bulletin estudiantin - university of manitoba · 2019. 7. 18. · dialogue d’enfance de: heidi...
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D A N S C E
R E C U E I L :
Récits d’enfance
(Hommage à
Nathalie Sarraute)
2
Profil des
étudiants d’études
supérieures et de
premier cycle
9
Textes de la soirée
théâtrale
11
Création littéraire
17
Bulletin estudiantin
F É V R I E R 2 0 1 1
V O L U M E 1
U N I V E R S I T É D U M A N I T O B A
Fête du Département de Français,
Espagnol et Italien
Le 2 décembre 2010
Photos approuvées par le Directeur du Département de Français, Espagnol et
Italien, Professeur Enrique Fernandez.
Bulletin édité par Natalie
LaFleur, textes rédigés par
les étudiants du Départe-
ment de Français .
Dialogue d’enfance
De: Heidi Groenheide
- Alors, tu vas vraiment faire ça? « Écrire un pastiche
d’Enfance »… Comme ces mots te font peur, tu n’es
pas une « vraie » écrivaine. Mais c’est bien cela que tu
tentes de faire, tu veux récrire « l’enfance ».
- Oui, c’est vrai, il m’était toujours séduisant d’écrire
et bien sûr que même Nathalie Sarraute, à un moment
donné, n’était pas une « vraie » écrivaine…
- C’est peut-être… est-ce que ce n’est pas possible…
que tu tentes d’éviter d’écrire une autre dissertation
critique… c’est peut-être que tu ne te sens pas en me-
sure d’écrire quelque chose de plus rigoureux…
- Non, je ne crois pas… en fait, je trouve que d’habitu-
de les projets plus créatifs sont souvent les plus « ri-
goureux »…
- Surtout si tu as des difficultés « d’évoquer tes souve-
nirs »… quoi faire donc?
- Arrête déjà…
- Il faut le demander… comment écrire un pastiche «
d’enfance » si tu ne réussis pas à « évoquer tes souve-
nirs » comme l’a fait Nathalie Sarraute?
- C’est une question juste. Je crois qu’il faut simple-
ment écrire un mélange de vérité et de fiction. En tout
cas, n’est-ce pas que l’enfance est moitié vérité et
moitié fiction? Voir les choses des yeux d’enfant,
c’est voir les choses d’une perspective incomplète, les
adultes ont l’habitude de cacher des choses aux en-
fants…
- Oui, mais il faut faire attention de ne pas entrer dans
le style « tout cuit », ce qui sera probablement plus
facile avec un récit de fiction…
- Tout à fait. Il faut faire attention. Du côté « fiction »
il s’agit plus d’un espace de « supposition ». L’enfan-
ce de Nathalie Sarraute incorporait beaucoup de sen-
sations…
- Et tu n’es pas sensible?
- Bien sûr! Seulement, mes souvenirs sont basés sur
les événements et les actions plutôt que sur les senti-
ments…
- Alors, dans la « fiction » il s’agit d’une approxima-
tion des sentiments qu’aurait éprouvés l’enfant pen-
dant un tel événement. C’est bien cela?
- Exactement
- Bon. Je me tais… tu m’y plonges…
Dans cette maison… une salle en carré, quatre
murs qui m’entourent, tout est brun. Les murs sont
d’un brun pâle, les sièges, le sofa, les rideaux… c’est
le salon où on jouait les petits jeux d’enfant. Même
dehors tout est brunâtre. Un printemps froid et plein
de boue. Ce n’est pas notre maison, les plantes sont
déjà vertes chez nous… on est plus au nord, à Chur-
chill où mon père a travaillé pendant plusieurs mois.
Quelqu’un hurle… c’est probablement mon frère qui
se lançait vers un ami, il jouait comme ça souvent : se
lançait, hurlait, faisait du bruit et en désordre.
- Tu ne jouais pas avec eux?
- Non, même cette fois-là je préférais observer.
- Tu le préférais? Ou peut-être te sentais-tu que tu n’é-
tais pas bienvenue dans leur jeu?
- Non, j’étais toujours bienvenue… mais je dirais que
même s’ils m’avaient incluse j’aurais été en dehors de
leur jeu.
Récits d'enfance (Hommage à Nathalie Sarraute)
P A G E 2 B U L L E T I N E S T U D I A N T I N
Une journée de printemps, fraîche, avec un ciel
bleu… on dirait une journée fabriquée pour les en-
fants. Je brisais des plaques d’eau gelée avec une
branche, puis me plongeais dedans avec les pieds en-
caissés dans des bottes de caoutchouc.
Je prépare une table avec de petites assiettes et de
petites tasses à thé… la petite voisine de mon âge et
moi, on fait une petite fête entre filles pendant que Ke-
vin saute dans l’eau. Ensuite Kevin et moi sommes sur
les escaliers qui montent dans la maison, on a peur et
la petite voisine pleure. Un chien nous avait attaqués,
il a mordu la voisine et son père a chassé le chien et
l’a battu.
- Ça s’est vraiment passé ainsi? Tu es certaine?
- Je ne suis sûre de rien, mais je me souviens du senti-
ment de la peur. Je ne sais si j’avais plus peur du
chien ou du père de la voisine.
- Voyons, tu sais bien que c’était le chien.
- Sans doute. Mais je suis certaine que c’était la pre-
mière fois que j’ai vu comment les humains peuvent
être violents envers les autres créatures
- Tu deviens un peu dramatique là, même un peu «tout
cuit »… il faut faire attention à ces choses…
-Trop vrai, j’ai passé trop de temps dans la littérature
et la philosophie. Je tends vers l’incorporation des
moralités, l’éthique et la philosophie dans toute l’é-
criture…
- Peut-être qu’un autre sujet t’aidera…
- Je le crois, oui…
C'est calme, je reste la joue contre la surface plate
et lisse d'un bureau pendant que Madame discute avec
ma mère... elle a tendance à rester seule pendant la
période de récréation, c’est une fille timide... le soleil
brille et la poussière flotte dans les fenêtres. Il fait
beau dehors, une journée douce avec la jeunesse du
printemps. Les arbres aux nouvelles feuilles vertes
dansent dans le vent... il faut se mêler un peu aux au-
tres... la piqûre d'un sentiment de rébellion me remon-
te dans la poitrine. Si je veux rester seule, je resterai
seule, c’est à moi de décider avec qui jouer ou ne pas
jouer ou discuter ou ne pas discuter.
- Tu n’as pas vraiment pris une telle décision à cet âge
-là…
- Pas d’une façon définie, mais bien sûr que le senti-
ment d’indépendance a commencé à ce moment, mê-
me dans l’enfance j’ai résisté aux gens qui critiquaient
ma tendance vers la solitude.
- Mais certainement ils ont voulu ton bien?
- Je n’en doute pas, mais j’ai senti qu’ils voulaient que
je change quelque chose d’intégral dans ma personna-
lité, et alors, que je change moi-même… alors, j’ai
résisté. D’une manière subtile évidemment, les accu-
sations de la timidité étaient justes. Ils avaient peut-
être raison.
- Peut-être? Plutôt certainement, n’est-ce pas? Sois
honnête…
- C’est vrai que la timidité m’avait empêchée de faire
tout ce que je pourrais.
Je suis entourée d’air frais et humide, le ciel est
gris. Papa me porte dans ses bras et c’est tellement
haut que je peux toucher aux nuages… le brouillard
est épais et blanc… un homme parle, il raconte l’his-
toire de la région et de ce site… une citadelle militaire
où les gens étaient obligés de manger des lichens pour
survivre, l’homme prend un peu puis l’avale. Il m’en
offre, mais je cache mon visage dans le manteau de
mon père… plus tard quand personne ne me regarde je
goûterai un peu, ça n’a pas de goût…
Je grimpe les rochers qui font mal aux genoux et
aux mains, l’air frais, le ciel bleu et clair, même le
brouillard donne un sentiment d’extase, je sens que je
pourrais grimper une montagne, la roche est une mon-
tagne… je tends vers une conquête… le vent pousse
fort… quelqu’un crie un nom… c’est moi qu’il cher-
che?... non… mais, peut-être… je suis presque là, il ne
reste que quelque pas… j’y suis arrivée! Je sens l’es-
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 3
prit de la conquête, une réussite et un nouveau pou-
voir… Kevin se plaint parce que je l’ai laissé au bas
des roches, il est trop petit pour les grimper et mon
père m’appelle… c’est le temps de partir… j’hésite
pendant un moment parce que je ne veux pas partir
encore… je veux attendre, mais l’air frais devient
froid et l’humidité du brouillard commence à pénétrer
jusqu’aux os…
- Il ne faut pas oublier la cave… un bon endroit à ex-
plorer, surtout pour les enfants…
- Justement. C’était noir et ça donnait des frissons de
peur, je crois que c’était assez petit, mais aux enfants
c’était énorme…une aventure d’exploration.
La verdure pique les pieds nus et les branches
rayent les bras pendant qu’on pousse avant dans la
forêt… ça fait tellement chaud… je veux trouver la
petite cabane que Kevin et ses amis ont construite, il
m’avait taquinée qu’une fille ne la retrouverait ja-
mais… il y a des voix, je m’approche…je marche aux
pas de loup, lente, en silence et avec soin… je ne veux
pas qu’ils m’entendent… je les regarde pendant quel-
ques moments puis je lance une pierre pour signaler
ma présence…
- Pourquoi signaler?
- Kevin m’avait taquinée, il fallait prouver que j’avais
réussi à les retrouver.
- Pourquoi était-ce nécessaire de le prouver? Ce n’é-
tait pas assez d’avoir une réussi? Il fallait que quel-
qu’un d’autre soit témoin?
- Il ne m’aurait jamais crue seulement sur ma parole…
- Alors, ce n’est pas parce que tu cherchais un peu de
valorisation? Ce n’est pas assez d’achever quelque
chose pour soi-même?
- Tu as raison… j’ai toujours cherché à ce que l’autre
valorise ce que je fais… ça fait longtemps que j’en
suis consciente. C’est quelque chose de difficile, d’ê-
tre témoin de soi-même.
- Tout à fait. Mais il faut quand même essayer…
- C’est vrai. Toute autre chose serait de la dernière
lâcheté…
Souvenirs
De: Carmen Penner
-Il me déteste....Il me déteste depuis .....depuis tou-
jours! C’est un fait.
-Ce n’est pas un fait. Tes cousins t’avaient dit plu-
sieurs fois que ton frère se fait du souci pour toi de-
puis toujours! Il t’aime immensément, même si ça ne
semble pas le cas. Après tout, c’est un homme qui res-
semble beaucoup à ton père. Ils ont des difficultés à
exprimer l’amour.
-Oui cela est vrai. Mais j’ai observé comment les au-
tres frères et soeurs communiquent, ainsi que les rela-
tions de mes cousins. Ils semblent avoir des relations
plus proches comme des amis, de bons amis. Ils sor-
tent le soir....ensemble, pendant toute la nuit. Ils vont
à la cabane les week-ends, ils font des voyages ensem-
ble.
-Je me souviens d’une sortie qu’on a fait ensemble il
n’y a pas longtemps en plus.
-Cinq mois plus tôt, on est allé à Rumors mais il m’a-
vait invitée seulement parce qu’il ne pouvait pas trou-
ver une compagne pour cette nuit-là.
-Et l’été dernier, je me souviens des week-ends à la
cabane.
-Oui on est allé à la cabane les week-ends mais ce n’é-
tait pas « ensemble. » On a même pris des
autos différentes.
-Est-ce que tu te souviens de ce qui est arrivé à ton
frère quand il avait dix ans?....Tu es devenue son hé-
roïne depuis ce jour-là.
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 4
-Ah oui!!
C’était un hiver froid comme d’habitude à Winnipeg.
Mon frère et moi faisions l’aller et le retour à l’école
par autobus. L’arrêt d’autobus était tout près de notre
rue, où il y avait au moins sept enfants, comme mon
frère et moi, qui faisaient des allés et venues. Comme
d’autres enfants, nous avions inventé un jeu très stupi-
de; après que nous étions sortis de l’autobus, nous sai-
sissions le côté de l’autobus et nous glissions le long
de la rue aussi loin que possible. Un jour la conductri-
ce de l’autobus a vu ce que nous faisions, alors elle a
arrêté l’autobus, elle nous a dit d’arrêter ce jeu, que
c’était dangereux. Mais mon frère avait une autre idée
en tête....de continuer le jeu.
Pendant que je marchais le long de la rue mon frère a
couru afin de retrouver sa place à côté de l’autobus et
puis en une fraction de seconde, il est tombé au-
dessous de l’autobus où ses jambes ont été écrasées
par les deux grands pneus.
-Quelles étaient tes sentiments?
-J’ai connu mon premier état de choc. J’avais besoin
d’aide…vite!
Je suis descendue à la prochaine rue jusqu’à ce que je
rattrape mon ami David qui était presque arrivé à sa
maison où son père avait commencé à préparer le sou-
per. Je lui ai expliqué ce qui était arrivé, nous sommes
retournés où Cole pleurait tranquillement. Le père de
David a pris Cole dans ses bras afin de l’emmener à
notre maison. Depuis ce jour-là, j’ai juré que je pren-
drais soin de mon petit frère du mieux que je puisse.
-Tu es son héroïne!
-Tu penses que depuis ce jour-là, j’étais son héroïne?
-Bien sûr!
-Pourquoi?
-Parce que même s’il avait fait quelque chose de bête,
c’était toi qui l’a sauvé de ses propres fautes.
-N’importe qui aurait fait la même chose. Je crois que
si j’avais arrêté mon frère avant l’accident j’aurais été
l’héroïne.
-Ne sois pas si exigeante envers toi-même! On ne peut
pas prédire ce qui va se passer. On peut seulement
agir le mieux qu’on puisse dans ce genre de situations.
Pense à ce qui aurait pu arriver si tu n’avais pas été là
du tout!
Les mains de ma mère
De: Jessica Kaisairis
« Êtes-vous prêts? », mon père nous demande-t-il
lorsque nous quittons la maison pour commencer nos
vacances à Kelowna. « C’est notre première aventure
en famille! ». À ce moment, j’étais très excitée. Notre
premier grand voyage ensemble. Je suis tellement
heureuse.
Nous sommes tous rentrés dans notre vieille
fourgonnette. Mon père donne un bisou à ma mère
pendant que mon frère et moi jouons gaiement ensem-
ble sur le siège arrière. Le nouveau jeu de Pokémon
pour le Gameboy va nous distraire beaucoup. Je suis
tellement heureuse.
J’entends ma mère rire. Je crois que mon père
lui a dit quelque chose de drôle. Je vois mes parents
sourire, et je me sens très chanceuse d’être avec ma
famille aujourd’hui. Je ferme les yeux et je me dis:
«souviens-toi, souviens-toi, souviens-toi. » J’ouvre les
yeux et j’aperçois par la fenêtre une barrière entre
l'herbe et le ciel. Je suis tellement heureuse.
Je marche à côté de ma mère à travers la foule
dans le centre d’achat du quartier. Elle bouge rapide-
ment, plus vite que moi, car j’ai seulement cinq ans.
J’essaie de lui saisir la main. Je suis si petite, je ne
peux pas voir la personne devant moi, seulement ses
pieds. J’essaie de suivre les pieds de ma mère, mais
tout à coup, je me rends compte que cet étranger de-
vant moi n’est pas ma mère. Ma mère a disparu.
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- Est-ce que tu penses qu’elle a voulu te perdre?
- Je ne sais pas.
« Es-tu perdue, petite fille? », une femme me
demande au bout de dix minutes. J’examine la situa-
tion. Je suis seule, dans le centre d’achat, sans ma mè-
re. Je crois que je suis vraiment perdue. Pourquoi est-
ce que je me perds tout le temps? Je jette un coup
d’œil à la femme qui me parle. Elle me donne un re-
gard de pitié. Je la déteste.
« Oui, je suis perdue », je l’ai enfin avoué.
Il n’est pas impossible de perdre ma mère dans une
foule. Il semble que cette émission se répète chaque
fois que nous allons à l’épicerie, à la librairie, ou au
centre d’achat. Au début, je restais là, en pleurant jus-
qu'à ce qu’elle me trouve. Ce jour-là, j’étais fâchée.
Quand la femme est revenue, elle était accompagnée
de ma mère.
- Tu es là! J'ai cherché partout!
Silence.
- Ma petite, est-ce que c’est ta mère ?
Silence.
- Jessica! Dis à cette dame que je suis ta mère!
Silence.
- Jessica!
Enfin, j’ai pris la main de ma mère et nous avons quit-
té le centre d’achat ensemble.
Je n'ai pas voulu être difficile. J'étais vraiment
obéissante lorsque j’étais petite. Je voulais que les
adultes pensent que j’étais une bonne gamine. Je crois
que ce jour-là, j'ai voulu lui apprendre une leçon. J’é-
tais furieuse d’être toujours perdue. J'ai voulu avoir le
pouvoir sur ma mère. Alors, j’ai fait cela, mais à la
fin, j’avais encore besoin de mon lit pour dormir.
Donc je suis retournée à la maison avec ma mère, en
écoutant ses cris.
Je n’aime rien d’elle. Pourtant, je veux qu’elle
m’aime. C’est une chose bizarre. Madame Brezina.
Pourquoi est-ce qu’elle me déteste? J’essayais souvent
d’être gentille et patiente, mais ce n’est jamais assez
pour elle. Dans notre classe de vingt élèves âgés de
huit ans à neuf ans, il y a seulement trois enfants
qu’elle aime. Je crois qu'elle les aime parce qu'ils sont
silencieux. Mais je crois que je suis silencieuse aussi.
J’ai demandé à mes parents pourquoi la madame ne
m'aime pas. Ils m'ont dit: « Bien sûr qu'elle t’aime.
Pourquoi elle ne t’aimerait pas?». C’est ce que je me
demande, ai-je pensé.
Le lendemain elle a crié après moi parce que
mon écriture était inclinée du mauvais côté. Je lui ai
dit qu'elle était ainsi parce que je suis gauchère. Je
crois qu'elle a fait semblant de ne pas m'entendre.
Puis, la semaine suivante, ma mère lui a envoyé une
note, en disant que je recevrais des lunettes bientôt.
Elle a crié après moi parce que je ne lui avais pas dit
que j’avais des difficultés à voir. Je pensais que j’étais
un enfant sage et tranquille.
« Prenez vos affaires! »
La famille entière courait en rond. Les mardis
soirs, mon frère et moi jouions au soccer. J’ai saisi
mon sac de soccer rapidement et je suis partie à la
course rencontrer mes parents. Ils décidaient quel en-
fant irait avec quel parent. Ils nous ont dit que nous
allions prendre deux voitures différentes. Après cette
exclamation, mon frère et moi nous sommes disputés.
- Je veux aller avec papa!
- Non, je veux y aller!
Ce n’est pas que nous n’aimons pas notre mè-
re, mais mon père part souvent en voyage pour son
travail. Il part parfois pour quelques semaines, donc
lorsqu’il revient, nous luttons pour son temps libre.
Mon père nous a interrompus, le visage très
sombre. J’ai vu ma mère dans la cuisine, triste. Au
début, je ne comprenais pas pourquoi ma mère se sen-
tait ainsi. Par contre, je me suis rendu compte plus
tard qu’elle était malheureuse. Je ne m’étais pas rendu
compte que notre dispute pouvait blesser un autre ain-
si. Elle pensait probablement que ses enfants ne vou-
laient pas être avec elle, ce qui n’était pas vrai. Plus
j’y pense, plus je me sens triste pour elle. C’est un
sentiment étrange.
- Est-ce que tu penses que ce souvenir est la pre-
mière fois que tu aies senti de la compassion
pour un autre?
- Oui. Je me suis rendu compte plus tard dans la
vie que ce souvenir est vraiment important
pour moi parce qu’il montre ma compréhen-
sion lente de ma mère.
- Donc, qu’est-ce que tu as appris de ta mère ici?
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 6
-Je pense que j’ai appris qu’elle est un être hu-
main.
« Vite, vite! » mon père nous dit lorsque nous
quittons la maison. Mon père et mon frère prennent
leur place dans la voiture. Je prends la main de ma
mère, comme auparavant. Mais cette fois-ci, elle me
serre la main.
Mon enfance
De: Elizabeth LaRue
« Beth! Get down here!… » « Beth! Viens ici!… »
J’ai entendu ceci pendant des années. Les cris de mon
père…les cris de ma mère. Même aujourd’hui, j’ai des
frissons quand ces mots entrent par les oreilles. Des
mots lourds. Un cri fâché.
- Tu veux vraiment descendre dans la cave?
- Non...mais je dois le faire. Aucun choix aujourd-
’hui. Aucun choix ni hier ni demain.
« Beth! Get down here!… » « Beth! Viens ici!… »
Les cris de mon père me hantent. Qu’est-ce qu’il
veut? Pourquoi est ce qu’il veut me voir maintenant?
J’ai d’autres choses à faire. Je joue toute seule dans
ma chambre… mais, je sais qu’il pense que j’ai fait
quelque chose de mal. -Beth l’a fait. C’était elle qui
l’a brisé! … Ma petite peste, ma petite sœur, Sarah,
était là dans la cave. Ce n’était pas elle?
- Tu pense vraiment que c’était elle? Ton père ne pen-
se pas que ce soit elle qui l’a brisé. C’est ta parole
contre la parole d’une petite gamine naïve et jeune.
Elle n’aurait pas pu le faire, car elle est parfaite.
- Jeune, oui. Naïve, non. Je sais que je n’ai rien tou-
ché. Je ne suis même pas descendue à la cave ce jour-
là. Mais, je dois l’accepter…c’est mon fardeau d’être
la plus âgée. Je cause tous les problèmes. C’est moi
qui l’ai brisé… même si je ne l’ai jamais touché. Peut-
être aurais-je dû être plus rebelle… au moins j’aurais
été punie pour une chose dont j’étais vraiment coupa-
ble. Je serais toujours indisciplinée aux yeux de mes
parents et elle serait leur ange magnifique et parfaite.
Elle, et ses réponses promptes et ses yeux innocents.
Les murs blancs m’entourent et un homme parle à ma-
man et papa. Dans le livre que je tiens dans mes
mains, il y a des dessins fabuleux et intrigants. Dans
cette chambre claire et simple, je les entends parler.
Ils parlent et parlent de rien. Ils utilisent des signes et
des lettres plus que des mots. Mais, les mots qu’ils
utilisent sont trop longs.
- Ils parlent de quoi?
- Aucune idée… ils parlent trop vite. Ils utilisent des
mots que je n’ai jamais entendus. Ils m’ont incluse
dans une visite comme telle pour me laisser de côté.
Les images des animaux dans ce livre sont merveilleu-
ses. J’aime les animaux. Ils sont tellement beaux, tel-
lement libres. Exempts des règles de la vie civile…
exempts des rencontres avec les hommes aux cheveux
gris.
- Peux-tu aller dans le corridor? - Oui. -Tu dois rester
près de la porte. - D’accord maman. - Et ne quitte pas
le corridor, reste juste là. - D’accord maman.—…et ne
parle pas aux étrangers. - Oui maman, je le sais. - Et…
- Oui. Maman! Laisse-moi tranquille, je la rassure. Je
vais être ici.
- Tu devais rester seule dans le corridor pour long-
temps?
- Non, l’attente n’était pas longue. J’ai lu le livre un
peu plus. Les autres hommes et femmes dans le cou-
loir étaient habillés des mêmes vêtements que l’hom-
me aux cheveux gris qui était dans la chambre. Ils
m’ont dit bonjour et m’ont donné un sourire. Ils sont
gentils.
- Il n’y avait pas de raison que tu sois là? On t’y avait
vraiment amenée pour que tu lises un livre?
« Beth, viens dans la salle. » C’est mon père. Il me
veut maintenant. - On peut retourner à la maison
maintenant? - Non, mais dans quelques minutes. Je
vois l’enregistreur de cassette de ma mère. C’était
dans les mains de l’homme avec le manteau blanc.
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 7
- Alors, il était médecin? Tu étais à l’hôpital?
- Ô… oui. Ils ne me l’ont pas dit. S’ils m’avaient dit
qu’on allait chez le docteur je n’aurais pas quitté la
maison ce matin-là. C’était le même enregistreur que
j’avais vu il y avait quelques jours quand j’étais en
train de jouer à la maison. Elle m’a enregistrée?… et
elle l’a donné à un étranger. Un homme a entendu
l’enregistrement de ma voix. Je suis atterrée. Ils m’ont
trahie.
- Tu ne savais pas? Aucun soupçon?
- Absolument pas! S’ils m’avaient demandé, j’aurais
peut-être été d’accord avec cela. Mais… non… ce
n’est pas acceptable. Comment est-ce que je pourrais
les comprendre? À ce moment-là, j’étais sûre que je
n’aurais jamais plus de confiance en eux. Je me sens
seule. Personne n’est là pour moi…à mes côtés. Les
murs blancs se rapprochent de plus en plus. Il n’y a
rien que je pourrais leur dire pour leur faire compren-
dre à quel point je suis fâchée. Ils me regardent com-
me une folle. Ils ne comprendraient jamais ce que
c’est d’être trahi comme cela.
« Your house has been sold. » « Quelqu’un a acheté ta
maison. » Une phrase terrible. Tous mes souvenirs
étaient dans ma maison. C’était là que mes parents
sont retournés après leur mariage. C’était dans cette
maison-là que j’ai grandi. Une autre maison n’était
pas une option. Pourquoi est-ce qu’on avait besoin
d’une autre maison? Celle-ci est bonne. Il y a une pis-
cine, elle est assez grande pour Sarah, eux et moi.
Mais, ils n’avaient aucun problème à la laisser de cô-
té….comme un sac poubelle, abandonné.
- Tu n’aimes pas l’autre maison? C’était la maison de
tes grands-parents. Tu les aimes. Je sais que tu as eu
beaucoup de plaisir dans cette nouvelle maison.
« Your house has been sold. » « Quelqu’un a acheté ta
maison. » Ils ne m’ont pas dit que c’était même une
option de déménager. Cette maison magnifique est à
moi aussi. Ils ne comprennent pas. Maintenant on doit
l’abandonner.
- Tu sais que la nouvelle maison était assez belle. Des
jardins partout et des arbres fruitiers. Plus d’espace
pour jouer. Ta petite sœur et toi aviez encore une
chambre ensemble.
- C’est vrai, mais c’était nouveau. À cette époque de
ma vie, rien de nouveau n’avait été si grand. Chaque
jour, on jouait, on riait, on mangeait et on dormait. Et
maintenant tout serait différent!
- Ce n’est pas vrai. Même avec une autre maison et
une autre chambre à coucher, ta petite peste et toi
pourriez jouer, rire, manger et dormir. C’est après cela
que tu as vu que la vie allait encore continuer, mais
que toi tu avais changé.
Les souvenirs d’enfance sont vagues et indéfinis. Je
n’ai plus envie d’écrire mes souvenirs. À quoi bon? je
n’ai pas besoin de ça. Je ne veux pas écrire.
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 8
Image de : http://www.matisse.lettres.free.fr/
rubriquecursives/enfance/enfance.htm
Nathalie Sarraute
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 9
ÉTUDIANTS D’ÉTUDES
SUPÉRIEURES
LAURENT POLIQUIN est inscrit au programme de
doctorat. En mai 2009, il a été reçu membre du centre
de recherche Young People’s Text and Culture de l’U-
niversité de Winnipeg (CRYTC). Il travaille égale-
ment à titre de rédacteur à la revue scientifique inter-
nationale Jeunesse: Young People, Texts, Cultures. Il
assume un rôle de premier lecteur d’articles scientifi-
ques ; il soumet ceux-ci à une évaluation internationa-
le et il fait part des commentaires et de la décision édi-
toriale aux chercheurs internationaux ; il assume en-
suite la coordination éditoriale de leur texte. Quatre
numéros ont été publiés depuis son arrivée au comité
de rédaction.
Il a présenté deux communications à l’automne 2009 :
« Valorisation de la culture métisse dans la littérature
de jeunesse de l’Ouest canadien : le cas de David
Bouchard », colloque Littérature de jeunesse et enga-
gement(s), Strasbourg, Université de Strasbourg, 12
au 14 novembre 2009.
« De l'abécédaire à l'identitaire : poésie et jeune enfan-
ce dans l'Ouest canadien », Colloque international
Langages poétiques et poésie francophone en Améri-
que du Nord, Toronto, University York, 1 au 3 octo-
bre 2009.
Ses publications les plus récentes :
Articles devant un comité de lecture :
« Amibiguïté idéologique chez Robert de Roquebru-
ne : le cas D’un océan à l’autre », dans Transplanter
le Canada : Semailles / Transplanting Canada: See-
dlings, sous la direction de Marie Carrière et Jerry
White, Edmonton, Centre de littérature canadienne,
2009, p.74-78.
« Robert de Roquebrune ou l’implosion des discours »
dans Francofonia, Universidad de Cadiz, no 18, 2009,
p. 118-131.
Compte-rendus :
« Une lecture qui « mène du train » », Liaison, no 149
Automne 2010, p. 60.
« Envies de fuite », compte-rendu de Blanchie de Bri-
gitte Haentjens dans Canadian Literature, no 202, au-
tomne 2009, p.113.
Essai :
« Carnet des accointances » dans Sillons : hommage à
Gabrielle Roy, sous la direction de Lise Gaboury-
Diallo, Saint-Boniface, Éditions du Blé, 2009, p.203-
206.
Livre :
Orpailleur de bisous, poésie, Éditions de L’Interligne,
2010, 80 p.
À paraître prochainement :
« Les mouvements propulseurs du rire : le cas Méla-
nie Watt », Jeunesse: Young People, Texts, Cultures,
Vol 2, No 2 Winter 2010.
« Ceviz » poèmes, Mœbius, no 127, Octobre 2010.
LECH KOSINSKI inscrit au programme de doctorat
travaille sur l'allégorie politique dans le film « Les
Enfants du paradis » de Marcel Carné, un des grands
classiques du cinéma français. Carné a été décoré
Commandeur de la Légion d’Honneur par le Président
de la République François Mitterrand le 22 octobre
1985. C'est un honneur et un plaisir pour lui d'aborder
un sujet d'une telle portée pour la France, et, donc,
pour toute l'Europe, ainsi que de travailler sous la di-
Profil des étudiants
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 1 0
rection experte de Dr. Étienne Beaulieu, son directeur
de thèse.
EMMA POPOWICH vient de terminer sa maîtrise.
Son mémoire est intitulé «L’orage féminin dans la
poésie de la Renaissance européenne». Cette étude
souligne la tradition des images de naufrages et orages
liées à la femme dans la poésie de Pétrarque, Ronsard
et Ausias March. Sa soutenance a eu lieu au mois
d'août, mais Emma poursuivra son étude du thème de
l'orage féminin chez d'autres auteurs de l'époque hu-
maniste tels que Garcilaso et Boscan.
NATALIE LAFLEUR entame sa dernière année de
maîtrise en français. Elle termine la rédaction de son
mémoire intitulé « L’esthétique théâtrale dans les œu-
vres romanesques de Diderot ». Dans celui-ci, elle
examine la problématique des genres, surtout le théâ-
tre dans le roman dans les trois œuvres romanesques
les plus importantes de Diderot; Jacques le fataliste,
La Religieuse et Le Neveu de Rameau.
Elle vient de présenter une communication nommée
«Des outils théâtraux transposés du Fils Naturel à La
Religieuse » au congrès de la Société Canadienne d’É-
tudes du Dix-Huitième siècle. Cette année, le congrès
a eu lieu à Saint-Jean, Terre-Neuve du 14-16 octobre.
C’est la deuxième année de suite qu’elle participe à ce
congrès dix-huitièmiste. Elle compte tenir la soute-
nance de son mémoire l’année prochaine et par la sui-
te, poursuivre son doctorat.
MÉLANIE CURÉ termine sa dernière année de maî-
trise en français. Elle rédige un mémoire de maîtrise
intitulé « Pas juste une question de langue : l'identité
nationale et l'exiguïté littéraire dans les récits franco-
manitobains et acadiens », qui porte sur le sort et les
caractéristiques des littératures minoritaires, en pre-
nant en compte les dimensions historiques et identitai-
res de la francophonie canadienne.
Cette année, elle a présenté une communication nom-
mée «Identité et altérité : le passé et le nouveau chez
J.R. Léveillé et Antonine Maillet » au colloque inter-
national « Les discours littéraires, cinématographiques
et artistiques de l'altérité et de la mémoire», tenu au
Collège universitaire de Saint-Boniface du 29 avril au
1er mai. C'est la deuxième fois qu'elle participe à ce
genre de colloque. Suite à l'obtention de sa maîtrise,
Mélanie compte poursuivre son doctorat.
MICHELLE KELLER est étudiante de deuxième
cycle de français au département depuis septembre
2009. Au cours de la dernière année scolaire (2009-
2010), elle a complété tous les cours requis pour le
programme y compris celui qu’elle a suivi au Québec
cet été. Il s’agissait d’un cours dans le cadre d’une
École internationale d’été qui portait sur la francopho-
nie des Amériques. Ce cours pluridisciplinaire s’est
déroulé à deux universités – l’Université Laval et l’U-
niversité du Québec en Outaouais – et a accueilli des
spécialistes de la francophonie tels Joseph-Yvon Thé-
riault (Québec), Susan Pinette (Maine), Barry Ancelet
(Louisiane) et Haydée Silva Ochoa (Mexique). Ce
cours a beaucoup alimenté les recherches pour son
mémoire qui porte sur les discours journalistiques sur
la francophonie manitobaine.
Plus tôt cette année, elle a travaillé pendant quelques
mois comme assistante de recherche pour Prof. Domi-
nique Laporte. Depuis septembre 2010, elle est
conseillère pour le département de français, espagnol
et italien au sein du Graduate Students’ Association.
C’est la première fois que le département ait un repré-
sentant au sein de cette association. Par ailleurs, elle a
été sélectionnée par la Fédération de la jeunesse cana-
dienne-française pour participer au 4e Forum jeunesse
pancanadien qui a eu lieu à Vancouver en novembre
2010. Elle reçoit actuellement de l’aide financière de
la province du Manitoba par le biais du Manitoba Gra-
duate Scholarship et compte soutenir son mémoire en
2011.
LÉA KON vient de terminer son mémoire de maîtrise
intitulé «Le héros romantique dans Le Rouge et le
Noir de Stendhal, Illusions perdues de Balzac, L’Édu-
cation sentimentale de Gustave Flaubert et Les Tra-
vailleurs de la mer de Victor Hugo». Elle compte
poursuivre ses études doctorales à l’Université du Ma-
nitoba.
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 1 1
AMALIA ZURZOLO (JÍMENEZ) achève sa maî-
trise. Sa soutenance aura lieu en juin. Son mémoire
porte sur la pensée politique chez Rousseau, Montai-
gne et Rabelais.
ÉTUDIANTES DE PREMIER
CYCLE
MARY HANNA a suivi cette année un cours d’orien-
tation scolaire à l’élémentaire au Collège universitaire
de Saint-Boniface en français. Elle pense suivre le
programme financé par le gouvernement qui lui per-
mettrait d’être assistante au Québec.
Rhinocéros (adaptation impertinente
de la pièce d’Eugène Ionesco)
Intro
La scène initiale telle que Delaram l’a expli-
quée… Jean est seul sur la scène noire, avec une seule
lumière qui l’illumine.
Scène I
Un restaurant de Winnipeg vers midi. Quel-
ques petites tables. Jean et Bérenger arrivent en mê-
me temps et s’assoient à une table. Jean est très soi-
gneusement vêtu : complet, cravate, souliers polis
(comme un homme d’affaires). Bérenger n’est pas ra-
sé, il est mal peigné, les vêtements chiffonnés; tout
exprime chez lui la négligence, il a l’air fatigué; de
temps en temps, il baîlle.
Jean
Tu n’as vraiment pas bonne mine, Bérenger.
DIANE CHOJCZAK suit le programme de CIEP en
France depuis le mois de septembre. Elle est assistante
d’anglais et elle a aussi suivi le programme d’Explore
au Québec le printemps dernier.
CARMEN PENNER travaille en France comme as-
sistante d’anglais. Elle compte poursuivre ses études
au niveau de la maîtrise.
ELIZABETH LARUE a été sélectionné comme jeu-
ne ambassadrice au Forum de la Francophonie des
Amériques qui s’est tenu au Nouveau Brunswick du 7
au 17 août 2010.
Bérenger
Oh! Ce n’est rien, Jean! J’ai un peu mal aux cheveux,
c’est tout…
Jean
Tu as trop bu encore hier soir!
Bérenger
J’ai un petit peu la gueule de bois, oui…
Jean
Tu es mal habillé, pas même rasé et tu pues! J’ai honte
d’être ton ami!
Bérenger
Écoute, Jean. Je m’ennuie à Winnipeg. Je ne suis pas
fait pour le travail que j’ai… tous les jours, au bureau,
pendant huit heures, trois semaines seulement de va-
cances en été!
Jean
Mon cher, tout le monde travaille et moi aussi! Moi
aussi comme tout le monde, je fais tous les jours mes
huit heures de bureau, et je ne me plains pas.
Soirée théâtrale (26 mars 2010)
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 1 2
Bérenger
Moi, je ne peux pas m’habituer. Non, je ne m’habitue
pas à la vie.
Jean
Tout le monde doit travailler. Tu dois gagner ta vie
comme tout le monde.
À ce moment, on entend le bruit très
éloigné, mais se rapprochant très vite,
d’un souffle de fauve et de sa course
précipitée, ainsi qu’un long barisse-
ment.
La serveuse, entrant dans la pièce.
Bonjour, Messieurs, que désirez-vous boire?
Les bruits sont devenus très forts.
Jean, criant presque pour se faire
entendre au-dessus des buits.
Deux Fort Garry Pale Ale! (Les bruits sont devenus
énormes.) Mais que se passe-t-il? (Les bruits du galop
d’un animal puissant et lourd sont tout proches, très
accélérés; on entend son halètement.) Mais qu’est-ce
que c’est?
La serveuse
Mais qu’est-ce que c’est?
Le Chef, venant sur la scène.
Mais qu’est-ce que c’est?
Bérenger n’a pas l’air inquiet. Jean se
lève d’un bond, fait tomber sa chaise
en se levant, regarde du côté de la cou-
lisse gauche, en montrant du doigt,
tandis que Bérenger reste assis.
Jean
Oh! Un rhinocéros! (Les bruits produits par l’animal
s’éloignent; toute cette scène doit être jouée très vite.)
Jean
Oh! Un rhinocéros!
La serveuse
Oh! Un rhinocéros!
Le Professeur et une Dame élégante (venant vite en
scène.)
On a vu un rhinocéros sur la rue Portage!
Le Chef
Mais voyons donc! (Voyant le rhinocéros.) Oh! Ça
alors!
La serveuse
Ça alors!
Jean
Ça alors! (À Bérenger.) Bérenger! As-tu vu le rhino-
céros?
Bérenger
Il me semble, oui, c’était un rhinocéros!
La Dame (au Professeur)
Oh! Ce que j’ai eu peur!
Le Professeur (d’un air paternaliste)
La peur est irrationnelle. La raison doit vaincre.
Le Chef (À la serveuse.)
Occupe-toi de ces messieurs!
Il rentre dans la cuisine et la serveuse le suit.
Pendant la conversation qui suit, la Serveuse
vient poser des bières sur la table de Jean et
de Bérenger. Elle regarde par la porte pour
voir si le rhinocéros est encore là. Elle lave la
table de la Dame et du Professeur. Elle le re-
garde comme s’il était fou.
Jean
Un rhinocéros! Je n’en reviens pas!
Bérenger bâille.
Le Professeur
Je suis professeur de logique. Je vais vous expliquer
cette affaire de rhinocéros, chère Madame. Un chat a
quatre pattes, n’est-ce pas? (Le professeur fait
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 1 3
« marcher » un chat imaginaire en remuant quatre
doigts.)
La Dame
Oui…
Le Professeur
Et un chien a quatre pattes, n’est-ce pas? (Il fait
« marcher » un chien imaginaire en remuant quatre
doigts.)
La Dame
Oui…
La Professeur
Alors, chère Madame, un chien est un chat! C’est de
la logique élémentaire!
La Dame
Un rhinocéros a quatre pattes aussi. C’est donc un
chat? (La dame fait « marcher » un rhinocéros.)
Le Professeur
Bravo, Madame! Vous comprenez des concepts très
difficiles, surtout si on n’a pas d’éducation ni de cultu-
re! (Il jette un regard méprisant sur Bérenger. Pen-
dant la conversation qui suit, le Professeur essaie
d’impressionner la Dame.)
Jean
Mais un rhinocéros, dans la ville, comment expliquer
ça? Nous devrions protester auprès du maire Sam
Katz!
Bérenger
Peut-être qu’il s’est échappé du zoo du parc Assini-
boine!
Jean
Le maire Katz? Oh! Tu veux dire le rhinocéros! Tu
rêves si tu penses que le zoo du parc Assinboine a des
rhinocéros!
Bérenger
Oui, je rêve… La vie est un rêve. Je suis fatigué.
Jean
C’est parce que tu bois trop. C’est la mélancolie du
buveur de bière de Winnipeg…
Bérenger
Je ne me suis pas habitué à moi-même. Je ne sais pas
si je suis moi. Dès que je bois un peu, je me sens plus
léger, ça va mieux.
Jean
Avec des Fort Garry Pale Ale? Tu pourrais au moins
boire des Heineken!
Bérenger
J’ai à peine la force de vivre. Je n’en ai plus envie. La
solitude me pèse. La société aussi. C’est une chose
anormale de vivre. Je me demande moi-même si
j’existe!
Jean
Tu n’existes pas, mon cher, puisque tu ne penses pas.
Penses, et tu seras.
Le Professeur (se levant et s’adressant à Bérenger)
Mais oui, mais oui! Vous ne connaissez pas le philo-
sophe René Descartes? Non?? Cogito ergo sum! Je
pense, donc je suis! Moi, je suis éduqué et je pense!
Voici un syllogisme philosophique très sophistiqué (il
tousse) : Tous les chats sont mortels. Socrate est mor-
tel. Donc Socrate est un chat!
La Dame
Et si Socarte est un chat, cela veut dire qu’il est aussi
un rhinocéros? Ah! Que la philosophie est belle!
Le Professeur a l’air très satisfait de lui-
même.
Bérenger
Moi, je ne suis pas allé à l’Université du Manitoba. Je
n’ai aucune chance de comprendre.
Jean
La vie est une lutte. Il faut lutter! Il faut essayer. Mon-
sieur le Professeur, que dites-vous de ce phénomène
du rhinocéros?
Le Professeur
Eh bien, eh bien!! Le rhinocéros! (Il ne semble pas
très sûr de ce qu’il va dire.) D’abord, peut-on être sûr
de l’avoir vu?
La Dame
Mais, je l’ai vu, moi!
Le Professeur (lui faisant un geste condescendant)
Ma chère Madame! Seule la phénoménologie peut
nous dire ce qu’on a vu! D’abord, est-ce un rhinocéros
d’Asie ou d’Afrique? A-t-il une corne ou deux?
Bérenger
Mais quelle importance…
Le Professeur (l’interrompant)
Il faut D’ABORD déterminer l’origine de cette bête
avant d’en constater l’existence! L’essence précède
l’existence!
Bérenger
Mais, Monsieur le Professeur! Jean-Paul Sartre a dit le
contraire : L’existence précède l’essence!
Le Professeur
Mais non, mais non! Jean-Paul Sartre n’est plus du
tout à la mode! Il faut suivre la mode!
Bérenger
Mais Sartre a dit qu’il faut créer ses propres valeurs!
Et Simone de Beauvoir a dit : Le conformisme, c’est
le contraire même de la créativité!
Le Professeur (d’un ton arrogant, avec un petit souri-
re)
Mais, mon cher enfant, est-ce que Jacques Derrida ne
nous dirait pas, justement, que les rhinocéros s’inscri-
vent dans la logique du conformisme, déjà, toujours?
Et d’ailleurs comme nous le dirait Jean Baudrillard, le
conformisme n’est-il pas un jeu de simulacres, et la
créativité aussi?
Bérenger (devenant plus confiant dans ses arguments)
Vous voulez dire que se conformer, c’est être créateur,
comme être un chat, c’est être un chien? Mais, Mon-
sieur le Professeur… (montrant qu’il n’est pas du tout
convaincu)
Jean
Bérenger, comment oses-tu critiquer le plus grand lo-
gicien de l’Université du Manitoba! Tu devrais avoir
honte! J’ai honte d’être ton ami. Au fait, je m’en vais!
Le Professeur
Nous aussi! Je ne tolère pas une telle impertinence!
(Le Professeur, la Dame et Jean quittent la salle en
emportant deux chaises et une table.)
Bérenger
Oh! Qu’est-ce que j’ai fait! Je n’aurais pas dû les in-
sulter!
Bérenger quitte la salle.
Jean arrive sur la scène, mais il n’est pas dans
son assiette. Il commence à enlever sa cravate,
comme s’il avait très chaud, puis son veston,
qu’il jette par terre. Il s’assoit lourdement sur
la chaise et se cache le visage dans les mains.
Bérenger frappe à la porte. Jean ne répond
pas. Bérenger entre timidement dans la pièce.
Bérenger
Je voulais te demander pardon. Tu as raison. Il ne faut
jamais, jamais contredire un professeur. (Il remarque
que Jean ne va pas très bien.) Mon Dieu, Jean, ça ne
va pas?
Jean
Va t’en! Je ne veux pas te parler! Tu me dégoûtes! (Il
disparaît dans la salle de bains.)
Bérenger
Es-tu malade? As-tu un rhume? Ta voix est enrouée!
(Il attend quelques secondes.) Je… veux te dire que
j’ai été stupide de me disputer avec toi pour une his-
toire de rhinocéros. Je voulais te dire que les gens ont
vu des rhinocéros à une corne aussi bien que des rhi-
nocéros à deux cornes.
Jean (ressortant de la salle de bains, le visage tout
vert)
C’est bien ce que je te disais!
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 1 4
Bérenger
Mais, Jean, qu’est-ce que tu as! Tu es tout vert! Je
vais téléphoner à l’hôpital!
Jean (retournant à la salle de bains)
Mais non! Je n’aime pas les médecins. Je n’ai confian-
ce qu’en les vétérinaires!
Bérenger
Ne te fâche pas contre moi. Je suis ton ami!
Jean (sortant de la salle de bains, transformé en rhi-
nocéros)
Je ne suis pas ton ami! Je déteste les hommes!
Jean essaie de percer Bérenger de sa corne.
Bérenger fait semblant de sortir, mais quand
Jean le poursuit, il referme la porte derrière
lui. Il fait quelques pas à reculons, puis s’ap-
proche de la fenêtre.
Bérenger
Oh non! Ils sont partout! Il y a des rhinocéros partout!
(On commence à forcer la porte. Jean essaie de la
bloquer, mais enfin, la porte s’ouvre et tous les ac-
teurs entrent sur la scène, transformés en rhinocéros.
Ils se placent en demi-cercle derrière Bérenger en
piétinant sur place, comme des soldats en marche.
Bérenger les regarde avec horreur et il dit :) On ne
m’aura pas, moi! Je ne vous suivrai pas! Je reste ce
que je suis. Je suis un être humain. Un être humain!
Puis Bérenger se retourne et se place au cen-
tre de la scène. Les rhinocéros s’avancent très
lentement vers lui pendant qu’il réféchit. Il es-
saie de boire une gorgée de bière mais elle est
vide.
Bérenger
Ah! C’est tout vide! C’est vide!
Bérenger renverse la bouteille. Les rhinocéros
sont maintenant très près de lui, comme s’ils
allaient l’envahir complètement. Bérenger fixe
la bouteille et la tient horizontalement devant
lui. Les rhinocéros restent figés sur place,
comme s’ils comprenaient qu’ils n’avaient
plus aucun pouvoir sur Bérenger. De ses qua-
tre doigts, il fait « marcher » la bouteille, com-
me si elle était devenue une bête. Les rhinocé-
ros reculent au fond de la scène et deviennent
tout petits, s’effondrant par terre. Bérenger
prend la bouteille et la jette. Il a l’air fort, fier,
confiant, debout, tout seul, au milieu de la scè-
ne.
FIN
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 1 5
Photo fournie par Professeure Louise Renée.
Masque fourni par Professeure Louise Renée et
photo prise par Natalie LaFleur.
Un masque de l’adaptation de
Rhinocéros
Photo de
Rhinocéros à la soirée théâtrale
Le Soccer des Philosophes (inspiré de
Monty Python)
Bonjour! Et bienvenue au stade olympique de l’Uni-
versité du Manitoba! Nous voilà réunis pour le dernier
match de soccer entre nos deux meilleures équipes, les
philosophes français et les anciens Grecs!
Voici l’équipe des Français! Le chef d’équipe Pascal,
suivi de Descartes et Rousseau!
Maintenant, c’est l’équipe des philosophes grecs qui
arrivent dans le stade! Le chef d’équipe Archimèdes,
suivi de Platon et Socrate!
Notre arbitre, Confucius, porte le ballon.
Les deux chefs d’équipe viennent se donner la main.
On est maintenant prêt pour ce dernier match des éli-
minatoires. Ça sera un match incroyable, tenez-vous
bien!
L’arbitre Confucius siffle et le jeu commence! Les
voilà!
Ah! Voilà Descartes qui doute de son existence.
Archimède essaie de calculer la circonférence du ter-
rain! Platon se moque des Français! Il dispute avec
eux. (« Je vous dis que vous avez tort!) Socrate va dire
à Confucius : « Espèce d’hypocrite! Tu es l’arbitre et
tu ne crois même au libre arbitre! » Confucius est
obligé de lui donner une pénalité (carte jaune), et il
n’est pas content!
Pascal commence à trembler (calculatrice et notes
dans les mains) : « Le silence de ces espaces infinis
m’effraie! » Rousseau va dans un coin solitaire pour
bouder! (Platon se moque de lui.)
Oh! Regardez Archimède, il se dirige vers le ballon,
et, et…il a une idée! (« Eurêka! ») Il prend le ballon et
l’envoie à Platon. Platon l’envoie à Socrate et le pau-
vre Descartes n’a aucune chance! C’est un but!
Les Grecs sont fous de joie! Sophocle a fait une belle
passe à Socrate, mais les Français sont en train de dis-
puter le but. Descartes dit que les Grecs ne peuvent
pas être sûrs d’avoir fait un but, et Pascal dit : « Le
cœur a ses raisons que la raison ne connaît point! »
Rousseau dit que le ballon était hors jeu et que c’est
un jeu stupide quand même.
Le match est fini! Félicitations à l’équipe des Grecs!
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 1 6
Images de Linternaute, Encyclopédie :
http://www.linternaute.com/
Pascal
Descartes
Socrate
Rousseau
Archimèdes
Platon
Le nouveau chapitre 26 de La
Répudiée
De: Nathanaël Wsiaki
Je me lève, je marche, il est minuit, je vais chez moi,
chez toi, chez nous. Je me faufile dans les rues étroi-
tes, comme un fantôme, une âme perdue, silencieuse,
absente, présence que personne ne remarque. J’arrive
au seuil de notre porte, portail menant à une vie d’au-
paravant, à un passé que je souhaite tant revivre. Je
vogue dans le néant de ma tristesse, j’avance sans le
savoir, sans y penser, guidé par un amour désespéré.
J’arrive à la cuisine et mon cœur s’arrête. Tu es là,
assis, pensif, perturbé, comme mon cœur qui s’achar-
ne à te chanter ses mélancolies, à battre au gré du tien.
Tu te retourne et me vois, et mon corps se glace, se
fige, pétrifié par le désir d’être aperçue, d’être dignes
de ton regard qui désir le mien.
- Rachel? Que fais-tu ici?
Je tremble, surprise par le son de ta voix. Je frémis
comme si telle musique réchauffait mon âme répu-
diée, glacée par l’oubli.
- Rachel?
- Je ne peux pas vivre sans toi, Nathan.
Le silence est assourdissant, hurlant dans le vide,
lourd par les émotions et les pensées secrètes. Je
m’approche de toi, la force est grande qui m’attire, de
ton corps tout blanc que je désire sans relâche, de la
personne que j’aime éperdument, à en mourir d’a-
mour.
- Pourquoi es-tu venu, Rachel?
- J’avais besoin de te voir. Je ne peux pas vivre
sans toi. J’ai tant à te dire avant que je quitte.
- Où vas-tu?
Je ne réponds pas à la question, perturbé par l’agres-
sion de la vérité qui s’apprête à surgir de mes lèvres, à
affliger celui que j’aime d’une nouvelle inconcevable.
- Je suis capable d’avoir des enfants Nathan. Je
suis une femme fertile.
- Rachel, nous avons essayé pendant dix ans.
Il s’est levé, mon mari, et m’a embrassé de ses bras.
Perdu dans son étreinte, je suis envahi par le désir, par
l’amour, par son corps, par les sens qui m’attachent à
sa personne. J’entends son cœur qui bat contre ma
joue, me murmurant à l’oreille une consolation divine,
duquel je me dois de m’éloigner pour continuer à lui
faire part d’une vérité qui est uniquement mienne de-
puis bien trop longtemps.
- Je suis allé voir le médecin. Il m’a examiné. Il
m’a dit que je ne suis pas stérile, que de mon
côté, il n’y a aucun empêchement pour avoir
des enfants.
- Que dis-tu, Rachel?
- Que c’est toi qui est stérile, Nathan. Tu n’es pas
capable d’avoir d’enfants. Toi et Léa, vous
n’aurez pas de progéniture. Tu vas la répudier,
et elle aussi, sa vie perdra son sens, son goût,
pendant que toi tu continues à vivre sans en-
fants.
J’entends mes paroles résonner dans la cuisine, même
si elles étaient murmurées. Le silence est insupporta-
ble, pour ne pas dire violent, criant des pleurs, comme
si le cœur brisé d’un homme pouvait fulminer des cris
tissés par le néant. Son regard est mort, il est perdu
dans ses pensés, dans son passé, cherchant une expli-
cation, la compréhension, mais toutes les réponses
qu’il détient viennent de la Torah, du Talmud, et il ne
trouve pas ce qu’il cherche. Il ne trouve pas une issue.
Il est une âme perdue, il n’est plus dans la cuisine, il
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Création littéraire
B U L L E T I N E S T U D I A N T I N P A G E 1 8
est ailleurs, absent, comme moi, fantôme, déchets spi-
rituels d’une histoire d’amour qui termine par l’hor-
reur, par l’angoisse, par la mort de soi, par des cœurs
achevés d’une injustice culturelle, par la main cruelle
de Jérusalem.
- Où vas-tu? murmure-t-il.
- Je quitte retrouver Naomi. Elle viendra me cher-
cher à l’aube. En voiture. J’irai vivre avec elle
et Yacov.
Nathan me regarde, puis il ferme les yeux, en prière.
Je lui donne sa place, tout en désirant être avec lui une
dernière fois, tout près, blottit contre sa poitrine,
contre son cœur, une dernière fois.
- Viens avec moi.
Je le suppliais de venir, l’idéal d’être avec lui plus fort
que tout ce que j’aurais pu désirer. Il fige devant l’ab-
surdité de l’idée, devant la possibilité d’échapper à
une vie maudite, d’échapper à l’humiliation, d’aban-
donner une femme à qui il s’était déjà donné en maria-
ge. Il se rassoit, incapable de porter le fardeau qu’était
devenu sa vie. Tout comme moi.
- Sors d’ici, Rachel.
- Viendras-tu avec moi?
- Sors Rachel.
Je suis déchirée par l’envi de rester près de lui et par
le devoir de lui obéir. Ce n’est plus ma maison, il n’est
plus mon mari, il ne me doit rien. La stérilité était sa
malédiction, son destin est sien, et je n’en suis pas res-
ponsable. Je lui écris l’information sur papier, la lais-
sant sur le comptoir.
- Je t’aime.
Puis sur ce, je quitte le lieu à jamais, les larmes brouil-
lant la nuit froide. Au nouveau jour commencera ma
nouvelle vie.
REMERCIEMENTS
Nos remerciements aux professeures Constance
Cartmill et Louise Renée.
University of Manitoba French Club
University of Manitoba French Club est un groupe
d’étudiants qui organise des réunions, des dîners,
des soirées cinéma et des sorties à d’autres évène-
ments locaux comme le Festival du Voyageur.
Leur but est de fournir des occasions où les étu-
diants peuvent pratiquer leur français.
Vous pouvez retrouver les évènements à venir du
club sur Facebook au http://www.facebook.com/
group.php?gid=59852490672 ou en cherchant
«University of Manitoba French Club » sur Face-
book.
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