guide pratique donne es publiques v 1 beta

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  • 8/7/2019 Guide Pratique Donne Es Publiques v 1 Beta

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    GUIDE PRATIQUEDE L'OUVERTURE DES DONNEESPUBLIQUES TERRITORIALES

    Guide l'usage des territoireset de leurs partenaires

    VERSION DE TRAVAIL N 1Janvier 2011

    Note : ce guide pratique se fixe pour objectif de faciliter l'engagement des collectivitsterritoriales dans une dmarche d'ouverture de leurs donnes publiques. Il se fonde sur uneobservation des expriences franaises et europennes, et notamment sur les dmarches desCommunauts urbaines de Bordeaux et Rennes. Cette version doit tre considre comme uneversion de travail, encore imparfaite. Elle sera enrichie et amliore tout au long de l'anne 2011.

    Nous accueillons avec plaisir vos commentaires, remarques et contributions par email ou bien enligne l'adresse : http://fing.org/vademecum2011

    Amandine BRUGIRE, [email protected] NPOTE, [email protected]

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    Table des matires

    Introduction - Contexte ................................................................3Quest-ce que louverture des donnes publiques? .................................................3Pourquoi ce guide pratique ?...............................................................................4Pourquoi y a-t-il un processus douverture des donnes publiques aujourdhui ? ........5

    1. Ouvrir et utiliser des donnes publiques territoriales............101.1. Une donne publique, cest quoi au juste ?...................................................101.2. Qu'attend-on de louverture et la rutilisation des donnes publiques ? ............121.3. Un nouvel cosystme dacteurs interdpendants.......................................... 27

    1.4. Un cadre juridique trs favorable ................................................................34

    2. Comment sy prendre ? .........................................................362.1. Engager une politique de rutilisation des donnes publiques.......................... 362.2. Dfinir sa politique d'ouverture et de diffusion des informations publiques : lesgrands choix faire.........................................................................................392.3. Comment rendre les donnes accessibles ? ..................................................47

    Annexes ......................................................................................55A1. "Louverture des donnes et aprs..."........................................................... 55A2. Petit lexique de lOpenData ......................................................................... 61A3. Rpertoire des acteurs, organismes et institutions.......................................... 63A4. Bibliographie - Webographie ....................................................................... 66

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    INTRODUCTION -CONTEXTE

    QUEST-CE QUE LOUVERTURE DES DONNEES PUBLIQUES?Partout en Europe, les Etats et les collectivits locales sengagent dans l "ouverture" de leursdonnes publiques. Le sujet sinvite dans les campagnes lectorales nationales, dans lesprogrammes stratgiques des Ministres1 comme des collectivits territoriales, et se diffuse deplus en plus communment dans la presse.

    Mais de quoi sagit-il au juste ?

    De mettre disposition des citoyens, des entreprises, des chercheurs, des associations etmme, des autres acteurs publics, les masses de donnes numriques que les collectivitsproduisent dans leur activit quotidienne : informations gographiques, statistiques,localisation des services, textes rglementaires, tudes, mesures, barmes, informationstransports, annuaires, etc.

    Et d'en permettre la rutilisation par d'autres logiciels, applications et services.Pour quoi faire ? Amliorer les services aux habitants ou en inventer de nouveaux, faire mergerde nouvelles connaissances, enrichir le dbat public

    1 Cf. le volet numrique du Plan de relance France numrique 2012 http://www.francenumerique2012.fr/

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    POURQUOI CE GUIDE PRATIQUE ?

    L'ouverture des donnes publiques n'est pas une option pour les acteurs publics : elle est rendueobligatoire par des directives europennes et une lgislation franaise qui en a fait un droit

    opposable. Citoyens, associations, entreprises, sont en droit d'exiger que les "donnes publiques"leur soient dlivres pour qu'ils en fassent leur propre usage, y compris commercial.

    Mais cette ouverture constitue galement une chance. En s'y engageant, les acteurs publics ontl'occasion de gagner en efficacit, en mutualisant leurs propres bases de donnes : combien dedpartements d'une mme administration, combien d'administrations d'un mme territoire,dupliquent-ils les mmes bases de donnes, les mmes cartes, les mmes statistiques,videmment pas tout fait cohrentes entre elles ?

    L'ouverture des donnes publiques peut galement contribuer au dveloppement conomique et l'amlioration de nombreux services aux habitants comme aux entreprises : en permettant desacteurs de proximit de mieux rpondre aux besoins particuliers de tel quartier, de telle catgoriede population, de tel bassin d'emploi, on cre de l'activit tout en amliorant la qualit de vie.

    L'accs aux donnes publiques offre enfin l'opportunit de faire merger des connaissancesindites sur un territoire, et de partager les lments de la dcision publique avec une socitcivile qui le demande et qui, sinon, se fera sa propre ide en dehors de tout dialogue avec lesacteurs publics.

    Il s'agit donc d'une vritable opportunit pour les territoires, qui plus est moins coteuse et moinscomplexe qu'il n'y parait de prime abord. Chaque territoire la saisira sa manire, enexprimentant et gnralisant. Malgr tout, de nombreux lments doivent tre pris en compte : juridiques, techniques, conomiques, organisationnels. Plusieurs territoires en Europe, et enFrance, montrent la voie : leur exprience a vocation servir aux autres.

    Ce Guide pratique sinscrit dans la dmarche daccompagnement des territoires initie par la FINGautour de la Rutilisation des donnes publiques2. Ce guide se donne pour objectifs dapporter des

    clairages et dinviter les acteurs publics agir. Des moyens, des outils sont dj porte demain, des initiatives existantes, en France comme ltranger, constituent dj des bonnespratiques, ou tout le moins des sources denseignement.

    Il senrichira, toute lanne 2011, des retours dexpriences et dinitiatives des diffrents territoiresengags.

    Cest le moment de se lancer : "Si vous ne le faites pas vous-mmes, dautres le feront votreplace !".

    2 http://fing.org/?-Reutilisation-des-donnees,138-

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    POURQUOI Y A-T-IL UN PROCESSUS DOUVERTURE DES DONNEESPUBLIQUES AUJOURDHUI ?

    L'ouverture et la rutilisation des donnes publiques s'inscrit dans une continuit historique : Linformatisation des administrations depuis plusieurs dcennies : bureautique,

    dmatrialisation des documents administratifs et des procdures, constitution de base dedonnes et de systmes d'information gographiques, publication sur le web, tlservicesnumriques, etc. ;

    Des politiques publiques successives de modernisation de la relation aux citoyens, detransparence de linformation publique, d'accs aux documents, etc.

    Enfin un mouvement plus large dvolution du web et de linterrelation des informations qui sytrouvent publies.

    Dune lgislation base sur laccs aux documents administratifs unelgislation base sur la rutilisation

    Ds 1978, laccs aux documents administratifs a t incit et encadr par une loi (Loi n 78-753du 17 juillet 1978), afin dinstaurer une relation de transparence entre les administrations et lescitoyens, et damliorer laccs aux droits. Tout document dtenu par l'administration, qu'il soit ounon produit par elle peut tre demand par un citoyen, directement ou (en cas de refus) parl'intermdiaire de la CADA (Commission daccs aux documents administratifs).

    Cette loi a t modifie par lordonnance 2005-650 du 6 juin 2005 qui transpose en droit franaisla directive europenne de 2003 portant sur la rutilisation des informations du secteur public.

    Ainsi la proccupation initiale centre sur la transparence et laccs aux droits s'tend un objectifdinnovation conomique et sociale.

    Du point de vue de la Commission europenne, il s'agit d'inviter les administrations europennes

    soutenir plus fortement le dveloppement conomique, et crer une synergie entre secteurpublic et secteur priv sur le march de linformation3.

    Mais l'objectif de la Commission, comme des acteurs publics qui s'engagent concrtement danscette dmarche, est plus large. Les donnes, statiques ou dynamiques forment la matirepremire de la production de connaissances sur le territoire et ceux qui y vivent, de la dcision etde la production de services. Dans nos socits complexes, ceux-ci s'appuient sur un nombrecroissant d'informations issues de sources diverses. Echanger des donnes devient indispensable.Les acteurs publics ont besoin d'informations produites par d'autres administrations, par lesentreprises, les chercheurs ou les associations et vice versa. Ainsi, en rendant leurs donnesrutilisables, les collectivits franchissent un pas supplmentaire, la fois dans la recherche deleur propre efficacit, et dans leur relation avec le reste de la socit.

    A ct du droit dmocratique la transparence que couvre l'accs aux documents publics, merge

    donc un droit conomique et social de rutilisation des donnes : l'administration considrecomme son devoir de distribuer la capacit de faire des usages pertinents de ses propres donnes.

    Cependant, cette volution pose son tour de nouvelles questions auxquelles il faut apporter desrponses pratiques : qui peut rutiliser quelles donnes, et sous quelles contraintes ? Que faire sila mise disposition un cot ? Dans quelle mesure la responsabilit de l'acteur public se trouve-t-elle engage par les usages qui sont faits de ses donnes ? Comment faire en sorte quel'ouverture des donnes, dont on ne peut videmment pas contrler tous les usages, produise desrsultats globalement positifs d'un point de vue social, conomique, environnemental etdmocratique ?

    3 Ce mouvement est initi ds 1989 avec la publication du document "Lignes directrices pour amliorer la synergieentre secteur public et secteur priv sur le march de linformation".http://ec.europa.eu/information_society/policy/psi/index_en.htm

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    EN FRANCE, UNE TRADITION ANCIENNE DE PUBLICATION DES DONNEES JURIDIQUES

    Il est souvent de bon ton daffirmer que la France est en retard sur ses voisins europens enmatire d'ouverture de ses donnes. Certes, d'autres pays tels que le Royaume-Uni apparaissent enpointe, mais la France a su se montrer pionnire dans le domaine, et le mouvement y est

    aujourd'hui bien engag.Depuis les annes 80, la France est engage dans la mise disposition de ses donnes juridiques,afin de faciliter laccessibilit et lintelligibilit de la loi. Si "nul nest cens ignor la loi", ce devoircitoyen savre une tche impossible au regard des 8 000 lois et plus de 110 000 dcrets envigueur. Les pouvoirs publics franais ont pour cette raison mis en place ds 1984 un "service publicde diffusion du droit", constituant des bases de donnes officielles pour les informations juridiques(lois, rglements, jurisprudence), et accessibles aux citoyens4. Les avances technologiques ont tlargement utilises par les producteurs et diteurs des bases de donnes juridiques officielles. En2002 un dcret5 instaurant la mise en ligne gratuite sur l'internet des informations juridiquesmarque un nouveau tournant. (Notons que le gouvernement britannique vient douvrir en octobre2010, son site dinformations juridiques "Acts and statutory instruments6").

    Linformation publique fait lobjet dune politique volontariste sur l'internet depuis dj plus de 10,

    avec le portail service-public.fr, cr en 2000 (et son guide des droits et dmarches) ; ainsi que devie-publique.fr, le site dinformation et de documentation des grands dbats publics.

    En revanche, cette diffusion porte aujourd'hui sur des documents formats, ditorialiss et publissur des pages web. La mise disposition de donnes "brutes" (budgtaires, gographiques,statistiques, de service...), directement issues des systmes informatiques des administrations,reprsente une nouvelle tape que les acteurs publics s'apprtent aujourd'hui franchir.

    Les "open data", un mouvement mondial

    Le mouvement douverture des donnes ("Open Data") ne se limite pas aux donnes publiques. Un

    grand nombre de secteur dactivits, ayant besoin de rcolter et danalyser des masses dedonnes (la recherche, la statistique, le secteur de lenvironnement, le journalisme, la culture,lintelligence conomique, la finance, lurbanisme, la cartographie, pour ne citer queux) ontdvelopp depuis longtemps des pratiques de partage de donnes, selon des modalits propres.

    Le monde scientifique a, par exemple, largement contribu la constitution dune culture departage de donnes et la diffusion de pratiques en la matire. Le terme "donnes ouvertes" y a faitson apparition ds 1995 dans le secteur de la recherche environnementale, o les chercheurs onteu besoin de partager les rsultats l'chelle mondiale7. Si les rsultats de la recherche circulentdepuis longtemps, la "science ouverte" se proccupe donc aussi de celle des donnes surlesquelles s'appuient ces rsultats. Il s'agit d'une part de faciliter la critique des rsultats publis,mais plus encore, de fournir le matriau de futures recherches8.

    4 Voir :- la circulaire du 14 fvrier 1994 relative la diffusion des donnes publiques (Journal officiel du 19 fvrier 1994, p.2864).- La circulaire du 6 juillet 1994 Consultation des banques de donnes juridiques- Larrt du 12 octobre 1994 Base de donnes informatises du Journal officiel des lois/dcrets (Journal officiel du 14octobre 1994, p. 14451).- Enfin le dcret n 94-980 du 14 novembre 1994 relatif la dlivrance de documents par le Conseil dEtat, les coursadministratives dappel et les tribunaux administratifs (Journal officiel du 15 novembre 1994, p. 16158).]5 Dcret n 2002-1064 du 7 aot 2002 relatif au service public de la diffusion du droit par linternethttp://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=PRMX0205836D6http://www.legislation.gov.uk/7 Notons que dans une large mesure, la critique du Groupe intergouvernemental d'experts sur l'volution du climat(GIEEC) se fonde d'une manire certes abusive sur la prtendue opacit des donnes sur lesquelles s'appuient lesmodles climatologiques. Rcemment deux chercheurs en appelaient ce que l'Organisation mtorologique mondialeappuie la cration dune banque communes de donnes climatiqueshttp://www.lemonde.fr/idees/article/2009/12/21/les-donnees-climatiques-devraient-devenir-publiques-par-gil-mahe-et-alain-gioda_1283739_3232.html8 Cette dynamique a donn naissance en 2006 lOpen Data Foundation.

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    Dans le secteur priv, l'change plus ou moins ouvert de donnes constitue une pratique de plusen plus rpandue, et se situe mme au coeur du modle conomique de plusieurs gants du web.

    Le pionnier en la matire est Amazon qui, ds 2005, a ouvert ses bases de donnes de livres viaune "interface de programmation" (API9). Des professionnels du livre comme des amateurs ont puafficher sur leur site des informations jour sur les livres, et les ont combines leur proprecontenu. Par ricochet, les internautes intresss par un livre se voyaient redirigs vers Amazonpour l'acheter. Le revenu est partag entre Amazon, et le site partenaire.

    Google Maps a lui aussi propos ses fonds de carte sous la forme dAPI ouvertes : gratuites pourun site sans vise commerciale et jusqu un certain niveau de consultation ; payantes si le traficest important ou pour l'accs certaines fonctions avances. Le cas chant, les revenus de lapublicit gnre par les "Google Ads", sur les sites tiers, sont partags entre Google et lepartenaire.

    A la suite de ces pionniers, la pratique s'est gnralise et fonde de nombreux modlesconomiques. De nombreux sites web se construisent en assemblant des briques (donnes, fondsde cartes, applications...) issues d'autres sites. On dsigne ces "services composites" sous le nomde "Mashups".

    Il est important de noter que ce systme nest pas compltement "gagnant/gagnant" au sens o lerutilisateur est dans une dpendance relle loffreur, ce dernier pouvant stopper tout momentla mise disposition de ses donnes.

    A la diffrence du secteur public, le secteur priv est en effet entirement libre d'ouvrir ou nonl'accs ses donnes. Du moins pour l'instant... La question devient en effet de plus en pluscomplexe lorsque les donnes en question proviennent, par exemple, de capteurs installs dansl'espace public, ou encore des internautes eux-mmes : traces dusages et de transactions,alimentation sous forme de crowdsourcing (o le site demande ses utilisateurs de produire oud'enrichir son contenu), publications et donnes personnelles sur les rseaux sociaux. "Statistiquesde frquentations des sites web, composition du graphe social, recommandations dans son rseausocial, achats en ligne et composition du panier, dplacements dans la ville identifis par le mobile,consommation lectrique identifie par les compteurs intelligents... chacun dentre nous gnre auquotidien une multitude de traces numriques qui sont autant de donnes susceptibles dtrerexploites par des tiers, et de circuler [...]. Les sites web ont-ils le droit de commercialiser cesdonnes gnres par leurs utilisateurs ?" questionne la chercheuse Valrie Peugeot10. Lesrponses cette question seront sans doute plurielles

    Vers le "web des donnes"

    Lvolution des technologies de linformation et de la communication, particulirement des formatset des capacits dchange de contenus, va de pair avec le mouvement douverture et derutilisation des donnes. Elle le permet autant quelle le dcuple. Le web devient lespace de jeuet de partage par excellence.

    Le web connectait au dpart des documents, des "pages". Dsormais, il interconnecte desapplications, des services et des informations de base, les donnes. Un document avait sonadresse (l'"URL") et ses descripteurs (un titre, un auteur, une date de cration, des mots-cls), ilen va dsormais de mme des donnes. Grce au web, un site web pourra par exemple agrgeren un seul endroit une multitude d'informations sur une ville : des cartes, la localisation deservices ou de lieux publics, de l'information trafic, la mto, des statistiques conomiques ousociales, etc.

    Pour qualifier limportance quest en train de prendre la donne dans le web daujourdhui et dedemain, Tim OReilly et John Batelle, les inventeurs du concept de web2.0, ont propos en 2009 leterme de web ("web au carr") : par l ils pointaient lide que le web, en raison de la quantit dedonnes - publiques, prives, de bien commun, statistiques, gographiques, personnelles... et des

    9 Voir lexique. Amazon ne livre donc pas l'ensemble de sa base de donnes : elle permet des programmesinformatiques de l'interroger en ligne, sous la forme de "requtes" auxquelles la base de donnes rpond avec desfiches (ouvrages et autres produits).10 in Peugeot 2010 p.7

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    possibilits de mashup, ne se dveloppait plus de manire arithmtique mais exponentielle. Cestune puissance supplmentaire du web et dune capacit nouvelle pour lhomme de combiner desinformations.

    "RAW DATA NOW"LES DONNEES BRUTES MAINTENANT !Intervention de Tim Berners-Lee lors de la confrence TED (2009)

    Lors de sa prsentation la confrence TED en mars 2009, Tim Berners-Lee, linventeur duWorld Wide Web, en appelle au partage et louverture des donnes brutes. "Grce au "www",on a pu mettre en ligne sur le web des milliers de documents, explique-t-il. Maintenant il faut ymettre des donnes". Quelles diffrences y a-t-il entre documents et donnes ? Les documentssont lire, analyser. Les donnes, si elles sont dans un format interoprable, sontdirectement utilisables, combinables... Cest le principe du "LinkedData" ("donnes lies") : lesdonnes du web de demain seront des objets relationnels.

    La profusion de donnes et dinformations sur le web, et leur interrelation requirent de penser denouveaux formats de structuration, de recherche, de lien entre celles-ci. La description de cesrelations devient le moteur des applications et services de demain. Cest l le domaine derecherche du web smantique. Il ne sagit plus de crer des liens entre des mots isols, mais entredes entits smantiques, comme lexplique cette vido propose par Metaweb, un diteur de basesde donnes ouvertes (Freebase).

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    1. OUVRIR ET UTILISER DES DONNEESPUBLIQUES TERRITORIALES

    1.1.UNE DONNEE PUBLIQUE, CEST QUOI AU JUSTE ?

    Comme toute organisation aujourd'hui, un acteur public utilise l'informatique pour prparer toutesses dcisions, produire tous ses services, valuer toutes ses actions. Et l'informatique traite desdonnes : par exemple, des fonds de cartes et des informations attaches aux cartes, desstatistiques, des descriptions de services et de lieux publics, des mesures, des tudes et rapports,des barmes, des textes rglementaires, des informations temps rel, et de bien d'autres choses.Ces informations sont la matire premire de l'action publique. Mais elles pourraient aussibnficier d'autres acteurs publics, ainsi qu' des entreprises innovantes, des associations, deschercheurs, des citoyens. C'est l'ide qui sous-tend la directive europenne sur la "rutilisation desdonnes publiques" (2003), transcrite en droit franais en 2005 sous la forme d'une rvision de laloi du 17 juillet 1978 sur l'" amlioration des relations entre l'administration et le public" : les"donnes publiques", finances par l'impt, doivent pouvoir tre rutilises par d'autres acteurs,au service de la qualit des services sur le territoire, de la croissance conomique, de laconnaissance et du dbat dmocratique.

    La dfinition juridiqueEn France, la loi considre la notion d'information publique, qui inclut les donnes, comme uneinformation produite ou reue "dans le cadre de leur mission de service public, par l'tat, lescollectivits territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes dedroit priv charges d'une telle mission" [article 1 de la loi de 1978].

    C'est donc la finalit de l'action qui dtermine le caractre public d'une information : les donnesproduites par un oprateur priv dans le cadre d'une mission de service public, sont des donnespubliques. En revanche, les donnes qui participent une mission de service public industriel etcommercial ne sont pas a priori"publiques".

    La loi franaise tablit donc une obligation gnrale d'ouverture des donnes publiques, tout enprvoyant quelques exceptions : les donnes relevant de la vie prive, les donnes relevant de la scurit nationale, les informations prsentes dans des documents sur lesquels des tiers dtiennent des droits de

    proprit intellectuelle.

    Toutes les autres donnes publiques sont rutilisables de droit. La loi franaise est mme all plusloin que la directive europenne en crant un droit opposable la rutilisation de ces donnes.

    Une administration ne peut sopposer la demande dun acteur priv, quel quil soit, de voir sesdonnes rutilises. En cas de refus ou de non rponse, tout acteur priv, individu ou organisation,peut saisir la CADA dont le rle est de "veiller la transparence de l'action administrative et seprononcer sur les modalits de rutilisation des informations publiques" et qui constitue unevritable voie de recours prcontentieuse11.

    Le cas des donnes nominativesLes donnes nominatives peuvent tre des donnes publiques lorsqu'elles ne relvent pas de la vieprive : par exemple les donnes qui concernent les personnes publiques dans l'exercice de leurfonction ; ou encore les donnes concernant des personnes qui n'ont pas de responsabilitpublique, lorsque ces personnes interviennent dans le cadre d'une activit publique. En revanche,tout en tant collectes dans le cadre d'une mission publique, les donnes du recensement, par

    exemple, ne sont pas publiques.11http://www.cada.fr/fr/presentation/center2.htm

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    Le droit distingue galement des cas o une donne nominative peut avoir une publicit limite :par exemple l'annonce d'un mariage est publi en mairie mais ne peut faire l'objet d'unepublication sur l'internet ; au titre du droit l'oubli, il n'est pas permis de publier indfiniment surl'internet des jugements, impliquant donc des personnes, alors que cette information est publielocalement.La publication de donnes nominatives doit donc faire l'objet d'une analyse juridique dtaille pours'assurer qu'elle entre bien dans le cadre de la loi.

    L'anonymisation des donnes

    Il peut tre intressant de rendre publiques des donnes nominatives en les anonymisant. Lesecteur de la sant, par exemple, fait un usage abondant de donnes anonymises, dontcertaines sont publiques (progression de la grippe, etc.). L'anonymisation est cependant un travailtrs dlicat. Certains chercheurs avancent que l'anonymisation absolue est impossible. L encore,il existe en France une expertise sur ce sujet, qu'il convient de consulter12.

    12 Livre blanc "Anonymisation des Donnes caractre personnel", crit par Bruno Rasle:http://www.cortina.fr/livres-blancs.php

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    1.2.QU'ATTEND-ON DE LOUVERTURE ET LA REUTILISATION DESDONNEES PUBLIQUES ?

    Les motivations qui prvalent louverture comme la rutilisation des donnes publiques

    peuvent tre trs diverses, selon le point de vue du protagoniste sous lequel on se place :producteurs, rutilisateurs. Dans les deux cas, les attentes de "cration de valeurs" sont trs fortesque celles-ci aillent dans le sens dune plus grande innovation sociale, dun nouveau dynamismeconomique, d'une plus grande efficacit des procdures administratives, d'une amlioration desservices au public, ou encore dun nouveau contrat dmocratique. En tout cas, la valeur attenduene serait se restreindre la seule valeur conomique.

    Cela tant, la mise disposition des donnes ouvre par dfinition un espace d'incertitude :l'administration qui "libre" ses donnes ne peut pas tout savoir, ni tout contrler, de ce qui ensera fait par les "rutilisateurs". Le mouvement tant par ailleurs relativement rcent, les acteurssusceptibles de tirer parti des donnes publiques ne se sont pas encore tous manifests.

    Ainsi, lors d'une premire analyse de la rutilisation des donnes du portail amricain data.gov, on

    a pu tre surpris de constater qu'en 2008 et 2009, lexploitation des donnes criminelles aconcentr elles seules 80% des rutilisations13.

    Do la ncessit danalyser et de comprendre au mieux, au regard des initiatives existantes, lesobjectifs attendus et les impacts rels. Cette partie sattache prsenter les principaux objectifsavancs par les parties prenantes, et de les mettre en regard des rsultats dj observables.Malgr le manque de recul dans le temps, il est indispensable de partager largement les initiativeset de se livrer au fur et mesure leur valuation.

    1.2.1. Efficacit administrative et innovation publique

    Amliorer les outils de travail internes et moderniser les processus bureaucratiques sont desobjectifs largement avancs par les acteurs publics : gagner en efficacit, rduire les redondances,amliorer la gestion des connaissances, mieux valuer l'action publique, rduire les cots

    13 Hubert Guillaud "Mesurer les effets de la libralisation des donnes"http://www.internetactu.net/2009/09/16/critiquesdu-web%C2%B2-24-les-effets-de-la-liberation-des-donnees/

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    Les services des administrations produisent - seules ou en se faisant aider par des tiers - desinformations destines clairer les propositions dactions publique et les dcisions des lus(statistiques, diagnostics, donnes prospectives, rapports dvaluation, etc.). Ces informationsrestent la plupart du temps au sein des services, au mieux sont-elles stockes sur un serveurpartag le fameux "intranet" -, et rfrences par des mots cls. La circulation de cesinformations nest pas chose aise dun service lautre, et encore moins dune administration une autre, le plus souvent par mconnaissance et manque de visibilit.

    Dcloisonner laction publique :Les divers ministres ou directions d'une collectivit travaillent bien souvent sur des objetscommuns, mais elles ont malgr tout tendance les traiter chacune de son ct, reproduirechacune les mmes bases de donnes (statistiques, gographiques, etc.). Si chaque directionfaisait savoir aux autres de quelles donnes elle dispose, diffrentes possibilits s'ouvriraient : Limiter les redondances : une seule base de donnes pour une mme fonction, alimente et

    mise jour par tous ceux qui y ont recours ; Croiser, comparer, combiner des informations : les informations des directions en charge, par

    exemple, de la voirie, des transports, de l'environnement, ont tout intrt tre croises.D'autres services peuvent galement en avoir besoin, qu'il s'agisse des "bureaux des temps"

    ou des agences de dveloppement conomiques charges d'tudier des programmesd'implantation d'entreprises. Ces croisements se font dj aujourd'hui, mais de manire ad hocet complexe. Ils pourraient devenir normaux et quotidiens.

    Mieux valuer l'action publique : la plupart des dcisions publiques, notamment locales, ontdes consquences dans un grand nombre de domaines. Leur efficacit ne peut s'valuer dansle cadre du seul dpartement qui en a la charge.

    Rendre l'action publique plus lisibleLa mise disposition des donnes publiques est une manire certes indirecte de rendre l'actionpublique plus intelligible, dans ses processus, ses choix et ses consquences. Il n'est pas facile dela comprendre lorsque celle-ci s'exprime dans des longs documents ou dans un langageadministratif certes ncessaire la prcision juridique, mais peu parlant pour les citoyens.

    Ainsi, de trs nombreux travaux portent aujourd'hui sur la "visualisation de donnes". Il s'agit detraiter un vaste ensemble d'informations, parfois trs htrognes, pour le reprsenter de manirevisuelle et le rendre plus comprhensible, voir pour dtecter des corrlations jusqu'alors invisible.

    Le Treemapping fait partie de ces nouvelles formes de visualisation, mettant en exergue lesstructures hirarchiques des informations contenues.

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    QUELQUES EXEMPLES DE TREEMAPPING

    Les chercheurs d'IBM auteurs d'un ensemble d'outils de visualisation censs tre accessibles tous, ManyEyes, ont "cartographi" les dpenses du budget franais14 Un clic sur chaque grandensemble livre une explication contextuelle.

    Le Whashington Post15 sest galement servi du Treemapping pour donner voir diffremmentlagenda du Prsident Obama. En faisant ressortir visuellement les thmes abords lors desdiffrentes runions, on donne lire les sujets qui marquent lintrt du Prsident, ou quicontraignent lactualit politique.

    14http://www-958.ibm.com/software/data/cognos/manyeyes/visualizations/recettes-de-letat-francais-2007-pr15http://projects.washingtonpost.com/potus-tracker/?wpisrc=nl_fed

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    En Grande-Bretagne, le site "Where does my money go?" rend visible d'une autre manire larpartition du budget national, ainsi que des diffrentes rgions, avec des comparatifs possibles.

    Inviter au partage et la collaborationEn ouvrant ses donnes, l'administration invite de fait d'autres acteurs, ainsi que les citoyens, contribuer leur tour enrichir une sorte de "domaine public" des informations relatives unterritoire ou un domaine.

    Ces acteurs peuvent d'abord tre des entreprises, commencer bien sr par celles qui ont lacharge de services indispensables sur un territoire. On sait, par exemple, combien la rticence detous les acteurs de la mobilit partager leurs informations rend difficile, presque partout en

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    France, la mise en place de services d'information multimodale sur les transports, qui seraientpourtant si importants pour la vie quotidienne des habitants (et pour l'environnement). Pensonsgalement aux trsors d'information que dtiennent les rseaux d'nergie et d'eau, les entreprisescharges du traitement des dchets, les oprateurs de tlcommunication, la grande distribution,les banques, La Poste Plusieurs de ces entreprises examinent aujourd'hui quelles informationselles pourraient partager sans dvoiler, ni la vie prive de leurs clients, ni leurs secretsstratgiques. Si elles le font, c'est bien parce que les acteurs publics ont pris le devant.

    Les citoyens peuvent galement contribuer enrichir les donnes "publiques". A Brest, Rennes,dans la petite commune de Plouarzel (Finistre), mais aussi en Hati juste aprs le tremblement deterre, la population (et dans le cas d'Hati, les internautes du monde entier) a t appele complter, corriger, enrichir les cartes du territoire. Les donnes disponibles, gnralement issuesdu Systme d'information gographique (SIG), taient mises disposition du site de cartographiecollaborative OpenStreetMap et de sa communaut. Et celle-ci l'a rendu au centuple lacollectivit. Certains ont prcis le trac des rues ou localis les points d'intrt. D'autres ontcartographi l'accessibilit du territoire aux handicaps. D'autres ont trac les itinraires cyclables,etc.

    PLOUARZEL ET LE CROWDSOURCING GRANDEUR NATURE

    Confronte au problme de mise jour et ddition de son plan communal, et ne disposant pas desmoyens ncessaires pour faire fonctionner un service technique, cette commune de 3150 habitantsa fait le choix de mettre les cartes quelle avait disposition sur OpenStreetMap, et de proposer la population de les enrichir. Au cours dune "cartopartie", coordonne par le centre multimdia dePlouarzel, une quarantaine dhabitants volontaires, quips de GPS par la mairie, ont sillonn leterritoire " pieds, cheval, vlo, moto, en voiture... et mme en kayak 16 pour en rpertorierles sites les plus remarquables et les inscrire sur les cartes d'OpenStreetMap. Ainsi enrichies,celles-ci sont devenues aujourdhui loutil de rfrence de lOffice municipal de Tourisme. Cettedmarche participative, trs innovante, a attir sur la commune une notorit nouvelle, sanscompter le sentiment que les habitants peuvent ressentir d'avoir contribu au bien public.

    16http://wiki.openstreetmap.org/wiki/Plouarzel

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    MASHUP MARSEILLE PROVENCE 2013

    Marseille et les villes environnantes seront en 2013 la "capitale culturelle de l'Europe". Et si cegrand projet dont le territoire espre beaucoup tait produit en commun avec les habitants, lesassociations et les entreprises qui y vivent ? C'est l'ide qui sous-tend le projet "MMP2013". L'ideconsiste verser un vaste ensemble de donnes urbaines, publiques, prives et citoyennes, dansun mme espace partir desquelles elles pourraient tre rutilises de diverses manires. Et pouren faciliter l'accs, le projet prvoit de partager galement des outils d'analyse et de visualisation

    de ces informations.

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    17 Illustration Anas Triolaire et Julien Defais - atelier Marseille Provence 2013

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    1.2.2. Transparence de laction publique et vie dmocratique

    Ddramatiser la "transparence"A l'vidence, l'ouverture des donnes publiques est un outil de transparence. Elle permet destiers, quelles que soient leurs intentions, d'examiner certains pans de l'action publique et s'ils lejugent pertinent, d'en dnoncer les dysfonctionnements.

    La transparence a aujourd'hui mauvaise presse. Elle s'assimile volontiers au souponsystmatique, la dnonciation, ou aux drives numriques dont l'affaire des tlgrammesdiplomatiques amricains rvls par Wikileaks est le plus rcent symbole.

    Les pays nordiques et anglo-saxons en font pourtant une pierre angulaire de leur viedmocratique. En Sude, une loi datant de 1776 autorise tout citoyen demander auprs desautorits concernes en moins de vingt quatre heures, davoir accs aux notes de frais dunMinistre18. En Angleterre, la culture de la transparence est aussi trs forte. En novembre 2010, legouvernement de David Cameron annonait ainsi que toutes les dpenses administrativesdpassant 25 000 (environ 29 500 ) seront publies en ligne, ainsi que lintgralit des contrats

    correspondants, soit presque 200 000 lignes articles de dpenses. Bien sr lobjectif nest passeulement de vivifier le dbat dmocratique, il est galement financier : faire pression sur les tarifsde certaines prestations en faisant jouer la concurrence19, et ainsi mieux employer largent public("modern deregulation"). Soit une plus grande transparence au service dune plus grande efficacitde laction publique.

    Mais la transparence est galement une rgle dmocratique partout ailleurs, notamment enFrance. Elle est dj au cur de la loi de 1978, qui instaure la "libert d'accs aux documentsadministratifs", et c'est cette loi dont la rvision en 2005 encadre dsormais aussi la mise disposition des donnes publiques des fins de rutilisation.

    C'est au nom de cette transparence que lassociation Regards Citoyens a cr le sitehttp://www.nosdeputes.fr/, qui extrait de plusieurs sources (en gnral de pages web que deslogiciels "lisent" pour en extraire les donnes prsentes) de nombreuses informations sur chaque

    dput : les commissions auxquelles il appartient, ses votes, ses interventions, sa prsence ou sonabsence en sance, etc. Voici comment le site se prsente aux internautes : " En synthtisant lesdiffrentes activits lgislatives et de contrle du gouvernement des lus de la nation, ce siteessaie de donner aux citoyens de nouveaux outils pour comprendre et analyser le travail de leursreprsentants. Conu comme une plateforme de mdiation entre citoyens et dputs, le sitepropose chacun de participer et de s'exprimer sur les dbats parlementaires. Au travers de leurscommentaires, les utilisateurs sont invits crer le dbat en partageant leur expertise lorsquecela leur semble utile. Peut-tre pourront-ils ainsi nourrir le travail de leurs lus ?"Certes, le sitepermet de voir quels dputs dtiennent les records d'absence en sance, mais il rend aussi visiblel'activit de la masse des dputs qui travaillent, et contribue probablement plus revaloriser letravail politique qu' l'inverse.

    Nosdeputes.fr a t cr par une association parce que le Parlement ne proposait pas l'accs ces

    donnes, pourtant minemment "publiques" par vocation. C'est dire l'importance, pour les acteurspublics, de prendre les devants : s'ils prennent l'initiative de rendre visible les informations quipermettent le contrle dmocratique, ils rendront le soupon sans objet et permettront ques'engage un dialogue constructif sur le pourquoi de tel choix, de telle dpense. Dans le cascontraire, ils s'exposent ce que les donnes soient malgr tout divulgues, souvent par desgroupes qui poursuivent un intrt particulier, ventuellement entaches d'erreurs, et dans uncontexte o ils auront se dfendre non seulement sur le fond, mais sur le pourquoi de leuropacit.

    Plus la transparence est choisie, plus ses ncessaires limites comme on le voit s'agissant destlgrammes diplomatiques, dont mme Wikileaks a expurg ceux qui faisaient courir des risquesaux personnes peuvent faire l'objet d'une discussion dpassionne.

    18http://www.sweden.gov.se/sb/d/2184/a/15521 A noter que, en cas douverture dune instruction judiciaire, ou depoursuites quelconques, la loi protge les fonctionnaires sudois qui dlivrent les documents.19http://www.guardian.co.uk/politics/2010/nov/19/government-data-accounts-private-firms

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    La participation sur des bases communesOn connat l'importance, et les limites, de la "dmocratie participative". Trop souvent, les dbatscitoyens qu'organisent les collectivits rassemblent des audiences clairsemes, composes avanttout de "citoyens professionnels", d'habitus du dbat public qui ont certes acquis une relleexpertise, mais qui, du coup, ne reprsentent pas plus (et parfois moins) que les lus les"citoyens". Les dbats publics en ligne sont moins aisment monopoliss par ces acteurs parailleurs ncessaires, mais il est galement difficile de savoir qui y intervient, et le profil socio-culturel de ceux qui y participe est souvent trs typ.

    L'ouverture des donnes publiques ne rsout pas magiquement ces problmes, mais elle ouvreune possibilit nouvelle, et dterminante : celle de partager, entre toutes les parties du dbat, unebase d'informations, de reprsentations et de simulation commune.

    Supposons que les acteurs publics, les citoyens, les entreprises concernes, les associations,travaillent tous ensemble sur les mmes informations ; qu'ils partagent des outils d'analyse, voirede simulation (modles conomiques, cartographie pour des projets d'urbanisme, etc.) ; quechacun puisse proposer ses analyses et permettre aux autres de les discuter en les comprenantne peut-on imaginer que la "dmocratie participative" y trouverait une seconde jeunesse ?

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    1.2.3. De nouveaux services, des services amliors pour la viequotidienne

    Innovation sociale et innovation conomiqueFace la l'urgence et la complexit des enjeux territoriaux, aux contraintes financires et l'mergence de nouveaux dfis (la ville durable, le vieillissement, le lien social), la diversit desbesoins, les acteurs publics ne peuvent plus tre seuls dlivrer (ou dlguer, ce qui revientpresque au mme) les services essentiels leurs habitants. Il faut dcloisonner, faire venir etassocier en permanence des ides et des nergies neuves. Une premire rponse a t cherchedans les "partenariats public-priv", mais ceux-ci concernent le plus souvent de trs grandesentreprises, charges de produire un service public prcisment dfini et, le plus souvent, choisiessur des critres avant tout financiers.

    En ouvrant les donnes utiles la production de services sur son territoire, la collectivit publiqueinvite d'autres acteurs intervenir : des associations locales qui connaissent bien les besoins d'unepopulation, des mdias rgionaux, des jeunes entreprises inventives, des citoyens malins

    LES DONNEES DE TRANSPORT DE RENNES METROPOLE EN ACCES LIBRE

    A Rennes, louverture des donnes de transport, et particulirement celles lies lutilisation delinfrastructure VeloStar, a suscit une floraison dapplications et services nouveaux : des alertestrafic en temps rel, un tat dutilisation des vlos dans les diffrentes stations, un tatdoccupation des parcs relais, une golocalisation des points de vente, un tat desfonctionnements des ascenseurs et des escalators, les horaires des bus et des mtros

    Seuls, loprateur priv ou lacteur public nauraient peut-tre pas eu ces ides-l, ou nauraientpas eu les ressources internes pour les dvelopper. Ces services ont incontestablement contribuau succs de VeloStar et son adoption rapide par la population rennaise.

    Ouvrir des donnes par exemple les donnes des mobilits-, cest permettre dautres acteursde dvelopper de nouveaux services, ou de faire voluer ceux qui existent : quand un jeuneprogrammeur cre autour des vlos en libre-service une application mobile qui permet des'informer de leur disponibilit une station donne, il contribue si nettement au succs de

    l'opration que l'oprateur des vlos a tout fait pour s'arroger a posteriori l'exclusivit de tellesapplications, oubliant que sans innovateurs extrieurs, il n'aurait peut-tre jamais pens proposer une telle possibilit. Dans d'autres villes, on voit que c'est par des acteurs extrieurs que

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    des esquisse des services d'information multimodale sur les transports mergent. Ailleurs, desentrepreneurs associent covoiturage et transports publics. Comment un seul acteur en charge destransports, si intelligent et bien financ soit-il, pourrait-il faire aussi bien et aussi vite ?

    Innovation sociale, innovation publique et innovation conomique se rejoignent. Les donnesforment la matire premire des trois. Quelles que soient leurs motivations, des acteurs sesaisiront des donnes mises disposition pour proposer des services. Certains innoveront enmatire technique, d'autres par la pertinence de leur rponse certains besoins, d'autres par leurproximit une population donne et certains choueront aussi. Fonds sur des informationscommunes, ces services pourront plus aisment collaborer, entre eux comme avec les services quela collectivit continuera de fournir, pour des raisons videntes de continuit et d'galit.

    En dfinitive, sans presque rien dbourser, les acteurs publics peuvent amliorer la vie quotidiennede leurs administrs, en se contentant de librer les nergies latentes et de les laisser s'exprimer.Cest, pour lacteur public, un moyen potentiel de dynamisation et dlargissement de la fourniturede services aux citoyens. C'est aussi un moyen d'inviter la population s'engager, entreprendreou au moins, prendre en mains certains de ses problmes quotidiens.

    APPS FOR DEMOCRACY

    Le Forum Virium, "laboratoire vivant" d'innovation qui runit entreprises et acteurs publicsd'Helsinki (Finlande), organise chaque anne un concours dapplications fondes sur les donnespubliques. S'il a repris le nom du concours quivalent lanc Washington D.C. : "Apps forDemocracy" (des applications pour la dmocratie), les applications qu'il suscite se situentbeaucoup plus du ct de la vie quotidienne que de la discussion dmocratique. Le laurat de 2010est ainsi un outil mobile qui permet de scanner le code barre dun livre pour savoir sil estdisponible dans une des bibliothques municipales.

    Lavantage de ces formes de stimulation est aussi dobtenir des applications peu chres et souventoriginales. Le site Palvelukartta, qui dresse la carte des services publics de la ville dHelsinki, estainsi devenu le meilleur annuaire de la ville. Tout en permettant aux diffrents acteurs publics dela ville de mieux communiquer entre elles en disposant enfin dun annuaire fiable, il permet

    galement de voir les carences des services publics sur certains quartiers. Au sein des servicespublics, ces formes danimation jouent aussi un rle dmulation : Lassociation a contribu librer plus de 200 bases de donnes de la ville, parmi lesquels une centaine de systmesdinformations gographiques diffrents20...

    20http://www.internetactu.net/2010/07/13/donnees-publiques-ouvertes-comment-faire/

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    Un effet sur l'attractivit des territoiresLa mise disposition dun plus grand nombre de donnes conomiques, touristiques, ou lies lavie quotidienne, peut renforcer lattractivit dun territoire.

    Les acteurs du tourisme peuvent proposer aux publics qu'ils connaissent bien des services pluscomplets, des informations plus riches et peuvent contribuer en traduire une plus grandepartie, et dans d'autres langues, que ce que des organismes publics aux moyens limits,proposent.

    Des entreprises cherchant s'implanter, des familles cherchant se loger, peuvent disposer d'uneconnaissance plus fine du tissu conomique, d'une meilleure vision des services accessibles ou dela vitalit de la vie locale.

    Louverture en elle-mme, et son effet mobilisateur, sont dj des moyens danimer unedynamique positive rejaillissant sur limage de la collectivit, de son territoire. Les dmarchesludiques - concours, etc. - de stimulation de la rutilisation des donnes, ou denrichissementparticipatif de celles-ci constituent elles seules de nouveaux modes de relations aux publicslocaux comme extrieurs au territoire.

    Des bnfices nets, des dfis complexesL'ide que des acteurs entirement indpendants de l'administration, sans autre lien avec elle quela signature (ventuellement lectronique) d'une licence de rutilisation de donnes, contribuent produire et dlivrer des services au public, est inhabituelle. Sduisante, voire puissante, elle posenanmoins des questions qu'il ne faudra pas ngliger terme : quelle responsabilit l'acteur publicpartage-t-il avec les oprateurs de ces nouveaux services ? Quelles nouvelles exigences cela fait-ilpeser, de fait, sur la qualit ou la fraicheur de ces donnes ? Que faudra-t-il prvoir dans leslicences en matire de transformation des donnes, de dlais de redistribution (pour les donnestemps rel), d'indication de la source publique, de responsabilit ?... Et enfin, l'mergence de cesservices est-elle de nature concurrencer le cur des missions publiques et dans ce cas, quellesen sont les consquences ?

    Cependant, ces questions ne peuvent pas s'apprhender de manire thorique. Les rponsesn'mergeront que de manire progressive, l'exprience.

    1.2.4. Valoriser le patrimoine immatriel local

    Mettre en valeur les donnes culturelles, patrimonialesComme beaucoup d'organisations, les collectivits publiques exploitent souvent assez mal lestrsors d'informations qu'elles dtiennent faute de moyens, d'intrt, de demande, decomptences disponibles Cest le cas, bien souvent, des "donnes culturelles". Certainescollectivits territoriales dtiennent des fonds documentaires, patrimoniaux, considrables

    (documents iconographiques, oeuvres numrises, affiches, documents audiovisuels, sonores,topographiques, etc.). Ces fonds sont le plus souvent disponibles dans des bibliothques ou desarchives, parfois exposs, mais en gnral mconnus et sous-utiliss.

    Faire le choix de les rendre accessibles en ligne, et rutilisables, selon un cadre de rutilisationdonn, peut considrablement augmenter la visibilit de ces ressources et, par ricochet, contribuer la notorit du territoire, voire faire merger de nouvelles activits culturelles. Desgnalogistes aux historiens, des experts aux enseignants, des amateurs de vieilles photos auxcommunauts d'"anciens" dsireux de transmettre leur histoire aux plus jeunes21, les raisons demieux exploiter ces fonds ne manquent pas.

    21 A la suite de Brest, beaucoup de collectivits ont ainsi ouvert des sites o des habitants racontent leur quartier,d'aujourd'hui et d'hier.

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    LA BIBLIOTHEQUE MUNICIPALE DE TOULOUSE SURFLIKCR22

    Depuis 2008, la bibliothque municipale de Toulouse diffuse sur le site de partage de photos Flickrle fonds photographique dun photographe local du 19e sicle, Eugne Trutat. Lambition initiale duprojet, et la raison du choix de Flickr (mdia web2.0 par excellence), taient de faire participer les

    internautes lenrichissement du fonds : par des apports de connaissances, des contributions, laqualification de certains clichs rests indtermins, etc. La conservatrice Jocelyne Deschauxtmoigne de lintrt que suscitent les photos auprs dinternautes franais ou trangers, et dunenotorit renforce : "Flickr nous a aids trouver un nouveau public".

    Les photos en basse dfinition sont utilisables sans restriction, tandis que l'usage des photos enhaute dfinition se fait selon la grille tarifaire de la bibliothque.

    Peut-on gagner de l'argent avec les donnes culturelles du territoire ?Les fonds d'archives peuvent coter cher numriser. Si leur originalit, leur valeur culturelle ouhistorique, apparaissent importantes, la tentation de les commercialiser pour dgager desressources financires sera grande. La loi l'autorise ds lors qu'un travail spcifique est ralispour les numriser et les rassembler dans une base de donnes. Mais il n'est sans doute pasinutile de s'interroger sur la ralit des revenus que l'on peut esprer, au regard des autresbnfices que l'on peut en attendre (attractivit, visibilit du territoire, vie culturelle) : le"march" est-il suffisant ? Les agents publics sauront-ils s'y adresser ? Ne cotera-t-il pas aussicher que cela rapport de facturer et recouvrer des sommes gnralement petites ?

    1.2.5. Une contribution au dveloppement conomique

    Que ce soit directement (au travers de la cration de services fonds en tout ou partie sur desdonnes publiques) ou indirectement (au travers des effets positifs de l'ouverture des donnessur le dynamisme du territoire), on attend de l'ouverture des donnes des effets sur ledveloppement conomique. Sans clairement fournir sa source, le gouvernement britanniquel'estime plusieurs diximes de points de croissance.

    Il existe cependant deux manires trs diffrentes de mesurer la contribution des donnespubliques "ouvertes" au dveloppement conomique. Ces deux approches ont des consquences

    22 Cf. le dossier de la Gazette des communes :http://infos.lagazettedescommunes.com/48352/l%E2%80%99exception-culturelle-se-glisse-dans-lere-du-numerique/

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    diffrentes sur la manire dont les acteurs publics peuvent envisager de mettre leurs informations disposition.

    La manire directe : mesurer le "march de l'informatique publique"Dans un premier temps, on peut mesurer le march de l'information publique en additionnant les

    chiffres d'affaires des organismes publics (Insee, IGN, Inpi) et des entreprises prives quivendent des bases de donnes juridiques ou conomiques, des informations financires, desservices cartographiques, etc. En 2007, le GFII estimait le chiffre d'affaires de l'informationprofessionnelle sous forme lectronique 1,6 milliard d'euros, dont l'information publiquereprsentait 60% (950 millions d'euros). Au niveau europen, la Commission europenne estimele march des donnes publiques 27 milliards d'euros en 2010.

    Ce march s'organise aujourd'hui autour d'un petit nombre d'entreprises spcialises, pour laplupart regroupes au sein du Groupement franais de lindustrie de linformation (GFII voirencadr). L'ouverture plus large, et moins coteuse, d'un ensemble plus divers de donnespubliques, peut la fois favoriser le dveloppement de ces entreprises et permettre de nouvellesentreprises d'entrer sur ce march.

    Encore faut-il que les conditions dans lesquelles les donnes sont mises disposition permettent

    ce dveloppement. Ainsi, lOffice of Fair Trading, quivalent britannique du Conseil de laconcurrence, a publi en dcembre 2006 un rapport intitul The commercial use of publicinformation4. Ce rapport value 870 millions deuros les revenus issus en 2005 de linformationpublique, soit par vente directe, soit par vente issue de la rutilisation de cette information. Ilvalue aussi le manque gagner, cest--dire le chiffre daffaires qui serait ralis si taient levsles diffrents freins actuellement mis par les administrations et les organismes publics larutilisation de leurs donnes : prix de vente trop lev (30 M ), restrictions daccs (206 M ) etnon-accessibilit de linformation (529 M ). Le dficit de lactivit conomique est donc valu 765 M , soit 88 % du march mesurable23 !

    La mesure indirecte : l'information publique, matire premire de laproduction de services

    Mais le potentiel conomique des donnes publiques est sans doute beaucoup plus important. Onsait que l'conomie du numrique ne se rsume pas aux entreprises spcialises, fournisseurs detechnologies, oprateurs tlcoms, producteurs de contenus ou de services en ligne : toutes lesentreprises sont concernes, que ce soit dans les services (services distance, cration denouveaux services, accs de nouveaux marchs) ou dans l'industrie (gains de productivit,optimisation des chaines d'approvisionnement et de la logistique, personnalisation, acclrationdes cycles d'innovation). Il en va de mme pour les donnes publiques : celles-ci peuventfaciliter l'mergence ou la croissance d'entreprise dont elles ne sont pas le produit, mais la matirepremire : des oprateurs de mobilit pourront proposer des services multimodaux, des acteursdes services urbains pourront mieux organiser leur prsence et leur offre, des agents immobiliersfourniront des informations dtailles sur le quartier dans lequel ils proposent des biens, desentreprises raliseront des tudes d'implantation ou des analyses marketing beaucoup plusprcises, etc.

    Parce qu'elle touche un primtre beaucoup plus large, on peut estimer que la contributionindirecte des donnes publiques la croissance est bien suprieure au chiffre d'affaires du "marchde l'information publique" dcrit plus haut. En revanche, elle se mesure beaucoup plusdifficilement, dans la mesure o il n'existe pas de lien directe entre les donnes et la valeur duservice ou du produit final.

    Deux formes de retour financier pour les acteurs publicsPour les acteurs publics, ces deux manires d'estimer la contribution conomique des donnespublics ont des consquence diffrentes. Dans le premier cas, ils peuvent tre tents de tariferleurs informations en fonction du chiffre d'affaires que les entreprises spcialises escomptent entirer24. Dans le second cas, la chose est pratiquement impossible et le retour financier pour l'acteur

    23 Source : "La longue marche de l'information publique", Bernard Marx et Ruth Martinez, Documentaliste Science del'information, 2007 - http://www.cairn.info/revue-documentaliste-sciences-de-l-information-2007-3-page-218.htm24 Mme si la loi invite les acteurs publics tarifer en fonction du "cot de mise disposition" et non d'un prix de

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    public proviendra plutt des taxes sur l'activit conomique des entreprises que de la cession desdonnes. On cherchera alors plutt abaisser les barrire conomiques, techniques ou pratiques l'accs aux donnes afin de favoriser l'activit.

    La tarification comme choix conomique : l'approche d'un conomiste

    L'conomiste Olivier Bomsel de Mines-ParisTech dcrit trois manires de tarifer l'informationpublique : Comme une rente (royaltie) prleve sur le bnfice de ldition prive : port, octroi, droit de

    passage... Comme une facilit essentielle : au cot moyen incrmental de long terme (le "cot de mise

    disposition") Comme un bien public offert aux entreprises au mme titre que lenvironnement institutionnelPour lui, le choix tarifaire reflte des priorits conomiques : plus il est cher, plus le service publicest en monopole, et plus les services apports par les entreprises prives sont chres pour leconsommateur

    march.

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    Les entreprises, productrices de donnes publiques ouvertes ?

    Le potentiel des donnes ouvertes est suffisamment important pour que mme des entreprisesprives, qui n'y sont nullement invites par la loi, rendent accessibles leurs donnes dediffrentes manires dans le but de permettre d'autres acteurs de crer des services valeur

    ajoute.Nous avons rencontr page 6 les exemples d'Amazon ou de Google, mais le mouvement peuttoucher des entreprises beaucoup plus modestes. La sociologue Valrie Peugeot mentionnel'exemple de la start-up anglaise Nestoria, compose dune dizaine de personnes et implantedans 6 pays, dont le service adjoint la recherche dannonces immobilires des informations valeur ajoute sur le quartier (prsence des services, donnes lies aux transports, quipementsscolaires, etc.), rcupres grce une collecte de donnes publiques. En salliant des agencesimmobilires, Nestoria offre ainsi un service de recherche plus intelligent. Le revenu gnr par laconsultation des annonces est alors partag entre les deux entreprises.

    Nestoria ne se contente pas de rutiliser des donnes publiques. Elle recueille galementmanuellement d'autres donnes sur les quartiers, et elle met disposition l'ensemble de sesdonnes, sous la forme dAPI ouvertes, afin que dautres puissent sen servir et les enrichir.

    Notons que Nestoria apporte aussi un soutien financier au dveloppement dOpenStreetMap.

    En France, plusieurs entreprises publiques et prouves dans les domaines des transports, ducourrier, de l'environnement, de l'eau, des tlcoms, rflchissent aux informations qu'elles

    pourraient mettre disposition, d'une manire gnralement gratuite. Leur objectif n'est pasphilanthropique, mais bien conomique : elles attendent que l'intervention d'autres entrepreneurscontribuent amliorer leurs services, augmenter leur trafic ou largir leur zone dechalandise. L'entreprise de transport Keolis a ouvert la voie avec la mtropole rennaise, etd'autres suivront.

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    1.3.UN NOUVEL ECOSYSTEME DACTEURS INTERDEPENDANTS

    L'ouverture des donnes publiques ne cre pas un simple face--face entre des acteurs publics quiproduisent ou dtiennent des donnes, et des acteurs privs qui en tirent profit. Elle cre un

    vritable "cosystme", dans lequel chaque acteur joue tour tour plusieurs rles et contribue autravail des autres.

    Ainsi, les administrations sont-elles la fois fournisseurs de donnes, et utilisateurs des donnespubliques produites par d'autres acteurs publics ; les citoyens, les associations et les entreprisesne se contentent pas d'exploiter des donnes publiques, ils peuvent contribuer les corriger ou lesenrichir. Les chercheurs ou les groupes de citoyens qui produisent par exemple de nouvellescartographies, ou des analyses indites des dpenses publiques, produisent des connaissances quipeuvent s'avrer utiles tous ; leur tour, les acteurs publics peuvent participer cette crationde connaissance en explicitant le sens de chaque donne, en expliquant comment elles sontproduites. Et ainsi de suite.

    Anciens et nouveaux acteursCertains des acteurs sont bien connus : les institutions publiques parmi lesquels nous incluronsles entreprises dlgataires de services publics , ainsi que les fournisseurs spcialiss de servicesd'information professionnelle, qui rutilisent depuis longtemps des donnes publiques. Mais denouveaux acteurs joueront galement un rle essentiel ds lors que l'accessibilit des donnespubliques devient la fois plus large (touchant de nouveaux types d'informations, provenant desources plus diverses) et plus aise.

    Les principaux acteurs de l'"cosystme" des donnes publiques

    Il est important de dcrire certains de ces acteurs, avec lesquels les institutions publiques n'ontsouvent pas l'habitude de travailler, ou en tout cas pas de cette manire.

    Startups et entreprises de services

    Le "march" des donnes publiques se limitait jusqu'ici pour ainsi dire des bases de donnes juridiques, conomiques, statistiques et gographiques, exploites par des acteurs spcialiss :fournisseurs de bases de donnes, cabinets d'tudes, systmes d'information gographiques

    Les nouvelles donnes mises disposition intresseront bien d'autres entreprises. Pensons parexemple aux multiples applications sur les mobiles qui se fondent sur les informations relatives

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    aux transports publics, la disponibilit de vhicules ou vlos en libre-service, au trafic ; l'mergence de "cityguides" qui fournissent galement une somme d'information sur la localisationdes services et quipements collectifs, leurs conditions d'accs, leurs heures d'ouverture ; ouencore, l'mergence de services relatifs l'environnement. Ceux-ci sont souvent fournis par detoutes petites entreprises ; ils s'adressent aux usagers, plutt qu' d'autres entreprises ; leurchelle va, selon les cas, du local l'international ; ils apparaissent, disparaissent, voluentrapidement ; les responsables de ces entreprises n'ont aucune habitude d'changer avec lesadministrations ; des dlais excessifs, des exigences administratives lourdes, des cots d'accslevs, ou tout simplement une incertitude sur ces trois facteurs, peuvent les tuer. Rien avoiravec les acteurs professionnels auxquels les administrations s'taient habitues.

    Fournisseurs de technologies

    Les entreprises qui fournissent25 aux administrations les logiciels ou les services en ligne surlesquelles se fondent leurs systmes de production et de gestion vont devoir faire voluerl'architecture mme de leurs produits. Celle-ci devra traiter les donnes d'une manire beaucoupplus indpendante des traitements qu'elles subiront pour rpondre aux besoins desadministrations. Il leur faudra prvoir les manires de rendre ces donnes disponibles desrutilisateurs, sans bien sr compromettre l'intgrit des applications propres aux administrations.Dans certains cas, il faudra savoir intgrer des enrichissements qui viennent de l'extrieur ; dans

    d'autres, faire respecter des conditions d'utilisation. Dans certains cas, on pourra se contenterd'exporter des fichiers et de les rendre tlchargeables ; dans d'autres (grandes bases de donnescomplexes, informations temps rel), on devra crer des "portes d'entre" (on parle d'API, ouinterfaces de programmation) pour permettre aux rutilisateurs de se "servir" la source ce quiobligera parfois redimensionner les infrastructures informatiques, prvoir des dispositifs descurit, etc.

    On peut prvoir que ces exigences conduiront rapidement faire voluer les cahiers des chargesque produiront les acteurs publics, ainsi que leurs critres de slection de leurs prestataires.

    "Hackers citoyens"26 et dveloppeur indpendants

    Au-del des associations citoyennes ou encore des "lobbies" organiss, et souvent bien avant eux,une nouvelle catgorie dacteurs a jou un rle dcisif dans l'ouverture des donnes publiques : il

    sagit de dveloppeurs indpendants, runis en groupes souvent informels, militants d'unedmocratie plus participative enrichie par les outils numriques. Ils ont dans un premier tempsparticip collecter des donnes et ont incit ainsi les administrations ouvrir leurs donnes.Comme l'indique un article publi sur le site Owni.fr, "la socit civile a impos des exemples debonnes pratiques et mis sous pression les gouvernements. Ainsi, data.gov.uk et data.govnauraient sans doute jamais t cres si des citoyens engags navaient pas dj dvelopp desapplications telles que TheyWorkForYou.com (au Royaume-Uni) ou GovTrack.us (aux tats-Unis),des cartes des accidents de vlo, ou des sites rpertoriant les dpenses publiques."

    Les deux portails britanniques et amricains nauraient sans doute jamais t crs "si descitoyens engags navaient pas dj dvelopp des applications telles que TheyWorkForYou auRoyaume-Uni, ou GovTrack.us aux Etats-Unis, des cartes des accidents de vlo, ou des sitesrpertoriant les dpenses publiques"27. Aujourdhui souvent regroups en associations, ilsparticipent activement la construction d'outils qui facilitent l'interprtation des donnespubliques, voire parfois la collecte de donnes ou l'accompagnement des collectivits locales.Cette communaut constitue un rseau informel dacteurs qui se connaissent entre eux, et oprennent naissance de multiples initiatives, l'chelle nationale ou mme europenne.

    En Angleterre lorganisation la plus reprsentative de ce mouvement est MySociety, regroupantaujourdhui une dizaine de permanents, et animant elle seule une dizaine de sites web finalitdmocratique ou de simplification de la vie du citoyen. Cette structure finance ses activitsdintrt gnral par des missions de conseil, y compris auprs du gouvernement britannique.

    25 Ou mme les associations grce auxquelles des acteurs publics coproduisent et mutualisent des logiciels, telles quel'Adullact.26 Le terme "hacker" a mauvaise presse. Souvent assimils aux "pirates", les "hackers" sont en fait, historiquement,des techniciens la fois comptents et anims d'une intention "sociale", capables de modifier un objet ou unmcanisme pour lui faire faire autre chose que ce qui tait initialement prvu.27 "Les bons ingrdients pour une ouverture des donnes publiques russie" : http://owni.fr/2010/05/31/opendata-12-data-gov-ou-data-gov-uk/

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    En France, des associations telles que Regards Citoyens Paris, LiberTIC Nantes ou laQuadrature du Net jouent un rle quivalent, mme si leur taille est plus modeste.

    Les associations fdratrices

    Dautres associations participent activement l'ouverture des donnes publiques, en animant lesdiffrents rseaux, en favorisant la rencontre entre les parties prenantes. Elles manent le plussouvent d'acteurs du numrique, mais la diffrence des prcdentes, elles ne dveloppentgnralement pas elles-mmes des applications.

    Le Forum Virium Helsinki, en France le GFII et la FING, jouent ce rle de facilitateurs,mdiateurs, mutualisateurs : en mettant en contact les diffrents acteurs entre eux, enpermettant que les diffrents intrts sexpriment, en partageant expriences et savoir-faire, etc.

    Les "data-journalistes"

    La presse a souvent t lavant-garde du mouvement dOpenData : le Guardian au Royaume-Uni, le New York Times ou le Los Angeles Times aux Etats-Unis, ont la fois milit en faveur decette ouverture, expriment trs tt ce qui pouvait tre fait de ces donnes, et inform sur lesinitiatives des Etats ou des territoires dans ce domaine.

    Ces mdias tablis, ainsi que d'autres beaucoup plus jeunes tels que le Franais Owni, ont donnnaissance une nouvelle forme de journalisme : le "data-journalisme28". Selon Wikipedia, ledatajournalisme est "une nouvelle technique journalistique qui consiste analyser des donnescomplexes (par exemple des statistiques) ou extraire des informations pertinentes de quantitsimportantes de donnes." Il s'agit donc de convertir les donnes en informations nouvelles,intelligibles, que d'autres modes d'investigation n'auraient souvent pas permis de faire merger.Pour cela, il faut savoir runir plusieurs comptences trs diffrentes : journalistes, dveloppeursinformatiques, designers, graphistes, etc.

    Quand les donnes manquent, le datajournaliste peut faire appel au crowdsourcing, cest--dire la contribution des citoyens. Ainsi les journalistes dOwni et Le Post ont-ils plusieurs fois lancs desappels contribution pour russir, par exemple, cartographier les villes sous vido-surveillance.

    La carte des villes sous vido-surveillance, co-produite avec les internautes29

    28 "Journaliste de donnes", Internet Actu, 2010 : http://www.internetactu.net/2010/07/09/journaliste-de-donnees-data-as-storytelling29http://www.lepost.fr/article/2009/12/11/1836005_plus-de-2000-communes-sont-videosurveillees-et-la-votre.html

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    Un nouveau rle pour l'acteur publicEn ouvrant l'accs leurs donnes, et en permettant d'autres d'en faire des usages imprvus,les acteurs publics dcouvrent un nouveau rle : celui qui consiste la fois faire vivre uncosystme aussi dynamique que possible (pour que l'ouverture des donnes soit fconde enconnaissances, en services aux citoyens et en vitalit dmocratique) et rguler l'usage de ces

    donnes.

    Il s'agit en particulier de trouver le bon quilibre entre plusieurs objectifs : En ouvrant l'accs ses donnes, l'acteur public cre un nouvel espace d'initiative pour les

    autres acteurs (publics, privs et associatifs). Il doit s'assurer que cet espace est reprable,suffisamment vaste et peu contrl pour que ces acteurs l'investissent effectivement. Enparticulier, il s'agit d'accepter que certains services concurrenceront de fait ceux de lacollectivit, que certaines interprtations des donnes dplairont, etc.

    L'acteur public doit aussi s'assurer que les services essentiels demeurent disponibles pourtoute la population. La mise disposition des donnes publiques ne signifie pas que lesinstitutions s'en remettent exclusivement "l'cosystme" pour dlivrer ces services, et mmed'autres moins essentiels.

    L'ouverture des donnes peut crer un cercle vertueux grce auquel des citoyens, desentreprises, des chercheurs, contribueront l'enrichissement des informations elles-mmes,

    ainsi qu' crer des connaissances et des services nouveaux. Les institutions doivent se mettre l'coute de ce que produira le terrain, et l'incorporer dans leurs propres systmes.

    Mais les acteurs publics ont aussi la responsabilit de s'assurer que la rutilisation des donnesne cre par en elle-mme des problmes : donnes dnatures, donnes temps rel diffusestrop tardivement, etc. Certaines donnes peuvent tre accompagnes de conditions derutilisation, qu'il s'agira de faire respecter. Pour autant, ces conditions doivent tre gnraleset de haut niveau : on ne saurait imaginer une imprimaturpralable toute rutilisation !

    Cette "nouvelle gouvernance" aura ainsi un certain nombre de caractristiques :

    Perdre un certain monopole public pour gagner en richesse et en inventivit

    Il est coutume de dire que louverture des donnes publiques marque le passage de linformationpublique aux "actifs" publics. On peut se montrer rticent devant la dimension "patrimoniale" dumot, en revanche il est intressant de considrer que la donne devient un "objet actif" : cest--dire dynamique, engendrant une chane de ractions.

    En effet la transparence accrue des donnes publiques aura invitablement pour consquence laperte dun certain monopole pour lacteur public : monopole dans la dtention de certainesdonnes, dans leur interprtation lgitime, ou parfois dans la dlivrance de certaines informationset de certains services.

    Cette perte de monopole engendrera ncessairement des problmes. Tout le monde n'exploiterapas les donnes de manire comptente. Tout le monde n'en tirera pas les conclusions que les lussouhaiteraient. C'est en revanche la condition pour qu'apparaissent de nouvelles voix, pour librerles capacit d'innovation conomique et sociale, pour faire merger de nouvelles connaissances. Il

    s'agit au fond d'largir l'"espace public", qui est la fois une ncessit dmocratique, un carrefourd'changes conomiques, et le lieu dans lequel se droulent les manifestations

    Soutenir, accompagner linnovation territoriale

    Il sagit bien pour lacteur public de mettre des ressources publiques au service de linnovationsociale et conomique, telle quelle se cre et sexprime aujourdhui. Pour cela, il doit la fois : Stimuler la rutilisation : en lincitant, la provoquant, en lorganisant, en la publicisant ; Accepter de lcher-prise sur les productions : pour que la crativit des acteurs privs,

    associatifs, citoyens, et linnovation sexprime sans contraintes excessives ; Conserver une vue d'ensemble pour s'assurer que l'intrt gnral est atteint, que l'accs aux

    services publics demeure universel, voire en coordonnant des initiatives afin d'en largirl'accs un plus grand nombre de citoyens.

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    Lacteur public est lgitime coordonner et fdrer lintelligence collective territoriale ; lgitimeaussi rappeler les grands principes des services au public, et les besoins et les manquesexistants.

    Imaginer des infrastructures sociales et pas seulement techniques

    Linfrastructure technique sous-jacente louverture des donnes (bases de donnes, modes detlchargement, licences, portails, etc.) est ncessaire l'cosystme, mais elle ne suffit pas. Elledoit se complter d'une "infrastructure sociale"30 : cest--dire les modalits daccompagnement dela rutilisation, les formes danimation de la communaut des r utilisateurs, la facilitation desmodes de partage entre rutilisateurs.

    Si lacteur public perd une partie du contrle de la rutilisation, cela ne veut pas dire que celle-cise droule en dehors de tout contexte ou influence politique, socioculturelle, etc. Au contraire,lanalyse des projets et initiatives existantes par exemple en Angleterre - montre que ceux-ci sedveloppent au sein de rseaux dacteurs ayant besoin de collaborer entre eux (ne serait-ce quenraison de la diversit des comptences requises). Charge lacteur public de favoriser la mise encontact des acteurs entre eux, de faire valoir les besoins et les manques de services identifis,voire d'influencer lorientation du dveloppement des services (par des concours, des formesdanimation ou de soutien spcifique).

    Le concours lanc ds 2008 par le gouvernement britannique, "Show us a better way" '"Montrez-nous une meilleure voie") est symbolique de cette nouvelle manire de faire. Elle a d'ailleursinspir de nombreuses oprations similaires comme "Apps for Democracy" (Washington, Finlande)ou le "Concours de cration d'applications" de Rennes?

    Offrir une reconnaissance aux travailleurs de lombre

    Les bonnes ides ou pratiques citoyennes ont besoin de relais auprs des agents et des cadres desinstitutions publiques. Ces "travailleurs de lombre" existent. Aujourdhui, en France, une poignedagents volontaires sont souvent l'origine des initiatives de leur ministre ou de leur collectivit,alors mme que ces chantiers ne sont pas toujours officiellement inscrits dans leurs missions... Ilsdoivent avancer en mme temps que faire la preuve leur hirarchie de lutilit de ces projets.

    En Angleterre, ces fonctionnaires de lombre ont l aussi jou un rle central : lexpertise quilsavaient acquises a donn confiance "aux leaders politiques dans la russite de stratgiesdouvertures des donns publiques. Les dirigeants ont ainsi eu les moyens et la motivation pourpasser outre linertie institutionnelle"31.

    Evaluer la cration de valeurs en imaginant de nouveaux indicateurs

    Il reste nanmoins une difficult de taille passer : lvaluation de linnovation produite grce larutilisation des donnes publiques. La valeur conomique n'est pas le seul indicateur pertinent.Quantifier, identifier le bnfice global pour la socit de telles ou telles innovations requerra desindicateurs plus divers et plus "socitaux".

    Lvaluation est dautant plus complexe que les retombes se constatent en deux, voire troistemps : La cration d'activits et de services, commerciaux ou non ; L'usage par les habitants et les entreprises, et ses consquences en termes de vie quotidienne,

    de productivit, etc. ; Le retour pour les pouvoirs publics, parfois mesurable (recettes directes des donnes

    publiques, recettes fiscales), parfois beaucoup moins (qualit de vie, environnement, vitalitdmocratique, cohsion sociale, comptitivit du territoire).

    30 Pour reprendre l'expression de Tim Davies dans son excellent rapport "How is open government data being used inpractice" : http://practicalparticipation.co.uk/odi/report/wp-content/uploads/2010/08/How-is-open-government-data-being-used-in-practice.pdf31 http://owni.fr/2010/05/31/opendata-12-data-gov-ou-data-gov-uk/

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    Territoires 2.0 : grer une plate-forme d'innovation ouverte

    Dans leur ouvrage "La ville 2.0, plate-forme d'innovation ouverte32", Daniel Kaplan et ThierryMarcou de la Fing dcrivent les 5 fonctions remplir pour grer une "plate-forme d'innovationouverte" dans un territoire. Extraits :

    Faciliter le partage et l'accs aux ressources partages

    L'infrastructure d'innovation doit assurer la mise disposition des ressources partages(notamment des informations et des services), sous des formes pertinentes pour ceux qui en ontbesoin. Une telle tche peut recouper plusieurs fonctions : La gestion d'un annuaire de ressources, L'assistance aux dtenteurs d'informations, par exemple pour formater ou cataloguer leurs

    ressources L'hbergement de donnes, ou autres prestations techniques.Rduire les cots pour tous les acteurs

    En grant certaines ressources communes, l'infrastructure d'innovation peut rduire les cotsd'investissement et d'exploitation associs aux innovations urbaines. Parmi les fonctions qui

    pourraient tre remplies de cette manire, on peut numrer : La mise disposition d'infrastructures techniques communes La gestion, voire la production de rfrentiels communs tels que des fonds de cartes, des

    modles 3D, des typologies, des vocabulaires, etc. La gestion de services communs tels que l'identification et l'authentification des utilisateurs.Faciliter les partenariats

    L'innovation urbaine ouverte tant par nature partenariale, elle aura besoin de facilitateurs.

    Des runions ou des manifestations destines aux innovateurs compltent gnralement cedispositif. Certaines ont pour objet de familiariser une communaut d'innovateurs avec lesressources mises leur disposition et de les inciter se regrouper entre projets similaires.D'autres opreront la rencontre entre des porteurs de projets et des institutions, des entreprises,des acteurs urbains installs des rseaux associatifs et citoyens...

    Favoriser la rencontre entre les projets et les utilisateurs

    Les petits innovateurs rencontrent souvent les plus grandes difficults pour associer desutilisateurs leurs projets, puis pour accder aux publics qu'ils visent, en phase d'exprimentationou de lancement. Les infrastructures d'innovation ouverte peuvent intervenir ces deux tapes.

    Pendant la priode de conception, elles peuvent favoriser la rencontre entre des innovateurs et descommunauts d'utilisateurs actifs, dans des dmarches de co-conception.

    Pendant la priode d'exprimentation, l'infrastructure d'innovation peut assurer une fonctiond'interface entre l'innovateur et les utilisateurs. Certaines municipalits envisagent ainsi derecruter elles-mmes des testeurs pour certains prototypes d'innovations urbaines qu'elles jugentintressants.

    L'infrastructure d'innovation peut ensuite, soit fournir un espace de visibilit aux projets innovants(sur un portail, par exemple, ou encore via des espaces d'affichage dans la ville), soit ouvrir lesportes des grands mdias et portails de services actifs dans la ville. D'autres systmes, tels quedes labels, des trophes et autres manifestations publiques, peuvent aussi permettre aux projetsles plus intressants d'attirer l'attention des mdias et des grands acteurs.

    Rguler les interactions entre les acteurs

    Enfin, l'infrastructure d'innovation peut jouer un rle important dans la rgulation des relationsentre les acteurs de l'cosystme d'innovation urbaine.

    32 Fyp Editions, 2009, tlchargeable ici : http://fing.org/?La-Ville-2-0-plateforme-d

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    Elle est d'une part un lieu permanent de rencontre et d'interaction entre ces acteurs, ce qui peutcontribuer un climat de confiance et aider rsoudre d'ventuels problmes suffisamment tt etd'une manire informelle.

    Elle contribue par ailleurs de plusieurs manires la rgulation des changes. Elle informe sur lesconditions (y compris conomiques) d'utilisation des ressources partages. Elle participe la

    capitalisation des retours d'exprience.

    Enfin, l'infrastructure d'innovation constitue un formidable lieu d'observation de la dynamiqued'innovation territoriale, ainsi que des pratiques et des usages dont elle suscite l'mergence. Cerle doit lui aussi tre pris au srieux et aboutir un retour d'information de qualit au bnfice detous les participants.

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    1.4.UN CADRE JURIDIQUE TRES FAVORABLE

    Un ouvrage complet, le guide Juridique d'AEC

    Nous ne rentrerons pas dans ce prsent Guide pratique danstous les dtails de la loi et renvoyons, pour ceux quidsirent approfondir, au Guide juridique d'AEC, Les donnespubliques33. Ce guide est librement tlchargeable.

    Lobjectif du prsent guide juridique est double :

    Rappeler de faon synthtique et pratique lesobligations lgales auxquelles les acteurs publicssont soumis en matire daccs et de rutilisationdes donnes quils produisent et dtiennent dans lecadre de leurs missions de service public (lesdonnes publiques au sens propre).

    Accompagner ces acteurs publics dans leur mise enconformit avec les prescriptions lgales.

    Enfin, ce guide sadresse aux acteurs publicsdsireux de sengager dans une dmarchevolontariste douverture de leurs donnes, en leur proposant un cadre juridique et pratique afindoprer cette libration en toute scurit.

    La lgislation franaise encadre clairement la rutilisation des donnes publique travers lechapitre II de loi 78-753 de 1978, dite loi CADA. Nous retenons tout d'abord deux chosesessentielles de ce texte : sauf exceptions vues prcdemment , toute donne collecte dans le cadre d'une mission

    de service public est rutilisable la loi franaise introduit un droit opposable de rutilisation des donnes publiques : par

    dfaut, rutiliser une information publique est un droit, que n'importe qui peut faire valoirauprs de n'importe quel acteur public

    Au del, la loi de 1978 exprime des droits et des obligations pour l'acteur public comme pour lerutilisateur.

    Les droits et obligations de l'acteur public Les obligations :

    Mettre disposition les donnes publiques collectes dans le cadre de ses missions sauf exceptions prvues par la loi

    Constituer un rpertoire des informations publiques, en ligne s'il dispose d'un site web Ne pas consentir d'accords exclusifs de rutilisation des donnes publiques Rdiger ou utiliser une licence type lorsque des donnes sont soumises redevance Si l'acteur public choisit de demander une redevance sur ses donnes, il a l'obligation

    d'en publier les modes de calcul et de la rendre "non discriminatoire" : elle doit treidentique pour deux acteurs exploitant les mmes donnes dans les mmes conditions

    Les droits : Percevoir une redevance pour la mise disposition des donnes publiques ; cette

    redevance doit cependant tre proportionne au cot de diffusion Faire respecter les conditions de la licence ou les obligations lgales lies la

    rutilisation Choisir le format, la mthode et la frquence de mise disposition des donnes l'acteur public peut apporter des restrictions la rutilisation, "toute restriction devant

    imprativement tre motive par lintrt gnral, respecter le droit de la concurrenceet tre proportionne la rutilisation envisage"

    33www.aecom.org/Vous-informer/Juridique-TIC/Guides-juridiques/Les-donnees-publiques-decembre-2010

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    Les droits et obligations des rutilisateurs Les droits :

    Le rutilisateur bnficie d'un droit personnel et non exclusif de rutilisation desdonnes publiques

    Sans mention de redevance, la rutilisation des informations publiques est gratuite Sauf mention contraire, la rutilisation des informations est libre, sans autre restrictionque celles prvues par la loi

    Les obligations : Indiquer la source des donnes et leur date de dernire mise jour34 Ne pas dnaturer le sens des donnes35 Ne pas rutiliser d'informations caractre personnel, sauf autorisation explicite des

    personnes concernes

    On le voit, le lgislateur franais a choisit de promouvoir sans ambigit la rutilisation desdonnes publiques.

    34 Sauf permission explicite et motive, actuellement du domaine de l'exception.35 Idem note prcdente.

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    2. COMMENT SY PRENDRE ?

    2.1.ENGAGER UNE POLITIQUE DE REUTILISATION DES DONNEESPUBLIQUES

    2.1.1. Une dmarche la fois volontariste, pragmatique et ouverte

    La rutilisation des donnes est un droit qui s'impose aux acteurs publics, mais ceux-ci ont toutintrt engager une dmarche volontariste, sans attendre. Il s'agit en effet de maitriser lecheminement plutt que le subir : identifier les priorits plutt que de se les faire dicter ;exprimenter pour prendre les bonnes dcisions au lieu de livrer sous la contrainte ; industrialiserla production des donnes plutt que risquer de se voir dpass par la demande.

    La dmarche gagne tre pragmatique. Tout d'abord, il s'agit d'un sujet nouveau et prospectif. Onaura donc tout intrt avancer progressivement. De petits rajustements valent mieux que degrands changements de cap. L'acteur public a tout intrt dmarrer dans un mode exprimental,avec des cycles courts, qui permettent notamment de prendre le temps de prenniser ce quimarche et de rflchir ce qui ne marche pas. Une dmarche pragmatique permet ensuite derduire un champ qui est potentiellement immense, en ne traitant au dpart que ce qui offre lesmeilleures chances de rsultats. Elle dmontre la volo