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Histoire de l’Angleterre – partie 3 1 LES BELLES SOIRÉES – Université de Montréal HISTOIRE DE L’ANGLETERRE ET DES ANGLAIS DU XVIIIe SIÈCLE À LA VEILLE DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE EMMANUELLE FRIANT [email protected] PARTIE 3 : L’ÈRE VICTORIENNE (1837-1901) Le très long règne de Victoria (64 ans) favorise la pérennité des changements alors même que la famille royale, apparentée à toutes les cours d’Europe, ne joue plus, en réalité, qu’un rôle de représentation. C’est en coulisse, autour de la figure du Premier Ministre, que se jouent désormais les grands enjeux du règne : réformes électorales qui démocratisent les institutions, industrialisation et essor du grand commerce, apogée de l’empire britannique, question d’Irlande. La période victorienne a marqué les esprits en raison du saisissant contraste entre la rigidité du conservatisme de la bonne société britannique et la misère ouvrière si bien décrite par Dickens. Les bas-fonds londoniens, où s’encanaillent les fils de bonne famille au contact des prostituées et des criminels (dont Jack l’Éventreur est le plus notoire) sont source de tous les fantasmes et continuent d’alimenter la littérature et la production cinématographique actuelles. C’est le temps des dandys – Oscar Wilde en tête – du mouvement spirite dont Arthur Conan Doyle, le père de Sherlock Holmes, est l’un des plus célèbres représentants, des grands romanciers (sœurs Brontë, Thomas Hardy) et des grands peintres romantiques (mouvement préraphaélite, William Turner), tous inspirés par l’effervescence intellectuelle de cette fin de 19 e siècle. BIBLIOGRAPHIE SUR LHISTOIRE BRITANNIQUE EN GÉNÉRAL (non exhaustive) Pour les manuels sur l’histoire générale de l’Angleterre, voir le document de la première partie. 1. Ouvrages universitaires 1.1. Histoire de l’Angleterre au 19 e siècle : *François Bedarida, L’Angleterre triomphante, 1832-1914, Paris, Hatier, 1974 *Christian Bonnet, Le Royaume-Uni de 1837 à 1914. De l’époque victorienne à la Grande Guerre, Paris, Nathan, 1997 *Jacques Carré, La Grande-Bretagne au XIXe siècle, Paris, Hachette Supérieur, 1997

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Histoire de l’Angleterre – partie 3 1

LES BELLES SOIRÉES – Université de Montréal

HISTOIRE DE L’ANGLETERRE ET DES ANGLAIS

DU XVIIIe SIÈCLE À LA VEILLE DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE

EMMANUELLE FRIANT [email protected]

PARTIE 3 : L’ÈRE VICTORIENNE (1837-1901)

Le très long règne de Victoria (64 ans) favorise la pérennité des changements alors même que la famille royale, apparentée à toutes les cours d’Europe, ne joue plus, en réalité, qu’un rôle de représentation. C’est en coulisse, autour de la figure du Premier Ministre, que se jouent désormais les grands enjeux du règne : réformes électorales qui démocratisent les institutions, industrialisation et essor du grand commerce, apogée de l’empire britannique, question d’Irlande.

La période victorienne a marqué les esprits en raison du saisissant contraste entre la rigidité du conservatisme de la bonne société britannique et la misère ouvrière si bien décrite par Dickens. Les bas-fonds londoniens, où s’encanaillent les fils de bonne famille au contact des prostituées et des criminels (dont Jack l’Éventreur est le plus notoire) sont source de tous les fantasmes et continuent d’alimenter la littérature et la production cinématographique actuelles. C’est le temps des dandys – Oscar Wilde en tête – du mouvement spirite dont Arthur Conan Doyle, le père de Sherlock Holmes, est l’un des plus célèbres représentants, des grands romanciers (sœurs Brontë, Thomas Hardy) et des grands peintres romantiques (mouvement préraphaélite, William Turner), tous inspirés par l’effervescence intellectuelle de cette fin de 19e siècle.

BIBLIOGRAPHIE SUR L’HISTOIRE BRITANNIQUE EN GÉNÉRAL (non exhaustive)

Pour les manuels sur l’histoire générale de l’Angleterre, voir le document de la première partie.

1. Ouvrages universitaires

1.1. Histoire de l’Angleterre au 19e siècle : *François Bedarida, L’Angleterre triomphante, 1832-1914, Paris, Hatier, 1974

*Christian Bonnet, Le Royaume-Uni de 1837 à 1914. De l’époque victorienne à la Grande Guerre, Paris, Nathan, 1997

*Jacques Carré, La Grande-Bretagne au XIXe siècle, Paris, Hachette Supérieur, 1997

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1.2. Histoire socio-économique au 19e siècle : *Monica Charlot et Roland Marx, La société victorienne, Paris, Armand Colin, 1997 (nouvelle éd.)

*Roland Marx, La Révolution industrielle en Grande-Bretagne, Paris, Armand Colin, 1997 (nouvelle éd.)

*Véronique Molinari et Catherine-Émilie Corvisy, Les femmes dans l’Angleterre victorienne et édouardienne, Paris, L’Harmattan, 2008 (ouvrage thématique traitant du mariage et de la vie de famille, de l’éducation, du travail, des avancées politiques et du quotidien des marginales)

*François Bedarida, La société anglaise du milieu du XIXe siècle à nos jours, Paris, Seuil, 1990.

1.3. Biographies (non exhaustif !): *Philippe Chassaigne, La reine Victoria, Paris, Folio (version poche), 2017 : par un professeur d’histoire, spécialiste de l’Angleterre du 19e siècle, une biographie accessible et rigoureuse.

*Guy Gauthier, Victoria, l’apogée de l’Angleterre, Paris, Grand West Éditions, 2014 : un ouvrage de vulgarisation historique par un historien, très accessible malgré quelques longueurs.

*Roland Marx, La reine Victoria, Paris, Fayard : plus dense et plus scientifique, une biographie universitaire, par l’un des plus grands spécialistes de l’histoire britannique. Incontournable.

*Bernard Cottret, Ces reines qui ont fait l’Angleterre. De Boadicée à Élisabeth II, Paris, Tallandier, 2016 : ouvrage d’un professeur de civilisation britannique, qui consacre évidemment de nombreuses pages à Victoria.

2. Films/séries télévisées * Victoria, les jeunes années d’une reine (The Young Victoria, 2009), film consacré aux premières années du règne de Victoria et à sa romance avec le prince Albert, avec Emily Blunt, sur un scénario de Julian Fellowes (Dowtown Abbey).

* La Dame de Windsor (1998), film de John Madden avec Judi Dench dans le rôle de la reine, peu après son veuvage.

* Victoria and Abdul (2017), film de Stephen Frears qui donne à nouveau le rôle de Victoria à Judi Dench.

* Oscar Wilde (1988) de Brian Gilbert, avec Stephen Fry et Jude Law, axé sur les mésaventures amoureuses et judiciaires de l’écrivain et fondé sur un rigoureux travail de recherche historique.

* Ripper Street (2012-2013, 2 saisons), série télévisée britannique dont l’action se déroule dans le quartier de Whitechapel en 1889, au temps de Jack l’Éventreur.

* Jack l’Éventreur (2008), un téléfilm avec Michael Caine dans le rôle d’un inspecteur désabusé enquêtant sur Jack l’Éventreur, qui, malgré des longueurs (il dure 3h30) reconstitue bien l’atmosphère du Londres victorien.

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3. La littérature contemporaine est la meilleure source pour mieux comprendre les mentalités et mœurs de la société victorienne, ainsi que l’importance des clivages sociaux. Nombreux sont les auteurs (comme C. Dickens) qui ont critiqué de manière virulente le conservatisme étriqué de la bonne société et la misère des classes populaires tandis que d’autres (comme W. Thackeray) en défendent la morale puritaine. * Charles Dickens (1812-1870), est considéré comme le plus grand auteur victorien,

incontournable quand il s’agit d’évoquer la misère et les maux des classes populaires (par ex. les terribles conditions de vie dans les orphelinats) : ses romans les plus connus sont Oliver Twist (1837-39), David Copperfield (1849-50) et De Grandes Espérances (Great Expectations, 1860-61)

*William M. Thackeray, l’autre grand romancier du siècle est au contraire l’un des meilleurs représentants de la morale victorienne (il se moque beaucoup des mœurs de la classe moyenne), connu notamment pour sa célèbre Foire aux Vanités (Vanity Fair, 1846) ainsi que pour ses Mémoires de Barry Lyndon (adaptées au cinéma par Stanley Kubrick en 1975.

* George Eliot (1819-1880), auteure de nombreux grands classiques de la littérature anglaise, dont Silas Marner (1860), Le Moulin sur la Floss (The Mill on the Floss, 1861) et Middlemarch (1871) dont l’action se situe dans l’Angleterre provinciale.

*Robert Louis Stevenson (1850-1894), L’Ile au Trésor (1883), L’Étrange cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde (1886)

*Oscar Wilde, l’incarnation même du dandy, est l’auteur du fameux roman fantastique Le portrait de Dorian Gray (1890) et de nombreuses pièces de théâtre comiques qui critiquent avec élégance le conservatisme de la bonne société victorienne. Il faut lire notamment L’Important d’être constant (The Importance of Being Earnest, 1895).

*L’Écossais Arthur Conan Doyle, passionné de spiritisme, est le père du détective le plus connu au monde Sherlock Holmes, dont les aventures le portent aussi bien dans la bonne société que dans les pires lieux de perdition de Londres.

*Les sœurs Brontë, dont la vie tragique a fortement inspiré les romans. Les œuvres de Charlotte (dont Jane Eyre, Villette, Le Professeur) et Anne (dont Agnès Grey, La recluse de Wildfell Hall) mettent en scène de jeunes femmes obligées de travailler comme préceptrices dans de riches familles (tout comme les auteures), apportant un éclairage sur la condition féminine dans les classes moyennes et populaires et dénonçant également les mauvais traitements subis par les enfants dans les pensionnats (les deux sœurs aînées de la famille étant décédées dans ces conditions). Les Hauts de Hurlevent, par Emily, sont une fresque romanesque puissante sur deux familles de propriétaires terriens.

La vie des sœurs Brontë est d’ailleurs en elle-même passionnante pour qui s’intéresse à l’histoire sociale et littéraire victorienne : beaucoup de bonnes biographies existent à leur sujet.

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*Thomas Hardy (1840-1928) critique lui aussi les conventions sociales et les rapports de classe. Parmi ses romans, Tess d’Urberville, dénonce l’hypocrisie de la bonne société dans laquelle l’héroïne, fille de paysans abusée par un aristocrate, connaît une irrésistible déchéance.

*Comme Hardy, D.H. Lawrence (1885-1930) expose les effets négatifs de l’industrialisation et de la modernisation dans les campagnes, notamment dans Amants et Fils (Sons and Lovers).

*Sur la Révolution industrielle, le roman-phare est celui d’Elizabeth Gaskell, Nord et Sud (North and South, 1855) dans lequel une femme du Sud de l’Angleterre s’installe dans une ville ouvrière du Nord (inspirée de Manchester, berceau de la Révolution industrielle) et découvre la terrible réalité des conditions de vie des ouvriers.

4. Romans historiques (quelques suggestions) : *Anne Perry est réputée pour ses polars victoriens : elle est l’auteure de deux séries, consacrées aux enquêtes de l’inspecteur William Monck d’une part, et de Charlotte et Thomas Pitt d’autre part. Ses ouvrages sont traduits en français dans la collection « Grands Détectives » aux éditions 10/18.

*Gyles Brandeth est l’auteur d’une série de six romans policiers dans la série « Grands Détectives » aux éditions 10/18. Son héros, qui mène l’enquête, n’est autre qu’Oscar Wilde.

*Kate Summerscale, La déchéance de Mrs Robinson : Journal intime d’une dame de l’époque victorienne, Paris, 10/18, un roman inspiré d’une histoire vraie qui donne un aperçu de la condition féminine à l’époque victorienne

5. Des documentaires britanniques, en anglais, sont facilement accessibles sur Internet :

Queen Victoria Children, série de 3 épisodes (BBC) sur les rapports épineux entre Victoria et ses enfants : https://www.youtube.com/watch?v=rv4RvQuCmR4 Music and Monarchy (David Starkey), épisode 4 « Re-Invention » : https://www.youtube.com/watch?v=Tx3UINh4xIc Plus grand public, l’émission française « Secrets d’Histoire » : « La reine Victoria ou l’empire des sens » : https://www.youtube.com/watch?v=Zqdo9f--Xag (attention toutefois à ne pas prendre tout pour argent comptant : parmi les commentateurs se trouvent des historiens reconnus comme Philippe Chassaigne mais aussi des journalistes ou écrivains qui ne sont pas des historiens). Sur la vie quotidienne : des photographies de la vie quotidienne dans les rues de Londres en 1876-1877 https://www.youtube.com/watch?v=KlNzeoyAokE