actes du colloque 2007 - afpssu · actes de la journée du 26 janvier 2007 ... les manifestations...

214
MEDECINE SCOLAIRE ET UNIVERSITAIRE L’ENFANT DIFFERENT Ses besoins spécifiques dans son parcours scolaire Actes de la journée du 26 janvier 2007 Editions AFPSSU

Upload: duongnhi

Post on 14-Sep-2018

218 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

MEDECINE SCOLAIRE ET UNIVERSITAIRE

L’ENFANT DIFFERENT

Ses besoins spécifiques dans son parcours scolaire

Actes de la journée du 26 janvier 2007

Editions AFPSSU

Page 2: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

2

Ce volume regroupe l'ensemble des textes remis pour la Journée du 26 janvier 2007 à L’ASIEM, 6 rue Albert de Lapparent, Paris 7ème

"Médecine Scolaire et Universitaire" Collection de livres thématiques

Direction et Rédaction de la publication : Dr Marie Claude ROMANO Dr Claude BRAVARD Secrétariat et Administration : A.F.P.S.S.U. 242 boulevard Voltaire 75011 Paris Mél. [email protected] Site : http://www.afpssu.com/ Imprimeur : Dumas imprimeur Impression n° Dépôt légal : janvier 2007 ISBN 978-2-9513364-2-1 EAN : 9782951336421

Page 3: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

3

Conseil scientifique de l’AFPSSU

• Monsieur Pierre Baligand, Inspecteur de l'Education nationale honoraire chargé de l'adaptation et de la scolarisation des enfants handicapés, responsable du site "intégration scolaire et partenariat", membre de conseils d'administration des associations Avenir Dysphasie 17", "Clairvoyants", "Maison associative de santé" de La Rochelle, conciliateur à la MDPH.

• Docteur Catherine Billard neuro-pédiatre à l'hôpital Bicêtre de Paris

• Professeur Jean.- Jacques. Detraux, Psychologie et Pédagogie de la Personne Handicapée. Département des Sciences Cognitives, Faculté de Psychologie et des Sciences de l'Education de Liège

• Professeur Jacques Fortin pédiatre honoraire, professeur en santé publique et en sciences de l’éducation à l’université de Lille

• Monsieur Bernard Gossot, docteur en psychologie, Inspecteur général honoraire de l’Éducation nationale, médiateur de l’académie de Créteil, membre du Haut conseil scientifique et pédagogique de l’APAJH, membre du CA de l’Entraide Universitaire, président du Comité français pour la scolarisation des enfants et adolescents atteints dans leur santé.

• Docteur Sophie Lemerle , pédiatre, CHI de Créteil Service de pédiatrie, responsable de la commission adolescent à la société française de pédiatrie, présidente de la Société Française pour la Santé de l'Adolescent

• Professeur Daniel Marcelli, Professeur de Psychiatrie de l'Enfant et de l'Adolescent S.U.P.E.A. Centre Hospitalier Henri Laborit Poitiers

• Docteur Michèle Mazeau, médecin de rééducation pratiquant la neuropsychologie infantile

• Docteur Xavier Pommereau, Chef de service Pôle aquitain de l'adolescent Centre Jean Abadie, CHU de Bordeaux

• Docteur Anne Postel Vinay, pédiatre, hôpital Necker, service de génétique Paris

• Professeur Jean Louis San Marco Professeur de Santé Publique au CHU de Marseille et Président du Conseil d’administration de l’INPES

• Docteur Pierre Rivière , pédopsychiatre, responsable de l’hôpital de jour du Centre Marie Abadie,

Page 4: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

4

• Madame Régine Scelles, Professeur de Psychopathologie, Université de Rouen Responsable du Master 2 Pro "Violence Traumatisme et Prévention" Responsable du DU "Ressources et Vulnérabilités des Familles: Thérapies familiales et travail social" Membre titulaire du Laboratoire du PRIS, Responsable de l'équipe : Traumatisme et processus de subjectivation individuelle et familiale

• Professeur Danièle Sommelet, présidente de la Société française de pédiatrie. Hôpital d'Enfants Vandœuvre-lès-Nancy

• Docteur Anne Laurent Vannier, Chef du service de rééducation des pathologies neurologiques acquises de l'enfant à l'hôpital Saint Maurice (94) , responsable de centre ressources pour enfants et adolescents après atteinte cérébrale acquise, présidente de France Traumatisme Crânien, Expert judiciaire

Page 5: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

5

Sommaire

Ouverture de la journée 9

La Présidente de l’AFPSSU, Madame le Docteur Claude Bravard

L’enfant différent, son parcours scolaire 11

Mr Jean Pierre Baratault Inspecteur spécialisé, coordination académique ASH

Les besoins de l’enfant atteint de maladie chronique. Un modèle : le cancer 15

Pr. Danièle Sommelet Présidente de la Société française de pédiatrie. Hôpital d'Enfants Vandœuvre-lès -Nancy

Les manifestations psychiatriques rencontrées chez l’enfant épileptique d’âge scolaire : étude à propos de 100 cas 23

Dr S. Kasraoui, Ch.Kasraoui, A.Mrabet, MB.Halayem

Le Vivre avec une maladie à l’adolescence 31

Dr Patrick Alvin Pédiatre, Chef du Service de médecine pour adolescents Pôle Mère-Enfant-Adolescent Centre hospitalier du Kremlin Bicêtre

Les jeunes en situation de précarité : qui sont-ils ? Pourquoi seraient-ils différents ? 37

Pr. Jean Louis San Marco Professeur de Santé Publique au CHU de Marseille et Président du Conseil d’administration de l’INPES

Adolescents, psychopathologie et études 39

Dr. Patrice Huerre Psychiatre des hôpitaux, médecin chef de service de l'inter secteur VI des Hauts de Seine, ancien directeur médical de la clinique médico-universitaire Georges Heuyer. Fondation Santé des Etudiants de France

L’intégration scolaire d’enfants déficients en milieu non spécialisé : les enjeux 45

Jean Jacques Detraux Professeur à l’Université de Liège

L'enfant Intellectuellement Précoce et l’ANPEIP : 53

Madame Françoise Astolfi Docteur en psychologie - Enseignante et Formatrice - Vice-présidente de la Fédération ANPEIP

Pourquoi ce fréquent paradoxe : haut potentiel et échec scolaire ? 55

Françoise Astolfi docteur en psychologie, Lysiane Marchal Psychologue clinicienne -

Particularités neurologiques de l’enfant intellectuellement précoce. 61

Dr Marie-Noële Magnie, Maître de Conférences des Universités, Médecin des Hôpitaux

Page 6: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

6

Précocité intellectuelle et graphisme 65

Elisabeth Demeure, Orthophoniste, Nice

L’enfant intellectuellement précoce 69

Delphine Van Der Elst, Psychologue clinicienne. Dijon Sylvie Tordjman Professeur en Pédopsychiatrie, Université de Rennes 1

Expérience d’un parent bénévole 77

Sophie Mahey, ANPEIP Bourgogne

Etre parent d’un enfant différent 83

Pr Philippe Jeammet Professeur de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent, psychanalyste. Chef du service de psychiatrie des adolescents et des jeunes adultes. Institut Mutualiste Montsouris -Jourdan, Paris 14.

Présentation du site Intégrascol : www.integrascol.fr aide à la scolarité de l’enfant atteint de maladie ou de handicap 85

Dr. Anne Postel-Vinay Pédiatre Hôpital Necker-Enfants -Malades, service de génétique

ARTICLES COMPLEMENTAIRES 97

Dans les Yvelines, prévenir la souffrance psychique chez les ados 99

Francine Hirtz, Suzanne Wipff, Catherine Isserlis

Adolescence et santé, Constats et propositions pour agir auprès des jeunes scolarisés 105

Professeur Jean-Louis San Marco, Faculté de médecine de Marseille, Président du Conseil d’administration de l’Inpes

La prévention, affaire de la société tout entière 107

Philippe Jeammet Président de l'École des parents et des éducateurs Ile-de-France.

Enfants : mieux vivre avec une maladie ou un handicap 117

Isabelle Aujoulat Chercheur, Unité d'éducation pour la santé et d'éducation du patient - Reso, Université catholique de Louvain, Bruxelles .

Accueillir un enfant handicapé et lui donner sa place 123

Cécile Allaire, Responsable du programme Personnes handicapées à la Fondation de France

La politique de santé à l’éducation nationale 129

Docteur Marie Claude Romano Médecin conseiller technique honoraire de l'éducation nationale, administrateur de l'AFPSSU

T E M O I G N A G E S 145

Gauthier 147

Maman de Gautier

Rentrée scolaire des enfants handicapés Parcours du combattant ? 153

Elie Martin, Associations de Parents d'Enfants Déficients Auditifs

Page 7: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

7

« Signe particulier : Handicapé » Comment le handicap est-il vécu au sein de la cellule familiale 159

Jean-Michel Debernard, éducateur spécialisé

Un enfant pas comme les autres : l’enfant au fort potentiel intellectuel A propos d’une carte d’identité possible 175

C. Droehnlé-Breit, Psychologue pour enfants et adolescents,

Témoignage d‘une maman d’un enfant dyspraxique 181

Présentation d’une expérience professionnelle : le diabète cékoissa ? 205

JC Azorin Fonction Responsable Pédagogique Département Prévention Epidaure Montpellier

Nos partenaires 208

Page 8: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

8

Page 9: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

9

Ouverture de la journée La Présidente de l’AFPSSU, Madame le Docteur Claude Bravard

Pour rester dans la continuité des sujets proposés annuellement par l’AFPSSU sur le thème de la santé de l’enfant à l’école, nous vous proposons aujourd’hui une réflexion commune sur un sujet qui nous concerne tous ; l’accueil, l’accompagnement, l’insertion scolaire et sociale de l’enfant différent

Nous sommes souvent très gênés pour évoquer la différence Il faut le reconnaître l’intégration de la personne différente n’est pas facile Aucune société ne la pratique spontanément même si des évolutions favorables sont en cours dans notre pays.

Pour ce qui concerne l’enfant, la question posée est en fait ; comment prendre en compte l’identité de’ chaque enfant, la reconnaissance de ses différences qu’elles soient liées au handicap, à la maladie ou à un environnement social précaire préjudiciable à son épanouissement ?

L’école demeure pour eux un lieu d’apprentissage, un relais éducatif essentiel, un lieu de vie qui doit apprécier leurs besoins spécifiques pour les aider à accomplir ce parcours scolaire dans les meilleures conditions de réussite ; encore faut il être attentif à ces besoins, les identifier pour leur apporter aide et accompagnement dans le respect de leurs droits

L’ensemble de ces problématiques vont faire l’objet d’exposés par des experts que je tiens à remercier pour nous avoir accorder un peu de leur temps précieux et nous faire bénéficier de leurs connaissances, leurs réflexions et leurs espoirs. Je tiens également à remercier tous ceux qui ont accepté de nous adresser leurs témoignages.

Page 10: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

10

Page 11: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

11

L’enfant différent, son parcours scolaire Mr Jean Pierre Baratault

Inspecteur spécialisé, coordination académique ASH

En avant-propos, je voudrais un instant m’attarder sur l’intitulé du colloque qui comprend l’expression « enfant différent ». Tous les enfants sont à la fois singuliers et semblables par leur développement. La référence à une norme est autant imposée par la biologie que par le milieu social. L’enfant se construit dans une interaction permanente entre le biologique et le social. L’enfant handicapé n’échappe pas à ce principe.

Il est également soumis aux interactions mais en tire pas toujours les mêmes bénéfices : des adaptions des médiations sont nécessaires. Le principe même d’un accueil de proximité à l’école se trouve ainsi justifié ; à juste titre ? Indiscutablement, l’intégration scolaire prônée par la loi du 30 juin 1975 a démontré qu’un plus grand niveau d’exigence tirait vers le haut des populations, condamnées parfois hâtivement au nom de points de vue théoriques et globaux. Les enfants et adolescents porteurs de trisomie 21 constituent un exemple flagrant, certaines formes d’autisme également dans une moindre proportion.

L’accès à l’Ecole, lieu de toutes les interactions, est donc juste et justifié.

L’Ecole elle–même, est productive de normes : l’enfant de trois ans dès les premières heures de classe découvre qu’il n’est pas le seul centre du monde ; il est incité à passer de la sphère privée à la sphère publique, de la famille à la communauté scolaire et par là accède à la citoyenneté républicaine. La loi du 11 février 2005 inscrit en premier cet accès au droit. Au fond, elle développe une double appartenance :

- la première reconnaît l’enfant handicapé comme membre à part entière de son village, de son quartier. On peut penser qu’un directeur ou une directrice d’école puissent accueillir des parents en leur disant : « oui, votre enfant a droit à une place parmi nous ; il a accès à la scolarité,

Page 12: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

12

il peut être élève », plutôt que « cet enfant n’est pas pour nous, il y a des écoles spécifiques pour lui.

Bien entendu, la reconnaissance de la place de l’enfant handicapé à part entière, au sein de la communauté scolaire ne signifie pas pour autant que les conditions de sa scolarisation découlent du droit commun sans conditions.

- La seconde inscrit l’élève handicapé dans un parcours scolaire cohérent, sans ruptures : il s’agit de veiller aux ajustements entre les projets collectifs, ceux des classes fréquentées.

La loi exige l’accès à l’autonomie par la construction des projets de vie. C’est l’accessibilité qui en constitue la clef : pas seulement l’accès physique aux lieux publics mais aussi l’accès au savoir, à la culture, aux autres, à la communauté. Pour l’enfant, il s’agit d’abord de l’accès à l’école. Pour l’adulte, l’autonomie exige la responsabilité de la personne handicapée elle-même : cette dernière pilote son projet. Pour l’enfant, c’est la famille qui pilote ce projet. Rien ne peut-être décidé sans l’aval de la famille. Aucune réunion dont la vocation est de prendre une décision d’orientation, ou d’aménagement du temps scolaire, ne peut être tenue, de bout en bout, sans la présence de la famille ou de son représentant légal. Bien entendu, les professionnels peuvent se réunir pour évoquer une situation donnée (réunion de synthèse par exemple).

Par contre la réunion de l’équipe de suivi de la scolarisation, réunie à la demande de l’enseignant référent, ne peut se tenir hors de la présence des tuteurs légaux de l’enfant.

Je viens d’évoquer un nouveau professionnel : il joue un rôle déterminant dans le cadre des décrets d’application de la loi à l’école. Pour résumer sa mission, on peut dire qu’il est à la fois un garant et un médiateur.

Il garantit la cohérence et la continuité de l’élève handicapé scolarisé dans son secteur d’intervention. Le secteur comprend les établissements scolaires privés et publics du premier et du second degré. Il est, au fond, la mémoire du parcours de l’élève toujours référé à son établissement d’origine, tenu régulièrement informé. Prévenir les ruptures donc, communiquer l’information nécessaire dans le respect de sa confidentialité.

La scolarisation de l’élève handicapé est une dimension du projet de vie de l’élève : elle doit s’articuler avec le projet de soin, l’éducation familiale,

Page 13: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

13

les aides décidées par la commission des droits et de l’autonomie. La cohérence de l’ensemble suppose des négociations avec chacun des partenaires concernés, un accompagnement face aux différents points de vue parfois en tension. Enfin, avant même toute idée de projet, le référent est une personne ressource présentée comme telle par le directeur ou chef d’établissement à l’ensemble de la communauté scolaire ; une mission d’information donc, permanente.

Enfin le référent à une fonction de mémoire : outre la cohérence du suivi, elle peut constituer pour l’institution une source d’indicateur pour piloter des dispositifs concernés.

Pour finir, je voudrais centrer le propos sur la scolarisation. La présence de l’élève handicapé à l’école impose une contrainte forte : concilier le projet individuel et le projet de groupe : la nécessité, en quelque sorte, de faire du « sur mesure » dans une institution organisée pour fabriquer du « prêt -à-porter ». Cette nécessaire dialectique n’est pas propre aux élèves handicapés : elle est une richesse pour l’ensemble des élèves et sans doute une condition de la réduction, malgré les progrès, de l’échec scolaire.

La présence de l’élève handicapé à l’école suppose une étroite collaboration entre le pédagogique, le médecin et le social. Pour l’enseignant ces points de vue médicaux et sociaux ne sont utiles que dans la mesure où ils permettent d’orienter les pratiques pédagogiques. En particulier, les méthodes et techniques recommandées par les médecins sont nécessairement à prendre en compte mais l’enjeu pédagogique est la formation du citoyen et pas seulement la diminution de l’incapacité.

La présence de l’élève handicapé à l’école doit conduire à une réflexion sur les bénéfices que l’enfant dit « normal » peut en retirer faute de quoi la présence de ces élèves handicapés pourrait bien être considérée comme un désavantage pour l’école. Entre autres bénéfices, on serait en droit d’attendre que les générations actuelles amenées à inscrire la relation avec l’autre « différent » dans leur expérience sociale scolaire modifient leur représentation, changent leur regard de façon à percevoir la personne plutôt que le handicap.

Dans une classe de CE1 en début d’année, l’enseignante prépare l’arrivée d’un élève « différent » à partir d’une situation présentée dans un récit de littérature de jeunesse. Après un rapide échange avec les élèves,

Page 14: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

14

un petit doigt se lève. Interrogé, l’enfant déclare : « maîtresse, moi je sais ; il y a les handicapés « mental » et les handicapés « normal…! ».

Une parole d’espoir ?

Page 15: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

15

Les besoins de l’enfant atteint de maladie chronique. Un modèle : le cancer

Pr. Danièle Sommelet

Présidente de la Société française de pédiatrie. Hôpital d'Enfants Vandœuvre-lès-Nancy

Résumé de la conférence

Développement de la cancérologie pédiatrique - Une organisation internationale - 1969 : création de la Société Internationale d’Oncologie Pédiatrique - Une structuration nationale

§ En Europe de l’ouest, Amérique du nord § Puis pays émergents

- En France, une reconnaissance officielle 2003 : plan cancer ? soutien soins, recherche 2004 : circulaire DHOS ? place majeure des parents et

associations

Spécificités des cancers de l’enfant n Incidence faible

< 1 % des cancers à 2000 nouveaux cas / an de 0 à 18 ans n Multiplicité des types de cancer n Taux de guérison 75 % vs 30 % en 1970 n Prévention des complications aiguës et tardives et des séquelles n Développement des aides

Psychologiques Scolaires Socioprofessionnelles

Guérir plus et guérir mieux

Exigences de la prise en charge

n Les soins - Connaissance spécifique de cette pathologie -- SSuurr ssppéécciiaa ll ii ttéé ppééddiiaa ttrriiqquuee - Équipe hospitalière multidisciplinaire - Plateau technique adapté aux soins et à l’âge des patients - Procédures de soins conformes aux règles de sécurité et

d’efficacité

Page 16: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

16

n La recherche Ø Clinique

à Respect des lois, consentement des parents/enfants, gestion de la qualité

Ø Épidémiologie - Descriptive à registres spécifiques - Analytique à les causes

Ø Expérience des spécificités physiologiques de l’enfant : - Croissance - Nutrition - Développement cognitif, neurosensoriel, affectif

n Environnement thérapeutique adapté - Apprentissage scolaire - Activités ludiques …

n Accompagnement de la famille - Information - Aides psychologiques et socio-économiques

n Douleur et soins de support n Continuité des soins du centre de référence au domicile

Graduation des soins • 33 centres de référence (CHU et CLCC) • Equipes soignantes pluridisciplinaires • Missions

- Assurer le diagnostic - Décider le plan de traitement - Réaliser les étapes principales du traitement et de sa

surveillance - Assurer le suivi à moyen et long terme - Aider l’enfant et sa famille à trouver de nouveaux repères

Le personnel paramédical et les intervenants extérieurs - Psychologues, psychiatres - Assistantes sociales - Enseignants - Éducateurs - Animateurs - Associations de parents

Autres lieux de traitement - Services de pédiatrie des CH de proximité - Au domicile : rôle majeur du médecin traitant

Page 17: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

17

- Recours rare à des centres ou instituts spécialisés - Réseau régional de cancérologie pédiatrique adossé à un réseau

régional de santé en cancérologie

L’annonce du diagnostic aux parents n Moment essentiel

- Confiance - Acceptation du traitement et des incertitudes

ØMédecin senior, durée, langage adapté

n La vérité : le cancer - La lutte à engager - Le plan de traitement - L’espoir - L’organisation de la « nouvelle vie » de l’enfant et de la

famille n Le diagnostic : un temps de crise pour les parents

- Brutalité d’un diagnostic impensable - Révélation de la mort possible de leur enfant

n Nécessité d’entretiens répétés - Écouter les parents et répondre à leurs questions

n Chances de guérison et quand ? n Pourquoi et pourquoi pas nous ? n Depuis quand ?

- Documents d’information et lieux d’échanges

Les besoins d’accompagnement Déstabilisation personnelle, familiale, professionnelle, sociale + expériences antérieures, facteurs de fragilité

Aider les parents à réorganiser leur vie

L’annonce du diagnostic à l’enfant malade

n Base de l’information : le respect de l’enfant

Ø Langage adapté à l’âge - Maladie, examens, traitement, effets secondaires,

traitement de la douleur - Comment « vivre » avec sa maladie en évitant rupture,

isolement et dépendance - L’écouter et susciter sa parole - Documents d’information/âge

n Hospitalisation - Séparation brutale du milieu familial et scolaire

Page 18: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

18

- Perception immédiate de la gravité possible de la maladie

- Permettre la vie à l’hôpital

Le programme de traitement n Plan de traitement = Programme personnalisé de soins

- Concertation pluridisciplinaire - Protocole ayant fait l’objet d’un consensus national ou

international : le meilleur / état actuel des connaissances Essais thérapeutiques (60 - 70%) Recommandations (30 – 40 %) = études observationnelles Validation, enregistrement, analyse des données, publication

n Les essais thérapeutiques multicentriques Ø Respect des règles de bonne pratiques et des dispositions légales

(loi Huriet) Consentement libre, éclairé, écrit : parents ± enfants

Ø Difficultés propres à la pédiatrie Confiance et adhésion au programme de soins

n Soins de support - Douleur - Nutrition - Troubles digestifs - Anomalies hématologiques - Troubles neurologiques - Troubles respiratoires - Fatigue

L’échec thérapeutique Passage du traitement à visée curative au traitement palliatif

= temps précieux pour tous

n Mais - Les parents → guérir à tout prix - L’enfant → abandon - Les soignants → leur propre échec

n Lieu : domicile / hôpital n Ménager des « périodes de vie » : scolarité, jeu, fêtes n Vivre avec celui qui va mourir et qui le sait

Page 19: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

19

n Disponibilité, présence, communication avant la mort et pendant la période de deuil

Accompagnement de l’enfant, de ses parents et de ses frères et sœurs

La prise en charge psychologique Proposée, jamais imposée

l Ses raisons

n L’enfant / adolescent - Perte de confiance en soi, estime de soi - Angoisse (agressions, mort) - Privation de liberté - Dépendance et passivité - Culpabilité - Injustice - Perte d’identité - Régression - Dépression - Agressivité - Déni et non compliance - Ritualisation

Le « travail de la maladie »

L’enfant devient « L’acteur », s’approprie sa maladie et lui donne un sens »

→ Hyper maturité

n Les parents - Angoisse - Déstabilisation personnelle, conjugale, professionnelle, sociale - Culpabilité, - Agressivité, - Défiance - Surprotection - Abandon - Séparation - Chômage

n La fratrie - Culpabilité - Angoisse

Page 20: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

20

- Jalousie - Dépression - Agressivité - Difficultés scolaires

n Les acteurs A côté de l’équipe soignante et du médecin traitant : des psychologues, un pédopsychiatre référent, des éducateurs spécialisés (ado), des parents

- Soutien psy (entretiens, dessins, jeux) - Psychothérapie - Liaison entre intervenants à l’hôpital et à l’extérieur

Organisation de la scolarité : devoir et droit • A l’hôpital

- Fonction pédagogique « adaptée » - Fonction thérapeutique - En concertation avec :

n Les parents n Les soignants n L’école d’origine

• Education Nationale → enseignement primaire

• Associations bénévoles → enseignement secondaire

• A domicile - Assistance, après accord du Coordonnateur Départemental - Inscription au Centre d’Enseignement à Distance

• Retour à l’école d’origine (secret médical partagé avec l’accord des parents)

- Pendant et/ou après le traitement - Concertation enseignants/familles/médecin Education Nationale - Préparation du retour, adaptation du rythme

• En cas de difficulté (préexistantes ou secondaires à la maladie)

- Maintenir la scolarité en milieu normal avec soutien pédagogique adapté

- Si impossible : orientation vers l’enseignement spécialisé (changement d’établissement)

En règle : projet scolaire et professionnels inchangé

Page 21: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

21

Facteurs de risque de difficultés scolaires • Liés à la maladie et son traitement

Exemple : tumeurs cérébrales • Liés au patient

- Adolescence, absentéisme scolaire prolongé/répété, altération de l’image corporelle, mésestime de soi, isolement, échec, fatigue

• Liés aux parents - Surprotection, inquiétude, relations enseignants, sous-estimation, rôle de l’école, deuil anticipé, famille éclatée

• Liés aux enseignants - La mort, les mots, la pitié, la responsabilité

• Liés aux autres élèves - Curiosité, agressivité, moqueries, violence, rejet

Informations utiles au médecin et à l’infirmière de l’Education Nationale - Type de cancer et traitement, calendrier, nature des informations

données à l’enfant et à sa famille - Problèmes pouvant gêner l’insertion scolaire (parfois retardée) :

modifications physiques, nutrition, troubles neurologiques, sensoriels, sphinctériens, endocriniens, comportementaux

- Risque de traumatismes (cathéter central, prothèses, thrombopénie) - Risques infectieux - Cahier de liaison - Pratique sportive ? - Retentissement sur fratrie

Nécessité d’un partenariat enfant / parents / médecin traitant / centre de référence / mEN et infirmière scolaire/ enseignants - Dépistage et/ou suivi des troubles du comportement - Dépistage des troubles neurosensoriels et cognitifs - Discussion sur le maintien ou non en milieu scolaire normal - Modification éventuelle du projet scolaire et professionnel

Les autres formes de soutien n A l’hôpital

- Présence des parents et hébergement à proximité - Moyens de liaison : tél, fax, TV, magnétoscope, ordinateur - Éducateurs de jeunes enfants et d’adolescents - Travaux manuels (Dames en Rose) - Clowns

Page 22: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

22

- Musiciens - Professeurs d’éducation physique et sportive adaptée

n A l’extérieur - Camps de voile - A Chacun son Everest - Réalisation de rêves d’enfants - Spectacles, éducation physique adaptée, sports collectifs

La protection sanitaire et sociale n Rôle majeur de l’assistante sociale de l’hôpital

- Affection de longue durée – soins 100 % - Allocation d’Education Spéciale - Allocation Journalière de Présence Parentale - Carte d’Invalidité - Prestations supplémentaires/ressources A l’extérieur

n Mais difficultés persistantes - Financières - Garde d’enfants - Aide à domicile - Accès à prêts et assurances - Adaptation du temps de travail

Rôle majeur du monde associatif

- Représentants de parents = Partenaires des soignants - Place à l’hôpital et participation aux réflexions sur : traitement,

recherche, environnement - Enquête de satisfaction - Accès à des aides psychologiques, socio-professionnelles,

financières

Page 23: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

23

Les manifestations psychiatriques rencontrées chez l’enfant épileptique d’âge scolaire : étude à propos de 100 cas

Dr S. Kasraoui1, Ch.Kasraoui2, A.Mrabet3, MB.Halayem4

INTRODUCTION

Il est habituel de considérer que les patients épileptiques présentent plus de troubles psychiatriques que les sujets normaux. Ces troubles peuvent parfois prendre le devant de la scène clinique offrant alors un tableau clinique complexe pouvant entraver les processus de scolarisation du patient épileptique notamment l’enfant.

Pris alors au piège dans un système d’interaction où sa vulnérabilité et son impossibilité d’apprendre souvent méconnues de l’entourage familial et scolaire suscitent chez l’enfant une angoisse qu’il ne comprend pas et le pétrifie en retour

MATERIEL ET METHODE

Il s’agit d’une étude rétrospective portant sur100 enfants épileptiques colligés sur une période de 3 ans allant du 02 janvier 1997 au 31 décembre1999 ayant consulté dans l’unité de pédopsychiatrie du Centre National de Médecine Scolaire et Universitaire de Tunis(CNMSU).

Pour ce faire nous avons eu recours à un questionnaire comportant :

1-des renseignements concernant le profil général socio-économique (âge, sexe,…) 2-des renseignements concernant le profil général de la famille (consanguinité, nombre d’enfants dans la fratrie,…) 3-des renseignements concernant l’enfant (grossesse, développement psychomoteur,…) 4-des renseignements concernant la scolarité 5-des renseignements concernant la maladie épileptique (âge du début, type d’épilepsie, troubles psychiatriques associés, traitement, évolution

1 Unité de Pédopsychiatrie : Centre National de Médecine Scolaire et Universitaire. Tunis 2 Service d’Anesthésie – Réanimation : CHI de Poissy. Paris 3 Service de Neurologie : E.P.S Charles Nicolle. Tunis 4 Service de Pédopsychiatrie : E.P.S Razi. Manouba

Page 24: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

24

RESULTATS

La population d’étude constituée de 100 enfants épileptiques se caractérise par :

- Une moyenne d’âge à la première consultation de 8 ans et 10 mois, avec des extrêmes allant de 5 ans 8 mois à12 ans 9 mois

- Une légère prédominance masculine (sexe ratio=1.5)

- L’enfant épileptique est souvent l’aîné (38%) ou le second (28%) d’une famille comportant une moyenne de 3 enfants

- 30% des enfants épileptiques sont issus d’un mariage consanguin. Le taux de consanguinité dans la population tunisienne est de 21.22%(Institut National de Statistiques –INS 1989)

- 15% présentent des problèmes psychosociaux et environnementaux 5 % : les parents sont divorcés 4% : le père est décédé 3% : sévices et éducation rigides 1% : sévices sexuels à type de sodomisation 2% : rejet scolaire manifeste

- Les problèmes scolaires sont souvent révélateurs de la maladie épileptique:

55% des épileptiques consultent pour des difficultés scolaires 10% pour des troubles du comportement 12% pour suspicion d’épilepsie.

- Les crises généralisées sont retrouvées dans 97% des cas.

- Dans 81% des cas il s’agit d’une épilepsie idiopathiques ou cryptogénique.

- 71% des enfants ont des problèmes scolaires.

- 45% des enfants épileptiques présentent des troubles psychiatriques associées selon le DSM IV il s’agit de :

Ø Troubles dépressifs dans 26% des cas : Troubles dépressifs majeurs : 17 cas Troubles dépressifs non spécifiés : 9 cas Une patiente a présenté une tentative de suicide et un patient a présenté des idées suicidaires.

Ø Troubles anxieux : 16%

• phobie spécifique : 7 cas • troubles anxieux généralisé : 9 cas

Page 25: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

25

Ø Troubles du langage oral : 21% Ø Bégaiement : 11%

Ø Comportement perturbateur non spécifié : 3% Ø Trouble du contrôle des impulsions non classés ailleurs : 1%

(pyromanie) Ø Trouble hyperactivité avec déficit de l’attention : 1% (THADA) Ø Trouble desintégratif de l’enfance : 1% Ø Trouble de l’alimentation 1ere et 2éme enfance : 1% (anorexie

mentale)

- 98% des enfants épileptiques sont traités par le valproate de sodium.

- l’observance du traitement antiépileptique est plutôt bonne : elle passe de 65.9% à la première consultation à 81.3% à la quatrième consultation de contrôle.

- la majorité des manifestations psychiatriques ont été jugulée par une prise en charge psychothérapique, par un traitement psychotrope et par les thérapies de rééducation orthophonique et psychomotricité.

- l’évolution est favorable dans 65% des cas. Le suivi est irrégulier dans 14% des cas.

- Dans 17.5% des cas les patients sont perdus de vue. L’état est resté stationnaire dans deux cas : (T.H.A.D.A et un patient qui présente un comportement perturbateur non spécifié)

DISCUSSION

La légère prédominance masculine retrouvée dans notre série a été rapportée dans la littérature (1) (2) (3), elle n’est cependant pas significative. Dans notre étude cette prédominance masculine de l’épilepsie chez l’enfant pourrait s’expliquer par le fait que les problèmes scolaires, motif de consultation le plus fréquent, interpelleraient plus les parents quand il s’agit d’un garçon.

Les crises généralisées sont souvent le type de crises le plus fréquemment rapportées 40 à 60% (3)

L’épilepsie de cause inconnue (épilepsie idiopathique et cryptogénique) reste dans toutes les séries la plus fréquente : 60 à 77% (Jallon 2000) (4) 81% dans notre série.

71% des enfants épileptiques ont des problèmes scolaires. Jallon estime que dans les écoles ordinaires 20 à 70% des épileptiques ont une scolarité retardée ou devant être adaptée. J.J Guillarmé et R. Bobet (5) estiment que 30 à 40% des enfants présentent des difficultés scolaires.

Page 26: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

26

Les appréciations statistiques des troubles psychiatriques sont extrêmement variables, dépendant à la fois des critères de recrutement et des critères d’appréciation (6).

Il semble néanmoins exister, toutes épilepsies confondues, environ 50% de morbidité psychiatrique contre 21% dans la population générale. (7)

L’intérêt de plus en plus marqué pour l’étude des troubles mentaux dans l’épilepsie ne cesse de croître en raison des progrès importants dans plusieurs domaines (8). Les troubles épileptiques peuvent avoir de nombreuses relations avec les troubles psychiatriques (anxiété, dépression …) (9) (10).

W. Sallami et al (1996) (11) trouvent que 61% des jeunes épileptiques en milieu scolaire présentent des troubles psychiatriques .45% dans notre série.

A. Depaulis et al (2000) (12) trouvent que les adolescents ont une tendance significativement plus élevé à développer des symptômes anxieux et dépressifs que le groupe control

R. Ghacchem (1993) (14) trouve que la dépression est associée à l’épilepsie dans 24,3% des cas.

D. W. Dunn (1999) (18) dans son travail incluant des adolescents épileptiques âgés de 12 à 16 ans trouve que 23% présentent des symptômes dépressifs. 26% dans notre série.

Il semble que la dépression constitue le tableau psychiatrique le plus fréquemment associé à l’épilepsie (15 (2002) (16 (2005).

L‘anxiété chez l’épileptique est fréquente, même si sa prévalence n’est pas connue. Elle se rencontre dans des circonstances diverses.

Certaines études épidémiologiques estiment que l’anxiété est retrouvée dans 3 à50% chez les patients épileptiques (17).

R. Ghacchem (1993) rapporte que 8.1% des enfants épileptiques présentent des troubles d’allure anxieuses.16% dans notre série.

La survenue de trouble du comportement chez l’épileptique est une notion classique. Il s’agit habituellement d’une hyperkinésie, d’accès de colère, de conduite agressive, ou d’un comportement d’opposition. (19). S Fink et al (1997) (20), Lajoie J, Miles DK (2002) (21) rapportent que le trouble hyperkinétique avec déficit de l’attention (THADA) peut s’associer à l’épilepsie. 1% dans notre série.

Page 27: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

27

La place des crises épileptiques au cours des psychoses est variable avec une fréquence souvent peu importante (6).12 à20% des enfants psychotiques présentent des crises épileptiques (22). Un état de type psychotique a été observé dans la série de Billard et al (1982) (23).Dans notre travail un patient présente un trouble desintégratif de l’enfance.

Les troubles du langage oral avec épilepsie ont fait l’objet de plusieurs travaux (24) (25).De Negri en 1993 (26) distingue deux types de troubles :

* ceux acquis de la fonction verbale « aphasie proprement dite »

* ceux d’origine mat rationnelle de la fonction verbale, encore appelés « dysphasie »

Dans notre série 21% des enfants épileptiques présentent des troubles du langage oral.

D Ammar (1990) (27) rapporte que 4% des enfants bègues ont une épilepsie idiopathique associé. Dans notre série 11% des enfants épileptiques présentent un bégaiement.

Enfin P. Gelisse et al (20001) (28) rapportent 2 cas d’anorexie mental dans leur travail. Dans notre série une patiente présente un trouble de l’alimentation de la première et de la deuxième enfance type anorexie mentale.

CONCLUSION

L’épilepsie de l’enfant en milieu scolaire peut emprunter différents visages. Les difficultés scolaires et les manifestations psychiatriques sont souvent le motif de principal de consultation.

L’école est souvent un lieu révélateur de ces troubles, mais aussi un lieu de la société où l’enfant aura à vivre avec son épilepsie et tous les troubles qui lui sont associés et éprouvera parfois de la souffrance. La complexité du tableau clinique peut parfois rendre difficile l’intégration d’un enfant souffrant d’épilepsie au sein d’une école et d’une classe.

Cette maladie inquiète souvent l’entourage et affecte même le climat familial. Le caractère imprévisible des crises avec la crainte qu’elles surviennent en classe est une des principales inquiétudes des parents d’autant plus que la scolarité de nos jours figure parmi les principales préoccupations des parents.

Une action de sensibilisation de l’environnement familial et scolaire est toujours nécessaire afin d’intervenir le plus tôt possible et d’engager une prise en charge aussi multidisciplinaire que possible.

Page 28: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

28

REFERENCES

1. WANDERS WALLS FW, GOUDSMIT J, GAJDUSEK DC. Clinical characteristics of hilly prevalent seizure disorders in the Gbawein and Wroughbach clan region of Grand Bassa country, Liberia. Neuro Epidemiology 1983; 2:35-44.

2. ATTIA ROMDHANE N, MRABET A, BEN HAMIDA M. Prevalence of epilepsy in Kelibia Tunisia. Epilepsia 1993;34:1028-32.

3. JALLON P. Epidémiologie descriptive, facteur de risque et prévention des épilepsies. Encycl Med Chir, Neurologie 2001; 17-045-A-35,10p.

4. JALLON P. La prévention des épilepsies : le regard de l’épidémiologiste Epilepsie 2000 ; 12 : 85-94

5. GUILLARME JJ, BOBET R. L’enfant épileptique à l’école. Réadaptation, 1985; 317:10-12

6. BEAUSCHENE H, BROUSSARR G. L’épilepsie chez l’enfant in LEBOVICI S, DIATKINE R, SOULE M. Nouveau Traité de Psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. P. U. F, Paris, 1995 :733-755

7. ASSOCIATION DE FORMATION MEDICALE CONTINUE DU CHI DE POISSY ET DE POISSY VILLE. Séminaire de neurologie et de psychiatrie. Epilepsie, quelques questions simples… des réponses qui s’efforcent de l’être. Revue –prat 1987; 57-65

8. De TOFFOL B. Epilepsie et psychiatrie. Epilepsie 2005 ; 17 :3

9. VENAULT P, CHAPOUTIER G .Relations entre troubles psychiatriques et épilepsie : l’apport des études sur les rongeurs. Epilepsie2005 ; 17 :4-9

10. VERCUEIL L. Psychopathologie des épilepsies partielles pharmaco résistantes . Epilepsie 2005 ; 17 : 10-16

11. SELLAMI W et coll. Manifestation psychiatriques associés à l’épilepsie : Etude de 100 cas d’épilepsie en milieu scolaire. Quatrième conférence méditerranéenne sur l’épilepsie. Tunis, 1996.

12. DEPAULIS A, HELFER V, DERANSART C, MARESCAUX C. Anxiogenic-like conséquence in animals models of complex partial seisures. Neurosci Biobehave Rev 1997; 21(6):412-416

13. ALWASH RH, HUSSEIN MJ, MATLOUB FF. Symptoms of anxiety and depression among adolesent with seisures in Irdid, Northern Jordan. Seisures, 2000;9(6):412-416

14. GHACCHEM R. Troubles psychiques et enfants épileptiques. Thèse pour le doctorat d’Etat en Médecine. Tunis 1993:138

15. GILLIAM F, KANNER AM .Treatment of depressive disorders in epilepsy patients. Epilepsy et Behavior 2002; 5:2-9

16. CAMUS V. Epilepsie et psychiatrie: la dépression .Epilepsie2005; 17: 24-28

Page 29: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

29

17. SCICUTELLA A, ETTINGER AB. Treatment of anxiety in epilepsy. Epilepsy et behaviour 2002; 5: 10-12

18. DUNN DW, AUSTIN JK HUSTER GA. Symptoms of depression in adolescents with epilepsy. J Am Acad Child Adols Psychiatry 1999; 138

19. CLAVEIROLE P, GENESTE J, COUDER AJ. Aspect pychopathologique d’un trouble épileptique particulier de l’enfant Neuropsy .Enf. Adol, 1997,45(1-2):3 41

20. FINK S, DANION-GRILLIAT A, BECACHE E, HIRCH E, METZ-LUTZ MN, UVILLEMINM O, MARESCAUX CH. Trouble de l’attention avec hyperactivité et méthylphénidate (Ritaline): L’épilepsie est-elle une contre indication absolue ou relative. Neuropsy Enf Adol 1997; 10:605-7.

21. LAJOIE J, MILES DK. Treatment of attention deficit disorders , cerebral palsy, and retardation in epilepsy. Epilepsy et Behaviour 2002, 5: 42-48

22. DE AJURIA GUERRA J, MARCELLI D. Epilepsie de l’enfant in psychopathologie de l’enfant. Masson, Paris : 256-270.

23. BILLARD C, AUTRET A, LAFONT F et coll. Electrical Status Epilepticus during sleep in children : a reapraisal from eight new cases in: SRERMAN MB, SCOUSSE MN, PASSOUANT P. Sleep and epilepsy. London New York Academic Press 1982.

24. SAWHNEY IM, SURESH N, DHAND UK, CHOPRA JS. Acquired aphasia with epilepsy. Landau Kleffner syndrome. Epilepsia, 1988; 29/ 30:283-287.

25. NASS R, PETRUCHA D. Accquired aphasia with convulsive disorder: apervasive developemental disorder varianty. J Child Neurol, 1990; 5:327-328.

26. DE NEGRI M, DORIA L, VENESELI E. L’aphasie acquise avec épilepsie chez l’enfant. Neuropsychiatr. Enfance, 1983,31(11-12);515-25

27. AMMAR D. Bégaiement à propos de 100 cas. Thèse pour le doctorat en médecine. Tunis, 1990:164.

28. GELISSE P, GENTON P, SAMUELIAN JC, THOMAS P, BUREAU M. Psychiatric disorder in juvenil epileptic. Rev Neurol2001;157(3):297-302

Page 30: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

30

Page 31: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

31

Le Vivre avec une maladie à l’adolescence

Dr Patrick Alvin Pédiatre, Chef du Service de médecine pour adolescents Pôle Mère-Enfant-Adolescent Centre hospitalier du Kremlin Bicêtre

En général, l’enfant bien portant ne « sent » pas son corps, qui le laisse relativement tranquille tant que la croissance se poursuit de façon linéaire. A partir de la puberté en revanche, ce corps en pleine métamorphose devient un véritable « chantier », source d’interrogations, de préoccupations et d‘impatiences multiples. Soudain magnifié dans ses potentialités sexuelles, exposé de façon radicalement nouvelle aux regards extérieurs, ce corps devient le théâtre mais aussi le porte parole obligé et encore mal assuré d’un sujet et de son rapport au monde eux-mêmes en pleine mutation.

Etre malade à l’adolescence

Etre malade à l’adolescence c’est donc devoir gérer, en plus des bouleversements et de la « dysharmonie » liés aux transformations de cette période de la vie, les stigmates et contraintes liées à la maladie comme les interférences croisées entre adolescence, sexualité et maladie ; c’est en outre devoir vivre avec la conscience plus ou moins culpabilisante de l’impact du fait d’être « malade » sur les proches ; c’est enfin devoir composer avec ses parents sur la question de l’autonomie à propos des informations, de la relation de soins, des traitements, des rendez-vous, etc. Il faut savoir que toutes ces problématiques restent présentes chez bon nombre de ceux que l’on qualifierait volontiers « bien tirés d’affaire », voire quasiment débarrassés de leur maladie.

Plus que la maladie elle-même et ses signes visibles ou ressentis, ce sont les traitements et les contraintes imposées par la dépendance médicale qui peuvent surtout gêner l’adolescent dans son fonctionnement au quotidien. On sait bien qu’à cet âge, il est souvent plus tentant de courir pieds nus qu’avec un caillou dans sa chaussure… et l’aspect de la maladie le plus unanimement redouté n’est autre que son interférence avec la liberté personnelle, entendue comme la liberté perçue de pouvoir faire ce que l’on veut avec et surtout « comme » les autres adolescents. On ne s’étonnera donc pas que dans les enquêtes épidémiologiques, les adolescents porteurs d’affections chroniques déclarent autant - sinon plus - de conduites d’essai ou à risque que les adolescents indemnes de maladie. On ne s’étonnera pas non plus que

Page 32: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

32

les adolescents dont la maladie est d’apparence « invisible » peuvent redoubler d’efforts pour dissimuler la réalité de leur situation, quitte à la dénier, et vivre ainsi plus anxieusement, plus douloureusement que les autres la compétition avec les adolescents « normaux ».

La survenue d’une complication, d’une poussée évolutive ou d’un accident de parcours intercurrent, la nécessité d’une chirurgie, d’une transplantation d’organe par exemple, induisent une situation assez proche de celle du sujet jusque là en bonne santé et soudain victime d’une maladie grave. L’adolescent peut être amené à interpréter ce qui lui arrive comme une sanction de ses premiers émois sexuels, de ses tentatives d’émancipation ou des sentiments agressifs qu’il avait pu commencer à éprouver à l’égard de ses parents. La famille, de son côté, peut se sentir soudain menacée d’anéantissement.

Pour résumer, chez l’adolescent et contrairement au jeune enfant, la maladie prend le contre-pied des impératifs de développement (voir tableau). Un conflit surgit en effet entre deux systèmes de forces antagonistes : le premier, commun à tous les adolescents à partir de la transformation pubertaire et de la « poussée adolescente », stimule les conduites d’essai, les relations avec le monde extérieur, l’expression de la sexualité et en définitive la démarche émancipatrice ; le deuxième, du fait de la maladie et de ses répercussions tant personnelles que sur l’entourage, vient amplifier les difficultés, complique le processus d’autonomie, met à l’épreuve l’estime de soi et réalise autant de résistances à cette dynamique de développement. A l’extrême, le risque serait au « renoncement à l’adolescence », tel qu’il a pu être décrit à partir de certaines situations d’insuffisance rénale chronique. Enfin et contrairement à ce qu’on pourrait croire, les maladies les moins visibles ne sont pas forcément les mieux tolérées.

Les principaux impératifs de développement de l’adolescent

- Adaptation à la métamorphose pubertaire et à la maturation sexuelle au sens large - Affirmation de l’identité sexuelle et capacité d’engager une relation intime - Intégration au groupe des autres adolescents, d’une extrême importance à cet âge - Acquisition d’une autonomie puis à terme d’une indépendance vis-à-vis de la famille - Acquisition d’une identité propre avec estime de soi - Acquisition d’une position claire face aux aspirations futures : études, travail, famille...

Page 33: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

33

Comment doit-on se comporter auprès de l’adolescent malade ? Certainement le plus naturellement, le plus « honnêtement » du monde pourrait-on dire…, mais cela n’est pas suffisant. Que l’on travaille en pédiatrie ou en médecine de l’adulte, l’adolescent n’est pas un personnage ni un patient comme les autres. Si le médecin, les soignants brident la relation de soins en la réduisant aux seuls discours sur le traitement et ses modalités, l’ouverture à la réciprocité ne sera pas possible. S’ils ne reconnaissent que les parents comme véritables interlocuteurs, si a fortiori ils s’identifient à eux, ils risquent encore plus de méconnaître l’univers de l’adolescent malade.

Parler de la maladie à l’adolescence

Avec un adolescent, il est souhaitable de se tenir prêt à discuter de la maladie - et de la vie avec la maladie - sous quantité d’angles différents, en fonction des étapes maturatives du sujet, de la conjoncture ou de telle ou telle demande plus ponctuelle. En effet, du fait d’un double mouvement, rien ne peut être considéré comme statique dans ces situations. Qu’il s’agisse des manifestations cliniques ou des traitements, la maladie est toujours changeante, même lorsqu’il s’agit d’une évolution a priori linéaire (handicap « fixé », maladie d’évolution « linéaire », organe transplanté, etc.). Ensuite, l’adolescent est lui-même perpétuellement en mouvement : sa perception de la maladie évolue nécessairement en fonction de son développement personnel et de ses divers niveaux d’exigence, en particulier en termes de liberté ou d’autonomie. Les relations aux pairs, en particulier, deviennent ici fortement investies. Une étude auprès d’adolescents porteurs de cardiopathies congénitales a ainsi montré que leur perception de leur niveau de santé ne dépendait pas de la complexité objective de leur cardiopathie, mais de leur degré d’exclusion de certaines activités ou des conséquences de la maladie sur leurs relations avec les autres. Ainsi, telle limitation physique, telle obligation liée au soin encore tolérée en début de collège à 11-12 ans, le sera moins au lycée à 16-17 ans ; tel aspect de la maladie comme un retard pubertaire, une cicatrice ou autre disgrâce physique, etc., s’avèrera soudain très gênant dans le domaine des relations plus intimes ; tel autre viendra contrecarrer un projet récréatif, sportif ou professionnel, etc.

Ce qui est important, pour un adolescent, ce n’est pas tant de posséder une « culture médicale » sur sa maladie que de disposer d’une information pertinente eu égard à sa situation concrète personnelle. On comprend ici le caractère illusoire d’une annonce initiale, de surcroît souvent incertaine ou de longue date. Sans compter que tout au long du suivi pédiatrique, les diverses informations se sont avant tout adressées

Page 34: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

34

aux parents, ce que les enfants devenus adolescents ne se privent d’ailleurs pas de dénoncer : « Moi de toute façon, on ne me disait jamais rien ».

C’est bien pourquoi l’entrée en adolescence, étape majeure de subjectivation, demande que le médecin sache prendre l’initiative d’un « arrêt sur image », dont l’objet final n’est autre que celui d’une annonce différée et personnalisée, directement avec l’adolescent. Ce moment peut coïncider avec celui où il sera décidé qu’à présent devenu grand, l’enfant mérite d’être reçu en partie en tête à tête et examiné seul, hors la présence de ses parents. Ailleurs, il s’imposera de lui-même à l’occasion de telle ou telle circonstance. En médecine de l’adolescent, nous sommes devenus très familiers de cette pratique auprès des enfants qui nous sont confiés pour poursuite de leur prise en charge.

La revue de l’ensemble des évènements depuis le début de l’histoire, incluant la revue détaillée et commentée du dossier, permet alors d’exhumer des questions inédites ou restées en suspens parfois depuis fort longtemps. Celles tournées vers l’avenir concernent évidemment la dépendance médicale sous tous ses aspects ou l’avenir professionnel, mais naturellement aussi la sexualité, la fertilité, la parentalité...

Une telle reprise, en termes actualisés, est la seule à même de permettre à l’adolescent - indépendamment de ce qu’il sait ou croit savoir déjà - de véritablement s’approprier sa propre histoire et surtout, de commencer à mieux se situer personnellement face à cette maladie, aux soins qu’elle exige et à ce à quoi elle va le confronter en tant que futur adulte.

Avec les parents, le même type de travail est très recommandé, séparément ou dans le même temps. Il suscite des souvenirs de faits et d’émotions étonnamment précis, souvent traumatiques, restés longtemps enfouis du fait des sentiments puissants de culpabilité et de la non moins puissante « fuite en avant » imposée par la maladie et ses impératifs de soins partagés. Il permet aussi l’expression d’inquiétudes nouvelles, activées du simple fait de la croissance pubertaire et de tout ce qu’elle peut impliquer. Pour beaucoup de parents, accepter et accompagner l’adolescence d’un enfant malade n’est déjà pas chose facile ; projeter cet enfant dans un futur d’adulte l’est encore moins. Il faut pour cela en être arrivé à se réconcilier un minimum avec l’histoire et partant, accepter cet enfant tel qu’il est dans sa trajectoire, et non plus tel qu’il devrait ou aurait du être idéalement.

Page 35: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

35

Conclusion : pour une approche globale

Pour l’adolescent malade comme pour ses parents, un certain nombre de questions s’imposent, quel que soit le diagnostic, l’ancienneté ou la trajectoire de l’affection. Ces questions peuvent également guider le clinicien désireux d’assurer un abord et un suivi le plus global possible auprès de l’adolescent et de ses parents.

Quelles sont les connaissances et les croyances sur la maladie ?

La médecine a généralement du mal à répondre au « pourquoi » d’un état de maladie. A l’adolescence, ce « pourquoi ? » ou « pourquoi moi ? » n’en devient pas moins une préoccupation de premier plan.

La maladie interfère-t-elle avec la croissance, la puberté, la reproduction?

Chez l’adolescent malade, les questions sur la « croissance » et la « formation » se posent avec une insistance toute particulière, même dans les situations où la maladie n'affecte objectivement ni la puberté, ni les potentialités sexuelles ou la fertilité.

Qu’en est-il de la sexualité au sens large ?

En dehors des grandes invalidités ou des retards maturatifs, la plupart des adolescents malades ont des aspirations et des comportements sexuels identiques à ceux des adolescents en général.

Quels sont les symptômes de la maladie, objectifs et surtout perçus?

A l’adolescence, les défigurations et les limitations de déplacement sont particulièrement mal tolérées. Les « contre-indications » et autres précautions imposées viennent également altérer le rapport à soi et aux autres.

L’évolution, le pronostic sont-ils connus, prévisibles ou au contraire incertains ?

La plupart des maladies sont émaillées de poussées, complications ou rechutes. Cette incertitude vient grandement perturber l’adolescent dans son rapport au temps, sa capacité à penser l’avenir et à « faire des projets ».

Quels sont les comportements et les responsabilités en termes d’observance ?

Tout adolescent cherche à maîtriser son corps, au même titre que sa vie. L’adolescent malade aimerait en plus faire ses propres expériences et maîtriser ses soins, au risque parfois de mal les suivre...

Page 36: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

36

Qu’en est-il du degré de dépendance aux soins et aux parents ?

La présence d’une maladie renforce les liens de dépendance entre l’enfant et ses parents d’un côté, l’enfant et l’équipe médicale de l’autre. Il peut en résulter un frein au processus même d’adolescence et des difficultés d’intégration au sein du groupe des pairs.

Quelle est la qualité de la vie récréative, scolaire, relationnelle et intime ?

Les adolescents malades sont souvent plus isolés, avec moins d’activités sociales, culturelles ou de loisirs. Les absentéismes scolaires, les redoublements et les effets éventuellement rajoutés de la maladie sur la croissance et la puberté accroissent ces difficultés.

Quelles sont les capacités d’adaptation : estime de soi, acceptation de la maladie?

Malgré la grande diversité des maladies chroniques en terme d’expression clinique ou de ret entissement fonctionnel, la même question se pose : comment l’adolescent peut -il se projeter positivement, se percevoir « normal » dans un corps endommagé ?

Qui assure la référence médicale ? Quelle est la perspective de transition des soins?

Ces deux questions méritent une attention très particulière : si le nom d’un spécialiste est facilement avancé, parfois interviennent plusieurs professionnels à titres divers, ce qui n’est pas forcément pour simplifier les choses.

Indications bibliographiques

Alvin P (Dir). L’annonce du handicap à l’adolescence. Paris, Vuibert/Espace éthique 2005 (128p)

Alvin P, Marcelli D. Introduction à la malade chronique. In : Alvin P, Marcelli D. Médecine de l’adolescent, 2005 (2ème édition). Paris, Masson (pp 211-7)

Alvin P, De Tournemire R, Anjot MN, Vuillemin L. Les adolescents malades chroniques. Dix questions pertinentes. Arch Pédiatr 2003 ; 10 : 360-66

Page 37: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

37

Les jeunes en situation de précarité : qui sont-ils ? Pourquoi seraient-ils différents ?

Pr. Jean Louis San Marco

Professeur de Santé Publique au CHU de Marseille et Président du Conseil d’administration de l’INPES

Voir autre article de l’auteur page 105

Page 38: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

38

Page 39: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

39

Adolescents, psychopathologie et études5

Dr. Patrice Huerre Psychiatre des hôpitaux, médecin chef de service de l'inter

secteur VI des Hauts de Seine, ancien directeur médical de la clinique médico-universitaire Georges Heuyer. Fondation Santé

des Etudiants de France

S’il est un sujet qui soulève des passions dans les familles et alimente les discussions, celui-ci en fait certainement partie. Il condense les attentes explicites et implicites des parents, leurs espoirs et leurs angoisses, sollicite leur narcissisme, interroge leurs investissements dans la vie, bref les mobilise activement.

Mais il intéresse aussi notre fonctionnement social : en effet, l’école se voit renforcée dans sa mission de socialisation à la mesure des évolutions de l’organisation familiale qui en était le lieu principal et des « incivilités » dont elle est de plus en plus le témoin et l’objet. Selon le modèle prévalent des adultes, de plus en plus de lycéens deviennent des consommateurs de cours s’absentant de ceux qui ne les intéressent pas s’éloignant du statut traditionnel d’élève. Mais c’est aussi dans les études que se localise l’ambition pour une génération qui devrait être mieux formée pour répondre mieux aux attentes et aux exigences de l’époque : ainsi fut lancé l’objectif « 80% d’une génération doit avoir le bac », renvoyant ceux qui ne l’auraient pas au banc des accusés de nullité. Comme si cet examen était alors posé comme rite de passage pour pallier au manque flagrant de repérage des moyens d’être reconnu comme adulte aujourd’hui.

A ces éléments s’ajoute notre défaut national de valorisation du diplôme comme sésame justifiant l’arrêt de toute formation ultérieure, qu’il s’agisse du permis de conduire ou des examens scolaires ou universitaires.

Malgré tout, soulignons, avant de développer les avatars de la relation aux études, que pour la très grande majorité des adolescents, elle ne posera pas de problème intéressant la psychiatrie ! Pour l’entourage de ceux-ci, le bulletin scolaire sera comme le thermomètre

5 Article extrait de l'ouvrage intitulé "Difficultés et troubles à l'adolescence", Masson, 2004

Page 40: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

40

pour le médecin : un moyen de vérifier l’absence de température excessive !

A contrario, les études seront pour les praticiens un lieu privilégié d’expression indirecte des difficultés individuelles, familiales et sociales sur lesquelles nous reviendrons plus loin.

Mais voyons tout d’abord quels sont les enjeux pubertaires, ainsi que ceux de l’enfance et ceux qui traversent les générations, que mobilise la relation aux études chez les adolescents

Après le début de la puberté, dans les années collège, l’adolescent est surtout occupé à faire avec un corps nouveau qu’il devra mettre en phase avec ses représentations de lui-même, et à composer avec l’émergence nouvelle de pulsions agressives et sexuelles. Bon nombre de problèmes comportementaux à cet âge, en particulier dans la relation aux études (provocations, indiscipline, absentéisme, transgressions…) en découleront. L’opposition aux exigences et aux attentes parentales pourront aussi y trouver leur moteur. Pour certains, la situation d’élève renvoyé à la passivité d’apprendre les conduira à mettre en œuvre des stratégies actives qui pourront les mettre en difficultés : comme si pour eux il valait mieux être « mauvais élève » ou « indiscipliné » plutôt qu’élève passif, différent du groupe, plutôt qu’indifférencié, quel que soit le prix que parfois ils en payent. Pour d’autres la rencontre avec certaines disciplines les confrontera à des questions trop sensibles, comme la biologie par rapport à la question des origines, de la génétique, et donc de la filiation, ou l’histoire par rapport au temps qui s’écoule, au caractère irréversible des événements…

Pour les plus âgés, s’ajoutera la question de l’autonomisation, espérée et redoutée parfois, et des désirs personnels, parfois différents de ceux des parents, renvoyant à la définition identitaire de chacun, tant sur le plan du projet de vie professionnel et social que sur le plan sexuel. D’où certains échecs ou blocages incompréhensibles si l’on oublie qu’ils visent inconsciemment à éviter la confrontation à des enjeux encore ingérables. Comme si l’échec regretté permettait alors de gagner du temps. Ainsi peut-on entendre certains ratages au bac chez des jeunes pas encore prêts à définir ou soutenir des projets personnels.

Mais l’adolescence est aussi le temps d’une relance des enjeux infantiles sous des formes d’expression nouvelles et donc souvent méconnaissables et méconnues. L’adolescent puise dans son enfance les ressources et les expériences précédemment acquises, comme il bute sur les points de blocage qui l’ont marqué. Qu’il s’agisse de l’estime de lui-même qu’il aura durant la traversée des tumultes pubertaires, à l’aune de ce qu’il a pu se constituer comme réserves durant l’enfance en

Page 41: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

41

matière de sécurité narcissique; ou encore qu’il s’agisse de la qualité et de la diversité des investissements qui sont les siens, comme autant de bases diversifiées lorsqu’ils seront malmenés par les transformations adolescentes. Il en va de même pour les capacités de jouer héritées directement de l’enfance : ont-elles été alors valorisées ou éteintes au nom d’un sérieux dans les apprentissages dès la maternelle ? Lui permettent-elles de jouer avec ses pensées nouvelles et par extension avec les apprentissages ? Cette marge de jeu plus ou moins grand dont dispose l’adolescent sera déterminante dans sa relation aux études.

Il faut dire par ailleurs que la scène scolaire se prête particulièrement bien aux régressions et aux emprunts infantiles. L’adolescent y rejouera souvent à son insu comme à l’insu de son entourage des scénarii du passé. Ces retours en arrière peuvent renvoyer à des phases plus ou moins archaïques de son développement, de la période orale à la sadique-anale en passant par les enjeux œdipiens à l’œuvre dans la relation à certains enseignants, soit que l’adolescent cherche à leur ressembler ou à s’en différencier à tout prix, ou qu’il tente de les séduire ou de susciter leur haine.

Il est en effet demandé aux élèves d’ingérer des connaissances par les oreilles et les yeux, comme leur bouche était sollicitée autrefois pour ingérer des aliments nécessaires à leur survie et à leur croissance. Chez certains cette situation réveillera des angoisses ou des menaces oubliées les conduisant à l’extrême à des « troubles des conduites de l’alimentation scolaire », du type anorexie ou boulimie scolaires : les premiers seront vite signalés tandis que les seconds seront souvent malheureusement encouragés, s’engageant dans le profil du « trop bon élève ». La question de l’appétence scolaire se posera en relation à ces enjeux anciens.

Il leur est ensuite demandé d’assimiler les savoirs ingérés et de les restituer, suivant en cela le modèle du processus de digestion qui relance directement chez l’adolescent les enjeux de la période anale et de l’apprentissage du contrôle sphinctérien. Les expériences relationnelles de l’enfance autour du pot seront très actives dans la relation aux attentes et exigences scolaires : devoirs rendus sous une forme pré-requise et au moment attendu, restitution des connaissances appréciée régulièrement sous forme de notation qui en définit la qualité, bonne tenue du matériel scolaire… C’est dire que s’offre là à l’élève un terrain de choix où rejouer des scènes au point où elles sont restées dans l’enfance ! L’agressivité et les propos « grossiers », les non-respects de consignes, les devoirs non « rendus » ou mal présentés et donc mal notés, ou au contraire la soumission extrême aux injonctions et

Page 42: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

42

la recherche de la satisfaction de l’enseignant en seront quelques témoignages.

Mais en plus des enjeux actuels de l’adolescence et de la relance de ceux de l’enfance, l’expérience clinique auprès des adolescents montre aussi l’importance des enjeux intergénérationnels dans la relation aux études. En effet pour les adultes, qu’ils soient parents ou professionnels, la question des études de l’adolescent réactive directement leur propre relation passée aux investissements scolaires. Dans certains cas l’enfant apparaîtra comme le moyen d’une revanche ou d’une réparation d’un parcours scolaire empêché ou déçu ; dans d’autres comme un concurrent potentiellement dangereux au point de tout faire, inconsciemment bien sûr, pour qu’il ne dépasse pas l’adulte, alors même que des vœux contraires sont formulés. L’envie, la jalousie et la rivalité régneront souvent dans ces cas de façon sous jacente contraignant le jeune à fonctionner sur le plan scolaire de manière précontrainte. Certains ne pourront prendre le risque imaginaire de dépasser le niveau de leurs parents étant donnée la charge agressive que ces résultats recèlent et se mettront en situation d’échec scolaire, tandis que d’autres surinvestiront les études de façon à satisfaire des attentes parentales au risque de ne jamais pouvoir se poser la question de leur propre désir.

Les questions d’orientation scolaires (choix de filière, abandon ou poursuite de l’enseignement général, choix de métier et de d’orientation professionnelle…) traduiront fréquemment ce nouage entre les rêves ou les regrets parentaux et les aspirations juvéniles.

Les identifications mutuelles parent-enfant qui sont un moteur indispensable à toute construction de vie pourront dans certains cas représenter des freins à la mesure du silence qui les entoure. Le dévoilement de ces enjeux cachés sera la condition d’une reprise de développement personnel de l’adolescent pour le dégager de ce qui l’entrave sans trop de culpabilité. Le travail avec les parents en sera une condition nécessaire.

Tout ce qui précède relevant, à des degrés variés, des avatars ordinaires du développement de l’adolescent et à ce titre au plus d’une évaluation globale et parfois d’une aide psychologique transitoire, penchons nous à présent sur les pathologies de la relation aux études à l’adolescence.

Il s’agira tout d’abord d’en évaluer la gravité. Pour ce faire nous ne disposons que de peu d’indicateurs fiables. Aussi importera-t-il de ne pas les négliger au risque, à défaut, d’adopter des stratégies d’aide collant aux signes visibles dont on sait qu’à l’adolescence ils ne correspondent pas toujours avec ce qui les anime : ainsi une baisse des résultats et des

Page 43: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

43

investissements scolaires pourrait conduire à un renforcement des aides pédagogiques alors même qu’il s’agira peut-être d’un état dépressif.

On s’attachera d’abord à bien évaluer les appréciations portées par les différents adultes ayant à faire à l’adolescent : les parents bien sûr, les enseignants, le Conseiller Principal d’éducation (CPE), l’infirmière et l’assistante sociale scolaires, le médecin de famille… Il est évident que l’appréciation sera différente selon que l’inquiétude sera partagée par tous les intervenants ou très localisée à l’un d’entre eux. Ensuite il s’agira de mettre les problèmes actuels en perspective : viennent-ils d’apparaître ou existent-ils, même sous une forme différente, depuis déjà quelques temps. L’examen du bulletin scolaire, du carnet de santé, la reconstitution de l’histoire du sujet depuis son enfance… seront des éléments d’appréciation tout à fait précieux.

Chez certains, c’est le trop qui s’avèrera préoccupant : le surinvestissement de la scolarité au détriment des autres investissements ; la boulimie scolaire sera le plus souvent associée à une anorexie mentale ;

Pour d’autres ce sera le désinvestissement installé qui posera problème : « décrochage » scolaire, absentéisme en seront les signes les plus fréquents. Ces tableaux peuvent être révélateurs de plusieurs causes sous jacentes : au delà de l’intérêt présenté par l’absence pour vérifier si l’on compte pour l’autre, souvent il s’agira d’une dépression à forme ainsi trop méconnue. Plus aisée à reconnaître, encore qu’à cet âge on ne l’identifie pas facilement, une forme déficitaire de psychose qui ne se traduisait jusqu’alors que par un isolement social et une inhibition durable. Ou encore des situations post-traumatiques (accidents, violences subies…) aux effets sidérant l’activité intellectuelle que l’entretien ne dévoilera pas à tous coups. Ou une prise régulière de drogues aux effets psychotropes et sédatifs érodant les représentations des enjeux à l’œuvre au collège ou au lycée.

Nous serons aussi sollicités pour des angoisses névrotiques prenant la scolarité pour objet : phobies scolaires en nombre croissant, stress invalidant avant chaque contrôle conduisant à l’évitement des épreuves et parfois de l’établissement. Ou l’angoisse soulevée par des menaces à type de racket ou de chantage…

Quant à ceux qui investissent de façon sélective telle ou telle discipline, ils paieront parfois leur intérêt trop tôt localisé, voire leur passion, du prix de difficultés à parcourir les étapes obligées de la scolarité jusqu’au moment où les options leur redonneront un avantage évident. L’élève « normal » quant à lui, à curiosité ouverte sur différents

Page 44: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

44

domaines, sera souvent moyen dans ses résultats : ce sera la condition du maintien de potentialités longtemps ouvertes.

Alors que conseiller en cas de difficultés ?

Tout d’abord de « perdre du temps » pour évaluer suffisamment bien la situation, tant historiquement qu’actuellement.

Ensuite d’associer les parents à la démarche afin qu’ils puissent la comprendre et la soutenir, ce qui jouera un rôle important pour leur enfant et pour sa compliance aux aides proposées.

Ne pas oublier que l’adolescent a un corps qui peut lui poser problème alors même qu’il apparaît en bonne santé physique.

Ne pas négliger non plus les aides offertes en milieu scolaire en termes d’échanges sur des projets d’orientation mieux adaptés (CIO, CIDJ, INETOP…), de soutien personnalisé… Le statut social d’élève ou d’étudiant reste un point d’appui important pour la plupart d’entre eux, même et surtout s’ils sont en difficultés par ailleurs sur le plan psychique.

Lorsque les problèmes deviennent invalidants, quelle que soit leur forme, une aide médicamenteuse adaptée permettra souvent, à défaut d’un règlement du problème, une relance des enjeux bloqués par l’angoisse ou la dépression. Sinon, la fermeture sera la règle, avec son cortège de conséquences individuelles, scolaires, familiales ou sociales.

L’aide psychothérapeutique individuelle ou groupale, qui ne prendra qu’exceptionnellement la forme d’une thérapie classique comme chez l’adulte, sera une base importante d’aide à la verbalisation de la conflictualité interne, à condition qu’elle soit en liens avec les autres aides dans le cadre d’approches pluri-focales.

Enfin, il sera parfois nécessaire d’envisager, en particulier lorsqu’une mise à distance géographique peut contribuer à l’apaisement des tensions, et à mieux aborder les difficultés intrapsychiques à prendre ses distances, ou encore en cas d’indication d’hospitalisation, un placement en institution spécialisée.

Bibliographie

- Danon-Boileau Henri : Les études et l’échec ; Payot - Cordié Annie : Les cancres n’existent pas - Huerre Patrice : Les trop bons élèves, Hachette littérature, 2005. - Huerre Patrice : Difficultés et troubles à l’adolescence ; ouvrage

collectif sous la direction de Philippe Mazet, Masson, 2004 - Catheline Nicole et Bedin Véronique : Les années collège : 4 ans

pour se construire ; Albin Michel, 2004

Page 45: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

45

L’intégration scolaire d’enfants déficients en milieu non spécialisé : les enjeux

Jean Jacques Detraux6 Professeur à l’Université de Liège

J.-J. Livre Blanc- Accueil de l'enfant malade chronique ou handicapé à l’école. Ligue des Droits de l'Enfant. 2004

Pourquoi s’interroger sur les enjeux de l’intégration scolaire ?

De manière générale, l’intégration scolaire est considérée comme profitant à l’enfant handicapé et à ses parents et l’on s’attache souvent à des aspects très pratiques (ce qui est légitime et utile bien entendu !) sans percevoir ce que l’on gagne ou perd éventuellement dans la conduite d’un tel projet. Il s’ensuit que nous manquons parfois et de recul et surtout d’arguments de poids pour défendre ces projets d’intégration.

Nous avons repéré une série d’enjeux possibles (probables) au niveau des divers acteurs (enfant handicapé, pairs, parents de l’enfant handicapé, autres parents, enseignants) ainsi qu’au niveau de la société plus largement. Certains de ces enjeux peuvent être considérés par d’aucuns comme des conditions (parfois sine qua non) pour qu’un projet d’intégration soit viable. Nous pensons que certains enjeux peuvent aussi être, en partie, des conditions de « réussite » ou des facteurs favorisant le processus d’intégration.

Cependant, on ne peut être et avoir été ! Si nous sommes d’accord pour affirmer que l’intégration est un processus, alors nous devons accepter le risque, l’aventure, l’inconnu et ne pas exiger que « toutes les garanties » soient données a priori.

Nous listons ci-après une série d’enjeux qui nous sont inspirés par la littérature scientifique ou à partir des observations menées par des

6 Psychologue et pédagogue, Professeur à l’Université de Liège, Faculté de Psychologie et

des Sciences de l’Education, Département des Sciences Cognitives, Unité de Psychologie

et de Pédagogie de la Personne Handicapée, Bd du Rectorat, B33, Sart Tilman, 4000 Liège

– 32 (0)4 366 2062 [email protected]

Page 46: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

46

praticiens La liste est loin d’être exhaustive. Elle n’a d’autre prétention que de nous obliger à élargir notre point de vue sur l’intégration scolaire et à ne pas nous enfermer dans un débat stérile « pour ou contre » l’intégration ou « pour ou contre » l’enseignement spécialisé.

ENJEUX POUR LES ELEVES

Enjeux pour l’enfant handicapé

1. Relativiser la situation de handicap en se confrontant au regard des autres ; relativiser l’effet du stigmate

L’étiquetage n’est pas négatif en soi : l’individu affublé d’un tel stigmate peut de manière active tenter de « négocier » avec l’entourage la présence de celui-ci ou enter d’en atténuer la portée ; la personne prend donc une part active dans ’évolution des représentations liées à la situation de handicap

2. Améliorer l’image de soi, l’estime de soi

Ce n’est pas le fait d’être ou de ne pas être dans l’enseignement spécial ou dans ’enseignement ordinaire qui fera varier en soi l’estime des soi chez l’élève mais le fait de proposer à l’enfant des situations d’apprentissage ambitieuses ; lorsque ’interaction avec les professionnels de l’enseignement ordinaire se déroule de manière optimale, la recherche de solutions à apporter à des situations-problèmes est/ effective et contribue à renforcer le sentiment qu’à l’enfant handicapé d’être un élève à part entière

3. Apprendre, en situation habituelle de vie, à gérer sa situation de handicap (confrontation aux difficultés) et développer une autonomie sociale ; apprendre à communiquer (transmettre de l’information, gérer des projets ensemble, établir de nouvelles relations, construire son identité

- Lorsqu’on adopte une perspective développementale, il apparaît évident que la capacité à faire des choix et à exercer un sens critique procède d’un apprentissage en situation ; une formation à la citoyenneté exige des bases cognitives sérieuses

4. Harmoniser ses propres attentes avec celles des autres, apprendre à faire valoir ses droits et participer à une même culture (Le principe de normalisation l’a largement montré)

5. Se construire un réseau social diversifié et large, apprendre à gérer du lien social, et en particulier maintenir des relations avec des pairs du voisinage

- Le maintien et le développement d’un réseau social est à mettre en lien avec la capacité à faire face à des situations adverses d’une part et avec le maintien d’un bon niveau de qualité de vie d’autre part

Page 47: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

47

6. Participer à un projet pédagogique ambitieux et en bénéficier au niveau des apprentissages

- L’observation montre que, pour certaines formes de déficience, l’enseignement spécialisé n’offre pas nécessairement de tels projets (la formation de l’enseignant exerçant dans cette structure est identique à celle de l’enseignant exerçant dans la structure d’enseignement ordinaire) mais a, au contraire, tendance à sous-estimer les compétences des élèves déficients. Il s’agit sans doute moins de parler d’intégration que d’apprentissage et d’éducation et à définir quelles sont les situations les plus adéquates pour favoriser le développement de l’enfant, et ceci à chaque étape de ce développement. Les connaissances acquises au cours des dernières années dans le domaine cognitif et langagier quant aux caractéristiques de fonctionnement d’une part et au potentiel de développement d’autre part des enfants déficients doivent nous conduire à être ambitieux dans nos projets éducatifs. En particulier, les recherches en éducation cognitive et les techniques issues de la neuropsychologie sont très prometteuses à cet égard

Enjeux au niveau des autres élèves

7. Contribution à une modification des images stéréotypées sur le handicap

Si les représentations liées au handicap ne se modifient pas, les représentations plus « périphériques » évoluent dans le cadre d’une expérience de vie commune avec un pair handicapé ; une condition cependant : la médiation de l’adulte-éducateur est nécessaire

8. Vécu d’un climat de tolérance contribuant de facto à une formation au civisme : apprendre à vivre avec la différence, à rencontrer ses peurs de l’autre et expérimenter la solidarité

Il s’agit évidemment d’un enjeu majeur à une époque où les discriminations de tous ordres se multiplient avec des prises de positions radicales telles qu’on les connaît ; la différence doit s’apprivoiser et il faut apprendre à concilier la recherche et l’affirmation d’une identité propre avec la rencontre de l’autre porteur d’un « stigmate » et pourtant terriblement ressemblant à soi. On fait aujourd’hui l’hypothèse que les peurs liées au handicap sont moins le fait de la différence objectivée en elle-même que de la confrontation à un « autre » qui pourrait être soi (mêmes besoins, mêmes désirs)

9. Bénéfices retirés des adaptations méthodologiques (dont les techniques d’évaluation des acquis)

- De nombreuses études menées par des pédagogues, ont montré les effets positifs de la présence d’un enfant handicapé dans une classe sur les améliorations au niveau méthodologique : rythme de la classe modifié, plus grande attention aux difficultés individuelles,

Page 48: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

48

meilleure présentation des consignes, réflexion sur l’objectif de l’évaluation individuelle et collective, travail sur la lisibilité des textes présentés, etc. Bien plus, la présence d’un enfant handicapé dans une classe est un révélateur de dysfonctionnements dans celle-ci et peut donc, potentiellement, permettre l’amélioration tant du climat de la classe que des techniques pédagogiques.

10. Expérimentation du tutorat avec les bénéfices que cela suppose - Redécouvert il y a quelques décennies, le tutorat entre élèves,

vieux comme le monde, trouve ici une application quasi naturelle et susceptible d’être valorisante pour l’élève tuteur. Les expériences menées sont très concluantes dans ce sens.

11. Mise à contribution des élèves dans la recherche de solutions à des problèmes rencontrés dans la gestion du groupe-classe (les élèves sont des ressources pour résoudre des problèmes : apprentissage ainsi de la coresponsabilité et valorisation des compétences ainsi qu’expérience d’une relation différente avec l’adulte-éducateur)

- Les observations menées par les professionnels qui accompagnent des projets d’intégration vont dans ce sens

ENJEUX POUR LES PARENTS

Enjeux pour la famille de l’enfant handicapé

12. Recherche active d’un enseignement de qualité pour leur enfant déficient et ouverture de l’éventail des choix au niveau de l’orientation scolaire et possibilité de jouer son rôle de décideur pour son enfant plutôt que d’être contraint de parcourir un chemin déjà balisé et maintenir les orientations les plus ouvertes possibles dans un cursus de formation, dans un projet de vie. Se poursuit ainsi l’enjeu déjà rencontré au niveau préscolaire permettant un investissement des deux parents dans le projet éducatif. Tout ceci contribue à l’estime de soi et à la valorisation de son statut de parent

Le concept d’empowerment a fait l’objet de nombreuses études : comment renforcer la capacité des parents à se prendre en charge, à faire face aux événements et à se laisser déposséder de leur rôle d’éducateur premier de l’enfant ?

13. Fortification de la cellule familiale (la démarche aguerrit !) contribution à la maturité de la famille face à la reconnaissance de la différence, du handicap ; aide au cheminement personnel, au cheminement de la cellule familiale, au développement du processus de résilience.

Coping, résilience, sentiment de cohérence sont aujourd’hui des concepts développés dans le cadre de la famille avec enfant déficient. L’annonce de la déficience provoque toujours un « séisme » dans la dynamique familiale. Mieux informés, disposant ou apprenant à se servir d’outils pour gérer la situation, découvrant le sens que peut avoir

Page 49: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

49

l’investissement consenti pour faire face, on montre que les parents peuvent jouer pleinement leur rôle et « négocier » avec les professionnels ce qui leur paraît le plus adéquat pour aider leur enfant à se développer. Les services d’aide précoce en particulier contribuent à cette « formation » des parents. Ceux-ci abordent alors l’école en réclamant plus de transparence et refusent de s’inscrire dans l’équation simple « enfant handicapé = enseignement spécial ».

14. Apprentissage d’un partenariat avec des professionnels et opportunité d’expérimenter un projet de coopération (création d’une œuvre commune)

Le partenariat est défini comme la reconnaissance mutuelle d’une expertise et l’exercice de celle-ci dans le cadre d’échanges permanents. Aujourd’hui, tout projet de service évoque l’idée d’un partenariat parents-professionnels. Mais celui-ci est un processus, souvent difficile tant pour les parents que pour les professionnels. Il va falloir apprendre à s’accorder l’un à l’autre. Tout en respectant la complexité et la singularité de chaque situation de partenariat parents-professionnels, il est possible de développer un modèle de bientraitance. Dans tout projet d’intégration, cet accordage revêt une grande importance et apparaît donc bien comme une opportunité de (re)fonder les relations parents-professionnels

15. Au niveau de la fratrie, perception différente de son frère/sa sœur handicapée

On sait que la fratrie de l’enfant handicapé a son propre vécu : des relations particulières se tissent, avec ce qu’elles peuvent comportement de solidarité et d’ouverture mais aussi de chagrin, de déception, de culpabilité ou de honte. L’intégration de son frère/de sa sœur dans une école « normale » peut représenter pour la fratrie une opportunité de grandir et de se renforcer dans l’abord du regard social des pairs. Mais il apparaît aussi que la capacité de parler de la situation de handicap en famille va aider les frères et sœurs à affronter ce regard.

16. Au niveau des grands-parents et de la famille élargie, possibilité de participation au projet scolaire et perception différente de la problématique

On connaît encore peu sur le vécu des grands -parents d’un enfant handicapé. Mais de récentes recherches montrent que leur rôle ne se limite pas à la garde des enfants. Ils peuvent avoir un impact important en termes de soutien émotionnel et de facilitation de l’intégration. Pour eux aussi, le projet d’intégration contribue à une meilleure qualité de vie.

Page 50: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

50

Enjeux au niveau des autres parents

17. Solidarité active et contribution à l’intégration. De plus, la thématique de la « différence » s’intègre dans un projet éducatif pour leurs propres enfants

Dans le cadre des associations de parents, comités scolaires et conseils de participation, la problématique de l’accueil d’enfants handicapés au sein de l’école/ peut (doit ?) être clairement abordée. Cela suppose que l’on puisse répondre à toutes les questions (mêmes les questions très naïves) des parents qui s’inquiètent de l’impact de la présence d’un enfant handicapé au sein de la classe/ de l’école fréquentée par/ leur propre enfant. Une fois ces questions clairement énoncées et une fois les réponses clairement apportées, une réelle solidarité peut se construire au sein de l’établissement.

18. Changements dans les représentations Comme nous l’avons vu plus haut, le noyau dur des

représentations se modifie difficilement. Par contre le vécu d’une situation très concrète peut amener à modifier des attitudes et à diminuer des peurs face au handicap

19. Bénéfices indirects pour d’éventuelles difficultés liées à l’apprentissage chez leur enfant (l’école réfléchit à des problématiques d’apprentissage)

La présence d’un enfant clairement identifié comme déficient conduit à une possibilité d’attention plus grande quant aux difficultés que peut connaître tout élève au cours de son cursus. Une relativisation de certains problèmes « scolaires »peut s’observer.

ENJEUX AU NIVEAU DES PROFESSIONNELS

Enjeux au niveau de l’enseignant qui accueille l’enfant déficient

20. Eclairage différent sur le processus d’apprentissage et ses troubles ainsi que sur la relation entre projet pédagogique et projet thérapeutique. Par ailleurs, expérience d’une aide apportée par un enseignant de soutien pour l’ensemble des problématiques posées dans l’école

Un des enjeux essentiels de l’intégration est la déspécialisation de la situation même de handicap. Nécessairement, le rapport entre le thérapeutique, qui représente le versant très « spécialisé » du projet éducatif à l’égard de l’enfant déficient et le versant pédagogique est questionné. L’«irruption» du spécialisé dans le projet d’apprentissage n’apparaît plus comme une solution en soi mais un moyen pour parvenir aux objectifs fixés. L’’enseignant de soutien ou l’auxiliaire d’éducation ou d’autres formes de soutiens à l’enseignant sont expérimentées.

21. Révélation de dysfonctionnements dans la démarche méthodologique

Page 51: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

51

par la simple présence de l’enfant handicapé Comme nous l’avons dit plus haut, l’accueil d’un enfant

handicapé au sein d’une classe d’enseignement ordinaire, révèle les dysfonctionnements de celle-ci en particulier sur le plan méthodologique. L’enseignant peut donc en tirer profit.

22. Formation en situation : les compétences de l’enseignant qui se retrouve dans une dynamique de recherche de solutions à des problèmes concrets, s’en trouvent renforcées

23. Démarche plus individualisée pour l’ensemble des élèves et capacité de relativiser les troubles de l’apprentissage

Un des impacts évidents est la prise de conscience qu’une approche plus individualisée est nécessaire. Et pas seulement pour l’enfant déficient.

24. Expérience d’un partenariat parents-enseignants et opportunité d’expérimenter un projet de coopération et modification des représentations qu’un professionnel peut avoir sur les parents d’un enfant déficient

Il s’agit en effet d’une opportunité d’exercer ce partenariat que nous dérivions plus haut comme un échange d’expertise.

Enjeux au niveau des autres enseignants/autres personnels dans l’école

25. Dynamique au niveau de l’équipe scolaire (solidarité, discussion sur le projet de l’école et ses moyens,)

L’équipe scolaire peut profiter de l’opportunité d’un projet d’intégration pour renforcer sa dynamique et sa cohésion

Enjeux au niveau des personnels de l’enseignement spécial

26 Possibilité de découvrir de nouvelles formes de collaboration et d’innover

L’intégration n’est pas un rejet de l’enseignement spécialisé. Elle doit être au contraire une nouvelle approche d’une collaboration entre structures spécialisées et structures ordinaires. Idéalement sans doute, le « spécialisé » devrait devenir un satellite et proposer des services dans le cadre de l’école pour tous ou école « inclusive »

27. Réflexion sur les peurs liées à l’intégration (peur de « scier la branche sur laquelle on est assis ») et sur la légitimité de l’enseignement spécialisé

Cette légitimité se fonde sur la mise en place de stratégies d’apprentissage basées sur un cadre théorique up to date et maîtrisé, sur une évaluation correcte des potentialités de l’élève, sur la mise en place d’une méthodologie en lien avec le cadre théorique et les objectifs définis

Page 52: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

52

et sur une évaluation précise des actions entreprises. Cette légitimité ne se fonde pas sur le « placement » d’un enfant dans une structure dite spécialisée. En d’autres termes, le besoin de l’enfant n’est pas l’école spécialisée ou non mais bien la prise en compte des ses potentialités et la mise en place d’un projet d’apprentissage ambitieux pour lui.

28. Réflexion sur les capacités de l’enseignement ordinaire à faire face à des problématiques liées à la déficience et découverte de nouveaux rôles de l’enseignant ayant acquis une expérience auprès d’une population d’enfants déficients et valorisation des acquis professionnels

29. Expérience d’un travail en réseaux et contribution au développement de réseaux, de synergies entre divers services, diverses personnes-ressources

30. Possibilité pour l’enseignant spécialisé de «sortir» de l’école d’enseignement spécial, d’avoir une plus grande visibilité des compétences acquises et d’obtenir une nouvelle reconnaissance permettant une valorisation de son travail trop souvent fait en «vase clos»

ENJEUX AU NIVEAU DE LA SOCIETE

31 A terme, augmentation d’attitudes de tolérance, de solidarité, de respect des différences (même si le noyau dur des représentations liées au handicap ne sont pas profondément modifiées)

32 Déspécialisation de la situation de handicap avec diminution des présupposés sur les incapacités et contribution à un changement de paradigme dans l’intervention auprès des personnes handicapées (passer d’une notion de prise en charge et d’assistance à une notion d’accompagnement)

33 Répartition différente des coûts : l’accent est mis sur les ressources humaines plutôt que sur des ressources matérielles

34 Opportunité de réfléchir au comment vivre ensemble avec les personnes handicapées par une mise en situation concrète

35 Facilitation de l’intégration sociale future de la personne déficiente et donc diminution des coûts liés notamment au soutien (plus grande autonomie de la personne combinée à une plus grande solidarité)

36 Contribution à un débat sur les finalités et sur le fonctionnement de l’école

Rappelons que le développement de l’école d’enseignement spécialisé n’a pas fait diminuer le taux d’échecs et de difficultés scolaires observés chez les élèves de l’enseignement ordinaire.

Page 53: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

53

L'enfant Intellectuellement Précoce et l’ANPEIP :

Madame Françoise Astolfi

Docteur en psychologie - Enseignante et Formatrice - Vice-présidente de la Fédération ANPEIP

FEDERATION ANPEIP Association Nationale Pour les Enfants Intellectuellement

Précoces 7 rue de la Providence – Nice - Téléphone : 04.93 92 10 53

Courriel : [email protected] Site : www.anpeip.org

Une fédération d’associations au service des enfants intellectuellement précoces et de leurs familles.

L’Association Nationale Pour les Enfants Intellectuellement Précoces a été créée pour répondre au désarroi des parents face à des situations concernant le développement de leur enfant qu’ils ne reconnaissent pas dans les profils- standard de l’enfance ou de l’adolescence.

S’il existe des enfants intellectuellement précoces épanouis, développant « naturellement » leurs potentialités sans besoin de prise en charge spécifique, la plupart vivent souvent des passages de vie chaotiques, douloureux et inquiétants parfois.

Les objectifs de l’association furent donc : d’accompagner les enfants et leurs familles dans la reconnaissance de leur identité, d’œuvrer pour une reconnaissance de la précocité intellectuelle, d’alerter les autorités de l’éducation sur les risques importants d’échecs scolaires ou d’erreurs d’orientation et de rechercher des professionnels compétents, partenaires respectueux de nos engagements au service des enfants.

A ce jour l’ANPEIP - agréée par le Ministère de l'Education nationale - a participé à de très nombreuses recherches avec le CNRS, l’INSERM, les institutions Universitaires et Hospitalières ainsi qu’à la commission

Page 54: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

54

DELAUBIER de l’Education nationale 7et à sa diffusion dans tous les milieux.

Cependant, reste un enjeu quotidien de l’association : informer les professionnels de l’enfance et de l’adolescence de l’existence des risques d’une précocité ignorée dans le développement de la personne. C’est aussi la raison de notre participation à cette journée scientifique organisée par l’AFPSSU et c’est pourquoi nous ne pouvons concevoir l’étude de la précocité intellectuelle sans la présenter dans une logique et une dynamique d’échanges pluridisciplinaires.

Associée à celles des parents, la diversité des interventions en est une démonstration. Celles-ci nous sont proposées par des spécialistes reconnus : pédagogue, psychologue, neurologue, pédopsychiatre, orthophoniste, universitaire, qui ont bien voulu nous faire profiter de leur expérience et de leurs travaux de recherches.

Ainsi, dans cet article, l’ensemble des analyses, des comptes-rendus d’expériences, des recherches et des témoignages permettront d’observer et de comprendre la précocité intellectuelle grâce à la complémentarité de regards croisés.

Avant tout, une éthique, une raison d’agir… «… Parce que identifier l’enfant intellectuellement précoce, le comprendre, l’accompagner dans ses différences, ce sera enrichir une action éducative et la mettre au service de tous les enfants… »

Françoise ASTOLFI Vice - Présidente de l’ANPEIP Fédération

7 Qui a donné lieu au rapport de l’éducation nationale sur « la scolarisation des élèves intellectuellement précoces »en 2002.Cf encart éducation nationale en fin d’article.

Page 55: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

55

Pourquoi ce fréquent paradoxe : haut potentiel et échec scolaire ?

Françoise Astolfi docteur en psychologie8, Lysiane Marchal Psychologue clinicienne9 -

Si l’intention première est de contribuer à une meilleure connaissance des enfants à haut potentiel en milieu scolaire, il nous tient à cœur de témoigner aussi de l’importance de travailler de façon collégiale et coopérative entre psychologue et pédagogue.

L’écriture de cet exposé s’est donc fait à quatre mains avec : - Deux éclairages complémentaires : l’analyse psychologique et

l’observation pédagogique, - un champ d’étude : le territoire scolaire, - une rencontre humaine et bienveillante.

Nous analyserons les phénomènes scolaires les plus décrits et nous montrerons la complexité de la prise en charge de cette population avec deux regards complémentaires de psychologue et de psychopédagogue.

On serait tenté d’imaginer que ces enfants ont déjà été gratifiés par la vie et que l’avenir leur sourit .Ils représentent environ 2,4% de la population des enfants scolarisés.

On les croit proches du génie, on les pense obligatoirement prédéterminés à un avenir insolent de réussite, sans effort et dans la brillance d’un succès facile.

La réalité se fait plus douloureuse. Ces enfants à haut potentiel s’isolent ou sont marginalisés ; ils vivront pour la plupart l’incompréhension et le désarroi de leurs enseignants et de leurs parents.

Plus de 50% de ces enfants intellectuellement précoces seront considérés à un moment de leur cursus comme des élèves médiocres ou en difficulté, 30% n’atteindront pas le lycée.

8 Enseignante – Formatrice, Nice [email protected] 9 Formatrice en milieu scolaire, Nancy, [email protected]

Page 56: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

56

Par quelles méprises ces enfances enviées se sont-elles brisées dans un parcours scolaire chaotique et disharmonieux ? - Comment identifier un enfant à haut potentiel ? - Quels profils le caractérisent ? - Quels indices le révèlent ? - Comment le comprendre et l’aider dans l’univers scolaire ? - Pourquoi tant de réticences manifestes en France à appréhender le phénomène de l’intelligence ? - Comment rester des référents responsables et des éducateurs face à cette population ?

La rencontre de l’enfant à haut potentiel avec l’institution scolaire est une rencontre singulière : comme pour tout individu, c’est d’abord une chance, une étape essentielle à la prise de distance nécessaire au grandissement, une rencontre avec un « tiers »dans la relation enfant-famille, tiers socialisé et socialisant ; c’est donc pour tout le passage des règles familiales aux règles sociales.

Les enfants intellectuellement précoces vivront intensément ce passage, de la curiosité et du besoin de découverte à la construction cognitive et aux apprentissages (plus qu’aux connaissances) ; de même le passage de la pensée individuelle ou familiale à une pensée partagée, la rencontre du discours et du jugement d’autrui, autant d’actes fondateurs pour permettre au sujet de se positionner.

Chez ces enfants, les traces de ses rencontres et de ses aléas sont souvent très fortes, souvenirs vivaces et chargés d’une émotion restée intacte, aussi bien dans la jouissance d’une relation très porteuse que dans la souffrance des malentendus et des déceptions.

L’enfant à haut potentiel a déjà anticipé le monde scolaire ; il s’attend à vivre une multitude d’expériences à la hauteur de sa curiosité intellectuelle. Il se montre avide de connaissances nouvelles, retient facilement les informations mais a des difficultés à supporter la lenteur des autres, la routine des exercices répétitifs et préfère engager sa réflexion dans des concepts particulièrement complexes : Quand les autres élèves travaillent sur la notion de multiplication, lui va se demander plutôt comment l’esprit humain accède à l’opération mentale.

Quand les autres étudient un texte de français, lui va vouloir comprendre la psychologie même de l’auteur. Et ce glissement d’une réponse

Page 57: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

57

pédagogique ordinaire souhaitée à la recherche de la conceptualisation se révèle à tous les niveaux scolaires ; ne diffère que le choix du vocabulaire selon leur âge. L’enseignant n’a pas toujours les codes pour comprendre un profil d’enfant et les évaluations scolaires vont témoigner de jugements sévères.

Sa curiosité insatiable, lorsqu’il est intéressé lui fait poser des questions « embarrassantes », l’isole du groupe d’apprenants ; cependant, son goût prononcé et son aisance pour les résolutions de situations complexes ne le rendent pas pour autant performant car il a une véritable aversion du banal et de « l’ordinaire » pédagogique ; il doit aussi faire face à une tendance à se contenter d’avoir compris en général plutôt que de prouver ce qu’il sait en détail.

Au cœur de cette rencontre, on peut retenir parmi d’autres, trois facteurs, essentiels:

- Les représentations de chacun, les convictions intimes, idéologiques, les à priori, les expériences personnelles, les attentes aussi bien réelles que fantasmatiques, les besoins, tout ce qui constitue un écran parfois opaque à la compréhension de l’enfant ;

- Les moyens d’adaptation, de défense, les formations réactionnelles pour chacun des partenaires (enfant, famille, enseignants), face aux situations scolaires ; la place de l’intelligence dans l’économie psychique, la force du Moi (ainsi que le poids de ce que vit le sujet dans sa réalité actuelle) ;

- La recherche d’une identité scolaire : trouver sa place au sein d’un groupe, être reconnu à la fois comme différent et intégrable, utile à la classe, capable d’apporter sa richesse et de bénéficier de celle des autres. C’est à ce titre que l’évaluation précise du potentiel et des capacités de mobilisation et d’adaptation, chez un enfant ou un adolescent, est indispensable. Elle permettra de mieux comprendre ce sentiment de différence et d’apaiser en partie les malentendus.

N’oublions pas que jusqu'à présent l’identification de la précocité s’inscrit dans un contexte particulier de pathologie, d’inquiétude, rarement pour confirmer une brillance intellectuelle. Et l’entourage familial et scolaire passe sans transition du portrait d’un enfant en difficulté de vie à un enfant intellectuellement précoce, une révélation propice à déstabiliser les référents adultes qui l’accompagnent.

Page 58: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

58

Sans parler de l’enfant lui-même, oscillant entre une attitude de toute puissance et un important manque de confiance en lui. L’enfant intellectuellement précoce ne maîtrise pas ces ambivalences de comportement, envahi le plus souvent par un émotionnel dévastateur et exposant tout en même temps une lucidité de raisonnement adulte.

Petite liste des situations scolaires qui nous impliquent, en tant qu’adultes, face à ces enfants (: les écarts de maturité, les spécificités et les troubles liés au haut potentiel (pensée divergente, hâte, intuition globale et refus du séquentiel mémoire immédiate, émotionnelle et sélective au détriment de la mémoire de travail) ; les stratégies particulières et parfois incompréhensibles ; la difficulté à accéder à la métacognition, et la motivation.

Les problèmes d’attention/concentration et de motivation ne sont pas propres à ce type d’enfant ; elles constituent même actuellement un des défis majeurs de l’enseignement. Celui-là n’est pas plus facilement démotivé qu’un autre élève mais il l’est de façon différente, dans sa racine (déception par rapport au désir, lassitude, sentiment qu’il n’a rien à attendre, sentiment de vide teinté d’angoisse) et dans les moyens qu’il met en place, pour une réussite à minima, ou dans le renoncement, parfois la révolte.

Sa difficulté face à l’effort et son manque d’intérêt pour l’apprentissage répétitif et mécanique expriment non un état d’esprit, mais bien une incapacité d’être autrement, ce que les enseignants ont du mal à accepter ; ils observent un enfant intelligent qui ne travaille pas ou refuse de travailler.

Certains de ces enfants auront pour seul système de survie le mimétisme, le conformisme à la majorité du groupe ; l’enfant précoce peut alors renoncer à son intelligence, et se conformer à ce qu’on attend de lui : être un élève clairement identifiable pour une évaluation de la norme.

D’autre part, son acuité intellectuelle et sa remarquable intuition lui font comprendre très vite (trop tôt à notre jugement d’adulte) son environnement familial, scolaire, affectif. S’il pratique l’humour, il discerne difficilement la limite entre la pertinence et l’impertinence du propos : Le résultat ? Des enseignants plus souvent en état de réaction émotionnelle qu’en action pédagogique.

Que peuvent-ils attendre de l’Institution scolaire ?

Page 59: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

59

Comme pour tout élève, une attention et un questionnement de l’enseignant aux « signaux » qu’ils envoient : ennui, hétérogénéité des résultats, problèmes de réceptivité, déception, changements d’humeur, découragements et désinvestissements- brutaux ou progressifs- contact maladroit etc., mais aussi leur intérêt pour la culture, pour l’expression symbolique, pour certains domaines particuliers qu’ils vont alors explorer de façon très poussée, la description parfois très fine et déjà conceptualisée de ce qu’ils vivent.

L’institution scolaire peut alors les aider à assouplir leurs défenses, contenir et clarifier leurs incertitudes, utiliser leurs atouts comme base de remédiation, notamment leur créativité.

Les partenaires de la santé scolaire peuvent par un accompagnement lors des désadaptations plus graves (problèmes de comportement, de dépression, de phobie scolaire par exemple), ou encore la mise en place de projets individuels favoriser un rééquilibrage de leur vie affective, intellectuelle et scolaire.

L’intensité de son envie de savoir va de pair avec l’intensité de son ennui à apprendre ; si le bon élève cherche à comprendre et à clarifier sa pensée par un cheminement méthodique ; l’enfant intellectuellement précoce va au contraire adorer plonger dans la pensée complexe, arborescente, et va vouloir appréhender le savoir de manière globale, immédiate et complète.

En cours, ces élèves vont se passionner pour un sujet en englobant tous les thèmes qui lui seront liés comme l’économie, la géographie, les sciences… De quoi donner le vertige aux adultes non initiés. La réalité scolaire est moins souriante, les éducateurs, ou rééducateurs, - dans leur sens le plus large – ignorant la précocité intellectuelle attendent de lui un niveau d’efficience correspondant à sa norme d’âge de développement et l’induisent à se conformer à une évolution bien inférieure à ses potentialités : c’est ce que JC Terrassier à nommé « l’effet Pygmalion négatif ».

Les préjugés liés à la méconnaissance de ce profil d’enfant ou d’adolescent constituent de nos jours un frein puissant à l’expression de leur potentiel. Plus grave, le danger de l’effet Pygmalion négatif, s’il est de moindre effet dans un cadre familial socialement porteur, sera beaucoup plus risqué lorsque les familles ne pourront pas être correctement attentives au développement de leur enfant. Une politique de prévention s’impose dès l’entrée en maternelle. Comment dit-on déjà ? « A l’âge où tout se joue ? » Eh bien considérons que le

Page 60: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

60

phénomène de la précocité intellectuelle fait depuis toujours partie du jeu et qu’il est urgent de reconsidérer nos règles dans l’univers de l’éducation.

Qu’ils soient catégorisés comme intellectuellement précoces, surdoués, à haut potentiel ; ces enfants ont besoin d’aide préventive Ils ont besoin d’être identifiés par les professionnels de l’enfance, pédiatres, médecins et personnel médical. Comment ? Par un simple réflexe, celui de poser l’hypothèse de la précocité intellectuelle comme une hypothèse parmi d’autres : pas plus, pas moins.

Page 61: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

61

Particularités neurologiques de l’enfant intellectuellement précoce.

Dr Marie-Noële Magnie, Maître de Conférences des Universités, Médecin des Hôpitaux10

La précocité intellectuelle est associée à des particularités neurologiques qui témoignent d’un style cognitif avec une tendance à surengager l’hémisphère cérébral droit. Les enfants intellectuellement précoces sont habituellement plus performants pour réaliser un traitement global de l’information qu’analytique et pour effectuer des traitements simultanés que séquentiels. Or, la pédagogie privilégie essentiellement les traitements séquentiels, fait qui pourrait être impliqué dans le paradoxe d’échecs scolaires chez les enfants à haut potentiel.

Bien que ces enfants se caractérisent classiquement par des apprentissages plus rapides, ils présentent, plus fréquemment que ceux dans la norme, des troubles des apprentissages ou du développement. Sur le plan du langage oral, ils se distinguent avant tout par la construction précoce de phrases complexes avec un vocabulaire précis. En effet, même si les premiers mots apparaissent souvent plus jeunes que dans la population générale, certains enfants intellectuellement précoces semblent attendre un niveau d’expertise leur paraissant suffisant avant de commencer à s’exprimer. L’apprentissage de la lecture est le plus souvent précoce, mais une dyslexie peut être associée à la précocité intellectuelle et son diagnostic pose alors un problème.

Les critères diagnostiques n’étant pas adaptés à ces enfants, le diagnostic est parfois posé tardivement retardant la prise en charge. Il existe fréquemment une hétérochronie du développement au cours de la précocité intellectuelle. Les enfants intellectuellement précoces présentent souvent des difficultés d’acquisition du graphisme, avec dans certains cas, des dysgraphies qui peuvent même conduire à une phobie de l’écriture. Un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité peut aussi être associé à une précocité intellectuelle. Mais,

10 Service d’Explorations Fonctionnelles du Système Nerveux, Hôpital Pasteur - CHU de NICE, [email protected]

Page 62: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

62

il peut également représenter un diagnostic différentiel dans la mesure où un enfant qui s’ennuie en classe peut être perçu comme distrait, voire hyperactif.

La composante motivationnelle s’avère particulièrement marquée, les enfants intellectuellement précoces ayant une sensibilité accrue au niveau de la stimulation cognitive et à l’intérêt de la tâche. On peut remarquer que nombre de ces enfants sont considérés maladroits. Toutefois, il n’existe que rarement une dyspraxie gestuelle patente. Il est important de souligner que le diagnostic de précocité intellectuelle sur la seule base du Q.I. Total exclut un certain nombre d’enfants ayant des troubles des apprentissages ou du développement associés du fait de leur retentissement sur les performances dans des domaines spécifiques.

La recherche de troubles associés et leur prise en charge s’avèrent essentiels chez les enfants intellectuellement précoces dès lors qu’il existe des difficultés scolaires dans la mesure où ils constituent un facteur d’échec scolaire.

Les études utilisant la méthode des potentiels évoqués apportent des arguments en faveur d’une maturation cognitive accélérée et elles confortent l’hypothèse d’une particularité de la spécialisation hémisphérique dans la précocité intellectuelle. Cette méthode d’exploration consiste en l’enregistrement de l’électroencéphalogramme durant une tâche intellectuelle. Elle ne nécessite ni piqûre, ni administration de substance.

Différents protocoles ont été utilisés pour explorer les processus cognitifs : attention, mémoire… La détection d’un intrus dans une série monotone de stimulations identiques se traduit par une onde P300 qui reflète les capacités attentionnelles et en mémoire de travail de l’enfant. Une incongruité sémantique (par exemple, un couple d’objets qui ne sont liés ni par la catégorie, ni par la fonction) suscite l’occurrence d’une onde N400 qui permet d’explorer les connaissances acquises par l’enfant. La latence d’une onde témoigne de la vitesse de traitement et son amplitude de l’intensité de l’attention portée par l’enfant pour réaliser la tâche. La latence de la P300 est plus courte et son amplitude est plus grande chez les enfants intellectuellement précoces par rapport aux enfants contrôles avec également une plus grande amplitude de la N400. L’amplitude de la N400 est positivement corrélée au Q.I., et en particulier au Q.I. Performance de l’enfant.

Page 63: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

63

Les données neurophysiologiques sont en faveur d’une maturation accélérée (1), mais elles suggèrent aussi que les enfants précoces possèdent de plus grandes capacités à mobiliser leurs ressources attentionnelles et en mémoire de travail avec un niveau supérieur de connaissances sémantiques (2). De plus, l’analyse de la N400 va à l’encontre de l’hypothèse d’une éventuelle sur stimulation de ces enfants. Les potentiels évoqués ont également été enregistrés dans des protocoles en champ visuel divisé avec une présentation tachitoscopique. Une présentation brève et latéralisée permet d’adresser l’information spécifiquement à un hémisphère cérébral avant qu’elle ne soit transmise à l’autre hémisphère. Ce type de présentation permet d’étudier les compétences de chaque hémisphère. Alors que l’hémisphère gauche est le plus compétent pour traiter les données verbales (par exemple, décider si une série de lettres constitue un mot), c’est l’hémisphère droit qui est le plus compétent pour les données visuo-spatiales (par exemple, compléter une matrice par un motif).

Les travaux de recherche suggèrent que les enfants intellectuellement précoces ont tendance à sur engager leur hémisphère cérébral droit mais avec toutefois une hétérogénéité de la population des précoces (3) En effet, les enfants ayant une importante différence entre leurs performances verbales et pragmatiques auraient tendance à sur engager l’hémisphère droit aux dépens du gauche, que la tâche à réaliser soit verbale ou non. En revanche, les enfants ayant profil harmonieux auraient tendance à engager les deux hémisphères, et ce, quel que soit le type de tâche.

Les particularités neuropsychologiques et neurophysiologiques observées dans la précocité intellectuelle soulignent ainsi l’importance de prendre en compte le style cognitif de ces enfants dans les choix pédagogiques tout au long de leur parcours scolaire.

Page 64: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

64

REFERENCES

(1) Martin F, Delpont E, Suisse G, Richelme C, Dolisi C. (1993). Long latency event-related potentials (P300) in gifted children. Brain Dev, 15, 173-177.

(2) Magnié MN, Kahlaoui K, Bailet B, Richelme C (2002). Cognitive maturation: An electrophysiological investigation in gifted children. Int J Psychophysiol, 45, 102. Seventh World Congress of Psychophysiology, Montréal, Canada, July 29th- August 3 rd 2002.

(3) Magnié MN, Caro C, Faure S (2003). Hemispheric specialisation in giftedness: psychometric, behavioral and electrophysiological investigation. Sixth IBRO World Congress of Neuroscience, Prague, Czech Republic, July 10th -15th 2003

Page 65: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

65

Précocité intellectuelle et graphisme

Elisabeth Demeure, Orthophoniste, Nice11

Un ouvrage publié dans les années 80, intitulé « l’enfant surdoué ou la précocité embarrassante » (1) amena nombre de détracteurs à commenter cette terminologie. Au terme de surdoué, on a pu préférer celui d’enfant à haut potentiel (.2) ou d’enfant intellectuellement précoce. C’est ce dernier qui a été retenu par l’Education Nationale pour qualifier ces enfants qui manifestent des aptitudes cognitives supérieures à leur âge mais aussi quelques discordances que J.C. Terrassier a nommé dyssynchronie. C’est bien cette dyssynchronie qui est embarrassante pour les parents, pour les enseignants et problématique pour le développement psychoaffectif et social de l’enfant.

Le développement psychomoteur et langagier de ces enfants présente quelques particularités. Alors que l’on observe une certaine maladresse chez ces enfants distraits, peu intéressés par les activités physiques, leur acquisition du langage est remarquable par la richesse du vocabulaire utilisé très tôt, par l’intégration rapide de concepts et par un intérêt marqué pour les jeux de lettres. Cependant, comme dans l’histoire de l’humanité, l’apprentissage, l’écriture arrive tard dans l’histoire de l’enfant et la dissociation entre l’oral et l’écrit sera une des premières manifestations de cette dyssynchronie interne caractéristique.

C’est à l’école qu’elle va se révéler et devenir embarrassante. En effet dessiner n’est pas écrire et si l’on peut observer une richesse de production chez ces enfants bons parleurs, on notera un certain désinvestissement pour l’apprentissage de l’écriture. Beaucoup d’enfants intellectuellement précoces apprennent à lire naturellement, souvent à partir de la manipulation de lettres mobiles. Or, l’écriture ne peut être acquise sans apprentissage. L’écriture est le résultat d’un entraînement gestuel qui nécessite l’acceptation de nombreuses contraintes telles que

11 [email protected]

Page 66: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

66

la tenue correcte de l’instrument scripteur, l’intégration d’un code, l’alphabet, pour devenir un mode d’expression et de communication.

Comme la lecture, l’écriture est une transposition. La lecture fait appel à un système de reconnaissance visuelle du mot. L’écriture fait appel à un système de production graphémique du mot. Rien ne s’oppose à leur parfaite coexistence (3).

Cette coexistence est rare dans les apprentissages pour ces enfants intellectuellement précoces qui maîtrisent la lecture sans avoir bénéficié simultanément de l’entraînement postural et moteur nécessaire à la maîtrise du geste scripteur. Ce sont ces enfants en échec scolaire, pour dysgraphie puis dysorthographie que côtoient les orthophonistes.

Vifs dans leur tête, ces enfants seraient plus maladroits dans leurs gestes. Pourtant une étude réalisée par Vaivre Douret (2) permet de conclure que l’on n’observe pas de retard psychomoteur dans cette population d’enfants. La dyssynchronie observée dans le cadre d’évaluation psychologique ou orthophonique n’apparaît pas avant l’apprentissage de l’écriture.

Si l’on considère le développement psychomoteur de l’enfant, on remarquera que la parole est constamment sollicitée alors que l’écrit appartient au monde des apprentissages scolaires, que l’inscription nécessaire à la réalisation adaptée du tracé des lettres ne fait l’objet d’un apprentissage que très tardivement. S’il est parfaitement connu à l’oral, l’alphabet est beaucoup moins bien maîtrisé à l’écrit.

Les enfants intellectuellement précoces possèdent toutes les compétences nécessaires à l’apprentissage du langage écrit, Leurs particularités neuro -physiologiques témoignent d’un surinvestissement de l’hémisphère droit(4) alors que c’est l’hémisphère cérébral gauche qui permet un traitement séquentiel de l’information si nécessaire dans les mécanismes d’acquisition du langage et plus encore du langage écrit.

La dysgraphie de l’enfant intellectuellement précoce n’est pas une fatalité.

Il est remarquable de constater que les enfants scolarisés dans les classes de pédagogie à rythme différencié, crées Nice dans les années 87 , entrés au Cours préparatoire à 5 ans et qui ont fait une scolarité primaire en 4 ans n’ont manifesté aucune dysgraphie par dyssynchronie, .alors que les enfants entrés par anticipation au cours préparatoire à 5

Page 67: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

67

ans sans avoir bénéficié d’une pédagogie préparatoire à la maîtrise du geste scripteur ont présenté une dysgraphie qui a fait l’objet d’une prise en charge.(5)

C’est en moyenne section de l’école Maternelle que devraient être identifiés ces enfants, afin que l’acquisition du langage écrit s’associe pleinement à l’enrichissement du langage oral et que l’apprentissage de l’écriture fasse l’objet d’un plaisir par l’appropriation d’un savoir faire et non d’un rejet par les contraintes qu’impose l’apprentissage d’un code.

La non reconnaissance de leurs aptitudes entraîne chez ces enfants un désinvestissement des apprentissages qui peut être lourd de conséquences.

Identifier la précocité intellectuelle d’un enfant c’est lui éviter un ennui et un manque d’intérêt pour des apprentissages qui mènent fatalement à l’échec scolaire. C’est favoriser la mise en adéquation de ses compétences et de ses performances.

BIBLIOGRAPHIE : Ellis W 1989; lecture, écriture et dyslexie une approche cognitive Delachaux et Niestlé (3)

TERRASSIER J.C1995 Les enfants surdoués ou la précocité embarrassante E.S.F (1)

REVUES L’enfant surdoué : détection et prise en charge surdoués A.N.A.E. n° 67 juin 2002 volume 14 tomes 11 (2)

MEMOIRES Riera S 1991; graphisme et précocité intellectuelle mémoire d’orthophonie Université de Nice-Sophia-Antipolis (5)

Guillot C. 2006 Enfants intellectuellement précoces une population à risque ; Réflexion Autour de l’apprentissage du langage écrit mémoire d’orthophonie Université de Nice-Sophia-Antipolis (4)

Page 68: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

68

Page 69: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

69

L’enfant intellectuellement précoce

Delphine Van Der Elst, Psychologue clinicienne. Dijon12 Sylvie Tordjman Professeur en Pédopsychiatrie, Université de

Rennes 1

Le but de cet écrit est d’apporter un éclairage sur les caractéristiques cognitives et affectives des enfants intellectuellement précoce (EIP) et sur l’impact qu’elles peuvent avoir sur le vécu psychique de ces enfants, notamment en termes d’estime de soi.

La problématique majeure des EIP réside dans leur différence .

Ces enfants se sentent en effet très tôt différents. Ils ne comprennent pas pourquoi et ne savent pas dire « comment », mais c’est un ressenti parfois très douloureux, d’autant plus s’il ne peut être expliqué. Et c’est bien là le problème. L’EIP est avant tout un enfant et il a besoin d’être reconnu comme tel. Il n’est pas plus « génial » que n’importe quel autre enfant. Ce n’est pas non plus un enfant porteur d’un handicap et/ou irrémédiablement inadapté et inadaptable. Mais l’enfant à haut potentiel intellectuel est un enfant différent. Il a un fonctionnement, un développement intellectuel (cognitif) et affectif (émotionnel) qui diffère de la norme .

Intellectuellement, l’EIP est bien souvent très performant en termes de compréhension, de réflexion, de raisonnement, d’observation, de mémorisation et de conceptualisation verbale. Sa culture générale et son niveau de connaissances tant scolaires que sociales ou relationnelles sont de très haut niveau et témoignent de son ouverture d’esprit. De même sa compréhension du contexte physique et social et des enjeux sociaux est excellente. Ces enfants ont enfin la plupart du temps des aptitudes de repérage spatial et d’abstraction bien supérieures à la norme.

Tout ceci devrait leur permettre une excellente efficience scolaire ainsi qu’une estime de soi très positive. Ils devraient être valorisés par une réussite obtenue avec aisance.

Mais ce n’est malheureusement pas toujours le cas parce que d’autres « différences » entrent en jeu. 12 [email protected]

Page 70: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

70

Ces enfants ont une manière de traiter l’information très particulière.

Ils sont tout d’abord très intuitifs. Ils manipulent les données d’un problème de façon extrêmement rapide et peuvent produire un résultat sans passer par les étapes classiques du raisonnement. Ils sont souvent incapables d’expliciter leur démarche et de la communiquer. Une partie de leur pensée leur est ainsi inaccessible.

Les EIP détestent la répétition, ce dont ils ont besoin pour se sentir satisfait, c’est d’être en permanence en état d’accommodation, c’est-à-dire confrontés à un problème nouveau, inconnu qu’ils vont devoir résoudre. Ils cherchent en permanence des sollicitations intellectuelles et attendent de l’école qu’elle leur apporte ce qu’ils n’ont pas pu trouver par eux-mêmes ou grâce à leur entourage.

Les enfants précoces privilégient le traitement simultané des informations par rapport au traitement séquentiel. Ils ont une pensée globale, organisée en réseau. Ils activent simultanément tout un champ de données connectées les unes aux autres et les traitent simultanément. Chaque nouvelle idée entraîne un nouveau champ d’idées possibles et la pensée se déploie sans limites. L’enfant se trouve ainsi face à une arborescence d’une rare complexité.

Ces enfants ont également un insatiable besoin de sens. Ils ont besoin de comprendre pourquoi ils doivent réaliser telle ou telle tâche. Tous les enfants posent des questions, les EIP veulent des réponses qui les satisfassent et ils cherchent en permanence à en savoir plus, à aller plus loin.

Leurs capacités de concentration sont très fluctuantes et fonction du type d’épreuve. Elles peuvent être extrêmement élevées et de longue durée lorsqu’il s’agit d’un de leurs (nombreux) centres d’intérêt. Elles sont bien souvent « nulles » si le sujet ne les intéresse pas, s’ils se sentent en danger (de ne pas réussir par exemple) ou si la tâche à accomplir n’est pas suffisamment stimulante.

Du point de vue affectif, l’EIP témoigne d’une hypersensibilité ou hyperesthésie au monde qui l’entoure. Sa perception des choses mais également des sentiments, du ressenti de ceux qu’il côtoie est extrêmement développée.

L’EIP a par ailleurs un sens aigu de la justice. Il a besoin de « valider » le comportement, les dires et les actes de son entourage et

Page 71: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

71

principalement des adultes. Si quelque chose ne lui paraît pas « juste », équitable et « vrai », il se défendra d’une manière ou d’une autre.

De même, il est à l’affût des failles de ses interlocuteurs et sait en tirer profit, notamment grâce à ses extraordinaires facultés d’argumentation, ce qui peut-être très déstabilisant pour l’entourage.

L’enfant IP se sent différent et il est bien souvent perçu comme tel par ses camarades. Il peut ainsi être en difficulté dans son rapport aux autres et plus particulièrement aux pairs. S’il ne sait pas pourquoi (s’il n’a pas été détecté et si on ne lui a pas expliqué sa différence), il peut avoir tendance à s’isoler (quand il n’est pas rejeté).

L’EIP se pose très (trop) tôt des questions concernant les limites de l’homme (naissance et mort) mais aussi du monde qui l’entoure (dinosaures, planètes sont souvent des sujets de prédilection). Il est ainsi perpétuellement dans la quête de ses propres limites et les teste en permanence sur les adultes de son entourage. Il refuse de se contraindre aux règles, provoque, prend des risques.

Ces enfants sont enfin habitués à réussir avec aisance ce qu’ils entreprennent. Ils supportent souvent mal d’être confrontés à leurs limites par peur d’échouer. Ils refusent ainsi d’effectuer une tâche s’ils ne se sentent ou ne se pensent pas à la hauteur. Ils ont également tendance à être trop exigeants (y compris avec eux-mêmes) et à se sentir « nuls », à se dévaloriser. De même, ils ressentent souvent les attentes d’autrui (parents, enseignants) comme trop élevées, inaccessibles et injustes. Enfin, ils ont dans la majorité des cas, beaucoup de mal à faire des efforts, particulièrement lorsque la tâche à réaliser n’a pas de sens pour eux ou leur paraît trop difficile.

L’enfant précoce est ainsi en permanence en « sur-stimulation» intellectuelle et affective .

Ces « attaques » répétées vont bien souvent entraîner une dépense d’énergie psychique épuisante et générer anxiété et souffrance. En fonction de sa personnalité, l’enfant, fragilisé, va réagir de différentes manières pour s’en sortir : agitation, provocation, rébellion ou au contraire repli sur soi, auto dépréciation, etc.

Dans la plupart des cas, l’enfant démuni, incompris, risque de se construire une identité en « faux-self ». Etant donné qu’il ne peut pas être « lui », il se construit tel qu’il pense devoir être pour être accepté,

Page 72: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

72

reconnu et aimé en utilisant préférentiellement ses points forts : l’intellectualisation à outrance et la fuite dans l’imaginaire qui, tous deux, ont pour but de maintenir le vécu d’émotions douloureuses à distance. Le problème est que ces stratégies (inconscientes) ont généralement pour effet d’aggraver les choses, notamment le rejet des pairs, l’incompréhension des adultes de l’entourage et de fait, l’isolation sociale.

Les troubles du comportement, la mésestime de soi et les symptômes d’allure dépressive peuvent ainsi s’inscrire dans le tableau clinique présenté par ces enfants. Le fonctionnement de ces enfants, peut cependant entraîner une confusion entre une pensée divergente et des troubles psychopathologiques autrement plus graves : trouble de la personnalité, désorganisation de la pensée. Il convient ainsi de prendre de sérieuses précautions lorsqu’il s’agit de poser un diagnostic et de proposer des solutions d’accompagnement, de prise en charge, voire de traitement. Une fois écartée toute hypothèse de troubles cognitifs et/ou instrumentaux, une évaluation de l’impact de la précocité intellectuelle sur les difficultés de l’enfant doit être effectuée, sachant bien entendu qu’un enfant précoce peut présenter des pathologies sans aucun rapport avec leur précocité.

Une étude menée en 2003 auprès de 23 EIP scolarisés dans des classes spécialisées (Hervé Bénony, Delphine Van der Elst, Khadija Chahraoui, Christelle Bénony, Jean-Paul Marnier) a permis de montré que les enfants intellectuellement précoces obtenaient « des scores d’estime de soi totale et d’estime de soi scolaire significativement inférieurs et des scores de dépression significativement supérieurs à ceux obtenus par les enfants du groupe contrôle ».

Ont également été constatés « des corrélations significatives entre l’estime de soi et les symptômes psychopathologiques : plus les scores d’estime de soi générale, totale et sociale sont chutés, plus les scores de dépression, d’hyperactivité et de l’échelle totale de psychopathologie sont élevés. La même corrélation est observée entre les scores d’estime de soi générale et totale et l’agressivité. Il apparaît donc chez les enfants IP de cette étude une faiblesse de l’estime de soi, particulièrement de l’estime de soi scolaire, et des symptômes dépressifs. »

Les hypothèses avancées pour expliquer ces résultats sont les suivantes : Les caractéristiques intellectuelles et émotionnelles de ces enfants entraîneraient « entre autre un vécu scolaire, souvent difficile, voir chaotique d’où une estime de soi générale et plus particulièrement

Page 73: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

73

scolaire inférieure à la moyenne. Ces éléments généreraient à leur tour des symptômes psychopathologiques tels que la dépression ou l’hyperactivité. D’autre part, le fait que les enfants de cette étude soient scolarisés dans des classes spécialisées pour EIP peut avoir un double impact. Positif d’une part puisqu’ils sont « censés avoir pu bénéficier de l’attention de leurs parents, de leurs professeurs et de leurs pairs », bien que « le regroupement seul n’est pas efficace et que peut-être subsiste-t-il des carences au niveau de la formation des professeurs, de la pédagogie qui leur est proposée ou du contexte dans lequel ces classes sont mises en place » Bent (1969). Ce dernier évoque par ailleurs « le rôle joué par la « reconnaissance » de ces enfants en tant qu’intellectuellement précoces. En effet, on peut penser que cette « étiquette » mise sur les enfants génère un certain nombre d’attentes de la part du corps enseignant, des parents, des pairs et plus généralement de l’entourage. De même, l’enfant se sait compétant ou du moins sait qu’il a des capacités supérieures à la moyenne ce qui peut entraîner chez lui des aspirations et un jugement de ses propres résultats particulièrement élevés et potentiellement irréalisables. Hors, l’estime de soi reflète une capacité de l’individu à se sentir aimé et compétent. Si les attentes de l’enfant lui-même et de l’entourage sont ressenties comme trop importantes, cela peut entraîner chez lui une baisse de son estime personnelle. »

Il reste important de noter que la passation d’un test de QI doit faire l’objet d’une étude approfondie des résultats obtenus. En effet si le QI total permet de situer l’enfant par rapport à une norme (sans oublier qu’il y a à priori autant de différence entre un enfant à 100 et un à 125 qu’entre un précoce à 125 et un à 150), les notes de l’enfant dans les différentes épreuves proposées sont encore bien plus intéressantes dans la mesure où elles permettent d’évaluer le profil intellectuel de l’enfant (notamment en terme d’homogénéité ou d’hétérogénéité). A ce titre, il est indispensable qu’un compte-rendu écrit soit proposé aux parents et si possible explicité verbalement afin de s’assurer de leur compréhension des spécificités de leur enfant et en particulier de ses points forts mais aussi de ses éventuels points faibles, non seulement du point de vue intellectuel mais également comportemental et/ou affectif puisque la passation d’un test d’efficience intellectuelle permet une analyse qui va bien au-delà du seul QI.

Page 74: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

74

Sylvie Tordjman Professeur en Pédopsychiatrie, Université de Rennes 113

Le sujet des enfants surdoués est à l’origine de multiples interrogations, et ceci commence d’emblée par leur dénomination et le regard porté sur ces enfants (précocité intellectuelle, potentiel, don ou talent). La terminologie utilisée varie selon les concepts théoriques sous-jacents. Compte tenu que seront traitées plus particulièrement ici les difficultés psychoaffectives et scolaires associées au surdon, l’adjectif “surdoué” sera donc utilisé préférentiellement, en nous intéressant aux conséquences psychopathologiques de ce “trop”. Nous avons été sensibilisés à la question des enfants surdoués en difficulté devant le nombre d’enfants consultant dans nos Centres Médico-Psychologiques (service public de psychiatrie infanto-juvénile), adressés pour des problèmes scolaires pouvant aller jusqu’à l’échec scolaire, des troubles du comportement, (notamment à type d’hyperactivité avec déficit attentionnel, de comportements d’opposition et de conduites hétéro agressives) ou encore pour des affects dépressifs, et chez lesquels nous découvrions un haut potentiel intellectuel (Tordjman, 2005). C’est la souffrance rencontrée chez certains de ces enfants qui nous a interpellés, ainsi que le contraste entre leurs troubles socio-affectifs et leur haut potentiel intellectuel. Ce décalage entre un développement cognitif précoce et l’apparition de troubles du développement socio-affectif est très bien illustré par le concept de dyssynchronie créé par Jean-Charles Terrassier (19981/2004) qui s’observe dans les domaines intellectuel, social, psychomoteur et émotionnel. Jean-Charles Terrassier distingue chez ces enfants d’une part la dyssynchronie interne avec une dyssynchronie intelligence-psychomotricité et une dyssynchronie intelligence-affectivité, et d’autre part la dyssynchronie sociale s’exprimant par des difficultés dans leurs relations et intégration sociales.

Concernant les possibles relations entre le trouble déficit de l’attention/hyperactivité, la dépression et les difficultés scolaires observés chez certains enfants surdoués, on peut faire l’hypothèse que l’hyperactivité et les troubles attentionnels qui en résultent, seraient des symptômes relevant d’une défense maniaque ou hypomaniaque permettant à l’enfant surdoué de lutter contre un syndrome anxio-dépressif. Ceci nous renvoie à la dépression qui est souvent méconnue

13 Chef du Service Hospitalo-Universitaire de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent de Rennes, et de l’Unité pour Enfants Surdoués en Difficulté, 154, rue de Châtillon -Rennes 35 000 E-Mail : [email protected]

Page 75: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

75

chez l’enfant (encore appelée « dépression masquée »), car le tableau clinique est différent de celui habituellement observé chez l’adolescent et l’adulte. En effet, la dépression peut se manifester chez le petit enfant (de 2 à 6 ans) sous forme d’hyperactivité motrice, d’agressivité dirigée vers les personnes et les objets ou encore d’isolement social, et s’exprimer chez le grand enfant (6 à 12 ans) par un sentiment de dévalorisation, des mensonges, des fugues ou des comportements d’opposition, de refus et d’échec scolaire (Revol et al., 2004). On retrouve presque systématiquement chez l’enfant un désinvestissement des activités antérieures, et donc en particulier chez l’enfant surdoué un désinvestissement de la scolarité pouvant entraîner des difficultés scolaires importantes.

Il apparaît important d’insister sur la nécessité de pouvoir et savoir repérer le plus tôt possible un enfant surdoué en difficulté (difficulté scolaire, psychologique ou affective), notamment devant certains signes d’appel retrouvés et permettant d’évoquer une précocité intellectuelle (capacités cognitives de l’enfant supérieures à celles, en moyenne, des enfants du même âge, tel par exemple un apprentissage spontané de la lecture dès l’âge de 4 ans). Il est en effet essentiel, afin de proposer des prises en charge thérapeutiques adaptées, de ne pas passer à côté du surdon chez un enfant consultant pour des troubles de l’apprentissage ou du comportement ainsi que des affects dépressifs. L’évaluation, entre autres, du niveau d’efficience intellectuelle peut s’avérer être une étape importante. Le sujet n’est pas certes réduit à un Quotient Intellectuel, mais la prise en considération de ce même Q.I., lorsqu’il est élevé et que l’enfant est en échec scolaire, peut exercer un effet révélateur, contribuer à restaurer le narcissisme de l’enfant, permettre de porter sur lui un regard différent, et relancer toute une dynamique tant au niveau de l’enfant que de son environnement parental ou scolaire. Rappelons cependant que tous les enfants en échec scolaire ou présentant des troubles du comportement ne sont pas des surdoués, et que les enfants surdoués ne sont pas tous en difficulté. Il ne faudrait pas néanmoins minimiser le problème posé par les enfants surdoués en difficulté, ou le mettre à distance, soit en méconnaissant sa fréquence, soit en considérant que ces enfants « trop intelligents » n’ont pas besoin d’être aidés.

Ouverture de l’USD (Unité pour surdoués en difficulté)

La réflexion développée ici s’est prolongée par l’ouverture de la première unité pour surdoués en difficulté qui depuis 2006 peut recevoir des enfants venant de toute la France. Notre perspective est de permettre à toutes les personnes concernées d’accéder à un dépistage

Page 76: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

76

précoce et aux soins dispensés par un service public afin qu’elles puissent sortir de leurs difficultés. Ce dispositif propose l’accueil des enfants ou adolescents et de leur famille, des consultations d’évaluation du fonctionnement cognitif (tests de QI et de créativité) et socio-affectif (évaluations de l’investissement scolaire, de l’estime de soi, du syndrome anxio-dépressif…), des suivis thérapeutiques adaptés au profil de chaque enfant à partir du bilan préalable, tout en promouvant le travail de recherche et de formation des équipes soignantes ou pédagogiques dans un respect de la spécificité de chacun. Les différentes missions de cette unité (dépistage, suivi thérapeutique, recherche et formation) nécessitent le développement d’un réseau en partenariat avec tous les acteurs impliqués dans la prise en charge de ces enfants. En effet, il apparaît important d’apporter aux enfants surdoués en difficulté, à partir d’un dépistage précoce, une aide psychologique en articulation avec une aide pédagogique adaptée et un accompagnement familial, afin que leur haut potentiel soit utilisé avec une ouverture sur l’environnement extérieur (c'est-à-dire, vers une créativité et une amélioration des interactions sociales), et ne devienne pas un handicap.

En d’autres termes, notre objectif est de faire de leur différence une source de richesse et d’épanouissement, et non de rejet et d’isolement.

REFERENCES:

Revol, O., Louis, J., Fourneret, P. (2004). L’enfant précoce: signes particuliers, Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence, 52, 148-153.

Terrassier, J.C. (19881/2004). Les enfants surdoués ou la précocité embarrassante (10ème éd.). Paris: ESF.

Tordjman, S. (Ed.) (2005). Enfants surdoués en difficulté : de l'identification à une prise en charge adaptée. Rennes: Presses Universitaires de Rennes.

Page 77: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

77

Expérience d’un parent bénévole Sophie Mahey, ANPEIP Bourgogne14

Si fort heureusement tous les enfants intellectuellement précoces ne rencontrent pas de problèmes, c’est néanmoins souvent suite à une difficulté scolaire, voire à une souffrance que le parent apprend la précocité intellectuelle de son enfant.

La précocité intellectuelle, le haut potentiel, parfois nommé surdouement – quel que soit le terme employé - ne doit être apparenté ni à une pathologie ni à un handicap, mais force est de constater que nombre d’enfants intellectuellement précoces souffrent à cause de la méconnaissance de ce sujet et du fait de leurs particularités non appréhendées.

Le parent et l'enseignant se retrouvent souvent démunis.

L’enfant, très jeune, peut faire montre de plusieurs signes de difficultés notamment des angoisses qui se manifestent de différentes façons. Signalons par exemple ce refus avec larmes, cris, tristesse ou nonchalance désarmante d’aller se coucher « parce que la nuit je pense tout seul et que ça me fait peur toutes mes idées d’un seul coup ». Souvent, il est vrai, l’enfant peut aussi ne plus vouloir/pouvoir se rendre à l'école : l’exprimant par des somatisations diverses ou d’une façon plus ou moins directe : « encore aujourd’hui à l’école alors que c’est si long, si long ».

Quoiqu’il en soit, l’enfant montre que quelque chose ne va décidemment pas ….

La plupart des parents, se culpabilisent et se questionnent. « Que se passe t-il ? Pourquoi ces angoisses, ces refus, ces oppositions ? » De si nombreuses raisons peuvent très aisément expliquer le malaise de notre enfant : la nouvelle grossesse, le petit frère qui vient d’arriver, le déménagement, la séparation, la période de …

Lorsqu’un jour, c’en est trop : il apparaît évident qu’il faut comprendre, réagir et agir pour aider son enfant ou du moins analyser ses réactions qui ne ressemblent vraiment pas à celles des enfants de son âge. 14 [email protected]

Page 78: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

78

Mais vers qui se tourner ?

Les parents se dirigeront alors –majoritairement- dans un premier temps vers leur pédiat re ou leur médecin généraliste, qui traitera le problème émergeant, par des conseils ; administrera parfois un traitement rassurant et orientera peut -être vers un spécialiste, s'il perçoit un problème qui lui semble plus spécifique.

Souvent le professionnel conseillera un pédopsychiatre, un psychologue ou un psychomotricien puisque l'enfant est agité, opposant, éreintant par ses mouvements perpétuels ou en échec scolaire.

Mais au fait qui contacter ?... vers qui s’orienter du secteur privé ou public et en quoi réside la différence de prise en compte… le délai d’attente et le prix mis à part ?

Mais, le temps passe et cela semble aller mieux alors on verra plus tard ; on s’en accommode presque. Après tout il n’est pas malade juste déstabilisant.

Cependant, l’enfant continue à manifester une différence quelque peu troublante, une difficulté ou un mal-être plus ou moins flagrant. Dans la plupart des cas, ces caractéristiques touchent aussi l’enfant en tant qu’élève, l’affectent donc dans sa vie scolaire et parfois avec beaucoup plus d’acuité et de conséquences néfastes qu’à la maison. C’est d’ailleurs souvent l’école qui révèle la problématique. Mais et c’est là le cœur du problème : la précocité intellectuelle ne saute pas aux yeux et se dissimule souvent derrière des difficultés de différentes formes. Les enfants intellectuellement précoces n’étant pas non plus stéréotypés.

Si l’enseignant constate un problème, il l’appréhendera le plus souvent au travers de l’écrit ou du comportement. En effet, nombre d’élèves intellectuellement précoces à l’aise voire brillants oralement rencontrent des difficultés dans le graphisme, l’écriture ou la restitution graphique (particulièrement les garçons).On dirigera alors la famille vers un orthophoniste ou même un graphothérapeute.

L’aspect comportemental est lui aussi évoqué avec prégnance : L’élève se montrant « explosif », ne tenant ni sa place ni sa langue, allant jusqu’à remettre en question l’autorité de l’adulte ou au contraire se mettant « en sourdine » : trop souvent en retrait pace que distrait, rêveur, dispersé ou se retrouvant mis à l’écart de ses camarades.

Page 79: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

79

Si l’enseignant se sent dépassé et cherche une explication, il sollicitera le RASED ou le psychologue scolaire. Si celui-ci est surchargé par des cas beaucoup plus lourds, le CMPP ou un psychologue libéral seront conseillés, mais extrêmement rarement le médecin scolaire.

Et jusqu’à là…personne n'aura émis l'hypothèse d'une éventuelle précocité intellectuelle pour expliquer cette différence ou ces problèmes rencontrées et vécus à la maison et à l’école.

Que l’on se détrompe, ce ne sont pas les émissions spectacles montrant un enfant champion de mathématiques ou le marronnier journalistique du bachelier de 13 ans qui amènent le parent à s’interroger sur un possible haut potentiel de son enfant. C’est d’une part : l’enfant par lui-même : de par son aspect détonant, sa curiosité de tout mêlée d’anxiété, ses capacités et principalement sa grande mémoire, sa connaissance et sa réparti, mais aussi : l’étonnement réitéré des adultes le côtoyant et l’échec des solutions essayées pour l’accompagner dans ses paradoxes, ses particularités et ses difficultés scolaires et autres.

Quand le hasard met le parent sur la piste de l'association, ses premiers mots sont souvent : « "j'ai lu un article il y a quelques temps et je trouve beaucoup de ressemblances avec mon enfant. Pourtant je ne pense pas qu’il soit plus intelligent que les autres- je vous assure- mais il est différent … » et, ils osent suggérer : « Pensez-vous qu'il puisse être intellectuellement précoce, pensez -vous que cette différence puisse expliquer ses difficultés ? Que faut-il faire ? » Souvent la souffrance existe déjà depuis très longtemps pour l'enfant et sa famille.

L’association après une longue écoute orientera dans un premier temps vers les professionnels compétents des secteurs scolaire et libéral. Très peu de parents prétextent une précocité intellectuelle pour se rassurer ou s’enorgueillir.

Si l’enfant s’avère être un enfant intellectuellement précoce et si le parent contacte à nouveau l’association, celle-ci l’accompagnera et l’aidera avant tout chose à prendre le recul nécessaire. En effet, apprendre que la précocité intellectuelle est la raison de la différence de son enfant, et ce, après un temps de difficulté voire de souffrance vécues, n’est pas évident à assumer et à gérer. De même, il est capital que le parent investisse le fait que tout n’est pas expliqué ou explicable uniquement par le biais de la précocité intellectuelle. Il sera aussi proposé au père comme à la mère de rencontrer d'autres parents -non pour se gargariser de cette différence- mais pour l’appréhender grâce à

Page 80: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

80

des groupes de paroles dans des rencontres d’accompagnement à la parentalité, ce qui lui permettra de devenir acteur en étant informé et sensibilisé : Ils pourront alors mettre en place des stratégies pour un meilleur accompagnement de leur enfant

Si, au départ la maman est le premier interlocuteur, au fil du temps, le papa trouve de l’intérêt à ces rencontres et échanges.

Tout parent confronté à cette problématique difficile devrait pouvoir trouver de l’aide auprès des professionnels de l’enfance : pédiatre, médecin, pédopsychiatre, enseignant, équipe du RASED, psychologue scolaire, médecin scolaire.

Mais, quatre ans après le rapport de l’éducation nationale sur « la scolarisation des élèves intellectuellement précoces » qui reconnaît l’existence des élèves intellectuellement précoces, qui explicite leur différence et le panel des difficultés rencontrées, qui inscrit plusieurs préconisations pour prendre en compte ces "élèves à besoins éducatifs particuliers" relayé par des bulletins officiels de rentrées …le parent d’un élève intellectuellement précoce et les enseignants, ne sont pas ou peu aidés. Les solutions sont rares et éparses en France.

Comment accompagner tous ces enfants reconnus ou pas, en difficulté que les parents ne savent pas toujours comprendre et ne parviennent pas toujours à aider ?

Une sensibilisation à cette différence n’incombe pas qu’à la sphère parentale . Pour véritablement accompagner et aider l’enfant intellectuellement précoce en difficulté- notamment scolaire, les professionnels de l’enfance - toute orientation confondue- doivent être informés de cette particularité.

Au sein de l’école, les médecins scolaires, les infirmières scolaires, ont une importance primordiale et pourraient se montrer des acteurs essentiels.

En effet, l’organisation de la détection précoce des difficultés lors de la visite médicale obligatoire entre 5 et 6 ans pourrait faire une petite place à quelques indicateurs d’une précocité intellectuelle mal gérée par le jeune élève. Cette identification précoce permettrait d'éviter une éventuelle mise en place d'un échec scolaire ou d’un mal être.

Gageons alors que de nombreuses difficultés ou troubles divers

Page 81: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

81

qui affectent l’enfant intellectuellement précoce à l’école régresseront. Ils sont nombreux et identifiés : l’inhibition intellectuelle, « l’effet pygmalion négatif »15, l’agitation, la démotivation, le décrochage ou l’échec scolaire, sans parler du trouble d'apprentissage qui peut exister comme chez tout enfant : dyslexie, dysgraphie, dysorthographie, dyspraxie, etc.

Nous pensons que l'identification précoce de tout problème devrait apporter une solution immédiate avant la mise en place de difficultés.

Un enfant en difficulté, un élève en échec ; un élève qui souffre est un enfant à comprendre et à aider d’urgence, quelle que soit la raison de sa souffrance.

ENCART documentations de l’éducation nationale

Le rapport sur la scolarisation des élèves "intellectuellement précoces" www.education.gouv.fr/rapport/delaubier.pdf

Quelques sites académiques :

GARSEP S’appuyant sur les travaux du Groupe Académique de Recherche sur la Scolarité des Enfants Précoces _ l'Académie de Toulouse « En adéquation avec les différents documents et textes officiels parus sur le sujet, une permanence téléphonique est mise en place dans l’académie de Toulouse afin de permettre au personnel de la communauté éducative comme aux parents d’avoir un interlocuteur pour les informer et les conseiller. » [email protected]

CRAEEMD : Centre de Ressources Actions Educatives en Milieu Difficile

www.ac-amiens.fr/pedagogie/craeemd/

http://www.ac-amiens.fr/pedagogie/craeemd/rubrique.php3 ?id_rubrique=59

CRISALIS : Collectif Ressources Internet Sur l’Adaptation et l’Intégration Scolaire www.crisalis -asso.org/ rubrique "adaptation scolaire"

OUVRAGES

ADDA Arielle et CATROUX Hélène - L'enfant doué, l'intelligence réconciliée - Editions Odile Jacob- 2003

BERT Jacques - L'échec scolaire chez les enfants surdoués - 2003-autoédition

15 "..Incitation faite à un enfant précoce non identifié de se normaliser pour être conforme à l'attente du maître et de ses camarades se résignant ainsi à renoncer à l'expression de son potentiel véritable." Jean-Charles TERRASSIER- l’enfant surdoué ou la précocité embarrassante 10ème édition. Edition ESF

Page 82: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

82

GIORDAN André et BINDA Monique Enfants surdoués: un nouveau regard - Comment accompagner les enfants intellectuellement - Editions DELAGRAVE - 2006

GIORDAN André - Apprendre- Editions Belin - 1999

LAUTREY Jacques et HUTEAU Michel : Les tests d'intelligence - Editions la Découverte - 2006

LAUTREY Jacques Dossier : Etat de la recherche sur la précocité intellectuelle Psychologie française sept 2004 vol.49 page 219-352. Editeur Elsevier

LUBART Todd et alii Enfants exceptionnels : Précocité intellectuelle, haut potentiel et talent - Edition Bréal - 2006

SIAUD FACCHIN Jeanne - L'enfant surdoué - Editions Odile Jacob - 2002

- Aider l'enfant en difficulté scolaire - - Editions Odile Jacob - 2006

TERRASSIER Jean-Charles - Les enfants surdoués ou la précocité embarrassante - Esf- 2006-

TORDJMAN Sylvie et alii - Enfants surdoués en difficulté : De l'identification à une prise en charge adaptée- PUR - 2005

VAIVRE DOURET Laurence : La qualité de vie du nouveau né - Edition Odile Jacob – 2003

REVUES

ANAE revue de neuropsychologie du développement et des apprentissages. N° 81

«Fonctionnement psychologique et apprentissage à l'école : l'enfant intellectuellement précoce».N° 67, N°73 et autres.

Le Journal des Psychologues. N°218 « Les surdoués : Grands déjà petits ».

Le Journal des Psychologues. N°230 « L'examen psychologique : intérêt et renouveau ».

Bulletin de psychologie N° 485, tome 59 (fasc. 5), 2006 - Les enfants à haut potentiel et l’école.

Mots clefs : enfant/élève intellectuellement précoce – difficulté- difficulté scolaire –échec scolaire- adaptation scolaire

Page 83: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

83

Etre parent d’un enfant différent

Pr Philippe Jeammet Professeur de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent,

psychanalyste. Chef du service de psychiatrie des adolescents et des jeunes adultes. Institut Mutualiste Montsouris-Jourdan,

Paris 14.

Voir autre article de l’auteur page 107

Page 84: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

84

Page 85: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

85

Présentation du site Intégrascol :

www.integrascol.fr aide à la scolarité de l’enfant atteint de maladie ou de handicap

Dr. Anne Postel-Vinay Pédiatre Hôpital Necker-Enfants -Malades, service de

génétique

I QU’EST CE QU’ « Intégrascol »

INS HEA

www.integrascol.fr L’information au service de la scolarisation des enfants malades ou handicapés

Objectifs : permettre la diffusion d’informations ciblées et validées aux personnels de l’éducation concernés par l’accueil d’un enfant handicapé ou malade. Cette démarche favorise l’information des enseignants et facilite l’adaptation de leurs démarches aux besoins de ces enfants.

Le Ministère de l’Education nationale, après avoir financé le site expérimental souhaite que ce site puisse se développer progressivement.

Moyens : création d’un site Internet pour promouvoir la scolarisation des 250.000 enfants handicapés et/ou malades. Ce travail, hébergé par le INS HEA, (Institut national supérieur de formation et de recherche pour l’éducation des jeunes handicapés et les enseignements adaptés dépendant du Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ; anciennement dénommé CNEFEI de Suresnes) se fait par une mutualisation : - des connaissances médicales, - de l’expertise des pédagogues, - de l’expérience des associations.

Intégrascol a reçu le patronage de l’Académie de Médecine, le soutien de la Société Française de Pédiatrie et un avis favorable du Conseil National de l’Ordre des Médecins.

Page 86: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

86

Réalisation : L’élaboration du site Intégrascol se fait en trois étapes :

1) mars 2004-septembre 2005 : conception d’un site expérimental, - ancrage du projet au sein de l’Education Nationale et contacts avec des partenaires financiers ou intellectuels, - conception du site et réalisation de quelques fiches médicales et pédagogiques, avec un questionnaire d’évaluation

2) octobre 2005 à octobre 2006 : site opérationnel, - collaboration avec certains Rectorats « terrains d’expérience », centralisée par Amiens - début de mise en place des partenariats. - rentrée 2006: lancement officiel du site par le Ministère,

3) octobre 2006 à octobre 2010 : développement du site , sur les nouvelles thématiques souhaitées. La vitesse de développement du site et l’interactivité sont étroitement dépendantes des moyens mis à la disposition du projet.

Partenaires intellectuels et financiers :

- l’Education Nationale assure une légitimité par rapport aux enseignants et

- a financé le projet par une subvention exceptionnelle à l’INS HEA - participe au groupe de pilotage et à la réalisation, notamment

grâce aux personnels de l’INS HEAI et des Rectorats - le Ministère de la Santé et le secrétariat d’état aux personnes handicapées

- participe au groupe de pilotage : par la Direction Générale de la Santé

- reconnaît Intégrascol comme un moyen d’information, dans le cadre du « plan maladies rares »

- les Institutions : peuvent apporter un soutien financier et/ou informer sur l’existence du site

- Caisses d’assurance maladie ou mutuelles, (CNAMTS, MGEN,) - caisse nationale d’allocations familiales …(CNAF)

- Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé (INPES) …

- l’ONISEP et la revue Réadaptation …

- les Associations de malades - ont financé le projet (subvention Aide aux Jeunes Diabétiques) - participent à la réalisation en proposant leur expérience pratique

Page 87: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

87

II MISSION et CHARTE

Les missions

Intégrascol est un site destiné aux enseignants et aux professionnels de l’éducation amenés à accueillir des enfants malades ou handicapés. Il est également ouvert aux familles, aux enfants et adolescents concernés. Ce projet bénéficie du soutien du Ministère de l’Éducation nationale, du Ministère de la Santé et du Secrétariat d’état aux Personnes handicapées, ainsi que du patronage de l’Académie de médecine.

Ce site a pour fonction de sensibiliser les acteurs de la scolarisation à l'accueil des enfants malades ou handicapés et de favoriser la mise en œuvre des adaptations qui leur sont nécessaires. Il propose :

- des éléments permettant de construire une démarche d'accueil en milieu scolaire ;

- une information sur les maladies et/ou handicaps ;

- une description des conséquences possibles sur la vie scolaire ;

- des liens vers des sites d'associations, d'autres sources d'information pertinente ;

- un espace ressource alimenté par des témoignages de professionnels, de jeunes et de familles ainsi que des exemples de projets et d'expériences.

L’information mise en ligne n'est ni exhaustive, ni définitive. Elle est ciblée sur les préoccupations professionnelles des acteurs concernés par la scolarisation des jeunes atteints dans leur santé ou leur développement. Ce site est amené à évoluer, dans sa nature et dans sa forme. Il continuera à s’enrichir de thématiques relatives aux élèves présentant des atteintes somatiques ou en situation de handicap mental ou psychique et à intégrer de nouveaux apports issus du terrain (témoignages, projets…). Cette évolution devrait permettre, en cinq ans, de disposer d’un outil au service d’une politique éducative.

Le site propose des thématiques pouvant regrouper :

- une ou plusieurs fiches médicales qui posent les indications,

- une ou plusieurs fiches pédagogiques qui développent les adaptations,

- des témoignages,

- et d’autres ressources que constituent une liste d’associations, des liens avec d’autres sites ou documents sélectionnés et enfin des

Page 88: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

88

documents téléchargeables dont par exemple des Projets d’Accueil Individualisé, des guides pour les enseignants accueillants, des histoires de vie, des exploitations pédagogiques liées aux thématiques, des outils spécifiques…

Le comité éditorial examinera tout apport issu du terrain.

La charte

Ce site apporte une information généraliste qui doit être utilisée par chaque professionnel dans le respect des individus et des situations.

Cette information généraliste donnée par Intégrascol pourra être :

- Relayée par la médecine scolaire, les cellules départementales Handiscol’ et la cellule nationale d’écoute Handiscol’ (tél. 0810555501) ;

- Complétée par les documents individualisés : le Projet Personnalisé de Scolarisation (PPS), le Projet d’Accueil Individualisé (PAI), le certificat médical;

- Partagées avec les enseignants spécialisés et les autres enseignants engagés dans le projet de scolarisation de l’enfant ou de l’adolescent ;

- Traduite, croisée et accompagnée par les services sanitaires, éducatifs ou médico-éducatifs, sociaux ou les praticiens libéraux qui suivent l’enfant et les autres enseignants de l’équipe ;

- Enrichie par des interventions du milieu associatif.

Les informations médicales de ce site posent un cadre général de symptômes possibles qui sont cependant variables dans leur présentation ou leur sévérité.

De même, les aspects pédagogiques développés sont des orientations que chacun devra adapter pour faciliter la scolarisation.

Dans leur conception, les fiches font place à des sources d’information diversifiées, choisies sans parti pris et exposées dans un souci d’impartialité et d’exactitude scientifique. Pour autant, nous ne pouvons garantir la prise en compte de toutes les sensibilités et tous les travaux existants.

Le Conseil de l’ordre des médecins rappelle que l’information sur la nature de la maladie dont souffre l’enfant reste à la seule discrétion des parents et de l’enfant. Aucune pression ne peut s’exercer sur eux à ce sujet. (Toute information concernant la santé des personnes se fait dans le respect du secret médical.) S’il est important que l’enseignant puisse connaître et comprendre les conséquences de la maladie ou du handicap sur les apprentissages, cela ne passe pas forcément par l’exposé du diagnostic en tant que tel.

Page 89: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

89

Intégrascol est un outil supplémentaire mis à disposition des professionnels de l’éducation qui peuvent par ailleurs se référer aux guides Handiscol’, susceptibles d’être téléchargés ou commandés. D’une meilleure information pourront naître une meilleure compréhension des situations et une mise en œuvre de démarches adaptées.

« […] chaque enfant, celui qui porte un handicap et celui qui n’en a pas, trouve sa place et enrichit l’autre par son existence même. »

Extrait de la préface de Stanislas Tomkiewicz (1925-2003), pour l’ouvrage Mon enfant est différent de Marielle Lachenal. Ed.Fayard, Les enfants du fleuve, Paris, 2000.

III CONTENU

Page d’accueil de www.integrascol.fr

Exemple de fiche médicale (Les mots soulignés sont expliqués dans un glossaire qui apparaît quand on clique sur le mot) Prader-Wi l l i : Le syndrome de (SPW) - Qu'est-ce que le « syndrome de Prader-Willi » ?

- Conséquences sur la vie scolaire

- Pourquoi ? - Quand faire attention ? - Quels symptômes et quelles conséquences ?

- Comment améliorer la vie scolaire des enfants malades ?

- Quelques chiffres - L'avenir - Traitement

Page 90: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

90

Qu'est-ce que le « syndrome de Prader-Willi » ?

Un syndrome est une association de symptômes, signes ou anomalies constituant une entité clinique reconnaissable».

Dans le cas du syndrome de Prader-Willi (SPW) cette association de symptômes, a été décrit en 1956 par plusieurs médecins : Dr Prader, Dr Willi et Dr Labhart, d’ou son nom. Ce syndrome associe une faiblesse du tonus musculaire, un trouble de la régulation du centre de la faim, une insuffisance de la croissance, une difficulté à contrôler ses émotions, des difficultés d’apprentissage. L’importance des problèmes varie beaucoup d’un enfant à l’autre.

Pourquoi ?

L’origine génétique du SPW était suspectée depuis longtemps. Elle n’a été démontrée qu’en 1985 par la mise en évidence d’une délétion (perte d’un morceau) de petite taille d’une région très précise du chromosome 15. Depuis, des études plus poussées ont permis de retrouver différents mécanismes génétiques qui ont tous la même conséquence : l’absence ou la perte de fonction des gènes contenus dans la région 15 q11-q13 du chromosome 15 d’origine paternel. Ce qui ne veut pas dire que c’est une anomalie qui provienne exclusivement du père.

Il existe trois mécanismes - une micro délétion sur le chromosome paternel (70%) - une disomie uniparentale maternelle (30%), soit deux chromosome 15 venant de la mère et aucun du père - une anomalie d’empreinte (très rare), soit l’absence de « marquage » de l’origine parental des chromosomes 15

Quels symptômes et quelles conséquences ?

Il y a deux périodes très différentes dans la vie des enfants. Pendant les premiers mois de vie ces enfant sont souvent très mous, hypotoniques, et ont des difficultés à s’alimenter. Beaucoup d’inquiétudes se cristallisent alors autour de la mauvaise prise de poids.

A l’âge scolaire les préoccupations changent totalement mais on constate une grande VARIABILITE d’un enfant à l’autre bien qu’il y ait certain traits communs :

- vers l’âge de 18 mois à 2 ans, le comportement alimentaire se modifie avec la survenue d’une hyperphagie. Cette prise excessive de nourriture est due à une anomalie de la satiété. Ces enfants sont donc constamment tiraillés par une sensation de faim.

Page 91: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

91

- Les difficultés d’apprentissage et le retard d’acquisition du langage sont fréquents. Le retard intellectuel, variable, est le plus souvent modéré.

- Un profil comportemental particulier peut gêner ces enfants dans leur socialisation et leurs apprentissages. Ils ont parfois un caractère entêté avec des persévérations verbales, répétant leurs questions. Ils peuvent être sujets à des accès de colère intense, véritables « raz de marée », dont ils sont les premiers à se sentir coupables.

- Les conséquences endocriniennes du SPW sont un éventuel déficit en hormone de croissance et une insuffisance en hormones sexuelles avec certaines anomalies génitales qui sont plus apparentes chez les garçons.

- Une diminution de la sensibilité à la douleur explique la tendance qu’ont certains enfants à se gratter, parfois de manière importante.

Quelques chiffres Le SPW est le plus souvent isolé dans une famille et sa survenue accidentelle. Sa fréquence est estimée à environ 1/15 000 naissances.

Traitement

Il comporte souvent - une prise en charge en psychomotricité et/ou en kinésithérapie : l’hypotonie des premiers mois régresse spontanément, mais un décalage des acquisitions motrices est quasi constant. Il persiste souvent une hypotonie résiduelle et une fatigabilité.

- de l’orthophonie, avec un travail sur la déglutition d’abord, puis sur les difficultés de l’articulation et l’acquisition du langage, enfin soutien aux apprentissages scolaires.

- un suivi en endocrinologie : un traitement hormonal est souvent proposé. L’hormone de croissance permet aux enfants de grandir car ils ont tendance à être petits. Ce traitement les aide à lutter contre la surcharge pondérale et favorise le développement des masses musculaires. Un complément en hormones sexuelles est proposé aux adolescents.

- un régime alimentaire, fondamental : il est souvent très strict car les enfants, en raison du SPW, dépensent très peu de calories (environ 60% de la normale pour leur âge) et paradoxalement ne sont jamais rassasiés. Ils sont donc en quête permanente de nourriture et la prise de poids peut être excessivement rapide. Il est indispensable de les aider à éviter une obésité (fiche obésité) qui réduirait considérablement leur qualité et leur espérance de vie.

Page 92: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

92

- une surveillance médicale régulière : de la colonne vertébrale (recherche d’une scoliose ), des yeux (strabisme, myopie), de l’état dentaire (salive épaisse, risque de caries) de la qualité du sommeil.

- un soutien psychologique : ces jeunes sont confrontés à de nombreuses frustrations et ressentent très violemment leurs échecs. Ils éprouvent une grande culpabilité quand ils n’arrivent pas à contrôler leur comport ement alimentaire et leurs accès de colère. Les aider dès le plus jeune âge à extérioriser leurs sentiments et à verbaliser leurs émotions peut leur procurer un soulagement.

Conséquences sur la vie scolaire

Les capacités d’apprentissage étant très variables selon les enfants, certains seront en intégration individuelle ou collective, d’autres se verront proposer une orientation spécialisée. De plus en plus d’enfants bénéficient d’une scolarisation en milieu ordinaire. Nombreux sont ceux qui acquièrent la lecture et l’écriture. Certains poursuivent leurs études au collège et au lycée

Les difficultés articulatoires et les troubles du comportement peuvent gêner l’évaluation des acquisitions de l’enfant

Les activités sportives, permettent de lutter contre le surpoids et la faiblesse du tonus musculaire. Les sports proposés tiendront compte de l’éventuel surpoids ou difficultés orthopédiques. La piscine est particulièrement intéressante.

Le régime strict faisant partie du traitement doit être respecté.

L’hormone de croissance qui se fait sous forme d’une injection au domicile 6 ou 7 jours par semaine ne pose aucun problème dans le cadre de la vie scolaire. C’est seulement lors d’une « classe de nature » que pourrait se poser la question de la poursuite du traitement pendant ces quelques jours en faisant appel à une infirmière libérale.

Pour tous les autres médicaments les problèmes sont les mêmes que pour tout enfant sous un traitement quelconque.

Quand faire attention ?

- autour de la nourriture : il est très difficile pour l’enfant ou l’adolescent de se responsabiliser complètement. L’adulte devra donc l’aider : adaptation de la cantine, éventuellement panier repas préparé par les parents. Certains enfants devront être surveillés pour qu’il ne « chaparde » pas chez les camarades. Lors d’un goûter à l’école il ne faut pas en priver l’enfant, mais autoriser qu’il apporte un aliment hypocalorique

Page 93: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

93

adapté. Pour les fêtes d’anniversaire, veiller à ce qu’il ait une petite part et ne se serve pas plusieurs fois.

- autour de la crise de colère. On cherchera à éviter les facteurs déclenchant. Laisser passer la crise si elle est déclenchée. Il est très rare que l’enfant soit dangereux pour lui même ou pour les autres, mais l’intensité des colères peut impressionner et mérite une explication rassurante au groupe.

- une somnolence diurne ou des baisses de vigilance seront signalées aux parents car peuvent être en rapport avec un trouble du sommeil qu’il sera nécessaire d’explorer médicalement.

Les enfants peuvent être sujets aux moqueries de leurs camarades, sur leur poids, leur difficultés alimentaires, leur obstination qui contraste avec leur crédulité ou naïveté.

Comment améliorer la vie scolaire des enfants malades?

Si nécessaire le PAI fixera les aménagements pratiques autour de l’alimentation

On peut mettre à tirer profit le caractère persévérant de ces jeunes, leur goût pour les activités répétitives et méthodiques. Ils ont une dextérité visuo-spatiale ainsi que le prouve leur capacités pour la réalisation de puzzles.

Leur mémoire visuelle est nettement meilleure que leur mémoire auditive. Des informations visuelles doivent toujours compléter les consignes données par oral.

Ces enfants ont souvent des difficultés en raisonnement mathématiques et leur mémoire à court terme est médiocre. En revanche leur capacité en lecture et leur mémoire à long terme est nettement meilleure.

Comme ces enfants sont très sensibles aux changements et à la frustration, toute modification du programme initial risque d’être mal perçue et devrait être si possible expliquée à l’avance. Toute organisation répétitive et structurée est au contraire rassurante

Ils ont un grand sentiment d’échec et sont facilement anxieux. Ils doivent être rassurés et encouragés par l’adulte. Très conscients de leurs différences ils ont tendance à se renfermer sur eux mêmes.

En revanche, ils ont souvent des difficultés à appréhender la justesse des situations de la vie courante, étant soit aveuglément confiant soit injustement suspicieux.

Leur fatigabilité et leur lenteur peuvent être en partie compensée par un temps supplémentaire dans la réalisation des consignes et/ou une

Page 94: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

94

restriction de la longueur du travail. Une demande de tiers temps peut être faite lors des examens.

L'avenir

La prise en charge précoce actuellement proposée, médicale et rééducative, doit éviter de nombreuses complications organiques (notamment l’obésité) et psychologiques du SPW. Mais le problème alimentaire reste toujours une préoccupation centrale.

Une meilleure connaissance des particularités comportementales de ces jeunes permet à l’adulte d’adapter ses propositions et de les conduire dans les apprentissages.

IV INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES

Pour une thématique donnée Le ou les associations et un lien permet d’accéder directement à la page d’accueil du site de l’Association

Des liens (exemple) Orphanet (maladies rares, informations médicales) C'est un serveur d'informations sur les maladies rares et les médicaments orphelins, en libre accès pour tout public. et un lien permet d’accéder directement à la page d’accueil

Page 95: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

95

Des ressources documentaires (exemple)

« Je vais à l'école » Document téléchargeable rédigé par l'Association Prader-Willi France et concernant l'intégration scolaire dans le cadre de ce syndrome. L'Association peut adresser le livret sur demande, à faire sur leur site web. .PDF – 1032116 octets et un lien permet d’accéder directement au document qui est téléchargeable

Les fiches pédagogiques Elles sont de plusieurs types - Soit des préconisations pédagogiques, exemple de la page Internet

- Soit des témoignages, exemple d’un texte : Témoignage d'une psychologue Présentation Une patiente drépanocytaire asymptomatique est suivie depuis quelques temps par une psychologue spécialisée dans la prise en charge des patients et/ou des familles touchées par la drépanocytose. Cette patiente est maman d'une fillette de 6 ans, elle aussi drépanocytaire mais avec une forme assez grave de la maladie.

Page 96: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

96

Le récit de la psychologue

« Au fil de nos entretiens, j'ai compris qu'à l'école cela ne se passait pas très bien pour la fillette du fait de la méconnaissance de la drépanocytose par l'enseignante et de la difficulté pour la maman, d'origine africaine, d'expliquer la maladie. J'ai donc donné à cette dame les informations sur le PAI (Projet d'Accueil Individualisé), avec la fiche sur la drépanocytose du projet Integrascol et le nom du site internet. Elle a d'emblée transmis toutes ces données à l'école. Cela a permis une amélioration considérable de la scolarité de cette fillette qui d'ailleurs a apporté à sa maîtresse une invitation pour la fête de l'APIPD (Association Pour l’Information et la Prévention de la Drépanocytose) du 19 décembre dernier… et la maîtresse est venue avec ses enfants.

Enfin, la directrice de l'école a dit à la maman qu'il n'était plus nécessaire de mettre des bouteilles d'eau dans le cartable de la fillette, l'école se charge de lui en fournir.

Ainsi, cette fillette drépanocytaire est aujourd'hui plus à l'aise dans la vie, elle assume déjà sa maladie ! »

CONCLUSION

Le projet Intégrascol parlant de la maladie et du handicap n’aborde que certains aspects de l’Enfant différent : ses besoins spécifiques dans son parcours scolaire.

Si ce site n’a en aucun cas vocation à répondre à des questions personnelles, mais l’information bien que généraliste peut participer à aider individuellement les acteurs de l’éducation.

Page 97: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

97

ARTICLES COMPLEMENTAIRES

Page 98: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

98

Page 99: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

99

Dans les Yvelines, prévenir la souffrance psychique chez les ados

Francine Hirtz16, Suzanne Wipff17, Catherine Isserlis18

La santé de l’homme n°380 Dossier "santé à l'école : tout un programme "

Dans les Yvelines, un dispositif de prévention des souffrances psychiques des jeunes réunit les professionnels de santé qui exercent en milieu scolaire, les psychologues et les psychiatres hors établissement. Ces professionnels forment notamment les équipes des collèges et des lycées à la prévention, au dépistage et à la prise en charge de la souffrance psychique.

Dans cet article collectif, nous présentons le dispositif de prévention de la souffrance psychique des enfants, mis en œuvre dans le département des Yvelines. Dans un premier temps, nous présentons le dispositif général mis en place, puis dans un deuxième temps, l'action de prévention des déscolarisations mise en œuvre avec les familles et les professionnels. Enfin, nous abordons l'implication - indispensable - des professionnels du secteur de la psychiatrie infanto-juvénile : psychologues, psychiatres et centres médico-psychologiques.

La prévention des souffrances psychiques des enfants et des adolescents est devenue une des préoccupations de l'école. De façon concomitante, la santé mentale apparaît dans le paysage social, et différents programmes déclinés au plan national élargissent le cadre de la maladie mentale vers cette souffrance psychique. Cette prise en compte de la souffrance psychique des élèves est une composante du plan quinquennal de santé de décembre 2003 du ministère de l'Éducation nationale.

Dans les Yvelines, les médecins du service de promotion de la santé en faveur des élèves sont confrontés à une augmentation des demandes de la part des équipes des établissements et des écoles dans

16 Médecin conseiller technique inspection académique des Yvelines. 17 Médecin de l'Éducation nationale, adjointe au médecin responsable départemental 18 Chef de service en psychiatrie infanto- juvénile à l'hôpital A. Mignot, Versailles.

Page 100: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

100

ce domaine ; premier motif des examens à la demande pour le service, dont 70 % au niveau secondaire, avec une montée en puissance dans le primaire actuellement.

Prévention des souffrances psychiques

Si la famille reste le lieu privilégié du développement psychoaffectif de l'enfant, dans quelle mesure l'école peut-elle participer à la prévention de la souffrance psychique ? Par la prévention primaire, à travers des actions visant à développer les compétences psychosociales chez les élèves et en favorisant les conditions de bien-être des élèves et des adultes de la communauté scolaire, par la prévention secondaire, grâce au repérage et au dépistage de cette souffrance psychique chez les élèves ; par la prévention tertiaire, afin que l'école " prenne soin " de ces élèves. Cette prévention doit s'inscrire dans une démarche de promotion de la santé mentale, pour laquelle nous travaillons avec deux axes prioritaires : - le développement du partenariat avec les secteurs de psychiatrie infanto-juvénile (services hospitaliers, hôpitaux de jour, centres médico-psychologiques ; - le développement des compétences des professionnels dans ce domaine.

En ce qui concerne le partenariat avec les secteurs de psychiatrie infanto-juvénile, une charte signée en 1998 entre l'inspecteur d'académie et le directeur départemental des Affaires sanitaires et sociales définit les bases du partenariat entre le milieu du soin et l'école.

Différentes actions sont déclinées principalement à travers l'aide apportée aux équipes d'établissements. À titre d'exemple, au sein des actions financées depuis 1999 dans le cadre des programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins (Praps), une formation-action, proposée aux établissements qui en font la demande, se déroule sous la forme de rencontres régulières entre une équipe d'adultes de l'établissement (enseignants, conseillers d'éducation, médecins, infirmières, assistantes sociales) et une équipe de pédopsychiatrie de secteur. Ces rencontres permettent, au fil des années, d'établir des échanges, permettant d'enrichir chaque équipe de la pratique professionnelle de l'autre. Autre action mise en œuvre : une équipe ressource de trois médecins (un pédopsychiatre, un pédiatre hospitalier et un médecin scolaire) propose des études de cas aux infirmières scolaires d'un bassin. Troisième action mise en œuvre : l'analyse de pratique d'une équipe médico-sociale d'un établissement animant un groupe de parole chez des élèves en grande difficulté d'adaptation.

Page 101: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

101

Toutes ces actions facilitent l'accès aux soins et le maintien de la scolarisation d'élèves en grande souffrance psychique.

Depuis 2005, devant la complexité de certains cas, les secteurs de psychiatrie infanto-juvénile ont rejoint des cellules partenariales Éducation nationale/Protection judiciaire de la jeunesse/conseil général. Dans ces " cellules d'aides à la scolarisation pour les élèves en difficulté " (Cased), le regroupement sur un même bassin des différents acteurs décisionnels de ces institutions permet de construire des réponses complémentaires. Les familles donnent leur accord pour que le cas de leur enfant soit évoqué par cette cellule.

D'autres actions s'appuient sur le partenariat avec la psychiatrie : des formations d'équipes d'établissements, une étude descriptive sur le repérage des risques suicidaires par les médecins et les infirmières sur quatre établissements d'un bassin ; une sensibilisation des enseignants de primaire au repérage de la dépression de l'enfant, la participation à des actions dans le cadre du réseau santé mentale Yvelines sud.

Enfin, un médecin scolaire compétent en psychiatrie intervient à plein temps au niveau départemental. Sa mission est large : conseil dans la prise en charge de certains élèves, animation de groupes d'étude de cas pour les médecins du service, formation des adultes, mise en place de formations dans les établissements pour aider les professionnels dans le repérage des difficultés des adolescents et les réponses à apporter, suivi de cas d'élèves en grande difficulté ou en rupture de scolarisation comme décrit ci-après et qui s'inscrit dans un dispositif départemental plus large

Prévenir les déscolarisations

Ce suivi des adolescents en situation - ou risque - de déscolarisation est désormais en œuvre à l'échelon départemental et donc assuré par un médecin scolaire dédié spécifiquement à cette tâche à l'inspection académique.

La déscolarisation concerne un nombre de plus en plus important de jeunes, confrontés à des situations très diverses. Une évaluation médico-psychologique est indispensable si l'on veut répondre à la globalité et à la complexité des problèmes posés. Il s'agit, en effet, de cerner le trouble psychique dans lequel s'inscrit la problématique scolaire, de donner un sens en termes psychopathologiques aux troubles constatés permettant au médecin, d'une part, de donner un avis sur les conditions les plus favorables de reprise de la scolarité, d'autre part,

Page 102: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

102

d'accompagner le jeune et sa famille vers une prise en charge thérapeutique si nécessaire

Ce travail ne peut se concevoir que dans le cadre d'un partenariat " vivant ". Il s'agit de créer autour du jeune un réel lien incluant les parents, l'établissement scolaire et les partenaires du soin. Les axes de ce travail sont multiples. Pour l'élève et sa famille, il s'agit d'identifier et de comprendre en termes psychiques les difficultés qui sous-tendent la déscolarisation afin de dégager les besoins psychiques de cet adolescent; un travail associant la famille sera alors entrepris pour impliquer, mobiliser et soutenir l'adolescent et sa famille dans un projet réaliste : les accompagner dans la reconnaissance de leurs difficultés pour amener l'adolescent à accepter, si besoin, une prise en charge thérapeutique.

Pour les personnels de l'Éducation nationale, accueillir des élèves présentant des troubles du comportement responsables d'importantes perturbations de la communauté scolaire et/ou générant beaucoup d'angoisse demande des compétences et moyens particuliers. Les équipes doivent, elles aussi, être écoutées et accompagnées. Fournir aux professionnels la possibilité de donner un sens aux troubles qu'ils constatent, de percevoir l'importance en termes psychiques du travail qu'ils réalisent est une nécessité absolue, faute de quoi le projet ne peut " vivre ", et son échec conduit souvent au rejet des uns par les autres. La qualité du partenariat et l'authenticité des liens entre la famille, l'école et le soin sont le gage de la réussite du projet de re-scolarisation. Des formations des personnels à la problématique adolescente, au repérage des signes de souffrance psychique et surtout à la façon d'y répondre devraient être mises en place lors de la formation initiale. Pour notre part, nous proposons dans notre académie des stages de formation continue sur ces thèmes.

Enfin, si les troubles ayant conduit à une déscolarisation sont liés à un processus pathologique, l'accueil sera réalisé en lien avec les structures de soin dans le cadre d'un Projet individuel d'intégration scolaire (PIIS). Dans ce cadre, l'élève, ses parents, la communauté scolaire et les professionnels du soin déterminent ensemble les objectifs et les conditions de la re-scolarisation et ils en suivent l'évolution.

Ce travail de re-scolarisation associant les jeunes, leurs familles et les professionnels, mis en œuvre à un échelon modeste, n'en a pas moins porté ses fruits : soixante-quinze des soixante-dix-huit jeunes suivis durant l'année scolaire 2004-2005 ont pu reprendre leur scolarité sous

Page 103: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

103

des modalités diverses fixées en fonction de leur situation personnelle (psychique, scolaire et sociale).

L'indispensable coopération médecins scolaires/psychiatres

Jusqu'à il y a dix ans, environ 30 à 50 % des élèves qui étaient pris en charge dans les centres médico-psychologiques étaient orientés par les professionnels de l'école qu'ils fréquentaient. Mais, depuis une dizaine d'années, de nombreux changements sont intervenus : l'augmentation considérable des demandes, l'extension des missions de la pédopsychiatrie au-delà des soins individuels à un rôle social centré sur une préoccupation de santé publique, et l'arrivée du concept de santé mentale ont amené les professionnels de la psychiatrie à faire évoluer leurs pratiques vers un nouveau type de partenariats avec les acteurs de soins primaires. Ce nouveau partenariat représente une rupture considérable avec ce qui fut longtemps une rigoureuse séparation entre soin et pédagogie. Alors que l'école s'était fait un devoir de développer en son sein toutes les ressources dont elle avait besoin pour la prise en charge des enfants et que la psychiatrie s'était fait une religion de ne pas intervenir dans l'école afin de préserver son espace de soin, il faut désormais apprendre à travailler ensemble. Car l'école ne peut surmonter seule le problème de la prévention en santé mentale ni réussir seule la gageure de scolariser tous les enfants, y compris ceux souffrant de troubles mentaux.

Pourtant, les représentations du psychiatre et plus largement du monde de la psychiatrie restent un obstacle à la demande de soins aussi bien pour les enfants et leur famille, qui répugnent à s'y adresser, que pour les intervenants scolaires, qui ne savent pas sur quels critères appuyer leurs propositions d'orientation vers des lieux de soins psychiatriques. En effet, de nombreux obstacles émaillent le parcours de soin et les interventions sont souvent trop tardives.

Certains enfants donnent très tôt des signes d'alerte, quelquefois même dès la maternelle. Faute d'être correctement analysés, ces signes ne sont parfois ni repérés ni traités. Les psychiatres et les psychologues des secteurs de psychiatrie infanto-juvéniles peuvent participer à des actions de formation pour aider au repérage précoce des troubles par le dispositif de santé scolaire. Certains enfants sont très tôt repérés et orientés vers les consultations de pédopsychiatrie mais les familles n'y vont pas ou n'adhèrent pas aux soins et abandonnent très vite. Il faut donc améliorer les relais entre l'école et la pédopsychiatrie afin que les professionnels de soin primaire puissent soutenir l'enfant dans l'environnement scolaire. L'accès aux soins en pédopsychiatrie est

Page 104: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

104

souvent rendu difficile par les délais d'attente et par la nécessité d'une prise de conscience des troubles par la famille et l'enfant. Leur demande doit être accompagnée par les professionnels qui sont les plus proches de l'enfant et de sa famille.

Certains enfants passent de l'échec scolaire à une conduite auto-agressive où à une conduite agressive à l'égard des autres ou vice versa et quelquefois sans grande transition. Les troubles cognitifs, les troubles du langage, l'hyperactivité ne peuvent être envisagés uniquement du côté de l'école dans leurs répercussions sur les apprentissages pas plus que leur dimension psychoaffective, traitée isolément du côté de la pédopsychiatrie sans tenir compte de leurs répercussions sociales. Il importe donc pour chacun des acteurs de bien connaître les conditions d'abord de l'enfant et les limites de l'action possible dans le cadre institutionnel de l'autre partenaire afin de coordonner leurs interventions en complémentarité.

Les dispositifs contacts entre les secteurs de psychiatrie et le milieu scolaire contribuent à la santé mentale en permettant d'améliorer l'accès aux soins grâce à un repérage plus précoce des troubles, une meilleure connaissance des ressources locales et de leur fonctionnement, et un accompagnement de la demande vers une orientation ciblée. Ils permettent aussi de favoriser l'intégration scolaire des enfants souffrant d'un handicap d'origine psychique en contribuant à la réflexion sur un aménagement des conditions de scolarisation qui tienne compte des capacités de l'enfant autant que de sa pathologie.

Page 105: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

105

Adolescence et santé, Constats et propositions pour agir auprès des jeunes scolarisés

Professeur Jean-Louis San Marco, Faculté de médecine de Marseille, Président du Conseil d’administration de l’INPES

Collection La Santé en Action Responsable de la collection, Philippe LAMOUREUX, Édition Jacqueline DIDIER. ISBN : 2-908 444-85-2. Septembre 2004

De toutes les périodes de la vie, celle de la fréquentation de l’école est la plus fascinante. Période des grandes acquisitions, c’est celle des transformations les plus importantes et donc des risques majeurs. Risques intimement liés à ces transformations, qui vont faire progressivement du petit d’homme un adulte conscient et responsable. Toutes ces étapes nécessaires, franchies l’une après l’autre, sont source de risques spécifiques. Le caractère inéluctable et quasi recherché de ces risques les rend particulièrement angoissants et leur enlève surtout le côté trivial des autres risques, liés à l’usure de l’âge ou à la fragilité des premières mises au point, qu’on cherche au contraire à éviter et dont on tente «seulement » de se protéger.

La prévention de ces risques évitables est bien plus facilement admise, dans notre culture essentiellement curatrice, que la prévention des risques « obligatoires » de l’adolescence, qui entre mal dans une représentation thérapeutique et implique au contraire la nécessité d’un «accompagnement », très dérangeante pour ceux qui croient pouvoir seulement traiter, ou à la rigueur protéger. Une réflexion curatrice, même précoce, est ici totalement inadaptée et non opératoire : risques et progression sont liés, chacun découlant de l’autre. Cela déstabilise ceux qui, dans une ambiance «médicalisé », s’attachent à comprendre et à protéger ceux qui traversent cette période difficile. Aider les jeunes scolarisés n’est pas simple. D’autant que la plupart s’adaptent bien et poussent l’outrecuidance jusqu’à traverser cette période difficile sans notre aide, et en tout cas sans l’aide «curatrice» qu’on se préparait à leur apporter. Mais certains chutent, sans que l’on comprenne clairement ce qui les surexposait ; et tous méritent qu’on leur facilite la traversée. Malgré une très bonne adaptation générale à cette situation difficile et l’excellente santé de la plupart des jeunes scolarisés, un sentiment diffus

Page 106: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

106

d’angoisse étreint les responsables tout au long de ces transformations indispensables, justifié par la survenue de complications qui, pour être peu nombreuses, peuvent être dramatiques. On résume souvent l’angoisse ressentie par les jeunes devant ces étapes par deux raisons symétriques : le sentiment de perte de la protection des parents après la destruction de leur représentation positive, angoisse renforcée par l’inquiétude devant une indépendance pourtant ardemment désirée. C’est un peu réducteur, car il y a de multiples passages intermédiaires, et à chaque étape un nouveau risque. Et, chaque fois, perte de la sécurité de la situation ancienne, connue et rassurante, et désir mêlé d’angoisse de découvrir la nouvelle étape.

Pour ne rien simplifier, trois caractéristiques de cette phase de vie compliquent la tâche des intervenants : tout d’abord, le caractère mouvant de cette période de transformations incessantes, qui rendent l’analyse difficile ; l’absence, ensuite, de marqueurs d’évolution et le silence des intéressés quant à leur stade d’évolution ; enfin, le fait que tous les groupes auxquels on s’adresse sont d’une extraordinaire hétérogénéité ! On intervient presque toujours à contretemps. On en viendrait presque à souhaiter que nos jeunes puissent être affranchis de ces obstacles. Ce qui serait pire encore! Ces épreuves sont nécessaires à leur maturation! On ne peut que les accompagner, pour leur rendre les obstacles le moins dangereux possible. On comprend pourquoi, ici moins qu’ailleurs, il ne peut y avoir simple prévention, au sens restrictivement médical de ce terme, mais un vrai accompagnement, un compagnonnage, pour tout dire une éducation. Cette dimension éducative est première dans ce livre.

Les analyses, les propositions d’action sont légions dans ce domaine. Mais celui-ci est tellement vaste que la plupart n’en abordent souvent qu’un aspect, un point de vue, et apportent au bout du compte bien peu d’aide.

Ce livre tire son deuxième intérêt de l’ouverture d’esprit de ses auteurs. Ils ne se contentent pas du découplage si fréquent entre analyse fine et désincarnée, et action généreuse mais sans réelle base scientifique. Au contraire, ils les associent et nous proposent un véritable guide d’action. Cette modalité d’approche, rendue sans doute nécessaire par la complexité des problèmes abordés, fait l’intérêt de ce travail. Une approche aussi complète et opératoire de cette phase de vie répond au grand défi lancé à une institution comme la nôtre : démontrer que l’éducation pour la santé est nécessaire, et en même temps qu’elle est possible et qu’elle peut être efficace. Elle pourra être notre justification, si nous savons le relever.

Page 107: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

107

La prévention, affaire de la société tout entière

Philippe Jeammet Président de l'École des parents et des éducateurs

Ile-de-France.

LA SANTÉ DE L'HOMME 384 - JUILLET/AOUT 2006 - Pages 15 à 19

Philippe Jeammet, psychiatre, président de l'École des parents et des éducateurs Ile-de-France était le " grand témoin " des Journées de la prévention. Il suit des adolescents depuis près de quarante ans. Voici une synthèse de son intervention. Pour lui, il faut repenser la prévention, qui doit être parentale, adulte et sociale en même temps. S'ils ne se nourrissent pas auprès des adultes, les " jeunes se dévalorisent, ne peuvent plus s'arc -bouter contre les autres, un peu comme une maison qui n'aurait plus d'intérieur. Ces jeunes qui vont mal s'étayent dans l'opposition, avec le sentiment qu'il n'y a rien de solide à l'intérieur. "

Cela fait presque quarante ans que je m'occupe des adolescents. Dans la période de flottement du passage entre le confort de l'enfance et la recherche d'une voie adulte, l'adolescent va être en recherche de lui-même, ce qui va le rendre particulièrement dépendant de son environnement. Et, plus on est en insécurité intérieure, plus on sera dépendant de l'environnement. Dans ce contexte, la prévention est fondamentale, et c'est le devoir basique des adultes que de se soucier - au sens profond - de l'attention portée à l'enfant et à son devenir. À la fois tout se prépare dans l'enfance et tout reste jouable ensuite. Tant qu'il y a de la vie, il n'y a pas de fatalité totale, on peut se libérer. Il n'empêche que ce sera beaucoup plus difficile si on est déjà pris dans un engrenage négatif. D'où l'importance du développement. Il est important de penser la prévention en termes d'un message adressé par les adultes à leurs enfants. Ce n'est pas simplement une liste d'informations, un constat d'expert sur ce qui peut préserver la santé. Ce qui fait de tout adulte un éducateur en puissance pour un jeune, c'est l'attente qu'a cet enfant, ou cet adolescent, de chercher à se nourrir de ce qui lui manque. Qu'on le veuille ou non, cette attente fait d'un adulte un modèle potentiel, pourvu d'une fonction éducative. Nous ne pouvons pas nous réfugier dans notre fonction d'expert. Le grand problème de la prévention, ce sont les adultes et quel message nous voulons faire passer

Page 108: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

108

C'est la raison pour laquelle je suis heureux que l'INPES n'insiste pas uniquement sur le catalogue des risques qui menacent les enfants et les adolescents. La vie est faite de tensions, c'est ce qui permet une certaine créativité. Nous ne pouvons donc pas centrer la prévention uniquement sur les dangers, il faut au contraire la positiver, et la motivation des adultes me semble importante.

Insécurité et mauvaise estime de soi

Nous avons certaines contraintes qui nous viennent de l'animal ; comme tout être vivant, l'être humain se nourrit de l'échange. Par rapport à l'animal, l'être humain a conscience de lui-même : cette conscience va totalement changer les choses. Elle va sérieusement compliquer cette nécessité, pour nous comme pour tout autre être vivant, de nous nourrir des autres. Et comme nous avons conscience de nous-mêmes comme un être unique, comment être soi si nous devons nous nourrir et apprendre des autres, et éviter d'être le clone des autres ? D'où tout le drame et l'intérêt de ce qui fait de nous des hommes. C'est-à-dire que ce dont nous avons besoin devient également une menace pour notre autonomie. L'adolescence est le moment par excellence où l'on est confronté à ce paradoxe, où ceux qui sont le plus en insécurité ont une mauvaise estime d'eux -mêmes, n'ont pas confiance en eux. Ils vont être en attente de recevoir de l'extérieur, notamment de leurs objets d'attachement, c'est-à-dire les parents, les adultes, cette force, cette sécurité faite d'éléments très imprécis qui vont les remplir, avec la sexualisation que génère inévitablement une telle attente aussi. Ils vont avoir besoin de se nourrir notamment des avis et des conseils des adultes.

Développer ses potentialités

Mais ce besoin est si grand qu'ils vont le ressentir comme un pouvoir donné aux adultes sur eux. C'est ce qui fait le charme et la complexité des relations amoureuses. Si on a trop besoin de l'autre, l'autre prend un pouvoir sur nous, et à ce moment-là la tentation est de refuser ce pouvoir et donc de se priver de ce dont nous aurions besoin, ce qui nous rend de plus en plus dépendant. Cet engrenage est pour moi au cœur de la question de la prévention. Il s'exaspère au moment de l'adolescence mais il commence avant et persiste après. Le grand problème de la prévention, c'est de permettre à un enfant de se nourrir de ce dont il a besoin tout simplement, c'est-à-dire de développer ses potentialités physiques, intellectuelles, affectives, relationnelles.

Ce besoin de nous nourrir est une contrainte qui peut sembler contradictoire avec le besoin de se différencier. Le pédiatre et

Page 109: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

109

psychanalyste anglais Winnicott a eu ce trait de génie de mettre en exergue ce paradoxe selon lequel pour qu'un enfant ait l'impression de créer son environnement il faut que l'environnement soit déjà présent. Pour créer ses objets de désir, d'attachement, il faut que la mère soit déjà là. Et, si celle-ci s'adapte bien aux besoins de l'enfant - ce qui demande de la fiabilité, des capacités d'adaptation -, l'enfant ne sent pas qu'il a besoin de sa mère, il sent que le monde est plutôt bien fait. J'ai besoin de quelque chose, je crie, et j'apprends. Et je ne me pose pas la question de mon impuissance, de ma dépendance, j'ai des besoins et ils se satisfont. Et, comme je suis dans la fiabilité, je commence à faire confiance, et comme je fais confiance je peux attendre, et comme je peux attendre j'apprends que j'ai des ressources. Je crois que cette triade est fondamentale en matière de prévention. Il faut avoir confiance pour pouvoir attendre et pendant que l'on attend, on utilise ses capacités, ses ressources intérieures entièrement dépendantes de la qualité des liens avec l'entourage, mais qu'on ne ressent pas comme une dépendance parce que cet entourage s'est bien adapté à nos besoins. En attendant que maman arrive avec le biberon, l'enfant suce son pouce, il joue avec son nounours, il babille, puis se met à utiliser son appareil psychique, il peut attendre et il apprend qu'il a des ressources. Si régulièrement la maman prévient toute demande de l'enfant ou le fait attendre désespérément des heures, il va sentir qu'il est impuissant et qu'il est dépendant. Ce qui crée une relation d'insécurité qui, au moment des expériences de séparation, donne lieu à trois prototypes : l'enfant anxieux, le sécure et le dépendant.

Confiance en les autres, confiance en soi

Quand l'enfant est dans une relation de sécurité suffisante, lorsque sa maman le quitte pour le mettre à la crèche, pour aller se coucher, il va utiliser ses ressources, à condition bien sûr qu'il retrouve sa maman. Et le traumatisme, c'est quand elle ne revient pas pour une raison ou une autre, quand la confiance a été trahie par un adulte et qu'il brise dans ce que nous avons de plus essentiel, c'est-à-dire notre capacité de confiance. Dans les cas où tout se passe bien, l'enfant apprend, peu à peu, à se passer de maman et à la retrouver avec plaisir. Et là, il ne se sent pas menacé par le besoin qu'il a de sa mère. En revanche, s'il est en insécurité, il va devenir dépendant de la mère et de l'environnement. Il faut que la lumière soit allumée, que sa maman lui tienne la main, car sinon c'est la panique, la désorganisation, l'enfant est submergé par ses émotions. Mais plus il se sent menacé par la perte de sa mère, plus il se sent dépendant, plus il va essayer de la contrôler comme il se perçoit contrôlé par elle ; comment peut -il le faire ? Pas par le plaisir partagé parce que, s'il lui dit qu'il est content, sa mère va le

Page 110: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

110

quitter aussitôt. Le contrôle n'est possible que par l'insatisfaction, la plainte ou le caprice.

Se protéger d'une angoisse d'abandon

Le cramponnement à la mère n'est donc pas une question de plaisir mais de peur. Et c'est cela qui est pathogène car cet enfant devient dépendant de sa mère. À 2 ans, il va se séparer, on fera ce qu'il faut, mais à 14-15 ans, ce sera beaucoup plus difficile. Et ces enfants sont prisonniers du regard de leurs parents, ils cherchent à être protégés d'une angoisse d'abandon parce qu'ils n'ont pas suffisamment confiance en eux, parce qu'ils n'ont pas de sécurité interne. Ces enfants vont donc être pris entre l'angoisse d'abandon - " tu ne me regardes pas, je n'existe pas " ; et l'angoisse de fusion/intrusion " tu me regardes, qu'est-ce que tu me veux ? " On est toujours trop près ou trop loin. Vous ne vous occupez pas de moi, vous m'abandonnez ; vous vous occupez de moi, c'est une intrusion. Et là, c'est le drame parce qu'ils ne peuvent pas se nourrir et qu'ils sont de plus en plus dépendants. Les adolescents emploient des mots comme " tu me soûles ", " tu me gaves ", " tu me prends la tête ", qui prouvent bien qu'ils ne sont plus eux-mêmes, que l'autre est devenu comme un psychotrope. S'ils sont devenus ainsi, c'est en raison de l'importance de leur attente. Même si l'autre est plus ou moins intrusif, même si l'autre a plus ou moins besoin de maîtriser, c'est avant tout le besoin que l'on a de cette personne qui lui confère un pouvoir sur nous. Et on a besoin de cette personne parce qu'on n'a pas acquis des nourritures permettant d'avoir les ressources nécessaires. La prévention, c'est faire en sorte que les enfants se nourrissent de ce dont ils ont besoin : la sociabilité, l'école, veiller sur leur santé, ne pas adopter de conduite à risque.

Mon troisième modèle après l'enfant sécure, l'enfant qui se cramponne à sa mère, c'est celui de l'enfant abandonné, qui n'a pas de référence parentale. Que fait-il ? Il s'auto stimule et recherche des sensations toujours destructrices. C'est l'enfant carencé qui se balance toute la journée dans son lit à 2 ans. Il manque de tout ce qui est de l'ordre du plaisir partagé, de l'échange avec les autres, autant de facteurs d'ouverture et de liberté, plaisirs nourrissants, apaisants. Plus ils sont en carence de relation, plus le comportement devient stéréotypé et plus ils sont prisonniers de ce comportement. Comme l'enfant qui se balance de manière stéréotypée dans son lit. Et, si cela ne suffit pas, il se tapera la tête contre les bords de son berceau, se donnera des coups contre lui-même.

Page 111: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

111

La demande affective : menace pour l'identité

L'époque est à la liberté et l'ouverture. De 15 à 20 % des jeunes vont utiliser la liberté qui existe dans nos pays pour se taper dessus, se cogner contre les murs de la société, aller à la rencontre des policiers. Ce qui les intéresse, c'est qu'il y ait une rencontre. Étant dans une demande incontrôlable, cette rencontre ne peut se faire dans l'échange, dans le plaisir, dans la tendresse car ils perdraient leurs limites et ils paniqueraient, mais elle se fait dans la violence. Cette violence est le signe d'une demande affective si importante qu'elle ne peut être vécue.

Je prends l'exemple d'une adolescente de 13-14 ans qui, après une tentative de suicide, est hospitalisée en pédiatrie. Déscolarisation, demi-prostitution, prise de drogues, père alcoolique, parents séparés, mère en grande difficulté, bref un tableau malheureusement assez banal dans ces circonstances. Et cette adolescente accepte d'être filmée en vidéo. Elle n'arrête pas de dire pendant trois-quarts d'heure : " Ça me soûle ", " mes parents j'en ai rien à faire ". Mais nous arrivons tout de même à échanger, et, à l'issue de l'entretien, je lui demande quelles sont les qualités qu'elle se voit. Et cette jeune fille qui m'a regardé pendant trois quarts d'heure droit dans les yeux pour me raconter toutes les horreurs de sa vie, apparemment sans émotion - mais que je sens bien sûr comme une petite fille en détresse et perdue -, quand je lui pose cette question, elle détourne la tête, ses cheveux tombent devant ses yeux, mais cet écran ne suffit pas, et elle met la main devant les yeux. Elle reste vingt secondes sans parler, elle relève la tête et elle me dit : " Je suis une conne ", ce à quoi je réponds : " Là, nous pouvons nous regarder droit dans les yeux, pas d'émotion, vous êtes une conne, vous maîtrisez, c'est à vous. Mais, à l'idée d'avoir une qualité, vous détournez la tête. En tout cas, je vois que vous avez au moins une qualité, c'est le courage, mais allez-vous continuer d'utiliser ce courage pour vous cogner contre les murs de la société ou pour prendre soin de vous ? "

Mais si elle a une qualité, tout s'effondre, elle est dans la détresse. Si elle peut être différente de ce qu'elle est maintenant, c'est-à-dire : " J'en ai rien à faire, tout le monde est mauvais, je suis comme ça et je rejette tout le monde ", tout son système s'effondre. Pour les adolescents dans cette situation avoir une qualité, éprouver une émotion positive, c'est comme une goutte d'eau sur un morceau de sucre, cela les fait fondre, menace leurs limites et jusqu'à leur identité. Prendre des risques devient une quête de sensations pour avoir un contact dont nous avons tous besoin, mais ce contact ne peut se faire dans l'échange, ne peut être nourrissant parce qu'il nous rendrait dépendant. Et ce contact violent devient à la fois une façon de se sentir exister et une sorte d'anesthésie contre la souffrance psychique et le risque d'effondrement. Si je ne vais pas bien,

Page 112: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

112

ça va ; si je commence à aller bien, tout peut s'effondrer parce que je vais voir l'écart immense entre ce que je suis et ce que je voudrais être.

Des parents qui ont peur de leurs enfants

On ne laisse pas un enfant ne pas se nourrir. Quelque chose se pervertit profondément dans notre société depuis cinq à six ans. Mes consultations ont radicalement changé, non pas au niveau des troubles avérés, comme la schizophrénie, les troubles de l'humeur, mais parce que je vois des parents qui ont peur de leurs enfants. Et c'est la catastrophe. Ils ont peur parfois de leur violence. Dernièrement, un parent m'a même dit : " J'ai peur qu'il me tue. ". Ce gamin de 13 ans qui a des accès de colère incontrôlables m'a dit : " C'est un autre que moi qui fait ça, je ne peux pas faire autrement, et surtout avec ma mère. " Pourquoi ? Parce que c'est le personnage le plus important, auquel il est le plus attaché. " Et j'insulte ma mère. " Je lui demande quelles insultes. Il se met quasiment à pleurer et répond : " Je ne peux pas le dire. " Quand il est dans cet état second de violence, il le dit, mais ensuite cela le rend malheureux. Et son estime de soi est gravement compromise, et il devient encore plus violent la fois suivante. Il m'a également dit cette phrase superbe : " Avec mon père, je me retiens davantage parce que j'ai peur. " Nous voyons bien que la peur peut également être une protection.

Émotion, créativité et destructivité

Quand il n'a pas peur, il est capable de faire des choses qu'il va amèrement regretter parce qu'il est abandonné à ses émotions. Et on ne choisit pas ses émotions. Quand on est en colère, ému, amoureux, on ne décide pas de l'intensité, mais on peut décider secondairement de ce que l'on en fait. L'émotion est ce qu'il y a de plus biologique en nous. Elle est déclenchée certes par des pensées, par des liens, par toute notre histoire, par le poids de nos antécédents mais, une fois que l'émotion est là, c'est l'intrusion de l'autre, le cheval de Troie de l'autre en soi. L'émotion envahit et on ne peut pas forcément la contrôler. Ces jeunes fragiles savent pertinemment qu'ils sont les marionnettes de leurs émotions. C'est la raison pour laquelle ils en ont si peur et qu'i ls ne peuvent réagir que sur un mode violent où ils retrouvent une maîtrise. L'homme possède une créativité exceptionnelle mais, l'envers de la créativité, c'est la destructivité. La destructivité est la créativité du pauvre. Créer demande des capacités, l'avis des autres, le résultat est aléatoire alors que détruire est toujours sûr et on est toujours le plus fort. Et là intervient la tentation des conduites à risque parce que l'on redevient d'une certaine façon maître de soi par la destruction. On n'est pas dans le plaisir partagé où l'on dépend des autres.

Page 113: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

113

Intervenir pour éviter le sentiment d'abandon

D'où l'importance encore une fois d'intervenir suffisamment tôt. Le fait qu'actuellement les adultes aient peur des enfants est un grave problème parce que cela empêche la confiance, et c'est ressenti par les enfants comme un abandon. Donc les parents ont peur parfois de la violence de l'enfant mais ils ont peur aussi qu'il se fasse du mal. Combien de parents me disent : " Je ne peux pas le réprimander ou lui demander quoi que ce soit, je ne peux même pas l'amener en consultation parce que j'ai peur de perdre sa confiance, parce que j'ai peur d'une fugue, d'une tentative de suicide. " Et personne ne peut dans l'état actuel des choses garantir, en effet, que si cet enfant est contrarié il ne va pas faire une tentative de suicide. Non pas parce qu'il a envie de mourir mais parce que c'est à un moment donné le seul moyen de redevenir ou d'avoir le sentiment de redevenir maître de son destin et de lui-même. Avec le réel danger d'être pris au mot et de mourir. Même si cet enfant n'est pas schizophrène, ne présente aucun trouble de l'humeur, ne présente aucune pathologie, il est dans des conduites pathogènes, et on ne peut plus laisser ses parents se débrouiller seuls en leur disant que c'est un problème éducatif. Ce n'est pas seulement le problème de l'éducation des parents mais le fait qu'au niveau social il n'y a plus de limites.

Poser des limites

Une réflexion est à mener au niveau de la prévention sur ces limites. Mais combien de catastrophes y aura-t-il avant que nous y réfléchissions ? Aujourd'hui, on a peur d'interdire alors que c'est ce qui permet au sujet de se différencier et éventuellement de faire ses preuves. Mais on peut aussi interdire pour mettre l'autre sous son emprise et non pas pour lui permettre de veiller sur lui et de penser à son avenir. Tout peut être perverti mais on a actuellement le sentiment d'une permissivité qui fait qu'un certain nombre d'enfants ne savent plus où est la limite. Beaucoup d'adultes ont le sentiment de ne plus pouvoir poser un certain nombre de limites parce qu'ils ne savent plus la valeur de ce qu'ils font. Au nom de quoi le feraient-ils ? Il y a donc chez un certain nombre d'adultes une espèce de morosité dépressive, ce qu'Alain Ehrenberg a appelé " la fatigue d'être soi ". Si on a fait des enfants, il faut qu'on sache un peu pourquoi, et c'est le rôle des adultes de pouvoir se projeter dans l'avenir et de dire que des choses valent la peine. La véritable prévention ne consiste pas à énoncer une liste de choses dangereuses ou défendues mais dire qu'il y a des choses à faire, quelles que soient nos déceptions.

Page 114: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

114

Redonner du sens

Il y a nécessité à l'heure actuelle de redonner un sens à ces choses-là et, ne pas le faire, c'est abandonner l'enfant à ses impulsions et à son désarroi du moment. Pour un certain nombre de parents, il y a derrière tout cela une certaine culpabilité, par rapport au fait de travailler beaucoup, d'être fatigué en rentrant le soir, même si on est très heureux de retrouver ses enfants. Alors, les parents finissent par céder et parentifier leur enfant en leur disant : " Dis-nous que nous avons raison, que nous sommes de bons parents, rassure-nous sur nous. " Ce sont eux qui doivent nous rassurer ! Il faut voir dans quelle ambiance on fait vivre un certain nombre de jeunes. Ce désarroi peut faire sentir l'angoisse de parents qui ont peur de perdre le contact avec leur enfant. Certains comportements n'étaient pas concevables autrefois ou du moins ils représentaient une transgression majeure. On ne se suicidait pas, on ne se faisait pas de mal soi-même, on n'insultait pas ses parents. Alors que c'est aujourd'hui licite, non pas par démission des parents, mais parce que c'est le mode de fonctionnement de la société. Nous assistons à un risque de perversion de la prévention au travers de cette notion de souffrance.

S'arc-bouter contre les autres

Il y a des choses que l'on ne fait pas. On doit se respecter comme on doit respecter les autres. Un certain nombre de jeunes ne peuvent pas se contrôler, ne peuvent pas veiller sur eux. S'ils sont turbulents, un peu insolents, mais qu'ils se nourrissent, alors on est sûr que c'est passager. Mais s'ils ne se nourrissent pas, ils se dévalorisent, et s'ils se dévalorisent, ils ne peuvent que s'arc-bouter contre les autres, un peu comme une maison qui n'aurait plus d'intérieur. Ces adolescents et ces enfants qui vont mal s'étayent sur l'opposition, avec le sentiment qu'il n'y a rien de solide à l'intérieur

Il n'y a pas que les textes ou les livrets sur les risques, aussi bien faits soient-ils, qui sont importants. Il y a aussi l'esprit dans lequel les adultes font la prévention. Il faut que les adultes arrivent à dire pourquoi ils considèrent que la vie vaut la peine d'être vécue. Quand on applique les mesures de prévention, quand on fait des cours d'éducation civique à l'école ou ailleurs, c'est un homme ou une femme qui parle en adulte face à des jeunes. Et il y a une nécessité de conviction. Heureusement, la majorité trouve cela dans son environnement, dans son entourage, et n'a peut-être pas la même fragilité.

Page 115: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

115

Sentir qu'on est motivé pour eux

Je prends souvent comme exemple de l'adolescence un état a priori non pathologique, qui est l'état amoureux, où l'on est en attente de l'autre et où l'on dépose une partie de soi dans l'autre. Ce qui permet de créer des choses extrêmement fortes. Il y a une force créatrice qui nous porte, y compris dans son aspect d'illusion. Quand on est amoureux et que l'on attend la soirée, l'anniversaire de la rencontre, et qu'il ou elle est en retard, plus le retard s'allonge et plus le déplaisir arrive. Et au bout d'un moment, on n'a plus envie de sortir, la soirée est gâchée, pas parce que ce n'était pas important, mais parce que la déception est telle qu'elle fait disparaître le sentiment de désir, comme tous ces jeunes qui disent qu'ils n'en ont rien à faire, que rien ne les intéresse. Ils voudraient tellement être intéressants pour tout le monde qu'il est plus facile de penser que rien ne les intéresse que de risquer d'être déçu. Si l'autre arrive en s'excusant de son retard, on lui demande de nous ramener parce qu'on n'a plus aucune envie de sortir. Et c'est vrai que cela a tué jusqu'au désir. Si on accède à son besoin et qu'on lui dit : " Puisque tu souhaites rentrer chez toi, respectueux de ton désir, je te ramène ", je pense que c'est la pire des réponses parce qu'elle emprisonne le sujet dans le refus ; par contre si, en miroir, on adopte la position passive de celui qui a subi notre retard, qu'on le supplie de revenir sur sa décision, il est fort possible qu'il vous dise au bout à peu près du même temps qu'il a attendu : " Tu me fatigues et rien que pour ne plus t'entendre j'accepte de sortir avec toi " et avec un peu de chance, au bout là aussi d'un peu de temps vous passerez une excellente soirée. Qu'est-ce qui va motiver des jeunes à prendre soin d'eux ? C'est de sentir qu'on est motivé pour eux. Si vous ne posez pas un certain nombre de limites, vous ne rencontrez pas les adolescents les plus en demande parce qu'eux ne pourront pas venir à votre contact. Il n'y a qu'un obstacle qui pourra les amener à venir.

Pour moi, la prévention devrait commencer dans les cours de récréation, en maternelle et en primaire, où l'on apprend aux enfants à se respecter les uns les autres, à ne pas se traiter comme ils se traitent actuellement, à veiller sur eux, à prendre soin d'eux. Il nous faut repenser les choses dès le départ. C'est là que se mettent en place ces conduites de déception qui vont amener les plus sensibles à devenir de véritables furies. Albert Camus, dans son extraordinaire ouvrage Le Premier Homme, parle à la fin de son récit de la lettre de M. Germain, son instituteur, en réponse à la lettre que lui a envoyée Camus quand il a reçu le prix Nobel. On ne peut pas écrire mieux sur ce qu'est le sens de la transmission que cet instituteur à la retraite dans cette lettre à Camus.

Page 116: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

116

Page 117: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

117

Enfants : mieux vivre avec une maladie ou un handicap

Isabelle Aujoulat Chercheur, Unité d'éducation pour la santé et d'éducation du

patient - Reso, Université catholique de Louvain, Bruxelles.

LA SANTÉ DE L'HOMME 384 - JUILLET/AOUT 2006 - Pages 36 à 37

L'acquisition de compétences psychosociales, en particulier l'estime de soi, par l'enfant malade ou handicapé, relève d'une responsabilité partagée. Tout en nommant les difficultés de l'enfant, il est important de porter sur lui un regard qui lui signifie ses possibilités. Les compétences psychosociales peuvent faire l'objet d'interventions éducatives, dans les différents milieux de vie de l'enfant, qui sont d'autant plus efficaces qu'il n'y a pas de rupture de communication ou de conflit d'objectifs entre les différents intervenants. Toute intervention devrait être précédée d'un recueil d'information sur ce que vit l'enfant, ce qu'il sait et ce qu'il désire.

Mieux vivre avec une maladie ou un handicap quand on est un enfant, c'est d'abord avoir la possibilité de vivre et grandir avec le désir de grandir ! Un enfant qui grandit est une personne dont l'identité est en construction. Or, l'image de soi qui compose le sentiment d'identité et qui se dessine dans la relation à autrui peut être fortement altérée chez un enfant malade ou handicapé, au point que " grandir " puisse ne plus être perçu comme désirable ou possible.

Accueillir un enfant malade ou handicapé, que l'on soit parent, éducateur ou soignant, c'est accueillir un enfant qui a certes des besoins spécifiques liés à sa maladie ou à son handicap mais c'est aussi accueillir un enfant qui, comme tous les autres enfants, a des besoins qui sont liés à son âge et à ses stades de développement : besoin d'être accueilli, aimé, rassuré ; puis, au fur et à mesure que l'enfant grandit : besoin de jouer, d'explorer et d'apprendre.. Aider un enfant à "mieux vivre avec une maladie ou un handicap", c'est d'abord porter sur lui un regard qui lui signifie ses possibilités de développement, au contraire d'un regard qui l'enfermerait dans ses limites. Et ce, dès le moment du diagnostic, qui peut être aussi précoce que la naissance, car "l'enfant va développer des savoir-faire qui lui sont propres et que l'on ignore a priori" (1).

Page 118: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

118

Une responsabilité partagée

Le développement harmonieux d'un enfant malade ou handicapé passe aussi par le développement d'un certain nombre de compétences psychosociales qui contribuent à forger ou consolider son estime de soi et qui lui permettent d'exister dans sa différence, notamment face à ses pairs, qui jouent un rôle primordial pour son développement, la construction de son identité et l'acceptation ou non de sa maladie : identification, complicité, transgression, soutien émotionnel, etc., sont autant de facteurs relationnels qui consolident l'image de soi et le sentiment d'exister chez l'enfant atteint de maladie chronique ou de handicap (2, 3).

Le développement des compétences psychosociales est une approche éducative qui ne discrimine pas l'enfant au sein de son groupe de pairs. En effet, les compétences psychosociales qui peuvent s'énoncer, entre autres comme " se connaître soi-même ", " avoir confiance en soi ", " savoir gérer les conflits et les émotions ", comme le propose M. Jacquier-Roux (4), constituent des objectifs éducatifs qui sont pertinents pour tous les enfants, quels que soient leur état de santé ou leur capacité d'apprentissage, et qui peuvent par conséquent faire l'objet de programmes éducatifs à l'école ou dans d'autres lieux d'accueil des enfants, y compris l'hôpital.

Le développement des compétences psychosociales, qui sont en réalité des compétences de vie, relève d'une responsabilité partagée, entre notamment les parents de l'enfant (sa famille), des éducateurs (crèches, écoles, centres de loisirs, centres d'accueil spécialisés) et des soignants. Pour cela, il est important qu'une bonne communication puisse s'instaurer entre ces acteurs, que les difficultés mais aussi les possibilités de l'enfant soient reconnues et nommées, et que les responsabilités des uns et des autres dans la prise en charge de l'enfant, y compris la responsabilité de l'enfant vis-à-vis de lui-même, soient explicitées tout en demeurant susceptibles d'être négociées et modifiées au fur et à mesure que la situation évolue.

Épauler les parents, écouter les enfants

Les parents sont les premiers tuteurs du développement de leur enfant et, par conséquent, de son adaptation psychosociale à la maladie ou au handicap. Les parents servent aussi d'intermédiaire entre l'enfant et ses autres milieux de vie. Enfin, c'est aux parents qu'incombe le plus souvent la tâche de prendre soin, au sens médical du terme, de leur

Page 119: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

119

enfant malade ou handicapé. Or, apprendre à soigner son enfant ne va pas de soi… la douleur de l'enfant entre en résonance avec la souffrance des parents, et les sentiments de culpabilité qui peuvent émerger de part et d'autre sont peu propices au " mieux vivre ". C'est donc les parents (et par extension les familles) qu'il convient d'aider en tout premier lieu dans le cadre de leur propre processus d'adaptation à la maladie ou au handicap de leur enfant. Les parents, en effet, ont besoin de se sentir suffisamment bien formés et compétents pour prendre soin, au sens médical du terme, de leur enfant, mais ils ont besoin, aussi, d'être " reconnus dans leur capacité à être parents et de pouvoir se représenter un avenir possible " (5).

C'est pourquoi l'éducation thérapeutique des enfants atteints de maladie s'adresse aux enfants comme aux parents (6). Dans le cadre des soins, il est important de ne pas s'occuper uniquement de la maladie et du traitement, mais de prendre en compte aussi toute l'expérience de vie avec la maladie. En ce qui concerne l'enfant, toute transmission d'information devrait être précédée d'un recueil d'informations sur ce que vit l'enfant et sur ce qu'il sait et désire. Pour cela, des méthodes adaptées au stade de développement de l'enfant, telles que des méthodes ludiques, devraient être proposées (2, 7). En effet, l'enfant a un droit fondamental qui est celui d'être entendu et éduqué par des méthodes qui soient adaptées aux capacités cognitives propres à son âge. À défaut de jeux, les questions posées doivent être ouvertes et reprendre les mots utilisés par l'enfant pour parler de sa maladie.

En effet, c'est à partir de l'expression de l'enfant qu'un véritable processus d'apprentissage peut se mettre en place. Malheureusement, il y a parfois des routines qui s'instaurent dans les services de soins et qui ignorent que l'enfant est un être en développement dont les connaissances et les perceptions évoluent : ce qu'il savait ou croyait savoir de sa maladie lors d'une précédente consultation n'est plus forcément ce qu'il sait ou croit savoir de sa maladie aujourd'hui, dans la mesure où il a grandi, où il a fait d'autres expériences, où il a appris à assumer d'autres responsabilités. Présupposer en fonction de critères " objectifs ", tels que l'âge de l'enfant ou la durée de sa maladie, ce qu'il est censé savoir, croire, pouvoir et désirer peut conduire à des impasses éducatives car il n'est pas suffisamment tenu compte de l'enfant en tant que personne à part entière, avec ses propres peurs et ses propres désirs.

Page 120: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

120

Soutenir l'apprentissage par la cohérence des interventions éducatives

Lorsque l'enfant est malade ou handicapé, le développement et la consolidation de ses compétences psychosociales sont conditionnés aussi par la possibilité d'acquérir et de mobiliser effectivement un certain nombre de compétences spécifiques de soins, telles qu'elles peuvent être enseignées lors des programmes éducatifs mis en place à l'hôpital ou par des associations (7). Ici, il est important de souligner l'importance de la continuité, voire le danger de la discontinuité, dans certains aspects de la communication entre les différents milieux de vie de l'enfant. En effet, un enfant peut être mis en grande difficulté s'il a appris à manier correctement certains éléments de son traitement à l'hôpital et dans sa famille mais qu'à l'école, par exemple, il lui est interdit de le faire.

Comment l'enfant intègre-t-il la contradiction de tels messages qui, d'un côté, lui signifient qu'il est assez grand pour prendre en charge tout seul l'un ou l'autre aspect de son traitement et qui, d'un autre côté, lui signifient qu'il est encore petit et irresponsable ? Il est nécessaire que les compétences spécifiques qui sont enseignées dans le cadre de l'éducation thérapeutique puissent effectivement être mobilisées par l'enfant dans ses différents contextes de vie, pour qu'elles puissent déboucher à terme sur une responsabilité et une autonomie réelles de l'enfant.

En France, des Projets d'accueil individualisé (PAI) sont possibles pour permettre à l'enfant de gérer un traitement à l'école mais tous les enfants qui pourraient en bénéficier n'en bénéficient pas encore. Trop souvent, les différents " mondes " de l'enfant demeurent cloisonnés, ce qui peut être une source d'isolement et de stigmatisation pour l'enfant.

Toutefois, s'il est important de permettre à l'enfant d'acquérir et de consolider un certain nombre de compétences, il est important aussi de garder présent à l'esprit que, ce qui compte, c'est la qualité de vie présente de l'enfant. En effet, quand on est face à un enfant malade ou handicapé - et face à un enfant tout court -, on est généralement préoccupé par l'adulte en devenir qu'il représente. Dès lors, on peut être tenté de projeter sur lui des comportements ou des compétences à acquérir en pensant qu'il en aura besoin dans sa vie future pour faire face à tel ou tel événement. Or, l'enjeu du développement de compétences et de l'adaptation psychosociale de l'enfant à sa maladie ou à son handicap, c'est avant tout que l'enfant se sente bien avec lui-même et dans ses relations avec sa famille et ses pairs… dans sa vie d'aujourd'hui !

Page 121: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

121

Références bibliographiques

(1) Allaire C. Accueillir un enfant et lui donner sa place. Communication aux 2es Journées de la prévention. INPES, 29-30 mars 2006.

(2) Aujoulat I., Simonelli F., Deccache A. Health promotion needs of children and adolescents in hospitals: A review. Patient Education and Counseling 2006; 61(1): 23-32.

(3) Aujoulat I., Barrea T., Doumont D. Quels sont les principaux facteurs d'adaptation psychosociale à la maladie et au traitement chez les enfants et les adolescents atteints de maladie(s) chronique(s) ?

Dossier technique réalisé en collaboration avec l'association " 3D Diabète Défi Dialogue " et avec le soutien de la Communauté française de Belgique. Unité d'éducation pour la santé UCL/MD/Reso, mai 2003, réf. 03-22. http:// www.md.ucl.ac.be/entites/ esp/reso/ dossiers/dos22.pdf

(4) Jacquier-Roux M. Comment renforcer les compétences psychosociales et mieux accompagner l'enfant en milieu scolaire ? Communication aux 2es Journées de la prévention. INPES, 29-30 mars 2006.

(5) Alain B. Former les professionnels et accompagner les parents pour optimiser l'accueil d'un enfant handicapé. Communication aux 2es Journées de la prévention. INPES, 29-30 mars 2006.

(6) Refabert L. Le point de vue du soignant et l'éducation thérapeutique. Communication aux 2es Journées de la prévention. INPES, 29-30 mars 2006.

(7) Pélicand J., Gagnayre R., Sandrin Berthon B., Aujoulat I. A therapeutic education programme for diabetic children: recreational, creative methods, and use of puppets. Patient Education and Counseling 2006; 60(2): 152-63

Page 122: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

122

Page 123: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

123

Accueillir un enfant handicapé et lui donner sa place

Cécile Allaire, Responsable du programme Personnes

handicapées à la Fondation de France INPES - Deuxièmes Journées de la prévention 29-30 mars 2006 : «Promouvoir la santé des enfants et des jeunes ». INPES, Actualités , http://www.inpes.sante.fr/30000/actus2006/006.htm

Je suis en charge du programme Personnes handicapées à la Fondation de France. Je ne suis pas acteur de terrain, mais nous avons eu l'occasion de soutenir un certain nombre d'actions de terrain et je vais donc me baser sur ces expériences-là. Ma présentation va tourner autour de l'accompagnement des parents par les professionnels et par les autres parents.

Je rappelle que la Fondation de France est un organisme de mécénat privé, qui soutient des actions concrètes proposées par des associations, des services hospitaliers ou des collectivités locales, afin de répondre à des problèmes qui sont peu ou mal pris en compte par la collectivité. Nous intervenons sur des champs extrêmement variés tels que la recherche médicale, la santé, l'environnement, les solidarités, la culture également. Et sur le secteur du handicap que je représente, nous avons plusieurs axes de travail, mais nous intervenons depuis plusieurs années tout particulièrement sur l'accompagnement des familles mis en œuvre au moment de la découverte et puis de l'annonce d'une maladie ou d'un handicap. Nous savons en effet que les conditions d'annonce d'une déficience ont un impact majeur sur l'enfant concerné ainsi que sur sa famille, son entourage, sa famille élargie. Et la qualité du soutien et de l'accompagnement de l'enfant et de la famille tout au long de ce processus va en grande partie conditionner l'élaboration du nouveau projet de vie de l'enfant.

Dans ce contexte, nous soutenons des projets contribuant à améliorer ce travail d'accompagnement, pendant des périodes parfois très longues, de suspicion, de diagnostic, quand le diagnostic peut être posé, et puis de prise en charge. Ma présentation est le fruit des témoignages recueillis à l'occasion des rencontres organisées avec ces acteurs de terrain, qu'ils soient membres d'associations, institutionnels, que ce soit des professionnels ou des parents bénévoles. Et nous avons pu ensemble identifier plusieurs pistes de travail qui ont été proposées à divers endroits, en fonction des réalités locales, des contextes et des besoins identifiés, mais toutes nous semblent intéressantes. Certaines

Page 124: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

124

sont très innovantes, mais souvent ce sont des initiatives extrêmement pragmatiques, en tout cas toutes vont dans le sens d'un meilleur accueil de l'enfant.

J'aborderai six points, que j'illustrerai d'un ou deux exemple(s) de projets que nous avons eus l'occasion de soutenir.

1. Le premier point, c'est ce qui tourne autour de la préparation de l'annonce . Cette question renvoie à la nécessité de prendre en charge très tôt certaines pathologies et d'être en mesure de répondre aux parents qui vont ressentir les premières inquiétudes ou qui vont être dans l'attente d'une confirmation de diagnostic, afin de leur éviter toute errance, parce qu'ils ne savent tout simplement pas à qui s'adresser. Donc il s'agit ici d'aider le premier médecin concerné, le médecin généraliste ou le médecin référent, à savoir écouter les informations précieuses qui vont être apportées par les parents, et de favoriser une prise en charge rapide avant même que le diagnostic ne soit posé. Donc, il s'agit ici non pas de délivrer un diagnostic précoce, mais bien de pouvoir repérer précocement une difficulté afin de ne pas retarder l'orientation de l'enfant vers un service plus approprié. Il y a l’exemple de la campagne «Handicap agir tôt» mise en place par l'ANECAMS (?) dans plusieurs départements de France, qui vise à sensibiliser l'ensemble des médecins généralistes ou des pédiatres afin qu'ils soient alertés le plus tôt possible. Elle consiste tout simplement en une petite brochure présentant les principaux handicaps et leurs manifestations et donnant les coordonnées des espaces où le médecin généraliste va pouvoir orienter l'enfant.

Un autre exemple tourne autour du travail mis en place autour de l'hôpital Antoine Béclère en Ile-de-France, qui accueille de grands prématurés. La démarche qui a été proposée a abouti à la constitution d'un réseau ville-hôpital ayant pour vocation d'améliorer le suivi des enfants sortant de néonatologie et qui retournaient dans leur domicile parfois très éloigné du département et de l'hôpital. De sensibiliser et d’informer les médecins potentiellement susceptibles de rencontrer ces enfants qui pouvaient présenter des retards ou des difficultés de développement.

2. Après la préparation de l'annonce, le deuxième volet concerne toute l'aide à apporter aux professionnels, et notamment à travers la formation. Il s'agit ici de prendre en

Page 125: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

125

compte la difficulté des professionnels auxquels incombe la difficulté d'annoncer et d'accompagner. On aborde assez aisément la souffrance des parents, mais on oublie parfois d'aborder celle du professionnel. Pour y répondre, il existe différents niveaux de formation, mais celles qui nous semblent les plus valorisées dans ce contexte sont celles qui mettent en avant naturellement la relation humaine. C'est-à-dire qu'il ne s'agit pas tant de savoir que d'être en mesure de transmettre ce savoir. La qualité de l'écoute des professionnels ne renvoie pas uniquement à la seule expertise technique. Je laisse de côté les bonnes pratiques, qui sont souvent mises en avant. Mais je citerai tout de même quatre recommandations qui reviennent de façon extrêmement récurrentes dans les débats. D’une part, l'importance de regarder le bébé ou l'enfant concerné comme tout autre enfant. D’autre part, l'importance de prendre en compte la sidération, et parfois le déni des familles, parce que c'est un temps qui peut être nécessaire et qui va permettre dans un premier temps éventuellement d'adopter cet enfant différent.

La troisième recommandation, c'est d'être prudent dans le pronostic. Les parents attendent naturellement d'être informés des difficultés de leur enfant, mais ils attendent aussi que les points positifs soient signalés parce qu'ils ont besoin de se projeter dans l'avenir, d'autant que l'enfant va développer des savoir-faire qui lui sont propres et que l'on ignore a priori. Donc il importe de laisser de l'espoir – c'est un mot qui revient très souvent. En fait, nous nous sommes dit pourquoi ne pas proposer carrément, en même temps que l’annonce de la déficience, un nouveau projet de vie. Et puis aborder la question de la guidance parentale. Pour éviter toute rupture pouvant survenir entre le moment de l'annonce et la proposition d'accompagnement, les professionnels ne doivent pas hésiter à impliquer les parents dans l'éducation de leur enfant. Il s'agit ici tout simplement de restaurer leur place de parent. Après la question de l'aide à apporter aux professionnels et celle de la formation,

3. Le troisième point concerne les informations à transmettre, et avec quels outils. Pouvoir disposer d'outils pédagogiques est particulièrement aidant pour les professionnels quels qu'ils soient. Ces outils doivent permettre aux familles de disposer d'informations justes et accessibles, qui vont leur éviter de partir à la recherche compulsive d'informations sur Internet particulièrement envahissantes et parfois déstabilisantes. Ces

Page 126: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

126

outils, lorsqu'ils sont adaptés, permettent aussi aux jeunes enfants et adolescents de s'approprier leur maladie, parfois de se défaire d'une attitude passive à son égard. Et ces outils permettent d'établir de bonnes conditions de dialogue entre les parents et les professionnels, car le médecin ou le professionnel concerné va se sentir plus à l'aise au moment de délivrer l'information s'il peut s'appuyer sur un support adapté, les parents vont pouvoir intégrer progressivement toutes les implications que suppose la maladie de l'enfant, ils vont pouvoir y revenir. Donc un dialogue va s'i nstaurer qui va faciliter cela. Je citerai comme premier exemple un guide destiné aux parents qui apprennent la surdité de leur enfant. Ils sont submergés par un tas d'informations et ont du mal à s’y retrouver dans ce méandre. Ce guide les rassure déjà sur leur place de parents et leur donne des informations précises sur les méthodes éducatives, sur les choix à faire, sur ce qui va leur permettre d'entretenir un dialogue posé avec l'ensemble des professionnels qu'ils vont rencontrer. Le second exemple est un classeur qui a été conçu au sein d'un service hospitalier pour des enfants insuffisants rénaux. C'est un outil adapté aux petits enfants et aux adolescents destiné à leur expliquer la dialyse, la greffe de rein, donc un outil adapté aux différents âges et notamment aux adolescents qui ont plutôt tendance à refuser le traitement. Je pense également à la réalisation d'un site Internet conçu spécifiquement à l'attention des parents dont l'enfant souffre d'épilepsie, qui aborde la maladie aussi de façon posée, sans donner trop d'informations dramatisantes.

4. Le quatrième point concerne la constitution de relais d'écoute et la coordination des professionnels. Qu'il s'agisse des relations informelles ou de la constitution de réseaux clairement structurés, il semble important que les professionnels concernés de prime abord puissent passer la main à un moment et proposer un relais aux parents. Il s'agit en quelque sorte de mettre en place un filet de prise en charge après des familles, afin qu'il y ait une continuité dans l'attention qui leur est port ée et puis naturellement dans la prise en charge. Nous avons vu se mettre en place plusieurs types de projets, portés soit par des professionnels, soit des réseaux dits d'hôpital, soit des réseaux informels permettant aux professionnels d'échanger sur différents sujets. Mais je citerai deux projets expérimentaux qui ont été mis en place parallèlement dans deux départements, la Seine-Saint-Denis et la Meurthe-et -Moselle. Il s’agit de services d'écoute téléphonique qui s'adressent aux professionnels, mais aussi aux

Page 127: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

127

parents. Des professionnels répondent simplement au téléphone à toutes les questions que posent des personnes qui se sentiraient plus isolées ou qui n'oseraient pas faire la démarche d'aller frapper à la porte d'un professionnel.

5. Le cinquième point concerne la question de l'entraide parentale. Nous avons constaté un essor de l'entraide parentale qui se constitue autour de la prise en charge de l'annonce et de la vie avec l'enfant malade ou handicapé. Et ce mouvement va bien au-delà des spécificités de la pathologie et des clivages associatifs. Ces relations d'aide inter parentale sont très enrichissantes et semblent même parfois déterminantes dans l'acceptation de l'enfant et la place qu'il va occuper au sein de la famille. Et de façon générale les parents éprouvent le besoin de dire leur ressenti, de rencontrer d'autres parents ayant vécu une expérience similaire, de constituer des lieux pour reprendre la parole, pour briser le silence, pour rompre l'isolement. Ce sont des choses que nous voyons naître assez régulièrement.

Pour un professionnel, il n'est pas toujours aisé d'avoir recours à une association, ce n'est pas toujours possible, ce peut être délicat, trop envahissant, mais parfois il semble utile de transmettre les coordonnées d'un couple qui a vécu des choses similaires et qui peut ponctuellement apporter une aide aux nouveaux parents concernés, aux parents qui rencontrent une nouvelle difficulté dans l'évolution de leur enfant. Bien entendu, ce type d'action doit reposer sur la formation, et c'est probablement à cette condition qu'un échange constructif pourra se mettre en place avec les professionnels. Je citerai l’exemple des groupes de rencontre organisés par l’association SOS Globi. C'est une association de parents d'enfants atteints de drépanocytose. Ces groupes permettent d'aborder les questions très spécifiques liées à cette maladie génétique qui fragilise très souvent la cellule familiale.

Page 128: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

128

6. En sixième point, j'aborderai la question des partenariats mis en place entre les parents et les professionnels. C’est le travail que nous avons eu le plus de plaisir à voir se mettre en place et à soutenir. C'est vraiment celui qui se structure de façon parfois très formalisée entre les familles et les professionnels. Et le travail conjoint qui se met en place ici et là peut prendre la forme de groupes de parole, de formations, de réseaux d'échange, parfois de consultations à deux. Ces dispositifs permettent la reconnaissance mutuelle des difficultés de chacun, peuvent permettre d'organiser la réfl exion en commun et de favoriser des pratiques partagées qui sont pertinentes au regard des parents comme au regard des professionnels. Sachant que ce sont des démarches qui vont associer à la fois la connaissance technique et pratique du professionnel et le vécu des parents, qui vont faciliter la compréhension et qui vont aider les nouveaux parents concernés à se projeter dans l'avenir. (…)

Je terminerai en rappelant que l'annonce est finalement l'affaire de toute une vie. Les familles et l'enfant, aidés des professionnels, devront trouver des réponses à chaque étape de la vie, que ce soient des étapes imposées par la maladie de l'enfant ou que ce soient des étapes que rencontre tout enfant, l'entrée en maternelle, l'entrée au CP ou au collège. Et en s'appuyant sur les différentes compétences que nous avons vues, la qualité de l'accompagnement à chacune de ces étapes permettra aux parents de cheminer, d'accepter leur enfant avec ses difficultés, mais aussi avec ses potentiels. Et puis de lui donner sa place en favorisant ses possibilités d'évolution, son intégration, et sa participation à la vie sociale.

Page 129: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

129

La politique de santé à l’éducation nationale

Docteur Marie Claude Romano Médecin conseiller technique honoraire de l'éducation

nationale, administrateur de l'AFPSSU Article paru dans la revue de la Fédération des D.D.E.N. - N°209 - décembre 2006".

Un peu d’histoire

Les principes généraux du service de santé scolaire sont posés par l'ordonnance du 11 octobre 1945. Il relève du ministère de l'éducation nationale, mais le ministère de la santé a un droit de regard pour les directives d'ordre technique. Le service comprend alors médecins, assistantes sociales et des adjointes qui font du travail d'infirmière. Le service de santé scolaire est créé dans un objectif très précis de santé publique pour la prise en charge médicale des problèmes de santé de la population d'enfants scolarisés, dépistage de la tuberculose et vaccination BCG. En effet, à la fin de la guerre, la situation sanitaire est déplorable: la malnutrition et les maladies infectieuses sont fréquentes, la tuberculose est en pleine extension. On ressent le besoin de protéger une population particulièrement exposée : enfants sous alimentés et carencés.

En 1964, l'évolution de l'état sanitaire, le développement de besoins nouveaux entraîne une nouvelle orientation définie par le décret du 30 juillet 1964. Le service de médecine scolaire est transféré au ministère de la Santé. Dans le cadre de la réorganisation des services extérieurs de l'état chargés de l'action sanitaire et sociale, le directeur départemental des actions sanitaires et sociales est responsable des orientations à mener en milieu scolaire; un médecin inspecteur de la santé en est le responsable technique.

En 1969, apparaît dans les textes la création du service unifié de l'enfance qui regroupe au sein de la Direction départementale de l'action sanitaire et sociale, la Protection maternelle et infantile, la santé scolaire, l'aide sociale à l'enfance, la psychiatrie infanto juvénile. Ce regroupement devrait permettre à tous les professionnels de l'enfance de coordonner leurs actions pour une meilleure efficacité. Pour la première fois, l'accent est mis sur la notion d'équipe pluridisciplinaire et sur la nécessité de coordination de tous les professionnels de l'enfance. Ce dispositif ne sera jamais mis en place.

Page 130: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

130

Le 12 juin 1969 est publiée l'instruction générale sur le fonctionnement du service de santé scolaire. Sur le papier, tout y est: l'existence d'une équipe de secteur (médecin, assistantes sociales, infirmières, secrétaires), la notion d'un secteur médico-social scolaire, un large éventail de missions faisant la part belle aux examens médicaux systématiques, mais comportant également des tâches de liaison avec les parents, les enseignants, la Protection maternelle et infantile, les médecins libéraux, la surveillance de l’hygiène du milieu, l'éducation à la santé, des permanences médicales, la participation aux différents conseils de classe, d'administration, d'orientation et de discipline.

En 1982 c’est la circulaire “ de Bagnolet ”qui indique que le développement de la prévention médicale et sociale au profit des élèves est une des grandes priorités du ministère de la santé ”.

Un décret du 21 décembre 1984 confie au ministère de l’éducation nationale la responsabilité des actions de santé scolaire mais de 1985 à 1991 les médecins sont gérés statutairement par les services déconcentrés du ministère chargé de la Santé, mais leurs missions sont définies par les inspecteurs d'académie. L'aggravation de la situation économique, du chômage et des problèmes sociaux bouleversent les mentalités et entraîne une remise en cause des pratiques.

L'année 1991 est pivot dans cette évolution. Tous les personnels de santé scolaire sont désormais gérés par l’éducation nationale. Le 24 juin est publié le texte fondamental actualisant et complétant les circulaires de 1969, 1982 et 1986, portant sur les missions et fonctionnement du service de promotion de la santé en faveur des élèves. Ce texte formalise l'élargissement du champ d'intervention du Service de promotion de la santé en faveur des élèves : il ne s'agit plus seulement de la surveillance de l'état de santé (prévention, dépistage précoce des déficiences et/ou pathologies) mais aussi de la promotion de la santé physique et mentale de tous les jeunes scolarisés en vue de contribuer à leur bon équilibre et à leur épanouissement, et d'assurer leur bonne insertion dans l'école.

« L'école est reconnue comme le lieu privilégié, mais non unique, d'éducation et de promotion de la santé en raison des interactions importantes entre la santé, la réussite scolaire et l'éducation, et aussi parce qu'elle permet d'atteindre la très grande majorité d'une classe d'âge »

En 2001 les orientations générales pour la politique de santé en faveur des élèves ainsi que les missions dévolues aux médecins et aux infirmières de l'Éducation nationale notamment dans le domaine de l'éducation à la santé sont redéfinies. Il est rappelé que la mission de promotion de la santé en faveur des élèves a pour objectif essentiel et

Page 131: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

131

spécifique de veiller à leur bien-être, de contribuer à leur réussite et de les accompagner dans la construction de leur personnalité individuelle et collective. La mission de l'École dans le domaine de la promotion de la santé s'intègre dans le processus éducatif concernant l'ensemble des élèves. La nouvelle circulaire vise à préciser d'une part des objectifs de santé : prendre soin de la santé plus que de la maladie, dépister précocement des déficiences ou des pathologies, aider les familles à accéder aux soins requis pour leurs enfants, aider à l'intégration des enfants et adolescents atteints de handicap ou de troubles de la santé, prendre en charge des élèves dans le cadre de l'enfant en danger ou victime de mauvais traitement et d'autre part des objectifs d'éducation : l'éducation à la santé doit s'inscrire dans un projet éducatif global, se dérouler tout au long de la scolarité des élèves depuis la maternelle jusqu'à la fin du collège. Les parents doivent être informés des actions entreprises et y être associés individuellement. Il est capital de faire de l'élève un acteur de sa prévention en l'aidant à faire des choix par rapport aux risques et pour cela il convient d'animer des échanges avec des groupes d'élèves afin de mieux cerner leurs préoccupations et de répondre à leurs attentes.

La promotion de la santé

8

L’objectif de la mission de promotion de la santé

Notre objectif est la promotion de la santé de l’enfant et de l’adolescent dans le contexte scolaire

- Veiller à son bien - être - Contribuer à sa réussite - L’accompagner tout au long de sa scolarité

une seule priorité :

L’élève

La mission de promotion de la santé en faveur des élèves a pour objectif essentiel et spécifique de veiller à leur bien- être, de contribuer à leur réussite et de les accompagner dans la construction de leur personnalité individuelle et collective. Les responsabilités de l'École en cette matière sont affirmées dans différents textes dont les plus récents sont :

- Les dispositions générales du Code de l'éducation Livre I, Titres I et II.

- Circulaire des missions 2001-012 du 12-1-2001

Page 132: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

132

- Loi sur la prévention de la maltraitance 2000-197 du 6-03- 2000 - Plan d’action pour les troubles du langage 2002-024 du 31-1-

2002 - Projet d’accueil individualisé 2003-135 08-09-2003 - Assistance pédagogique à domicile 98-151 17-07-1998 - Plan quinquennal de prévention 2003-210 du 01.12.2003 - Loi 2005-102 du 11-02-2005 pour l'égalité des droits et des

chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées

- Décret 2005-1014 du 24-08-2005 relatif aux dispositifs d'aide et de soutien pour la réussite des élèves à l'école

- Décret 2005-1752 du 30-12-2005 relatif au parcours de formation des élèves présentant un handicap

Le ministre de l'éducation nationale définit les principes et les orientations générales de la politique de promotion de la santé en faveur des élèves.

Il appartient à chaque recteur de définir les objectifs et les modalités de mise en œuvre de la politique de santé de son académie, en tenant compte des axes indiqués au niveau national et du contexte local.

Sous l'autorité de l'inspecteur d'académie, et en concertation avec les conseillers techniques auprès du recteur, le médecin et l'infirmier(ère) conseillers techniques ont pour mission, chacun dans le champ de ses compétences techniques propres, de conseiller l'inspecteur d'académie pour mettre en œuvre la politique de santé définie par le recteur en tenant compte du contexte départemental et local

L’objectif de la mission de promotion de la santé Le médecin de l’éducation nationale est un médecin « spécialiste » de la santé de l’enfant dans le cadre scolaire, depuis son entrée à l’école jusqu’à l’université.

Actuellement 7 objectifs nous paraissent prioritaires

- Prévenir, dépister, orienter et suivre les enfants présentant des troubles des apprentissages tout au long de la scolarité

- Agir pour la protection de l’enfant dès lors que celui-ci est en danger

- Contribuer à une meilleure intégration des enfants et des adolescents handicapés ou porteurs de pathologies chroniques

- Favoriser la prévention, le repérage, la prise en charge des jeunes présentant des conduites à risques et des signes de souffrance psychique.

- Favoriser un accompagnement vers les réseaux de soins - Contribuer à la mise en place des politiques d’éducation pour la

santé

Page 133: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

133

- Collaborer avec les autorités sanitaires et gérer des situations d’alerte (méningites, toxi-infections alimentaires collectives) et de crises (suicide, accident…)

Bilan de la 6ème année

La mission d’un médecin est de prévenir, dépister et traiter tout individu afin que son état se rapproche du bien être défini par l’OMS.

Il en est ainsi de la mission du médecin de l’éducation nationale mais le traitement ne lui appartient pas. Ce qui relève de sa mission prioritaire c’est d’être le médecin de l’élève et de veiller à sa qualité de vie à l’école en mettant tout en œuvre pour éviter la mise en échec liée à des difficultés ou des déficiences. A ce titre sa mission prioritaire est de contribuer au dépistage des troubles d’apprentissage.

Il est certes indispensable de ne pas médicaliser les troubles du langage mais il est essentiel de ne pas passer à côté et de faire le diagnostic le plus précocement possible

Face à l’immense souffrance des enfants et des parents perdus et désespérés par nos cloisonnements et nos dysfonctionnements, les troubles d’apprentissage doivent être l’affaire de tous et tout le monde doit y œuvrer dans le champ de ses compétences.

Le médecin de l’éducation nationale dépiste les troubles devant des difficultés d’apprentissage scolaire, prescrit une consultation spécialisée et les aides adéquates de par sa connaissance du système éducatif et assure le suivi.

L’examen médical des enfants de 6 ans est centré sur les compétences neurosensorielles nécessaires à l'apprentissage des langages. Ce bilan ne peut être conduit qu’avec la participation des parents des équipes des RASED et de l’enseignant. En particulier, le recueil de données réalisé par l’enseignant est essentiel à l’analyse et à l’évaluation. Il comporte cinq axes d’évaluation : - les conditions de vie. - le développement somatique. - le développement cognitif. - le développement psychomoteur. - le développement social.

Le plan d’action définit dans la circulaire 2002-024 du 31janvi er 2002 : - Reconnait l’existence des enfants à besoins particuliers, estimés

à plus d’un enfant par classe.

Page 134: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

134

- Affiche une nouvelle conception de l’intervention des professionnels concernés et de l’articulation de leurs compétences : enseignants, professionnels de santé et d’action sociale à l’Ecole, praticiens spécialisés.

- Définit une chaîne de soins pour ces enfants, depuis le repérage en classe de leurs difficultés, en passant par le dépistage des troubles selon des protocoles validés et par des professionnels formés à cet effet, pour aboutir à une prise en charge pédagogique et sanitaire adaptée et régulièrement réactualisée.

- Pour répondre à sa mission pour la réussite de tous, l’éducation nationale avait décidé de se doter de médecins spécialistes de la santé de l’élève et d’infirmières, recrutés et formés à cet effet pour aider l’Ecole à évaluer la situation des élèves et conseiller les équipes éducatives et les familles.

Prévention des troubles d’apprentissage

DEPISTAGEMédecins éducation nationale, PMI

DIAGNOSTICconsultation spécialisée

Médecin de l’enfant

En lie

n avec

orthophonistes

psychologuessoins

REPERAGEenseignants Élève

parents

La qualité du repérage, du dépistage et du diagnostic d’enfants porteurs d’un trouble spécifique du langage constitue une étape essentielle et déterminante pour définir les meilleures conditions d’une prise en charge individualisée.

Examens à la demande Le médecin agit en appui des équipes éducatives pour les aider

à gérer les situations individuelles, mais aussi pour réfléchir aux actions de prévention primaire.

Les difficultés des élèves, visibles le plus souvent au travers des résultats scolaires et se manifestant volontiers par des difficultés de comportement nécessitent un diagnostic rapide que doit assurer le médecin de l'éducation nationale chaque fois qu'un élève lui est signalé. Le médecin assure le suivi et l'accompagnement de l'élève, l'oriente si

Page 135: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

135

nécessaire vers les structures de soins appropriées, et effectue la liaison entre l'école, le service de soins et la famille.

Prévention des souffrances psychiques

Tous les personnels doivent être formés pour savoir être attentifs aux signes de mal être des enfants et des adolescents (les chiffres officiels font état de 146 décès par suicide et 1516 tentatives.

Le médecin de l’éducation nationale aide les équipes éducatives et les familles à mieux comprendre les enjeux des comportements « dérangeants », en veillant à trois écueils : - la médicalisation systématique du comportement et la psychiatrisation de toute manifestation bruyante - la médicalisation et la psychiatrisation à outrance de problématiques essentiellement éducatives - la banalisation de comportements pathogènes relevant de prises en charge médicales adaptées.

Prévention de l’obésité L’obésité est devenue une priorité de santé publique. Les textes donnent toutes les recommandations :

- Lors des bilans médicaux et des dépistages infirmiers utilisation des outils de repérage (disque Indice de masse corporelle et courbe de poids), - Diffusion dans les établissements scolaires du guide de la nutrition pour les adolescents, élaboré par l’INPES - Inciter les chefs d’établissement à mener une réflexion sur le contenu des distributeurs afin de prendre en compte la qualité nutritionnelle des produits proposés. - Définir une politique d’installation de fontaines d’eau réfrigérée en concertation avec les collectivités territoriales concernées. - Sensibiliser les collectivités locales sur l’importance de la restauration scolaire

Prévention de la maltraitance Dans le dispositif légal de la protection de l'enfance en danger, le

ministère de l'Education nationale est, selon des modalités et des champs de compétences bien définies, partenaire de plusieurs institutions : en particulier les ministères de la justice et de l’intérieur et les collectivités territoriales. L’institution scolaire travaille ainsi en relation avec les deux dispositifs de protection de l’enfance : l’autorité administrative représentée par le président du conseil général et l’autorité judiciaire représentée par le procureur.

Page 136: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

136

Les personnels sociaux et de santé de l’institution scolaire, accompagnent les enseignants dans la connaissance du dispositif de protection de l’enfance en danger, le repérage et la gestion des situations de risque ou de danger dans le but de mettre en œuvre toutes les mesures pour assurer la protection des élèves face aux violences et aux carences de certains adultes qui les entourent.

40 000 enfants en danger vus par les médecins chaque année

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

maternelle élémentaire collège SEGPA EREA lycée LP agricole0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

maltraités en risque

Dans le cadre de leurs missions les médecins de l’éducation

nationale sont amenés à faire une évaluation de la situation vécue par l'enfant.

Il relève de leur compétence de délivrer un certificat médical décrivant avec objectivité les lésions organiques ou les troubles psychologiques induits par la maltraitance ; s'ils constatent que la santé ou le développement de l'enfant est compromis ou menacé, et sans préjuger des compétences et de la saisine des autorités judiciaires , ils en rendent compte sans délai aux services départementaux compétents et/ou au procureur, selon les modalités définies en liaison avec l'autorité judiciaire et les services de l'État dans le département.

Le projet d’accueil individualisé de l’élève circulaire n° 2003-135 du 8-9-2003 C’est un Projet : donc se prépare avant C’est un document d’accueil de l’enfant : donc définir ses besoins Individualisé donc propre à chacun avec une réponse particulière

Page 137: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

137

22

Directeur

Chef d’établissement

Demande de la famille

Régime alimentaire Protocole

d'urgence Besoins spécifiquesProtocole de soins

Définit avec l’infirmier(ère), l’équipe pédagogique les parents et les partenaires

les mesures à prendre dans le PAI

Médecin traitant pédiatre ou médecin

spécialiste

Collectivités locales

Médecin de la l’éducation nationale

C’est une démarche d’accueil permettant d’établir un partenariat entre les parents, le médecin de l’EN, l’équipe pédagogique et le médecin traitant

Il définit les dispositions proposées permettant aux enfants : - de manger avec un panier repas préparé par les familles - de prendre des médicaments par voie orale, inhalée - de bénéficier d'aménagements spécifiques améliorant ses conditions de vie - de bénéficier de soins d'urgence

Il précise les numéros d'urgence, les coordonnées du service hospitalier le plus proche, donne l’ordonnance qui détaille les médicaments à donner et les soins à donner en cas d’urgence.

L’assistance pédagogique à domicile circulaire n° 98-151 du 17-7-1998

L’assistance pédagogique à domicile permet à l'élève qui ne peut, compte tenu de son état de santé être accueilli dans son établissement scolaire, de poursuivre les apprentissages scolaires

Ella a pour but d’éviter des ruptures de scolarité, de maintenir le lien avec l'établissement scolaire, avec ses camarades de classe et de faciliter le retour.

12 000 à 15 000 élèves sont en maladie de longue durée et éloignés de leur établissement scolaire chaque année : 6000 bénéficient de l’APAD grâce notamment au dispositif mis en place avec la fédération des PEP.

Page 138: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

138

25

Inspecteur d’académie

DirecteurChef d’établissement

Famille

L’accès au dispositif de l’APAD

Comité de pilotagedétermine modalités

d’actions

Coordonnateurvérifie mise en place et

fonctionnement du réseau

L’association supportMédecin de l’EN

Pivot du dispositifMédecin de l’ENPivot du dispositif

Médecin qui suit l’enfant établit

certificat médical

Le directeur, le chef d'établissement ou la famille saisit l'inspecteur d'académie.

Le médecin de l’éducation nationale est le pivot de ce dispositif : au vu du certificat médical du médecin traitant, il précise si l'état de santé de l'enfant requiert l'intervention du dispositif.

Le comité départemental de pilotage détermine les modalités d'action les plus appropriées

Le coordonnateur vérifie la mise en place et le fonctionnement du réseau

Scolarisation des élèves en situation de handicap ou porteurs d’affections chroniques : loi du 11 février 2005 « Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de la santé invalidant. »

Les enfants porteurs de handicaps, porteurs de maladie chronique, en situation de risque psychosocial ont droit à l’Ecole pour y réussir leur construction de futur adulte inséré socialement et professionnellement.

L’Ecole a l’obligation de les accompagner pour leur permettre d’accéder à la réussite scolaire.

Le médecin de l’éducation nationale qui connait l’institution est le spécialiste de l’identification et de la compréhension des besoins particuliers de l’enfant ou de l’adolescent au regard des exigences et contraintes de la scolarité , pour que l’équipe éducative puisse assurer l’accompagnement personnalisé nécessaire tout au long du parcours de l’élève

Page 139: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

139

Modifications des dispositions du code de l'éducation - Tout enfant, tout adolescent présentant un handicap ou un

trouble invalidant de la santé est inscrit dans l'école ou l'établissement scolaire le plus proche de son domicile qui devient son établissement de référence.

- Dans le cadre de son projet personnalisé, si ses besoins nécessitent qu'il reçoive sa formation au sein de dispositifs adaptés, il peut être inscrit, avec l’accord de ses parents ou de son représentant légal, dans une école ou un établissement scolaire, autre que cet établissement de référence, soit parce qu'il a besoin d'un dispositif adapté (CLIS, UPI), soit parce qu'il est accueilli dans un établissement de santé ou médico-éducatif.

- La continuité du parcours scolaire doit être assurée - La formation scolaire est complétée, si besoin, par des actions,

pédagogiques, psychologiques, éducatives, sociales, médicales et paramédicales coordonnées dans le cadre d'un projet personnalisé de scolarisation

- Des équipes de suivi de la scolarisation sont créées dans chaque département. Elles comprennent l'ensemble des personnes qui concourent à la mise en œuvre du projet personnalisé de scolarisation et, en particulier, le ou les enseignants qui ont en charge l'enfant ou l'adolescent. Elles assurent le suivi du projet et peuvent, le cas échéant, proposer des adaptations à la commission des droits et de l'autonomie

- Les aménagements des conditions de passation des épreuves des examens et concours de l'enseignement scolaire et de l'enseignement supérieur pour les candidats handicapés sont prévus par décret.

- Il est instauré une formation initiale et continue des enseignants et des personnels d'encadrement, d'accueil et de service concernant l'accueil et la scolarisation des élèves handicapés.

Page 140: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

140

Ce qui change

31

Ce qui change

l CCPE et CCSD l Enseignants référents

l Equipes éducatives lESS équipes de suivi de la scolarisation

Avant Après

l CDES • CDA commission des droits et de l’autonomie mis à disposition de la MDPH

Diapos extraites du fichier Scolarisation version CTP

30

Architecture institutionnelle pourla politique du handicap

Régional

Départemental

Pilotage et r épartition des financements

C.N.S.A.Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie

administrée par un directeur, assistée d'un conseil et d'un cons eil scientifique

Programmation des équipements

Gestion de proximité

P.I.P.E.C.Programme interdépartemental de prise en charge

établipar le Préfet de région (liens DRASS/DDASS, ARH,CRAM)

M.D.P.H.Maison départementale

des personnes handicapées

C.D.A.Commission des droits

et de l'autonomie

National

Président du Conseil généraltutelle admistrative et financière de MDPH

Le Préfet (DDASS)tutelle administrative et financière sur établissements et services médico -sociaux

Diapos extraites du fichier Scolarisation version CTP

La maison départementale des Personnes handicapées (MDPH) Met en place deux instances destinées à remplacer la CDES et la COTOREP, dont elles fusionnent les compétences. - les équipes pluridisciplinaires - la CDA (Commission des Droits et de l'Autonomie).

Exerce des missions

- d’accueil, et d’information et de conseil des personnes handicapées et de leur famille - met en œuvre les décisions de la CDA - Assure la gestion des fonds départemental de compensation

Page 141: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

141

Désigne La personne référente pour recevoir et orienter les réclamations individuelles Le référent pour l'insertion professionnelle

Elle organise le fonctionnement De l’Equipe pluridisciplinaire (EPE) De la commission des droits et de l'autonomie (CDA) De la Procédure de conciliation interne

Le parcours La formulation de la demande d’un PPS est faite - à l’initiative de la famille - ou à l’initiative de l’équipe éducative

A l’issue de la réunion de l’équipe éducative, le directeur d’école ou le chef d’établissement propose aux parents de faire la demande à la MDPH et leur propose de s’informer, auprès du référent affecté sur le secteur, des aides qui peuvent être apportées dans le cadre de ce projet

École

ou établissement scolaire

L’enseignant référent

MDPH

CDACommission des droits et de

l’autonomie

Décision desmodalités

de scolarisation

PPS

ESSÉquipe de suivi

de la scolarisation

La famille l’enfant

Organisation des modalités de scolarisation d’un élève handicapé

EPEéquipe pluridisciplinaire

Instruction des dossiers

L’équipe de suivi de Scolarisation (ESS)

Elle est composée de l’élève et /ou ses parents, l’enseignant référent, le ou les enseignants de l’élève. Son rôle est de

- faciliter la mise en œuvre et d’assurer, pour chaque élève handicapé, le suivi de son projet personnalisé de scolarisation (PPS).

- Elle évalue les besoins, propose les aménagements nécessaires pour garantir la continuité du parcours de formation.

Page 142: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

142

- Propose si besoin une autre orientation et elle évalue ce projet au moins une fois par an

- Informe la CDA de toute difficulté de nature à mettre en cause la poursuite de la mise en œuvre du PPS.

- Propose à la CDA avec l’accord des parents toute révision de l’orientation qu’elle juge utile.

L’équipe pluridisciplinaire d’évaluation (EPE) Elle réunit des professionnels : psychologues, paramédicaux, assistants sociaux, enseignants et médecins.

Elle prépare le Plan personnalisé de compensation dont le Projet Personnalisé de Scolarisation est un volet

L’enseignant référent

C’est un enseignant titulaire du CAPA-sh ou du 2CA-sh qui exerce les fonctions de référent auprès de chacun des élèves.

Son rôle est : - d’accueillir et d’informer l’élève et ses parents lors de l’inscription - d’assurer le lien avec l’équipe pluridisciplinaire d’évaluation de la

MDPH - de réunir l’équipe de suivi de la scolarisation - de contribuer à l’évaluation des besoins et à l’élaboration du PPS - de favoriser la continuité et la cohérence de la mise en œuvre du

PPS

La commission des droits et de l’autonomie (CDA) Prend les décisions relatives à l’ensemble des droits de la personne handicapée : attribution de prestations comme aides financières, matérielles, humaines et d’orientation.

Le cas échéant organise une procédure de conciliation interne avec les parents.

==================

Tout est donc bien proclamé dans les textes mais les besoins spécifiques des élèves sont-ils vraiment entendus? Quels moyens existent-ils sur le terrain pour mettre en application les textes ? Aujourd’hui, nous sommes inquiets.

Ø Les PAI pour allergies alimentaires : on constate sur le terrain de plus en plus de refus des maires pour leur mise en place à cause de la complexité à confectionner les repas et en avançant le fait que le

Page 143: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

143

personnel n'est pas un personnel hospitalier capable de gérer des réactions telles que les œdèmes. Quelles mesures sont prises en maternelle pour éviter les allergènes dangereux pour les enfants allergiques comme par exemple l’élevage d’animaux ou l’utilisation de matériaux allergisants lors des activités.

Ø « Assurer tout au long de la scolarité la continuité des actions d’éducation à la santé » quelle est la réalité des actions mises en place dès la maternelle ? Quels moyens sont donnés?

Ø « Hygiène des locaux » : où sont les points d’eau pour boire ou se laver les mains dans les écoles ? combien y a-t-il de WC conformes aux normes ? combien y a-t-il de fontaines à eau réfrigérée mises en place dans les écoles maternelles et primaires ?

Ø « Éduquer à la nutrition et prévenir les problèmes de surpoids et d’obésité » : nous sommes le seul organisme capable de suivre les enfants de la maternelle à la terminale. Aucun moyen n’est donné pour assurer ce suivi. Quelles sont les mesures concrètes prises pour supprimer es distributeurs dans les collèges et aménager les gouters dans les écoles maternelles ?

Ø « Mieux connaître, mieux repérer et prendre en compte les signes de souffrances psychiques des enfants et des adolescents » : Quelle formation réelle est donnée aux enseignants ? stigmatiser les enfants à l'âge de 3 ans et terme de sagesse ou d’agitation est une réelle interrogation.

Ø La loi du 11 février 2005 : Certaines évolutions se font jour qui ne rendent plus vraiment lisibles le rôle et les fonctions du médecin de l’éducation nationale en tant que garant du diagnostic des besoins particuliers des élèves pour leur prise en compte dans le cadre d’une équipe plurielle. Qui assure désormais l’expertise des situations pour la commission des droits et de l’autonomie au sein de la Maison Départementale des Personnes Handicapées ? et avec quelles compétences médicales et quelle connaissance des enjeux scolaires pour aider la dite commission dans ses décisions d’orientation, de mise en place de Projets Personnels de Scolarisation, d’attribution d’aides techniques et pédagogiques spécifiques, d’aménagements des épreuves d’examens et concours ?

Ø « Repérer et suivre les problèmes de santé des élèves » : comment appliquer les mesures sans aucun moyen ? Dans le cadre de la loi sur la protection de l’enfance, les députés ont fait adopter une visite médicale avec bilan de "l'état de santé physique et psychologique" au cours des sixième, neuvième, douzième et quinzième années dans le cadre de la médecine scolaire, afin de renforcer la prévention alors que le

Page 144: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

144

nombre insuffisant de médecins scolaires ne permet déjà pas de couvrir les bilans de 6 ans. Dans le même temps, les décisions de réduction des moyens accordés à la médecine scolaire (diminution des crédits de vacation), l’absence de politique de modernisation du service (informatisation, renouvellement des équipements techniques, etc.), la modification des modalités de recrutement, la faible part accordée à la formation continue… ne sont elles pas révélatrices d’une …mort prévisible?

Inquiétude encore sur

Ø Le dépistage systématique des troubles du comportement des enfants dès l’école maternelle - médicalisation systématique du comportement des petits enfants et la psychiatrisation de toute manifestation bruyante - confusion entre troubles du comportement et future délinquance - confusion entre problèmes éducatifs et troubles de la santé

Ø La levée du secret professionnel en direction du maire ou son représentant. Ø La suppression des postes d’enseignants qui ne peut que rendre plus difficile la scolarisation des enfants qui on des besoins spécifiques

Quelle valeur ajoutée la présence des médecins de l’éducation nationale apporte-t-elle à l’Institution scolaire ?

Si l’on considère que la santé est facteur de réussite scolaire, si l’on considère que la réussite scolaire est un déterminant de la Santé, la présence d’un médecin dans l’Ecole – dont il est un des membres à part entière – doit assurer la garantie d’une interaction permanente entre ces deux objectifs : faciliter l’accès à la réussite scolaire pour tous les enfants et adolescents et promouvoir la Santé dans la vie à l’Ecole de chaque élève.

Quel avenir pour la scolarisation des élèves ayant des besoins spécifiques sans une véritable médecine scolaire ?

Tous les textes réaffirment la volonté ministérielle en matière de scolarisation d'enfants en situation de handicap ou de maladie, de zones d'éducation prioritaire, de soutien et d'aide aux enfants en difficulté….mais en l’absence de moyens, comment les besoins spécifiques des élèves peuvent-ils être vraiment entendus et pris en compte aujourd’hui ?

C’est l’avenir de milliers d’enfants au regard de leur réussite à l’Ecole qui, pour moi est en cause.

Page 145: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

145

T E M O I G N A G E S

Page 146: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

146

Page 147: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

147

Gauthier

Maman de Gautier

Mon fils, mon merveilleux TDAH !

Né en décembre 1991, Gauthier est un magnifique bébé et le premier enfant de notre couple. En 1996 naît sa sœur Elisa.

Les nuits sont calmes même si ses trois premières années il se lève dès 6H et se rendort difficilement le soir. Par contre, il fait de très bonnes siestes de 13H à 15H. En journée, c’est un gamin qu’il faut constamment surveiller. Il ne tient pas en place et semble infatigable. Il ne voit pas le danger, traverse la route sans regarder. D’ailleurs il a fait une chute avec traumatisme crânien nécessitant une hospitalisation. En grandissant, je me rends compte qu’il est lent, très lent dans les tâches de routine comme se préparer pour aller à l’école, s’habiller. Il met ses habits à l’envers. Il évite de lacer ses chaussures, de classer, de coller, de découper, de dessiner, de colorier. Il n’aime pas écrire et son écriture restera petite, serrée, pointue….une écriture d’enfant angoissé, de dysgraphique. En outre, il n’est attentif que devant un écran : TV, ordinateur ou jeux vidéo. Il soutient difficilement le regard d’autrui et ne retient qu’une consigne à la fois. J’ai beaucoup travaillé la mémoire visuelle pour sa scolarité.

- En première année maternelle, Gauthier se trouve dans mon école maternelle où je travaille en qualité d’ATSEM. Sa maîtresse me dit qu’il est « difficile » mais qu’elle y arrivera. Malheureusement, elle quitte l’école pour une longue maladie et est remplacée par un maître qui d’emblée ne tolère pas son côté « immature », son refus de travailler. Il est pourtant le plus jeune élève de l’école. En décembre il se fait opérer des végétations et paracentèses. A son retour en classe, nous ne le mettons plus l’après -midi à l’école car Gauthier pleure de plus en plus pour ne pas aller en classe. De même, lui qui est « propre » depuis ses deux ans, recommence à uriner en

Page 148: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

148

journée ! Par contre, il reste propre la nuit. Le pédiatre me dit qu’il y a un problème avec l’école. Des problèmes de tremblements de mains sont signalés. En avril soit à 3 ans quatre mois, il ne prendra plus la sucette qu’il ne prenait que pour dormir.

- En moyenne section, je le change d’école et Gauthier va à l’école maternelle du village. Tout se passe bien puisque Gauthier est à nouveau propre et s’entend à merveille avec la maîtresse. Elle me demande juste s’il dort suffisamment pour s’endormir encore en plein cours l’après-midi ! Gauthier dort 12 heures à cette période : de 19H à 7H. A partir d’avril, il cessera les siestes spontanément. Gauthier ne fait pas de grasse matinée jusqu’à 7 ans. Je me rends compte déjà qu’il a un retard en graphisme. Gauthier n’aimera jamais jusqu’à ce jour dessiner.

- En dernière section maternelle, Gauthier semble plus calme mais a encore du mal à accepter le travail scolaire. La maîtresse dit qu’il est décevant mais reste persuadée qu’il « peut mieux faire ». Elle le dit « bon en maths, imaginatif en art plastique, mais lent, distrait, immature ». Elle me conseille de le suivre et l’aider à la maison pour surmonter ses difficultés. Gauthier va au CP.

- Au CP, les résultats sont corrects mais irréguliers. Gauthier a un suivi avec la psychologue scolaire de janvier à mars 1998. La maîtresse pense que Gauthier progresse quand il « veut bien se mettre au travail ». Je passe beaucoup de temps aux devoirs et je remarque très vite qu’il a véritablement une mauvaise acquisition de l’écriture. Gauthier peine à écrire et pleure quand il doit recopier ses cours non terminés en classe. Pendant les vacances d’été, Gauthier va chez une psychologue privée qui déclare que l’enfant grandit et qu’il faut patienter et qu’un suivi psychologique est inutile.

- CE1. En décembre la psychologue scolaire fait un bilan : encore instable mais des progrès et niveau scolaire satisfaisant. Mais Gauthier reste agité et ses plaisanteries perturbent la classe et lassent la maîtresse qui compte sur lui pour grandir un peu, apprendre à travailler avec méthode, application et régularité. En fin d’année la maîtresse dit que les résultats sont globalement corrects mais irréguliers et ne reflètent pas les capacités de l’élève. Les compétences sont atteintes et Gauthier passe au cycle 3.

- CE2. En mars 2000, le bilan avec la psychologue scolaire révèle un niveau fin CE1 début CE2 avec de gros progrès en comportement. De mars à juin, Gauthier va au CMP pour l’acquisition de l’écriture. En vain, aucun progrès au bout de quatre mois. Il cesse donc la psychomotricité. La maîtresse estime qu’il doit reprendre le

Page 149: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

149

programme du CE2. Je fais donc redoubler en le mettant dans un établissement privé.

- CE2 au privé. Deux maîtresses à mi-temps dont Gauthier apprécie l’une mais pas l’autre ! Son comportement dépend de la maîtresse qu’il a ! Il rattrape son retard scolaire et passe au CM1.

- CM1 en privé. Bonne année mais résultats moyens. Gauthier semble fatigué des voyages en autobus (15 kms aller) où il s’endort constamment. Je décide donc de le mettre au CM2 dans la ville où je travaille.

- CM2. Très bonne année avec une maîtresse très compréhensive. La maîtresse me signale un manque de concentration et me conseille d’aller chez un psychologue pour un QI pensant à une éventuelle précocité. Je ne le fais pas ne croyant pas à cette possibilité.

- 6e. Gauthier a des résultats irréguliers et désastreux en dessin, techno, maths puis français. Incompris, Gauthier fait des crises d’angoisse à répétition. En octobre je trouve sur internet le « trouble de l’attention » et je reconnais mon fils dans la description des symptômes. Je prends donc RV chez un neuropédiatre mais ne reçois le RV qu’en mars 2004 ! Diagnostiqué TDAH et dysgraphique, il reçoit la « Ritaline » et termine bien son année au grand étonnement de ses professeurs qui le laissent passer en 5e. Un professeur me dit que sans sa médication, on m’aurait conseillé l’école spécialisée. Il a 9/20 de moyenne. Le professeur de maths me dit « ne droguez pas votre enfant » !

- 5e. Gauthier travaille mieux et est toujours sous traitement médicamenteux. Depuis janvier, il reçoit « Ritaline LP » pour couvrir 8h car entre midi, Gauthier redevenu inattentif, donc hyperactif, reçoit souvent des remarques des surveillants ou Conseiller d’Education. En anglais, il passe de 10 à 2 de moyenne ! Son professeur, très exigent, estime qu’il s’agit d’un manque de travail ! Or Gauthier prend des cours particuliers en anglais depuis la 6e ! En novembre 2004, Gauthier passe un bilan orthophonique : « Gauthier présente un déficit très net de la mémoire de travail ainsi qu’une grande anxiété, responsable du graphisme laborieux. Ce jeune garçon d’intelligence normale, et dont le TDAH a été dépisté tardivement, très consciencieux et bien suivi à la maison, devrait pouvoir bénéficier d’une adaptation au travail scolaire qui tiendrait compte de son déficit mémoriel. Une prise en charge en psychomotricité serait bénéfique, ou au moins mettre en place une technique de relaxation. ». Son professeur de techno me dit qu’il est le meilleur élève de la classe avec 18 de moyenne toute l’année. Gauthier apprécie beaucoup le

Page 150: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

150

sport. Il a 12-14 de moyenne générale. En août, il fait un bilan orthoptique, il a un problème de divergence et de convergence des yeux tout comme sa sœur et moi-même. La rééducation est nécessaire jusque décembre.

- 4e. Année catastrophique ! Le professeur principal (français), d’emblée, refuse d’accepter que Gauthier puisse avoir des difficultés d’attention et de mémorisation ! En novembre je demande au médecin scolaire la mise en place d’un PII (Plan Individuel d’Intégration). Elle semble comprendre les problèmes de Gauthier qu’elle connaît depuis la 6e, depuis sa médication. En décembre, elle me fait parvenir un mot : « J’ai vu le professeur principal et d’allemand. Une réunion n’est pas indiquée». Je suis dépitée mais n’insiste pas de crainte que Gauthier en subisse les conséquences. En janvier, Gauthier commence le traitement de posturologie de Lisbonne (port de prismes et semelles) qui lui permettent de cesser la médication fin février tant son comportement est calme. Gauthier a 8,5/20 de moyenne les deux premiers trimestres. D’autres professeurs semblent s’acharner contre lui depuis la demande de PII : maths, techno, allemand, anglais ! Gauthier décroche complètement le dernier trimestre. En février je décide de montrer le bilan orthophonique au professeur principal qui ne cesse de mettre des remarques dans le carnet de Gauthier « les problèmes mémoriels SELON VOUS… » ! Elle refuse de lire le bilan ! En mars Gauthier me supplie de le mettre dans le privé ! Présumé mauvais élève, il l’est devenu. Il a 4,5/20 le dernier trimestre avec « 0 » en techno alors qu’il était le meilleur élève en 5e ! Elève moyen à médiocre en SVT, il passe un concours et reçoit le premier prix des « 4e » ! Le redoublement est décidé au conseil de classe. Je refuse cette décision chez le Directeur adjoint en précisant que Gauthier n’en serait pas là si le PII avait été mis en place ! Il accepte l’orientation en 3eDP6 ! Je lui signale que Gauthier part en lycée privé selon son souhait. Gauthier est soulagé, il quitte l’établissement. Une nouvelle vie ailleurs. Une nouvelle chance pour réussir. Août 2006, Gauthier a RV chez un neuropédiatre pour un diagnostic de dyspraxie (L’association DMF m’a si souvent conseillé de faire ce bilan car Gauthier présenterait les symptômes). Mais Gauthier n’est pas suffisamment atteint pour parler de « maladie ». Il n’est donc pas dyspraxique même si ses difficultés ont perturbé sa scolarité. A près de 15 ans, il doit essayer maintenant de surmonter ses difficultés. D’autant qu’au lycée, les problèmes d’écriture, de présentation seront moins pénalisées qu’au collège. Le neuropédiatre pense cependant qu’enfant, Gauthier, aurait dû bénéficier d’une aide en psychomotricité.

Page 151: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

151

Même si je parfois épuisée de me battre pour que Gauthier réussisse, je continuerai. Mon fils a des capacités qu’il ne peut mettre en valeur sans la compréhension de ses professeurs. Je trouve urgent de former les enseignants sur les différents troubles cognitifs qui existent et leur donner les conseils sur les méthodes de travail à adapter.

Par ailleurs, les classes surchargées n’aident pas les enseignants à travailler avec des élèves en difficulté !

En outre, il faudrait une équipe pluridisciplinaire (médecin, orthophoniste, ophtalmologue, orthoptiste, psychologue (formé sur TDAH..), psychomotricien, ergothérapeute) pour dépister les problèmes de façon précoce à l’école et pouvoir donc signaler aux parents les difficultés de leur enfant et les guider vers les spécialistes adéquats. Les parents sont si désemparés.

Jamais, malgré les différents bilans avec la psychologue scolaire, mon fils n’a eu de conseils pour se rendre chez un neuropédiatre ! Pourtant la psychologue savait qu’il était TDAH mais ne me l’avait pas dit de crainte qu’il ait la « Ritaline » (« attention m’a t’elle dit, il y a eu des abus en Amérique… »)! Je crois quand même que c’est à nous, parents, de décider ! Elle m’a révélé son TDAH cinq ans après le dernier bilan, quand elle a su que j’allais chez un neuropédiatre. Mon fils a donc souffert 9 ans à l’école avant d’être diagnostiqué TDAH ! Et il était déjà en 6e ! Diagnostic tardif.

Page 152: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

152

Page 153: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

153

Rentrée scolaire des enfants handicapés Parcours du combattant ?

Elie Martin, Associations de Parents d'Enfants Déficients Auditifs Procédures complexes, difficultés de mise en place des MDPH, manque de places dans les services de suite (SSEFIS 19], SSESAD20 ,SAAIS21) manque d’Auxiliaires de Vie Scolaire, la rentrée scolaire s’est avérée difficile pour de nombreux enfants handicapés, dont les enfants sourds.

Les difficultés de mise en place des MDPH C’est désormais la Maison Départementale des Personnes

Handicapées 22 qui examine les dossiers traités auparavant par la Commission d’Education Spéciale23 .

Le moins que l’on puisse dire c’est que les conditions de mise en œuvre de la nouvelle Loi Handicap rendent difficiles l’application de ses préconisations sur le terrain.

Les MDPH22 mises en place progressivement depuis le 1er janvier 2006, ont dû recruter et former du personnel à la hâte, attendre la parution des décrets d’application, installer et utiliser de nouveaux outils de gestion (logiciels), trouver des locaux.

Dans de nombreux départements nos associations notent des dysfonctionnements importants : insuffisance des moyens d’accueil et d’information, difficultés de fonctionnement des équipes de la C.D.A.P.H24, pour les adultes fonds départemental non opérationnel (ce fonds ne s’applique pour l’instant pas aux enfants, dans la mesure ou la PCH25 - pour eux ne prendra effet qu’en 2007), absence de procédure d’urgence. La longueur de traitement des dossiers entraînent des retards, quand ce n’est des ruptures dans les notifications d’orientation ou attribution d’AEEH26.

19 S.S.E.F.I.S. : Service de Soutien à l’Education Familiale et à l’Intégration Scolaire 20 S.S.E.S.A.D. : Service de Soin et d’Education à Domicile 21 S.A.A.I.S. : Service d’Aide à l’acquisition de l’Autonomie et à l’Intégration Scolaire 22 MDPH : Maison Départementale des Personnes Handicapées 23 CDES : Commission Départementale d’Education Spéciale 24 C.D.A.P.H. Commission des Droits de l’Autonomie des Personnes Handicapées 25 PCH : prestation compensation du handicap 26 AEEH : allocation d’éducation de l’enfant handicapé

Page 154: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

154

En ce qui concerne plus particulièrement la CDAPH24 « secteur adultes », les équipes pluridisciplinaires dévolues à l’évaluation des personnes sont en majorité constituées de personnel médical (médecins, infirmières), oblitérant ainsi de fait une vision plus sociale du projet de vie de la personne. Celui-ci n’est alors pas toujours respecté dans sa globalité puisque uniquement considéré sous un angle « santé ». Est-ce de fait ou non, mais sont souvent constatées sur le terrain des inégalités de traitement ?

On peut regretter qu’une période de transition n’ait pas été organisée pour faciliter le passage entre l’ancienne et la nouvelle loi, afin de permettre une véritable concertation entre l’Etat et les Conseils Généraux. Il est également à déplorer que les associations de personnes handicapées et de parents d’enfants handicapés n’aient pas toujours été réellement concertées pour la mise en place des MDPH. Quand elles l’ont été, ont elles réellement été écoutées ?

Projet Personnalisé de Scolarisation27

Une procédure complexe dans laquelle les parents sont, au mieux, simplement consultés

La MDPH à l’obligation de rédiger un document précisant les conditions de scolarisation. Le projet est à définir si possible avant la rentrée scolaire. Aujourd’hui, ce sont les parents qui doivent prendre l’initiative du projet de scolarisation et en adresser la demande à la MDPH. L’enfant handicapé, à partir de 3 ans, n’ayant pas encore fait l’objet d’une décision de la part de la MDPH doit être non seulement inscrit, mais aussi effectivement accueilli, si ses parents le demandent, dans l’école de son secteur. Celle-ci devient alors son établissement de référence.

Si la famille a saisi la MDPH, il convient de réunir par anticipation l’équipe éducative (composée de l’enseignant référent, des enseignants, et des membres du SSEFIS19 ou autre service qui suivent éventuellement l’enfant). Cette équipe a pour objet de concevoir les éléments précurseurs d’un PPS 27, de le transmettre (par l’intermédiaire de l’enseignant référent) à l’équipe locale pluridisciplinaire d’évaluation (ELPE) de la CDAPH Enfance 24. Par la suite, l’Equipe de Suivi de la Scolarisation (ESS), comprenant obligatoirement l’élève -ou ses parents- sera amenée à faciliter la mise en œuvre, évaluer et faire évoluer si besoin le PPS.

27 PPS : Projet Personnalisé de Scolarisation

Page 155: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

155

Si la famille n’a pas saisi la MDPH, et que les besoins sont avérés, la démarche est la même, mais à l’initiative de l’enseignant référent.

Après avoir reçu l’évaluation de l’ELPE, la commission des droits et de l’autonomie (CDAPH) valide donc le projet personnalisé de scolarisation après avoir pris connaissance de l’avis de l’élève ou de sa famille sur son -ou leur- projet d’orientation et/ou de formation, élément du projet de vie.

En cas de désaccord avec une décision de la CDAPH, une mission de conciliation peut être proposée. Si la conciliation n’aboutit pas, les décisions prises à l’égard d’un enfant ou un adolescent handicapé peuvent faire l’objet d’un recours par la famille devant la juridiction du contentieux technique de la sécurité sociale.

Quelques questions :

La procédure d’élaboration et de mise en œuvre d’un PPS est complexe. Les responsabilités sont partagés entre différents partenaires : la CDAPH et son équipe pluridisciplinaire, l’enseignant référent, l’équipe éducative, les professionnels spécialisés du handicap (SSEFIS [1], autres). Les parents seront- ils associés aux travaux de l’équipe éducative qui à la charge de préparer le pré-PPS ? Rappelons qu’ils ne sont pas associés à l’élaboration du PPS par le CDAPH mais seulement destinataire du document.

Les enseignants référents peuvent avoir en charge jusqu’à 300 dossiers. Comment gérer les réunions si on suit 300 dossiers ?

Après la décision de la CDAPH Pour les enfants qui étaient déjà pris en charge (en intégration

avec suivi d’un service ou en établissement spécialisé), ils doivent bénéficier -normalement- d’une reconduction des mesures décidées par l’ex-CDES

Pour le traitement des nouveaux dossiers, les délais d’attente peuvent être très longs. En particulier pour les enfants qui font l’objet d’une demande pour première prise en charge et ceux qui souhaitent changer d’orientation. Une fois celle-ci prononcée par la CDAPH, encore faut-il que l’établissement spécialisé ou le service sollicité (SSEFIS) ait des places disponibles ! Question : que va-t-il se passer pour les milliers d’enfants dont les décisions d’orientation sont actuellement en attente ?

A propos des AVS Concernant les enfants dont les parents souhaitent (souvent à

défaut d’une prise en charge plus complète) un accompagnement par un

Page 156: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

156

AVS28 Education Nationale, les problèmes rencontrés à cette rentrée sont énormes : non seulement l’Education Nationale peine à recruter car le statut proposé est précaire, sans aucune perspectives de professionnalisation et d’intégration dans le ministère, mais certains Rectorats ont tout simplement refusé les embauches.

Dans le cadre de ces emplois, deux volets de formation sont prévus : un module d’adaptation à l’emploi de 60 heures, obligatoire pour tous les AVS, et un crédit de formation de 200 heures. Mais quand on interroge sur le terrain les AVS ou les familles il semble que la réalité ne corresponde pas souvent à la réglementation. La spécificité des handicaps est survolée, compromettant ainsi largement la qualité du service rendu à l’enfant.

Rappelons que ces AVS sont affectés à un enfant handicapé (majoritairement à temps partiel, et dans de rares cas à temps complet) pour l’aider dans son intégration scolaire. Ils sont recrutés au niveau Bac minimum et ont des contrats de 3 ans renouvelables 2 fois. Ne pas les confondre avec les EVS (emploi vie scolaire) qui sont des personnes destinées à aider le directeur d’école dans des travaux purement administratifs, mais qui, bien souvent se voient attribuer le rôle et la fonction d’AVS , alors qu’ils ne bénéficient pas des formations dispensées à ceux-ci . Les ASEH (aides à la scolarisation d’enfants handicapés) sont affectés dans une classe accueillant un enfant handicapé, en principe en priorité en maternelle, mais de nombreux « glissements » les affectent aujourd’hui jusque dans les lycées. Leur attribution ne relève pas de la CDAPH. L’ASEH est recruté par l’Inspecteur d’académie, sans diplôme, avec un niveau CAP petite enfance ou BEP Carrières Sanitaires et Sociales, en contrat C.A.E. (contrat d’accompagnement vers l’emploi).

Dans tous les cas de figure nous estimons que les emplois AVS sont un palliatif et qu’ils ne doivent pas se substituer aux emplois des professionnels de la surdité auprès des enfants et des jeunes sourds et malentendants.

Que faire en cas de difficulté ?

Le manque d’AVS est un réel problème, leur déficit en formation également. Le manque de places en SSEFIS en est un autre, largement aussi grave.

Nous invitons toutes les familles concernées à contacter nos associations qui pourront les conseiller et les accompagner dans leurs démarches pour obtenir la reconnaissance de leurs droits et les moyens

28 AVS : Assistant Vie Scolaire

Page 157: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

157

nécessaires à la scolarisation de leurs enfants dans le respect de leur choix d’éducation.

Nota : Pour tout savoir sur le PPS vous pouvez consulter un site partenaire : intégration scolaire et partenariat

Remerciements à toutes les personnes qui m’ont aidé à rédiger cet article : Danièle, Florence, Françoise, Michel, Nicole, Sylvie.

Page 158: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

158

Page 159: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

159

« Signe particulier : Handicapé » Comment le handicap est-il vécu au sein de la cellule familiale

Jean-Michel Debernard, éducateur spécialisé : [email protected]

Résumé

A travers une histoire, notre histoire, je vous propose de vous confronter aux

difficultés d’une famille touchée par le handicap. Combien il lui impossible de

recouvrer confiance, et sérénité. Comment la défiance s’immisce dans les relations qui la lient aux médecins, aux enseignants, aux éducateurs… Pourquoi

une vie durant, il va lui falloir se débattre dans les méandres administratifs, en

défendre le devenir de son enfant, et ce malgré les regrets, les inquiétudes, les angoisses. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Au-delà des contingences

matérielles, c’est un climat, une atmosphère, une souffrance morale, qui sera

désormais le lot de chaque jour.

Mots clefs

Culpabilité Isolement

Défiance

Engagement Mobilisation

Témoigner de ce que l’on voit peut paraître relativement aisé. Témoigner de ce que l’on vit s’avère beaucoup plus ardu. Témoigner pour, et au nom, de vos semblables relève du très difficile pari. Les quelques lignes qui vont suivre n’ont donc pas la prétention d’être exhaustives, et représentatives de ce que vivent, pensent, ou ressentent les familles touchées par le handicap. Elles relatent d’abord notre propre histoire, le parcours de notre fille Clémentine, quelques réflexions sur la condition de parents « d’handicapé », nos relations avec ce monde extérieur parfois presque étranger, et nos difficultés d’hier, d’aujourd’hui, et malheureusement de demain. Certains se sentiront blessés, voire agressés, qu’ils soient assurés de ma sincérité, et de mon honnêteté. Comme beaucoup de mes semblables, je me sens soudain très coupable ; coupable d’avoir un enfant différent, coupable d’avoir voulu tant dire et d’avoir si peu écrit, coupable d’avoir omis, occulté, ou minimisé ce qui peut paraître essentiel à d’autres. Que ceux là me pardonnent, et puissent beaucoup se reconnaître dans cet écrit.

Page 160: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

160

Comment le handicap est-il vécu au sein de la cellule familiale ? Après avoir relaté notre propre itinéraire, je vais tenter de démontrer que l’arrivée d’un enfant différent, va modifier les comportements individuels et collectifs de cette famille. Après les réactions internes, je m’attacherai à décrire les interactions avec le monde extérieur.

Nous sommes les parents de Clémentine, jeune fille née il y a 18 ans dans une petite maternité du Limousin. Dans les mois qui précédent, nous sommes tout à l’excitation inhérente à l’approche d’un événement aussi important, que l’arrivée d’un premier enfant. Chambre retapissée, achat de meubles, constitution du trousseau, lecture spécialisée, rien ne manque. Dès le sixième mois, de l’hypertension artérielle chez la maman oblige à des séjours prolongés à l’hôpital. Clémentine naît prématurée à 8 moins, et présente une anoxie néonatale. Elle est transférée immédiatement au CHU de Limoges, dans le service des prématurés, où elle séjournera trois semaines. Elle ne marchera qu’à 18 mois, et ne parlera qu’à l’âge de trois ans, et ce à l’aide de photographies. Très vite elle présente un retard global et psychomoteur, et son regard fixe longuement des points au plafond, que l’on suppose être les poutres de la maison. Devant nos inquiétudes, le responsable du service pédiatrique régional explique avec assurance, que clémentine est prématurée, que son retard global est normal, et qu’il s’estompera au fil du temps. Vient le temps de la scolarité jusqu’en moyenne section, avec toujours ce retard constaté, lié à des troubles du comportement et de la communication. C’est aussi le temps des premières alertes médicales avec dans le désordre, des crises d’asthme, des épisodes d’épilepsie myoclonique (qui correspondent date pour date à un changement de « nounou »), une hépatite B, une allergie aux acariens et à tous les poils d’animaux, et enfin une très forte myopie, puisque clémentine n’a que 2/10 au meilleur des deux yeux, après correction. Nous commençons à voyager beaucoup, isolement rural oblige, et nous allons consulter à Paris ; à l’hôpital Necker pour l’épilepsie, celui des quinze vingt pour la vue, et en banlieue pour rencontrer un ostéopathe, que notre praticien local nous a recommandé. Dès 18 mois également, nous installons des prises en charge libérales en pédopsychiatrie et en orthophonie, qu’il faut aussi aller quérir hors département. Fait notable à cette époque, il existe un déséquilibre important dans la perception, la conscience, et la gestion du handicap de Clémentine à l’intérieur de notre couple. Ma femme est en effet assistante sociale en institut médico-éducatif, ce qui lui donne une vue plus informée du handicap en général, et plus affirmée et affinée, quant à celui de Clémentine en particulier.

Des difficultés d’ordre professionnel n’obligent à migrer, et Clémentine a quatre ans lorsqu’elle et sa maman m’accompagnent sur le littoral atlantique. Nous sommes à nouveau confrontés aux difficultés

Page 161: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

161

scolaires, et après un maintien en maternelle grande section houleux, malgré des prises en charge extérieures pour soulager l’enseignante, le dossier de Clémentine est examiné en commission de circonscription préélémentaire. Nous sommes reçus par une psychologue scolaire, qui visiblement n’a pour autre mission, que celle de nous imprégner du message suivant : Clémentine est handicapée, et doit donc rejoindre un établissement. Nous avons à ce moment la « chance » que Clémentine soit admissible dans une école pour enfants déficients sensoriels et moteurs, sa forte myopie le lui autorisant. Elle intègre une classe d’intégration scolaire pour enfants déficients visuels. Cette classe se trouve rapidement déplacée dans un groupe scolaire voisin, est forte de sept éléments, et notre fille y connaît trois années bénéfiques, tant sur un plan cognitif, que social, moteur et comportemental. Mais les 12 ans approchent, et il nous faut déjà penser à la réorientation.

Après avoir visité plusieurs établissements en charge du handicap mental, une place se libère dans un institut médico-éducatif. Nous faisons connaissance avec les outils de communication incontournables du partenariat familles/établissement. Cahier de liaison, référent éducatif, réunions, projet individualisé, tout cela semble rendre bien obsolète la petite classe précédente. En fait, nous n’avons de cesse de réclamer un arlésien projet, d’annoter un cahier de liaison unilatérale, d’interroger un référent prisonnier du mimétisme d’équipe, et de nous étonner des méthodes et du contenu de la prise en charge. Notre émoi pèse peu face à l’hermétisme pluridisciplinaire. Par contre, d’autres faits plus tangibles suscitent nos inquiétudes. Une fracture de la clavicule soignée avec de la pommade, des brûlures suite à une exposition trop prolongée au soleil, des cigarettes fumées à l’intérieur du minibus, nous mettent en éveil, et un retour de clémentine le dos maculé du sang de ses règles menstruelles (pourtant signalées) ont raison de notre confiance. Nous retirons notre fille sans autre forme de procès, sinon celui que nous fait la commission d’éducation spéciale d’avoir soustrait Clémentine à ses obligations scolaires. Fort de ce que nous croyons être notre bon droit, nous bataillons avec l’association gestionnaire de l’établissement, et avec la commission sus citée pour obtenir une nouvelle orientation. C’est par notre propre réseau que nous trouverons une nouvelle solution, en unité pédagogique d’intégration, suite des classes d’intégration scolaire, au collège. Cette classe qui accueille des adolescents déficients mentaux moyens semble bien correspondre au profil de notre fille. Il nous apparaît vite que Clémentine y est toujours en décalage au regard du programme proposé ; à la traîne en mathématique par exemple, en avance en français ou la même lecture lue et relue durant toute l’année, devient vite récitation. Nous avons connaissance de la présence d’une autre unité pédagogique pour autistes dans notre cité. Nous aimerions que

Page 162: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

162

Clémentine, qui a beaucoup de difficultés à appréhender une tâche dans sa globalité, puisse bénéficier des méthodes comportementalistes.

Le pédopsychiatre qui suit Clémentine depuis maintenant des années, pense qu’elle souffre de troubles sémantiques pragmatiques, corrobore notre souhait, comme d’ailleurs l’équipe enseignant/éducateur/psychologue qui travaille autour de cette classe. La commission d’éducation spéciale n’accède pas à notre demande, au prétexte que nous n’avons pas de diagnostic autistique de prononcé. Nous contactons le centre de consultations spécialisées de Bordeaux, où dès la première entrevue, la possibilité d’une aberration génétique est évoquée, et rendez-vous est aussitôt pris avec le service de génétique infantile. Après quelques mois, le caryotype révèle une trisomie partielle sur le chromosome 10, que je porte en moi, et que j’ai transmise à ma fille. Cette maladie génétique extrêmement rare, qui explique au dire des spécialistes, le « phénotype » si particulier de Clémentine, nous conforte dans l’idée qu’il convient d’adapter une prise en charge réellement adaptée sur ses manques bien sûr, mais aussi sur ses potentialités.

Nous mettons donc en œuvre un projet encore en place aujourd’hui, qui fait appel à des partenaires tels qu’un centre de loisirs et un centre social, un horticulteur, un répétiteur missionné par le CNED, un club de judo, une école de musique, une auxiliaire de vie, et un service de transport spécialisé. Ce projet qui a évolué au fil du temps, est en passe d’entamer sa troisième année « scolaire », et tend lentement à préparer le futur de Clémentine, que nous souhaitons le plus autonome et le plus épanoui. A cet effet elle a déjà effectué, et elle effectuera des stages en établissements type centre d’aide au travail, ou plus sûrement foyer occupationnel, ce qui nous permet de valider le projet actuel, tout en s’assurant que le retour vers l’éducation spécialisée évidemment nécessaire, est toujours possible. Nous avons pour notre part l’impression d’avoir (enfin ?) trouvé une solution réellement adaptée à notre fille, ainsi qu’au fonctionnement de notre cellule familiale. Ce fonctionnement qui aurait pu paraître très coûteux en énergie, nous sécurise davantage, et nous autorise des plages de « décompression » plus fréquentes.

Notre histoire n’a rien d’exceptionnelle, mais elle est comme toute, singulière. Singulière comme peut l’être la vie de Clémentine, et comme devrait l’être celle de chaque personne « différente », en harmonie avec ce qu’elle veut, et ce qu’elle peut. Clémentine abordera, nous l’espérons, sa vie d’adulte la mieux armée possible.

Page 163: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

163

Mais que vivent réellement ces parents d’enfants handicapés ? Que ressentent-ils ? Quel et leur cheminement ?

En assistant des personnes âgées dans une maison de retraite américaine Elisabeth Kubler Ross a analysé et repéré, les réactions psychologiques des individus face à l'annonce d’un pronostic grave pour elles-mêmes. De cette réflexion sur l'agonie, elle distingue cinq stades de comportement, qu'elle a ensuite transposés à « toute réaction face à l'annonce d'un malheur ».

Elle décline donc chronologiquement l'état de choc ou de sidération qui inclut le déni, puis celui de la colère, ensuite la transaction, la résignation/dépression pour s’arrêter enfin au stade de l'acceptation/réconciliation.

Avant d'aborder le premier état de choc, il me faut envisager les différents parcours pour arriver à ce moment où : L’ON SAIT.

Certains handicaps sont décelés dès la grossesse et se pose alors aux parents le douloureux dilemme de donner la vie ou pas. Pour le cas où l'enfant naît, cet état de choc se produit donc en période prénatale.

D'autres handicaps n’apparaissent qu’à la naissance, et c’est donc bien de choc dont il faut parler, d'autant que ce malheur vient bouleverser l'excitation et la joie que chaque parent ressent lorsque sa famille est sur le point de s'agrandir.

Et puis il y a plus insidieux, le doute qui envahit, l'angoisse qui gagne, la douleur qui s’abat. Que ce soit pour des stigmates physiques, des troubles du comportement, ou du développement cognitif, cet enfant n’est pas comme les autres. Jusqu'au jour où un médecin, un psychologue scolaire, un psychiatre, un généticien... assène le coup que vous portez déjà en vous.

Mais que ce soit par effet d'annonce, par constat, par pronostic, ou par diagnostic, c'est véritablement une sidération.

À ce stade, vous n’entendez plus rien, vous êtes abasourdi, vous niez, vous vous mentez, vous simulez, vous vous isolez. Puis vient le temps de la rébellion, celui de la colère contre votre médecin, votre gynécologue, la maternité, votre conjoint, contre cet enfant que vous auriez voulu tout autre.

L’action vous évite de vous apitoyer. Il vous faut passer à l’acte. La colère dit-on est mauvaise conseillère, mais dans ces moments, il n’en existe pas de meilleures, tant il vous faut un exutoire. Vous commencez aussi à vous rapprocher de votre conjoint, la seule personne selon vous à même de vous comprendre.

Page 164: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

164

Vous croisez aussi d’autres familles dans lesquels vous vous reconnaissez, vous n’êtes plus seuls. Heureusement d’ailleurs, car vous êtes prêts à toutes les compromissions, à tous les marchandages, à toutes les propositions pour peu que l’on vous conforte dans l’idée que votre enfant n’est certes pas comme les autres, mais qu’en même temps il est différent.

Un dernier piège est à éviter : La première toilette introspective vous place face à votre miroir. Gare à la décompression, la chute de tension, la somatisation, l’alcool, les médocs, l’insomnie, l’anorexie, la boulimie !... et à tout les symptômes de la dépression.

Ce passage est néanmoins essentiel. Vous n’êtes plus en friche, vous êtes en jachère. Enfin c’est l’heure de la reprise. Vous vous accommodez de votre sort, vous vous raccommodez avec votre enfant. La cicatrice est toujours visible, mais elle est moins douloureuse. C’est le stade de l'acceptation/résignation, le dernier repéré par Élisabeth Kubler Ross.

Bien sûr les parcours ne sont pas toujours aussi clivés et repérables, et tout blocage prolongé ou définitif à l’une de ces étapes s'avérerait pathologique

Mais quel que soit l’interlocuteur, professionnel ou non, qui s’adresse à ces parents, combien il serait important qu’il repère quel est leur niveau de maturation, afin de leur tenir un discours, certes responsable, mais adapté à leur capacité d’écoute du moment.

Comme je l’ai évoqué en amont, il peut être salutaire de se rapprocher d’autres familles confrontées elles aussi, au handicap d’un de leur enfant. Le choc, le déni, la sidération passés, c’est un réflexe d’autoprotection qui pousse les parents à rechercher leurs semblables. Ne plus se sentir seul, entendre évoquer des émotions, des inquiétudes, des angoisses, des « galères », des colères que l’on connaît, ou que l’on a connu soi-même, est à la fois rassurant, et régénérant.

Pour ma part, mes relations avec les autres parents sont calquées sur mon itinéraire intérieur personnel. J’ai moi aussi éprouvé le besoin de « m’encorder » pour ne pas chuter plus profondément. J’ai assisté à des réunions, commencé à participer aux discussions, intégré les organigrammes de quelques associations, jusqu’à œuvrer à la création de l’une d’elle. J’ai présidé cette nouvelle association, j’ai représenté et assisté les familles, j’ai siégé au sein de commissions, j’ai réclamé de nouveaux services, je me suis intéressé à l’accessibilité et aux transports, je me suis rapproché du handicap visuel, moteur, mental, de l’autisme, je ne suis déplacé, j’ai écrit, compté, j’ai…, j’ai…, j’ai…, j’ai…, et j’ai explosé.

Page 165: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

165

J’ai sincèrement de la reconnaissance et de la considération, pour ces parents qui s’investissent, et dont un certain nombre sont, sinon des amis, du moins d’excellentes relations. Je sais trop quel travail énorme ils accomplissent bénévolement, sur des temps qu’ils pourraient consacrer aux loisirs.

Cependant je sais aussi qu’être parents d’un enfant handicapé, devrait obliger à s’investir encore davantage dans l’éducation de celui-ci. Paradoxalement tous ces temps de réunion, de concertation, de préparation, de déplacements, font que bien souvent l’enfant vit mal ce sur investissement au service des autres, et ce qu’il considère comme une forme de désintérêt à son égard. D’autant qu’il faut également se montrer vigilant, attentif, et concentré sur tout ce qui de gravite autour du devenir de son enfant.

Lorsqu’une « anomalie » apparaît avant, ou après la naissance d’un bébé, c’est vers le milieu médical que les parents se tournent spontanément. A juste titre d’ailleurs, puisque c’est à cette étape de leur parcours, leur seul interlocuteur. Ces « savants » sont alors censés informer, rassurer, dédramatiser, réparer, déculpabiliser… Mais comment sont-ils perçus généralement ?

D’abord il convient de préciser que les parents et leur enfant handicapé rencontrent trois grandes familles de soignants : les soignants hospitaliers, les soignants libéraux, et les soignants d’établissement spécialisé.

En premier donc vient l’hôpital avec sa maternité accueillante bien sûr, mais aussi dès l’apparition de complications, sa cohorte de blouses blanches, sa moite atmosphère, son aspect impersonnel, et son hermétisme.

Lorsque Clémentine naît dans un petit hôpital de campagne, elle est tout de suite orientée vers le centre hospitalier universitaire régional, où elle séjourne trois semaines au service des prématurés, et ce dans des conditions idéales. Mais ensuite à chacune de nos visites, nous avons beaucoup de difficultés à obtenir des informations. Nous n’avons que des discours de circonstances, certes dédramatisants, mais aussi terriblement infantilisants.

Dans cette période de sourde inquiétude, les parents sont à la recherche d’un diagnostic si possible, mais aussi et peut -être surtout de conseils qui leur permettent d’adopter la bonne attitude, de donner les bons soins, et de démarrer une éducation adaptée. Lorsque nous rencontrons les responsables de services des grandes unités parisiennes, nous éprouvons ce même sentiment de frustration. Notre fille est soumise à toute une batterie de tests et d’examens, mais jamais

Page 166: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

166

nous n’avons un petit mot d’explication sur le but recherché, ou quelle anomalie est suspectée.

Ce n’est que bien des années plus tard (16 ans) que nous recevons un discours réellement constructif au centre de consultation spécialisée de Bordeaux. Le personnel, pourtant étonnamment jeune à nos yeux, formule immédiatement des hypothèses, et nous renvoie vers le service de génétique infantile, ou le caryotype de Clémentine est étudié. A l’annonce du résultat, beaucoup de précautions sont prises pour m’annoncer que ma fille est porteuse d’une trisomie 10, que je lui ai transmise. Je sais gré au service d’avoir été aussi précautionneux lors de cette annonce.

Bien sûr qu’un sentiment de culpabilité m’a envahi à cet instant. Mais c’est un sentiment qui me « taraude » depuis la naissance de mon enfant, et comparé aux thèses de la famille pathogènes par exemple, du père « absent », ou de la mère « trop envahissante », cette culpabilité « mécanique » est somme toute beaucoup plus facile à porter.

La relation avec les praticiens de proximité est par définition plus proche, et donc plus étayante pour les familles confrontées au handicap. En premier lieu vient le médecin de famille qui, bien que pas toujours très au fait du champ du handicap, est la personne ressource qui renseigne, conseille, oriente.

Pour notre part, nous avons aussi eu le bonheur de croiser un pédopsychiatre qui depuis plusieurs années explique, décortique, valide ou invalide nos projets, et nous aide à faire des différentes étapes citées précédemment, un véritable parcours de vie. Nous croisons aussi la route d’autres thérapeutes que sont les orthophonistes, psychomotriciens, orthoptistes, ou kinésithérapeutes. Chez chacun d’eux nous recevons aide et soutien, et pas seulement par clientélisme comme nous l’a quelquefois susurré la concurrence, et Clémentine a toujours semblé tirer profit de leurs pratiques.

Un seul regret, nous ne pourrons jamais faire participer ces personnes à l’avis pourtant autorisé, aux réunions organisées autour du devenir de notre fille. Cette absence de passerelle, avec un rivage libéral pourtant demandeur, me conduit tout naturellement à évoquer le corps médical que nous avons rencontré au sein de l’éducation spécialisée.

Il me faut discerner les praticiens qui siègent ou appartiennent aux services de la DDASS ou de l’Education Nationale, et ceux qui composent pour partie les équipes pluridisciplinaires des établissements.

Les premiers sont avant tout des techniciens, et ne travaillent presque exclusivement que sur dossiers. Cela leur confère certainement

Page 167: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

167

une part d’objectivité liée à la distance, mais ne peut que les priver du selon moi nécessaire contact, qui sied à une bonne décision d’orientation. Lorsque l’on parvient à forcer quelques portes, il est néanmoins possible d’être reçu, sinon entendu, et si je garde un excellent souvenir d’un échange avec le médecin de la commission d’éducation spéciale par exemple, j’en veux encore terriblement aujourd’hui à d’autres spécialistes incontournables, qui uniquement sur dossiers ont décidé arbitrairement du devenir de notre fille.

J’ouvre une parenthèse pour ce qu’il faut bien appeler un peu trivialement « les querelles de clocher ». Le « phénotype »de Clémentine, longtemps sans diagnostic avéré, à donné à penser à certains médecins qu’elle pouvait présenter des troubles autistiques, où des troubles envahissants du développement. En recherche de solutions adaptées, nous nous sommes tournés vers la sphère autistique. Deux demi sphères, devrais-je dire, tant ce milieu est scindé entre les courants psychanalytique et comportementaliste.

Nous avons bien eu le sentiment alors d’être isolés entre deux mondes qui s’ignoraient, et d’avoir été plus un enjeu, qu’une situation à appréhender dans sa globalité et sa spécificité.

Je termine par le personnel médical rencontré dans les établissements. De prime abord, il est intéressant de constater que les équipes pluridisciplinaires peuvent bénéficier du renfort de psychiatres, de psychologues, d’orthophonistes. Par contre, si l’on examine un peu plus attentivement le temps de travail qui leur est imparti dans le service, il y est le plus souvent fait mention de mi-temps dans le meilleur des cas, mais souvent de quart temps, voire de huitième de temps. Il est également curieux de constater qu’en additionnant les temps partiels exercés par certains psychiatres en établissement, ajouté à leur activité libérale ou hospitalière, la science mène tout droit à l’ubiquité. Si l’on divise ces vacations par le nombre de pensionnaires des établissements, cela relativise considérablement l’efficience de ces interventions. Si j’ajoute que le médical « d’établissement » snobe souvent, ou ignore les contacts extra muros, qu’il monopolise les temps de parole lors des trop rares réunions équipe/parents, qu’il émet des hypothèses sans avoir le temps matériel de les vérifier, je peux dire que oui ; j’ai souvent été en conflit ou en désaccord, mais rarement été aidé ou orienté pertinemment par cette corporation.

Le deuxième grand interlocuteur que croisent les parents, c’est l’éducation nationale. Malgré les progrès de la médecine, des dépistages de plus en plus précoces, et des diagnostics de plus en plus précis, c’est souvent à l’école qu’apparaissent les premières difficultés de l’enfant. La famille est alors en présence d’un enseignant le plus souvent surchargé

Page 168: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

168

de travail, et à peine sensibilisé au handicap. Il n’est pas question ici de faire de procès d’intention. Pour des parents qui n’en sont qu’au début du cheminement décrit plus avant, il est difficile, voire impossible, d’être lucide et objectif. Pour notre part, devant les difficultés récurrentes de Clémentine en moyenne section, puis en grande section, c’est une psychologue scolaire qui nous assène sans ménagement, et très brutalement, ce qui va bouleverser toute notre vie. Vient alors que le temps des commissions d’orientation ou de réorientation. Ces instances, présidées par la DDASS ou l’éducation nationale sont souvent extrêmement traumatisantes pour des parents. Nous avons été invités, où nous avons demandé à assister à la quasi-totalité des commissions qui ont évoqué le devenir de Clémentine. Devant ces « aréopages » de personnes présumés savantes, nous avons à tort ou à raison, presque toujours ressenti un sentiment de frustration, et la désagréable impression de n’avoir pas tout à fait bien défendu les intérêts de notre fille.

Il est de plus extrêmement paradoxal d’admettre qu’un enfant handicapé apprend plus lentement et plus difficilement, et de ne lui laisser pour ce faire qu’un temps plus court que celui d’un enfant dit normal. Si vous n’y prenez garde, votre enfant est déjà dans les filières pré adultes, et il n’aura jamais l’opportunité d’exploiter au mieux ses potentialités, et de se préparer ainsi à une vie la plus autonome possible.

Clémentine a connu à deux reprises les classes d’intégrations en primaire et en secondaire. Le concept est séduisant, puisque dans un environnement scolaire normal, l’enfant est à la fois entouré d’un enseignant, d’une équipe pédagogique, et d’un éducateur soutenu par son équipe pluridisciplinaire.

Le passage en classe d’intégration primaire a été extrêmement bénéfique pour notre fille, et elle y a reçu un enseignement véritablement individualisé. La vérité m’oblige cependant à constater que son passage en unité pédagogique d’intégration (collège) s’est avéré beaucoup moins bénéfique. Elle n’y a été que trop rarement placée en conditions optimales pour progresser. Malgré le relatif petit nombre d’élèves (12), elle y a toujours été en décalage ; car soumise au prima du groupe, et trop rarement en réelle conditions individualisées.

Force est aussi de constater que l’osmose n’est pas toujours de mise entre l’éducatif et le pédagogique, et donc les équipes ne sont pas toujours en synergie. Le rôle de la famille y est réduit à sa portion la plus congrue. Le projet individuel existe, vous êtes conviés à le ratifier, mais aucunement à l’élaborer.

Page 169: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

169

Cela aurait été un moindre mal si au moins les praticiens qui prenaient en charge notre fille à l’extérieur avait été invités. Eux-mêmes étaient demandeurs, non pour faire de l’ingérence, mais pour expliquer ce qu’était Clémentine dans leur cabinet, et pour recevoir des informations sur son comportement au collège. Ce ne sera jamais le cas, et ils se heurteront même à une fin de non recevoir.

La suite naturelle de mon propos, c’est le rapport souvent conflictuel, que les familles entretiennent avec les établissements spécialisés et leurs équipes. C’est la lutte entre ceux qui ne peuvent pas savoir, et ceux qui ne peut pas comprendre. Comme si l’on pouvait savoir sans comprendre, et comprendre sans savoir…

Nous n’avons qu’une expérience relativement brève (une année et demie), de la vie en institut médico-éducatif. Je ne peux qu’observer que, malgré les textes très clairs à ce sujet, nous n’aurons jamais de projet individualisé, nous serons bien invités à des réunions de concertation, mais les perspectives et les pistes évoquées resteront sans suite.

Nous avions pourtant d’excellents contacts avec l’éducateur référent. La référence éducative, c’est l’interface entre la personne handicapée, l’établissement, et la famille. Je connais relativement peu de famille en conflit direct avec les éducateurs. Ce sont après elles, les personnes qui connaissent le mieux leur enfant, ils les reconnaissent dans leurs observations, et partagent a priori leurs analyses, et leurs propositions. Souvent un climat de confiance s’instaure, et pourrait se poursuivre si les parents ne se sentaient pas floués lorsque surviennent les premières réunions.

Sont en effet porteurs de la parole institutionnelle, le médical que j’ai déjà évoqué, et qui connaît peu les situations, le directeur ou le chef de service qui donnent l’impression d’ouvrir puis de refermer un dossier. Si c’est l’éducateur qui s’exprime, il lit un rapport éducatif élaboré en commun, bien éloigné des premiers échanges plus informels, et qui l’avaient fait considérer comme une personne ressource. Nous sommes là bien éloignés du partenariat qui (toujours les textes) devrait présider aux relations famille /établissement.

Il est une dimension de leurs fonctions que les équipes pluridisciplinaires devraient, selon moi, prendre davantage en considération. Leur nombre lors des réunions, leur confère une position de toute-puissance qui si elles n’y prennent garde, peuvent être terriblement blessantes et humiliantes pour les familles. Gare aux jugements de valeur ! Aux théories sauvages ! (ah ! la systémie), aux hypothèses émises légèrement et reprises allègrement. Je conseille à mes collègues parents de consulter chaque fois qu’ils le peuvent le

Page 170: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

170

dossier de leur enfant, qu’il soit en milieu médical, en commission d’éducation spéciale, ou archivé en établissement.

Je cite parmi d’autres, cet écrit d’une psychologue qui officie dans un service de soin, qui sur la foi d’une seule rencontre avec l’enfant, sans avoir à l’époque de diagnostic médical, qui n’avait jamais rencontré les parents, et qui affirme ceci :

« La relation fusionnelle entre X… et sa mère, implique pour celle-ci un fonctionnement psychiatrique qui reste collé au désir maternel. Ce comportement adhésif l’empêche de se différencier et de construire sa propre identité. »

La population des établissements spécialisés est composée c’est vrai, pour partie d’enfants ou d’adultes profondément marqués par des carences, des maltraitances, des dysfonctionnements de la cellule familiale. On omet généralement de préciser aussi, qu’un tiers des problématiques rencontrées dans le handicap mental n’ont pas d’étiologie.

Mieux même, les progrès de la génétique font apparaître des causes physiologiques nouvelles, qui expliquent le pourquoi de certain handicap. L’autisme, naguère si stigmatisant et culpabilisant pour les familles, commence aussi à trouver quelques explications du côté des caryotypes.

Il y a lieu de ne pas confondre fusion et effusion. Il est normal par exemple, qu’un enfant de 15 ans qui n’a qu’un âge mental de six ans (source de tests psychologiques), soit enclin à des démonstrations affectives exagérées pour un adolescent. Il y a lieu également de ne pas amalgamer corrélation et causalité. Il est évident qu’un grand nombre de parents de personnes handicapées, ont tendance à les sur protéger, et ce faisant à peut-être freiner leur évolution. Les questions sont alors de savoir si la relation pouvait s’établir autrement ? S’il serait souhaitable qu’elle soit autrement aujourd’hui ? S’il est possible qu’elle soit différente ?

Ici également, il m’apparaît comme important qu’un professionnel soit en capacité de repérer à quel type de famille il s’adresse, où elle en est de son cheminement, si elle en est toujours à subir ou si elle est en capacité de réagir, quelles sont ses facultés à entendre un message, à le digérer, à se l’approprier.

Face à ces professionnels, j’ai également eu à souffrir d’avoir le sentiment de ne pas exister. Ma femme est assistante sociale depuis toujours, et je suis aujourd’hui éducateur spécialisé. Je n’ai rejoint cette profession que très récemment, et très longtemps il m’a semblé ne pas

Page 171: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

171

être considéré comme un interlocuteur à part entière, lorsqu’il s’agissait d’évoquer la situation de ma fille. C’est un appel que je lance ici aux professionnels de l’entretien:

Quelle que soit l’attitude des personnes qui vous font face, quel que soit leur niveau d’information, leur implication, c’est bien à un couple que vous vous adressez. Il est des regards et des discours exclusifs, qui accroissent encore davantage des déséquilibres qui existent déjà, j’en conviens tout à fait.

Ce déficit de communication, et de compréhension, influe directement sur le comportement des personnes handicapées, qui profitent souvent de ces failles, et adoptent les attitudes et les stratégies des « enfants du divorce ».

La personne handicapée a spontanément tendance, sciemment ou inconsciemment, à adopter des comportements différents selon le milieu où elle évolue.

Dans quel conflit de loyauté est-elle écartelée, lorsqu’elle entend ses deux modèles identitaires s’entre-déchirer et se dénigrer.

Alors me direz-vous, heureusement que vous avez vos proches !

Bien sûr, mais là encore ce n’est pas aussi simple. Les amis avec qui vous avez partagé la joie de votre grossesse, restent présents au début de vos déboires. Puis peu à peu une gêne s’instaure. Vous-même en êtes à l’une des étapes que j’ai citées, et que vous soyez en état de sidération, de choc, de déni ou de colère, vous n’êtes pas un interlocuteur très soucieux de partager. Pire la saine évolution des enfants de vos amis, concoure également à distendre les liens. Vous n’osez plus évoquer les soucis de votre quotidien, et pour les autres, afficher leur bonheur leur semble indécent. Les préoccupations, les centres d’intérêt, les obligations parentales, font diverger les trajectoires. Les rencontres s’espacent, les uns grandissent plus vite que les autres, et vos amis deviennent des relations.

Pour la famille, c’est un peu le même mécanisme. Certes les liens affectifs sont plus étroits, mais il est difficile de se confier, et ce faisant d’infliger de la peine à ceux qu’on aime. C’est souvent alors la loi du non dit. Un modus vivendi s’installe, empreint de silences, de comportements de façade, et de conversations d’évitement. D’autres que moi, avec la distance que leur confère leur position d’observateurs, et leur savoir qui leur permet d’interpréter, disséqueront beaucoup mieux la lente déliquescence de ces rouages familiaux.

Page 172: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

172

Clémentine est fille unique, mais nous savons aussi quels problèmes rencontrent les familles qui ont d’autres enfants. Combien il est difficile de ne pas polariser son attention et son énergie, à l’intention du membre de la fratrie le plus fragile ! Combien il est frustrant pour ces autres membres de se sentir délaissés, voire mal aimés, jusqu’au point de jalouser parfois le handicap de son frère, ou de sa sœur ! Combien il peut être stigmatisant à l’école, au milieu des copains, d’appartenir à une telle famille, et combien il peut être culpabilisant d’en avoir honte !

A ce niveau de mon propos, je ne peux éluder les pointes ondes, qui parcourent l’électro encéphalogramme du parcours d’un couple, confronté à une telle annonce d’abord, puis au long quotidien qui s’en suit. Certains prétendront qu’ils y voient le motif de leur séparation, d’autres que cet état de fait les a rapprochés, d’autres encore qu’à compter de cette arrivée l’enfer conjugal s’est installé. Par pudeur sans doute, mais aussi parce que ce n’est pas si clair que cela dans mes pensées, j’aurais beaucoup de difficultés à me positionner.

Ce qui me frappe avec le recul de ces dix huit années, c’est l’incontournable dimension, la pesante présence, l’usante vigilance, et l’accaparante capacité à toujours répondre, qui accompagnent quasiment le restant de sa vie.

C’est aussi l’obsédante question : « que va-t-il se passer lorsque nous ne serons plus là? »

La permanente protection d’une personne dépendante, engendre des mécanismes, des réflexes, des comportements conditionnés, qui peuvent faire oublier que chacun doit pouvoir mener sa vie d’adulte, et quitter un jour l’environnement familial.

Confronté au handicap, j’ai expliqué comment l’on s’éloigne de ses amis, mais c’est aussi l’obligation de bouleverser son mode de vie, d’aller à la rencontre d’autres familles semblables, de pratiquer des activités accessibles à votre enfant.

Le handicap devient votre quotidien, votre atmosphère, votre environnement. Le fantasme de tout parent d’un enfant handicapé, en tout cas cela a pu être le mien, c’est que le miracle se produise. Que votre enfant sinon ne guérisse, du moins puisse s’approcher au plus près de la normalité, ou mieux encore ne se découvre un talent caché. C’est le difficile pari de l’intégration ; difficile de voir les copains du judo passer dans le cours supérieur chaque année, et de voir votre enfant si grand, et si maladroit au milieu de beaucoup plus jeunes, difficile de constater à la traditionnelle audition du cours de musique, les progrès des uns par rapport à d’autres, difficile de supporter le regard moqueur, ou pire condescendant, des autres enfants ou de leurs parents…

Page 173: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

173

Et puis vous ne pouvez être partout, il faut même quelquefois sacrifier ses obligations professionnelles. Tant que votre enfant est mineur, le transport est pris en charge, après les solutions existent, mais elles s’avèrent très onéreuses.

Vous êtes donc condamné votre vie durant, à monopoliser votre capital d’énergie pour inventer des solutions, chercher une future orientation, renseigner le dossier ad hoc…

J’en termine avec ce qui va paraître un bien sombre tableau. D’autres parents auraient probablement eu une restitution différente, mais probablement pas plus optimiste. Pourtant le projet que nous avons mis en place pour Clémentine ne serait ni viable ni vivable, sans l’apport financier de l’allocation d’éducation spéciale majorée de son complément. Ce projet a du sens, parce qu’un retour est à terme possible vers un établissement spécialisé. Des facilités et des dispositifs nouveaux apparaissent, mais souvent plus par redéploiement, que par l’affectation de réels moyens supplémentaires. Alors la société évolue c’est vrai, le handicap est davantage pris en considération, et l’État s’est engagé fortement par deux récents textes de loi. Mais cette volonté de légiférer n’est-elle pas en elle-même un aveu d’obligation à la discrimination positive ?

Page 174: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

174

Page 175: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

175

Un enfant pas comme les autres : l’enfant au fort potentiel intellectuel A propos d’une carte d’identité possible

C. Droehnlé-Breit, Psychologue pour enfants et adolescents, Docteur en psychologie clinique, diplômée de la Sorbonne,

spécialisée dans les questions du haut potentiel

Tous les parents n’ont d’yeux que pour leur enfant ; il est incontestablement, le plus beau, le plus intelligent, le plus réussi, de tous les enfants. Depuis son premier sourire jusqu’à son premier mot, tout sera noté, enregistré, filmé, comme autant de preuves d’amour, que cet enfant est vraiment unique, magique.

Oui, mais si c’était effectivement le cas ?

Et si en toute objectivité cet enfant était différent, capable de prouesse bien avant l’heure, en avance dans plusieurs domaines et parfois aussi en retard dans d’autres ? Bref, s’il était un enfant dit à fort potentiel intellectuel.

Ils seraient 5 % à être ces enfants là, différents par leurs aptitudes spécifiques ; être en avance sur le plan intellectuel, c’est avant tout fonctionner avec un référentiel à part, où l’intelligence est étroitement et continuellement mélangée aux émotions. Et ce mariage ne va pas toujours être simple et souvent aboutir à un profil d’enfant tout à fait atypique, enfants que je nommerai bien volontiers des « drôles de zèbres ».

Cet animal aux surprenantes rayures noires et blanches ou blanches et noires d’ailleurs, n’est certes pas un âne, mais est-il pour autant un si mauvais cheval ? Il n’est certes pas facile à vivre et peut même se comporter d’une manière particulièrement sauvage, mais n’est-ce pas là la rançon de l’étrangeté ? Tout comme le zèbre en pyjama rayé cohabite avec ses congénères, l’enfant au fort potentiel cohabite avec ses pairs, mais en se faisant souvent repéré pour ses nombreux décalages, ses nombreuses rayures !

Retour aux origines, Te voilà…

Souvent, tu es un petit dormeur, préférant la compagnie des adultes à celle de ton lit. Tonique, tu explores le monde dès ton plus jeune âge. Un

Page 176: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

176

développement précoce t’a permis de répéter tout ce que tu entends. Dès avant 24 mois, tu t’exprimes fréquemment de façon très claire, passant directement des mots isolés aux phrases complexes et laissant ainsi le parler-bébé pour tes pairs. Tes phrases, correctement construites, émerveillent et séduisent ton entourage. Charmeur, doté d’un vocabulaire étrangement riche pour ton âge, tu t’efforces toujours de trouver le mot juste. C’est alors que tu te fais magicien. Quand tu mérites d’être grondé et sanctionné, tu sais argumenter et négocier et tu réussis souvent à échapper à la frustration de la punition. Petit à petit, tu prends une place de choix entre tes parents, littéralement subjugués par ce bout de chou doté d’un tel langage et capable d’une telle présence dans la relation. Tu es également très réactif aux odeurs, aux bruits, au toucher, à la douleur et, surtout, à la frustration. Tu n’apprécies guère la contradiction et tu as sans cesse besoin d’explications et de sens pour accepter de collaborer aux tâches du foyer. Pour cette raison, nombreux sont ceux qui te nomment «monsieur je sais tout», car tes innombrables pourquoi? précèdent inlassablement chacune de tes actions. Ton niveau d’énergie est élevé et tu peux te concentrer très longtemps sur une activité qui t’intéresse. En revanche, quand tu es lassé par une tâche, tu peux soudain te montrer remuant et agité, parfois jusqu’à l’hyperactivité.

L’arrivée dans la jungle…

Vient le temps de la maternelle. Du haut de tes trois ans, tu t’engages avec beaucoup d'espoir sur le chemin de la socialisation, mais, hélas, tu découvres vite que cet environnement n’est pas adapté à tes besoins. L’école te paraît si étriquée, si répétitive, si ennuyeuse! Les enfants de ton âge te semblent bizarres, serviles et inconsistants. Les adultes te rabâchent toujours les mêmes questions, te proposent sans cesse les mêmes tâches, les mêmes rituels… Ne se souviennent-ils donc pas qu’hier, avant-hier, avant avant-hier, ils te répétaient déjà la même histoire éculée? Ce trop petit monde te paraît alors austère, maussade et insipide. Malgré - ou à cause - de la foule d’enfants qui le peuplent, et en dépit de ses multiples jeux et activités, il t’accable.

Tu deviens alors méfiant, tu te sens incompris et tu te mets à t’isoler. Tu ne parles plus à personne, puisque personne ne parle ta langue. Tu fais peut-être semblant d’écouter, mais, pour tromper l’ennui, tu t’évades, tu vas retrouver les richesses ton univers imaginaire. Tes centres d’intérêts sont vite perçus comme singuliers, bizarres, voire inquiétants : un enfant normal ne se préoccupe pas à ce point des dimensions et du fonctionnement de l’univers, des propriétés des planètes, des détails de la préhistoire ou des enjeux de l’écologie. Les questions existentielles t’obnubilent, pendant que les autres garçons et filles de ton âge courent

Page 177: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

177

après un ballon, sautent à la corde, jouent à la marelle ou se bagarrent pour un tricycle…

Ton attitude et tes résultats à l’école sont pour le moins déconcertants : soit tu ne viens jamais à bout de ton travail, parce que tu es perfectionniste et que tu refuses de le bâcler pour finir dans les délais impartis, soit tu ‘l’exécutes’ en un rien de temps, puis le ratures, le biffes, le tritures et le défigures, tant il t’a fallu ronger ton frein avant l’arrivée de la maîtresse. Bref, il n’est pas souvent conforme aux exigences et aux normes scolaires…

Dangereusement sous-alimenté par ton environnement éducatif, tu décides alors de grandir vite, le plus vite possible et par tous les moyens, pour – crois-tu – échapper enfin à l’école. Et là, tu mets à contribution ta famille, tes voisins, tes copains, le monde entier. Oui, tu remues ciel et terre pour dominer la lecture, sachant qu’elle est à portée de ta main puisque tu maîtrises l’alphabet depuis l’âge de trois ans ! Et voilà que tu commences à syllaber, de plus en plus et de plus en plus vite, et, finalement, à lire. L’univers cesse alors d’être muet, aveugle et sourd, il s’ouvre à toi dans son immensité : ta vie de lecteur vorace commence…

La vie dans la jungle

Maintenant que tu sais lire, tu vois l’école sous un autre jour. La steppe fastidieuse se mue en un terrain de chasse fastueux pour le prédateur de livres que tu es devenu. Tu passes ton temps dans le coin lecture, et, contrairement aux autres enfants qui se saisissent de tous les bouquins en moins d’un quart d’heure, tu choisis soigneusement le tien. Tu te l’appropries scrupuleusement, le cher compagnon qui te fera rêver et t’échapper de la réalité pour rejoindre ton monde, celui de l’imaginaire et du savoir. Tu ne l’abandonnes pas avant d’en avoir fait le tour complet, tu ne le relâches que lorsque plus une ligne, plus un mot, n’ont de secrets pour toi.

Tes copains, alors, te trouvent plutôt égoïste. Ils te traitent volontiers de ‘bébé’, tandis que les adultes te jugent immature, puisque tu refuses farouchement de prêter ta précieuse lecture. Ton intransigeance te suscite de l’opposition, te vaut pas mal de remarques désagréables et te fait nombre d’ennemis, mais n’est-ce là pas le prix à payer pour se nourrir quand on vit dans jungle?

En revanche, tu te lies d’amitié avec l’écrit. L'âge de l’exploration solitaire de la jungle de la vie est révolu : les livres, tous les livres, ces partenaires fidèles qui instruisent, comprennent, accompagnent et nourrissent si bien ta quête de sens et de savoir, ne te quitteront plus. Il se peut que cette forte appétence pour la lecture se voie à l’école ; elle risque cependant de passer inaperçue, car tu préfères souvent la discrétion à l’exhibition.

Ce sont pourtant les plus tapageurs qui s’en tireront le mieux : eux seuls seront écoutés, testés, détectés, considérés et pris en charge. Ceux-là pourront parfois bénéficier d’un saut de classe et passer au cours préparatoire dès l’âge de cinq ans. Les autres, les petites zébrettes le plus souvent, plus calmes et plus

Page 178: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

178

soumises, passeront inaperçues à la maternelle et devront ronger sagement leur frein avant de pouvoir enfin pâturer dans les savanes luxuriantes de la grande école.

Quoi qu’il en soit, la plupart des zébreaux se mêlent très vite aux conversations des adultes. Maîtrisant de mieux en mieux les noms et les idées, ils se risquent rapidement au maniement des jeux de mots et se dotent bientôt d’un sens de l’humour qui ne manque pas d’étonner leur entourage. Bref, c’est le temps de la naissance des zèbres en miniature !

École de la jungle ou jungle de l’école ?

Te voilà au C.P. Avec un peu de chance, tu as attiré l’attention sur toi par ton comportement singulier. Ton exubérante curiosité t’a valu d’être repéré pour ce que tu es : un petit bout aux aptitudes très particulières. Tu ne passes donc que deux ans à l’école maternelle. Les autres, hélas, devront atteindre l’âge standard et entreront au C.P à six ans, en lecteurs confirmés pour beaucoup. Les difficultés latentes vont alors éclater au grand jour.

Trop vite fini, ton travail manque du soin que l’adulte réclame et que seul l’effort soutenu que tes petits camarades sont contraints de fournir te permettrait de cultiver. Ta rapidité perturbe le rythme de la classe. Ta déroutante maîtrise de la lecture te dessert plus qu’elle ne t’aide… Plus proches de celles du maître que tu anticipes que de celles de ses petits apprentis que tu attends, tes capacités semblent déplacées. Tes dons incongrus ne sont pas toujours des cadeaux pour ton entourage ! Lecteur et calculateur trop rapide, trop habile, tu déranges, tu troubles, tu interpelles. Ton sens aigu de la justice te fait réagir avec une émotion souvent excessive et incontrôlée. Tu refuses les promesses non tenues, le rabâchage, l’attente muette, inerte et inepte à laquelle on te contraint.

Il arrive que ton mal-être soit remarqué. L’insistance de tes parents aboutit parfois à un bilan. Tu es donc identifié et tu peux alors fusionner C.P. et C.E.1. Ce changement de braquet dans ton cycle te permet alors de déployer des forces insoupçonnées, d'exercer enfin toutes tes aptitudes…

Quand un zébreau est ainsi découvert, à demi perdu dans sa brousse, il accepte toujours de prouver ce dont il est capable. Il a un besoin vital, en effet, d’être identifié, reconnu, admis, et de se savoir aimé pour ce qu’il est : un poulain sauvage pas si différent des autres, somme toute, à quelques magnifiques rayures près…

D’autant qu’un zèbre n’est pas zébré de la même façon partout. L’équilibre parfait des aptitudes n’existe pas. La plupart des zèbres, en effet, sont ‘dyssynchrones’29 : d’importantes dissonances entre une intelligence subtile,

29 Les Enfants surdoués ou la précocité embarrassante / Jean-Charles Terrassier. Éditions

Page 179: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

179

aiguë, flamboyante, et une immaturité affective, un apragmatisme plus ou moins prononcé, se télescopent parfois chez un enfant qui n’en peut mais. Trop souvent, ces décalages sont repérés et renvoyés au petit zèbre comme autant de graves incompétences scolaires : « tu sais peut-être lire, mais tu ne sais même pas lacer tes chaussures ! » L'écrit est alors fréquemment stigmatisé : le graphisme reste longtemps infantile, précipité et peu soigneux.

La plupart des zébreaux aiment écrire, mais sont de piètres calligraphes : trop vifs, ils sont fâchés avec l’écriture cursive et lui préfèrent souvent l’ordinateur, plus rapide. La main se traîne loin derrière la pensée et le soin exigé par l’école les ennuie profondément…

Pour eux, le fond prime la forme, et qu’importe le flacon ! Seulement voilà : la fonction de l’école est exactement inverse : pour former, elle informe, formule et formate. Pour arriver à ses fins, elle façonne. Elle se focalise sur l’aspect de la bouteille aux dépens de l’ivresse du sens. Contrairement au zèbre, à l’esprit indépendant, elle est très à cheval sur l’étiquette : elle privilégie la forme, plus saisissable, au détriment du fond, moins directement scolaire.

Après et hors l’école

Si l’école suffit généralement à étancher la soif de connaissance des enfants de leur âge, les petits zèbres, bien plus que d’autres, éprouvent le besoin d’investir leur temps libre dans une quête insatiable des savoirs. Les pâturages de ces seigneurs incontestés de la jungle des pourquoi ? débordent alors largement le cadre scolaire. C’est là, bien souvent, qu’ils expriment enfin leur vraie personnalité de têtes chercheuses. Mus par une inlassable curiosité, ils se mettent à toucher à tout, sans vraiment ne s’attacher à rien : ils enchaînent activité sur activité, mais réussissent rarement à s’ancrer dans la durée. Plus qu’une inconstance particulière, c’est leur extrême vivacité d’esprit qui leur donne rapidement le sentiment d’avoir fait le tour d’un apprentissage, le plus souvent après une ou deux années de pratique seulement. Seulement, un an, c’est très long pour un petit zèbre ! Ces abandons récurrents de ses engagements ne favorisent malheureusement pas son intégration sociale. Une fois repu, le zébreau abandonne le troupeau sans états d’âmes, peu soucieux de l’amputer d’un de ses membres, puisque il n’a généralement pas cherché à s’y faire une place active. Il révèle alors sa vraie nature, celle d’une créature à l’engagement plus individuel que collectif…

Les activités les plus investies dans la durée sont généralement celles qui impliquent difficultés et défis : échecs, plongée, modélisme, musique, etc. Elles ne sont alors plus vécues sur le mode de la répétition et de la redondance mais sur celui de l’exploration toujours possible. Les exercices collectifs sont souvent délaissés au profit de rencontres en petit groupe, où le

ESF (Paris) - 1° éd. 1981 - 4° éd. 1999 - 130 pages.

Page 180: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

180

choix du partenaire n’est pas fait en fonction de l’âge mais selon les niveaux de compétences.

Malheureusement, quand les zébreaux auront grandi, nombre d’entre eux n’auront comme seul partenaire que leur cher ordinateur, leur ‘ami’ fidèle, toujours prêt, sans exigences particulières, ne réclamant ni préparatifs ni engagement, n’ayant même pas besoin d’être rangé et disponible en un tournemain…

Carte d’identité du zébreau et du jeune zèbre

Nom : “monsieur je sais tout”, “l’intello”, “prof”…

Caractéristiques générales : curiosité dévorante, hypersensibilité, sens aigu de la justice, tempérament plutôt farouche.

Caractéristiques intellectuelles : excellente mémoire, étonnante capacité à comprendre et à assimiler des informations de toutes sortes de façon simultanée, fascination pour les nombres et les relations qu’ils entretiennent entre eux, attachement obsessionnel à des sujets liés aux savoirs fondamentaux : préhistoire, planètes, mythologie, volcans, ordinateur et internet...

Caractéristiques relationnelles : plus solitaire que solidaire, éprouve généralement des difficultés à intégrer un groupe, recherche la compagnie d’adultes ou de pairs plus âgés, suscite de façon intense l’intérêt (petit chef) ou le rejet (dénigrement, isolement).

Centres d’intérêts : lecteur pressé et inassouvi, il se nourrit volontiers de dictionnaires, d’encyclopédies, se passionne pour les origines de l’Homme, de l’univers et de la vie, se soucie particulièrement des grandes questions existentielles. Ses engouements sont souvent fugaces : il en cerne trop vite les contours.

Troubles psychologiques : insomnie, tics, énurésie, encoprésie, maladies psychosomatiques, troubles du comportement et de l’humeur, manque de confiance en soi, troubles identitaires.

Page 181: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

181

Témoignage d‘une maman d’un enfant dyspraxique

J. M- S.

Cette réflexion est à propos du cheminement scolaire d’un collégien puis d’un lycéen ayant ce qu’il est convenu d’appeler une spécificité handicapante de nature dyspraxique . Ce handicap aussi nommé « handicap invisible » demande non seulement au jeune une énergie et une combativité permanentes mais aussi à son entourage une détermination sans faille.

Pourtant le quotidien n’est pas exempt de découragement, d’incompréhension. Pour construire l’avenir social et de ce fait le parcours scolaire de notre enfant, bien qu’aidé par notre connaissance du milieu de l’enseignement, épaulé par un collège et un lycée compréhensifs il a fallu sans cesse trouver des solutions, des méthodes pour compenser les troubles spécifiques liés à la dyspraxie. Bien entendu à travers ce chemin scolaire c’est toute l’éducation dans sa globalité qui est envisagée. A chaque écueil ou à chaque avancée tous les parents savent combien il importe de recentrer les événements, les émotions et les ressentis dans une perspective de maturité et d’épanouissement. L’enjeu n’est pas uniquement d’accéder à un diplôme mais d’aider à construire une personnalité aboutie. C’est parce que le temps scolaire et l’énergie consacrés à l’apprentissage intellectuel sont si absorbants que pour nous parents le défi a été d’épauler sans cesse un enfant puis un adolescent volontaire et motivé.

Quelques spécificités propres au jeune dyspraxique créent bien des difficultés et déboires en milieu scolaire tels que :

- la désorganisation chronique jouxtée à la particularité du fonctionnement intellectuel,

- la fatigabilité et autres difficultés plus physiques, - et ce que nous pourrions nommer « l’inhibition » relationnelle.

La désorganisation chronique : Que cela provienne :

- d’oubli : cahiers, feuilles perdues, vêtements abandonnés etc. L’étourderie est un mot clé de la dyspraxie. Il induit énormément de nuisances matérielles et intellectuelles.

- de désordre : cartable - poubelle, confusion dans l’emploi du temps, manque de repères dans les locaux du collège, la non-anticipation pour apprendre et faire son travail de classe.

Page 182: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

182

- d’une maladresse conduisant à la perte ou la destruction des outils de travail : trousse et objets de travail perdus ou cassés, livres abîmés, cornés, salis etc.

- de chutes causées par le poids du cartable et du sac de sport, exemple : en 6ème, dents de devant cassées avec vilain choc frontal pleine face, mais aussi dérapages variés et multiples dans les escaliers : vêtements traînant mal rangés hors du sac, lacets défaits. Petits avatars de bleus et plaies en toutes circonstances.

- de l’illisibilité de l’écriture, de l’incapacité physique à écrire (que l’on comprenne ce handicap comme un désordre d’ordre neurologique, psychomoteur, de troubles de l’intégration sensorielle etc.) en découlent toutes les aberrations inimaginables : Dysorthographie- Perte fréquente du sens de la phrase, recopiée ou produite, lors de l’élaboration du geste de l’écrit.

Prises de notes impossibles ou inutilisables, copies illisibles, compensation de toutes sortes de manières, incapacité à tenir correctement un cahier de texte : consignes non écrites, dates de rendu des devoirs non indiquées, mélange des jours etc.….

La difficulté à écrire s’accentue avec le rythme qui devient au fur et à mesure de la scolarité de plus en plus rapide. Ainsi pour essayer d’écrire vite notre enfant s’était inventé une sorte de sténo personnelle en supprimant des lettres, une sur trois, cela était non seulement peu efficace mais a rajouté des aberrations orthographiques à celles déjà présentes.

- La gestion impossible des classeurs ne tenant pas qu’au fait de leur taille, de leur nombre. Tout est source de confusion : les feuilles s’arrachant, les intercalaires non exploités (trier est difficile pour le jeune dyspraxique), le collage des photocopiés, le recopiage des cours à l’ordinateur. Même se pincer durement et régulièrement les doigts dans les anneaux (le geste n’est pas toujours synchronisé avec l’intention !!!) rend le classeur ingérable.

- Le mélange des principes méthodologiques : ce qui est demandé comme attitude en histoire : par exemple se documenter et mémoriser les mots clés n’est pas forcément identique en anglais avec des exercices à trous, à caractères répétitifs où l’enfant ne comprend pas ce qu’il faut faire.

Page 183: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

183

- De la difficulté à comprendre, à retenir des informations dans le bruit et l’agitation de la classe : lors de travail par groupe de 4 à 6 élèves retournant les tables, la manipulation et l’installation suffit à déconnecter l’attention du travail.

- De l’exigence de cohérence « morale », exemple : signer le règlement intérieur avec comme règles légitimes la courtoisie et le respect entre élèves et professeurs laissait très perplexe notre jeune collégien quand des attitudes émotionnelles d’adultes : énervement, hostilité et même harcèlement allaient en opposition avec les exigences de correction. Idem quand des élèves se comportant mal et reconnus comme des fauteurs de troubles étaient excusés car « bons élèves » C’était plus que pour d’autres enfants, très déstructurant et perturbant et désorganisait aussi le bon déroulement de la scolarité.

Mais aussi

- De la particularité de la construction du « langage intérieur » donnant l’impression de ce que je nomme « pensée qui s’effiloche et mémoire mitée » : des idées du coq à l’âne et des impropriétés, des mélanges un peu étranges de connaissances pourtant par ailleurs acquises, des ruptures d’argumentation etc.….

- Utilisation de la mémoire comme outil de référence car écrivant difficilement le jeune retient tout par « souvenir du cours » donc aspect très fallacieux et peu fiable car mémoire engorgée. Relier les informations aux livres de cours.

- Engendre aussi des déconvenues car les cours des enseignants ne suivent pas toujours ceux des ouvrages scolaires et lors des contrôles attendent les mots clés important issus de leur cours.

- Et surtout, ce qui spontanément commence à être associé à la dyspraxie quand on la signale : la difficulté à se concentrer. En effet, de manière extrêmement schématique on peut caractériser la dyspraxie comme l’impossibilité d’entreprendre deux gestes, deux actions, ou plusieurs en même temps : qu’il s’agisse de tracer un trait et tenir le double décimètre ou d’écouter en même temps et suivre les déplacements d’autres élèves dans la classe, ou de prendre des notes et regarder en même temps les explications sur le tableau. On observera tous les efforts du jeune dyspraxique pour soutenir son attention au détriment du sens du cours. On comprendra son brio intellectuel à l’oral sans avoir à écrire sa démonstration donc à gérer les gestes multiples et sophistiqués que suppose « l’acte scriptural ».

Page 184: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

184

Mais on entendra aussi cette difficulté à se concentrer comme une résultante de ce qui pourrait se visualiser comme « fonctionner en circuit ouvert ». L’information bien qu’arrivant n’est pas forcément traitée, analysée. Qu’il s’agisse d’informations d’ordre physique tel que demeurer devant le robinet ouvert les mains offertes devant l’eau, incapable de poursuivre l’acte de se laver les mains, ceci pour les plus jeunes notamment. Mais aussi dans cette perspective d’actes inachevés, inaboutis on peut de même lors de l’organisation d’une idée, de son début d’argumentation voir le jeune dyspraxique perdre totalement le fil de son discours. Notre enfant résume cette fuite qui désorganise tout plan et organisation intellectuelle à l’image d’un bouquet de ballon de baudruche que l’on tient fermement serré. En prendre un, c’est non seulement risquer de le faire s’envoler mais si on le garde avec son fil, risquer de voir s’envoler tous les autres.

A ces constantes matérielles ou intellectuelles, nous parents avons du mettre un protocole de surveillance et d’entraînement ou de compensation :

- Sur le plan matériel : vérification et nettoyage du cartable (tous les jours puis toutes les semaines), renouvellement permanent et prévu du petit matériel : compas, règles (les deux premières années presque tous les mois) et rappel discret mais présent à l’adolescence.

- Sur le plan des documents de cours : systématiquement reprendre par ordinateur les cours ; ce qui n’est pas évident quand il en manque la moitié, faire le lien avec le cours en classe et le cours dans le livre : ce qui n’est pas toujours possible.

- En répétant pour les intégrer les règles de chargement du cartable : repérer avec une mémoire gestuelle, ce qui est très difficile pour un dyspraxique : à ta main gauche dans pochette devant tu as la trousse etc. . Utiliser des astuces de couleurs : couvrir le livre et le cahier de la même couleur matière par matière et garder ces codes toute la scolarité collège voire lycée.

- En refusant les classeurs, quitte à déranger l’ordre établi, en privilégiant des petits cahiers, collant sur double page les grandes photocopies. (plus facile à manipuler et moins de problème d’espace).

- En vérifiant la circulation d’imprimés administratifs comme : la quittance de la cantine (toujours perdue ou oubliée), les formulaires d’inscriptions, les fiches navettes, les dossiers d’inscription aux examens etc.…

Page 185: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

185

- En contrôlant discrètement à chaque arrivée dans la voiture la présence du manteau, du cartable et du sac de sport (ceci très longtemps jusqu’à ce que l’adolescent fasse cette vérification lui-même en réflexe).

- En ayant répété la montée des escaliers à la maison pour ne plus vaciller avec le barda sur le dos, être sensible lors de la croissance à ce changement du centre de gravité.

- Dans les jeunes classes du collège : une classe fixe avec un casier, avec en double les livres serait un soulagement surtout pour les collégiens de 6éme, pliant sous le poids du cartable et se déplaçant selon les besoins d’étage en étage par exemple salle de physique, de musique, lieu de sport, avec « le cartable-boulet ».

- En bref incarner matériellement les supports pédagogiques, cerner le déroulement temporel de la journée et de la semaine, faire un planning de travail, développer une meilleure appropriation de l’espace dans l’établissement ; bien repérer le chemin cantine, salle de permanence, infirmerie, CDI ceci pour le tout premier mois.

- Quand il y a obligation de se déplacer : penser à donner un temps plus important pour se rendre sur le lieu. Profitable aussi pour tous, cela crée de l’énervement de déambuler ainsi à la va- vite. Etre magnanime quand il y a retard, au lieu de compliquer encore : ainsi être en retard conduit à aller chercher un billet d’excuse et risquer de perdre l’accès au cours. L’enfant dyspraxique est très scrupuleux des règlements et panique quand il est en faute ou incapable d’être à l’heure.

- En ayant au collège, une matière détachée au CNED : le français, matière fondamentale ou sans concentration il n’y avait aucun résultat. Ce cours fait à la maison utilisant non seulement l’ordinateur mais l’oral.

- Demander et obtenir la liste des téléphones des camarades de classe (quand malade ou en rendez-vous médicaux ou rééducation il est indispensable d’avoir les cours au moment de la semaine où ils ont été fait), pour organiser les photocopies de leurs prises de notes. Utile pour lutter contre cette désorganisation mais aussi on le verra plus loin pour favoriser les contacts relationnels.

- Quelques enseignants d’eux-mêmes ont procuré les polycopiés de leurs cours avant ou après ce dernier, permettant une réelle attention et concentration en cours (ainsi en physique en terminale S).

Page 186: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

186

- Une solution qui donnerait aussi un caractère solidaire à ce soutien serait pour chaque matière de constituer un cahier collectif constitué des photocopies des prises de notes de camarades.

- Et bien sûr beaucoup d’autres attitudes permettant d’intégrer les particularités qui désorganisent le travail scolaire comme rangement ritualisé du bureau et étagères. Cela semble ordinaire car beaucoup de jeunes et de parents rencontrent cette désorganisation, ici c’est à une échelle supérieure. Montres perdues ou volées, calculatrice idem, bonnet et manteau, livres le sont dans une proportion importante et régulière. A titre de représentation : en terminale bien que sachant la disposition particulière à la non-organisation, confiant à ce que nous croyions acquis comme protocole d’archivage des cours, de manière fortuite ( ménage de la chambre avec accord du jeune) en soulevant la masse d’un énorme classeur, j’ai eu un étrange pincement au cœur devant la masse en vrac des cours, non triés, non recopiés, pris tels quels du cartable au rayon stockage. Réponse de l’intéressé « de toute manière je n’arrive même pas à me relire, je gratte du cours pour ne pas avoir de remarques ni des profs ni des copains. » Ni insolence ni dépit juste un constat.

Il y a double culture pour le dyspraxique : ce qu’il est censé faire comme les autres en l’occurrence copier du cours et l’usage qu’il peut en faire et d’autre part son approche intellectuelle basée sur une mémoire inouïe mais malgré tout chancelante. Il doit s’adapter à la manière d’être en cours en études, mais jamais véritablement on s’adapte à sa manière à lui d’apprendre, de retenir et de redistribuer ses acquis.

Cette désorganisation finit par trouver des solutions qui améliorent un peu l’aspect matériel des choses mais pour la partie plus spécifique « intellectuelle » de la vie scolaire il y a encore à penser.

- Prise de conscience par l’élève, les parents et bien entendu les enseignants, de la nécessité d’oraliser : apprendre à haute voix les cours et avec support gestuel marcher, se balancer etc. et de subvocaliser pour l’élève en prenant des notes : donc ne pas être ou hostile ou septique si l’élève chuchote légèrement ou écrit en mimant les mots. Ainsi de l’utilisation dominante du cerveau droit en fonctionnement analogie, impulsion, intuition, émotion donnant une pensée « qui s’effiloche » (pense du coq à l’âne, une mémoire mitée : « je sais mais je ne trouve plus où c’est ») il faut fonctionner avec le cerveau gauche analytique. On retrouvera au sein des travaux d’éminents chercheurs en pédagogie cognitive, le rôle et la mise en fonction du faisceau arqué favorisant la communication cerveau droit/cerveau gauche.

Page 187: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

187

- La nécessité vitale pour arriver à construire une pensée cohérente et une mémoire solide d’expliquer avec minutie et ensuite analyser. (à l’ancienne manière et non sous forme formatée de questionnaires.)

- Non utilisation de documents en colonnes, d’exercices à trous car l’élève dyspraxique se perd dans les processus de rendu de connaissance sous cette forme. Il est efficace quand il explique ce qu’il a assimilé et organisé selon un plan personnel et non standard.

- Des textes sans excitations couleurs bigarrées, vives, sans composition en colonnes, avec de rajouts partout. Il semble qu’on retrouve actuellement des ouvrages plus clairs, plus simples.

- Des photocopiés de qualité , lisibles et propres (ce n’est pas toujours le cas). Bref tout ce qui évite confusion, amalgame, avec trop de stimuli. On peut aussi imaginer des blancs permettant des rajouts de notes de l’élève, bref tout un support pédagogique à expérimenter.

- Des textes composés sans se perdre dans l’espace de la feuille. Exemple : des documents de géographie avec texte sur des feuilles recto-verso qui ne sont pas évidentes à manipuler, avec aussi des compositions éclatées, dispatchées etc.

- L’utilisation de l’ordinateur serait la solution à l’écriture illisible, à la prise de notes, à l’organisation ensuite du travail à la maison. Ceci sous condition de subvocaliser afin de ne pas rester en fonctionnement cerveau droit au risque de fragilité psychique, (observation de certains médecins scolaires). Il existe un modèle « d’ordinateur-cahier » « alphasmart » qui est de petite taille, autonomie avec piles de 200 h, élèves, ergothérapeutes semblent le recommander, mais il n’est pas adapté pour le niveau collège et lycée.

Dictaphone et « transcripteur » de l’oral dans l’ordinateur via un programme spécifique seraient des outils utiles.

- Savoir donner les consignes une par une , attendre que l’élève absorbe et comprenne la première avant de donner la seconde. Par écrit les dissocier en plusieurs phrases. Ceci surtout pour les plus jeunes.

- Laisser le temps de répondre en cours. Souvent le jeune dyspraxique sait, mais le temps qu’il recentre ses idées, fabrique dans sa tête la phrase, d’autres donnent la réponse. Donc quand il

Page 188: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

188

est interrogé, ni impatience et moqueries tolérées. Il n’est pas rare qu’il prenne un mot pour un autre avec le stress.

- Pour garder les idées et leur développement mettre très vite les mots clés et se connecter à des pans entiers de « case-mémoire » Travailler avec des plans types, avec des listes de connaissances afin d’éviter la fuite de toute connaissance vague ou mal intégrée. Pour exemple en Histoire : réciter tous les gouvernements entre 1870 et notre époque : nommer les numérotations des républiques et quand interviennent les gouvernements comme Etat Français ou gouvernement provisoire, les mémoriser fermement dans le déroulé comptable, sinon en condition d’examen, le stress fait perdre le fil des connaissances et tout se mélange, conduisant à écrire de vraies inepties. Prendre conscience des amalgames induits dans l’urgence à ne pas perdre les idées. Exemple pour agrémenter travail histoire au lieu d’écrire Sartre auteur des Mouches, puis Vercors celui du Silence de la Mer, on peut lire Sartre auteur de Vercors. De la même manière il y a aura confusion de sens entre les mots, impropriétés baroques donnant l’impression d’une pensée non seulement confuse mais proche de la stupidité. Pour les langues étrangères on verra aussi en situation de stress des confusions entre vocabulaire anglais et allemand, en mathématiques des lapsus d’écriture de signes etc. On pourrait comparer cette spécificité à ce que certains d’entre nous ont pu vivre quand ils ont expérimenté en ayant beaucoup travaillé le fameux « trou », où dans une spirale angoissante ils savaient où se situaient les connaissances, même de manière visuelle (en haut page de gauche première partie) et n’avaient que ce blanc, ce vide à proposer. Le jeune dyspraxique vit l’embouteillage, la mauvaise circulation de son savoir quand il est obligé d’écrire vite, sans subvocaliser, et quand l’enjeu émotionnel est éprouvant.

- Les cours particuliers, non seulement grèvent le budget mais génèrent d’autres complexités. Ils ne sont pas toujours en phase avec le cours et une sorte de tabou fait qu’on ne signale pas à l’enseignant « officiel » cette démarche.

- Une solution de tutorat faisant office de liaison pédagogique, avec un personnel formé, serait plus adaptée et plus démocratique. Quand un parent, un proche peut apporter cette aide pédagogique ou logistique tant mieux, mais une personne formée et référente serait bien utile au sein de l’établissement. On parle de nouveau métier comme celui d’assistant pédagogique . Cela va au-delà de ce qu’il est convenu d’appeler l’AVS, qui gère

Page 189: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

189

l’aspect matériel, quelquefois logistique devenant secrétaire. Ce métier entre le « réadaptateur » et « le traducteur pédagogique » serait en quelque sorte l’ergothérapeute de l’enseignement. Le témoignage et l’expérience de parents ayant fait office de soutien pourraient être utiles à l’élaboration concrète de cette activité en collaboration avec le corps professoral, administratif et de santé. Il permettrait au principe d’équité de devenir un outil pédagogique et éducatif. Organiser en permanence, réguler les désordres « scolaires », aménager souvent dans l’urgence des solutions faute d’avoir pu anticiper les difficultés, se former dans des matières si différentes et si vastes, découvrir des approches cognitives adaptées, finissent par faire du parent un super spécialiste de l’éducation. Certains de part leur propre parcours y sont plus à l’aise, plus aptes que d’autres mais tous y sont confrontés comme une nécessité vitale. Sans cette implication, la réussite scolaire du jeune dyspraxique est quasiment impossible aux vues de l’exigence de qualité et de quantité demandées.

Passer un examen est un challenge terrible qui lui demande non seulement les connaissances, les savoir-faire mais aussi les savoir-retrouver et les « savoir-ne-pas perdre ». Un principe d’équité demande une amélioration des modalités d’examens pour ces élèves studieux, curieux et cultivés.

- Redonner le fil directeur si à l’oral il perd le cours de son développement, ceci est très préjudiciable lors d’oral d’examen. Pour les oraux de français du bac, c’est notre jeune qui a donné les clés de son handicap à l’examinateur, en lui signalant que quelquefois il était arrêté non par ignorance ou confusion mais par une perte momentanée de sa pensée. Dans ce cas-là l’identification du handicap a permis de relancer grâce au plan présenté, le travail.

- Palier une mémoire qui peut se dérober. Pour les mêmes raisons en situation d’examen, il y a une grande fragilité du dyspraxique qui bien que connaissant la formule mathématique, ou le vocabulaire, la grammaire de la langue étrangère, les données historiques ou autres, les citations philosophiques etc.… n’arrive plus à trouver la réponse. Avoir le soutien du dictionnaire, d’une banque de données serait à réfléchir. Dans le stress, la fatigue, ce que l’on pourrait visualiser comme un embouteillage des chemins vers les lieux de stockage d’informations, donne la fausse impression d’ignorance. C’est très douloureux pour le jeune qui sait qu’il sait.

Page 190: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

190

Quand il y a maîtrise d’un savoir, d’un savoir-faire c’est absolument intégré et utilisable. Il faut du temps, une infinie patience, du répétitif et surtout que cela prenne sens de manière extrêmement globale. Si un élément du savoir manque ou ne semble servir à rien ou se relier difficilement à ce qui est déjà acquis, il y a une « paralysie » intellectuelle.

Finalement très analytique et très analogique le jeune dyspraxie peut acquérir une maîtrise intellectuelle profonde. Sans que cela soit une règle absolue, on sait le nombre impressionnant de jeunes dits précoces atteints de cette spécificité. Leur QI est souvent élevé, et on pose même la question concernant l’apparente faiblesse intellectuelle de certains à savoir si cela ne correspondrait pas à une « intelligence en friche » du fait de la non-utilisation de leur spécificité cognitive.

Dans des domaines qui ne sont pas pour eux évidents, quand le support de l’intégration sensorielle est utilisé pour apprendre, la capacité non seulement de comprendre mais d’utiliser les connaissances est étonnante.

Ainsi si la maîtrise de l’espace semble difficile à apprendre selon les normes cognitives scolaires : géométrie, géographie, dans la vie ordinaire je n’ai jamais vu le sens intuitif de l’espace faire défaut à notre enfant : repérage et emmagasinage d’un lieu sont parfait, pas d’erreur d’orientation, pas confusion d’un fait dans son contexte géographique, navigateur sur la mer émérite non seulement en utilisant les outils de navigation mais aussi un sens particulier de la nature : vent, impression visuelle, odorat etc..

L’utilisation des autres sens comme support cognitif est indispensable. Dans l’âge tendre du primaire, c’est ce qui a permis les apprentissages fondamentaux : associer tous les sens pour ainsi faire pénétrer l’acquis intellectuel : apprendre en marchant, en tournant ses leçons et en chantant, en sentant physiquement les mots. Les mots devant absolument s’incarner pour être retenus. Pas d’écriture avec nuances : adjectifs et adverbes, phrases complexes, figures de styles, etc. sans ce protocole charnel de la langue. Curieusement le langage mathématique et celui de la physique lui a été possible car enraciné dans des jeux d’enfant avec des manipulations très sensorielles : apprendre à compter avec des « playmobils » en inventant de jolies histoires, entendre les phénomènes physiques à travers le ressenti du corps et ensuite verbaliser, « mentaliser » conceptualiser. Une enfance au sein de la nature, auprès d’une fratrie suffisamment nombreuse pour être tonique et stimulante, des rencontres culturelles variées ont bien entendu favorisé cet éveil sensoriel et intellectuel. C’était une nécessité impérieuse que nous avons mis en œuvre avec autant de délicatesse que possible afin de ne pas transformer la vie de notre enfant en une perpétuelle séance

Page 191: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

191

de rééducation mais en objectif éducatif. Nous avons été portés par sa soif d’apprendre, sa curiosité naturelle, sa bonté et sa simplicité envers les autres, sa capacité à s’émerveiller. Le partage de l’univers plein d’imagination de cet enfant en le guidant vers le concret et le réel, en l’aidant à incarner ses rêves avec humour, a été et reste un régal.

Leur rapport au temps les conduit à être non seulement des narrateurs remarquables, alliant l’originalité de leur imaginaire à un goût prononcé des images et d’une approche sensitive du récit. Ce sont des décrypteurs plein de finesse des textes et des codes. Ils sont en général très investis dans le domaine de l’histoire aimant relier le déroulement des faits historiques à celui des mouvements philosophiques, économiques et artistiques de la période étudiée. Ils savent aussi manier les concepts les plus subtils de la morale voire de la théologie et sont passionnés par tout ce qui suppose non seulement une éthique mais une déontologie. Les rouages de la société les passionnent y compris ceux de la justice. Les domaines scientifiques s’ils ont été approché de la manière cognitive qui leur est spécifique les enthousiasment : astronomie, biologie, médecine.

Si leur compétence écrite les prive en l’état du passage des examens avec brio dans ces domaines si variés, c’est tout à fait dommage que notre société se prive de leur puissante honnêteté.

Notre mode de vérification et de notation des connaissances est tout à fait pénalisant pour le dyspraxique. Il suffit d’imaginer cette agitation permanente, cet affolement, ces dijonctages à ne pas suivre, à être perdu, à être maladroit, à tout mélanger pour ressentir la perte de confiance, de recentrage qui privent l’élève d’une partie de ses facultés avec tous ces parasitages permanents

C’est bien plus d’un allégement, d’un confort qu’il convient de comprendre mais d’une adaptation à mobiliser le sens de l’ordre qui est le sien qui suppose du temps, de la régularité, presque de la ritualisation, (au collège suis-je en semaine A ou B c’est déjà l’enfer !!!) La dyspraxie est en quelque sorte la maladie du lien.

Cela suppose une maturité de l’enseignant, qui n’a pas forcément de rapport avec l’âge mais plus avec une personnalité bien structurée sans raideur, inventive et curieuse, bienveillante, patiente et véritablement impliquée. Les jeunes dyspraxiques étant hyper sensibles à l’incohérence des adultes, à l’hypocrisie, même cachée sous une fausse courtoisie ou attention c’est en fait une pédagogie d’écoute, de respect, d’observation, de compétence et de curiosité qui les aide. La question qui devrait être celle de tout bon pédagogue est « Mais comment fonctionne donc ce gamin ? De quelle manière vais-je faire entrer la connaissance, le savoir-

Page 192: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

192

faire et comment établir la capacité de l’élève à l’exprimer que ce soit par écrit ou par oral ? »

Former les adultes à la dyspraxie éviterait les jugements simplistes voire réducteurs de négligence, de maladresse, d’étourderie, de paresse, d’originalité, et quelquefois même de provocation. Ainsi on n’entendrait plus ou ne lirait plus : manque de rigueur, travail bâclé et sale, organisation défaillante et négligence, de méthode non maîtrisée, d’investissement insuffisant. Tout qui peut apparaître comme vrai mais qui sont les manifestations de la spécificité physique et psychique de l’élève dyspraxique à laquelle on peut apporter une très grande amélioration en utilisant avec bon sens tout ce qui rassure, régule, précise le travail scolaire. Il ne s’agit pas non plus de faire de comportements de cette nature un principe de réversibilité, de manière simpliste : tout maladroit n’est pas dyspraxique et toute paresse n’induit pas forcément cette pathologie.

On note la dualité du corps enseignant désireux d’avancer vers des solutions « modernes » et en même temps très suspicieux qu’il s’agisse d’outils matériels comme l’ordinateur ou d’autres aménagements. Sans avoir l’audace de penser que : l’adage « apprendre dans la douleur » serait de mise ou de l’obligation d’un « dressage intellectuel » ou d’une « initiation par l’effort » soient des axes inébranlables de l’éducation scolaire, on peut cependant s’ouvrir à la réflexion. Que dire d’apprendre surtout avec douleur, effort et formatage pour un enfant ? Que dire de l’aisance, de la facilité, du plaisir, de la douceur du savoir ? Pour les parents il ne s’agit pas d’une demande de mignardise, de dilettantisme, beaucoup s’interrogent sur leur propre exigence à tant demander à leur enfant. Mais tous sont devant l’évidence de la demande personnelle d’avancer en études émanant de ces jeunes intelligents et décidés. On nous a dit que les examens ne pourraient être à la carte pour nos jeunes, qu’il s’agit d’un principe institutionnel quasi inaliénable. Ils ne demandent pas de privilèges mais de l’équité. A l’identique du permis de conduire qui adapte l’outil de circulation à la spécificité handicapante il devrait être possible d’établir des protocoles d’examen et de scolarité qui autorisent la circulation dans le monde socioculturel de ces personnes.

La possibilité du tiers-temps n’est pas évidente à mettre en place quotidiennement. Dans notre société la vitesse et la rapidité sont très présentes, or en cours, lors du contrôle continu pour le jeune dyspraxique cette exigence devient ingérable. Il est d’autant plus lent qu’il est bousculé et précipité. Sa pensée peut même être très vive, fulgurante c’est la mise en œuvre qui est ralentie. Rarement, il peut avoir un temps de travail allégé : quelques enseignants de leur propre chef proposent

Page 193: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

193

moins d’exercices. S’il peut avoir plus de temps lors des examens pour rédiger, se relire du fait du phénomène de sa fatigabilité c’est une aide à double tranchant. Il sort vidé de ces épreuves si longues où il a peine le temps de se reprendre pour recommencer à composer. C’est une grande inquiétude pour lui : « vais-je tenir ? » et il peut se sentir coupable et dérouté face à cette aide qu’il n’arrive pas à utiliser pleinement. Il est à noter la bienveillance des services cantine qui lui préparent un panier- repas pour au moins avoir le temps de manger. Dans un climat serein, il n’est pas toujours dans ce cercle infernal où il se décourage et échoue, ces petites attentions lui redonnent foi en ses « possibles ».

Pour une meilleure organisation du temps scolaire, de la « manière » scolaire on devrait sans que cela soit trop préjudiciable supprimer, alléger les matières « boulet » technologie avec manipulation, dessin ou musique et activité sportive en l’état actuel. On peut envisager une demande d’un exposé culturel dans ces domaines afin de préserver l’égalité entre les élèves. On peut aussi proposer sans arriver à un enseignement à la carte un peu de souplesse : ainsi si l’apprentissage d’une langue s’avère impossible (ce que l’on sait généralement en cours d’année) avoir la possibilité de changer de langue ou de permuter par exemple avec de l’informatique.

L’expérience du TPE Travail Personnel Encadré au lycée est tout à fait intéressante comme mode d’examen. Les protocoles de mise en œuvre de la documentation, de l’élaboration du support au choix du mémoire, cd rom, DVD, livret, etc.…, les modalités de notation : livre de bord, fiche de synthèse, mémoire, et soutenance sont vraiment très adaptées. Pour notre enfant cela lui a permis d’être rigoureux, de cibler ses objectifs, d’apprendre à expliquer oralement son travail (y compris en travaillant sur la position de son corps en répétant en situation). Il a pris un réel plaisir à élaborer un projet où toutes ses chances d’être capable étaient favorisées. Qu’il s’agisse d’un travail en équipe a été certes compliqué mais pas plus que pour d’autres. Un travail de cette nature et en individuel serait tout à fait indiqué pour un jeune dyspraxique. Il peut travailler à son rythme. Il ne se sent pas en porte-à-faux quand il trouve des aides humaines pour combler ses ignorances puisque cela fait partie du protocole, il peut ouvrir largement sa documentation. Le TPE fonctionne en englobant sur deux années : deux projets, trois matières par exemple pour les scientifiques mathématiques, physique et biologie. Cela les rend en phase avec les études supérieures à venir et surtout le monde du travail où toutes les compétences sont reliées.

Utiliser leur prodigieuse capacité à se cultiver, à s’informer, à réfléchir dans des domaines les plus divers : histoire, géographie, ethnologie, paléontologie, anthropologie, technologie, astronomie,

Page 194: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

194

biologie, littérature, philosophie, langues, etc. Non seulement autodidactes mais souvent aussi érudits, ils sont créatifs et novateurs.

Il faut compter avec leur talent à cultiver leur imaginaire qui est puissant. Le monde du théâtre, des animations, des jeux de rôle leur permet de mettre en scène leur originalité.

Ce sont aussi des êtres de la parole et dans les ateliers de plaidoirie, les débats philosophiques ils sont épanouis et très stimulants pour les autres.

Ils sont animés d’un extraordinaire don d’empathie et épris de justice mais ce ne sont pas des personnes violentes ou vindicatives et ils sont des médiateurs efficaces. On trouvera en eux d’autres dispositions spécifiques et utiles à la société.

Cette non-organisation qui infiltre tous les domaines de la vie scolaire peut être comprise et jugulée. Désordre dysorthographique par exemple : A quoi bon noter ce type de travail l’humiliation et le découragement sont au bout. Dans le primaire on voit l’émergence de nouvelles dispositions de contrôle comme redistribution des mots difficiles sous forme de liste, hors contexte « linéaire » du texte dicté à haute voix. Mais d’autres solutions de vérification des acquis restent envisageables dans ce domaine très sensible. Les rééducations de l’orthographe deviennent de plus en plus complexes, ainsi les orthophonistes se forment à la dynamique très efficace de la neuropsychologie et on peut aussi envisager que les enseignants du français suivent une formation de ce type. Pour un enfant dyspraxique une orthographe réflexe « code de la route » ça ne marche pas. Même des règles apparemment simples comme la notion de singulier et de pluriel sont très alambiquées dans son esprit. Exemple la populations car dans sa tête population est un groupe de personnes donc nombreuses et la foule avancent idem. Une reconnaissance de leur singularisme permet de rééduquer efficacement leur défaillance.

Le dyspraxique est extrêmement fin et subtil avec des nuances, certains diront « d’ergoteur compliqué ». C’est ce qui a permis à notre fils de réussir en mathématiques parce que c’est un code, un langage et qu’il l’a appris avec son père et ses sœurs plus âgées tous scientifiques (mathématiques, physique, biologie, informatique, robotique) autrement qu’à l’école.

Ce ne sont que des pistes à comprendre à rendre opérationnelles. Bien entendu j’ai volontairement omis beaucoup de faits, d’anecdotes car il s’agit d’un état permanent et on finit par fonctionner essentiellement comme « assistant pédagogique ». Tout l’art étant de

Page 195: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

195

rendre responsable le jeune, autonome avec ce qui lui est propre et de comprendre ses difficultés et d’y faire face avec des solutions adaptées.

Compenser est hélas souvent impossible voire insurmontable avec la rigidité de notre système scolaire. Les bonnes volontés, les idées pour résoudre telle ou telle difficulté sont réelles mais il y a tant à faire.

Des troubles physiques très divers leur compliquent le temps scolaire comme dans la vie « ordinaire ». Autant que la problématique de la désorganisation chronique

La fatigabilité du jeune est impressionnante. Il semble quelquefois se débrancher littéralement. On peut s’en rendre compte en observant sa posture « semi-avachie ». Les psychomotriciens, les ergothérapeutes ont des réponses très techniques ainsi que les ostéopathes et autres approches neurologiques. Cette posture créant bien des malentendus avec l’enseignant qui y voie un manque de respect et de motivation.

En classe, en milieu scolaire, cela se traduit aussi par des absences (regard dans le vague), semi- engourdissement et même quelquefois petit somme.

Pour ne pas basculer dans cette torpeur mon garçon avait trouvé le truc de tripoter un bout de crayon créant de manière artificielle un tic. Certains donc tripotent, titouillent, bidouillent, mâchouillent bref irritent leur entourage.

La fragilité conduit à moins résister aux diverses petites épidémies liées à la vie en collectivité. La moindre grippe peut faire perdre pied car manquer les cours accentue les difficultés à être dans le rythme. Mais d’autres troubles moins évidents comme des nausées, des vertiges, des tremblements, des crampes, des courbatures, des points soudainement aigus de douleur, accompagnent la croissance. Quelques petits tracas pour certains comme ne pas réguler correctement au froid mais surtout au chaud les mettent dans des situations parfois baroques : claquer des dents et ne pas se rendre compte qu’il est urgent de se couvrir et idem être blême de chaleur sans boire ou se découvrir : insolation et coup de chaleur sont fréquents.

La fatigabilité s’accompagne aussi d’une mauvaise gestion des signaux de la douleur. Ainsi les abcès dentaires ne sont découverts qu’après des complications. Nous avons eu aussi une frayeur lors d’une crise d’appendicite très forte où il a juste demandé après deux jours : « est-ce que c’est normal d’avoir bien mal au ventre comme ça ? », il a frisé la péritonite. De la même manière : entorse du genou

Page 196: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

196

négligée durant deux jours parce qu’il nous a expliqué « j’ai si souvent mal de partout que j’ai pris l’habitude d’attendre que cela passe ».

Pour les adultes qui les suivent en milieu scolaire il faut savoir qu’un teint vert, des dents bien serrées racontent plus que des larmes ou des cris. Si d’ailleurs il y a larmes ou cris il faut s’inquiéter car ce ne sont pas des enfants douillets. Ils sont reconnus comme aimables, courageux (ceci étant vérifié par de nombreux parents).

Ces enfants sont si souvent voire constamment tombés, choqués, pincés, égratignés, tuméfiés dans toutes sortes de circonstances (nous avons connu le passage à travers la porte en verre, les chutes en tout lieu : au cinéma, sur la digue, dans la rue…), de toute nature : blessures étranges (paille dans l’œil, épine aussi, coupure sévère avec couteau suisse en épluchant une pomme etc.) qu’ils ne se rendent pas non plus compte de la gravité de ce qui leur arrive. Ce qui est spécifique c’est la fréquence de ces avatars. Mais le corps traduit dans des actes simples ses maladresses : manger de manière totalement élégante n’arrive qu’avec les années, au collège le temps cantine ne met pas en valeur cette disposition. Souvent passant un temps plus important à contrôler leurs gestes ils ne mangent pas suffisamment, certaines textures surtout chez les plus jeunes leur posent problème et là encore ne favorisent pas une bonne alimentation générant une fatigue évidente.

Les activités supposant déshabillage posent aussi problème, longtemps les jambes s’emmêlent dans les pattes des pantalons, les manches ne passent pas etc.

Les sorties extrascolaires avec les situations inattendues demandent doigté et vigilance en ce qui concerne la surveillance : fatigué le jeune peut s’asseoir un instant et perdre le groupe, déconcentré il peut traverser sans faire attention, trop stimulé il n’arrive plus à se concentrer et le processus de la fatigue l’envahit.

D’autres bizarreries les habitent comme : balancement réguliers des jambes, crispation des doigts, on peut aussi parler pour certains du bégaiement, de la difficulté d’élocution. Ceci requiert sans cesse concentration sur le geste, la posture et s’avère dévoreur de leur énergie. D’autres souffrent longtemps d’énurésie avec toutes les hontes et humiliations qu’endurent à ce sujet certains avec selon le degré de brûlure de la peau une gène à la marche. Les troubles de la vision augmentent aussi leur fatigabilité en plus des déboires que cela suscite. Des difficultés sensorielles variées notamment en ce qui concerne le tactile leur causent bien des avatars et doivent être repérées. Bref les

Page 197: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

197

troubles sont infinis et pernicieux générant cet état chronique de fatigue et de vulnérabilité.

Le paradoxe et pas des moindres est leur courage et leur ré sistance à toutes ces misères du corps, qui sont quelquefois fluctuantes donc encore plus déroutantes.

L’infirmière de l’établissement doit savoir comment poser les questions et ne pas risquer de renvoyer un collégien estropié en cours devant son laconique « ça va aller ». Contrairement aux apparences, ils ne sont pas surprotégés car bien souvent on ne mesure pas du tout les tracas physiques qui sont les leurs car ils ne se plaignent quasiment jamais.

Pour exemple bien qu’en terminale, notre enfant a reçu le retour de la porte de couloir (type coupe feu), en plein front lui faisant une belle entaille et juste préoccupé d’être en cours à l’heure car contrôle, il s’est contenté de presser la plaie et d’éviter de mettre du sang sur la copie. Un peu étourdi mais sans se soucier du choc tellement habitué à ce type de rencontre brutale ! Ce sont les camarades, de solides gaillards, qui se sont inquiétés !!!

Ce fonctionnement corporel se traduit directement dans certaines matières : En sport les performances directement liées aux possibilités du jeune dyspraxique sont aléatoires.

En effet, quand après des efforts répétitifs invraisemblables pour savoir nager (au-delà de la centaine d’heures de leçons particulières, faire du vélo (largement plus tard que la moyenne des enfants), courir sans trébucher (un enfant dyspraxique qui court ressemble assez à un pantin désarticulé) il semble avoir acquis certains gestes ; tout peut être remis en question sans véritable explication. Ce manque de fiabilité peut s’avérer dangereuse. Pour exemple, bien que sachant tout à fait skier, avec un apprentissage besogneux (genou abîmé, chutes spectaculaires, bizarreries de toutes sortes rendant le moniteur très perplexe) en pleine descente le jeune pris de crampes violentes a du se faire assister par les secouristes. D’autres témoignages d’enfants nageant et devenant incapables tout à coup de continuer les gestes attestent des précautions constantes à avoir.

Par contre quand finalement lorsque les acquis après maints avatars sont stables ils finissent par le demeurer. C’est donc une appréciation à long terme qu’il faut établir et continuer à encourager toutes les découvertes sportives. Oraliser le geste leur permet de l’intégrer et de le mémoriser.

On commence à mieux percevoir leur difficulté d’équilibre, sensation nauséeuse quand les gestes sont saccadés, vertige en situation de relief

Page 198: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

198

(escalade, poutre) impression du sol qui se dérobe ou glisse sous les pieds.

Lors des jeux de balle ou de ballon, la difficulté à accorder l’appréhension du point d’impact de l’objet et la non possibilité de l’attraper les caractérise. Notre enfant avait cette phrase « je sais où le ballon va arriver mais mes jambes ne peuvent être là à ce moment. ». L’espace leur pose problème et la vitesse d’exécution aussi. La voile ou l’équitation, même l’aviron, sont souvent des pôles où ils expriment le plaisir physique de l’effort associé aux sensations sensorielles, activités pratiquées au sein des loisirs plutôt qu’au collège ou au lycée.

Quand ils sont capables de pratiquer un sport, l’esprit compétitif n’est généralement pas le leur. Dans les sports, ils sont peu populaires sur les aires de basket, de foot ou autre sport collectif toutefois ce sont des arbitres excellents très à cheval sur les règles et l’esprit de courtoisie ainsi que spectateurs avertis. Ces talents aussi participent à la vie du sport. Il importe de savoir que le dyspraxique se fatigue vite et ne se concentre pas facilement et que cela peut se traduire en difficulté de santé face aux rythmes et aux exigences scolaires.

En tant que parents si nous avons veillé à tout ce qui était pratique comme vêtement, à réguler leur rythme de vie, à surveiller le temps de repos et de sommeil, à bien entendu avoir des bilans santé réguliers et une alimentation la plus saine possible, il ne nous appartient pas d’alléger l’emploi du temps de matières, surtout au collège, qui sont de véritables poids morts pour l’élève. Cités précédemment, cela peut au collège, être la technologie à cause des manipulations, la musique, le dessin et toute activité axée sur la psychomotricité fine.

Pour certains on aura aussi de grandes difficultés du moins en l’état actuel des modes d’apprentissage en langues étrangères, en mathématiques, géographie, physique. Pour notre jeune cela a été le cas de l’allemand LVII sitôt que le rythme (dès le second trimestre de 4ème) s’est accentué, la fatigue se superposant avec la spécificité cognitive les cours se sont transformés en pensum y compris pour l’enseignant. Quand l’impossibilité à suivre le cours se met en marche on voit apparaître ce phénomène de torpeur. C’est un révélateur très utile qu’il ne faut pas prendre pour du laisser-aller mais une réalité physiologique.

Lutter contre cet endormissement est pour l’élève extrêmement compliqué, il suffirait quelquefois de sortir se rafraîchir pour se « rebrancher » au cours. On sait que les enfants hypoglycémiques doivent impérativement manger noisettes ou fruits secs pour ne pas développer de malaise, pour les enfants dyspraxiques c’est la même urgence.

Page 199: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

199

« Comment avoir le goût de l’effort quand on est épuisé ? » m’a demandé un autre parent. C’est la vraie question et il faudra bien y apporter des réponses pas forcément médicamenteuses comme il est devenu presque de mode face à cet embarras. Comment les sortir de leur apathie somnolente ? Que faire du zombie aimable, du rêveur sympathique, du « fumeur de pétard » qui n’en n’est pas un ?

On imagine bien que l’enseignant ne peut facilement gérer cette particularité, s’en souvenir et y remédier lorsque les devoirs maisons ne sont plus rendus (ceci surtout après des notes catastrophiques ou au moment des révisions de contrôles ou d’examen) quand l’élève décroche. Les familles découvrent bien souvent cette spirale du renoncement ou de la gestion inappropriée des priorités quand le bulletin scolaire arrive. Il est trop tard ensuite pour envisager ou une réduction des devoirs ou un délai supplémentaire . Dans les classes lycée, il est presque malsain d’avoir à s’immiscer dans les détails de cette nature et c’est finalement une erreur. Le conseiller d’éducation pourrait faire la liaison discrète dans ce domaine mais ce sont des personnes surchargées et du fait de la nature réservée de ces jeunes ils ne vont pas demander de l’aide.

Anticiper a toujours été une des clés de ce chemin d’éducation mais il y a énormément à envisager avec tellement de détails et d’imprévisible. Non seulement il faut anticiper mais ne rien tenir comme acquis. Il faut toujours être sur ses gardes tout en manifestant une confiance et un élan inconditionnel à ce jeune. Il suffit quelquefois par analogie de se poser la question : s’il était asthmatique est-il en période d’insuffisance respiratoire, s’il était diabétique en période de risque, s’il était dyspraxique…. Et bien il faut veiller à sa chute d’énergie.

Ce qui complique encore l’observation c’est qu’il arrive que certains soient hyperactifs ou considérés comme tels et ne semblent pas toujours épuisés. Pourtant en phase d’hyper stimulation, ils commencent une action ou une découverte intellectuelle et changent immédiatement d’activité. En circuit ouvert non seulement pour la main qui ne sait plus ce qu’elle tient mais aussi dans une forme de papillonnage culturel. Cet inachèvement les fatigue énormément. On peut aussi réfléchir par analogie : si c’était un dérèglement thyroïdien on mettrait une limite à « trop de » : trop de désir de faire, d’être. On est encore à l’orée de bien des découvertes neurologiques sur leur trouble et peu à peu les explications et les adaptations deviendront de plus en plus cohérentes et efficaces. Sur le terrain du lieu scolaire il est évident qu’il faut donner non seulement des clés aux enseignants mais la possibilité en toute légalité d’aménager leur pédagogie.

Page 200: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

200

A travers l’observation des symptômes du corps la dyspraxie devient plus crédible aux yeux de l’entourage, bien que ces symptômes soient quelquefois entendus comme une « déviance comportementale ». « Fatigué chronique » est un constat humoristique ou féroce selon le niveau d’humanité du jugement qu’entend si fréquemment le jeune qu’il ne se vit pas toujours lui-même comme courageux et entreprenant. Un suivi psychologique fait en connaissance réelle de la dyspraxique peut être un soutien non seulement pour le jeune et sa famille mais devrait aussi inclure l’équipe éducative qui perd quelquefois ses repères avec ce type d’élève.

Tout au long de leur prime jeunesse et souvent encore au collège et au lycée il a fallu « reprogrammer » littéralement le fonctionnement corporel, inlassablement réactivant les divers capteurs, neurotransmetteurs et autres circuits neurologiques. Sans rentrer dans cette complexité de scientifique : visualiser pour les enseignants et les camarades cette altération de l’intégration sensorielle, comprendre les disfonctionnements physiologiques serait donc très utile. On pourrait dire que l’association de cette désorganisation chronique et de cette fatigue crée une personnalité qui n’est pas de suite reconnue pour ce qu’elle est et nous conduit à nous interroger sur :

Ce qui ressemble à de « l’inhibition relationnelle ».

Le regard des adultes perplexes parfois même irrités conduit aussi à fortifier le regard sans tolérance des autres élèves à l’encontre du jeune dyspraxique si différent d’eux. Il semble urgent de savoir expliquer aux camarades, aux enseignants et aux partenaires éducatifs la spécificité dyspraxique. Quand l’information est donnée, souvent en raison de difficultés, nous avons l’impression d’être suspects de vouloir dédouaner l’élève de ses travers scolaires. Des remarques telles que : «Et alors il y a beaucoup d’autres élèves maladroits, distraits, on n’en fait pas toute une affaire !», «Ils peuvent quand même faire un effort non !!», «Les autres aussi doivent travailler durement », «la trop grande sollicitude est la porte ouverte à toutes les compromissions», «La dyspraxie est à la mode pour parler de la paresse», «Quand on veut on peut» et ainsi de suite.

Expliquer un mode de fonctionnement n’est pas excuser mais donner des outils de pédagogie. Nous avons observé le même silence prudent concernant d’autres jeunes ayant des troubles handicapants. Quand le handicap est visible il y a sans doute moins de suspicion de tricherie, d’abus. Les parents sont souvent vécus comme omniprésents, surprotecteurs alors même qu’ils cherchent à établir une communication efficace, s’ils sont trop discrets il leur sera reproché leur manque d’investissement et de confiance envers leur enfant. Le lycée où notre

Page 201: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

201

jeune a suivi ses études envisage de réfléchir à comment annoncer en milieu scolaire le handicap et comment permettre une meilleure relation entre tous les membres de la communauté scolaire. Les bonnes volontés sont réelles, les compétences aussi il manque le temps mais aussi un élan et une sensibilité à cette problématique de l’élève « hors -norme ».

Il semble en outre fréquent que la mauvaise appréciation des codes en ce qui concerne les regards, les gestes, les paroles des autres créent des situations équivoques où non seulement le jeune se comporte en décalage mais devient aux yeux des autres ridicule.

Ainsi se crée le cercle infernal de la discrimination et du rejet quant il ne s’agit pas de celui du harcèlement.

C’est terrible pour ce type de jeunes qui sont pour la plupart extrêmement grégaires et ont le goût de la communication. N’extériorisant que très peu leur peine face à leur solitude ils semblent la rechercher ce qui n’est pas du tout le cas. Pudiques, timides, réservés, ils sont dans l’attente des autres sans savoir toujours rentrer en contact avec eux.

Ils ne se dévoilent pas facilement ne révélant pas ce qu’il est convenu d’appeler le handicap invisible, ne donnant pas non plus ni aux adultes, ni à leurs camarades les clés de leur attitude. La fierté naturelle qui est la leur, fait qu’ils peuvent refuser les aménagements salutaires qui leur sont autorisés comme le portable, car c’est révéler cette différence. Différence entendue comme une vulnérabilité voire en schéma réducteur comme une forme de déficience intellectuelle. Ils ont à prouver sans cesse leur capacité intellectuelle et leur honnêteté scolaire quand ce qui est acquis ne l’est plus et cette suspicion les déroute.

Ils peuvent non seulement être perçus comme s’isolant mais comme étant narquois, certains prenant leur réserve pour une forme ou d’insolence, de provocation ou d’évitement.

Evitement de leur part souvent en auto-préservation pour se protéger des humiliations des vexations si souvent entendues, et du rejet des autres les prenant pour des nigauds. Evitement qui se confond avec la prudence et la méfiance car tout ce qui est nouveau peut apporter son lot de déconvenues et les conduit à être très pondérés et mesurés dans leurs gestes, leurs actes et leurs paroles. Et pourtant au milieu de ces quiproquos relationnels je n’ai jamais entendu de parole de médisance, de méchanceté ou de dénigrement de l’autre chez notre enfant, au contraire une compréhension des faiblesses et des ignorances très mature pour son âge et ceci très jeune.

« Se sentir sur un fil sans savoir où on va », crée une sorte de funambulisme relationnel, oscillant sans cesse entre les émotions et les

Page 202: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

202

sentiments tels que la honte, la peine, l’étonnement, la perplexité, l’attente, la gêne, etc. le jeune semble anxieux alors qu’en fait il ne sait pas bien se positionner aux autres, à lui-même. Cela est davantage de l’ordre d’une inquiétude larvée, état peut-être lié à cette résilience qui les habite. Ils ont tellement tenu, survécu aux avatars du quotidien dans une attitude de courage constant, sans pour autant par humilité envers d’autres handicaps lourds ou des histoires de vie tragique, se sentir dans un mécanisme héroïque. Notre enfant n’a pas manifesté de réelle dépression face à ces embarras de vie, juste de l’impatience, de la tristesse désabusée quand les obstacles ne cessaient jamais. Sa nature de marin a symbolisé cette aventure comme « vague après vague : tenir et avancer ». Toute rencontre positive, tout événement agréable le rend heureux. Disposition de caractère qui semble être celle de beaucoup de ces enfants. Gratitude naturelle en la vie ou chemin intérieur se façonnant au fil des ans c’est là aussi la zone intime de chaque être.

Le travail des adultes est énorme dans ce domaine de l’encouragement et de la reconnaissance pour l’aider à se construire or la méconnaissance des nuances de la dyspraxie rendent cette tâche complexe. Si ces jeunes ne se plaignent jamais et ne vont jamais signaler ni les malaises, ni les ennuis, ni les peines, à plus forte raison ils n’évoquent pas les maltraitances dont ils sont souvent victimes. Au collège ils appartiennent facilement à l’espèce dite des boucs-émissaires.

Sans véritables troubles du comportement puisqu’ils ne sont pas agressifs, ils donnent la fausse impression de ne pas être blessés ou foudroyés par le rejet ou la méchanceté. Et pourtant ils peuvent, sans raison apparente, juste parce qu’ils n’arrivent plus à exprimer leurs sensations, leurs émotions ou leurs idées avoir une colère aussi brève que fulgurante, sans objet, sans véritable interlocuteur, bouffarde décompressante. Cela ne fait qu’enferrer le jeune dans les moqueries, les taquineries permanentes. Il est impératif que les enseignants mesurent à quel point cette attitude peut devenir le mode de fonctionnement d’un groupe d’élèves et ce pendant plusieurs années. Titiller le garçon gauche et sensible semble un plaisir sans fin pour certains esprits caustiques : ainsi reprendre à l’infini un lapsus de mot particulièrement décalé, insister sur les travers de la maladresse, rien de bien original ni de bien dramatique pensent parfois les adultes prenant cela pour un jeu de taquinerie entre jeunes et ils n’en soupçonnent pas toujours la charge d’énervement contenu.

L’élève un peu étrange, original, à la dégaine gauche n’est pas davantage populaire auprès des familles qui ne voient en lui que ce que leurs enfants racontent. Il est celui qu’on oublie d’inviter, qui maladroit a

Page 203: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

203

renversé un objet ou dit une phrase déconcertante. Il est celui qui invite et attend longtemps des camarades qui ne viennent pas toujours.

Il passe tellement de temps à compenser pour effectuer son travail scolaire que c’est au détriment des joies simples et normales de son âge. Quand les autres jouent, se distraient en bande, lui est chez l’orthophoniste ou le psychomotricien ou recopie ses cours.

Seuls des élèves ouverts aux autres, avec une qualité de cœur et de courage savent reconnaître leur intelligence, leur sens de la justice, leur humour et leur bonté .

Une anecdote mais il y en a tant !!! En 5ème époque des clans, bien que sentant que quelque chose n’allait pas, devant son mutisme acceptant d’attendre qu’il se livre, nous avons été alertés grâce à la liste des téléphones des camarades par des parents horrifiés des récits des harcèlements subis par notre enfant. Des manipulateurs pervers de 12 ans ont réussi sous l’œil d’une équipe pédagogique pourtant solide à faire du collège un enfer : insultes, gestes déplacés, destruction d’objets personnels, mise à l’écart systématique, dénonciations abusives, brutalités en tout genre, humiliations…La réaction vigoureuse parce que sans complaisance de l’administration n’a pourtant pas empêché un professeur de dire à un de ces tyrans en herbe qui venait de subir une bonne admonestation « Oui d’accord mais on sait que tu es un bon élève et ta mère est une psychiatre excellente !!! , X . doit être capable de se défendre sans que cela devienne toute une affaire ». On touche à un tabou celle de l’image du bon élève qui est intouchable alors que l’élève maladroit, brouillon, réservé est forcément un cancre donc un problème.

Non ils ne savent pas se défendre . Beaucoup de témoignages racontent l’amalgame fait quant à une soi-disant attitude agressive de leur part alors qu’ils sont souvent battus par les autres ou dénoncés pour des faits non commis par eux. Bien connaître leur mode de fonctionnement éviterait des erreurs de cet ordre. Maladresse ne veut pas dire agressivité.

Le jeune dyspraxique habité par sa rigueur morale refuse : les compromissions, de se plier à la loi du silence quand il voit la tricherie en cours, les trafics y compris de drogue au sein de l’établissement, les comportements incorrects à l’encontre des filles, les atteintes raciales etc. Mais il ne sait pas gérer ces éléments. Il est observateur de nature, il a une mémoire étonnante et une sensibilité exacerbée et rien ne lui échappe. Sa nature franche le rend incapable de se taire et de ne pas réagir à ce qui le choque. Il prend très à cœur les règlements intérieurs, les contrats citoyen, sa propre éthique mais avec la même maladresse coutumière qui le caractérise il aura la phrase benête ou dérisoire ou

Page 204: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

204

décalée pour intervenir. Il devient facilement la risée de camarades plus « affranchis » plus provocateurs. Ce n’est pas une question de maturité mais d’adéquation au milieu. Ainsi le maladroit devient le naïf ou le niais et sa prévenance, sa courtoisie sont tournées en dérision.

Ce type de situation peut faire surtout au collège quelquefois une zone de non-droit, de nature carcérale (terme employé par le proviseur du collège de notre enfant) et tue tout travail de finesse éducative et citoyenne.

Cette attitude a pérennisé les quolibets, les railleries, les bousculades, les gestes déplacés jusqu’à la seconde où la mère d’un jeune a demandé que son fils ne soit pas en coéquipier avec le nôtre car cela pénalisait ses résultats !!! C’est en devenant d’une stature impressionnante qu’a cessé ce jeu imbécile avec une bonne bourrade contre un poteau. Le très étonné : « Quand même, en venir à une position de force pour des idioties pareilles je n’y crois pas !!! » a fait basculer les choses de manière ironique.

Bien entendu, les adultes qui sont présents dans les établissements ne cautionnent pas cette approche de l’autre, en tout cas pas officiellement. Un groupe de travail dans chaque établissement avec des parents d’enfants avec des spécificités handicapantes permettrait de mieux savoir annoncer, gérer la relation qui en découle.

Notre jeune a dépassé tous ces aléas en devenant plus solide physiquement, plus confiant en ses capacités, épaulés par des adultes, d’autres jeunes. Il a puisé dans ses propres sources vives ses joies, ses élans. Il est un être mûr, abouti, habité diront certains où nous espérons que tous les émerveillements restent intacts, ainsi que le courage et l’enthousiasme préservés.

Cela demeure un long combat, une lutte permanente mais où existe aussi la jubilation de la réussite et les saveurs des sentiments nobles comme l’entraide, la générosité, le dépassement, la loyauté et l’honneur.

Cette expérience de l’éducation d’un adulte en devenir m’autorise à vouloir encourager, stimuler d’autres parents, mais aussi de veiller à ce que les innovations quelquefois généreuses restent adéquates. C’est dans cet esprit d’ouverture très pragmatique que je vous remets ces quelques pages.

NB voir aussi les dispositions avec table inclinée et tabouret via la posturologie

Page 205: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

205

Présentation d’une expérience professionnelle : le diabète cékoissa ?

JC Azorin Fonction Responsable Pédagogique Département

Prévention Epidaure Montpellier

Coordonnées 04 67 61 30 18 – [email protected] Epidaure 1 Rue des Apothicaires 34 298 Montpellier cedex 5 Lieu d’activités Département de l’Hérault

OBJECTIFS : Réassurer un enfant diabétique dans le groupe classe. Dédramatiser auprès des enseignants, des élèves la présence d’un enfant diabétique dans une classe.

PRÉSENTATION SYNTHÉTIQUE DE L’EXPÉRIENCE

Dédié à la prévention des diabètes, "Le diabète cékoissa" est un programme d'action éducative à destination des classes de CM1&2 des écoles primaires.

Initié depuis maintenant 6 ans, ce programme consiste en la mise en place dans les écoles volontaires du département de l'Hérault d'animations autour d'un parcours ludique et interactif original conçu par l'espace de prévention Epidaure CRLC/IA 34 en partenariat avec la Caisse Primaire d'Assurance Maladie et l'Association des Diabétiques de l'Hérault.

Ce parcours permet aux élèves et enseignants de découvrir : Ø les ressors, les symptômes et les manifestations du diabète Ø la façon de bien vivre avec, à l’école, comme ailleurs Ø les moyens de se prévenir de certaines de ses formes ou évolutions

C'est aussi l'occasion pour les animateurs, souvent eux-mêmes diabétiques de répondre aux questions des enfants et des adultes avec notamment une réflexion globale sur la santé et sur la question de l'intégration et l'acceptation de la différence.

Page 206: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

206

IMPACT ET SUIVI DE L’EXPÉRIENCE

Evaluation

Chacune des interventions fait l'objet : • d'une évaluation de processus visant à améliorer les réponses

aux attentes spécifiques des équipes éducatives et sanitaires en place

• d'une enquête pour mesurer, par questionnaires-enfants avant-après, l'impact du programme sur :

- l'acquisition de connaissances par les élèves - l'inflexion des attitudes des enfants par rapport à cette

maladie.

Le partenariat entre Epidaure et l'ADH s'est avéré extrêmement positif sur les points suivants :

• amélioration du niveau d'information, de formation et compétence des personnels des deux parties

• augmentation de l'audience du programme par mutualisation des ressources humaines et techniques

Dans son déroulement l'animation a apporté entière satisfaction aux enseignants qui ont souligné :

• la disponibilité des intervenants dans leur école, • la qualité du matériel pédagogique mis à leur disposition.

Les animateurs ont apprécié : • l'écoute et la motivation des enfants • le confort d'intervention lié à la légitimité apportée à l'action par

l'Inspection Académique

Impact

1.1 Etat initial

Page 207: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

207

Idées reçues sur le diabète (questions 4 et 6) Connaissances physiologie (questions 1, 2, 3, 8) Connaissances pathologie (questions 5, 7, 9, 10)

Les scores obtenus aux questionnaires (n 120) avant action justifient la nécessité d'une intervention pour apporter une information sur le diabète aussi bien auprès des enfants que de leurs enseignants pour :

• mieux intégrer dans les classes les élèves atteints de diabète 1 • faire action de prévention pour le diabète 2

Si les enfants obtiennent des scores satisfaisants quant aux idées reçues sur la maladie, les items concernant leurs connaissances en physiologie et pathologie sont lacunaires.

1.2 Après action d'information

Après information, la moyenne générale des scores passe de 6/10 à 7,2/10 soit une progression de 18%.

Taux d’évolution des réponses On a surligné en gras les résultats très positifs et en italique les négatifs.

Les résultats négatifs aux items 7 et 8 soulignent la difficulté qu'ont les enfants à assimiler les mécanismes métaboliques du diabète. Un effort didactique devra être produit afin de rendre notre enseignement plus signifiant dans ce domaine.

Idées reçues Connaissances physiologie Connaissances pathologie

Questions Juste FAUX Sans réponses 4 23,46 -48,72 0 6 21,11 -45 -100 1 16,67 -61,90 -100 2 10,89 -52,94 -100 3 24,53 8,33 -89,47 8 12,20 27,27 -100 5 55,32 -33,82 -60 7 -18,18 36,36 -100 9 16,98 7,55 -92,86 10 50 -59,26 0

Page 208: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

208

Page 209: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

209

L’AFPSSU tient à remercier ses partenaires qui soutiennent son action et sans qui cette journée

n’aurait pu être organisée

Conseil régional d’Ile de France

ASNAV L'Association Nationale pour l’Amélioration de la Vue

L'Association Nationale pour l’Amélioration de la Vue a été créée en 1954 par les professionnels de l'optique oculaire déjà conscients, à l'époque, de l'importance d'une bonne vision dans toutes les situations de l'activité humaine. Ses multiples actions s'appuient sur des partenariats avec les Pouvoirs Publics ou des organismes agissant pour la même cause. Citons comme exemples :- La vision des conducteurs, avec la Sécurité Routière, la Gendarmerie Nationale, la Prévention Routière…- La vision des salariés, avec la Médecine du Travail.-La vision des enfants, avec le Ministère de l'Education Nationale et, plus particulièrement, le Bureau de l'Action Sanitaire et Sociale et de la Prévention. http://www.asnav.org/

MSD - AsthmAction

Merck Sharp & Dohme - Chibret : les patients d’abord Les laboratoires pharmaceutiques MSD-Chibret mettent à la disposition des médecins et des patients des médicaments dans presque tous les pays du monde, ainsi que des programmes humanitaires dans les pays en voie de développement (VIH/sida, onchocercose, filariose). En matière d’information des patients, les laboratoires MSD-Chibret diffusent le Programme pédagogique ASTHME ACADEMY conçu en partenariat avec l’Association Asthme et Allergies et parrainé par le ministère de l’Education Nationale depuis 2003. Destiné aux relais d'éducation et de santé au collège (professeurs d’EPS, de SVT, infirmières scolaires) et aux écoles de l’asthme, cette initiative a pour but d’informer les enfants et les adolescents asthmatiques et de sensibiliser le grand public, afin d’améliorer la prise en charge de la maladie asthmatique et la qualité de vie des jeunes patients. http://www.asthmaction.com/

Novartis

Notre objectif consiste à fournir aux patients du monde entier, par l'intermédiaire des professionnels de santé, une large gamme de produits et services à la fois innovants, efficaces et bien tolérés. http://www.proximologie.com

Page 210: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

210

Tetra pak

Tetra Pak a la volonté d'être une entreprise citoyenne qui passe par deux actions clés : la défense de l'environnement et la nutrition des enfants qui construisent le monde de demain. Afin de favoriser l'équilibre alimentaire des enfants, la distribution de lait à l'école reste l'un des moyens les plus efficaces. Depuis 1976, l'apparition de l'emballage Tetra Brik 20 cl de lait U.H.T. rend cette distribution plus pratique et plus sûre. http://62.39.87.252/tetrapak/attente/attente_lae.htm

Laboratoires Baxter

La division Vaccins des laboratoires Baxter France développe et commercialise des vaccins pour prévenir et traiter des maladies graves et parfois mortelles telles que la méningite à méningocoque C et la méningo-encéphalite à tiques. http://www.baxter.fr/

Ferring-pipi au lit

Ferring, depuis années impliqué dans l'énurésie, a initié en Octobre 2005 un partenariat avec les infirmières et médecins scolaires autour du thème du pipi au lit encore mal connu et souvent négligé. En effet, l'énurésie concerne 400 000 enfants âgés de 5 à 10 ans, il est donc important de prendre en charge ces enfants le plus tôt possible afin de prévenir les répercussions parfois très graves; L'énurésie peut avoir des conséquences négatives sur la vie sociale, familiale de l'enfant ainsi que dans sa vie scolaire. C'est pourquoi, Ferring sillonne depuis octobre 2005, toute la France pour sensibiliser et former les différents acteurs concernés par l'énurésie. http://www.pipi-au-lit.net/index1.html

L2i-logiciel VEDUCA

Les médecins scolaires ont enfin à leur disposition un appareil médical destiné à effectuer un examen de la fonction visuelle et auditive des enfants. Afin de prévenir des difficultés scolaires liées à une mauvaise vision ou audition et de dépister précocement des anomalies, le système VEDUCA a été développé en collaboration avec des médecins scolaires. Facilement transportable et fonctionnant sur support informatique, VEDUCA répond aux critères de fiabilité et de mobilité. VEDUCA est un produit de la société L2Informatique, 20 Rue Schnapper 78100 St Germain en Laye http://www.lagon.net/french/veduca.htm

Parallerg

Parallerg est spécialisée dans les solutions pour l'allergie, l'intolérance alimentaire et l'asthme. Son objectif : constituer une offre très diversifiée de produits pertinents et de très haute qualité pour faciliter la vie au quotidien des personnes concernées. A la fois boutique en ligne et boutique en ville (Lyon) ce sont 800 articles présentés avec compositions et évictions d’ingrédients garanties http://www.parallerg.com/

AFM - Association française contre les myopathies

L’AFM vise un objectif clair : vaincre les maladies neuromusculaires, des maladies qui tuent muscle après muscle. Elle s’est fixé deux missions - guérir les maladies neuromusculaires et réduire le handicap qu’elles provoquent - et quatre axes prioritaires pour les maladies neuromusculaires : le développement des thérapeutiques, les actions vers les familles, la myologie et la revendication. http://www.afm-france.org/

Page 211: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

211

ANAE-Revue de Neuropsychologie du Développement et des Apprentissages

A.N.A.E. est une revue spécialisée traitant spécifiquement des troubles du développement et des apprentissages de l'enfant et de l'adolescent. Dans une volonté de promouvoir une meilleure prise en charge des enfants sujets à ces troubles souvent composites, A.N.A.E. s'est donné pour objectifs principaux : - de mettre les approches de la neuropsychologie de l'enfant à la disposition de l'éventail de tous les professionnels de l'enfance. Que ceux-ci appartiennent aux disciplines et spécialités médicales, paramédicales, des sciences de l'éducation et de la pédagogie,- pour faciliter la coordination des savoirs entre tous ces acteurs. - Le lectorat d'A.N.A.E. est constitué de tous ces Professionnels de l'Enfance répartis dans des centaines d'établissements et institutions de santé, de soins, médico-scolaires, médico-psychologiques, d'enseignement spécialisés ou classiques Présentation et répartition du lectorat sur le site : http://www.anae-revue.com/lecteurs.php Présentation des établissements, institutions et administrations lecteurs : http://www.anae-revue.com/lecteurs-etablissements.php

Editions la Cigale

La Cigale édite des entraînements pour repérer, prévenir et remédier aux difficultés d’apprentissage de la lecture à l’école. Les premiers outils, conçus à l’initiative du Dr Zorman et validés dans le cadre du bilan de santé réalisé en 1998 dans l’académie de Grenoble, ont été complétés par une série d’entraînements dont l’efficacité a été Parallerg est spécialisée dans les solutions pour l'allergie, l'intolérance alimentaire et l'asthme. Son objectif : constituer une offre très diversifiée de produits pertinents et de très haute qualité pour faciliter la vie au quotidien des personnes concernées. A la fois boutique en ligne et boutique en ville (Lyon) ce sont 800 articles présentés avec compositions et évictions d’ingrédients garanties mesurée par des recherches -actions impliquant circonscriptions et laboratoires de recherche. Ces entraînements ont récemment fait l’objet de séances de classe filmées et diffusées sur le DVD « Apprendre à Lire » produit par le ministère de l’éducation nationale et le CNDP. Utilisables dans le cadre de décloisonnements ou lors des interventions des maîtres spécialisés, ces entraînements répondent aux difficultés des élèves, grâce à des programmations de séances systématiques, progressives et limitées dans le temps, organisées en petits groupes de niveau pour une plus grande efficacité. Localement, les médecins de l’éducation nationale peuvent par leur expertise aider à la mise en œuvre de ces outils et à l’appropriation des pratiques pédagogiques qui y sont associées. http://www.editions-cigale.com

MEDIECO -ingénierie et édition d'écologie médicale

Le but de la société est de développer une approche globale en Santé-Habitat- Environnement en intégrant :- une approche multicritères : - biologiques - chimiques – physiques - une vision à long terme : nécessité d'intégrer le facteur "temps" puisque les effets sanitaires émergent 10, 20, 30 ans après une exposition - développer une approche la plus "en amont" possible pour éviter des erreurs dans le bâti et les incidences sur la santé des occupants - développement du concept "Habitat Qualité Santé http://www.medieco.info/

Page 212: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

212

AFTOC - Association française de personnes souffrant de troubles obsessionne ls et compulsifs

L'AFTOC est constituée de malades, ex -malades, familles de malades et médecins sympathisants. Ses actions : - aider les malades et leur famille à mieux comprendre cette maladie - Organiser des groupes de soutien pour que les malades et leurs proches puissent échanger des informations et s'aider mutuellement. - informer le public et la profession médicale sur ces troubles invalidants, afin de les détecter de façon plus précoce et de favoriser leur compréhension et les adaptations qu'ils nécessitent parfois. - Soutenir, promouvoir ou participer à toute action et recherche pouvant contribuer à une meilleure prise en charge et au mieux-être des personnes en souffrance. http://www.aftoc.fr.st/

Aclie

Diffusés par « les Editions Noëlle Bermond », les outils ACLIE sont ses outils sensoriels qui facilitent l’accès des enfants à la structure de la phrase Une grande mascotte sympathique (« Une bébête pas si bête selon l’émission « Imaginons demain de la chaîne LCI), différents accessoires ainsi qu’un petit conte font de ACLIE un matériel utilisable à des niveaux divers - pour le développement du langage oral - pour la découverte des notions grammaticales utiles à l’orthographe (cf : article de Madame Eyoum, dans la revue « L’orthophoniste » avril 2004 : « Jean-Baptiste et ACLIE ou comment apprendre la grammaire en jouant et sans effort» http://www.aclie.com/

ALREP-Association nationale et internationale de Loisirs, de Rencontre et d’Education

pour les enfants et adolescents Précoces

Participer au développement des enfants et adolescents précoces par la mise en place de centres de vacances en présence d'animateurs formés à cet effet. Prendre conseils auprès de spécialistes. Informer les services sociaux ainsi que le Ministère de l'Education Nationale (l'ALREP participe à la Commission sur la précocité intellectuelle). Obtenir un enseignement adapté dans chaque école, collège ou lycée. Aider ceux qui souhaitent mettre en place des structures adaptées. Guider, sensibiliser et conseiller les parents http://www.alrep.org/

Page 213: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

213

Collection publiée par L'ASSOCIATION FRANCAISE DE PROMOTION DE LA

SANTE SCOLAIRE ET UNIVERSITAIRE

COLLECTION Médecine Scolaire et Universitaire

Editée par l'AFPSSU TITRES DES OUVRAGES DISPONIBLES : Risques psychologiques chez l'adolescent 10€ Le bilan d’orientation scolaire et professionnelle 10€ Vision et Lecture 10€ Vision de l’enfant 10€ Dyslexies et troubles des apprentissages scolaires 10€ Education à la sexualité 10€ Les maladies rares 10€ La souffrance psychique de l’enfant et de l’adolescent 10€

Tous ces livres vont sont expédiés FRANCO DE PORT (sauf DOM-TOM).

Pour tous renseignements adressez vous à l'AFPSSU, 242 boulevard Voltaire 75011 Paris

mél : [email protected] Site Web : http://www.afpssu.com/

L'Association Française pour la Promotion de la Santé Scolaire et Universitaire regroupe toute personne (active ou retraitée) s’intéressant soit par sa profession, soit par ses activités à la santé des élèves et des étudiants

Pour toute demande d'adhésion et de publication de travaux personnels ou de groupes, écrire au siège social.

Page 214: actes du colloque 2007 - AFPSSU · Actes de la journée du 26 janvier 2007 ... Les manifestations psychiat riques rencontrées chez l’enfant épileptique ... Rentrée scolair e

214

FRANCE : 20 euros

FRANCO DE PORT sauf DOM-TOM