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khmer histical phonetics

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  • Norme et phontisme dans le Cambodge moderne

    Jean-Michel Filippi

    Ce texte a lambition de proposer des matriaux prliminaires pour construire une histoire de la norme linguistique dans le Cambodge moderne.

    Nous chercherons corrler les premiers rsultats dune recherche sur le phontisme du khmer contemporain1 non pas lexpos officiel dune orthopie qui dfinirait le bon usage khmer, car cet expos nexiste pas (ou pas encore), mais des comportements2 qui rendent explicite la trame de fond sur laquelle slaborent les attitudes de dsirabilit ou de non dsirabilit envers un phontisme donn ; en dautres termes, nous essaierons de cerner, dans le Cambodge moderne, la consistance dun phontisme conu comme valorisant et den dterminer assise et provenance.

    Le matriau utilis provient dune analyse phontique au sens large, en ce quelle inclut une attitude purement phontique qui repose sur une analyse fine de la substance sonore ainsi que sa reformulation en rseaux doppositions distinctives, en dautres termes, une reprsentation phonologique. Poser la notion de norme linguistique tout autant quune norme linguistique particulire prsuppose ncessairement du comparatif, car toute construction normative repose sur une dialectique dintgration rejet, or lanalyse phontique possde lavantage, sur les autres plans de lanalyse linguistique, de pouvoir mettre en jeu lensemble des units qui constituent la forme sonore dune langue3, ce qui, dans le cas dune tude comparative, constitue un avantage apprciable.

    1 Il sagit de travaux sur le khmer de Phnom Penh, mais surtout de lensemble des enqutes de terrain destines constituer un atlas linguistique du Cambodge. Ces enqutes portent sur des points distants, lun de lautre, dau plus dix kilomtres et couvriront tout lespace linguistique khmer lintrieur des frontires actuelles du Royaume du Cambodge. Les domaines privilgis de cette tude sont le lexique, avec un corpus de 2000 units, llucidation des systmes phonologiques des parlers locaux, ainsi que ltude de la variation phontique. Lessentiel des donnes recueillies et traites, jusqu prsent, provient des provinces de Kandal, Prey Veng, Tako, Kompong Spoeu et Kompong Cham ; quelques recherches ont galement t faites Siem Reap et Batdambang . Filippi (2002), Filippi et Hiep (2006), Filippi et Hiep (2007). 2 Nous entendons par l comportements quotidiens, mais aussi comportements de recherche en linguistique khmre. 3 Ce nest pas un hasard si la plupart des travaux comparatifs (Atlas linguistiques, tudes sociolinguistiques) ne peuvent faire lconomie dune composante phontique.

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  • 0. La norme et son discours.

    Le linguiste a coutume didentifier la notion de norme langagire son nonc qui, conu sous la forme dun discours prescriptif4, distinguera, une bonne fois pour toutes, les comportements langagiers permis des interdits. Une telle identification obit, de notre point de vue, une vision rductionniste qui prsente linconvnient majeur dinterdire une approche de la norme en termes gntiques ou plus gnralement, de causalit profonde. Les mises en forme injonctives existent bel et bien mais elles ne sont quun point extrme auquel la notion de norme, conue dans toute sa complexit, na logiquement pas vocation invitable aboutir ; en dautres termes, si le discours de la norme peut, en aval, reprsenter la norme, il nenglobera pas pour autant lessence de la norme langagire. Quest-ce qui pourrait donc en constituer lessence? La rponse est malaise car aux sciences du langage, qui nont ici pas vocation offrir une mthodologie de recherche, doivent sajouter des analyses autres5 : psychanalytique, anthropologique, sociologiqueNous proposerons cependant, et titre provisoire, de slectionner deux aspects interdpendants qui nous semblent constitutifs de la norme langagire6: il sagit, dune part, de lesthtique de la totalit organique dont rendent compte en surface les thmes de lordre, de lharmonie et de la logique dans la langue7 et, dautre part, de la peur de leffet destructeur que le temps exerce sur cet difice8, ce qui peut, entre autres, se traduire par un recours lcriture, medium stable, sil en est. Peut-tre, cela peut-il aider formuler un chanon manquant entre discours et essence de la norme ; il sagit bien dun chanon car, dun degr dabstraction adquat pour subsumer lnonc prescriptif, ces deux aspects nen puiseront cependant pas la dimension causale. Si nous les citons ici, sans en dtailler outre mesure le contenu, cest dans lintention de montrer que la normativit en langue englobe bien plus que le discours prescriptif.

    Un exemple, pris dans la pratique linguistique moderne et dune ironie trop belle pour tre vit, clairera notre propos. La linguistique scientifique se fonde, entre autres, sur une opposition prescription / description9, le premier terme, cens rsumer la position des grammairiens traditionnels, est rejet dans les tnbres de la pense pr scientifique, alors que le linguiste, dune objectivit exemplaire, dcrirait la langue telle

    4 Ce discours comprend lensemble des textes qui dfinissent le bon usage linguistique ; un bon reprsentant de cette tendance est en France Le bon usage de J. Grvisse 5 Sans traiter explicitement des questions de norme, la mthode de Fnagy (1991) permet de poser les vritables fondements dune esthtique dans la langue. Il sagit dune approche pluridisciplinaire qui, entre autres, permet dinterprter des substances phoniques par le recours la psychanalyse. 6 Ces deux aspects se retrouvent galement chez Millroy (1978). 7 Lacadmie franaise cre en 1642 en est un bon exemple. 8 Il existe un excellent matriau anthologique de lattitude du puriste face au temps chez Millroy (1978) et Aitchinson (1991) 9 Cette attitude est thorise chez Martinet (1960) et ses disciples.

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  • quelle est10. Ce positivisme linguistique cache en fait un malaise profond qui nous intressera directement ici. Le linguiste construit son espace de recherche en excluant le discours prescriptif, sattribuant par l une mthodologie descriptive qualifie satit de scientifique , or on peut lgitimement sinterroger sur ce quimplique la description structurelle dune langue. Ltablissement de rgles destines subsumer le fonctionnement dune langue donne est en ralit bas sur un parler bien localis ou un groupe social particulier, un dcoupage prcis de la temporalit11, voir un seul individu : le linguiste12 ; quon largisse le corpus descriptif dautres parlers ou groupes sociaux et la logique interne de la description sestompe13. Le systme, que les exigences structurelles de la linguistique14 gnrent en guise de description dune langue, est doublement ferm, dune part, par une exclusion de la variation langagire, spatiale ou sociale, dautre part, par une exigence de synchronie qui exclue toute temporalit ; en rsum, nous obtenons l deux caractristiques de lesprit normatif sur la critique duquel la linguistique a pourtant construit sa mthodologie descriptive. Nous tirerons de cela une conclusion minimale : la linguistique na pu et ne peut gure proposer de thorie pour expliciter la notion de norme langagire.

    Il nest gure surprenant que les approches variationistes15 diverses, dont nous nous inspirons ici, comme la dialectologie et la sociolinguistique, se soient dveloppes et continuent de se dvelopper en marge dune linguistique officielle avec laquelle elles nentretiennent que des rapports distants, voir pas de rapports du tout. Ce sont prcisment ces approches qui ont permis denvisager srieusement la notion de norme. Pour ne laisser place aucune ambigut, nous adopterons ici la position selon laquelle la norme langagire dans ses fondements essentiels est dune antriorit logique et temporelle au discours qui, ventuellement, la dcrira. 10 Il nest gure besoin dpiloguer sur linanit de cette conception, quil suffise de considrer la grammaire de Panini (IV sicle avant notre re) ; il sagit dun trait normatif conu par la volont de prserver une prononciation correcte des prires vdiques, mais qui comporte aussi une description phontique articulatoire dont loccident noffre pas dexemple avant le XIX me sicle et des procdures de contrle de la variation reposant sur un critre de pertinence qui anticipe les travaux des phonologues du XX me sicle ; Allen (1965), Joshi et Kiparsky (1980) 11 Mme si lon considre que les deux axes saussuriens de synchronie et de diachronie, Saussure (1972), relvent du point de vue et non pas de la nature de la langue, ce point de vue est essentiel pour poser la nature systmique de la langue ; cest une vision similaire qui permet de dcrter que le changement phontique nest pas observable, Bloomfield (1933). Quant la diachronie saussurienne du Cours de linguistique Gnrale, elle sanalyse, en toute logique, comme une suite de synchronies. 12 The Saussurean paradox could explain why Bloomfield could analyze Chicago English from his own personal knowledge, Labov (1972) 13 Ainsi, lhistoire des relations entre dialectologie et linguistique. Depuis le dbut du XXme sicle, les traitements linguistiques (no grammairiens, structuraux et gnrativistes) des donnes de la dialectologie se sont solds par des checs rpts : Gilliron (1915), Moulton (1960), Weinreich (1964), Newton (1972), Chambers et Trudgill (1980). 14 Nous entendons par l les linguistiques qui ont domin le monde universitaire durant le XXme sicle, quelles soient dobdience structuraliste ou gnrativiste. 15 Pour une prsentation dsormais emblmatique des thses variationistes, Bailey (1972)

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  • 0.1 Lancrage spatial de la norme

    Nous prendrons comme point de dpart le fait que les pays voisins du Cambodge

    ont norm le phontisme de leurs langues respectives sur une base gographique. Cela implique la slection dun parler (ou dun ensemble de parlers) qui servira dtalon une langue dite standard . Ainsi, dans le cas du Vit-Nam, la langue standard sest constitue sur la base des parlers du nord16, en Thalande, ce sont les parlers de la Thalande centrale qui constituent le Tha standard17, en Chine, les parlers de la rgion de Pkin fournissent larmature phonique qui est prne dans lenseignement et la plupart des mdia18.

    La situation au Cambodge doit sanalyser tout autrement car il nexiste aucun texte qui mentionnerait un parler quelconque pour en recommander lusage du phontisme. Est-ce dire, comme il la t suggr19, que lespace khmer prsenterait un degr dhomognit linguistique qui ferait dfaut aux pays voisins? On peut difficilement proposer une rponse faute dtudes dialectales approfondies20 ; toutefois, toute langue, conue dans lespace ou elle est mise en uvre, est consubstantielle une variation qui se traduit par une stratification verticale (variation sociale) et horizontale (variation spatiale) et il nexiste vraisemblablement pas de mthode qui permettent de quantifier le degr de compacit ou de diffusion dune langue.

    Nous mettrons lhypothse que les notions de compacit ou de diffusion ne sappliquent qu posteriori la langue et proviennent bien plutt des rapports entre un espace culturel originel et une extension territoriale. Il serait bien plus logique de parler du territoire des tats modernes comme culturellement et/ou ethniquement plus compact ou plus diffus, cette diffusion rsultant dune extension par rapport un espace territorial originel. Ainsi, tudier la gense dun vietnamien standard ou dun chinois standard peut se concevoir comme ltude des conditions dmergence dune norme dans une rgion donne (le Tonkin ou le nord de la Chine), ou bien comme ltude de limposition par dcret dune langue standard lensemble dun pays, ce qui ne nous intressera gure. Nous pouvons entrevoir ici la complexit des imbrications sous-jacentes au concept de norme.

    Il importe dsormais, pour rentrer dans le vif de notre sujet, de reconsidrer lhistoire de la description phontique du khmer en slectionnant quelques descriptions dans une priode qui stend du dbut du XX me sicle aux annes soixante dix. 16 DeFrancis (1977) 17 Marvin Brown (1985) 18 He (1932); Chao (1976); DeFrancis (1980) 19 The dialects of Cambodian are remarkably homogeneous, and the degree of dialect variation seems to be roughly comparable to that between the various dialects of American English. Even the dialects spoken in northeaster Thailand and western South Vietnam appear to be mutually comprehensible with the dialects spoken in Cambodia, the differences being perhaps on the order of those between British and American English. Huffman (1967) 20 Outre les travaux de latlas linguistique en cours, on peut citer divers articles qui dcrivent le phontisme de dialectes du khmer :Sakamoto (1968), Martin (1975), Minegishi (1985), Wayland (1996), Filippi (2002). Il sagit dun maigre bilan qui dispense de toute affirmation catgorique sur le degr dhomognit du khmer parl lintrieur des frontires du Royaume du Cambodge. Quant au critre de comprhension , il sagit dune notion pour le moins approximative, Hymes (1974).

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  • 1. Les descriptions du khmer et leur contenu phontique

    Il ne sagit pas tant de comparer des descriptions que de cerner leur objet. Il serait effectivement insens de rechercher une base de comparaison des travaux que tout loigne : lpoque, les prsupposs mthodologiques, le choix des lieux de description, la slection des locuteurs natifs, sans parler des rsultats. Outre sa mthodologie, une description se dfini prioritairement par son objet et lobjet semble faire ici lunanimit : la langue khmre ou cambodgien21. La description dun phontisme devant reposer sur une analyse de la matrialit sonore, une question premire surgit : comment et ou sincarne cette langue khmre? 1.1 Une matrialit dsincarne

    Larticle de Finot (1903) ne vise pas la description phontique du khmer, il sagit simplement pour lui de construire un systme rationnel de transcription latinise pour servir aux travaux de lEcole Franaise dExtrme Orient (EFEO). Finot slve contre lemploi de la translittration avec des arguments phontiques : Toutes les explosives sonores du sanscrit ( lexception dune seule, a) sont des sourdes en khmer ; tandis que, linverse, les deux sourdes, a et pa, sont des sonores ; les voyelles sanscrites ont pris une prononciation diffrente, selon quelles affectent une consonne sourde ou sonore en sanscrit 22. Il sagirait premire vue de proposer une transcription plus en accord avec la ralit phonique du khmer, cest ce quentend faire Finot avec cependant une importante rserve : la translittration nest gure mieux adapte aux recherches linguistiques quaux ncessits pratiques. Un autre systme soffre nous, cest celui qui consiste noter simplement les sons, abstraction faite de lcriture : il est encore moins recommandable que le premier. On ne peut songer fonder une notation rgulire sur un lment aussi instable que la prononciation, qui varie avec les temps et les lieux, avec la condition de celui qui parle, avec louie plus ou moins fine de celui qui coute. On naboutirait qu la confusion 23. On ne saisit ds lors plus trs bien la mthode de Finot qui semble prner une romanisation mi chemin entre transcription phontique et translittration sans indiquer une mthodologie qui justifie son systme : Il reste une dernire solution : cest de choisir une transcription unique, qui satisfasse la fois aux besoins de la philologie et ceux de la pratique, en tenant compte la foi de lcriture, qui est llment fixe du langage, et de la prononciation, qui en est llment vivant 24. Suit une srie de tableaux ou Finot expose son systme quil accompagne dexplications pour interprter phontiquement les graphies quil a proposes. Si ses descriptions phontiques ne manquent pas de prcision, il nest par contre jamais fait 21 Finot (1903), Maspero (1915), Martini (1946), Henderson (1952), Khuon (1961) Gorgonijev (1966), Huffman (1967, 1970-a, 1970-b). 22 Finot (1903) P. 1 23 Finot (1903) PP. 4, 5 24 Finot (1903) P. 6

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  • mention de la moindre source (locuteur, lieu, voir autorit) susceptible de les ancrer dans la ralit linguistique du Cambodge.

    Prs de la moiti de la monumentale grammaire de Maspro (1915) est consacre des questions de prononciation, trs souvent en relation avec lcriture. La prononciation dcrite provient de lanalyse dun khmer rel et non pas des tiquettes immmoriales qui dcrivent la prononciation des lettres du sanscrit : Il est remarquer dailleurs que la division des consonnes en sourdes et sonoresne correspond rien de prcis pour les Cambodgiens daujourdhui .25 Par contre, Maspero ne livre aucune information sur lorigine des prononciations quil dcrit. 1.2 Le systme de Martini

    Avec ltude de Martini (1946) qui est la premire approche du khmer en termes de phonologie, on dispose enfin dun ancrage dans lespace : Nous avons pris pour base de notre aperu, la prononciation de Phnom Penh, qui est une moyenne entre le conservatisme de Battambang et la diphtongaison du parler cambodgien de la Cochinchine 26. Lanalyse de Martini du systme phonologique du khmer et de ses ralisations phontiques mrite quon sy arrte. Nous prendrons comme exemple son traitement des voyelles longues antrieures et postrieures que rsument les tableaux ci-dessous27 et auquel nous confrontons nos interprtations phonologiques et phontiques:

    Martini (1946) Filippi et Hiep (2006) Terme khmer

    Reprsentation Phonologique

    Transcription phontique

    Reprsentation Phonologique

    Transcription phontique

    Traduction

    RBIg pri [pri] /pri/ [pri] Bouea macrophylla RBag prie [prie] /pri/ [pri] confus

    eRBg pri [pr] /pre/ [pre] antique

    eRbg pre [pre] /pre/ [pre] huile

    ERB pr [pr] /pr/ [pr] soie

    ERbg pr [pr] /pra/ [pra] brosse

    R)ag pra [pra] /pra/ [pra] tour Tab. 1 voyelles antrieures longues 25 Maspero (1915) P. 116 26 Martini (1946) P. 114 27 Nous restituons avec exactitude les signes employs par Martini, sans cependant indiquer sa translittration des termes khmers, sans intrt pour notre objet.

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  • Martini (1946) Filippi et Hiep (2006) Terme khmer

    Reprsentation Phonologique

    Transcription phontique

    Reprsentation Phonologique

    Transcription phontique

    Traduction

    KU ku [ku] /ku/ [ku] paire

    KYr kuo [kuo] /ku/ [ku] Il convient

    eKa kU [kou] /ko/ [ko] boeuf

    kYr ko [ko] /ko/ [ko] remuer

    K k [k] /k/ [k] muet

    ekar k [kao] /ka/ [ka] raser

    k k [ k] /k/ [k] cou Tab. 2 Voyelles postrieures longues

    Le systme de Martini a ceci de particulier quil augmente le nombre des degrs

    daperture en intgrant les diphtongues linventaire des voyelles longues ; cette interprtation, qui repose sur un traitement des diphtongues en monophtongues, est phonologiquement tout fait acceptable, mme si nous ne la suivrons pas.

    Huffman cite la description de Martini comme a complete treatment of the non-intonational features of Cambodian phonology, but whose phonetics lead one to suspect that he was dealing with a rather variant dialect28 et precise par ailleurs que: The dialect spoken in Phnom Penh and in the immediately surrounding area of Kandal Province differs phonologically from both the standard colloquial and the Takeo dialect29. Il napparat pas que la description de Martini soit base sur le dialecte de Phnom Penh30, mais plus vraisemblablement sur la prononciation de lettrs, rsidents Phnom penh, qui lui ont servi dinformateurs, ce qui pourrait expliquer les parents certaines quoffrent les descriptions de Martini et de Khuon Sokhampu (1970).

    Entre les approches de Finot, de Maspro et celle de Martini, Phnom Penh est devenu un centre culturel important: Linstitut indigne des tudes du bouddhisme du

    28 Huffman (1967) P.9 29 Huffman (1967) P. 14 30 Les premires descriptions, toujours trs partielles, que nous ayons du parler phnom penhois remontent aux annes soixante, Noss (1961) insiste sur un traitement du / r / caractristique du parler de Phnom Penh quil oppose au khmer standard ; Huffman (1967) met en vidence les diffrences des oppositions vocaliques, notamment de longueur, entre khmer standard et dialecte Phnom Penhois ; Gorgonijev (1966) est seul crire (P. 11) que Les principes de la prononciation littraire qui sont vhiculs par lcole, le cinma, la radio et la tlvision proviennent du dialecte de Phnom Penh [Traduit par nous], mais il ne propose pas de description du dialecte en question, ne donne pas de renseignements sur le niveau dducation de ses informateurs et ses exemples Phnom penhois, lis au traitement du / r /, semblent contredire son affirmation. A ces textes, il convient dajouter notre propre description, Filippi (2007). En tout tat de cause, le dialecte de Phnom Penh ne semble avoir, lpoque, que peu de rapport la gense dun khmer standard.

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  • petit vhicule est cre en 1930 et sera rebaptis en 1939 Institut bouddhique , le premier tome du Dictionnaire Khmer paratra en 1938, le deuxime en 1943 ; un autre vnement essentiel est linstitution de la Commission culturelle en 194631. Jusque l, les politiques lies lenseignement en khmer et au maintien dune tradition crite avaient eu pour cadre le monastre sans la prsence dune autorit centralisatrice susceptible de rguler les initiatives locales ; en tmoigne, mme jusqu aujourdhui, la multiplicit des orthographes sur les murs des pagodes et dans les manuscrits, ce qui, lpoque, avait provoqu les vives critiques de Maspro32.

    Dsormais, partir des annes trente, les cadres dune planification linguistique sont mis en place essentiellement sous limpulsion des religieux. On assiste alors une politique de cration de mots nouveaux qui sera plus tard remise partiellement en question33, ainsi qu une stabilisation de lorthographe.

    En matire dorthopie, en revanche, hormis des recommandations ponctuelles, rien de global na t produit. Ce qui ne revient pas dire quil y ait eu fluctuation en matire de norme phonique car, durant cette priode, deux attitudes vont tre luvre : dune part, linfluence de lcriture sur la prononciation et, dautre part, le suivi de modles. 1.3 Ecriture et prononciation

    Nous illustrerons le rapport criture prononciation de faon apparemment

    paradoxale en nous basant sur larticle fondateur de Henderson (1952). Ecrit par une phonticienne de renomme mondiale, il sagit du premier article exclusivement consacr la phontique du khmer.

    Nous reproduisons ci-dessous son diagramme des voyelles longues34ainsi quun tableau les exemplifiant dans lequel nous avons ajout nos propres transcriptions phonologiques : i u

    e e o o

    ae ao

    a a

    31 Khin Sok (1999), Antelme (2001) 32 Lorthographe, jamais fixe jusquici, est reste soumise aux fantaisies des scribes qui constituent au Cambodge la classe lettre P. 36 ; pour une opinion oppose, Tandart (1910) 33 Lexique de khmrisation (1973) 34 Henderson (1952) P. 159

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  • Henderson (1952) Filippi et Hiep (2006) symboles exemples symboles exemples

    Orthographe khmre

    Traduction

    i mi i mi mIg tante yt jt yWt lent u puc u puc BUC race e lev le eLv bouton e pep e pep eBb moue o lok o lok elak matre o kon o kon kUn enfant ae tae a ta Etg dcorer k e ec Ejk sparer ml ml emIl regarder km km Km bosse ao baoc a bac ebac arracher a ham a ham ham interdire a hay a haj ehIy dj dp dp db bouteille

    Tab.3 Le systme de Henderson

    Les deux analyses arrivent des rsultats similaires dans linventaire des phonmes, savoir lattribution chacune des units dune forme phonique distincte. Mais ce qui nous intressera particulirement relve de la transcription phontique.

    Dans la transcription de Henderson, huit voyelles longues sur quinze sont affectes dun accent aigu qui indique quelles sont prononces avec un registre de voix souffle, les sept restantes sont prononces avec un registre de voix normal.

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  • Henderson dfinit les registres du Khmer de la faon suivante: The characteristics of the first register are a normal or head voice quality, usually accompanied by relatively high pitch. The characteristics of the second register are a deep rather breathy or sepulchral voice, pronounced with a lowering of the larynx, and frequently accompanied by a certain dilatation of the nostrils. Pitch is usually lower than that of the first register in similar context35. Autrement dit, le vocalisme du khmer est structur sur la base dune opposition phonatoire36 binaire qui oppose une voix normale une voix souffle . Cela a effectivement t le cas et permet de rsumer le passage dun khmer angkorien un khmer post angkorien37 et un khmer moderne. Ainsi, une opposition consonantique non voise / voise caractristique de lpoque angkorienne (type t /d ) va succder lpoque moyenne une opposition non voise / souffle (type t/d 38) et lpoque moderne, labsence pure et simple dopposition dans le khmer central, les deux types tant ramens au non voisement (type t).

    Nous prendrons le traitement phontique du mot Ta canard pour illustrer ce phnomne en le simplifiant quelque peu :

    Epoque I Epoque II Epoque III da da ti39

    Tab. 4 Registre de voix souffle et volution du phontisme du khmer.

    Si lopposition phonatoire voix normale / voix souffle se maintien aujourdhui de

    faon rsiduelle dans quelques parler khmers40, il est, par contre, surprenant que Henderson ait pu, en 1952, centrer sa description du khmer sur cette opposition ; les choses peuvent sclairer si lon considre les informateurs auxquels Henderson a eu recours, en premier lieu, le Professeur Keng Vannsak41.

    Henderson explique les diffrences phontiques entre ses deux informateurs en qualifiant le style de M. Keng Vannsak de plus contrl et surtout en ce que la 35 Henderson (1952) P. 141 36 La mthodologie de la phontique moderne distingue soigneusement lactivit articulatoire qui comprend les mouvements des organes situs en amont de la trache de lactivit phonatoire qui consiste en la vibration (ou son absence) des cordes vocales ainsi que dans les diffrentes configurations de la glotte (espace compris entre les cordes vocales) qui dterminent des modes phonatoires (ou registres) spcifiques ; Ladefoged (1975, 1995), Catford (1980), Laver (1980, 1994) 37 Parmi les nombreuses tudes consacres ce phnomne : Martinet et Haudricourt (1946), Pittman (1976), Ferlus (1979) Diffloth (1982) Filippi et Hiep (2006) 38 Les deux points souscrits sont la notation moderne de lAlphabet Phontique International (A. P. I.) pour la voix souffle, ce qui correspond laccent aigu de Henderson. 39 Cette construction est simplifie dessein. Une description vritablement phontique de ce processus devra prendre en compte les variantes dialectales dont nous avons dj recens un certain nombre : [t], [tie], [ti], [t], [ta], etc. A ce sujet, il est vain denvisager une histoire du phontisme du khmer pralablement une description des dialectes. 40 Ainsi le parler khmer de Thung kabin en Thalande dcrit par Thongkum (1998) 41 N en 1925, il sagit dun des plus brillants intellectuels de sa gnration. A la fois pote, philosophe et linguiste, ses principes de crations des mots nouveaux constituent un texte essentiel la comprhension des dbats linguistiques des annes 60 et son enseignement a profondment marqu la vie intellectuelle cambodgienne, Khing Hoc Dy (d), 2006.

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  • diffrence de qualit de voix et lexpression des deux registres taient clairement identifiables42.

    Nous mettrons deux hypothses :

    1. La prononciation du khmer dcrite par Henderson est en fait le sociolecte43 du Professeur Keng Vannsak et non pas un parler khmer identifiable au sein dune communaut donne44. 2. Ce sociolecte doit son phontisme linfluence prpondrante de lcriture.

    Il est difficile de concevoir lexistence, dans le royaume du Cambodge des annes cinquante, dun parler khmer dont le vocalisme resterait entirement structur par une opposition de registres de voix, mme sil reste, ici et l, des reliquats de registre de voix souffle45.

    Lcriture peut apporter une rponse car lalphabet khmer possde, pour des consonnes occlusives dsormais homophones, deux graphies dont lune rend compte de la consonne non voise et lautre de la consonne anciennement voise ; ainsi, la graphie

    k correspond en vieux khmer comme en khmer moderne la prononciation [k], alors qu la graphie K a correspondu en vieux khmer la prononciation [] devenue [k] en khmer moderne46.

    Ce qui pose problme est que la mtalangue des grammairiens cambodgiens continue de diviser les consonnes en voises et non voises (gha et agha) non pas sur la base du phontisme du khmer contemporain mais partir de la classification des grammairiens indiens, pertinente pour le sanscrit ainsi que de faon partielle pour le khmer ancien, mais totalement inadapte au khmer moderne. On peut trs bien concevoir que ce soit cette diffrence de graphie qui, interprte en termes de registres de voix, a permis de construire de faon purement artificielle le phontisme dun sociolecte.

    42The pronunciation here described is that of Mr. Keng Vannsak, a young Cambodian born at Kompong Chhnang All examples have been checked with a second Cambodian, Mr. Keo Mongkry, and where his usage differs from that of Mr. Keng, this has been notedMr. Keng, as a philosophy student with literary and dramatic leanings, was aware of and interested in language from both the philosophic and aesthetic standpoints. His style of utterance was in general more deliberate and controlled than that of Mr. Mongkry, who as a student of economics was less concerned with language for its own sake. The two styles complemented each other well. Mr. Kengs style was helpful in that the different voice quality and manner of utterance of the two registers were clearly, sometimes startlingly, recognizable, even in fairly rapid speech, whereas Mr. Mongkry appeared often to make no distinction other than that of vowel quality. Henderson (1952) PP. 148 -149. 43 Sociolecte est pris comme quivalent de dialecte social , c'est--dire un ensemble de formes utilis par un groupe dindividus dans des contextes particuliers, la diffrence de dialecte qui na que des implications rgionales. 44 Quon ne sy mprenne pas, il ne sagit pas de souponner le Professeur Keng Vannsak davoir fabriqu un parler de toutes pices ; bien au contraire, son parler est tout fait normal dans un registre de communication particulier, savoir un contexte compris comme formel auquel correspond un style linguistique qualifi par Huffman (1967) de highly formal and idealized et par Gorgonijev (1966) de prononciation typiquement standard [Nous traduisons]. 45 Ainsi les prononciations du mot gaz Phnom Penh : [kah], mais aussi [ah] et [ah]. 46 Sur la question de la translittration, Antelme (2002)

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  • Cette influence de lcriture se constate galement dans le traitement des

    occlusives vlaire devant les voyelles antrieures. Ainsi aux graphies k et g correspondent linitiale de syllabe et devant les voyelles postrieures les prononciations [k] et [], par contre devant les voyelles antrieures [i e

    ], une rgle de palatalisation sapplique que nous formulons comme suit : [k] [c] et [] []. Cette rgle, jusqu preuve du contraire, trs largement dominante dans les parlers khmers centraux47, se constate chez le deuxime informateur de Henderson, mais non chez son informateur principal, le Professeur Keng Vannsak, qui sen tient vraisemblablement lcriture.

    Un autre exemple est la distinction en position finale de mot des sons [s] et [h]48 qui, elle, na jamais t rvle par une tude dialectale quelconque.

    Il sagit bien videmment dexemples destins tayer et non pas prouver une hypothse, un gros travail de collecte des donnes resterait accomplir pour recueillir les tmoignages des acteurs de la vie culturelle et ducative de lpoque. 1.4 Le recours au modle

    Une deuxime tendance voque consiste dans le recours un modle en prenant pour base de la description du phontisme le sociolecte dune personnalit reconnue du monde des lettres. Pour illustrer cette tendance, nous nous appuierons sur la thse du professeur Khuon Sokhampu49. Il sagit dun formidable travail de description qui na pas encore son quivalent pour le khmer contemporain. Nous reproduisons ci-dessous son inventaire des voyelles longues50 et brves accompagn dexemples et de nos propres transcriptions, cette fois phontiques, linstar de celles de lauteur :

    47 Il existe pourtant un isoglosse sparant la prononciation de k et de c aprs voyelle antrieure et un isoglosse / dans le mme contexte. Cet isoglosse nest pas encore localis avec exactitude faute dune tude dialectologique exhaustive, mais permet dopposer, par exemple, la ralisation [ke] dormir en khmer central de la ralisation [ke] en Cochinchine (Kampuchea Kraom). 48 My principal informant felt that the two ought to be kept apart, and he always distinguished them in careful utterance. Henderson (1952) P. 170. 49 Une version en langue khmre a t propose par son auteur en 1970, cest cette version, dont nous disposons, que nous utiliserons ici. 50 Nous avons reproduit les signes utiliss conformment loriginal, lexception du point souscrit, actuellement non disponible dans lA.P.I., qui indique une fermeture de la voyelle ; nous y avons substitu le signe [ ] dont la fonction est identique.

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  • Khuon Sokhampu (1970) Filippi et Hiep (2006) symboles exemples symboles exemples

    Orthographe khmre

    Traduction

    i rik i ric rIk panouir i cit ct Cit prs e sek e sec esk perroquet e tec tc tic peu e pep e pep eBb moue e rec e rec erc abm pt pt eBT mdecin rh rh ErH casser a kak a ka kak corbeau a kan a kan kan ; tenir jt jt yWt lentement tk tk Twk eau pp pp buWb beuglement d d dwg savoir c c eCIg jambe u puc u puc BUC race u tum tm TuM mr o do o do dUg noix de coco o khoh kh xus diffrent o lop o lop elaP envie krp krp RKb couvrir rt rt rt ; courir ct ct ct garer kp kp kb ; enterrer

    Tab. 5 Le systme de Khuon Sokhampu

    13

  • Cette prsentation, simplifie dessein, na que pour but de rvler un vocalisme dans ses grandes lignes.

    Un commentaire qui rendrait justice au Professeur Khuon Sokhampu impliquerait la prise en compte de labondance des dtails phontiques que son travail nous livre, car lauteur, en authentique phonticien, base son analyse sur un traitement de la matrialit sonore dans toute sa complexit et en ayant recours des techniques instrumentales.

    A linstar de la description de Martini, son systme prsente cinq degrs daperture pour les voyelles non diphtongues51, ce qui est galement le rsultat quobtient Gorgonijev (1966). Ce nest pas identique au systme vocalique du parler phnom penhois de lpoque dont nous navons pas de description sur le vif , mais que nous sommes parvenus reconstituer par le biais dinformateurs qui ont vcu Phnom Penh dans les annes soixante52. Quelques diffrences importantes peuvent tre notes entre le parler de Phnom Penh de lpoque et la description de Khuon Sokhampu: les degrs daperture des voyelles non diphtongues sont au nombre de quatre, le [] est beaucoup plus ouvert, la voyelle [] dcrite comme une voyelle darrire moyenne non arrondie est en ralit une voyelle centrale moyenne non arrondie.

    Il y a aussi des diffrences importantes dans la ralisation des diphtongues, pour

    ne citer quun exemple, le mot RBH est transcrit [prih] au lieu de [prah]. Quant aux consonnes, leurs prononciations diffrent galement, outre la rgle de

    palatalisation des consonnes vlaires aprs voyelle palatale qui ne sapplique pas, il faut mentionner la prononciation [k] aprs les voyelles ouvertes [a a ] alors quil sagit en ralit, dans le parler phnom penhois de lpoque, de locclusive glottale [], ces deux derniers cas permettent de subodorer une influence de lcriture sur la prononciation.

    En fait, le Professeur Khuon Sokhampu est parfaitement explicite sur le niveau de langue quil dcrit en voquant lAuguste Vnrable Chuon Nat53 qui sest exprim presque chaque semaine la radio nationale dans le cadre dune mission consacre la langue et la littrature54 et dont il a pu disposer des enregistrements. Nous avons en partie cout ces missions55 et avons pu analyser le phontisme du Vnrable qui savre trs proche de la description du professeur Khuon Sokhampu.

    Nous sommes cette fois en prsence dune norme phonique dont la gense se fonde sur le parler dune personnalit saisi partir dun cadre formel : des missions de radio sur la langue littraire. Nous ne pensons pas que ce parler ait eu une assise rgionale particulire autre que trs partielle, car linfluence de lcrit y est trs perceptible ; il sagit vraisemblablement dun sociolecte de lettrs qui reste confin des contextes formels et sur lequel un trait dorthopie aurait pu ventuellement se baser. Il

    51 Il serait plus exact de dire que les deux reprsentations se correspondent phontiquement, mais quelles diffrent phonologiquement, car Martini, confrant un statut phonologique de monophtongues deux diphtongues, obtient un systme sept degrs daperture. 52 Filippi, J-M, The phonetics of Phnom Penh Khmer in the sixties, research methodology and outcomes, paratre en 2007. 53 Lauguste vnrable Chuon Nath (1883 1969), suprme patriarche de lordre Mohanikay, a jou un rle immense dans la normalisation de lorthographe khmre et dans la cration de mots nouveaux ; Ds 1915, il a dirig les travaux qui devaient aboutir la rdaction du premier dictionnaire unilingue khmer. 54 Khuon Sokhampu (1970) P. 5 55 Que M. Deth Thach qui nous les a procures en soit chaleureusement remerci.

    14

  • nen a pas t ainsi car la guerre civile qui va marquer lexistence de la rpublique khmre et les vnements qui vont succder au 17 avril 1975 vont relguer tout cela dans loubli.

    Lexamen de ces descriptions56 permet de tirer quelques conclusions ; une norme phonique a bel et bien exist. Cette norme, qui ne semble pas avoir possd de support rgional consistant, se conoit comme rsultant des deux apports conjoints que sont, dune part, linfluence de lcrit sur la prononciation et, dautre part, le recours des modles. 2. Lpoque contemporaine

    Sil nexiste lheure actuelle aucune formulation dune norme phonique, il est

    par contre possible davoir recours des enqutes directes pour dcrire des parlers dans des contextes prcis ainsi que leurs variations.

    La sociolinguistique a permis lmergence de mthodologies sophistiques qui ont radicalement renouvel notre approche des phnomnes linguistiques. L ou une vision systmique traditionnelle ninterprtait pas des diffrences phoniques entre individus et les classait, faute de mieux, sous ltiquette de variantes libres , lapproche sociolinguistique a dvelopp une thorie de la variation57qui, structurant des donnes linguistiques en interaction avec des contextes sociaux, permet dexpliquer ces diffrences. Il sen est suivi une approche des phnomnes langagiers en termes vritablement sociaux58 , ainsi que la dfinition de procdures denqute ingnieuses. En mettant profit quelques unes de ces procdures, notre but a consist dterminer lensemble des paramtres phoniques segmentaux qui caractrisent, dans le Cambodge actuel, un niveau de langue standard. 2.1 Mthodologie

    Comme point de dpart, nous avons pos lhypothse selon laquelle lattitude

    langagire norme ne repose pas ncessairement sur une explicitation antrieure de la norme ; cela est effectivement la situation du Cambodge actuel, car il nexiste aucun texte explicitant le bon usage du phontisme. Se pose tout naturellement la question de savoir comment, en labsence de lnonc de la norme, dterminer une attitude norme. Le choix des locuteurs et des contextes dnonciation ont t essentiels : les locuteurs des deux sexes dont nous avons dcrit le phontisme sont au nombre de 12 et en moyenne gs de 30 ans ; de formation universitaire, ils sont en fin dtude ou, titulaires dune licence ou dune matrise, ils occupent des fonctions dans ladministration, lenseignement secondaire ou suprieur. Il sagit donc de personnes duques sexprimant dans un contexte formel car, outre un petit questionnaire, nous avons eu

    56 Nous insistons sur la description de E.J.A. Henderson et de Khuon Sokhampu car ce sont des phonticiens professionnels qui ont recours linstrumentation ; leurs analyses ne peuvent reposent que sur des productions sonores bien relles. 57 Nous nous rferons essentiellement Chambers et Trudgill (1998) et Labov (1972) 58 Ce qui na rien voir avec la conception saussurienne de la langue comme fait social car, comme la montr Labov (1972), la langue saussurienne nest sociale que dans la mesure ou elle soppose la parole conue comme individuelle

    15

  • recours la lecture de textes, de mots isols et de paires minimales. Nous avons galement enregistr, transcrit et analys des missions radio et tldiffuses59. Nous possdons de plus un corpus enregistr loccasion de cours universitaires que nous navons encore pu mettre entirement profit.

    Une attitude langagire norme repose sur une positivit : lensemble des productions phoniques dans un contexte formel donn, mais nexiste que borne par une ngativit que rsume la notion de hors norme , savoir les productions phoniques qui mergent partir de contextes non formels. Ces attitudes langagires hors norme ne se laissant que beaucoup plus difficilement constituer en corpus60, il a fallu penser des contextes et les actualiser sur la base de jeux de rle61 qui ont t enregistrs ; de plus, tout un corpus de productions non enregistres a t transcrit.

    Ces procdures ont permis de dterminer des attitudes langagires requises par des contextes formels, une partie de leurs variations, ainsi quun niveau de khmer caractristique de contextes non formels. 2.2 Phontisme du khmer dans des contextes formels

    Nous prsentons ci-dessous les rsultats obtenus pour les consonnes, les voyelles et les diphtongues62. 2.2.1 Les consonnes

    labiale dentale palatale vlaire glottale occlusive p b t d c k

    nasale m n vibrante r fricative s h

    approximant j approximant latral l

    Tab.6 Les consonnes

    Il nest pas de notre propos de dcrire ici toutes les ralisations contextuelles des units du tableau dont le nombre et la position ne sont pas sujets controverse63 ; trois points doivent cependant faire lobjet de commentaires :

    59 On trouvera les dtails concernant les procdures de recueil des donnes dans Filippi et Hiep (2007) 60 Ces difficults sont trs bien rsumes par le paradoxe de lobservateur de Labov (1972) 61 Par exemple, Vous travaillez dans une agence de voyage et vous conseillez un ami sur un voyage organis ; vous marchandez le prix dun kilo de crabes sur la plage de Kep, etc. 62 Pour des rsultats plus prcis, Filippi et Hiep (2006); Filippi et Hiep (2007). 63 Le mme nombre et, en gros, la mme classification se retrouvent dans les descriptions que nous avons voques. Une exception intressante est lutilisation, par la plupart des auteurs, du symbole [v] fricative labiodentale voise l ou nous employons le symbole [] approximant bilabial , emploi que nous justifions ailleurs, Filippi et Hiep (2006). Cela se comprend trs bien dans la mesure ou la notion

    16

  • La ralisation des vlaires [k] et [] aprs les voyelles et diphtongues antrieures

    [i e e a] sidentifie celle des palatales [c] et []. Lcriture, en continuant

    dutiliser les signes k et g , rend vraisemblablement compte dune prononciation plus ancienne que les tudes dialectales rvlent progressivement.

    Locclusive vlaire [k] est, devant les voyelles ouvertes et les diphtongues ouvrantes [a

    i u], toujours ralis comme une occlusive glottale [] en dpit

    de sa graphie qui reste k. Les ralisations de lapproximant bilabial [] sont les suivantes : linitiale de

    syllabe [], aprs [a ] comme la voyelle centrale ferme [] et aprs [i i a] comme [] qui est une voyelle de degr daperture intermdiaire entre [u] et [o].

    Ainsi aux mots )av nUv RCIv TIv exov Ekv correspondront les transcriptions suivantes : [ba] [n][cri] [t] [kie] [kae].

    2.2.2 Les voyelles

    Avant Central Arrire i (i) () u (u) Ferm

    e e o o Mi ferm

    Mi ouvert

    a a Ouvert

    Tab.7 Les voyelles

    Les voyelles du trapze peuvent tre illustres par les paires minimales qui suivent: 2.2.2.1 Oppositions de longueur

    /e/ ~ /e/: eKg dormir Kij dtective /ke/ ~ /ke/

    dapproximant est rcente, Ladefoged (1975), et bouleverse larchitecture de la classification phontique en introduisant une catgorie intermdiaire entre une turbulence constitutive des fricatives voises et une absence de turbulence caractristique de rsonnants comme les voyelles hautes, Catford (1972) ; Laver (1994)

    17

  • // ~ //: ECg gagner ecj sortir /c/ ~ /c/ /a/ ~ /a/: cab moineau cab; attraper /cap/ ~ /cap/ // ~ //: eTIb venir de TiBV divin /tp/ ~ /tp/ /o/ ~ /o/: eBat mas Bt; pencher /pot/ ~ /pot/ // ~ //: Kk Sorte de coq kuk hron /kk/ ~ /kk/ // ~ //: cb houe cb; finir /cp/ ~ /cp/

    Les voyelles fermes [i u] ne sont pas analysables en terme dopposition de longueur car leurs trois occurrences brves ne se rencontrent que dans un contexte prcis dont sont exclues des ralisations longues : avant [h] et [] pour [i] et [u] et avant [h] pour []. 2.2.2.2 Oppositions daperture

    /i/ ~ /e/: TI lieu eT part. ngative /ti/ ~ /te/ /e/ ~ //: emX ciel Emk branche /mec/ ~ /mc/ // ~ /a/: EKm bord kam dsir /km/ ~ /kam/ // ~ //: QW malade eQI bois /ch/ ~ /ch/ /u/ ~ /o/: KU paire eKa vache /ku/ ~ /ko/ /o/ ~ //: eKa vache K muet /ko/ ~ /k/ // ~ //: K muet k cou /k/ ~ /k/ /e/ ~ //: eKc schapper kic tche /kec/ ~ /kc/ // ~ /a/: ecj sortir caj; perdre /c/ ~ /ca/ // ~ //: Cit prs cit sentiment /ct/ ~ /ct/ /o/ ~ //: Tuk mettre tu table /tok/ ~ /tk/

    18

  • // ~ //: kudi cellule kt; noter /kt/ ~ /kt/

    2.2.3 Les diphtongues

    Une diphtongue se dfinissant comme une voyelle qui change de timbre au cours de son mission , nous reprsenterons les diphtongues du khmer au moyen dune flche qui relie la couleur vocalique de dpart la couleur darrive. Avant Central Arrire i u Ferm

    e o Mi ferm

    Mi ouvert

    a Ouvert Tab. 8 les diphtongues longues

    Nous donnons ci-dessous des exemples pour chacune des diphtongues

    mentionnes sur le trapze :

    /i/: Ta /ti/ canard //: elOn /ln/ vite /u/: KYr /ku/ falloir /a/: Et /ta/ seulement /a/: ebI /ba/ si /a/: eta /ta/ lion /oa/: Kat; /koat/ il, lui /e/: ekr /ke/ renomme /o/: dUr /do/ changer //: muWn /mn/ 10000

    19

  • Avant Central Arrire i u Ferm

    e o Mi ferm

    Mi ouvert

    a Ouvert Tab. 9 les diphtongues brves.

    Les trois exemples qui suivent prsentent une opposition entre les trois

    diphtongues brves :

    BYk groupe Bak mot Bak; porter : /pu/ ~ /pi/ ~ /pa/ Cette prsentation du phontisme du khmer standard est ncessairement sommaire

    et ne restitue pas grand chose des variations constates et des contextes phontiques qui les gnrent64. De surcrot, mme un niveau de langue soign laisse transparatre des variations inter individuelles qui doivent tre lobjet dune vritable analyse sociolinguistique.

    Les units dgages permettent cependant de tirer une conclusion immdiate : les caractristiques du phontisme du khmer dcrites ci-dessus, que nous qualifierons de standard, constituent galement, et peu dexceptions prs, le phontisme du phnom penhois.

    Comme exceptions, nous pouvons citer, dans un tat de langue non formel, une neutralisation des oppositions [e] / [e] et [] / [].

    Par contre, Ce qui est beaucoup plus sujet la variation rside dans la

    phontisation des units considres, en voici quelques exemples : le mot ehIy aura dans la variante formelle la forme phonique transcrite [haj] et dans des contextes moins formels tout un ensemble de formes phoniques telles que : [haj] produit avec une rtraction de la langue, ou encore [haj] ; la voyelle postrieure longue mi ouverte est souvent ralise [] dans un registre soign obtenu partir de la lecture de mots isols ou de paires minimales, par contre, dans des productions plus spontanes, on rencontre, par

    exemple pour le mot Kr muet , les variantes [k], avec une position centrale de la langue dans la cavit buccale, ou [k], voyelles de mme aperture, [] et [] diffrent en

    64 Pour davantage de dtails, Filippi et Hiep (2006)

    20

  • ce que la premire est non labiale, ou encore [k], le diacritique sous la voyelle indique une avance de la racine de la langue. Ces variations devront faire lobjet dtudes beaucoup plus systmatiques.

    La ressemblance systmique du phontisme des deux parlers, savoir le sociolecte standard et le parler de Phnom Penh, ne signifie pourtant pas que khmer standard puisse tre identifi au parler de Phnom Penh. 2.3 Le hors norme

    Ltude des ralisations phontiques dans des contextes non formels a permis de mettre en vidence certaines caractristiques dun khmer parl non standard. Nous en dcrirons une particulirement saillante qui nous clairera sur un aspect de la gense du parler standard. 2.3.1 Le traitement phontique de la graphie r

    Ce qui nous intressera ici est le traitement de cette unit dans un contexte pr

    vocalique. La variante standard ralise une vibrante lamino alvolaire [r] qui correspond de faon systmatique la graphie khmre r 65 alors que le parler de Phnom Penh ne prsente aucune occurrence de cette ralisation. A une syllabe r + voyelle, correspond dans le parler de Phnom Penh une ralisation syncrtique qui met simultanment en jeu un double phnomne phonatoire : tonalit descendante et voix relche souffle66 et un phnomne articulatoire : modification du timbre de la voyelle, gnralement vers un plus grande fermeture67. Le tableau ci-dessous prsente des exemples des deux types.

    orthographe khmre standard Phnom Penh traduction

    R)aM pram peam cinq

    Rtg; tr to droit

    ry rj j cent

    ERs sra s rizire

    eRsam sram sm enveloppe

    eRtIy traj tj rivage 65 Pour ce qui est des dialectes du khmer, la graphie r correspond la prononciation [r] par exemple Oudong et dans des dialectes situs au nord de Phnom Penh et, prcision essentielle, dcentrs par rapport aux voies de communication importantes. 66 Nous nous rfrons ici la typologie que propose Ladefoged (1995) des registres de voix ; cette typologie repose un traitement des registres en fonction dun continuum qui va du voisement total, qualifi de modal labsence de voisement : voix modale voix relche voix souffle voix murmure voix craquante (laryngalise) dvoisement. 67 Des descriptions de ce phnomne dans les annes soixante diffrent de la ntre. Ainsi Noss (1961) le dcrit comme a voiced pharyngeal spirant /H/, plus a rising pitch on the vocalic nucleus / / which continues to the end of the voiced portion of the syllable, alors que pour Huffman (1967), il sagit de a voiced uvular fricative.

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  • Tab. 10 Traitement de la graphie r en khmer standard et en Phnom penhois.

    Il est difficilement concevable quil existe un lien de filiation entre les deux ralisations, car on ne voit pas sur quelle base de comparaison analyser le rapport entre une vibrante alvolaire et une ralisation qui conjoint un phnomne de tonalit et de registre de voix la modification dun timbre vocalique donn. Les choses sclairent partiellement quand on compare les parlers du Bassac des deux cts de la frontire qui spare aujourdhui le Cambodge du Vietnam ; en ltat actuel de la recherche, sans prtendre des certitudes, nous pouvons formuler les hypothses suivantes :

    1. Le trait tonalit fermeture de la voyelle nest pas un substitut phontique la vibrante [r], mais une ralisation darrire de type fricative uvulaire voise []; cest ce quillustre lassimilation de la nasale au point darticulation de locclusive dans les exemples qui suivent : [bmpe] remplir : labial labial, [bnda] suspendre : dental dental, [bcol] : faire entrer palatal palatal, [bkat] : donner naissance vlaire vlaire, [brin] enseigner : vlaire - ?. Il faudrait, pour clairer ce rapport, poser une ralisation postrieure du r , au moins vlaire, peut tre pharyngale []68. Dans cette perspective, il devient concevable de construire un modle phontique qui rende compte du rapport, voir du rapport gntique, entre dune part, une ralisation postrieure uvulaire ou pharyngale et, dautre part, un phnomne qui comporte une composante phonatoire (ton + registre) et une composante articulatoire (fermeture de la voyelle).

    2. Ce sont probablement des parlers du Kampuchea Krom (Cochinchine) qui ont influenc le khmer central sur ce point et, partir de Phnom Penh, ce trait a t diffus dans les grands centres des provinces adjacentes69.

    Ces hypothses proviennent de donnes dialectales encore trop partielles et

    pourront tre dveloppes lorsque nous disposerons dun atlas linguistique des parlers khmers.

    La slection dune de ces variables apparat tre lindice prioritaire qui distingue un registre standard dun registre non standard70 et il est frquent de constater chez un mme individu le passage dune variable lautre en fonction du contexte social dans lequel il se trouve.

    Le fait, quen termes de phontique, on ne puisse pas poser une relation gntique au sein dun parler donn entre les deux ralisations actuelles rvle que le rle de la

    68 Il est intressant de constater que le Saoch de Veal Renh, la diffrence des autres langues pariques,

    possde cette ralisation dans des mots demprunt au khmer, ex. [pin] pour beRgon enseigner , Filippi (2000) 69 Le diffusionnisme est une thorie base gographique, Hagerstrand (1967), qui a montr quune innovation se dplace linairement du centre le plus important vers un centre secondaire ; cette thorie a t applique avec succs ltude des contacts entre dialectes par Trudgill (1974) 70 Cette situation nest pas nouvelle, ainsi Noss (1961): The outstanding point of difference between standard Khmer and Phnom Penh is in fact, the treatment of */r/ - a feature instantly noticed by the most unsophisticated observers.

    22

  • variable [r] dans la dtermination dun registre standard est un artifice qui a sa source dans lcriture. Pour rsumer, nous proposerons les tapes suivantes :

    1. Existence originelle dun isoglosse [r] []. La ligne exacte reste tracer, mais semble sparer le sud est du nord ouest.

    2. Passage du [] la ralisation syncrtique [voix relche tonalit fermeture vocalique], diffusion de ce trait et marginalisation de la ralisation [].

    3. Introduction tardive du [r] dans des parlers qui nont jamais possd une ralisation de ce type. Cette introduction sest faite partir de lcriture et/ou partir dun des nombreux dialectes qui laurait conserv et son maintien ultrieur, emblmatique dun style formel, sest fait sur la base de linfluence de lcrit.

    Nous pouvons donc dfinir la variante standard du khmer contemporain comme la

    combinaison du phontisme du parler actuel de Phnom Penh et dune influence de lcrit71.

    Reste savoir sur quelles bases le parler phnom penhois sest constitu, le repeuplement de la capitale au dbut des annes quatre vingt nincluant que peu de phnom penhois dorigine. Mme si cette question ne relve pas exactement de notre propos, nous pouvons apporter un dbut de rponse ; les donnes dialectales dont nous disposons permettent de dceler une influence importante de dialectes parls dans les provinces de Kampong Cham, Prey Veng et dans la portion de la province de Kandal comprise entre les fleuves Bassac et Mkong.

    Conclusion

    Notre propos na consist ici qu proposer des donnes prliminaires de futurs travaux sur la norme phonique au Cambodge et presque tout reste faire.

    Nous avons pu constater quil ny a pas, au Cambodge, de prescriptions explicites prnant, en guise de norme standard, un phontisme localisable dans lespace, pas plus quun expos officiel dune orthopie. Les choses se sont passes autrement dans les deux priodes que nous avons distingues. Dans une premire priode, du dbut du sicle jusquen 1975, les traits dominants semblent avoir t lindexation de la prononciation sur lcriture, ainsi que la slection du phontisme sociolectal dune personnalit ; dans une deuxime priode, la priode actuelle, le khmer standard sest constitu sur la base du phontisme du parler de Phnom Penh filtr par un recours lcriture, comme nous avons pu le constater dans le cas de linsertion du [r].

    Ltude de la gense du khmer standard doit tre approfondie dans plusieurs directions. Les progrs des tudes dialectologiques permettront de mesurer la diffusion de traits phontiques de Phnom Penh vers la province et de mettre ainsi en valeur ce qui est vritablement diffus, mais permettront aussi une avance importante dans ltude de la

    71 Il existe de nombreux autres traits galement lis lcrit, pour nen citer quun : style formel = intgrit de la syllabe initiale, type [bntp] / style non formel = modification et rduction de la syllabe initiale, type [ptp], [ktp]

    23

  • constitution du phontisme du parler actuel de Phnom Penh. Ltude du parler de Phnom Penh devra galement bnficier des techniques de plus en plus sophistiques quoffre la sociolinguistique; cela permettra den affiner la description phontique, dapprofondir ltude de la variation, ainsi que de situer des formes phoniques sur des chelles de dsirabilit et, bien entendu, de rejet.

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