Revue de Pneumologie clinique (2014) 70, 233—235
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CAS CLINIQUE
Épaississement pleural bilatéral de la plèvre
Bilateral pleural thickening
J. Ben Amar ∗, H. Zaibi, B. Dhahri, H. Aouina,H. Bouacha
Service de pneumologie, hôpital Charles-Nicolle, Tunis, Tunisie
Disponible sur Internet le 18 juillet 2014
MOTS CLÉSTuberculosepleurale ;Abcès froid
Résumé Les auteurs rapportent un cas exceptionnel de tuberculose pleurale bilatérale pseu-dotumorale.© 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.
KEYWORDSPleural tuberculosis;Tuberculous coldabscess
Summary The authors report the case of a 20-year-old man in whom pulmonary and bonetuberculosis presented as bilateral pleural thickening without effusion.© 2014 Published by Elsevier Masson SAS.
Observation
Il s’agit d’un patient de 20 ans, étudiant, non tabagique qui nous a consulté pour unesymptomatologie, remontant à 2 mois, faite d’une toux sèche, d’une fièvre et d’un amai-
grissement de 5 kg, concomitant à l’apparition de douleur thoracique bilatérale et detuméfactions au niveau du pouce droit (Fig. 1) et du coude.L’examen pleuro-pulmonaire était sans particularités. La radiographie du thorax révé-lait un épaississement pleural nodulaire bilatéral.
∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (J. Ben Amar).
0761-8417/$ — see front matter © 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.http://dx.doi.org/10.1016/j.pneumo.2013.09.005
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Figure 1. Tuméfaction au niveau du pouce droit.
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igure 2. TDM thoracique fenêtre médiastinale : épaississementleural bilatéral et diffus, irrégulier.
Le bilan biologique avait montré un syndrome inflamma-oire biologique avec une protéine C-réactive à 119 mg/L,ne hyperleucocytose à 13 640 El/mL et une vitesse de sédi-entation à 120 à la première heure. La sérologie du viruse l’immunodéficience humaine (VIH) était négative.
Les bacilloscopies étaient négatives. Le scanner thoraco-bdominal (Fig. 2 et 3) avait montré, à l’étage thoracique,n épaississement pleural bilatéral et diffus, irrégulier,
igure 3. TDM thoracique fenêtre médiastinale : extension parié-ale para-sternale.
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J. Ben Amar et al.
argement nécrosé, rehaussé par injection de produit deontraste, responsable d’une extension pariétale en para-ternal envahissant le cartilage chondrocostal par endroit,ans lésion osseuse en regard. À l’étage abdominal, on avaitrouvé des adénomégalies nécrosées de la fosse iliaqueroite avec une petite masse para-vertébrale droite enegard de T2 nécrosée. On a complété le bilan par une biop-ie percutanée sous contrôle scannographique d’un noduleleural. L’examen histologique des prélèvements a mis envidence des granulomes épithélioïdes et gigantocellulaires,entrés par de la nécrose caséeuse.
Le diagnostic d’épaississements pleuraux pseudotumo-aux d’origine tuberculeuse associés à des abcès froidsuberculeux : para-vertébral, du coude et du pouce a étéetenu.
Un traitement par quadrithérapie anti-tuberculeusessociant isoniazide 5 mg/kg/j, rifampicine 10 mg/kg/j,thambutol 20 mg/kg/j, pirazinamide 30 mg/kg/j pen-ant deux mois, puis par bithérapie associant isoniazide
mg/kg/j et rifampicine 10 mg/kg/j pendant sept moisssociée à une mise à plat des abcès froids.
À neuf mois de traitement, l’examen clinique est normal.e scanner thoracique montre une régression des épaissis-ements pleuraux (Fig. 4
iscussion
ette observation est particulière par le mode de révé-ation de la tuberculose pleurale. En effet, celle-ci serésente par une forme inhabituelle d’un épaississementleural bilatéral mamelonné circonférentiel mimant uneésion pleurale tumorale maligne. Cette localisation pleu-ale de tuberculose peut être primitive ou secondaire à’atteinte vertébrale par contiguïté. Notre patient a été misous traitement antituberculeux quadruple, à base de rifam-icine, isoniazide, pyrazinamide et éthambutol, avec unevolution clinique et radiologique favorable.
Les masses pleurales ont plus souvent une origine maligneecondaire que primitive. Cependant, ces masses peuventonstituer la présentation radiologique de quelques mala-ies infectieuses telle que la tuberculose [1].
Les principaux diagnostics à évoquer devant des épais-issements nodulaires de la plèvre sont : l’origine tumorale,lus rarement asbestosique bénigne ou infectieuse et excep-ionnellement médicamenteuse ou auto-immune [1]. Lesumeurs malignes sont la première cause d’épaississementleural irrégulier, primitives à type de mésothéliome, deymphome pleural ou de thymome invasif par extensionirecte, ou secondaires, de loin les plus fréquentes, notam-ent à un adénocarcinome pulmonaire, mammaire ouigestif [2,3].
Dans l’asbestose bénigne [4], il s’agit en fait d’une fibroseiffuse de la plèvre associée à une symphyse des deuxeuillets pleuraux, survenant soit à la suite d’une pleuré-ie bénigne asbestosique, soit au décours d’une asbestoseous-pleurale.
L’étiologie infectieuse est dominée par la tuberculose.
elle-ci se manifeste habituellement par un épanchementnilatéral pouvant engendrer un épaississement régulier. Learactère bilatéral de l’atteinte pleurale est rare [1,2].ans cette forme particulière de tuberculose pleurale,Épaississement pleural bilatéral de la plèvre 235
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Figure 4. TDM thoracique de contrôle : régression des lésions ple
l’existence de nécrose centrale et de rehaussement péri-phérique rappelle la tuberculose ganglionnaire [2]. Laconfirmation diagnostique repose sur les biopsies pleuralesréalisées sous scanner, comme c’est le cas dans notre obser-vation, ou sous thoracoscopie permettant d’objectiver desgranulomes épithélioïdes gigantocellulaires avec nécrosecaséeuse. Par ailleurs, l’actinomycose, les séquelles depleurésie purulente, la tuberculose pariétale thoracique[5] peuvent être responsables d’épaississements pleurauxlocalisés. Quelques cas d’épaississements pleuraux d’originemédicamenteuse ont été décrite dans la littérature, avec labromocriptine, l’amiodarone, le cyclophosphamide. . . [1].
Conclusion
Certes, l’épaississement pleural bilatéral pseudotumorald’origine tuberculeuse, en l’absence d’épanchement pleu-
ral, est exceptionnel ; cependant, ce diagnostic doit êtreévoqué de principe, en particulier chez les sujets jeunesdans les pays endémiques, surtout s’il existe une atteintevertébrale associée.[
s.
éclaration d’intérêts
es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.
éférences
1] Le Guillou F, Hubscher Ph, Cuvelier A, Quieffin J, Guyonnaud CD,El Haite A, et al. Épaississements pleuraux pseudotumoraux bila-téraux d’origine tuberculeuse. Rev Mal Respir 2002;19:515—7.
2] Ariyurek OM, Cil BE. Atypical presentation of pleural tuberculo-sis: CT findings. Br J Radiol 2000;73:209—10.
3] Bonomo L, Feragalli B, Sacco R, Merlino B, Storto ML. Malignantpleural disease. Eur J Radiol 2000;34:98—118.
4] Gevenois PA, De Maertelaer V, Madani A, Winant C, Sergent G,De Vuyst P. Asbestosis, pleural plaques and diffuse pleural thi-ckening: three distinct benign responses to asbestos exposure.Eur Respir J 1998;11:1021—7.
5] Trombati N, Afif H, El Farouki Z, Bahlaoui A, Aichane A,Bouayad Z. La tuberculose pariétale thoracique en dehorsde l’immunodépression par le virus de l’immunodéficiencehumaine. Rev Mal Respir 2001;18:301—4.