le retour du bois dans l'architecture contemporaine
DESCRIPTION
Questionnement critique sur sa significationTRANSCRIPT
L E R E T O U R D U B O I S D A N S L ’A R C H I T E C T U R E C O N T E M P O R A I N E
QUESTIONNEMENT CRITIQUE SUR SA SIGNIFICATION
GORCEA RAZVAN – GEORGE
E.N.S.A.P.L.V. MEMOIRE RECHERCHE, 2010/2011. COORDINATION:
CHRIS YOUNES, ERIC DANIEL-LACOMBE, CATHERINE ZAHARIA, ANNE TUSCHER, EDOUARD ROPARS
L E R E T O U R D U B O I S D A N S L ’A R C H I T E C T U R E C O N T E M P O R A I N E
QUESTIONNEMENT CRITIQUE SUR SA SIGNIFICATION
GORCEA RAZVAN – GEORGE
E.N.S.A.P.L.V. MEMOIRE RECHERCHE, 2010/2011. COORDINATION:
CHRIS YOUNES, ERIC DANIEL-LACOMBE, CATHERINE ZAHARIA, ANNE TUSCHER, EDOUARD ROPARS
«CHACUN DES MATERIAUX A UNE SIGNIFICATION EN FONCTION DE SA PROPRE NATURE […], FAIRE MAUVAIS USAGE D’UN MATERIAU, C’EST
MALMENER L’INTEGRALITE DU PROJET DANS SON ENSEMBLE»
F. L. Wright, 1957, « Testament » IX. Matériaux, p. 196
SOMMAIRE
INTRODUCTION
PAR TIE A : THE ORIES E T ARC HITEC TE S P A G E 5
LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
A.1. LA SI GNI FICATIO N D ’UN MAT ERIAU EN AR CHI T ECTUR E A.2. LE BOI S PO UR LES MAITR E S DE L ’AR CHIT ECT UR E OR GANIQ UE A.3. A L ’ER E DU DEV ELOPP EMENT DUR ABL E - UN E NOUVELLE SIGNI FICATIO N I MPOS E E
PAR TIE B : CUL TUR ES DU B OIS P A G E 31
LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS
B.1. UN US AGE V ERNACULAI R E B.2. L’ IN FLUEN CE CULTUR ELLE ASI ATIQUE B.3. PA R ADO X ES ET M UT ATION DES R AP PORT S AU BOI S
PAR TIE C : LIM ITES DU BOIS P A G E 64
PERISSABLE / VIVANT / RENOUVELABLE
C.1. L’O PPO SITION HIS TORIQ U E DU BOI S FACE A LA PI ER R E C.2. LE CAR A CT ERE VI VANT DU BOI S C.3. LE BOI S – UNE R ES SOUR CE V R AI MENT R EN OUV ELABL E ?
CONCLUSION
EXE MPL IFIC ATION : PR O J E T D E F I N D ’E T U D E S P A G E 84
LE SOL , L ’ARBRE , LE BOIS – ELEMENTS D ’UN PROJET URBAIN
BIBLIOGRAPHIE ET INDEX
3
Introduction
Depuis quelques années le bois se réclame le matériau de l’avenir. Plusieurs types de
raisonnement sont à la base de cette attribution. Le bois est privilégié en tant que
ressource renouvelable, économise l’énergie avec des faibles émissions de CO2 dans le
processus de la production, tout en protégeant l’environnement et le climat1.
Mais dans ce contexte énoncé, du développement durable, il faut élargir le champ de
vision, car cette « image du bois » a de nouvelles significations, qui suscitent des
dimensions psychologiques, sociales et culturelles, environnementales et
technologiques.
Est-ce qu’on parle d’un vrai retour de l’ancestral matériau bois ou s’agit-il d’un nouveau
matériau qui peut se substituer aux actuels, trop énergivores et polluants? Il semble que
l’on soit face à un matériau dont la signification est déjà donnée et même imposée.
Quelques architectes, comme Frank Lloyd Wright, Alvar Aalto, Christian Norberg-Schulz
ou Peter Zumthor ont attiré l’attention sur l’importance des matériaux et de la
signification dans l’architecture. Qu’apport-le débat contemporain aux significations du
bois dans l’architecture ? Comment les théories, la philosophie, la politique influencent-
elles la perception d’un matériau ?
Le lien intime du bois avec l’homme facilite ce retour « écologique » dans le contexte
actuel, car le bois est généralement aimé pour sa beauté et ses qualités naturelles. Long
temps utilisé par l’homme, il a fait l’objet d’approches vernaculaires variées et
contrastées. Ces traditions de la construction en bois sont aussi entrées dans un
processus de transformation de sens. Que peut-on apprendre aujourd’hui de ces
différentes approches culturelles et comment peuvent-elles influencer l’emploi du bois
dans l’architecture contemporaine ?
1 Thomas Herzog, Julius Natterer, Roland Schweitzer, « Construire en bois, c’est
l’avenir » dans Construire en bois - Conception et construction, éd. Birkhausen, Bâle, 2005, p.p. 47-49
4
Enfin, si on parle de l’héritage d’un matériau, il faut comprendre et reconnaître les
limites et les faiblesses du bois, pourquoi et comment il a perdu sa place face à la terre
cuite, la pierre ou le béton. Comment les différences fondamentales, notamment la
durée de vie et sa non-pérennité, l’ont distingué et éloigné historiquement et
culturellement de l’architecture des tombes, des monuments - l’architecture éternelle.
Cette non-pérennité du bois est mise en balance avec la capacité de régénération des
forêts, l’avantage renouvelable du bois à un relatif court terme. Mais aujourd’hui cette
équation renvoie à la gestion durable et soutenable des forêts à l’échelle mondiale,
forêts qui restent les principaux transformateurs de CO2 émis par l’homme dans
l’atmosphère. Cet équilibre reste sensible et complexe et faire mauvais usage de ce
matériau peut facilement détruire les valeurs mêmes qui créent sa célébrité. Le bois
peut facilement devenir qu’une « étiquette verte », au prix de banaliser ses propriétés
et finalement de tomber dans une utopie ou même, un échec écologique.
En l’absence, à ma connaissance, d’un ouvrage qui élargit le débat sur ce « retour » du
bois dans l’architecture contemporaine, j’essaie de développer un questionnement
critique sur cette « nouvelle » signification, celle d’une ressource « renouvelable et
écologique ».
En dépassant les limites habituelles centrées sur l’utilisation effective du bois dans la
construction, on crée une structuration complexe, en relevant les influences des
théories des architectes sur les significations des matériaux, le rapport de l’homme au
matériau dans certaines cultures du bois dans le monde, et finalement l’impact des
limites du bois dans la perception contemporaine de ce matériau.
MOTS– CLEFS Matériaux, Développement Durable, Bois, Signification, Théories, Nouvelles
Technologies, Culturel, Architecture Vernaculaire, Propriétés, Renouvelable.
PARTIE A : THEORIES ET ARCHITECTES
LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
PA R T I E A : THEOR IE S E T ARC HITEC TE S
LES SIGNIFICATIONS DU BOIS A.1. Signification d’un matériau en architecture ........................................................................ 7
La signification dans l’architecture ..................................................................................... 7
La nature des matériaux : Frank Lloyd Wright ................................................................... 8
La sincérité des matériaux : Louis Kahn ............................................................................. 9
La métaphore des matériaux : Herzog et de Meuron ...................................................... 10
La tangibilité des matériaux : Peter Zumthor ................................................................... 10
A.2 Le bois pour les maitres de l’architecture organique .......................................................... 11
Frank Lloyd Wright .................................................................................................................... 12
Le neuvième principe d’une architecture organique ....................................................... 12
La beauté interne du bois ................................................................................................ 12
Le bois et la machine ........................................................................................................ 13
La structure en bois dissimulée ........................................................................................ 14
Moins de bois = plus d’arbres .......................................................................................... 15
Protéger et respecter le bois ............................................................................................ 15
Alvar Aalto................................................................................................................................. 16
Héritier de la culture finlandaise ...................................................................................... 16
Rapprochement de la nature et de l’humain ................................................................... 16
Explorations de toutes les propriétés du bois .................................................................. 17
A.3. A l’ère du Développement Durable - une nouvelle signification imposée .......................... 18
Le Développement Durable ............................................................................................. 18
Les atouts « renouvelables » du bois ............................................................................... 19
De quel bois parle-t-on ? .................................................................................................. 19
Un nouveau matériau pour remplacer les actuels ........................................................... 20
Le « green washing » du bois ........................................................................................... 21
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
7
A.1. SIGNIFICATION D ’UN MATERIAU EN ARCHITECTURE
Signification1 = I. A. − Ce que signifie, manifeste ou indique une chose, un fait
matériel. Synonyme sens Signification du monde, de la mort, de l'univers, de la vie; signification d'un événement, des choses. B. − 1. Ce que signifie un ensemble de signes, un propos ou un texte. Signification d'une expression, d'une leçon, d'un mythe, d'un oracle, d'une phrase, d'une prophétie; comprendre, pénétrer la signification d'un texte. Sens assignable. Propos sans signification.
2. a) [À propos d'un signe linguistique, d'un mot] Sens déterminé et spécifique. Les différentes significations d'un mot; mot pris dans toute sa signification; donner une signification à un mot.
3. [À propos d'une notion, d'un principe, d'une théorie] Sens, valeur. Emprunté au lat. significatio « indication, annonce, signal, allusion, sens (d'un mot),
acception », dérivé de significatum, supin de significare (signifier)
LA SI GNI FI CATION DAN S L ’AR CHI T ECTUR E
Avant de proprement parler de la signification des matériaux, il me semble important
d’introduire quelques repères en ce qui concerne la signification et la symbolique dans
l’architecture, exemples qui ont influencé radicalement la manière de penser et
d’enseigner l’architecture.
Dans les années 1970, le professeur Christian Norberg-Schulz propose une façon
nouvelle de regarder l’architecture occidentale. Il prend comme prémisse l’utilisation de
l’architecture par l’homme en tant que moyen symbolique, pour apporter ordre et
signification dans les relations entre lui-même et son environnement. Il montre que
l’architecture de différentes périodes culturelles est, dans chaque cas, l’expression
physique des croyances religieuses et philosophiques régnantes. Il base sa
démonstration en examinant soigneusement toutes les époques principales de l’art
occidental, de l’Egypte ancienne jusqu’aux années soixante.
« L’architecture est un phénomène concret. […]
Depuis des temps reculés, l’architecture a aidé l’homme à rendre son existence
signifiante. A l’aide de l’architecture il a obtenu une assise dans l’espace et dans le
temps. L’architecture a donc un objectif qui dépasse la satisfaction des besoins pratiques
et économiques. Son objet est la définition des significations existentielles […]
L’architecture devrait être comprise en termes de formes signifiantes (symboliques).
Comme telle, elle participerait à l’histoire des significations existentielles. Aujourd’hui,
l’homme éprouve l’urgence d’une reconquête de l’architecture en tant que phénomène
concret. »
1 CNRTL 2009
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
8
(Christian Norberg-Schulz / Oslo, Janvier 1974)
On s’aperçoit que cette façon de penser l’architecture face à l’existence humaine est
difficile à analyser dans un temps actuel, contemporain, quelque soit l’époque, car les
changements produits sont difficilement quantifiables sur leur importance, révélée dans
le temps. Dans la même période postmoderne, de l’autre coté de l’océan, une autre
réclamation du « symbolisme oublié de la forme architecturale » apparaît. Il s’agit de
Robert Venturi et son livre « Learning from Las Vegas », paru en 1972 et complété en
1977.
Cette fois il s’agit de la critique clairement exprimé d’un néo-modernisme qui mène à
une perte de signification de la forme architecturale. Cette fois le discours est basé
moins sur des périodes passées de l’histoire, que sur l’exemple de Las Vegas, un cas
contemporain dans un développement plutôt vernaculaire. La question du monument et
du symbolisme en architecture tourne autour de l’analyse et montre le changement
produit dans le symbolisme et la forme architecturale, corrélé au changement de la
société américaine après la deuxième guerre mondiale.
Dans la même optique j’essaie de tourner la question des matériaux dans l’architecture
contemporaine, autour de la signification du bois en tant qu’enseigne pour « le
bâtiment vert », « le monument écologique ».
LA NATUR E DES MAT ER IAUX : FR ANK LLOY D WRI GHT
Mais lorsqu’il s’agit des matériaux, il faut d’abord explorer le rôle que peut jouer un
matériau dans l’architecture et avec quelle implication, quelle signification.
L’américain Frank Lloyd Wright fut le premier à avoir traité la question de la signification
des matériaux. En 1928, il publie à New York une série d’articles sur la nature des
matériaux dans la construction pour la revue « The Architectural Record ». Il avait « un
sujet de son choix ». « J’ai choisi « La nature des matériaux », étonné de voir, en
commençant mes recherches, que rien n’avait jamais été écrit sur ce sujet en quelque
langue que ce soit.
« Tous les matériaux utilisables dans la construction sont aujourd’hui plus importants
que jamais. Chacun d’entre eux a une signification en fonction de sa propre nature.
Les vieux matériaux, comme les nouveaux, apportent leur contribution à l’élaboration
de la forme, du caractère et de la qualité de chaque bâtiment. Un matériau bien choisi
peut déterminer le style ; faire mauvais usage d’un matériau, c’est malmener
l’intégralité du projet dans son ensemble. »2
2 Wright, Frank Lloyd. Testament. Traduit par Claude Massu. Marseille: Éd. Parenthèses,
2005 (original 1957). P.p. 196
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
9
Nature 3= III. − [La nature d'une chose, d'un être] A. −Ensemble des qualités, des
propriétés qui définissent un être, un phénomène ou une chose concrète, qui lui
confèrent son identité. − PHILOS., THÉOL. Essence. Empr. au lat. natura «le fait de la
naissance, état naturel et constitutif des choses, tempérament, caractère, cours des
choses».
On voit qu’il marque une différence entre les « vieux » matériaux et les « nouveaux »,
car on est en plein progrès de l’architecture industrielle, l’essor du béton armé. Pour
Wright l’architecte doit explorer et exploiter les propriétés de chaque matériau afin de
mettre en valeur la signification propre à chacun d’entre eux.
LA SIN CERIT E DES MAT ERI AUX : LO UIS KAHN
Louis Kahn évoque la valence spécifique à chaque matériau, exprimé très clairement
dans ce fameux dialogue avec « la brique » :
« Si on dit à la brique : Qu’est-ce que tu veux, brique ?
Et la brique vous dit : J’aimerais une arche.
Et si vous dites à la brique : Ecoute, les arches sont chères, et je peux utiliser un linteau
de béton au-dessus. Que pensez-vous de cela? Brique ?
La brique dit : J’aimerais une arche.» 4
Cette logique s’appui sur la vérité structurale absolue. Donc si on juge sur le
raisonnement de Wright on pourrait dire que la nature d’un matériau vient de la
technique de construction optimale spécifique à chaque matériau et ainsi la signification
lui est induite.
On peut observer cette sincérité constructive des matériaux dans des nombreux projets
de Kahn : les panneaux en bois de remplissage dans la structure de voiles en béton de
Salk Instute5, les arches et les cercles en brique avec les poutres – tirants en béton de la
Biblioteque Exter. Chaque matériau est utilisé en mettant en valeur ses propriétés
physiques et constructives : le béton est coulé en voiles linéaires et renforcé avec l’acier,
devient tirant, le bois n’a pas un rôle structurel, mais surface de remplissage, et les
briques, deviennent des espaces structurels sortant de la linéarité du mur. Cette
approche vient d’une théorie plus élargie dans l’architecture Louis Kahn, celle de
l’espace servant – espace servi6.
3 CNRTL 2009
4 Traduction personnelle de l’anglai, source :
http://en.thinkexist.com/quotes/louis_kahn/ 5 Louis Kahn, Salk Institute, Californie U.S.A. 1959-1966 (v. Fig. 3,4)
6 « La nature de l’espace se caractérise aussi par les espaces plus petits qui le servent *…+
Le concept d’ordre de l’espace doit s’étendre au-delà du fait d’héberger les équipements techniques et inclure les espaces servants adjoints aux espaces servis » - Louis Kahn, «
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
10
LA MET AP HO R E DES MATE RIAUX : HER ZOG ET DE MEURO N
Je prends aussi deux cas des architectes contemporains qui ont traité l’importance des
matériaux et leur signification dans l’architecture. Leurs approches expriment encore la
variété en ce qui concerne le sens de l’emploi des matériaux dans la conception
architecturale. Si Herzog et de Meuron adoptent un usage métaphorique qui dépasse
l’ordinaire d’un matériau, Zumthor se concentre plutôt sur les sensations primaires que
les matériaux expriment par leur nature.
« Le matériau a une qualité s’il dépasse sa propre matérialité; s’il n’est plus qu’un moyen
de représentation »7
L’utilisation métaphorique des matériaux, que l’on observe dans de nombreux projets,
s’inscrit dans le courant d’une analyse des fondements de la signification architecturale.
L’atelier pour un photographe de Herzog & de Meuron se réfère lui aussi à un lieu
complexe et ce sont à nouveau les différents matériaux d’habillage qui caractérisent les
diverses faces de cet objet, avec trois “canons à lumière”: des plaques en bois sur l’avant
et du papier bitumé sur l’arrière, qui s’affiche en tant que tel, tandis que nous
connaissons avant tout ce matériau dans le cadre de bâtiments dissimulés à la vue.
Ainsi, notre expérience transmet une signification au papier bitumé, tandis que le
matériau est utilisé de telle manière qu’il rappelle cette expérience. Ce faisant, il change
de camp: de matériau banal, pauvre, il acquiert le statut d’un matériau qui signifie la
banalité. Ce changement en entraîne un autre, dans la mesure où, dans le cas d’un
hangar habillé de papier bitumé, on ne peut pas parler de représentation, qui
impliquerait une intention esthétique. Le matériau est utilisé dans ce cas parce qu’il est
utilitaire, un point c’est tout, même s’il ne se résume pas à être utilitaire.8
LA TANGI BI LIT E DES MAT ERI AUX : PET ER ZUMT HOR
Peter Zumthor propose une nouvelle approche concernant les matériaux. Il leur donne
une importance qui dépasse les règles de composition, il leur insuffle leur tangibilité.
L’odeur et les qualités acoustiques sont pour lui des éléments du langage que
l’architecte est obligé d’utiliser dans les bâtiments. Il essaie de mettre en évidence une
signification spécifique d’un certain matériau, une signification perçue juste dans cette
manière dans le bâtiment respectif.
Les espaces, l’ordre et l’architecture » in Silence et lumière, Editions du Linteau, Paris, 1996 (1961) 7 Conférence «Herzog & de Meuron.» par Jean-François Chevrier (Beaux Arts Paris). Paris
- Musée du Louvre, 10 DEC 2008. 8 « Conceiving architecture, materializing ideas » in WANG, Wilfried. Herzog et de
Meuron. Boston : Birkhauser, 1998. p.p.15
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
11
Peter Zumthor fait l’éloge des matériaux dans son approche de l'architecture, car il
soutient que « dans chacune de mes œuvres, le matériau a dicté ses lois. (...) Les projets
naissent d'une idée et cette idée, dans mon cas, est toujours accompagnée d'un
matériau. Je ne conçois pas une façon de concevoir dans laquelle on décide d'abord la
forme puis les matériaux »9.
Mais il ne faut pas confondre que le matériau même et le point départ, car pour chaque
sujet, il trouve « le matériau » qui soutient « l’idée », les deux sont interdépendantes. Il
n’a pas de préférence pour un certain matériau, car il bâtit en pierre pour les Termes de
Vals, en bois pour une chapelle en Suisse, avec le verre pour un centre d’art en Autriche
et il utilise la brique pour le musée de Cologne10
.
C O N C L U S I O N P A R T I E L L E
On s’aperçoit que c’est une option très rare de concevoir un bâtiment à partir d’un
certain matériau, même si le matériau est amené à un haut degré d’expressivité, et que
ses propriétés sont explorées et mises en valeur. Souvent les architectes essaient de
donner aux matériaux des significations qui dépassent leur stricte utilité dans la
construction, basée sur des théories plus larges, quelle que soit leur approche de
l’architecture.
A.2 LE BOIS POUR LES MAIT RES DE L ’ARCHITECTURE
ORGANIQUE Considérés comme les précurseurs de l’architecture éco-responsable, « à l’ère de
l’industrialisation triomphante, quelques architectes mettaient déjà en garde contre les
dangers d’un éloignement radical de la nature et de la tradition. L’américain Frank Lloyd
Wright militait en faveur d’une architecture « organique ». *…+Leur travail est cependant
toujours guidé par le respect de la nature et des convictions humanistes, Frank Lloyd
Wright est le maître à penser de la plupart de ces pionniers. Certains furent ses disciples,
comme Alvar Aalto, qui a introduit l’architecture organique en Europe ».11
C’est comme ça que nous sont présentés aujourd’hui les maitres « à suivre » pour une
architecture dite « éco-responsable. J’ai étudié donc leurs approches en ce qui concerne
l’emploi du bois dans leurs œuvres. J’essaie de comprendre comment leurs conceptions
architecturales se traduisent dans l’utilisation du bois dans leurs projets.
9 http://www.floornature.eu/progetto.php?contact=yes&id=4032&sez=30
10 V. fig. 7-10
11 Habiter écologique, quelles architectures pour une ville durable? Dominique Gauzin-
Müller, « Les précurseurs de l’architecture écoresponsable » Cité de l'architecture et du patrimoine, 2009
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
12
FRANK LLOYD WRIGHT
LE N EUVI EME P RIN CIP E D ’UN E ARCHIT ECT URE ORGAN IQ UE
Après la révolution industrielle, le choix des matériaux se multiplie, de nouveaux
matériaux pour la construction apparaissent. Les architectes sont face à un nouveau
défi. Certains se concentrent sur une manière de construire plus industrialisée et
standardisée (Bauhaus), d’autres font appel à la reprise des techniques traditionnelles
(ex. Arts and Crafts).
Frank Lloyd Wright, conçoit les bases de l’architecture organique et il intègre les
« matériaux » comme un de ses neuf principes fondamentaux12
. Alors, pour la première
fois, forcée peut-être par le contexte historique et la relative crise de l’architecture,
Wright met l’accent sur la signification d’un matériau, le fait qu’il est porteur d’un sens
et doit être inclus dans la conception architecturale.
Selon Wright, la signification vient, comme on l’a présenté dans le chapitre précédent,
de sa propre nature. Mais la nature-même d’un matériau peut-être aussi différente, car
Wright refusait « de chérir une forme préconçue» et conseillait de « chercher une forme
exaltant les lois simples du bon sens ou d’un sens supérieur, qui détermine la forme par
le biais de la nature et des matériaux »13
. Alors l’emploi d’un matériau ne se réduit pas à
son strict usage dans une certaine manière esthétique dans un projet. Déjà le choix d’un
matériau est crucial et après la technique de mise en œuvre joue aussi un rôle important
pour l’intégralité du projet.
LA BEAUTE IN T ERN E DU BOI S
En 1994, l’auteur Terry Patterson réalise une grande nouvelle étude sur cet
incontournable maître du XXème siècle, il explore en profondeur le rôle réel des
matériaux de construction dans l’œuvre de Wright. Dans son livre fortement illustré
“Frank Lloyd Wright and the Meaning of Materials”, Patterson développe un regard sans
précédent sur plus des 240 constructions et projets de Wright. La structure du livre se
concentre objectivement sur chaque matériau dans un chapitre séparé : le bois, la
pierre, la brique, le bloc en béton, les métaux, le béton et le verre. Sa méthode examine
régulièrement l’essence de chaque matériau par quatre propriétés : la forme,
l’exploitabilité (de l’anglais workability), la résistance, et la durabilité.
12 Principes : 1 – la parente entre le bâtiment et le sol; 2 – la décentralisation; 3 – le
caractère est un élément naturel ; 4 - ; 5 – l’interprétation de la troisième dimension ; 6 – l’espace ; 7 – la forme ; 8 – l’abri : besoin inhérent a l’homme ; 9 – les matériaux. (Wright 2005 (original 1957), 192) 13
Habiter écologique, sous la direction de Dominique Gauzin-Müller Arles [Paris]: Actes Sud, 2009, p.p. 25
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
13
« Chaque matériau a son propre message ... »14
Quel est le message du bois dans les
projets de Wright ? Quelle est la nature du bois pour Wright ?
Wright s’est rapporté au bois dans les termes les plus sympathiques. Pour Wright le bois
était aimable, amical, gentil, et «le plus humainement intime de tous les matériaux » [...]
L'aspect du bois qui semble attirer le plus l'attention de Wright c’est son grain (la
veine). Cependant, la partialité de Wright pour les modèles du bois avec
un grain délicat et varié ne pouvait être traitée avec efficacité que dans les intérieurs des
bâtiments. L'incapacité du bois pour maintenir la beauté de sa surface naturelle dans
le temps sans être protégé était un dilemme pour Wright comme il est pour la plupart
des architectes.15
Le bois est donc pour Wright « révélateur de sa beauté interne », ce qui est beaucoup
plus difficile dans le cas de la terre par exemple. Vu en tant que matériau noble, la
tendance de Wright est de « l’exposer » et en même temps de « le mettre à l’abri ». Il
veut intervenir très peu sur le bois.
« Faire ressortir la nature des matériaux ; laissez leur nature intime dans votre schéma »
LE BOI S ET LA MACHIN E
Wright n'a pas tenu compte, pour la plupart des cas, de la grande « ouvrabilité » du bois,
une propriété qui contribue fortement au sentiment de l'humanité et à l'intimité du
bois. Au contraire, Wright cherche aussi à trouver la place du bois avec les nouvelles
technologies de l’époque, en acceptant comme inhérentes les interventions
industrialisées à la place des techniques traditionnelles qui « abiment » la naturalité du
bois et donc sont moins honnêtes.
Wright a révélé le rôle important mais contrôlé des machines par rapport à sa vision sur
le bois quand il a déclaré qu'elles ont permis au concepteur de « réaliser la vraie
nature du bois dans ses créations en harmonie avec le sens de la beauté de
l'homme ». 16
Il essaie de trouver les techniques propres à l’intervention sur le bois, en concordance
avec ses visions esthétiques et sa philosophie sur la nature des matériaux, ainsi que ses
conceptions architecturales.
« La forme et la fonction deviennent ainsi un tout unitaire dans la conception et
l'exécution si la nature des matériaux et la méthode sont à l'unisson. »
14 "Each material has its own message …" — Frank Lloyd Wright, Architectural Record,
(April/1928)
15 Patterson, Terry L. Frank Lloyd Wright and the Meaning of Materials. New York: Van
Nostrand Reinhold, 1994. p.p. 45 - traduction personnelle de l’anglais 16
Ibid., p.p. 46
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
14
Wright cite des compatibilités entre la nature du traitement mécanique et les aspects de
bois qu'il favorise. Il a observé que « les effets linéaires sont propres à la machine » 17
. La
production de bois est un processus dominé par la machine, caractérisé par des
mouvements linéaires parallèles et perpendiculaires les uns aux autres. Son expression
dans l'architecture fait appel à une démonstration de la linéarité du bois à la grande
échelle et aux formes rectangulaires à la petite échelle. Wright a rejeté certains profils
qui étaient devenus des produits industriels standards en raison de leur popularité. Il ne
considère pas que la machine soit le définisseur de la forme du bois naturel quand
elle produisait des sections non rectangulaires ou curvilignes complexes.18
LA ST RUCTUR E EN BOI S DI S SI MULEE
Le bois structurel est généralement caché par Wright, à l’intérieur aussi bien qu’à
l’extérieur. Il n’y a quasiment pas de bois structurel exposé à l’extérieur. En cachant le
plus possible le bois structurel, bien qu'il maximise la continuité visuelle en
réduisant le nombre des pièces et la production apparente d’une surface plus lisse, il
élimine pratiquement la contribution linéaire de ces éléments dans l’espace qu’il crée.
Si on prend comme exemples les plafonds de la Avery Coonley Residence, Frederick C.
Robie Residence, Unity Church, on se rend compte que la plupart de ses moulures de
plafond manque de crédibilité en raison de l'absence de logique structurelle dans
leur configuration.
En même temps il prend une position très ferme envers les façons «traditionnelles» de
travailler le bois. Wright a rejeté certains assemblages de bois en tant que «menuiserie
laborieuse». La menuiserie de bois historique (et ses imitations ultérieures), étant
moins dépendantes des attaches métalliques que la charpente légère contemporaine, à
tendance à être trop volumineuse et moins esthétique que l’idéal de Wright. 19
Une réalisation qui peut paraître en apparence différente de sa pensée habituelle du
bois, est le bâtiment de Taliesin West. Mais, en effet, il ne représente que l’exception
qui confirme la règle. Les poutres apparentes sur le toit de l'aile de l'administration à
Taliesin West (1937) expriment la force modérée de bois en vertu de la grande
profondeur de ses membres. En outre, l'extrémité inférieure du système rapproche
le bois du visiteur, ce qui souligne la profondeur importante et la masse de la section sur
la ligne de toit. D'autre part, la section est relativement faible en épaisseur pour
la longue portée, une caractéristique rendue possible par des plaques d'acier dans les
poutres. Les plaques métalliques ont également été utilisées pour le toit en porte à
faux du garage de la première Maison Jacobs (1936) et dans d'autres projets.
17 Ibid., p.p. 47
18 Ibid., p.p. 47
19 Ibid., p.p. 48
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
15
MOINS DE BOIS = P LUS D ’AR BRES
Son opinion que le bois est vraiment traité comme du bois quand il est appliqué comme
placage révèle que la résistance, la durabilité, et la forme de base du matériau sont
secondaires dans sa définition du matériau.
Wright offre aussi un point de vue écologique, car il considère que le placage représente
une manière de sauver les forêts, de contribuer à la protection de l’environnement :
« L’utilisation de placages pourrait sauver les arbres »20
.
L'implication est que le grain de surface devient la plus importante caractéristique du
bois, au détriment des autres propriétés – la résistance, la durabilité par exemple.
Wright peut être critique pour cette approche l’utilisation du placage qui a plutôt
tendance à imiter un bois plus épais. Sa justification pour un minimum des pertes de
bois peut sembler à une excuse pour cet usage. Il a aussi réclamé qu’à la minimalisation
des déchets s’ajoutent les longues bandes de moulures du plafond, ce qui a donné son
avis sur « le charme du bois sans pertes de production »21
. Selon certaines critiques, ceci
constitue toujours une imitation du bois qui semble incongrue à la promotion de
l'honnêteté en architecture par Wight.
On peut voir l’expression du grain du bois, en surface, dans des projets comme le
bureau de M. Kaufmann, Carlton Wall Residence et beaucoup d’autres.
PROT EGER ET R ESP ECT ER LE BOI S
Wright a commenté peu la résistance du bois. Ceci, en soi, reflète une attitude
particulière envers le matériau. Son analyse du matériau est caractérisée par une
orientation visuelle. On peut dire qu’il y a une sorte de protectionnisme envers le bois
car Wright ne croit pas aux qualités de la durabilité ou à la résistance a long terme du
bois. La critique dénote une incapacité ou une non-appréciation des toutes qualités du
bois : les expressions de Wright quant à dans la nature du bois semblent être en grande
partie le sous-produit de ses objectifs généraux d'architecture plutôt qu’une intention
délibérée d’honorer le bois22
.
Finalement, on se rend compte que le débat sur l’utilisation du bois dans la construction
ne peut pas être dissocié des questions technologiques. Wright évite de prendre
position sur les aspects « vivants » du bois et il ne l’utilise que dans des conditions où il
peut assurer un contrôle maximal et une certaine pérennité. Il ne veut pas intervenir
trop sur sa modification, considérant que « la sculpture en bois a fait plutôt violence à sa
nature» et la discussion en ce qui concerne la protection par la peinture reste un
dilemme. En tout cas, on voit qu’il essaie de minimiser l’apparence extérieure ou
20 Ibid., p.p. 45
21 Ibid., p.p. 48
22 Ibid., p.p. 50
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
16
excessive du bois, vision contraire à celle d’aujourd’hui, qui essaie de l’exprimer dans
toutes les conditions. Sa vision fait appel à une protection de la nature, au bois à l’état
naturel, une responsabilité pour sa mise en œuvre, et il minimise les quantités et les
pertes, avec néanmoins, une connaissance et intelligence dans son usage.
ALVAR AALTO
HERI TI ER DE LA CULT UR E FIN LAN DAI S E
Suite à l’analyse du cas du Frank Lloyd Wright, on peut passer à son « homologue
européen », et d’ailleurs à son ami, Alvar Aalto, pour lequel Wright avait beaucoup
d’estime : « Alvar Aalto is a genius »23
Le théoricien S. Gidion affirmait « Aalto, où qu’il aille, porte la Finlande avec lui »24
.
Phrase énigmatique et ouverte aux interprétations, en ce qui concerne le bois, elle est
assez évidente dans l’architecture d’Alvar Aalto, car c’est un matériau qu’il aime bien et
qu’il utilise dans tous ses projets.
En Finlande, pays reconnue pour ses ressources en bois sur lesquelles son économie
actuelle est fortement basée, il y a une forte tradition de la construction en bois25
, ainsi
qu’une perception différente du bois, de son vieillissement en temps. Cette différence
est significative notamment sur la perception du matériau, car en Finlande on accepte
que le bois change sa couleur en temps, il noircit, etc. A la différence de la France, par
exemple, où on veut qu’il reste dans le même état de sa mise en œuvre26
.
Les influences de l’architecture vernaculaire finlandaise dans les projets d’Alvar Aalto
sont liées à la recherche d’esthétiques structurelles ou fonctionnelles27
, mais aussi à un
certain regard « culturel » du bois. Par exemple, on peut observer que dans la même
typologie de terrassement, Aalto utilise le bois en Finlande28
et la pierre en France29
.
RAP PRO CHEMENT DE LA N ATUR E ET DE L ’HUMAIN
Dans la conférence « De la nature au bâtiment : l’usage du bois chez Alvar Aalto »30
,
Asdis Olafsdottir, 31
a souligné le rapport à la nature dans l’architecture d’Alvar Aalto.
23 Alvar Aalto / Göran Schildt, Alvar Aalto, de l'œuvre aux écrits, textes d'Alvar Aalto,
établis et choisis par Göran Schildt, éd. Centre Georges Pompidou Paris, 1988 24
Ibid. p.p.5 25
Ce sujet sera développé dans le chapitre B.3 sur l’architecture finlandaise 26
Ces différences de perception seront plus approfondies dans le chapitre C.1. 27
Voir les exemples sur les poteaux, poignées de porte, gardes de corps, etc. 28
Pour la mairie de Saynatsalo (v. fig. 21) 29
Pour la maison Louis Carée (v. fig. 22) 30
« Le bois dans l’architecture d’Alvar Aalto » Conférence par Asdis Olafsdottir à E.N.S.A. Paris Belleville, 24 mars 2011
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
17
« L’architecture d’Alvar Aalto se caractérise par son ancrage dans l’environnement,
souvent souligné par une végétation envahissant des parties extérieures ou intérieures.
La nature est également reflétée de façon symbolique par des éléments structurels et
décoratifs ainsi que par l’usage du bois, dans son architecture comme dans son design. »
A la différence de Wright, Aalto écrit très peu sur son architecture, car il considère que la
meilleure théorie se fait par de réalisations concrètes. Quand même il exprime son
affectation pour le bois, il le considère « profondément humain »32
.
Un bon exemple sur cette idée est son fameux fauteuil « Paimio ». En effet, cette
appellation vient du nom du Sanatorium de Paimio, projet réalisé par Aalto dans les
années 1929-1931 en Finlande. Il était à la recherche d’un matériau pour son mobilier
de l’hôpital qui pouvait être conforme aux normes d’hygiène et en même temps
agréable pour les patients. Alors il commence à utiliser le bois en contre-plaqué moulé
pour ses chaises et des fauteuils. La flexibilité de ce matériau offrait des possibilités
esthétiques presque illimitées. Sur le plan pratique, sa chaleur, son « humanité »
répondaient aux vœux d’Aalto. *…+ Symbole de cette évolution : le fauteuil dit
« Paimio »: synthèse à la fois esthétique et fonctionnelle de ses recherches. Constitué de
cinq éléments, ce siège relève du fonctionnalisme rationnel dans ce qu’il a de meilleur,
mais la marque humaniste et réaliste d’Aalto y est déjà présente : chaleur du bois, forme
organique, souplesse, beauté. » 33
EXP LOR ATION S DE TO UTE S LES PRO PRI ET ES DU BOI S
Dans ses écrits Aalto affirme sur l’influence des matériaux : « Les « produits naturels
directs » sont désormais remplacées par le « matériau de construction » ; ils ne
constituent plus une catégorie de matériaux brute et primitive, mais ils sont l’objet
d’une perpétuelle élaboration- élaboration qui s’est toujours faite et continue à se faire
au cours même du processus de construction. »34
Alvaro Aalto est allé plus loin et il a inventé d’autres esthétiques avec de nouvelles
technologies du bois. On voit apparaître des formes curvilignes qui ont comme support
le même contre-plaqué, produit dérivé du bois, composé par plusieurs strates de
placage. Alors le placage, bien aimé par Wright, réussi maintenant à montrer aussi la
résistance et la durabilité du bois et non pas seulement sa fibre, son grain. (v. fig. 25-27)
31 Historienne de l’art et administratrice de la Maison Louis Carré, realisée par Alvar
Aalto à 40 km de Paris entre 1956-1959 32
Alvar Aalto / Göran Schildt, Alvar Aalto in his own words edited and annotated by
Göran Schildt, éd Rizzoli, New York 1998, c1997
33 Maarkku Lahti, « Introduction » au catalogue de l’exposition « Alvar Aalto, du
romantisme national à l’architecture moderne », Centre Pompidou Paris, 1988 34
Ibid. A.Aalto, « De l’influence des matériaux et des structures », p.135
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
18
En plus, si Wright utilisait « la machine » pour créer des formes rectilignes, Alvar Aalto,
utilise l’industrialisation pour « renaturaliser le bois », en recréant des formes inspirées
du monde végétale. Ses expérimentations sur l’usage du bois sont très vastes, il connait
bien les essences, comme on peut voir dans la Maison Louis Carrée, où il emploie une
beaucoup d’essences différentes chacune avec ses propres qualités : couleur, dureté,
etc.
A.3. A L’ERE DU DEVELOPPEMENT DURABLE - UNE
NOUVELLE SIGNIFICATION IMPOSEE Après une présentation de l’emploi du bois dans l’œuvre de deux maîtres de
l’architecture moderne, on va explorer comment aujourd’hui on assiste à une mutation
dans l’utilisation des matériaux, car certains sont imposés aux architectes pour des
raisons écologiques, protection du climat, émissions de CO2, etc.
LE DEV ELOPP EMEN T DUR ABLE
Le « Développement Durable » (traduction de l’anglais « Sustainable development ») est
une nouvelle conception de l'intérêt public, appliquée à la croissance économique et
démographique et reconsidérée à l'échelle mondiale.
Selon la définition proposée en 1987 par la Commission mondiale sur l’environnement
et le développement dans le « rapport Brundtland », le développement durable est :
« Un développement qui répond aux besoins des générations du présent sans
compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs »
A l’heure actuelle un des dangers primaires de la planète c’est un désastre écologique,
dont la première cause est l’émission des gazes à effet de serre dans l’atmosphère. Les
produits le plus utilisés aujourd’hui, le béton et l’acier, contribuent considérablement à
ses émissions. Dans le cas du béton ces émissions ne se produisent pas seulement lors
de sa production industrielle, mais notamment à sa mise en œuvre fine lors de son
refroidissement. Ce pourcentage est croissant, car plus de 50% de surfaces construites
annuelles se réalisent chaque année en Asie, notamment en Chine, dans des pays
émergeants où la construction en béton occupe le premier rang.
Alors, on cherche de réduire des émissions dans tous les secteurs, en même temps avec
les économies d’énergie et le passage aux énergies renouvelables, car le secteur
énergétique actuel est c’autant plus considéré insoutenable.
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
19
LES ATO UT S « RENOUV ELABLES » DU BOIS
« Le bois, matériau traditionnel universel depuis des siècles, a retrouvé ces dernières
années une place de choix, grâce notamment a l’écologie. Les architectes lui
reconnaissent maintes qualités : viabilité, polyvalence, rentabilité et beauté. »35
Mais plus qu’un « retour » de ce matériau ancestral dont on redécouvre ses qualités, le
bois a des atouts plus importants du point de vue du Développement Durable.
Gerd Wegener, Bernhard Zimmer36
, en analysant les propriétés du bois concluent que « la construction de bois est une construction d’avenir », car:
- Le bois est un matériau renouvelable
- Le bois est produit dans l’usine la plus respectueuse du point de vue écologique et
social : la forêt
- Les forets et les produits à base de bois fixent le CO2
- Les produits de bois économisent l’énergie et le CO2 (production peu gourmande en
énergie, production d’énergie avec les déchets et les produits annexes, fonction isolante
qui économise l’énergie, utilisation énergétique en fin de vie utile)
- Chaque fois que l’on utilise du bois à la place d’un matériau fossile ou non renouvelable,
on fait un geste pour l’environnement et pour la protection du climat
DE Q UEL BOI S PAR LE-T-ON ?
Mais en même temps la production du bois et son emploi en architecture sont
définitivement entrés dans des processus industrialisés et le bois acquiert une nouvelle
esthétique. Alors il est nécessaire à spécifier à quel type de produit en bois on se réfère.
Historique des produits de bois :
Avec le développement du bois lamellé-collé au début du siècle dernier, on a réussi à
dépasser les limites dimensionnelles imposées par la croissance naturelle de l’arbre. Des
éléments long, voire courbes, de grande envergure, sont devenus réalisables.
Mais la construction bois est quand même restée, et jusque bien au-delà de la moitie du
XXème siècle, essentiellement une construction à base de tiges. Un changement s’est
amorcé grâce à la disponibilité sans limite de panneaux bon-marché. Les panneaux en
bois – contreplaqués, panneaux en particules de bois, et plus tard OSB (Oriented Strand
Board) – ont entamé leur marche triomphale dans le secteur du bois de construction
comme planchéiage dans la construction à ossature bois. Certains esprits inspirés ont
bientôt testé de nouvelles applications qui allaient au-delà du simple contreventement.
Par exemple l’utilisation de bois contreplaqué et du bois lamellé-collé pour des poutres
ou pour les structures de toiture tridimensionnelles.
35 Le bois en architecture : innovations & esthétique . Paris: Place des Victoires, 2010.
36 Thomas Herzog, Gerd Wegener, Bernhard Zimmer, « Construire en bois, c’est
l’avenir », 2005 p. 49
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
20
Donc aujourd’hui on voit apparaitre une nouvelle série de structures en bois qui ont
perdu toute connexion avec le modèle de la charpente traditionnelle. Elles amplifient les
qualités naturelles du bois en utilisant une haute technologie pour la production, qui n’a
plus besoin de grandes sections de bois – le bois lamellé-collé se fait à partir du bois de
petites dimensions, sélectionné et coupé automatiquement. Ce type de produit de bois
est assez économique, a des bonnes résistances physique et le travail du bois est
minimisé, ce qui assure sa durabilité. On trouve un panorama assez large, avec toutes les
fonctions, dont un des exemples le plus récent c’est le Centre Pompidou à Metz, réalisé
par l’architecte japonais Shigeru Ban.
UN NO UV EAU MAT ERI AU P OUR R EMP LACER LES AC T UELS
Dans les dix dernières années, un nouveau produit à base de bois, inventé par une
compagnie allemande dans les années 1990, prend une importance cruciale, car il paraît
qu’il pourra remplacer le béton. Il s’agit de « cross laminated timber » CLT, un sort de
contreplaqué qui ressemble à une sorte de contreplaqué géant livré sur chantier en
panneaux de 13m de long. Actuellement les industriels autrichiens tiennent la première
place dans cette technologie.
Réalisé en multicouches de 3, 5 ou 7 couches de bois massif, superposées et collées avec
une rotation de 90 dégrées entre elles, ce matériau a une résistance nettement
supérieure au bois « traditionnel ». Il est utilisé pour de constructions en hauteurs et
même pour des ponts. En plus le bois offre aussi l’isolation thermique.
En Grande Bretagne, les architectes Waugh Thistleton ont conçu en 2008 le plus haut
immeuble en bois du monde, de neuf étages (R+8)37
. Au nord-est de Londres, dans une
zone fortement urbanisée, la résidence de Murray Grove offre, depuis octobre 2008,
vingt-neuf appartements, dont un tiers affecté à l’habitat social comme l’impose la
réglementation anglaise. Les appartements s’orientent autour d’un noyau central, selon
une structure en nid-d’abeilles38
.
Les atouts de cette construction sont nombreux.
Au moment du chantier, les panneaux en bois massif contrecollé ont été livrés
largement préfabriqués, ils comprenaient déjà les fenêtres, les portes et les ouvertures
pour passer les gaines techniques. Ces panneaux, d’une taille allant jusqu’à 13 mètres,
arrivaient selon une chronologie prédéterminée pour une pose immédiate.
Une telle technique de construction est particulièrement pertinente dans un
environnement à forte densité de population: elle génère peu de bruit et peu de
déchets.
37 V. fig. 38-41
38 V. fig. 39
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
21
« En comparant les différentes techniques de construction pour réaliser un tel ouvrage,
il est apparu aux architectes que l’utilisation du béton, un volume d’environ 950 m3,
aurait émis dans l’atmosphère quelque 68 tonnes de carbone. Le même calcul, appliqué
aux 120 tonnes d’acier nécessaires, donne un résultat de 57 tonnes de carbone
dispersées dans l’air. Avec les 830 m3 de bois présents dans cet immeuble, ce sont 181
tonnes de carbone qui sont stockées, de manière permanente. En travaillant le bois, on
émet très peu de carbone, le bilan reste largement positif. »
Autre élément, il met en exergue la possibilité de valorisation du bois, à toutes les
étapes de sa transformation. Les panneaux en bois massif sont fabriqués en utilisant une
colle non toxique. Les déchets de bois, ou de panneaux, servent d’énergie pour l’usine
de fabrication (en Autriche), qui y puise son propre chauffage, ainsi que pour deux
villages voisins, qui en bénéficient également.
Cet exemple prouve que le bois peut attendre les performances du béton. Mais
paradoxalement, dans ce bâtiment toutes les pièces de bois sont cachées, à l’intérieur
et à l’extérieur. Donc il n’y a plus du tout un vrai lien visuel avec le bois. Les architectes
disent que c’était la volonté de leur commanditaire « un peu conservateur ». Donc cela
prouve encore que ce « nouveau » matériau coupe le lien avec le « bois » qu’on connaît
traditionnellement.
« Le bois ne pose, techniquement, aucun problème quand il s’agit de construire des
ouvrages de plusieurs étages. Grâce aux panneaux en bois massif, on dispose
dorénavant de composants structurels dotés d’une résistance mécanique très élevée
dans les trois dimensions, ce qui n’est pas le cas du bois brut et qui handicapait ce
matériau »39
Les exemples à Berlin, E3 (R+6), et à Londres, Stadthaus (R+8), démontrent que le
matériau est désormais capable de concurrencer les systèmes constructifs traditionnels
en matière de statique, de rapidité et de coût. Encore timide en France, la construction
bois en hauteur commence à se développer.40
LE « GR EEN W ASHI NG » DU BOIS
Cette croissance de la demande publique du bois dans la construction est déterminée
aussi pour un raison écologique car l’usage du bois peut directement aider à atteindre
39 Yves Weinand, Professeur associé et directeur du laboratoire de construction en bois
“Ibois” à l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne - EPFL Suisse 40
« Le bois prend de la hauteur » article internet ;
http://www.germatrad.com/telechargements/ecologiK%208%20-
%20Le%20bois%20prend%20de%20la%20hauteur.pdf
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES LES SIGNIFICATIONS DU BOIS
22
la certification HQE. Alors, le bois est souvent « ajouté » dans les projets, en devenant
une étiquètte ou « une fourrure verte »41
pour un bâtiment « écolo ».
Une des 14 cibles de la « Démarche HQE » (Haute Qualité Environnementale) concerne
les matériaux:
« Le choix intégré des produits, systèmes et procédés de construction. Le choix des
matériaux à faible impact environnemental relève de l’organisation interne du
constructeur qui doit sélectionner des produits et matériaux compatibles avec les
contraintes d’usage (par leur nature, leur utilisation et leur coût), de durabilité, de
sécurité, de santé. Les matériaux fabriqués localement à partir d’une matière première
locale sont valorisés ainsi que l’utilisation du bois. »
Son apparence a tellement d’importance qu’on arrive aujourd’hui à falsifier
complètement sa matérialité. Par exemple on a créé des produits qui utilisent une image
numérique imprimée du bois, des produits céramiques, artificiels nervurés de veines de
bois et même, on projette pendant la nuit un bardage en bois sur des murs en béton.
Cette « virtualisation » du bois s’éloigne complètement de la dimension écologique mais
elle profite énormément de cette « fourrure verte ». En plus, une mauvaise conception
ou mise en œuvre qui détermine une détérioration rapide des pièces mal posées en bois
accentuent la perte de confiance et d’intérêt pour ce matériau.
41 « La fourrure verte, futur opium de l'urbain », « la fourrure verte, c'est l'eldorado de
l'arnaque », critiques virulentes de la certification HQE de l’architecte Rudy Ricciotti, le prix national de l'architecture en 2006
A.1. SIGNIFICATION D’UN MATERIAU EN
ARCHITECTURE
Fig. 1 -page 5 (couverture) interprétation personnelle,
I AM GREEN! Recommandation pour un
bâtiment écologique // Google Images 2011
+ manipulation
Fig. 2: Robert Venturi,
I AM A MONUMENT! Recommandation pour un
monument, 1972
// Google Images 2011
Fig. 3: Louis Kahn,
Indian Institute of Management,
Ahmedabad, India, 1974– détail d’arche en brique
avec un tirant en béton armé // Google Images 2011
Fig. 4: Louis Kahn,
Salk Institute, Californie U.S.A. 1959 - 1966
– le bois comme matériau de remplissage, en contraste avec la structure en voiles de
béton // Google Images 2011
2
34
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES
A.1. SIGNIFICATION D’UN MATERIAU EN
ARCHITECTURE
Fig. 5 : Herzog & deMeuron
– l’imprimé partiel sur le mur de cette salle d’un gymnase
joue l’ambiguïté de la matière et de la structure qui se cache
derrière // photo scannée
Fig. 6 : Herzog & deMeuron
Dominus Winery, U.S.A. - l’assimilation du poids
de la pierre de ballaste a l’impondérabilité de la lu-
mière transforme signification du matériau
// Google Images 2011
Fig. 7 : Peter Zumthor,
Musée Kolumba de Cologne, Allemagne, 2007
– l’usage de la brique // Google Images 2011
Fig. 8 : Peter Zumthor,
Chapelle Benedict, Suisse , 1989
– l’usage du bois // Google Images 2011
Fig. 9 : Peter Zumthor,
Les Thermes de Vals, Suisse, 1996
– l’usage de la pierre // Google Images 2011
Fig. 10 : Peter Zumthor,
Musée d’art de Bregenz, Autriche, 1997
– l’usage du verre // Google Images 2011
5 6
7 89 10
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES
A.2. LE BOIS POUR FRANK LLOYD
WRIGHT
Fig. 11 : Frank Lloyd Wright,
bureau de M. Kaufmann – usage du placage en bois,
au fond modèles géomé-triques
// Google Images 2011
Fig. 12 : Frank Lloyd Wright,
dessin des éléments en bois sur plafond, logique non
structurelle // Google Images 2011
Fig. 13 : Frank Lloyd Wright,
Hillside Home School II – la relation structurale en
bois est cachée, dessin déc-oratif sur le plafond géomé-
triques // photo scannée
Fig. 14 : Frank Lloyd Wright,
Unity Temple, Illinois USA, 1908
- des éléments en bois encas-trés dans l’enduit des parois
// Google Images 2011
1112
13 14
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTES
Fig. 15 : Frank Lloyd Wright,
Romeo and Juliet Windmill - des rangées horizontales sur
un bâtiment avec une domi-nante verticale
// Google Images 2011
Fig. 16 : Frank Lloyd Wright,
F. F. Tomek Residence – utilisation purement déc-orative du bois en moulure
appliquée au dessus du socle // photo scannée
Fig. 17 : Frank Lloyd Wright,
E.A. Gilmore Residence – coupe verticale façade,
montrant l’espace derrière la moulure en bois
// photo scannée
Fig. 18 : Frank Lloyd Wright,
Taliesin West, Arizona USA, 1937
- les poutres très fines renforcées par des éléments
métalliques // Google Images 2011
15 16 17
18
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTESA.2. LE BOIS POUR FRANK LLOYD
WRIGHT
Fig. 19 : Alvar Aalto,
la sauna de la maison expéri-mentale, Finlande
// Google Images 2011Fig. 20 :
Alvar Aalto, détail de garde de corps à
maison-atelier Aalto, Helsinki, Finlande, 1956
– inspiration du vernaculaire finlandais
// photo personnelle *2008Fig. 21 :
Alvar Aalto, détail aménagement, mairie
de Saynatsalo, Finlande, 1952
– usage du bois pour le ter-rassement
// Google Images 2011Fig. 22 :
Alvar Aalto, détail aménagement Maison
Louis Carré, Bazoches-sur-Guyonne,
Yvelines, France, 1957 – usage de la pierre pour le
terrassement // Google Images 2011
Fig. 23 : Alvar Aalto,
détail poteau Maison Louis Carré,
Bazoches-sur-Guyonne, Yvelines, France, 1957
– le bois ajouté sur le poteau métallique fait référence à
son lien à la nature // Google Images 2011
Fig. 24 : Alvar Aalto,
maison – atelier Aalto, Hel-sinki, Finlande, 1956
– la maison est envahie par la végétation et rapprochement
du bardage en bois // photo personnelle *2008
19 20 21 22
2423 24
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTESA.2. LE BOIS POUR ALVAR AALTO
Fig. 25 : Alvar Aalto,
le fauteuil Paimio, 1931-32 // Google Images 2011
Fig. 26 : Alvar Aalto,
l’usage du bois en contre - plaqué moulé, courbé, 1929
– expérimentations // Google Images 2011
Fig. 27 : Alvar Aalto,
tabouret, 1954 – inspiration de motifs végé-taux et industrialisation de la
production // Google Images 2011
Fig. 28 : Alvar Aalto,
intérieur de la Maison Louis Carré,
Bazoches-sur-Guyonne, Yvelines, France, 1957
– plusieurs essences de bois utilisées
// Google Images 2011
2526
27 28
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTESA.2. LE BOIS POUR ALVAR AALTO
Fig. 29 : détail poutre lamellé-collé
// Google Images 2011Fig. 30 :
détail d’une composition complexe des produits en
bois avec des technologies avancées
– économie du matériau, réduction aux limites néglige-
able du « travail du bois »// Google Images 2011
Fig. 31 : panneaux de fibres de bois – minimisation des pertes
de matériau, possibilité d’utilisation d’un bois de
qualité inferieure // Google Images 2011
Fig. 32 : OSB (Oriented Strand Board)
– produit bon marché et résistant
// Google Images 2011Fig. 33 :
cross laminated timber, contreplaqué de planches 5/7
couches - produit avec une très bonne résistance, réduction aux lim-
ites négligeable du « travail du bois »
// Google Images 2011
Fig. 34 : construction avec des poutres
en lamellé-collé standardisées
// Google Images 2011Fig. 35 :
construction avec des pan-neaux contreplaquées
standardisés // Google Images 2011
29 3031 32
33
34 35
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTESA.3. DE QUEL BOIS PARLE-T-ON ?
Fig. 36 : Hangar avec une structure en
poutres lamellé-collé – grande ouverture sans ap-
pui secondaire // Google Images 2011
Fig. 37 : Drexel Reinhard architecte,
Hohenems, Vorarlberg, Au-triche, 1999
- toiture suspendue avec de panneaux en contreplaqué
39mm d’épaisseur - hall de 20x50m
// Google Images 2011
Fig. 38: Waugh Thistleton Architects,
Stadthaus building, Murray Grove, Londres, 2008
– vue pendant la construction à l’intérieur
// Google Images 2011Fig. 39 :
Waugh Thistleton Architects, Stadthaus building,
Murray Grove, Londres, 2008 - le plus haut immeuble en
bois du monde ; tous les élé-ments porteurs sont en bois
// Google Images 2011Fig. 40 :
Waugh Thistleton Architects, Stadthaus building,
Murray Grove, Londres, 2008 – la construction fut élevée
en 29 jours// Google Images 2011
Fig. 41 : Waugh Thistleton Architects,
Stadthaus building, Murray Grove, Londres, 2008
– toutes les parties en bois sont complètement cachées
// Google Images 2011
3637
38 39
40 41
PARTIE A: THEORIES ET ARCHITECTESA.3.UN NOUVEAU MATERIAU POUR
REMPLACER LES ACTUELS
PARTIE B : CULTURES DU BOIS
LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS
PA R T I E B : C ULTURE S DU BOIS
LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS L’usage universel du bois dans le monde ......................................................................... 32
Pourquoi l’architecture vernaculaire est-elle importante ? ............................................. 33
B.1. Un usage vernaculaire : Le cas de la Roumanie ................................................................ 34
Pourquoi l’architecture roumaine? .................................................................................. 34
La liberté de l’espace et d’expression ............................................................................... 34
L’héritage et le monument en bois ................................................................................... 35
Une culture totale en bois ................................................................................................ 36
L’architecture vernaculaire n’utilise plus le bois .............................................................. 37
Nouvelles esthétiques inspirées du vernaculaire ............................................................. 38
B.2. L’influence culturelle de l’Extrême Orient ......................................................................... 38
Le bois pour habiter, la pierre pour se protéger ............................................................... 38
L’architecture traditionnelle coréenne ............................................................................. 39
La reconstruction du patrimoine ...................................................................................... 39
Un autre rapport à la nature ............................................................................................. 40
Les architectes japonais et leur influence ......................................................................... 41
Tadao Ando ....................................................................................................................... 41
Kengo Kuma ...................................................................................................................... 44
B.3. Paradoxes et mutation des rapports au bois : Le cas de l’Eurasie du nord ....................... 45
Le bois une ressource permanente .................................................................................. 45
La Norvège et l’invention .................................................................................................. 46
Le détournement suédois ................................................................................................. 46
La migration formelle en Sibérie....................................................................................... 47
Le retour du bois au XXIème siècle en Finlande ............................................................... 47
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 32
32
L’USAGE UNIV ER S EL DU BOIS DANS LE MO ND E
Le bois a toujours été une ressource facile à trouver et à exploiter, il à toujours fourni du
combustible, les premiers outils pour les ancêtres d’Homo Sapiens, des abris. Il a laissé
des traces qui témoignent de sa présence dans de multiples activités humaines.
Sans faire appel à l’époque préindustrielle, on constate que le bois est toujours resté un
élément très central dans notre vie aujourd’hui, ainsi que dans l’économie mondiale.
Nous écrivons sur du papier qui vient du bois, nous avons des meubles en bois, certains
d’entre nous vivent dans des maisons en bois, on peut se chauffer avec le bois, c’est une
énergie, qui elle est supposée renouvelable, nous nous promenons dans les bois, etc.
Tous ces rappels montrent que le bois est très présent dans notre vie quotidienne.
On divise le bois en deux catégories. La première, dite primaire, il est utilisée pour le
chauffage ou pour faire la cuisine. Ce bois de feu vient surtout des zones tropicales –
Afrique, Asie - où environ 80% de la récolte de bois part en fumée1 ! Ce qui veut dire
que, en sens inverse, seulement 20% des coupes dans ces pays seront utilisé comme
bois d’œuvre, nommé bois secondaire. Ce dernier peut être commercialisé sous forme
de bois ronds, mais aussi sous forme de sciages, de planches, de madriers, c'est-à-dire le
bois issu d’une première transformation en scierie. Il y a aussi les panneaux qui sont ces
structures composées de plusieurs morceaux collés, puis enfin les autres secteurs,
notamment la pâte à papier et le carton.
Il est donc évident que ce matériau a créé un lien ancestral avec l’humain, quel que soit
son état, quelle que soit la culture. Si dans les pays pauvres le bois est considéré comme
une matière de subsistance, dans les sociétés développées il est souvent apprécié
comme étant « naturel », « chaleureux », « beau », « noble » et plus récemment
« écologique » ou « biologique ».
Mais cette célébrité du bois a créé plutôt une « image du bois » qu’un lien direct avec ce
matériau. Aujourd’hui on trouve même des produits céramiques, plastiques, etc. qui
imitent les bois et même des impressions numériques des veines du bois sur différents
supports. (v.fig.43-44)
Pour cela je crois qu’il est nécessaire de retourner à l’histoire des cultures qui ont utilisé
le bois en tant que matière première pour l’habitat ou pour donner forme concrète à
une civilisation afin de comprendre les liens tissés entre une culture2 et le matériau.
1 ARTE.tv 2010 Le dessous des cartes « Le commerce du bois »
2 Cf. Amos Rapoport, Culture, architecture et design. Traduit par Sabine El Sayegh.
Gollion (Suisse): InFolio, 2003.
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 33
33
POURQ UOI L ’AR CHIT ECTUR E V ERN ACULAI R E EST-ELLE IMPOR TAN T E ?
Il y a plusieurs définitions3 de l’architecture vernaculaire, mais cette étude n’a pas pour
but de faire une étymologie du terme. Je veux spécifier une définition qui est signifiante
et importante pour mon approche.
Dans la plupart des cas, dont le plus connu de Bernard Rudolfsky, on parle d’
« Architecture sans architectes », une architecture « populaire » opposée à celle
académique, enseignée dans les écoles. Mais en réalité, dans toutes les sociétés il y une
certaine séparation dans des métiers spécifiques, avec des échanges entre régions et
domaines d’activités. La transmission de savoirs des maîtres bâtisseurs a autant
d’importance que l’éducation d’un architecte, mais d’autant plus l’adaptation
permanente aux nouveaux défis du mode vie, du climat, etc.
Cela ne veut pas dire que je n’adhère pas à cette thèse qui montre qu’on a oublié ou
même pas connu des « grandes découvertes » de cette architecture, au contraire. A
travers mes expériences, mes voyages dans plusieurs cultures m’ont offert certainement
des exemples, du système de chauffage « ondol »4 des maisons en Corée à la
« décoration fonctionnelle »5 du bardage en bois au sud de la Roumanie.
Je me suis toujours demandé ce qu’il faut vraiment apprendre de cette architecture,
comment elle peut avoir des liens avec mon travail. Est-ce qu’elle représente tout ce
qu’on a oublié à l’époque industrielle ? Est-ce qu’elle est le modèle parfait, trouvé et
ciselé pendant des siècles ?
Après des réflexions, des débats, des workshops, j’ai découvert que peut-être le but de
l’architecture vernaculaire n’est pas nécessairement de devenir un exemple ou un
modèle. Elle offre plutôt des solutions particulières, elle s’adapte à des circonstances
géographiques, sociales, culturelles, climatiques, économiques, etc. Et, néanmoins, elle
établit des rapports avec les matériaux de constructions locales. Dans le contexte du
Développement Durable et de la politique « agir local, penser global », je crois que cette
recherche mérite attention.
Alors, dans le cas de cette étude, je cherche à comprendre les rapports de l’humain
avec un matériau, avec son usage, etc. Je souhaite mettre en évidence comment
certaines cultures ont développé des liens très forts avec le bois et en même temps
3 RUDOLFSKY, Bernard. L'Architecture insolite, une histoire naturelle de l'architecture
concernant, en particulier, ses aspects le plus souvent négligés ou totalement ignorés. Paris: Tallandier, 1979. 4 « Ondol », système de chauffage traditionnel coréen – la fumée traverse le dessous la
maison en réchauffant le plancher (v.fig.45) 5 bardage en bois roumain – la décoration devient fonctionnelle car la surface de
contact du bois avec l’eau s’agrandi (v.fig.46)
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 34
34
assez différents. Cette liaison a sûrement des conséquences sur le psychisme individuel
et la mémoire collective. Finalement peut-on dire que le bois représente le rapport de
l’homme avec l’environnement ?
J’ai choisi 3 exemples que j’ai eu l’occasion de connaitre personnellement. D’abord mon
pays natal la Roumanie, très fortement marquée par l’architecture en bois ; puis
l’architecture coréenne, pays où j’ai été étudiant une année pendant laquelle j’ai étudié
l’architecture traditionnelle; et l’architecture nordique, scandinave qui se remarque au
domaine du bois, que j’ai eu aussi l’occasion de connaître personnellement de la
Norvège jusqu'à la Sibérie profonde.
B.1. UN USAGE VERNACULAIRE : LE CAS DE LA ROUMANIE
POURQ UOI L ’AR CHIT ECTUR E ROUMAIN E?
L’architecture traditionnelle roumaine est reconnue dans le monde pour ses qualités
d’expression en bois. Si on parle des églises en bois de Maramures, au nord, ou des
maisons des boyards d’Olténie, au sud, des petits villages d’Apuseni à l’ouest, on
retrouve partout un rapport spécifique à la nature, à la religion, au contexte
géographique.
L’architecture roumaine est arrivée à un degré maximal d’utilisation du bois. Forcée des
fois par le contexte sociopolitique, elle est en quelque sorte vivante aujourd’hui, et en
particularité elle a toujours coexistée en parallèle avec un développement de
l’architecture urbaine. Je vais choisir trois régions en particulier pour exemplifier
l’importance et les significations du bois pour la culture roumaine.
LA LI BER T E DE L ’ES PACE ET D ’EXP R ES SION
En premier je veux parler d’une région au sud-ouest de la Roumanie, l’Olténie, et plutôt
de la partie nordique de cette région. Avant la conquête romaine en 100-105, elle fut la
partie inferieure de Dacia, les dacians étant les ancêtres de peuple roumain. Cet aspect
historique est important car on trouve des implications jusqu'à nos jours. L’architecture
de cette région a très souvent des éléments avec des significations spirituelles et
mythologiques très anciennes, avant la période chrétienne. Le bois a été un moyen
d’expression de ces croyances, des éléments symboliques. Il est devenu une manière de
communication avec le monde des esprits, des dieux, en communion avec la nature.
Les éléments comme les « têtes de chevaux »6 ou les « ciocarlani »
7 expriment ces
croyances. Ils protègent la maison, apportent des richesses ou une bonne récolte. On
garde ces symboles et on les retrouve dans la construction des maisons et des églises
6 (v.fig.47)
7 (v.fig.48)
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 35
35
jusqu’aux XIXème – XXème siècles. Le bois est devenu le support de transmission de ces
croyances. De la même façon que la civilisation grecque ou romaine s’est développée
dans l’architecture en pierre, ou que les nombreux peuples africains ont développé la
construction en terre, l’architecture en bois se développe dans cette région d’une
manière presque contre l’évolution. Elle arrive plutôt à se raffiner dans les limites de ce
matériau, le bois, que d’inventer des formes nouvelles. Le fait qu’on trouve aujourd’hui
des églises en bois qui ont été démontées et remontées dans d'autres endroits montre
le respect, l’attachement envers ces constructions. Bien sûr le contexte politique et
économique influence aussi cette situation, mais en même temps on s’aperçoit que le
niveau d’expressivité, en ce qui concerne la forme, les proportions, la décoration, aux
quels l’architecture de Gorj atteint est d’une supériorité difficile à dépasser.
Sur ces lieux, dans le département de Gorj, un des plus importants artistes modernes est
né, le sculpteur Constantin Brancusi8. Il n’est pas difficile d’ imaginer comment son
œuvre a été influencée par l’architecture en bois de cette région quand on regarde les
poteaux sculptés9 des maisons du Gorj.
Donc, ce matériau, le bois, est devenu lui-même symbole, porteur de sens et élément de
transmission culturelle.
L’HERITAGE ET LE MON UM ENT EN BOI S
Un deuxième exemple roumain porte sur les églises en bois de Maramures, monuments
du patrimoine international de l’humanité UNESCO, au nord de la Roumanie. Ce
territoire, enclavé au nord dans les Carpates Orientales, a connu aussi une histoire
particulière qui a commencé dans la préhistoire. Conformément à l’UNESCO :
« L’ensemble « Églises en bois de Maramures » représente une sélection de huit
exemples remarquables de solutions architecturales issues de périodes et de régions
différentes. Elles dessinent un portrait vivant de la diversité des conceptions et des
compétences artisanales exprimées dans ces constructions de bois hautes et étroites,
dotées du caractéristique clocher élancé du côté ouest du bâtiment et de toits simples
ou doubles couverts de bardeaux. Il s'agit là d'une expression vernaculaire propre au
paysage culturel de cette région montagneuse du nord de la Roumanie.
Les églises en bois de Maramures sont des exemples exceptionnels d’une architecture
religieuse et vernaculaire en bois, fruit des interactions entre traditions religieuses
orthodoxes et influences gothiques, dans une interprétation particulière des traditions
architecturales du bois, qui laisse apparaître une grande maturité artistique et
d’immenses compétences artisanales. »
On voit donc « des monuments » caractéristiques d’un paysage et indissociables de leur
matériau de construction.
8 (v.fig.51)
9 (v.fig.50)
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 36
36
UNE CULTUR E TOT ALE EN BOIS
Le dernier exemple se réfère à la région où j’ai grandi et dans laquelle j’ai participé à
plusieurs études et projets culturels. Il s’agit de Bucovine, une région au nord-est de la
Roumanie plutôt connue pour ses monastères aux églises peintes10
.Mais je vais aborder
le sujet de l’habitat et non pas celui des églises. Si par contraste les églises sont bâties
en pierre, les maisons sont complètement en bois.
Cette région, appelée la Moldavie du Nord ou la Bucovine (« Bucovina ») est la région la
plus boisée de la Roumanie. La proximité de la forêt a tissé un lien immédiat avec
l’homme et en plus, l’agriculture, l’exploitation de ce terrain collinaire et montagneux
ont créé un paysage très particulier.
L’habitat se compose d’une unité indépendante, qu’on appelle « gospodarie » - les
ménages, composés par la maison et les annexes bâties, ainsi que des terrains comme le
potager, le verger, etc. Cette unité s’est imposée comme modèle spatial, administratif,
social et spirituel de la société roumaine du Moyen Age jusqu'à nos jours. Initialement
d’une exceptionnalité rurale, il résiste et coexiste avec l’urbain. Ce qui est particulier en
Bucovine, et en Roumanie en général, est cette persistance du rural, contrairement aux
civilisations occidentales ou le modèle urbain vient s’imposer sur la typologie rurale.
Dans une étude récente à laquelle j’ai participé avec l’Ordre des Architectes Roumains,
on a analysé les transformations produites et en cours sur le paysage culturel de
Bucovine. Il s’agit d’une analyse du traditionnel et ses mutations, ainsi que des scenarios
de développement dont ont fait partie des sociologues, architectes, urbanistes,
paysagistes, ethnologues.
En Bucovine on retrouve une multi culturalité unique dans le pays : des roumains, des
polonais, ukrainiens, allemands. Par rapport aux habitations des autres ethnicités on
peut mettre en évidence les caractéristiques du modèle des ménages roumain, la
« gospodaria ». En premier, la maison est orientée au sud, elle n’a pas une logique
d’alignement sur la rue. La façade principale, ensoleillée, a toujours un espace
intermédiaire couvert mais non fermé, la « prispa », qui crée la liaison entre l’espace
intérieur de la maison et la cour intérieure, l’endroit où se poursuivent les activités
quotidiennes. Autour de la cour on retrouve les annexes, organisées sur une logique
strictement fonctionnelle. Le bâtiment pour stocker le foin, la « sura », souvent accolée
à l’étable, le « grajd », est régulièrement plut haut que la maison et il a une double
entrée pour servir de passage entre la cour intérieure et les terrains extérieurs, le verger
ou potager. La porte d’entrée dans l’ensemble est le seul élément aligné à la rue, elle a
un fort rôle de représentation, de statut social, de signification spirituelle, etc.
10 (v.fig.56)
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 37
37
Tous ces éléments qui composent l’ensemble des ménages sont couverts par une
toiture en bois, de même facture. Ce type de toiture des bardeaux en bois superposés
donne unité à l’ensemble. Elle est d’une grande flexibilité, donne des formes arrondies,
en couvrant aussi des espaces ouverts de stockage connectés aux autres grands
bâtiments.
L’architecture en bois de cette région n’a pas été considérée comme une architecture
de pauvreté, elle appartient aux gens riches et pauvres également, même si la qualité
des constructions n’est pas toujours la même. Il y a un vrai rituel de la construction en
bois. Elle suit des règles précises établies dans le temps et transmises aux générations
successives de menuisiers, charpentiers, artisanats, etc. L’usage du bois a défini même
une organisation de l’exploitation à la construction selon des étapes et périodes précises
pendant l’année. Il faut couper les arbres en hiver, laisser sécher plusieurs ans, assurer
la ventilation, etc. Puis la construction de la maison suit aussi des étapes qui sont liées à
des rituels religieux. Comme on l’a expliqué auparavant chaque élément de la
construction a ses propres significations et message.
L ’ARCHIT ECT URE V ERN ACU LAIR E N ’UTI LI S E P LUS LE BOI S
Le monde contemporain redéfinit la vitesse du développement, il accélère le temps,
réduit la période de la construction. Aujourd’hui l’architecture vernaculaire remplace le
bois par le plastique, la tôle pas chère, etc. Je ne parle pas d’une architecture de
pauvreté ou de manque des moyens qui bien sûr est assez répandue, mais on voit que
même les typologies des maisons changent, que les gens du village adoptent le
« modèle urbain », qu’on ne sait plus le faire en bois, il est fait avec du ciment.
Évidemment que les facteurs économiques du développement jouent aussi un rôle
important.
Mais on revient toujours sur le lien entre typologie et modèle constructif, au rapport
entre un mode de vie et une vision du monde et un matériau. Un autre exemple pour
montrer ce lien est la mutation produite sur l’ensemble des bâtis, car en même temps
que la maison change complètement sa forme, les annexes restent toujours en bois,
elles sont même reconstruites en utilisant des éléments constructifs de la structure
ancienne, elles n’ont pas un autre modèle pour les remplacer.
L’architecture vernaculaire, forcée par de nombreuses conditions – politiques, sociales,
culturelles, économiques – n’a pas un but précis, elle est caractérisée par l’adaptation
des moyens existants, plutôt que par la recherche de nouveaux matériaux. Elle n’est pas
non plus assez localisée comme on peut le croire, car une petite influence peut changer
beaucoup une communauté. Mais dans ce processus de réinvention « in situ » elle fait
toujours preuve de créativité et une certaine ce sélection naturelle de la meilleure
réponse.
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 38
38
NOUV ELLES ES THETIQUES IN SPI R EES DU V ERN ACU LAIR E
La couverture en bardeaux de bois ou tavaillon11
reprend les modèles traditionnels en
favorisant les formes irrégulières, leur grande flexibilité dans la façon de couvrir des
formes diverses avec une surface continue.
Cette flexibilité du matériau à commencé à être explorée même par les architectes
modernes plutôt connus pour une architecture très technique et industrialisée. On cite
l’exemple de Norman Foster et son bâtiment en Suisse12
.
Des nombreux industriels de bois, notamment des pays allemands, ont multiplié leur
gamme de produits, en intégrant les nouvelles tendances.
B.2. L’INFLUENCE CULTURELLE DE L ’EXTREME ORIENT
LE BOI S PO UR HABIT ER , LA PI ERR E PO UR SE PR OTEGER
En général, on juge l’architecture orientale par comparaison avec celle occidentale, on
met en évidence les différences. On observe ce qui est fondamentalement différent des
cultures qu’on connait.
En ce qui concerne le bois, on remarque qu’en Asie Orientale (le Nord-est de la Chine, la
Corée et le Japon) on est face à un autre rapport. Tous les temples, les monuments
historiques sont en bois. On pourra dire qu’il s’agit de civilisations du bois, car on ne
trouve pas l’architecture de pierre de temples et cathédrales européennes. Et pourtant
il y a aussi des exemples exceptionnels comme le temple de Nara au Japon13
ou les
hautes pagodes de la Chine, des vrais monuments en bois !
Bien sûr les critiques vont donner l’exemple de la Grande Muraille ou de la Cité Interdite
de Pékin, qui restent les ouvrages plus étonnants, bâtis en pierre et terre cuite. Mais
c’est là où on trouve peut-être la différence essentielle. Les bâtiments en bois sont
utilisés pour habiter, alors que la pierre est employée dans les structures défensives et
dans les socles. Finalement tous les palais de la Cité Interdite sont construits en bois,
mais le système des enceintes, clôtures et terrasses est réalisé avec la pierre.
11 Terme utilisé en Suisse
12 (v.fig.66-67)
13 (v.fig.69-70)
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 39
39
Et d’ailleurs, je n’ai jamais affirmé que les civilisations asiatiques ne savent pas utiliser la
pierre, car l’exemple du palais d’Osaka14
présente un ouvrage avec les plus grands blocs
de pierre utilisés dans la construction. Ceci accentue le fait qu’il il y à une forte
différence de perception des matériaux, car il était difficile de penser qu’on habite la
pierre, à l’opposé de la chaleur et la noblesse que le bois offre à l’habitat.
L’ARCHIT ECT URE TR ADITIONN ELLE COR EEN NE
J’ai choisi la Corée parmi les exemples asiatiques, car l’architecture coréenne a eu un
développement très particulier aussi. Même si les prouesses de l’architecture japonaise
sont les plus connues au monde et que l’origine philosophique vient de Chine, ce petit
pays au milieu de ces grandes cultures, a réussi à garder une manière de construction
bien conservée dans le temps.
En ce qui concerne l’architecture coréenne il y a deux différences essentielles qui sont à
la base : la vision du patrimoine et le rapport à la nature.
LA R ECON STR UCTION DU PATRI MOIN E
Il s’agit d’une vision différente de la protection du patrimoine par les pays est-
asiatiques, notamment remarquée au Japon. Les « monuments » ou les bâtiments
publics importants ne sont pas censés avoir une vie éternelle comme on le considère en
Occident – les temples grecs, les tombes étrusques, romaines, etc. Dans ces pays,
seulement les fortifications, les bâtiments militaires sont construits en pierre, tout autre
temple, école, maison, pavillons sont faits en bois. Jusqu’au début du XXème siècle, les
villes japonaises ou coréennes étaient des « villes en bois ». Donc on peut encore une
fois, presque plus qu’ailleurs, dire qu’on a à faire avec une culture, une civilisation du
bois. Dans ce contexte une manière de protection du patrimoine a évolué – une garantie
de la reconstruction dans l’état initial, une protection du patrimoine « vivant » - les
métiers de charpentier, menuiser, ainsi que leurs connaissances et techniques sont
protégés. Cette conception on la retrouve dans plusieurs domaines – la musique, la
gastronomie, etc. – la transmission vivante, la reconstruction. En Corée, l’arbre d’un
jardin est considéré comme la partie de la nature qui doit être conservé et non pas le
bâtiment – destiné à la reconstruction régulière. L’arbre est l’élément vivant, non pas le
bâtiment en bois.
Pour l’architecture, en occurrence celle du bois, cette vision du patrimoine a donné
naissance en Corée à un système de construction très spécifique et précis. Il est
évidemment inventé d’abord par la civilisation chinoise et décliné en Corée. Mais si en
Chine il a évolué selon les époques et changements politiques, en Corée il a connu une
évolution plus linéaire, sans changements radicaux. Il s’agit d’un système de
14 (v.fig.72)
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 40
40
construction basé sur des éléments en bois pré-dimensionnés à partir d’un module
commun, inscrit dans des documents, pour qu’il puisse se reproduire exactement dans
le même état initial. La structure est faite avec des éléments verticaux porteurs
ponctuels – les poteaux – et la structure portante horizontale se fait par l’addition et
l’empilage de plusieurs types de petits éléments en bois – presque standardisés - qui
réalisent la descente statique des charges. Ce système, assez simple des points de vue
statiques et physique – comparé aux structures complexes des ponts en Suisse ou des
fermes des cathédrales – se sont très peu modifié pendant plus de mille ans. Mais la
propriété essentielle qui le tient en place c’est la modularité répétable des éléments.
Les modalités des assemblages sont très complexes et elles nécessitent un ordre très
précis. Au finale la structure est assise sur le sol, elle est comme une pièce de meuble,
une table, qui n'a pas besoin d’être connectée aux fondations, elle a sa propre stabilité,
car les assemblages ne lui permettent le déplacement dans aucune direction.
Donc ce type de système de construction peut permettre la pérennité par la
reconstruction et si on considère la qualité renouvelable du bois, on peut dire qu’elle est
parfaitement adaptée à son matériau. La reconstruction chaque 30 - 40 ans des temples
ou autres bâtiments devient assez logique avec le cycle de régénération des forets dans
une pensée de développement durable.
UN AUTR E R AP PORT A LA N AT URE
La deuxième différence essentielle est le rapport a la nature, développé par plusieurs
systèmes de pensée qui s’entrecroisent – taoïsme, confucianisme, Feng shui,
bouddhisme. Dans la pensée coréenne, le site d’une ville ou d’un village se choisit
toujours « avec la montagne derrière et la rivière en face ». Dans ce pays avec 75% de
montagnes, le respect de la nature atteint le sacré, car on ne bâtit jamais sur la
montagne, il n’y a jamais la volonté de dominer la nature – en contraste avec temple
grec au sommet de la colline. Dans le paysage coréen il est facilement remarquable que
les bâtiments les plus hauts situés sur la colline sont les temples des écoles
confucéennes, mais elles n’atteignent jamais le sommet, la montagne reste toujours
derrière. Bien sûr ces bâtiments ont une situation privilégiée – par leur emplacement
sur la pente non pas par leur taille, de même que dans la culture occidentale les
cathédrales ont la place centrale et sont les plus hauts bâtiments.
Une particularité de l’architecture coréenne liée aussi à son rapport à la nature est
l’expression presque imitative des temples bouddhistes. En contraste avec la civilisation
européenne qui favorise l’usage horizontal de troncs des arbres – position contraire à
son état initial naturel – dans l’architecture coréenne la structure est portante verticale
– on remarque l’importance de grands poteaux et la dissimulation des poutres en
nombreux éléments empilés. Ensuite les chevrons s’arrangent en éventail avec un
grande porte-à-faux courbé – les branches des pins parasols. De plus, les couleurs des
temples font une référence directe aux forêts de pins qui les entourent – les poteaux
sont rouges comme les troncs des pins et la partie supérieure est à prédominante verte,
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 41
41
avec des modèles jaunes, rouges, blancs et bleus, comme la couronne des arbres. Cette
référence plus directe à la nature dénote encore les différences culturelles et le rapport
à l’allégorie ou l’imitation, le symbolisme de la forme. Pour ces raisons dans
l’architecture contemporaine on peut observer de nombreux exemples qui « imitent »
ou « citent » des formes connues et cela nous paraît assez bizarre de notre point de vue
occidental.
LES AR CHIT ECT ES JAPO N AI S ET LEUR IN FLUE N CE
A partir de la deuxième moitié du XXème siècle les architectes japonais sont de plus en
plus présents sur l’avant-scène de l’architecture mondiale. Bien qu’il y ait des
architectes de l’Occident, comme Frank Lloyd Wright et Alvar Aalto, qui s’inspirent de la
culture japonaise, les confrères du Japon reprennent aussi les principes de l’architecture
moderne occidentale.
Mais ils lui apportent aussi beaucoup des choses qui viennent de la culture et la
philosophie asiatique. Par exemple le cas des métabolistes qui inspirent une vision d’une
ville qui se refait sans cesse sur elle-même15
, ou la pureté spatiale de Tadao Ando16
TADAO AN DO
Tadao Ando (né en 1941), un admirateur de Le Corbusier, considère que l’architecture
moderne doit s’occuper de nouveaux matériaux. Pour lui la valeur de l’architecture
traditionnelle est l’espace, la relation avec la nature, non pas les matériaux eux-mêmes :
« Mon architecture n’utilise aucun élément architectural traditionnel, cependant je veux
évoquer la sensation de l’espace traditionnel. »
« Les principaux matériaux de construction au XXème siècle sont le verre, le béton et le
métal. Dans mon architecture, je cherche à transporter les idées japonaises dans des
formes qui peuvent se traiter dans ses matériaux. »
Connu plutôt pour sa maîtrise du béton, Tadao Ando a expérimenté le bois dans trois
remarquables projets qui confirment un des aspects fondamentaux de son travail : son
attachement à la terre et à l’histoire du Japon17
. Le premier et le plus marquant peut-
être, fut le pavillon japonais de l’Exposition Universelle de Séville 1992. Un bâtiment
temporaire non pas édifié sur le sol japonais. Sa façon d’utiliser le bois est
complètement différente de celle de Wright en ce qui concerne la nature et la
signification. Il utilise d’une certaine manière les caractéristiques physiques du matériau
et il l’associe avec la plus haute technologie moderne du moment, en réalisant un très
15 On peut la comparer à la reconstruction périodique des temples en bois
16 Liée à la philosophie Zen et son art du jardin
17 Jodidio, Philip. Ando : complete works. Cologne (Allemagne): Taschen, 2010
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 42
42
grand bâtiment en bois (longueur : 60 mètres, largeur : 40 mètres, hauteur maximum :
25 mètres). Il « expose » littéralement au centre de son bâtiment des énormes colonnes
en lamellé-collé, en groupe de 4, soutenant un plafond de 17 mètres de haut, avec un
toit complètement moderne, en téflon, transparent, qui aide en effet à montrer la
structure des éléments superposés en bois.
Pour Ando, la nature du bois a une autre signification que pour Wright, ce qui est
certainement lié à ses origines et à sa culture japonaise, au fait que toutes les villes
japonaises étaient construites en bois avant le milieu du XXème siècle. Mais plus qu’une
référence culturelle, la mise en œuvre révèle les qualités négligées par Wright : la
résistance, la durabilité et le recyclage du bois. Au delà de prouver que le bois n’est pas
si limité en résistance, par un usage innovant18
et qui ne nécessite pas des troncs
d’arbres gigantesques, Ando crée une structure en bois qui isole les éléments. Bien
qu’inspiré de la technique d’assemblage traditionnelle des temples japonais, il
démontre que ces assemblages permettent un recyclage parfait de la structure – ils
peuvent être démontés et remontés encore et encore. Comme les temples ont aussi des
éléments « standardisés », ave un système de dimensionnement strict, pour Ando cela
prouve la capacité de créer des éléments en bois qui sont immédiatement réutilisables –
une idée d’une architecture modulaire, même préfabriquée. Cette idée ouvre une porte
la construction en bois dans une pensée du développement durable, même si cela
n’était pas exprimé comme ca.
Donc, si pour Wright l’assemblage traditionnel détruisait la nature du bois, pour Ando
ceci lui apprend la nature du bois. Il utilise la linéarité du bois en décomposant des
éléments multipliés et non pas la surface comme Wright. Les superpositions de ces
éléments font penser aussi plus aux juxtapositions de Rietveld dans sa chaise en trois
couleurs (1917) et son cabinet ou la maison à Utrecht (1924).
Le musée du bois (Mikata-gun, Hyogo, 1993-94), le deuxième bâtiment reprend
quasiment en totalité la même technique du pavillon de Séville, dans une forme plus
aboutie et définitive, cette fois en ouvrant un espace central circulaire au milieu d’une
forêt. A l’intérieur on trouve des poteaux de cèdre de Hyogo, en lamellé-collé, de 16
mètres de l’hauteur, travaillés localement. Les grandes poutres en haut ont les mêmes
principes de superposition et d’isolement des éléments.
Le plus récent bâtiment en bois de Tadao Ando est le temple bouddhiste de Komyo-ji
sur l’ile de Shikoku (Saijo, Ehime, 1999-2000). Il est la reconstruction moderne
d'un temple de la Terre Pure (Terre Pure est une forme dominante
du bouddhisme) datant de la période Edo (1606-1867). Encore une fois on y trouve des
18 En effet, la technique de bois lamellé-collé est utilise au Japon depuis le XIIème siècle.
On y trouve de temples en bois avec des hauteurs remarquable, par exemple celui de Todai-ji (reconstruit 1709), a Nara, la plus grande construction en bois au monde a une hauteur de piliers a l’intérieur d’environ 17m (Fig. 69)
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 43
43
éléments de la construction du pavillon de 1992. Ando commente lui même ses
principes :
« Le thème principal est une exploration d'un espace en bois. *…+
L'essence de l'architecture traditionnelle japonaise en bois, à mon avis, est
«l'assemblage». Un nombre considérable de pièces de bois sont coupées pour un seul
bâtiment, et le bâtiment prend forme puisque ces pièces sont assemblées et montées
ensemble. »
On voit que sa réflexion est profonde sur le matériau et sa nature, ainsi que sur les
implications sociales :
« Je voulais créer un espace qui serait le retour aux origines de l'architecture en bois. Ce
serait une structure unique composée de plusieurs parties, chacune pleine de
tension. J’ai senti aussi que ce serait, comme le cadre du bâtiment principal, l’expression
de l'image de rassemblement de gens et qui se donnent la main, se soutenir
mutuellement dans une seule communauté. »
Mais plus que la structure, similaire aux bâtiments précédents, mais redimensionnée,
avec des groupes de quatre poteaux et trois couches des poutres superposées, cette
fois, il travaille le mur, la cloison en bois :
« La circonférence a, tout d'abord, un écran de verre dépoli, puis un couloir autour de
l'écran, puis un mur-grillage extérieur autour du couloir. Il s'agit d'une configuration qui
est doublement entourée de l'extérieur. Le mur extérieur à treillage des poteaux de 15
x 21 centimètres (6 x 8 pouces) a des intervalles de 15 centimètres, avec un verre
inséré entre les poteaux. Il en résulte une démarcation indéterminée entre l’intérieur et
l’extérieur. La lumière filtre à travers le mur extérieur en treillis pour
remplir l'intérieur d’une lumière naturelle, douce. C'est un espace lumineux, ouvert
et cérémonieux. »
Cette typologie de « mur en treillis » en bois est devenue assez courante dans
l’architecture contemporaine pour ses qualités plastiques exceptionnelles, on verra plus
bas comment un autre japonais, Kengo Kuma l’exploite au maximum. Encore une fois
l’utilisation du bois ici n’a pas du tout les mêmes caractéristiques que chez Wright. Mais,
F.L. Wright a noté aussi cette qualité du bois : «les bâtons de bois auront leur propre
volume et espacement naturel»19
Même si Ando réalise ainsi des transparences, des textures, des sensations, qui peuvent
être difficilement dissociées du matériau, il essaie toujours de se détacher du bois et de
le mettre encore dans le regard « contemporain » :
« En dehors du fait qu'il s'agit d'une structure en bois et que le toit a un avant-toit en
pente douce sur ses bords, ce bâtiment a presque rien en commun avec l'architecture
traditionnelle japonaise en bois, il est fait de bois lamellé. Cela a été le résultat
19 “sticks of wood will have their own natural volume and spacing”
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 44
44
de notre recherche de méthodes de structure qui, tout en héritant de l'esprit de
«montage» de l'architecture traditionnelle japonaise, serait simple, logique, et en
conformité avec les technologies du bâtiment contemporain. Le bois lamellé est
extrêmement efficace, car il procure une uniformité matérielle et surtout
parce qu'il permet à tout bois d’être utilisé avec aucun déchet. Depuis le matériau lui-
même est constitué par la superposition des pièces plus
petites, il semblait particulièrement approprié à l'intention de cette conception. »
Donc, Tadao Ando induit une dimension philosophique et culturelle même à une
technique, un procédé industriel de préfabrication du bois, tout en relevant ses qualités
de respect de l’environnement et la consommation des matériaux.
KEN GO KUMA
Kengo Kuma a été profondément inspiré par la vision de l’architecte Frank Lloyd Wright
qui aurait « traduit la philosophie japonaise en un langage universel », réinterprétation
qui sera essentielle pour l’architecture moderne. Avec l’attention portée au paysage, au
contexte, l’autre grand thème architectural de Kengo Kuma est l’utilisation de matériaux
naturels comme le bois, la pierre, le papier, la terre, matériaux fragiles que
l’architecture japonaise a toujours recherchés.
Il a travaillé avec des artisans des diverses régions du Japon, redécouvrant alors les
techniques et les matériaux traditionnels. Cette expérience a profondément marqué sa
démarche architecturale, notamment en ce qui concerne l’utilisation des matériaux
naturels locaux. Kengo Kuma rend hommage à l’esprit du lieu et à son histoire et, selon
lui, ce continuum ne devrait pas être interrompu par l’intervention architecturale.
« Je veux estomper les frontières » affirme Kengo Kuma, « je veux gommer
l’architecture ». L’architecture ne devrait pas constituer un objet isolé, mais un élément
intégré à l’environnement. Les édifices doivent parvenir à se fondre dans le paysage. Ils
peuvent jouer la fonction d’intermédiaires entre les caractéristiques de la nature et les
perspectives élaborées par l’Homme. Ils deviennent alors le produit à la fois de l’esprit
du lieu et des idées de l’architecte. L’un de ses ouvrages les plus récents est ainsi
humblement intitulé «Defeated Architecture » : l’architecture vaincue.
Nombreuses sont les démarcations qu’il s’applique à supprimer : celles entre les espaces
intérieurs et extérieurs, les éléments naturels et artificiels, les matériaux authentiques
et les idées abstraites, l’expérience et l’expérimentation, la tradition et les technologies
de pointe, etc.
L’approche architecturale de Kengo Kuma s’appuie sur les concepts clés de « détail », de
« vide » et enfin, de « matériau ». On décrit souvent la légèreté et la délicate simplicité
de ses œuvres. Mais on doit ajouter que sa conception des détails est précise et
magistrale. Étant donné que les éléments constructifs doivent être suffisamment
résistants pour supporter les modifications dues aux conditions naturelles (par exemple,
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 45
45
le bois change de couleur et de forme avec le temps), Kengo Kuma conçoit ses formes
en prenant en considération toutes les évolutions prévisibles de la matière.
Il traite les matériaux avec tendresse et a établi une connivence certaine avec eux. Ceux
qu’on redécouvre actuellement, tels que le bois de cèdre, le bambou, la pierre et le
papier sont habilement employés et mis en œuvre de façon innovante. Ainsi, dans le
musée d’art de la préfecture de Nagasaki (2005), il a utilisé la pierre pour fabriquer des
persiennes – référence architecturale à l’histoire du lieu. La lumière qui traverse les
lames de pierre est une parfaite illustration de sa capacité à faire s’évanouir les
oppositions entre gravité et légèreté, entre opacité et transparence. Notons également
que plusieurs de ses projets ont été nommés d’après les matériaux utilisés : le musée de
pierre, la maison de bambou, la maison de plastique et la villa Eau / Verre.
Le leitmotiv de Kengo Kuma est 'd’effacer l'architecture', convoquer la quasi-disparition
de l'architecture dans son environnement, naturel ou urbain, comme en témoigne le
Kitakami Canal Museum (Miyagi, 1996-99). Pour ses bâtiments qu'il revendique
'faibles', Kuma recourt à des matériaux vernaculaires, terre, bois, bambou, pierre, mais
surtout les pense selon des assemblages constructifs innovants.
Le matériau est ainsi toujours chez Kengo Kuma un principe de construction, d'où
découlent l'esthétique et la symbolique de l'architecture. Le bois en tant qu’élément qui
provient de la nature, est généralement utilisé sous forme de bâtons, de baguettes fines
en bois en treillis. Il dissimule le bâtiment dans son contexte, équilibre le plein et le vide,
efface les limites concrètes.
B.3. PARADOXES ET MUTATION DES RAPPORTS AU BOIS : LE
CAS DE L ’EURASIE DU NORD
LE BOI S UN E R ES SO UR CE P ER MAN ENT E
La péninsule Scandinave et la Russie sont les plus grands exportateurs de bois en
Europe, avec des taux de boisement très élevés et d’essences de bonne qualité. Quand
on parle de l’architecture scandinave, on dit que c’est superflu d’ajouter le mot « bois »,
car cette architecture se définit et surtout se différencie par l’usage régulier du bois
comme matériau de construction. Que l’on parle de l’architecture traditionnelle ou de
l’architecture contemporaine, le bois reste au cœur du débat, il devient une marque
régionale. D’autant plus qu’il exprime deux facteurs déterminants. D’un coté, il fait tout
de suite penser à une qualité physique – « chaud » ; il exprime la chaleur dans un climat
très froid. De l’autre coté il montre l’abondance de ce matériau dans cette partie du
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 46
46
monde. Mais si on étudie l’architecture vernaculaire à travers ces pays, on verra qu’il y
a des phénomènes très différents et des approches assez spectaculaires.
LA NOR VEGE ET L ’ INV ENTION
D’abord, on prend le cas de l’architecture norvégienne, la plus ancienne de la région,
une civilisation assez développée a l’époque des vikings. Si on regarde l’art des vikings,
les bateaux trouvés dans une tombe, on se rend compte tout de suite que leurs
techniques de fabrication du bois étaient très avancées. Mais si on regarde
l’architecture domestique on ne trouve pas de constructions très spectaculaires point de
vue structurel.
Par contre, c’est une architecture extrêmement protectrice, adaptée aux conditions
climatiques sous-polaires. Les maisons sont des piles de grands troncs des arbres. Par-
dessus ils sont couverts encore de troncs d’arbres, sur lesquels on ajoute une couche
d’écorce de bouleau – qui est imperméable - comme l’isolation et par dessus une
couche de terre de 20-30 cm. Donc au lieu de produire une architecture de grandeur, ils
ont trouvé des solutions exemplaires pour s’adapter au climat. Ces solutions sont
utilisées aujourd’hui pour les toitures végétalisées partout dans le monde, avec le même
principe. En plus pour éviter les interstices dus au travail du bois, ils mettent de la
mousse de la forêt entre les bois empilés.
Plus tard, une architecture en bois plus glorieuse apparait avec les églises de bois
debout.
LE DET OURN EMENT S UEDO IS
Un autre cas, en Suède, plus tard, vers les XVIII-XIXème siècles, on trouve une
architecture complètement différente. Une architecture qui essaie de « nier le bois ».
Les suédois ont découvert une substance naturelle pour protéger le bois, à base du
minerai de fer, de couleur rouge. Alors ils commencent à imprégner les planches de bois
avec cette substance rouge. Ensuite ils recouvrent toute la maison – d’une structure
classique en bois empilé – avec un bardage vertical. (Fig. B10-10)
Au-delà de la protection effective du bois – sa durée de vie a bien augmenté – en effet,
ces maisons en « bois rouge » essaient d’imiter la brique – considérée plus noble et plus
chère, plus difficile à se procurer. Donc il est difficile à dire si on a une architecture
spécifique du bois ou plutôt une réplique des manoirs en brique dans le bois. En même
temps, le bois considéré pas cher et pas durable à long terme augmente sa période de
vie et devient conforme au statut social désiré. Encore une fois cette transformation
n’est pas recherchée dans le matériau lui-même, mais plutôt dans l’adaptation d’un
matériau aux autres critères – sociaux, économiques, etc. Dans ce cas le lien direct avec
la nature est rompu, le rouge contraste avec le paysage, on accepte l’architecture en
tant qu’artificielle.
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 47
47
LA MI GRATI ON FO R MEL LE EN S I BERI E
Pour compléter cette idée de modèle d’adaptation du matériau, je prends l’exemple des
villes colonies russes de la Sibérie. Par exemple la ville d’Irkoutsk, sur le fleuve Angara, à
coté du grand lac Baïkal. Au XVIIIème siècle cette ville coloniale russe apparait au milieu
de la Sibérie et devient la plus grande de cette région. Dans ce contexte très isolé, une
architecture vernaculaire étonnante se développe en bois – la seule ressource facile à
trouver pour les constructions. Comme la plupart de familles étaient des aristocrates et
assez riches et cultivés, ils ont reproduits les bâtiments en pierre moscovites de XIXème
siècle. On retrouve des formes littéralement reproduites en bois du langage classiciste
de la pierre, des encadrements de portes et fenêtres, des toitures, etc. Mais cette
architecture ne peut pas nier complètement le matériau et ses techniques. Donc
finalement on assiste à une transformation du bois avec des expressivités qui lui
deviennent propres et impossibles à imiter dans la pierre.
LE R ETO UR DU BOI S AU XXIEME SI ECLE EN F IN LANDE
En Finlande, les trois quarts du pays sont fortement boisés – 23 millions d’hectares – la
plus grande surface boisée de l’Union Européenne. Les essences sont principalement le
pin et l’épicéa, en tant que bois tendres conifères, et le bouleau régional, plus résistant.
Comme dans les autres pays nordiques, même si le bois est une tradition centrale
aimée, au siècle dernier il a été marginalisé en faveur du béton, de la brique et l’acier. Et
de manière choquante, dans les derniers quatre décennies, plusieurs aspects de la
tradition de construction en bois ont presque disparu.
Dans l’ensemble, le patrimoine de constructions en bois est difficilement identifiable.
Contrairement à la Norvège, où on retrouve encore environ 30 milles bâtiments
médiévaux, les nombreuses guerres et invasions de la Finlande – qui s’est toujours
trouvée entre deux grands pouvoirs, la Russie et la Suède – ont déterminé l’usage du
bois des constructions pour chauffer les troupes armées pendant les froides nuits
d’hiver finlandais. La conséquence est une absence complète des bâtiments médiévaux
dans le pays. Ironiquement les grandes villes ont abandonné aussi le bois en tant que
premier matériau de construction à l’époque où l’industrialisation de l’exploitation
forestière a commencé.
Mais ces vingt dernières années, le bois est à nouveau considéré comme un matériau
important pour la construction, car il est considéré comme l’option la plus soutenable à
présent, avec une consommation d’énergie minimale par rapport aux autres matériaux
modernes.
PARTIE B: CULTURES DU BOIS LE RAPPORT DE L’HOMME AU BOIS 48
48
Un nouveau prix international d’architecture – le « Spirit of Nature Wood Architecture
Award » - est établi en Finlande en 1999. Il a été fondé par l’Association « Wood in
Culture » et il est attribué pour l’excellence en architecture à une ou à un groupe de
personnes, dont les projets montrent un usage progressif et créatif du bois dans
l’architecture. Le prix apour but de promouvoir et donner une confirmation
internationale à une architecture qui place au premier plan le bois.
Les lauréats de ce prix ont été :
2000 : Renzo Piano, Italie
2002 : Kengo Kuma, Japon
2004 : Richard Leplastrier, Australie
2006 : Peter Zumthor, Suisse
2008 : José Cruz Ovalle, Chili
2010 : Hermann Kaufmann, Autriche
Fig. 42 : le bois primaire dans les
zones tropicales – 80% de la récolte du bois
part en fumée // ARTE.tv
Le dessous des cartes « Le commerce du bois »
Fig. 43 - 44 : PlasticWoodComposite PWC, imitations du bois en plastic – marché très développé en
Asie // Google Images 2011
Fig. 45 :
« Ondol », système de chauff-age traditionnel coréen
– la fumée traverse le des-sous la maison en réchauffant
le plancher // photo personnelle *2009
Fig. 46 : le bardage en bois roumain
– la décoration devient “fonctionnelle” car la surface de contact du bois avec l’eau
s’agrandi // photo personnelle *2007
4243 44
45 46
PARTIE B: CULTURES DU BOISB. L’ARCHITECTURE VERNACULAIRE
DANS LE MONDE
Fig. 47 : les « ciocarlani », Musée du village,
Curtisoara, Roumanie – éléments symboliques du toit, semblant aux oiseaux,
protège la maison // photo personnelle *2007
Fig. 48 : les « têtes de chevaux »,
Olténie du Nord, Roumanie – éléments symboliques pro-
tecteurs du bâtiment // photo scannée
Fig. 49 : détail église Olténie du Nord,
Roumanie, - marque d’une église démon-
tée et remontée // photo scannée
Fig. 50 : maison du Gorj,
Musée du village, Curtisoara, Roumanie,
- expressivité et liberté de l’espace architectural
// photo personnelle *2007
Fig. 51 : Constantin Brancusi,
Centre Pompidou Paris, - sculpteur originaire de la région de Gorj, Roumanie,
influence de la culture et symbolique locale
// photo personnelle *2008
4748 49
50
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PARTIE B: CULTURES DU BOISB.1. L’ARCHITECTURE VERNACULAIRE EN
BOIS, ROUMANIE
Fig. 52 : Eglise de Rogoz,
Maramures, Roumanie, 1663 – patrimoine UNESCO
// Google Images 2011
Fig. 53 : Axonométrie de l’église de
Ieud Deal, Maramures, Roumanie,
début XVIème siècle – détail de la structure en
bois // Google Images 2011
Fig. 54 : L’église de Budesti - Josani,
Maramures, Roumanie, 1643 – détail de la toiture en bois
// Google Images 2011
Fig. 55 : L’église de Plopis,
Maramures, Roumanie, 1798 – monument en bois
// Google Images 2011
52
53 54
55
PARTIE B: CULTURES DU BOISB.1. L’ARCHITECTURE VERNACULAIRE EN
BOIS, ROUMANIE
Fig. 56 : L’église peinte du monastère
Humor, Bucovine, Roumanie, 1530
– monument UNESCO // photo personnelle *2010
Fig. 57 : Paysage caractéristique de la
région de Bucovine, Roumanie
– relation étroite entre habi-tat, collines, forêts, champs
agricoles // photo personnelle *2009
Fig. 58 : Paysage d’une colonie
polonaise dans la région de Bucovine, Poiana Micului,
Roumanie – des lotissements linéaires
tracés en dépit de la topographie
// photo personnelle *2009
56
57
58
PARTIE B: CULTURES DU BOISB.1. L’ARCHITECTURE VERNACULAIRE EN
BOIS, ROUMANIE
Fig. 59 : maison du village Manastirea
Humorului, Bucovine, Roumanie
– orientation au sud de la façade principale
// photo personnelle *2009
Fig. 60 : « gospodarie » du village
Manastirea Humorului, Bucovine, Roumanie
– l’élément unifiant de la toiture en bois
// photo personnelle *2009
Fig. 61 : détail de toiture d’une mai-
son, Bucovine, Roumanie // photo personnelle *2009
Fig. 62 : artisan local du village Plesa – la continuité d’une tradi-
tion familiale // photo personnelle *2009
Fig. 63 : cérémonie d’enterrement
dans une maison traditionnelle, Partesti,
Bucovine, Roumanie – la relation entre croyance,
traditions et l’habitat // photo personnelle *2008
5960
61 6263
PARTIE B: CULTURES DU BOISB.1. L’ARCHITECTURE VERNACULAIRE EN
BOIS, ROUMANIE
Fig. 64 : le vernaculaire contemporain,
Bucovine, Roumanie – le bois est remplacé par la
tôle pas chère, le parpaing, le plastique
// photo personnelle *2009
Fig. 65 : Renzo Piano,
Centre Culturel Tjibaou, Nou-velle Calédonie, 1998
– inspiration formelle et inter-prétation de la culture locale
// Google Images 2011
Fig. 66-67 : Norman Foster,
« Maison du Futur », St. Moriz, Suisse 2000-2004
– utilisation des tavaillons traditionnels suisses
// Google Images 2011
64
6566
67 68
PARTIE B: CULTURES DU BOISB.1. LES PARADOXES DU VERNACULAIRE
Fig. 69 : le temple Todai-Ji de Nara, Kansai, Japon, fondée 750,
construction actuelle datée 1709
– la plus grande construction en bois au monde
// photo personnelle *2010
Fig. 70 : la pagode à 5 étages du
temple Kôfuku-ji de Nara, Kansai, Japon, 1426
// photo personnelle *2010
Fig. 71 : La cité interdite, Pékin, Chine
– la pierre utilisée pour les terrassements et fortifica-
tions, clôtures, le bois pour habiter (palais et autres bâti-
ments connexes) // photo personnelle *2009
Fig. 72 : Le palais d’Osaka, Kansai,
Japon – la plus grande pierre d’une
muraille de la fortification, 130tones
// photo personnelle *2010
Fig. 73 : Résidence noble à Osaka,
Kansai, Japon – l’omniprésence du bois
dans l’habitat // photo personnelle *2010
69 70
717273
PARTIE B: CULTURES DU BOISB.2. LA CHINE ET LE JAPON
Fig. 74 : temple bouddhiste,
Haeinsa, Corée du Sud – le rapport au paysage
// photo personnelle *2010
Fig. 75-76 : académie confucéenne,
zone rurale à proximité de Busan, Corée du Sud
– l’emplacement dans la nature, de l’extérieur et de
l’intérieur // photo personnelle *2010
Fig. 77 : temple bouddhiste,
Gyeongju, Corée du Sud – les arbres sont plus vieux que les bâtiments derriere
qui ont été reconstruits plu-sieurs fois
// photo personnelle *2010
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PARTIE B: CULTURES DU BOISB.2. LA COREE
Fig. 78 : détail d’un pavillon à Jinju,
Gyeongsangnam-do, Corée du Sud
// photo personnelle *2009
Fig. 79-80 : détails constructifs de
l’architecture coréenne // cours scanés
Fig. 81 : charpentier, Corée du Sud
– le patrimoine vivant et la perpétuation d’une tradition
constructive // photo personnelle *2010
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79 80 81
PARTIE B: CULTURES DU BOISB.2. LA COREE
Fig. 82 : temple bouddhiste,
Gyeongju, Corée du Sud – l’imitation de l’arbre et de la
forêt des pin par les couleurs spécifiques du tronc et de la
couronne // photo personnelle *2009
Fig. 83 : maison noble et jardin,
Corée du Sud – la mise en valeur de l’arbre
et son rapport à la maison // photo personnelle *2009
Fig. 84-85 : détails de l’avant-toit et de la structure dans l’architecture
coréenne // photo personnelle *2009
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84 85
PARTIE B: CULTURES DU BOISB.2. LA COREE
Fig. 86 : Tadao Ando,
Pavillon japonais, Séville, Espagne 1992
–vue de l’entrée principale // Google Images 2011
Fig. 87 : Tadao Ando,
Pavillon japonais, Séville, Espagne 1992
–détail structurel « exposé » // Google Images 2011
Fig. 88 : Tadao Ando,
Musée du bois, Japon, 1996 - gallérie circulaire
// Google Images 2011
Fig. 89 : Tadao Ando,
le temple bouddhiste de Komyo-ji sur l’ile de Shikoku,
Japon1999-2000– signification culturelle du
bois // Google Images 2011
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PARTIE B: CULTURES DU BOISB.2. L’INFLUENCE JAPONAISE
- TADAO ANDO
Fig. 90 : Kengo Kuma,
Noh Stage in the Forest; Teraikekanmachi, Miyagi,
1996 // Google Images 2011
Fig. 91 : Kengo Kuma,
Great (Bamboo) Wall, Beijing, China, 2002
– l’architecture suprimée // Google Images 2011
Fig. 92 : Kengo Kuma, Nakagawa-
machi Bato Hiroshige Museum of Art; Bato, Nasu,
Tochigi 2000 // Google Images 2011
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PARTIE B: CULTURES DU BOISB.2. L’INFLUENCE JAPONAISE
- KENGO KUMA
Fig. 93-95 : l’architecture traditionelle
norvegiene, NORSK FOLKEMUSEUM,
Oslo, Norvège // photos personnelles *2010
Fig. 96 : bateau viking,
Viking Ship Museum, Oslo, Norvège
– performance technique // photos personnelles *2010
Fig. 97 : église en bois de bout,
NORSK FOLKEMUSEUM, Oslo, Norvège
// photos personnelles *2010
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PARTIE B: CULTURES DU BOISB.3. LA NORVEGE
Fig. 98 - 100 : le « paradoxe rouge » de
l’architecture suédoise, Skansen Open Air Museum,
Stockholm, Suède – on essaie de nier la vraie
nature du bois, en imitant la brique
// photos personnelles *2010
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PARTIE B: CULTURES DU BOISB.3. LA SUEDE
Fig. 101 - 103 : Maisons en bois d’Irkoutsk,
Sibérie-lac Baïkal, Russie – des formes en bois em-
pruntées de l’architecture de pierre
// photos personnelles *2010
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PARTIE B: CULTURES DU BOISB.3. LA SIBERIE
PARTIE C : LIMITES DU BOIS PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
PARTIE C : LIMITES DU BOIS
PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
PARTIE C : LIMITES DU BOIS PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
PA R T I E C : LIMITE S DU BOIS
PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE La complexité d’un matériau ............................................................................................ 66
C.1. Une opposition historique face à la pierre ........................................................................ 66
Abris / Tombes .................................................................................................................. 67
Orient / Occident .............................................................................................................. 67
Nomade / Sédentaire........................................................................................................ 68
Poteau / Mur .................................................................................................................... 69
Charpentiers / Maçons ..................................................................................................... 69
Révéler le bois par le contraste ou la complémentarité ................................................... 70
C.2. Le caractère vivant du bois ............................................................................................... 71
Vivant ou Mort ? ............................................................................................................... 71
Peter Zumthor – les parfums et sons du bois ................................................................... 71
Structures paysagères – Architectures vivantes ............................................................... 72
C.3. Le bois – une ressource vraiment renouvelable ? ............................................................. 72
Changement de rapport entre exploitation et régénération ........................................... 72
L’industrie du bois et la gestion des forêts ....................................................................... 73
L’importance des nouvelles découvertes ......................................................................... 74
Quantité / Qualité / Responsabilité .................................................................................. 74
PARTIE C : LIMITES DU BOIS PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
66
LA CO MPLEXIT E D ’UN MAT ERI AU
A la différence des autres ressources naturelles comme la pierre ou la terre, le bois
provient du règne vivant des végétaux. C’est un matériau non homogène, non-isotrope,
il a des caractéristiques spécifiques en fonction de sa section, des espèces, de l’âge, de
la partie utilisée, etc. La science du bois devient de plus en plus complexe et
importante, car c’est un matériau qui a beaucoup de qualités mais aussi des limites, des
imperfections, des irrégularités.
Chaque espèce de bois a des propriétés physiques et mécaniques spécifiques : dureté,
poids, retrait ou flexibilité, mais aussi couleur, lustre et odeur. Les propriétés physiques
les plus importantes d’un bois sont les suivantes :
- La dureté est définie par le niveau de difficulté rencontré dans le travail du bois. Parmi
les bois durs figurent par exemple l’ébène, le chêne ou le buis ; on range au nombre des
bois tendres le peuplier, le saule ou le balsa.
- La flexibilité est la faculté qu’ont certains bois de se plier longitudinalement sans se
briser. Le frêne et l’orme sont de ceux-là ; en revanche, les moins flexibles sont par
exemple le chêne ou l’érable.
- Le poli est une qualité qui s’obtient au mieux avec les bois durs comme le noyer, le
merisier ou le poirier, dont les fibres sont très serrées.
- La densité est la relation entre le poids du bois et son volume.
- L’homogénéité est définie par la structure et la composition des fibres du bois.
- La couleur varie elle aussi en fonction des espèces : le peuplier et l’érable sont
blanchâtres, le chêne brun clair, l’acajou rougeâtre, le bois de rose violâtre, l’ébène noir.
- L’odeur sert souvent à distinguer les espèces.
- La durabilité traduit la durée de résistance d’un bois au pourrissement.
Toutes ces propriétés ont été plus ou moins reconnues et exploitées au fil des siècles, si
bien que l’usage spécialisé des essences s’est peu à peu perfectionné. Pour obtenir le
meilleur bois, l’arbre doit être coupé lorsqu’il atteint son plein développement : les
arbres trop jeunes donnent du bois trop tendre, les arbres trop vieux peuvent receler
des parties intérieures en mauvais état. L’âge optimal de coupe varie selon les essences.
Aujourd’hui l’avantage renouvelable du bois et sa meilleure empreinte
environnementale semblent effacer ses limites naturelles à l’aide de nouvelles
technologies. Mais ses limites ont déterminé des attitudes, des traditions, voire des
convictions envers la signification du bois dans l’architecture. Comment cette
banalisation écologique peut-elle influencer son usage et sa signification en
architecture ? Comment le rapport du bois à la nature change-t-il cette optique ?
C.1. UNE OPPOSITION HISTORIQUE FACE A LA PIERRE Au cours du développement de la civilisation humaine, les matériaux de construction se
sont différenciés par leurs propriétés physiques, notamment la durabilité. Ils ont donné
lieu à des perceptions différentes suivant les cultures. Dans le chapitre précédent on a
PARTIE C : LIMITES DU BOIS PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
67
montré l’emploi et la signification du bois dans certaines cultures qui ont fait du bois le
premier matériau dans la construction, sous différentes formes. Mais dans un pays
comme la France, par exemple, la perception du bois est différente, car on parle d’une
civilisation bâtie en pierre. Il ne s’agit pas seulement d’une question de proximité des
ressources, mais ces oppositions renvoient aux croyances, philosophies ou traditions.
Il y a plusieurs paliers d’opposition dans la signification du bois, en tant que matériau
périssable, et la pierre, en tant que matériau pérenne, durable. Ces oppositions sont
souvent le résultat de l’observation et l’intuition, alors que d’autres fois une recherche
plus profonde est nécessaire.
ABRI S / TO MBES
Cette approche est basée sur les deux explications de l’origine de l’architecture. En
premier la cabane ou l’abri, dont l’objectif principal est de protéger les personnes contre
les intempéries, et puis le bétail et les provisions. La deuxième est la construction des
tombes, déterminée a par la prise de conscience de la mort de l’homme.
On constate que la pierre est utilisée surtout pour les constructions des tombes, des
édifices de commémoration d’une personnalité à laquelle on attribuait des pouvoirs
surhumains: pyramides, stupas, mastaba, tumuli, autels etc. Ces édifices sont conçues
pour durer car ils ne doivent pas dépendre de la vie des hommes. Ils on un caractère
permanent.
Le bois, ainsi que la terre, restent les principaux matériaux destinés à l’habitat : tentes,
kiosques, pavillons, maisons en terre battue avec des planchers en bois, maisons en
bois, etc. Ils on un caractère temporaire. La durée de vie de la maison est dépendante
de l’entretien et de la permanence des générations.
Au cours du siècle dernier, en Occident de nouveaux monuments, les musées, les
bibliothèques, les archives se sont éloignées de cette opposition entre matériaux, de la
protection et la pérennité de la « pierre » : tous les livres de la bibliothèque nationale
française sont tenus en tours de verre, la nouvelle structure du Centre Pompidou à Metz
est faite en bois, etc.
Assiste-t-on alors à une perte de la signification traditionnelle des matériaux ou à un
changement complet de la société, avec une confiance totale dans les nouvelles
technologies et dans sa capacité d’entretenir à long terme toutes ces œuvres
techniques ?
Les matériaux sont aussi entrés dans le débat contemporain sur la « soutenabilité » de
notre développement technique, avec un caractère symbolique et culturel, mais
concret, des propriétés et limites physiques, de durabilité.
ORI EN T / OCCI DEN T
Cette opposition peut être extrapolée aux différences culturelles entre l’Orient et
l’Occident, qu’on a détaillées dans le chapitre B.2. de la partie précédente. Ceci est d’un
PARTIE C : LIMITES DU BOIS PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
68
coté sur le plan de l’habitat, en Asie on « habite » le bois1, alors qu’en Occident, la
pierre. Mais de l’autre coté, l’influence des croyances religieuses à aussi contribué aux
différences de signification du bois dans l’architecture. Les religions ont établi des
approches complètement à part en ce qui concerne l’architecture religieuse.
Revenons à la différence de perception du bois de l’Extrême Orient, notamment sur la
reconstruction permanente des temples au Japon2. Ceci invoque les dimensions
métaphysiques de l’architecture car cette reconstruction est conforme aux croyances de
la renaissance après la mort, de vies multiples. Alors le bois devient le matériau parfait
pour une telle signification, car son caractère renouvelable au cycle de la forêt permet
de redonner périodiquement (25-30 ans) une nouvelle vie par rapport à ces lieux
spirituels. Alors que l’Occident, avec la croyance d’une vie éternelle après la mort, a
préféré la pierre comme symbole de permanence pour les cathédrales, qui règnent
depuis plusieurs centaines d’années.
On trouve donc une différence fondamentale de la signification des matériaux dans
l’architecture entre l’Orient et l’Occident. Mais la nouvelle organisation mondiale fait
que plus de la moitié des surfaces construites dans le monde dans les dix dernières
années sont en Chine, en utilisant généralement le béton et l’acier. Alors qu’en Europe
on constate un retour progressif de la construction en bois. On est donc dans un monde
globalisé où les différences culturelles ne s’opposent plus, mais se mélangent, en
perdant certaines significations et en gagnant d’autres.
NOMADE / SEDENT AIR E
Si on fait un historique des constructions en bois, on observe qu’elles étaient
traditionnellement caractérisées par l’assemblage, avec plus ou moins de savoir faire, de
troncs d’arbres, de poutres façonnées à la hache ou sciées. La délimitation de l’espace à
l’aide de composants naturellement unidimensionnels sous forme de barre se faisait de
manière très différente selon la région. Chez les peuples nomades comme les Indiens
d’Amérique du Nord ou les habitants d’Asie occidentale et centrale, des charpentes
faciles à transporter, composées de tiges en bois, étaient tendues de peaux ou de tissus.
En Asie orientale, des villes entières étaient construites en bambou. Des éléments
formant l’espace, surtout murs et plafonds, étaient réalisés par des tiges bien serrées les
unes à côté des autres. Les surfaces des toits à protéger de la pluie étaient le plus
souvent en paille de riz.
Alors que les hommes se sont sédentarisés, ils ont cherché à utiliser des matériaux dont
la légèreté ne comptait plus, mais la résistance et la durabilité étaient plus appréciées.
1 Voire les explications du chapitre B.2. « Le bois pour habiter, la pierre pour se
protéger », page 2 Ibid. « La reconstruction du patrimoine»
PARTIE C : LIMITES DU BOIS PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
69
Dans les « temps modernes », la disparition de limites dans le temps et l’espace,
soutenue par les réseaux de mobilités internationales, reviennent à une certaine forme
de nomadisme urbain, mais cette fois les matériaux qui remplacent le bois sont plutôt le
plastique, le métal, etc. Quand même les industries ont fait beaucoup d’innovations
dans les produits de recyclage du bois qui commencent à devenir de plus en plus fiables.
POTEAU / MU R
En Europe, on distingue deux types de construction traditionnelle en bois : la
construction en bois empilé et la construction à colombages. Dans le cas de la
construction en bois empilé, telles les constructions en bambou, les éléments formant
l’espace sont composés de tiges superposées, ici de troncs d’arbres bruts, façonnés ou
sciés. Pour la protection contre les intempéries, on utilise selon la disponibilité des
plaques en pierre ou du chaume.
Dans le cas de la construction à colombage, la structure des murs est constituée d’un
squelette en poutres, dont on remplit les interstices de pierres ou de pisé, de torchis.
Les toits, en particulier ceux des édifices sacrés ou de stockage, évoluent vers des
constructions imposantes à mesure que les portées augmentent. Les édifices de la
famille des maîtres bâtisseurs Grubenmann ou les églises en bois debout scandinaves
témoignent de l’excellence de l’art de la charpenterie. Toutes ces constructions, du tipi à
l’église en bois debout, avaient une caractéristique en commun. Elles étaient le résultat
de l’assemblage de tiges unidimensionnelles. Chaque tige n’avait généralement qu’une
seule fonction. En particulier dans les grandes constructions, la disposition était :
« hiérarchique » : la poutre maîtresse, la ferme porte de panne, la panne porte le
chevron qui, lui porte le litonnage.
Cette structure caractéristique au bois, de type poteau – poutre, également développée en Asie, introduit une autre différence, qui provient surtout de la linéarité du bois. On peut dire que traditionnellement le poteau est caractéristique au bois, autant que le mur à la pierre. D’ici découlent les différences entre « l’espace-structure »
3 et « le plan libre »
4
CHAR P ENTI ER S / MAÇONS
Souvent les constructeurs des bateaux deviennent aussi les charpentiers et ils apportent
des techniques de construction et d’assemblage du bois très évoluées. On voit
apparaître après le Moyen Age, à l’époque des villes grandes portuaires, d’étonnantes
charpentes en bois, quelles qu’elles soient des cathédrales ou des halles. En général
pour la structure du toit le bois reste le matériau prédominant, car il n’est pas lourd et il
permet de couvrir des espaces très larges.
Par la suite, les techniques de sciage rationalisées ont simplifié la fabrication de
planches et permis une meilleure gestion du matériau. Ainsi, des plafonds en poutres ou
3 Les limites spatiales sont déterminées par la structure : le mur, la voûte, etc.
4 La structure est indépendante de délimitations spatiales, déterminées par des cloisons
PARTIE C : LIMITES DU BOIS PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
70
en bois demi rond disposés sans interstices (plafonds massifs à cœur fendu ») ont-ils été
remplacés par des plafonds en solives portant un plancher en surface ou un faux-
plancher intermédiaire. Les planches trouvaient aussi un emploi en bardage des
constructions à colombage : leur disposition diagonale (planchéiage) remplace en
contreventement jusqu’aux jambes de force, donnant alors naissance à des types de
construction « platform frame » et « ballon frame » en Amérique du Nord, caractérisées
par leurs montants serrés à disposition exclusivement verticale, et aussi à la
construction à ossature bois de style européen.
En plus, avec la révolution industrielle, les assemblages traditionnels disparaissent petit
à petit, laissant la place aux éléments métalliques de connexion qui offrent beaucoup
plus de flexibilité et de rapidité à la construction.
Si le bois est utilisé pour la construction totale ou partielle des bâtiments ou comme
construction temporaire ou échafaudage ou coffrage pour la construction des bâtiments
en pierre, des voutes, ses arcs, etc., les structures en bois ne cessent de se réinventer
selon le développement technologique de l’époque. Sa flexibilité, sa résistance en
traction, l’élasticité et le poids léger sont les qualités qui ont favorisées la fabrication des
structures en bois La beauté structurale mise en évidence par les constructeurs des
bateaux pour les charpentes est doublée aujourd’hui dans l’architecture contemporaine
par son association à des nouvelles technologies.
Il a toujours existé une différence entre ces deux typologies de métiers, dans l’esprit de
la construction, le « maçon » et le « charpentier ». Si le premier aspire à une sculpture,
en « creusant dans la masse, le deuxième « bricole » une structure à partir d’éléments
d’assemblage.
REV ELER LE BOIS P AR L E CONT RAST E OU LA CO MP LEMENT ARI T E
On trouve aujourd’hui plusieurs exemples qui essayent de remplacer d’autres matériaux
par le bois, ils essaient de cacher le matériau. De l’autre coté, d’autres architectes
utilisent le bois partout bien que des fois il ne se prête pas à un certain usage.
Pourquoi ne pas mettre en évidence les qualités du bois en soulevant les contrastes et
les différences par rapport aux autres matériaux ?
Par exemple, les irrégularités du bois, ses différences de coloration deviennent
importantes dans l’habillage en bois sous forme des planches, le bardage, mais il est
infiniment plus facilement mis en évidence par la mise en contraste de sa naturalité
avec des matériaux « froids » en acier, béton ou aluminium.
PARTIE C : LIMITES DU BOIS PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
71
C.2. LE CARACTERE VIVANT DU BOIS
VIVANT OU MO RT ?
La sensibilité à l’humidité est un des plus importants aspects du bois, car il a des
implications directes dans l’utilisation dans la construction. Le pourcentage d’humidité
du bois peut directement influencer les caractéristiques techniques du matériau. Car il
est un matériau hygroscopique, il garde la possibilité d’échange d’humidité avec
l’environnement, ce qui peut produire des variations de volume et de dimensions
On sait qu’il y a des indications très précises sur le temps de séchage pour la mise en
œuvre correcte du bois, mais, sans une protection supplémentaire, le bois reste
vulnérable, car il absorbe facilement l’humidité et peut pourrir, il est menacé par
l’action des microorganismes et insectes, etc.
Dans ces situations on l’appelle souvent « vivant » ou encore vivant ». Selon certains
paysagistes « Une planche est toujours vivante ».
Mais cette appellation du bois m’intrigue beaucoup. Bien sûr que le bois provient de
l’arbre, du monde vivant et du règne végétal, à la différence des autres matériaux, mais
je ne comprends pas quelles valeurs vivantes un matériau peut avoir après avoir été
coupé, scié, séché ou encore retravaillé industriellement. Utilisé par l’homme dans la
construction il devient aussi artificiel que le bâtiment dont il fait partie. Il s’agit d’un
matériau crée et contrôlé par l’homme, non pas de quelque chose qui appartient à la
nature. En plus il s’agit d’un matériau qui a beaucoup d’avantages, mais aussi il est
menacé en permanence de se dégrader et finalement de retourner à la nature qui l’a
créé, de boucler le cycle.
Les cultures du bois connaissent bien ce processus, car elles ont appris à utiliser le bois
de manière naturelle, elles acceptent sa dégradation, le vieillissement du bois, etc.
Un exemple en Autriche - les gens ne protègent pas le bois avec des produits chimiques
pour qu’ils puissent l’utiliser pour le feu après (sinon il émet des gaz dangereux pour la
santé).
Donc le caractère vivant du bois se traduit du fait de son retour à la nature et non dans
sa phase de matériau dans la construction.
PET ER ZUMT HO R – LES P AR FUMS ET S ONS DU BOIS
Architecte suisse, il déclare en référence à sa formation d'ébéniste dans le laboratoire
de son père : « J'ai grandi en construisant des choses concrètes. (...) Je suis un menuisier
dans ce sens, dans la tentative de connaître le matériau avec lequel je travaille, ses
limites, ses potentialités, l'effet que le temps aura sur lui ...".
Dans le cas du Pavillon Suisse de l'Expo 2000 de Hanovre, l'intuition du projet tire son
origine d'une image fréquente, habituelle : le simple empilage de planches de bois dans
PARTIE C : LIMITES DU BOIS PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
72
un dépôt quelconque ou dans un entrepôt de menuisier ou de charpentier. Le petit
édifice de 3000 m3 est en effet construit avec 45.000 planches de bois non vieilli,
assemblées sans colle : les parois - qui ont une hauteur de 9 m - subdivisent l'espace
intérieur en suivant une logique labyrinthique et complexe, tandis que les plafonds
constitués de poutres de mélèze reposent sur des poutres verticales de pin écossais.
Elles sont maintenues en position par des câbles d'acier reliés à des tirants à ressort au
design minimal et élégant, qui " suivent" le bois dans sa nature de matériau changeant.
Il accepte ce travail du bois, il lui montre la limite, mais il met en évidence les autres
propriétés négligées d’habitude. Son approche est plus sensible, sensorielle, basée sur
l’expérience active et avec tous les sens du bâtiment.
STRUCT UR ES P A Y S AGER ES – ARCHIT ECT UR ES V IVANT E S
Certains architectes, paysagistes ou artistes poussent plus loin ce rapport du bois au
monde vivant. Ces exemples se trouvent à un stade assez expérimental : il s’agit de
structures naturelles, d’architectures vivantes.
Les traces de ces approches viennent plutôt du paysagisme, d’une manipulation ou
aménagement du végétal, avec le matériau bois dans sa forme vraiment vivante. Elles
prennent en compte littéralement le caractère évolutif du bois, qui peut être dirigé par
l’homme et reste vivant en même temps.
Peter Dougherty, Mikael Hansen, Andy Galsworthy ou Nils Udo travaillent plus dans le
land art, en créant avec le bois des structures paysagères avec des formes inédites.
D’un autre côté on trouve des architectes qui sont à la recherche d’un bâtiment évolutif,
d’une architecture vivante, comme dans le cas du groupe Stafte Strukturen (Structures
Soft). Cette approche me paraît très intéressante et pertinente dans le contexte actuel
des idées de façades interactives et de matériaux ou bâtiments qui « poussent », qui
évoluent, mais elle reste encore peu étudiée à ma connaissance.
C.3. LE BOIS – UNE RESSOURCE VRAIMENT RENOUVELABLE ?
CHAN GEMENT DE R APP ORT ENTR E EXP LOIT ATI ON ET R EGEN ERATI ON
La nouvelle signification « renouvelable » du bois est en train d’augmenter la demande
de bois, car il devient une « marque » de l’éco-architecture. On a tendance à croire que
les ressources du bois sont illimitées car les forêts se régénèrent perpétuellement. Mais
qu’est-ce qui assure cet équilibre entre l’exploitation des forêts et leur capacité de
régénération ? Dans une urgence écologique est-ce qu’on n’a pas besoin de plus de
forêts, qui absorbent principalement leCO2 ?
C’est un paradoxe environnemental souvent ignoré par plusieurs acteurs qui voient le
bois comme élément crucial dans la construction à faible consommation d’énergie, donc
une solution « durable » pour la planète. Mais cela veut dire couper plus d’arbres. Les
PARTIE C : LIMITES DU BOIS PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
73
architectes et les constructeurs n’ont pas donc les mêmes priorités que les activistes des
forêts, malgré quelques buts communs.
Dans l’histoire, dans certains cas, il y a eu une relation étroite entre la capacité
régénérative de la forêt et son exploitation, corrélée même avec la croissance
démographique. Par exemple, on sait que dans les Landes, les grandes familles
propriétaires des forêts plantaient quelques dizaines d’hectares de terrain à la naissance
d’un enfant. Alors l’enfant pourra faire usage de cet héritage à sa maturité, corrélé aussi
à l’espèce plantée (15 ans pour le peuplier, 20 ans pour le pin, etc.)
Mais on perçoit que le commerce du bois est fortement mondialisé et les filières bois
locales deviennent souvent insuffisantes. Pour que le bois devienne vraiment
renouvelable il lui faut un équilibre entre son exploitation et sa capacité de
régénération. A cause du réchauffement climatique et notamment du commerce illégal
et de l’exploitation non-contrôlée, la gestion des forêts dans le monde est de plus en
plus réglementée.
Les Nations Unies ont adopté depuis la conférence de Rio de Janeiro, en 1992, l’Agenda
215 en tant que modèle et programme d’action pour le XXIème siècle. Un grand nombre
de ses chapitres évoquent les forêts, la sylviculture et l’exploitation du bois.
L’ INDUSTRI E DU BOI S ET LA GES TION DES FOR ETS
La gestion des forêts est un des plus importants systèmes d’exploitation des ressources
du monde, car bien qu’elle ait de nombreux effets positifs, elle est un système complexe
et non également développé dans le monde.
Un autre paradoxe apparent du développement durable est que « L’usage du bois en
tant que matériau de construction c’est le seul moyen de sauver les forêts du monde.
L’usage du bois est directement lié à la conservation des forêts et la plantation de
nouveaux arbres ».6
Les industries du bois militent pour un usage du bois dans la construction, en disant
qu’ainsi les forêts seront contrôlées et renouvelées en permanence. En Allemagne par
exemple, le concept de « gestion durable de la forêt » a été introduit il y a trois siècles.
En France, on connait l’exemple du massif forestier des Landes, occupant une superficie
de près d'un million d'hectares, il est le plus grand d'Europe occidentale. Cette forêt des
Landes est presque entièrement constituée de forêts plantées et exploitées
industriellement. Sa plantation a commencé au XVIIIème siècle.
5 http://fr.wikipedia.org/wiki/Agenda_21 - l’intégralité du texte (en liens externes)
6 J. Natterer The Use of Timber as a Construction Material - The Only Chance to Save the
Forests of the World
PARTIE C : LIMITES DU BOIS PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
74
Les pays développés, avec une tradition dans la gestion durable des forêts, peuvent être
avantagés de cette montée dans la construction, et en même temps contribuer à une
bonne gestion de l’environnement.
Récemment, six fédérations de propriétaires forestiers allemands, français, autrichiens,
finlandais, norvégiens, suédois ont mis en place une autre certification, c'est le
Programme de reconnaissance des certifications forestières, le PEFC. Les forêts
certifiées par ce label couvrent une superficie de 220 millions d’hectares, soit les 2/3 de
la superficie certifiée mondiale.
L’ IMPORT AN CE DES NO UV E LLES DECO UV ERT ES
Les nouveaux produits vont jouer un rôle essentiel dans la construction bois car ils
peuvent relancer la création, l’expérience, afin de créer de nouvelles esthétiques et
formes dans l’architecture.
Par exemple, les nouvelles technologies offrent la possibilité d’utiliser le bois en termes
de matière recyclable, dans certains produits, notamment les panneaux à base de fibres
de bois7. Certaines industries utilisent même des meubles, mélangés avec des déchets
du bois massif, etc. Alors dans ces conditions plusieurs essences sont mélangées,
pressées et collées ensembles, les produits finaux sont standardisés et pas chers. La
France et l’Allemagne sont les plus grands producteurs de panneaux en bois.
Mais ces produits utilisés déjà depuis plusieurs dizaines d’années continuent d’être
considérés inférieurs au « vrai bois », le bois massif. Mais de point de vue de l’écologie
je pense que ces produits, qui assurent un recyclage complet et pas des pertes, sont très
intéressants et ils méritent plus d’intérêt de la part des architectes.
Mais la question qui suit naturellement est en quoi ce recyclage du bois est-il meilleur
que le recyclage du béton (réutilisé facilement comme agrégats pour les infrastructures)
ou les métaux (avec 90 % de récupération) ?
QUANTI T E / QUALI TE / RESPO NS ABILI T E
Si une gestion raisonnée et durable des forets, en équilibrant soigneusement la cadence
de la consommation et le temps indispensable à leur régénération, peut résoudre les
problèmes de préservation de cette ressource, la mise en œuvre dans les bâtiments
revient aux architectes. Il faut qu’ils intègrent les multiples propriétés du bois dans le
projet, qu’ils ne considèrent plus juste une belle texture choisie d’un catalogue, qu’ils
connaissent l’essence disponible localement et qu’ils les utilisent avec créativité dans
leurs projets.
Aujourd’hui en France, des nombreux architectes, même ceux présentés en tête
d’affiche du HQE, amènent du bois de pays tropicaux, ou de la Sibérie pour les bonnes
7 Certaines industries peuvent recycler même des meubles anciens.
PARTIE C : LIMITES DU BOIS PERISSABLE, VIVANT, RENOUVELABLE
75
qualités du bois « noble ». Mais évidement on ne gagne pas beaucoup sur « l’empreinte
Carbone » avec cette attitude qui va plus loin que les questions de responsabilité et
d’éthique, elle dénote même un manque de connaissances et de créativité.
Je crois qu’un peu plus d’attention dans l’enseignement scientifique de l’architecte doit
être pris en compte car la science de bois est extrêmement complexe et elle ne peut pas
être assimilée facilement.
Les architectes doivent transformer la quantité en qualité, mais non pas le sens de
l’exemple donné au-dessus. Il faut plutôt adapter les nouvelles technologies dans leurs
projets, avoir une vision plus large et enfin donner une signification aux matériaux et
finalement aux projets, en concordance avec l’esprit de l’époque, plutôt que de
respecter des réglementations.
Fig. 104 : mastaba en Egypte
– la construction de tombes favorise la pierre,
signifiant l’éternité // Google Images 2011
Fig. 105 : tente nord-scandinave, Suède,
Skansen, musée en plein air – la construction des abris utilise le bois, signifiant le
temporaire // Google Images 2011
Fig. 106 : Le Parthénon, Athènes, Grèce
– le temple en marbre dom-ine la ville et tout son paysage
// Google Images 2011
Fig. 107 : Temple bouddhiste dans les
montagnes Jiri, Corée du Sud
– le temple domine la vallée devant, mais la montagne
reste derrière lui // photo personnelle *2010
104105
106107
PARTIE C: LIMITES DU BOISC.1. OPPOSITIONS FONDAMENTALES
Fig. 108 : L’évolution du « ger »
(yourte) mongol // Google Images 2011
Fig. 109 : Yourtes (« ger » en mongol)
en Mongolie, 2010 – la structure des tiges de
bois, symbole de la vie nomade
// photo personnelle *2010
Fig. 110 : Shigeru Ban arch.,
Centre Pompidou Metz, France, 2010
– usage d’une grande struc-ture en bois pour un bâtiment
public, un musée // Google Images 2011
Fig. 111 : charpente de l’église
Saint-Girons, 1464-1530, Mo-nein, Aquitaine, France
- les charpentiers utilisent des techniques de construction
et d’assemblage du bois très évoluées
// Google Images 2011
Fig. 112 : le système Fachwerk du
Moyen Age, Allemagne - France
// Google Images 2011
Fig. 113 : les constructeurs de bateaux deviennent souvent les char-
pentiers et apportent leurs techniques en bois
// Google Images 2011
108109110
111 112 113
PARTIE C: LIMITES DU BOISC.1. TENTES ET CHARPENTIERS
Fig. 114 : Mole Architects,
Cavendish Avenue House in Cambridge, England,
Grande Bretagne 2010, le bois en « traditionnel » se
détache sur un fond de maté-riaux très « technologiques »
// Google Images 2011
Fig. 115 : BIG Architects,
Mountain dwellings, Orestad Copenhague, Danemark,
le bois est mis en valeur par le contraste avec le placage
métallique des bords du bâti-ment et rapproché à la nature
par la végétation // Google Images 2011
Fig. 116 : Constantin GORCEA arch.,
la maison Gorcea, 2001-2004 Suceava, Roumanie,
la « boîte en bois »contentant les espaces « à habiter » est
mise en contraste avec les murs blancs qui délimitent « les annexes », la cuisine,
débarras, etc. // photo personnelle *2005
Fig. 117-119 : mise en évidence du bois
par son contraste avec des autres : l’aluminium, la terre,
le verre, // Google Images 2011
114115
116 117118 119
PARTIE C: LIMITES DU BOISC.1. SOULIGNER LES CONTRASTES DES
MATERIAUX
Fig. 120 – 123 : Peter Zumthor,
« le corps sonore », Pavillon Suisse de l’Expo 2000
de Hanovre - édifice de 3000 m3 est en effet construit avec 45.000
planches de bois non vieilli, maintenues en position par
des câbles d’acier reliés à des tirants à ressort au design
minimal et élégant, qui “ suivent” le bois dans sa
nature de matériau « vivant » // Google Images 2011
120
121
122 123
PARTIE C: LIMITES DU BOISC.2. LE S SONS ET LES PARFUMS DU BOIS- PETER ZUMTHOR
Fig. 124 : Mikael Hansen,
« Organic Highway », Danemark 1995
- en relation avec la photo sur la couverture de la partie C,
le « retour » à a la nature du bois
// Google Images 2011
Fig. 125 : Patrick Dougherty,
« Around the corner », Indi-ana USA, 2003
// Google Images 2011
Fig. 126 :Sanfte Structuren,
Allemagne, Suède, Belgique, Pologne, etc., 1998 –
– architecture « botanique », « vivante », « évolutive »
// www.sanftestrukturen.de
124
125
126
PARTIE C: LIMITES DU BOISC.2. ARCHITECTURES VIVANTES
81
CONCLUSION
LES FACTEURS D ’INFLUENCE DE LA SIGN IFICATION DU BOIS « Ce qui distingue fondamentalement l’homme, c’est donc sa faculté d’abstraire et de
généraliser, c’est-à-dire sa faculté d’induction ; d’où, il découle que son besoin
fondamental est l’expérimentation de la signification. Devenir adulte veut dire devenir
conscient des significations. »1
Généralement, pour la plupart des architectes modernes et contemporains, la
signification d’un matériau fait partie d’une pensée plus large sur l’architecture, la
société, l’homme, la nature, etc.
Aujourd’hui, des facteurs sociopolitiques et économiques induisent un changement
dans la conception architecturale et dans le choix de certains matériaux. Les décideurs
politiques, ainsi que le monde scientifique demandent des réductions immédiates de
consommation d’énergie, des émissions de CO2, face à une urgence environnementale,
ainsi qu’économique et sociale.
Ce phénomène d’influence extérieure sur l’évolution de la conception architecturale
n’est pas nouveau dans l’histoire de l’architecture. Par exemple, l’industrialisation et la
standardisation de la construction au début du XXème siècle ont profondément changé
l’architecture. On a commencé à parler d’une « machine à habiter » avec Le Corbusier et
d’un « style international » après la deuxième guerre mondiale.
La conversion des modes de vie dans les conditions d’un « développement durable »
change aussi les attentes et la demande du public de l’architecture. Les matériaux, en
tant que premiers éléments de contact direct avec le bâtiment et son environnement,
1 Christian Norberg-Schulz, « Signification, Architecture et Histoire » dans
La signification dans l’architecture occidentale, Pierre Mardaga éditeur, Bruxelles, 1974
82
peuvent créer un impact majeur et même changer la signification d’une œuvre
architecturale.
Dans ces conditions, le bois est souvent vu comme « le matériau sauveur » de ce monde
polluant et artificiel qu’on n’aime plus, car il est considéré naturel, chaleureux, proche
de l’homme et respectueux de l’environnement.
DIFFERENCES ET RESILIENCE DANS LA PERCEPT ION D ’UN
MATERIAU ANCESTRAL Avant l’apparition de nouvelles techniques de construction qui utilisent le béton et
l’acier, les matériaux dits « naturels » - la pierre, la terre et le bois – ont bâti les édifices
de l’humanité en ayant chacun son rôle bien défini. Leurs significations étaient
dépendantes du contexte culturel, géographique, historique, etc.
Cet usage ancestral du bois a déterminé des différences de perception fondamentales
par rapport aux autres matériaux. La plupart des civilisations occidentales ont favorisé
les qualités pérennes de la pierre pour bâtir des empires, en limitant le bois à un usage
domestique avec un caractère temporaire.
Toutefois, d’autres cultures, en raison du manque de moyen, des ressources ou de la
tradition, n’ont pas cessé d’explorer le bois et ont établi des liens très proches et variés
avec ce matériau, rapports entre les lieux habités et le matériau.
Un contraste majeur s’est créé avec l’Extrême Orient où on a gardé exclusivement le
bois en tant que matériau noble pour l’habitat jusqu’à l’aube de XXème siècle, en
utilisant la pierre, en tant que matériau utilitaire, pour les fortifications et les socles.
A l’ère du développement durable, après quelques décennies de mondialisation, ce
phénomène a tendance à universaliser, voire uniformiser la signification du bois comme
étant « renouvelable » et « écologique ». Mais comme on l’a montré auparavant, il est
difficile de croire qu’on peut changer sa perception culturelle héritée d’un temps long.
A part les questions éthiques de cette banalisation, la résilience des architectes, ainsi
que du public est souvent justifiée car son usage imposé2 mène des fois à des résultats
catastrophiques qui peuvent, comme le disait F L Wright, « malmener l’intégrité du
projet dans son ensemble ».
En même temps, la globalisation produit des effets paradoxaux en ce qui concerne les
matériaux en architecture, car il y a aussi de vrais échanges culturels, d’un coté
l’Occident reprend des concepts orientaux et vice-versa, et de l’autre on emprunte des
esthétiques de l’architecture vernaculaire qui deviennent industrialisées.
2 Le bois devient souvent une “étiquette verte” pour un bâtiment HQE, il n’est pas qu’un
élément de façade qui ne respecte les règles constructive en bois ; un élément ajouté ; un matériau qui se dégrade trop facilement et prouve plus des faiblesses que des avantages
83
TRANSFORMATION RADICALE DU MATERIAU Plus de deux siècles après la Révolution industrielle, tout ce qui est production du bois
peut être considéré industrialisé. Alors cette « image verte », d’un matériau « naturel »,
livrée au public, ne risque d’être qu’un « green washing »3.
En plus, cette demande croissante du bois dans la construction met en péril le
renouvèlement des forêts, et en même temps elle met la pression sur les industries
pour trouver des solutions de plus en plus innovantes, en minimisant les pertes, et en
ajoutant d’autres produits chimiques pour améliorer les propriétés du bois.
En effet, ce « retour » du bois dans le débat contemporain accentue l’importance des
matériaux dans l’architecture, ainsi que le rôle du développement technologique et,
néanmoins, la capacité d’adaptation de tous les acteurs impliqués dans le processus
architectural.
Cette transformation peut être si radicale qu’elle pourra mener à la réalisation d’un
« nouveau matériau » qui remplacera les actuels4. Un matériau qui peut perdre
certaines qualités appréciées par l’homme et effacer les différences physiques par
rapport aux autres matériaux, mais en même temps un « nouveau » matériau qui
dépasse les limite du bois « traditionnel » et offre plus de liberté.
Le bois devient donc, par l’importance symbolique qui lui est induite, une « marque » de
l’époque actuelle, car apparemment aucun matériau ne correspond mieux aux besoins
contemporains. Ce phénomène entraine la recherche de nouvelles esthétiques, plus
d’attention aux aspects constructifs et enfin une réflexion élargie et profonde sur la
signification des matériaux en architecture.
3 L’écoblanchiment, (éco-blanchiment ou blanchiment écologique) est un procédé
de marketing utilisé par une organisation (entreprise, gouvernement, etc.) dans le but de donner à l'opinion publique une image écologique responsable, alors que plus d'argent a été investi en publicité « verte » que pour de réelles actions en faveur de l'environnement 4 Dans des nombreux projets on observe qu’on essaie de prouver qu’on peut utiliser des
produits de bois (poutre lamellé-collé, panneaux contreplaqués, etc.) avec des résultats supérieurs aux autres structures en béton ou métalliques
EXEMPLIFICATION : PROJET DE FIN D’ETUDES LE SOL, L’ARBRE, LE BOIS
EXEMPLIFICATION : PROJET DE FIN D’ETUDES
LE SOL, L’ARBRE, LE BOIS
ELEMENTS D’UN PROJET URBAIN
EXEMPLIFICATION : PROJET DE FIN D’ETUDES LE SOL, L’ARBRE, LE BOIS
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ELEMENTS D ’UN PROJET URBAIN Après avoir effectué un long et complexe questionnement sur les significations du bois,
j’essaie d’exemplifier comment cette réflexion peut contribuer à la conception d’un
projet urbain et d’architecture, mon projet de fin d’études.
Selon Bernard Lassus nous sommes entrés dans une logique où « l’artificiel » réintroduit
« le naturel »1. Le bois peut alors jouer un rôle essentiel. Car quand on introduit le bois
dans cette équation, on se rend compte qu’il appartient aux deux, car il provient de la
nature et en même temps il est utilisé par l’homme pour habiter. Mais comme on l’a
montré précédemment, il est un matériau complexe plein de qualités et en même
temps de limites. Ce « retour » n’est donc pas si simple. Par exemple, il y à une
différence fondamentale de perception par rapport aux autres matériaux, comme la
pierre ou l’acier. Il est considéré comme une ressource renouvelable, mais en même
temps, dégradable. Ou encore les nouveaux produits en bois, les plus utilisés, sont loin
d’être de ce qu’on peut appeler « naturels ».
Comment la conception d’un projet d’urbanisation peut elle réintroduire la nature, par
le biais de l’habiter, en relation avec le bois et en allant de l’échelle territoriale à celle de
l’objet architectural?
Donc, la question du bois dans le PFE ne se restreint pas à l’usage du matériau bois dans
l’architecture, mais plutôt au retour du bois, de l’arbre à la nature avec l’urbanisation. Si
dans le mémoire je fais référence à certains usages du bois, ce n’est pas pour autant un
catalogue pour le projet. Plus largement, cela porte à accorder plus d’importance à la
signification des matériaux dans l’œuvre architecturale.
LA R ECONQ UET E DU T ERR ITOI R E – LE SO L
Mon projet part d’un modèle d’urbanisation depuis l’échelle territoriale jusqu’à l’échelle
de l’habitat. Il est basé sur la logique de la ville linéaire – avec une relation étroite aux
infrastructures, il essaie d’opposer le générique des mobilités aux lieux habités, aux
proximités. La conception générale s’attaque à un territoire fortement modifié par
quatre réseaux d’infrastructures juxtaposés, mais qui manquent de cohésion et de
sentiment d’être habité. Dans l’urgence d’une croissance démographique et la limitation
d’un modèle radioconcentrique des villes avec le développent périurbain de faible
densité, cette approche liée aux infrastructures existantes est justifiée, car il s’agit d’un
territoire déjà transformé.
1 Bernard Lassus, interview dans l’exposition « La ville fertile », Cité de l’architecture et
du patrimoine, Paris, 2011
EXEMPLIFICATION : PROJET DE FIN D’ETUDES LE SOL, L’ARBRE, LE BOIS
86
Le principe général s’appuie sur l’idée de « la ville qui recrée la nature », de l’habitat qui
réintroduit le naturel, à l’inverse de l’opposition classique entre la ville et la nature. Une
rue, qui franchit les quatre réseaux, crée le lien entre un village et sa vallée boisée avec
un autre territoire de champs agricoles, en passant par un tissu pavillonnaire, une
concentration des centres commerciaux et un campus universitaire.
Deux mécanismes prospectifs vont projeter cette rue transversale vers une nouvelle
forme de ville linéaire : les « transitions des sols » et « l’évolution des arbres ».
Traditionnellement, nous avons une logique qui va du territoire à la matière, de la
nature au matériau, dans le sens où l’homme s’adapte à un milieu et en l’habitant, il le
« transforme ». Mais aujourd’hui, dans le contexte choisi du projet, on n’est plus dans
une distinction nette entre naturel et artificiel, on n’est plus dans le cas d’une
colonisation de territoires vierges, car ce lieu est totalement anthropique – depuis les
infrastructures qui traversent le territoire jusqu’aux champs soumis à l’agriculture
industrialisée intensive. On assiste donc à une réorganisation permanente ainsi qu’une
ambiguïté entre « artificiel » et « naturel ».
Car l’occupation des sols, ou en l’occurrence du territoire est un thème de départ pour
ma démarche générale (l’évolution non-limitée du tissu périurbain), la transformation
des sols est un élément clé de la conception du projet. En premier, il s’agit de la
reconversion d’une partie des champs en jardins collectifs bordés par des rangées des
maisons ou immeubles. C’est une manière de créer le passage vers les nouveaux
habitats, en limitant le développement pavillonnaire existant et en redonnant les
champs aux habitants.
« Dans la nouvelle ville, la qualité du sol devrait largement déterminer la forme
fondamentale, et même le style, de chaque occupation dans le bâtiment, les routes et
les institutions. Déterminer où le sol disparaît et où commence le bâtiment devrait
requérir l’attention la plus soigneuse. »
FL Wright, L’architecture et l’étendue réunies sont le paysage
L’AP PARITION DE L ’AR BR E
Les sols et leur attribution à l’habitat sont en relation étroite avec l’évolution de la
végétation dans mon PFE. Le principe reste toujours basé sur l’idée qu’une nouvelle
urbanisation apporte aussi un développement du vivant, de la biodiversité. Cette
logique est similaire à celle du bois en tant que ressource renouvelable (évoqué surtout
dans le chapitre C3).
Des cartes montrent l’évolution des arbres et milieux plantés, projetée en 3 parties :
premières plantations (1-5 ans), achèvement de la nouvelle LGV (7 ans) et arrivée à
l’état de climax (14 ans)2. Il est important pour mon projet d’intégrer et d’illustrer cette
2 Giles Clément
EXEMPLIFICATION : PROJET DE FIN D’ETUDES LE SOL, L’ARBRE, LE BOIS
87
réapparition de l’arbre, car ainsi on peut faire le lien direct avec le matériau bois et
l’habitat.
TROI S EX EMP LES D ’UTI LIS ATIO N DU BOI S
Si je reprends la définition de Wright sur le sens des matériaux «Chacun d’entre eux
(matériaux) a une signification en fonction de sa propre nature ». Si on suppose que
pour nous, aujourd’hui la nature du bois est par excellence d’être une ressource
renouvelable, comment peut-on la décliner dans un projet architectural ou urbain ?
Cette signification est complexe et ne se réduit pas à l’usage du bois dans le bâtiment.
Donc, le bois ne s’impose pas dans tous les bâtiments et peut-être que dans certains il
ne trouve pas sa place.
Dans mon PFE, j’ai choisi de montrer cette nouvelle forme de ville linéaire et
transversale par trois interventions qui correspondent aux trois zones (de 5 en total),
définies par une infrastructure spécifique : champs et ligne grande vitesse, université et
autoroute, entrée de ville et nationale. Trois programmes spécifiques leur sont
attribués : des maisons mitoyennes, un équipement public nautique, un bâtiment mixte
avec centre commercial, bureaux et parkings.
L’échelle architecturale est celle assurant le passage entre les différentes zones. J’ai
choisi de la représenter en coupes et morceaux de coupes détaillés. Ces derniers auront
des spécifications claires sur les matériaux, leur choix en fonction de leur utilité et non
pas par nécessité externe, afin de respecter leur propre nature. Dans ces trois cas il y a
toutefois une certaine utilisation du bois et je vais le présenter pour montrer leur
diversité et leur signification en relation avec le projet dans son ensemble et les autres
matériaux. Cela n’est pas une recommandation d’utilisation, car on a bien vu qu’il y a
une grande diversité de produits et d’usages, qui change de signification en fonction des
contextes, programmes, autres matériaux, etc.
a. Panneaux de bois renouvelables, pour les façades des maisons
b. Poutres lamellés – collés, pour la structure du toit de la piscine
c. Façade végétale aux plantes grimpantes, pour les façades du centre commercial –
parking
88
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90
INDEX * « photos personnelles » ont ©Razvan-George GORCEA No. : 1, 20, 24, 45 – 47, 51, 56 – 64, 69 – 85, 93 – 103, 107, 109, 116 . Total : 46 photos
NO. FIGURE : AUTEUR – TITRE OU PROJET, LOCALISATION PROJET - COMMENTAIRE // SOURCE
A . THEORIES ET ARCHITECTES Fig. 1: interprétation personnelle, I AM GREEN! Recommandation pour un bâtiment écologique // Google Images
2011 + manipulation personnelle
A.1. SIGNIFICATION D’UN MATERIAU EN ARCHITECTURE
Fig. 2: Robert Venturi, I AM A MONUMENT! Recommandation pour un monument, 1972 // Google Images 2011 Fig. 3: Louis Kahn, Indian Institute of Management, Ahmedabad, India, 1974 – détail d’arche en brique avec un tirant en béton armé // Google Images 2011 Fig. 4: Louis Kahn, Salk Institute, Californie U.S.A. 1959-1966 – le bois comme matériau de remplissage, en contraste avec la structure en voiles de béton // Google Images 2011
Fig. 5 : Herzog & deMeuron – l’imprimé partiel sur le mur de cette salle d’un gymnase joue l’ambiguïté de la matière et de la structure qui se cache derrière // photo scannée Fig. 6 : Herzog & deMeuron – Dominus Winery, U.S.A. - l’assimilation du poids de la pierre de ballaste a l’impondérabilité de la lumière transforme signification du matériau // Google Images 2011 Fig. 7 : Peter Zumthor, Musée Kolumba de Cologne, Allemagne, 2007 – l’usage de la brique // Google Images 2011 Fig. 8 : Peter Zumthor, Chapelle Benedict, Suisse, 1989 – l’usage du bois // Google Images 2011 Fig. 9 : Peter Zumthor, Les Thermes de Vals, Suisse, 1996 – l’usage de la pierre // Google Images 2011 Fig. 10 : Peter Zumthor, Musée d’art de Bregenz, Autriche, 1997 – l’usage du verre // Google Images 2011
A.2. LE BOIS POUR FRANK LLOYD WRIGHT
Fig. 11 : Frank Lloyd Wright, bureau de M. Kaufmann – usage du placage en bois, au fond modèles géométriques // Google Images 2011 Fig. 12 : Frank Lloyd Wright, dessin des éléments en bois sur plafond, logique non structurelle // Google Images 2011 Fig. 13 : Frank Lloyd Wright, Hillside Home School II – la relation structurale en bois est cachée, dessin décoratif sur le plafond géométriques // photo scannée Fig. 14 : Frank Lloyd Wright, Unity Temple, Illinois USA, 1908 - des éléments en bois encastrés dans l’enduit des parois // Google Images 2011 Fig. 15 : Frank Lloyd Wright, Romeo and Juliet Windmill - des rangées horizontales sur un bâtiment avec une dominante verticale // Google Images 2011 Fig. 16 : Frank Lloyd Wright, F. F. Tomek Residence – utilisation purement décorative du bois en moulure appliquée au dessus du socle // photo scannée Fig. 17 : Frank Lloyd Wright, E.A. Gilmore Residence – coupe verticale façade, montrant l’espace derrière la moulure en bois // photo scannée Fig. 18 : Frank Lloyd Wright, Taliesin West, Arizona USA, 1937- les poutres très fines renforcées par des éléments métalliques // Google Images 2011
91
A.2. LE BOIS POUR ALVAR AALTO
Fig. 19 : Alvar Aalto, la sauna de la maison expérimentale, Finlande // Google Images 2011 Fig. 20 : Alvar Aalto, détail de garde de corps à maison-atelier Aalto, Helsinki, Finlande, 1956 – inspiration du vernaculaire finlandais // photo personnelle *2008 Fig. 21 : Alvar Aalto, détail aménagement, mairie de Saynatsalo, Finlande, 1952– usage du bois pour le terrassement // Google Images 2011 Fig. 22 : Alvar Aalto, détail aménagement Maison Louis Carré, Bazoches-sur-Guyonne, Yvelines, France, 1957 – usage de la pierre pour le terrassement // Google Images 2011 Fig. 23 : Alvar Aalto, détail poteau Maison Louis Carré, Bazoches-sur-Guyonne, Yvelines, France, 1957 – le bois ajouté sur le poteau métallique fait référence à son lien à la nature // Google Images 2011 Fig. 24 : Alvar Aalto, maison – atelier Aalto, Helsinki, Finlande, 1956 – la maison est envahie par la végétation et rapprochement du bardage en bois // photo personnelle *2008 Fig. 25 : Alvar Aalto, le fauteuil Paimio, 1931-32 // Google Images 2011 Fig. 26 : Alvar Aalto, l’usage du bois en contre - plaqué moulé, courbé, 1929 – expérimentations // Google Images 2011 Fig. 27 : Alvar Aalto, tabouret, 1954 –inspiration de motifs végétaux et industrialisation de la production // Google Images 2011 Fig. 28 : Alvar Aalto, intérieur de la Maison Louis Carré, Bazoches-sur-Guyonne, Yvelines, France, 1957 – plusieurs essences de bois utilisées // Google Images 2011
A.3. A L’ERE DU DEVELOPPEMENT DURABLE - UNE NOUVELLE SIGNIFICATION IMPOSEE
Fig. 29 : détail poutre lamellé-collé // Google Images 2011 Fig. 30 : détail d’une composition complexe des produits en bois avec des technologies avancées – économie du matériau, réduction aux limites négligeable du « travail du bois »// Google Images 2011 Fig. 31 : panneaux de fibres de bois – minimisation des pertes de matériau, possibilité d’utilisation d’un bois de qualité inferieure // Google Images 2011 Fig. 32 : OSB (Oriented Strand Board) – produit bon marché et résistant // Google Images 2011 Fig. 33 : cross laminated timber, contreplaqué de planches 5/7 couches - produit avec une très bonne résistance, réduction aux limites négligeable du « travail du bois »// Google Images 2011 Fig. 34 : construction avec des poutres en lamellé-collé standardisées // Google Images 2011 Fig. 35 : construction avec des panneaux contreplaquées standardisés // Google Images 2011 Fig. 36 : Hangar avec une structure en poutres lamellé-collé – grande ouverture sans appui secondaire // Google Images 2011 Fig. 37 : Drexel Reinhard architecte, Hohenems, Vorarlberg, Autriche, 1999 - toiture suspendue avec de panneaux en contreplaqué 39mm d’épaisseur / hall de 20x50m // Google Images 2011 Fig. 38: Waugh Thistleton Architects, Stadthaus building, Murray Grove, Londres, 2008 – vue pendant la construction à l’intérieur // Google Images 2011 Fig. 39 : Waugh Thistleton Architects, Stadthaus building, Murray Grove, Londres, 2008 - le plus haut immeuble en bois du monde ; tous les éléments porteurs sont en bois // Google Images 2011 Fig. 40 : Waugh Thistleton Architects, Stadthaus building, Murray Grove, Londres, 2008 – la construction fut élevée en 29 jours// Google Images 2011 Fig. 41 : Waugh Thistleton Architects, Stadthaus building, Murray Grove, Londres, 2008 – toutes les parties en bois sont complètement cachées // Google Images 2011
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B. CULTURES DU BOIS Fig. 42 : le bois primaire dans les zones tropicales – 80% de la récolte du bois part en fumée // ARTE.tv Le dessous des cartes « Le commerce du bois » Fig. 43 - 44 : Plastic Wood Composite PWC, imitations du bois en plastic – marché très développé en Asie // Google Images 2011 Fig. 45 : « Ondol », système de chauffage traditionnel coréen – la fumée traverse le dessous la maison en réchauffant le plancher // photo personnelle *2009 Fig. 46 : le bardage en bois roumain – la décoration devient fonctionnelle car la surface de contact du bois avec l’eau s’agrandi // photo personnelle *2007
B.1. L’ARCHITECTURE VERNACULAIRE EN BOIS, ROUMANIE
Fig. 47 : les « ciocarlani », Musée du village, Curtisoara, Roumanie – éléments symboliques du toit, semblant aux oiseaux, protège la maison // photo personnelle *2007 Fig. 48 : les « têtes de chevaux », Olténie du Nord, Roumanie – éléments symboliques protecteurs du bâtiment // photo scannée Fig. 49 : détail église Olténie du Nord, Roumanie, marque d’une église démontée et remontée // photo scannée Fig. 50 : maison du Gorj, Musée du village, Curtisoara, Roumanie, expressivité et liberté de l’espace architectural // photo personnelle *2007 Fig. 51 : Constantin Brancusi, Centre Pompidou Paris, - sculpteur originaire de la région de Gorj, Roumanie, influence de la culture et symbolique locale// photo personnelle *2008 Fig. 52 : Eglise de Rogoz, Maramures, Roumanie, 1663 – patrimoine UNESCO // Google Images 2011 Fig. 53 : Axonométrie de l’église de Ieud Deal, Maramures, Roumanie, début XVIème siècle – détail de la structure en bois // Google Images 2011 Fig. 54 : L’église de Budesti - Josani, Maramures, Roumanie, 1643 – détail de la toiture en bois // Google Images 2011 Fig. 55 : L’église de Plopis, Maramures, Roumanie, 1798 – monument en bois // Google Images 2011 Fig. 56 : L’église peinte du monastère Humor, Bucovine, Roumanie, 1530 – monument UNESCO // photo personnelle *2010 Fig. 57 : Paysage caractéristique de la région de Bucovine, Roumanie – relation étroite entre habitat, collines, forêts, champs agricoles // photo personnelle *2009 Fig. 58 : Paysage d’une colonie polonaise dans la région de Bucovine, Poiana Micului, Roumanie – des lotissements linéaires tracés en dépit de la topographie // photo personnelle *2009 Fig. 59 : maison du village Manastirea Humorului, Bucovine, Roumanie– orientation au sud de la façade principale // photo personnelle *2009 Fig. 60 : « gospodarie » du village Manastirea Humorului, Bucovine, Roumanie– l’élément unifiant de la toiture en bois // photo personnelle *2009 Fig. 61 : détail de toiture d’une maison, Bucovine, Roumanie // photo personnelle *2009 Fig. 62 : artisan local du village Plesa – la continuité d’une tradition familiale // photo personnelle *2009 Fig. 63 : cérémonie d’enterrement dans une maison traditionnelle, Partesti, Bucovine, Roumanie – la relation entre croyance, traditions et l’habitat // photo personnelle *2008 Fig. 64 : le vernaculaire contemporain, Bucovine, Roumanie – le bois est remplacé par la tôle pas chère, le parpaing, le plastique // photo personnelle *2009 Fig. 65 : Renzo Piano, Centre Culturel Tjibaou, Nouvelle Calédonie, 1998 – inspiration formelle et interprétation de la culture locale // Google Images 2011 Fig. 66-67 : Norman Foster, « Maison du Futur », St. Moriz, 2000-2004– utilisation des tavaillons traditionnels suisses// Google Images 2011
93
B.2. L’ARCHITECTURE ASIATIQUE : LA COREE ET LE JAPON
Fig. 69 : le temple Todai-Ji de Nara, Kansai, Japon, fondée 750, construction actuelle datée 1709 – la plus grande construction en bois au monde // photo personnelle *2010 Fig. 70 : la pagode à 5 étages du temple Kôfuku-ji de Nara, Kansai, Japon, 1426 // photo personnelle *2010 Fig. 71 : La cité interdite, Pékin, Chine – la pierre utilisée pour les terrassements et fortifications, clôtures, le bois pour habiter (palais et autres bâtiments connexes) // photo personnelle *2009 Fig. 72 : Le palais d’Osaka, Kansai, Japon – la plus grande pierre d’une muraille de la fortification, 130tones // photo personnelle *2010 Fig. 73 : Résidence noble à Osaka, Kansai, Japon – l’omniprésence du bois dans l’habitat // photo personnelle *2010 Fig. 74 : temple bouddhiste, Haeinsa, Corée du Sud – le rapport au paysage // photo personnelle *2010 Fig. 75-76 : académie confucéenne, zone rurale à proximité de Busan, Corée du Sud – l’emplacement dans la nature, de l’extérieur et de l’intérieur // photo personnelle *2010 Fig. 77 : temple bouddhiste, Gyeongju, Corée du Sud – les arbres sont plus vieux que les bâtiments derriere qui ont été reconstruits plusieurs fois // photo personnelle *2010
Fig. 78 : détail d’un pavillon à Jinju, Gyeongsangnam-do, Corée du Sud // photo personnelle *2009 Fig. 79-80 : détails constructifs de l’architecture coréenne // cours scanés Fig. 81 : charpentier, Corée du Sud – le patrimoine vivant et la perpétuation d’une tradition constructive// photo personnelle *2010 Fig. 82 : temple bouddhiste, Gyeongju, Corée du Sud – l’imitation de l’arbre et de la forêt des pin par les couleurs spécifiques du tronc et de la couronne // photo personnelle *2009 Fig. 83 : maison noble et jardin, Corée du Sud – la mise en valeur de l’arbre et son rapport à la maison // photo personnelle *2009 Fig. 84-85 : détails de l’avant-toit et de la structure dans l’architecture coréenne // photo personnelle *2009 Fig. 86 : Tadao Ando, Pavillon japonais, Séville, Espagne 1992 –vue de l’entrée principale // Google Images 2011 Fig. 87 - Tadao Ando, Pavillon japonais, Séville, Espagne 1992 –détail structurel « exposé » // Google Images 2011 Fig. 88 : Tadao Ando, Musée du bois, Japon, 1996 - gallérie circulaire // Google Images 2011 Fig. 89 : Tadao Ando, le temple bouddhiste de Komyo-ji sur l’ile de Shikoku, Japon1999-2000– signification culturelle du bois // Google Images 2011 Fig. 90 : Kengo Kuma, Noh Stage in the Forest; Teraikekanmachi, Miyagi, 1996 // Google Images 2011 Fig. 91 : Kengo Kuma, Great (Bamboo) Wall, Beijing, China, 2002 – l’architecture suprimée // Google Images 2011 Fig. 92 : Kengo Kuma, Nakagawa-machi Bato Hiroshige Museum of Art; Bato, Nasu, Tochigi 2000 // Google Images 2011
B.3. LES PARADOXES NORDIQUES : NORVEGE, SUEDE, SIBERIE
Fig. 93-95 : l’architecture traditionelle norvegiene, NORSK FOLKEMUSEUM, Oslo, Norvège // photos personnelles *2010 Fig. 96 : bateau viking, Viking Ship Museum, Oslo, Norvège – performance technique // photos personnelles *2010 Fig. 97 : église en bois de bout, NORSK FOLKEMUSEUM, Oslo, Norvège // photos personnelles *2010 Fig. 98 - 100 : le « paradoxe rouge » de l’architecture suédoise, Skansen Open Air Museum, Stockholm, Suède – on essaie de nier la vrais nature du bois, en imitant la brique// photos personnelles *2010
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Fig. 101 - 103 : Maisons en bois d’Irkoutsk, Sibérie-lac Baïkal, Russie – des formes en bois empruntées de l’architecture de pierre // photos personnelles *2010
C. LIMITES DU BOIS
C.1. OPPOSITION FONDAMENTALE FACE A LA PIERRE
Fig. 104 : mastaba en Egypte – la construction de tombes favorise la pierre, signifiant l’éternité // Google Images 2011 Fig. 105 : tente nord-scandinave, Suède, Skansen, musée en plein air – la construction des abris utilise le bois, signifiant le temporaire // Google Images 2011 Fig. 106 : Le Parthénon, Athènes, Grèce – le temple en marbre domine la ville et tout son paysage // Google Images 2011 Fig. 107 : Temple bouddhiste dans les montagnes Jiri, Corée du Sud – le temple domine la vallée devant, mais la montagne reste derrière lui // photo personnelle *2010 Fig. 108 : L’évolution du « ger » (yourte) mongol // Google Images 2011 Fig. 109 : Yourtes (« ger » en mongol) en Mongolie – la structure des tiges de bois, symbole de la vie nomade // photo personnelle *2010 Fig. 110 : Shigeru Ban arch., Centre Pompidou Metz, France, 2010 – usage d’une grande structure en bois pour un bâtiment public, un musée // Google Images 2011 Fig. 111 : charpente de l’église Saint-Girons, 1464-1530, Monein, Aquitaine, France - les charpentiers utilisent des techniques de construction et d’assemblage du bois très évoluées // Google Images 2011 Fig. 112 : le système Fachwerk du Moyen Age, Allemagne - France // Google Images 2011 Fig. 113 : les constructeurs de bateaux deviennent souvent les charpentiers et apportent leurs techniques en bois // Google Images 2011 Fig. 114 : Mole Architects, Cavendish Avenue House in Cambridge, England, Grande Bretagne 2010, le bois en « traditionnel » se détache sur un fond de matériaux très « technologiques » // Google Images 2011 Fig. 115 : BIG Architects, Mountain dwellings, Orestad Copenhague, Danemark, le bois est mis en valeur par le contraste avec le placage métallique des bords du bâtiment et rapproché à la nature par la végétation // Google Images 2011 Fig. 116 : Constantin GORCEA arch., la maison Gorcea, 2001-2004 Suceava, Roumanie, la « boîte en bois »contentant les espaces « à habiter » est mise en contraste avec les murs blancs qui délimitent « les annexes », la cuisine, débarras, etc. // photo personnelle *2005 Fig. 117-119 : mise en évidence du bois par son contraste avec des autres : l’aluminium, la terre, le verre, // Google Images 2011
C.2. CARACTER VIVANT DU BOIS
Fig. 120 – 123 : Peter Zumthor, « le corps sonore », Pavillon Suisse de l'Expo 2000 de Hanovre - édifice de 3000 m3 est en effet construit avec 45.000 planches de bois non vieilli, maintenues en position par des câbles d'acier reliés à des tirants à ressort au design minimal et élégant, qui " suivent" le bois dans sa nature de matériau « vivant » // Google Images 2011 Fig. 124 : Mikael Hansen, « Organic Highway », Danemark 1995 -en relation avec la photo sur la couverture de la partie C, le « retour » à a la nature du bois// Google Images 2011 Fig. 125: Patrick Dougherty, « Around the corner », Indiana USA, 2003 // Google Images 2011 Fig. 126 : Sanfte Structuren, Allemagne, Suède, Belgique, Pologne, etc., 1998 – architecture « botanique », « vivante », « évolutive » // http://www.sanftestrukturen.de
Cette étude attire l’attention sur l’importance de la signification des matériaux dans l’architecture contemporaine. Le « retour » du bois, ce matériau ancestral, en tant que «matériau de l’avenir » mène à de
nouvelles découvertes ainsi qu’à des phénomènes contradictoires. « L’image du bois » est devenue « l’étiquette verte » de l’architecture écologique et du développement durable. Face à cet engouement pour le bois, cette recherche vise à comprendre la complexité des différents fac-teurs construisant sa signification. Elle est structurée en trois parties dis-tinctes.
Dans un premier temps, les significations des matériaux, du bois en particu-lier, sont analysées dans les théories et pensées de plusieurs architectes, pour mieux situer la problématique actuelle et les effets d’un usage imposé du bois dans l’architecture « durable » contemporaine.
Dans un deuxième temps, pour mieux comprendre le rapport ancestral et intime de l’homme au bois, trois « cultures du bois » sont présentées : les particularités de l’architecture vernaculaire roumaine, l’influence culturelle de deux pays asiatiques, la Corée et le Japon, ainsi que les paradoxes et mu-tations de l’architecture nordique.
Enfin, les propriétés et les limites du bois sont étudiées pour comprendre ce qui le différencie historiquement et culturellement des autres matériaux, notamment de la pierre. Aujourd’hui ce qu’on appelle « bois » n’est plus le même matériau « naturel » et vivant » avec lequel l’homme avait entretenu un lien fort.
La qualité « renouvelable » du bois est en train de créer un « nouveau » matériau qui pourra se substituer aux autres, considérés énergivores et polluants pour le monde contemporain.Cette « nouvelle » signification renvoie à une réflexion élargie sur la ques-tion des matériaux, dans un projet urbain et architectural.
Mots-clefs:
Bois, Signification, Architecture, Matériaux, Développement Durable,Culturel, Vernaculaire, Propriétés, Technologie, Renouvelable.