subjectivement parlant pour prendre l'exemple le plus simple, met en jeu leur individualit, pour eux cette perte, pour si douloureuse qu'elle soit, ne trouble en rien la solidit de leur personnalit. Ils ne sont pas dpendants d'une relation objectale. Cela ne veut pas dire qu'ils peuvent se passer aisment de toute relation objectale, ce qui d'ailleurs est pratiquement irralisable, tant les relations d'objet sont multiples et varies, mais que simplement leur unit n'est pas la merci de la perte d'un contact avec un objet significatif. C'est l ce qui du point de vue du rapport entre le Moi et la relation d'objet les diffrencie radicalement des prcdents. Si comme dans toute nvrose une volution normale semble avoir t stoppe par l'impossibilit o s'est trouv le sujet de rsoudre le dernier des conflits structurants de l'enfance, celui dont la liquidation parfaite, si l'on peut s'exprimer ainsi, aboutit cette adaptation si heureuse au monde que l'on nomme la relation d'objet gnitale et qui donne tout observateur le sentiment d'une personnalit harmonieuse et l'analyse la perception immdiate d'une sorte de limpidit cristalline de l'esprit, ce qui est, je le rpte, plus une limite qu'une ralit, cette difficult de rsolution de l'dipe bien souvent n'a pas tenu au seul problme qu'il posait. Limpidit cristalline Nous voyons galement o cet auteur avec la perfection de la relation objectale, peut nous porter, c'est encore ceci : Les pulsions dont il sagit nous ferons aboutir cette notion, alors que les formes prgnitales marquent ce besoin de possession incoercible, illimit, inconditionnel, comportant un aspect destructif, (dans les formes gnitales), elles sont vritablement aimantes, et si le sujet ne s'y montre pas pour autant oblatif c'est--dire dsintress, et si ses objets sont aussi foncirement des objets narcissiques que dans le cas prcdent, il est ici capable de comprhension, d'adaptation la situation de l'autre. D'ailleurs la structure intime de ses relations objectales montre que la participation de l'objet son propre plaisir lui, est indispensable au bonheur du sujet. Les convenances, les dsirs, les besoins de l'objet sont pris en considration au plus haut point.

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    Ceci suffit nous montrer, ouvrir un problme fort grave qui est celui de savoir ce qu'il importe de distinguer dans la maturation qui n'est ni une voie, ni une perspective, ni un plan sur lequel nous ne puissions pas en effet poser la question : Qu'est-ce que signifie l'issue d'une enfance et d'une adolescence et d'une maturit normales ? Mais la distinction essentielle entre l'tablissement de la ralit avec tout ce qu'elle pose de problmes d'adaptation :

    - quelque chose qui rsiste, - quelque chose qui se refuse, - quelque chose qui est complexe, - quelque chose qui implique en tout cas que

    la notion d'objectivit, comme l'exprience la plus lmentaire nous montre, que c'est une chose distincte de ce qui est vis dans ces textes mmes sous la notion plus ou moins implicite et couverte par le terme diffrent d'objectalit, de plnitude de l'objet.

    Cette confusion qu'il y a, est d'ailleurs articule parce que le terme d'objectivit se trouve dans le texte comme tant caractristique de cette forme de relation acheve. Il y a une distance assurment entre :

    - ce qui est impliqu par une certaine construction du monde considre comme plus ou moins satisfaisante telle poque, en effet dtermine certainement hors de toute relativit historique,

    - et d'autre part cette relation mme l'autre comme tant ici son registre affectif, voire sentimental, comme de la prise en considration des besoins, du bonheur, du plaisir de l'autre.

    Assurment ceci nous porte beaucoup plus loin puisqu'il s'agit de la constitution de l'autre en tant que tel, c'est--dire en tant qu'il parle, c'est--dire en tant qu'il est un sujet.

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    Nous aurons revenir sur cela. C'est l quelque chose qu'il ne suffit pas de citer, mme en formulant les remarques humoristiques qu'ils suggrent suffisamment par eux-mmes, sans pour autant avoir fait le progrs qui s'impose. Cette conception extraordinairement primaire de la notion d'volution instinctuelle dans l'analyse est quelque chose qui est loin d'tre reu universellement. Il est certain que la notion des textes comme ceux de GLOVER par exemple, vous fera retourner une notion bien diffrente de l'exploration des relations d'objet, mme nommes et bien dfinies comme telles. Vous verrez aborder les textes de GLOVER, qu'essentiellement ce qui me parait caractriser les stades, les tapes de l'objet aux diffrentes poques du dveloppement individuel, c'est l'objet conu comme ayant une toute autre fonction. L'analyse insiste introduire de l'objet une notion fonctionnelle d'une nature bien diffrente de celle d'un pur et simple correspondant, d'une pure et simple coaptation de l'objet avec une certaine demande du sujet. L'objet a l un tout autre rle, il est si l'on peu dire plac sur fond dangoisse. C'est pour autant que l'objet est instrument masquer, parer sur le fond fondamental dangoisse qui caractrise aux diffrentes tapes du dveloppement du sujet, le rapport du sujet au monde, qu' chaque tape le sujet doit tre caractris. Ici je ne peux pas, la fin de cet entretien d'aujourd'hui, ne pas ponctuer

    illustrer d'un exemple quelconque qui donne son relief ce que je vous apporte propos de cette conception

    vous faire remarquer que la conception classique fondamentale freudienne de la phobie n'est exactement pas autre chose que ceci.

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    FREUD et tous ceux qui ont tudi la phobie avec lui et aprs lui, ne peuvent manquer de montrer qu'il n'y a aucun rapport direct de la prtendue peur qui colorerait de sa marque fondamentale cet objet en le constituant comme tel comme un objet primitif. Il y a au contraire une distance considrable de la peur dont il s'agit et qui peut bien tre dans certains cas, et qui peut bien aussi dans d'autres cas ne pas tre une peur tout fait primitive, et l'objet qui par rapport elle est trs essentiellement constitu pour la maintenir distance, pour enfermer le sujet dans un certain cercle, dans un certain rempart, lintrieur duquel il se met l'abri de ces peurs. L'objet est essentiellement li l'issue d'un signal d'alarme. L'objet est avant tout un poste avanc contre une peur institue qui lui donne son rle, sa fonction un moment, un point dtermin d'une certaine crise du sujet qui n'est pas pour autant fondamentalement ni une crise typique, ni une crise volutive. Cette notion moderne si l'on peut dire, de la phobie, est quelque chose qui peut tre plus ou moins lgitimement affirm. Nous aurons galement la critiquer, l'origine de la notion d'objet telle qu'elle est promue dans les travaux et dans le mode de conduire l'analyse qui est caractristique de la pense et de la technique d'un GLOVER. Qu'il s'agisse d'une angoisse qui est l'angoisse de castration nous dit-on, c'est quelque chose qui a t jusqu' une poque rcente peu contest. Il est nanmoins remarquable que les choses en sont venues au point que le dsir de reconstruction dans le sens gntique ait t jusqu' cette tentative de nous faire dduire la construction mme de l'objet paternel de quelque chose qui viendrait comme la suite, l'aboutissement, le fleurissement des constructions phobiques objectales primitives.

  • 23

    Il y a un certain rapport paru sur la phobie et qui va exactement dans ce sens par une sorte de curieux renversement du chemin qui dans l'analyse nous avait en effet permis de remonter de la phobie la notion d'un certain rapport avec l'angoisse, d'une fonction de protection que joue l'objet de la phobie par rapport cette angoisse. Il n'est pas moins remarquable dans un autre registre, de voir ce que devient galement la notion de ftiche et la notion de ftichisme. Je l'introduis galement aujourd'hui pour vous montrer que le ftiche se trouve

    si nous prenons la chose dans la perspective de la relation d'objet

    remplir une fonction qui est bel et bien dans la thorie analytique articule comme tant lui aussi une certaine protection contre l'angoisse et contre, chose curieuse, la mme angoisse, c'est--dire l'angoisse de castration. Il ne semble pas que ce soit par le mme biais que le ftiche serait plus particulirement reli l'angoisse de castration pour autant qu'elle est lie la perception de l'absence d'organe phallique chez le sujet fminin, et la ngation de cette absence. Qu'importe ! Vous ne pouvez pas ne pas voir qu'ici aussi l'objet a une certaine fonction de complmentation par rapport quelque chose qui ici se prsente comme un trou, voire comme un abme dans la ralit, et que la question de savoir s'il y a rapport entre les deux, s'il y a quelque chose de commun entre cet objet phobique et ce ftiche se pose. Mais poser les questions dans ces termes, peut-tre faut-il, sans nous refuser aborder les problmes partir de la relation d'objet, trouver dans les phnomnes mmes l'occasion, le dpart d'une critique qui, mme si nous soumettons l'interrogation qui nous est pose concernant l'objet typique, l'objet idal, l'objet fonctionnel, toutes les formes d'objet que vous pourrez supposer chez l'homme, nous amne aborder en effet la question sous ce jour.

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    Mais alors, ne pas nous contenter d'explications uniformes pour des phnomnes diffrents, et centrer par exemple notre question au dpart sur ce qui fait la fonction essentiellement diffrente d'une phobie et d'un ftiche, pour autant qu'elles sont centres l'une et l'autre sur le mme fond d'angoisse fondamental, sur lequel l'une et l'autre seraient appeles comme une mesure de protection, comme une mesure de garantie de la part du sujet. C'est bien l en effet que j'ai pris la rsolution de prendre mon point de dpart pour vous montrer de quel point nous partions dans notre exprience pour aboutir aux mmes problmes. Car il y a effectivement poser, non plus d'une faon mythique, ni d'une faon abstraite, mais d'une faon directe, telle que les objets nous sont proposs, nous apercevoir qu'il ne suffit pas de parler de l'objet en gnral, ni d'un objet qui aurait, par je ne sais quelle vertu de communication magique, la fonction de rgulariser les relations avec tous les autres objets. Comme si le fait d'tre arriv tre un gnital suffisait nous poser et rsoudre toutes les questions, savoir par exemple si ce que peut tre pour un gnital un objet qui ne me parait pas ne pas devoir tre moins nigmatique du point de vue essentiellement biologique qui est ici mis au premier plan, qu'un des objets de l'exprience humaine courante, savoir une pice de monnaie, ne pose pas par elle-mme la question de sa valeur objectale. Le fait que dans un certain registre nous la perdions en tant que moyen d'change, ou tout autre espce de prise en considration pour l'change de n'importe quel lment de la vie humaine transpos dans sa valeur de marchandise, ne nous introduit-il pas de mille faons la question de ce qui effectivement a t rsolu par un terme trs voisin, mais non pas synonyme de celui que nous venons d'introduire dans la notion de ftiche, dans la thorie marxiste.

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    Bref - la notion d'objet, - la notion aussi si vous le voulez, d'objet cran, - et du mme coup la fonction de cette constitution

    de la ralit si singulire sur laquelle ds le dbut FREUD a apport cette lumire vritablement saisissante et laquelle nous nous demandons pourquoi on ne continue pas accorder sa valeur : la notion de souvenir-cran comme tant tout spcialement constituante du pass de chaque sujet comme tel ?

    Toutes ces questions mritent d'tre prises en effet par elles-mmes et pour elles-mmes, analyses dans leurs rapports rciproques, puisque c'est de ces rapports que peuvent ressurgir les distinctions de plan ncessaires qui nous permettront de dfinir d'une faon articule pourquoi une phobie et un ftiche sont deux choses diffrentes, et s'il y a en effet quelque rapport avec l'usage gnral du mot ftiche dans l'usage particulier qu'on peut en faire propos de la forme prcise, et l'emploi prcis qu'a ce terme pour dsigner une perversion sexuelle. C'est donc ainsi que nous introduirons le sujet de notre prochain entretien, il sera sur la phobie et le ftiche, et je crois que ce retour ce qui est effectivement l'exprience, est la voie par laquelle nous pourrons restituer et redonner sa valeur vritable au terme de relation d'objet.

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    28 Novembre 1956 Table des sances J'ai fait cette semaine votre intention, des lectures de ce qu'ont crit les psychanalystes sur ce sujet qui sera le ntre cette anne, savoir l'objet, et plus spcialement cet objet dont nous avons parl la dernire fois, qui est l'objet gnital. L'objet gnital, pour l'appeler par son nom, c'est la femme, alors pourquoi ne pas l'appeler par son nom ? De sorte que c'est en somme un certain nombre de lectures sur la sexualit fminine dont je me suis gratifi. Il serait plus important que ce soit vous qui les fassiez que moi, cela vous rendrait plus ais comprendre ce que je vais tre amen vous dire ce sujet, et ensuite ces lectures sont fort instructives d'autres points de vue encore, et principalement en celui-ci que, si l'on pense la phrase bien connue de RENAN : La btise humaine donne une ide de l'infini . Je dois ajouter que s'il avait vcu de nos jours il aurait ajout : et les divagations thoriques des psychanalystes

    non pas du tout que je sois en train de les assimiler la btise

    sont un ordre de ce qui peut donner une ide de l'infini . Car en effet il est extrmement frappant de voir quelles difficults extraordinaires les esprits des diffrents analystes sont soumis, aprs les noncs eux-mmes si abrupts, si tonnants de FREUD. Mais FREUD, toujours tout seul, a apport sur ce sujet

    car c'est probablement cela que se limitera la porte de ce que je vous dirai aujourd'hui

    c'est qu'assurment s'il y a quelque chose qui doit au maximum contredire l'ide de cet objet

    que nous avons dsign tout l'heure comme un objet harmonique, un objet achevant de par sa nature la relation du sujet l'objet

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    s'il y a quelque chose qui doit le contredire, c'est - je ne dirais pas mme l'exprience analytique,

    car aprs tout l'exprience commune, les rapports de l'homme et de la femme, n'est pas une chose non problmatique : si ce n'tait pas une chose problmatique il n'y aurait pas d'analyse du tout

    - mais les formulations prcises de FREUD sont ce qui apporte le plus la notion d'un pas, d'une bance, de quelque chose qui ne va pas.

    Cela ne veut pas dire que a suffise le dfinir, mais l'affirmation positive que a ne va pas est dans FREUD

    - elle est dans le Malaise dans la civilisation, - elle est dans la leon des Nouvelles confrences sur la psychanalyse.

    Ceci nous ramne donc nous questionner sur l'objet. Je vous rappelle que l'oubli qui est fait communment de la notion d'objet n'est point si accentu dans le relief dont l'exprience et l'nonc de la doctrine freudienne situent et dfinissent cet objet :

    - objet qui d'abord se prsente toujours dans une qute de l'objet perdu,

    - et de l'objet comme tant toujours l'objet retrouv.

    - Les deux s'opposent de la faon la plus catgorique la notion de l'objet en tant qu'achevant, pour opposer la situation dans laquelle le sujet par rapport l'objet est trs prcisment l'objet pris lui-mme dans une qute, alors que c'est la notion d'un sujet autonome qu'aboutit l'ide de l'objet achevant.

    J'ai dj galement soulign la dernire fois cette notion de l'objet hallucin, de l'objet hallucin sur un fond de ralit angoissante, qui est une notion de l'objet tel qu'il surgit de l'exercice de ce que FREUD appelle le systme primaire du dsir. Et tout oppose cela dans la pratique analytique, la notion d'objet en fin de compte qui se rduit au rel. Il s'agit de retrouver le rel.

  • 28

    L'objet se dtache, non plus sur fond d'angoisse, mais sur fond de ralit commune si on peut dire, le terme de la recherche analytique tant de s'apercevoir qu'il n'y a pas de raison d'en avoir peur, autre terme qui n'est pas le mme que celui d'angoisse. Et enfin le troisime terme dans lequel il nous apparat le voir et le suivre dans FREUD, c'est ce terme de la rciprocit imaginaire, savoir que dans toute relation avec l'objet la place de termes en rapport est occupe simultanment par le sujet, que l'identification l'objet est au fond de toute relation l'objet. la vrit, ce dernier point n'est pas oubli, mais c'est videmment celui auquel la pratique de la relation d'objet dans la technique analytique moderne s'attache le plus avec comme rsultat ce que j'appellerai cet imprialisme de la signification . Puisque tu peux t'identifier moi, puisque je peux m'identifier toi, c'est assurment de nous deux le moi qui a meilleure adaptation la ralit qui est le meilleur modle. En fin de compte c'est l'identification au moi de l'analyste que se ramnera dans une pure idale le progrs de l'analyse. la vrit, je voudrais illustrer ceci pour y montrer l'extrme dviation qu'une telle partialit dans le maniement de la relation d'objet peut conditionner, en vous rappelant ceci par exemple, parce que a a t plus particulirement illustr par la pratique de la nvrose obsessionnelle. Si la nvrose obsessionnelle est

    comme le pensent la plupart de ceux qui sont ici cette notion structurante quant l'obsessionnel qui peut s'exprimer peu prs ainsi : Qu'est-ce qu'un obsessionnel ? : c'est en somme un acteur qui joue son rle, assure un certain nombre d'actes comme s'il tait mort, c'est une faon de se mettre l'abri de la mort, ce jeu auquel il se livre en quelque sorte est un jeu vivant qui consiste montrer qu'il est invulnrable.

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    Pour ceci il s'exera une sorte de domptage qui conditionne toutes ses approches autrui. On le voit dans une sorte d'exhibition pour montrer jusqu'o il peut aller dans l'exercice. Il y a tous les caractres d'un jeu, y compris les caractres illusoires : jusqu'o peut aller ce petit autre qui n'est que son alter-ego, le double de lui-mme, et ceci devant un Autre qui assiste au spectacle dans lequel il est lui-mme spectateur, car tout son plaisir du jeu et sa possibilit rsident l. Mais par contre il ne sait pas quelle place il occupe, et cest ce quil y a dinconscient chez lui. Ce qu'il fait il le fait des fins d'alibi, cela il peut l'entrevoir

    il se rend bien compte que le jeu ne se joue pas l o il est, et c'est pour cela que presque rien de ce qui se passe n'a pour lui de vritable importance

    mais pas qu'il sache d'o il voit tout cela, et en fin de compte qui est-ce qui mne le jeu. Assurment nous savons que c'est lui-mme, mais nous pouvons faire aussi mille erreurs si nous ne savons pas o il est men, ce jeu, d'o la notion d'objet, et d'objet significatif pour ce sujet. Il serait tout fait erron de croire que c'est en termes quelconques de relation duelle que cet objet peut tre dsign, bien sr avec la notion de la relation d'objet telle qu'elle est labore chez l'auteur. Vous allez voir o cela mne Mais sans doute il est bien clair que dans cette situation trs complexe, la notion de l'objet n'est pas donne immdiatement puisque ce n'est trs prcisment qu'en tant qu'il participe un jeu illusoire que ce qui est proprement parler l'objet, savoir le jeu de rtorsion agressif, ce jeu de riche, ce jeu d'aller aussi prs que possible de la mort, et en mme temps d'tre hors de la porte de tous les coups en tuant en quelque sorte l'avance chez lui-mme, et en mortifier si l'on peut dire le dsir.

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    La notion d'objet l est infiniment complexe et mrite d'tre accentue chaque instant pour que nous sachions au moins de quel objet nous parlons. Nous tcherons de donner cette notion d'objet un emploi uniforme qui permette pour nous, dans notre vocabulaire, de nous y retrouver. C'est une notion, non pas qui se drobe, mais qui se propose comme absolument difficile cerner. Pour renforcer notre comparaison, il s'agit de dmontrer une certaine chose qu'il a articule pour cet autre spectateur quil est sans le savoir, et la place duquel il nous met mesure que le transfert avance. Qu'est-ce que va faire l'analyste par cette notion de la relation d'objet ? Je vous prie de reprendre l'analyse de la lecture des observations comme reprsentant le progrs de l'analyse d'un obsd dans le cas dont je parle, chez l'auteur dont je parle4. Vous y verrez que la faon de manier la relation d'objet dans ce cas, consiste trs exactement faire quelque chose qui serait analogue de ce qui se passerait si assistant une scne de cirque o l'un et l'autre s'administrent une srie de paires de claques alternes, ceci consisterait descendre dans l'arne et s'efforcer d'avoir peur de recevoir des gifles. Au contraire c'est en vertu de son agressivit qu'il en donne et que la relation de l'entretien avec lui est une relation agressive. L-dessus, Monsieur Loyal arrive et dit : Voyons tout ceci n'est pas raisonnable, lchez, avalez donc votre bton mutuellement, comme cela vous l'aurez la bonne place, vous l'aurez intrioris. Ceci est en effet une faon de rsoudre la situation et de lui donner son issue. On peut l'accompagner d'une petite chanson, celle vraiment imprissable d'un nomm [] qui tait une sorte de gnie.

    4 Maurice Bouvet, La relation d'objet, Puf 2006, Coll. Le fil rouge.

  • 31

    On ne comprendra absolument jamais rien, ni ce que j'appelle dans cette occasion le caractre en quelque sorte sacr, en quelque sorte d'exhibition, d'office laquelle on assisterait dans cette occasion, si noire apparut-elle, mais on ne comprendra pas non plus peut-tre ce que veut dire proprement parler la relation d'objet. Apparat en filigrane le caractre et l'arrire-fond profondment oral de la relation d'objet imaginaire qui en quelque sorte nous permet de voir aussi ce que peut avoir d'troitement, de rigoureusement imaginaire une pratique qui ne peut pas chapper bien entendu aux lois de l'imaginaire, de cette relation duelle qu'il prend pour relle, car en fin de compte ce qui est l'aboutissement de cette relation d'objet c'est le fantasme d'incorporation phallique. Phallique pourquoi ? L'exprience ne suit pas la notion idale que nous pouvons avoir de son accomplissement, elle se prsente forcment en mettant d'autant plus en relief ses paradoxes, et vous le verrez, c'est aujourd'hui ce que j'introduis par le pas que j'essaye de vous faire faire, tout l'accomplissement que la relation duelle comme telle fait

    mesure qu'on s'en approche surgir au premier plan comme un objet privilgi quelque chose qui est cet objet imaginaire qui s'appelle le phallus. Toute la notion d'objet est :

    - impossible mener,

    - impossible comprendre,

    - impossible mme exercer, si l'on n'y met pas comme un lment

    je ne dis pas mdiateur car ce serait faire un pas que nous n'avons pas fait encore ensemble

    un tiers lment qui est un lment, le phallus pour tout dire.

  • 32

    Ce que je rappelle aujourd'hui au premier plan dans ce schma qu' la fin de l'anne prcdente je vous avais donn comme la fois une conclusion l'lment de l'analyse du signifiant laquelle avait men l'exploration de la psychose, mais qui tait aussi une introduction, en quelque sorte le schma inaugural de ce que cette anne je vais vous proposer concernant la relation d'objet.

    La relation imaginaire, quelle qu'elle soit, est module sur un certain rapport qui lui est effectivement fondamental, qui est le rapport mre-enfant , bien entendu avec tout ce qu'il a en lui de problmatique et assurment bien fait pour donner l'ide qu'il s'agit l d'une relation relle. En effet c'est l le point vers lequel se dirige actuellement toute l'analyse de la situation analytique qui essaye de se rduire dans les derniers termes quelque chose qui peut tre conu comme le dveloppement des relations mre-enfant avec ce qui s'en inscrit et ce qui dans la suite, dans la gense porte les traces et les reflets de cette position initiale. Il est impossible par l'examen d'un certain nombre de points de l'exprience analytique d'exercer, de donner son dveloppement

    mme chez les auteurs qui en ont fait le fondement de toute la gense analytique proprement parler

    de faire intervenir cet lment imaginaire, sans qu'au centre de la notion de la relation d'objet quelque chose que nous pouvons appeler le phallicisme de l'exprience analytique ne se montre comme un point cl.

  • 33

    Ceci est dmontr par l'exprience, par l'volution de la thorie analytique et en particulier par ce que j'essaierai de vous montrer au cours de cette confrence, savoir les impasses qui rsultent de toute tentative de rduction de ce phallicisme imaginaire quelque donne relle que ce soit, par l'absence de la trinit des termes : symbolique, imaginaire et rel. On ne peut en fin de compte que chercher

    pour retrouver l'origine de tout ce qui se passe, de toute la dialectique analytique

    on ne peut que chercher se rfrer au rel. Pour donner un dernier trait et une dernire touche ce but, cette faon dont est conduite la relation duelle dans une certaine orientation, une thorisation de l'exprience analytique, je ferai encore tout un rappel

    car cela vaut la peine d'tre not sur un point qui est prcisment l'en-tte de l'ouvrage collectif dont je vous ai parl [ La PDA, op. cit. ]. Quand l'analyste, entrant dans le jeu imaginaire de l'obsessionnel, insiste pour lui faire reconnatre son agressivit, c'est--dire lui faire situer l'analyste dans la relation duelle, dans la relation imaginaire, celle que j'appelais tout l'heure celle des rciproques, nous avons dans le texte quelque chose qui donne comme un tmoignage du refus, de la mconnaissance que le sujet a de la situation, le fait que par exemple le sujet ne veut jamais exprimer son agressivit et ne l'exprime que comme un lger agacement provoqu par la rigidit technique. L'auteur avoue ainsi qu'il insiste et qu'il ramne le sujet perptuellement ce thme, comme si c'tait l le thme central, significatif, et l'auteur ajoute d'une faon significative, Car enfin tout le monde sait bien que l'agacement et l'ironie sont de la classe des manifestations agressives , comme si c'tait vident que l'agacement ft typique et caractristique de la relation agressive comme telle, on sait que l'agression peut tre provoque par tout autre sentiment, et que par exemple un sentiment d'amour n'est pas du tout exclut comme tant au principe d'une raction d'agression.

  • 34

    Quant qualifier comme tant, de par sa nature, agressive, une raction comme celle de l'ironie, cela ne me parat pas compatible avec ce que tout le monde sait, savoir que l'ironie n'est pas une raction agressive, l'ironie est avant tout une faon de questionner, un mode de question, s'il y a un lment agressif, c'est secondairement la structure de l'lment de question quil y a dans l'ironie. Ceci vous montre quelle rduction de plan aboutit une relation d'objet dont aprs tout je prends la rsolution sous cette forme de ne plus jamais, partir de maintenant ni autrement, vous parler. Par contre nous voil amens la question : quels sont les rapports entre quiconque ? Et c'est la question la fois premire et fondamentale dont il nous faut bien partir parce qu'il nous faudra y revenir, c'est celle laquelle nous aboutirons. Toute l'ambigut de la question souleve autour de l'objet se rsume ceci :

    l'objet est-il ou non le rel ?

    La notion de l'objet, son maniement l'intrieur de l'analyse doit-il ou non

    mais nous y arrivons la fois par la voie de notre vocabulaire labor dont nous nous servons ici, symbolique, imaginaire et rel, et aussi bien par l'intuition la plus immdiate de ce que cela peut en fin de compte reprsenter pour vous spontanment, la lecture de ce que d'emble la chose reprsente pour vous quand on vous en parle

    l'objet est-il oui ou non le rel. Quand on parle de la relation d'objet, parle-t-on purement et simplement de l'accs au rel, cet accs qui doit tre la terminaison de l'analyse ? Ce qui est trouv dans le rel, est-ce l'objet ?

  • 35

    Ceci vaut la peine qu'on se le demande, car aprs tout sans mme aller au cur de la problmatique du phallicisme, de celle que j'introduis aujourd'hui, c'est--dire sans nous apercevoir d'un point vraiment saillant de l'exprience analytique par lequel un objet majeur autour duquel tourne la dialectique du dveloppement individuel, comme aussi bien toute la dialectique d'une analyse, c'est--dire un objet qui est pris comme tel, car nous verrons plus en dtail qu'il ne faut pas confondre phallus et pnis. S'il a fallu faire la distinction, si autour des annes 1920-1930 la notion du phallicisme et de la priode phallique s'est ordonne autour d'un immense interloque qui a occup toute la communaut analytique, c'est pour distinguer le pnis en tant qu'organe rel avec des fonctions que nous pouvons dfinir par certaines coordonnes relles, et le phallus dans sa fonction imaginaire. N'y aurait-il que cela, cela vaut la peine que nous nous demandions ce que la notion d'objet veut dire. Car on ne peut pas dire que cet objet ne soit pas

    dans la dialectique analytique un objet prvalent et un objet dont l'individu a l'ide comme telle, dont l'isolement

    pour n'avoir jamais t formul comme tant, proprement parler, uniquement concevable sur le plan de l'imaginaire

    n'en reprsente pas moins depuis ce que FREUD en a apport une certaine date et ce qu'a rpondu tel ou tel, et en particulier JONES

    comment la notion de phallicisme implique de dgagement de cette catgorie de l'imaginaire. C'est ce que vous verrez surgir toutes les lignes. Mais avant mme d'y entrer, posons-nous la question de ce que veut dire la relation, la position rciproque de l'objet et du rel. Il y a plus d'une faon d'aborder cette question, car ds que nous l'abordons nous nous apercevons bien que le rel a plus d'un sens.

  • 36

    Je pense que certains d'entre vous ne peuvent pas manquer de pousser un petit soupir d'aise : Enfin il va nous parler du fameux rel qui tait jusqu' prsent rest dans l'ombre . En effet nous n'avons pas nous tonner que le rel soit quelque chose qui soit la limite de notre exprience. C'est bien que ces conditions si artificielles, contrairement ce qu'on nous dit

    que c'est une situation si simple c'est une position par rapport au rel qui est bien suffisamment explique par notre exprience, nanmoins nous ne pouvons faire que nous y rfrer quand nous thorisons. Il convient alors d'apprhender ce que nous voulons dire quand en thorisant nous invoquons le rel. Il est peu probable qu'au dpart nous ayons tous de ceci la mme notion, mais il est vraisemblable que nous pouvons tous accder certaine distinction, certaine dissociation essentielle apporter quant au maniement de ce terme de rel ou de ralit, si nous regardons de prs quel usage en est fait. Quand on parle du rel on peut viser plusieurs choses. D'abord l'ensemble de ce qui se passe effectivement, c'est la notion de ralit qui est implique dans le terme allemand qui a l l'avantage de discerner dans la ralit une fonction que la langue franaise permet mal d'isoler, la Wirklichkeit. C'est ce qu'implique en soi toute possibilit d'effets, de Wirkung, de l'ensemble du mcanisme. Ici je ne ferai que quelques rflexions en passant pour montrer quel point les psychanalystes restent prisonniers de cette catgorie extrmement trangre tout ce quoi leur pratique pourtant devrait pouvoir semble-t-il les introduire, je dirais d'aise, l'endroit de cette notion mme de la ralit .

  • 37

    S'il est concevable qu'un esprit de la tradition mcano-dynamiste

    de la tradition qui remonte la tentative du XVIIIme sicle de l'laboration de L'homme-machine dans la science

    s'il est concevable que d'une certaine perspective tout ce qui se passe au niveau de la vie mentale exige que nous le rfrions quelque chose qui se propose comme matriel , en quoi ceci peut-il avoir le moindre intrt pour un analyste en tant que le principe mme de l'exercice de sa technique, de sa fonction, joue dans une succession d'effets dont il est admis par hypothse - s'il est analyste - qu'ils ont leur ordre propre et que c'est trs exactement la perspective qu'il doit en prendre s'il suit FREUD, s'il conoit ce qui dirige tout l'esprit du systme, c'est--dire une perspective nergtique ? Laissez-moi illustrer ceci par une comparaison, pour vous faire bien comprendre la fascination de ce qu'on peut trouver dans la matire, le Stoff primitif de ce qui est mis en jeu par quelque chose de tellement fascinant pour l'esprit mdical, qu'on croit dire quelque chose quand on l'affirme d'une faon gratuite que nous autres, comme tous les autres mdecins, nous mettons la base, au principe, de tout ce qui s'exerce dans l'analyse, une ralit organique, quelque chose qui en fin de compte doit se trouver dans la ralit. FREUD l'a dit aussi simplement, il faut se reporter l o il l'a dit et voir quelle fonction a a. Mais ceci reste au fond une espce de besoin de rassurance qu'on voit les analystes, au cours de leurs textes, reprendre sans cesse comme on touche du bois. En fin de compte il est bien clair que nous ne mettons pas l en jeu autre chose que des mcanismes qui sont superficiels et que tout doit se rfrer au dernier terme, quelque chose que nous saurons peut-tre un jour, qui est la matire principale qui est l'origine de tout ce qui se passe.

  • 38

    Laissez-moi faire une simple comparaison pour vous montrer l'espce d'absurdit, ceci pour un analyste, si tant est qu'il admette l'ordre dans lequel il se dplace, l'ordre d'effectivit, c'est cela la premire notion de ralit : c'est peu prs comme si quelqu'un qui a s'occuper d'une usine hydrolectrique qui est en plein milieu du courant d'un grand fleuve, le Rhin par exemple, prouvait que pour comprendre, pour parler de ce qui se passe dans cette machine

    dans la machine s'accumule ce qui est au principe de l'accumulation d'une nergie quelconque, en l'occasion cette force lectrique qui peut ensuite tre distribue et mise la disposition des consommateurs

    c'est trs prcisment quelque chose qui a le plus troit rapport avec la machine avant tout, et que non seulement on ne dira rien de plus, mais qu'on ne dira littralement rien du tout en rvant au moment o le paysage tait encore vierge, o les flots du Rhin coulaient d'abondance Mais dire qu'il y a quelque chose en quoi que ce soit qui nous avance de dire que l'nergie tait en quelque sorte dj l l'tat virtuel dans le courant du fleuve, c'est dire quelque chose qui ne veut proprement parler rien dire. Car l'nergie ne commence nous intresser dans cette occasion qu' partir du moment o elle est accumule, et elle n'est accumule qu' partir du moment o les machines se sont mises s'exercer d'une certaine faon, sans doute animes par une chose qui est une sorte de propulsion dfinitive qui vient du courant du fleuve. Mais la rfrence au courant du fleuve comme tant l'ordre primitif de cette nergie ne peut venir prcisment qu' l'ide de quelqu'un qui serait entirement fou, et une notion proprement parler de l'ordre du mana concernant cette chose d'un ordre bien diffrent qu'est l'nergie, et mme qu'est la force, et qui voudrait toute force retrouver la permanence de ce qui est la fin accumul comme l'lment de Wirkung, de Wirklichkeit possible avec quelque chose qui serait l en quelque sorte de toute ternit.

  • 39

    En d'autres termes cette sorte de besoin que nous avons de penser, de confondre le Stoff ou la matire primitive ou l'impulsion ou le flux ou la tendance avec ce qui est rellement en jeu dans l'exercice de la ralit analytique, est quelque chose qui ne reprsente rien d'autre qu'une mconnaissance de la Wirklichkeit symbolique. C'est savoir que c'est justement dans le conflit, dans la dialectique, dans l'organisation et la structuration d'lments qui se composent, qui s'difient, que cette composition et cette dification donnent ce dont il s'agit une toute autre porte nergtique. C'est mconnatre la ralit propre dans laquelle nous nous dplaons que de conserver ce besoin de parler de la ralit dernire comme si elle tait ailleurs que dans cet exercice mme. Il y a un autre usage de la notion de ralit qui est fait dans l'analyse

    celui-la beaucoup plus important n'a rien faire avec cette rfrence que je peux vraiment qualifier dans cette occasion de superstitieuse, qui est une sorte de squelle, de postulat dit organiciste qui ne peut littralement dans la perspective analytique avoir aucun sens. Je vous montrerai qu'il n'a plus aucun sens dans cet ordre l o FREUD apparemment en fait tat

    l'autre question, dans la relation d'objet, de la ralit, est celle qui est mise en jeu dans le double principe : principe de plaisir et principe de ralit. Il s'agit l de quelque chose de tout fait diffrent car il est bien clair que le principe de plaisir n'est pas quelque chose qui s'exerce d'une faon moins relle - je pense mme que l'analyse est faite pour dmontrer le contraire. Ici l'usage du terme de ralit est tout autre. Il y a quelque chose d'assez frappant, c'est que cet usage qui s'est rvl au dpart si fcond, qui a permis les termes de systme primaire et de systme secondaire dans l'ordre du psychisme, mesure qu'avanait le progrs de l'analyse s'est rvl plus problmatique, mais d'une faon en quelque sorte trs fuyante.

  • 40

    Pour s'apercevoir de la distance parcourue entre le premier usage qui a t fait de l'opposition de ces deux principes et le point o nous en arrivons maintenant avec un certain glissement, il faut presque se rfrer ce qui arrive de temps en temps : l'enfant qui dit que le roi est tout nu

    - est-il un bent, - est-il un gnie, - est-il un luron, - est-il un froce ?

    Personne n'en saura jamais rien. C'est assurment quelqu'un d'assez librateur de toute faon, et il arrive des choses comme cela, des analystes reviennent une espce d'intuition primitive que tout ce qu'on tait en train de dire jusque l n'expliquait rien. C'est ce qui est arriv D.W. WINNICOTT5, il a fait un petit article pour parler de ce qu'il appelle le transitional object . Pensons transition d'objet ou phnomne transitionnel. Il fait simplement remarquer qu' mesure que nous nous intressons plus la fonction de la mre comme tant absolument primordiale, dcisive dans l'apprhension de la ralit par l'enfant, c'est--dire mesure que nous avons substitu l'opposition dialectique et impersonnelle des deux principes, le principe de ralit et le principe de plaisir, quelque chose quoi nous avons donn des acteurs, des sujets, sans doute sont-ce des sujets bien idaux sans doute sont-ce des acteurs qui ressemblent beaucoup plus une sorte de figuration ou de guignol imaginaire, mais c'est l que nous en sommes venus :

    - ce principe de plaisir nous l'avons identifi avec une certaine relation d'objet, savoir le sein maternel,

    - ce principe de ralit nous l'avons identifi avec le fait que l'enfant doit apprendre s'en passer.

    5 Donald Woods Winnicott, Transitional objects and transitional phenomena, 1953 ; Les objets transitionnels, Payot 2010.

  • 41

    Trs justement Monsieur WINNICOTT fait remarquer qu'en fin de compte si tout se passe bien

    car il est important que tout se passe bien, nous en sommes faire driver tout ce qui va mal dans une anomalie primordiale, dans la frustration, le terme de frustration devenant dans notre dialectique le terme cl

    WINNICOTT fait remarquer qu'en somme tout va se passer comme si au dpart, pour que les choses se passent bien, savoir pour que l'enfant ne soit pas traumatis, il fallait que la mre opre en tant toujours l au moment qu'il faut, c'est--dire prcisment en venant placer l'endroit, au moment de l'hallucination dlirante, l'objet rel qui le comble. II n'y a donc au dpart aucune espce de distinction dans la relation mre-enfant idale entre :

    - l'hallucination surgie par principe de la notion que nous avons du systme primaire, l'hallucination surgie du sein maternel,

    - et l'accomplissement rel, la rencontre de l'objet rel dont il s'agit.

    Il n'y a donc au dpart, si tout se passe bien, aucun moyen pour l'enfant de distinguer :

    - ce qui est de l'ordre de la satisfaction fonde sur l'hallucination qui est celle qui est lie l'exercice et au fonctionnement du systme primaire,

    - et l'apprhension du rel qui le comble et le satisfait effectivement.

    Tout ce dont il va s'agir, c'est que progressivement la mre apprenne l'enfant subir ces frustrations, du mme coup percevoir sous la forme d'une certaine tension inaugurale la diffrence qu'il y a entre la ralit et l'illusion. Et la diffrence ne peut s'exercer que par la voie d'un dsillusionnement, c'est--dire que de temps en temps ne concide pas la ralit avec l'hallucination surgie du dsir.

  • 42

    WINNICOTT fait simplement remarquer que le fait premier c'est qu'il est strictement inconcevable l'intrieur d'une telle dialectique ceci : comment quoi que ce soit pourrait s'laborer qui aille plus loin que la notion d'un objet strictement correspondant au dsir primaire, et que l'extrme diversit des objets, tant instrumentaux que fantasmatiques, qui interviennent dans le dveloppement du champ du dsir humain sont strictement impensables dans une telle dialectique partir du moment o on l'incarne en deux acteurs rels, la mre et l'enfant. La deuxime chose est un fait strictement d'exprience : c'est que mme chez le plus petit enfant, nous voyons apparatre ces objets qu'il appelle transitionnels dont nous ne pouvons dire de quel ct ils se situent dans cette dialectique, cette dialectique rduite, cette dialectique incarne de l'hallucination et de l'objet rel, c'est savoir ce qu'il appelle les objets transitionnels. Nommment pour les illustrer : tous ces objets du jeu de l'enfant, les jouets proprement parler

    l'enfant n'a pas besoin qu'on lui en donne pour qu'il en fasse avec tout ce qui lui tombe sous la main

    ce sont les objets transitionnels propos desquels il n'y a pas de question poser s'ils sont plus subjectifs ou plus objectifs, ils sont d'une autre nature dont WINNICOTT ne franchit pas la limite. Pour les nommer, nous les appellerons tout simplement imaginaires. Nous serons tout de suite tellement bien dans l'imaginaire que nous voyons

    travers les travaux certainement trs hsitants, trs plein de dtours, trs plein de confusion aussi des auteurs

    nous voyons que c'est quand mme toujours ces objets que sont ramens les auteurs qui par exemple cherchent s'expliquer l'origine d'un fait comme l'existence du ftiche, du ftiche sexuel, comment ils sont amens faire autant qu'ils le peuvent, voir quels sont les points communs qu'il y a avec le ftiche, qui vient occuper le premier plan des exigences objectales pour la satisfaction majeure qu'il peut y avoir pour un sujet, savoir la satisfaction sexuelle.

  • 43

    Ils sont amens chercher, pier chez l'enfant le maniement un tant soit peu privilgi d'un menu objet

    - d'un mouchoir drob sa mre, - d'un coin de drap de lit, - de quelque part accidentelle de la ralit

    mise la porte de la prise de l'enfant, et qui apparat dans cette priode

    qui, pour tre appele ici transitionnelle, ne constitue pas une priode intermdiaire mais une priode permanente du dveloppement de l'enfant

    ils sont amens l presque les confondre sans se demander la distance qu'il peut y avoir entre l'rotisation de cet objet et la premire apparition de cet objet en tant qu'imaginaire. Ici ce que nous voyons c'est ce qui est oubli dans une telle dialectique

    oubli qui bien entendu oblige ces formes de supplmentation sur lesquelles je mets l'accent propos de l'article de WINNICOTT

    ce qui est oubli, c'est qu'un ressort des plus essentiel de toute l'exprience analytique - et ceci depuis le dbut - c'est la notion du manque de l'objet, ce qui n'est pas tout fait la mme chose. Et je vous rappelle que les choses sont alles dans un certain sens, que jamais dans notre exercice concret de la thorie analytique nous ne pouvons nous passer d'une notion de manque de l'objet comme centrale, non pas comme d'un ngatif, mais comme du ressort mme de la relation du sujet au monde. L'analyse commence ds son dpart, l'analyse de la nvrose, commence par la notion

    si paradoxale qu'on peut dire qu'elle n'est pas encore compltement labore

    de la castration. Nous croyons que nous en parlons toujours, comme on en parlait au temps de FREUD, c'est tout fait une erreur, nous en parlons de moins en moins, nous avons tort d'ailleurs parce que ce dont nous parlons beaucoup plus c'est de la notion de frustration.

  • 44

    Il y a encore un tiers terme dont on commence parler, ou plus exactement dont nous verrons comment ncessairement la notion a t introduite, et dans quelle voie et par quelle exigence, c'est la notion de privation. Ce ne sont pas du tout trois choses quivalentes. Pour les distinguer je voudrais vous faire quelques remarques qui sont simplement pour essayer d'abord de vous faire comprendre ce que c'est. Bien entendu il faut commencer par ce qui nous est le plus familier de par l'usage, c'est--dire la notion de frustration. Quelle diffrence y a-t-il entre une frustration et une privation ? Il faut bien partir de l puisqu'on en est introduire la notion de privation et dire que dans le psychisme ces deux notions sont prouves de la mme faon. C'est quelque chose de trs hardi, mais il est clair que la privation, nous aurons nous y rfrer pour autant que si le phallicisme

    savoir l'exigence du phallus est comme le dit FREUD, le point majeur de tout le jeu imaginaire dans le progrs conflictuel qui est celui que dcrit l'analyse du sujet, on ne peut parler

    propos de tout autre chose que de l'imaginaire, savoir le rel

    on ne peut parler dans son cas que de privation. Ce n'est pas par l que l'exigence phallique s'exerce. Car une des choses qui apparat des plus problmatiques, c'est comment un tre prsent comme une totalit peut se sentir priv de quelque chose que par dfinition il n'a pas ? Nous dirons que la privation c'est essentiellement quelque chose qui, dans sa nature de manque, est un manque rel, c'est un trou. La notion que nous avons de la frustration simplement en nous rfrant l'usage qui est fait effectivement de ces notions quand nous en parlons, c'est la notion d'un dam.

  • 45

    C'est une lsion, un dommage. Ce dommage tel que nous avons l'habitude de le voir s'exercer, la faon dont nous le faisons entrer en jeu dans notre dialectique, il ne s'agit jamais que d'un dam imaginaire. La frustration est par essence le domaine de la revendication, la dimension de quelque chose qui est dsir et qui n'est pas tenu, mais qui est dsir sans aucune rfrence aucune possibilit, ni de satisfaction, ni d'acquisition. La frustration est par elle-mme le domaine des exigences effrnes, le domaine des exigences sans loi. Le centre de la notion de frustration, en tant qu'elle est une des catgories du manque, est un dam imaginaire. C'est sur le plan imaginaire que se situe la frustration. Il nous est peut-tre plus facile partir de ces deux remarques de nous apercevoir que la castration

    dont je vous rpte la nature, savoir la nature essentielle de drame

    la castration a t beaucoup plus abandonne, dlaisse, qu'elle n'a t approfondie. Il suffit, pour l'introduire pour nous - et de la faon la plus vive - de dire que c'est d'une faon absolument coordonne la notion de la loi primordiale, de ce qu'il y a de loi fondamentale dans l'interdiction de l'inceste et dans la structure de l'dipe, que la castration a t introduite par FREUD, sans doute par quelque chose qui reprsente en fin de compte

    si nous y pensons maintenant le sens de ce qui a t d'abord nonc par FREUD. Ceci a t fait par une espce de saut mortel dans l'exprience. Qu'il ait mis quelque chose d'aussi paradoxal que la castration au centre de la crise dcisive, de la crise formatrice, de la crise majeure qu'est l'dipe, c'est quelque chose dont nous ne pouvons que nous merveiller aprs coup, car c'est certainement merveilleux que nous ne songions qu' ne pas en parler. La castration est quelque chose qui ne peut que se classer dans la catgorie de la dette symbolique.

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    La distance qu'il y a entre :

    - dette symbolique, - dette imaginaire, - et trou, absence relle,

    est quelque chose qui nous permet de situer ces trois lments, ces trois lments que nous appellerons les trois termes de rfrence du manque de l'objet. Ceci sans doute peut peut-tre paratre certains ne pas aller sans quelque rserve. Ils auront raison parce qu'en ralit il faut se tenir fortement la notion centrale qu'il s'agit de catgories de manque de l'objet, pour que ceci soit valable. Je dis de manque de l'objet mais non pas d'objet, car si nous nous plaons au niveau de l'objet nous allons pouvoir nous poser la question de : qu'est-ce que l'objet qui manque dans ces trois cas ? C'est au niveau de la castration que c'est tout de suite le plus clair :

    - ce qui manque au niveau de la castration en tant qu'elle est constitue par la dette symbolique,

    - le quelque chose qui sanctionne la loi, - le quelque chose qui lui donne son support et son

    inverse, ce qui est la punition, il est tout fait clair que dans notre exprience analytique ce n'est pas un objet rel. Il n'y a que dans la loi de Manou qu'on dit que celui qui aura couch avec sa mre se coupe les gnitoires, et les tenant dans sa main s'en aille tout droit vers l'ouest jusqu' ce que mort s'en suive. Nous n'avons jusqu' nouvel ordre observ ces choses que dans des cas excessivement rares qui n'ont rien faire avec notre exprience, et qui nous paraissent mriter des explications qui restent d'ailleurs d'un bien autre ordre que celui des mcanismes structurants et normalisants ordinairement mis en jeu dans notre exprience. L'objet est imaginaire, la castration dont il s'agit est toujours un objet imaginaire.

  • 47

    Ce qui nous a facilit croire que la frustration tait quelque chose qui devait nous permettre d'aller bien plus aisment au cur des problmes, c'est cette communaut qu'il y a entre le caractre imaginaire de l'objet de la castration et le fait que la frustration est un manque imaginaire de l'objet. Or il n'est pas du tout oblig que le manque et l'objet et mme un troisime terme que nous allons appeler l'agent, soient du mme niveau dans ces catgories. En fait l'objet de la castration est un objet imaginaire c'est ce qui doit nous faire poser la question de ce qu'est le phallus que l'on a mis tant de temps identifier en tant que tel. Par contre l'objet de la frustration est bel et bien

    toute imaginaire que soit la frustration dans sa nature un objet rel, c'est toujours de quelque chose de rel que pour l'enfant, par exemple que pour le sujet lu de notre dialectique de la frustration, c'est bel et bien un objet rel qui est en mal. Ceci nous aidera parfaitement nous apercevoir

    ce qui est une vidence pour laquelle il faut un peu plus de maniement mtaphysique des termes que l'on a l'habitude de le faire quand on se rfre prcisment ces critres de ralit dont nous parlions tout l'heure

    c'est qu'il est bien clair que l'objet de la privation, lui, n'est jamais qu'un objet symbolique. Ceci est tout fait clair. Ce qui est de l'ordre de la privation, ce qui n'est pas sa place ou justement, ce qui ne l'est pas du point de vue du rel, a ne veut absolument rien dire. Tout ce qui est rel est toujours et obligatoirement sa place, mme quand on le drange. Le rel a pour proprit d'abord de porter sa place la semelle de ses souliers, vous pouvez bouleverser tant que vous voudrez le rel, il n'en reste pas moins que nos corps seront aprs leur explosion encore leur place, leur place de morceaux.

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    L'absence de quelque chose dans le rel est une chose purement symbolique, c'est--dire pour autant que nous dfinissions par la loi que a devrait tre l, c'est qu'un objet manque sa place. Pensez comme rfrence qu'il n'y en a pas de meilleure que celle de penser ce qui se passe quand vous demandez un livre dans une bibliothque, on vous dit qu'il manque sa place, il peut tre juste ct, il n'en reste pas moins qu'en principe il manque sa place, il est par principe invisible, cela ne veut pas dire que le bibliothcaire vit dans un monde entirement symbolique. Quand nous parlons de privation, il s'agit d'objets symboliques et de rien d'autre. Ceci peut paratre un peu abstrait, mais vous verrez combien cela nous servira dans la suite pour dtecter ces sortes de tours de passe-passe grce quoi on donne des solutions qui n'en sont pas des problmes qui sont de faux problmes. Autrement dit, grce quoi dans la suite, dans la dialectique de ce qui se discute pour arriver rompre avec ce qui parat intolrable, qui est l'volution compltement diffrente de ce qu'on appelle la sexualit dans les termes analytiques chez l'homme et chez la femme, les efforts dsesprs pour ramener les deux termes un seul principe alors que peut-tre ds le dpart il y a quelque chose qui permet d'expliquer et de concevoir d'une faon trs simple et trs claire pourquoi leurs volutions seront trs diffrentes. Je veux simplement y ajouter quelque chose qui va trouver galement sa porte, c'est la notion d'un agent. Je sais qu'ici je fais un saut qui ncessiterait que j'en revienne la triade imaginaire de la mre, de l'enfant et du phallus, mais je n'ai pas le temps de le faire, je veux simplement complter le tableau.

  • 49

    L'agent lui aussi va jouer son rle dans ce manque de l'objet, car pour la frustration nous avons la notion prminente que c'est la mre qui joue le rle. Qu'est-ce que l'agent de la frustration ? Est-il symbolique, imaginaire ou rel ? Qu'est-ce que l'agent de la privation ? C'est--dire en fin de compte est-ce quelque chose qui n'a aucune espce d'existence relle comme je l'ai fait remarquer tout l'heure ? Voil des questions qui mritent tout au moins qu'on les pose. Je vais laisser, la fin de cette sance, ouverte cette question, car s'il est bien clair que la rponse pourrait peut-tre ici s'amorcer, voire se dduire d'une faon tout fait formelle, elle ne saurait en aucun cas, au point o nous en sommes, tre satisfaisante parce que prcisment la notion de l'agent est quelque chose qui sort tout fait du cadre de ce quoi nous nous sommes limits aujourd'hui, savoir d'une premire question comportant les rapports de l'objet et du rel. L'agent est manifestement ici quelque chose qui est d'un autre ordre. Nanmoins vous voyez que la question de la qualification de l'agent ces trois niveaux est une question qui manifestement est suggre par le commencement de la construction du phallus.

  • 50

    05 Dcembre 1956 Table des sances Mesdames, Messieurs, vous avez entendu hier soir des interventions sur un sujet : L'image du corps. Les circonstances ont voulu que sur certaines d'entre elles je n'ai pas dit autre chose que l'affirmation gnrale du bien que j'en pensais, et si j'avais d en parler c'et t pour le situer par rapport ce que nous faisons ici, c'est--dire en somme pour faire de l'enseignement. C'est une chose laquelle je rpugne dans un contexte de travail scientifique qui est vraiment d'une toute autre nature, et je ne suis pas fch de n'avoir pas eu en parler. Mais enfin, pour partir de cette image du corps comme elle nous a t prsente hier soir, je pense que pour la situer par rapport ce que nous faisons, vous savez tous suffisamment cette chose vidente au premier chef : qu'elle n'est pas un objet. On y a parl d'objet pour tenter de dfinir les stades, et en effet la notion d'objet est importante, mais non seulement cette image du corps telle que vous l'avez vue prsente hier soir n'est pas un objet, mais je dirais que ce qui permettra le mieux de la situer l'encontre d'autres formations imaginaires, c'est qu'elle ne saurait elle-mme devenir un objet. C'est une trs simple remarque qui n'a t faite directement par personne, si ce n'est d'une faon en quelque sorte indirecte. Car si nous avons affaire, dans l'exprience analytique, des objets propos desquels nous pouvons nous poser la question de leur nature imaginaire

    je n'ai pas dit qu'ils l'taient, je dis que c'est justement la question que nous nous posons ici

  • 51

    si c'est le point central d'o nous nous plaons pour introduire au niveau de la clinique ce qui nous intresse dans la notion de l'objet, cela ne veut pas dire non plus que c'est un point o nous nous tenons : savoir que nous partons de l'hypothse de l'objet imaginaire Nous en partons mme si peu que c'est la question que nous nous posons. Mais cet objet possiblement imaginaire tel qu'il nous est donn en fait dans l'exprience analytique, est dj pour vous connu : pour fixer les ides j'ai dj pris deux exemples sur lesquels j'ai dit que j'allais me centrer : la phobie et le ftiche. Voil des objets qui sont loin jusqu' prsent - vous auriez tort de le croire - d'avoir rvl leur secret. quelque exercice, acrobatie, contorsion, gense fantasmatique qu'on se soit livr, il reste quand mme assez mystrieux qu' certaines poques de la vie des enfants, mles ou femelles, ils se croient obligs d'avoir peur des lions, ce qui n'est pas un objet rencontr d'une faon excessivement commune dans leur exprience. Il est difficile den faire surgir la forme dune espce de donne primitive par exemple inscrite dans l'image du corps. On peut tout faire, il reste quand mme un rsidu. Ce sont toujours les rsidus dans les explications scientifiques qui sont ce qu'il y a de plus fcond considrer, en tout cas ce n'est srement pas en les escamotant qu'on fait progresser. De mme vous avez pu remarquer qu'il reste tout de mme partout assez clair que le nombre de ftiches sexuels est assez limit. Pourquoi ? Quand vous tes sorti des chaussures qui tiennent l un rle tellement tonnant qu'on peut se demander comment il se fait qu'on