caballeros e hidalgos

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españa medieal Adeline Rucquoi

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Page 1: Caballeros e Hidalgos
Page 2: Caballeros e Hidalgos

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@ Presses de l'université Paris-Sorbonne, zoroISBN : 978-z-8 4o5o- 678-z

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[email protected]: //pups.paris-sorbonne.fr

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CABALLEROS ET HIDALGOS :LA NOBLESSE ET LAVILLE EN CASTILLE

Adeline Rucquoi

Une longue tradition historiographique a imposé, pour le Moyen Ágehispanique, les mots de caballería uillana, vite traduits en frangais paro chevalerie vilaine ), pour désigner le groupe dominant dans les villes desxIII'-xv' siécles. Dans cette perspective, les caballeror - mot qui peut setraduire aussi bien par u cavaliers ) que par < chevaliers ) - ne sont donc pasdes nobles, au sens propre du terme, mais une sorte de bourgeoisie aisée qui,par le recours i ce terme, tenterait de s'assimiler - vainement, si I'on en croitles historiens contemporains - á la véritable noblesse. Cette véritable noblesseserait bien évidemment rurale et le mot pour la définir serait hidalguía tI'hidalgo ou f¡odalgo, le vrai noble, ne serait donc jamais urbain. Il est vraiqu'au cours des siécles, de mémes mots en viennent á recouvrir des réalitésfort différentes. Au xvI'siécle, Ies bidalgos sont, selon Joseph Pérez, u desnobles qui s'accrochent i leurs priviléges, mais qui n'ont plus les moyensmatériels de I'exercer et )r qui leurs compatriotes refusent toute considérationsociale o', alors que le dtre de caballero a joui de l'immense popularité desromans de chevalerie qui lui ont donné une aura beaucoup plus romantiqueque militaire'.

La distinction établie entre l'bidalgo et Ie caballerz, et la création dunéologisme caballería uillana refétent en fait le poids de I'historiographiefrangaise du milieu du xx'siécle, selon laquelle les nobles domineraient la

. campagne et la bourgeoisie serait une spécificité des villes. Labsence d'unmot équivalent ). o bourgeois > a donc amené de nombreux auteurs i accoler

Joseph Pérez, < Réflexions sur l'hidalguía >, dans M. Lambert-Georges (dir.) Hidolgos,hidalguía dans I'Espagne des xvt"-xvttt" siécles, Paris, CNRS, 1989, p.77-22.Jesús D. Rodríguez-Velasco, El debate sobre la caballería en el siglo XV. La tratadísticacaballeresca castellana en su morco europeo, Vattadolid, Junta de Castilta y León, 1996.

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i celui qu'ils trouvaient dans les textes, caballero, I'adjectif uillano, entenducomme u urbain , ou u citadin ,.Les caballer¿s constitueraient donc une sorte

de bourgeoisie, soumise au service des armes en raison de la reconquéte, maisqui n aurait pas été considérée comme noble.

Dans le cas de I'Espagne en général, et de la Castille en particulier, il

convient en fait d'analyser séparément les deux termes qui nous intéressentici, c'est-i-dire la ville et la noblesse, avant de tenter d'établir les rapports quiles unissent. Qu est-ce qu'une ville et qu'évoquent des mots comme ciudad

o ov uilla dans l'imaginaire de ceux qui les employaient ) la fin du MoyenÁge ? Que veut dire o noble ), qui est, noble et d'oü vient la noblesse sontpar ailleurs les questions qui se posent lorsqu'on se penche sur l'histoire de laPéninsule ibérique ) cette méme époque. Ce n'est qu'une fois définis ces deuxéléments qu'il sera possible d'apprécier la place et le róle joués par les noblesdans les milieux urbains.

LA VI LLE

La ciuitas, disait Isidore de Séville, ( est une multitude d'hommes uniepar le lien de la société, appelée ainsi en raison des citadins, c'est-á-dire deshabitants mémes de la ville, parce qu'elle concentre et contient les vies d'un

grand nombre. Car sil'urbs, ce sont les remparts, la ciuitas, ce ne sont pas lespierres sinon ses habitants o.

La ville est donc avant tout une communauté de ciues, de citoyens qui,dit toujours Isidore de Séville, < vivent ensemble añn que la vie communesoit plus agréable et plus süre o3. Le métropolitain d'Hispalis rejoint dansces définitions celle d'Aristote qui, dans le premier chapitre de la Politique,affirmait que

puisque toute cité, nous le voyons, est une certaine communauté, et que toutecommunauté a été constituée en vue d'un certain bien (car c'est en vue de cequi leur semble un bien que tous les hommes font tout ce qu'ils font), il estclair que toutes les communautés visent un certain bien et que, avant tout,c'est le bien supréme entre tous que vise celle qui est la plus éminente de touteset qui contient toutes les aut¡es. Or c'est celle que l'on appelle la cité, c'est-)-dire la communauté politiquea.

San lsidoro de Sevi l la, Etimologías, XV, z, r et |X,4, z, éd.josé Oroz Reta, Madrid, LaEditorial Catól ica, col l . < Bibl ioteca de Autores Crist ianos >>, t982, t .2, p.226 et f .r ,p . 7 7 4 .Aristote, Les Poli t iques, éd. Pierre Petlegrin, Paris, Garnier-Flammarion, 993,p.85.

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Platon également, dans la République, mettait dans la bouche de Socrate

un discours sur la cité, entendue comme l'ensemble de la communauté

politique :

C'est, répondis-je, un nom d'une signification plus étendue qu'il faut

donner aux autres cités, car chacune d'elles est multiple, et non pas une,

comme on dit au jeu ; elle renferme au moins deux cités ennemies I'une de

l'autre : celle des pauvres et celle des riches, et chacune de celles-ci se subdivise

en plusieurs autres. Si tu les considéres comme n'en formant qu'une seule, tu* s.r", complétement dégu, mais si tu les traites comme multiples, donnant aux

unes les richesses, les pouvoirs, ou mérne les personnes des autres, tu auras

toujours beaucoup d'alliés et peu d'ennemis. Et aussi longtemps que ta cité

se¡a sagement administrée, comme nous venons de l'établir, elle sera la plus

grande de tou tes5 .

Dans un monde pétri de réftrences classiques, comme I'Espagne médiévale,

oü l'héritage gréco-romain reste vivant, la communauté politique est á la foí3

la ville et l'empire, la cité et le royaume, les deux termes étant pratiquement

équivalents6. Vers r454-r4t t encore, le grand prélat castillan Rodrigo

Sánchez de A¡évalo rédige en langue vulgaire une Somme de la polhiqu¿ ainsi

définie:

Ici commence le livre appelé Somme de la Politique,qui parle de commentdoivent étre fondées et édifiées les cités et les villes. Il parle aussi du bongouvernement et de la droite police que doit avoi¡ tout royaume ou ville, entemps de paix comme en temps de guerreT.

Un siécle plus tót, Juan García de Castrojeriz, dans sa traduction et surtoutson commentaire du De Regimine principum de Gilles de Rome, assimile dela méme fagon la ville et le royaume lorsqu'il écrit que, dans la premiére partiedu troisiéme livre, le roi connaitra u les moyens et les instruments nécessairespour gouverner villes et royaumes, et il saura aussi quel est le meilleur moyenet le meilleur gouvernement et ordonnance de la ville, car beaucoup ontmontré de la sagesse pour ordonner les villes, mais celui qui I'a le mieux faitest Aristote > 8.

Platon, la République,lY,4zze-4z3,trad. Émite Chambry, Paris, Les Beltes Lettres, 1932.Ernst Kantorowicz, Mourir pour la patrie, Paris, PUF, 1984, p.105-141. Pour [e cashispanique, voir Ariel Guiance, Los discursos sobre la muerte en la Costillo medieval(siglosVll-XV), Vatladol id, Junta de Casti l la y León, 1998, p.325-355.RodrigoSánchezdeArévalo,5umadelapolít ica,éd. MarioPenna,Prosistascastel lanosdelsiglo XV, Madrid, Madrid, Ediciones Atlas, 1959, colt . < Bibl ioteca de autores españoles >,p.249-309.Glosa castellana al< Regimiento de príncipes tt de Egidio Romano,éd. Juan Beneyto Pérez,Madrid, lnst l tuto de Estudios polít icos, 7941,1.7, p. 20 : ( E por la primera parte sabrdlas policías e los governam¡entos que son menester para governar cibdodes e reynos,

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Un siécle plus tót encore, vers rz65-1267, Thomas d'Aquin dans le DsRegno expliquait que I'homme esr fair pour vivre en société, que la ville estune communauté parfaite, er que celui qui dirige une communauré parfaite,c'est-)-dire une ville ou une province, est appelé roie.

La ville n'est donc pas une simple agglomération que I'on pourrait opposeri la campagne, un espace báti par rappoft á un espace n naturel o. La villeest l'unique lieu oü peut vivre la societas humaine. Le monde < civilisé , nese congoit que comme une ville, ou tout au plus un ensemble de villes, enopposition i la barbarie, anx ( déserts > oü vivenr \es rustici et les barbari

I qui ne constiruenr pas une societas.,Lorsqu'en 1434, l'évéque Alfonso deCartagena, á la téte de la légation castillane au concile de Bále, réclama pourcette derniére la place qu'occupaient les représentants du roi d'Angleterre,il expliqua entre aurres n que l'Anglererre esr une ile de la mer Océane, quiest, par rapport au monde et i la rotondité de la rerre, comme le faubourgpar rappoft á la ville; or il est manifeste que la ville est l'élément prin<;ipalet le faubourg un élément accessoire et rajouté, et ce mot ville, pris dans sonsens strict, ne comprend pas le faubourg ), mettant ainsi en évidence que,( pour parler clairement, il semble bien que I'Angleterre est en dehors dumonde nto.

LEspagne ne se congoit donc pour ses habitanrs que comme un ensemble devilles. La chronique élaborée I la cour du roi Alphonse III (866-grc) I Oviedodécrit ainsi le pays comme composé de six provinces, placées sous I'autoritéd'une église métropolitaine, incluanr une série de siéges ecclésiastiques quisont autant de villes ; la description inclut ensuire la distance qui sépare lesprincipales villes entre elles depuis cadix jusqu'á constantinople et enfin lenom des titulaires des siéges épiscopaux". Le récit de la o restaurarion ) duroyaume consiste pour sa part en la liste des villes reprises aux musulmans :

e sabrd también cuól es la mejor policía e el mejor governamiento e ordenamiento decibdad, ca muchos dieron sabiduría para ordenar cibdades, mas el que la mejor ordenófue Aristóteles >.Tho mas d'Aq u in , De regno,Lib. l, cap. | : < [...] in c¡v¡tate vero, que est pe rfecta com m unitas,quontum ad omnia necessorio víte [...] Ilnde qui perfectam commun¡tatem regit, id estc¡v¡totem vel provinciam, ontonomasice rex vocatur >.Alfonso de cartagena, Discurso sobre la precedencia del rey católico sobre el de lnglaterroen el concilio de Basilea, éd. par Mario Penna, Prosistas castellanos del siglo XV, op. cit,,p.205-233, en part icul ier p. 22o-22t: < [ . . . ] E desto se sigue que lnglaterra, pues es insuladel mar océano, que se ha al mundo e redondesa de la tierra como se ha el arravat arespecto dela cibdad. E nanifiesto es que la cibdod es cosa principal, e el arraval cosaocesor¡o e ollegoda; e este vocablo cibdad, tomado estrechomente, non comprehendeal arraval [...] E asi parece que fablando propiamente, lnglaterra esta fuera del mundo ees como un arraval del, segun que dixe [...]>.Juan Gil Fernández, José L. Moralejo et Juan l. Ruiz de ta peña,crónicas asturianas, oviedo.Universidad de Oviedo, 1985, p. t54, t57, t5B.

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Alphonse I" (lj9-71) n prit un grand nombre de villes quils opprimaient,c'est-i-dire Lugo, Tu¡ Porto, Braga la métropolitaine, Viseo, Chaves,Agata, Ledesma, Salamanque, Zamora, Avila, Ségovie, Astorga, León,Saldaña, Mave, Amaya, Simancas, Oca, Veleya de Alava, Miranda, Revenga,Carbonárica, Abeica, Briones, Cenocero, Alesanco, Osma, Coruña, Arganza,Sepúlveda u".

La ville est donc I'habitat naturel des hommes, la campagne étant alorsréservée soit au monde sauvage - sahus - soit au territoire productif - ager -.

Gomme ) l'époque romaine, ce dernier est inséparable de la ville qui en estle centre et s'en alimente, donnant ainsi,en Castille des n communautés deville et de terre u, c'est-á-dire des circonscriptions composées d'une villeet des champs, des villages et des bois qui en dépendaient. Les labradoresqui cultivaient les champs ou les bortelanos qui s'adonnaient aux culturesmaraichéres vivaient de préference en ville, rant il esr vrai que dans la majeurepartie de la Péninsule ibérique les travaux agricoles ne sonr que saisonniers,,- céréales, vigne, oliviers -, et une parrie des troupeaux d'ovins quittaitI'agglomération le matin pour y revenir le soir.

On ne n vit , donc pas ) la campagne, et les nobles moins que les autres. Lesgrandes familles de I'aristocratie, tout en se souciant d'accroitre leurs domaineset leurs rentes, résident en ville et possédent parfois des demeures dans laplupart de celles oü séjourne le roi. C'est le cas á Valladolid, au xlÉ siécle, desMendoza qui sont mayordomos du roi et acquiérent les titres de marquis deSantillane et ducs de I'Infantado, des Stúñiga ou Zuñigu justicias mayores duroyaume, comtes de Ledesma, ducs de Plasencia puis de Béjar, des Enríquez,grands amiraux de Castille, des Acuña, comtes de Valencia de Don Juan etde Buendía, et d'une branche de la puissante famille des Guzmán, ainsi qued'autres familles dont le prestige s'accroir á l'époqueu. A Séville dominentles Guzmán qui sont comtes de Niebla er ducs de Medina Sidonia, les Poncede León qui sont comtes d'Arcos et marquis de Cadix, les de la Cerda quiportenr le titre de comtes de Medinaceli, les Pacheco, marquis de Villena, lesZifiga et les Enríqu ezL4 . i\ Ségovie, que les monarques apprécient également,ont une résidence les marquis de Villena, Ies marquis de Moya, les comtes dePuñoenrostro, et les Mendoza'5. Bien que moins fréquentée par la cour royale,Burgos accueillait les puissants connétables de Castille, les Fernández de

I b i d., p. 733, 2o7 ef 2og.Adeline Rucquoi,Val ladol id au Moyen Áge, Paris, Publisud, rgg3,p.z78-287.Antonio Collantes de Terán, Sevilla en la Baja Edad Media. La ciudad y sus homores,Sevit la, Ayuntamiento, 1984, p. zz4-226.María Asenlo González, Segovia. La ciudad y su tierra a fines del medievo, Segovia,Diputación provincial, 1986, p. 265-27o.

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Velasco, la famille des Rojas, marquis de Poza, celle des Fernández Manrique,comtes de Castañeda et marquis d'Aguilaa une branche de la famille des

' Mendoza et quelques autres grandes familles qui tiraient leurs revenus duterritoire plus ou moins proche'6. Dans une ville d'importance politiquemoindre, comme Soria, s'établirent i partir du dernier tiers du xrv" siéclediverses familles aristocratiques, les Luna, les Arellano, les Bearn de la Cerda,les Pacheco et les Velasco, seigneurs de domaines situés dans la région'7.

Les nobles titrés vivent donc de préference en ville et ne résident dans leurs

- . chátearx ruraux qu'en cas d'exil, forcé ou volontaire, de la cour. Le favoridu roi et connétable de Castille, Ál,oaro de Luna, passa ainsi en 1427, r4)9et r44r plusieurs mois éloigné de la cour suite ) des pressions exercées ) sonencontret8. Le seigneur de Batres, Fernán Pérez de Guzmán, qui dut se retirerdans son cháteau de Batres dans les années r43o, se plaignit am¿rementd'u écrire grossiérement car il vivait entre les laboureurs p er s'excusait auprés

3og du marquis de Santillane de son manque de finesse car ( entre gens rustiquesla fortune m'a fait vivre >te. Vers 1456, Alfonso de Palencia mer en scéne,dans son Tiaité de la perfection du triomphe militaire, un laboureur n que latourmente du temps adverse avait forcé á quitter la ville et )r faire rusrique vie,dont la civilité autrefois avait été d'un louable appareil, et dont la rusticitéprésente n'était pas chose outrageante )2o. En r49o, dans Ie Vocabulaireuniuersel en latin et en rzmdn, qu'il publia ) Séville á la demande de la reinede Castille, Isabelle la Catholique, le méme Alfonso de Palencia définit le motrusticut comme u celui qui garde les champs cultivés ou travaille au village, cequi fait que le rustique est un ouvrier ou un homme non policé ,".

Hilario Casado Alonso, Señoreg mercoderes y campesinos. Lo comarca de Burgos a finesde la Edad Media, Valtadol id,. lunta de Casti l ta y León, ry87, p. 442-45o.Máximo Diago Hernando, Estructuros de poder en Soria a fines de la Edad Media,Vatladol id, lunta de Casti l la y León, 1993, p.703-779.Luis Suárez Fernández, Nobleza y monarquía. Puntos de vista sobre la historia políticacostel lana del sigloXV, z" ed., Val ladol id, Universidad de Valladol id, rgt5, p.rog-ttg.Adeline Rucquoi, < Privauté, Fortune et pol i t ique: la chute d'Átvaro de Luna >, dans DerFoll des Günstlings. Hofparteien in Europo vom 13. bis zum t7. Jahrhundert, dir. lanHirschbiegel et Werner Paravicini, Rezidenzenforschung, Jan Thorbecke Verlag, zoo4,p. z873to.Fernán Pérez de Guzmán, Generaciones y semblanzas, éd.. luan DomÍnguez Bordona,Madrid, Espasa -Calpe, 97 9, p. t6.Alfonso de Palencia, Tratado de la perfección del triunfo militar, éd. par Mario Penna,Pros¡stas castellanos del siglo XV,op. cit.,p.348l. < [...] respondió uno de los labradores,al qual la tormento del tiempo siniestro avia costreñido dexar la cibdad e fazer rust¡covida, e cuya civilidad otro t¡empo avia sido con loable aparato, ni aun entonces surusticidad seguía cosa de denuesto [...] >.f ohn M. Hill, < Universal vocabulario > de Alfonso de Palencia. Reg¡stto de vocesespañolas internos, Madrid, Real Academia Españota, 1957, p. t66 : < Rustico : Agricolarustico que labra el campo [...] Rust¡cus el que guarda la labranEa o lobra en el aldea yesta ende assi que rustico o es obrero o ombre no polido >>.

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Si la ville est I'habitat naturel de I'homme, elle I'est donc plus encore deceux qui en constituent l'élite, et qui seront capables de mettre á profit cettesocietas pour développer la courtoisie, I'amour des lettres, I'ingéniosité, maisaussi leurs ambitions politiques. Car la politique est bien évidemment liée,méme étymologiquement, á, la polis, á la ville. Le chevalier, parangon desvertus humaines, si l'on en croit Raymond Lulle, ne peut donc pas résiderentre les rustici, les n laboureurs ) ou, pire encore, au milieu des étenduessauvages. Celles-ci seront I'espace des vagabonds, des malfaiteurs, et de tousctux qui sont proches de I'animalité.

LA NOBLESSE

En Castille, comme dans tous les pays profondément romanisés, la noblessen'est pas liée au service des armes, mais á celui de la res publica, au service del'État. Lointains successeurs des membres des classes sénatoriale et équesrre-,ceux que le monarque associe au bon gouvernement du royaume sont nobles.Recourant á la métaphore du corps, laII' Partida composée sous l'égide du roiAlphonse X le Sage dans les années 1260-1280 précise que o les sages direntdu roi qu'il était la téte du royaume, pour les raisons qui sont exposées ci-dessus, et des hommes nobles du royaume qu'ils en étaient les membres, car,de la méme fagon que les membres rendent l'homme bien fait er beau et qu'ilse sert d'eux, les hommes honorables - omes honnados - rendent le royaumebien fait et beau, et aident le roi á le défendre et ) l'accroitre r, et ajoute quel'on est noble n par lignage ) ou ( par bonté u, c'est-á-dire en raison de bonnesmcurs et coutumes ; celui qui conjugue le lignage et la vertu est appelé )conseiller le roi".

Plus avant, lall' Partida s'intéresse au cas particulier de ceux qui prennentles armes pour servir le roi et défendre le royaume. Il s'agit des caballeros " queles anciens appellent défenseurs ), et, ajoutent les auteurs du texte, ( ceuxqui sont choisis pour devenir chevaliers sont plus honorables que les autresdéfenseurs , ; ils n'ont en effet pas le monopole du service des armes puisqu'enCastille tous les habitants des villes (la o ville ) comprenant le territoire qu'elleadministre) doivent étre armés, et participer i l'ost royal lorsqu ils en sontrequis. Le caballero doit donc &re hidalg et posséder la n gentillesse n qui

zz Alfonso X, Segunda Partido, Salamanca, Andrea de Portonariis, 1555, Titre lX, loi Vl,p.23 to. : < Cabega del reyno llamoron los sabios al Rey, por las razones que de suso sondichas, e a los omes nobles del reyno pusieron como miembros, ca bien osi como losmiembros fozen al ome apuesto e fermoso e se ayuda dellos, otrosi los omes honrradosfazen al reyno noble e apuesto e ayudan al Rey a defender lo, e acrescentor lo. e noblesson llamados en dos maneras. O por linoje o por bondad >.

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vient du lignage, du savoir, ou de la o bonté des courumes et des maniéres > ;I'hidalguía, précise ici le texte, n est la noblesse qui vient aux hommes enraison du lignage o23. Le n lignage n, la noblesse de sang, esr un processusd'accumulation des vertus de génération en génération. C'est pourquoi, écriraAlfonso de Cartagena vers r44t dans sa Doctrine des cheaaliers, nlef¡o dalgodoit se garder d'étre si infortuné que ce qui a prit naissance chez les autreset dont ils ont hérité ne diminue et ne prenne fin avec lui n, norammenr enépousant une uillana, une vilaine'a.

Mais il existe un troisiéme groupe qui sert les intéréts du royaume et aidele roi á remplir sa mission, celui des mairres et des docteurs en droit. Ceuxqui atteignent le degré de maitre, explique la II' Partida, ( onr le nom demaitres et de caualleros >, - sunt autem milites et domini legurn dicuntur, ditla traduction latine -, et lorsqu'ils ont enseigné le droit pendant vingt ans,n ils doivent étre honorés comme des comres n ; ils jouissent de privilégeshonorifiques, ainsi que d'exemptions fiscales et militaires'5.

Pour I'aider i gouverner le royaume que Dieu lui a confié, le roi s'entouredonc d'hommes nobles, versés en politique, en arr militaire ou en droit.Comparant le royaume á un verger dont les arbres seraient le peuple, laII' Partida indique que u le roi esr son seigneu¡ et les officiers du roi, quidoivent juger et doivent lui préter aide pour faire régner la justice, sontcomme ses laboureurs, les ricos hombres et les caballelrl sont comme dessoldats pour le défendre, et les lois et les chartes et le droit sonr comme lapalissade qui I'entoure. Et les juges et les magistrats en sonr comme les murs

Alfonso X, Segunda Partida..., op. cit.,Iitre )fil, p. 7o v.: << Pero con todo esso, a losque mas pertenesce son los cavalleros, a quien los ant¡guos dizen defensores >; loi | :K Otros¡ los que son escogidos para cavalleros son mas honrrados que todos los otrosdefensores > ; loi ll : K E esta gentileza avian en tres moneros. La una por linaje. La otrapor saber. La tercero por bondad de costumbres e de maneras >; loi lll : < Fidalguía,segund dixímos en la ley ante desto, es nobleza que viene a los omes por linoje >.Alfonso de Cartagena, Doctrinal de caballeros, Burgos, Fadrique Alemán, 1487, Paris, BnF,Rés. Om. 43,P 7 ; < Fidalguia segund diximos en la ley antes desta es nobleza que vienea los omes por linaje. E por ende deven mucho guardor los que han derecho en elloque non la doñen nin la menguen. Ca pues el linaje faze los omes. los omes asi comoherengia. Non deve querer el fijo dalgo que el aya de ser de tan molo ventura que lo queen los otros se comengo y heredaron mengue o se oceve en el. E esto ser¡a quondo elmenguase en lo que los otros ocrescentoron casondo con villana [...] >.Alfonso X, Segundo Partida..., op. c¡t.,Tite XXXI, Loi Vlll; < E por ende los Emperadoresque fizieron las leyes otorgaron privillejo a los maestros de las escuelas en quatromaneras. La una, co luego que son moestros han nome de maestros e de cavalleros, ellamaronlos Señores de leyes [...] e despues que ayan veynte años tenido escuelas de lasleyes deven aver honrra de condes [...] E por ende tenemos por bien que los maestrossobredichos ayon en todo nuestro señor¡o las honrras que de suso diximos, asi comola ley ontigua lo manda. [...] que deven ser quitos de pecho e non son tenidos de yr enhueste nin en covalgoda, nin de tomar o otro oficio, sin su plazer >.

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et les haies vives qui le protégent afin que personne ne puisse entrer pour yfaire du mal ,'6. Peu aprés, i la fin du xrrr" siécle, dans son Libre qui es deI'Ordre de cauallería, le majorquin Raymond Lulle fait également figurer le( gouvernement du royaume > et I'exercice des ofnces royaux parmi les vertusexigées du chevalier ; pour lui le lignage, c'est-)-dire le sang, conÍ¿re une sortede garantie i cet ensemble de qualités, mais n'est pas indispensable pour étrearmé chevalier'7. En 1444, dans sa réponse á la question posée par le marquisde Santillane sur I'origine de la chevalerie, Alfonso de Cartagena - quisignale qu'il na pas encore lule De militia de Leonardo Bruni - prend soind'indiquer qu'il existe une n chevalerie armée ) et une u chevalerie désarmée o,

la premiére étant celle de ceux qui défendent le royaume les armes á la main,tandis que les clercs etles letrador constituent la seconde'8.

La noblesse est donc une catégorie juridique qui est liée au service de l'État- la res publica -. La justification de la noblesse et des priviléges qui sontles siens - exemptions fiscales, tribunal spécial, priviléges honorifiques .-,repose généralement sur les services rendus au royaume plus que sur I'habiletéaux armes, méme si en r44r, dans Ie Miroir de uraie noblesse qu'il dédie auconnétable Áll

"to de Luna, Diego de Valera reconnait avec amertume que les

chevaliers de son temps ne cherchent qu á échapper ) I'imp6t, ) assujettir lares publica, et I accumuler des richesses méme au prix de I'exercice de métiersvils'e. Au milieu du xv" siécle, alors que les romans de chevalerie feurissentqui exaltent les prouesses militaires, i la question rhétorique u Quel est celuiqui atteint la plus haute gloire, celui qui par le travail des armes défend etaccroit la res publica ou celui qui, par la prudence et la diligence du savoir,travaillant également, I'accroit et la protége >, I'auteur répond finalement quela gloire et la dignité sont plus élevées chez celui qui n gouverne par prudenceet légale administration la chose publique ou l'accroit o que chez celui qui

Alfonso X, Segunda Partida..., op. cit.,Titre X, loi lll, p.3: n[...] e dize que el Reyno escomo huerto e el pueblo como arboles, e el Rey es señor della, e los officiales del Rey(que han de iuzgar e han de ser ayudadores a complir la justicia) son como labradores,los ricos omes e los cavalleros son como o soldadados para guardar la, e las leyes elos fueros e los derechos son como valladar que la cerca. E los juezes e justicias comoparedes e setos porque se amparen, que non entre ninguno a fazer daño >.Ramón Lult, Libre del Orde de cavayleria, éd. Marian Aguitó GSZq), Valencia, LibreríasParís-Valencia, r992.Alfonso de Cartagena, Respuesto o una quistion..., éd. Mario Penna, Pros¡stas castellanosdel siglo XV, op. c¡t.,p.239 : << Mas a semejanga de ella, extendiéndolo mós anchamente,otros algunos que por otras vios la deftenden suelen las escr¡pturas llamar cavalleros:como los sacerdotes que orando delante del trono divino, e los letrados alegandodelante los tribunales humanos trabajan por escapar o los que son en peligro >.Diego de Valera , Espejo de verdadera nobleza, éd. Mario Penna, Pro sistas castellanos delsiglo XV,op. c¡t. ,p. ro5-ro8.

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< la régit et la gouverne par la force des armes quoiqu'il I'agrandisse et la fassecroitre o3o.

A l" fin du Moyen Áge, prés de zo o/o de la population du royaume deCastille jouit ainsi, á des titres divers, de la condition nobiliaire. Dans lamesure oü les ressources de la monarchie proviennent á 9o % des impótsindirects pergus sur Ie commerce des marchandises, la multiplication desexemptions fiscales ne pose pas de problémes financiers á la Couronne. Enrevanche, de nombreux cas montrent que le service militaire était effectif etque l'on se devait de posséder les chevaux et les armes qui convenaient.

Au cours du xv'siécle, cependant, un nouveau concept de noblesse sedéveloppe, qui fait du temps, non plus l'élément nécessaire ) l'accumulationdes vertus au sein du lignage, mais le facteur essenriel d'une élimination,celle de la souillure de I'origine. Présent dans de nombreuses ceuvres, maissystématisé par Fernando de Mexía dans le Nobiliario uero qu'71rédige dansles années 477-1485 et publie en r49z i Séville, ce nouveau concep{, esrcelui de la pureté du sang. La noblesse y est ici donnée comme étant lapremiére des qualités divines : Dieu, en effet, est u noble, haut, profond,sage, fort, éternel, infini, tout-puissant, doux, pieux, saint, effrayant, bon,parfait et grand u. Lors de la Création, Dieu u créa toutes les choses bonneset l'homme noble n, et c'est pourquoi, en raison du u trés haut lignage áI'image duquel il fut formé et la perfection de la matiére en rant que mati¿re,et l'auteur de notre humanité [...] nous sommes généreux et nobles, ou rourhomme devrait l'étre ,3t. La noblesse est donc une qualité ontologique, elleest l'état de perfection de I'homme, qu'il possédait au paradis á l'image de soncréateur. Mais, continue Fernando de Mexía, u par le péché toute la noblessefut perdue >, et Adam o d'excellent et de resplendissant devint obscur, debeau laid, de parfait imparfait, et de léger pesant u. Lhomme se rapprocha deo lavilenie et l 'obscurité du péché,,3'.La noblesse a été perdue par le péchéoriginel, qui a souillé le sang des hommes.

Madrid, 8.N., Ms. tz.67z,P t96-zt4 << Prefagion en rrespuesta de una quistion fecho entredos cavalleros del reyno de Castíllo >.Fernando de Mexía, Nobil iar io vero, Sevi l la, Pedro Brun & Juan Genti [ , r49z,Lib. l , prot.:n[...] su fazedor que era y es dios noble, olto, profundo, sabio, fuerte, eterno, ynfrn¡to,omn¡potente, dulge, suove, piadoso, santo, espantoble, bueno, perfeto e grande >;cap. 54 : < [...] Ovieron comiengo de nuestro fazedor que crio todas las cosas buenas e alonbre noble, asi exgelente como es dicho en el comiengo deste nuestro libro [...] > ; < [...]el linaje muy alto a cuyo semejango fue plasmado e la perfegion de la materia en quontomateria, e el fabricador que conpuso nuestra humonidad [...] seamos generosos e nobleso lo deviera ser todo onbre [...]>.Fernando de Mexía, Nobiliario vero..., op. clf., Libro l, cap. 54 ; << Pero como dicho es por elpecado fue perdido toda la nobleza [...] >; prol.: < [...] Donde es agora de notor que diosbendito e eterno a adam crio en tanto perfegion e exgelenEia quanta dios pudo criallo

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Ainsi insérée dans le grand courant de pensée relatif au probléme du salut,qui secoue la Chrétienté entre r3 to et r 5 5o33, la réflexion sur la noblesse offreen Espagne des perspectives sociales intéressantes. De la méme fagon que lebaptéme efface le péché originel, I'obtention de la noblesse - par le servicede l'État, les armes ou les titres universitaires - permettra de surmonter lasouillure originelle. Mais, de la méme fagon aussi que le baptéme doit étresuivi d'une vie vertueuse et, au delá de la vie humaine, d'une période depurgatoire, la vraie noblesse, celle oü le sang est définitivement ( lavé u de lavilenie, oü il est désormais ( pur D, requiert au moins quatre générations, carle plébéien, le non-noble est ( sale de I'infamie du sang de la vilenie qui estla nuit, laquelle représente les ténébres de son lignage vil ,. Il convient o qu ilsorte de I'auberge oü il demeure, qui sont les coutumes de ses aieux, et se lavedans I'eau qu'est la propreté des vertus. Et il parviendra i l'aprés-midi, quiest l'ordre de la chevalerie ou les degrés de la science. Entreront alors dansles auberges de la noblesse ses descendants aprés que se soit couché le soleif",de son obscurité, ca¡ lorsque le soleil se couche, toutes les choses vaguent etse reposent. Ainsi l'homme plébéien et sans lignage, dans la nuit de l'oublide ses origines qui est I la quatriéme génération, se repose en se réjouissant áI'idée d'étre loin de ses bas et obscurs débuts r3a. C'est ainsi que u le plébéienou celui qui est soumis aux impóts ou le vilain ne peut étre ni lavé ni purgéau début de sa noblesse avant le quatriéme degré quand il devient hidatgo. Ace degré, il est lavé de la vilenie du lignage. Et ensuite, au dell du quatriéme

segund que lo pudo sofrir la mater¡a de que se formo, el qual por el pecado fue tornadode exgelente e rresplandegiente escuro, e de fermoso feo, e de perfeto ynperfeto, e deligero pesado [...]>..fean Delumeau, La Peur en Occ¡dent xtf-xvttte siécles, une cité assiégée, Paris, Fayard,ry78 ; Le Péché et la peur. La culpabilisation en Occident (xrrr"-xvrrr" siécles), Paris, Fayard,1983; Rassurer et protéger. Le sent¡ment de sécurité dans l'Occident d'autrefois,Paris,Fayard,989 i Une histoire du Paradis,t. \ Le lardin des délices, Paris, Fayard, tgg2,t.2,Mille ans de bonheur, Paris, Fayard, 1995.Fernando de MexÍa, Nobiliario vero..., op. cit., Lib.ll, conclusion 3: < Pues bien asi elonbre plebeo ensuziado de la vileza de sangre de villanía ques el noche, la qual es latiniebra de su vil linaje, conviene que salga de las alvergadas do mora, las quales sonlos costunbres de sus padres, e se lave en agua que son la linpiezo de los virtudes. Etornara en la tarde, la qual es la orden de cavalleria o grados de giengia. E entoneesentraron en las alvergadas de fidalguia sus desgendientes despues de puesto el sol desu obscuridad, que asi como puesto el sol todas las cosos fuelgan e descansan. Asi elonbre plebeo e obscuro e sin linaje, en la noche de olvidanEa de su pringipio que es en laquorto genero1ion, desconso delectandose a gerca de la membranga de ser alongado desu baxo e obscuro comienEo >.

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degré, ses descendants seront nobles en raison de leur ascendance et deI'ancienneté de leur lignage ,35.

La noblesse ontologique peut donc étre récupérée á la suite d'un o cheminde perfection ) au cours duquel le sang sera o purifié u de la souillure du péchéoriginel. Le noble est un chrétien qui a u lavé ) son sang, qui a rourné le dosau péché, qui a choisi le salut. En revanche, le non-noble estun uillano, c'est-á-dire un étre vil, semblable aux barbares et aux animaux, un pécheur nonrepenti, ou un étre qui est indélébilement stigmatisé par la présence de sangnon chrétien dans ses veines36.

Devenue un enjeu de salut, méme si ses voies d'accés restent les mémes etque seul le roi peut la conferer ou entériner, la noblesse échappe au domainedes catégories purement sociales pour devenir l'un des plus puissants ressortsde I'imaginaire castillan. La course i Ia noblesse, vraie ou fausse mais quiprouve que I'on est un bon chrétien et un bon Espagnol, est le fait aussibien des individus que des institutions3T. Des preuves de u pureté de sang ,,

c'est-á-dire de noblesse, sont exigées par les colléges universitaires, les ordresmilitaires, les chapitres des cathédrales dés la seconde moitié du xv" siécle,tandis que les choniqueurs glorifient, comme en 1493,la pureté du sang duroi, dans la mesure

oü Ie lignage des rois de Castille, dont descend Votre Altesse des deux c6tés,est trés excellent car il provient du sang trés haut et clair des rois wisigothsrenommés [...] et ainsi est considérée I'excellence de votre claire ascendance,son ancienneté si grande, et sa succession ininterrompue, un roi venant endroite ligne d'un autre de son propre lignage jusqu') présent depuis prés demille ans, sans que durant tout ce temps cette royale succession n'ait connu

Fernando de Mexía, Nobiliario vero..., op. cit., Lib. ll, cap.23 : <Asi el plebeo o pecheroo villano no se puede ser linpio ni purgado por vio del pringipio de su nobleza fasto elquarto grado en el qual es fidalgo. En el qual grodo es alinpiodo de la vileza del linaje. Eluego, traspasando al otro quarto grado, sus desgendentes seran nobles por generagione antiguedad de linaje >.Adeline Rucquoi, < Étre nobte en Espagne aux xtve-xvte siécles >, dans Nobilitas. Funktionund Reprdsentation des Adels in Alteuropo, d¡r. Otto Gerhard Oexle et Werner Paravicini,Gót t ingen, Vandenhoeck & Ruprecht , 1997, p .273-z9B; id . , <Manc i l la y l imp ieza : taobsesión por e[ pecado en Castilla a fines del siglo XV >, dans Os "últimos fins" na culturoibérica dos séculos XV-XVIll (Porto, r9-zr outubre 1995), Porto, Instituto de CulturaPortuguesa, D97, p.t t j -735i id., < Nobtesse des conversos ?>, dans <Qu'un sangimpur... >: les conversos et le pouvoir en Espagne d la fin du Moyen Áge, dir. jeanneBattesti Pelegrin, Aix-en-Provence, Université, t997, p. 89-to8.Jean-Pierre Dedieu, L'Administration de la foi. L'inquisition d Toléde et les vieux chrét¡ens,xvte-xvue siécles, Madrid, Casa de Velázquez, 1989.

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de changement, sans que soit intervenu en elle aucun roi d'une générationétrangére ou difftrente, ce qui se trouve chez trés peu de rois chrétiens38.

Pour leur part, les villes rivalisent á I'heure d'obtenir les titres de o trés noble n

ou de ( noble o cité, de n noble o ou de < més noble , ville, se dotent de blasonset d'armes, ainsi que d'histoires qui sont en fait de véritables généalogiesattestant leur ancienneté et leurs vertus, c'est-i-dire leur noblesse3e.

La noblesse n'est donc pas, en Castille, une caste fermée qui pourrait setarguer d'un u sang bleu o, c'est-i-dire d'une difftrence radicale et congénitalephr rapport au reste de la sociétéao. La noblesse est un mélange de vertuspubliques - le service dela res publica - et privées - le lignage, que celui-ciconsiste en I'accumulation des qualités ou en la purification du sang -. Elleest un concept i la fois politique et moral, le sumrnum bonum auquel touthomme doit aspirer. Elle se caractérise par un double sens de l'honneu¡ celuique conÍérent les titres, dignités et fonctions exercées -l'bonor - et celui quiprovient des qualités et vertus personnelles - la honra -, dont témoigne lr'renommée ou bonne réputation -lafama -.

LES NOBLES ET LA VILLE

La ville, communauté politique, est donc le lieu oü la noblesse vit et agit,qu elle provienne de hautes familles aristocratiques possédant de vasteso états , - estados - et exergant d'importantes charges i la cour, ou des lignagesurbains traditionnels. Il n'y a pas de u bourgeoisie o dans les villes castillanes.Le mot, ou son équivalent, n ont jamais été inventés. Lélite urbaine est noble.Elle est noble parce qu'elle dirige, gouverne la ville, parce qu'elle la défend

Breve compendio de los crónicas de los Reyes de España, BnF, Paris, Ms. Esp, no, Pr :< [...] Et como las aguas quanto de mas alto lugar progeden mas suavidat troen y quantode mos lexos y porlongado pringipio vienen tonta mas purificagion regiben, asy el linajede los reyes de Castilla, de que vuestra olteza viene por omos respetos, es muy egelenteca proEede de lo muy alta e clara sangre de los famosos reyes godos [...] pues no menos seconsydera la eEelengia de vuestra clara progenia, s¡ ont¡guedat tan alongada et contynosubgesyon, víniendo por reto lineo un rey de otro de su propio linaje o oy qerca de millaños, syn regebir en tanto tyenpo esta real sugesion ninguna mudan6a, ni entrevenir enella rey de pelegrina ni extraña generagion, lo que en muy pocos de los reyes xristianosse hal la [ . . . ]>.Adeline Rucquoi, < Des villes nobles pour [e roi >, dans Realidad e imágenes del poder.España a f ines de la Edad Media,di.Adeline Rucquoi, Valtadol id, Ámbito, 1988, p. r95-zt4 ; id., << Les villes d'Espagne : de l'histoire á la généalogie >>, dans Memoria, co mmunitas,civitas. Mémoire et conscience urbaines en Occident ñ Ia fin du Moyen Age, dir. HannoBrand, Pierre Monnet et Mart¡at Staub, Stuttgart, . lan Thorbecke Verlag, col[ . < Beihefte derFrancia >, 2oo3, p. r45-t66.André Devyver, Le Sang épuré. Les préjugés de race chez les gentilshommes frangais del 'Ancien Régime ft56o-t 7zo), Bruxel les, Éd¡t ions de l 'université de BruxelLes, 1973.

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par les armes ou par les lettresa'. Cette oligarchie noble, composée d'hidalgosqui sont aussi des caballeros, provient donc de groupes divers, marchands,juristes, membres de I'administration royale, familiers ou clients des noblestitrés qui résident dans I'agglomération et contrólent ainsi en partie songouvernement.

Ca¡ si le roi s'entoure d'hommes nobles pour gouverner son royaume, á sontour ce < service u anoblit, conÍére la noblesse i ceux qui s'en acquittent. Ausein des villes, les magistrats qui les gouvernent, ceux qui les représentenr aux

ú Cortes, ou encore ceux qui y exercent la justice, le font au nom du roi. Lesréformes d'AlphonseX au milieu du,xrrr'siécle ont en effet transformé lesmembres élus ou cooptés des conseils municipaux, les concejos,en représentantsdu pouvoir royal. Méme s'il n existe pas de cérémonie particuliére d'investiture,tout regidor - ou ueinticuatro dans les villes d'Andalousie - exerce sa chargeau nom du roi. Les élites politiques municipales sonr donc associées par lui

jt6 au service de Ia res publica, comme les juristes qui la défendenr par le sayoir.Le service dela res public¿ est I'une des voies d'accés á la noblesse, aussi bien áValladolid qu'á Pontevedra, en Galicea'.

Suivant les époques et les régions, les membres de l'oligarchie privilégientd'ailleurs le titre de caballero, qui est doté au xv'siécle d'une auréoleromantique et renvoie á un mythique u ordre de chevalerie o, ou la qualitéd'hidalgo qui privilégie I'ancienneté et Ia pureté du sang. Selon le recensementeffectué en r384 ) Séville, les caballeros constituaient alors 3o 7o des inscrits,et sous ce terme générique se retrouvaient les nobles dtrés, les officiersmunicipaux, Ies changeurs et jusqu'á des raverniers; un siécle plus tard, lesrecensements précisent l'origine des caballeroJ et disdnguenr les bidalgos, Iescaballeros de gracia - qui ont bénéficié d'un privilége royal - er les caballerosde cuantía - dont la richesse se manifeste par le paiement d'une ( quanriré )élevée -a3. Dés 14o6, i Murcie, pour se distinguer du reste de la population,

' et notamment de leurs concitoyens qui servaient á cheval et se targuaientdu titre de caballeros, les hidalgos exigérent de l'écrivain-notaire municipal

Adeline Rucquoi, < Las ol igarquías urbanas y las primeras burguesías en Casti l la >, dans ElTratado de Tordesillas y su época. Congreso lnternacional de Historia, dir. Luis AntonioRibot García, Adotfo Carrasco Martínez, LuÍs Adáo da Fonseca, Vatladotid, Junta de Casti l lay León, ry95,3 vol. , t . 1,p.345369.Adeline Rucquoi, < Noblesse urbaine en Casti t le (xl t t"-xvu siécles) >, dans Actes du to6"Congr¿s nat¡onol des soc¡étés savantes, Paris, CTHS, 7984, p.37-47. losé Armas Castro,Pontevedra en los siglos Xll a XV. Configuroción y desarrollo de una villa morinera en laGalicia medieval, Pontevedra, Fundación Pedro Barrié de la Maza conde de Fenosa, 1992,p .233 '237.Antonio Collantes de Terán, Sevilla en la bajo Edad Media. La ciudad y sus hombres,Sevi l la, Ayuntamiento, 1984, p. 224-233.

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l'établissement d'une liste dans le registre ; en r4r8, I'inscription dans chaque

paroisse des n caballeros, écuyers, dames et damoiselles, hidalgos notoires,

habitants et résidents de la trés noble ville de Murcie ) marqua la fermeture

de l 'élite polit iqueaa.Les textes montrent bien qu il existe une équivalence entre le regidor et le

caballero, entre le notaire de laville et l'écuyer, c'est-i-dire entre les membres

des oligarchies urbaines qui exercent des offices publics, les possesseurs de

titres universitaires et les nobles. En r4z5,le chapitre de la cathédrale deItlencia obtint de son évéque, Gutierre de Toledo, que füt modifié le statutqui voulait que tout nouveau chanoine 4it d'abord servi deux ans commeprébendier; les docteurs, licenciés et bacheliers en droit canon et droit civil,les maitres et licenciés en théologie, ainsi que les membres des familles nobles

furent désormais dispensés de cette obligationas. A Valladolid, oü deux

Iignages de cinq < maisons, chacun se répartissaient les offices, en 1438 la< maison , des Corrales du lignage de Reoyo se dota d'ordonnances. Celles-ci.,précisent que ( toutes et n'importe quelles personnes, les docteurs comme leslicenciés, les caballeros, écuyers et bacheliers de quelque érat, condirion ouprééminence qui désireraient entrer désormais dans ladite casa des Corrales ,

devraient offrir aux autres membres un banquet n de bonnes poules o ; enr526, de nouvelles ordonnances interdisent que les charges de procureurs aux

Cortes soient confiées n ) quelque personne que ce soit et quelle que soitson ancienneté, qui ne soit caballero ou letrado ou personne d'honneur, etqui ne soit tenue et estimée pour telle ,. De fait, dans toutes les u maisons u

les nouveaux membres étaient obligés de u préter I'hommage , au lignage- le pleito homenaje -, rituel qui excluait naturellement les non-noblesa6.

Denis Menf ot, < Hidalguía et caballería á Murcie : Contours sociaux d'une aristocratieurbaine du xllle au xve siécle >. dans les Sociétés urbaines en France méridionales eten Péninsule ibérique au Moyen Age. Actes du colloque de Pau, zt-zj septembrery88, Paris, CNRS, r99r, p.219-221 ; id., << La classe dominante des vit les de I 'Occidentméditerranéen au seuil de la modernité >, dans t49o : en el umbral de la modernidod.El Mediterrdneo europeo y los ciudades en el trdnsito de los siglosXV-XVI, dir.)oséRamón Hinojosa Montatvo, Jesús Pradells Nadat, Vatencia, Consel[ Valenciá de Cultura -

G e neralitat Vale nciana, t994, p. 181- 203.Archives de la Cathédrale de Palencia (désormais : A.C.P. ), Armario lV, tegalo r, P ro vo-rz.Le compromis, signé le z6 février 425, fut rat i f ié par une bul le du pape Mart in V daté deRome, le rr novembre r4z5 6.C.P., Armario lV, legaio 6).León de Corral, Don Diego de Corral y Arellono y los Conales de Vallodolid, Madrid,1905, p. 72 el76-77.Le pleito homenoje f igure parmi les condit ions d'admission requisesdans les Ordonnances de la Coso d'Esteban García, du l ignage de Reoyo, en r43r (NarcisoAlonso Cortés, < Ordenanzas de la Casa de Esteban García en t43t >, Revista de estudioshistóricos,191B, p. 8-rz) ; i l est également exigé en 1510 par les Ordonnances des cinq< maisons > du lignage de Tovar (Adeline Rucquoi, Volladolid au Moyen Age, Paris,Publisud, 199), p. 75t et 756).

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A Bu.gos, au xf siécle, la confrérie des chevaliers de Saint-Jacques, qui seconsidérait comme un o ordre de chevalerie u, réservait l'entrée en son sein átrois catégories d'individus : ceux qui < tiennenr ou onr tenu les offices de lajustice et du gouvernement de cette ville ,, ceux qui n possédent des vassaux o,et ceux qui ont le titre de docteur ou de licenciéa7.

Paradigme de toutes les vertus civiques et chrétiennes, la noblesse s'imposedonc comme le seul idéal i I'horizon des Castillans des xur'-xvr" siécles.A I'imitation de I'aristocratie titrée qui réside en ville, l'élite urbaine vit

¿ n noblement u, c'est-)-dire vouée au service de l'État. Elle posséde deluxueuses demeures, entretient de , nombreux domestiques, fonde deschapelles, patronne et enrichit des églises, participe aux débats littéraires etaux joutes poétiques, organise des fétes, investit dans la terre er acquiert desrentes gagées par la Couronne, les jurosas. Noblesse titrée et élite urbaine,tout en possédant des seigneuries rurales, tirent profit du milieu urbainae,et cherchent I en diriger le destin : la haute noblesse place certains da, sesmembres dans les conseils des villes, aux c6tés des magistrats traditionnels,tandis que les patriciens acquiérent des domaines fonciers et envoient leursenfants étudier le droit i. I'université. Le grand prélat Rodrigo Sánchez deArévalo Q4o4-r47o), fils ainé d'une famille de regidores d'Arévalo, devenutót orphelin, fut ainsi envoyé par ses parenrs i Salamanque pour y étudier ledroit avant de choisir la carriére ecclésiastique5o. Un méme clivage se rerrouvedans l'Église, oü évéques et chanoines proviennent des milieux nobles alorsque le bas clergé est recruté parmi les non-nobles (il n existe pas d'équivalentespagnol á < roturier u). Comme en Italie, élites aristocrariques et élites

Faustino Menéndez PidaI y Navascués (édJ, El Libro de la cofradia de Santiago de Burgos,édit ion fac-similé, Bi lbao, La Gran Enciclopedia Vasca, tg77, ci tat ion par Hilario CasadoAlonso, < Oligarquía urbana, comercio internac¡onaI y poder real: Burgos a f ines de laEdad Media >, dans Adeline Rucquoi (di.), Realidod e imógenes del poder. España o finesde la Edod Med¡o, Vatladotid, Ámbito, 1988, p. 34o.Hilario Casado Alonso, < Oligarquía urbana, comercio internacional y poder real : Burgos afines de ta Edad Media >,dans Realidad e imógenes del poder. España a fines de la EdadMedia, op. ci t . , p.325-347; id., < Les habitants de Burgos et leurs propriétés rurales >,dans les Sociétés urbaines en Fronce méridíonales et en Péninsule ibériaue au MovenAge..., op. cit., p. 295-3to.. lean-Pierre Molénat, < La noblesse tolédane du xv" siécle et ses origines ), dans ¿esSociétés urbaines en Fronce méridionale et en Péninsule ibérique ou Moyen Age...,op. cit.,p. zo3-2t8.Rodrigo Sánchez de Arévalo, Speculum humanae yitae, Rome, Sweynheim et Pannartz,1468. Adeline Rucquoi, < Rodrigo Sánchez de Arévalo y su madre >, Temas Medievoles, 6,1996, p.239-257.

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urbaines tendent á se fondre en un groupe homogéne quant i son mode devie et ses idéaux5t.

Tiés nombreux sont donc, dans les villes, ceux qui jouissent de lacondition nobiliaire. Car celle-ci n est pas incompatible avec I'exerciced'un métier, pourvu qu il ne soit ni manuel ni < vil ,. Dans son Nobiliariouero, Fernando de Mexía, qui était ueinticuato de Jaén, c'est-á-dire I'un desvingt-quatre regidores de sa ville, distingue en effet trois catégories de non-nobles, les u plébéiens ), que sont o les marchands, les artisans - ofgiales -,

les laboureurs et leurs semblables ,, les u obscurs u, c'est-).-dire < ceux qui nesont pas notoirement marchands, ou artisans ou hidalgos, mais qui se sontenrichis et que I'on appelle des citadins honorables, qui n'usent plus deleurs propres mains de la bassesse desdites choses o, et enfin les u vils , ouo vilains > qui exercent des offices n vils n, comme I'office du crieur public,des vendeurs d'eau, des journaliers, et de ceux qui nettoient des lieux sales,sortent les cadavres d'animaux, ou se louent pour faire un travail manuel,-,tel que le terrassement ou la moisson5'. Des artisans, ( gens plébéiens etd'obscur lignage ,, Fernando de Mexía se moque d'ailleurs, disant qu'ils sedotent d'armes n de n'importe quelle couleut sans tenir compte de s'il s'agitd'une couleur ou d'un métal >, sur lesquelles ils mettent o les instruments desmétiers dont ils sont les artisans, le savetier plagant dans un écu jaune uneforme d'argent, ou un couteau, ou un chausse-pied, ou tout ensemble o, cequi prouve bien o I'obscurité ou bassesse de lignage , de tels plébéiens53.

Maria Serena Mazzi et Sergio Raveggi , Gli Uomini e le cose nelle compagne fiorentinedel Quattrocento, Firenze, Otschki, 1983. Phi l ippe lansen, ( Él i tes urbaines, service de lacommune et processus d'aristocrat¡sation : le cas de Macerata aux xtve-xve siécles >r, dansLes Élites urbaines au Moyen Áge, XXVIIe congrés de la SHMES (Rome, mai ry96), Rome/Paris, École frangaise de Rome/Publications de [a Sorbonne, 1997,p. zor-226. Jean-ClaudeHocquet, < Solidari tés famil iales et sol idari tés marchandes á Venise au xrve siécte ), dans; h ; ) ^ ^ ^ - ^ - -t u r u . , P . z z t - z J J .

Fernando de Mexía, Nobiliario vero..., op. cit., Lib. lll, cap. r : <[...] Por ques agoro desaber que plebeo es dirivado de pueblo [...] estos son los mercaderes, los ofigiales ylos labradores y la otra gente tal. Obscuro es entendido aquel o aquellos que no sonconosgida mente mercaderes, ni ofigioles, ni fidalgos, mas aquellosm que son venidoso ser rricos, los quales llomamos onbres onrrodos gibdadanos, que yo no uson con suspropias manos de la baxeza de las dichas cosas. Villano propio mente es dicho aquelque usa o m¡n¡stra olgund vil ofigio por sus propias manos, osi como pregon, o soyon, olinpiador de suzios lugares, o los que tiran el bol o la xavega, los que sacan las bestiasmuertas que dizen de la polanca, en fin todos aquellos que se alquilan pora qual quierministerio corporal, agora poro covor, agora poro segar, agora para otro qualquier ofigiovil, asi mismo lo son los aguodores y aEacanes y todos los jornaleros [...]>.Fernando de Mexía, Nobiliario vero..., op. cif., Lib. lll, cap. r : <[...] lo primera es aquellade que usan en muchos partes la gente plebea o de obscuro linaje, mayor mente losofigiales, la qual no es de alguna nobleza por alguno rrespetos [...] la qual monera esque cada ofigial o muchos de los ofigiales, cada uno faze pintar el escudo de color

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Néanmoins, en dépit des restrictions apportées par Fernando de Mexía,

certains de ces artisans et Ia majeure partie des grands marchands jouissent despriviléges attachés ir la condition nobiliaire. C'est le cas des grands marchandsde Burgos qui dominent la vie politique de leur ville et se retrouvent au seinde confréries spécifiques, comme celle des chevaliers de Saint-Jacques54, d'unepartie du patriciat sévillan qui s'adonne au commerce maritime5s, ou encoredes Montenegro, Arias de Aldán et autres qui, en compagnie de chanoines

ou de fréres des monastéres de la région de Pontevedra, maitrisent et la vie* politique et l'économie d'échanges de leur ville56. A Valladolid, le riche

marchand Rodrigo de la Cone, fils d'un joaillier d'origine brabangonne, fitreconnaitre son hidalguía en r488 ; I'un de ses fils entra au conseil du roi57.

Aristocrates titrés et magistrats urbains ne sont donc pas les seuls n nobles ,

dans les villes castillanes, car la condition nobiliaire attachée au service dela res publica ne se perd pas. Les témoins qui, á la fin du xv" siécle, vinrentdéposer en faveur de la noblesse du fabricant de chausses Antón Yelázqlezsignalérent que son grand-pére, Pedro Alfonso, avait occupé la charge detasador de Valladolid o qui était un office qui n était donné qu á des membresdes lignages de ladite ville, comme l'était ledit Pedro Alfonso ) et, bienqu'artisan ou commergant, et petit-fils d'un sellier, Antón Yelázguez obtint

une sentence qui reconnaissait sa qualité de noble58. Juan de Portillo, dansle méme but, produisit des témoins qui afirmérent que son grand-pére, lebachelier Fernand Gongales de Aguilar, avait été I'un des quatre regidoresperpétuels désignés par les lignages de la ville de Portillo, jusqu'au jour oü ilfut tué alors qu'il était corregido¡ dans le Pays Basque dans les années r 44o5e .Lexercice d'une magistrature municipale figure également parmi les preuvesde noblesse exigées lors de I'entrée dans I'un des ordres militaires. En 1527,le dossier d'entrée de Cristóbal de León dans I'ordre de Santiago fait état du

qualquiera, no acatando si ha de ser color o metal, ni faziendo distingion ni division entrelos colores e metales, mas color sobre color e metal sobre metal pintan a su plazer en eldicho escudos darmas los ynstrumentos de los ofiqios de que son ofigiales, el gapateroponiendo en el escudo amarillo una forma de plata o una cuchílla o un calqador o todoiuntamente [. . . ]>Hilario Casado Alonso, a Oligarquía urbana, comercio internacional y poder real : Burgos afines de la Edad Media >, dans Realidad e imógenes del poder. España a fines de la EdadMedia, op. cit.Antonio Collantes de Terán, Sevillo en la baja Edad Media. La ciudad y sus hombres,op. c¡t. , p.29o.José Armas Castro, Pontevedra en los siglos Xll o XV..., op. cit., p.22o-23r.Adetine Rucquo i, Va lladoli d a u Moye n Áge.., o p. cit., p. 3t63t7.Archivo de [a Real Chancit lerÍa de Vatladol id (désormais : A.R.C.V.), Ejecutorias, leg. 49,octubre r492.A.R.C.V., Ejecutorias, [eg. 52, febrero 1493.

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fait que son pére était, ou avait été, alcalde de la ville de Medina del Campo ;I'année suivante, le regidor Nfonso de Montemayor, qui vint témoigner de lanoblesse du jeune Diego Osorio y Herrera, rappela que son grand-pére, Juande Herrera, avait été regidor de Valladolid6".

La noblesse peut également étre acquise par le service des armes, et le faitde servir i cheval est ) son tour une preuve de noblesse. Lorsqu'á la fin duxv" siécle, l'écrivain-notaire de Valladolid, Juan Pérez de Otalora, originaired'Azpeitia dans le Pays basque, voulut faire reconnaitre sa condition devantles tribunaux, ses témoins mentionn¿rent le fait que son pére et son grand-pére avaient servi le roi dans ses campagnes militaires et que son pére avait( tenu le báton de I'alcaldía de ladite ville [Azpeitia] et I'avait renu deux anset avait aussi été regidor de la ville o6'. Car le roi n'hésite pas i faire appel auxhabitants des villes, ce qui permir au regidor de Burgos Fernando de la Torre,en r4t 5, d'écrire au roi Henri IV de Castille qu il avait brillamment défenduI'excellence de sa patrie face á un chevalier frangais, en évoquant en particulier..,le fait qu'en quelques heures le roi pouvait lever, n dans la seule ville de Sévilleou celle de Cordoue ), trois mille hommes d'armes á pied et á cheval, < etdans beaucoup d'autres villes et terres diverses, plus ou moins selon leur tailleet la région oü elles se trouvaient u6t.

Lascension sociale reste en outre relativement facile : de hauts faits lorsdes campagnes militaires, notamment contre les musulmans jusqu'á la prisede Grenade, de la conquéte de I'Amérique ensuite, ou les services rendus auroi conftrent la condition nobiliaire, au méme titre que I'obtention de titresuniversitaires ou l'exercice d'une magistrature urbaine. En r395, Gonzalo dela Torre, originaire de Madrid et qui vivait non loin de li á Barajas, produisiten faveur de sa qualité de noble des témoins qui rappelérenr que son pére,Diego, avait lutté aux c6tés du futur Henri II de Castille ) Montiel conrrePierre I" le Cruel, et avait fait la guerre en Aragon63. Le fils de Juan Ruiz,qui avait été armé chevalier dans la Vega de Grenade pour ses exploits face áI'ennemi, obtint en r4r j du roi Jean II la reconnaissance de ce privilége afinque lui-méme et ses descendants u i tout jamais soient tenus et notoirementconnus comme des hommes nobles - omes fiosdalgo notorios - ) et, commetels, puissent relever ou lancer des défis, préter l'hommage et le recevoir,et jouir de I'ensemble des priviléges des nobles du royaume ; en 1489, les

6o Madrid, Archivo Histórico Nacional (désormais: A.H.N.), Ordenes Mil i tares, Santiago,expediente 444o, année 7527, et expediente 6o77, année 1.5z8.

61 A.R.C.V., Ejecutorias, leg. 5r, diciembre t492.6z Ma Jesús Díez Garretas, La obra literoria de Fernando de la Torre,Vattadolid, Universidad

de Valtadotid, 198j, p. 347.63 A.R.C.V., Caja r, no r, diciembre 1395.

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auües fils de Juan Ruiz et leurs enfants regurent confirmation du privilége6a.

Les témoins aux procés en reconnais sance d' hidalguía soutenus devant la

chancellerie de Valladolid á la fin du siécle témoignent de l'importance du

service militaire : le grand-pére de Gonzalo de Hevia avait aussi servi le roi

Jean II u dans la Vega de Grenade ) tandis que son pére avait participé au

siége de Zamora contre le roi du Portugal ; le pére et le grand-pére de Pedro

Gonzalez de Escobar participaient á toutes les revues des omes fiosdalgo et

allaient en guerre avec armes et chevaux; le grand-pére de l'écrivain-notaire' Juan Pérez de Otalora avait servi I'infant Ferdinand lors de la prise de la ville

d'Antequera en r4ro et son pére coqrmandait la force militaire envoyée par

la ville d'Azpeitia lors du siége du cháteau de Burgos ; le grand-pére d'Alonso

A¡ias avait participé, avec le roi Jean II de Castille, á. u une guerre contre le roi

de Navarre r65.

Le roi peut aussi conférer la condition nobiliaire á ceux qui, dans un moment

t22 critique, lui ont rendu service. En aoüt r466,Henri IV de Castille accorda i

8 5 habitants de Valladolid qui avaient pris son parti contre la haute noblesse

révoltée un privilége d'hidalguía; des selliers, des fabricants de chapeaux ou

de ceintures, des tisserands, des charretiers, des bouchers et poissonniers, deux

écrivains, un joueur de trompette, un peintre, des jardiniers, des armuriers et

un chirurgien regurent ainsi le titre, les exemptions fiscales et les priviléges

de la noblesse66. Parmi les témoins produits en 1486 par Gonzalo de Hevia,

habitant de Zamora, figurait un certain Lope Rodríguez n charpentier,habitant et résidant á.Zamora, homme noble - fiodalgo - ,ot . Le fabricant de

chausses Antón Yelazquez de Valladolid, petit-fils d'un selliet avait obtenu en

r49zla reconnaissance de son bidalguía.Bien évidemment, au sein de la noblesse, un abime sépare les Mendoza,

mayordomos du roi, marquis de Santillane et ducs de I'Infantado, du

charpentie¡ du sellier ou des tisserands qui, juridiquement, sont aussi desnobles. Le concept de u pureté du sang ) permet notamment de distinguer le( nouveau noble , - encore n sale de I'infamie du sang de la vilenie u, selonles mots de Fernando de Mexía - de l'ancien noble, comme on distingue

aussi le ( nouveau chrétien n du o vieux chrétien r. La richesse, compagne

indispensable de la noblesse dans la mesure oü elle prévient la déchéance, est

un autre facteur de distinction.

Madrid, A.H.N., Ctero, Valtadol id, San Benito, legaio 772t, s.n.A.R.C.V., Ejecutorias, marzo t486 (Gonzalo de Hevia), marzo 1488 (Pedro González deEscobar), diciembre t49z {uan Pérez de Otalora), enero 1493 (Alonso Arias).A.R.C.V., Ejecutorias, octubre 1492 et marzo 1486; Archivo General de Simancas, Mercedesy Privi legios, Iegaio 4,no 37.A.R.C.V., caja z, no z, marzo t486.

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Valeur morale tout autant que sociale, la noblesse est I'idéal auquel aspire,ou doit aspirer tout Castillan, sous peine d'étre considéré comme un pécheurobstiné et de se retrouver relégué au rang des u vils o, des o obscurs o, desuillanos, proches de I'animalité et de la terre. Pour Fernando de Mexía, I'undes effets du péché originel avait été de rendre Adam u de léger pesant ). ( Ilfaut noter n, dit-il, u que les choses subtiles sont plus dignes et plus nobles quece qui est épais, et ce qui est clairsemé plus que ce qui est touffu. Cela vientdu fait que ce qui est subtil monte au ciel et s'éléve. Et du ciel ce qui descendtdrnbe épaissi ,. C'est la raison pour laquelle le noble ne peut manger quedes aliments subtils, qui lui créeront de sgbtiles humeurs, et éléveront sonentendement, contribuant ). < purifier et á générer un sang plus propre et pluspur ut8.Or ce n'est qu'en ville que cet idéal peut étre atteint, car c'est lá quese trouvent autant les u bonnes coutumes n que les u aliments subtils r.

Qu'ils revendiquent le titre d'hidalgos en insistant sur I'ancienneté de leurlignage et la pureté de leur sang, ou celui de caballeros qui renvoie aux mérites.-,personnels et á I'image romantique du o chevalier r, les habitants des villescastillanes sont ou se veulent nobles, tout autant qu'ils s'enorgueillissent dutitre de o noble ville , ou de u trés noble ville u qu arbore leur patrie. Seulela ville peut leur fournir les moyens d'accéder i cette condition - par leservice public, les lettres, l'entrée en clientéle, le service militaire - et de s'ymaintenir, et seule la ville leur offre un cadre adéquat pour manifesrer auxyeux du monde leur qualité. De méme que la ville est I'habitat naturel dela communauté des hommes, la noblesse est leur état primitif celui qu'ilsretrouvent gráce á un u chemin de perfection > qui inclut le service de la respublica.lJne communauté politique parfaite, la ville, ne devrait étre composéeque d'hommes parfaits, c'est-á-dire nobles.

Fernando de Mexia, Nobíliario vero..., op. cit., Prólogo del Libro | ; B.N. Madrid, ms. 3311,P 97vo-98: < [...] es de notor que toda cosa sotyl es mas digno e mas noble que lo grueso,e lo ralo mas que lo espeso. Esto paresQe asy que lo sotyl sube al gielo, va por ysando.E del gielo desgiende e cae espesado [...] asy mismo, delicados, sotyles e dyrigiblesmanjares trae natural e aun heredytoria mente mas sotyles umores, lo qual es cabsa deasotalisar el yngenio a elevar el entendimiento, e a puryfycar, e a generor mas lynpia emas pura sangre [...] >.

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