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SS Le pouvoir du toucher

Frédérika Van Ingen, chef de service médecine, développement personnel à ÇA M’INTÉRESSE

MARDI 6 SEPTEMBRE 15H-16H

ON EST FAIT POUR S’ENTENDRE FLAVIE FLAMENT

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Quelles sont les parties du corps les plus sensibles ?

Plus triviale, cette carte du corps érogène réalisée récemment par des chercheurs finlandais regroupe les données de 700 personnes inter rogées sur les zones sensibles à la caresse dans le feu de l’action. Avec une information majeure, mesdames : si vous voulez éviter un flop, oubliez le haut du mollet externe de ces messieurs…

T oucher, être touché : certains aiment, d’autres pas. Pourtant, ce sens se ré-vèle essentiel : développement affec-tif, confiance en soi, atténuation du

stress… De nombreuses études mettent en évidence ses effets positifs, et cela à tous les âges de la vie. Si bien qu’au jour d’hui le mas-sage revient en force à l’hô pital, notamment dans le cadre de pathologies lourdes. Les chercheurs ont d’ailleurs découvert que ne pas apprécier d’être touché pour rait être physiologique : ce serait lié au mau vais déve-loppement in utero des « fibres caresse », un circuit de capteurs de la peau liés à des zones cérébrales impliquées dans les émotions et le plaisir. Or, ce toucher- plaisir, lorsqu’il fonc-

Dossier : Frederika Van Ingen, Catherine Maillard et Julia Zimmerlich

tionne bien, favoriserait justement la sécré-tion d’ocytocine, dite hormone de la confiance, et d’endorphines, aux propriétés analgésiques et euphorisantes. Pas étonnant dès lors que le fait de « se toucher ou pas » comporte aussi une dimension culturelle : si, en Occident, on se touche peu dans nos rapports sociaux, « en Afrique, la communi-cation est inséparable du toucher », rappelle l’épistémologue Bernard Andrieu. Chez les Masai par exemple, un échange verbal s’ac-compagne d’une caresse des avant-bras de l’interlocuteur, une façon d’être présent à ce qui est dit, d’y associer le corps, de capter l’attention. Ainsi, le toucher devient presque un autre langage, une façon de se mettre en

SE SOIGNER PAR LE TOUCHER

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D.r.

Vers 1930, Wilder Penfield, neurochirurgien canadien, réalise des opérations sur ses patients conscients, atteints d’épilepsie. Il applique des stimulations électri ques

— indolores — sur leur cortex, et note, pour chaque zone, leur réaction : réponse motrice ou sen so rielle. Il en tire des enseignements sur la localisation de ces fonctions et leur étendue cérébrale. Pour rendre les choses plus explicites, il demande à une artiste de créer deux représentations de cerveaux, l’un moteur, l’autre sensoriel. C’est ainsi que naissent les fameux « homonculus de Penfield ».

Voici les réponses de notre panel* de lecteurs aux questions suivantes :

Vous arrive-t-il de vous faire masser ?

Ensemble210

Souvent 10 %

Parfois 49 %

Jamais 41 %

si oui, pour quelle(s) raison(s) ?

Ensemble 125

Pour vous détendre 62 %Remédier à des douleurs 49 %Lutter contre le stress 29 %

Pratiquer une rééducation 16 %

avez-vous recours, même occasionnellement, à :

Ensemble 125

La kinésithérapie 39 %

L’ostéopathie ou la chiropraxie 35 %

Le massage relaxant 26 %

L’automassage 14 %

La réflexologie plantaire 11 %

Le shiatsu 4 %

La fasciathérapie 1 %

* Enquête réalisée du 21 au 27 juin 2016, auprès de 210 lecteurs de Ça m’intéresse.

lien. C’est précisément ce « toucher-lien » qu’explorent les nombreuses méthodes thé-rapeutiques manuelles proposées aujour d’hui en complément de la médecine classique, à l’image de la médecine ayurvédique en Inde, qui intègre les mas sages comme l’une de ses pratiques centrales de guérison. Ostéopathie, fasciathérapie, réflexologie plantaire, hapto-nomie, shiatsu… Utilisant tantôt la palpation ou le ressenti, ces prati ques s’adressent au corps bien sûr, pour restaurer sa mobilité, sa position dans l’espace, ou en core la circula-tion de son « énergie vitale » si chère à la médecine chinoise, mais aussi, de plus en plus souvent, aux émotions et au men tal. Pour soigner ou prévenir les maux…

C’est votre avis !

SENSIbILITé fAIbLE

SENSIbILITé fORTE

Cet homonculus sensoriel en trois dimen-sions est une représentation — imparfaite — de notre sensi bilité tactile. La taille excessive de certaines zones de ce corps difforme est là pour souligner l’ampleur de leur sensibilité respective.

Pour établir cette cartographie cérébrale schématique, le neuro chirurgien a isolé les différents organes et les a répartis

autour d’un cerveau sensoriel imaginaire. Là encore, la taille des organes est pro-

portionnelle à leur importance sensorielle.

Ostéopathie, réflexologie, shiatsu…

stIMuler le CerVeau, rÉDuIre le stress , VaInCre la Douleur…

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U ne tape sur l’épaule pour se donner du courage, des embrassades viriles à chaque but… Sur les terrains de sport, les joueurs passent leur temps

à se toucher. Une étude de l’Université de Californie, à Berkeley, sur le championnat de basket-ball a établi un lien entre le nombre de contacts physiques et les performances des équipes : les meilleures sont celles dont les membres se touchent le plus. Si le high five, cette habitude de se frapper la main, en signe de victoire ou d’encouragement, amé-liore les scores d’une équipe, c’est parce qu’il réduit le niveau de stress. Il déclencherait la production d’ocytocine, qui contribue à créer la sensation de confiance, et réduit le cortisol, responsable du stress. Le toucher est bien plus qu’un outil d’exploration ou de survie qui nous prévient en cas de danger : il a des vertus déstressantes et fédératrices.

Des recherches récentes ont mis en évi-dence un double circuit du toucher dans notre corps : l’un rapide et l’autre plus lent. Le premier est activé par les fibres nerveuses A-bêta, spécialisées pour la détection et l’identification des stimuli extérieurs. Elles transmettent des signaux électriques à la vi-tesse d’un TGV (20 à 80 mètres par seconde), jusqu’à la moelle épinière puis aux centres cérébraux où ils sont ensuite analysés. Cela

nous permet de réagir quand une araignée grimpe sur notre bras par exemple. Parallè-lement s’active un autre circuit, câblé avec une autre famille de capteurs, les fibres C, qui transmettent les informations plus lentement, (0,5 à 2 mètres par seconde). Certaines sont spécialisées dans la douleur, d’autres dans les démangeaisons ou le plaisir. Ces dernières, baptisées « nerfs CT » (C-tactiles), intéressent beaucoup les chercheurs. Enroulées autour des follicules pileux, elles sont activées quand le poil est dévié de sa position naturelle. « Dans le cerveau, elles sont reliées au cortex insulaire, qui joue un rôle central dans le système limbique et le contrôle des émo-tions », précise le neurologue et spécialiste du toucher Francis McGlone, de l’université de Liverpool (Angleterre). « Le “système rapide” nous dit que nous sommes touchés et le “système lent” ajoute l’émotion qui y est associée — la douleur si vous vous êtes brûlé, le plaisir si c’est un toucher agréable. »

Un contact agréable pousse à créer des relations de confiance

En matière de toucher, on distingue les zones de peau poilue et de peau glabre (lèvres, paume des mains, plante des pieds). Sur celles dépourvues de poils, les fibres A sont très concentrées. Cela fait de notre main un bijou de technologie. Une équipe de l’université de Stockholm (Suède) a montré qu’en passant notre index sur une surface nous sommes capables de détecter la pré-sence de plis hauts de 13 nanomètres : si notre doigt faisait la taille de la Terre, nous ferions la différence entre les maisons et les voitures !

Le réflexe d’agrippement des bébés — qui tiennent fermement les doigts de leurs pa-rents ou un objet — a été étudié par Michèle Molina, professeure de psychologie du déve-loppement à l’université de Caen (Calvados). « Nous avons proposé à des nouveau-nés de tenir des objets mous lisses ou texturés, reliés à des capteurs de pression. Sur les objets lisses, les capteurs enregistraient beaucoup de points d’appuis de faible amplitude, alors que sur les objets texturés, les appuis étaient moindres mais de plus forte amplitude. » Sur une surface lisse, la petite main effectue un balayage rapide (« ça se passe où ? »), alors que sur une surface texturée, la main concentre son attention sur un point d’irré-gularité et appuie plus fort. « Dès la naissance, nous utilisons notre main comme un réel objet d’exploration », conclut Michèle Molina.

Sur la peau poilue, les fibres CT — qui « éveillent » le plaisir — sont, elles, concen-trées sur les avant-bras, le tronc et les cuisses. « La réponse émotionnelle dépend évidem-ment du contexte — c’est-à-dire qui est en train de vous toucher et dans quelles circons-tances », précise le Pr McGlone. Son équipe a mesuré l’activité électrique des fibres CT sur des sujets effleurés sur l’avant-bras par des systèmes robotisés à des vitesses variant de 0,5 à 5 cm par seconde, puis 50 cm par seconde. Résultat : ces fibres « caresse » s’en-flamment quand la peau est touchée avec une force moyenne et à une vitesse située entre

3 et 5 cm par seconde. Nous aurions ainsi un maximum de plaisir à cette vitesse. Pourquoi la nature nous a t-elle dotés de ces fibres ca-resse ? Selon l’anthropologue Robin Dunbar de l’université d’Oxford (Angleterre), le toucher doux active des zones du cerveau similaires à celle des singes en pleine séance d’épouillage. En plus de l’ocytocine, le toucher émotionnel (appelé aussi social ou affectif) favoriserait la sécrétion d’endorphines — des hormones aux effets euphorisants et antal-giques. Le toucher agréable nous pousserait ainsi à développer des relations de confiance.

Les caresses aident l’enfant, dès son plus jeune âge, à mieux mémoriser

Mais les bienfaits de ces fibres CT vont bien au-delà du plaisir. Elles joueraient aussi un rôle dans notre conscience du corps. « Les travaux du psychologue Harry Harlow ont montré dans les années 1950 que la privation de contacts physiques chez des bébés singes entraînait des comportements autistiques et une absence totale d’interactions sociales », indique le Pr Hakan Olausson, de l’université de Göteborg (Suède), qui a montré que le toucher doux et lent chez les nouveau-nés stimulait leurs fibres CT. « Nous pensons qu’il joue un rôle clé dans la relation mère-enfant et le bon développement du “cerveau social” du bébé. » L’activation de ces fibres CT com-mencerait dès la gestation. Selon le Pr Mc-Glone, les mouvements du liquide amniotique

sur le lanugo — le fin duvet qui re couvre les bébés — stimuleraient la maturation du cerveau et plus particulièrement les aires du cerveau social — le cortex insulaire. « Un mauvais développement du système CT, pour des raisons génétiques ou épigénétiques, pourrait entraîner des troubles autistiques et des comportements anorexiques, avance Francis McGlone. Dans les deux cas, la conscience de soi et de son corps est pertur-bée. C’est ce qui explique aussi que certaines personnes, qui ne présentent aucune patho-logie clinique, n’aiment pas du tout être touchées. Les travaux du psychologue Simon Baron-Cohen le montrent : nous nous situons tous quelque part, à des degrés divers, le long d’un continuum sur le spectre de l’autisme. »

De nombreuses études sur les animaux, puis sur les humains, ont montré que recevoir des caresses dès le plus jeune âge est essen-tiel dans les processus de mémorisation, de réduction du stress et de l’agressivité. Vital pour les bébés, le toucher émotionnel l’est aussi tout au long de l’existence. De récents travaux de l’équipe du Pr Olausson ont montré que le sens du toucher « caresse » tend à s’aiguiser avec l’âge, alors que le sens du toucher rapide et la vue se détériorent. « Là encore, nous pensons que le toucher émotionnel vise à nous rapprocher des autres pour assurer notre survie, alors que notre santé décline et que nous sommes plus vul-nérables », précise le chercheur.

La peau, un bijou de haute technologie

Si la réaction au contact fait l’objet de nombreuses études, les chercheurs s’intéressent aujourd’hui au toucher « actif ». La peau de notre main, extrê­mement élaborée, est l’objet d’études du labo ratoire de tribologie (science du contact et du frottement) de l’école centrale de Lyon qui tente — comme ici — de la recréer artificiellement.

et à la peauAu doigt…

Loin d’être un simple outil d’exploration, le sens du toucher remplit de multiples fonctions, parfois inattendues.

Qui a la peau la plus douce ?

La peau des autres semble toujours plus douce que la sienne… Enfin c’est ce

que nous croyons. Selon une étude de l’Uni-versity College de Londres, nous serions victimes d’une illusion sensorielle. Sur une échelle graduée, les tests ont montré qu’en touchant notre propre peau et celle d’une autre personne, la peau de l’autre nous

paraît toujours plus lisse et plus suave que la nôtre. Précision importante : cette illusion ne se produit que lorsqu’on caresse une zone de peau pileuse. Comme par hasard, c’est là où les fibres CT sont présentes, c’est-à-dire juste l’endroit où la personne caressée éprouve le plus de plaisir. Les choses sont si bien faites !

ILLUSIOnS SEnSORIELLES

“le toucher, un plus pour l’apprentissage”

Édouard Gentaz,professeur de psycho-logie du développe-ment à l’université de Genève, auteur de Je découvre la lecture et l’écriture (éd. PlayBac).

D.r.

où en est la recherche sur le toucher ? Édouard gentaz : De nombreuses études ont été faites sur le toucher « passif » pour com-prendre comment notre peau réagit à un contact. Le toucher « actif » est plus complexe à étudier. À chaque mouvement de la main, on sollicite tout le système pro-prioceptif et senso-riel. Beaucoup de laboratoires tentent de comprendre la perception tactile pour pouvoir la stimuler. L’industrie du jeu vidéo s’y intéresse — demain, on aura la sensation du volant de sa voiture de course ; l’industrie du vête-ment aussi, pour simuler les textiles lors de commandes sur Internet.

le toucher actif est-il un plus pour les apprentissages ? É. g. : Oui. nous nous sommes inté-ressés à l’apprentis-sage de la lecture, exclusivement basé

sur la vision et l’ouïe. À force de répéter les lettres, l’enfant finit par faire le lien entre un signe arbitraire (la lettre) et une unité sonore. Mais si l’on ajoute l’exploration de la lettre avec les mains, il aura plus de facilités pour les tracer. Le but est de créer une trace multisensorielle dans le cerveau. Quand on a un doute sur l’orthographe d’un mot, on a sou-vent le réflexe de l’écrire pour retrou-ver le geste. C’est le même principe.

les non-voyants ont-ils un sens du toucher plus développé ? É. g. : C’est plus complexe que cela. Des travaux ont montré que voyants et non-voyants ont les mêmes seuils de perception du tou-cher. En revanche, si l’on mesure sur une échelle le côté agréable ou désa-gréable d’une stimu-lation, les personnes déficientes vont ressentir des sensa-tions plus élevées en terme de dou-leur. Elles vont être plus sensibles, pour (sur)protéger les sens restants. Au niveau cérébral, on constate que si la zone normalement dédiée à la vision n’est plus stimulée, elle est alors utili-sée au service de l’ouïe ou du toucher.

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“Il peut accroître notre influence”Comment le toucher

soigne et apaise

D epuis sept ans au service d’hémato-logie du CHU de Nantes, Armelle Simon y a introduit le Toucher-mas-sage. Habituellement, les personnes

atteintes de leucémie sont cantonnées dans des chambres stériles, et les contacts physiques réduits au minimum pour éviter toute infec-tion. Cette infirmière au centre fédératif douleur soins de support explique : « Du jour au lendemain, ces patients passent du statut d’individu bien portant à celui de grand ma-lade. Ils ne peuvent plus sortir de leur chambre et restent ici jusqu’à six semaines. Le toucher prend pour eux une autre dimension. »

Le niveau d’anxiété des patients baisse après un massage

En 2015, Armelle Simon a mené une expé-rimentation pour mesurer les bénéfices des séances de Toucher-massage sur l’anxiété et l’estime de soi de 62 volontaires. Pendant trois semaines, les patients ont reçu un mas-sage par semaine, tandis qu’un groupe test observait des temps de repos. Après chaque séance de massage, le niveau d’anxiété bais-sait en moyenne de 11,6 points sur l’échelle de Spielberger (qui va de 20 à 80 — référence utilisée pour évaluer l’anxiété), contre 0,9 pour le groupe témoin. Lors d’entretiens individuels, les patients ont aussi souligné

l’importance de ces soins dans leur rapport au corps, dans ces moments où ils subissent de nombreuses transformations corporelles.

La psychologue Tiffany Field, de l’Univer-sité de Miami, a été l’une des premières à s’intéresser aux bénéfices du massage, dès les années 1980. Ses premiers travaux, qui portaient sur des bébés prématurés, ont montré que les petits ayant reçu des massages pendant cinq à quinze jours après leur nais-sance prenaient plus de poids (entre 21 % et 48 %) que les autres et qu’ils étaient hospi-talisés en moyenne trois à six jours de moins. Le mode opératoire, mis au point par l’équipe de Tiffany Field, est aujourd’hui pratiqué par 38 % des services de néonatalogie américains. Les prématurés reçoivent trois soins par jour de quinze minutes, avec des pressions modé-rées sur tout le corps, puis des mouvements de flexion et d’extension des membres. De-puis, des travaux menés par plusieurs équipes dans le monde ont montré que les massages réduisent également le risque de complica-tions postnatales, le stress des bébés et favo-risent même leur développement cérébral.

En 2009, l’équipe du neurologue Andrea Guzzetta, de l’université de Pise, a réalisé des électroencéphalogrammes sur 20 bébés prématurés dont la moitié avait reçu des massages. Les chercheurs ont également comparé les facultés visuelles des bébés et le niveau de l’hormone de croissance IGF-1, impliquée dans le développement cérébral. Les résultats ont révélé, au bout de quatre semaines de soins, une meilleure maturation du cerveau, une plus grande acuité visuelle et un taux plus élevé d’IGF-1 chez les bébés

massés. Plus récemment, les équipes de Tiffany Field ont montré que les effets des massages sont tout aussi efficaces s’ils sont effectués par la mère du nouveau-né. Avec un avantage indéniable : ils réduiraient également les symptômes de dépression post-natale chez les mères.

Une demande de plus en plus forte des personnes hospitalisées

Après ses travaux sur les prématurés, Tif-fany Field, a créé, en 1992, le Touch Research Institute (TRI) qu’elle dirige. Cet institut a procédé à plus d’une centaine d’études sur les effets bénéfiques du toucher chez les adultes, révélant ainsi que les massages font chuter le taux de cortisol, la pression san-guine et la fréquence cardiaque — les trois principaux symptômes liés au stress. Ces cinq dernières années, les équipes du TRI se sont intéressées au traitement de personnes souf-frant d’arthrite. « Nous avons montré qu’un massage par semaine réalisé par un théra-peute, combiné avec des auto-massages quotidiens, permet de réduire significative-ment la douleur et de retrouver une certaine mobilité des articulations, détaille Tiffany Field. Les pressions modérées — un toucher doux mais franc — sont la clé de ces soins. »

En France, la recherche clinique sur les thérapies complémentaires qui incluent des approches par le toucher sont encore bal-butiantes. Un retard que les auteurs d’un

rapport de l’APHP n’ont pas manqué de mentionner, alors que la demande des malades se fait de plus en plus forte. En 2012, l’APHP a mené une grande enquête nationale pour dresser un état des lieux de ces pratiques dans les hôpitaux. Sur les 16 CHU qui ont répondu au questionnaire, 14 ont déclaré pratiquer le Toucher-massage dans des services aussi variés que l’oncolo-gie, la réanimation pédiatrique, la rhuma-tologie ou la rééducation.

Le Toucher-massage — qui est un nom déposé — a été mis au point par le masseur-kinésithérapeute Joël Savatofski à la fin des années 1980. « Cette approche est avant tout basée sur une intention bienveillante (re-laxer, rassurer, remettre en forme…) qui prend forme grâce au toucher et s’adapte aux ressentis du soignant et du soigné, explique Armelle Simon. On exerce des pressions douces, glissées ou non, de la paume de la main ou de l’avant-bras, sur tout le corps ou seulement une partie en fonction des besoins de chaque patient. Les gestes lents favorisent le sommeil en fin de journée, un rythme plus soutenu en début de matinée dynamise. » En plus du Toucher-massage, quelques hôpitaux pratiquent des soins d’ostéopathie, de ré-flexologie plantaire et de chiropractie. Le recours aux thérapies du toucher pose aussi le problème de l’encadrement de ces profes-sions, qui à l’exception de l’ostéopathie, ne sont pas reconnues en France.

Le fait de se tenir la main aurait des vertus analgésiques

Un autre bénéfice intéressant du toucher est son effet analgésique, démontré par plusieurs études. Même le fait de tenir la main suffit : en 2006, James Coan, de l’Uni-versité de Virginie, a fait subir des chocs électriques à 16 femmes mariées. Le niveau de douleur ressenti était bien plus élevé quand elles étaient seules que quand elles tenaient la main d’un étranger ou, mieux, de leur compagnon. Les IRM réalisées en direct ont montré que ce toucher de leur partenaire, et dans une moindre mesure d’un inconnu, suffisait à réduire le niveau d’acti-vation du système limbique émotionnel de la peur. Détail qui a son importance : plus la relation du couple était bonne, plus les effets étaient marqués…

Le TRI poursuit actuellement d’autres recherches sur des vétérans souffrant de stress post-traumatique. « Comme nous l’avons déjà montré pour d’autres patholo-gies ou conditions physiques, nous pensons que les massages permettront de faire baisser leur taux d’anxiété et leurs troubles du sommeil », poursuit la chercheuse. Il ne reste plus qu’à apprendre aux parents à masser leurs enfants et aux couples à prendre soin de leur partenaire. Nous souf-frons tous de stress, de douleurs diverses et variées ou de maladies parce que nous ne nous touchons pas assez. »

Mais à qui est ce bras ?

On l’appelle « l’illusion de la main en caout-chouc ». Un volontaire, dont le bras

est dissimulé à la vue, est assis à une table où repose un bras en caoutchouc. Si l’on caresse simultanément la main du sujet et celle du bras artificiel, au bout d’un certain temps… l’homme a la sensation que le faux bras lui appartient ! L’expérience, menée

pour la première fois par le neurobiologiste Matthew Botvinick, en 1998, montre la triple inter action entre le toucher, la vision et la proprioception (perception de la dispo sition des parties du corps les unes par rapport aux autres) dans la construction de l’image de soi. Depuis, le test a été reproduit avec un faux pied, une langue et tout le corps.

ILLUSIOnS SEnSORIELLES

On croyait ces techniques dépas sées. Pourtant, elles reviennent en force, notamment à l’hôpital.

Jacques Fischer­Lokou,maître de conférences en psychologie à l’uni ver sité de Bretagne Sud.

D.r.

le toucher est-il un outil de persuasion ? Jacques Fischer-lokou : Oui, parfois il peut accroître notre influence. C’est ce que suggèrent les travaux en psy-chologie du com-portement de Chris Kleinke, dès la fin des années 1970. Dans son expéri-mentation, un étu-diant laissait des pièces de monnaie dans une cabine téléphonique. Une fois la personne sui-vante entrée, il lui demandait si elle avait vu ces pièces. 63 % des personnes restituaient l’argent quand il n’y avait pas eu de contact physique, alors que 96 % le faisaient lorsque l’étudiant s’arrangeait pour frôler la personne.

le toucher peut-il aussi influen-cer nos compor-tements d’achat ? J. F.-l. : Oui. nicolas Guéguen, profes-seur à l’université Bretagne Sud, a demandé, dans le cadre d’une étude, au serveur d’un res-

taurant de toucher brièvement les clients en leur re-mettant la carte, avant de leur re-commander le plat du jour. 42 % des clients ont suivi sa suggestion en situation de non-contact, contre 59 % lorsqu’il y avait eu toucher. Un contact rapide a aussi des effets sur la consommation d’alcool dans un bar ou sur le montant des pourboires. Le toucher peut aussi encourager la prise d’initiative ou réduire les conflits interpersonnels.

Comment l’expliquez-vous ? J. F.-l. : Aucune recherche n’a pu réduire l’effet du toucher à une seule explication. Dans certaines si-tuations, la familia-rité activée a cer-tainement un effet, renforcée par le statut de celui qui touche (un patron avec un employé, un enseignant avec un élève). Dans d’autres, l’humeur et la perception posi-tive engendrées jouent aussi un rôle. La proximité induite par le toucher acti-verait une prédispo-sition automatique à manifester davan-tage de confiance et de perception positive envers celui qui touche, et donc à accepter ses requêtes.

Au Touch Research Institute, à Miami, les nouveau­nés prématurés sont massés, ce qui favorise une prise de poids plus importante et un meilleur développement cognitif et moteur.

tous les bébésMasser

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Mobilisation arti culaire, massage, drainage… À quoi servent les différentes médecines du toucher ?

12 méthodes pour rééquilibrer le corps

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Nos pieds recèlent plus de 70 000 terminaisons nerveuses. Chaque partie de notre corps y serait représentée, selon la réflexologie plantaire.

corps sous le piedUne carte du

D u contact qui manipule la structure osseuse à celui qui masse, effleure, voire survole, nombre de techniques paramédicales permettent de préve-

nir et soigner notre corps, mais aussi notre esprit. Quelles sont leurs indications, qui les pratique et que valent-elles ?

L’ostéopathie, poUr restaUrer L’arChiteCtUre osseUse

62 % des personnes qui consultent un ostéo pathe le font pour des douleurs mus-culo-squelettiques. Cette méthode thérapeu-tique manuelle, la seule médicalement recon-nue en France avec la kinésithérapie, traite notamment les restrictions de mobilité. Alors que le kinésithérapeute traite en majeure partie par le mouvement et les mobilisations (créées, elles, par le professionnel), l’ostéopa-thie va plus loin : « Dans une entorse de la cheville par exemple, explique Nicolas Bou-nine, kinésithérapeute et ostéopathe, sont en cause à la fois le déséquilibre du bassin sur le plan osseux et le dysfonctionnement d’un nerf sciatique. » L’ostéopathie permet au corps de récupérer une architecture osseuse idéale, ainsi qu’un repositionnement équilibré dans l’espace. Concrètement, le praticien mobilise les articulations et redonne, si besoin, la liberté articulaire en effectuant des pres-

sions longues et fermes des doigts sur les points d’attache des muscles et des ligaments sur l’os. Faut-il faire craquer ? « C’est une approche traditionnelle pour libérer les ten-sions présentes entre deux vertèbres. Ce n’est pas une garantie de résultat plus probant, mais cela ne présente pas de contre-indica-tions majeure », précise Nicolas Bounine.www.afosteo.org

Le massage sportif, poUr préparer Le mUsCLe

« Dans le cadre d’une activité sportive, avoir recours au massage est essentiel pour préparer son corps à l’effort, » affirme Marielle Volondat, masseuse-kinésithéra-peute, ex-formatrice à l’Insep, consultante pour Weleda. Cela permet d’éviter les cour-batures et les contractures musculaires. Au niveau cellulaire, une étude de l’université McMaster, à Hamilton (Canada), a montré en 2012 comment il facilite la récupération : 11 jeunes hommes ont fait de l’exercice pendant 70 minutes, puis ont été massés 10 minutes sur une jambe seulement. Les échantillons de muscles ont révélé une baisse des cytokines (qui jouent un rôle important dans l’inflammation) et une augmentation des mitochondries (qui transforment le glucose en énergie utilisable par la cellule). « Avant le massage, le praticien pose sa main sur le muscle pour établir un bilan : il mesure s’il est dur, contracté, induré, chaud… La pratique repose alors sur des techniques d’effleurage profond, de palper-rouler, de pressions glissées ou de pétrissages. Le massage est recommandé à l’échauffement,

avant des efforts intenses, comme les courses à pied ou le ski, ou en récupération.www.ffmkr.org

La fasCiathérapie, poUr LUtter Contre Les doULeUrs et Le maL-être

Fondée par le Français Danis Bois, kinési-thérapeute-ostéopathe, la fasciathérapie est le fruit de ses recherches autour du ressenti corporel. « Les fascias sont de fines mem-branes de tissu conjonctif qui entourent les muscles, les os, les viscères, le cerveau », ex-plique Isabelle Eschalier, kinésithérapeute et fasciathérapeute. Ce maillage assure notre unité anatomique et fonctionnelle, « notre squelette psychique », selon son fondateur. Il stockerait nos traumatismes, stress, émo-tions amoureuses, chocs physiques, et se ré-tracterait sous leur effet. « Par un toucher “psychotonique”, lent, très doux et profond sur des points d’appui répartis sur tout le corps, cette approche ne manipule pas, mais sollicite les forces internes de régulation du corps, pour éliminer les tensions et restaurer notre équilibre. » Selon une étude de la kiné-

sithérapeute Nadine Quéré et ses collègues (congrès de recherche sur les fascias, Boston, 2007), elle induirait des effets bénéfiques sur les parois internes des vaisseaux sanguins et une réduction du stress physique et émotion-nel. « La fasciathérapie libère les tensions tissulaires, rend mobile ce qui est figé, sensible ce qui a été anesthésié. S’opère alors un travail d’unification, de rassemblement, de centrage », précise Isabelle Eschalier. Ses indica tions : douleurs physiques, troubles fonctionnels, stress et mal-être psychologique.www.ankf.fr

Le roLfing, poUr se redresserEncore discrète en France, la méthode du

Rolfing, développée dans les années 1950 aux États-Unis par Ida Rolf, docteure en biochi-mie, est issue de l’ostéopathie, de la chiro-praxie et du yoga. Elle apaise les douleurs musculo-squelettiques, atténue les tensions et les mauvaises postures, mais c’est aussi un outil de développement personnel. « On re-garde la manière dont la personne se déplace dans l’espace, comment elle respire, parle, soutient le regard », détaille Claudia Righini,

praticienne de Rolfing à Paris. « On lui dit ce qu’on observe, cela permet une première prise de conscience. Puis on vérifie sur la table si nos observations se confirment au niveau structurel. » Le « rolfeur » travaille alors les fascias, mais, surtout, fait des propositions au patient pour qu’il prenne de nouvelles habi-tudes. » Danseurs, sportifs et musiciens ont recours à cette pratique. Compter dix séances pour corriger définitivement sa posture.www.rolfing.org

La réfLexoLogie pLantaire, poUr détendre Le Corps et L’esprit

Selon la réflexologie, chaque partie de notre corps trouverait sous la plante de pied son point correspondant. Par des mouve-ments de massage et de pressions, le théra-peute parcourt les zones réflexes l’une après l’autre et dresse un bilan énergétique com-plet de la personne. Quelques études scien-tifiques, sur un nombre restreint de patients atteints d’un cancer, ont montré des effets positifs de cette pratique née en Chine il y a 5 000 ans, notamment pour réduire les effets secondaires des traitements de chimio-thérapie (nausées, troubles du sommeil…). « Je constate tous les jours des effets sur les patients que j’accompagne en cancérologie ou en soins palliatifs », précise Martine Bois-serie Terrier, présidente de la Fédération française des réflexologues. « De plus en plus de médecins se tournent vers nous pour diminuer le niveau d’anxiété mais également les problèmes de constipation. »reflexologues.fr

Quel est le segment le plus long ?

Dans l’illusion de Müller-Lyer, on demande quel segment (schéma ci-dessus) est le

plus long. Spontanément, notre vision nous dit que c’est celui doté de pennes ouvertes sur l’extérieur. En réalité les deux segments font la même longueur. Or, si l’on suit du doigt, à l’aveugle cette fois, ces formes en relief, on fait généralement la même erreur,

et d’autant plus si l’angle formé par les pennes et le segment est petit. Cependant, si le sujet regarde ou touche plusieurs fois ces segments, son cerveau va peu à peu corriger sa perception et se rendre compte qu’ils font la même longueur. Le cerveau est donc capable de corriger son erreur, même s’il n’avait pas conscience d’en faire une.

ILLUSIOnS SEnSORIELLES

“on se regarde mais on ne se touche plus”

Bernard Andrieu,philosophe, auteur de Sentir son corps vivant (éd. Vrin). Directeur du laboratoire techni ques et enjeux du corps de l’université Paris-V.

D.r.

Comment lisez-vous l’engouement pour les thérapies du toucher ? bernard andrieu : On est dans une culture télévisuelle, on se téléporte par l’intermédiaire de son smartphone. Les gens se re gar-dent mais ne se touchent plus. Les images sont suf-fi samment érotiques ou effrayantes pour provoquer des sen-sations. En même temps, il y a une très forte demande d’être touché, mal-gré les problèmes éthiques que le toucher soulève.

Quel est l’objectif de ces thé-rapies du toucher ? b. a. : C’est une façon de se réappro-prier son schéma corporel en terme de plaisir et de bien-être. Lorsqu’on se fait masser, on sort du registre de son apparence, on ne se conforme plus à une norme. Chacun revient à l’intérieur de son corps pour dresser sa propre cartographie senso-

rielle. C’est impor-tant car cela montre, par l’expérience d’être touché, que le bien-être ne peut pas être totalement externalisé dans le regard de l’autre. On se fait masser pour avoir un vécu unifié. L’inverse de ce que j’ai appelé le « corps dispersé ». Je ne suis plus un cerveau, un sexe et un bras, mais un corps rassemblé. Le toucher concerne aussi notre histoire et notre géographie corporelles. C’est une manière d’ac-tiver la mémoire, de découvrir des zones inconnues de son corps.

le toucher est-il un tabou ? b. a. : Oui, c’est un vieil héritage de la culture judéo-chrétienne. On n’apprend plus à se toucher. On le fait un peu à l’école en éducation physique, mais c’est tout. À l’inverse, dans les cours de récréation, puis dans la rue, nous sommes confrontés à des libérations tactiles sauvages avec la multiplication des gestes trans-gressifs. Le toucher devient négatif et on ne sait plus l’uti-liser. On a créé des ateliers du goût, on pourrait proposer des ateliers du contact ! Qu’est-ce que la distance, le proche, l’intime…

En mobilisant les articulations, l’ostéopathe travaille sur l’architecture osseuse dans son ensemble, pour restaurer un positionnement du corps dans l’espace plus équilibré.

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le squeletteRééquilibrer

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SEPTEMBRE 2016SEPTEMBRE 2016

Le drainage LymphatiqUe, poUr rédUire L’insUffisanCe veineUse

En France, 57 % des femmes et 26 % des hommes souffrent d’insuffisance veineuse. Le drainage lymphatique a été fondé en 1936 par le physiothérapeute danois Emil Vodder. Dans l’organisme, les canaux lymphatiques véhiculent l’eau, les protéines, les cellules libres et les déchets en direction du système sanguin. « Le but des drainages est de restau-rer l’évacuation du liquide lymphatique des jambes vers le haut », précise Sonia Pétrau-Gay, masseuse-kinésithérapeute au centre de thalassothérapie de Carnac (Morbihan). Le protocole est précis : des pressions circu-laires sur la peau, lentes et régulières, puis des mouvements alternant pression et dé-pression. Le masseur « pompe » pour activer la lymphe. Ses indications : problèmes circu-latoires, tissus congestionnés, rétention d’eau, microvaricosités et vaisseaux dilatés. Le drainage lymphatique se pratique dans un cabinet de kinésithérapie sur prescription, ou dans des thermes spécialisés en phlébo-logie. La naturopathie, non reconnue, l’utilise également. Pour Dominique Sol-Rolland, naturopathe au Centre tout naturellement, à Paris, « ce massage puissant et en profondeur des muscles et des tissus conjonctifs, accom-pagné d’un sauna, remet les toxines en circu-lation pour une meilleure élimination ».www.afpdlm.org

L’étiopathie, poUr soULager Les troUbLes fonCtionneLs et Les doULeUrs artiCULaires

Tout comme l’ostéopathie, l’étiopathie s’inspire de la tradition du « reboutement » qui s’est transmise à travers les âges par la tra dition orale. Du grec aitia, « cause », et pathos, « ce qui affecte le corps », l’étiopathie s’attache en priorité à déterminer la cause

du problème. « Le corps humain est appré-hendé comme un ensemble de systèmes (osseux, musculaire, digestif…) en interac-tion permanente, à la fois entre eux et avec le milieu qui les entoure, soit une approche systémique », explique Jean-Paul Moureau, étiopathe. Le traitement étiopathique se déroule en quatre étapes : le recueil des faits exprimés par les patients (symptômes, gênes fonctionnelles, douleurs…), le diagnostic par examen clinique, l’évaluation du degré d’évolutivité et l’intervention par des mani-pulations. « Ces interventions sont d’une précision telle que l’on peut parler de chirur-gie non-instrumentale, précise le praticien. Sur une entorse de la cheville, l’étiopathie rétablit l’ouverture articulaire entre le tibia et le péroné d’une part et l’astragale (os de la cheville) d’autre part, par une légère traction qui doit être précise, simple, rapide et douce. » L’étiopathie vise les structures musculo-squelettiques, génito-urinaires, respiratoires ou digestives. Elle est indiquée aussi dans les troubles circulatoires, gynéco-logiques, digestifs et ORL, à tout âge.www.etiopathie.com

Le Chi nei tsang, poUr Chasser Les traCes émotionneLLes

Le chi nei tsang, pratiqué dans les ermitages taoïstes, est arrivé récemment en Occident. Pour Gilles Marin, directeur de l’Institut chi nei tsang, à Berkeley (Californie), « cette pratique prend en compte les cinq systèmes majeurs du corps : vasculaire, lymphatique, nerveux, musculaire et énergétique ». Sa parti-cularité ? Il vise principalement la région abdominale, où réside le chi, l’énergie vitale de la médecine chinoise et les émotions. « Pour une bonne santé, le chi doit être puis-sant, dense, et circuler librement », ajoute Gilles Marin. Par un toucher profond, léger

et doux, on stimule le travail des organes internes, de façon à rétablir la libre circulation du chi et éliminer les charges émotionnelles. Peuvent être massés l’abdomen, le thorax, le diaphragme ou encore les zones latérales du ventre (zones dorso-lombaire et rénale).chineitsang.marin.free.fr

L’haptopsyChothérapie, poUr gagner ConfianCe en soi

Cette « science de l’affectivité », inventée par Frans Veldman, est connue des futurs parents : le thérapeute leur fait découvrir comment entrer en relation avec leur bébé in utero par le toucher. Mais elle concerne aussi les adultes : « Entre 150 et 200 psychiatres ou psychologues en France utilisent le toucher affectif haptonomique avec leurs patients », détaille la psychiatre Dominique Décant, présidente du Centre international de re-cherche et de développement de l’haptono-mie. « Il développe les sentiments de sécurité intérieure, de conscience de soi et de confiance en soi. » Il alterne moments de parole et de massage sur une table. Le patient peut aussi être debout, et le professionnel pose alors par exemple ses mains sur les hanches. Détail qui peut dérouter : les séances se déroulent en sous-vêtements. « Certaines personnes ont peur du contact et il leur faut parfois plusieurs séances de découverte. L’objectif est de retrou-ver la verticalité du corps. À force de répéti-tion, de petits et grands modelages sur tout ou parties du corps, le patient se libère de son passé. Nous formons aussi des médecins géné-ralistes et des psychomotriciens exerçant en instituts ou hôpitaux psychiatriques. »www.haptonomie.org

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IP En médecine chinoise, c’est là que réside l’énergie vitale que peuvent bloquer des émotions fortes. Masser le ventre, selon les principes du chi nei tsang, les libère et prévient les maladies.

Le massage du ventre

Le shiatsU, poUr stimULer Les défenses immUnitaires

Shiatsu — terme japonais — signifie « pres-sion des doigts ». Reconnue en tant que médecine non conventionnelle digne d’inté-rêt (résolution du Parlement européen, mai 1997), cette pratique est entrée à l’hôpital. Elle a fait l’objet, entre autres, d’une méta-analyse de 80 études internationales confir-mant ses effets positifs sur la réduction de la douleur, la qualité du sommeil, la diminution du stress et de l’anxiété. « Le shiatsu consiste à stimuler les points d’acupuncture situés sur les trajets de méridiens, au nombre de 12, qui parcourent notre corps tels des cours d’eau irriguant notre organisme, par des pressions accompagnées d’étirements », détaille Shahine Ismail, certifiée par la Fédération française de shiatsu traditionnel (FFST). Chaque point est relié aux différents organes. « Cette discipline est une pratique d’hygiène naturelle qui stimule les défenses naturelles, que l’on peut utiliser en prévention. »www.ffst.fr

Le reiki, poUr bénéfiCier d’Une reLaxation profonde

Depuis 2005, l’unité de soins et de recherche sur l’esprit de l’hôpital de la Timone, à Mar-seille (Bouches-du-Rhône), intègre le reiki en tant que thérapie complémentaire dans ses soins accompagnant l’oncologie et les soins palliatifs, au même titre que la relaxation, la méditation et l’accompagnement spirituel. Rei veut dire « universel », et ki évoque l’énergie vitale. Selon la Fédération française de reiki traditionnel (FFRT), « cette pratique fondée par le moine bouddhiste japonais Mikao Usui

(1865 - 1926) repose sur l’induction d’une re-laxation et d’une méditation par une simple imposition des mains. » Le reiki induit à la fois une détente profonde et un apaisement des pensées. Pour Christian Mortier, psychanalyste et fondateur de l’Institut de reiki, « on accède dans cet état à une énergie universelle, qui posséderait une intelligence propre et qui permettrait de se diriger là où le corps en a besoin ». De rares recherches ont exploré ses effets : en 2002, une étude de l’Université du Texas a indiqué qu’il engendre une diminution du stress et un sentiment de relaxation. L’ins-titut de recherche de Portland (Oregon) a étudié ses effets sur l’immunité : les analyses de prises de sang ef fectuées avant une séance, puis quatre heures plus tard, ont révélé un taux de globules blancs en augmentation.www.ffrt.fr

Le massage tantriqUe, poUr réveiLLer sa Libido !

« Il n’y a pas de connotation sexuelle dans ce massage, mais un réveil de la libido — l’énergie fondamentale de l’être humain — qui se manifeste entre autres dans la sexua-lité, d’après les travaux du psychanalyste Wilhelm Reich », précise Nathalie Vieyra, thérapeute psychocorporelle, certifiée en massage tantrique. Issu du tantra, une philo-sophie de l’Inde, « sa vocation est de relier le corps et l’esprit par des mouvements spéci-fiques, comme de grands lissages, envelop-pements, papillonnages ». Son rythme, très lent, libère cette énergie et plonge la personne dans un état méditatif. « Alors, la simple di-mension corporelle s’efface au profit d’un sentiment de complétude, où le cœur et la conscience s’ouvrent », explique la praticienne. www.nathalie-vieyra-massage.com

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POUR ALLER PLUS LOIN

Livres � « Haptonomie et

psychothérapie », Jean- Louis Revardel, éd. PUF.

� « L’équilibre du bassin. La clé », nicolas Bounine, éd. Dauphin.

� « La fasciathérapie », Isabelle Eschalier, éd. Guy Trédaniel.

� « À mains nues. Soigner et guérir », Jean-Paul Moureau, éd. du Seuil.

� « Guérir à partir de l’intérieur avec le chi nei tsang », Gilles Marin, éd. Guy Trédaniel.

� « Shiatsu pratique », Denis Lamboley, éd. Marabout pratique.

� « Les bons Gestes de la réflexologie plantaire », Jean-Louis Abrassart, éd. Guy Trédaniel (+ DVD).

� « Massage ayurvédique », Stéphanie Marie, éd. Marabout.

� « Le Guide complet du reiki », Tanmaya Honervogt, éd. du Courrier du livre.

� « Lâchez prise. Promenades au pays de la conscience », nathalie Vieyra et Flore-aël Surun (autoédition).

� « Massage détente. Guide des techniques », Catherine Maillard, éd. Jouvence.

Le mois prochain : Comment rendre nos enfants heureux

Le reiki, qui traite les différentes parties du corps, crée des sensations de chaleur et de détente, mais sans contact. Il a néanmoins des effets tout aussi relaxants qu’un massage.

sans toucherLe toucher…

“Des séances de shiatsu et des ateliers collectifs au travail”

Shahine Ismail,créatrice de l’Arbre de vie, une gestion du stress en entreprise par le shiatsu.

D.r.

Pourquoi avoir introduit le mas-sage au travail ? shahine Ismail : Lors de la parution du rapport Larose-Pénicaud sur « le bien-être et l’effica-cité au travail », en 2010, il m’est apparu que la prise de conscience corpo-relle était centrale : une mauvaise ges-tion du stress peut être une source de désordres neuro-psycho-immunolo-giques qui agissent à la longue sur la santé. Mon approche repose à la fois sur des séances indivi-duelles de shiatsu et des ateliers péda-gogiques en groupe. Deux tiers des salariés ayant suivi ce programme ont vu diminuer leurs douleurs, migraines et insomnies.

le corps est-il encore tabou en entreprise ? s. I. : Le problème n’est pas tant qu’il soit tabou, mais que nous sommes dans le déni du corps, de ses rythmes et de son importance en

matière de perfor-mance, puisque l’en-treprise est essen-tiellement tournée vers cet aspect. Les postes sont rarement ergono-miques, ce qui en-traîne de nombreux troubles physiques. Plus préoccupés par le rendement que par le bien-être, nous soumettons notre corps à de fortes exigences, avec à la clé stress, épuisement et burn-out. Quant au toucher, hormis poignée de mains ou bises, il est rare en entreprise.

Quels sont les bénéfices de votre programme ?

s. I. : Ils sont physio-logiques : le niveau des hormones du stress chute en cours de massage tandis que l’ocyto-cine augmente ; et psychologiques aussi : cette pratique corporelle permet de se réapproprier son corps et de créer un sentiment de confiance en soi et de concentration. Au final, elle relie le corps et l’esprit alors que notre mode de vie concourt à les séparer. L’auto-massage aide à l’apprentissage d’outils d’autonomie en cas de stress. Et les ateliers collectifs sont source de cohésion dans les équipes.


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