depardieu darroussin des hommes
TRANSCRIPT
SYNECDOCHE PRESENTE
HOMMESDES
UN FILM DE LUCAS BELVAUX
GĂRARDDEPARDIEU
JEAN-PIERREDARROUSSIN
CATHERINEFROT
SYNECDOCHE présente
avec
GĂRARD DEPARDIEU, CATHERINE FROT, JEAN-PIERRE DARROUSSINYOANN ZIMMER, FĂLIX KYSYL, EDOUARD SULPICE
SORTIE LE 11 NOVEMBRE 2020
2020 - France-Belgique - Couleur - 1h41
DISTRIBUTION AD VITAM 71, rue de la Fontaine au Roi75011 Paris [email protected]
RELATIONS PRESSEFlorence Narozny / Clarisse André
6, rue de la Victoire - 75009 ParisTĂ©l. : 01 40 13 98 09
[email protected] [email protected]
Matériel presse téléchargeable sur : www.advitamdistribution.com
HOMMESDES
UN FILM DE LUCAS BELVAUX
Synopsis
Ils ont Ă©tĂ© appelĂ©s en AlgĂ©rie au moment des « Ă©vĂ©nements » en 1960. Deux ans plus tard, Bernard, Rabut, FĂ©vrier et dâautres sont rentrĂ©s en France. Ils se sont tus, ils ont vĂ©cu leurs vies. Mais parfois il suffit de presque rien, dâune journĂ©e dâanniversaire, dâun cadeau qui tient dans la poche, pour que quarante ans aprĂšs, le passĂ© fasse irruption dans la vie de ceux qui ont cru pouvoir le nier.
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Jâai lu Des hommes dĂšs sa sortie, il y a plus de dix ans. Je lâai trouvĂ© magnifique, Ă©tourdissant, Ă©mouvant, fort. En fait, jâaurais aimĂ© lâavoir Ă©crit.Il y a bien sĂ»r le style, une Ă©criture syncopĂ©e, haletante qui fait naĂźtre la tragĂ©die de lâinsignifiant, de lâordinaire, du silence. Laurent Mauvignier est un grand auteur mais on nâadapte pas un style. On peut en revanche adapter un procĂ©dĂ©. Ici, ce sont les flash-backs, les soliloques, le rĂ©cit non chronologique au fil de la pensĂ©e.Mais au-delĂ de ça, ce sont les thĂšmes dĂ©veloppĂ©s qui mâont accrochĂ© parce quâils rejoignent les questions qui me tarabustent depuis des annĂ©es : la confrontation des destins individuels avec la grande Histoire, les souvenirs, la culpabilitĂ©, les blessures secrĂštes et les marques indĂ©lĂ©biles que la guerre laisse dans les consciences.
Oui. Câest un film sur la mĂ©moire, les souvenirs, les cicatrices. Pour ceux qui en sont revenus, cette guerre ne sâest jamais terminĂ©e parce quâon ne lâa jamais nommĂ©e, jamais considĂ©rĂ©e comme telle. Comme sâils ne sâĂ©taient jamais battus. Comme Fabrice Ă Waterloo, nos personnages nâont vu que ce quâils ont vĂ©cu. Câest-Ă -dire des fragments, des instants. Ils ont fait ce quâils pensaient ĂȘtre leur devoir et se sont rendu compte, plus tard, quâils avaient Ă©tĂ© les rouages dâune mĂ©canique terrifiante. Sans avoir nĂ©cessairement les mots pour en parler, sans ĂȘtre sĂ»rs dâĂȘtre entendus et compris. On dit souvent que les anciens dâAlgĂ©rie nâont pas racontĂ©, je crois surtout que personne ne voulait les entendre. On les a condamnĂ©s Ă ce non-dit, ce silence, qui est la marque de la guerre dâAlgĂ©rie. Câest ce que jâavais envie de porter Ă lâĂ©cran depuis que jâavais lu le livre. A lâĂ©poque, les droits nâĂ©taient pas libres. Et puis ils se sont libĂ©rĂ©s et jâai trouvĂ© que le projet arrivait naturellement aprĂšs Chez Nous qui parlait de la montĂ©e de lâextrĂȘme-droite. Le FN sâest, en grande partie, construit sur les cendres de cette guerre-lĂ .
Entretienavec Lucas Belvaux
Pourquoi avoir choisi dâadapter le roman Des hommes de Laurent Mauvignier ?
Ă propos du roman, JĂ©rĂŽme Garcin a dit quâil traitait de la guerre aprĂšs la guerre âŠ
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Câest un film politique mais pas un film militant. IdĂ©ologiquement, la question de la colonisation est rĂ©glĂ©e. La guerre est terminĂ©e depuis prĂšs de soixante ans. LâHistoire a jugĂ©.En revanche le film est politique dans le sens oĂč il interroge sur la façon de raconter cette histoire, comment on lâassume, comment on la transmet, comment on rĂ©concilie les diffĂ©rents rĂ©cits parce que, Ă©videmment, il y a plusieurs façons de raconter. Les pieds-noirs ont Ă©tĂ© incompris, mal traitĂ©s, pendant et aprĂšs. Encore aujourdâhui, il y a un racisme anti pieds-noirs qui est insupportable. Il nây a dâailleurs pas un seul « point de vue pieds-noirs » parce que comme toute sociĂ©tĂ© humaine, câest une communautĂ© traversĂ©e par la politique, les questions sociales. Pour employer un terme Ă la mode, on ne peut pas plus « essentialiser » les pieds-noirs que nâimporte quel autre humain. Il y a aussi les militaires, et, selon quâils soient appelĂ©s ou professionnels, ça ne sera pas la mĂȘme histoire. Chacun racontera la sienne, forcĂ©ment singuliĂšre, unique, diffĂ©rente selon la rĂ©gion oĂč il a servi, ou lâannĂ©e. Il y a bien sĂ»r le rĂ©cit des AlgĂ©riens, dans toutes leurs diversitĂ©s politiques FLN ou MNA, combattants de lâALN ou harkis. Il faut entendre tous les rĂ©cits. Accepter lâexpression de tous les points de vue, de toutes les subjectivitĂ©s, les confronter et voir en quoi on peut, non pas les rĂ©concilier, mais en faire une histoire que tout le monde pourra entendre parce quâon y trouvera la voix de chacun. Câest le travail que font les historiens quand on veut bien les laisser travailler.Câest assez inouĂŻ de voir comment cette guerre « travaille » encore la sociĂ©tĂ© française alors que plus de la moitiĂ© de la population est nĂ©e aprĂšs la fin de cette derniĂšre.
Oui. Jâai pensĂ© Ă lui pendant toute lâĂ©criture de lâadaptation. Plus jâavançais plus il sâimposait pour jouer ce personnage Ă la fois mutique et explosif. Mais câest un personnage double. On le voit Ă deux Ă©poques de sa vie, distantes de plus de quarante ans. Quand il arrive en AlgĂ©rie, il a vingt ans et il sâappelle Bernard. Il va y dĂ©couvrir Ă la fois la beautĂ© du monde et de lâamour mais aussi lâhorreur dont lâhumanitĂ© est capable. Il ne sâen remettra jamais.Lâhistoire de lâAlgĂ©rie passionne GĂ©rard, il la connaĂźt trĂšs bien. Il est trop jeune pour avoir fait la guerre mais, enfant, adolescent, il a connu des appelĂ©s, il les a vus revenir, cassĂ©s. En plus, câest un provincial. On peut imaginer quâil a connu Feu-de-Bois. Il nâa pas eu Ă lâinventer. Il pouvait faire appel Ă ses souvenirs et Ă son talent !
Câest un film politique ?
GĂ©rard Depardieu dans le rĂŽle de Feu-de-Bois, câĂ©tait une Ă©vidence pour vous ?
Catherine câĂ©tait une Ă©vidence dĂšs le dĂ©part pour jouer Solange la sĆur de Feu-de-Bois. Jâentendais sa voix en lisant le roman et jâai Ă©crit en pensant Ă elle. Dâailleurs, câest la premiĂšre Ă qui jâai fait lire le scĂ©nario, dĂšs la premiĂšre version. Et sa lecture a Ă©tĂ© particuliĂšrement importante parce que les questions quâelle mâa posĂ©es ont Ă©tĂ© centrales dans la rĂ©Ă©criture. Câest une lectrice trĂšs affutĂ©e. Elle ne laisse rien passer mais elle est dâune bienveillance extrĂȘme. Avec Catherine, on est tout de suite dans le travail. On va Ă lâessentiel.Pour le personnage de Rabut, la recherche a Ă©tĂ© plus compliquĂ©e. Autant Feu-de-Bois est truculent, contrastĂ©, explosif ; autant Rabut est sur la retenue. Il Ă©coute, regarde, commente un peu. Sa dĂ©rive est lente, imperceptible, presque. Câest un rĂŽle trĂšs tĂ©nu et dĂ©licat quâil faut tenir (retenir) sur tout le film. TrĂšs complexe, fait dâallers-retours, de paradoxes. Il faut une rigueur absolue et une confiance totale dans le travail, sans pouvoir se dire « je me rattraperai Ă la prochaine scĂšne ». Il faut « ĂȘtre là » tout le temps, Ă chaque instant et Jean-Pierre est un champion dans le genre.Câest trĂšs exaltant de travailler avec des acteurs comme eux. On se sent portĂ©s. LâĂ©change est permanent. Ils apportent beaucoup. Ils donnent. Je parle dâeux, mais tous les acteurs, mĂȘme ceux qui venaient deux ou trois jours, Ă©taient particuliĂšrement impliquĂ©s, concentrĂ©s. Le reste de lâĂ©quipe aussi, dâailleurs, sans doute parce que câest une histoire française, que chacun, chaque famille est concernĂ©(e).
Yohann et Edouard sont trĂšs jeunes. Ils font partie dâune gĂ©nĂ©ration de jeunes Français (ou Belges !) qui (heureusement) nâa jamais connu la guerre, pas fait de service militaire et dont la vie est Ă des annĂ©es-
lumiĂšre de celles de Rabut et Bernard. Ils devaient incarner des jeunes qui nâavaient jamais quittĂ© leur canton, jamais pris le bateau ou lâavion. CâĂ©tait passionnant de les voir dĂ©couvrir cette rĂ©alitĂ©-lĂ au fil du travail. Il fallait quâils comprennent ce quâĂ©tait la vie dâun jeune Ă cette Ă©poque et quâils lâintĂ©riorisent.CâĂ©tait vrai pour tous les comĂ©diens de cette partie du film. Un des plaisirs de ce tournage, ça a Ă©tĂ© de dĂ©couvrir une gĂ©nĂ©ration dâacteurs. Des types trĂšs Ă©tonnants, trĂšs talentueux, avec des personnalitĂ©s fortes, singuliĂšres. FĂ©lix Kysyl (FĂ©vrier), Jean-Baptiste Le Vaillant (Chatel) Simon Parmentier (Poiret), Yannick Morzelle (Kastendeuch), Ahmed Hamoud qui joue Idir. Un acteur marocain magnifique. Et Fleur Fitoussi, bien sĂ»r, la seule fille de cette partie-lĂ . Ce sont des acteurs quâon connaĂźt trĂšs peu, quâon nâa jamais vus pour certains et qui forment une gĂ©nĂ©ration magnifique.
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Et puis Catherine Frot et Jean-Pierre DaroussinâŠ
Bernard, alias Feu-de-Bois, et Rabut sont appelĂ©s Ă vingt ans en AlgĂ©rie. Ils sont incarnĂ©s par Yohann Zimmer et Edouard SulpiceâŠ
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Un des thĂšmes majeurs du film est le silence. Paradoxalement vous utilisez beaucoup les voix-off qui renforcent cette polyphonie quâest le rĂ©citâŠ
Le livre Ă©tait dĂ©jĂ en voix-off ! Câest lâimpression que jâai eue en tout cas. Je nâai pas essayĂ© de transformer systĂ©matiquement les rĂ©cits des uns et des autres en images. Je les ai parfois gardĂ©s pour ce quâils sont, des rĂ©cits, des histoires quâon raconte, avec la force propre des mots, lâimaginaire quâils permettent Ă ceux qui les entendent.Câest pour ça que jâai gardĂ© cette construction en flash-back, la seule capable, par ses allers-retours incessants entre hier et aujourdâhui, de montrer le regard dâun homme au dĂ©but de sa vieillesse sur ce quâil Ă©tait quand il avait vingt ans.Le flash-back et la voix-off sont au cĆur du projet. Câest une façon de prendre de la distance. Et câest un paradoxe intĂ©ressant de voir que câest cet Ă©loignement qui permet une introspection profonde, qui permet de transcender les Ă©poques. De faire que le passĂ© et le prĂ©sent dialoguent, se parlent, se questionnent, se rĂ©pondent.La voix-off permet au personnage de murmurer Ă lâoreille des spectateurs, dans
une relation dâintimitĂ© unique, mais câest aussi une façon pour le personnage de se parler Ă lui-mĂȘme, de sâinterroger, de rĂ©flĂ©chir sur sa condition, ce quâil a Ă©tĂ©, ce quâil est, ce quâil fait. Et ça permet au personnage dâaujourdâhui de dialoguer avec celui quâil Ă©tait quarante ans plus tĂŽt.Le film, comme le roman, parle de mĂ©moire(s) et donc de temps diffĂ©rents racontĂ©s de façon non chronologique parce que la mĂ©moire se fout de la concordance des temps.Il fallait retrouver le fonctionnement discontinu des souvenirs, le cĂŽtĂ© marabout-de-ficelle, leur caractĂšre « submergeant » aussi, comme dans la sĂ©quence oĂč les voix dâaujourdâhui dialoguent avec celles dâhier, et oĂč les rĂ©cits individuels, soliloques ou dialogues, se mĂ©langent Ă des sons (et des images) dâarchives, ramenant lâhistoire des individus dans lâHistoire commune, jusquâĂ une trĂšs grande densitĂ© sonore avant de revenir progressivement Ă lâintimitĂ© du « soliste ». Un peu comme le contrepoint en musique oĂč des lignes mĂ©lodiques distinctes se superposent. Elles peuvent se rejoindre, se croiser, se rĂ©pondre, et dans tous les cas, elles sâenrichissent.Jâai essayĂ© dâappliquer ça au cinĂ©ma, de faire que les voix, les rĂ©cits et les histoires de chaque personnage se racontent sur des lignes diffĂ©rentes, se rejoignent de loin en loin et avant de revenir Ă lâintimitĂ© du soliste.
Entretien réalisé par Nicolas Jacobs.
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Lucas Belvaux : Lorsque jâai commencĂ© le casting du film, jâai rencontrĂ© beaucoup de jeunes acteurs de 20 ans et, Ă chaque fois ou presque, ils me parlaient dâun membre de leur famille, un grand-pĂšre, un grand-oncle, qui avait fait la guerre dâAlgĂ©rie. Ils amenaient des souvenirs familiaux de cette pĂ©riode, des photos, des carnets, des objets parfois comme, par exemple, un couteau ramassĂ© sur le corps dâun fellagha. Mais tous me faisaient la mĂȘme remarque : « Il ne racontait rien, on a reconstituĂ© son histoire aprĂšs sa mort ».
Benjamin Stora : Câest tout Ă fait reprĂ©sentatif. Ce qui est intĂ©ressant dans le film câest sa lecture de ce conflit comme dâun secret de famille. Et on le sait un secret de famille câest une violence sourde, trĂšs noire, enfouie⊠mais qui ressort inexorablement un jour ou lâautre. Les mĂ©canismes de fabrication de lâoubli se sont mis en place dĂšs la guerre. Du cĂŽtĂ© français cela a Ă©tĂ© la nĂ©gation de la guerre elle-mĂȘme, le refus de reconnaĂźtre la violence, les tortures et les exĂ©cutions sommaires. Du cĂŽtĂ© AlgĂ©rien, la cruautĂ© de la guerre secrĂšte entre FLN et MNA et le massacre en masse des harkis en 1962. Le film exprime bien ce quâa Ă©tĂ© ce conflit : une dĂ©chirure atroce entre des gens qui sâimaginaient appartenir Ă la mĂȘme famille. Ă cela sâajoute lâarrachement, cĂŽtĂ© Français. Ce sont des jeunes de 18 ou 20 ans qui ont Ă©tĂ© appelĂ©s en AlgĂ©rie dans le cadre dâun service militaire de 18 mois, mais qui a Ă©tĂ© allongĂ© jusquâĂ 30 mois. Ils nâont pas eu le choix. Ils devaient quitter leurs familles, leurs fiancĂ©es, leurs Ă©tudes ou leurs emplois.
Lucas Belvaux : Ils ont dĂ©couvert en mĂȘme temps la beautĂ© du monde et lâhorreur de la guerreâŠ
Benjamin Stora : Ces jeunes gens sont entrĂ©s dans la guerre en aveugles, sans ĂȘtre prĂ©venus de ce quâils allaient y voir et y faire. Beaucoup en sont sortis murĂ©s, transformĂ©s. Certains ont Ă©tĂ© « cassĂ©s » Ă vie. En tout cas tous ont vu leurs repĂšres complĂštement brouillĂ©s. Le pari du film Ă©tait de rester Ă hauteur de ces hommes et je trouve que câest rĂ©ussi.
Secrets de FamillesDiscussion
entre Lucas Belvaux et Benjamin Stora(Historien, Professeur des UniversitĂ©s, SpĂ©cialiste de la guerre dâAlgĂ©rie)
« Et puis parce que la guerre câest toujours des salauds
qui la font Ă des types bien et que les types bien lĂ
il nây en avait pas, câĂ©tait des hommes,
câest tout⊠» (âDesâhommes - Laurent Mauvignier )
Lucas Belvaux : Lâorigine sociologique des appelĂ©s est trĂšs importante. Il y avait ceux qui arrivaient des campagnes et qui, le plus souvent, nâĂ©taient jamais sortis de leurs cantons. Et puis il y avait les urbains ou ceux qui venaient de mouvements de jeunesse ouvriĂšre ou confessionnels et avaient dĂ©jĂ une conscience politique. LĂ encore il y a eu des dĂ©chirures.
Benjamin Stora : Les lignes dâaffrontement classiques Ă©taient complĂštement brouillĂ©es. Quand on regarde dans le dĂ©tail on ne retrouve pas forcĂ©ment le schĂ©ma de la gauche qui Ă©mancipe les peuples et de la droite qui dĂ©fend le colonialisme. Par exemple câest François Mauriac en 1955 qui a dĂ©noncĂ© les tortures puis Raymond Aron en 1957 sâest prononcĂ©, dans Le Figaro, pour lâindĂ©pendance alors que la gauche, Ă ce moment, Ă©tait au pouvoir et menait une politique de rĂ©pression en AlgĂ©rie.Au brouillage des frontiĂšres idĂ©ologiques sâest ajoutĂ©e la sauvagerie de la guerre civile. Ce nâĂ©tait pas une guerre conventionnelle. Ce que montre le film câest une double, et mĂȘme triple, guerre civile. Les AlgĂ©riens contre les Français, les AlgĂ©riens entre eux et les Français entre eux. Cela ne pouvait quâĂȘtre une « sale » guerre.
Lucas Belvaux : Elle sâest dĂ©roulĂ©e moins de 15 ans aprĂšs la seconde guerre mondiale. On y retrouvait des fils dâanciens combattants, de rĂ©sistants. Enfants, ils avaient connu lâOccupation.
Benjamin Stora : Câest toute la force de la sĂ©quence oĂč un jeune fait rĂ©fĂ©rence Ă Oradour-sur-Glane pour qualifier le comportement sanglant de certains de ses camarades de section lors dâune descente dans une « mechta », un petit hameau dâagriculteurs. Personnellement, lors de mes recherches, jâai recueilli beaucoup de tĂ©moignage sur les « corvĂ©es de bois », ces exĂ©cutions sommaires pratiquĂ©es par lâarmĂ©e française. Comment pouvaient-ils ensuite raconter de telles horreurs, mĂȘme sâil nây avaient pas participĂ© directement. Câest cela qui est tragique.
Lucas Belvaux : Câest lâindicible. « On ne peut pas le dire. Il nây a pas de mot » dit Feu-de-Bois dans le film.
Benjamin Stora : Câest lĂ que le travail des Ă©crivains et des cinĂ©astes est important. En reconstituant un imaginaire bien compris qui aide les historiens Ă progresser dans une histoire trĂšs compliquĂ©e. Jâai toujours Ă©crit quâils aidaient les historiens Ă progresser. Les films sont importants car la masse des livres Ă©crits sur la guerre dâAlgĂ©rie nâa jamais rĂ©ussi Ă rompre le consensus sur le silence. Seuls les films ont cette force.
Lucas Belvaux : La fiction permet de mĂ©langer lâHistoire collective et les histoires individuelles. Raconter les histoires individuelles, mĂȘme si elles sont fictives, permet de multiplier les points de vue sur lâHistoire. Parce que la fiction a besoin de confrontations, de regards opposĂ©s, de dialectique pour intĂ©resser et cette multiplication des points de vue permet au spectateur (ou au lecteur) dâĂ©largir son horizon, de se faire sa propre idĂ©e. Lâautre grand intĂ©rĂȘt de la fiction, câest de pouvoir raconter lâintime, lâexplorer, fouiller la matiĂšre sombre, enfouie de chaque individu et qui, parfois, permet de comprendre lâinexplicable.
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Benjamin Stora : Câest une guerre compliquĂ©e qui annonce les conflits modernes : des guerres sans front et sans nom, des guerres invisibles auxquelles seuls les Ă©crivains et les cinĂ©astes peuvent donner corps et Ăąmes. La guerre dâAlgĂ©rie câest le transistor, la radio. Alors que le Vietnam câest lâapparition de lâimage de tĂ©lĂ©vision. Câest trĂšs important parce que les imaginaires de guerre vont se construire sur lâAlgĂ©rie autour du bruit et du son, donc sur du non-visible et du non-reprĂ©sentable. Alors que la guerre du Vietnam renvoie Ă un imaginaire dâimages fortes, accentuĂ©, redoublĂ© par le cinĂ©ma amĂ©ricain. Le paradoxe est que les Français ont prĂ©fĂ©rĂ© adorer les films amĂ©ricains sur le Vietnam. Pourquoi ?
Lucas Belvaux : Parce que câĂ©tait moins douloureux pour les AmĂ©ricains. CâĂ©tait une guerre lointaine qui touchait des populations Ă©trangĂšres. Ce nâĂ©tait pas une histoire de famille. La population AmĂ©ricaine nâavait pas dâattache au Vietnam.
Benjamin Stora : Alors quâen AlgĂ©rie, câĂ©tait la guerre des proches. La guerre entre gens qui se connaissaient. Le film le montre trĂšs bien ainsi que les dĂ©gĂąts irrĂ©parables sur ceux qui y ont participĂ©.
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Feu-de-Bois GĂ©rard DEPARDIEU Solange Catherine FROT Rabut Jean-Pierre DARROUSSIN Bernard Yoann ZIMMER FĂ©vrier FĂ©lix KYSYL Rabut 20 ans Edouard SULPICE Mireille Fleur FITOUSSI Idir Ahmed HAMOUD Nicole Clotilde MOLLET Madame Chefraoui Amelle CHAHBI Le grand-pĂšre dâIdir Mohemmed ELFAKI SaĂŻd Farid LARBI Le mĂ©decin Michem FERRACCI Le pĂšre de Mireille JĂ©rĂŽme ROBART Evelyne Catherine CHEVALLIER Marie-Jeanne Sophie PINCEMAILLE La Chouette Brigitte DE VILLEPOIX Le maire François FEROLETO Roland François SAINT POL Lâadjudant Millet Bertrand CONSTANT Patou Charlotte TALPAERT Kastendeuch Yannick MORZELLE Poiret Simon PARMENTIER Chatel Jean-Baptiste LE VAILLANT BrĂ©niĂšre Lilian DUGOIS Le lieutenant Antoine DE FOUCAULD Bergonnier FĂ©lix LAUDIERE Abdelmalik Kamal HAIMOUD Lâadjudant Charles BESNARD Le mĂ©decin militaire Sylvain HAWAWINI Fatiha Safaa KHATAMI La jeune fille violentĂ©e Rim FETHI La mĂšre de Bernard Eve ARBEZ Reine GaĂŻa WARNANT Solange enfant CorĂ©ane MARCHAND Jean-Marc LĂ©o MISSET
Bourlem NaĂŻm BAHA Le petit garçon de SaĂŻd Yascine DAHMANI La fille de SaĂŻd Ines BAHA LâingĂ©nieur Hatim SADIQI La grand-mĂšre dâIdir Touria EL ATAOUI Le juge militaire Eric CUVELIER Lâadjudant cellule Alexis LOGIE Jean-Jacques Alain BOUCHET Lopez Anthony SONIGO Segura MikaĂ«l HALIMI Nicole 30 ans Julie ROUX
Liste Artistique
Réalisation Lucas BELVAUX Scénario Lucas BELVAUX Adapté du roman éponyme de Laurent MAUVIGNIER Publié aux Editions de Minuit Image Guillaume DEFFONTAINES Décors Frédérique BELVAUX Montage Image Ludo TROCH Costumes Dorothée GUIRAUD Son Nicolas WASCHKOWSKI Béatrice WICK AgnÚs RAVEZ Luc THOMAS Direction de production Claire LANGMANN Direction de post-production Christina CRASSARIS Production exécutive Maroc Saïd HAMICH (mont fleuri production)
Producteurs David FRENKEL Patrick QUINET
Production SYNECDOCHE ARTEMIS PRODUCTIONS En coproduction avec FRANCE 3 CINĂMA RTBF (TĂLĂVISION BELGE) VOO-BE-TV SHELTER PROD
Avec la participation de CANAL +, CINE + FRANCE TĂLĂVISIONS AD VITAM En association avec LA BANQUE POSTALE IMAGE 13 MANON 10, SOFITVCINĂ 7 CINĂAXE
Distribution France AD VITAM Ventes internationales THE PARTY FILM SALES WILD BUNCH INTERNATIONAL
AVEC LE SOUTIEN DE EURIMAGES CENTRE NATIONAL DU CINĂMA ET DE LâIMAGE ANIMĂE AVEC LA PARTICIPATION DU FONDS IMAGES DE LA DIVERSITĂ COMMISSARIAT GĂNĂRAL Ă LâĂGALITĂ DES TERRITOIRES CENTRE NATIONAL DU CINĂMA ET DE LâIMAGE ANIMĂE LA RĂGION BOURGOGNE FRANCHE-COMTĂ EN PARTENARIAT AVEC LE CNC LA PROCIREP ET LâANGOA TAXSHELTER.BE ING TAX SHELTER DU GOUVERNEMENT FĂDĂRAL DE BELGIQUE LE CENTRE DU CINĂMA ET DE LâAUDIOVISUEL LA FĂDĂRATION WALLONIE-BRUXELLES
© 2020 Synecdoche - Artemis Productions - France 3 Cinema - Rtbf
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