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La Revue de médecine interne 33 (2012) 457–460
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www.sciencedirect.com
ommunication brève
mbolie pulmonaire révélée par une crise convulsive : à propos d’un cas et revuee la littérature
ulmonary embolism revealed by a seizure: A case report and literature review
. Lam , M. Jammal , K. Tiev , C. Toledano , L. Fardet , S. Riviere , L. Josselin Mahr , J. Cabane , A. Kettaneh ∗
ervice de médecine interne, université Pierre-et-Marie-Curie Paris, hôpital Saint-Antoine, Assistance publique–Hôpitaux de Paris, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine, 75011 Paris,rance
n f o a r t i c l e
istorique de l’article :isponible sur Internet le 4 juillet 2012
ots clés :pilepsiembolie pulmonaire-dimères
r é s u m é
Introduction. – L’embolie pulmonaire est une maladie fréquente dont la stratégie diagnostique reposelargement sur une approche probabiliste. Néanmoins, il en existe des formes potentiellement aggravéesen raison d’un retard diagnostique résultant de manifestations initiales, particulièrement inhabituelles.Observation. – Nous rapportons l’observation d’une femme de 37 ans, hospitalisée à la suite d’une criseconvulsive, révélatrice d’une embolie pulmonaire ainsi que les caractéristiques de neuf autres cas simi-laires rapportés dans la littérature depuis 1945. Il s’agissait, dans tous les cas, de crises généraliséestonico-cloniques chez des patients n’ayant pas d’antécédent d’épilepsie. Une tachycardie était présente audécours de la crise convulsive dans neuf cas sur dix. Le pronostic est sombre avec un décès par défaillancecardiovasculaire dans 70 % des cas.Conclusion. – Ces observations suggèrent l’importance d’envisager le diagnostic d’embolie pulmonairedevant toute crise convulsive généralisée en l’absence d’antécédent épileptique, et notamment en pré-sence d’une tachycardie au décours. Des travaux complémentaires sont nécessaires pour confirmerl’intérêt du dosage systématique des d-dimères dans cette situation.
© 2012 Société nationale française de médecine interne (SNFMI). Publié par Elsevier Masson SAS.Tous droits réservés.
eywords:pilepsyulmonary embolism-dimers
a b s t r a c t
Introduction. – Pulmonary embolism is a frequent disorder with a diagnostic approach based on probabi-lity estimation. Nevertheless, in some cases, prognosis may be impaired by delayed diagnosis resultingfrom atypical presenting manifestations.Case report. – We report a 37-year-old woman, admitted for a seizure as the presenting manifestationof pulmonary embolism, and review nine additional similar cases reported in the literature since 1945.Seizures were always generalized tonico-clonic in nature without a past medical history of epilepsy in
any case. Tachycardia was noted in nine patients over ten. Prognosis was usually severe leading to deathby cardiovascular deficiency in 70% of cases.Conclusion. – These observations suggest a systematic suspicion of pulmonary embolism in the presenceof generalized convulsion with persistent tachycardia after resolution of the episode and no past medicalhistory of seizures. More research is necessary to assess the role of d-dimer testing in these situations.© 2012 Société nationale française de médecine interne (SNFMI). Published by Elsevier Masson SAS.
. Introduction
L’embolie pulmonaire est une maladie fréquente, avec une inci-ence de l’ordre de 60 à 70 cas pour 100 000 habitants par an [1].
∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (A. Kettaneh).
248-8663/$ – see front matter © 2012 Société nationale française de médecine interne (ttp://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2012.06.002
All rights reserved.
Les signes cliniques ayant une spécificité peu élevée, la plupartdes stratégies diagnostiques recommandées sont fondées sur uneapproche probabiliste à critères multiples dont le principe reposesur l’évaluation d’une probabilité a priori. Il en est ainsi du score
de Wells et du score de Genève révisé : l’un et l’autre reposent surla présence ou l’absence de symptômes évocateurs (douleur tho-racique, dyspnée, toux, hémoptysie, etc.), d’un terrain favorisant(immobilisation, cancer, etc.), de signes électrocardiographiquesSNFMI). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
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tachycardie, onde S en D1, Q en D3, onde T négative en D3), écho-ardiographiques (insuffisance ventriculaire droite), gazométriquehypoxie, effet shunt, etc.) et de la positivité des d-dimères [2].
Il est des situations où, faute de contexte évocateur et en pré-ence d’une probabilité apparemment faible a priori, le diagnostic’embolie pulmonaire n’est jamais évoqué ou envisagé trop tardi-ement au moment où le pronostic vital est mis en jeu. C’est le cases embolies révélées par des crises convulsives, une situation par-ois évoquée dans certains traités de médecine [3] ou décrite chezuelques patients dans des séries portant sur l’embolie pulmonaire4].
Or l’épilepsie est également l’une des affections les plus fré-uentes touchant environ 1 % de la population et représentantgalement un motif fréquent de recours aux urgences. Son inci-ence serait de l’ordre de 47,4/100 000 personnes par an, soitnviron 30 000 nouveaux cas par an en France, selon une méta-nalyse des incidences de l’épilepsie portant sur les publicationsntre 1966 et 1999 [5]. De plus on estime qu’une personne sur0 aura une crise convulsive isolée au cours de sa vie [6]. À notreonnaissance, il n’existe aucune donnée permettant d’évaluer laréquence et le pronostic de l’embolie pulmonaire parmi les crisesonvulsives apparemment isolées.
À partir d’une observation d’embolie pulmonaire révélée parne crise convulsive généralisée et des observations similaires de
a littérature, nous avons tenté de dégager les principales caracté-istiques sémiologiques et pronostiques propres à cette situation.
. Méthodes
.1. Recherche bibliographique
La recherche bibliographique a été réalisée sur Medline®, actua-isée le 21 novembre 2011 avec les mots clés seizure et pulmonarymbolism. L’examen des titres et résumés a permis d’isoler lesrticles susceptibles de rapporter des observations d’embolies pul-onaires révélées par une ou plusieurs crise(s) convulsive(s). Seuls
es articles en langue franc aise ou anglaise ont été retenus : laecture de ces articles a permis de retenir les observations quiépondaient aux critères d’inclusion.
.2. Critères d’inclusion des observations
Les patients inclus sont des observations ayant été rapportéese manière isolée ou faisant partie de séries portant sur l’embolieulmonaire et qui ont manifesté initialement une crise convul-ive. L’embolie pulmonaire devait avoir été documentée, soit par unxamen de référence (angiographie pulmonaire par cathétérisme,cintigraphie pulmonaire de ventilation et de perfusion, angio-omodensitométrie), soit par une autopsie en cas de décès avant’établissement du diagnostic.
Le diagnostic de crise convulsive généralisée devait avoir ététayé par la constatation d’une sémiologie typique rapportée par’entourage ou les professionnels de santé associant une perte deonnaissance prolongée (plusieurs minutes) et au moins deux desléments suivants : phase tonique ou tonico-clonique, phase deelaxation (respiration bruyante, perte d’urine), morsure latéralee la langue ou de la face interne des joues, retour à la consciencerogressif ou amnésie postcritique.
. Résultats
.1. Observation
Une femme de 32 ans était transportée aux urgences à lauite d’une perte de connaissance brutale, sans prodrome, de
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30 secondes environ, suivie d’un réveil progressif ainsi que d’uneconfusion et d’une amnésie totale de l’épisode. Des mouvementscloniques des membres avaient été rapportés par les témoins et lespompiers sans perte d’urines ni morsure de langue.
À l’arrivée aux urgences, la patiente était consciente et bienorientée. L’examen clinique était sans particularité hormis unetachypnée à 20/min et une tachycardie sinusale à 110/min. La satu-ration en oxygène était à 98 % et l’électrocardiogramme confirmaitune tachycardie sinusale sans autre anomalie. Une oxygénothéra-pie par sonde nasale était débutée à 5 L/min puis des prélèvementssanguins étaient effectués. La gazométrie du sang artériel sousoxygène nasal à 5 L/min mettait en évidence une acidose mixte :pH à 7,11, PaCO2 à 49 mmHg, PaO2 à 109 mmHg, bicarbonates à15 mmol/L, avec des lactates élevés à 11,2 mmol/L.
Une demi-heure plus tard, la patiente était trouvée inconsciente,le visage plaqué contre la barrière du brancard, la mousse aux lèvreset avec une respiration bruyante. Elle reprenait conscience pro-gressivement après quelques minutes. Le dosage des d-dimèreseffectué à l’arrivée était à 1467 ng/mL (N < 500) et la créati-nine phosphokinase (CPK) était à 161 UI/L (N < 160). L’examentomodensitométrique cérébral était normal, mais l’angio-scannerthoracique mettait en évidence la présence de thrombus à l’originedes artères postéro- et latéro-basales droites ainsi qu’une dilata-tion modérée des cavités cardiaques droites, posant le diagnosticd’embolie pulmonaire. Une anticoagulation par énoxaparine étaitalors débutée à la posologie de 100 UI/kg deux fois par jour.
Auxiliaire de vie, la patiente souffrait d’une insomnie presquequotidienne pour laquelle elle était traitée par zopiclone et avaitété mise en arrêt de travail depuis trois mois. Elle ne consom-mait pas de boissons alcoolisées, ou d’autre substance toxique àl’exception d’un tabagisme à trois cigarettes par jour. Elle n’avaitpas d’antécédent personnel ou familial d’épilepsie. Elle avait subidix années plus tôt une interruption volontaire de grossesse suiviede la mise en place d’une contraception orale par œstro-progestatifinterrompue depuis deux ans. Un mois avant l’hospitalisationactuelle, elle avait eu une perte de connaissance brutale avec respi-ration bruyante associée à des clonies dont l’étiologie n’avait pas ététrouvée au décours d’une consultation chez son médecin traitant.
Le lendemain, la patiente transférée en médecine interne étaitconsciente et coopérante. L’examen neurologique était normal sanssignes de localisation. Les bruits du cœur étaient réguliers, maisla fréquence cardiaque était à 110 battements/min. Il n’y avait pasde turgescence jugulaire ou de reflux hépato-jugulaire. L’examenpulmonaire était normal. L’examen des membres inférieurs ne met-tait en évidence aucun signe de thrombophlébite. La saturationartérielle en oxygène était à 97 % en air ambiant. Un électroen-céphalogramme, réalisé sans stimulation lumineuse intermittenteà 72 heures de l’hospitalisation, ne mettait en évidence aucuneanomalie électrique. Le taux d’hémoglobine était à 10,9 g/dL, lesplaquettes à 307 000/mm3, le taux de prothrombine à 92 % et lerapport patient/témoin du taux de céphaline activée à 0,97. La gly-cémie et les transaminases étaient dans les limites de la normalede même que la protéine C réactive et la troponine I négatives. La�-HCG plasmatique était négative.
L’échographie cardiaque montrait une pression artérielle pul-monaire systolique à 28 mmHg et mettait en évidence un foramenovale perméable (FOP) significatif à l’état basal et massif sousmanœuvre de Valsalva. L’échographie Doppler des membres infé-rieurs ne mettait pas en évidence de thrombose veineuse.
L’évolution de la patiente était favorable sans nouvelle criseconvulsive au cours de son hospitalisation de dix jours et on déci-dait de ne pas instaurer de traitement antiépileptique au long
cours. Un relais de l’énoxaparine par la coumadine était effectuéciblant un INR entre 2 et 3. Il n’y a avait pas d’argument cliniqueen faveur d’un cancer et un scanner thoraco-abdomino-pelvien nemettait en évidence aucun processus tumoral. La recherche d’uneM. Lam et al. / La Revue de médecine interne 33 (2012) 457–460 459
Tableau 1Caractéristiques neurologiques de notre observation et de neuf autres cas d’embolie pulmonaire révélée par une crise comitiale rapportées dans la littérature.
Référence Année Sexe/âgea Antécédentsneurologiquespersonnels
Récidive précoce(< 3 semaines)
Contexte de survenue Examen neurologique Imageriecérébrale
EEG
Hamilton et Tompson [8] 1963 H/67 Accident vasculairecérébelleux
1 fois Durant hospitalisation Aphasie, confusion ethémiparésie droite
– –
Hamilton et Tompson [8] 1963 F/60 – 1 fois Fièvre, insuffisancecardiaque
Hyperréflexie, Babinskibilatéral
- -
Fred et al. [9] 1967 H/61 – 2 fois Nausée intense, durantl’interrogatoire
Confusion, céphalée,hémiparésie droite
– –
Fred et Yang [10] 1995 H/37 – 1 fois Anxiété, sueurs,vertige, fièvre
Normal – –
Marine et Golhaber [11] 1997 H/33 - Non J2 postappendicectomie
Hyperréflexie,hémiparésie gauche,confusion
Normale Normal
Marine et Golhaber [11] 1997 F/34 – 4 fois Nausée Confusion Normale –Kupnick et Grmec [12] 2004 H/69 – Non Trouvé confus
– – –Shah et Darwent [1] 2009 F/20 Épisode dépressif
majeur1 fois Dyspnée et
hyperleucocytoseNormal – –
Meyer [13] 2009 H/50 Trouble bipolaire Non Arrêt lamotrigine etalprazolam, privationde sommeil
Confusion Normale Normal
Notre patiente 2011 F/32 – 1 fois Privation de sommeil Ralentissementidéomoteur
Normale Normal
H
tdLa
3
ppcpe1
[Tdrlnd
TC
Ev
: homme ; F : femme ; J : jour ; EEG : électroencéphalogramme ; – : non fait.a Âge exprimé en années.
hrombophilie constitutionnelle ou acquise était négative (facteurse thrombophilie : antithrombine, protéines C et S libre, facteur Veiden et polymorphisme G 20 210 A du gène de la prothrombine,nticardiolipine et anti-�2-glycoprotéine I types IgG et M).
.2. Données de la littérature
La recherche bibliographique a permis de répertorier 12 casubliés en langue franc aise ou anglaise depuis 1945 concernant desatients âgés de 20 à 69 ans. Deux de ces cas étaient simplementités sans description détaillée dans une série de 108 patients hos-italisés pour embolie pulmonaire au Beth Israel Hospital de Bostonntre 1929 et 1942 [4]. Un troisième article sans résumé publié en955 par Hussey et Katz [7] a été exclus faute d’avoir pu être obtenu.
Les détails des neuf autres observations de la littérature1,8–13] ainsi que ceux de notre patiente sont résumés dans lesableaux 1 et 2. Tous les patients avaient une tachycardie et cinq’entre eux une dyspnée. La crise convulsive, toujours de type géné-
alisé tonico-clonique, était le motif de prise en charge dans touses cas. Des signes de localisation et des anomalies de l’exameneurologique étaient présents dans quatre cas simulant un acci-ent vasculaire cérébral responsable d’un retard au diagnostic etableau 2aractéristiques cardiovasculaires de notre observation et de neuf autres cas d’embolie p
Auteur Année Sexe/Âgea Signes de cœurpulmonaire
Sat/lacta
Hamilton et Tompson [8] 1963 H/67 – –
Hamilton et Tompson [8] 1963 F/60 – –
Fred et al. [9] 1967 H/61 – –
Fred et Yang [10] 1995 H/37 – 89 %
Marine et Golhaber [11] 1997 H/33 Oui 88 %
Marine et Golhaber [11] 1997 F/34 Oui –
Kupnick et Grmec [12] 2004 H/69 – 80 %
Shah et Darwent [1] 2009 F/20 Oui 92 %/9,6Meyer [13] 2009 H/50 Oui 80 %
Notre patiente 2011 F/32 Non 95 %/11,
CG : électrocardiogramme ; H : homme ; F : femme ; Sat : saturation en oxygène ; signesentricule droit documentés par l’échographie cardiaque ; – : non fait.a Âge exprimé en années.
du décès de trois d’entre eux. Aucun patient n’avait une épilepsieattestée dans ses antécédents.
Aucun facteur prédisposant de crise convulsive n’était identifié,excepté chez deux patients incluant notre observation : un cas oùla crise convulsive pourrait avoir été favorisée par l’arrêt du traite-ment par lamotrigine et alprazolam prescrits pour un trouble bipo-laire associé à une privation de sommeil, également en cause cheznotre patiente [13]. Une récidive précoce (nouvelle crise convulsivedurant l’hospitalisation) était rapportée dans six cas ainsi que cheznotre patiente. Une thrombose veineuse des membres inférieursétait documentée dans six cas. Chez deux patients seulement, desfacteurs prédisposant à la maladie thromboembolique avaient étéidentifiés. À la différence de notre observation, l’embolie pulmo-naire était massive et bilatérale dans 100 % des observations de lalittérature, à l’origine d’un retentissement ayant donné lieu à unarrêt cardiorespiratoire au cours des heures suivantes dans sept cas.L’imagerie cérébrale est généralement normale. L’évolution n’étaitfavorable que dans trois cas seulement.
4. Discussion
Le taux de mortalité au décours d’une embolie pulmonaire estd’environ 10 % par an, variant entre 2 % et 14 % selon la sévérité
ulmonaire révélée par une crise comitiale rapportées dans la littérature.
te (mmol/L) ECG Thrombophlébite desmembres inférieurs
Évolution
Tachycardie Oui DécèsTachycardie Oui DécèsTachycardie Oui DécèsTachycardie Oui DécèsTachycardie Oui Retour à domicileTachycardie Oui DécèsTachycardie – Soins intensifs
Tachycardie – DécèsTachycardie – Décès
2 Tachycardie Non Retour à domicile
de cœur pulmonaire sont l’hypertension artérielle pulmonaire et la dilatation du
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nitiale de l’embolie pulmonaire [14]. Au vu d’un taux de mortalitée 70 % dans l’ensemble des observations que nous avons colli-ées, les embolies pulmonaires révélées par une crise convulsiveemblent constituer un sous-groupe de patients dont le pronosticst particulièrement sévère. Trois hypothèses concourent à expli-uer ce constat.
En premier lieu, un biais de publication ne peut être excluorsqu’il s’agit essentiellement de rapporter un écueil diagnostiquet ses conséquences : les observations dont l’issue est fatale ontorte valeur d’illustration et tendent à être plus souvent rapportées.
Par ailleurs, la présentation initiale de ces patients n’est pas unode de révélation fréquent de l’embolie pulmonaire (2 % dans
a série de Sagall et al.) [4] et ne remplit que très partiellementes critères des recommandations faisant habituellement chercherne embolie pulmonaire, ce qui peut être à l’origine d’un retard auiagnostic responsable d’une aggravation du pronostic.
Les manifestations neurologiques sont peu fréquentes au course l’embolie pulmonaire à type de syncope, épilepsie et plus rare-ent confusion, coma, anxiété, agitation ou parésies [9,10]. Cesanifestations, souvent associées à un terrain d’athérosclérose ou
ardiaque, concernent plutôt des personnes âgées [9,10], ce qui sug-ère une hypothèse explicative vasculaire. Un bas débit artériel oune embolie cérébrale « paradoxale » à travers un foramen ovaleersistant seraient à l’origine d’un accident vasculaire associé ouon à une crise convulsive. Néanmoins, l’hypothèse vasculaire neuffit sans doute pas à expliquer la plupart des crises convulsives :ucun des patients que nous avons rapporté n’avait eu d’accidentérébral ischémique clairement documenté.
Une troisième hypothèse, proposée en 1997 par Marine et Gold-aber [11] semble plus convaincante car elle est compatible avec leableau clinique observé dans la plupart de ces cas et permet éga-ement de comprendre pourquoi le pronostic de ces patients esti sévère. La souffrance cérébrale associée à l’hypoxémie induitear l’embolie pulmonaire serait le facteur favorisant des crisesomitiales, l’hypoxémie étant de surcroît la marque d’une embolieulmonaire grave. Chez ces patients, l’embolie pulmonaire serait à
’origine d’une défaillance respiratoire et d’une hypoxie secondaireui, couplées à l’insuffisance ventriculaire droite, entraîneraientne acidose et une hypoxie cérébrale. Ainsi la survenue d’une criseonvulsive au décours d’une embolie pulmonaire pourrait en êtren signe de gravité puisqu’elle témoigne d’une hypoxie profonde.
Compte tenu de l’incidence élevée des crises convulsives, il estmportant d’identifier, parmi celles-ci, le profil des patients pouresquels une embolie pulmonaire devrait être systématiquementecherchée. Les observations que nous avons colligées suggèrentue les éléments incitant à évoquer l’embolie pulmonaire sont
’absence d’antécédent d’épilepsie, le caractère généralisé de larise convulsive, sa récidive à court terme, et la présence d’une
achycardie ou d’une tachypnée au décours. La démarche diag-ostique pourrait faire appel au dosage des d-dimères tel quee recommande la société européenne de cardiologie devant unerobabilité clinique basse ou intermédiaire d’embolie pulmonaire
[
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(score de Wells ≤ 6) [2]. Néanmoins, la valeur des d-dimères pourle diagnostic d’embolie pulmonaire n’a pas été précisément établiedans la situation d’une crise convulsive où les chutes, les contrac-tions musculaires intenses et les morsures de la langue sont autantde facteurs potentiellement à l’origine de saignements et donc defaux positifs.
5. Conclusion
L’embolie pulmonaire peut être révélée par une cri se convul-sive. Le pronostic de ces patients est sombre car la crise convulsiverésulte souvent d’une embolie pulmonaire grave associée à unedéfaillance cardiorespiratoire à l’origine d’une hypoxie cérébrale,mais également en raison d’un retard au diagnostic de l’emboliepulmonaire. Il paraît légitime de rechercher systématiquementune embolie pulmonaire devant toute première crise convulsiveinexpliquée lorsqu’il existe au décours une tachycardie ou unetachypnée.
Déclaration d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-tion avec cet article.
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