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LA VOLONTÉ Cours d’agrégation d’Alain Badiou (2002-2003) (notes de François Nicolas) I. 10 octobre 2002 1 Corneille 2 Descartes 3 L’être et le néant (extraits) 3 II. 17 octobre 2002 4 Récapitulation 4 1. Une construction de la pensée classique...................................................... ....................... 4 2. Dualisme métaphysique................................................... .................................................. 4 3. Nécessité comme loi fondamentale de l’univers...................................................... ........... 5 4. Scission du Moi............................................................ ..................................................... 5

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LA VOLONTE

La VolontCours dagrgation dAlain Badiou (2002-2003)(notes de Franois Nicolas)1I.10 octobre 2002 Corneille 2Descartes 3Ltre et le nant (extraits) 3II.17 octobre 2002 4Rcapitulation 41. Une construction de la pense classique............................................................................. 42. Dualisme mtaphysique..................................................................................................... 43.Ncessit comme loi fondamentale de lunivers................................................................. 54. Scission du Moi................................................................................................................. 55. Le plus propre du sujet...................................................................................................... 56.Volont pose la question de lunit du sujet....................................................................... 6Sartre: Ltre et le nant 6III.12 dcembre 2002 6Sartre 7Les arguments de Sartre........................................................................................................ 8IV.13 mars 2003 9Usage classique de la catgorie: 91) Reprage........................................................................................................................... 92) Problmatique pratique..................................................................................................... 93) Statut mtaphysique.......................................................................................................... 9Critique de la conception classique 101. Critique de la volont comme catgorie psychologique (Sartre)...................................... 102. Critique de la volont comme catgorie morale (Nietzsche)............................................. 103. Critique de la mtaphysique du dualisme......................................................................... 11Programme possible dune volont impure en 4 proprits 12Premire proprit............................................................................................................... 12Deuxime proprit............................................................................................................. 12Troisime proprit............................................................................................................. 12Quatrime proprit............................................................................................................ 12Question: volont & politique 12Bilan (septembre 2003) 13

I.10 octobre 2002

Rapports entre volont et libert?

Trois leons:

1) Constitution classique du problme: cf. la premire moiti du 17 sicle (Descartes)

2) Lanalytique de la volont dans Ltre et le nant de Sartre

3) La question de la volont chez Kant.Commenons par le 17 sicle car cest au 17 sicle que culmine un emploi absolu du mot volont.

Cf. une thse relative au nouage entre volont et infini: cf. linfinit formelle du vouloir. Cf. homothtie avec la construction de la monarchie absolue. Ainsi Corneille est un accompagnement de Descartes.

Cela touche la question de la dcision; connexion donc entre volont et dcision: cf. quest-ce que dcider?

Ainsi dans la monarchie absolue, la forme de ltat et du pouvoir est dans la figure dune volont. Voir la dcision en tant que sa forme est un vouloir: cf. la constitution au 17 sicle dun lien entre une thorie, une psychologie des facults et des passions et une mtaphysique de la libert dont la dcision est reprsentable dans la forme dun vouloir. Ce lien va se poursuivre jusqu Sartre inclus. Soit le paradoxe du concept de libert: cest une mdiation entre ces deux domaines htrognes: psychologie et mtaphysique. Cest au 17 sicle quest mont ce dispositif.

On trouve une rsonance de cela dans la thorie de la Fronde chez le Cardinal de Retz mais surtout chez Corneille.

Corneille

Cf. actes 4 et 5 de Cinna: exhibition de la nouvelle figure du vouloir quand Auguste apprend le complot de ses amis. Cf. IV.2: ncessit de la rpression (Il faut unir). Cf. ncessit du crime dtat qui est de lordre de la rgle, du devoir. Do ordre-nature-devoir, o le devoir est assign la ncessit des rgles naturelles. La volont est construite sur le fond dune thorie de la ncessit. Do la volont comme ce qui est capable dinterrompre la vengeance.

Est-il possible dinterrompre la vengeance? Cest la question fondamentale au thtre: voir Orestie dEschyle. Rponse dEschyle: ce qui interrompt, cest la loi, linstitution dun tribunal.

Pour Shakespeare: on ne peut pas interrompre. Cf. son pessimisme tragique.

Pour Corneille: par la volont. Cf. V.3: volont comme capacit de slever au-dessus de la ncessit naturelle du crime dtat. La volont est construite comme qui est susceptible dune certaine transcendance au regard de lordre naturel. Voir le thme des rapports entre volont et solitude: la trahison cre la solitude.

Je suis matre de moi comme de lunivers; / Je le suis; je veux ltre.Le vouloir nest pas transitif ltre: je le suis; je veux ltre. Le je veux ltre corrige le je le suis: je le suis pour autant que je veux ltre, je le suis parce que je veux ltre.

Quest-ce que vouloir tre? Cf. capacit constituante de la volont, caractre constituant du vouloir. La volont est transcendante aux passions: Je triomphe aujourdhui du plus juste courrouxle marquage de lunivers (comme subjectivation des lois de lunivers),

la volont pure, indpendante de la subjectivation des ncessits.

Do une scne interne au Moi: le moi y est divis. La volont est ce qui reste du Moi quand on a retir ce qui subjective lunivers.

Problme: si la volont est ce qui du Moi est irrductible aux lois de lunivers, alors quel en est le contenu, quel en est lefficace?

Do un dilemme: soit la volont est pure donc inefficace, soit elle est inefficace, et alors elle nest pas ce reste.

Notre concept de volont est donc formel. Quel en est donc le rel?

Pour Corneille, lefficace de la volont est interne au Moi: le Moi peut saffirmer contre son inscription dans lunivers. Formellement la volont est ce qui du Moi est intransitif lunivers, ce qui nexprime pas lunivers. Et comme toute dfinition formelle, elle est ngative. Quant son efficace rel, la volont sexerce sur le Moi: elle peut dominer ce qui du Moi exprime lunivers. Soit la volont comme victoire sur soi-mme.

Pour Spinoza par contre, le moi est entirement expressif de lunivers, et il nexiste donc pas de volont.

Lhypothse dualiste entrane alors la scission dun des deux termes.

La question de la volont est celle de la domination des passions, celle de laction sur les passions. Ainsi le grand ducateur thique dAuguste, cest la trahison. Chez Corneille, il y a donc des circonstances de la volont: laffirmation de soi dans la plus extrme solitude. Il y a ainsi une soudainet du vouloir (ce nest donc pas une donne structurelle): voir le moment thtral Ainsi il ne faut souhaiter le vouloir personne!

La volont agit alors comme sil ne stait rien pass, en loccurrence comme sil ny avait pas eu trahison. Il y a donc des circonstances de laction qui mobilisent le vouloir, mais le vouloir ne doit pas en tenir compte! Cest le paradoxe de la volont pure o lacte de la volont nest que dans on auto-affirmation. On retrouve ce paradoxe de la clmence cornlienne dans limpratif catgorique kantien.

Descartes

Article 41 des Passions de lme: La volont est tellement libre de sa nature, quelle ne peut jamais tre contrainteLa libert est-elle alors une proprit de la volont? Libert veut simplement nommer lhtrognit lunivers de la contrainte.

Voir des paragraphes de la premire partie des Principes de la philosophie: les paragraphes 34 43, surtout les numros 34, 35, 37 et 39.

34: la volont est une pice essentielle du jugement dans la modalit du consentement. La volont est interne au connatre et pas seulement lagir. Soit la question du consentement au savoir. La volont est une puissance daffirmation ou de ngation; la volont est ce qui dit oui ou non.

35: la volont en quelque sens peut sembler infinie (ce qui est une consquence de ce quelle est puissance de dire oui ou non). Ainsi la volont est dans lme une figure de lexcs, car pour Descartes, lme est finie (do sa preuve de lexistence de Dieu): la volont comme infinit formelle et pas relle (virtuelle et pas actuelle). Cf. la volont est peut-tre toujours en excs sur le sujet!

37: la volont est la principale perfection de lhomme sous le nom de libre arbitre. Do que la volont est une valeur. Alors que la connaissance est restreinte, la volont, elle, est tendue.

Agir librement, cest agir par le moyen de la volont. Laction libre nous est imputable, elle est notre action. Ainsi lidentit de lme est dans la volont. Lessence subjective du sujet, cest la volont.

Cf. la gnrosit (Trait des passions, article 153) comme lie la volont: la gnrosit est une figure de lestime de soi, la figure lgitime de lestime de soi. Cf. la conception cornlienne de la gloire: la reconnaissance que ce quil y a de mieux en nous, cest la volont. Do une gnrosit de lidentit entre soi-mme et la volont. Le caractre normatif de la volont est li son caractre identifiant.

39: la volont, cest une vidence dexprience. Cela na pas tre prouv, dmontr, construit. La volont, cest un fait, cest une de nos plus communes notions. Ainsi on peut consentir ou ne pas consentir. La volont est une dimension transparente du sujet.

Lessence de la volont, cest la transparence, lexcs, laffirmation et la ngation. La volont, cest cette partie de lme qui ctoie les passions en leur tant trangre.

Do la question de lunit du sujet, de lunit de lme. La volont nest-elle pas dislocation du concept mme dme? La volont est-elle compatible avec la substantialit du sujet?

Cest ce que va nier Sartre.

Ltre et le nant (extraits)

Nous devons nous demander comment un motif (ou un mobile) peut tre constitu comme tel. (512)

Le mobile ne se comprend que par la fin, cest--dire par du non-existant; le mobile est donc en lui-mme une ngatit. (512)

Il est impossible de trouver un acte sans mobile mais il nen faut pas conclure que le mobile est la cause de lacte. Car cest en un seul surgissement que se constituent le mobile, lacte et la fin. (513)

La libert na pas dessence. Cf. en elle lexistence prcde lessence. (513)

Le sens profond du dterminisme, cest dtablir en nous une continuit sans faille dexistence en soi. (515)

Motif, acte, fin constituent un continuum, un plein. Ces tentatives avortes pour touffer la libert sous le poids de ltre (516)

Tirer au clair les rapports de la libert avec quon nomme la volont. (516-517)

Loin que la volont soit la manifestation privilgie de la libert, elle suppose, au contraire, le fondement dune libert originelle. (519)

La libert tant assimilable mon existence ne saurait se limiter aux actes volontaires. (520)

La libert nest rien autre que lexistence de notre volont ou de nos passions. (520)

Il ne suffit pas de vouloir: il faut vouloir vouloir. (521)

La volont napparat-elle pas comme la dcision qui succde une dlibration au sujet des mobiles et des motifs? (522)

Nous appellerons motif la saisie objective dune situation dtermine en tant que cette situation se rvle, la lumire dune certaine fin, comme pouvant servir de moyen pour atteindre cette fin. Le mobile, au contraire, est un fait subjectif. (522) Reste expliquer la relation des motifs aux mobiles. (523) le motif est objectif. (524)

Loin que le motif dtermine laction, il napparat que dans et par le projet dune action. (524)

La conscience qui dcoupe le motif dans lensemble du monde a dj sa structure propre, elle sest donn ses fins, elle sest projete vers ses possibles et elle a sa manire propre de se suspendre ses possibilits. (525)

La dlibration volontaire est toujours truque. [] Motifs et mobiles nont que le poids que mon projet leur confre. Quand je dlibre, les jeux sont faits. Et si je dois en venir dlibrer, cest simplement parce quil entre dans mon projet originel de me rendre compte des mobiles par la dlibration plutt que par telle ou telle autre forme de dcouverte. Il y a donc un choix de la dlibration comme procd. [] Quand la volont intervient, la dcision est prise et elle na dautre valeur que celle dune annonciatrice. (527)

Si la volont est par essence rflexive, son but nest pas tant de dcider quelle fin est atteindre puisque de toutes faons les jeux sont faits, lintention profonde de la volont porte plutt sur la manire datteindre cette fin dj pose. (528)

Il faut se dfendre de lillusion qui ferait de la libert originelle une position de motifs et de mobiles comme objets, puis une dcision partir de ces motifs et de ces mobiles. Bien au contraire, ds quil y a motif et mobile, il y a dj position des fins et, par consquent, choix. (539)

Contre le sens commun, la formule tre libre ne signifie pas obtenir ce quon a voulu, mais se dterminer soi-mme vouloir (au sens large de choisir) par soi-mme. Autrement dit, le succs nimporte aucunement la libert. (563)

II.17 octobre 2002

Rcapitulation

Rcapitulation en 6 points de la logique gnrale du discours sur la volont tel que tenu de lge classique jusqu Sartre. Cf. ceci constitue un cadre structural gnral. Volont est un mot dcisif pour Descartes. Sartre fait une critique explicite de ce concept. Cette trajectoire-opposition est interne un cadre gnral qui porte sur la catgorie de libert.

1. Une construction de la pense classique

Volont est une construction de la pense classique. Le mot, certes, existe avant: cf. il y a un dbat chez les stociens. Mais le concept est construit lge classique. Cela est contemporain dune thorie politique: cf. la thorie classique de la souverainet est une thorie du vouloir.

2. Dualisme mtaphysique

Cette construction suppose un dualisme mtaphysique dans la figure premire dune disposition spare du Moi et de lunivers. Cf. Corneille: deux royaumes, donc deux questions de souverainet. Voir lapparition du royaume du Moi. L o ce dualisme est ontologiquement rduit (cf. Spinoza), le concept de volont est dconstruit.

3.Ncessit comme loi fondamentale de lunivers

Il faut aussi que la ncessit soit la loi fondamentale de lunivers. Le concept de volont est coextensif la naissance de la physique moderne, du paradigme mcaniste. Cf. le caractre constituant de la dualit libert / ncessit.

Pourquoi? Cette thse de la ncessit soppose des thses finalistes: la catgorie de volont se construit contre la vision finaliste du monde (causes finales). Si vous avez un principe de finalit, alors vous navez pas besoin dun concept indiquant la rupture avec la finalit car le vouloir peut tre simplement un accompagnement dans la finalit. Le concept de volont na plus alors de radicalit.

Cf. position stratgique pour Descartes de la libert dindiffrence: celle de consentir ou de ne pas consentir.

Le paradoxe pour Descartes est que la libert dindiffrence serait coextensive la volont et que cette libert dindiffrence est le plus bas degr.

La libert dindiffrence est non qualifie en termes de fin, de valeur, car pour Descartes, lunivers nest pas finaliste.

Soit la libert comme possibilit dinterruption de la ncessit causale. la fois dignit ontologique et indignit normative (elle ne vaut rien). Elle est ontologiquement constituante et thiquement indigne. Do une substitution de la catgorie des possibles la catgorie des fins. Do la liaison volont-ncessit-possibilit.

4. Scission du Moi

Il y a une scission du Moi selon que le Moi exprime lunivers ou est en position dautonomie par rapport lunivers. Cf. scission du Moi entre ncessit et libert. Cest l que le concept de volont est constitu dans la psychologie. Il est constitu sur la scne du Moi (et non plus seulement dans la dualit Moi/ univers). Il va dsigner la capacit du Moi se soustraire la ncessit. Volont comme concept psychologique cest--dire dtermination du Moi.

Il y a toujours dans ce concept quelque chose de combattant: la question du triomphe de la volont (cf. film fasciste!). Il ny a pas de vision pacifie de lacte volontaire. Cf. aussi le paradigme de la souverainet: la volont comme capacit tre souverain de son propre royaume. Son tre actif est combattant, conflictuel.

Il faut pouvoir vouloir et ensuite le vouloir est lpreuve du monde. Cf. pour entreprendre, il nest pas ncessaire desprer mais de vouloir. Entreprendre, cest dabord pouvoir vouloir et ne ncessite pas lexamen des fins. Il nest pas ncessaire de russir pour persvrer: ceci est trs tranger la position finaliste.

tre dans le coup, cest tre finaliste. Ne pas tre dans le coup: cest la maxime classique de la volont. Cf. le concept de volont est dconnect de la question des rsultats; le volontarisme, cest une indiffrence aux rsultats.

Voir la diffrence entre les philosophies indiffrentes aux rsultats (rsultat voulant dsigner ce sur quoi il peut y avoir souverainet) et les philosophies astreintes aux rsultats (il y a sagit de rendre compte de la possibilit des positivits) cest--dire pragmatisme, accommodement au monde

Do la possibilit dune souverainet absolue, mme si elle est sans rsultats.

La volont est trs souvent un concept tragique, au sens dune confrontation dun sujet avec limpossible. Ce nest pas par hasard que la volont rencontre du possible et non pas dessence. Sinon, elle serait une volont naturelle dans un espace finalis (cf. conception pr-classique). Car pour les classiques, ce possible, cest le ncessaire! Do quil sagisse de vouloir limpossible! (cf. un on na jamais vu a!). Cf. le plus propre du sujet est connect limpossible.Volont est un concept tragique jusqu Nietzsche.

5. Le plus propre du sujet

Cette scission aboutit ce que volont dsigne ce quil y a de plus propre au sujet, ce quil y a de plus subjectif du sujet. Voir la thse cartsienne sur le plus propre de lme. Cf. le plus propre du sujet nest pas le connatre mais le vouloir. Certes le connatre est le propre de lhomme gnrique, de lhumanit; laccs cognitif lunivers est le propre de lhumanit. Mais la volont est le plus propre dun sujet. Le connatre est le mme pour tous, mais pas le vouloir! Le sujet universel, son propre est de connatre. Le sujet singulier, son propre est de vouloir. La singularit est dans le vouloir.

Lunit synthtique du sujet dans la Critique du jugement de Kant: personne ny comprend rien!

La psychologie est la science de la singularit subjective. Il peut y avoir un transcendantal neuronal cest--dire matriel.

6.Volont pose la question de lunit du sujet.

Dans le montage classique, lunit de la spontanit et de la rceptivit est la synthse de lactif et du passif. Volont dsigne quelque chose toujours tendanciellement en excs sur cette unit. Car quelque chose du vouloir est en exception de la finitude. Dans volont, la mtaphysique tend dborder le psychologique. Cest difficile de faire de volont une simple facult (cf. une potentialit naturelle).

Sartre: Ltre et le nantVoir sur volont et libert p.477 et surtout 485.

La thse gnrale: volont nest pas plus le nom de la libert que son contraire. Cf. la conscience est tout aussi libre dans la passion que dans la volont. La volont est une simple modalit possible de la libert. Sartre dtache volont de libert et donc le psychologique du mtaphysique: volont est trop troit pour penser libert.

Sartre est un matre en rhtorique. Cf. son style dissertationnel (en copie dagrgation).

4 arguments de Sartre:

1. Limpossible, si la volont est le nom de la libert, de lunit psychique.

2. Montrer que la libert est constitutive de ce qui a lapparence de la passivit et pas seulement de la volont. La libert est aussi prsente dans la passion

3.Lanalyse de la dlibration volontaire (mobiles et motifs de laction). Ces mobiles et motifs ne sont pas dterminants de laction. Cf. quand je dlibre, les jeux sont faits!: cest la dcision qui cre le motif.

4.Critique de la dlibration. La dlibration est une modalit et non la substance mme de la volont et de la dcision.

Volont est ici pris en un sens trs troit, rduit la question de la dcision dlibrative: cf. volont, do acte volontaire, do dlibration. En ce sens, Sartre reste un rationaliste classique (cf. lien entre volont et raison). Sartre se maintient sur lhorizon de la psychologie classique.

III.12 dcembre 2002

La volont est une construction discursive du classicisme, dans la dialectique volont / libert autour de la notion de dcision.

Volont ne surgit pas dabord comme une facult. Volont surgit comme un oprateur didentification subjective. Cette construction repose sur une hypothse mtaphysique de type dualiste je/ univers, sur larrire-plan du mcanisme (cf. les figures de ncessit pour lunivers).

Volont est une catgorie de lpoque du sujet de la science, de lpoque o il y a une physique rationnelle dterministe, de la ncessit, des lois de lunivers.

Cest au regard de cet idal mcaniste que surgit volont comme dsignation de lespace de la libert possible du lieu du libre arbitre.

Cf. ncessit de dsigner un lieu de la libert car il ny a pas de lieu pour elle, car le lieu, cest le rgne de la ncessit. Il faut donc un lieu retranch, soustrait. Il y a un lieu soustrait aux lois du lieu: le sujet, lme. Ceci ouvre une histoire de la catgorie de volont, catgorie qui nest pas que philosophique, catgorie oprant comme question de ce qui est soustrait aux lois de la ncessit. Il sagit ici de jalonner cette histoire.

Autre manire: puisque la ncessit est la loi de lextriorit, lexception la ncessit va sindiquer comme intriorit, comme figure dintriorit. Do progressivement une thorie de la conscience: la conscience comme dbat avec elle-mme de ses propres fins. Cf. lespace intrieur dune dlibration.

La polarit intrieur / extrieur est plus profonde que celle entre pense et tendue, ou entre me et corps (qui sont des chos de lancienne mtaphysique).

La conscience est le nom moderne de lintriorit. Volont est lindicateur par excellence de lintriorit. Do le concept kantien dautonomie

Cette longue histoire de la volont commence par une valorisation du volontaire: cf. volont est un concept normatif positif. Il y a une positivation, jusqu Kant inclus, dans le nouage volont-libert.

Chez Descartes, gnreux dsigne qui reconnat en lui-mme la capacit du vouloir. Or lautre bout, il y a une dprciation de la volont au XX sicle en mme temps quen existe un usage hyperbolique: la volont comme figure radicale de la puissance, cest--dire de la libert pense comme puissance (voir Le triomphe de la volont de Riefenstahl). Heidegger, dans son discours du Rectorat, crdite le nazisme de la capacit la dcision rsolue. Cf. aussi Carl Schmidt et son dcisionnisme. Cf. Nietzsche et sa volont de puissance (l cest beaucoup plus compliqu).

Voir le fascisme: figure typique du vouloir comme constitutif du peuple politique. Derrire cela, il y a une prcomprhension de la libert comme puissance.

Il existe une interprtation heidegerienne de tout cela: lusage hyperbolique de la volont nest que lultime figure mtaphysique de la subjectivit inaugure par Descartes (dualisme cartsien); lhistoire de la volont serait lhistoire de son dchanement, de son hyperbole. Do une dprciation de la volont corrlative de son hyperbole. Cela fait de la volont une catgorie du nihilisme, du nihilisme de la puissance: la puissance comme puissance ne veut rien dautre que la puissance; et alors il nexiste pas de raccordement ltre

Mais ce nest pas la seule critique de la volont. Il en existe deux autres:

1. Une critique heidegerienne de son hyperbole contemporaine, des usages fascistes de la volont. De fait volont a t une catgorie du fascisme sous la condition de la libert comme puissance.

2. Cf. Sartre mais pas seulement: la volont nest pas lindicateur de la libert. Volont nest quune modalit; do une modalisation de la volont. On a ici un dmontage du classicisme (cf. sa scission du moi, du sujet). La catgorie de volont exige en effet une comprhension scinde du sujet entre la part qui relve de la ncessit et la part qui relve de la volont. Il faut bien alors une communication entre intrieur et extrieur. Psychologie va dsigner les manires de penser le clivage entre ncessit et libert. Cf. lpoque de la psychologie comme celle de la scission du sujet

La deuxime dprciation de la volont va soutenir que cette scission est en elle-mme un montage indfendable et va tenter de mettre fin la psychologie. Do le rgime dtre du sujet doit tre unique et pas double (selon le vouloir et les passions) car il est incohrent.

Donc lhistoire de la volont sachve par un double procs: politique et psychologique.

supposer quon assume ces critiques, quelles consquences?

Cf. aujourdhui rhabilitation massive de la passivit! On est dans une poque historique post-volont. La maxime paradoxale est: je dois pouvoir faire ce que je veux, mais ne me demandez pas de commencer quoi que ce soit!. Ce que je veux = ce que je dsire; je ne suis pas astreint commencer quoi que ce soit. Or vouloir = commencer.

Sartre

Pour Sartre, il ny a pas de plus de libert dans la volont que dans la passivit, dans les passions. Il y a tout autant de libert dans les passions que dans la volont. La libert, cest aussi la libert de ma passivit.

Cf. la quatrime partie de Ltre et le nant. La condition premire de laction, cest la libertIl faut dfaire lquation acte libre = acte volontaire.

Premire consquence: volont sera pris dans le contexte du montage classique. Sartre ne dplace donc pas le concept de volont!

Deuxime consquence (cf. p.485): la discussion assume lopposition libert-dterminisme. Sartre opre une saturation critique car il reste dans lespace classique.

Cf. il existe deux types de critique:

assumer la localisation et montrer que le dispositif nest pas capable de ce dont il se dit capable.;

sortir le concept du dispositif et produire une autre catgorie de volont.

Les arguments de Sartre

Largument fondamental: il est impossible dans ce dispositif de penser lunit du sujet, de penser une conscience comme juxtaposition dune dtermination et dune spontanit. Il est impossible que srie de faits dtermins les uns par les autres et spontanit se dterminant tre coexistent. Derrire le mot volont, il y a toujours eu un malaise de lunit subjective.

Cf. la catgorie de volont est mise lpreuve de la psychanalyse Chez Freud, il y a linstance du Sur-Moi: quand je veux, cest que a veut!. Do un dplacement vers lorigine de la loi. Quel est lenjeu du commandement? Cest--dire comment je fais avec la loi?

La volont est un malaise de lUn car il y a alors un rgime de lexception intrieure ce que je suis. Pour Sartre, lunit psychique doit tre axiomatiquement dclare. Il ruine la psychologie comme psychologie dun conflit des facults. La scne subjective, cest le conflit des facults. La psychologie vient du thtre, non linverse. Le thtre est le transcendantal de la psychologie. Le thtre est sa constitution transcendantale.

Sartre dthtralise la psychologie car il y a reconnaissance axiomatique de lunit de la conscience. Et cette unit, cest la libert!

Pour Sartre, libert est ce partir de quoi on peut lucider la scission elle-mme. Il renverse la problmatique: il sagit dsormais dexpliquer pourquoi il y a lopposition volont/passions au regard de lunit de la libert. Il faut expliquer le deux alors quil tait lexpliquant. Le deux, de rponse, devient la question.

Cf. le deuxime argument de Sartre: la libert est constitue aussi bien des passions que des actes volontaires; Ce dont la psychologie ne rend pas compte, cest sa propre existence, la scne elle-mme, le lieu de ce conflit. La libert nest rien dautre que lexistence de notre volont et de nos passions. Libert nomme lexistence pure du lieu, du conflit. Sinon, cest entirement dli.

La psychologie ne peut expliquer ltre de la psychologie. Existence et la mme chose que libert pour Sartre. Existence nomme une autre figure que ltre. La volont, cest la modalit de la libert, non son indicateur; cest un de ses modes possibles.

Dans le montage classique, la volont est ce qui atteste quil y a libert et non pas un mode de la libert. La preuve: y compris en Dieu, la volont est libre. Cf. pour Descartes, la volont en lhomme gale la volont en Dieu.

Dans Sartre, la volont est une des figures de la libert.

Pour les classiques, la volont entrane la libert: cf. lacte volontaire a une existence indubitable.

Pour Sartre, la libert entrane la volont. Il va donc falloir une thorie particulire de lacte libre comme acte volontaire. Il lui faut expliquer lacte volontaire comme illusion classique.

Intervient ici la rflexivit. Pourquoi?

Si lacte volontaire nest pas plus libre que lacte passionnel (tout acte humain est libre), alors le caractre volontaire de lacte est une illusion si lon admet que ce caractre volontaire ferait la libert. Cf. la mprise car je ne me rapporte pas la fin de lacte de la mme manire. Dans un acte volontaire, je me reprsente la fin, je me rapporte la fin de manire rflchie. Dans un acte passif, il y a par contre irrflexivit.

Parce que je me reprsente la fin, je mimagine que cest par le biais de cette rflexivit que je lai dcide. L est lillusion: cette reprsentation de la fin nest possible que parce que je lai dj dcide! Cf. p.527: la volont comme annonciation; la volont, cest lange de mon acte. La volont mannonce cette fin que je poursuis dans mon acte. Et je prends cette annonciation pour une dcision. Cf. la manire datteindre la fin dj pose[] non pas dcider quelle fin atteindre.

Il y a donc bien des actes volontaires qui se distinguent par leur modalit. La volont nest plus la cause de lacte mais leffet de lacte! Do la question de la puissance dillusion de la rflexivit. La volont est une modalit rflexive de la dcision et non pas le choix de la fin. Soit lillusion de croire quune reprsentation peut avoir une puissance causale. Car la volont est ici une reprsentation.

La rflexivit est linstrument dune lucidit suprieure pour les classiques. La rflexivit est une oprateur dillusion pour Sartre. Cf. Bergson, Deleuze

La rflexivit nest pas ce qui donne clart la dcision. La rflexivit dispose les choses comme si jtais en train de dcider alors que jai dj dcid. Toute rflexivit est aprs-coup. Il ny a pas, dans la libert, de rflexivit au prsent. Elle est toujours dans laprs-coup de ce quelle reprsente.

Mais est-il vrai que la volont est rflexive? Oui si on est dans la psychologie classique: un acte volontaire est alors un acte qui examine sa maxime.

En fait il sagit chez Sartre dune tentative dsespre, hroque donc. Tentative dsespre car trop interne ce quelle critique. Sartre est le dernier des grands psychologues. Sartre opre de lintrieur de connexions maintenues. Mais il ny a pas de sortie!

IV.13 mars 2003

Existe-t-il un usage non classique de la notion de volont? En effet, volont est exemplairement une construction du classicisme franais du XVII sicle approprie aux mutations de la science. Volont tait une catgorie ncessaire pour identifier ce quest un sujet dans un monde post-galilen. Un sujet ne peut plus tre une figure dintgration vivante dans un cosmos harmonieux (comme il ltait pour les Grecs); il y a une inhumanit du monde naturel (cf. la mcanisation entrane la physique moderne). Parmi les nouveaux oprateurs pour construire le concept dhomme, le nouvel humanisme, la volont intervient comme un identificateur subjectif.

Cette construction classique est loin dtre exclusivement philosophique: cf. le thtre. Ainsi, dans la catgorie de volont, convergeaient diffrentes procdures intellectuelles.

Usage classique de la catgorie:

1. Son reprage

2. Sa problmatique pratique

3. Son statut mtaphysique ou le destin dtre de la catgorie de volont.

1) Reprage

La catgorie de volont est reprable la fois comme catgorie psychologique et comme catgorie morale. Elle intervient la jointure des deux.

Catgorie psychologique? car la volont est une facult de lesprit parmi dautres. On la dfinit par diffrence davec dautres facults. Cf. pour Descartes: la volont est essentiellement infinie l o la facult de connaissance est finie.

Catgorie morale? Cf. Descartes et sa corrlation de la volont et de la libert. Cette dimension morale connatra son apoge chez Kant. Rien nest absolument bon quune volont bonne.

2) Problmatique pratique

Cf. quel usage descriptif et concret de cette catgorie? Tout se joue ici dans la corrlation entre volont et libert. Cf. article 41 des Passions de lme de Descartes: La volont est tellement libre de nature quelle ne peut jamais tre contrainte. Il y a donc une rciprocit entre volont et libert: la volont, cet la libert comme facult de lme, non comme dtermination abstraite. La volont, cest une localisation de la libert comme facult; la volont, cest ltre-l de la libert; la volont, cest lexercice localis, la praticabilit de la libert.

3) Statut mtaphysique

La volont, cest ce qui identifie un sujet car elle est ce qui spare le Moi de la dtermination extrieure, du monde. Cest loprateur qui spare et donc identifie.

Il existe ici une mtaphysique dualiste (ontologique) dernire: cf. Spinoza, qui refuse le dualisme, refuse cette catgorie. Pour lui, la volont appartient limaginaire; la volont est ainsi la preuve par labsurde du lien!

La catgorie de volont sinscrit donc dans lespace dune ontologie dualiste. Les autres facults nattestent pas la sparation (par rapport la dtermination) du Moi dans le monde.

Ceci va entraner que la volont, cest ltre du sujet par scission du Moi lui-mme (et pas simplement par sparation du monde). Cf. la volont est spare des autres facults; la volont, cest la part propre du Moi, cest le propre du Moi dans le Moi. Cf. le roman au XIX sinterroge sur: quel est le propre du sujet? La part irrductible du Moi est traque par recensement des dterminations. La part propre du Moi se trouve ultimement concentre par la dcision volontaire. La volont dsigne alors ce qui du Moi nest pas appropri au monde, la dsappropriation du monde quand pour les dterministes, la volont est une fiction.

Critique de la conception classique

Derrida me dclarait que le concept de volont est celui dont il a le moins usage. Cf. la fonction mtaphysique de ce concept; ainsi la dconstruction de la mtaphysique entrane celle du concept de volont.

Il existe trois grandes critiques de cette conception classique de la volont:

1.critique de la psychologie

2. critique de la moralit

3. critique de la mtaphysique

1. Critique de la volont comme catgorie psychologique (Sartre)

Cette critique est celle de Sartre. Pour lui, le choix libre est toujours quelque chose de plus radical que ne peut ltre une facult. Il y a dans le motif de la dcision libre quelque chose qui nest pas localisable dans une facult, dans le psychologique. Il y a une dimension ontologique de la libert (ltre du nant) qui se subordonne toute localisation: quand je veux quelque chose, quand quelque chose se prsente comme un vouloir, en fait je lai dj dcid. Ainsi le vouloir nest pas le lieu mais la prsentation mme.

Cette critique est-elle dvastatrice?

Sartre suppose quil y a une immdiatet ontologique de la volont: la volont, cest limmdiat de lexistence, et il y a le dispositif psychologique des facults. Il admet, lui aussi, une scission entre immdiat et mdiat; do que la volont est une production factice: les facults sont toutes mdiates.

Sartre contourne en fait lhypothse que la libert elle-mme serait une construction et non pas limmdiat subjectif, quelle aurait alors des conditions de construction. Pour Sartre, la libert est inconditionne ou nest pas. Pour lui, la libert, si elle est sous conditions, nest pas libre.

Mais on peut rsister cette thse: lopposition dune dtermination intgrale et dune libert absolue est un proto-dualisme de Sartre. Et si la libert tait constructible? Et sil y avait des conditions de libert? Ainsi en France on na jamais t aussi libre que sous lOccupation, et le prisonnier la veille de mourir est le plus libre! Or pour Sartre, il nexiste pas de combat pour la libert. La libert est pour lui la condition de tout combat.

La critique de Sartre (et dautres) est quil nest pas vrai que la libert puisse se localiser dans une opration particulire.

Sortir de cette critique, cest donc tenir la libert pour une construction, tenir que la libert est mdiate.

2. Critique de la volont comme catgorie morale (Nietzsche)

Cest la critique nietzschenne (cf. Gnalogie de la morale). L aussi il y a critique de ltroitesse de la localisation: la volont morale, cest un type dtre ractif. Elle exprime un ressentiment, la volont dimposer la culpabilit. Ce quil sagit de culpabiliser selon Nietzsche, cest laffirmation: la volont, cest une localisation dun type dtre anti-affirmation.

Nietzsche va proposer une autre volont. Il va scinder la volont et poser quil y a la volont pour la puissance, quil y a laffirmation intgrale de la vie. Le vrai vouloir pour lui ne sinstalle pas dans la mutilation de laffirmation. La volont pour Nietzsche est valuante (cratrice de valeurs) et pas value. La volont morale, par contre, est une mutilation de laffirmation.

Pour Nietzsche, la valeur de la vie ne peut pas tre value: la valeur de laffirmation ne peut pas tre value car elle est lvaluation elle-mme.

La volont morale, cest ce qui prtend faire comparatre la vie devant le tribunal de lvaluation. Pour Nietzsche, la volont localiserait la vie dans lespace des valeurs: avoir la vie est ce par quoi il y a des valeurs.

La catgorie de volont apparat ici comme une localisation insuffisante de laffirmation ontologique majeure:

la libert (Sartre),

laffirmation de la vie comme puissance (Nietzsche).

Le prsuppos de cette critique, cest quil y a un rgime univoque de la vie, quil y a une unit originaire de laffirmation. Ainsi laxiome majeur de cette univocit est: la vie est invaluable.

Cela suppose que ce qui est invaluable, cest ce partir de quoi il y a valeur. Do quil ny a pas alors de doctrine praticale du possible: cf. la critique du possible par Bergson ou Deleuze. Le possible supposerait en effet une potentielle division de lunit affirmative de la vie. Ainsi pour Bergson, le possible nest que le nom de baptme rtroactif du rel.

Et sil ny a pas doctrine du possible, que signifie le vouloir? Vous ne pouvez alors vouloir que ce quil y a. Cela laisse de ct quil y ait une pure neutralit du vivant, que le vivant ne soit pas puissance affirmative.

La conception classique de la volont savre ainsi trop troite au regard du dynamisme vital car dj norme. Mais on peut maintenir quil y a une question de la possibilit du possible: sil y a lunit de la substance (Spinoza) ou lunit de llan vital (Bergson), alors il nexiste pas de possible!

Volont est alors reconstruire non comme ce qui traite du choix du possible mais de laffirmation du possible: ce qui affirme la possibilit du possible. La volont se prononce alors sur la possibilit du possible; elle est une facult non pas slective mais constituante.

3. Critique de la mtaphysique du dualisme

Cette critique existe ds Spinoza.

Daccord: il ny a pas de dualisme mtaphysique; la volont nest pas une localisation spare de linstance de lEsprit. En ce sens, notre poque est plutt spinoziste: un spectre hante la mtaphysique: Spinoza! On est des hritiers de Spinoza: Spinoza est le Christ de la philosophie (Deleuze). Il annonce en effet que dsormais lincarnation est radicale; on ne peut tre dans llment de la sparation. Il nexiste pas de rgimes distincts de ltre; en rgle gnrale, il y a la dtermination; en rgle gnrale, il y a la rptition.

Cependant, ne peut-on admettre des interruptions dans les sries rptitives? On nadmettra alors pas des dualismes globaux mais des lacunes locales. Volont pourrait alors nommer lartifice dun enchanement non enchan; volont pourrait nommer le sujet au point dune coupure de la rptition, dune rptition qui na pas t cre par le sujet (qui nest donc pas une souverainet).

Volont, cest alors le sujet convoqu la csure, le sujet convoqu comme maillon manquant, le sujet convoqu involontairement. Volont, cest ce qui se passe lorsque linvolontaire est lacunaire. Cf. cette exprience de la volont comme rquisition, do langoisse. Langoisse est le signe de la rquisition du vouloir, cest langoisse de la lacune: on ne peut plus faire confiance linvolontaire, les dterminations du monde ne nous portent plus; il va donc falloir vouloir cest--dire faire tre une possibilit. Dhabitude, on est dans la slection des possibles. Au point dun vouloir, il sagit de se faire tre soi-mme comme possibilit nouvelle. On ne peut donc souhaiter personne dtre convoqu au point de vouloir

Si on admet quil peut y avoir de la lacune dans les sries rptitives, alors vouloir, cest passer l o a ne passe pas, cest dcider une possibilit inexistante, cest crer une possibilit et non pas choisir.

Deuxime critique: il y a une unit ontologique de la conscience. Or la volont, cest toujours une thorie de la scission subjective, cest le propre du Moi contre son improprit qui est son appropriation au monde, cest ce quil y a de plus subjectif dans le sujet.

Sartre soutient ainsi une unit: il ny a pas pour lui darne fictive pour cette scission. Autant dire que le sujet, pour lui, est libert.

Cf. Proust: la volont comme masque dune dtermination; la volont nest quun discours, cest un mode dexpression, un camouflage mondain.

On en retiendra que la prsupposition ontologique de la volont ne peut pas tre celle de lun. Ainsi lontologie du sujet ne peut tre celle de lun (lun du sujet).

Or, si dans la conception classique de la volont, soit on est intgralement libre, soit on est intgralement dterministe, on peut cependant identifier le sujet une ontologie du multiple et non plus de lun, lidentifier alors dans une complexit du sujet. On nest pas en effet accul au choix entre lun ou le deux!

Voir ainsi chez Lacan lhsitation entre le trois (RSI: Rel / symbolique / Imaginaire) et le quatre (RSI + son nouage).

Voir de mme chez Hegel: lobjectif est de penser lAbsolu comme sujet. Cf. la Prface la Phnomnologie de lEsprit et la fin de la Logique: lapparence dialectique, cest la triplicit, mais la ralit, cest le 4, non le 3, car le terme surnumraire assure la pense rcollective du mouvement triple.

Il sagit donc dchapper lunit du sujet et la dualit mtaphysique. La volont serait une composante dune complexit: on nexigera plus quelle soit transparente elle-mme. Ceci est une rponse la critique psychanalytique de la volont.

Pour la psychanalyse, la volont est une catgorie de la conscience; elle peut dissimuler du dsir inconscient. Mais attention: il ny a pas de dualisme dans la psychanalyse; il y a toujours du trois: cf. conscient/ inconscient/ prconscient.

Sil y a une complexit structurale, la volont serait une instance de cette complexit sans quon exige delle quelle soit transparente.

Il existerait ainsi des actes volontaires mais pas transparents eux-mmes. La volont, en effet, nest pas forcment transparente ou intgralement dlibrative. La volont resterait articule au symptme. Ce serait une volont symptomale qui resterait distincte de linvolontaire.

Ceci impose daccepter que le sujet est complexe. Do le concept de la volont impure.

Programme possible dune volont impure en 4 proprits

Premire proprit

La volont serait lie une doctrine constructive de la libert et non pas ontologique: ltre libre est sous conditions.

Deuxime proprit

La volont serait lie, non la slection des possibles, mais une instauration dun possible. Elle ne traiterait pas essentiellement de la ralisation dun possible mais de la possibilit dun possible. Elle aurait donc affaire limpossible: la volont aurait quelque chose de rel et pas de formel. La conception classique, cest la volont comme forme de lacte. Ici la volont serait relle: en proie limpossible.

Troisime proprit

La volont serait lie des points de lacune des sries dtermines, des points dinterruption de la rptition quelle ne dciderait pas. Elle aurait faire tre le sujet dans linterruption, faire du corps du sujet la nouvelle connexion, rorienter ainsi la rptition. Cf. tout sujet est un corps.

Quatrime proprit

La volont serait sur fond de complexit subjective et ne serait pas ncessairement transparente elle-mme. Il y aurait toujours plus en elle que ce qui est immdiatement reprsentable. Il aurait toujours un surplus, un reste inaltr. La volont pourrait tre le vecteur du dsir sans que ce soit une catgorie vaine. Il peut y avoir en effet collage dun dsir une volont sans que pour autant la volont soit le dsir.

Ainsi, la volont, ce nest pas routinier, ce nest pas pur. Limpuret du vouloir ne le destitue pas comme activit singulire mais il y a une raret du vouloir: il existe pour cela des conditions.

Question: volont & politique

Ce systme de conditions ne fait-il pas quun espace naturel de la catgorie de volont serait la politique?

Ce ne serait cependant pas le seul espace pour la volont: cf. il existe bien une volont amoureuse. Mais il est vrai quil ny a pas de politique sans volont: la politique est subordonne une volont. Ainsi:

Pas de politique sans que la libert soit construite. La politique est confronte une libert relle et pas formelle. La politique est confronte un point dimpossible.

Il faut tre convoqu une interruption.

Articulation complexe: le vouloir politique est impur; il a toujours fallu accepter quil le soit. Cf. complexit immdiate du collectif!

Il y a donc bien une destination particulire la politique de la catgorie de volont. Ceci est prsent ds Rousseau sous le terme de volont gnrale: lexistence dune volont gnrale est la condition de la politique. Cf. les paradoxes de la politique de Rousseau: Jaime mieux tre un homme paradoxes qutre un homme prjugs.

Donc chez Rousseau:

Aucune psychologie collective

La volont nest pas une catgorie morale (disant le Bien).

La volont institue la politique, cre la politique. Elle est moderne en ce sens.

La libert civile est lexercice de la volont gnrale.

La volont est une dcision sur le possible (voir Le Contrat social)

La volont touche aux interruptions, aux discontinuits avec lexistence naturelle. La complexit de cette volont gnrale se donne chez Rousseau dans le vote.

Bilan (septembre 2003)

Parler de vouloir plutt que de volont (facult). Donc de vouloirs: un vouloir, et un autre, et un autre

Desceller le vouloir de cette dcision qui intervient aprs une dlibration, un relev du pour et du contre, un examen des motifs et mobiles. Vouloir nest pas proprement parler trancher un indcidable.

Desceller de mme le vouloir de la libert: tre libre, cest se tenir pour responsable de ses actes (et dires), quils soient volontaires ou involontaires tre libre nest pas essentiellement vouloir. Vouloir nest donc quune forme parmi dautres dune libert.

Dlier donc le vouloir de volont, dcision et libert.

Le vouloir est conditionn, non pas inconditionn. Ce nest pas une possibilit permanente, perptuellement disponible et convocable la demande (cf. ce nest pas une facult). Il y a des conditions pour vouloir. Le vouloir nest donc pas une capacit formelle, logique mais dpend de conditions ontologiques. Il y a un ici et maintenant pour chaque vouloir.

Un vouloir est une assignation un point de rel, donc un point dimpossible. Vouloir, cest toujours vouloir un impossible donn, apparu; cest vouloir rendre possible un impossible. Vouloir, cest forcer un point dimpossible pour le rendre possible.

Vouloir est requis en un point dangoisse. Ntant pas slection parmi des possibles disposs et offerts mais tant rquisition au point o un rel prend forme dinterruption (en sorte dinstaurer un nouveau possible), vouloir va avec angoisse.

Vouloir implique dengager son corps, le corps du sujet. Forcer un point dimpossible se fait en y engageant son corps. Vouloir, cest engager en un point dimpossible son corps comme nouvelle connexion au point mme dinterruption. Cette nouvelle connexion, bien sr, nest pas du mme type que celle qui manque: il ne sagit pas de rpter ce qui a cess de rpter. Il sagit de commencer en ce point autre chose.

Vouloir, cest commencer quelque chose (plutt que continuer, qui est plutt la fidlit).