anaes, ostéoporose et marqueurs osseux : avant l'heure, c'est pas l'heure

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Actualit@s Anaes, osteoporose et marqueurs osseux : avant I'heure, c'est pas I'heure Le Service @valuation des technologies de I'Agence nationale d'accr@ditation et d'@valuation en sant@ diffuse un rapport sur les indications des mesures quantitatives du tissu osseux. R apport interessant & double titre : il @va- lue la pertinence des differentes tech- niques diagnostiques et therapeutiques & I'in- tention des pouvoirs publics et des medecins et des biologistes. Objectif : aider & la mise en place des meilleures strategies de prise en charge de I'osteoporose seton le sacro-saint critere coQt/efficacit& Ce rapport actualise les deux precedents (1991 et 1998). II evoque la mesure de la densite mi- nerale osseuse (DMO) par la technique de I'ab- sorptiometrie & rayons X (DXA), ou osteoden- sitometrie, exploration souvent presentee com- me un ,, depistage ,, de t'osteoporose. Indirectement, cependant, I'Anaes redonne sa place au diagnostic biochimique puisque, se- Ion ses experts, ,, les donn@es cliniques dis- ponibles sont insuffisantes pour @valuersa pla- ce (la DXA) dans /'arsenal diagnostique -. Quand l'imagerie montre une lacune de la DMO, la perte osseuse est deja. significativement engagee, a. la difference des marqueurs biochimiques de resorption (perte) ou d'osteoformation (remodelage), qui peuvent dej& donner I'aJerte au stade de la pre-menopause (osteop@nie). Systematique, non Ici, I'Anaes precise bien que le depistage dans la population generale feminine tout venant ne peut @tresystematique. Selon une etude sue- doise de simulation, un tel balayage demogra- phique (suivi d'un traitement bien observe, & la suedoise) ne permettrait de prevenir que 1 & 7 % des fractures du col du femur ! La strategie la plus positive reste le depistage cible des femmes rr~nopausees asymptomatiques presentant plusieurs facteurs bien etablis de risque fracturaire. C'est I'avis de 57 % des tra- vaux d'experts actuellement disponibles et des recommandations autorisees les plus recentes : OMS, experts de la CEE, Groupe frangais de recherche et d'information sur les osteoporoses (GRIO). Question : comment determiner les femmes & risque ? II demeure ici des ,, zones d'ombre, tra- duisant & notre avis I'absence d'une strategie anti-osteoporose reposant sur un depistage precoce des signes biologiques des atteintes osseuses. En attendant un rapport d'evaluation des mar- queurs biochimiques osseux (?), quels sont les emplois de I'osteodensitom6trie, puisqu'elle existe ? Reponse : suivi de la perte osseuse ou du gain de DMO (sous traitement), & condi- tion, dit en gros le rapport de I'Anaes, que les mesures reiterees recourent toujours au me- me appareil et au meme site anatomique, que I'intervalle utile entre deux mesures soit evalue avec precision - qui suppose aussi une bonne reproductibilit@ des mesures (ce qu'assurent les marqueurs biochimiques), que I'on deter- mine & quelles femmes ces mesures reiter@es sont utiles - notamment osteoporose cortiso- nique, mais quid de I'hyperparathyroi'die ? Contr61e qualite pour I'image aussi Conclusions : - Les donn~es scientifiques ac- tuelles ne permettent pas de pr6ner aujour- d'hui la mesure de la DMQ comme moyen de d@pistage syst@matique et organis@ de toutes les femmes ~ la m@nopause ,. Cela dit, I'Anaes ne conseille pas I'abandon de I'idee d'un de- pistage, mais juge que des ,, methodes de contrele quafit~ soient mises en place de ma- ni6re rapide, et souligne (en gras dans le tex- te) que les procedures de realisation de la me- sure de DMO ,, doivent @tre redig@es par des professionnels ,, (ecartant le ,, lobbying ,, actuel commercial et parlementaire ? - NDLR). Or, cette reflexion, si I'on peut dire, n'est pas inno- cente. Si les marqueurs osseux sont & la no- menclature et ont droit au remboursement, - la ques#on de la prise en charge de la densitometfie (...) est controvers@e ,, note I'Anaes. Prise en charge reclamee depuis plusieurs mois par des parlementaires dans leurs questions ecrites aux ministeres concernes... Rien & esperer dans I'immediat : ,, Elle dolt fai- re I'objet d'une ~tude plus approfondie sur les facteurs permettant d'isoler un groupe dont le risque est assez ~lev@pour optimiser la vateur predictive (sic) de la mesure de la DMO et sur I'~ge opportun du d~pistage ,,, etc. Un delai que I'industrie du DIV devrait mettre & profit pour faire & son tour du ,, lobbying ,, sur les mar- queurs biochimiques osseux aupres de cer- tains parlementaires et des experts de I'Anaes% Mais le DIV serait moins bon en lobbying que I'imagerie, nous a-t-on dit aux JIB... J.-M, M. m I, Lisle disponible sur demande ~ RFL. 16 Revue Fran0aise des Laboratoires, fevrier 2002, No 340

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Actualit@s

Anaes, osteoporose et marqueurs osseux : avant I'heure, c'est pas I'heure

Le Service @valuation des technologies de I'Agence nationale d'accr@ditation et d'@valuation en sant@ diffuse un rapport sur les indications des mesures quantitatives du tissu osseux.

R apport interessant & double titre : il @va- lue la pertinence des differentes tech-

niques diagnostiques et therapeutiques & I'in- tention des pouvoirs publics et des medecins et des biologistes. Objectif : aider & la mise en place des meilleures strategies de prise en charge de I'osteoporose seton le sacro-saint critere coQt/efficacit& Ce rapport actualise les deux precedents (1991 et 1998). II evoque la mesure de la densite mi- nerale osseuse (DMO) par la technique de I'ab- sorptiometrie & rayons X (DXA), ou osteoden- sitometrie, exploration souvent presentee com- me un ,, depistage ,, de t 'osteoporose. Indirectement, cependant, I'Anaes redonne sa place au diagnostic biochimique puisque, se- Ion ses experts, ,, les donn@es cliniques dis- ponibles sont insuffisantes pour @valuer sa pla- ce (la DXA) dans /'arsenal diagnostique -. Quand l'imagerie montre une lacune de la DMO, la perte osseuse est deja. significativement engagee, a. la dif ference des marqueurs

biochimiques de resorption (perte) ou d'osteoformation (remodelage), qui peuvent dej& donner I'aJerte au stade de la pre-menopause (osteop@nie).

Systematique, non

Ici, I'Anaes precise bien que le depistage dans la population generale feminine tout venant ne peut @tre systematique. Selon une etude sue- doise de simulation, un tel balayage demogra- phique (suivi d'un traitement bien observe, & la suedoise) ne permettrait de prevenir que 1 & 7 % des fractures du col du femur ! La strategie la plus positive reste le depistage cible des femmes rr~nopausees asymptomatiques presentant plusieurs facteurs bien etablis de risque fracturaire. C'est I'avis de 57 % des tra- vaux d'experts actuellement disponibles et des recommandations autorisees les plus recentes : OMS, experts de la CEE, Groupe frangais de recherche et d'information sur les osteoporoses (GRIO). Question : comment determiner les femmes & risque ? II demeure ici des ,, zones d'ombre, tra- duisant & notre avis I'absence d'une strategie anti-osteoporose reposant sur un depistage precoce des signes biologiques des atteintes osseuses. En attendant un rapport d'evaluation des mar- queurs biochimiques osseux (?), quels sont les emplois de I'osteodensitom6trie, puisqu'elle existe ? Reponse : suivi de la perte osseuse ou du gain de DMO (sous traitement), & condi- tion, dit en gros le rapport de I'Anaes, que les mesures reiterees recourent toujours au me-

me appareil et au meme site anatomique, que I'intervalle utile entre deux mesures soit evalue avec precision - qui suppose aussi une bonne reproductibilit@ des mesures (ce qu'assurent les marqueurs biochimiques), que I'on deter- mine & quelles femmes ces mesures reiter@es sont utiles - notamment osteoporose cortiso- nique, mais quid de I'hyperparathyroi'die ?

Contr61e qualite pour I'image aussi

Conclusions : - Les donn~es scientifiques ac- tuelles ne permettent pas de pr6ner aujour- d'hui la mesure de la DMQ comme moyen de d@pistage syst@matique et organis@ de toutes les femmes ~ la m@nopause ,. Cela dit, I'Anaes ne conseille pas I'abandon de I'idee d'un de- pistage, mais juge que des ,, methodes de contrele quafit~ soient mises en place de ma- ni6re rapide, et souligne (en gras dans le tex- te) que les procedures de realisation de la me- sure de DMO ,, doivent @tre redig@es par des professionnels ,, (ecartant le ,, lobbying ,, actuel commercial et parlementaire ? - NDLR). Or, cette reflexion, si I'on peut dire, n'est pas inno- cente. Si les marqueurs osseux sont & la no- menclature et ont droit au remboursement, - la ques#on de la prise en charge de la densitometfie (...) est controvers@e ,, note I'Anaes. Prise en charge reclamee depuis plusieurs mois par des parlementaires dans leurs questions ecrites aux ministeres concernes... Rien & esperer dans I'immediat : ,, Elle dolt fai- re I'objet d'une ~tude plus approfondie sur les facteurs permettant d'isoler un groupe dont le risque est assez ~lev@ pour optimiser la vateur predictive (sic) de la mesure de la DMO et sur I'~ge opportun du d~pistage ,,, etc. Un delai que I'industrie du DIV devrait mettre & profit pour faire & son tour du ,, lobbying ,, sur les mar- queurs biochimiques osseux aupres de cer- tains parlementaires et des experts de I'Anaes% Mais le DIV serait moins bon en lobbying que I'imagerie, nous a-t-on dit aux JIB...

J.-M, M.

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I, Lisle disponible sur demande ~ RFL.

16 Revue Fran0aise des Laboratoires, fevrier 2002, N o 340