content2_2277
TRANSCRIPT
-
7/24/2019 content2_2277
1/64
-
7/24/2019 content2_2277
2/64www.wkf.fr
A-COLENV06-07-WoltersKluwerFranceSASaucapitalde2
20037000-TVAFR55480081306-SIREN480081306RCSNanterre
Informations et commandes :
Lamy Environnement - LEauEntirement consacr leau, ce support unique en son genre runit
plus de 2000 pages danalyse de la rglementation et dinformations
indispensables en matire de : prlvements, rejets, distribution d'eau,
assainissement, prvention des pollutions, inondations, fiscalit, assurance,
responsabilit, eaux marines...
COMPRIS DANS L ABONNEMENT CHACUN DES OUVRAGES
Le Bulletin du Droit de lEnvironnement IndustrielOutil de veille et danalyse sans quivalent en droit de lenvironnement industriel,
cette revue vous livre tout au long de lanne lexpertise juridique des plus grands
spcialistes en matire dinstallations classes, mais aussi de dchets, eau, produits
dangereux, sites pollus Elle complte ainsi la mise jour de votre support papier.
Le Code de lenvironnement
Nouveau !Votre ouvrage comprend dsormais, dans sa version cdrom, une base de
donnes sur les dispositifs daides publiques concernant lenvironnement.
Lamy Environnement - Installations ClassesRglementation, jurisprudence, conseils pratiques, tudes thmatiques
sur des secteurs dactivit spcifiques, Cet ouvrage rassemble
les informations essentielles pour grer une installation classe
en toute scurit juridique, depuis le projet de cration jusqu la cession.
Implantation, fonctionnement, gestion des risques, fiscalit, remise en tat,
Rien ne peut vous chapper !
Lamy Environnement - Les DchetsPour vous permettre de matriser tous les aspects juridiques et techniques
de la gestion des dchets, cet ouvrage expose lensemble des textes franais,
communautaires et internationaux applicables, analyse la jurisprudence
et prsente un large panorama de filires de traitement : tri, collecte, transfert,
limination
Dcouvrez
la CollectionLamy Environnement !
Votre bibliothque en
DROIT DE LENVIRONNEMENT
INDUSTRIEL
-
7/24/2019 content2_2277
3/64
sommaire
S U P P L M E N T A U N 0 3 6 D C E M B R E 2 0 1 1 B D E I 3
DIRECTEUR SCIENTIFIQUE
> Jean-Pierre BOIVIN,Avocat, SCP Boivin et Associs
> Michel BAUCOMONT,Docteur dEtat en droit Avocat la Cour
> Annie BEZIZ-AYACHE, Docteur en Droit Matre de confrence, Universit Lyon III
> Mathilde BOUTONNET,Matre de confrences, Universit Rennes 1
> Hlne BRUNET-LECOMTE, Chef du Bureaudes affaires juridiques des risquespour lenvironnement, DAJ, MEEDDM
> Jean-Nicolas CLMENT,Avocat, Cabinet UGGC et Associs
> Michel COURTIN,Prsident honorairedu Tribunal administratif de Paris
> Laurent FONBAUSTIER, Professeur agrg,Responsable du Master Environnement,Universit Paris-Sud XI
> liane FRMEAUX, Notaire
> Jrme FROMAGEAU, Doyen,Facult Jean Monnet, Universit Paris-Sud XI Vice-prsident de la SFDE
> David GILLIG,Avocat, SELARL Soler-Couteaux Llorens
> Anne-Marie GUILLERME, Responsabledu dpartement Grands contentieux, Total
> Steve HERCE,Avocat, SCP Boivin et Associs
> Christian HUGLO, Avocat, Huglo Lepageet Associs Conseil Professeur au CNAM
> Chantal JARLIER-CLMENT,Directeur adjoint des affaires europennes, EDF
> Pascale KROMAREK, Coordinatrice des
questions juridiques denvironnement, Total> Franoise LABROUSSE, Avocat la Cour
Cabinet Jones Day
> Laurence LANOY, Docteur en droit Avocat la Cour
> Caroline LONDON, Docteur en droit Avocat la Cour , Matre de confrenceassoci, Universit dArtois
> Ghislain de MARSILY, Agrg des facultsde droit Professeur lUniversit Paris VI
> Jean-Marie MASSIN,Expert auprsdes instances maritimes internationales
> Malik MEMLOUK,Avocat, SCP Boivin et Associs
> Alexandre MOUSTARDIER,Avocat, Huglo Lepage et Associs Conseil
>Franoise NSI,Magistrate
> Bernard POUJADE,Agrg des facults
de droit Professeur lUniversitParis V Avocat au Barreau de Paris
> Cyril ROGER-LACAN,Matre des Requtesau Conseil dEtat
> Jacques SIRONNEAU,Docteur en Droit,Chef du Bureau de la rglementationet du contentieux, Direction de leau, MEEDDM
>Julien TARDIF,Avocat
> Franois-Guy TRBULLE,Agrg des facultsde droit, Professeur lUniversit de Paris V
> Jean-Pierre BOIVIN
> Michel BAUCOMONT> Hlne BRUNET-LECOMTE>Jean-Nicolas CLMENT> Laurent FONBAUSTIER
> David GILLIG> Christian HUGLO> Caroline LONDON> Cyril ROGER LACAN> Franois-Guy TRBULLE
diteur : WOLTERS KLUWER FRANCEAS au capital de 300 000 000
ge social : 1, rue Eugne et Armand Peugeot2856 Rueil-Malmaison Cedex
CS Nanterre 480 081 306rsident/Directeur de la publication : M. KOCH dacteur en chef: Delphine Dprez (01 76 73 33 68) dacteur : Paul ine Hi l i Imprimerie : Del -am bre - 45 , rue De l i z y - 93500 Pan t i n Commission paritaire : 0608 T 88244 Dpt lgal :parution - N ISSN : 1262-0955 Abonnement annuel :26,72 TTC Prix au n : 33,69 TTC Informationt commande : N Indigo : 0 825 08 08 00 Fax : 76 73 48 04ternet: http://www.wkf.frette revue peut tre rfrence de la manire suivante :DEI n 36/2011, n 1 (n de la revue/anne, n du commentaire)
Q
BDEIR E V U E L A M Y
45
47
21
29
12
4INTERVIEW4 >Rexions croises
Nicolas VUILLIERPrsident de lUnion Nationaledes producteurs de Granulats UNPG
Jean-Pierre BOIVINAvocat, SCP Boivin et AssocisDirecteur scientique du BDEI
URBANISME12 > La prise en compte des carrires par les documents
durbanisme : tat des lieux et propositions
pour prserver laccs la ressource Steve HERC
Avocat associCabinet BOIVIN & Associs
BIODIVERSIT21 > Carrires et biodiversit : la difcile traduction
juridique dune biocompatibilit Agns DUPIE
Avocat
CONTENTIEUX29 > Le juge administratif et les carrires Michel BAUCOMONT
Avocat
39 > Un aspect particulier du droit des carrires :le contentieux des arrts de refus
Franois BRAUDAvocat associHuglo Lepage & Associs
Alexandre MOUSTARDIERAvocat associHuglo Lepage & Associs
SANT SCURIT45 > Rglement Gnral des Industries Extractives :
volution de la rglementation en matire dhygineet scurit applicable aux carrires
Roberto VERACHTENPrsident de PREVENCEM
Michel BUZOTSecrtaire Gnral Adjoint de lUNPG
LIVRE BLANC
47 > Carrires & granulats lhorizon 2030Pour un approvisionnement durable des territoiresLes 22 propositions de la profession pour unapprovisionnement durable des territoires
UNPG
-
7/24/2019 content2_2277
4/644 B D E I D C E M B R E 2 0 1 1 S U P P L M E N T A U N 0 3 6
Jean-Pierre Boivin
Nicolas VuillierRexions croises
1312
(1) Voir Livre Blanc : Carrires & granulats lhorizon 2030 Pour un approvisionnement durable des territoires http://www.unpg.fr/developpement_durable/livre_blanc; voir aussi Livre Blanc,extraits, Les 22 propositions de la profession pour un approvisionnement durable des territories, BDEI Suppl. au n 36/2011, n 1318
BDEI
BDEI : LUnion nationale des
producteurs de granulats a
publi en mai 2011 un Livre
blanc intitul Carrires et gra-
nulats lhorizon 2030 Pour
un approvisionnement durable
des territoires . Pourquoi un
Livre Blanc ?
Nicolas VUILLIER : Les gra-
nulats sont des matriaux
indispensables pour assurer
lamnagement du territoire
et satisfaire aux besoins de la
construction de notre pays.
Or, les conditions daccs cetteressource, pourtant largement dispo-
nible, savrent de plus en plus difciles,
en raison de nombreuses contraintes
spatiales, rglementaires et socitales.
Il apparat aujourdhui impratif de faire
voluer les politiques publiques de ges-
tion de la ressource minrale.
Cest le sens de ce Livre blanc qui a pour vocation de
poser un diagnostic partag sur ltat des lieux de notre
profession, les grandes tendances davenir et de proposer
des solutions pour assurer un approvisionnement durable
des territoires.
60 experts consults
Le Livre blanc de lUNPG a t labor dans le cadre dune
dmarche prospective prenant en compte les grandes tendances
dvolution de la socit et le contexte propre ce secteur
dactivit(1). Cette dmarche sest appuye sur la consulta-
tion de nos professionnels et de plusieurs parties prenantes :
200 responsables dentreprises et 60 experts en amnagement
du territoire, gopolitique, cologie, gographie, sociologie,
droit de lenvironnement, ur-
banisme
Les inventaires disponibles mon-
trent quil existe aujourdhui en-
viron 2 300 carrires de granu-
lats en France. Elles taient plusdu double il y a 30 ans. Pendant
ce temps, le secteur de lamna-
gement et de la construction na
jamais t aussi actif. Ajout
cela des dlais dinstruction des
demandes dautorisation de plus
en plus longs, nous sommes en-
trs dans une zone de risque et
de tensions pour lapprovision-
nement des territoiresLa premire de ses consquences est dj
visible dans certaines lires : limpor-
tation de granulats marins par exemple,
saccrot avec des consquences cono-
miques, socitales et environnementales
videntes.
Il nous faut ragir. Le Livre Blanc constitue une premire
tape pour mettre en uvre une politique responsable
et concerte dapprovisionnement en matriaux de nos
territoires.
BDEI :La profession sest mue de la rcente rforme du dlai
de recours des tiers contre les autorisations dexploiter mise
en place par le dcret n 2010-1701 du 30 dcembre 2010. Ce
texte introduit-il rellement une inscurit des titres et, une
anne aprs son entre en vigueur, comment la profession
sest-elle organise pour en grer les consquences ?
Nicolas VUILLIER :La question des dlais de recours est
symptomatique de laggravation de la situation.
Nicolas VUILLIERPrsident de lUNPG
Union Nationale des Producteursde Granulats
-
7/24/2019 content2_2277
5/64S U P P L M E N T A U N 0 3 6 D C E M B R E 2 0 1 1 B D E I 5
>
Carrires & granulats
Quel est le problme ? Cette rforme a satisfait la plupart des
exploitants dinstallations classes, le dlai existant de quatre
ans tant ramen un an. Sauf pour les exploitants de car-
rires : le dlai les concernant tait de six mois compter de
la mise en service de linstallation. Il passe un an.
Mais entendons nous bien : si un projet doit connatre des
difcults, la saisine de la juridiction administrative se produit,
dans les faits, ds les premiers mois, les premires semaines
de la dlivrance de lautorisation, voire ds les premiers jours !
Lallongement du dlai reste donc relatif. Le courroux de la pro-
fession tient la suppression des
dispositions qui permettaient
aux exploitants de carrires de
connatre de manire certaine le
point de dpart du dlai.
Celui-ci tait prcisment enca-dr par la publication dune d-
claration de dbut dexploitation
dans deux journaux locaux ou
rgionaux diffuss dans le dpar-
tement ou les dpartements int-
resss. Par ailleurs, les conditions
dans lesquelles cette dclaration
devait tre faite, taient prcis-
ment indiques par larrt mi-
nistriel du 22 septembre 1994relatif aux exploitations de carrires et
aux installations de premier traitement
des matriaux de carrires.
Ces conditions pouvaient tre le cas
chant prcises par larrt dautori-
sation de linstallation considre.
Cette scurit juridique a dsormais disparu. Le dlai de recours
de tiers nest plus li une publicit formelle mais la notion
de mise en service. Or, sagissant dune carrire, cette notion
nest plus dnie et prtera immanquablement contentieux.
Nous nentrerons pas dans les dtails, en rappelant simplement
que les gisements peuvent tre afeurant ou de quelques
plusieurs dizaines de mtres de profondeurs.
Pourquoi les exploitants de carrires ont-ils eu, et tiennent-ils
conserver, cette scurit juridique ?
Si depuis des dcennies, les exploitants de carrires ont b-
nci dun dlai scuris de recours des tiers, ce nest pas
sans raison.
Citons-en seulement trois, il y en aurait dautres.
Les carrires sont autorises pour une dure limite contraire-
ment la majeure partie des installations classes. Cette dureest dau maximum 30 ans, elle se situe bien souvent entre 15 et
20 ans. Parce que la dure dexploitation qui lui est consentie
est strictement encadre dans le temps, un exploitant doit
pouvoir prcisment dater sa priode dexploitation.
Autre spcicit des carrires, ds le dpt de sa demande dau-
torisation dexploiter, le ptitionnaire doit justier quil matrise
lemprise foncire des terrains exploiter. Des conventions ou
ventes doivent donc tre conclues trs en amont, assorties de
conditions suspensives que le ptitionnaire doit tre en mesure
dencadrer contractuellement an de les lever en toute scurit.
Il doit donc tre en mesure de dater de manire certaine les
dlais de recours.
Enn, et en particulier, les auto-
risations de carrires sont condi-
tionnes la mise en uvre de
mesures compensatoires, ds le
dmarrage de lexploitation :
dplacement dhabitats, despcimens, achat de terres en
dehors des primtres autoriss
pour ces dplacements ou rim-
plantations despces. Il ne peut
tre raisonnablement demand
aux exploitants de procder
ces investissements quaprs
avoir eu la certitude que leurs
autorisations ne seront pas re-
mises en cause.Ces quelques exemples illustrent la par-
ticularit des carrires. Il est donc nces-
saire que la rglementation redonne aux
carriers la scurit juridique dont ils ont
toujours bnci pour ces justes motifs.
En attendant, les professionnels sorga-
nisent comme ils le peuvent. La plupart dentre nous faisons
tablir toute sorte dattestation, par exploit dhuissier, relev de
gomtre, photo satellite avec date certaine, etc., susceptible
de rapporter la preuve dune mise en service. Mais toutes ces
donnes restent soumises apprciation. Nous demandons que
la mise en service dune carrire soit de nouveau considre
comme tablie ds linstant que les amnagements pralables
dnis aux articles 4 7 de larrt prcit du 22 septembre
1994 ont t achevs.
Jean-Pierre BOIVIN :Comme souvent, lEnfer est pav de
bonnes intentions. La rforme du 30 dcembre 2010 dcou-
lait, en effet, de la volont des pouvoirs publics de raccourcir
et de rationnaliser les dlais de recours ouverts aux tiers qui
avaient t stigmatiss comme des sources dinstabilit pour lesexploitants. Le dlai de droit commun de quatre ans se trouvait
ainsi ramen un an et le lgislateur a souhait remettre un
Jean-Pierre BOIVINAvocat
SCP Boivin et AssocisDirecteur scientifique du BDEI
INTERVIEW
R
FLEXIONSCROISES
-
7/24/2019 content2_2277
6/646 B D E I D C E M B R E 2 0 1 1 S U P P L M E N T A U N 0 3 6
peu dordre dans les dlais de recours contentieux qui avaient
eu tendance foisonner (six mois pour les carrires, un an
pour les installations participant aux services publics, et quatre
ans pour le reste des installations).
En ramenant le dlai de droit commun de quatre ans un
an, le dcret no2010-1701 du 30 dcembre 2010 prend en
quelque sorte la profession des carriers contre-courant
puisquils perdent le bnce dun mcanisme en apparence
plus court, et en tout cas plus clair. Sur le fond, la diffrence
entre lancien et le nouveau rgime nest pas si substantielle
quil y parat. Dans les deux cas, en effet, le dlai de recours
des tiers sarticulait et continue sarticuler autour dune
notion matrielle peu prs identique qui est celle de la mise
en service de linstallation. Sous le prcdent rgime, larticle
R. 512-44 du Code de lenvironnement (aujourdhui abrog)
prcisait que la dclaration de dbut dexploitation devait treadresse ladministration ds quont t mis en place les
amnagements et les quipements permettant la mise en service
effective de linstallation, tels quventuellement prciss par
larrt dautorisation de lexploitation en cause. Le nouveau
rgime sarticule autour de la mme notion de mise en service
de linstallation qui constitue le point de dpart du dlai sp-
cial de recours. Dans les deux cas, au moment o commence
lexploitation, le titre nest jamais purg.
Ce principe ne tient rien du hasard, mais puise, au contraire,
ses racines dans lhistoire du droit des installations jadisconsidres comme incommodes et insalubres. Le dlai sp-
cial de quatre ans offert aux tiers tirait alors sa lgitimit de la
volont doffrir aux tiers riverains la possibilit de mesurer les
nuisances relles dune installation en fonctionnement et sur
une dure de temps sufsante pour que cette apprciation soit
circonstancie. Dans les priodes o nexistaient pas dtudes
dimpact pralables, le seul moyen pour les riverains de ragir
aux nuisances dune installation tait de pouvoir en apprcier
ex postles inconvnients.
Cette perspective est aujourdhui compltement renverse par
lapparition dune batterie complte dtudes environnemen-
tales pralables et par la densication des prescriptions dont
lobjet est danticiper et de matriser les incidences potentielles
dune installation sur son environnement. Sous cet angle, le
dlai dun an (cote mal taille entre le dlai de deux mois dont
disposent les exploitants et lancien dlai de quatre ans des
tiers) ne repose lui-mme sur aucune justication intrinsque et
le dlai de six mois du droit des carrires aurait parfaitement pu
servir pour caler efcacement le schma des dlais de recours.
Ce qui, en ralit, est critiquable dans le nouveau systme est
moins le dlai lui-mme que labsence dun point dancragelisible. Lancien systme prsentait, en effet, lavantage de
saccrocher formellement une procdure de dclaration dite
de dbut dexploitation qui donnait au dlai de recours des
tiers un point de dpart certain.
Linconvnient du nouveau texte vient de ce quil a supprim
cette procdure de dclaration et que le dlai de computation
part dsormais du concept de mise en service de linstallation.
Or, ce concept nest ni dni, ni univoque. Si, dans certains cas,
il est facile cerner (la mise en service dun entrept sentend
naturellement de lentrept achev et prt recevoir des mar-
chandises), il nen va pas de mme du domaine des carrires
o le curseur peut tre plac plusieurs endroits. Ainsi, dans
lhypothse dune ressource profondment enfouie sous des
terres de dcouvertes, faudra-il attendre lextraction de la pre-
mire tonne de matriaux pour dire que la carrire est en service
ou bien, au contraire, considrera-t-on que le fait dattaquer les
terres de dcouvertes est lui-mme le signe de la mise en service
de la carrire ? Sous langle de la protection des riverains onpeut penser que le bruit et les premires nuisances seront aussi
importantes au niveau des travaux de dcapage quau niveau
des travaux dextraction eux-mmes. On peut donc craindre
que des discussions despce sans n aient lieu devant le juge
pour connatre la consistance relle du dlai et juger si les tiers
sont ou non forclos agir. Et si, dans le doute et pour viter cet
cueil, les tiers taient conduits saisir le juge immdiatement
aprs la dcision, on aurait perdu tout lintrt du mcanisme et
prcipit les requrants dans le prtoire sans mme quils aient
pu apprcier si leurs craintes taient ou non fondes.
BDEI :La protection de la biodiversit a pris dans le dbat
public une place non ngligeable et la cration des DREAL,
intgrant les anciennes DIREN, a ampli cette perception.
Comment la profession ressent-elle cette volution et quelles
rponses prvoit-elle dy apporter ?
Nicolas VUILLIER : Lextraction des roches inuence la bio-
diversit dun site, dans la mesure o elle modie les habitats,
donc les espces qui y vivent. Laction du carrier modie le sol,
cre des plans deau ou des falaises Elle prsente des simili-
tudes avec certains processus naturels tels que le ravinement
et les boulements en montagne ou bien lrosion des cours
deau actifs, qui attaque les berges ou dpose des graviers.
De nombreuses espces, dites pionnires spcialistes des
milieux neufs ainsi crs par lrosion , tirent parti de tels
bouleversements naturels. Ce sont elles qui vont spontanment
coloniser les carrires o elles trouvent un habitat propice.
Leur prsence sera dautant plus importante et intressante
que les habitats de la carrire vont ressembler ceux rsultant
de lrosion naturelle.Ces observations sont issues de recherches appliques menes
depuis une vingtaine dannes en partenariat avec le Musum
-
7/24/2019 content2_2277
7/64S U P P L M E N T A U N 0 3 6 D C E M B R E 2 0 1 1 B D E I 7
>
National dHistoire Naturelle. Elles ont montr, aussi bien en
ce qui concerne les carrires de roches meubles que celles
de roches massives, que les sites dextraction abritent une
biodiversit importante, varie et originale.
Sur une cinquantaine de sites tudis, on recense par exemple
45 % de la liste des oiseaux nichant en France ou bien 17 %
de la ore franaise.
Lextraction cre galement des habitats trs divers, en fonction
notamment de la granulomtrie (massif/meuble) et de leau
(sec/humide), mais aussi des types de roches (calcaire/ruptif),
des caractristiques de lextraction (supercie, prols, remise
en tat ) etc. ; cette diversit des conditions de vie entrane
celle des plantes ou animaux prsents.
Enn, les habitats issus des carrires sont trs souvent origi-
naux par rapport leur environnement immdiat : un plan
deau isol en plaine, des friches ou rocailles aux milieux desterres fertiles de la Beauce, une falaise Leur biodiversit
sera donc elle aussi qualie doriginale, avec des espces
rares une certaine chelle, souvent
catalogues sur des listes de valeur patri-
moniale et protge.
Lensemble de ces rsultats a fort logi-
quement t lorigine dune forte mobi-
lisation de la profession en faveur de la
biodiversit. Ainsi, la lumire des tudes
prcites, la profession publie rgulire-ment des guides de bonnes pratiques pour
la gestion et lamnagement des carrires.
LUNPG organise galement des manifestations publiques pour
partager les connaissances ainsi acquises avec ladministra-
tion, les collectivits, des associations environnementales et
les bureaux dtudes. Sept colloques ont ainsi t organiss
courant 2009, clturs au Musum national par le Forum Les
carrires, une opportunit pour la biodiversit. En parallle,
dans le cadre de la dmarche de progrs volontaire porte
par la Charte Environnement des industries de carrires, des
journes de formation et de sensibilisation animes par des
associations naturalistes et destination des personnels des
sites ont lieu sur tout le territoire national.
Cest dans ce contexte, et celui du Grenelle de lEnvironnement,
qua merg la volont de mettre en uvre une Trame Verte
et Bleue (TVB).
Nous considrons que, des quelques 3 000 carrires qui maillent
le territoire national, nombreuses sont celles qui possdent un
potentiel cologique. Elles peuvent contribuer la restauration
des continuits cologiques et, dans de nombreux cas, les
crer. Dans certains cas, au travers de leur gestion ou de leurramnagement, les carrires peuvent donc contribuer la
mise en place de la TVB, en tant que rservoirs de biodiversit
ou continuits cologiques. Notons dailleurs que lUNPG,
qui vient dadhrer la Stratgie Nationale de la Biodiversit
(SNB), a lanc un nouveau programme de recherche avec le
Musum National dHistoire Naturelle visant tudier lapport
des carrires aux connectivits cologiques.
La profession est, vous le constatez, fortement implique
dans la prservation de la biodiversit. Cependant, nous
nous inquitons aujourdhui des effets sur nos activits de la
place prioritaire donne la biodiversit dans les politiques
publiques. La lgislation sur la protection des espces et des
habitats, qui peut contraindre un exploitant ne pas pouvoir
poursuivre son activit, ou lapplication parfois disproportion-
ne du principe de compensation, sont de nature dcourager
nos entreprises. Les SRCE (Schmas Rgionaux de Cohrence
cologique), qui vont dcliner la TVB lchelle rgionale,
viennent sajouter une dj trop longue liste de documentsde planication. Laccumulation des rglementations doit tre
articule pour permettre un dveloppement durable.
Jean-Pierre BOIVIN :Je ne peux naturel-
lement que souscrire aux rexions de Ni-
colas Vuillier et constater qu lvidence la
perception de la biodiversit a notoirement
chang. Sans sous-estimer les enjeux lis
aux nuisances classiquement constates
sur les carrires (bruit, poussires, circula-tion) ni les enjeux fonciers lis laccs la
ressource (en particulier, le problme des
fortages), force est de constater que la sensibilit des dossiers
sest graduellement dplace vers dautres problmatiques :
protection des eaux travers les effets de la loi sur leau, probl-
matiques sant travers le volet sanitaire des tudes dimpact
et, plus rcemment, apparition de nouvelles proccupations
directement lies la protection de la biodiversit travers les
effets retardement de la Directive du Conseil CEE no92/43 du
21 mai 1992 dite directive Habitats .
Face cette monte en puissance de la protection de la faune
et de la ore sauvages, une premire constatation simpose.
En effet, larsenal juridique et lingnierie technique dont on
dispose conduit aujourdhui davantage des logiques daffron-
tement et de strilisation des projets qu une action dynamique
pour concilier lactivit anthropique et la protection des espces
naturelles. La rgle de droit, au lieu de servir de pont entre
les deux logiques de dveloppement et de protection, aboutit
dresser des murailles et striliser linitiative. Et ladminis-
tration rpute arbitre entre ces deux tendances apparat
comme ttanise. Il est donc important dtablir des pistes derexion pour restaurer des marges de manuvre. On peut
en donner quelques exemples.
Carrires & granulatsINTERVIEW
R
FLEXIONSCROISES
La rgle de droit,au lieu de servir de pontentre les deux logiques
de dveloppementet de protection, aboutit dresser des murailles
et striliserlinitiative.
-
7/24/2019 content2_2277
8/648 B D E I D C E M B R E 2 0 1 1 S U P P L M E N T A U N 0 3 6
Le premier qui vient lesprit concerne les mcanismes de
compensation environnementale qui peuvent tre des sources
de blocage alors quils pourraient, au contraire, tre la source
dune dynamique daccompagnement des projets. Lactivit
de carrire prsente, en effet, de fortes spcicits qui ne sont
pas sufsamment valorises. Le premier trait spcique tient
ce que la carrire trouve sa source dans le milieu naturel,
pour lexploitation dune ressource naturelle, et que son ram-
nagement procdera dune restitution au milieu naturel, mais
avec un dcalage dans le temps et dintressantes potentialits
de mutations. Ces volutions sont constates dans un espace
temporel relativement long qui stend frquemment sur le
demi sicle, voire sur le sicle. Dans ce contexte, au lieu de
percevoir le mcanisme de compensation comme un outil
effet instantan et gographiquement dport (re-cration
dhabitats proximit du projet, par exemple dans le cas dunnouvel ouvrage dinfrastructure ou dquipement), il serait ju-
dicieux de prendre acte du fait que lemplacement de la carrire
recle en lui-mme de fortes potentialits de reconstitution
dhabitats et permet, de plus, la cration dhabitats naturels
nouveaux. Cest notoirement le cas pour les exploitations pour
lesquelles la rhabilitation se fera travers la constitution de
plans deau. La compensation devrait alors intgrer les capaci-
ts de rgnration du milieu au fur et mesure des tranches
quinquennales jusqu la remise en tat nale qui consacrera
souvent la consolidation dun nouveau biotope.Un second point mrite galement dtre abord. Il sagit
des conditions dobtention des autorisations de destruction
dhabitats despces protges telles quelles rsultent des
dispositions de larticle L. 411-2 du Code de lenvironnement.
Deux aspects de ce rgime juridique, directement issu de la
Directive Habitats, mriteraient dtre revisits pour viter des
situations de blocage frontal.
Dun ct, les potentialits ci-dessus rappeles de rgn-
ration du milieu et/ou de cration de nouveaux milieux
devraient tre mieux prises en compte dans le cadre de lins-
truction de la drogation. En effet, ou bien on se trouve dans
le cas o le milieu sera graduellement rendu sa situation
primitive au fur et mesure des tranches de rhabilitation et
on est alors en prsence dun mcanisme de compensation
diffre qui prsente terme des qualits identiques, voire
suprieures. Ou bien, dans certaines hypothses (carrires
en eau, colonisation de fronts de taille), la carrire provoque
lapparition de nouveaux milieux qui peuvent tre diffrents,
et parfois plus riches, que les milieux initiaux. Or, ce ph-
nomne nest actuellement pas saisi par le droit. Ce faisant,
on ne tient pas compte, dans lapprciation de la dcision,dune vision cologique long terme pourtant elle-mme
porteuse de richesses nouvelles.
Dun autre ct, le mcanisme autorisant quil soit port une
atteinte aux habitats despces protges constitue, dans le
domaine des carrires, un obstacle qui peut tre rdhibi-
toire. En effet, lobtention de la drogation implique une
justication tenant lexistence dune raison imprative
dintrt public majeur. Prise la lettre, une telle exigence
constitue un frein puissant lactivit dextraction, cette
activit tant consubstantiellement lie au milieu naturel
et donc souvent confronte la prsence dun habitat des-
pces. Pour restaurer une forme dquilibre dans le bilan
cot/avantage dun projet, il conviendrait alors de pouvoir
jouer sur deux critres.
Le premier a t rappel ci-dessus. Il consiste prendre en
compte la restauration diffre du milieu et/ou lapparition
dun milieu nouveau, diffrent et souvent plus riche.
Le second critre devrait consister en une meilleure prise encompte de lintrt de la ressource en granulats partout o
existent de fortes tensions sur lapprovisionnement. Dans
cette optique, les schmas dpartementaux des carrires,
ou les schmas rgionaux dont la cration (depuis long-
temps souhaite par le BRGM) est actuellement envisage,
devraient permettre de confrer un certain nombre de
gisements un degr dintrt gnral sufsant, transcendant
le seul intrt commercial de lexploitant. Concrtement, le
vhicule de larticle 109 du Code minier devrait tre revisit
pour en largir le champ non pas sous langle patrimonialpour forcer les ventuelles rticences du propritaire fon-
cier , mais sous un angle beaucoup plus large confrant
lexploitation de la ressource un intrt gnral spcique.
Une telle reconnaissance permettrait alors une apprciation
mieux quilibre des conditions de larticle L. 411-2 du
Code de lenvironnement et permettrait aux exploitants de
se prsenter devant le CNPN dans des conditions moins
dmunies.
BDEI :Des inquitudes se sont manifestes quant la porte
de la rforme des tudes dimpact, la mobilisation des
moyens quelle est susceptible dengendrer et surtout quant
linscurit quelle pourrait gnrer pour la ralisation des
projets. Au vu des projets de textes, ces inquitudes vous
paraissent-elles fondes et comment la profession sapprte-
t-elle grer les nouvelles tudes dimpact ?
Nicolas VUILLIER : Louverture dune carrire est soumise
tude dimpact depuis 1979 : autant dire que les carriers
savent de quoi ils parlent.
Bien sr, leur contenu a singulirement volu. Lexerciceest dautant plus compliqu que la plupart des dossiers de
carrires doivent non seulement valuer limpact de leur
-
7/24/2019 content2_2277
9/64S U P P L M E N T A U N 0 3 6 D C E M B R E 2 0 1 1 B D E I 9
>
projet pour toute la dure dexploitation, mais galement
au-del, en prvoyant, ds le dpart, les conditions dans
lesquelles le site, aprs remise en tat, sera restitu son
environnement.
En une trentaine dannes, les tudes dimpact sont passes
de quelques dizaines de pages, plusieurs centaines.
L o un bureau dtudes parvenait laborer seul une tude
dans son ensemble, il doit dsormais faire appel une multi-
tude de spcialistes : cologues, environnementalistes, golo-
gues, acousticiens, etc. Un bureau dtudes est ainsi devenu
au l du temps un assembleur, capable dapprhender un
projet dans tous ses aspects les plus experts. De tout cela, le
carrier doit avoir la matrise : la matrise douvrage bien sr,
mais galement la matrise duvre.
Le carrier ne peut pas se reposer aveuglement sur son bureau
dtudes, car sa matrise du projet sera ensuite durement mise lpreuve : dune part, dans le cadre de linstruction des
services spcialiss dconcentrs de ltat, dautre part, au
cours de lenqute publique.
La rforme annonce des tudes dimpact
entranera-t-elle des bouleversements ?
On ne peut pas aller jusqu dire cela. Mais
certains aspects sont particulirement in-
quitants. Pour autant, la philosophie des
tudes dimpacts va certainement voluer
dans un sens favorable.Parmi les aspects inquitants, citons au
premier chef celui des effets cumuls.
Les projets de textes qui ont t mis la
consultation prvoient dimposer aux ptitionnaires danaly-
ser les effets cumuls de leurs projets avec dautres projets
connus. Cette analyse serait produire sur la base de la seule
tude dimpact dun projet connu, pour peu que celui-ci soit
en cours dinstruction ou autoris.
Notre organisation a dmontr que le principe pos par la
directive europenne dont la mesure est cense assurer la trans-
position, dicte quune telle analyse incombe lautorit
charge de dlivrer lautorisation, laquelle est seule en mesure
danalyser les effets cumuls de projets prsents par diffrents
ptitionnaires.
Au surplus, le corpus rglementaire en cours dapprobation
ne prvoit aucune chance butoir au-del de laquelle un p-
titionnaire naura plus intgrer de nouveaux projets connus.
Bien que le bien fond de cette mesure puisse tre compris, la
manire dont celle-ci est prvue sera une source dinscurit
juridique importante.
Pour autant, comme je lindiquais, le projet de rforme porteen germe une volution, certainement favorable, de la philo-
sophie des tudes dimpact.
Ces vingt dernires annes ont t marques par une exigence
qualitative croissante : les impacts font en effet lobjet dana-
lyses de plus en plus expertes.
lavenir, ces analyses vont se complexier en intgrant une
analyse combine des impacts entre eux, savoir leurs impacts
additionnels et interactifs.
Concrtement, les impacts taient tudis milieu par milieu :
impact sur les eaux, impact sur lair, impact sur le sol et le
sous-sol, etc. Ces impacts seront dsormais tudier dans
leurs interactions rciproques, et leurs effets cumuls : quelle
interaction entre laffouillement du sol et le ruissellement des
eaux, par exemple.
En pratique, la plupart des bureaux dtudes intgrent dj
une analyse globale des impacts dun projet. Mais un effort
de pdagogie sera ncessaire dans la rdaction et la pr-
sentation des tudes qui, toujours plus complexes, doiventrester accessibles.
La vision additionnelle et interactive des impacts dun projet,
y compris ses impacts positifs, pourra, nous lesprons, am-
liorer lacceptabilit de nos projets. Cest
en tout cas dans cet tat desprit que nous
aborderons ce volet de la rforme.
Vous aurez peut tre remarqu que je
viens dvoquer les impacts positifs dune
carrire. Ce nest pas un hasard : le projet
de rforme ouvre en effet aux ptition-naires la possibilit de faire valoir les effets
positifs de leurs projets sur lenvironne-
ment. Cet aspect de nos activits est en
effet bien souvent ignor.
Je ne peux, enn, rpondre votre question sans voquer les
dlais dinstruction et les relations avec les diffrentes parties
prenantes.
Lexploitant de carrire a, comme tout acteur conomique,
besoin de visibilit pour planier son activit et prvoir les
moyens mettre en uvre, quils soient humains, nanciers
ou techniques. Le dlai administratif ncessaire pour ouvrir
un site sest considrablement allong et, surtout, il est de-
venu difcilement matrisable. Dans ce dlai, il faut compter
le temps dlaboration du dossier avant son dpt en prfec-
ture. Il nest pas rare que ce dlai atteigne deux annes. Il
ne sagit pas ici de contester lapprofondissement des tudes
dimpacts, mais simplement de constater les consquences
et la complexit qui en rsultent pour le carrier, notamment
quand il sagit de prparer un dossier de demande dautorisa-
tion, parfois, simplement, en vue de poursuivre son activit.
Rappelons que les carrires sont autorises pour une durelimite qui imposent la prsentation de demandes rgulires
de renouvellement.
La vision additionnelleet interactive des impacts
dun projet, y comprisses impacts positifs,
pourra, nous lesprons,
amliorer lacceptabilitde nos projets.
Carrires & granulatsINTERVIEW
R
FLEXIONSCROISES
-
7/24/2019 content2_2277
10/6410 B D E I D C E M B R E 2 0 1 1 S U P P L M E N T A U N 0 3 6
La recevabilit du dossier par ladministration nest, pour sa
part, encadre par aucun dlai rglementaire.
Lavis de lAutorit environnementale a introduit un facteur de
complexit supplmentaire tant pour les services que pour les
professionnels. Les demandes de complments dinformations
sont habituelles. Dans certains cas, qui ne sont pas rares, la
recevabilit ncessite plusieurs annes, pendant lesquelles
la rglementation volue et certaines parties de ltude se
priment.
Pour anticiper et donc rduire les dlais, la connaissance pr-
alable du niveau dexigence de ladministration est ncessaire.
La rforme des tudes dimpact tend rpondre cette attente
au travers du cadrage pralable. Cette procdure devrait tre
prcise. Le ptitionnaire ou matre douvrage devrait pouvoir
demander lautorit comptente quest le
prfet pour les carrires de rendre un avissur le degr de prcision des informations
fournir dans ltude dimpact, autre-
ment dit sur le contenu attendu de ltude
dimpact selon la sensibilit desmilieux.
En pratique, la profession, a toujours
soutenu une concertation en amont avec
toutes les parties prenantes dun dossier.
Elle na pas toujours, forcment permis
de rduire les dlais.
Selon le projet de dcret tel que nous le connaissons, lavisindiquera au minimum les zonages, schmas et inventaires
relatifs aux lieux dimplantation envisags du projet, les autres
projets connus avec lesquels les effets cumuls devront tre
tudis, ainsi que les guides mthodologiques existants. Cet
change pralable dinformations pourra, nous lesprons,
atteindre plus rapidement le niveau dexigence attendu et
acclrer la recevabilit des dossiers.
Le cadrage pralable, qui reste, prcisons-le, facultatif pour
lentreprise, et sans engagement de responsabilit pour ltat,
sera certainement une amlioration notable des relations avec
ladministration et donc des dossiers.
Mais les grands absents du projet de rforme restent les dlais
qui ne sont xs ni pour la remise du cadrage pralable, ni
pour la recevabilit des demandes, ni pour la dsignation des
commissaires enquteurs.
Le projet de rforme est manifestement emprunt dune volont
forte de dvelopper le dialogue. Il en est de mme du dialogue
avec le public et les associations, compte-tenu des mesures
envisages dans le cadre de la rforme sur les enqutes pu-
bliques, qui paralllement est engage.
Mais faute dun encadrement des dlais, le temps du dialoguepourrait se trouver dilu, voire rduit dans un souci de rattra-
page du temps pass.
Jean-Pierre BOIVIN : Bien que la rforme ne soit pas encore
entre en vigueur, on peut dores et dj tenter de discerner les
lignes de force telles quelles se dessinent travers lexamen
des textes et des discussions souvent surabondantes qui
les ont prcds.
Si je cherche prendre un peu de recul par rapport la pra-
tique dj fort longue des tudes environnementales, il me
parat que lon assiste larrive dune deuxime gnration
dtudes dimpact. La premire avait accompagn la cration et
la mise en place de loutil. Elle stait traduite par une difcile
pdagogie des exploitants comme de ladministration et par
une prise de possession graduelle du sujet par le juge. Une ju-
risprudence abondante, voire pointilliste, en tait rsult, mais,
au total, on peut dire que lexercice de ltude stait grosso
modo install dans un climat de relative
srnit et avec une bonne prvisibilit. lexamen, les annulations contentieuses
rsultaient souvent de ngligences, parfois
lourdes, des rdacteurs, mconnaissant les
textes ou traitant avec lgret certains
volets de ltude. Seul le volet sant res-
tait parfois problmatique, mais le juge
ne sy est aventur quavec beaucoup de
prcaution, sen remettant volontiers aux
avis techniques des services comptents.
Et si, dans linstruction des dossiers, subsistaient des zonesstructurelles de fragilit pour certains secteurs dactivit, ctait
plutt vers ltude des dangers quil fallait se tourner que vers
ltude dimpact que lon pouvait regarder comme un outil
assez largement rod.
Les discussions du Grenelle, les fantasmes rels ou suppo-
ss ns dune transposition juge insufsante de la directive
CE n 85/337 du 27 juin 1985, et la rforme des tudes dimpact
qui en est rsulte montrent que sannonce une seconde gn-
ration dtudes dimpacts quil faudra mettre en place et grer
dans les meilleures conditions. Sans quil soit ncessaire, ce
stade, dentrer dans le dtail des textes, on peut dores et dj
identier deux axes de mutation, vraisemblablement profonde,
qui viendront innerver la mise en place des futures tudes.
Dun ct, une nouvelle dimension espace/temps devra ve-
nir structurer des tudes dimpact souvent trop triques et
statiques. Dun autre ct -et cest peut-tre laspect le plus
novateur les textes mettent en place le cadre dun dialogue
institutionnel nouveau dont les exploitants doivent rapidement
prendre conscience et qui, sil est bien matris, devrait per-
mettre dattnuer les inconvnients lis au renouvellement du
champ spatial et temporel des tudes dimpacts.Sur le premier point, lexprience et une jurisprudence incon-
tournable permettront de prciser la nature et les limites du
Le cadragepralable, facultatifpour lentreprise,et sans engagement
de responsabilit pourltat, sera certainementune amlioration notable
des relations avecladministration.
-
7/24/2019 content2_2277
11/64S U P P L M E N T A U N 0 3 6 D C E M B R E 2 0 1 1 B D E I 11
Carrires & granulats
nouveau champ dinvestigation que sont appeles couvrir
les futures tudes dimpact. Sous langle de leur dimension
spatiale, les tudes devront intgrer deux types de facteurs
aux effets possiblement exponentiels.
Tout dabord, les tudes devront dsormais dpasser la vision
statique de linstallation et se projeter dans lapprciation des
effets de linsertion de linstallation dans la zone de rfrence
qui sera dnie, notamment, par lautorit environnementale.
Elles devront galement prendre en compte les effets, dans
ladite zone, dautres installations ou activits soumises
tudes dimpact et dj exploites ou en cours dautorisation.
Ltude devra galement prendre en compte les interrelations
qui existent entre les diffrents milieux susceptibles dtre af-
fects par le projet. Les acteurs du terrain doivent prendre bien
conscience des consquences dune telle
rforme. Dune manire ou dune autre,elle obligera les diffrents exploitants
se concerter pour grer et partager leurs
informations, leurs solutions techniques
et leur vision des mesures compensatoires
an de dgager des marges de manuvre
pour viter tout ostracisme vis--vis des
nouveaux arrivants. Et, sur le fond mme
des tudes, les bureaux dtudes internes
ou externes devront mettre en uvre des
outils performants pour mesurer, par exemple, les mergencescumules dans une zone, les rejets aqueux cumuls dans un
milieu naturel donn ou, plus dlicat encore, les impacts cumu-
ls de rejets atmosphriques vus sous langle du volet sant
des tudes. Ladministration, qui sera dsormais dpositaire
dun panorama largi et global des effets environnementaux
de plusieurs installations dans une zone, devra elle-mme se
positionner par rapport lacceptabilit de lensemble cumul
des impacts.
Ensuite, lautre facteur dlargissement de la dimension spatiale
de ltude est lui-mme constitu par deux lments. Un l-
ment dj en cours de rodage constitu par lintroduction
des mcanismes de compensation, en particulier lorsque cette
compensation sopre lextrieur du site. Mais cest surtout
lintroduction dans les textes de la notion de continuit colo-
gique qui va forcer les rdacteurs dtudes largir considra-
blement leur champ de vision et de perception selon les espces
et les habitats en cause. Une rexion et un savoir faire sont
construire autour de ces notions de continuit cologique
qui, si elles sont mal matrises, pourraient constituer autant
de boites de Pandore.
Sur le second point, relatif la dimension temporelle que
devront revtir les tudes dimpact, le nud du problme
va se situer dans la nouvelle prescription relative lexamen
des consquences court, moyen et long terme du projet sur
lenvironnement. Que faudra-t-il entendre par le long terme ?
Quels critres pertinents pourront tre retenus ? Quels outils
mettra-t-on en uvre pour mesurer des impacts pressentis dans
un pas de temps possiblement trs long au regard, soit de la
dure de lactivit, soit des effets potentiellement perturbateurs
de cette activit sur le milieu.
Lautre versant de la rforme des tudes et probablement
le plus novateur mme sil transparait moins des dbats est
constitu par lmergence dun cadre institutionnel nouveau
pour la pr-instruction du dossier de demande, comme lvo-
quait Nicolas Vuillier.
En vrit, lapparition de ce phnomnena rien de soudain et tait dj en ges-
tation travers le phnomne de sco-
ping que javais de longue date soulign
dans de nombreuses interventions. Les
nouveaux textes mettent en place un m-
canisme de cadrage pralable permettant
tout exploitant dinterroger ladminis-
tration sur le degr de prcision quil
devra apporter dans son tude dimpact
pour les projets quil entend mettre en uvre. Ladminis-tration sera ainsi tenue de donner un avis circonstanci sur
lexistence et la porte doutils de planication et de protection
tels que les zonages, les schmas et les inventaires relatifs
la zone o limplantation du projet est envisage. Cest
dans le cadre de ce cadrage pralable quelle fera connatre
les autres projets connus ou en cours avec lesquels les effets
cumuls devront tre tudis. Elle devra, enn, fournir au
ptitionnaire les rfrences des guides mthodologiques
pertinents pour raliser son tude.
La saisine de ladministration par le ptitionnaire nest pas
rglementairement obligatoire, mais lexercice ne peut quen
tre fortement recommand pour deux raisons. Dune part,
il permettra au ptitionnaire et ses conseils dviter de
faire limpasse sur des points importants ou sensibles quils
nauraient peut-tre pas spontanment perus. Dautre part,
lexercice permettra dtablir ou de rtablir un dialogue
entre les porteurs de projets et une administration qui doit
moins se comporter en censeur de lentreprise quen soutien
technique et logistique dactivits qui, in ne, concourent au
Bien public et au dveloppement de la richesse nationale.
INTERVIEW
R
FLEXIONSCROISES
Mais cest surtoutlintroduction dans lestextes de la notion de
continuit cologique quiva forcer les rdacteurs
dtudes largirconsidrablement leur
champ de vision.
-
7/24/2019 content2_2277
12/6412 B D E I D C E M B R E 2 0 1 1 S U P P L M E N T A U N 0 3 6
La prise en compte descarrires par les documents
durbanisme : tat des lieuxet propositions pour prserverlaccs la ressource
1313
Lexploitation des carrires est dintrt gnral. Chacun saccorde pour en faire le constat et il suffit, sur cepoint, de citer quelques chiffres issus du Livre Blanc de lUnion nationale des producteurs de granulats (UNPG,
mai 2011). La production nationale de granulats se situe hauteur de 400 millions de tonnes par an, soit6,5 tonnes par habitant. titre dexemple, un kilomtre dautoroute ou de ligne ferroviaire grande vitesse
suppose en moyenne 20 000 tonnes de matriaux. Sur le seul chantier du Stade de France, ce sont prsde 250 000 tonnes de matriaux qui ont t ncessaires. Les besoins slvent galement 40 000 tonnesde granulats pour construire un hpital et jusqu 300 tonnes pour une simple maison individuelle.
BDEI
Outre quils sont indispensables, les lieux de pro-
duction doivent galement se situer proximit des
bassins de consommation. La distance moyenne entreles sites et les lieux de consommation nest, en ef-
fet, que de 25 30 kilomtres. Le prix du matriau
double ensuite tous les 40 kilomtres, ce qui suppose
un maillage du territoire relativement serr et sur-
tout une cohrence globale dans les diffrents lieux
dimplantation.
Si lintrt gnral attach lactivit de carrire apparat
vident et est dailleurs parfaitement reconnu par le juge
administratif (CAA Paris, 16 mars 2000, n 97PA03595,Asso-
ciation vigilance environnement et autres) il nen demeure
pas moins quil existe souvent un dcalage trs net entre les
bonnes intentions unanimement afches par lensemble des
parties prenantes (exploitants, services de ltat, lus locaux
et milieux associatifs) et la ralit du terrain qui rvle une
difcult daccs la ressource de plus en plus prgnante.
Les motifs pour lesquels il est difcile douvrir de nouvelles
carrires ou de renouveler les carrires existantes sont nom-
breux et ont frquemment pour origine un problme de matrise
foncire (ngociation avec les propritaires) ou des obstacles
environnementaux (prise en compte des espces protges,
par exemple). Mais, lentrave la plus srieuse se situe biensouvent dans le document durbanisme lui-mme. Sur ce point,
on constate un phnomne gnral dostracisme des PLU qui,
en cho au syndrome Nimby, bloquent toute possibilit
douvrir de nouvelles carrires.
Au plan sociologique, cette situation repose, la plu-part du temps, sur une mprise bien connue : celle
des no-ruraux qui quittent les villes et qui pensent
trouver en pleine nature (prcisment l o se sont
toujours situes les carrires, mais aussi les exploita-
tions agricoles) un jardin dEden dpourvu de toute
activit terrestre. Au plan juridique, il en rsulte une pression
exerce sur les lus locaux qui sont contraints de modier
la hte les documents durbanisme lorsque les projets de car-
rires sont ports leur connaissance. Une vritable course
lchalote est alors souvent observe entre les services de
ltat qui instruisent la demande dautorisation et la commune
dimplantation qui modie paralllement son PLU.
A ce jeu l, le ptitionnaire est gnralement perdant car il est
plus facile et plus rapide dadopter, par une simple procdure
de modication, un nouveau zonage interdisant les carrires
(trois mois sufsent) que de dlivrer une autorisation dex-
ploiter (souvent plus dune anne dinstruction). Mais, au-del
du ptitionnaire, cest surtout lintrt gnral et lautorit de
ltat qui sen trouvent affects, avec pour consquences une
rarfaction des matriaux, un surenchrissement des prix et
des impacts environnementaux plus importants lis au trans-port de matriaux sur de longues distances. Dans les faits, ces
consquences sont dores et dj perceptibles dans certaines
Par Steve HERCAvocat associ
CabinetBOIVIN & Associs
-
7/24/2019 content2_2277
13/64S U P P L M E N T A U N 0 3 6 D C E M B R E 2 0 1 1 B D E I 13
>
Carrires & granulatsURBANISME
CHRONIQUE
rgions o le march des granulats est particulirement tendu
(par exemple en Rhne-Alpes). En 20 ans le nombre de car-
rires est dailleurs pass de 3 500 moins de 2 500(1).
Ce constat de la prise de pouvoir des collectivits locales
travers la norme durbanisme nest pas nouveau(2)et des
parades ont progressivement t mises en place (I). Toutefois,
devant lintensication du phnomne, et au regard du cas
particulier des carrires de granulats qui ne peuvent, pour
les raisons ci-dessus voques, qutre des installations de
proximit, il apparat utile davancer quelques propositions
damlioration (II).
I. LES CARRIRES DANS LES DOCUMENTSDURBANISME : ENTRE INDIFFRENCE GNRALE ETOPPOSITION MILITANTE DIFFICILEMENT COMBATTUEPAR LES OUTILS DINTERVENTION DE LTAT
Dans la majorit des cas, les documents durbanisme sont heu-reusement compatibles avec lactivit de carrire. Il en est ainsi
des carrires existantes dont le lieu dimplantation nexpose
pas les tiers une gne excessive ou de celles qui prsentent
un fort intrt pour la collectivit, en termes demploi (cas des
carrires associes une usine de fabrication), de ressources
nancires (taxes locales) ou de qualit des matriaux extraits
(cas des gisements nobles).
Toutefois, dans de trs nombreuses hypothses, on rencontre
aussi des SCOT et des PLU qui soit ignorent totalement le sujet,
soit sopposent frontalement aux carrires de granulats (A).Face de telles situations, ltat tente dintervenir, mais avec
des outils qui sont en ralit peu efcaces (B).
A. La libert dapprciation laisse aux communespour encadrer limplantation des carrireset ses consquences
De faon gnrale, lindustrie est le parent pauvre des do-
cuments durbanisme. En effet, les PLU ont, lorigine
(L. n 67-1253, 30 dc. 1967, dite loi dorientation foncire),
t principalement conus comme des outils du dveloppe-
ment urbain, ce qui a indirectement eu pour effet de gn-
rer une urbanisation autour de sites industriels initialement
implants en dehors des agglomrations. Les industriels ont
eux-mmes particip ce phnomne en cdant des rserves
foncires autour des sites sur lesquels des programmes de
constructions ont ensuite t dvelopps. Dans un second
temps (L. n 2000-1208, 13 dc. 2000, dite loi SRU), les PLU
ont t rquilibrs en vue de mieux concilier lurbanisation,
dun ct, et la protection des espaces naturels de lautre ct.
Il en est rsult une politique durbanisation principalement
centre autour du renouvellement urbain et de la densication
des espaces existants en contrepartie dune protection plus
forte des espaces naturels. chacune de ces deux priodes,
lindustrie a t oublie. En schmatisant, la premire priode
a gnr un talement urbain et un mitage du territoire fragi-
lisant les sites existants. La seconde priode est, quant elle,
venue protger le patrimoine naturel existant, limitant ainsi
les possibilits douvrir de nouveaux sites. Le Grenelle de
lenvironnement na pas modi cet tat de fait et a mme, au
contraire, offert, travers le verdissement des documents
durbanisme, la possibilit de mieux lgitimer les dcisions
dexclusion des activits industrielles(3).
Le Code de lurbanisme est, cet gard, trs rvlateur de cet
oubli des activits industrielles dont, au-del mme des
questions durbanisme, on commence aujourdhui mesurer
toutes les consquences en termes de perte de comptitivitde lconomie franaise.
titre dexemple, larticle L. 121-1 du Code de lurbanisme
contient un ensemble de principes gnraux qui, autour de
trois thmes distincts, doivent guider les auteurs des documents
durbanisme dans llaboration de la norme urbanistique. Tout
dabord, larticle L. 121-1 nonce le principe dit d quilibre
qui impose de concilier les deux impratifs, considrs comme
tant a prioriantinomiques, de protection des espaces non ur-
baniss, dune part, et de dveloppement urbain, dautre part.
Ensuite, ce mme article afrme le principe de diversit desfonctions urbaines et de mixit sociale. Enn, larticle L. 121-1
mentionne les principes de protection et de prvention. Pour
chacune de ces trois rubriques, il est tout fait clairant de
constater que le terme industrie nest pas une seule fois
employ. Au contraire mme, le paragraphe 3 de larticle
L. 121-1 se lit comme une invitation faite aux auteurs des
PLU de ne pas dvelopper les activits rputes polluantes
ou risques, les documents durbanisme devant, en effet,
dterminer les conditions permettant dassurer la rduction
des missions de gaz effet de serre, la matrise de lnergie et
la production nergtique partir de sources renouvelables, la
prservation de la qualit de lair, de leau, du sol et du sous-sol,
des ressources naturelles, de la biodiversit, des cosystmes,
des espaces verts, la prservation et la remise en bon tat des
continuits cologiques, et la prvention des risques naturels
prvisibles, des risques technologiques, des pollutions et des
nuisances de toute nature
Dans ce contexte, les PLU existants oscillent frquemment
entre indiffrence et opposition militante rendues possibles par
(1) Daprs lUNICEM (cf.Livre Blanc prcit), une division par 2 du nombre de carrires augmente de 41 % la distance de livraison des matriaux. Dans le cas dune division par 3, la distancecrotrait de 73 %. (2) Cf. Boivin J.-P., Les installations classes, Le Moniteur, mars 2003, p. 93 sur limperium de la norme urbanistique . (3) Sur cette analyse, Herc S., Les outils de planificationissus du Grenelle de lenvironnement : nouveaux enjeux, nouveaux dfis pour le tissu industriel, BDEI suppl. au n 24/2009, n 943.
-
7/24/2019 content2_2277
14/6414 B D E I D C E M B R E 2 0 1 1 S U P P L M E N T A U N 0 3 6
labsence de prise en compte obligatoire des carrires (1) et
des orientations contenues dans les schmas dpartementaux
des carrires (2).
1) Labsence de prise en compte obligatoire des carrires
dans les documents durbanisme
Pour llaboration ou la rvision de leur document durbanisme,
les collectivits nont pas sinterroger de faon obligatoire
sur la ncessit dassurer limplantation dune carrire sur leur
territoire. Cette situation apparat dautant plus paradoxale que
ce sont prcisment les choix oprs travers les documents
durbanisme qui gnrent une constructibilit et donc lemploi
des granulats. En dautres termes, les communes peuvent tre
lorigine dun besoin en matriaux de carrire, sans tre tenues
de mettre cette demande en relation avec une offre de
granulats proximit des bassins de consommation.Tout au plus, les SCOT et les PLU doivent-ils contenir un rap-
port de prsentation destin justier les orientations durba-
nisme retenues par la collectivit (C. urb., art. L. 122-1-2 pour
les SCOT et C. urb., art. L. 123-1-2 pour les PLU). Ce document
expose, plus particulirement, les choix retenus pour tablir le
projet damnagement et de dveloppement durables (PADD)
en sappuyant sur un diagnostic tabli au regard notamment
des prvisions conomiques et dmographiques et des besoins
rpertoris en matire de dveloppement conomique. tra-
vers cette disposition, les auteurs des SCOT et des PLU peuventidentier les besoins dapprovisionnement en granulats et la
ncessit dexploiter de nouveaux gisements. Toutefois, en
labsence dune rdaction plus prcise et plus contraignante,
cette analyse nest jamais ralise.
Labsence de prise en compte obligatoire de lactivit de car-
rire se retrouve galement dans les documents graphiques du
PLU. Larticle R. 123-11 c) du Code de lurbanisme dispose,
sur ce point, que les documents graphiques du rglement font
apparatre sil y a lieu les secteurs protgs en raison de
la richesse du sol ou du sous-sol, dans lesquels les constructions
et installations ncessaires la mise en valeur de ces ressources
naturelles sont autorises. Ici galement, il nexiste aucune
obligation de dnir systmatiquement ces secteurs protgs
qui ne seront dlimits quautant et pour autant que la col-
lectivit aura bien voulu admettre limplantation de carrires
sur son territoire.
De son ct, le juge administratif tire toutes les consquences
des textes prcits en reconnaissant traditionnellement aux
auteurs dun PLU le pouvoir de xer librement (i.e.sous le
contrle limit lerreur manifeste dapprciation), pour des
considrations urbanistiques, les conditions dimplantationdes carrires. La commune peut ainsi dcider dinterdire ces
installations classes sur tout ou partie de son territoire. Un
arrt de la Haute Assemble a mme t jusqu admettre la
lgalit dune dcision dinterdiction gnrale dexploiter des
carrires sur lensemble du territoire dune commune, ds lors
que cette interdiction se justiait par des ncessits locales
(CE, 30 juill. 1997, n 119897, Socit Carrires de la 113).
lappui de ses dcisions dinterdiction, la commune peut
notamment se fonder sur lexistence dinstruments de protec-
tion comme, par exemple, une inscription en site class (CAA
Douai, 22 juin 2000, n 97DA00494,Syndicat de ramassage
des ordures mnagres des Flandres-Nord).
Le pouvoir dapprciation des collectivits nest, toutefois, pas
sans limite. Le Conseil dtat a, ainsi, censur une dcision
dexclusion des carrires sur le territoire communal alors que
des gisements taient connus et que la situation des terrains
permettait une exploitation sans nuisances excessives (CE,
30 dc. 1996, n 136796,Commune de Boissire). De mme,lorsquun SCOT a expressment identi des sites susceptibles
dtre retenus pour limplantation dune nouvelle carrire,
le PLU, qui doit lui-mme tre compatible avec le SCOT, ne
peut rgulirement sopposer louverture dune carrire
(CE, 21 mai 2008, n 290241,Socit du domaine de Sainte-
Marcelle).
La prise en compte des carrires dans les documents durba-
nisme apparat, en outre, dautant moins obligatoire quaucun
lien na t tabli entre la planication urbaine et la plani-
cation des carrires.
2) Labsence de lien avec la planication des carrires
Lentre dnitive des carrires dans la police des installa-
tions classes loccasion de la loi n 93-3 du 4 janvier 1993
relative aux carrires a t marque par la mise en place dun
dispositif de planication destin rationaliser la ressource.
Suivant larticle R. 515-2 du Code de lenvironnement, les
schmas dpartementaux des carrires (SDC) doivent princi-
palement : analyser la situation existante concernant, dune
part, les besoins du dpartement et ses approvisionnements
en matriaux de carrires et, dautre part, limpact des car-
rires existantes sur lenvironnement, dresser un inventaire
des ressources connues en matriaux de carrires, valuer
les besoins locaux en matriaux de carrires dans les annes
venir.
Alors que les orientations des SDC devraient, en toute logique,
tre prises en compte par les documents durbanisme, les
textes ne prvoient cependant aucune articulation entre les
SDC, dun ct, et les SCOT et les PLU, de lautre ct. Par-
tant, en application du principe suivant lequel il nexiste pas
darticulation sans texte (voir par exemple : CAA Bordeaux,31 mars 2009, n 07BX00159,Association vivre au marais),
les orientations contenues dans les SDC sont inopposables aux
-
7/24/2019 content2_2277
15/64S U P P L M E N T A U N 0 3 6 D C E M B R E 2 0 1 1 B D E I 15
Carrires & granulats
>
auteurs des documents durbanisme (CAA Paris, 9 mars 2006,
n 01PA03394, Socit SAGED).
Demble, cette circonstance est surprenante lorsque lon
songe la trs longue liste des outils de planication avec
lesquels les SCOT et les PLU doivent tre articuls. Il existe, en
effet, une multitude dinstruments devant tre mis en rapport
avec ces deux documents durbanisme, que ce soit dans un
rapport de compatibilit ou par une simple obligation de prise
en compte(4). Pour mmoire, la compatibilit se distingue
de la conformit en ce quelle admet un possible cart entre
la norme suprieure et la norme infrieure (CAA Versailles,
15 janv. 2009, n 07VE00255,Socit Tepac Terre et plein air
crations). De son ct, la prise en compte consiste, pour
les auteurs dun acte, ne pas ignorer lexistence et les objec-
tifs poursuivis par une autre norme. Selon le Conseil dtat, il
sagit de ne pas scarter des orientationsfondamentales de cette norme, sauf,
sous le contrle du juge, pour un motif
tir de lintrt de lopration envisage
et dans la mesure o ce motif le justie
(CE, 17 mars 2010, n 311443,Ministre de
lcologie c/ Association FRAPNA). Dans
un rapport de prise en compte, il appa-
rat ainsi possible, sous rserve de bien
le justier, de droger aux dispositions
du document suprieur. titre dillustration, le PLU doit tre com-
patible avec les SDAGE et les SAGE, les plans de gestion des
risques dinondation (PGRI), les chartes des parcs nationaux
et des parcs naturels rgionaux (C. urb., art. L. 111-1-1, al. 3
et 4). De mme, suite la loi n 2010-788 du 12 juillet 2010,
loi Grenelle II, les PLU doivent prendre en compte les schmas
rgionaux de cohrence cologique (SRCE) qui contiennent
les trames vertes et bleues (C. env, art. L. 371-3) et les plans
climats-nergie territoriaux (C. env., art.L. 229-26). On peut
galement citer larticle L. 923-1-1 du Code rural et de la pche
maritime issu de la loi n 2010-874 du 27 juillet 2010 de moder-
nisation de lagriculture et de la pche qui prvoit la cration
de schmas rgionaux de dveloppement de laquaculture
marine tablis dans chaque rgion comportant une faade
maritime an de recenser les sites existants et les sites propices
au dveloppement dune aquaculture marine durable. Ces
schmas sont pris en compte par le PLU. Enn, dans un tout
autre domaine que lenvironnement, les schmas dpartemen-
taux dorganisation sociale et mdico-sociale qui identient
les besoins sociaux et mdico-sociaux de la population et les
objectifs de dveloppement de loffre sociale et mdico-sociale
sont galement opposables aux PLU.
En rsum, alors quil existe une multitude doutils avec
lesquels les PLU et les SCOT doivent tre articuls, il nen va
aucunement ainsi des SDC qui portent pourtant sur une activit
dintrt gnral indispensable la construction et au dvelop-
pement conomique. elle seule, cette absence darticulation
dans les textes souligne le peu de considration pour les acti-
vits industrielles dans les outils de la planication urbaine.
Surtout, une telle omission est prjudiciable dans la mesure o
elle procde dune dmarche de planication imparfaite de la
ressource minrale qui laisse les exploitants au milieu du gu
entre les potentiels identis dans le SDC et laccessibilit la
ressource travers les documents durbanisme.
Dans la pratique, les acteurs cherchent dailleurs remdier
cette situation, en introduisant danscertains SDC des recommandations
prendre en compte dans les documents
durbanisme. Par elles-mmes, de telles
incitations soulignent limperfection ac-
tuelle des textes et la ncessit de faire
voluer ltat du droit. Le schma dpar-
temental des carrires de la Savoie dat
de mars 2006 en constitue, cet gard,
lillustration parfaite : on constate en
Savoie labsence douverture de carrirenouvelle depuis 10 ans et la ncessit, pour
les professionnels de faire face une demande croissante, lie
lexpansion conomique du sillon alpin, alors que les ressources
se rduisent ou sont limites par le dispositif rglementaire
en place. La prise en compte des besoins en matriaux dans
les documents durbanisme est gnralement insufsante et
traduit une absence de prise en compte des besoins indis-
pensables au dveloppement conomique et touristique dun
secteur. Sagissant dun enjeu supra communal, la production
de matriaux de carrires doit dans la mesure du possible tre
prise en compte dans les documents durbanisme, lors de leur
mise jour par modication ou rvision. Les communes sont
invites favoriser la cration de zones naturelles ds lors
quelles prsentent des potentialits intressantes, conformes
aux dispositions du prsent dossier. Une meilleure prise en
compte de cette problmatique, au niveau des SCOT, est bien
videmment souhaitable.
En labsence de lien juridique, les formulations de ce type
sapparentent ni plus ni moins des incantations de principe.
Tout au plus, les recommandations dun SDC peuvent-elles
(4) Cf.Herc S., Le PLU, d. Le Moniteur, oct. 2011, p. 43 et s.
URBANISME
CHRONIQUE
En rsum, alors quilexiste une multitude
doutils avec lesquels lesPLU et les SCOT doiventtre articuls, il nen vaaucunement ainsi des
SDC qui portent pourtantsur une activit dintrtgnral indispensable.
-
7/24/2019 content2_2277
16/6416 B D E I D C E M B R E 2 0 1 1 S U P P L M E N T A U N 0 3 6
tre utilises pour soutenir lexistence dune erreur manifeste
dapprciation de la commune qui, en dpit dun besoin et de
zones dimplantation clairement cibles, adopterait un PLU
totalement ferm lactivit de granulats. De mme, en cas
de blocage, les lments du SDC peuvent permettre au prfet
dadopter un projet dintrt gnral (PIG). Toutefois, si le
recours au PIG linitiative du prfet a bien t valid par
le juge administratif, y compris au bnce dune entreprise
prive (CAA Marseille, 24 janv. 2011, n 08MA05093,Socit
Sita Sud), il nen demeure pas moins quil sagit l dune
procdure souvent longue mettre en uvre et qui pourrait
trs simplement tre vite par linstitution dun lien juridique
entre les diffrents documents de planication. Mieux, dans
les faits, on constate le plus souvent une attitude de prudence
de la part des services de ltat vis--vis dune autorit dcen-
tralise, cette rserve pouvant parfois prendre la forme dunecapitulation pure et simple. Le juge administratif veille alors
ce que ltat ne mconnaisse pas sa propre comptence,
comme cela a pu tre le cas dans une affaire symptomatique
dans laquelle le prfet avait irrgulirement pris un sursis
statuer sur la demande dautorisation dexploiter dans lattente
de la rvision du PLU interdisant lexploitation des carrires
(TA, Amiens, 3 avr. 2007, n 0400873,Holcim Granulats).
B Linsuffisance des outils actuels aux mainsde ltat permettant de faire prvaloir
lexploitation de la ressourceLes outils dintervention de ltat existent et ont mme t
renforcs travers la rforme de la procdure de dclaration de
projet (1). Toutefois, les outils rgaliens existants apparaissent
globalement inefcaces, ce qui est plus particulirement vrai
du projet dintrt gnral (2).
1) Les outils de contrainte existent et ont t rcemment
renforcs
Les mouvements locaux dostracisme manifests lencontre
de catgories entires dactivits peuvent tre lorigine de
blocages prjudiciables lintrt gnral, en particulier
lorsque les activits concernes prsentent une fonction
conomique importante (installations chimiques, grandes
plateformes logistiques) ou lorsquelles concourent trs di-
rectement un service public (limination des dchets m-
nagers), voire mme lorsquelles participent directement la
politique du dveloppement durable (oliennes, installations
de recyclage).
travers larticle L. 123-5 du Code de lurbanisme, lauto-
risation dexploiter ne peut rgulirement tre dlivre ds
lors quil existe une incompatibilit avec le PLU (pour une
solution de principe : CE, 7 fvr. 1986, n 36746,Colombet).
Ds lors, bien qutant une police indpendante, lurbanisme
constitue le vritable talon dAchille de la lgislation sur les
installations classes. Rgulirement, le juge administratif
doit mme venir au soutien de ltat en rappelant aux auteurs
des PLU les limites de leur comptence (pour lillgalit dun
PLU xant la dure dautorisation dune carrire : CE, 29 avr.
1998, n 168895,Socit Cosson). Le juge administratif a sur-
tout permis un rquilibrage des comptences en permettant
au prfet dutiliser loutil du projet dintrt gnral (PIG)
au cas particulier des installations classes. Plus rcemment,
cest la rnovation de la procdure de dclaration de projet
qui peut, dans certains cas, permettre de sortir de situations
dimpasse.
En premier lieu, le mcanisme du PIG a t cr par la loin 83-8 du 7 janvier 1983 relative la rpartition des com-
ptences entre les communes, les dpartements, les rgions
et ltat pour viter que la dcentralisation des comptences
durbanisme naboutisse au blocage des projets de ltat
ou dautres collectivits sur le territoire communal. Ltat
dispose, de la sorte, de la facult dexiger des collectivits
quelles adaptent leur document durbanisme pour permettre
la ralisation de projets dont lutilit publique est reconnue
(C. urb., art. L. 121-9). Concrtement, le prfet (ou toute autre
personne ayant la capacit dexproprier) prend une premiredcision arrtant le principe et les conditions de ralisation du
projet. Puis, lissue dune mise disposition dun dossier
exposant le projet, le prfet institue par arrt le PIG et le
transmet la collectivit qui doit alors mettre en compatibilit
son document durbanisme travers une procdure de mo-
dication ou de rvision (C. urb., art. R. 121-4)(5). dfaut
pour la commune dagir elle-mme, le prfet se substitue
celle-ci pour procder directement la mise en compatibilit.
Bien que ntant pas, lorigine, prvu pour tre appliqu
aux activits industrielles, le PIG est dsormais rgulirement
utilis pour rgler des conits entre ltat et les communes
sur limplantation de certaines installations(6). Le PLU a ainsi
t utilis pour louverture de carrires an dviter toute
pnurie de matriaux ncessaires lapprovisionnement de
chantiers publics (CAA Paris, 16 mars 2000,Association vi-
gilance environnement et autres,prc.). Cette solution a plus
rcemment t tendue par le juge au cas des installations de
stockage de dchets mnagers et de dchets industriels banals
qui, dans un contexte dinsufsance avre des capacits de
stockage disponibles, revtent une utilit publique certaine
(5) Cf. Herc S., Le PLU, d. Le Moniteur, oct. 2011, p. 260 et s. (6) Cf.Defradas F. et Giraudet M., Les carrires et les contraintes lies lurbanisme, BDEI Suppl. au n 18, n 751.
-
7/24/2019 content2_2277
17/64S U P P L M E N T A U N 0 3 6 D C E M B R E 2 0 1 1 B D E I 17
Carrires & granulats
>
(CAA Bordeaux, 25 janv. 2010, n 08BX00281,Commune de
Saint-Silvain-Bar-Le-Roc).
En second lieu, larticle L. 300-6 du Code de lurbanisme a
ouvert la possibilit pour les collectivits locales de se pro-
noncer, par une dclaration de projet, sur lintrt gnral
dune action ou dune opration damnagement au sens
de larticle L. 300-1 du Code de lurbanisme (opration de
requalication urbaine, cration dun centre de quartier,
amnagement dun ple commercial, ralisation dune aire
daccueil des gens du voyage, projet de construction dun
quipement collectif, etc.).
Postrieurement sa cration, larticle L. 300-6 a fait lobjet
dun double largissement. Dune part, la loi n 2006-872 du
13 juillet 2006portant engagement national pour le logement
(loi ENL) a introduit la possibilit pour ltat (et ses tablis-
sements publics) dadopter galement une dclaration deprojet. Dautre part, la loi n 2009-323 du 25 mars 2009 de
mobilisation et de lutte contre lexclusion (dite loi MOLLE)
a ajout cette liste la ralisation dun programme de
construction(7).
Par ailleurs, suite au dcret n 2004-531 du 9 juin 2004 relatif
aux documents durbanisme et modiant le code de lurba-
nisme, une ambigit stait faite jour concernant la question
de savoir si la dclaration de projet du code de lurbanisme
pouvait galement porter sur des projets privs dintrt gn-
ral. La rfrence la matrise douvrage publique des projetsa dsormais t purement et simplement supprime.
De la sorte, la dclaration de projet de larticle L. 300-6 du
Code de lurbanisme valant mise en compatibilit peut dsor-
mais indiffremment sappliquer aux actions, oprations,
ou programmes de construction, publics ou privs . Cette
clarication permet aux collectivits locales de disposer dun
instrument supplmentaire dadaptation rapide des documents
durbanisme pour des projets qui, bien qutant conduits par
des oprateurs privs, nen sont pas moins dintrt gnral.
Mais, de son ct, ltat dispose galement dun nouveau
levier juridique pour imposer, en cas de refus des collectivits
locales, certains quipements dinitiative prive destins
satisfaire un besoin collectif. Il peut en aller ainsi de certains
quipements, tels que les installations de dchets, qui sont des
installations classes concourant un intrt gnral. Pour les
carrires, qui ne sont proprement parler ni des actions ou
oprations damnagement au sens du code de lurbanisme,
ni des constructions, la question peut se poser de la possibilit
de recourir la dclaration de projet. Toutefois, dans le cas
de louverture dune carrire associe des installations de
traitements et de fabrication (i.e.des constructions ), loutil
de la dclaration de projet devrait pouvoir tre un recours
envisageable.
Enn, au plan procdural, la dclaration de projet est soumise
une procdure globalement aussi complexe que celle prsidant
la mise en uvre du PIG. Le projet doit donner lieu un dossier
soumis lavis conjoint des personnes publiques concernes,
puis une enqute publique. Contrairement la dclaration
dutilit publique, la dclaration de projet nemporte pas auto-
matiquement mise en compatibilit du PLU. Ladaptation du
document durbanisme doit donc intervenir par dlibration de
la collectivit ou, dfaut, par arrt du prfet.
Tels quils se prsentent, les outils dintervention ci-dessus
apparaissent peu efcaces.
2) Linefcacit des outils rgaliens existants
Le PIG, comme la dclaration de projet, ne sont initis que si le
prfet accepte de lancer la procdure, ce qui suppose un degr
minimum dengagement de la part du reprsentant de ltat
sur des sujets souvent politiquement sensibles au plan local.
Lorsque le prfet est saisi dune demande dinstitution du
PIG, le Conseil dtat admet, en particulier, que le prfet reste
libre, sous rserve du simple contrle restreint de lerreur ma-
nifeste dapprciation, de donner ou de ne pas donner suite
la demande qui lui est adresse par le ptitionnaire. (CE,
7 fvr. 2007, n 287252,Socit Sagace, BJDU 3/2007, p. 166).Cette solution nest, ds lors, pas favorable linstitution du
PIG (ou la dclaration de projet) demand par un oprateur
conomique, et ce dautant plus que, de manire inverse, la
dcision de recourir au PIG est soumise au contrle normal du
juge (CE, 8 oct. 2001, n 215736,Association contre lextension
et les nuisances de laroport Lyon Satolas).
Par ailleurs, dans ses modalits actuelles de mise en uvre, le
PIG nest pas un instrument efcace puisquil ncessite, pour
tre vritablement opposable en tant que norme durbanisme,
une procdure de modication ou de rvision du PLU. Dans
le systme actuel, cette procdure dadaptation du PLU peut
tre mene ou bien par le prfet ou bien par la commune si
elle dcide dintgrer elle-mme le PIG dans son document
durbanisme. En pratique, ce mcanisme en deux temps pose
des problmes de dlai, notamment lorsquune procdure de
rvision du PLU est lance, et de scurit juridique lorsque
ladaptation du PLU est mene par une commune qui est en
mme temps oppose au projet.
Partant, il ressort du tableau gnral ainsi dress que lex-
ploitation des carrires napparat pas sufsamment prise en
(7)Cf.Herc S., Les habits neufs de la dclaration de projet, Le Moniteur, 30 avr. 2010, p. 80).
URBANISME
CHRONIQUE
-
7/24/2019 content2_2277
18/6418 B D E I D C E M B R E 2 0 1 1 S U P P L M E N T A U N 0 3 6
compte par les auteurs des documents durbanisme alors que
la production des granulats revt clairement un intrt gnral
et que les services de ltat sont souvent dmunis face une
opposition locale structure et relaye travers les disposi-
tions du PLU. Face ce constat, la solution devrait pouvoir
passer par une rexion obligatoire de la collectivit sur la
disponibilit en matriaux de carrires avant toute dcision
de planication urbaine.
II. LES PROPOSITIONS POUR UNE VRITABLEINTGRATION DES CARRIRES DANS LESDOCUMENTS DURBANISME
Dans son Livre Blanc, lUNPG a symboliquement retenu
comme premire proposition (sur les 22 mises sur la table)
linscription de lapprovisionnement en granulats dans les
politiques publiques et, plus particulirement, la ncessitde prendre en compte les programmes en granulats dans
les plans et programmes publics. Ce faisant, la profession
souligne quel point il manque aujourdhui un mcanisme
juridique qui obligerait les personnes publiques vrier les
impacts de leurs dcisions sur les besoins en granulats. Par
exemple, linterdiction des carrires sur le territoire communal
ne conduit-elle pas une situation de pnurie ? Louverture de
nouvelles zones lurbanisation ou la densication de certains
quartiers ne ncessite-t-elle pas de prvoir limplantation de
nouvelles carrires de proximit ?La premire solution pour faire voluer ltat du droit consiste
ne plus adopter de PLU ou de SCOT sans quil y ait eu, au
pralable, une prise en compte des enjeux lis lexploitation
des carrires (A). Par ailleurs, pour remdier linefcacit
des outils dintervention de ltat, plusieurs pistes sont envi-
sageables comme le renforcement du porter connaissance
ou la cration dun lien juridique nouveau entre les schmas
dpartementaux des carrires, dun ct, et les SCOT et les
PLU, de lautre ct (B).
A. Lobligation de prise en compte des carrires parles SCOT et les PLU
En ltat actuel du droit, les auteurs des SCOT et des PLU peu-
vent, sans que cela nentrane vritablement de consquences,
oublier de sinterroger sur les besoins en matriaux de
carrires ou de procder un examen de limpact de leurs
mesures sur la production de granulats.
An de remdier une telle situation, nous pensons quil
sufrait, tout dabord, de complter larticle L. 121-1 du Code
de lurbanisme de manire y ajouter, lintrieur du principe
dquilibre, la valorisation des activits minrales. Ainsi, lesSCOT et les PLU devraient-ils dterminer les conditions per-
mettant dassurer lquilibre entre (partie nouvelle en italique
soulign) : a) Le renouvellement urbain, le dveloppement
urbain matris, la restructuration des espaces urbaniss, la
revitalisation des centres urbains et ruraux ; b) Lutilisation
conome des espaces naturels, la prservation des espaces
affects aux activits agricoles et forestires, aux activits
extractiveset la protection des sites, des milieux et paysages
naturels ; c) La sauvegarde des ensembles urbains et du pa-
trimoine bti remarquables .
Ensuite, sagissant du contenu des documents durbanisme, le
rapport de prsentation pourrait tre renforc par un examen
obligatoire des impacts des dispositions du SCOT et du PLU
sur la production de granulats rendue ncessaire par la mise
en uvre du document durbanisme. Il convient dobserver
que cette solution est dores et dj applique dans le dispo-
sitif de lutte contre ltalement urbain. En effet, le rapport de
prsentation du SCOT doit raliser une analyse de la consom-mation despaces naturels, agricoles et forestiers au cours des
deux annes prcdant lapprobation du schma (C. urb., art.
L. 122-1-2). A partir de cette tude, le document dorientation
et dobjectifs du SCOT arrte les objectifs chiffrs de consom-
mation de lespace. Dans le cas prsent, rien nempcherait de
prsenter ainsi une analyse de la consommation prvisible de
granulats, tout en la mettant en perspective et en larticulant
avec les donnes du schma dpartemental des carrires en
vigueur relatives aux besoins en nouvelles carrires.
Cette obligation aurait elle-mme pour a