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UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE
« Devenir un employeur de choix : Un défi à sa mesure pour le Centre de santé et de services sociaux - Institut
universitaire de gériatrie de Sherbrooke »
par
Josée Paquette
Essai intervention présenté à la Faculté d’administration
comme exigence partielle du diplôme 3e cycle en administration (D3C)
Université de Sherbrooke
Août 2008
© Josée Paquette, 2008
UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE
Faculté d'administration
« Devenir un employeur de choix : Un défi à sa mesure pour le Centre de santé et de services sociaux - Institut
universitaire de gériatrie de Sherbrooke »
Josée Paquette
Cet essai intervention a été évalué par un jury composé des personnes suivantes :
Jean-Maurice Trudel Président du jury
Mario Roy Directeur de recherche
Denis Lalumière Représentant du milieu
SOMMAIRE
Une vision à moyen terme des structures démographiques québécoises laisse
entrevoir des perspectives plutôt inquiétantes au niveau du marché de l’emploi. En
effet, le Québec évolue graduellement vers une situation où les personnes âgées
représenteront, d’ici une quinzaine d’années, 25 % de la population. Incidemment, les
jeunes et les personnes actives sur le marché du travail seront en décroissance,
particulièrement à partir de 2011 et ce, pour au moins deux décennies.
Le vieillissement de la main-d’œuvre, jumelé à une relève insuffisante,
engendreront des défis importants en matière de gestion de ressources humaines.
Plusieurs observateurs anticipent une grave crise de l’emploi qui impliquera une
guerre féroce des talents; attirer et retenir une main-d’œuvre qualifiée deviendront la
priorité pour toute organisation.
Le réseau de la santé et des services sociaux n’échappera pas à cette
conjoncture préoccupante. D’ailleurs, les pénuries d’effectifs se font d’ores et déjà
pressentir, tel qu’en fait foi les nombreux travaux menés par diverses instances du
réseau socio-sanitaire ainsi qu’une couverture médiatique régulière au sujet du
manque de ressources humaines au sein des organisations en santé. Ce contexte
alarmiste incite les employeurs à se distinguer, à convoiter le statut d’employeur de
choix.
La problématique explorée dans cet essai intervention concerne la pénurie de
main-d’œuvre actuelle et surtout celle plus déterminante anticipée dès 2011 dans le
réseau de la santé et des services sociaux ainsi que dans la société québécoise qui
compromet dans la même foulée la qualité et la prestation des services à la clientèle
du Centre de santé et de services sociaux - Institut universitaire de gériatrie de
Sherbrooke (CSSS – IUGS).
4
Pour faire face aux enjeux en matière de gestion de ressources humaines,
notre intervention consistait, à la première étape, à mettre en place un comité
consultatif et des mécanismes de concertation pertinents. Suivant ces démarches,
s’étant déroulées sur une période d’environ un an, la seconde étape de l’intervention
visait à influencer les hautes instances décisionnelles de cette organisation, soit le
comité de direction et le comité des ressources humaines et informationnelles issu du
conseil d’administration, à s’engager à devenir un employeur de choix.
Dans cette optique, cet établissement doit se positionner comme une
organisation attrayante, conservant ses employés grâce à un environnement de travail
stimulant, comportant notamment des opportunités de croissance personnelle et de
développement professionnel.
Pour étudier et circonscrire notre problématique, nous avons exploré dans les
écrits scientifiques les notions d’attraction, de rétention, d’employeur de choix ainsi
que les divers paramètres associés aux générations présentes sur le marché de
l’emploi. Certains modèles théoriques ont été examinés, particulièrement en ce qui a
trait à l’attraction et à la rétention. De plus, nous avons consulté la littérature à propos
des stratégies d’influence à préconiser au niveau de hautes instances décisionnelles,
afin de soutenir la préparation et le déroulement des démarches d’influence, la
seconde étape de notre intervention.
Tenant compte des avancées scientifiques consultées, nous proposons un plan
de travail préliminaire qui sera à peaufiner avec la collaboration des groupes
d’intérêts de l’organisation d’ores et déjà impliqués dans des activités visant à contrer
le manque d’effectifs.
En outre, puisque nous avons constaté que la notion spécifique d’employeur
de choix s’avère peu étudiée par les chercheurs jusqu'à ce jour, notre analyse de la
problématique de la pénurie de main-d’œuvre de même que nos références proposées
5
pour devenir un employeur de choix se révèleront des références pertinentes pour les
organisations souhaitant se documenter sur le sujet. Nous proposons d’ailleurs
quelques démarches de transfert d’informations, plus spécialement au sein du réseau
de la santé et des services sociaux, dans le but de partager nos réflexions et notre
analyse.
Par ailleurs, tel qu’entrevu dans les écrits, s’engager à devenir un employeur
de choix impliquera un renouvellement des valeurs de gestion; il s’agit d’un long
processus de travail. Cette démarche de transformation est pilotée par la Direction des
ressources humaines et informationnelles du CSSS – IUGS; soulignons que l’auteure
assume un rôle de leadership structurant, étant la directrice de ce service.
En définitive, devenir un employeur de choix consistera d’abord à construire
un schème de valeurs spécifiques partagé par tous mais, en priorité, par les
gestionnaires.
TABLE DES MATIÈRES
SOMMAIRE ................................................................................................................ 3
LISTE DES TABLEAUX ......................................................................................... 10
LISTE DES FIGURES ............................................................................................. 11
INTRODUCTION ..................................................................................................... 13
PREMIER CHAPITRE LA PRÉSENTATION DE L’ORGANISATION ET DE SON CONTEXTE ENVIRONNEMENTAL .............................................. 17
1. LES POINTS DE REPÈRES HISTORIQUES .............................................................. 18
1.1 L’évolution en bref du réseau sociosanitaire québécois ................................. 18
1.2 La création du CSSS-IUGS : les étapes marquantes ...................................... 20
2. LA MISSION, LA VISION ET LES VALEURS .......................................................... 21
2.1 La mission du CSSS - IUGS ........................................................................... 22
2.2 La vision d’avenir du CSSS – IUGS ............................................................... 23
2.3 Les valeurs du CSSS - IUGS .......................................................................... 24
3. LES MANDATS ET SECTEURS D’ACTIVITÉS DU CSSS – IUGS ............................ 25
3.1 Le secteur des activités cliniques .................................................................... 26
3.2 Le secteur des activités reliées au projet clinique et à la qualité..................... 28
3.3 Le secteur des activités universitaires ............................................................. 29
3.4 Le secteur des activités de soutien aux activités cliniques et administratives 31
3.5 Le secteur des activités reliées à la Direction générale : 19 personnes........... 32
DEUXIÈME CHAPITRE LES ENJEUX DE MAIN-D’ŒUVRE ET L’ÉNONCÉ DE LA PROBLÉMATIQUE ....................................................................... 34
1. LES ENJEUX DE MAIN-D’ŒUVRE AU CSSS - IUGS ........................................... 34
1.1 La démarche de planification de main-d’oeuvre ............................................. 35
1.2 Les données de planification de main-d’oeuvre ............................................. 40
1.3 Les constats et les pistes de réflexion ............................................................. 53
2. LE CONTEXTE SOCIODÉMOGRAPHIQUE QUÉBÉCOIS .......................................... 56
2.1 Le portrait sociodémographique québécois .................................................... 56
7
2.2 La définition et les attributs du terme pénurie ................................................ 61
2.3 L’état de situation en matière de main-d’œuvre dans le réseau de la santé et des services sociaux ........................................................................................ 62
2.4 L’influence des générations sur le marché du travail ..................................... 68
3. L’ÉNONCÉ DE LA PROBLÉMATIQUE .................................................................. 77
TROISIÈME CHAPITRE LA RECENSION DES ÉCRITS ............................... 81 1. LES NOTIONS D’ATTRACTION ET DE RÉTENTION ............................................... 82
1.1 L’attraction ...................................................................................................... 84
1.2 La rétention ..................................................................................................... 90
1.3 Quelques observations et liens concernant les notions d’attraction et de rétention .......................................................................................................... 97
2. LES CARACTÉRISTIQUES DE L’EMPLOYEUR DE CHOIX .................................... 100
2.1 Des références globales sur la notion d’employeur de choix........................ 101
2.1.1 Quelques données relatives à la notion d’employeur de choix issues d’études de cas ............................................................................................................. 102
2.1.2 Le recours à la notion d’« Employeur de choix » par les organisations ....... 105
2.2 Les caractéristiques des « Magnets hospitals » ............................................ 106
2.3 Les caractéristiques de « Planetree movement » .......................................... 108
2.4 Quelques observations et liens concernant la notion d’employeur de choix ainsi que sur les approches « Magnet hospital » et « Planetree ». ................ 110
2.5 Une synthèse des notions associées à un employeur de choix ...................... 111
3. LES STRATÉGIES POUR MOBILISER LES HAUTES INSTANCES DÉCISIONNELLES 114
3.1 Le contexte environnemental ........................................................................ 115
3.2 Les leviers associés aux stratégies d’influence ............................................. 117
QUATRIÈME CHAPITRE LA MÉTHODE, LE CONTENU ET LES RÉSULTATS DE L’INTERVENTION .................................................... 122
1. LA PREMIÈRE ÉTAPE DE L’INTERVENTION : LA MISE EN PLACE DU COMITÉ CONSULTATIF SUR LES STRATÉGIES À ADOPTER FACE À LA PÉNURIE DE MAIN-D’ŒUVRE ET L’AMORCE DES TRAVAUX (MARS 2007 À MARS 2008) ............... 124
1.1 Le mandat et les responsabilités du comité consultatif sur les stratégies à adopter face la pénurie de main-d’œuvre ...................................................... 126
1.2 Les résultats issus de la mise en place du comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de main-d’œuvre ................................................... 128
8
2. LA DEUXIÈME ÉTAPE DE L’INTERVENTION : LES DÉMARCHES D’INFLUENCE VISANT À FAIRE ADOPTER UNE ORIENTATION STRATÉGIQUE, SOIT DE DEVENIR UN EMPLOYEUR DE CHOIX, AUPRÈS DU COMITÉ DE DIRECTION ET DU COMITÉ DES RESSOURCES HUMAINES ET INFORMATIONNELLES (JUIN 2008) ...................... 130
2.1 La méthode préconisée pour les démarches d’influence .............................. 131
2.2 La préparation des démarches d’influence.................................................... 136
2.3 Le déroulement et les résultats des démarches d’influence auprès du comité de direction et du comité des ressources humaines et informationnelles .......... 138
3. UN BILAN GLOBAL ET LES SUITES DES DEUX ÉTAPES DE L’INTERVENTION ..... 144
CINQUIÈME CHAPITRE LES BALISES POUR ÉLABORER UN PLAN DE TRAVAIL AFIN DE DEVENIR EMPLOYEUR DE CHOIX ............... 147
1. LES APPUIS ET LES AXES DE TRAVAIL EN VUE DU FUTUR PLAN DE TRAVAIL ... 148
2. LES ACTEURS ET LEURS RÔLES ....................................................................... 150
2.1 La haute direction ......................................................................................... 150
2.2 Les champions .............................................................................................. 151
2.3 Les équipes porteuses ................................................................................... 152
3. LES ENJEUX POTENTIELS ................................................................................ 153
3.1 Les enjeux relatifs au suivi du projet ............................................................ 154
3.2 Les enjeux relatifs à l’implication des accréditations syndicales ................. 155
3.3 Les enjeux relatifs au changement de rôle des gestionnaires ........................ 155
SIXIÈME CHAPITRE L’ANALYSE CRITIQUE .............................................. 158 1. LES APPRENTISSAGES ET LES CONSTATS ASSOCIÉS À L’ÉLABORATION DE L’ESSAI
INTERVENTION ............................................................................................... 158
1.1 Les apprentissages et les constats liés à l’élaboration de l’essai .................. 158
1.2 Les apprentissages et les constats liés à l’intervention ................................. 160
1.2.1 La première étape de l’intervention : La mise en place du comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de main-d’œuvre ..................... 161
1.2.2 La deuxième étape de l’intervention : Les démarches d’influence auprès de deux instances décisionnelles........................................................................ 164
1.2.3 Des constats globaux concernant les deux étapes de l’intervention ............. 168
2. LES APPRENTISSAGES ET LES CONSTATS CONCERNANT LES MODÈLES CONCEPTUELS ................................................................................................ 169
2.1 L’influence des générations .......................................................................... 170
9
2.2 Les notions d’attraction, de rétention et de roulement de personnel ............ 171
2.3 Les caractéristiques des employeurs de choix .............................................. 175
2.4 Les stratégies d’influence et l’approche « Future search » .......................... 178
2.5 Des réflexions globales concernant les références théoriques ...................... 181
3. DES PISTES DE RECHERCHE ............................................................................ 182
SEPTIÈME CHAPITRE LE PLAN DE VALORISATION ............................... 184
CONCLUSION ....................................................................................................... 187
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES .............................................................. 190
ANNEXE A PLAN STRATÉGIQUE 2006-2011 ................................................. 198
ANNEXE B ORGANIGRAMME CSSS-IUGS .................................................... 199
ANNEXE C STABILISATION DES RESSOURCES HUMAINES .................. 201
ANNEXE D MANDAT DU COMITÉ CONSULTATIF SUR LES STRATÉGIES À ADOPTER FACE À LA PÉNURIE DE MAIN-D’ŒUVRE ................................................................................................... 207
ANNEXE E PRÉSENTATIONS AUX COMITÉS .............................................. 214
ANNEXE F PLAN DE TRAVAIL PRÉLIMINAIRE ......................................... 232
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : La répartition des sexes et des statuts d’emploi ....................................... 41
Tableau 2 : La répartition par l’âge ............................................................................. 42
Tableau 3 : Les départs à la retraite et en congé de maternité .................................... 44
Tableau 4 : Les motifs de mouvements ...................................................................... 46
Tableau 5 : Une comparaison entre les directions ...................................................... 47
Tableau 6 : Une comparaison entre les principales catégories d’emploi .................... 48
Tableau 7 : Une comparaison entre les titres d’emploi vulnérables ........................... 49
Tableau 8 : Les pénuries nationales anticipées en 2010 ............................................. 64
LISTE DES FIGURES
Figure 1 : Une population québécoise décroissante .................................................... 57
Figure 2 : Le nombre de travailleurs sortants pour le nombre de travailleurs entrants ..................................................................................................... 58
Figure 3 : Les caractéristiques des générations ........................................................... 76
Figure 4 : Vers l’employeur à choisir, les facteurs de rétention ............................... 113
Figure 5 : Les appuis et les axes de travail ............................................................... 149
Figure 6 : Les concepts interreliés : Attraction, Rétention et Employeur de choix .. 176
REMERCIEMENTS
La mise en œuvre de cet exercice très formateur et stimulant qu’est
l’élaboration d’un essai intervention n’aurait pu voir le jour sans la chaleureuse
invitation de Madame Lise Custeau du bureau des études de troisième cycle, durant
l’été 2007. Nous lui adressons nos plus sincères remerciements pour avoir su éveiller
notre intérêt et surtout rendre ce projet réaliste à nos yeux.
Mais ce projet n’aurait pu être réalisé sans le soutien indéfectible de monsieur
Mario Roy, professeur et chercheur à l’Université de Sherbrooke, notre directeur de
projet. Il a dirigé nos travaux avec beaucoup de tact et de rigueur, nous fournissant
toujours un conseil judicieux au bon moment, tout en nous encourageant à poursuivre
notre propre cheminement. Nous le remercions d’avoir accepté de nous encadrer,
malgré nos échéanciers de réalisation serrés et un emploi du temps de son côté très
chargé. Nous sommes fiers d’avoir pu bénéficier de l’expertise et du soutien de
monsieur Roy; ce dernier nous a permis de concrétiser ce défi associé à la réalisation
de notre essai intervention.
Enfin, nous soulignons la contribution de Monsieur Maurice Compagnat,
conjoint de l’auteure, qui, avec patience, ouverture et attention, a lu et relu tous les
textes soumis et suggéré des améliorations toujours pertinentes. Son soutien et ses
encouragements quotidiens ont grandement contribué à la réalisation de la démarche.
INTRODUCTION
Être un employeur de choix s’avère incontestablement un statut convoité par
toutes les organisations, publiques ou privées, ainsi qu’un symbole de performance,
surtout dans un contexte où le déclin démographique frappe le Québec de même que
l’Amérique du Nord.
Les organisations gagnantes se révèlent celles sachant attirer et surtout retenir
une main-d’œuvre qui se raréfie. Le monde du travail, en mutation, est marqué par
divers bouleversements, notamment des changements démographiques impliquant la
venue sans cesse croissante de nouveaux arrivants avec des valeurs face au travail
divergentes de celles des ressources en place au sein des organisations.
Notre essai intervention se consacrera à la notion d’employeur de choix, en
ciblant une organisation du réseau de la santé et des services sociaux. Nous rendrons
compte d’une intervention s’étant déroulée sur une période de quinze mois et
effectuerons un travail d’analyse et de réflexion concernant, notamment, les stratégies
à actualiser pour que cet établissement se distingue et devienne un employeur de
choix.
L’auteure, directrice des ressources humaines et informationnelles au Centre
de santé et de services sociaux – Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke
(CSSS – IUGS), a mis en place des structures de travail appropriées pour faire face à
la conjoncture empreinte de défis en matière de gestion de main-d’œuvre. Suite à ces
démarches, elle aspire maintenant à influencer les instances décisionnelles de
l’organisation afin qu’elles s’engagent dans un processus formel et exigeant, pouvant
s’étaler sur quelques années, dont l’aboutissement ultime est que l’organisation soit
reconnue comme employeur de choix tant par les chercheurs d’emploi que par les
employés de l’établissement.
14
Notre essai intervention comportera sept chapitres et s’amorce par la
présentation, au premier chapitre, de l’organisation et de son contexte
environnemental. Nous décrirons d’abord l’évolution récente du réseau de la santé et
des services sociaux dans le but de mettre en lumière les enjeux qui en découlent,
particulièrement au plan de la gestion des ressources humaines. Par la suite, nous
énoncerons les principaux attributs du CSSS – IUGS, sa mission, sa vision, ses
valeurs et décrirons globalement ses mandats et ses secteurs d’activités.
Le second chapitre comprend trois sections. Premièrement, nous évoquerons
l’une des questions de gestion les plus impératives pour cette organisation, soit le défi
associé au renouvellement et à la rétention des effectifs. Pour ce faire, nous
expliquerons d’abord la nature de la démarche poursuivie par l’organisation en
matière de planification de main-d’œuvre, pour ensuite exposer sommairement les
données recueillies et analysées à l’occasion de cette opération. Nous soulevons aussi
les principaux enjeux organisationnels de main-d’œuvre mis en lumière par cet
exercice. À la deuxième section, nous aborderons la conjoncture sociodémographique
québécoise, démontrant des enjeux imminents de disponibilité de main-d’œuvre.
Nous définirons le terme pénurie, fréquemment utilisé pour circonscrire les enjeux
actuels de main-d’œuvre et analyserons les tendances et défis reliés spécifiquement
au bassin de main-d’œuvre du réseau sociosanitaire. Pour terminer la seconde section,
nous décrirons les caractéristiques, les valeurs et les aspirations des travailleurs issus
des différentes générations, œuvrant dans le monde du travail. La troisième section du
chapitre énonce la problématique managériale à examiner. Celle-ci origine de la
pénurie de main-d’œuvre actuelle et anticipée, tant au niveau organisationnel qu’au
sein du réseau de la santé et des services sociaux.
Ce manque qualitatif et quantitatif de ressources humaines compromet
sérieusement la qualité, voire la prestation des services à la clientèle au CSSS –
IUGS. En conséquence, l’attraction et la rétention de la main-d’œuvre deviennent
15
des préoccupations fondamentales, générant une compétition de plus en plus
impitoyable entre les employeurs. Dans ce contexte, nous avançons que devenir un
employeur de choix, notre but ultime, relève davantage de la survie que d’une option
à envisager.
Le troisième chapitre vise à rendre compte des écrits, sous la forme d’une
synthèse des notions pertinentes associées au concept d’employeur de choix. Pour ce
faire, trois sections seront développées. En premier lieu, les construits scientifiques
déployés autour des phénomènes d’attraction et de rétention seront présentés. En
seconde partie, nous décrirons les caractéristiques de l’employeur de choix et
traiterons des concepts apparentés, provenant du secteur de la santé, tels le Magnet
hospital et l’approche Planetree. Soulignons d’emblée que l’on retrouve peu de
littérature scientifique concernant la dénomination spécifique d’Employeur de choix.
Finalement, en troisième partie de ce chapitre, sera proposée une recension succincte
des écrits portant sur les facteurs favorisant l’influence des hautes instances
décisionnelles.
Le chapitre quatre vise à rendre compte de l’intervention qui comprend deux
étapes. Tenant compte de la conjoncture de main-d’œuvre particulière teintée par un
manque de ressources de plus en plus évident, la première étape de l’intervention a
consisté à mettre sur pied un comité organisationnel et des mécanismes de travail
concertés impliquant différents acteurs du CSSS – IUGS. Ces démarches, constituant
la première section du chapitre, se sont déroulées sur une période d’environ un an.
Dans cette section, les groupes d’intérêt concernés seront décrits ainsi que les
résultats globaux observés suite à la mise en œuvre de ce comité consultatif sur les
stratégies à adopter face à la pénurie de main-d’œuvre. À la seconde section, nous
rendrons compte de la deuxième étape de l’intervention qui vise à influencer deux
groupes de décideurs afin qu’ils émettent une orientation claire conduisant à devenir
un employeur de choix. Nous décrirons la méthode préconisée pour favoriser
l’adhésion au projet par les acteurs stratégiques et détaillerons les différents aspects
16
de cette intervention d’influence s’étant déroulée récemment. En terminant cette
deuxième section, nous ferons état des résultats de ces interventions d’influence qui
visaient ultimement à obtenir un engagement de la part des hautes instances
décisionnelles à devenir employeur de choix. À la troisième section, nous
présenterons un bilan global et proposerons les suites des deux étapes de
l’intervention.
Le chapitre cinq, quant à lui, concerne l’élaboration d’un plan de travail
préliminaire qui soutiendra les démarches à conduire pour atteindre notre but ultime.
Ce plan, présenté en annexe, propose les thèmes à aborder ainsi que certaines
activités à réaliser tenant compte des avancées théoriques énoncées dans cet ouvrage.
Dans la première section du chapitre, nous décrirons plus spécifiquement ces thèmes
inclus au plan de travail préliminaire. En second lieu, le rôle et les mandats
spécifiques des principaux acteurs seront abordés. Troisièmement, les écueils
potentiels à envisager seront succinctement mentionnés.
Au chapitre six, nous effectuerons une analyse critique et partagerons notre
réflexion relative à la démarche, tant au plan de l’élaboration de l’essai qu’au niveau
de la réalisation de l’intervention réalisée en deux étapes. Nous dégagerons aussi
quelques constats et apprentissages et émettrons certains questionnements pouvant
éventuellement faire l’objet de recherches.
Enfin, le dernier chapitre effleurera les mécanismes de transfert de
connaissances pouvant être articulés au terme de l’essai intervention. Ce plan de
valorisation inclura essentiellement des démarches à effectuer dans le but de diffuser
les résultats au sein de l’organisation et du réseau de la santé et des services sociaux,
tant au palier régional que national.
En guise de conclusion, nous ferons ressortir les faits saillants issus de nos
travaux et évoquerons quelques limites perçues face à notre projet.
PREMIER CHAPITRE
LA PRÉSENTATION DE L’ORGANISATION ET DE SON CONTEXTE ENVIRONNEMENTAL
Dans le cadre de la dernière réforme du système de santé et de services
sociaux introduite par le Gouvernement du Québec en 2004, soit le projet de loi 83, le
Centre de santé et de services sociaux – Institut universitaire de gériatrie de
Sherbrooke (CSSS – IUGS) a été créé en février 2005.
Le CSSS – IUGS est issu d’une intégration entre le Centre local de services
communautaires (CLSC) de Sherbrooke et l’Institut universitaire de gériatrie de
Sherbrooke (IUGS) qui inclut un centre hospitalier de soins spécialisés en gériatrie et
un important centre d’hébergement et de soins de longue durée.
Afin de bien comprendre les composantes qui façonnent l’organisation et le
contexte particulier dans lequel cette dernière évolue, nous proposons une
présentation du CSSS – IUGS et de son environnement, soit le réseau de la santé et
des services sociaux.
Dans cette optique, nous exposerons premièrement quelques points de repères
historiques concernant les vagues de réorganisations au sein des services de santé et
de services sociaux au Québec. Nous dévoilerons aussi les étapes marquantes
associées à la création de l’organisation. En second lieu, la mission, la vision et les
valeurs du CSSS – IUGS seront décrites. Par la suite, nous situerons brièvement les
mandats et les secteurs d’activités de l’organisation.
18
1. LES POINTS DE REPÈRES HISTORIQUES
Pour saisir la logique inhérente aux multiples fusions et intégrations ayant
débouché à la création du CSSS – IUGS, il importe d’esquisser sommairement les
principales phases de reconfiguration du réseau québécois de santé et de services
sociaux.
1.1 L’évolution en bref du réseau sociosanitaire québécois
Tous les systèmes sociosanitaires du monde occidental ont connu des
transformations majeures au cours de la dernière décennie. Au Québec, depuis le
milieu des années 90 sous l’impulsion du virage ambulatoire, on assiste à des
transformations majeures du système de santé et de services sociaux (Pérodeau et
Côté, 2002).
En effet, la réorganisation des systèmes de santé au Québec s’amorce par le
transfert vers l’ambulatoire (l’externe) de services et de soins dispensés
traditionnellement en centres hospitaliers. Les travaux de la Commission Rochon,
initiés par le ministère de la Santé et des Services sociaux en 1987 et présidés par
Jean Rochon (médecin fonctionnaire), donnèrent l’envol à cette réorganisation. En
résumé, les principales conclusions démontraient que si le réseau de la santé et des
services sociaux continuait de reposer sur l’institutionnalisation, comme c’était le cas,
le système deviendrait graduellement ingouvernable; on assisterait à un
accroissement des coûts de l’ordre de 400 %, tout en observant une augmentation des
délais dans la prestation des services. Selon le rapport Rochon, il faudrait bâtir au
moins 40 nouveaux hôpitaux de 200 lits, et multiplier des centres de soins de longue
durée et d’hébergement pour les personnes âgées (ministère de la Santé et des
Services sociaux, 2000).
19
Parmi les réaménagements les plus évidents et discutés découlant de cette
réforme, on relève que les centres locaux de services communautaires (CLSC) ont
augmenté, depuis 1995, de façon importante la prestation de services (soins
postopératoires, en santé mentale ou en soins palliatifs) dans la communauté pour des
patients quittant les hôpitaux plus rapidement. De plus, ces organisations ont
développé les services de réponse téléphonique Info-santé et Urgence-détresse. Les
centres de soins de longue durée et d’hébergement pour les personnes âgées
(CHSLD), pour leur part, ont dû consolider leurs services externes, notamment la
gérontopsychiatrie et les centres de jour (Pérodeau et Côté, 2002).
En conséquence, on assiste entre 1995 et 1998, à de multiples fusions et
fermetures d’établissements de santé dans plusieurs régions du Québec (Pérodeau et
Côté, 2002). Concurremment, le réseau se retrouve au cœur d’une opération
d’assainissement des finances publiques dont l’objectif ultime s’avère le déficit zéro.
Quelques années plus tard, dès 2004, la refonte de la Loi sur les services de
santé et les services sociaux (LSSS) résulte en la création de 95 centres de santé et de
services sociaux (CSSS) au Québec, initiant une nouvelle vague de fusions et
d’intégrations entre des établissements de santé de même mission ou de missions
différentes.
Conformément à la LSSS, un CSSS se définit comme une instance locale,
laquelle est un établissement multifonctionnel exploitant un centre local de services
communautaires (CLSC), un centre hospitalier de soins de longue durée (CHSLD),
et, le cas échéant, un centre hospitalier (CH) de soins généraux et spécialisés
(gouvernement du Québec, mai 2008).
De ces multiples changements, issus de réformes et de commissions d’études,
découlent une nouvelle dynamique dans la prestation des services à la population
ainsi que des impacts cruciaux au plan des ressources humaines exposées à des
20
modifications majeures des tâches et de l’organisation du travail, impliquant des
adaptations importantes. Ces mutations structurelles et stratégiques ont en effet
engendré des abolitions de postes générant des transferts de personnel intra et inter-
établissements ainsi que des départs massifs à la retraite. Comme le soulève une
publication du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), il n’est pas
surprenant que tous ces changements aient eu des impacts au plan des ressources
humaines (gouvernement du Québec, 2002).
Ces quelques repères relatant brièvement l’évolution du réseau de la santé et
des services sociaux au cours des deux dernières décennies, permettent de mieux
appréhender les différentes étapes qui mèneront à la création du CSSS – IUGS.
1.2 La création du CSSS – IUGS : les étapes marquantes
Le CSSS – IUGS est né de fusions et d’intégrations d’établissements réalisées
au gré des diverses transformations du réseau de santé et de services sociaux décrites
précédemment. Voici quelques dates marquantes qui ont jalonné son histoire (Plan
stratégique, 2006).
1888 : fondation du Centre hospitalier de Sherbrooke (Sherbrooke Hospital) 1966 : ouverture du foyer Saint-Joseph 1968 : création de l’Hôpital D’Youville de Sherbrooke 1968 : ouverture du Foyer de Bromptonville 1969 : ouverture de la Résidence de l’Estrie 1972 : création du CLSC SOC (Sud-Ouest-Centre) 1985 : création du CLSC Gaston-Lessard 1992 : création du CHSLD Estriade (Foyer Saint-Joseph, Foyer de Bromptonville et Résidence de l’Estrie) 1996 : création de l’Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke (Hôpital D’Youville et Centre hospitalier de Sherbrooke) 1999 : fusion des CLSC SOC et Gaston-Lessard (CLSC de Sherbrooke) 2004 : intégration à l’IUGS des CHSLD Estriade 2005 : création, le 5 février, du Centre de santé et de services sociaux – Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke (CSSS – IUGS)
21
Découlant de ce parcours pouvant être qualifié de véritable marathon, le
CSSS – IUGS est fondé à partir de sept établissements distincts, soit le Centre
hospitalier de Sherbrooke, le Foyer Saint-Joseph, l’Hôpital D’Youville de
Sherbrooke, le Foyer de Bromptonville, la Résidence de l’Estrie, le CLSC SOC et le
CLSC Gaston-Lessard.
On constate donc que l’organisation nouvellement créée en 2005 et les
ressources humaines qui la composent, auront vécu cinq réorganisations, issues de
fusions ou d’intégrations, entre 1992 et 2004. De tels réaménagements intermittents
ont certainement nécessité des adaptations importantes de la part du personnel et des
acteurs organisationnels responsables de la gestion et de la prestation des services.
Suite à ces quelques points de repères historiques, énonçons maintenant la
mission, la vision et les valeurs adoptées par le CSSS – IUGS.
2. LA MISSION, LA VISION ET LES VALEURS
Dès l’automne 2004, soit aussitôt la décision ratifiée par les hautes instances
d’intégrer le CLSC de Sherbrooke au sein de l’Institut universitaire de gériatrie, des
démarches sont amorcées par le directeur général en titre afin d’élaborer une
stratégie, selon une approche incrémentale, pour déployer la nouvelle structure
organisationnelle.
Afin de préparer et soutenir de façon optimale cette démarche déterminante,
les directions administratives (la Direction des ressources humaines et
informationnelles et la Direction des ressources financières et matérielles) ont été
regroupées de façon intérimaire, tandis que les directions cliniques ont été maintenues
intactes jusqu’à ce que l’organisation définisse son plan stratégique. Notons que la
majorité des établissements regroupés suite à l’adoption de la nouvelle Loi sur la
santé et les services sociaux ont eu recours à une stratégie où la structure était
22
d’emblée entérinée par le conseil d’administration et mise en application dès lors
(CSSS – IUGS, plan d’organisation 2006-2011).
Or, cette stratégie étapiste et novatrice, empreinte de préoccupations en
matière de ressources humaines, visait à enrichir le plan stratégique par la
participation des acteurs organisationnels, par le biais de diverses instances
consultatives, évitant que les protagonistes soient préoccupés par des enjeux
structurels de réorganisation. De plus, cette approche permettait de fournir des
occasions de concertation entre les membres du personnel, au lendemain de
réorganisations successives. Il s’agit d’un message clair, visant à tenir compte
d’abord des personnes plutôt que de la structure organisationnelle. Le plan
d’organisation est donc abordé comme un moyen pour atteindre une cible, laquelle
s’avère, préalablement, le développement collectif du plan stratégique (Annexe A,
Plan stratégique 2006-2011).
Ainsi, la mission, la vision d’avenir et les valeurs reproduites dans les
prochaines parties, sont issues du plan stratégique 2006-2011 de l’établissement.
2.1 La mission du CSSS – IUGS
Disposant d’un budget annuel de 120 millions de dollars, le CSSS – IUGS
compte aujourd’hui environ 2 500 employés, dont une cinquantaine de cadres
intermédiaires et quinze cadres supérieurs. Il se révèle le 5e employeur en importance
dans la région de l’Estrie. Soulignons que l’organisation se déploie actuellement sur
15 sites répartis dans la ville de Sherbrooke.
Globalement, l’établissement a pour mission d’améliorer la santé et le bien-
être de toute la population de Sherbrooke dont il a la responsabilité. Pour ce faire, il
doit assurer la coordination de l’ensemble des services requis à cette fin, la prestation
des soins et services généraux et spécialisés pour les personnes âgées de même
23
qu’assurer la formation, la recherche et le partage des connaissances dans ses
domaines d’activités (CSSS – IUGS, Plan stratégique 2006-2011).
2.2 La vision d’avenir du CSSS – IUGS
Le CSSS – IUGS entend se distinguer par son leadership efficace au service
de sa population et au cœur des réalités québécoises touchant la santé et le bien-être.
Il compte notamment être reconnu comme un chef de file dans la conception, la
coordination et la mise en œuvre de services de santé et de services sociaux de haute
qualité, répondant aux besoins des personnes, des familles et des communautés. Il
aspire à devenir un modèle pour la création de continuum et la prestation de soins et
services aux personnes âgées répondant à leurs besoins et à ceux de leur famille tant à
domicile qu’en situation d’hébergement.
L’organisation souhaite être un acteur majeur dans la promotion de la santé et
la prévention de la maladie et des problèmes sociaux favorisant la prise en charge et
la responsabilisation des individus et des collectivités à l’égard de leur santé et de leur
bien-être.
Elle agira en tant que porte d’entrée du réseau de la santé et des services
sociaux, simple et facile à utiliser, où toute demande est reçue et par laquelle sont
rendus accessibles les bons services au bon moment.
Le CSSS-IUGS sera créateur de réseaux et un partenaire mobilisateur et
respectueux, travaillant en complémentarité et établissant des mécanismes de liaison
stables, clairs et efficaces.
L’établissement vise à être reconnu comme un lieu d’excellence dans les
services d’hébergement et les soins de longue durée, offrant à sa clientèle un milieu
de vie chaleureux auquel participent les familles et les bénévoles ainsi qu’un foyer
24
d’expertise interdisciplinaire reconnu au plan national dans le domaine des soins et
services de première ligne et, aux plans national et international, dans le domaine du
vieillissement, offrant son soutien au réseau de la santé et des services sociaux et
particulièrement aux établissements du Réseau universitaire intégré de santé (RUIS)
dont il est membre.
Enfin, l’organisation se positionne par sa mission universitaire en intégrant
harmonieusement les activités de soins et services, la formation et la recherche. Elle
constitue un milieu de travail stimulant et une organisation apprenante capable
d’attirer et de garder un personnel compétent et dévoué et de susciter son esprit de
coopération, son sentiment d’appartenance et sa fierté. C’est une organisation connue
de tous pour son engagement social et son imputabilité.
Cette vision d’avenir s’ancre dans des valeurs organisationnelles ayant fait
l’objet d’un vaste consensus.
2.3 Les valeurs du CSSS - IUGS
Telles qu’en témoignent les valeurs organisationnelles, le capital humain,
constitue un ancrage stratégique incontournable. Pour faire face aux défis relatifs aux
ressources humaines, l’organisation souhaite adopter des pratiques de gestion
décentralisées et participatives, alliant souplesse et rigueur.
En ce sens, le CSSS – IUGS convient de placer les personnes et les familles
au centre de toutes ses actions et de fonder ses choix en fonction de ces valeurs : le
respect, l’excellence, le partenariat et la collaboration, la solidarité et l’engagement,
l’autonomie et la responsabilisation, et l’innovation.
25
Ces valeurs, plutôt d’ordre général rejoignent autant les personnes prodiguant
des services aux usagers que celles fournissant des services de soutien au sein de
l’organisation.
Dans cet ordre d’idées, un énoncé de positionnement a été soigneusement
sélectionné afin de stimuler l’émergence d’un dénominateur commun auquel chaque
membre de l’organisation est appelé à contribuer : la santé, une passion à partager.
Par ailleurs, soulignons que la philosophie de gestion est en cours
d’élaboration, documentant les principes et valeurs déjà entérinés et qui seraient mis
en application depuis les trois dernières années.
Toutefois, il ne s’agit pas que d’écrire des orientations prometteuses, le réel
défi s’avère plutôt de faire ce qui est écrit, afin d’éviter que la réalité soit divergente
des engagements. Certes, ce test de la réalité est une variable capitale pour être
reconnu en tant qu’employeur de choix.
Il manque à ce tour d’horizon concernant la structure du CSSS – IUGS, les
principaux mandats et secteurs d’activités. C’est ce qui est décrit à la prochaine
section.
3. LES MANDATS ET SECTEURS D’ACTIVITÉS DU CSSS – IUGS
Pour réaliser les mandats qui lui sont confiés et octroyer les services requis,
l’organisation est structurée en cinq grands secteurs d’activités, soit le secteur des
activités cliniques, le secteur des activités reliées au projet clinique et à la qualité, le
secteur des activités universitaires, le secteur des activités de soutien aux activités
cliniques et le secteur des activités reliées à la Direction générale (Plan stratégique,
2006-2011). Cette architecture organisationnelle, impliquant plusieurs services et
26
directions facilite l’identification du personnel à une composante de plus petite taille,
correspondant plus aisément à leurs aspirations professionnelles.
Afin d’entrevoir la complexité, la variété et l’étendue des programmes offerts
par l’organisation, nous exposerons les principaux services offerts par chacune des
directions. De surcroît, ce portrait fournira les assises pour mieux assimiler les
données proposées au prochain chapitre, soit l’état de situation face au
renouvellement de la main-d’œuvre au CSSS – IUGS. Effectivement, des liens seront
facilités entre les types de ressources en pénurie et les directions les plus touchées.
En outre, pour ne pas alourdir cette section décrivant les services déployés
dans les directions, nous n’indiquerons que le nombre de ressources pour chacune
d’entre elles. Les titres d’emploi pertinents à notre analyse de main-d’œuvre seront
donc précisés au chapitre deux.
D’autre part, pour les fins du présent exercice, il n’a pas été jugé opportun de
décrire les diverses instances internes, communes à plusieurs établissements de santé
et de services sociaux, dont notamment le conseil d’administration, le comité des
usagers, les comités des résidents, le commissaire local aux plaintes et à la qualité.
L’organigramme présenté en annexe (Annexe B, Organigramme du CSSS - IUGS)
permet de situer globalement la structure organisationnelle.
Amorçons maintenant la description des secteurs d’activités et des directions
en utilisant le plan d’organisation en guise de référence.
3.1 Le secteur des activités cliniques
Les directions cliniques sont le cœur de l’organisation; elles assurent chaque
jour la mission première de l’établissement, soit de fournir des services aux usagers et
aux personnes résidentes (volet hébergement) dans le but ultime d’améliorer la santé
27
et le bien-être de la population de Sherbrooke. Quatre directions et un service
complètent l’organisation clinique de l’établissement.
3.1.1 La Direction des services et programmes aux personnes âgées ou en perte d’autonomie (DSPPAPA) : 1 250 personnes
Cette direction assume l’ensemble des soins et des services aux personnes
âgées ou en perte d’autonomie et se subdivise en trois grands secteurs, soit les
services d’hébergement, les services de courte durée et les services professionnels.
Plus spécifiquement on y retrouve les services de soutien à domicile, le Centre et
l’Hôpital de jour, les services aux personnes âgées en ressources intermédiaires ou de
type familial, les services d’hébergement et de soins de longue durée (750 lits),
l’Unité de courte durée gériatrique ainsi que les cliniques externes spécialisées.
3.1.2 La Direction des services généraux et des programmes spécifiques aux personnes adultes (DSGSPA) : 130 personnes
Cette direction comprend les services et programmes aux personnes de moins
de 65 ans. Citons notamment les services d’accueil santé et psychosocial, les services
courants infirmiers, la centrale régionale Info-santé, les services Urgence-détresse,
l’Équipe de santé mentale, la Clinique du voyageur international, le Centre de
dépistage anonyme du VIH-Sida, le Centre de maternité et les Services de santé en
milieu de détention.
3.1.3 La Direction des programmes et des services spécifiques aux enfants, aux jeunes et à leur famille (DPSEJF) : 117 personnes
L’importance et la spécificité des interventions à réaliser par l’établissement
auprès des enfants, des jeunes et de leur famille impliquent un vaste champ
d’activités. Cette direction est responsable des services psychosociaux aux enfants,
aux jeunes et à leur famille, des services psychosociaux aux jeunes en difficulté, des
28
services en santé mentale jeunesse, de la vaccination et des services de santé en
milieu scolaire, des services d’hygiène dentaire, des services de liaison postnatale,
des services d’orthophonie aux enfants ainsi que des programmes de répit aux
familles et aux proches.
3.1.4 La Direction des services professionnels et du partenariat médical (DSPPM) : 188 personnes, dont 87 médecins
La LSSS prévoit que dans les établissements où pratiquent des médecins, ces
derniers soient regroupés au sein d’une Direction des services professionnels, laquelle
doit être placée sous la responsabilité d’un médecin. Par ailleurs, la DSPPM se voit
aussi confier d’autres responsabilités portant sur des activités et services qui sont en
lien étroit avec l’activité médicale. Ainsi, cette direction se voit confier, en plus des
services médicaux, d’autres services tels que la pharmacie, la dentisterie, les services
de laboratoire et de radiologie et le service des archives.
3.1.5 Le service des sages-femmes (SSF) : 12 personnes
Le service des sages-femmes, tel que prévu par la Loi sur la santé et les
services sociaux (LSSS), relève directement de la Direction générale. Les sages-
femmes offrent des services de suivi prénatal et postnatal et des services
d’accouchement au Centre de maternité, à domicile ou en milieu hospitalier.
3.2 Le secteur des activités reliées au projet clinique et à la qualité
Les CSSS sont imputables, avec leurs partenaires, de ce que la LSSS désigne
comme une responsabilité populationnelle supposant, notamment, la connaissance de
l’état de santé et des besoins de la population de référence. De plus, les attentes
croissantes du gouvernement et de la population afin que les établissements rendent
compte de leur performance conduisent le CSSS – IUGS à mettre en œuvre diverses
29
activités pour soutenir les efforts d’amélioration continue de la qualité et les
processus de reddition de comptes. Deux directions regroupent ces activités.
3.2.1 La Direction du projet clinique, de la santé publique et du développement des communautés (DPCSPDC) : 10 personnes
Cette direction se voit confier des responsabilités telles qu’animer,
coordonner, soutenir et superviser la démarche de mise en place du projet clinique et
du réseau local de services ainsi qu’établir des liens étroits avec les partenaires et
coordonner le plan d’action de l’établissement en matière de développement des
communautés.
3.2.2 La Direction de l’évaluation et de l’assurance-qualité (DÉAQ) : cinq personnes
La pierre angulaire de cette direction s’avère les enjeux de reddition de
compte. Dans cette optique ses principaux mandats sont relatifs au processus
d’agrément, au traitement des plaintes, à la satisfaction des usagers, à la gestion des
risques, au suivi des ententes de gestion ainsi qu’à la production et l’analyse des
données sur les services et la clientèle.
3.3 Le secteur des activités universitaires
Le CSSS – IUGS est un établissement unique au Québec, puisqu’il est le seul
CSSS qui a été, dès sa création, intégralement désigné comme établissement
universitaire. Quatre directions regroupent les activités universitaires.
30
3.3.1 La Direction du Centre de recherche sur le vieillissement (DCDRV) : 92 personnes
Cette direction, responsable du Centre de recherche sur le vieillissement, a été
créée pour enrichir les connaissances sur le vieillissement afin de favoriser de
développement biologique, psychologique et social des personnes âgées.
3.3.2 La Direction de la recherche du centre affilié universitaire (DRCAU) : deux personnes
À l’instar de la DCDRV, cette direction est également imputable du
développement, de la coordination et du suivi des activités de recherche dans son
domaine, soit les soins et les services de première ligne.
3.3.3 La Direction de l’enseignement en lien avec la Faculté de médecine et des sciences de la santé (DEFMSS) : deux personnes
La Direction de l’enseignement en lien avec la Faculté de médecine et des
sciences de la santé assume la planification, la coordination et le suivi des activités
d’enseignement pour les programmes de cette faculté dont ceux en médecine et en
sciences infirmières.
3.3.4 La Direction de la coordination et des affaires académiques (DCAA) : 33 personnes
Cette direction assure la réalisation de mandats dans toutes les sphères de la
mission académique de l’établissement, soit l’enseignement, la recherche, le transfert
de connaissances et l’innovation clinique.
31
3.4 Le secteur des activités de soutien aux activités cliniques et administratives
Quatre directions regroupent les activités de soutien et d’assistance,
incontournables pour appuyer tous les secteurs du CSSS – IUGS.
3.4.1 La Direction des ressources humaines et informationnelles (DRHI) : 63 personnes
La Direction des ressources humaines et informationnelles s’efforce de
soutenir et de favoriser la mobilisation des personnes ayant la responsabilité
quotidienne de prodiguer des services ou du soutien administratif. Elle entretient des
interfaces de partenariat avec les instances syndicales, au nombre de quatre,
représentant tous les employés syndiqués de l’établissement, soit environ 2 000
personnes.
Les fonctions habituellement dévolues à une Direction des ressources
humaines sont assumées par la DRHI, telles que la dotation, la planification de la
main-d’œuvre, la mutation interne, la rémunération, les avantages sociaux, la
formation, la présence au travail et les relations de travail.
Par ailleurs, soulignons que les responsabilités en matière de planification de
main-d’œuvre s’avèrent dorénavant un pivot majeur rassemblant les enjeux en
matière de gestion de ressources humaines; nous y consacrons d’ailleurs le prochain
chapitre.
En plus des fonctions usuelles, cette direction doit aussi assurer le
fonctionnement continu, l’adaptation et l’évolution des différents systèmes
informatisés afin de répondre et même anticiper les besoins de l’organisation.
32
3.4.2 La Direction des ressources matérielles et financières (DRMF) : 388 personnes
En plus de soutenir une saine gestion financière de l’établissement, la DRMF
voit aux achats d’équipements et fournitures, de même qu’à l’entretien et, le cas
échéant, à la rénovation ou la réparation des immeubles. Cette direction gère
notamment les projets d’agrandissement ou de transformation des espaces physiques,
les services environnementaux, les mesures d’urgence et le service d’alimentation.
3.4.3 La Direction des soins infirmiers (DSI) : six personnes
La LSSS prévoit qu’un directeur des soins infirmiers doit être nommé dans
tout établissement exploitant un CSSS. La Direction des soins infirmiers exerce une
fonction de soutien lui conférant une autorité fonctionnelle sur la qualité de la
pratique en matière de soins infirmiers.
3.4.4 La Direction des services multidisciplinaires (DSMU) : deux personnes
Les responsabilités de cette direction consistent à soutenir les pratiques
professionnelles pour l’ensemble des disciplines, excluant les sages-femmes ainsi que
les ressources en soins infirmiers, médicaux et pharmaceutiques. Citons par exemple,
les travailleurs sociaux, les ergothérapeutes, les physiothérapeutes, les orthophonistes
et les archivistes.
3.5 Le secteur des activités reliées à la Direction générale : 19 personnes
Comme dans toute organisation, la Direction générale a la responsabilité de
s’assurer du bon fonctionnement de l’ensemble des activités, en lien avec la mission
et les objectifs entérinés par le conseil d’administration. Par ailleurs, les récents
changements au sein du réseau de la santé et des services sociaux ont confié aux
directions générales la responsabilité majeure de favoriser, à tous les niveaux, le
33
développement du travail en réseaux de services. Ajoutons aussi comme défi pour la
Direction générale les enjeux associés aux mandats universitaires.
Dans le prochain chapitre, nous abordons d’abord un enjeu crucial auquel
s’avère confrontée cette organisation, à l’instar du réseau de la santé et des services
sociaux, soit le renouvellement de la main-d’œuvre. Suivront la description du
contexte sociodémographique québécois et l’énoncé de la problématique.
DEUXIÈME CHAPITRE
LES ENJEUX DE MAIN-D’ŒUVRE ET L’ÉNONCÉ DE LA PROBLÉMATIQUE
Les mutations du monde du travail, s’illustrant notamment par des enjeux
relatifs à la main-d’œuvre, seraient particulièrement influencées par les changements
démographiques, déjà ressentis par bon nombre d’employeurs.
Afin de mieux comprendre ce contexte, nous décrirons spécifiquement les
enjeux de main-d’œuvre du CSSS – IUGS et plus globalement la conjoncture
sociodémographique québécoise. Les répercussions qui en découlent, spécialement
une pénurie de main-d’œuvre, nous permettront d’étayer les fondements de notre
problématique.
Ainsi, ce chapitre comporte trois sections, soit les enjeux face à la gestion de
la main-d’œuvre au CSSS – IUGS, le contexte sociodémographique québécois ainsi
que l’énoncé de la problématique.
1. LES ENJEUX DE MAIN-D’ŒUVRE AU CSSS – IUGS
Depuis quelques années, plus précisément à la fin de 2005, la pression exercée
par le manque d’effectifs se fait ressentir de plus en plus et ce dans tous les secteurs
organisationnels. Il devient donc primordial de se référer à des données objectives et
de s’appuyer sur un diagnostic étoffé afin d’aligner des stratégies correctives.
D’ailleurs, dans le plan stratégique 2006-2011, des orientations ont été
endossées à cet égard. Citons deux d’entre elles : « Adopter une approche proactive et
concertée face au recrutement, à la rétention et à la mobilisation des ressources
35
humaines » de même que « Mettre en œuvre un plan d’action dynamique et prospectif
pour assurer la présence des ressources humaines nécessaires à l’établissement »
(Plan stratégique, 2006-2011, p. 64).
Les enjeux face à la gestion de la main-d’œuvre au CSSS – IUGS seront
abordés en trois parties. La première retracera la démarche de planification des
effectifs initiée par la Direction des ressources humaines et informationnelles, la
seconde présentera l’état de situation proprement dit, tandis que la dernière partie
abordera certains constats et pistes de réflexion ressortant de l’exercice.
1.1 La démarche de planification de main-d’œuvre
Un processus de planification de main-d’œuvre vise à obtenir le portrait des
effectifs, tant qualitatif que quantitatif, afin d’en dégager les enjeux présents et futurs
en matière de disponibilité de la main-d’œuvre (Brassard, 2007). De fait, pour
répondre adéquatement au défi impérieux de la main-d’œuvre, il faut d’abord
connaître l’état de situation permettant de planifier les ressources, d’anticiper les
besoins, pour ensuite ressortir les enjeux concrets et finalement identifier les pistes,
voire les priorités d’intervention. Puisqu’elle permet, ultimement, de produire un plan
prévisionnel, la planification de la main-d’œuvre devient un levier stratégique, capital
pour toute organisation.
Dès la fin de l’année 2006, suivant les démarches finales d’intégration ayant
mené à la création du CSSS – IUGS, la Direction des ressources humaines et
informationnelles initie le processus de planification de main-d’œuvre selon une
approche structurée, impliquant différents acteurs organisationnels, dont les
gestionnaires et les instances syndicales. Dans le but d’assurer une structure de suivi
permanente, la formation d’un comité organisationnel est entérinée par le comité de
direction, soit le comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de
36
main-d’œuvre. La mise sur pied de ce comité consiste en la première étape de notre
intervention qui sera détaillée au chapitre quatre.
Pour saisir les liens avec la démarche de planification de main-d’œuvre,
soulignons que ce comité, représentatif des principaux secteurs d’activités de
l’organisation, se veut un phare guidant et appuyant ce processus de renouvellement
des effectifs. Il est constitué de champions, issus de différents niveaux
organisationnels, qui soutiennent le développement et le déploiement de cette
démarche cruciale au sein de l’organisation. Partant justement de cette concertation
suscitée pour le projet de planification de main-d’œuvre, nous verrons plus loin que la
mobilisation de plusieurs acteurs organisationnels génère une des clés à succès pour
devenir un employeur de choix.
En outre, un processus de planification de la main-d’œuvre s’avère complexe
pour une organisation de cette taille, d’autant plus que les effectifs sont répartis selon
environ 50 titres d’emploi, au sein de services, comme nous l’avons constaté
précédemment, fort diversifiés. La planification de la main-d’œuvre dans le réseau de
la santé et des services sociaux, bien que consignée dans les fonctions usuelles des
directions de ressources humaines et encadrée par la LSSS (l’article 231 énonce
l’obligation pour les établissements de développer un processus de planification de
main-d’œuvre) ne s’avère point une expertise développée à grande échelle, telles
qu’en témoignent les consultations effectuées par la Direction des ressources
humaines et informationnelles.
D’ailleurs, selon Tomblin (2005), peu d’avancées scientifiques supportent des
stratégies de planification de ressources humaines au Canada; les organisations,
jusqu’à tout récemment, basaient leurs besoins en matière de ressources humaines à
partir de données d’informations issues des années antérieures, plutôt que suivant des
analyses prospectives.
37
Tenant compte de ces considérations ainsi que de la portée stratégique de ce
processus pour l’organisation, la Direction des ressources humaines et
informationnelles s’est adjoint une ressource experte dans le domaine pour
l’accompagner, particulièrement pour la conceptualisation de la démarche, le
démarrage ainsi que pour l’analyse des données préliminaires.
Selon cette consultante, une démarche de planification de la main-d’œuvre
comporte, sommairement, trois grandes phases, soit l’inventaire des effectifs, le
diagnostic sur la vulnérabilité et le plan prévisionnel de la main-d’œuvre,
habituellement triennal (Brassard, 2007). À ce jour, le CSSS – IUGS a franchi deux
des trois phases. Le plan prévisionnel de la main-d’œuvre devrait être complété en
décembre 2008.
La première phase consiste essentiellement à ressortir des données factuelles,
grâce à des outils informatiques spécialisés, traçant un portrait quantitatif des départs
possibles à la retraite et en congé de maternité en fonction de paramètres configurés
nationalement. Par exemple, les personnes de 57,5 ans et plus sont signalées comme
partant à la retraite, tandis que les femmes de moins de 35 ans sont identifiées comme
des potentiels de congés de maternité, selon une moyenne de 1,8 enfants.
Ces présomptions ne pouvant s’avérer exactes, des données qualitatives,
cumulées à la phase deux, se révèlent absolument nécessaires. Néanmoins, la
première phase a le mérite de lancer la démarche et mobiliser les acteurs à partir de
ces données préliminaires qui engendrent fréquemment un choc propice pour obtenir
un certain niveau de concertation.
La seconde phase est d’une ampleur considérable car, pour qualifier et
approfondir les données amassées à la phase initiale, il devient impératif de
rencontrer tous les gestionnaires. Ces rencontres visent à passer en revue toutes les
ressources de leurs secteurs et services, afin de documenter les risques de départs,
38
permanents ou temporaires, associés à diverses causes telles la retraite, le congé de
maternité, le déplacement dans un autre service, le congé d’études ou le départ de
l’établissement. Ces informations sont recueillies selon une perspective de trois ans.
Aussi, ces rencontres permettent d’identifier les postes-clés et les individus-clés,
informations se révélant très enrichissantes pour bien planifier, le cas échéant, la
relève. Malgré la taille de l’établissement et les récents réaménagements, décrits
antérieurement, soulignons que les gestionnaires détiennent et divulguent beaucoup
d’informations concernant les mouvements potentiels de leurs ressources, ce qui nous
semble de très bon augure, sous l’angle de la planification et de la gestion des
ressources humaines.
La troisième et dernière phase, à compléter d’ici décembre 2008, consiste à
déduire de l’exercice des projections de main-d’œuvre pour les trois prochaines
années. Pour ce faire, on se base sur les données recueillies à la phase deux, sur les
perspectives de développement ou de réduction de services de même que sur le
potentiel de recrutement documenté dans les divers titres d’emploi. Cette étape
permet de cerner les déficits ou, le cas échéant, les surplus de main-d’œuvre.
Une démarche efficiente de planification de main-d’œuvre se doit d’être
cyclique afin d’assurer la disponibilité continuelle de données récentes et fiables,
influençant ainsi avec justesse les décideurs. À ce titre, le Dr Stephen Birch de
l’Institut de Recherche en santé du Canada (IRSC, 2006) allègue que les
organisations ont plutôt tendance à créer des comités de crise lorsque la situation
s’avère aiguë. Ce dernier milite davantage en faveur d’une structure de planification
de main-d’œuvre permanente, assurant une disponibilité récurrente d’informations.
En terminant cette première section, dressons sommairement les étapes
franchies par l’établissement dans le cadre de ce processus de planification de main-
d’œuvre.
39
PHASE 1 : Inventaire des effectifs (automne 2006 au printemps 2007) a) Acquisition d’outils technologiques performants;
b) Répartition des personnes selon l’âge, le sexe et les statuts d’emploi;
c) Estimation du potentiel des départs à la retraite et en congé de maternité en fonction de l’âge;
d) Mise en place du comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de main-d’œuvre.
PHASE 2 : Étude et diagnostic de vulnérabilité (été 2007 à hiver 2008) a) Analyse qualitative des mouvements potentiels de personnel (retraite, congés de
maternité, autres congés à long terme);
b) Identification des emplois vulnérables et des individus-clés;
c) Diagnostic et résultats de l’étude de vulnérabilité;
d) Présentation à l’interne de la démarche et des résultats (comité de direction, gestionnaires, instances syndicales, conseil d’administration);
e) Embauche d’un gestionnaire dédié au soutien de la démarche;
f) Amorce d’un plan de communication interne et externe.
PHASE 3 : Début de l’élaboration des plans d’action avec chaque direction (mars 2008)
La prochaine partie mettra en lumière les données issues des phases un et
deux de la démarche de planification de main-d’œuvre au CSSS – IUGS, c’est-à-dire
l’inventaire des effectifs et l’étude de vulnérabilité.
40
1.2 Les données de planification de main-d’œuvre
Une pléthore de données peut être extraite du rapport de planification de
main-d’œuvre (Brassard, 2007). Pour les fins du présent exercice, le but étant de faire
ressortir les zones de vulnérabilité pour le CSSS – IUGS, nous sélectionnerons les
informations les plus appropriées et les agrémenterons de commentaires.
À cet égard, nous présenterons d’abord des données factuelles, suivies d’une
exploration des mouvements de main-d’œuvre éventuels qui en découlent. La
seconde partie s’attardera aux résultats qualitatifs amassés lors de l’étude de
vulnérabilité. Pour clôturer ce chapitre, nous étayerons quelques préoccupations de
gestion émanant du portrait de main-d’œuvre de l’organisation.
Notons que les informations soumises représentent une tendance, puisque la
composition des effectifs fluctue constamment au gré des différents mouvements
inévitables au sein d’une organisation.
1.2.1 Les faits saillants selon les données statistiques
Ces quelques faits saillants, issus des données statistiques telles que le sexe,
les années de service, les statuts et l’âge, mettent en lumière, d’emblée, certains
enjeux organisationnels.
L’organisation se compose de 23,4 % d’hommes et de 76,6 % de femmes
donc forte féminisation, retrouvée en grande partie dans le réseau de la santé et des
services sociaux.
La moyenne des années de services est de 10,4 ans au sein de l’établissement.
Pour atteindre le maximum des prestations dans le cadre du régime de retraite
gouvernemental, il faut cumuler 35 années de service dans le réseau sociosanitaire
41
(les années s’additionnent lorsqu’une personne change d’organisation). On ne peut
donc pas extrapoler les risques de départ à la retraite en fonction de cette donnée; une
analyse de chaque dossier d’employé serait indispensable.
Dans l’ensemble du CSSS – IUGS, 39,3 % des personnes occupent un poste
régulier à temps complet, 21 % un poste régulier à temps partiel alors que 39,6 % ont
un statut temporaire, communément désigné liste de rappel. Au Québec, 82 % de la
main-d’œuvre travaille à plein temps et 18 % à temps partiel. Plus spécifiquement
dans le réseau sociosanitaire, la proportion de postes réguliers par rapport aux statuts
occasionnels se situe à 75 % contre 25 %. Or, les statuts occasionnels et temporaires
augmentent généralement le niveau de vulnérabilité de l’organisation, car ces
individus, n’ayant pas d’ancrage, peuvent aisément se déplacer dans l’organisation,
voire vers d’autres établissements.
L’âge moyen du personnel est de 42,4 ans tandis qu’au Québec, l’âge moyen
de la main-d’œuvre se situe à 40 ans. Par ailleurs, la moyenne d’âge est de 42,1 ans
pour les femmes et de 43,4 ans pour les hommes.
Le tableau qui suit donne un aperçu global des données présentées.
Tableau 1 : La répartition des sexes et des statuts d’emploi
Hommes Femmes Total Temps com let
Temps p partiel Temporaire
Nombre d'individus 562 1 840 2 402 945 505 952Pourcentage 23,4% 76,6% 100,0% 39,3% 21,0% 39,6%Âge moyen 43,4 42,1 42,4 47,6 44,3 37,1Moyenne d'années de service 10,9 10,3 10,4 17,3 11,2 3,9
Source : Brassard, décembre 2007, p. 6.
En ce qui a trait à la répartition par l’âge, on relève que 29,9 % des individus
ont moins de 34 ans, 38,7 % ont entre 35 et 49 ans, 17,3 % ont entre 50 et 54 ans,
tandis que 14,1 % ont plus de 55 ans. Selon notre expert, cette répartition des groupes
d’âge indiquerait un assez bon équilibre, considérant que l’on retrouve près de 40 %
42
des individus dans la tranche d’âge présentant le moins de risque de départ à la
retraite ou en congé de maternité. Incidemment, le nombre de jeunes âgés de 34 ans
ou moins (29,9 %) constitue un avantage certain pour la relève mais représente un
défi de taille au niveau de la rétention du personnel, ces derniers représentant une
clientèle plus volatile, principalement dans les cas où ces personnes ont un statut
temporaire ou occasionnel. De plus, les mouvements dus à la maternité se sont accrus
au sein de ce même groupe d’âge. Par ailleurs, les effectifs âgés de 50 ans ou plus,
soit une proportion de 31,4 %, représentent un potentiel de retraite imminente pour
les sept prochaines années. Le tableau qui suit illustre ces informations.
Tableau 2 : La répartition par l’âge
< 34 ans 35 - 49 ans 50 - 54 ans 55 ans et +
Nombre d'individus 719 929 415 339Pourcentage 29,9% 38,7% 17,3% 14,1%
Source : Brassard, décembre 2007, p. 6.
Une analyse plus spécifique de la variable de l’âge permettra de faire ressortir
des informations pertinentes concernant les mouvements éventuels de personnel.
1.2.2 Les mouvements potentiels de personnel selon les données statistiques de l’âge
À partir de la répartition des groupes d’âge, deux types de mouvements de
personnel peuvent être anticipés, soit les potentiels de départs à la retraite et en congé
de maternité. Effectivement, à l’aide du logiciel spécialement configuré, il est
possible d’extrapoler statistiquement le pourcentage annuel de départs à la retraite
pour les 7 prochaines années ainsi que les congés de maternité potentiels pour les
10 prochaines années.
43
Conséquemment, environ 108 personnes pourraient quitter à la retraite chaque
année pour les sept prochaines années, soit 4,5 % de la main-d’œuvre. En ce qui
concerne le potentiel de congés de maternité, 66 femmes ou 2,7 % des effectifs
pourraient en bénéficier annuellement, soit 658 d’ici 10 ans. Sans considérer d’autres
types de départs, permanents ou temporaires, tels la maladie, les congés divers, les
départs volontaires, ces projections indiquent que 7,2 % de la main-d’œuvre devra
être remplacée annuellement, ce qui implique environ 175 personnes. Ces
informations sont agglomérées dans le tableau suivant.
44
Tableau 3 : Les départs à la retraite et en congé de maternité
Total % Mensuel % annuel
Nombre de personnes susceptibles de se prévaloir d'une retraite entre 2007 et 2014
754 31,4% 8,98 4,5%
Nombre de départs potentiels en congés de maternité entre 2007 et 2017
658 27,4% 5,48 2,7%
Source : Brassard, décembre 2007, p. 7.
Les données statistiques ainsi que les informations en découlant relativement
aux mouvements possibles de main-d’œuvre seront approfondies par l’étude de
vulnérabilité.
1.2.3 Les données issues de l’étude de vulnérabilité
Cette étape charnière dans le processus de planification de la main-d’œuvre
requiert une tournée de toutes les directions et services afin de confirmer ou valider
les données statistiques ressorties préalablement. Pour une organisation de
l’envergure du CSSS – IUGS, il faudra compter sur une ressource dédiée à temps
plein, pendant une période de cinq mois, pour compléter cette démarche. Il va sans
dire que cette opération s’avère une opportunité en or pour impliquer et mobiliser les
acteurs autour de cet exercice de planification.
À l’occasion de ces rencontres, préparées afin de fournir tous les outils
adaptés à chaque service, deux éléments sont particulièrement analysés, soit les
mouvements de personnel anticipés ainsi que l’identification des postes-clés et des
individus-clés; nous préciserons ces notions un peu plus loin. Il s’agit de consigner
les données en passant en revue toutes les personnes travaillant dans chaque service.
Incidemment, les personnes non titulaires de postes sont assignées au service le plus
régulièrement fréquenté.
45
Les données sont recueillies selon une projection de trois ans mais, selon
l’expert, il s’avère plus juste d’extrapoler les informations de l’année un, davantage
représentative de la réalité; en effet, plus on s’éloigne dans le temps, moins les
informations seraient fiables. De toute évidence, les gestionnaires, voire les personnes
salariées elles-mêmes, anticipent rarement leurs intentions pour plus d’un an à
l’avance, particulièrement en ce qui a trait aux congés autres que la retraite.
Considérant cette mise en garde et dans le but de pourvoir l’organisation
d’une projection suffisamment étoffée, des données triennales de 2007 à 2010 seront
produites puis transposées à partir des résultats obtenus pour l’année initiale.
1.2.3.1 Les mouvements de main-d’œuvre
Un premier regard sur les résultats de l’étude qualitative, étalée sur trois ans,
laisse présager une très grande vulnérabilité, plutôt inquiétante, pour toute
l’organisation.
Au niveau des mouvements de main-d’œuvre, c’est près de 50 % des effectifs
qui bougeront, occasionnant des défis de réorganisation, de dotation de poste ou de
remplacement. Selon l’expert, en comparaison à d’autres organisations, ces constats
se révèlent assez critiques. Par ordre décroissant selon les principaux motifs, on
retrouve : la maladie avec 11,28 %, soit 271 absences; la mobilité interne
(changement de service) avec 9,33 %, soit 224 déplacements; la retraite avec 7,95 %,
soit environ 191 départs; les congés de maternité pour environ 6,54 %, soit les départs
dont la durée n’est pas connue; divers types de congés (sans solde, études), soit 106
mouvements.
En croisant les données, on observerait 1 059 mouvements au cours des trois
prochaines années. De ce nombre, on compte 301 départs, 224 possibilités de
mobilité interne et 534 congés à long terme (six mois ou plus). Les mouvements liés à
46
la mobilité interne représentent des défis dans le contexte actuel, car les surplus de
ressources étant pratiquement inexistants, un remplacement temporaire nécessite
d’emblée une embauche.
L’essentiel des données exposées ci-haut sont représentées dans le tableau qui
suit.
Tableau 4 : Les motifs de mouvement
Motifs de mouvement Total %
Retraite 191 7,95%Départ volontaire 110 4,58%Mobilité 224 9,33%Maladie 271 11,28%Maternité 157 6,54%Sans solde 30 1,25%Études 37 1,54%Autres 39 1,62%Total 1 059 48,00%
Source : Brassard, décembre 2007, p. 8.
Le portrait général de l’établissement ne saurait être complet sans donner un
aperçu des résultats comparatifs entre les directions et les catégories d’emploi. De
surcroît, les titres d’emploi jugés les plus vulnérables par la Direction des ressources
humaines et informationnelles ont fait l’objet d’une analyse spécifique. En
considération de ce qui précède, trois tableaux seront présentés et nous en ressortirons
les faits déterminants.
Une légende de couleur permet de qualifier les pourcentages inclus aux
tableaux : le jaune indique un niveau inquiétant, tandis que le rouge révèle une
situation urgente. Ces indices ont été identifiés à partir de données historiques de
l’organisation. En effet, tenant compte des recommandations de la personne
ressource, les pourcentages d’absences diverses observés au cours des cinq dernières
47
années ont été analysés de même que leurs impacts ressentis dans l’organisation. Par
la suite, en fonction de cette réalité historique et des enjeux en découlant, les barèmes
inquiétant ou problématique ont été identifiés. Ainsi, ces barèmes seraient différents
d’une organisation à l’autre dépendant de la réalité spécifique de chacune.
INQUIÉTANT
PROBLÉMATIQUE
Le premier tableau représente les résultats de l’étude de vulnérabilité pour
toutes les directions de l’établissement.
Tableau 5 : Une comparaison entre les directions
Directions Total
N % N % N % N % N % N % N % N %DSPPM 188 4 2% 12 6% 18 10% 7 4% 5 3% 2 1%DG 19 2 11% 1 5% 1 5% 2 11% 1 5%DRMF 388 3 1% 14 4% 11 3% 15 4% 1 0,3% 2 1% 1 0,3%DRHI 63 2 3% 6 10% 1 2% 1 2% 3 5%DEAQ 5DCAA 33 1 3% 1 3% 2 6% 2 6% 1 3% 1 3%DSGPSA 130 2 2% 10 8% 18 14% 1 1% 1 1% 1 1% 2 2%DSPEJF 117 2 2% 13 11% 3 3% 2 2%CRV 92 1 1%DPCSPDC 10 2 20%DSI 6 1 17% 1 17%CME 8 1 13% 1 13% 1 13%DSPPAPA - Hébergement 920 25 3% 19 2% 98 11% 58 6% 8 1% 3 5%DSPPAPA - Courte durée 229 2 1% 7 3% 11 5% 9 4% 4 2% 1 0,4% 2 1%DSPPAPA - Serv. prof. 191 5 3% 7 4% 13 7% 6 3% 8 4% 4 2%
Maternité Sans solde Études AutresRetraite Départ volontaire Mobilité Maladie
Source : Brassard, décembre 2007, p. 17.
Quelques éléments ressortent du tableau. La Direction générale et la Direction
de la qualité sont les plus affectées par les départs à la retraite. On remarque que le
tiers des directions sont affectées par les départs autres que la retraite. La DSGPSA
semble particulièrement vulnérable à ce niveau.
La mobilité interne touche presque toutes les directions et ce, de façon
importante. Certes, les individus demeurent dans l’organisation mais cela signifie
48
qu’il faut gérer plusieurs mouvements de personnel, soit les départs, le recrutement,
la sélection, l’accueil et l’intégration.
On constate que les congés de maladie de longue durée représentent un enjeu
de taille pour près de la moitié des directions. La situation est assez inquiétante,
d’autant plus que ces données concernent les congés de six mois et plus.
Par ailleurs, les congés de maternité représentent un défi aussi important que
les départs à la retraite; connaître la durée moyenne de ces congés s’avérera utile pour
déterminer le besoin réel d’employés pour les trois prochaines années. Finalement,
les congés sans solde et autres congés représentent un pourcentage assez élevé. Il sera
pertinent de connaître les probabilités réelles de retour, afin de déterminer si ces
congés se transformeront en départs?
Le prochain tableau fournit les données selon les principales catégories
d’emploi au CSSS – IUGS. Chacune de celles-ci inclue plusieurs titres d’emploi
différents.
Tableau 6 : Une comparaison entre les principales catégories d’emploi
Catégories d'emploi Total
N % N % N % N % N % N % N % N %Cadres 77 2 3% 5 6% 4 5% 2 3% 1 1% 1 1%Professionnels 281 9 3% 19 7% 26 9% 6 2% 9 3% 5 2% 7 2%Infirmières 236 8 3% 10 4% 13 6% 7 3% 7 3% 1 0,4% 1 0,4%Infirmières bachelières 294 8 3% 10 3% 31 11% 10 3% 6 2% 2 1%Paratechniques et soins 867 13 1% 20 2% 83 10% 52 6% 6 1% 2 0,2% 3 0,3% 1 0,1%Employés de bureau 239 5 2% 3 1% 26 11% 13 5% 4 2% 2 1%Services auxiliaires et métiers 306 1 0,3% 7 2% 10 3% 13 4% 1 0,3% 1 0,3%
Maternité Sans solde Études AutresRetraite Départ volontaire Mobilité Maladie
Source : Brassard, décembre 2007, p. 19.
De ce tableau, il ressort que la catégorie des cadres est particulièrement
affectée par les départs à la retraite, ce qui entraîne des répercussions tant au plan de
la relève que de la gestion. D’une part, en combinant les départs à la retraite et les
démissions (quitter), le nombre de départs devient critique. Dans l’ordre, les
49
catégories affectées sont : les cadres (10 %), les professionnels (9 %), les techniciens
(7 %), les infirmières techniciennes (7 %) et les infirmières bachelières (6 %).
D’autre part, le taux de mobilité potentiel est assez élevé dans toutes les catégories
d’emploi. Certaines questions et enjeux émanent de ce constat : Est-ce souhaitable sur
le plan organisationnel? À quoi attribue-t-on ces mouvements; promotion, désir de
changements, mauvais climat au sein d’une équipe de travail?
Enfin, toutes les catégories d’emploi sont touchées par un nombre important
de congés, plus particulièrement les congés de maladie. Par ailleurs, les congés sans
solde demeurent assez élevés, surtout chez les cadres.
Le troisième tableau, quant à lui, décrit les zones les plus critiques pour des
titres d’emploi perçus comme précaires par la Direction des ressources humaines et
informationnelles. Cette précarité se reflète notamment par des délais plus longs pour
combler des postes (par exemple, plus d’un an pour le titre d’emploi de
physiothérapeute) ou par la faible quantité de candidats sollicitant des entrevues
suivant une offre d’emploi (par exemple, pour cinq postes de travailleurs sociaux en
santé mentale, trois curriculum vitae ont été reçus).
Tableau 7 : Une comparaison entre les titres d’emploi vulnérables
Titres d'emploi Total
N % N % N % N % N % N % N % N %Préposés aux bénéficiaires 569 8 1% 9 2% 62 11% 32 6% 4 1% 1 0,2% 1 0,2%Travailleurs sociaux 15 4 27% 1 7%Infirmières auxiliaires 185 3 2% 5 3% 19 10% 14 8% 2 1% 2 1% 1 1%Physiothérapeutes 17 2 12% 1 6% 1 6%Ergothérapeutes 29 2 7% 2 7% 1 3%Orthophonistes 10 1 10%Psychologues 14 2 14% 1 7% 1 7%Psychoéducateurs 17 4 24%Pharmaciens 6 3 50% 1 17% 1 17%Inhalothérapeutes 27 2 7% 1 4% 2 7%Diététistes 11 1 9%Cuisiniers 15 2 13%
Maternité Sans solde Études AutresRetraite Départ volontaire Mobilité Maladie
Source : Brassard, décembre 2007, p. 21.
50
Ce tableau démontre que pour 12 titres d’emploi, la situation de recrutement
s’avère précaire. On relève en effet un nombre impressionnant de zones critiques. À
noter que le titre d’emploi d’infirmière, considéré en précarité au niveau du
recrutement, ne s’y retrouve pas puisqu’il a fait l’objet d’une analyse au tableau
précédent concernant les catégories (y sont inclus tous les titres d’emploi apparentés à
l’infirmière, tels que infirmières, infirmières bachelières, infirmières chef d’équipe et
infirmières assistantes.).
Il ressort de ces données, quelques repères. Les titres d’emplois les plus
affectés par les risques de départs sont, en ordre décroissant, les pharmaciens, les
psychologues, les cuisiniers, les diététistes, les inhalothérapeutes et les infirmières
auxiliaires.
De plus, en ajoutant les différents types de congés à long terme aux départs,
nous augmentons considérablement le niveau de vulnérabilité des titres d’emplois
sélectionnés, notamment pour les pharmaciens, les psychologues et les travailleurs
sociaux. Soulignons certains éléments préoccupants, tels 17 % de congés sans solde
chez les pharmaciens, 12 % de congés autres pour les physiothérapeutes et 10 % chez
les ergothérapeutes ainsi que 9 % de congés sans solde chez les diététistes.
Par ailleurs, les congés pour études affectent particulièrement trois titres
d’emploi, c’est-à-dire les ergothérapeutes, les physiothérapeutes et les travailleurs
sociaux.
La prochaine partie aborde brièvement la question des postes-clés et
individus-clés, eu égard aux consultations effectuées auprès des gestionnaires.
51
1.2.3.2 Les postes-clés et les individus-clés
Pour dresser un portrait complet au sujet des perspectives de main-d’œuvre au
CSSS – IUGS, il faut cibler les postes et les individus reconnus comme ayant des
attributs distinctifs. Cet exercice procure des informations judicieuses pour mieux
planifier les actions, notamment en ce qui a trait à la relève. Afin de fournir quelques
points de repères, nous définirons d’abord ces notions, selon les références de la
ressource externe, pour ensuite relater globalement les résultats.
Un poste-clé peut être désigné ainsi selon trois paramètres; par compétence,
s’il requiert plusieurs qualifications distinctives, par apprentissage s’il exige une
période d’intégration beaucoup plus longue que celle généralement reconnue, ou par
repêchage s’il représente un risque de départ lié directement à la sollicitation d’autres
organisations.
Une personne-clé peut être désignée comme un atout ou une relève
potentielle. D’une part, l’individu démontrant des aptitudes, des connaissances et des
qualités personnelles particulières, faisant de lui un avantage certain pour
l'organisation, est alors reconnu comme un atout. D’autre part, celui qui, par ses
compétences, pourrait accéder à des postes supérieurs dans l’organisation, est désigné
de relève.
En conséquence, l’identification des postes-clés et des individus-clés permet
d’augmenter ou de diminuer la vulnérabilité de l’organisation. Par exemple, si
beaucoup de postes s’avèrent à risque de repêchage, la vulnérabilité organisationnelle
s’accroît, tandis qu’à l’inverse, dans le cas où beaucoup de personnes sont ciblées
comme atouts, la vulnérabilité s’avère amoindrie.
52
Les données disponibles concernant ces aspects se révèlent précieuses, en
autant qu’elles sont très spécifiques (par service, par titre d’emploi) et nominatives.
En effet, les plans d’action qui sont échafaudés impliquent de peaufiner ces
informations avec les gestionnaires et chacune des personnes salariées visées. Aussi,
pour les fins de notre portrait global, nous fournirons des données générales.
En ce qui a trait aux postes-clés, 122 nécessitent des compétences complexes,
141 des apprentissages prolongés et 148 se révèlent à risque de repêchage. C’est donc
411 postes, 16,4 %, qui représentent une certaine complexité du point de vue du
renouvellement de la main-d’œuvre.
Parmi les individus-clés, 372, soit 15,5 %, sont ciblés atouts. Toutefois, 68 de
ces personnes occupent une fonction temporaire ou occasionnelle, ce qui augmente le
niveau de vulnérabilité.
Ainsi, seulement 112 individus sont désignés comme des relèves potentielles,
soit 4,7 % de la main-d’œuvre. Rappelons que 619 départs ont été identifiés à la
section précédente. Comme pour les candidats atouts, plusieurs de ces individus ont
un statut occasionnel ou temporaire, soit 30 personnes ou 26,8 %. Cette volatilité
risquerait de compromettre les possibilités de relève au sein de l’organisation.
Ce portrait général, issu d’un processus de planification de main-d’œuvre
devant devenir itératif, soulève par lui-même l’ampleur des défis que devra relever
l’organisation en matière de renouvellement des effectifs. Néanmoins, en terminant
cette section, faisons ressortir l’essentiel des constats émergeant de cet exercice ainsi
que quelques pistes de réflexion.
53
1.3 Les constats et les pistes de réflexion
Comme nous l’avons souligné antérieurement, la démarche de planification de
main-d’œuvre fait état d’un niveau de vulnérabilité assez élevé pour l’organisation.
Certes, des actions pour attirer et retenir les personnes s’avèreront indispensables,
mais il importe de cibler quelques constats desquels pourraient émerger des pistes
d’intervention appropriées.
Ces constatations réfèrent notamment à la forte féminisation, au nombre élevé
de personnes avec des statuts temporaires, aux nombreux congés pour maladie ainsi
qu’aux départs à la retraite et en congé de maternité.
Considérant cette forte féminisation, de l’ordre de 77 %, il serait indiqué de
circonscrire la répartition par groupes d’âge, particulièrement pour les femmes de
moins de 34 ans, plus enclines aux congés de maternité.
Près de 40 % de la main-d’œuvre possèdent un statut temporaire
comparativement à 20 % dans d’autres organisations; ce constat amplifie les enjeux
de rétention et d’attraction des effectifs. C’est une priorité d’effectuer la dotation d’un
nombre maximum de postes, d’autant plus que parmi ces personnes sans postes,
plusieurs sont ciblées comme atout ou relève.
Plus de 50 % des personnes bougeront dans l’organisation pour des motifs
prioritairement associés aux congés de maladie et à des déplacements internes. En ce
qui a trait aux congés de maladie, il importe d’effectuer une analyse fine de différents
paramètres comme les diagnostics principaux, l’âge moyen, le sexe, les services les
plus touchés, les titres d’emploi. De même, concernant la mobilité, une analyse doit
être conduite : est-elle liée aux nombreux statuts temporaires, à de l’insatisfaction,
aux horaires de travail, à un besoin de changement ou à un climat de travail néfaste?
54
Des stratégies doivent être établies concernant les départs prévus à la retraite,
3e motif des mouvements. Par exemple, des mesures de transfert des connaissances
pourraient être mises de l’avant pour les postes-clés en fonction des personnes
désignées atouts ou relèves ou encore des modalités encourageant les travailleurs à
retarder leur départ.
La perspective du nombre de congés de maternité étant aussi considérable,
soit le 4e motif de mouvements, des avenues permettant de réduire la durée du congé,
sans atteinte aux droits des employées, pourraient être recherchées, telles des
réaffectations ou des services de gardiennage.
Dans le contexte où de nombreux mouvements d’effectifs sont prévisibles,
soit pour des départs temporaires ou permanents, peu d’individus s’avèrent ciblés en
tant que relèves potentielles. Un plan de relève structuré devrait être mis en place.
Pour les catégories d’emplois qui nécessiteront un recrutement intensif au
cours des trois prochaines années, eu égard aux titres d’emplois identifiés comme
vulnérables (les infirmières et infirmières auxiliaires, les préposés aux bénéficiaires,
les travailleurs sociaux, les physiothérapeutes, les ergothérapeutes, les orthophonistes,
les psychologues, les psycho-éducateurs, les pharmaciens, les inhalothérapeutes, les
diététistes et les cuisiniers), il serait important d’établir une stratégie de marketing
particulière, ainsi qu’explorer toutes les sources de recrutement.
Pour parachever ce portrait de la main-d’œuvre au CSSS – IUGS, nous
divulguerons quelques données relatives au taux de rétention compilé pour trois titres
d’emploi jugés précaires par l’organisation, soit les infirmières, les infirmières
auxiliaires et les préposés aux bénéficiaires. Ces informations étant compilées aux six
mois depuis 2003, nous pouvons connaître le taux de rétention après six mois, un an,
18 mois, pour chacun des trois titres d’emploi faisant l’objet d’embauche au fil du
temps.
55
L’objectif ici s’avérant de saisir les tendances générales, nous présentons des
résultats agglomérés, dépeignant la tendance. Ainsi, les taux de rétention se situent
aux environs de 70 % pour les infirmières et les infirmières auxiliaires et de 65 %
pour les préposés aux bénéficiaires.
Ces informations sommaires concernant les taux de rétention justifient
l’importance de comprendre le phénomène de portes tournantes, désespérant pour les
équipes de travail, les usagers ainsi que pour l’équipe de dotation de la Direction des
ressources humaines et informationnelles. S’ajoutent donc aux pistes énoncées
préalablement, d’autres interventions pour palier ces difficultés de rétention telles
que, par exemple, des entrevues de départ ou des rencontres avec les équipes.
Ces constats globaux seront enrichis par l’exploration des concepts théoriques
d’attraction et de rétention qui seront, notamment, abordés au chapitre trois.
Manifestement, les résultats découlant de la démarche de planification de
main-d’œuvre au CSSS – IUGS illustrent, d’ores et déjà, une partie du plaidoyer
devant inciter les décideurs à adopter des orientations qui permettront à
l’établissement de se démarquer, afin de préserver et d’attirer les ressources
nécessaires à la prestation des services.
Par ailleurs, pour compléter cette présentation concernant la situation de la
main-d’œuvre au CSSS – IUGS, la conjoncture plus globale relative au marché de
l’emploi doit être exposée pour bien positionner notre problématique. La prochaine
section du chapitre traite de cet aspect.
56
2. LE CONTEXTE SOCIODÉMOGRAPHIQUE QUÉBÉCOIS
Pour décrire la conjoncture sociodémographique québécoise, nous
subdiviserons cette section en quatre parties. En premier lieu, nous ferons état du
portrait démographique québécois duquel émane des projections relatives aux bassins
de main-d’œuvre. Nous mettrons en lumière un manque flagrant d’effectifs, dit
pénurie. Nous définirons, à la seconde partie, le terme pénurie de même que certaines
particularités afférentes. Troisièmement, nous indiquerons les défis, contraintes et
enjeux de main-d’œuvre auxquels est particulièrement confronté le réseau de la santé
et des services sociaux. Enfin, nous énoncerons les caractéristiques de la main-
d’œuvre composant le marché du travail. Cette dernière partie concernera notamment
les divers aspects associés aux générations de travailleurs.
2.1 Le portrait sociodémographique québécois
Une vision à long terme des structures démographiques au Québec présente,
d’une part, un vieillissement de la population ainsi que de la main-d’œuvre et, d’autre
part, une forte croissance des personnes retraitées (Légaré, 2004). Le même auteur
souligne que de tels phénomènes ne sont pas le fait exclusif du Québec; d’autres pays
industrialisés sont aussi touchés par ces tendances. Ces facteurs impliqueront donc au
cours des prochaines décennies une transformation importante de la pyramide des
âges.
Subséquemment, il est prévu que la disponibilité de la main-d’œuvre
québécoise diminuera sensiblement à partir de 2011. Pour cause, en moyenne les
Québécois prendraient leur retraite plus tôt qu’ailleurs; on observerait 29 % des gens
entre 60 et 64 ans au travail au Québec, tandis qu’en Ontario, pour cette même
tranche d’âge on en compte 42 % (Salmon, 2007). Incidemment, dès 2030, on
observera, pour un retraité, deux personnes d’âge actif au sein de la population, alors
que ce ratio se situe actuellement aux environs de un pour cinq. Du reste, d’ici 30 ans
57
la proportion des personnes âgées de 65 ans et plus passerait de 12 % à 24 %, tandis
que pour le reste du Canada, cette progression prendra 40 ans (Légaré, 2003).
Cette « impasse » démographique (Lowe, 2001), qui s’intensifierait dès le
début de la prochaine décennie, réclame une connaissance assez fine de l’offre
externe de main-d’œuvre afin d’en discerner les menaces… et pourquoi pas, les
opportunités.
Ainsi, on relève une surabondance de données, sous forme de graphiques ou
de tableaux, illustrant les diverses tendances sociodémographiques concernant le
Québec ou d’autres contrées. À tout le moins, pour saisir les faits saillants issus de
ces tendances démographiques, nous exposerons deux graphiques, suivis de
commentaires corroborés par certaines études.
Figure 1 : Une population québécoise décroissante
0
1,000,000
2,000,000
3,000,000
4,000,000
5,000,000
6,000,000
7,000,000
8,000,000
9,000,000
1901 1911 1921 1931 1941 1951 1961 1971 1981 1991 2001 2011 2021 2031 2041 2051
Année de calendrier
Popu
latio
n
0 - 14 ans
15 - 64 ans
65 ans et plus
Source: Gosselin A. (2008), Séminaire
58
Cette courbe démontre à la fois la décroissance populationnelle,
l’augmentation des personnes âgées de plus de 65 ans ainsi que la diminution de
personnes actives de 15 à 64 ans et ce, à compter de 2011. Le marché de l’emploi se
corsera donc davantage à compter de ce moment.
La prochaine figure illustre le nombre de travailleurs quittant le marché de
l’emploi comparativement à ceux le joignant et ce, entre 1996 et 2051.
Figure 2 : Le nombre de travailleurs sortants pour le nombre de travailleurs entrants
5
6
7
8
9
10
11
12
13
1996 2001 2006 2011 2016 2021 2026 2031 2036 2041 2046 2051Année de calendrier
Nom
bre
de s
orta
nts
pour
10
entra
nts
Source: Gosselin A. (2008), Séminaire
En référence à cette figure, l’équilibre entre les personnes partant à la retraite
et celles qui débutent sur le marché du travail aurait été adéquat jusqu’en 2005. Ce
constat coïncide justement avec les observations relevées antérieurement à l’effet
qu’au CSSS – IUGS, les difficultés de recrutement s’amorcent vers la fin de cette
même année. De fait, à compter de 2011, on trouvera annuellement en moyenne 12
personnes sortantes du marché du travail pour 10 personnes qui y feront leur entrée
59
(Légaré, 2004). Ce déséquilibre, engendrant un déficit de main-d’œuvre,
s’observerait pour quatre décennies.
Pour compléter ces données, brossant un portrait global des perspectives
démographiques, nous dévoilerons quelques constats émanant d’une étude effectuée
par Emploi-Québec, axée sur la conjoncture du marché du travail (Le marché du
travail et l’emploi sectoriel au Québec 2007-2011, 2007).
La population active sur le marché du travail s’accroît à un rythme plus lent
que la croissance de l’emploi, ce qui se traduira par un recul annuel, entre 2007 et
2011, du taux d’activité.
Le nombre d’emplois au Québec devrait être en hausse de 246 000 d’ici 2011.
Par ailleurs, la population active, elle, augmentera de 230 000, générant d’emblée un
écart négatif face aux besoins de main-d’œuvre.
Les emplois créés pour le marché du travail au cours des années 2002 à 2007,
ont été destinés en bonne partie aux personnes de 55 ans et plus. Ce rythme ne saurait
être maintenu, eu égard aux tendances démographiques. Effectivement, en 2007, les
premiers baby-boomers célèbrent leur 61e anniversaire; ils seront donc nombreux à
quitter le marché du travail au cours des prochaines années, considérant que l’âge
médian de la retraite (statistique Canada, 2006) serait de 60,2 ans.
Dans le cadre d’un récent scénario démographique échafaudé par l’Institut de
la statistique au Québec, relevé par Emploi-Québec, on anticipe un plafonnement de
la population active de 15 à 64 ans en 2011, suivi d’un long déclin.
En complément de ce qui précède, une autre étude spécifie que les
employeurs canadiens sont confrontés à une main-d’œuvre qui se raréfie,
particulièrement la main-d’œuvre spécialisée. On relève que certaines entreprises ont
60
dû même renoncer à des possibilités de croissance considérant les manques de
ressources (Gouvernements fédéral et provincial, 2003).
Ces informations annoncent des perspectives d’emploi préoccupantes pour les
employeurs mais certainement séduisantes pour les futurs travailleurs.
Or, le secteur des services, dont fait partie le réseau de la santé et des services
sociaux, n’échappe pas à cette tendance lourde telle que démontrée par ces quelques
projections additionnelles, issues du rapport récent d’Emploi-Québec.
Le secteur des services, qui fournit déjà plus de 75 % des emplois au Québec,
sera responsable de la quasi-totalité des emplois créés d’ici 2011, estimés à 59 000,
majoritairement au sein réseau de la santé et des services sociaux.
Ce secteur, troisième employeur au Québec, a connu, uniquement pour
l’année 2006, une hausse de 2,1 % d’emplois comparativement à l’année précédente.
Plus précisément, le secteur de la santé et des services sociaux remportera la
palme au plan de la création du plus grand nombre d’emplois entre 2007-2011.
À juste titre, l’étude d’Emploi-Québec souligne aussi que l’on peut s’attendre
à ce que la proportion croissante du poids des personnes âgées dans la population
totale exerce une pression à double incidence sur la main-d’œuvre. Ainsi, le
vieillissement de la population aura comme impact non seulement d’accentuer le
bassin de patients mais aussi d’amputer un nombre sans cesse croissant de
travailleurs, quittant à la retraite. Pour compléter ce sombre tableau, soulevons que la
santé faisant partie des priorités du gouvernement québécois, la poursuite graduelle
des investissements se traduira inévitablement par un accroissement des besoins en
ressources humaines. Nous détaillerons ultérieurement les perspectives d’emploi dans
le réseau de la santé et des services sociaux.
61
Toutefois, comme démontrée précédemment, la pénurie des effectifs s’avère
une réalité indéniable pour la société québécoise. À la seconde partie, nous proposons
une définition du terme pénurie, accompagnée de certains éléments descriptifs.
2.2 La définition et les attributs du terme pénurie
Les données énoncées préalablement prédisent une crise majeure de l’emploi
caractérisée par une sérieuse pénurie de main-d’œuvre, en particulier dans les
secteurs hautement qualifiés, tel que l’a souligné Audet (2004) à l’occasion d’un
colloque de l’Association des CLSC et CHSLD du Québec. Une pénurie de
ressources signifie que l’offre d’emploi l’emporte sur le nombre de travailleurs
disponibles (Brassard, 2007). Selon l’expert consulté, trois types de pénurie peuvent
s’observer, soit la pénurie quantitative, la pénurie qualitative et la pénurie
corporative.
La pénurie quantitative fait référence à l’écart en nombre entre le besoin de
main-d’œuvre et la disponibilité sur le marché de l’emploi, tandis que la pénurie
qualitative renvoie à un manque associé aux compétences, à la qualification des
individus. De fait, la diminution du bassin de main-d’œuvre résulte fréquemment en
une baisse dans les critères qualitatifs des candidats. Pour illustrer ce double impact,
citons, par exemple, qu’à la pénurie quantitative d’infirmières, s’immisce aussi des
difficultés concernant le niveau d’expertise recherché. Effectivement, comme le
nombre de ressources disponibles s’effritent, les candidates disponibles répondent
moins aux critères d’expérience, de qualification obligeant l’organisation à
compenser, notamment, par des programmes de formation.
Quant à la pénurie corporative, elle réfère au potentiel d’attraction et de
recrutement lié aux conditions d’exercice dans le secteur d’activité. Ce type de
pénurie évoque les enjeux de compétitivité par rapport à d’autres organisations ou
62
secteurs, privés ou publiques. Par exemple, invoquons le cas des physiothérapeutes
attirés fortement par le secteur privé, eu égard aux conditions salariales et à l’horaire
de travail. En conséquence, la capacité d’attraction de l’établissement pourrait être
influencée d’une part, par les conditions d’emploi proposées par le réseau de la santé
et des services sociaux et d’autre part, par celles mises de l’avant par d’autres
organisations.
Après avoir démontré les perspectives d’avenir peu reluisantes de l’emploi au
Québec et clarifié les notions connexes à la pénurie qui en découle, nous abordons
maintenant les caractéristiques de la main-d’œuvre au sein du réseau de la santé et
des services sociaux.
2.3 L’état de situation en matière de main-d’œuvre dans le réseau de la santé et des services sociaux
Certes, les prochaines années s’avéreront périlleuses du point de vue de la
disponibilité de la main-d’œuvre, dans toutes les sphères d’activité, mais
particulièrement dans le domaine sociosanitaire québécois, déjà fort éprouvé par de
multiples réorganisations. Légitimement, certains auteurs font d’ailleurs des liens
directs entre les perspectives actuelles face à la disponibilité de la main-d’œuvre dans
le réseau de la santé et des services sociaux et les transformations énoncées au
premier chapitre.
De son côté, Lowe (2001) évoque qu’un déplacement démographique des
effectifs ne peut constituer à lui seul une crise. Ce dernier affirme que l’impasse
démographique observée dans le secteur public résulte d’une juxtaposition des forces
démographiques, d’une décennie de coupures de personnel, de programmes de mise à
la retraite, tous ces aspects jumelés au vieillissement de la population. Pour sa part,
l’Association des hôpitaux de l’Ontario soulève que les vagues de réorganisations et
de coupures de personnel effectuées dans les années 90, ayant eu entres autres pour
63
effet d’accroître les départs anticipés à la retraite, ont conduit à des répercussions,
observables encore aujourd’hui (2001).
De toute évidence, selon la Coalition pour la qualité de vie au travail et des
soins de santé de qualité (2007), les pénuries de personnel touchent de plus en plus de
professions du domaine de la santé et ne feront que s’aggraver dans les années à
venir. De plus, on souligne que les professionnels de la santé seraient plus nombreux
à opter pour une retraite anticipée, comparativement aux autres professionnels.
Toutes ces tendances pessimistes, bien documentées et fortement médiatisées,
relatives à la disponibilité de la main-d’œuvre en santé n’échappent pas au MSSS.
Rappelons d’ailleurs les nombreux débats, en période électorale qui se répètent et qui
font de la disponibilité des ressources en santé un enjeu politique déterminant.
Depuis le début des années 2000, de multiples travaux ont été menés par le
MSSS, qu’il s’agisse de forums nationaux sur la planification de la main-d’œuvre
infirmière, de cadres de référence en matière de gestion de main-d’œuvre, de
colloques thématiques, de discussions avec les hautes instances corporatives et
syndicales, d’outils et de documentation de support ou de politiques incitatives pour
le personnel. Bref, toutes ces démarches illustrent l’urgence de la situation.
Incidemment, soulignons un extrait du plan stratégique 2005-2010 du MSSS
corroborant ces préoccupations de main-d’œuvre : « Identifier les problématiques de
main-d’œuvre, selon les secteurs d’activités, à l’échelle locale, régionale et
nationale » (MSSS, 2005, p.34). Conformément aux travaux ministériels, les pénuries
nationales anticipées au tournant de la prochaine décennie touchent plusieurs titres
d’emploi, dont les infirmières, les préposés aux bénéficiaires, les pharmaciens, les
physiothérapeutes et les orthophonistes. Ces renseignements corroborent ceux
résultant de l’exercice de planification de main-d’œuvre du CSSS – IUGS. Le tableau
qui suit, citant huit titres d’emploi, en fait foi.
64
Tableau 8 : Les pénuries nationales anticipées en 2010
En 2010 En 2005-06
Infirmières - 4 465 - 1 647Préposés aux bénéficiaires - 3 861 - 1 581Pharmaciens (Établ.) - 132 - 99Techn. Médicaux - 407 + 20 Techn. Radio-diagnostique - 411 - 234Techn. Électrophysiologie - 135 - 81Physiothérapeutes - 226 - 87Orthophonistes - 267 - 212
Source: MSSS – PMO, janvier 2006
En appui à ces statistiques, et dans le but de sensibiliser les décideurs et de
fournir quelques pistes d’action, le MSSS a élaboré, en collaboration avec des
groupes de travail, 12 documents de référence sur la planification de la main-d’œuvre
concernant pas moins d’une vingtaine de titres d’emploi, tels que les infirmières, les
infirmières auxiliaires, les techniciens en génie biomédical, les biochimistes
cliniques, le personnel cadres, les physiciens médicaux, les technologues en radio-
oncologie, les travailleurs sociaux, les diététistes et les ergothérapeutes.
Reproduire les nombreuses statistiques et tendances provenant de ces
différentes sources alourdirait indûment notre propos, s’agissant surtout d’établir,
hors de tout doute, les enjeux de main-d’œuvre existant au sein du réseau
sociosanitaire.
À la rigueur, relatons que ces écrits documentent amplement l’état de situation
pour chacun des titres d’emploi problématiques, en abordant, notamment, la
projection de l’attrition, l’offre de main-d’œuvre, l’estimation de l’évolution des
besoins et du recrutement et les programmes de formation.
Toutes ces données, solidement documentées, convergent vers un constat
unanime : la pénurie frappera une majorité écrasante de titres d’emploi dans le réseau
65
de la santé et des services sociaux, surtout chez les professionnels, et ce en
s’intensifiant dès 2010.
Pour terminer ce tour d’horizon des effectifs en santé, mentionnons quelques
aspects caractérisant le contexte de travail du réseau sociosanitaire.
2.3.1 Le contexte de travail particulier du réseau de la santé et des services sociaux
Nous avons établi que la pénurie de main-d’œuvre représentera un défi de
taille pour toute organisation, privée ou publique. Dans ce contexte de rareté de
ressources, de plus en plus aiguë, surgit inévitablement des enjeux de concurrence,
voire de compétition entre les organisations pour disposer de la main-d’œuvre
essentielle à l’actualisation de leur mission. La pénurie des effectifs qualifiée de
corporative, discutée auparavant, émerge d’ailleurs dans un contexte de relative
compétition.
Puisque les conditions offertes par une entreprise peuvent avoir une incidence
sur le choix effectué par un travailleur, explorons, en général, les conditions de travail
caractérisant le réseau public.
Selon diverses études rapportées par Lowe (2001), certaines particularités
ressortent des conditions d’emploi dans le secteur public, comparativement au
domaine privé. Nous en relevons quelques unes, accompagnées de commentaires
succincts.
Premièrement, les taux d’emploi temporaire et à temps partiel seraient plus
élevés; cet énoncé coïncide d’ailleurs avec les résultats de la démarche de
planification de main-d’œuvre du CSSS – IUGS soulevant un taux de statut
temporaire singulièrement élevé.
66
Deuxièmement, la rémunération, obéissant à un jeu complexe de forces
politiques, sociales et économiques, suivrait l’état des finances publiques plutôt
qu’une logique d’analyse de marché. En conséquence, on constaterait entre autre un
écart salarial plus faible dans le secteur public que dans le secteur privé entre les
employés les mieux payés et ceux que s’avèrent les moins bien payés. Tous les
paramètres associés à la rémunération sont négociés nationalement, ne laissant
aucune marge de manœuvre dans les organisations.
Troisièmement, un bon nombre d’emplois nécessitent des formations
spécialisées; la main-d’œuvre est donc en majorité scolarisée. Dans ces domaines
spécialisés, les salaires seraient plus alléchants dans le secteur privé. Le salaire se
situerait dans la moyenne pour les femmes et au-dessous de la moyenne pour les
hommes.
Quatrièmement, les effectifs du réseau public s’avèrent très majoritairement
syndiqués, impliquant un système soutenu de gestion des relations de travail appelant
des mécanismes de concertation solides.
Cinquièmement, les organisations du secteur public sont de gros employeurs,
impliquant habituellement moins de flexibilité.
Finalement, le secteur public emploie davantage de femmes. D’ailleurs, selon
Emploi-Québec (2007), elles occupent une place prépondérante dans le réseau de la
santé et des services sociaux, de l’ordre de 80 %, ce qui est de loin supérieur à
l’ensemble du marché du travail, soit 46,9 %. Relevons que cette observation
concorde avec les données issues de l’exercice de planification de main-d’œuvre du
CSSS – IUGS indiquant la proportion des femmes à 76,6 %.
D’autres éléments caractérisant les conditions de travail du réseau de la santé
et des services sociaux peuvent être signalés; d’une part, les horaires de travail,
67
souvent jugés indésirables, s’étalant majoritairement sur 24 heures par jour, sept jours
par semaine et d’autre part, des bénéfices sociaux désirables (fonds de pension,
assurances). Comme reflet du manque de ressources humaines, on assiste aussi à une
augmentation du nombre d’heures à temps supplémentaire, ces heures étant parfois
obligatoires.
De toutes les considérations exposées jusqu'à maintenant dans ce chapitre
pourraient surgir un sentiment d’impuissance face à une conjoncture aussi
préjudiciable; un optimiste considérera cependant cette situation comme une
opportunité de sortir des sentiers battus et une source d’inspiration pour devenir
employeur de choix. Ces défis obligent à adopter des principes de gestion veillant à
mieux gérer les nouveaux effectifs et les retraités de demain.
Considérant les distorsions démographiques appréhendées, Légaré (2004)
soulève judicieusement quatre éléments à explorer plus en profondeur, soit la
participation importante des femmes au marché du travail, la planification du système
d’éducation en fonction des besoins de main-d’œuvre, l’intégration adéquate de la
main-d’œuvre immigrante sur le marché du travail ainsi que la mise sur pied de
stratégies retenant les travailleurs âgés au travail. Audet (2004) allègue que le
principal défi de gestion de ressources humaines découlant de cette conjoncture
affectant le marché du travail sera d’apprendre à gérer la diversité, surtout en ce qui a
trait aux rapports intergénérationnels.
Le départ progressif, bientôt massif, des travailleurs à la retraite déclenche
une arrivée marquée de jeunes adultes sur le marché du travail. Pour adapter
adéquatement les approches en matière de gestion de ressources humaines, il est
primordial de comprendre l’influence exercée par ce mélange des générations. C’est
d’ailleurs le propos de la prochaine partie.
68
2.4 L’influence des générations sur le marché du travail
L’exode du marché du travail astreint les employeurs à mettre en œuvre des
démarches soutenues de planification de la relève. À mesure que les taux de départ à
la retraite augmenteront, la concurrence pour attirer les jeunes travailleurs
s’intensifiera. Les employeurs devront séduire la nouvelle cohorte de travailleurs;
pour cause, ils sont moins nombreux que les besoins de main-d’œuvre anticipés.
Or, tenant compte de l’écart considérable entre les besoins de main-d’œuvre et
la disponibilité de celle-ci, les jeunes joignant le marché du travail, à l’instar des
travailleurs à l’emploi, auront l’embarras du choix. Ils rechercheront alors des
conditions de travail qui répondent à leurs ambitions.
Puisque attirer et retenir la main-d’œuvre devient une priorité inéluctable, il
s’avère impératif pour l’employeur de comprendre les caractéristiques et les
aspirations des travailleurs potentiels et de ceux déjà à l’emploi.
Selon Howe et Strauss (2000), une nouvelle génération naît
approximativement tous les 20 ans. Ainsi, le marché du travail est constitué
principalement de trois générations (Earle, 2003). Pour mieux saisir les
comportements et les motivations de ces générations de travailleurs, cette partie du
chapitre en décrira les principales caractéristiques ainsi que les impacts qui en
découlent au niveau du contexte de travail.
Toutefois, avant d’examiner des éléments distinguant les trois générations de
travailleurs, nous soulèverons quelques aspects relatifs aux facteurs
environnementaux ayant une incidence sur le monde du travail et les individus qui le
composent.
69
2.4.1 Les facteurs environnementaux
Il est reconnu que les facteurs environnementaux influencent les organisations
et les incitent à évoluer, à changer pour s’adapter. Les sources de changement issues
de l’environnement organisationnel ont été abondamment décrites par différents
auteurs, dont Roy (2002), lors d’un colloque pour l’Ordre des conseillers en
ressources humaines et en relations industrielles agréés du Québec. Elles
comprennent des facteurs de nature économique, politique, technologique, culturelle
et sociale.
Grâce à la synergie de ces éléments contextuels, une mutation dans le monde
du travail émerge, marquée, entre autres, par une économie du savoir. Dès le début
des années 80, à l’aube de l’époque de l’information, les organisations dépendent
désormais des connaissances, des talents acquis et démontrés par ses travailleurs
(Earle, 2003). Cet auteur définit le talent comme la somme des habiletés, des
connaissances, des expériences, de l’intelligence, du jugement, de l’attitude et du
caractère retrouvée chez un individu. Il inclut aussi la capacité pour une personne
d’apprendre et d’évoluer.
À la rigueur, une distinction est dorénavant établie entre le simple besoin de
main-d’œuvre et celui d’attirer les personnes possédant les talents indispensables
pour assurer le succès de l’organisation. La guerre des talents s’amorce alors et
s’intensifiera avec la conjoncture démographique que l’on connaît.
Dans cette optique, toutes les organisations contemporaines s’accordent avec
cette prémisse : les personnes œuvrant au sein de l’entreprise se révèlent l’atout le
plus précieux et représentent un avantage concurrentiel indéniable (Szamosi, 2006).
Bien connaître les individus qui composent la force de travail se révèle donc
primordial.
70
Ces considérations font ressortir l’importance de développer des mécanismes
appropriés pour attirer la main-d’œuvre possédant les connaissances requises.
Nonobstant la pertinence démontrée d’attirer une main-d’œuvre qualifiée, la rareté
des ressources et l’émergence de la société du savoir amplifie la portée des stratégies
de rétention adaptées, garantissant la longévité d’une organisation. Effectivement, la
nature de l’investissement à fournir par un employeur dans l’éventualité d’un travail à
caractère intellectuel s’avérera plus imposante et complexe que dans le cas d’un
emploi requérant des habiletés manuelles. Nous aurons l’occasion d’approfondir ces
notions d’attraction et de rétention au chapitre trois. Mais auparavant, nous
consacrerons la prochaine partie à l’identification des caractéristiques des personnes
sur le marché du travail.
Ainsi, nous dépeindrons les caractéristiques des trois générations influençant
le monde du travail, soit les baby-boomers, la génération X et la génération Y (Clark,
2007). Les deux dernières générations, communément désignées comme les
nouvelles générations, composent la relève.
2.4.2 Les caractéristiques des trois générations majoritaires sur le marché du travail.
Plusieurs auteurs affirment que chaque génération possède ses propres
caractéristiques, déterminant des besoins distincts, essentiels à comprendre pour
attirer et retenir la main-d’œuvre, plus que jamais précieuse (Clark, 2007; Earle,
2003; Maxwell et Ogden, 2007; Paré, 2002; Szamosi, 2006). Earle (2003) allègue
même que les travailleurs d’aujourd’hui sont plus exigeants envers les employeurs,
non seulement quant aux salaires ou aux bénéfices marginaux, mais aussi en ce qui a
trait à l’expérience de travail et à l’environnement culturel.
Un survol historique (Paré, 2002) permettra de situer, en préambule, les trois
générations.
71
Les baby-boomers sont nés entre 1947 et 1964. On associe cette période de
l’après-crise à une prospérité économique sans précédent, créant de l’optimisme à
outrance. Aujourd’hui, les baby-boomers forment un groupe d’environ neuf millions
de personnes au Canada.
La génération X, formée des personnes nées entre 1965 et 1976, s’avère la
génération charnière, subissant le passage de l’économie industrielle à la société du
savoir, sans disposer du poids démographique de leurs prédécesseurs, les baby-
boomers. Ils sont au nombre d’environ cinq millions au Canada, soit
approximativement la moitié des baby-boomers.
Quant à la génération Y, ils n’ont pas vécu le passage à la société du savoir;
ils sont nés avec elle entre 1977 et 1997. Cette génération, composée de sept millions
de personnes, est profondément marquée par l’informatique, notamment l’Internet,
qui constitue un outil essentiel du développement tant cognitif que social. Cette
génération montante, représentant la relève contemporaine, est aussi désignée comme
la génération Internet.
À ce stade-ci, nous préciserons les attributs de chacune de ces générations,
suivis de quelques constats d’intérêt.
Les baby-boomers (1947-1964)
Cette génération est majoritaire non seulement sur le marché du travail actuel,
mais constitue la cohorte d’individus la plus importante du Canada. Elle influence
ainsi les courants sociaux (Earle, 2003; Paré, 2002).
72
Les baby-boomers accèdent à des niveaux de scolarité les plus élevés de cette
époque, donc à des perspectives d’emploi plus diversifiées (Paré, 2002). Le travail
représente un ancrage majeur dans la vie de ces personnes (Gamble, 2006).
Pour cette génération, se conformer à l’image corporative de l’organisation
représente une opportunité d’atteindre les objectifs de carrière; les baby-boomers
perçoivent que plus on met de l’ardeur au travail, meilleures sont les chances
d’avancement.
De plus, ayant investi beaucoup d’énergies pour gravir les échelons, ils
préfèrent les lignées hiérarchiques traditionnelles plutôt que les organisations du
travail émergentes, telles qu’horizontales. Fiers des connaissances et de l’expertise
acquises durement, ils souhaitent un certain statut, de la reconnaissance et du respect.
Ils auraient une assez haute opinion d’eux-mêmes (Paré, 2002).
Enfin, cette génération a été influencée par la venue de la télévision.
La génération X (1965-1976)
Cette génération, suivant une prospérité économique sans précédent, hérite
cependant des problèmes causés par la génération précédente; endettement personnel
et national, détérioration de l’environnement, rationalisation des entreprises et
précarité des emplois (Paré, 2002).
Ayant grandi dans une économie instable, soit la période de récession
concourant de la fin des années 70 au début des années 80, les membres de cette
génération ont opté davantage pour la poursuite d’études plutôt que de s’engager dans
une vie familiale (Earle, 2003).
73
Pour leurs premières expériences de travail, les individus de la génération X
ont souvent accepté ce qui était offert, sans que l’emploi corresponde aux champs
d’intérêt ou d’expertise développés. Les possibilités de promotion étaient peu
envisagées. De fait, ils s’attendent à changer d’orientation professionnelle plus d’une
fois dans leur carrière, l’environnement de travail volatil dans lequel ils évoluent s’y
prêtant (Clark, 2007; Paré, 2002).
La génération X s’adapte aisément aux changements car elle a été témoin
d’intenses mutations sociales, économiques et technologiques marquant les années
80. Confortable avec les technologies, elle progresse bien dans un environnement en
mouvance, riche en stimuli. Cette génération démontrerait aussi de bonnes capacités
de résolution de problème. Son développement serait dominé par la télévision (Clark,
2007).
Par ailleurs, les membres de cette génération ont entrevu les effets de la
récession des années 80, telles les coupures massives de personnel. Ils ne croient
donc point à la sécurité d’emploi; la valeur de loyauté, si importante pour les baby-
boomers, est remise en question.
Si le travail se révèle une source de valorisation pour cette génération,
l’équilibre entre l’emploi et la vie personnelle est plus important (Gamble, 2006;
Paré, 2002; Szamosi, 2006). Elle ne veut pas sacrifier son énergie et sa créativité pour
une entreprise non reconnaissante. Les efforts se mesureront par l’appréciation
démontrée par l’employeur (Szamosi, 2006).
La génération Y (1977-1997)
Cette dernière génération se marie plus tard et étudie longtemps, elle demeure
donc sous le toit familial jusqu’à un âge adulte avancé et occupe plusieurs emplois
74
temporaires avant de s’investir à temps complet chez un employeur (Maxwell et
Ogden, 2007).
Née pendant l’ère moderne de l’indépendance, la génération Y développe une
aversion des règles et de la hiérarchie. Attirée davantage par les aspects
communautaires, elle souhaite travailler en équipe avec des gens partageant ses
valeurs et reconnaissant ses capacités. Elle sera attirée par des structures de travail
aplanies ou par l’entrepreneurship (Earle, 2003; Szamosi, 2006).
La génération Y a grandi dans un monde caractérisé par de rapides
changements, notamment ethniques résultant en une tolérance à la diversité (Szamosi,
2006). En fait, l’absence de changement leur paraît presque anormale (Paré, 2002).
Les individus de cette génération développent beaucoup d’aptitudes associées
à la technologie, au détriment d’habiletés relatives à la lecture, à l’écriture et aux
mathématiques (Gamble, 2006). Ils utilisent l’informatique pour étudier, se divertir,
participer à des groupes de discussions, s’informer (Paré, 2002).
Leur accès à la connaissance est marqué par la globalité et l’instantanéité.
L’Internet oblige à pointer, lire, penser et cliquer. Ces jeunes sont des chercheurs
actifs d’information au lieu de capteurs passifs, faisant d’eux des personnes
indépendantes et autonomes. Ils seront les plus instruits de l’histoire. L’accès à
l’information et la libre expression des idées et des opinions représente des droits
fondamentaux pour eux.
En raison de la mondialisation des technologies de l’information, cette
génération aime les sensations fortes, les nouvelles expériences et les voyages (Paré,
2002).
75
C’est la génération qui exige le plus de son environnement de travail, émet
son opinion et sera encline à quitter face à des insatisfactions. Elle souhaite faire
partie d’organisations dynamiques, innovatrices qui mettront en valeur leurs idées et
encourageront leur créativité (Earle, 2003).
Ces personnes rechercheront un patron qui dirige, un coach, qui favorise le
développement et qui fournit des rétroactions régulièrement (Maxwell et Ogden,
2007).
De ces caractéristiques qui colorent les travailleurs des trois générations, nous
soutirons quelques enseignements, des constats préliminaires, propices à alimenter
nos réflexions.
Ainsi, les travailleurs de la relève, constituant les générations X et Y, aspirent
à évoluer dans des milieux de travail flexibles, stimulant et à forte intensité
d’apprentissage. Ils seront rebutés par une bureaucratie rigide, une autonomie limitée
de même que d’autres obstacles les empêchant de fournir un apport professionnel
significatif (Lowe, 2001). Ces jeunes travailleurs, préconisant l’équilibre entre la vie
personnelle et professionnelle, souhaitent incidemment retrouver dans leur milieu de
travail ces attributs : des défis, de la collaboration, de la diversité dans les tâches. À
bien des égards, il s’agit aussi de sources de satisfaction pour les employés de la
génération des baby-boomers. D’ailleurs, Lowe (2001) avance que les jeunes
travailleurs ne sont pas si différents de cette génération concernant ce qu’ils jugent
valable dans leur travail. Du reste, les travailleurs plus jeunes seraient plus mobiles et
disposés à laisser leur emploi, advenant leurs ambitions professionnelles non
accomplies.
En ce qui concerne les travailleurs de 45 ans et plus, ce qui les distinguerait
des plus jeunes, serait l’importance plus grande qu’ils attachent à un travail leur
donnant un sentiment de satisfaction, de réussite et de fierté. Bien que plus
76
traditionalistes et empreints de loyauté envers l’employeur, les aînés de cette cohorte
privilégieraient aujourd'hui un meilleur équilibre entre la vie professionnelle et
personnelle, plusieurs ayant favorisé, auparavant, l’avancement de la carrière au
détriment de la vie familiale et des loisirs.
Nous avons conceptualisé la figure suivante afin de synthétiser les
renseignements relatifs aux trois générations et mettre en lumière les points communs
et dissemblables.
Figure 3 : Les caractéristiques des générations
Ancrage au travail
• Désir d’un statut • Fierté de leurs réalisations
Supérieur immédiat
• Mobilité • Milieu stimulant
• Aime le changement • Usage des technologies • Équilibre vie pers./prof.
Majeur •
Valeur importante
Capacité de résolution de problèmes
• Capacité d’adaptation
Coach, rétroaction, développement
• Instruction élevée • Aversion des règles et de la hiérarchie • Attrait pour les aspects communautaires • Travail d’équipe • Recherche d’une organisation dynamique • Recherche d’information
BABY- BOOMERS
GÉNÉRATION X
GÉNÉRATION Y
• Désir d’un statut • Fierté de leurs réalisations
77
En tout état de cause, attirer et retenir cette main-d’œuvre, issue des trois
générations, impliquera d’échafauder des stratégies s’alignant sur leurs spécificités,
certaines similaires d’autres divergentes.
Certains des auteurs cités qui ont analysé la dynamique intergénérationnelle,
évoquent aussi certaines orientations quant aux conduites à préconiser par
l’employeur pour attirer et retenir les travailleurs, surtout les plus jeunes, composant
la relève. Ces pistes enrichiront inévitablement les théories d’attraction et de rétention
abordées au chapitre qui concerne la recension des écrits.
Mais auparavant, en tenant compte des indications invoquées dans les sections
précédentes, nous étayerons notre problématique.
3. L’ÉNONCÉ DE LA PROBLÉMATIQUE
Afin d’introduire et d’encadrer notre problématique à l’étude, nous
récapitulerons d’abord le chemin parcouru au terme des deux premiers chapitre de
notre essai intervention.
Nous avons présenté, au chapitre un, l’organisation dans laquelle se déroulera
notre intervention, le CSSS – IUGS. Des liens ont été établis entre l’histoire de
l’établissement, forgée de fusions et d’intégrations, et l’évolution récente du réseau
de la santé et des services sociaux, marquée par plusieurs transformations qui ont
légué des traces au niveau des ressources humaines.
Au sein de ce chapitre, nous avons d’abord explicité la démarche de
planification de main-d’œuvre poursuivie par l’organisation et établi qu’un des
enjeux de gestion cruciaux consiste au renouvellement des effectifs. Aussi, nous
avons décrit le contexte sociodémographique du Québec, mettant en lumière des
78
enjeux importants de main-d’œuvre et ce, dès le début de la prochaine décennie. Des
données concernant la planification des effectifs, spécialement pour le réseau
sociosanitaire québécois, ont aussi été colligées. Un constat unanime découle de ces
projections face à la main-d’œuvre: le manque d’effectifs, exacerbé par les départs
massifs à la retraite et une relève insuffisante, deviendra un enjeu capital à compter
de 2011. Cette conjoncture, engendrant une mutation du monde du travail,
provoquera de la compétition entre les employeurs déterminés à attirer et retenir cette
précieuse et rare main-d’œuvre.
Nous avons aussi énoncé dans le présent chapitre les caractéristiques des trois
générations composant le marché du travail contemporain à partir desquelles de
nouvelles stratégies en matière de gestion de ressources humaines peuvent être
actualisées, surtout dans un contexte où la rareté des ressources prédomine,
notamment pour attirer et retenir la main-d’œuvre.
En considération de ce qui précède, l’identification de notre problématique de
gestion émerge presque naturellement. De fait, selon Hlady (2002), une
problématique à étudier s’édifie à partir d’un point central pouvant prendre la forme
d’un constat ou d’un champ d’intérêt.
En ce sens, la synthèse des différents aspects abordés jusqu’à maintenant
cerne le point central de notre problématique. La pénurie de main-d’œuvre actuelle et
surtout celle anticipée dès 2011 dans le réseau de la santé et des services sociaux ainsi
que dans la société québécoise compromettra la qualité et même la prestation des
services à la clientèle du CSSS – IUGS.
En appui à la description de notre proposition de travail, nous avons vu
précédemment que les préoccupations de planification, de renouvellement, bref de
gestion globale de la main-d’œuvre sont partagées par les hautes instances tant de
l’établissement que du réseau de la santé et des services sociaux.
79
D’une part, rappelons que dans le plan stratégique 2006-2011 du
CSSS - IUGS des objectifs relatifs aux enjeux de main-d’œuvre sont développés.
Citons : « Mettre en œuvre un plan d’action dynamique et prospectif pour assurer la
présence des ressources humaines nécessaires à l’établissement » (p. 64).
D’autre part, le plan stratégique 2005-2010 du MSSS contient une orientation
réaffirmant ces préoccupations de main-d’œuvre : « Identifier les problématiques de
main-d’œuvre, selon les secteurs d’activités, à l’échelle locale, régionale et
nationale » (p. 34).
L’Agence de la santé et des services sociaux de l’Estrie propose pour sa part
un plan stratégique 2007-2012 à tous les acteurs du réseau impliqués de près ou de
loin dans les stratégies de renouvellement de la main-d’œuvre. Ce plan met de l’avant
une proposition sur le partage des rôles, des responsabilités et des contributions de
chacun et chacune ainsi que sur la démarche type de concertation préconisée pour les
travaux régionaux de planification des ressources humaines.
Tenant compte de cette problématique qu’est la pénurie des ressources
humaines, allant en s’aggravant au Québec, le CSSS – IUGS n’a pas d’autres
alternatives que se démarquer pour assurer les services à sa clientèle puisque la
compétition entre les organisations sera féroce.
Selon Gosselin (extrait de présentation, 2008), cette pénurie s’avère une
opportunité pour les directions de ressources humaines : « Ce dossier place les
directions des ressources humaines dans une position d’acteur stratégique… c’est une
occasion à saisir ». À ce titre, l’auteure de l’essai intervention escompte inciter les
instances décisionnelles à se mobiliser et à agir pour devenir un employeur de choix.
80
Nous définirons la notion d’employeur de choix comme étant un employeur
dont la caractéristique distinctive constitue un attrait significatif aussi bien pour les
chercheurs d’emploi que pour le personnel en place. Par le fait même, cette
distinction engendrera une excellente rétention des membres du personnel, plus
particulièrement ceux dont les talents sont reconnus.
Ainsi, à partir de ce point central qu’est la pénurie des effectifs et ses
contrecoups, nous analyserons trois construits théoriques qui procureront des assises
pour soutenir notre démarche visant à devenir un employeur de choix.
Donc, en plus de référer aux renseignements recueillis antérieurement
concernant la pénurie des effectifs au CSSS – IUGS et au Québec ainsi que les
informations relatives aux générations sur le marché du travail, nous appuierons nos
stratégies pour devenir employeur de choix sur trois aspects examinés au prochain
chapitre par le biais d’une recension des écrits. Ces cadres conceptuels concernent
l’attraction et la rétention de la main-d’œuvre, les caractéristiques propres aux
employeurs qui se distinguent de même que les notions relatives à la mobilisation des
instances décisionnelles.
81
TROISIÈME CHAPITRE
LA RECENSION DES ÉCRITS
L’objectif de ce chapitre vise à effectuer une recension des écrits portant sur
certains éléments-clés qui cernent, d’une part, notre problématique de pénurie de
main-d’œuvre et, d’autre part, certains aspects entourant le concept d’employeur de
choix.
Nous explorerons trois domaines : les notions d’attraction et de rétention, les
caractéristiques associées aux employeurs de choix et les stratégies à utiliser pour
influencer les instances décisionnelles à opter pour une orientation stratégique
spécifique. Les informations amassées concernant ce dernier domaine seront
particulièrement utiles pour préparer la seconde étape de notre intervention qui vise à
influencer les hautes instances décisionnelles.
Notre recherche bibliographique s’est réalisée essentiellement par le biais des
bases de données informatisées de l’Université de Sherbrooke qui donnent accès à
une pléthore d’informations scientifiques directement en ligne ou encore par des prêts
entre bibliothèques. En complément, des renseignements ont aussi été recueillis par
l’Internet en utilisant un moteur de recherche.
En premier lieu, les notions d’attraction et de rétention ont été explorées par
des termes comme recruitment, attracting, attraction, organizational attraction,
organizational attractiveness, job choice decision, retention, retention culture,
retained valued employees, exit interview, employee disengagement, employee
turnover, turnover, volontary turnover et job embeddedness.
82
Deuxièmement, la notion d’employeur de choix a surtout été approfondie par
des éléments connexes puisque peu de littérature scientifique traite directement de ce
concept. La plupart des écrits explorent des expériences positives vécues par des
entreprises à partir desquelles des apprentissages sont tirés. Tout de même, pour
explorer ce thème, les mots-clés employeur de choix, employer of choice et best
employer ont été utilisés. De plus, nous avons effectué une recherche dans la
littérature concernant les approches dénommées Magnet hospital et Planetree qui
relatent des expériences à succès, pertinentes à notre propos.
Quant au dernier thème, associé aux stratégies d’influence, il a été étudié
sommairement en utilisant les termes suivants : stratégies d’influence, stratégies
décisionnelles, influence strategies, influence without autority, top management
selling issues, peer commitment, building commitment leadership et decision making
process.
Le chapitre sera donc subdivisé en trois sections. Dans la première, nous
élaborerons sur les fondements conceptuels relatifs aux notions d’attraction et de
rétention. La seconde section décrira d’abord les caractéristiques relevées chez les
employeurs qui se distinguent. Nous aborderons ensuite des concepts apparentés à
cette notion, spécifiques au secteur de la santé, tels que Magnet hospital et l’approche
Planetree. Troisièmement, nous explorerons certains écrits portant sur les facteurs à
considérer pour mobiliser les hautes instances décisionnelles à adopter une
orientation stratégique donnée.
1. LES NOTIONS D’ATTRACTION ET DE RÉTENTION
L’attraction et la rétention sont des notions qui retiennent l’attention de
plusieurs auteurs, qu’elles soient traitées de concert ou séparément.
83
Certains d’entre eux allèguent que si attirer et embaucher des travailleurs
s’avèrent une entreprise délicate, retenir ces derniers se révèle un enjeu beaucoup
plus complexe et déterminant (Butler et Waldroop, 1999). De leur côté, Anderson et
Pulich (2000) soulèvent qu’une des façons les plus efficaces de minimiser les besoins
de recrutement consiste à développer des stratégies pour retenir les employés en
place. Ils soutiennent que la rétention des travailleurs est dorénavant aussi importante
sinon plus que le recrutement de nouveaux employés. Quant à Neubauser (2002), il
soutient que l’attraction et la rétention s’avèrent les plus grands défis à relever pour
les organisations de la santé. D’autres auteurs affirment que l’habilité consistant à
attirer et à retenir les travailleurs deviendra un élément critique pour garantir le
présent et le futur des organisations (Sutherland, Torricelli et Karg, 2002).
Pour leur part, Anderson et Pulich (2000) considèrent qu’un des défis pour
une organisation consiste vraisemblablement à attirer le travailleur à son emploi.
Cependant, l’attraction réussie, un enjeu majeur persiste et il consiste dès lors à offrir
un environnement de travail adéquat afin de fournir au travailleur toutes les raisons
de rester. L’attraction sans la rétention se transforme alors en un cercle vicieux; l’une
renforce l’autre. Pour Hariri (1998), les plus grands défis stratégiques consistent à
attirer et retenir la meilleure main-d’œuvre.
On peut donc extrapoler que dans une société désormais axée sur le savoir, la
rétention des travailleurs, ceux-ci ayant fait l’objet d’un investissement souvent
substantiel de la part de l’employeur notamment au niveau de la formation, prime sur
les activités d’attraction, condamnées à devenir récurrentes sans des efforts soutenus
pour garder les employés. Le contexte de rareté des ressources documenté
précédemment milite aussi en faveur d’une intense préoccupation concernant la
rétention : réussir à embaucher un employé qui correspond aux caractéristiques
recherchées par l’employeur mérite assurément une attention spéciale pour le
conserver en emploi.
84
Afin de mieux saisir les fondements théoriques sous-jacents à ces notions
d’attraction et de rétention, nous débutons, à la prochaine section, par l’analyse du
concept d’attraction en exposant d’abord quelques avancées théoriques suivies d’un
modèle théorique.
1.1 L’attraction
L’attraction représente une composante du processus global de recrutement.
Plusieurs auteurs se sont intéressés à l’un ou l’autre des aspects particuliers de ce
processus, comme le soulèvent Terjesen, Vinnicombe et Freeman (2007). Ces auteurs
recensent en effet diverses études sur ces sujets : la prise de décision de l’employeur
associée à la démarche de recrutement, les facteurs de marketing déterminants, les
impacts du recrutement associés au sexe du candidat, l’influence de la perception des
recruteurs face aux chercheurs d’emploi et les techniques d’embauche (Raschke,
2003).
Pour les fins de notre propos, l’attraction réfèrera au phénomène faisant en
sorte qu’un chercheur d’emploi dépose sa candidature spécifiquement chez un
employeur plutôt qu’un autre (Terjesen, Vinnicombe et Freeman, 2007). Dans cette
optique, la perception de l’attraction d’une organisation par un individu devient
déterminante. Dans sa thèse de doctorat, Zhang (2001) illustre cette perception face à
l’organisation comme étant l’attitude positive d’un candidat potentiel envers une
entreprise étudiée, l’incitant à initier une relation d’emploi. Incidemment, l’attraction
se révèle indispensable au soutien du processus de renouvellement de main-d’œuvre.
Depuis les cinquante dernières années, quelques auteurs ont examiné les
facteurs induisant l’attraction de la main-d’œuvre. À partir de plusieurs de ces études,
une équipe de chercheurs a mené une méta-analyse et identifié six facteurs
fréquemment désignés comme inducteurs de l’attraction organisationnelle (Chapman,
Uggerslev, Carrol, Piasentin, Jones, 2005). Nous les décrivons sommairement :
85
a) Les caractéristiques du travail et de l’organisation (type de travail, salaire, bénéfices, image de l’entreprise);
b) Les caractéristiques des personnes effectuant le recrutement (âge, compétence,
attitude); c) La perception face au processus de recrutement (façon d’être considéré,
information reçue en temps opportun durant le processus, perception de la validité des outils de sélection utilisés);
d) La perception de la compatibilité (interprétation des caractéristiques
organisationnelles, du travail et des recruteurs); e) Les alternatives perçues (nombre de possibilités d’emploi); f) Le potentiel d’embauche (chance d’être embauché).
Parmi ces facteurs favorisant l’attraction de la main-d’œuvre, la perception de
la compatibilité organisationnelle et personnelle s’avérerait l’élément le plus puissant,
suivie des caractéristiques de l’organisation et du travail ainsi que du processus de
sélection. En ce qui concerne ce dernier aspect, il est mentionné que la manière dont
le processus est conduit (par exemple, le fait de fournir la bonne information et d’être
respectueux) se révèlerait plus déterminante que les attributs personnels (par exemple
le sexe, l’âge, la race) des personnes effectuant le recrutement.
Cette compatibilité souhaitable en matière d’attraction entre les
caractéristiques organisationnelles et celles des chercheurs d’emplois s’avère le
fondement de la théorie de Schneider, largement citée dans les écrits. En effet, de
nombreux auteurs se réfèrent à cette théorie pour étoffer leurs études, celle-ci étant
basée sur l’effet de la similarité dans le processus d’attraction. De fait, les avancées
de Schneider stipulent que les organisations attireraient des individus possédant des
caractéristiques similaires (Billsberry, 2007; Cable et Judge; 1996, 1997; Carless,
2005; Kristof-Brown, 2000; Turban et Keon, 1993; Zhang, 2001). Un des éléments
lié à l’attraction, issu de ce cadre de référence dénommé ASA ou
86
attraction-selection-attrition, consiste en l’affirmation que les individus seraient
attirés par les organisations compatibles avec leurs propres caractéristiques
personnelles.
Un courant fortement majoritaire exploite cette théorie. Par ailleurs, nous
avons relevé deux études remontant à plus d’une dizaine d’années (Cable et Judge,
1997; Turban et Thomas, 1993) qui sous-tendent que les préférences des chercheurs
d’emploi pour un type de culture organisationnelle seraient aussi fortement associées
à leurs traits de personnalité (par exemple les individus extravertis seront davantage
attirés par des cultures organisationnelles agressives et orientées sur le travail
d’équipe).
En tout état de cause, un modèle théorique dominant issu de la littérature
découle des avancées de Schneider au sujet de la notion de l’attraction (Cable et
Judge, 1997; Kristof-Brown, 2000; Zhang, 2001). Nous examinons maintenant ce
modèle théorique dénommé Person-organisation fit1.
1.1.1 Le modèle de la compatibilité entre l’organisation et les personnes
En substance, ce modèle théorique avance que les chercheurs d’emploi sont
attirés par des organisations nanties de caractéristiques compatibles avec leurs
aspirations personnelles et professionnelles (Billsberry, 2007; Cable et Judge, 1996;
Kristof-Brown, 2000; Zhang, 2000). Ainsi, une concordance perçue entre les valeurs
organisationnelles et celles des individus influencerait positivement l’attractivité pour
l’entreprise; les individus seraient davantage enclins à solliciter ces établissements
pour un emploi (Cable et Judge, 1996).
1 Compatibilité entre la personne et l’organisation (traduction libre)
87
Cette congruence entre les attributs de l’organisation et les caractéristiques
recherchées par le candidat est dénommée the good fit2. La théorie qui en découle,
soit la compatibilité entre les personnes et l’organisation, est fondée principalement
sur cette compatibilité (Terjesen, Vinnicombe et Freeman, 2007).
Une récente recherche examine les caractéristiques organisationnelles qui
attirent les nouveaux gradués de la génération Y (Terjesen, Vinnicombe et Freeman,
2007). Les voici :
a) Des investissements majeurs dans la formation initiale et le développement en cours d’emploi;
b) Des préoccupations importantes concernant le bien-être des employés; le fait de
prendre soin des personnes; c) Des opportunités de progression de carrière; d) De la variété dans le travail quotidien; e) Du dynamisme, une approche de croissance, de proactivité dans le domaine
d’activités de l’organisation.
Une autre étude relève six caractéristiques déterminantes pour le chercheur
d’emploi (Anderson et Pulich, 2000) :
a) Un environnement de travail respectueux, suscitant une contribution distinctive où la personne est perçue comme un membre à part entière d’une équipe ainsi qu’un partenaire;
b) Des responsabilités permettant une bonne dose d’autonomie de même que des
défis professionnels; c) Des possibilités d’avancement et de développement professionnels continus; d) De bonnes relations avec les supérieurs immédiats se traduisant par de l’écoute,
des encouragements et du soutien;
2 La bonne compatibilité (traduction libre)
88
e) Des gestionnaires qui considèrent la famille et le temps personnel comme étant
importants; f) Des conditions salariales et des bénéfices marginaux compétitifs.
D'après ces études, hormis les conditions salariales et les bénéfices
marginaux, les caractéristiques organisationnelles inspirant les chercheurs d’emploi
consistent principalement en un milieu de travail stimulant ainsi qu’un climat positif.
Ce constat s’apparente aux réflexions découlant de l’analyse des trois générations
présentes sur le marché du travail; ce qu’ils recherchent dans leur emploi se révèle
somme toute assez comparable à certains égards.
En regardant de plus près ces caractéristiques fortement recherchées par les
candidats potentiels, nous constatons que certaines réfèrent à une compatibilité entre
la personne et le travail tandis que d’autres attributs sous-tendent une congruence
entre la personne et l’organisation. Ces deux formes de compatibilité sont d’ailleurs
spécifiées par quelques auteurs (Carless, 2005; Kristof-Brown, 2000).
Ces observations provisoires laissent présager pour les établissements du
réseau de la santé et des services sociaux autant d’opportunités que d’enjeux. Du côté
des opportunités, les organisations locales de la santé pourraient se démarquer par des
attributs qualitatifs, tout à fait accessibles comparativement aux aspects associés aux
conditions de travail négociés au niveau provincial. Du côté des enjeux, les futurs
travailleurs pourraient être moins enclins à poser leur candidature pour un
établissement du réseau de la santé et des services sociaux considérant,
malheureusement, la perception négative des attributs offerts par les établissements
de ce secteur d’activité. En effet, les multiples réorganisations, les coupures de
personnel et plus récemment le manque d’effectifs pour certains titres d’emploi
contribuent à alimenter cette perception (OHA, 2001).
89
En complément à la théorie fondée sur la compatibilité entre les
caractéristiques individuelles et organisationnelles, nous avons relevé dans la
littérature récente certains écrits faisant état de l’exploitation d’un site Web pour
favoriser l’attraction envers une organisation. Effectivement, ces études font valoir la
pertinence de bien décrire les attributs organisationnels par le biais du site Web,
permettant aux candidats potentiels d’évaluer leur niveau de congruence avec
l’entreprise (Dineen R., Ash S. R. et Noe, 2002; Hu, Su et Chen, 2007;). L’une
d’entres elles proposent même un questionnaire que le chercheur d’emploi peut
compléter en ligne et comptabiliser un pointage suggérant ou non une compatibilité
avec la culture organisationnelle (Dineen R.; Ash S. R. et Noe, 2002). Une rétroaction
positive et rapide engendrerait des propensions attractives face à l’entreprise. Certes,
tel que soulevé par Hu et ses collègues (2007), l’avènement de la technologie du Web
fournit de multiples pistes à explorer dans le domaine du recrutement et plus
spécialement en ce qui a trait à l’attraction. Ils soulignent même que certaines études
examinent le design d’un site attirant le mieux les candidats.
En tout état de cause, les caractéristiques organisationnelles souhaitables
prônées par les personnes responsables du recrutement, doivent être vraiment ancrées
dans la culture de l’organisation. Une distanciation entre les caractéristiques
annoncées et celles observées durant l’expérience de travail résulterait en un choc de
la réalité, incitant souvent les travailleurs à quitter l’organisation (Terjesen,
Vinnicombe et Freeman, 2007).
Ces enseignements nous procurent des pistes pertinentes pour favoriser
l’attraction de la main-d’œuvre, mais retenir celle-ci s’avère un défi encore plus
imposant. Incidemment, la rétention fera l’objet de la prochaine section. Abordons
d’abord quelques considérations théoriques, suivies de deux modèles théoriques.
90
1.2 La rétention
La rétention des employés constituerait le facteur organisationnel le plus
critique à considérer pour les prochaines années (Frank, Finnegan et Taylor, 2004;
Birt, Wallis et Winternitz, 2004). D’ailleurs, les propos de Frank, Finnegan et Taylor
(2004) traduisent cette allégation : Employee retention is king3.
La rétention et le roulement du personnel s’avèrent deux concepts interactifs.
D’une part, la rétention se définit comme l’effort à fournir par un employeur pour
garder les travailleurs performants afin d’atteindre les objectifs organisationnels.
D’autre part, le roulement de personnel concerne le départ de travailleurs; il affecte
négativement l’organisation en ce qu’il produit des pertes tangibles et intangibles
(Frank, Finnegan et Taylor, 2004).
Tenant compte de ces définitions, nous avançons que des processus de
rétention efficaces réduiront le taux de roulement et que des taux de roulement élevés
fourniront des indications relatives à une rétention déficiente. Dès lors, connaître les
composantes d’une rétention efficace s’avère primordial.
Avant d’approfondir le concept de rétention, nous livrons d’abord quelques
informations concernant le roulement de personnel.
1.2.1 Quelques notions sur le roulement de personnel
Bien qu’indésirable, un certain niveau de roulement de personnel s’avère
incontournable, notamment le roulement involontaire, déclenché par diverses
situations telles que des départs à la retraite, des déménagements, voire des décès. Par
contre, le roulement volontaire, souhaité et instigué par les travailleurs, se révèle
préoccupant pour l’employeur car il résulte en la perte de ressources précieuses
3 La rétention des employés est roi (traduction libre)
91
(Frank, Finnegan et Taylor, 2004). Par ailleurs, certains départs, associés à des
congédiements par exemple, seront jugés nécessaires. On peut donc catégoriser aussi
le roulement de personnel de fonctionnel ou de dysfonctionnel (Holtom, Mitchell,
Lee et Inderrieden (2005).
Plusieurs auteurs documentent les impacts négatifs inhérents au roulement de
personnel. Ceux-ci relèvent fréquemment la perte d’habiletés et de connaissances, la
baisse du moral au sein des équipes, une diminution de la satisfaction de la clientèle,
une réduction de la productivité ainsi qu’un accroissement des dépenses pour
l’organisation (Dooney, 2005; Griffeth et Hom, 2004; Holtom, Mitchell, Lee et
Inderrieden 2005; Waldman, Kelly, Arora et Smith, 2004).
Parmi les effets découlant du roulement de personnel, l’aspect des coûts
retient l’attention de quelques auteurs qui soutiennent que ceux-ci peuvent atteindre
des sommets inquiétants (Waldman, Kelly, Arora et Smith, 2004). En effet, les coûts
liés à un départ équivalent à environ une fois le salaire annuel du travailleur; si ce
dernier occupait une fonction spécialisée on peut escompter jusqu’ à une fois et demi
le salaire annuel. Ces projections considèrent autant des coûts directs comme le
processus d’embauche, la formation à la tâche, les frais de séparation que les coûts
indirects tels que la baisse de la productivité.
Dans cette optique, les dépenses résultant du roulement de personnel ont été
estimées à 5 % du budget annuel d’opération pour une organisation américaine dans
le domaine de la santé (Waldman et al., 2004). Cette projection pourrait impliquer
pour le CSSS – IUGS des dépenses de l’ordre de six millions de dollars par année.
Voilà un autre argument de taille militant en faveur de mécanismes efficaces pour
retenir la main-d’œuvre.
Tous ces renseignements préliminaires seront maintenant enrichis par
l’exploration de modèles théoriques appuyés d’études associées au roulement de
92
personnel et à la rétention : le Unfolding model of volontary turnover4 et le Job
embeddedness5. Nous énonçons d’abord les éléments sous-jacents à ces modèles dans
les deux prochaines sections, pour ensuite proposer des pistes de réflexion.
1.2.2 Le modèle décrivant le déploiement du roulement volontaire de personnel
Depuis de nombreuses années, les concepts de rétention et de roulement de
personnel ont fait l’objet de multiples études. Selon Lee et Mitchell (1994) les
premiers modèles théoriques concernent les antécédents du roulement de personnel et
datent de 1938 (Barnard) et 1945 (Simon).
La majorité des construits scientifiques de l’époque expliquent le concept du
roulement de personnel par des notions associées à la satisfaction au travail et à la
perception d’alternatives d’emploi (Holtom, Mitchell, Lee et Inderrieden, 2005).
Ainsi, le fait de quitter une organisation serait intimement lié au niveau de
satisfaction que procure le travail ainsi qu’aux possibilités d’emploi offertes.
À partir de 1994, Lee et Mitchell proposent une nouvelle théorie enrichissant
les modèles développés depuis les 20 années précédentes, ces derniers étant basés
essentiellement sur le désir de changer d’emploi suite à de l’insatisfaction et en
fonction de la perception des options possibles (Donnelly et Quirin, 2006; Lee,
Holtom, McDaniel et Hill 1999).
Holtom et Inderrieden (2006) allèguent que cette nouvelle théorie serait une
des plus prometteuses pour comprendre et décrire le phénomène du roulement de
personnel.
4 Modèle de déploiement du roulement volontaire de personnel (traduction libre) 5 Modèle d’enracinement au sein de l’organisation et du milieu (traduction libre)
93
Lee et Mitchell, instigateurs du modèle décrivant le déploiement du roulement
de personnel, introduisent la notion de choc, un évènement significatif ayant un
impact sur la perception du travail. Or, Holtom et Inderrieden (2006) soulignent que
cette notion de choc s’avère une contribution majeure pour comprendre le phénomène
du roulement. Conformément à ce modèle, le choc se révèle le précurseur, la bougie
d’allumage initiant le processus psychologique menant à la décision de quitter
(Harman, Lee, Mitchell, Felps, Owens, 2007). Notons que ce processus
psychologique aboutissant à la décision de démissionner de l’organisation se fonde
sur la théorie de l’image invoquée par Beach en 1990 (Donnelly et Quirin, 2006).
Ce modèle remet en question les théories conventionnelles antérieures
stipulant notamment que l’insatisfaction au travail serait la cause la plus probante des
départs. Les auteurs du modèle allèguent plutôt que le roulement de personnel origine
d’un évènement impromptu, générant un choc pour le travailleur et stimulant une des
quatre voies décisionnelles possibles menant à quitter l’organisation (Harman, Lee,
Mitchell, Felps, Owens, 2007).
Ainsi, explorer un peu plus la nature de ces chocs personnels ou
professionnels, permettra à l’employeur d’anticiper les réactions et possiblement de
soutenir le travailleur, le cas échéant. Dans la catégorie des chocs personnels, on peut
retrouver des évènements comme : le transfert dans une autre ville du conjoint, une
séparation, l’adoption ou la naissance d’un enfant, la maladie d’un proche, le retour
aux études ou gagner à la loterie. Du côté des évènements engendrant un choc
professionnel, citons en exemple : manquer une promotion, recevoir une offre
d’emploi, avoir un échange houleux avec son supérieur ou éprouver des difficultés
avec les membres d’une équipe. On constate donc que les chocs peuvent s’avérer
internes ou externes à l’organisation, constitués d’évènements positifs, négatifs ou
plutôt neutres (Harman, Lee, Mitchell, Felps, Owens, 2007).
94
Suivant l’évènement qualifié de choc, Lee et Mitchell détaillent quatre voies
décisionnelles par lesquelles le processus de retrait se matérialise (Donnelly et Quirin,
2006; Harman, Lee, Mitchell, Felps et Owens, 2007; Holtom et Inderrieden, 2006,
Lee et Mitchell, 1994; Vandenberghe, 2004). Nous les décrirons sommairement.
La première voie est provoquée par un choc en dehors du contrôle de
l’organisation, comme le fait pour une employée de devenir enceinte. Cet évènement
engendre un scénario de retrait qui se met rapidement en place; la salariée sait qu’elle
quittera le travail soit temporairement ou définitivement en fonction des perspectives
envisagées. La seconde voie s’initie à la suite d’un choc dû à un évènement maîtrisé
par l’organisation qui occasionne un départ rapide, avant même d’amorcer la
recherche d’un nouvel emploi. En guise d’exemple, citons l’employé qui est privé
d’une promotion; la décision de quitter peut intervenir rapidement. En ce qui
concerne la troisième voie, le scénario de départ tarde à se dessiner. La personne
salariée, bien qu’éprouvant quelques insatisfactions, ne projette pas de plans pour
quitter, mais l’évènement inattendu semble exacerber ce mécontentement. Pour
expliquer ce scénario, soulevons à titre d’exemple le fait de recevoir une offre
d’emploi; la relative insatisfaction au travail incitera l’employé à la considérer
positivement. Finalement, la dernière voie comprend deux options, les versions A et
B, impliquant une érosion puis une rupture de la relation entre l’employé et
l’organisation. D’une part, la version A suppose des insatisfactions cumulées incitant
le travailleur à quitter l’organisation sans toutefois rechercher un autre emploi au
préalable. D’autre part, la version B implique aussi une accumulation
d’insatisfactions aboutissant à une démission après avoir cependant trouvé un autre
emploi (Vandenberghe, 2004).
Bien que ce modèle théorique bénéficie d’une bonne notoriété au sein de la
communauté scientifique, il ne faudrait pas écarter le concept de satisfaction au
travail comme prédicateur pertinent du roulement volontaire. Dans cet ordre d’idées,
95
Branham (2006) dévoile sept raisons cachées pour lesquelles les employés quittent
une organisation :
a) L’environnement de travail ou l’emploi ne correspond pas aux attentes; b) Une mauvaise compatibilité entre le travail et la personne; c) Trop peu de coaching et de rétroaction; d) Les possibilités de croissance et d’avancement insuffisantes; e) Un manque de reconnaissance et une perception de dévalorisation; f) Une charge de travail trop élevée conduisant à un déséquilibre entre la vie
personnelle et professionnelle; g) Une perte de confiance envers les gestionnaires de haut niveau.
A cet égard, le Unfolding model of volontary turnover doit plutôt être perçu
comme un construit scientifique complémentaire décrivant la complexité de
l’expérience vécue par le travailleur face à des enjeux autant personnels que
professionnels, reflétant du même coup les défis contemporains auxquels les
travailleurs sont exposés (Holtom et Inderrieden, 2006).
La pierre angulaire du modèle de Lee et Mitchell (1994) consiste en la notion
de choc. Cet évènement charnière engage le processus psychologique décisionnel qui
impliquera, à court ou moyen terme, le fait de quitter une organisation. Ce modèle est
résolument centré sur le processus conduisant l’employé à quitter une organisation.
Mais qu’en est-il du processus décisionnel incitant le travailleur à rester au sein d’une
organisation, faisant alors appel aux facteurs de rétention?
Une récente théorie énonce certains paramètres associés au fait de rester dans
une organisation. Il s’agit du modèle d’enracinement au sein de l’organisation et du
milieu dont les fondements sont traités à la prochaine partie.
96
1.2.3 Le modèle d’enracinement au sein de l’organisation et du milieu
Ce modèle théorique, militant en faveur de la rétention, soulève que plus des
liens sont tissés serrés entre le travailleur, la communauté et l’organisation,
meilleures sont les chances que l’individu demeure au sein de cette organisation
(Holtom et Inderrieden, 2006). Les aspects cruciaux de cette théorie, axée sur
l’enracinement à l’organisation, reposent en grande partie sur la création de liens
enchevêtrés. Ces liens enrichissent non seulement l’engagement professionnel, mais
aussi les sphères de la vie personnelle du travailleur. Ils se génèrent par de multiples
activités ou rencontres initiées par le milieu de travail. Ces liens étant solidement
ancrés, ils retiennent le travailleur car un départ laisserait présager diverses ruptures
non souhaitées.
En substance, trois dimensions sont à la base de ce modèle : fit, links,
sacrifice. Ces trois dimensions se résument par un niveau de compatibilité perçu entre
les valeurs, les aspirations du travailleur et son travail de même qu’avec
l’organisation et la communauté (fit), des liens étroits avec diverses personnes
composant l’organisation, les équipes et les groupes d’appartenance (links), ainsi que
des sacrifices à envisager si le travailleur devait quitter l’organisation (sacrifice)
(Harman, Lee, Mitchell, Felps, Owens, 2007; Holtom et Inderrieden, 2006; Mitchel,
Holtom, Lee et Erez, 2001).
Ce modèle axé sur les forces du réseautage stipule premièrement que les
valeurs personnelles et professionnelles ainsi que les plans de carrière doivent
concorder avec la culture organisationnelle et les exigences immédiates de l’emploi
(connaissances, habiletés). De surcroît, le travailleur considérera positivement des
liens compatibles avec les attributs de la communauté à proximité de l’organisation.
En second lieu, cette théorie suggère que de multiples liens, incluant
l’employé et sa famille, se tissent afin d’engendrer une toile sociale, psychologique et
97
financière entremêlant les collègues de travail, les amis, les groupes ainsi que la
communauté.
La troisième dimension découle des deux premières : plus la complicité
personnelle et professionnelle s’avère intense avec l’organisation et son milieu, plus
le nombre de liens tissés se révèle imposant et significatif, plus le désir de rester dans
l’organisation s’intensifie. Quitter l’organisation représente alors des sacrifices et des
pertes professionnelles ainsi que non professionnelles (par exemple, des amis ou des
projets communautaires).
En somme, le modèle d’enracinement au sein de l’organisation et du milieu
explique pourquoi les employés demeurent dans l’organisation. Il propose la création
de multiples liens compatibles entre eux, inculquant aux travailleurs le sentiment
qu’ils ne peuvent pas quitter leur travail ou l’organisation (Crossley, Jex, Benneth et
Burnfield, 2007).
Ce modèle axé sur la rétention renferme des pistes pertinentes alimentant nos
réflexions. Par exemple, nous saisissons l’importance de mettre sur pied des activités
favorisant la création de liens entre les individus ou encore que l’organisation soit
impliquée dans la communauté avec la participation des employés et même de leur
famille. Cependant, la profusion des renseignements puisés dans les écrits sur les
notions d’attraction et de rétention nous incite à proposer quelques liens et
observations émergeant de ces avancées théoriques.
1.3 Quelques observations et liens concernant les notions d’attraction et de rétention
D’emblée, un fil conducteur émerge des modèles théoriques sur l’attraction et
la rétention : la compatibilité entre le travail et les aspirations des employés.
Effectivement, la théorie découlant du phénomène de l’attraction Person-
98
organisation-fit ainsi que celle concernant la rétention Job Embeddedness model,
présentent toutes deux une trame de fond en partie semblable qui relève l’importance
de la convergence entre les caractéristiques organisationnelles prônées par l’employé
et celles démontrées par l’employeur.
Ainsi, le candidat à l’emploi recherche certains attributs organisationnels
relatifs au développement des connaissances, aux opportunités de carrière, aux
relations harmonieuses avec le supérieur immédiat, à un contexte de travail qui prône
des valeurs familiales; de surcroît, il souhaiterait voir ces atouts s’enrichir en cours
d’emploi afin de les rendre de plus en plus compatibles avec ses ambitions
personnelles et professionnelles. La création d’une compatibilité entre le milieu de
travail et les désirs de l’employé s’avérerait donc très prometteuse pour réussir à
attirer et à retenir les travailleurs. Butler et Waldroop, (1999) soulignent même que
l’enracinement entre les intérêts des individus et le travail doit aller jusqu’à sculpter
l’emploi en fonction de l’employé dans le seul et unique but de le rendre heureux au
travail.
En analysant plus spécifiquement la théorie préconisant l’enracinement au
sein de l’organisation et du milieu dans l’emploi, nous retenons certains constats.
D’une part, on peut déduire que le travailleur dûment ancré dans l’organisation par un
emploi stimulant, des relations mobilisatrices avec ses collègues et son supérieur
immédiat ainsi que par des activités diversifiées devra subir de sérieux revers pour
quitter l’organisation. En ce sens, Holtom et Inderrieden (2006) soumettent que
lorsque la compatibilité entre l’employé et le contexte organisationnel se révèle
intense, le choc devra être très significatif pour mener à un départ. Cette allégation
fournit un lien pertinent entre les deux modèles théoriques concernant le déploiement
du roulement de personnel et la rétention du personnel.
D’autre part, la création de liens multiples au sein de l’organisation
supposerait que le supérieur immédiat représente un atout majeur de ce réseautage.
99
Les gestionnaires tiennent assurément un rôle de premier plan dans l’enracinement au
travail. À ce titre, Frank, Finnegan et Taylor (2004) invoquent que le rôle déterminant
du supérieur immédiat dans la rétention s’avère bien reconnu; pour l’employé, avoir
de bonnes relations avec le gestionnaire qui le supervise, empreintes de respect et
d’ouverture dans la communication, rendrait un éventuel départ de l’organisation
laborieux. Nous retenons que la relation de supervision constituerait donc un axe
d’intervention privilégié.
En appui à cette allégation, d’autres auteurs soulignent que le rôle du
gestionnaire se révèle crucial dans des contextes organisationnels forgés de fusions et
d’acquisitions comme observés fréquemment dans les années 90. Le sentiment
d’appartenance s’avérant alors ardu à développer, le supérieur immédiat devient
l’ancrage du travailleur (Stinglhamber et Vandenberghe, 2003).
Par ailleurs, d’autres constatations émergent concernant les théories sur
l’attraction et la rétention. Un des enseignements frappant du modèle décrivant la
compatibilité entre les attributs organisationnels et les individus réside en
l’affirmation que certains attributs organisationnels attirent les chercheurs d’emploi.
Or, nous avons vu que les personnes qui œuvrent au sein de l’organisation,
notamment les gestionnaires, sont grandement responsables du succès de la rétention.
En conséquence, les chercheurs d’emploi seraient attirés d’abord par une organisation
présentant certaines caractéristiques et ensuite ils y demeureraient principalement
grâce aux relations établies, entre autres, avec et par les gestionnaires.
De fait, selon Becker et Kaplan (2006), plus souvent qu’autrement, les
employés quitteraient une organisation en fonction de facteurs sous la gouverne des
gestionnaires : les travailleurs joignent une organisation et pourtant, ils quittent des
gestionnaires. Cette affirmation est lourde de sens pour une équipe de gestion.
100
En complément, en ce qui a trait à la théorie relative au roulement de
personnel, il serait intéressant d’explorer la possibilité de préparer les travailleurs à
interpréter les évènements pouvant engendrer des chocs, causes potentielles de
départ. Cette préparation viserait à encourager le dialogue avec le supérieur immédiat
en cas d’évènements bouleversant les perspectives d’emploi. Citons deux exemples
pouvant réalistement générer des chocs pour les travailleurs, particulièrement ceux de
la relève : des propositions d’offres d’emploi ainsi que l’intégration au marché du
travail.
Ce dernier point a d’ailleurs fait l’objet d’études par différents auteurs,
particulièrement pour les infirmières nouvellement graduées. Ils relèvent que la
transition entre la formation académique et le milieu de travail s’avère terrifiante et
stressante, ils désignent cet état de choc de la réalité (Greco, Laschinger et Wong,
2006; Polach, 2004). Conséquemment, une préparation appropriée qui donnerait une
vision réaliste des défis présentés par le marché du travail se révèlerait assurément
pertinente pour les travailleurs de la génération Y.
De toutes ces notions concernant l’attraction et la rétention émergent une fois
de plus des réflexions à propos du capital humain. La main-d’œuvre rarissime,
désormais considérée comme un avantage compétitif, représentant une valeur
inestimable pour une organisation, doit être soigneusement attirée, choisie, formée,
développée et surtout retenue.
La seconde partie de ce chapitre traite de la recension des écrits concernant les
caractéristiques afférentes aux employeurs de choix.
2. LES CARACTÉRISTIQUES DE L’EMPLOYEUR DE CHOIX
Dans un contexte où le bassin de main-d’œuvre diminue, engendrant une forte
concurrence, quasi une guerre des talents, courtiser les travailleurs en devenant un
101
employeur de choix s’avère une avenue enviable. D’ailleurs, Robak (2007) soutient
que devenir un employeur de choix représente autant une stratégie de gestion de
ressources humaines efficace qu’un solide avantage compétitif pour attirer et retenir
les talents.
Néanmoins, ce concept d’employeur de choix demeure encore flou; peu de
littérature scientifique en analyse directement les tenants et aboutissants.
Dans ce contexte, nous abordons ce concept en décrivant premièrement
quelques références repérées au sujet d’employeurs qui se distinguent, en mettant
notamment en lumière des études de cas. Par la suite, nous décrirons des concepts
apparentés, plus spécifiques au secteur de la santé, soit le Magnet hospital et
l’approche Planetree. Nous partagerons ensuite certains constats issus de ces
références. À la dernière partie, nous proposerons un schéma récapitulant plusieurs
aspects relatifs à la notion d’employeur de choix.
2.1 Des références globales sur la notion d’employeur de choix
Bien que peu de chercheurs semblent avoir étudié spécifiquement le concept
d’employeur de choix jusqu’à ce jour, certains en font allusion dans leur écrits
comme Birt, Wallis et Winternitz (2004) qui sous-tendent que l’élaboration de
politiques bien ciblées, prônant la rétention du personnel, représente une étape
déterminante pour devenir un employeur de choix. De fait, d'après notre recension
des écrits, nous constatons que les auteurs s’attardant au phénomène de la rétention
proposent fréquemment des liens entre un employeur réussissant à retenir ses
travailleurs et un employeur qui se démarque.
Pour leur part, Joo et McLean (2006) soulèvent, dans leur article recensant les
écrits sur les meilleurs employeurs, qu’en dépit d’une pratique populaire, très peu
d’écrits scientifiques ont pu être retracés. Ces auteurs mentionnent aussi que ce
102
phénomène de meilleur employeur s’étudierait mieux par le biais d’études de cas
puisque le construit théorique serait presque inexistant. À cet égard, deux autres
auteurs soutiennent qu’il s’avère impératif que ce concept fasse l’objet d’études
scientifiques rigoureuses. Ils allèguent que les avantages compétitifs dévolus aux
employeurs de choix, clamés surtout par la presse populaire depuis quelques années,
consisteraient en des présomptions qui doivent se valider par des recherches
(Lenaghan et Eisner, 2006).
De fait, le concept d’employeur de choix ou employer of choice semble
davantage l’apanage de la littérature populaire. En effet, il est aisé de repérer des
ouvrages, des questionnaires ou même des listes de projets à mener pour devenir un
employeur de choix; ceux-ci sont élaborés par des consultants. Citons, entre autres,
un volume intitulé How to become an Employer of Choice (Herman et Gioia, 2000)
qui décrit une douzaine d’avantages (par exemple, une augmentation de la
performance et des profits, une diminution du stress chez les employés et une
augmentation du plaisir, un service à la clientèle plus efficace) et fait valoir certains
principes à observer pour devenir un employeur de choix comme soutenir les
initiatives, encourager le plaisir au travail, adopter un code vestimentaire décontracté,
envoyer toujours des messages positifs et assurer un environnement sécuritaire. Ces
références s’attardent davantage à proposer une démarche qu’à expliciter ou analyser
certains fondements.
2.1.1 Quelques données relatives à la notion d’employeur de choix issues d’études de cas
Certains chercheurs ont effectué des analyses de cas et font ressortir les
principaux facteurs à succès de quelques entreprises. Dans cette foulée, citons les cas
de l’usine Lauralco (Drouin, 1998), de la marque Deloitte (Morin et Lamothe, 2007)
ainsi que de l’entreprise EXFO (Audet, Jacob et Boulet, 2002). De ces études de cas
103
décrivant des réussites d’entreprises, émergent des caractéristiques consistantes qui
semblent distinguer ces employeurs.
Soulignons une recherche de candidats ciblés, en accord avec les valeurs
organisationnelles, une intégration à l’emploi bien encadrée et des relations de
proximité facilitant une communication directe, la prise en compte du point de vue
des employés.
On relève aussi un pouvoir décentralisé favorisant l’autonomie et la
participation, une importante participation sociale ainsi qu’une gestion proactive des
carrières et des hauts potentiels.
De plus, on remarque des investissements importants pour un développement
des connaissances continu, basé sur le partage et sur l’apprentissage dans l’action, de
même qu’une rétroaction fréquente et une reconnaissance du succès ainsi qu’une
implication sociale reconnue et des activités qui favorisent le bien-être.
De son côté, Gosselin (2008) y va de propositions sous forme de leçons des
meilleurs employeurs. Il souligne l’importance d’une grande sélectivité à l’embauche,
d’une grande écoute des employés appuyée par beaucoup de communication,
régulière et transparente. Il relève aussi le soutien pour équilibrer travail et vie
personnelle, des efforts soutenus et des moyens diversifiés en matière de formation
continue. Selon l’auteur, les emplois doivent comporter des défis et faire appel à
l’intelligence des travailleurs. L’organisation du travail doit être flexible. Ce dernier
souligne que la reconnaissance pour des contributions exceptionnelles est importante
de même qu’un partenariat avec les instances syndicales et la création d’une culture
forte et unique.
D’autres auteurs ont procédé à une analyse exhaustive de la vaste étude de cas
menée par Hewitt en Asie durant l’année 2003 concernant les meilleurs employeurs
104
(Joo et McClean, 2006). Selon ces derniers, les caractéristiques-clés de ces
organisations pourraient se réduire à trois, soit des opportunités d’orientation à la
tâche et de développement professionnel, des possibilités d’avancement au niveau de
la carrière ainsi qu’un environnement de travail positif. Pour leur part, Sutherland,
Torricelli et Karg (2002) avancent que les caractéristiques les plus importantes pour
un employeur de choix se résumeraient à offrir un environnement de travail
comportant des défis ainsi que des opportunités de développement de carrière.
Selon une perspective un peu différente, suite à des analyses de cas
d’entreprises à succès, Branham (2005) mentionne que pour devenir un employeur de
choix, une organisation doit mobiliser des ressources tangibles, telles qu’un salaire
adéquat et des avantages sociaux pertinents, et intangibles, comme un climat de
travail positif ou la création d’une relation de confiance. Ainsi, les efforts doivent être
axés sur des objectifs tant à court terme qu’à long terme.
Invariablement, la majorité de ces auteurs souligne directement ou
indirectement le dynamisme, la motivation et la fierté des personnes qui composent
ces entreprises; bref, les travailleurs semblent heureux au travail.
Tous ces éléments convergent avec plusieurs des aspects abordés
précédemment, notamment au niveau des concepts d’attraction et de rétention.
Naturellement, des liens se tissent avec les modèles théoriques étudiés ainsi qu’avec
les caractéristiques des générations sur le marché du travail.
À la prochaine partie, nous discuterons brièvement de l’utilisation du terme
Employeur de choix par plusieurs entreprises comme image de marque.
105
2.1.2 Le recours à la notion d’Employeur de choix par les organisations
On remarque que le terme Employeur de choix s’avère passablement utilisé
par bon nombre d’organisations, notamment en guise de publicité pour attirer les
travailleurs. Certains auteurs font d’ailleurs allusion à cette stratégie utilisée pour
mousser la réputation de l’entreprise (Joo et McClean, 2006). Sutherland, Torricelli et
Karg (2002) soutiennent que l’appellation Employer of choice réfère à l’identification
d’une marque associée à l’image corporative et à la réputation exigeant ainsi une
approche marketing, particulièrement au niveau des stratégies de recrutement.
Certaines organisations s’autoproclament Employeur de choix et font leur
propre marketing, tandis que d’autres choisissent de se faire reconnaître par un tiers à
l’échelle sectorielle, régionale, provinciale ou canadienne. Effectivement, une
entreprise peut obtenir une certification ISO, essayer de faire partie du Top cent
classé par de grands magazines, relever le Défi Meilleurs Employeurs Affaires Plus,
figurer parmi les 50 employeurs de rêve de la revue Commerce ou encore obtenir le
titre d’Employeur de choix au Canada.
La plupart de ces démarches se basent sur des questionnaires à compléter par
les travailleurs; par exemple, le Défi meilleurs employeurs gratifiant les
environnements de travail sains et stimulants réfère à un questionnaire mesurant le
niveau d’engagement des employés. Toutefois, celui-ci n’est disponible que lorsque
des démarches d’inscription au concours sont effectuées. Quant au concours
Employeurs de choix au Canada, il est axé sur la mobilisation organisationnelle qui
se reflèterait par : des employés qui parlent positivement de l’organisation,
démontrent un fort désir de demeurer au sein de l’organisation et déploient des efforts
additionnels, se dépassent pour contribuer à la réussite de l’organisation. Une fois de
plus, l’accès au sondage pour mesurer le niveau de mobilisation de l’entreprise est lié
aux démarches d’inscription.
106
En outre, nous avons repéré un test éclair développé par des consultants (Le
groupe Ambition) portant sur Êtes-vous un employeur de choix?. En substance, il
s’agit d’un outil composé de quinze questions permettant de réfléchir sur la qualité
des gestes favorisant l’embauche et la fidélité des meilleurs employés. Parmi ces
questionnements, on discerne quelques thèmes apparentés aux éléments relevés
antérieurement, tels que : la sollicitation d’idées de la part des employés, l’intégration
d’un nouvel employé à l’aide d’un mentor, la présence d’un processus décisionnel
impliquant les employés, l’actualisation d’un système d’appréciation de la
performance, la démonstration d’un grand intérêt pour les besoins de développement
de compétences et de carrière ainsi que la responsabilisation des superviseurs face à
la rétention du personnel. En tout état de cause, ces caractéristiques correspondent à
de saines pratiques de gestion de ressources humaines qui s’avèrent gagnantes au plan
de la fidélisation du personnel.
Nonobstant le véhicule de reconnaissance préconisé, nous croyons qu’il ne
suffit point de se proclamer ou d’être désigné Employeur de choix. Cette image de
marque, utilisée d’ores et déjà des milliers de fois par des entreprises sur l’Internet,
demeurerait selon nous factice sans une solide culture organisationnelle qui supporte
un assortiment d’actions fondamentales qui caractériseront l’employeur.
Dans le but d’enrichir nos réflexions concernant les caractéristiques d’un
employeur qui se distingue, plus spécifiquement dans le secteur de la santé, nous
explorons maintenant le concept de Magnet hospital.
2.2 Les caractéristiques des Magnets hospitals
Ce concept a été développé à l’origine aux États-Unis, il y a plus de 20 ans,
dans le but d’attirer et de retenir la main-d’œuvre infirmière dans les organisations de
la santé (Armstrong, Saisie le 12 mai 2008).
107
En fait, des chercheurs ont décelé, en 1982, que certains hôpitaux récoltaient
beaucoup de succès dans l’attraction et la rétention de leurs infirmières
comparativement à d’autres. Ceux-ci ont alors désigné ces organisations à succès de
Magnet hospital car les infirmières se sentaient attirées par celles-ci (Smith, Tallman
et Kelly, 2006). Dans les années 90, l’Association américaine des infirmières a établi
un système de reconnaissance officiel, le Magnet Recognition Program proclamant
l’excellence des soins et services infirmiers des établissements en faisant partie
(Armstrong et Laschinger, 2005).
Les hôpitaux désignés de Magnet hospital démontrent des caractéristiques
spécifiques et uniques engendrant une culture et un environnement que les infirmières
trouvent attirantes et très satisfaisantes. Les attributs relevés, particulièrement du
point de vue des infirmières, selon ces auteurs, (Armstrong, Saisie le 12 mai 2008;
Cameron, Armstrong-Stassen, Bergeron et Out, 2004; Smith, Tallman et Kelly, 2006)
consistent en un grand niveau d’autonomie et des responsabilités importantes
concernant le champ de pratique, de bonnes relations avec les collègues,
particulièrement avec les médecins, du personnel en quantité suffisante pour fournir
des services de qualité, du temps pour discuter avec les collègues de situations
relatives aux patients ainsi qu’un processus de décisions décentralisé, de même
qu’une structure organisationnelle avec peu de paliers hiérarchiques, un supérieur
immédiat (infirmière-chef) détenant un réel pouvoir et supportant pour les
infirmières, un leadership en soins infirmiers soutenant les investissements dans la
formation et valorisant l’expertise en soins infirmiers et une organisation du travail
qui reconnaît la valeur de la contribution des infirmières.
Ces facteurs ont été regroupés en trois domaines par Smith, Tallman et Kelly
(2006) soit, l’autonomie professionnelle, l’influence sur le champ de pratique et
l’environnement de travail ainsi qu’une communication efficace avec les collègues,
les médecins et les administrateurs.
108
En tout état de cause, ces caractéristiques ont fait l’objet de plusieurs études et
ont démontré des impacts convaincants au fil du temps (Cameron, Armstrong-
Stassen, Bergeron et Out, 2004). De fait, comparativement aux hôpitaux non Magnet,
les Magnet hospitals démontrent moins de roulement de personnel, un niveau de
satisfaction face au travail plus élevé pour les infirmières, de meilleurs résultats pour
les patients dont un taux de mortalité plus bas, un niveau de satisfaction plus haut
chez les patients de même qu’un ratio infirmière-patient plus élevé. En somme, les
Magnet caractéristiques semblent engendrer l’efficience autant au niveau de
l’environnement de travail qu’au niveau des coûts.
Toutes ces études mettent en lumière des succès relatifs à l’attraction et à la
rétention des infirmières. Armstrong (Saisie le 12 mai 2008) soutient même que ces
principes édictant la reconnaissance d’un Magnet hospital, spécifiquement dédiés aux
infirmières, pourraient s’appliquer pour tout le personnel d’un centre hospitalier.
Pour compléter notre quête des attributs caractérisant les employeurs qui se
démarquent dans le secteur de la santé, examinons maintenant l’approche Planetree.
2.3 Les caractéristiques de Planetree movement
Cette approche se déploie, tout comme le Magnet hospital, au sein du système
de santé. La pierre angulaire de ce mouvement, initié en 1978 aux États-Unis,
consiste prioritairement à fournir un environnement holistique incitant le patient à
s’engager dans un processus de guérison et de croissance spirituelle (Bischop et
Griffin, 2006). Axée à ces débuts sur le client, cette approche évoluera au fil du temps
afin d’orienter certaines de ses actions sur le bien-être du personnel.
Ainsi, dans le cadre d’un environnement médicalisé, souvent technologique,
une attention particulière est portée aux besoins spirituels, sociaux et émotionnels de
la clientèle; toute l’approche de soins se centre sur le patient et son bien-être. De fait,
109
l’approche Planetree est fondée sur une compréhension des facteurs de stress
affectant le processus de guérison et propose un ensemble d’éléments qui les
atténuent. Ces derniers concernent autant l’environnement physique que des aspects
liés à la prestation des soins, comme des fenêtres dans les chambres, en majorité
privées, permettant de profiter de la lumière du jour et si possible d’une vue sur la
nature;des chambres sont suffisamment spacieuses pour accueillir un membre de la
famille à dormir, le cas échéant; des murs de corridor peints de couleurs pastel et
enjolivés de fresques et une attention particulière au contrôle du bruit; on peut même
agrémenter le quotidien de musique douce. Aussi, on privilégie un accès pour le
patient à l’information qui concerne son épisode de soins; en ce sens, le lieu de travail
de l’équipe de soins est à aire ouverte de façon à faciliter la consultation des dossiers.
Le patient est donc encouragé à effectuer des commentaires et à les inscrire dans son
dossier. Ainsi, le patient et sa famille participent directement à l’élaboration du plan
de soins avec l’équipe de soins et les médecins.
Tous ces éléments, et beaucoup d’autres, tendent à humaniser les soins.
Certains soulignent que cette approche humaniste a révolutionné la façon dont les
soins sont prodigués dans les établissements adoptant ce modèle (Schwade, 1994).
En ce qui a trait aux retombées de l’approche Planetree, on souligne une
accélération du processus de guérison, une réduction de la durée de séjour ainsi
qu’une augmentation de la satisfaction de la clientèle. Conséquemment, certains
auteurs énoncent que lorsque la satisfaction des patients s’accroît, celle du personnel
augmenterait aussi (Bischop et Griffin, 2006).
Grâce à cette approche qualifiée d’humaniste, les employeurs semblent se
distinguer, à tout le moins en ce qui a trait à la prestation des services à la clientèle.
Par contre, peu d’évidences scientifiques nous permettent de conclure que des effets
notables sont observés relativement à l’attraction ou à la rétention de la main-
d’œuvre.
110
Toutefois, depuis les dix dernières années, l’approche s’élargit et se centre
aussi sur le personnel en offrant un environnement et des services axés sur leur bien-
être, comme des salles de repos décorées et équipées avec attention, d’agréables vues
sur des jardins, des services de traiteurs 24 heures par jour, des garderies, des services
de nettoyeur ou des rabais pour accéder à des centres sportifs.
Le réseau Planetree movement inclut aujourd’hui plus de 95 centres de santé
répartis aux États-Unis, en Europe et au Canada. Incidemment, depuis 2004 le Centre
de Réadaptation de l’Estrie a pris ce virage humaniste afin d’offrir de meilleurs
services mais aussi pour attirer du personnel (Cousineau, 2006).
Pour terminer cette partie qui documente les caractéristiques d’employeurs se
démarquant, nous effectuerons quelques constatations découlant de la notion
d’employeur de choix, du modèle Magnet hospital et enfin de l’approche Planetree.
2.4 Quelques observations et liens concernant la notion d’employeur de choix ainsi que sur les approches Magnet hospital et Planetree.
De toutes ces notions d’Employeur de choix, de Magnet hospital et de
Planetree movement émerge un scénario constant : la vraie distinction pour un
employeur jaillira d’une culture organisationnelle forte, axée sur le capital humain,
qui obligera à se renouveler, à évoluer et surtout à être à la hauteur des aspirations des
travailleurs et le cas échéant, des promesses annoncées.
Nous croyons que pour être reconnu un employeur de choix, les meilleurs
juges seront les travailleurs à l’emploi qui rechoisiront l’organisation malgré
différentes opportunités, telles que des offres d’emploi croisant leur chemin. Plus que
l’attraction, parfois éphémère, la rétention insufflera une image corporative favorable
qui devrait limiter la pénurie.
111
En ce qui a trait plus spécifiquement au modèle Magnet hospital, on constate
qu’un des facteurs déterminant s’avère l’établissement de relations harmonieuses
avec l’entourage au travail tout comme le préconise le modèle sur la rétention (Job
Embeddedness model) qui souligne l’importance de façonner des liens multiples au
sein de l’organisation. Aussi, le fait de proposer des défis ainsi que de déléguer des
responsabilités professionnelles rejoignent les aspirations, déjà décrites, des
travailleurs en plus de représenter un levier pertinent pour la rétention. D’un autre
côté, considérant les enjeux de main-d’œuvre qui se profilent pour le titre d’emploi
d’infirmière, ce modèle centré sur cette profession pourrait être examiné plus
spécialement par les responsables en soins infirmiers.
Quant à l’approche Planetree, elle recèle des pistes intéressantes à exploiter
concernant la vigilance centrée sur l’environnement physique et des services qui
préconisent la qualité de vie, ayant un impact sur le bien-être du personnel. En ce qui
a trait à l’environnement physique, s’il est conçu avec précaution, il pourrait
engendrer des effets positifs sur la culture organisationnelle en plus de faciliter la
communication, le travail d’équipe et même la créativité (Earle, 2003).
Au point suivant, nous présentons une figure reconceptualisée qui renferme
des renseignements agglomérés sur la notion d’employeur de choix.
2.5 Une synthèse des notions associées à un employeur de choix
Dans le but de fournir un outil synthétisant les divers éléments à considérer
pour devenir employeur de choix, nous proposons une figure inspirée des résultats
d’une recherche canadienne. Celle-ci relate les éléments majeurs influençant la
rétention des travailleurs (OHA, 2001). Or, nous avons vu précédemment que les
employeurs qui se démarquent sont souvent ceux sachant retenir les talents; cette
figure nous procure donc des points de repères pertinents.
112
Il est intéressant de constater que la figure proposée s’apparente, à certains
égards, à un schéma développé en 2005 par la Direction des ressources humaines et
informationnelles et ce, dès les débuts de la réorganisation du nouveau CSSS – IUGS
(Annexe C, Meunier et Rosa, 2005, Projet de stabilisation des ressources humaines).
Effectivement, un projet avait dès lors été lancé : le défi de la stabilisation des
ressources humaines. Un mandat avait été octroyé à deux gestionnaires de cette
direction, débouchant sur l’élaboration d’un modèle adopté au comité de direction.
Celui-ci est basé sur huit zones de performance, telles qu’identifiées par les
gestionnaires l’ayant développé. Nous discuterons brièvement de ce modèle et de ses
zones de performance dans la cadre de la première étape de notre intervention, décrite
au chapitre quatre. Malheureusement, considérant les démarches structurelles
d’envergure qui ont suivi, le modèle n’a pu se transposer complètement en
réalisations.
La figure présentée plus loin pourra servir de canevas de base aux groupes
d’acteurs organisationnels qui seront impliqués dans l’élaboration d’un plan de travail
décrivant les activités à prioriser pour devenir un employeur de choix. Ce sujet sera
traité au chapitre cinq.
113
Figure 4 : Vers l’employeur à choisir, les facteurs de rétention
GESTION ET SUPERVISION • Préoccupations de l'équilibre travail / vie personnelle • Respect, confiance et reconnaissance • Préoccupations du bien-être des employés • Coaching
RÉSEAUTAGE • Mise sur pied d'activités diverses • Création de liens avec l'entourage de l'employé et la communauté • Implication communautaire de l'organisation • Création d'un esprit d'équipe
OPPORTUNITÉS DE CARRIÈRE • Plans pour un avancement professionnel • Soutien particulier des employés performants • Rétroactions régulières et recherche d'opportunités de carrière • Nombreuses possibilités d'apprentissages
ATTRACTION / RECRUTEMENT • Pratiques proactives d'embauche • Programme de mentorat • Création d'un environnement de travail sur l'apprentissage et le développement • Recherche de gestionnaires avec une philosophie d'attraction et de rétention de la main-
d'œuvre
ORIENTATION À LA TÂCHE • Programme de mentorat et de coaching • Processus d'innovation (technologie) • Validation des aspirations • Sensibilisation, ateliers sur la notion de choc • Formation initiale structurée et soutenue
TRAVAIL
• Autonomie et latitude • Défis professionnels variés • Retrait des irritants • Utilisation et validation des talents • Utilisation des technologies • Participation dans les décisions
ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL • Équilibre vie professionnelle / vie personnelle • Environnement physique agréable • Principes de gestion axés sur le bien-être • Soutien aux bonnes habitudes de vie (exercice physique, alimentation, gestion du stress)
VERS
L’E
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FACT
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DE
RÉTE
NTIO
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« Être un employeur de choix, un résultat à atteindre! »
Source : Reconceptualisation et traduction libre à partir du modèle développé par Price Waterhouse Coopers LLP pour Ontario Hospital Association (2001)
Certes, cette figure met en évidence la complexité du projet en illustrant la
multitude de leviers organisationnels à orchestrer pour arriver aux résultats convoités.
Car, devenir L’employeur à choisir, s’avère le résultat d’une longue démarche ciblant
des objectifs axés sur le mieux-être des travailleurs au sein de l’organisation.
Collectivement, ce défi pourra être relevé.
L’exploration des écrits scientifiques relatifs aux principaux paramètres
associés aux phénomènes d’attraction et de rétention ainsi que ceux connexes à la
notion d’employeur de choix évoquent divers aspects en interaction, aboutissant à des
points de repère congruents qui permettent de faire cheminer la réflexion.
114
Nous compléterons l’étude des écrits pertinents à notre essai intervention par
un survol des approches à préconiser pour influencer des instances décisionnelles à
s’engager dans une orientation stratégique. Ces informations seront particulièrement
pertinentes pour la seconde étape de notre intervention.
3. LES STRATÉGIES POUR MOBILISER LES HAUTES INSTANCES DÉCISIONNELLES
Devenir un employeur de choix présuppose d’abord la diffusion d’une
orientation stratégique, suivie de gestes et décisions qui, à force de persévérance,
édifieront une culture organisationnelle à la hauteur de cette ambition. Par
conséquent, la Directrice des ressources humaines et informationnelles doit influencer
les plus hautes instances décisionnelles, soit le directeur général, le comité de
direction et le conseil d’administration, afin que non seulement soit adoptée une
orientation édictant comme cible de devenir un employeur de choix, mais surtout
dans le but que des actions significatives se manifestent; il s’agira de la seconde étape
de notre intervention.
Ce rôle d’influence stratégique, apparenté à celui de gestion de changement,
consistera essentiellement à inciter l’organisation à mener un ensemble d’activités
axées sur le développement de sa capacité de transformation (Bareil, Boudrias et
Savoie, 2002).
Certains écrits rapportent que la capacité d’influencer consisterait en un des
attributs les plus cruciaux qu’un gestionnaire de niveau supérieur devrait démontrer
(Cohen et Bradford, 1989; Enns et McFarlin, 2003 et 2005; Yukl et Falbe, 1990). De
fait, dans un contexte environnemental marqué par la turbulence, il n’est pas
surprenant que des gestionnaires doivent déployer beaucoup d’énergie à influencer
des collègues dans le but d’introduire de nouvelles initiatives, projets ou stratégies
115
qui assureront l’adaptation, voire la survie de l’organisation (Enns et McFarlin,
2005).
Gosselin et Bélanger (2005) soutiennent qu’exercer de l’influence de manière
efficace s’avère une activité capitale et une exigence incontournable chez les
professionnels en gestion de ressources humaines.
Pour mieux comprendre les principales notions liées aux stratégies
d’influence, nous aborderons deux aspects déterminants soit, premièrement, la prise
en compte du contexte environnemental et en second lieu les leviers essentiels à faire
valoir.
3.1 Le contexte environnemental
Avant d’entreprendre une démarche d’influence, il est primordial d’analyser
le contexte afin de débusquer les enjeux militant en faveur du projet ou au contraire,
nuisant à la cible convoitée (Gosselin et Bélanger, 2005). Certes, la conjoncture de
pénurie de main-d’œuvre décrite précédemment procure à la Direction des ressources
humaines et informationnelles un contexte idéal pour stimuler un réalignement des
stratégies face au renouvellement des effectifs du CSSS – IUGS.
Par ailleurs, d’autres facteurs positifs ou au contraire contraignants prévalant
dans l’organisation et dans son environnement pourraient influencer notre stratégie de
persuasion. Afin de dresser un portrait général de ce contexte dans lequel notre
stratégie d’influence se déroulera, nous en présenterons les grandes lignes.
3.1.1 Les facteurs positifs
En ce qui concerne les facteurs positifs entourant notre projet de devenir un
employeur de choix, citons : un conseil d’administration déjà sensibilisé à la
116
problématique de pénurie de main-d’œuvre, un directeur général ouvert, préoccupé
par les enjeux de gestion de ressources humaines et supportant les initiatives de la
Direction des ressources humaines et informationnelles depuis quelques années ainsi
qu’une équipe à la Direction des ressources humaines et informationnelles mobilisée
par ce projet, jouissant d’une réputation positive au sein de l’organisation. Soulignons
que le directeur général s’avère déjà convaincu de la pertinence d’une orientation
visant à devenir un employeur de choix. De plus, les impacts de la pénurie de main-
d’œuvre vécue d’ores et déjà par plusieurs gestionnaires et équipes en font un dossier
stratégique hautement préoccupant, bénéficiant d’une certaine mobilisation de la part
de bon nombre d’acteurs organisationnels. Soulignons aussi que les relations avec les
partenaires syndicaux s’avèrent empreintes de respect, de volonté de collaboration en
plus d’être centrées sur la recherche de solutions. Enfin, mentionnons le plan
stratégique 2006-2011 de l’organisation qui émet des orientations claires en matière
de stratégies de renouvellement de main-d’œuvre et de services de qualité à la
clientèle.
3.1.2 Les facteurs contraignants
Du côté des facteurs pouvant freiner le projet, on peut certainement estimer
que la pression quotidienne vécue par tous les acteurs organisationnels commandera
énormément d’actions assidues pour assurer l’avancement des objectifs convenus. Par
ailleurs, le départ précipité et non anticipé du directeur général soulève des
inquiétudes face au déroulement du projet; d’autres appuis devront remplacer le
soutien, indéfectible, de ce dernier.
Aussi, la taille de l’organisation et son étalement impliqueront de bien
circonscrire les étapes du projet. De plus, la récente histoire de fusions et
d’intégrations oblige à faire des efforts notables pour rassembler les protagonistes
autour d’un projet commun, eux qui ont vécu plusieurs bouleversements
organisationnels. L’environnement syndical, empreint de règles procédurales,
117
pourrait également représenter un frein aux divers projets à mettre en œuvre.
Finalement, la relative concurrence établie entre les organisations en santé s’avérera
un enjeu majeur à prendre en compte.
Malgré ces quelques facteurs, sans être exhaustifs, recelant des opportunités et
des enjeux qui devront être considérés au cours de notre démarche, nous estimons que
le contexte s’avère suffisamment propice pour que notre tentative d’influence
débouche sur un engagement d’enclencher des actions, suivi par l’adoption d’un
choix stratégique de devenir employeur de choix.
Dans un contexte jugé favorable, la capacité d’influence reposera aussi sur
l’utilisation de divers leviers; nous les décrivons à la prochaine section.
3.2 Les leviers associés aux stratégies d’influence
En tant que service conseil et de soutien, la Direction des ressources humaines
et informationnelles ne détient pas de réelle autorité pour faire approuver un tel
projet, des leviers d’influence basés sur d’autres atouts, sont requis (Church et
Waclawski, 1999; Cohen et Bradford, 1989; Enns et McFarlin, 2003 et 2005;
Gosselin et Bélanger, 2005). En effet, cette direction ne peut ordonner de prioriser ce
projet ni de modifier les approches de gestion actuelles au profit de l’idée de devenir
employeur de choix.
Conséquemment, pour potentialiser la capacité d’influence, le recours à des
leviers tels que le pouvoir, la crédibilité et la réputation, se révèle indispensable
(Gosselin et Bélanger, 2005). Selon Conger (1998), la crédibilité serait la pierre
angulaire du processus de persuasion. De leur côté, Enns et McFarlin (2005)
soulignent aussi l’importance pour une direction de ressources humaines de jouir
d’une bonne crédibilité de même qu’une réputation enviable pour être en mesure
d’influencer les objectifs organisationnels.
118
Bien qu’il s’agisse de trois leviers distincts, on considère le pouvoir, la
crédibilité et la réputation comme des entités complémentaires. Nous abordons ces
concepts dans les lignes qui suivent.
Pour une direction de ressources humaines, le pouvoir lié à l’expertise serait
le levier le plus accessible, permettant d’amener une personne ou une instance à agir
dans le sens de ce qui est souhaité. En ce qui a trait à la crédibilité, elle reposerait sur
la cohérence entre les paroles et les actions; passer de politiques à des comportements
congruents. La réputation, quant à elle, concerne la perception positive ou négative
des autres à l’égard d’une personne ou d’une équipe souvent associée à la capacité de
livrer des résultats. Ce troisième levier serait aussi lié à une certaine forme de
visibilité concernant surtout le fait d’être associé à des enjeux de nature stratégique.
(Gosselin et Bélanger, 2005).
En substance, pour être en mesure d’exercer de l’influence auprès du conseil
d’administration, la directrice des ressources humaines et informationnelles, dans son
rôle d’intervenante, devra utiliser son pouvoir d’expertise, sa légitimité
professionnelle et sa crédibilité personnelle (Gosselin, 2008). Elle devra notamment
faire valoir son expertise, son sens des responsabilités en référant à ses réalisations
antérieures, aux dossiers menés, ainsi qu’à sa grande détermination à mener à bien
cette ambitieuse entreprise.
Quoique les leviers associés au pouvoir, à la crédibilité et à la réputation
soient majeurs, une stratégie d’influence ne saurait être garante de succès sans qu’une
préparation appropriée de l’intervention soit dûment effectuée. D’ailleurs, certains
auteurs rapportent que la façon dont les cadres supérieurs influencent les autres
s’avère tout aussi importante que l’atteinte de la cible elle-même (Church et
Waclawski, 1999; Williams et Miller, 2002).
119
Gosselin (2005) rapporte que onze tactiques d’influence différentes sont
utilisées par les gestionnaires; celles faisant appel à la raison, à la légitimité, à la
confiance mutuelle, aux émotions, à la consultation et aux bénéfices mutuels ainsi
que celles requérant l’usage de la pression, d’impression positive, de collaboration, de
négociation et de coalition. Allant sensiblement dans le même sens, Yukl et Falbe
(1990) relèvent huit tactiques d’influence relatives à la pression, à l’échange, à la
coalition, à la persuasion rationnelle, à l’inspiration, à la consultation, en plus d’une
tactique ascendante référant à des approbations qui seraient déjà acquises d’instances
supérieures et une autre, qualifiée d’insinuante, qui commande de placer son
interlocuteur d’abord dans de bonnes grâces.
La diversité dans les tactiques reflèterait la complexité et la variété des
situations rencontrées. Le recours à une tactique ou à une combinaison de certaines
d’entre elles serait intimement lié aux objectifs d’influence à atteindre. Or, certaines
tactiques seraient davantage utilisées, nonobstant que la stratégie d’influence soit
orientée vers des pairs, des subordonnés ou des instances supérieures. Il s’agirait des
tactiques faisant appel à la consultation et à l’inspiration. La première tactique
implique de rechercher la participation d’interlocuteurs pour la prise de décision ou
dans le but de planifier l’implantation de la stratégie, de la politique ou du
changement convoité. Dans la seconde tactique, dénommée inspiratrice, le
gestionnaire utilise le registre émotionnel, propose avec enthousiasme et fait appel
aux valeurs, aux idéaux des personnes visées par la stratégie d’influence, mettant en
lumière une grande confiance face à la capacité de réussir (Yukl et Falbe, 1990).
Le recours aux tactiques appropriées selon la situation doit s’accompagner
d’une préoccupation marquée dans la manière dont le message est transmis (Williams
et Miller, 2002). Conger (1998) allègue même que l’art de la persuasion implique
d’utiliser un langage vivant, des arguments irrésistibles et de capter les émotions de
son auditoire.
120
Les deux tactiques citées ci-dessus seront retenues pour orienter notre
intervention auprès des instances décisionnelles. Certains aspects prônés par une
approche de groupe relativement récente, nommée Future search6, s’avérera une
source d’inspiration précieuse. En substance, cette approche de groupe préconise la
participation des individus, focalisant les interventions en fonction d’une image ou
d’un projet futur (O’Connor, 2001). Nous en discuterons davantage au prochain
chapitre consacré à l’intervention explicitant la méthode privilégiée.
En fonction de toutes ces considérations, à juste titre Gosselin (2005) souligne
qu’« il ne fait aucun doute qu’exercer une influence soit une activité complexe… »
(p. 28).
Ces enseignements relatifs aux stratégies d’influence sauront alimenter les
réflexions afin de guider la préparation de l’intervention décrite au prochain chapitre.
Une certaine crédibilité de même qu’une réputation positive semblant être établies
concernant la directrice des ressources humaines et informationnelles, elle abordera
cette étape cruciale avec confiance.
Ce tour d’horizon des concepts pertinents à notre projet, soit les notions
d’attraction et de rétention, d’employeur de choix ainsi que celles associées aux
stratégies d’influence, nous convainc qu’une solution miracle ne saurait exister.
Comme le soutient d’ailleurs Gosselin (2008), il faut assurer des
investissements majeurs en temps et en moyens, assortis de beaucoup de
persévérance pour développer ce qui semble faire la différence, soit une relation
spéciale et unique avec les employés. C’est le pari à relever.
Au prochain chapitre, nous explorerons plus spécifiquement l’approche
privilégiée pour notre intervention qui doit mener à l’adoption d’une orientation 6 Démarche prospective selon Beaulieu et Carrière (2000)
121
stratégique de renouvellement de valeurs dans le but de devenir un employeur de
choix.
QUATRIÈME CHAPITRE
LA MÉTHODE, LE CONTENU ET LES RÉSULTATS DE L’INTERVENTION
Devenir un employeur de choix implique, pour le CSSS – IUGS, de réviser
ses valeurs de gestion et ses pratiques dans le but d’attirer et surtout de retenir une
main-d’œuvre qualifiée de plus en plus rare. Nous avons vu que les principales
raisons motivant la mise en œuvre d’une telle démarche sont liées aux pressions
environnementales externes, notamment sociodémographiques.
Or, les démarches sous-jacentes à l’ambition de devenir un employeur de
choix, requerront un solide engagement de la part des gestionnaires au premier plan et
supposeront une transformation de type renouvellement que l’on pourrait qualifier de
grande envergure et complexe. Selon certains auteurs, cet objectif organisationnel
exigera de lancer de nouveaux processus, de définir des priorités, de s’ouvrir à de
nouvelles approches, et probablement de prendre certains risques (Martin et Jobin,
2004).
Dans cette optique, différentes démarches ont été orchestrées au cours des
deux dernières années afin d’amener progressivement le CSSS – IUGS à adopter une
orientation inspirante, soit celle de devenir un employeur de choix.
Effectivement, l’intervention effectuée par l’auteure, comprenant deux étapes,
s’est déroulée sur une période de plus d’un an, soit de mars 2007 à juin 2008. À
posteriori, nous constatons que ces étapes se présentent comme un continuum, une
structure logique où chacune des démarches sous-jacentes aux étapes s’avère
préalable à la suivante. Nous croyons que ces démarches, réalisées pendant une
123
période prolongée, ont permis de graduellement mettre en place les conditions
propices à un renouvellement de valeurs.
Ainsi, la première étape a consisté à mettre en place le comité consultatif sur
les stratégies à adopter face à la pénurie de main-d’œuvre à partir duquel divers
groupes de travail ont été greffés. Le comité et les groupes de travail ont amorcé des
travaux liés aux enjeux de pénurie de personnel; cette étape initiale découle
logiquement de l’exercice sur la planification de main-d’œuvre, détaillé au chapitre
deux. Bien que cette première étape de l’intervention ait davantage été réalisée dans
le but d’affronter le contexte de rareté des ressources, la recension des écrits
concernant les concepts pertinents liés à la notion d’employeur de choix nous indique
que les activités réalisées par ces instances sont préparatoires et pertinentes pour
atteindre éventuellement ce statut distinctif. Nous en discuterons un peu plus loin
dans ce chapitre.
La seconde étape de notre intervention, franchie quinze mois suivant la mise
en place du comité consultatif, visait à effectuer des démarches d’influence auprès de
deux instances décisionnelles, soit le comité de direction et le comité des ressources
humaines et informationnelles, ce dernier issu du conseil d’administration. Cette
seconde étape de notre intervention souhaitait générer un engagement à poursuivre et
même à intensifier les activités en cours qui mèneraient non seulement à contrer le
manque d’effectifs, mais à devenir un employeur de choix. En effet, en dépit d’un
contexte organisationnel et environnemental semblant opportun à l’actualisation d’un
tel projet, une réelle volonté des dirigeants et des gestionnaires s’avère une condition
incontournable pour sa réussite.
En substance, on peut récapituler les deux étapes composant l’intervention.
Premièrement, il s’agit de la mise en place du comité consultatif sur les stratégies à
adopter face à la pénurie de main-d’œuvre et l’amorce des travaux (mars 2007 à mars
2008). Deuxièmement, nous effectuons les démarches d’influence visant à faire
124
adopter une orientation stratégique, soit de devenir un employeur de choix, auprès de
deux instances décisionnelles (juin 2008).
Ce chapitre qui rend compte des différents aspects inhérents à l’intervention
sera subdivisé en trois sections. La première section décrira la démarche associée à la
mise en œuvre du comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de
main-d’œuvre. Le mandat de ce comité et son champ d’activités seront présentés
ainsi que les principaux résultats observés par cette mise en œuvre. À la deuxième
section, nous ferons état des interventions effectuées récemment auprès des instances
décisionnelles. La méthode utilisée, le déroulement et le résultat de ces démarches
seront exposés. Troisièmement, nous proposerons un bilan global et indiquerons les
suites des deux étapes de l’intervention.
1. LA PREMIÈRE ÉTAPE DE L’INTERVENTION : LA MISE EN PLACE DU COMITÉ CONSULTATIF SUR LES STRATÉGIES À ADOPTER FACE À LA PÉNURIE DE MAIN-D’ŒUVRE ET L’AMORCE DES TRAVAUX (MARS 2007 À MARS 2008)
Dès l’automne 2006, des démarches s’amorcent par la Direction des
ressources humaines et informationnelles afin d’orchestrer un exercice de
planification des effectifs. Pour assurer la légitimité de cette démarche, une
présentation a d’abord été effectuée au comité de direction qui a entériné le
déroulement de ce processus explicité au chapitre deux. Suivant l’aval du comité de
direction, une présentation a été réalisée à l’assemblée des gestionnaires (instance
incluant tous les gestionnaires de l’organisation, soit une soixantaine de personnes, se
réunissant à chaque mois) afin d’introduire la démarche dans toute l’organisation. Ces
deux présentations, effectuées en janvier 2007, ayant soulevé des questionnements et
favorisé des échanges au sein de ces groupes d’intérêt, ont en quelque sorte marqué le
lancement de cette démarche de planification de main-d’œuvre qui nécessitera
l’implication d’acteurs provenant de tous les secteurs organisationnels.
125
En fait, cette démarche de planification des effectifs s’est révélée la bougie
d’allumage à partir de laquelle la première étape de notre intervention a été
orchestrée.
Ainsi, une fois les démarches liées au processus de renouvellement des
effectifs amorcées, nous avons sollicité de nouveau le comité de direction, en mars
2007, afin d’entériner la mise sur pied d’un comité organisationnel devant axer ses
interventions sur des stratégies à développer pour contrer la pénurie des ressources
humaines. Effectivement, le manque notable d’effectifs anticipé, dorénavant mis en
lumière par l’exercice de planification de main-d’œuvre, faisait appel à des
interventions concertées à formaliser au sein du CSSS – IUGS.
Le mandat faisant état des principales responsabilités du comité consultatif sur
les stratégies à adopter face à la pénurie de main-d’œuvre, développé par la directrice
des ressources humaines et informationnelles, a fait l’objet d’une présentation suivie
d’une discussion étoffée au comité de direction, pour finalement être entériné. Les
directeurs étant sensibilisés à la problématique de pénurie de main-d’œuvre, la mise
en place d’une instance consultative, relevant du comité de direction a été perçue
positivement. Par ailleurs, il importait de bien circonscrire le rôle de cette instance et
de cibler les activités à prioriser pour que ce comité représente une réelle valeur
ajoutée considérant la conjoncture de pénurie.
De fait, par la mise sur pied de cette instance, les membres du comité de
direction ont entrevu l’opportunité de contaminer les divers secteurs de l’organisation
pour que les enjeux de manque d’effectifs soient partagés et les solutions identifiées
collectivement; la pénurie des ressources humaines s’avérant l’affaire de tous.
Ainsi, en considération de la philosophie de l’organisation, qui prône la
participation et l’implication des acteurs, le comité de direction a endossé la
composition du comité en veillant à ce qu’il soit représentatif des principaux secteurs
126
d’activités et comprenne les différents niveaux hiérarchiques. Les gestionnaires
identifiés pour siéger au comité consultatif sur les stratégies à adopter face la pénurie
de main-d’œuvre se révélaient aussi des champions déjà reconnus pour leurs
préoccupations en matière de renouvellement des effectifs. Effectivement, la plupart
de ces derniers soutenaient et actualisaient déjà certaines initiatives associées à la
gestion proactive des ressources humaines dans le but de contrer la pénurie.
Dans la prochaine partie de ce chapitre, nous ressortirons les faits saillants du
mandat de ce comité organisationnel.
1.1 Le mandat et les responsabilités du comité consultatif sur les stratégies à adopter face la pénurie de main-d’œuvre
Cette instance comptant une quinzaine de personnes issues des principales
directions, animée par la directrice des ressources humaines et informationnelles,
jouera un rôle d’éclaireur pour que la transformation des valeurs s’amorce au sein de
l’organisation. En effet, à partir des principales responsabilités confiées au comité,
différents projets ont été mis en place créant une nouvelle dynamique pour minimiser
la pénurie du personnel et explorer de nouvelles avenues répondant de façon plus
optimale au contexte.
Le mandat du comité consultatif, adopté en mars 2007 par le comité de
direction (révisé en août 2007 en ce qui a trait à la composition, suivant de nouvelles
nominations internes), est présenté en annexe (Annexe D, Mandat du comité
consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de main-d’œuvre). Il fait état
des principales responsabilités; nous en présentons les faits saillants.
Le comité consultatif assure un rôle aviseur et conseil dans le domaine de la
gestion des ressources humaines, plus particulièrement relativement aux enjeux
associés à la pénurie de main-d’œuvre pouvant affecter la qualité et la continuité des
127
services. Il vise donc à établir des stratégies pour contrer le manque d’effectifs, en
tenant compte du contexte organisationnel et environnemental.
Les travaux du comité s’échafauderont à partir des huit zones de performance,
auxquelles nous avons fait allusion antérieurement, identifiées par la Direction des
ressources humaines et informationnelles dans le cadre du projet sur la stabilisation
de la main-d’œuvre (Annexe C, Meunier et Rosa, 2005, Projet de stabilisation des
ressources humaines). Celles-ci concernent l’attraction, la rétention, l’organisation du
travail, la planification de la main-d’œuvre, les mouvements de main-d’œuvre, la
gestion des remplacements, le développement des compétences et la présence au
travail. Tenant compte de ces zones de performance, le comité assume principalement
cinq rôles : recommander et influencer le choix de différentes stratégies, contribuer
au développement des plans d’action, contribuer à l’identification d’indicateurs
pertinents et de cibles, contribuer à l’identification des priorités d’intervention,
contribuer à l’évaluation des démarches actualisées.
Les rencontres du comité sont au nombre d’environ six par année. Dès la
première rencontre du comité, le mandat est révisé avec les membres afin que ceux-ci
comprennent bien la nature des travaux à mener et favoriser ainsi une meilleure
cohésion pour leur avancement.
À cette première étape, notre intervention visait principalement à créer un
mécanisme de concertation formel, détenant un réel pouvoir dans l’organisation et
répondant directement au comité de direction. Le focus principal du comité
consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de main-d’œuvre s’avérait la
recherche collective de stratégies novatrices pour contrer la pénurie, désormais à nos
portes. Des résultats tangibles devaient donc émaner de ce groupe d’intérêt; les
retombées seraient associées à la synergie d’un ensemble d’individus plutôt qu’à la
Direction des ressources humaines et informationnelles.
128
Or, pour que les stratégies face au manque d’effectifs émergent plus aisément
et se concrétisent graduellement dans toute l’organisation, plusieurs porteurs de
projets doivent être impliqués. Effectivement, le projet doit s’infiltrer au sein de
l’organisation par l’implication d’une masse critique d’individus. Dès la seconde
rencontre du comité consultatif, quatre groupes de travail de petite taille (de quatre à
cinq personnes) ont été formés, impliquant des représentants syndicaux et d’autres
gestionnaires. Un autre groupe de travail a été constitué quelques mois plus tard.
Nous relaterons globalement les travaux de ces instances plus loin.
Ainsi, chaque membre du comité s’avère donc impliqué dans un groupe de
travail avec d’autres membres de l’organisation. Des plans d’action sont élaborés et
l’avancement des travaux est régulièrement soumis à l’instance consultative.
La partie suivante aborde globalement les travaux réalisés par le comité et les
groupes de travail; il s’agit des résultats de la première étape de notre intervention
consistant en la mise en place du comité consultatif sur les stratégies à adopter face à
la pénurie de main-d’œuvre.
1.2 Les résultats issus de la mise en place du comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de main-d’œuvre
L’aboutissement des travaux du comité consultatif sur les stratégies à adopter
face à la pénurie de main-d’œuvre se révèle directement lié aux projets réalisés par
les groupes de travail. Ces derniers se réunissent environ une fois par mois.
Investis de mandats circonscrits, cinq groupes de travail se rapportent donc au
comité consultatif sur les stratégies à adopter. Ceux-ci sont pilotés par un gestionnaire
de la Direction des ressources humaines et informationnelles, sous la responsabilité
de la directrice. En effet, trois des gestionnaires en ressources humaines de cette
direction sont membres du comité et dirigent un groupe de travail selon leurs champs
129
d’activités. De concert avec les membres du groupe, ils sont responsables d’élaborer
un plan de travail et de stimuler sa mise en œuvre, d’assurer l’avancement des projets
priorisés et de rendre compte des travaux au comité consultatif.
Les thèmes traités par ces groupes de travail, convenus au comité consultatif,
concernent la conversion des heures des statuts temporaires en postes, les stratégies
de recrutement, d’attraction et de rétention, les programmes d’accueil et
d’orientation, le développement professionnel, la planification des effectifs en lien
avec la venue de stagiaires et la planification de la main-d’œuvre du personnel cadre.
Tous ces thèmes découlent des huit zones de performance identifiées précédemment.
Ces groupes de travail ont vu le jour grâce à une préoccupation liée aux
enjeux de pénurie de main-d’œuvre, mise en lumière par la démarche de planification
des effectifs. Pourtant, des liens apparaissent aisément entre les thèmes traités par ces
cinq groupes de travail et les notions abordées par notre recension des écrits dont la
trame de fond s’avère le concept d’employeur de choix. Par exemple, soulignons les
aspects d’attraction, de rétention et plus spécifiquement les enjeux associés à l’accueil
du personnel, à leur orientation et à leur développement professionnel; tous ces
thèmes font partie d’éléments traités par les auteurs que ce soit pour mieux attirer ou
retenir la main-d’œuvre de qualité.
De ces travaux ont émergé différents projets comme la révision du processus
d’accueil, de formation initiale à l’embauche, la mise en place d’un programme
apparenté au mentorat pour les nouvelles recrues, la conceptualisation d’un site Web,
d’un kiosque et de matériel pour les visites externes et l’élaboration d’un processus
d’appréciation de la contribution. Les cinq groupes de travail, guidés par des plans
d’action, poursuivent leurs travaux qui seront probablement itératifs.
Outre ces résultats tangibles obtenus à cette première étape de l’intervention,
nous constatons que la contamination dans l’organisation s’opère; les gestionnaires et
130
les représentants syndicaux impliqués à l’une ou l’autre des instances (le comité
consultatif ou les groupes de travail) discutent de la situation de pénurie de main-
d’œuvre et des stratégies orchestrées pour y faire face. Graduellement, un nouveau
langage surgit : les acteurs soulèvent qu’il est impératif de modifier nos façons de
faire pour être attrayant et préserver la main-d’œuvre, si précieuse. Non seulement
une majorité des acteurs organisationnels, soit les gestionnaires et les représentants
syndicaux, sont sensibilisés mais ils se mobilisent et commencent à agir. Ces
retombées nous semblent significatives.
De celles-ci découlent naturellement la prochaine étape de notre intervention
qui permettra de canaliser les efforts organisationnels vers le but ultime de devenir un
employeur de choix.
2. LA DEUXIÈME ÉTAPE DE L’INTERVENTION : LES DÉMARCHES D’INFLUENCE VISANT À FAIRE ADOPTER UNE ORIENTATION STRATÉGIQUE, SOIT DE DEVENIR UN EMPLOYEUR DE CHOIX, AUPRÈS DU COMITÉ DE DIRECTION ET DU COMITÉ DES RESSOURCES HUMAINES ET INFORMATIONNELLES (JUIN 2008)
La première étape de l’intervention, c’est-à-dire la mise sur pied d’une
instance consultative et la coordination des travaux en découlant, s’est effectuée
plutôt intuitivement par l’auteure; cette démarche spontanée, ancrée à la philosophie
de gestion du CSSS – IUGS, répondait à des impératifs organisationnels et à des
préoccupations de concertation avec les membres de l’organisation. La seconde étape
de l’intervention, quant à elle, s’est révélée une opportunité de créer un sens, de
fournir une cible stimulante, intégrant les démarches déjà bien amorcées.
Ainsi, l’auteure a effectué une intervention en juin 2008 auprès des dirigeants
visant à obtenir un engagement qui se traduirait par la formulation d’une orientation
stratégique menant éventuellement à un renouvellement des valeurs et
conséquemment des pratiques de gestion. De fait, après discussion avec le directeur
131
général, il a été convenu que deux rencontres seraient actualisées; l’une avec le
comité de direction, l’autre avec le comité des ressources humaines et
informationnelles issu du conseil d’administration.
Conformément à la philosophie de gestion organisationnelle, une approche a
d’abord été réalisée auprès des directeurs afin de stimuler leur collaboration au projet;
ils en seront d’ailleurs les artisans et ceux qui influenceront les gestionnaires de
l’organisation. Grâce à cette démarche de concertation, nous pensions être en mesure
d’inciter les membres du conseil d’administration à engager l’organisation dans ce
projet dont la finalité vise à assurer les services à la clientèle, à la hauteur de ses
obligations.
Cette section qui concerne la deuxième étape de l’intervention sera subdivisée
en trois parties. La première partie décrira les instances au sein desquelles les
interventions se sont déroulées ainsi que la méthode choisie pour les réaliser. En
second lieu, nous expliquerons la nature des interventions proprement dites. Enfin,
nous détaillerons les résultats des deux interventions effectuées auprès du comité de
direction et du comité issu du conseil d’administration.
2.1 La méthode préconisée pour les démarches d’influence
L’approche préconisée pour accomplir nos démarches d’influence consiste à
jumeler les deux stratégies usuellement utilisées par les gestionnaires, soit la tactique
axée sur la consultation des protagonistes et celle dénommée inspiratrice, faisant
appel aux émotions. Car, bien plus qu’une orientation rationnelle, l’auteure souhaite
un engagement affectif, où un partage de valeurs doit être mis en évidence.
Soulignons d’abord que les instances au sein desquelles les interventions se
sont effectuées sont de petite taille. En ce qui concerne le comité de direction il se
compose de 15 personnes, tandis que le comité des ressources humaines et
132
informationnelles compte six personnes. Les deux instances sont constituées depuis
les débuts du CSSS – IUGS, soit environ depuis quatre années. Ces groupes
décisionnels connaissent bien la situation relative à la main-d’œuvre de l’organisation
et partagent une bonne connaissance quant aux divers dossiers stratégiques de
l’organisation. La perspective de devenir un employeur de choix a d’ailleurs été
évoquée par l’auteure à quelques reprises.
Le comité de direction inclut tous les directeurs, directrices responsables des
services et directions présentées au premier chapitre. Il est donc composé de
gestionnaires provenant de services diversifiés, avec des expertises ainsi que des
intérêts différents mais complémentaires. Le comité des ressources humaines et
informationnelles, quant à lui, est composé de quatre membres du conseil
d’administration partageant des préoccupations particulières en matière de gestion de
ressources humaines, en plus de la présidente, du directeur général et de la directrice
des ressources humaines et informationnelles.
Pour soutenir la préparation des interventions, en conformité avec les
tactiques préconisées, nous avons exploré sommairement quelques notions issues
d’une approche novatrice. Cette approche de groupe, teintée d’un processus
participatif planifié, vise à bâtir une vision et une direction communes menant à des
actions organisationnelles concertées (Polanyi, 2002).
Celle-ci, connue internationalement sous le nom de Future search, a été mise
au point par Weisbord et Janoff au début des années 90 (Weisbord, 1999). Il s’agit
d’une approche résolument axée vers le futur, nécessitant l’utilisation d’une image
forte de ce qui est désiré (O’Connor, 2001). L’approche est issue de la nouvelle
génération des processus participatifs et est destinée aux grands groupes (Oels, 2002);
néanmoins nous pensons que des aspects la caractérisant se révèlent inspirants pour
nos interventions.
133
Ainsi, l’approche Future search aurait été introduite au Québec sous le
vocable de démarche prospective par Jean-Pierre Beaulieu et Émile J. Carrière
(2000), après bon nombre de réflexions et de recherches ainsi que des investissements
pour adapter le matériel. Ces auteurs rapportent quatre principes qui servent de guides
à la démarche.
Premièrement, il s’agit de mener une exploration et une réflexion sur le
contexte global des organisations avant de se centrer sur l’action dans une
organisation en particulier. Le second principe vise à favoriser une interaction directe
entre les différents acteurs, sans intermédiaires, pour les amener à découvrir et à
apprécier leur réalité respective sans poser de jugement, et ainsi faire émerger le
terrain commun à tous les participants. En troisième lieu, il faut amener les
participants à se centrer sur le futur plutôt que sur les conflits et les différends d’hier
ou d’aujourd’hui. Le dernier principe permet de terminer la rencontre par la
planification d’actions concrètes impliquant tout le groupe, pour s’assurer de ne pas
en rester sur le plan de la réflexion mais bien de passer à l’action.
La démarche prospective implique un grand nombre de participants, soit les
acteurs-clés du système, environ 60, réunis pour une durée de deux à trois jours
(Beaulieu et Carrière, 2000). Elle « constitue un processus global qui ne peut être
réduit à une méthode sophistiquée de conduite de réunion » (Ibid, p. 23). Ainsi, le
recours à une telle approche ne saurait être improvisé; celle-ci exige une bonne
connaissance de la méthode, le développement d’une expertise ainsi qu’une
préparation rigoureuse, impliquant la majeure partie du temps, selon les écrits
consultés, la contribution d’une équipe. Beaulieu et Carrière (2000) ont adapté cette
approche et détaillent cinq étapes, soit : a) prendre la décision d’amorcer la démarche
et en fixer le but, b) constituer une équipe de coordination et mobiliser ses membres,
c) élaborer le projet de rencontre et assurer la logistique de l’opération, d) tenir un
atelier réussi, e) se donner des mécanismes de suivi pour assurer la mise en place du
projet collectif.
134
En considération de ce qui précède, nous ne pouvons prétendre recourir
complètement à cette démarche pour orchestrer nos stratégies d’influence. D’ailleurs,
pour illustrer la relative complexité de la démarche, notons qu’un des écrits consultés,
un volume de référence sur le sujet, se consacre exclusivement à expliciter comment
préparer, organiser et diriger l’atelier de travail se déroulant pendant environ deux
jours, cette rencontre s’avérant le cœur de l’approche Future search (Weisbord et
Janoff (2000).
Malgré tout, plusieurs des caractéristiques propres à cette démarche sont
inspirantes : elle est participative, axée sur le futur et génère une vision commune.
Nous avons aussi repéré dans les écrits que l’approche cible le dialogue plutôt que la
discussion (Levine, 1994; Oels, 2002). Selon Levine, une discussion implique que les
individus défendent une position, à l’instar d’un débat, tandis que le dialogue suppose
que les protagonistes laissent de côté leurs orientations pour sonder les opinions
d’autrui afin de découvrir de nouvelles avenues. Le dialogue s’avère davantage
créatif; il se décrit comme une conversation faisant place à diverses possibilités où la
performance est délaissée au profit d’un partage d’idées, d’intuitions. Si la discussion
recherche un constat final ou une conclusion, le dialogue, quant à lui, priorise la
dynamique de groupe, la création d’une synergie entre des personnes. Une approche
teintée par le dialogue sera retenue pour le déroulement de nos interventions.
À juste titre, Polanyi (2002) considère que l’approche Future search se révèle
un processus très humain. De leur côté, Weisbord et Janoff (2000) désignent
l’approche de laboratoire d’apprentissage, laissant libre cours aux échanges.
De fait, cette approche découlerait du concept d’organisation apprenante,
introduit par Senge (1993) et fonde ses assises sur une communication de groupe
efficace, découlant de quatre conditions (Oels, 2002) : l’ouverture, le partage d’un
champ d’intérêt commun, des similarités psychologiques entre les personnes et la
présence d’une confiance mutuelle. Incidemment, nous pensons que les deux
135
instances participant à la démarche endossent les quatre conditions qui favorisent une
communication efficace, incontournable pour générer un dialogue empreint
d’ouverture. Notamment, les membres du comité de direction et du comité des
ressources humaines et informationnelles font preuve en général d’ouverture, d’une
confiance mutuelle et partagent l’intérêt commun de disposer des travailleurs de
qualité pour assurer les services à la clientèle.
Selon Beaulieu et Carrière (2000), « toute la démarche prospective se
caractérise par la recherche d’un terrain commun entre les partenaires, c’est-à-dire la
recherche de ce qui les rassemble plutôt que de ce qui les sépare ou divise » (p. 144).
Tenter de créer une vision d’avenir d’employeur de choix milite en ce sens.
Ce tour d’horizon sommaire à propos de l’approche Future search nous
procure des points de repères pertinents pour nos deux démarches d’influence.
Certaines des caractéristiques évoquées, telles l’ouverture, l’échange, la création
d’une vision d’avenir rejoignent les tactiques d’influence préconisées, soit celle
désignée d’inspiratrice et l’autre axée sur la consultation.
D’une part, ces avancées nous suggèrent que le projet de devenir un
employeur de choix ne saurait s’opérer sans, préalablement, un dialogue ouvert entre
les décideurs, permettant à chacun d’exprimer ses perceptions, ses appréhensions, ses
opinions et ses intérêts dans le but de façonner cette vision d’avenir stratégique créant
une synergie entre les individus. D’autre part, l’approche et les tactiques d’influence
retenues pour les interventions supposent pour l’auteure de jouer un rôle de
facilitatrice. Elle devra donc favoriser les échanges de façon à laisser émerger une
concertation entre les membres autour de la vision de devenir un employeur de choix.
Il ne fait pas de doute qu’une telle vision, nécessitant un réalignement des valeurs ne
peut s’imposer, elle doit jaillir des échanges.
136
Il est intéressant de souligner que cette vision d’avenir est inscrite dans la
planification stratégique 2006-2011 du CSSS – IUGS, soit « Un milieu de travail
stimulant et une organisation apprenante capable d’attirer et de garder un personnel
compétent et dévoué et de susciter son esprit de coopération, son sentiment
d’appartenance et sa fierté » (p. 30). Nous recourrons d’ailleurs à cet énoncé à
l’occasion de nos interventions.
2.2 La préparation des démarches d’influence
La première démarche d’influence s’est effectuée auprès du comité de
direction, la deuxième au niveau du comité des ressources humaines et
informationnelles. Les rencontres se sont déroulées à deux semaines d’intervalle au
mois de juin 2008. Nous disposions d’un peu plus d’une heure pour chacune d’entre
elles. Ce décalage entre les deux rencontres a permis de rendre compte au comité des
ressources humaines et informationnelles de la teneur des échanges survenus au
comité de direction.
La préparation de ces démarches a tenu compte des principes issus des
approches décrites précédemment. La rencontre s’est préparée en prévoyant une
animation faisant place aux interventions, par le biais, par exemple, de questions
ouvertes sur la quête d’opinion et de perceptions.
Mais, dans le cadre de cet exercice il importait d’allier les préoccupations
terrain des décideurs et les préoccupations académiques de l’auteure. D’un côté,
celle-ci devait éviter d’énoncer des avancées scientifiques suggérant un rôle d’expert.
D’un autre côté, le volet théorique procurant des assises, des enseignements et des
leviers, soutenait les actions à entreprendre et renforçait celles déjà entreprises par
l’organisation. Réussir à atteindre cet équilibre entre les besoins anticipés des
décideurs et le contexte académique se révélait donc une préoccupation
omniprésente.
137
L’angle choisi pour les stratégies d’influence a émergé d’une constatation qui
découlait des travaux présentés aux précédents chapitres: l’organisation peut compter
sur des bases solides l’engageant d’ores et déjà sur la route menant à devenir un
employeur de choix. En fait, cette vision d’avenir s’inscrit en continuité avec les
démarches d’ores et déjà amorcées.
Ainsi, les rencontres ont été développées autour d’une présentation (sur
support informatique) comportant trois volets : un regard en arrière, le
positionnement actuel de l’organisation et un regard vers l’avenir (Annexe E,
Présentations au comité de direction et au comité des ressources humaines et
informationnelles). Ces thèmes, permettant d’englober l’essentiel du contenu de nos
travaux, seraient abordés en suscitant les réflexions et les échanges conformément
aux approches préconisées. Voici quelques informations contenues dans la
présentation :
A) Un regard en arrière : des tremplins pour le futur.
Dans cette première partie, nos aborderons le contexte sociodémographique
québécois, les enjeux de main-d’œuvre dans le réseau de la santé et des services
sociaux, la vision, les valeurs et la philosophie de gestion de l’organisation, de même
que sa planification stratégique et sa planification de main-d’œuvre pertinente.
B) Notre positionnement actuel : l’heure des choix;
Cette deuxième partie permettra de s’attarder aux perceptions de la situation,
et d’identifier la destination à choisir.
C) Un regard en avant : l’itinéraire à choisir et un plan d’action concerté.
138
Cette dernière partie touchera l’influence des générations sur le marché du
travail et aux caractéristiques des membres de l’organisation. Nous aborderons les
modèles théoriques soutenant le projet de devenir un employeur de choix
(l’attraction, la rétention et le roulement de personnel, les caractéristiques associées
aux employeurs de choix).
Suivant la présentation de ces thèmes et les échanges suscités au fur et à
mesure, la démarche se terminait par d’autres questions suscitant l’émergence
d’opinions ou d’enjeux perçus, tels que : Qu’est-ce que ça veut dire de s’investir dans
une telle démarche? Qu’est-ce qu’on devra faire de plus? Sommes-nous prêts? Est-ce
que ça vaut la peine?
Les rencontres se sont clôturées par une nouvelle réflexion concernant la
valeur, nommée précédemment et inscrite au plan stratégique 2006-2011, qui
préconise un milieu de travail stimulant, capable d’attirer et de garder un personnel
compétent. Suivait la question : Sommes-nous prêts à nous engager à devenir un
employeur de choix… et même L’employeur à choisir?
La préparation pour les deux démarches s’est avérée semblable, sauf que pour
le comité issu du conseil d’administration, il était prévu de rapporter l’essence des
échanges issus du comité de direction.
2.3 Le déroulement et les résultats des démarches d’influence auprès du comité de direction et du comité des ressources humaines et informationnelles
Les deux démarches d’influence se sont amorcées par un aveu de l’auteure :
un curieux mélange d’anxiété et d’excitation l’animait et ce, de façon plus marquée
que dans d’autres occasions, fréquentes, où des présentations ont été faites à ces
mêmes instances. Cet état de fébrilité semblait principalement attribué au mélange
des rôles tant professionnels (le rôle de directrice) que personnels (le rôle d’étudiante)
139
sous-jacents aux interventions. De plus, quelques jours avant les rencontres, le départ
imminent et non prévu du directeur général pour des fonctions au sein du MSSS a été
annoncé, générant un choc et certes un niveau d’anxiété spécialement chez les
directeurs. Ce contexte, préoccupant pour les membres du comité de direction ainsi
que pour ceux du conseil d’administration rendait l’intervention sensible, générant
des craintes de la part de l’instigatrice, grandement mobilisée à ce que l’organisation
atteigne cette ultime consécration d’employeur de choix.
D’entrée de jeu, nous avons souligné aux deux instances qu’il s’agissait d’une
rencontre d’échanges où le thème de devenir L’employeur à choisir serait à
l’honneur. Des questions ouvertes ont été soulevées : Souhaitons-nous nous engager
dans une telle aventure? Le départ du directeur général remet-il en question cette
avenue?
Nous avons débuté ensuite la démarche d’influence, basée sur la consultation
et la recherche de dialogue, avec comme appui la présentation, articulée selon les
trois éléments identifiés préalablement, soit nos appuis, l’heure des choix et nos
perspectives de travail.
2.3.1 La démarche d’influence auprès du comité de direction
La démarche s’est effectuée dans le cadre d’une rencontre régulière du comité
de direction. Notons que tous les membres étaient présents hormis une personne (à
l’extérieur pour une rencontre). Le directeur général ainsi que le directeur général par
intérim prenant la relève temporairement étaient aussi présents. En guise
d’introduction, le directeur général a souligné l’importance de cette démarche et a
validé l’intérêt des membres; tous étaient d’avis que malgré le départ du directeur
général, il s’agissait d’une vision d’avenir réaliste.
140
Une fois la présentation des appuis contextuels et organisationnels effectués,
des questions ouvertes ont été posées, initiant l’échange et la circulation d’opinions :
Quelles sont vos perceptions de notre situation? Sommes-nous sur la bonne voie? Est-
ce pertinent de viser à devenir l’employeur à choisir? Les échanges se sont donc
amorcés et tous les participants ont émis leurs points de vue. Nous reprenons
quelques citations typiques recueillies à l’occasion de ces échanges, tels que : « C’est
une source d’inspiration, pas de découragement »; « La vision de devenir un
employeur de choix procure une cible positive, moins administrative que le dossier de
la planification de la main-d’œuvre »; « Devenir un employeur de choix implique
sûrement de mettre en place un assortiment d’éléments pas tous structurés, mais
enlignés sur une ou des cibles communes »; « Il faut que l’on pense autrement »;
« Nous sommes déjà sur la bonne voie »; « Il faut créer une atmosphère où les
travailleurs sentent qu’on leur fait confiance, on doit apprendre à prendre des
risques »; « Il y a sûrement plusieurs façons de devenir un employeur de choix, il faut
trouver notre filon, être créatif ».
À la suite de cet échange, la présentation des informations s’est poursuivie
avec le partage des données agglomérées issues des écrits scientifiques. Les
renseignements relatifs à l’influence des générations, les modèles théoriques
concernant l’attraction, la rétention et le roulement de personnel ainsi que les
caractéristiques des employeurs de choix ont été présentés. De nouveau, des
questions ont ensuite été soulevées pour animer le processus de consultation : Qu’est-
ce que ça veut dire de s’investir dans une telle démarche? Qu’est-ce qu’on devra faire
de plus? Sommes-nous prêts? Est-ce que ça vaut la peine? Quels obstacles sont à
prévoir? Les propos qui en découlaient ont mis en lumière quelques éléments, repris
dans ces citations, comme : « Ce projet donne un sens, une couleur à nos futures
actions »; « C’est stimulant de voir que l’on est sur la bonne voie »; « Il y a beaucoup
de liens à faire avec des dossiers en cours comme le sondage sur la mobilisation du
personnel de l’agrément, Entreprise en santé »; « Nous avons déjà fait beaucoup de
141
démarches allant dans cette direction depuis un an ou deux »; « Il faut attirer et retenir
les meilleurs; après tout, nous sommes un établissement universitaire ».
Le directeur général a exprimé une proposition d’orientation, approuvée par
tous les membres, en soulignant l’importance de notre désignation universitaire dans
une telle démarche. On s’engage à intensifier nos démarches en cours et à réviser nos
façons de faire afin de créer un milieu de travail stimulant, capable d’attirer et de
retenir un personnel doté des meilleurs talents.
Suivant l’assentiment général face à cette proposition, deux constats ont
émergé de la part de membres du comité de direction. D’une part, certains ont
souligné qu’il faut considérer que différents éléments dans le contexte teinteront nos
enjeux de gestion tels que nos obligations liées à la mesure de la productivité et le
partenariat à intensifier avec les diverses instances entourant l’organisation; ces
éléments pourront engendrer des irritants auprès du personnel. D’autres membres ont
allégué que la façon de s’y prendre, l’approche de gestion préconisée devra justement
tenir compte des alignements prônés.
D’autre part, à juste titre, un membre a souligné que le projet de devenir un
employeur de choix semblait partagé par tous les membres du comité de direction.
Ainsi, les membres du comité de direction admettaient donc que s’engager à devenir
un employeur de choix ne serait pas l’affaire de la Direction des ressources humaines
et informationnelles mais plutôt de tous les acteurs organisationnels, prioritairement
des gestionnaires.
Cette dernière observation nous a semblé riche de sens; qu’un membre du
comité de direction ait relevé un constat aussi fondamental et que celui-ci ait été
appuyé par les autres membres, s’avère déterminant pour la poursuite des démarches.
142
2.3.2 La démarche d’influence auprès du comité des ressources humaines et informationnelles
La rencontre avec le comité des ressources issu du conseil d’administration
s’est déroulée essentiellement selon la même logique que celle avec le comité de
direction. En guise d’introduction, nous avons spécifié que bien qu’il s’agissait d’une
démarche encadrée par un contexte académique, devenir un employeur de choix
s’avérait une préoccupation omniprésente pour la directrice des ressources humaines
et informationnelles. Nous avons aussi souligné qu’une rencontre avait été effectuée
avec le comité de direction concernant le même objet, soit d’échanger à propos de la
vision de devenir un employeur de choix et d’émettre, le cas échéant une orientation.
Il a été mentionné que les résultats sommaires de cette rencontre seront d’ailleurs
divulgués. De plus, l’impact du départ du directeur général a été abordé; les membres
étaient d’avis d’aller de l’avant. Notons que tous les membres du comité étaient
présents à la rencontre, incluant le directeur général par intérim.
Une fois la première partie de la présentation complétée, c’est-à-dire Un
regard en arrière : nos appuis, les membres ont été interpellés afin de décrire leur
perception de la situation à l'aide des questions identifiées précédemment. Cette étape
visait à faire émerger notre positionnement face à l’orientation de devenir un
employeur de choix. Les citations typiques qui ont été mentionnées sont : « Pas de
sentiment d’impuissance »; « Des assises solides sont présentes, c’est évident »;
« Beaucoup de conditions sont facilitantes dans l’environnement comme un réseau de
formation avec lequel un partenariat est déjà établi ainsi qu’une région attrayante »;
« Pour devenir un employeur de choix, il faudra apprendre à se distinguer, trouver
notre créneau spécifique ».
Les réactions qui ont été émises par les membres du comité de direction à
l’occasion de la rencontre sur le même sujet ont alors été dévoilées, appuyées par le
directeur général intérimaire, présent à cette rencontre. Suivant l’ensemble de ces
143
commentaires qui suggéraient une prédisposition des membres du comité de direction
à s’engager pour devenir un employeur de choix, la rencontre s’est poursuivie en
présentant sommairement les avancées théoriques issues de la littérature.
Par la suite, des questions ont de nouveau été adressées aux membres, de
façon à susciter un échange et faire émerger une orientation face à devenir un
employeur de choix. La discussion a alors fait ressurgir peu de questionnements,
repris sous forme de citations : « Qu’allons-nous faire pour réellement passer à
l’action? »; « Comment allons-nous innover? »; « Quelle sera notre distinction, notre
créneau spécifique? ».
La présidente du conseil d’administration a souligné sa grande préoccupation
face à la lourdeur d’un tel projet; nous avons souligné qu’il s’agit de recadrer les
actions déjà en cours et surtout de renouveler certaines valeurs de gestion. De plus,
certains membres ont relevé qu’une telle orientation devrait laisser entrevoir
prioritairement des bénéfices pour la clientèle.
Malheureusement, les échanges ont dû être écourtés, par manque de temps.
Ainsi, au terme de la rencontre, c’est une orientation mitigée qui se dégage. Devenir
l’employeur à choisir est une nécessité dans le contexte actuel, mais avec quel plan?
L’intervention réalisée auprès du comité des ressources humaines et
informationnelles s’est donc terminée, contrairement à celle ayant été effectuée
auprès du comité de direction, sans une orientation claire.
De fait, nous pressentons que pour les membres du comité issu du conseil
d’administration, cette rencontre s’est avérée incomplète, et même probablement
insatisfaisante, faute de plan précis. Par ailleurs, soulignons qu’une ébauche de plan
de travail sera proposée au prochain chapitre; ce dernier sera soumis à la consultation,
dès l’automne, auprès notamment du comité issu du conseil d’administration.
144
En substance, nous avons décrit dans ce chapitre les différents aspects
entourant notre intervention, répartie en deux étapes, s’étant déroulée sur une période
d’environ quinze mois. Nous présentons, à la prochaine section, un bilan global et
indiquons les suites des deux étapes de l’intervention.
3. UN BILAN GLOBAL ET LES SUITES DES DEUX ÉTAPES DE L’INTERVENTION
En ce qui concerne la première étape de l’intervention, nous estimons qu’elle
a permis de poser les jalons essentiels pour encadrer une démarche d’envergure et
stimuler progressivement l’émergence d’une vision d’avenir, un engagement à
renouveler les valeurs de gestion. Nous constatons que les travaux résultant du comité
consultatif et des cinq groupes de travail sont bien alignés et jouissent d’une
crédibilité organisationnelle.
À l’instar des membres du comité de direction et du comité des ressources
humaines et informationnelles, les membres de ces instances gagneront assurément à
être outillés, documentés au niveau des concepts entourant la notion d’employeur de
choix. Dès l’automne, des rencontres avec le comité consultatif et les groupes de
travail pourront s’actualiser dans le but de générer des discussions à propos de cette
cible visant à devenir L’employeur à choisir. Se révélant en continuité avec les
travaux en cours, nous estimons que la création de cette vision sera riche de sens et
sera perçue comme une étape cohérente dans le processus d’ores et déjà amorcé. De
concert avec les membres du comité consultatif, d’autres rencontres et échanges
pourront être planifiés afin de procurer autant d’occasions pour favoriser
l’enracinement de cette vision et inspirer des gestes, des actions l’appuyant.
En ce qui concerne la seconde étape de l’intervention, consistant à la
démarche d’influence auprès de deux instances décisionnelles, nous avons obtenu, en
145
guise de résultat, une orientation de la part du comité de direction, cristallisant en
quelque sorte une vision d’avenir. Par contre, les membres du comité issu du conseil
d’administration, sans être contre le projet de devenir un employeur de choix, ont
émis un engagement mitigé, anticipant d’obtenir un plan d’action plus spécifique,
bien que ces interventions s’attardaient plutôt à obtenir une orientation.
En considération de ces résultats, des gestes d’enracinement devront être
rapidement orchestrés auprès du comité de direction et surtout du comité des
ressources humaines et informationnelles issu du conseil d’administration. Par contre,
nous devrons prendre en compte la conjoncture associée à la nomination au poste de
directeur général, étape fondamentale pour le CSSS – IUGS.
En tout état de cause, durant la période automnale, nous devrons saisir
l’opportunité d’inscrire le sujet à une rencontre du comité de direction et de soulever
une discussion relativement aux priorités à convenir pour que notre cible se
concrétise progressivement. Quant au comité des ressources humaines et
informationnelles, une rencontre sera assurément organisée au cours de l’automne,
puisqu’une pause a été faite durant les six mois de congé de l’auteure. Ce sera
l’occasion de réitérer l’importance de cette cible et de tenter de faire émerger une
synergie autour d’actions concrètes à actualiser.
Nous comprenons que les démarches amorcées par les deux étapes de notre
intervention devront rapidement être renforcées par divers mécanismes; une douce
pression, continue, doit absolument être maintenue. C’est un effort assidu que nous
sommes prêts à investir.
Par ailleurs, notons que nos réflexions ainsi que notre analyse critique face à
ces interventions et à leurs résultats seront énoncées au chapitre six. Ce chapitre fera
aussi état de l’analyse critique pour l’ensemble de la démarche ayant mené à la
réalisation de l’essai intervention.
146
Mais auparavant, afin de procurer des outils de travail propices à nos futures
démarches devant favoriser l’enracinement de notre projet, nous proposerons au
prochain chapitre les grandes lignes d’un plan de travail préliminaire.
CINQUIÈME CHAPITRE
LES BALISES POUR ÉLABORER UN PLAN DE TRAVAIL AFIN DE DEVENIR EMPLOYEUR DE CHOIX
Toutes les notions révisées dans le cadre de cet ouvrage concourent vers le
même constat : pour devenir un employeur de choix, l’organisation doit offrir un
projet mobilisateur répondant aux aspirations des travailleurs issus des trois
générations présentes sur le marché du travail. Nous avons aussi vu qu’une telle
ambition ne saurait se réaliser sans un long processus de travail, impliquant une
transformation des valeurs organisationnelles et conséquemment, un rôle
prépondérant de la part des gestionnaires.
Un bon nombre d’informations ont été prélevées dans la littérature. Il s’agit
maintenant d’organiser et de structurer ces données en tenant compte autant des
aspects théoriques qu’empiriques. En ce sens, l’élaboration d’un plan de travail se
révèle une suite logique à notre intervention. En effet, pour façonner sa conception
nous recourrons aux mêmes instances déjà engagées dans les démarches associées à
l’intervention, soit le comité de direction, le comité des ressources humaines et
informationnelles, le comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie
de main-d’œuvre ainsi que les cinq groupes de travail. De plus, le fait de développer
un outil permettant de projeter les futures actions pour devenir un employeur de choix
procure un excellent prétexte, propice à l’enracinement du projet.
Ainsi, tenant compte des considérations émises jusqu’à présent dans cet
ouvrage, le présent chapitre se concentre sur l’élaboration de balises, préalables à
l’élaboration d’un plan de travail, jetant les bases pour orienter les actions à mener
pour devenir employeur de choix.
148
En premier lieu, nous décrirons les rubriques, désignées appuis et axes de
travail, qui seront proposées aux groupes d’intérêt pour élaborer un plan de travail.
En outre, dans le but de fournir un canevas de travail pour faciliter les travaux, nous
proposons, en annexe, un plan de travail préliminaire (Annexe F, Plan de travail
préliminaire). La deuxième partie du chapitre identifiera les principaux acteurs ainsi
que leurs rôles à assumer dans le cadre de la mise en œuvre du plan de travail. La
dernière section abordera quelques enjeux ou écueils pouvant être anticipés.
1. LES APPUIS ET LES AXES DE TRAVAIL EN VUE DU FUTUR PLAN DE TRAVAIL
Pour orchestrer les différentes activités à déployer au sein de l’organisation
afin d’atteindre la cible d’employeur de choix, huit éléments charnières ont été
retenus. Ces huit éléments, inspirés des travaux effectués jusqu'à maintenant, sont
subdivisés en quatre appuis organisationnels et contextuels ainsi que quatre axes de
travail émergeant des avancées scientifiques amassées dans le cadre de la recension
des écrits.
Les quatre appuis organisationnels ou contextuels englobent le contexte
sociodémographique québécois, les enjeux de main-d’œuvre au sein du réseau de la
santé et des services sociaux, les particularités du CSSS – IUGS ainsi que son plan de
développement de la main-d’œuvre. Quant aux axes de travail, ils tiennent compte de
l’influence des générations sur le marché du travail, du phénomène d’attraction de la
main-d’œuvre, des notions de rétention et de roulement de personnel et des
caractéristiques des employeurs de choix.
La figure qui suit, élaborée par l’auteure, illustre les huit éléments charnières
qui serviront de base à l’élaboration du plan de travail.
149
Figure 5 : Les appuis et les axes de travail
L’EMPLOYEUR À CHOISIR
L’influence des générations
Les appuis organisationnels et contextuels
Les axes de travail
Un contexte sociodémographique préoccupant
Des enjeux de main-d’œuvre du RSSS percutants
Une planification stratégique clairvoyante
Une P.M.O rigoureuse
L’attraction par la compatibilité
Un employeur attentif
La rétention par un solide réseautage
À partir de ces appuis et de ces axes de travail, un plan de travail préliminaire
a été conçu afin de fournir du matériel de base initiant les échanges au sein des
instances concernées. Le tableau fourni en annexe (Annexe F, Plan de travail
préliminaire) comprend ces quatre appuis et ces quatre axes en plus de proposer des
éléments de réflexion, des pistes d’intervention de même que des exemples
d’activités à explorer.
Assurément, l’exercice qui mènera à l’élaboration du plan de travail dans sa
forme plus formelle permettra aux membres des diverses instances de mieux
s’approprier la démarche pour devenir un employeur de choix. Parmi les actions à
prioriser dans ce plan, il sera important de considérer le rôle capital que les
gestionnaires doivent assumer dans cette ambitieuse entreprise. Des activités
spécifiques, comme de la formation ou des groupes de soutien, devront possiblement
s’actualiser pour soutenir les gestionnaires afin que leurs approches soient en
150
concordance avec la cible convoitée. Incidemment, l’influence prépondérante des
gestionnaires dans le projet de devenir un employeur de choix doit être constamment
gardée en filigrane.
La prochaine section traite principalement du rôle des acteurs organisationnels
qui seront sollicités pour l’avancement du projet.
2. LES ACTEURS ET LEURS RÔLES
Pour la mise en œuvre d’un chantier aussi important que celui devant mener à
devenir un employeur de choix, on doit accorder une attention particulière aux
acteurs organisationnels impliqués ainsi qu’aux rôles qu’ils assument face au projet
de changement. Selon Rondeau (1999), trois groupes d’acteurs suscitent un intérêt
spécifique lorsqu’on traite d’une transformation organisationnelle : la haute direction,
les champions et les équipes porteuses.
2.1 La haute direction
La haute direction initie le changement; elle agit comme le principal
déclencheur de la transformation. La deuxième étape de notre intervention effectuée
auprès du comité de direction et du comité issu du conseil d’administration va en ce
sens. Rondeau (1999) allègue d’ailleurs qu’un engagement de la haute direction dans
le projet de transformation est considéré comme la plus significative de toutes les
conditions de succès répertoriées dans les écrits.
Dans le contexte du départ du directeur général et de l’appui mitigé du comité
des ressources humaines et informationnelles, nous devrons redoubler d’ardeur dès
l’automne pour diffuser dans l’organisation cette vision : devenir l’employeur à
choisir. Toutes les occasions seront à saisir pour que le projet s’enracine dans
l’organisation.
151
Pour que la transformation s’opère, des champions ainsi que des équipes
porteuses doivent agir comme catalyseurs du changement. Rondeau (1999) parle d’un
processus de contamination de l’organisation, où des individus incarnent dans
l’action les buts poursuivis.
2.2 Les champions
Dans le cadre de notre projet de transformation, le rôle de champion sera
assuré par deux instances, soit la Direction des ressources humaines et
informationnelles et le comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie
de main-d’œuvre, ce dernier ayant fait l’objet de la première étape de l’intervention.
D’une part, la Direction des ressources humaines et informationnelles
assumera un rôle de leadership de premier plan. Instigatrice du projet, elle animera le
processus et devra susciter l’adhésion pour que celui-ci pénètre dans toutes les
sphères de l’organisation, en recourant notamment à différentes stratégies
d’implication. De surcroît, ayant initié une démarche d’influence auprès des hautes
instances décisionnelles, la directrice des ressources humaines et informationnelles se
doit d’être une source d’inspiration tout au long de la démarche.
D’autre part, le comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie
de main-d’œuvre jouera un rôle prépondérant, notamment en participant activement à
l’élaboration du plan de travail final qui indiquera les activités à prioriser.
Incidemment, cette instance se situe aux premières loges pour soutenir les actions
menant à l’échafaudage d’un plan structuré pour devenir employeur de choix. De par
son implication depuis plusieurs mois et la crédibilité dont elle jouit, cette instance
s’avère bien positionnée pour poursuivre les démarches, bien entamées, qui
convergeront dorénavant vers la cible d’employeur de choix.
152
Dans la foulée des nombreuses réflexions à tenir au sein de ce comité, la
désignation de comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de
main-d’œuvre pourrait aussi être révisée pour mieux représenter la nouvelle cible. On
pourrait suggérer un nom comme comité consultatif sur les stratégies à adopter pour
devenir l’Employeur à choisir…
Nous présentons maintenant les équipes porteuses.
2.3 Les équipes porteuses
Nous avons identifié principalement deux équipes porteuses, soit les
accréditations syndicales et le comité de pilotage pour le projet Entreprise en santé.
Les accréditations syndicales, au nombre de quatre, représentent des porteuses
essentielles de projets. Aussi, elles sont déjà impliquées soit en participant à l’un ou
l’autre des cinq groupes de travail (par exemple la conversion des heures des statuts
temporaires), soit par le biais des comités de relations de travail ou encore à
l’occasion de rencontres régulières où tous les syndicats sont rassemblés autour de
dossiers transversaux tels la planification de la main-d’œuvre ou les enjeux
d’absentéisme.
Les représentants syndicaux se révèlent des acteurs déterminants, car sans une
solide concertation avec ces derniers, la légitimité des différents projets serait
menacée. Il ne faut d’ailleurs pas minimiser l’ampleur de la tâche qui consiste à
influencer les instances syndicales à adopter de nouvelles avenues, bousculant parfois
les paramètres prévus aux conventions collectives.
Pour compléter l’information concernant les porteurs qui seront des acteurs
importants pour la réussite de notre projet, citons le comité de pilotage impliqué dans
le dossier Entreprise en santé. En effet, l’établissement participe actuellement à un
153
projet du Bureau de Normalisation du Québec pour être accrédité Entreprise en santé
et ce, d’ici juin 2009. Ainsi, par le biais du comité qui pilote cette démarche de
certification, le CSSS – IUGS jouira d’un autre appui pour le projet de devenir
employeur de choix.
Ce comité de pilotage est formé d’une quinzaine de personnes, gestionnaires
et salariés, dont des représentants des quatre instances syndicales. De fait, certains
aspects évalués par cette norme, soit les habitudes de vie des travailleurs
(alimentation, exercice, gestion du stress), l’équilibre entre le travail et la vie
personnelle, l’environnement de travail ainsi que les pratiques de gestion convergent
vers les éléments soutenant le projet de devenir employeur de choix. Notons que la
participation du CSSS – IUGS à ce projet novateur visant à promouvoir (et atteindre)
cette nouvelle norme d’Entreprise en santé dans le réseau de la santé et des services
sociaux, ne cible que quatre établissements de santé au Québec identifiés par le
MSSS; c’est de bon augure pour le CSSS – IUGS.
Ces instances contribueront certainement à créer une synergie qui pourra
lentement transformer les modes de fonctionnement organisationnel vers le but ultime
visé. Graduellement, au fil des démarches contaminantes, tous les gestionnaires de
l’organisation feront partie des porteurs; nous avons vu antérieurement que leur
contribution se révèle capitale et fait la différence pour une organisation qui veut se
distinguer.
Par ailleurs, à mesure que le projet progresse, d’autres enjeux pourraient
surgir; nous en traitons à la prochaine section.
3. LES ENJEUX POTENTIELS
Dans le cadre de la mise en œuvre d’un projet de cette envergure, se profile
assurément des enjeux auxquels les acteurs organisationnels, surtout les champions,
154
pourraient avoir à faire face. Nous en soulevons trois principaux, soit les enjeux
relatifs au suivi du projet, à l’implication des accréditations syndicales ainsi qu’au
changement de rôle à prévoir pour les gestionnaires.
3.1 Les enjeux relatifs au suivi du projet
Un projet qui s’échelonne sur quelques années exige beaucoup d’assiduité au
niveau des suivis. Rondeau (1999) souligne d’ailleurs qu’ « il arrive que les dirigeants
soient énormément impliqués au début mais que leur élan s’estompe et que leur
implication diminue à mesure que le projet progresse » (p. 154). Un des défis réside
donc dans une animation soutenue des processus pour éviter que la pression
quotidienne accapare les acteurs au détriment de l’avancée du projet.
La Direction des ressources humaines et informationnelles devra redoubler
d’efforts pour non seulement identifier des porteurs de dossiers mais surtout pour
assurer un rythme régulier progressant vers les objectifs convenus. L’enracinement
du projet dans l’organisation en dépend.
Dans cette optique, quelques mécanismes sont proposés afin d’assurer une
vigie régulière, obligeant la mise à niveau des informations et insufflant une cadence.
Ces démarches de suivi concernent les instances identifiées précédemment, soient les
champions ou les équipes porteuses. Dans le cadre de rencontres régulières prévues
pour ces instances, un état de situation sera présenté en lien avec le projet et
l’avancement du plan de travail.
Ainsi, un suivi à fréquence régulière concernant l’avancement du projet serait
effectué par la Direction des ressources humaines et informationnelles auprès des
groupes d’intérêt suivants : le comité de direction (chaque deux mois), le comité des
ressources humaines et informationnelles du conseil d’administration (chaque trois
mois), le comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de main-
155
d’œuvre (chaque rencontre, soit aux deux mois), le comité de pilotage pour
Entreprise en santé (chaque rencontre, soit environ aux trois mois) et les instances
syndicales (chaque trois mois).
Aussi, pour faire valoir les résultats, un plan de communication interne et
externe pourra être développé en fonction de l’avancement du projet; il devra
accompagner les réalisations et non pas les précéder. En effet, le danger réside en
l’annonce de projets non réalisés qui créent inévitablement des attentes et résultent en
des déceptions si des résultats concrets ne s’avèrent pas observés. Rappelons les
impacts inhérents aux chocs de la réalité qui se révèlent néfastes pour la rétention et
indirectement pour l’attraction, les mauvaises nouvelles circulant rapidement par des
ambassadeurs internes.
3.2 Les enjeux relatifs à l’implication des accréditations syndicales
Une solide concertation avec les accréditations syndicales et ce, dès les
débuts, se révèle une assise incontournable. Toutefois, il est possible que nous ne
puissions conclure des ententes permettant d’assurer une certaine flexibilité par
rapport aux paramètres enchâssés dans les conventions collectives. Un manque de
souplesse représenterait assurément un frein dans la mise en œuvre du projet. Par
ailleurs, la récente négociation locale des quatre conventions collectives a permis
d’introduire quelques aspects prometteurs, notamment au niveau de la gestion de la
liste de rappel, de la dotation des postes et de la formation du personnel.
3.3 Les enjeux relatifs au changement de rôle des gestionnaires
Un autre écueil à anticiper concerne les réactions de certaines personnes eu
égard aux changements à implanter; il ne s’agit pas ici nécessairement des employés
mais plutôt des gestionnaires qui seront directement visés par la mise en place de
nouvelles dynamiques de gestion. Cette résistance potentielle s’avère une réaction
156
normale liée aux changements, étape essentielle du processus d’appropriation
(Rondeau, 1999).
La Direction des ressources humaines et informationnelles devra jouer un rôle
important pour recadrer la nouvelle réalité et soutenir l’émergence de nouveaux
points de repères par les gestionnaires. Dans certains cas, de la formation, du
coaching ou la mise sur pied de groupes de soutien pourront être organisés. Beaucoup
d’efforts devront être investis pour soutenir les gestionnaires dans leurs approches
auprès des employés. Ces approches doivent être conformes aux ambitions visées;
c’est ce qui fera la différence.
En définitive, l’approche de gestion nécessitera la création de multiples lieux
de concertation. Mais, pour appuyer les démarches à orchestrer auprès des
gestionnaires, une opportunité d’alliance se pointe par le biais d’un projet
organisationnel en cours depuis plus d’un an, soit la mise sur pied d’un Centre de
formation continue en gestion, avec le soutien de l’Université de Sherbrooke.
L’approche préconisée est axée, encore une fois, sur la formation d’un groupe de
travail dénommé le comité de pilotage pour la mise en œuvre du Centre de formation
continue en gestion, formé de huit gestionnaires mobilisés par le projet. La Direction
des ressources humaines et informationnelles est étroitement impliquée dans ce
projet, pour lequel des activités de développement pour les gestionnaires sont prévues
à compter de l’automne 2008. Ces activités pourront progressivement s’arrimer au
projet et au plan de travail.
Jusqu’à maintenant, notre essai intervention a touché plusieurs aspects, soit la
présentation de l’organisation, la démarche de planification de main-d’œuvre du
CSSS – IUGS, le contexte sociodémographique québécois et plus spécifiquement
celui du réseau de la santé et des services sociaux, la description de la problématique,
la recension des écrits, l’intervention répartie en deux étapes de même que ses
résultats ainsi que des balises pour élaborer un plan de travail avec les divers groupes
157
d’intérêt. Deux aspects demeurent à aborder, soit l’analyse critique de la démarche et
le plan de valorisation du projet.
Au prochain chapitre, nous traiterons de l’analyse critique en décrivant
notamment les apprentissages réalisés et les constats observés.
SIXIÈME CHAPITRE
L’ANALYSE CRITIQUE
Pour débuter, ce chapitre décrira les enseignements retenus relativement à
l’élaboration de l’essai et à la réalisation de l’intervention. En second lieu, nous
effectuerons une analyse réflexive sur les différents concepts théoriques énoncés.
Enfin, nous partagerons quelques questionnements issus de notre démarche qui
pourraient, à notre avis, faire l’objet d’études plus approfondies.
1. LES APPRENTISSAGES ET LES CONSTATS ASSOCIÉS À L’ÉLABORATION DE L’ESSAI INTERVENTION
La description des apprentissages et des constats généraux se scinde en deux
sections, soit d’une part, ceux concernant l’élaboration de l’essai et d’autre part, ceux
évoquant l’actualisation de l’intervention.
1.1 Les apprentissages et les constats liés à l’élaboration de l’essai
La réalisation d’un essai intervention se révèle sans contredit un exercice
riche en apprentissages pour un professionnel comme l’auteure, constamment dans le
feu de l’action. D’ailleurs, le programme de troisième cycle permet de prendre un
recul très pertinent, tout en bénéficiant d’un encadrement académique fort judicieux.
Un des premiers constats associés à l’élaboration de l’essai, concerne
l’importance de la constance et de la discipline dans un contexte où peu de balises
structurantes et d’échéanciers sont définis. Nous pensons qu’aborder un tel projet
sans une structure de travail rigoureuse assurant une assiduité quasi quotidienne nous
semble voué à l’échec. Selon nous, une certaine discipline assurant une continuité sur
une période assez longue se révèle essentielle pour créer et maintenir un fil
159
conducteur, nourrissant l’avancement de l’écriture de même que la structure de
l’ouvrage.
De cette assiduité découle un second enseignement : le sujet à la base de
l’essai intervention doit grandement stimuler l’auteure. Cette mobilisation procure
l’énergie nécessaire pour lire et traduire les écrits ainsi que pour maintenir l’intérêt
pour discourir sur diverses théories, surtout une fois l’excitation du début passée.
En troisième lieu, nous relevons, grâce à un certain recul, les différentes
étapes franchies durant la démarche. D’abord, une bonne dose de stimulation devant
un nouveau projet changeant complètement le paysage quotidien de l’auteure.
Ensuite, un état de légère anxiété en constatant l’ampleur de la tâche : de la
documentation abondante à lire, à comprendre et à interpréter, le tout devant
déboucher sur une intervention et un écrit cohérents qui rendent compte avec justesse
des enjeux organisationnels et des impératifs académiques. Puis, une fois le travail
amorcé, le fil conducteur trouvé, émerge un état de veille et une stimulation soutenue
pour que les travaux avancent. D’ailleurs, un plan sommaire, développé dès les
débuts, décrivant les têtes de chapitres et les principales sections, nous est apparu
nécessaire pour fournir globalement des points de repères et ce jusqu’à la fin.
En outre, nous avons constaté que bien qu’un plan sommaire soit essentiel
pour orienter les propos, un ouvrage de cette envergure se construit au fur et à mesure
des découvertes, des avancées tant scientifiques qu’empiriques. Ce quatrième
enseignement implique que des changements et des adaptations en cours de route sont
inévitables.
Cinquièmement, nous avons pressenti à plusieurs reprises le danger de
s’éparpiller, les sujets liés à la gestion de ressources humaines, comme le nôtre, étant
fréquemment enchevêtrés d’une manière ou d’une autre. Pensons à l’engagement
organisationnel, à la mobilisation des ressources humaines ou aux pratiques de
160
gestion gagnantes, tous des sujets d’intérêt pouvant faire l’objet d’une revue de
littérature et d’interventions plus ou moins associées à notre projet. Malgré de
multiples possibilités, il s’avérait donc capital de préserver un fil conducteur principal
et de s’en tenir aux concepts référant plus directement à notre sujet.
Enfin, écrire un texte d’une telle ampleur, comportant des appuis scientifiques
pour les fins d’un exercice académique, s’est avéré un exercice contraignant, générant
un sentiment d’humilité. Plutôt habituée à recourir aux réflexes, d’émettre des
orientations émanant d’opinions et de traiter différents dossiers dans un court laps de
temps, l’auteure constate qu’il est ardu de s’astreindre à bien représenter et articuler
les avancées de différents auteurs.
Passons maintenant aux réflexions émanant de la mise en œuvre et des
résultats obtenus de l’intervention.
1.2 Les apprentissages et les constats liés à l’intervention
Rappelons que l’intervention a été répartie en deux étapes. La première étape,
amorcée en mars 2007, a consisté à mettre en place un comité organisationnel et à
orchestrer des travaux pour contrer la pénurie de main-d’œuvre. À la seconde étape,
se déroulant en juin 2008, nous avons effectué deux démarches d’influence visant à
obtenir une orientation stratégique, l’une auprès du comité de direction, l’autre au
niveau du comité des ressources humaines et informationnelles issu du conseil
d’administration. Le contexte particulier associé au départ imminent et non prévu du
directeur général, a teinté les démarches d’influence, rendant a priori le projet visant
un engagement ferme des hautes instances décisionnelles plus fragile.
Nous dégagerons les apprentissages soutirés de ces deux étapes de
l’intervention de façon distincte.
161
1.2.1 La première étape de l’intervention : La mise en place du comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de main-d’œuvre
Nous avons soulevé antérieurement que cette étape initiale a été entamée
intuitivement pour faire face à la pénurie des effectifs, clairement mis en lumière par
l’exercice de planification de main-d’œuvre. Nous estimons que cette démarche s’est
avérée déterminante dans le cadre du processus qui mènera progressivement à la
distinction d’employeur de choix. De fait, la cible initiale qui se concentrait
principalement sur la pénurie des effectifs, gagnera maintenant à s’élargir vers celle,
plus inspirante et globale, de devenir un employeur de choix.
En guise de premier apprentissage, nous remarquons donc que des démarches
intuitives peuvent déboucher à des réalisations de nature stratégique. Il est rassurant
de constater que dans une fonction où l’action prime souvent sur la réflexion, des
gestes initiés par instinct se révèlent porteurs et font leur marque. Toutefois,
l’expérience acquise au fil du temps, composée de diverses situations qui ont été
affrontées, guidera sûrement les actions et les gestes. Ainsi, dans un rôle comme celui
assumé par l’auteure, l’action et la réflexion ne sont probablement pas vraiment
dissociées.
Notre seconde observation concerne l’organisation de mécanismes de
concertation, représenté ici par le comité consultatif sur les stratégies à adopter face à
la pénurie de main-d’œuvre. La mise sur pied d’instances semblables se révèle
fréquemment notre réflexe pour traiter de dossiers organisationnels; nous croyons
fermement que l’implication de protagonistes enrichit substantiellement l’avancement
et le contenu des travaux. Pour assurer la crédibilité d’un comité organisationnel,
nous avons appris qu’il importe qu’il soit représentatif des secteurs ainsi que des
niveaux hiérarchiques de l’organisation et soit composé de personnes motivées par la
cible du comité. La présence de différentes personnalités ou encore d’individus ayant
des perspectives divergentes face au sujet, voire complémentaires, enrichira d’autant
162
les échanges. De surcroît, toute instance doit être dotée d’un mandat de travail clair,
laissant cependant place à de la créativité dans l’avancement des projets. En
substance, nous estimons que la composition du comité, représentative de
l’organisation et constituée de personnes motivées, de même que son mandat de
travail suffisamment précis et stimulant ont contribué aux résultats obtenus, fort
pertinents.
En troisième lieu, nous déduisons que la mise en œuvre de ce comité
organisationnel et des cinq groupes de travail en découlant, s’est avéré un excellent
moyen pour créer une certaine cohésion entre les divers secteurs du CSSS – IUGS.
En effet, récemment intégrée, l’organisation se composait de l’addition des anciens
établissements, plutôt que d’une entité cohésive. De telles instances, rejoignant la
grande majorité des individus en ciblant des objectifs comme la pénurie, fournissent
un bon prétexte pour rapprocher les philosophies et même pour constater parfois
qu’elles ne sont pas si distinctes. Ainsi, le comité consultatif sur les stratégies à
adopter face à la pénurie de main-d’œuvre, jouissant maintenant d’une bonne
cohésion et ayant accompli quelques réalisations, nous semble tout désigné pour
soutenir les prochaines étapes qui consisteront à actualiser différentes actions dans le
but de devenir un employeur de choix.
Quatrièmement, en ce qui concerne la méthode de travail préconisée par le
comité, soit le recours à des groupes de travail restreints, nous constatons qu’elle s’est
révélée pertinente. D’abord, l’implication de nouvelles personnes, centrées sur des
travaux plus concrets, a généré des résultats plus rapides que si les discussions
avaient été effectuées en comité rassemblant plusieurs personnes. Ensuite, le fait
d’impliquer un grand nombre de personnes, soit approximativement une trentaine
d’individus qui contribuent aux travaux du comité ou aux groupes de travail, permet
de favoriser la contamination dans l’organisation. Conséquemment, le comité
consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de main-d’œuvre pouvait se
163
concentrer sur des perspectives plus globales, puisque les groupes de travail
investissaient leurs efforts à des projets plus opérationnels.
Cinquièmement, nous pensons que les instances syndicales auraient pu être
impliquées plus rapidement dans le processus, dès la mise en place du comité
organisationnel. Étant des partenaires essentiels, des liens directs avec les comités de
relations de travail auraient pu s’effectuer plus rapidement. Nous veillerons à les
impliquer très étroitement dans les prochaines étapes qui viseront à recadrer le rôle du
comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la pénurie de main-d’œuvre vers
la nouvelle cible. En tout état de cause, dans le cadre du plan de valorisation, décrit
au dernier chapitre, le comité, les groupes de travail et les instances syndicales seront
impliqués ce qui fournira un moyen d’intégrer la nouvelle vision. Dans cette foulée,
comme soulevé précédemment, le nom du comité pourra être modifié suivant les
propositions qui émergeront de ces instances.
Notre sixième apprentissage concerne le rôle de la Direction des ressources
humaines et informationnelles dans le cadre d’une telle démarche. Notre intervention
nous convainc que cette direction a un rôle prépondérant, stratégique, dans la mise en
œuvre d’un tel projet organisationnel. Par ailleurs, sans la forte cohésion de cette
équipe, les démarches en cours n’auraient pu aboutir, puisque les gestionnaires de
cette direction ont été impliqués étroitement dans l’actualisation des projets.
Ensemble, ils devaient être alignés sur les mêmes priorités et perspectives. Nous
sommes fiers de ce constat de cohésion qui renforce notre préoccupation, toujours
omniprésente, de contribuer à générer un travail d’équipe harmonieux, cohérent et
axé vers des cibles de travail communes et stimulantes. Dans un projet significatif
comme celui de contrer la pénurie de main-d’œuvre, la Direction des ressources
humaines est en quelque sorte dans une vitrine; tous ses agissements sont scrutés et
porteurs de messages, qu’on le veuille ou non.
164
Partageons maintenant nos apprentissages concernant la seconde étape de
notre intervention.
1.2.2 La deuxième étape de l’intervention : Les démarches d’influence auprès de deux instances décisionnelles
En juin 2008, la deuxième étape de l’intervention, consistant à des démarches
d’influence, se déroulait auprès du comité de direction et quelques jours plus tard,
auprès du comité des ressources humaines et informationnelles. Voici nos
apprentissages tirés de ces démarches.
1.2.2.1 La démarche d’influence auprès du comité de direction
Le principal apprentissage issu de notre intervention auprès du comité de
direction touche l’importance de jouer un rôle de facilitateur plutôt que celui
d’expert. En effet, cette démarche d’influence actualisée auprès de collègues aurait pu
résulter en un accord de principe, sans qu’un engagement réel ne soit présent. Mais
comment s’objecter à un projet qui propose de devenir un employeur de choix?
Or, nous avons senti une mobilisation autour de la cible, les protagonistes
remarquant plusieurs liens à faire avec divers chantiers en cours. En effet, ils
soutiennent que ce projet d’avenir représente une opportunité de fournir un nouveau
sens aux gestes à poser; nous estimons que l’approche employée (Future search) et
les tactiques préconisées (consultation et inspiration) y ont contribué.
Ainsi, malgré le départ imminent du directeur général, les membres du comité
de direction semblent convaincus de la pertinence et du réalisme du projet. Notre
organisation serait sur la bonne voie pour accéder à cette reconnaissance; le directeur
général renforce d’ailleurs cette orientation. Il n’en demeure pas moins que la venue
d’un nouveau directeur général soulève des craintes; serons-nous, les membres du
165
comité de direction, en mesure de l’influencer pour qu’il soutienne et incarne cette
vision d’avenir? Nous estimons tout de même que la tendance est bien enclenchée.
Aussi, l’intervention, abordée dans un esprit de consultation et orchestrée
autour de trois axes, soit un regard vers le passé (nos appuis), notre positionnement
actuel (l’heure des choix) et un regard vers le futur (des références scientifiques pour
nous aider à cibler nos actions), a permis de construire un fil conducteur, laissant
émerger cette vision d’avenir.
Par ailleurs, nous avons été agréablement surpris de constater le grand intérêt
soulevé au sujet des modèles théoriques; les gestionnaires, agissant souvent
d’instinct, ont apprécié ces références qui fournissent des assises aux approches de
gestion. Nos craintes anticipées face aux préoccupations de terrain en comparaison à
celles plus théoriques ne sont pas matérialisées; bien au contraire les membres du
comité de direction ont semblé stimulés par les perspectives émanant de ces avancées
conceptuelles.
Globalement, au terme de notre intervention visant à obtenir une orientation,
nous avons éprouvé un sentiment de confiance et de satisfaction. Nous avions le
sentiment que la vision d’avenir bâtie autour de L’employeur à choisir était partagée
et qu’une mobilisation s’était créée face à cette cible, à transformer plus
spécifiquement en plan de travail duquel se dégageront quelques priorités.
Nous avons saisi l’importance d’une approche axée sur la concertation faisant
émerger une vision commune dans un projet où le renouvellement de valeurs est
central. Nous sommes convaincus que nous devrions recourir fréquemment à ce
positionnement de facilitateur plutôt que celui d’expert dans notre rôle professionnel;
cette approche, proactive plutôt que réactive, gagnera à s’actualiser dans un contexte
de partenariat, d’abord avec les gestionnaires et les instances syndicales, favorisant
l’émergence d’une vision partagée.
166
Voyons maintenant les constats et apprentissages issus de la rencontre du
comité des ressources humaines et informationnelles.
1.2.2.2 La démarche d’influence auprès du comité des ressources humaines et informationnelles
Malgré le recours à une approche similaire, axée sur la consultation et
l’échange, les résultats de l’intervention auprès du comité issu du conseil
d’administration se sont avérés fort différents. Les membres du comité ont
rapidement orienté les échanges vers des préoccupations associées aux moyens de
parvenir aux fins, c’est-à-dire de devenir l’employeur à choisir.
Ainsi, la création d’une vision commune face à devenir l’employeur à choisir,
stimulée par diverses questions durant la rencontre, n’a pu faire l’objet d’échanges;
les réflexions étaient plutôt dirigées vers les démarches concrètes pour y parvenir.
Comme si devenir l’employeur à choisir s’avérait une évidence dans notre contexte et
qu’il importait maintenant de définir les étapes pour y accéder. Nos réflexions
concernant notre intervention et les résultats observés nous mènent à trois constats.
D’abord, selon nous, les membres du comité perçoivent et souhaitent un rôle
d’expert, à jouer par la directrice des ressources humaines et informationnelles.
Même si le contexte académique a été expliqué au début de la rencontre, cette attente
n’a pu être écartée, selon nous, lors de l’intervention. Les membres s’attendaient
probablement à des solutions concrètes, plutôt qu’à une démarche sollicitant
l’émergence d’une vision commune d’employeur à choisir, déjà inscrite, selon eux,
plus ou moins distinctement dans les orientations stratégiques de l’établissement.
Ainsi, le rôle de facilitatrice n’a peut-être pas été suffisamment explicité; à tout le
moins, il n’a pas été perçu comme tel.
167
En second lieu, nous constatons que les membres du comité des ressources
humaines et informationnelles se préoccupaient principalement de résultats terrain
comparativement aux aspects théoriques à faire valoir. De fait, notre crainte, dévoilée
à la section concernant la préparation des interventions, liée à l’équilibre entre les
enjeux de terrain et ceux plus théoriques s’est matérialisée. Par ailleurs, nous
anticipions que cette situation arrive plutôt au comité de direction. Ainsi, les
gestionnaires du comité de direction se sont montrés plus intéressés et stimulés par
les concepts théoriques, qui nourrissent même, selon eux, cette vision de devenir un
employeur de choix, tandis que les membres du conseil d’administration se sont
concentrés sur les moyens pour y parvenir et les résultats à escompter.
Nous émettons deux possibles explications à ce résultat. Premièrement, les
nombreuses exigences de reddition de compte, émanant principalement de l’Agence
de la santé et des services sociaux de l’Estrie, auxquelles le conseil d’administration
est contraint de répondre depuis quelques années pourraient fortement teinter leurs
préoccupations, axées sur l’importance de livrer des résultats. Deuxièmement, durant
les quatre dernières années, plusieurs dossiers ont été présentés à cette instance par la
directrice des ressources humaines et informationnelles, lesquels étaient toujours
accompagnés d’un plan d’action ou de tableaux de bord énonçant clairement les
étapes à franchir et les résultats à atteindre. Cette habitude pourrait aussi avoir généré
des attentes, bien que le contexte de cette rencontre s’avérait tout autre.
Finalement, en ce qui a trait au troisième constat, nous pensons que la
conjoncture associée au départ du directeur général a engendré des craintes de la part
des membres du conseil d’administration, notamment quant aux prochaines étapes à
envisager; un plan d’action aurait pu être rassurant. Nous constatons donc que le
départ de la tête dirigeante pourrait fragiliser, pour un certain temps, l’organisation.
Nous devrons redoubler d’efforts, notamment en posant différents gestes
d’enracinement, pour assurer une cohésion autour du projet de devenir L’employeur à
choisir.
168
Quoi qu’il en soit, ces apprentissages mettent en lumière l’importance de bien
analyser au préalable le contexte dans lequel se déroule une intervention. Par ailleurs,
malgré différentes précautions nous avons trouvé ardu de dissocier notre rôle
professionnel de celui d’étudiant.
Nous terminerons cette section du chapitre relative à nos apprentissages
concernant l’intervention par quelques constats émanant de ses deux étapes.
1.2.3 Des constats globaux concernant les deux étapes de l’intervention
Nous partagerons deux constatations d’ordre général tirées de l’intervention,
au terme des deux étapes.
Dans un premier temps, nous remarquons que notre intervention s’inscrit dans
une approche de type incrémental où chaque démarche se révèle essentielle à la
suivante. Dans une telle approche étapiste, le temps (dans notre contexte, une période
de quinze mois), se révèle un allié puisqu’il permet de créer graduellement une
synergie avec les acteurs et un enracinement dans l’organisation.
Plus spécifiquement, nous pensons que la seconde étape de notre intervention,
soit les démarches d’influence auprès des instances décisionnelles, aura
principalement permis de créer un sens, une cohérence aux actions déjà en place et
celles à venir. Par contre, nous admettons que les rencontres, d’une durée d’une
heure, ne fournissaient pas un contexte facilitant, voire réaliste. Devant cette
situation, nous aurions pu déplacer celles-ci. Mais, le départ du directeur général s’est
avéré un enjeu contraignant. Pourtant, avec un peu de recul, nous pressentons que la
nouvelle cible consistant à viser un statut d’employeur de choix s’est avérée
rassurante dans le contexte du départ du directeur général; l’organisation allait
poursuivre sa lancée, en recadrant ses actions.
169
Notre deuxième constat concerne le rôle joué par le comité consultatif. Suite à
notre intervention, nous pensons qu’il serait approprié que les fonctions de celui-ci
soient revues afin d’intégrer différents projets organisationnels. En effet, la cible
consistant à devenir un employeur de choix devrait chapeauter, et inspirer, tous les
projets comme Entreprise en santé, l’appréciation de la contribution et la
reconnaissance. Cette ambition doit teinter toutes les actions organisationnelles et
influencer les démarches à connotation de gestion des ressources humaines.
Le projet de devenir un employeur de choix doit s’imbriquer partout; tous les
prétextes seront bons pour mettre de l’avant cette cible; tous les gestes, les actions
soutenant l’enracinement du projet dans les mœurs du CSSS – IUGS importeront.
À la seconde partie de ce chapitre, nous exprimerons nos réflexions à propos
des modèles théoriques consultés.
2. LES APPRENTISSAGES ET LES CONSTATS CONCERNANT LES MODÈLES CONCEPTUELS
Afin de soutenir la réalisation de notre essai intervention, nous avons consulté
les écrits scientifiques relativement à six thématiques, soit l’influence des
générations, la notion d’attraction, les concepts de rétention et de roulement de
personnel, les caractéristiques des employeurs de choix, les stratégies d’influence et
l’approche Future search.
Nos réflexions porteront sur ces thèmes, amalgamés en quatre groupes, suivis
d’une analyse plus générale. Les quatre prochaines parties concernent donc :
l’influence des générations; les notions d’attraction, de rétention et de roulement de
personnel; les caractéristiques des employeurs de choix; les stratégies d’influence et
l’approche Future search.
170
2.1 L’influence des générations
Les écrits consultés soulèvent en général certains attributs liés aux trois
générations présentes sur le marché du travail. L’émergence de ces caractéristiques
découle majoritairement de la conjoncture environnementale au sein de laquelle ces
individus évoluent. Par exemple, des facteurs sociaux, culturels ou technologiques
influenceront la manière de percevoir le milieu de travail. Inévitablement, ces
caractéristiques contribuent donc à façonner le type d’environnement de travail
privilégié par ces générations. Nous avons cependant vu que toutes les générations
recherchent un supérieur immédiat de type coach, ouvert, stimulant, avec qui des
relations interpersonnelles positives peuvent être construites.
Différents angles sont utilisés pour aborder les particularités distinctives des
générations, mais peu d’auteurs traitent de l’impact de la cohabitation entre ces
travailleurs ayant des attributs pouvant certainement s’amalgamer. Ainsi, les écrits
font davantage ressortir les divergences au détriment des éléments rassembleurs. Du
point de vue d’un gestionnaire, préoccupé d’intégrer et de gérer adéquatement des
travailleurs issus des trois générations, l’approche à préconiser demeure floue :
Comment allier ces caractéristiques générationnelles, concrètement, au plan de la
gestion d’une équipe de travail?
Certes, l’étude des générations présentes sur le marché du travail fournit des
assises pertinentes à la fois au niveau des structures organisationnelles à privilégier
(plus flexibles), des valeurs à mettre de l’avant (confiance, respect, communication)
ainsi que des pratiques de gestion à prôner (transparence, participation à la décision,
gestion de la formation et de la carrière, reconnaissance). Cependant, la façon
d’introduire ces orientations, tout en respectant la culture organisationnelle et
intergénérationnelle, demeure un défi prépondérant pour les dirigeants.
171
Par ailleurs, l’influence des générations sur le marché du travail devrait
éventuellement s’élargir aux aspects liés au multiculturalisme, inévitables considérant
le contexte démographique. Ainsi, les préoccupations intergénérationnelles devraient
probablement aussi tenir compte des enjeux interculturels. La cohabitation de tous ces
travailleurs génèrent assurément des défis à documenter, pertinents à prendre en
considération pour les employeurs.
Enfin, considérant la fascination des jeunes de la relève envers la technologie,
de nouveaux processus informatisés doivent être implantés dans le milieu de travail;
cette curiosité pour les aspects technologiques doit être assurément nourrie. Nous
constatons que cet aspect doit être exploré beaucoup plus intensément dans nos
milieux de travail pour répondre autant à des aspects professionnels que personnels.
Mais où s’arrêter en considération des enjeux de sécurité des actifs informationnels?
C’est un sujet à débattre.
En tout état de cause, les informations relatives aux générations doit éveiller
les gestionnaires à la nécessité d’un état de vigie, précurseur de gestes concrets,
d’actions concertées notamment au niveau des enjeux d’attraction et de rétention.
Selon nous, saisir les aspirations des travailleurs contemporains s’avère le premier
pas à franchir pour les attirer et éventuellement les retenir.
En définitive, nous retenons que, toutes générations confondues, la création
d’un rapport de qualité entre le supérieur immédiat et l’employé, axé sur la
stimulation des apprentissages, la reconnaissance et l’écoute, s’avère fondamentale.
2.2 Les notions d’attraction, de rétention et de roulement de personnel
La consultation des écrits portant sur les phénomènes d’attraction, de
rétention, et de roulement de personnel nous convainc que l’atteinte probante de
résultats en ces matières se révèle l’aboutissement de nombreuses démarches
172
organisationnelles. Attirer et retenir des travailleurs s’avère l’affaire de toute une
organisation, des gestionnaires, des employés ou encore des syndicats.
Nous avons vu grâce au modèle sur l’attraction, Person-organisation-fit, que
les employés recherchent un milieu de travail offrant des opportunités de
développement des connaissances et de la carrière, des gestionnaires ouverts et
préoccupés du bien-être de leurs employés ainsi que des possibilités à conjuguer la
vie personnelle et professionnelle. Ces atouts, présents dès l’embauche doivent
s’enrichir tout au long de l’expérience professionnelle pour préserver l’état de
mobilisation des travailleurs et ultimement les retenir.
Nous constatons de grandes similitudes entre les modèles sur l’attraction,
Person-organisation-fit, et sur la rétention, Job embeddedness model, en ce qu’ils
prônent l’importance de la compatibilité entre les ambitions des travailleurs et les
offres de l’employeur. Dans le contexte de rareté de main-d’œuvre actuel et tenant
compte des caractéristiques des travailleurs représentant la relève, il devient évident
qu’il revient à l’employeur de s’adapter et d’offrir un milieu de travail répondant aux
aspirations des jeunes. Le modèle préconisant l’enracinement entre les intérêts des
individus et le travail sous-tend même d’aller jusqu’à sculpter l’emploi du travailleur.
L’édification de cette compatibilité organisationnelle, à renforcer tout au long
de l’expérience de travail, doit se bonifier de solides liens interpersonnels, gages
d’une meilleure longévité dans l’établissement. Pour alimenter cette mobilisation,
l’organisation aura donc avantage à proposer des projets d’envergure, de longue
haleine aux travailleurs représentant des atouts, des talents à garder à l’emploi. Ainsi,
ce modèle théorique sur la rétention, basé sur la compatibilité, la construction de liens
interpersonnels et l’émergence d’un sentiment de sacrifice devant un éventuel départ,
fait appel à l’affectivité. Conséquemment, nous observons quelques liens avec les
aspects associés à l’engagement organisationnel qui réfèrent à des dimensions
affectives.
173
Toutes ces avancées incitent à revoir les éléments de structure, les valeurs et
les pratiques de gestion. Mais, cette transformation des approches, obligée pour
construire une compatibilité entre les individus et l’organisation ainsi qu’un solide
réseautage, ne saurait se produire sans un renouvellement des valeurs partagées par
l’établissement et chacun de ses membres. Le défi réside justement dans une
transformation de valeurs, qui consistera en un processus continu, requérant du temps
pour contaminer progressivement toute l’organisation. Le CSSS – IUGS doit
apprendre à gérer cette nouveauté en préservant la perspective de la finalité
convoitée.
Selon nous, la création de cette complicité entre l’organisation et le travailleur
s’enclenchera prioritairement avec le concours du supérieur immédiat; celui-ci aurait
un rôle charnière dans la mise en place de liens affectifs associés au travail, aux
collègues et même, le cas échéant, avec des projets communautaires. Ce rôle
prépondérant à assumer par les gestionnaires devra faire l’objet de beaucoup de
sensibilisation, voire d’ateliers de développement. Aussi, il sera essentiel d’adapter
nos processus de sélection destinés aux gestionnaires afin que les candidats incarnent
la philosophie prônée et démontrent des aptitudes à créer des liens de grande
proximité avec les salariés.
De plus, l’importance de cette compatibilité organisationnelle et individuelle
des futurs candidats relevée dans les écrits, implique de bien faire connaître les
attributs de l’entreprise. Une approche marketing ciblée, dont un site Web doté
d’outils interactifs, fournissant de l’information judicieuse, s’avère certainement une
avenue à exploiter rapidement quand on tient compte des habiletés technologiques de
la génération composant la relève. Nous avons appris qu’il est primordial que des
chercheurs d’emploi disposent de l’information adaptée à la conjoncture et aux
avancées scientifiques et ce, dès leurs premières démarches, attraction oblige.
174
Par ailleurs, le modèle sur le roulement de personnel, Unfolding model of
volontary turnover, suggère des explications pertinentes sur le processus menant à la
décision de quitter une organisation. La notion de choc, cet évènement significatif et
déclencheur du processus décisionnel, a été une révélation intensifiant l’importance
des liens de proximité entre le travailleur et des personnes significatives au travail. En
effet, dans un milieu de travail où des communications fluides existent, l’employé
serait davantage porter à initier un dialogue pour l’aider à interpréter l’évènement et à
réajuster, le cas échéant, divers éléments entourant son contexte de travail, sans
nécessairement quitter l’organisation. Dans ce contexte, le mentor pourrait jouer un
rôle de soutien approprié pour aider le travailleur à affronter ces évènements, ceux-ci
étant préalablement sensibilisés à cette notion de choc. De plus, la présence d’un
mentor, représentant un lien significatif, contribuerait à alimenter le réseau au travail
ce qui, en soi, peut contribuer à percevoir le choc et ses impacts sur le travail plus
positivement.
Ce modèle consacré aux enjeux de roulement de personnel a aussi révélé
l’importance d’une sensibilisation auprès des jeunes travailleurs au sujet de la
transition, parfois ardue, entre le milieu scolaire et la vie professionnelle. Des ateliers,
offerts dès l’embauche par des employés ayant passé au travers cette étape seraient
une avenue à exploiter.
En complément aux apprentissages et aux constats énoncés, nous avancerons
trois réflexions critiques concernant les modèles ayant trait à l’attraction, à la
rétention et au roulement de personnel.
En premier lieu, nous présumons que la taille de l’organisation influencera
l’atteinte des résultats prônés par ces modèles. En effet, la mise en œuvre d’approches
découlant des modèles sur l’attraction, la rétention ou le roulement de personnel nous
semble se complexifier proportionnellement à la grosseur de l’établissement et, à la
rigueur, à son étalement. Nous supposons que plus une organisation est grande ou
175
dispersée géographiquement, plus les défis de gestion seront importants, commandant
possiblement une certaine adaptation des modèles. Ces aspects ne sont aucunement
abordés dans les écrits relatant la nature de ces construits théoriques.
Deuxièmement, aucun des modèles ne traite de la notion de réciprocité,
particulièrement par des liens avec la rétention. Lorsqu’une organisation répond à
certains besoins de ses membres, comme leur démontrer de la reconnaissance ou
favoriser leur implication dans la prise de décisions, ceux-ci seraient-ils davantage
enclins à s’investir à leur tour au sein de l’organisation et dans quelle mesure? Est-ce
que le concept de réciprocité pourrait aussi contribuer au phénomène de la rétention?
Finalement, nous regrettons que les modèles théoriques ne procurent pas de
pistes plus précises pour spécifier les composantes associées aux pratiques
managériales, prépondérantes pour attirer et retenir des travailleurs. De quoi est
constitué l’éventail de pratiques auxquelles le gestionnaire peut recourir pour
décentraliser le processus décisionnel dans le contexte de travail actuel?
La prochaine section vouée aussi à une analyse critique et à l’énoncé de divers
constats aborde un autre sujet émanant de la recension des écrits, soit les
caractéristiques des employeurs qui se distinguent.
2.3 Les caractéristiques des employeurs de choix
D’entrée de jeu, soulignons une certaine carence de la littérature scientifique
touchant à ce concept, pourtant contemporain, d’employeur de choix. Par contre, il
est possible de dénicher des écrits comportant les attributs d’entreprises se
démarquant, soit dans le domaine privé ou public. De fait, nous avons constaté que
différents termes sont associés à la notion d’employeur de choix; nous ne discernons
aucune expression consacrée dans la littérature.
176
En analysant le contexte environnemental spécifique au réseau de la santé et
des services sociaux et la littérature, nous estimons que la notion d’employeur de
choix s’accolera aux établissements qui sauront retenir une main-d’œuvre qualifiée.
Tous les leviers liés à la rétention deviennent primordiaux pour générer un milieu de
travail qui rend les individus heureux et l’organisation capable de disposer de
ressources de talents.
De fait, les concepts d’attraction, de rétention, d’employeur de choix,
pourraient se relier par une boucle, l’un générant l’autre, à condition que des
pratiques de gestion gagnantes soient actualisées au sein de l’organisation. La figure
six que nous proposons, illustre cette avancée.
Figure 6 : Les concepts interreliés : Attraction, Rétention et Employeur de choix
177
Ce qui ressort en analysant la littérature relative aux employeurs qui se
distinguent, c’est la référence constante aux bonnes pratiques de gestion de ressources
humaines reconnues, telles que l’appréciation de la contribution, la gestion
décentralisée des décisions, la communication ouverte et régulière et la
responsabilisation.
En substance, attirer et retenir des travailleurs de même qu’être un employeur
de choix seraient intimement liés à la qualité de la gestion, adaptée aux valeurs des
travailleurs. Selon cette interprétation, les entreprises, grandes ou petites, bâtissant
une forte cohésion autour d’une approche de gestion attentive aux ressources
humaines, auraient accès à cette consécration d’employeur de choix à mesure que la
contamination opère dans l’organisation.
Devenir un employeur de choix se révèlerait, selon nous, le résultat de
nombreuses démarches organisationnelles, orchestrées dans le but d’intéresser les
travailleurs à leur travail, à leur équipe immédiate, aux autres groupes d’affinités et à
la mission poursuivie par l’entreprise. Pour mener à bien cette tâche, il nous semble à
propos de débuter par initier des ambassadeurs, c’est-à-dire des gestionnaires, des
personnes salariées et même des représentants syndicaux présentant de l’intérêt et des
aptitudes pour les approches préconisées. D’après leurs intérêts et habiletés, ceux-ci
peuvent être impliqués au niveau du recrutement, de l’accueil, de l’orientation à la
tâche, de la formation, bref, pour toute activité engendrant des contacts positifs entre
travailleurs, nouveaux et anciens. La synergie ainsi créée fournirait l’impulsion pour
lentement infiltrer toute l’organisation.
Mais, puisque devenir un employeur de choix implique d’investir beaucoup
d’énergie dans le développement des individus, ceux-ci seront aussi très attrayants
pour d’autres organisations. Nous pensons que le milieu et surtout les personnes qui
le composent contribueraient alors justement, par le phénomène de l’enracinement à
l’emploi, à retenir l’employé.
178
D’un autre côté, toute organisation convoitant la reconnaissance d’employeur
de choix devra certes innover et identifier les créneaux qui la distinguent. Il peut
s’agir d’un ensemble d’attributs, associés directement à l’organisation ou non, comme
le type de clientèle, un environnement physique particulier, une approche de
mentorat, une région attrayante pour sa qualité de vie ou pour les possibilités de
formation professionnelle. Il s’agira aussi de bâtir graduellement une culture
organisationnelle dont les caractéristiques convergeront vers la distinction souhaitée.
Mais, ces faire-valoir devront être réels et surtout en lien avec les aspirations
des générations composant le marché du travail.
De toute façon, il est à espérer que le contexte démographique qui accélère les
défis en matière de gestion de la main-d’œuvre incitera des chercheurs à bâtir un
modèle de référence englobant la plupart des aspects névralgiques pour fournir des
balises à qui veut devenir un employeur qui se distingue.
Nous livrerons à la prochaine section, nos commentaires relatifs aux stratégies
d’influence qui ont orienté nos interventions.
2.4 Les stratégies d’influence et l’approche Future search
La recension sommaire des écrits au sujet des stratégies d’influence nous a
permis de recadrer notre approche en vue des interventions auprès du comité de
direction et du comité des ressources humaines et informationnelles. Grâce à ces
lectures, nous avons saisi qu’il aurait été une erreur d’aborder cette démarche selon
une approche de persuasion, utilisant par le fait même notre chapeau de directrice des
ressources humaines et informationnelles.
179
En effet, notre projet impliquant un renouvellement de valeurs, l’engagement
à y adhérer doit émerger des personnes, être intrinsèquement convoité pour assurer
une certaine cohérence, essentielle. Un projet tel que devenir un employeur de choix,
nécessitant un réalignement des valeurs organisationnelles, doit d’abord être habité
par ses membres, particulièrement par ceux qui influenceront sa réalisation. Ainsi,
nous avons appris que la stratégie d’influence à adopter dépendra du contexte, du
type de projet et des acteurs impliqués.
Puisque le projet de devenir un employeur de choix fait appel à l’affectivité et
aux valeurs, le choix de tactiques parmi celles proposées par la littérature s’est fait
naturellement : les stratégies axées sur la consultation et l’inspiration. Ces tactiques
supposent que les interventions soient menées dans le but de faciliter l’échange et
l’expression d’opinions ou de craintes avec, en filigrane, une animation dynamique.
Renforçant ces stratégies d’influence, l’approche Future search a suggéré l’angle à
privilégier pour nos interventions, soit l’émergence d’une vision d’avenir grâce à des
échanges ouverts.
Bien que cette approche n’ait été que très partiellement exploitée,
l’importance du dialogue impliquant le rassemblement des personnes significatives
autour d’un projet d’avenir fut une source d’inspiration pertinente, appuyant
l’importance du rôle de facilitateur.
Nous remarquons par ailleurs que peu de recherches empiriques ont étudié les
effets de l’approche Future search; les écrits semblent davantage axés sur
l’explication de cette méthode par le biais de livres de référence, accompagnés
d’études de cas. Il serait intéressant de constater les effets d’une telle approche dans
divers types d’entreprises; les éléments facilitant, les résultats obtenus, les pièges à
éviter, les conditions de succès et les difficultés à prévoir.
180
De toute façon, la relative complexité de cette approche implique qu’on ne
peut sûrement pas s’improviser coordonnateur et animateur sans avoir préalablement
développé des habilités spécifiques. Par ailleurs, le tour d’horizon sommaire effectué
au sujet de cette méthode, particulièrement les cas exposés en référence, nous incite à
convenir qu’il s’agit d’une approche puissante, lorsque bien dirigée. Nous pensons
aussi que le fait qu’un consultant, externe à l’organisation, pilote la démarche offre
une neutralité possiblement essentielle à l’émergence d’une nouvelle vision partagée.
D’un autre point de vue, les études relatives aux stratégies d’influence
adoptent essentiellement l’angle de la personne entreprenant une telle démarche.
Effectivement, les auteurs soulèvent les attributs souhaitables de la personne
d’influence, tels que jouir d’une certaine crédibilité et d’une bonne réputation, avoir
du doigté et de la persévérance ou détenir de l’expertise. Par contre, les écrits
n’abordent pas les écueils pouvant survenir des protagonistes à influencer. Est-ce que
des démarches d’influence non réussies peuvent être dues à des considérations
appartenant aux interlocuteurs comme un manque d’écoute et d’ouverture ou encore
le refus de prendre des risques ou de se projeter dans l’avenir?
En somme, il se dégage de ce qui précède que la capacité d’influencer serait
liée au soin que l’on accorde à préparer cette étape ainsi qu’à la juste compréhension
des enjeux en cause. Toutefois, le défi réside tout de même en l’intégration des
niveaux stratégiques, opérationnels et fonctionnels obligeant à traiter adéquatement
les frictions aux interfaces de ces trois aspects qui ne manqueront pas de jaillir.
Nous concluons cette seconde partie par quelques réflexions globales au sujet
des quatre thèmes consultés dans les écrits, soit l’influence des générations,
l’attraction et la rétention, la notion d’employeur de choix ainsi que les stratégies
d’influence.
181
2.5 Des réflexions globales concernant les références théoriques
Toutes les théories étudiées s’avèrent logiques, pas d’éléments foncièrement
surprenants en découlent, mais des propositions permettant de faire des liens
rationnels avec des projets initiés instinctivement. Par exemple, l’importance de
l’activité de Noël, de l’activité de reconnaissance, du comité social des gestionnaires,
des festivités ou encore de l’accueil aux nouveaux employés régulièrement amélioré.
En effet, les avancées scientifiques à propos des notions d’attraction, de
rétention, d’employeur de choix et de stratégies d’influence permettent de mettre des
mots, une structure de pensée, un raisonnement relatif à des gestes souvent posés sans
réaliser leur portée, leur signification au plan de la culture organisationnelle.
Nos réflexions convergent autour de deux éléments nous semblant
primordiaux : le rôle résolument central des gestionnaires dans toutes les actions à
poser et la nécessaire synergie entre les individus d’un groupe d’intérêt ou d’une
équipe pour que se crée des liens solides.
Néanmoins, nous sommes d’avis que les auteurs traitant des aspects surtout
liés à l’attraction et à la rétention et indirectement à la notion d’employeur de choix,
devraient aborder la capacité transformationnelle d’une organisation. St-Amant et
Renard (2004) définissent cette capacité organisationnelle par le « déploiement, la
combinaison et la coordination de ressources, de compétences et de connaissances à
travers différents flux de valeur pour mettre en œuvre des objectifs stratégiques »
(p. 3). Autrement dit, la capacité organisationnelle nécessite la présence de
ressources, de compétences et de connaissances et émerge, selon ces auteurs, des
activités collectives. Ainsi, il nous semble essentiel d’effectuer une bonne analyse de
la capacité d’une organisation à mener une transformation de valeurs, sous-jacente à
un projet de devenir un employeur de choix.
182
Aussi, nous sommes convaincus que les démarches telles Entreprise en santé
favorisant le bien-être et la santé se révèleront pertinentes au niveau de l’attraction et
la rétention de la main-d’œuvre. Des activités concernant la saine alimentation ou
facilitant l’exercice physique seraient sûrement appréciées. Nous pensons que ces
préoccupations devraient s’ajouter à un modèle d’employeur de choix.
D’autre part, nous avons été surpris de constater que les recherches font peu
allusion aux impacts générés par des environnements de travail syndiqués au niveau
des différents leviers proposés par les construits théoriques. Évidemment, on ne
saurait omettre la participation, capitale, des instances syndicales à un projet touchant
d’aussi près les personnes salariées. Par ailleurs, des réticences pourraient être
observées lorsque certains leviers essentiels ne seraient pas appliqués en respectant
l’ancienneté, par exemple. La présence d’instances syndicales implique certes une
concertation et des préoccupations de partenariat mais peut avoir des répercussions
non négligeables.
À la dernière section de ce chapitre, nous énoncerons des pistes de recherches
émanant de la consultation des écrits.
3. DES PISTES DE RECHERCHE
Les construits scientifiques relatifs à l’attraction, la rétention, la notion
d’employeur de choix et même ceux concernant les stratégies d’influence feront
sûrement l’objet de multiples études dans la prochaine décennie, étant donné les
enjeux imposants de main-d’œuvre découlant de la conjoncture démographique
actuelle. Des recherches empiriques quant à ces aspects névralgiques s’avéreraient
profitables pour tout dirigeant car elles permettraient d’approfondir la réflexion, de
cibler les interventions pertinentes et d’orienter les actions.
183
La complexité intrinsèque de ces théories et l’environnement en mouvance
nous laissent présumer qu’il y a encore place pour des découvertes. En ce sens, nous
émettons quelques questionnements pouvant faire l’objet de recherches, tirées des
précédentes réflexions, telle que : Comment ajuster les pratiques de gestion en
considérant les caractéristiques distinctives des générations au sein d’une même
équipe de travail?, Quels sont les impacts associés à la venue de travailleurs issus de
différentes communautés culturelles au niveau des théories relatives à l’attraction et
à la rétention?, Quels critères doivent être utilisés pour effectuer la sélection des
gestionnaires, tenant compte de leur capacité à attirer, retenir la main-d’œuvre et
devenir un employeur de choix?, Quels sont les pratiques managériales gagnantes et
leurs attributs pour devenir un employeur de choix?, Quels sont les leviers
particuliers à utiliser dans un environnement de travail syndiqué?, Comment la taille
d’une organisation influence-t-elle la capacité de devenir un employeur de choix?,
Quels sont les liens entre l’engagement organisationnel et la propension à devenir un
employeur de choix?.
En définitive, le développement d’un modèle qui intégrerait les divers
paramètres relatifs au concept d’employeur de choix, comme les inducteurs et les
effets, s’avérerait utile notamment pour les professionnels en gestion des ressources
humaines.
Le dernier chapitre vise à proposer un plan succinct de valorisation permettant
de partager les apprentissages réalisés par l’actualisation de l’essai intervention.
SEPTIÈME CHAPITRE
LE PLAN DE VALORISATION
Le réseau de la santé et des services sociaux n’échappera pas au déficit de
main-d’œuvre, quasi catastrophique, prévu à compter de 2011. Bien que la
conjoncture actuelle face à la disponibilité des effectifs dans le réseau sociosanitaire
s’avère d’ores et déjà périlleuse, les prédictions laissent planer une situation de
pénurie qui ne cessera de s’aggraver et ce, pour de nombreuses années.
Certains parlent d’un marché du travail en mutation (Audet, 2004), tandis que
d’autres évoquent une montée vertigineuse du phénomène de la concurrence entre les
employeurs (Salmon, 2007). Forcément, accéder à la reconnaissance d’employeur de
choix se retrouvera dans la mire, tôt ou tard, de tous les établissements du réseau de la
santé et des services sociaux.
Considérant les travaux menés dans le cadre de cet essai intervention ainsi que
nos préoccupations de partenariat, il nous apparaît opportun de proposer quelques
démarches visant le transfert de nos apprentissages, principalement au sein du réseau
de la santé et des services sociaux.
Mais, préserver un avantage concurrentiel pour mieux se distinguer ne serait-
il pas indiqué? Nous pensons plutôt que devenir employeur de choix fait appel à une
philosophie de gestion particulière et à des démarches organisationnelles en
profondeur; une présentation théorique seule ne saurait représenter autre chose
qu’une bougie d’allumage. En effet, nous savons maintenant que devenir un
employeur de choix dépendra d’un renouvellement de valeurs à partager avec les
acteurs organisationnels. De fait, notre défi, comme celui de toute organisation, sera
d’identifier et d’incarner une distinction.
185
Ainsi, nous prévoyons offrir des séances d’échanges ou encore des
présentations, selon le cas, à nos partenaires des diverses instances régionales et
provinciales déjà existantes et ce, au courant de l’hiver 2009. Ces rencontres seront
ultérieurement préparées à partir de notre documentation, des démarches effectuées
auprès des instances décisionnelles ainsi qu’en tenant compte des activités qui seront
accomplies au sein de l’organisation.
Au plan régional, nous suggérons de recourir à deux mécanismes de
concertation en place, soit la table des responsables en ressources humaines et la table
des directeurs généraux des services de santé et de services sociaux de l’Estrie. D’une
part, nous proposerons donc à la présidente de la table des responsables en ressources
humaines, rassemblant environ une douzaine de gestionnaires, d’effectuer une
présentation de notre analyse, suivie d’une période d’échanges. D’autre part, des
contacts pourront être réalisés auprès d’un représentant de l’Agence régionale de la
santé et des services sociaux de l’Estrie, dans le but d’organiser aussi une activité,
selon l’intérêt manifesté, à la table des directeurs généraux. Des rencontres pourraient
aussi s’effectuer au niveau de d’autres groupes d’intérêt, comme la commission
scolaire, selon le cas.
Au niveau provincial, l’Association québécoise des établissements de santé et
de services sociaux nous semble l’instance à privilégier compte tenu des différents
mécanismes de concertation et d’information qu’elle actualise au niveau du réseau
sociosanitaire. Selon les possibilités évoquées par nos contacts, nous pourrons
préparer une présentation soit à un groupe restreint de décideurs ou encore à un plus
grand auditoire, par exemple dans le cadre d’un colloque.
Ces démarches de transferts d’apprentissages à orchestrer dans les mois qui
suivront la fin de notre essai intervention, nous stimuleront à garder notre projet actif
tout en le faisant évoluer. D’ailleurs, dans le but de mousser la mobilisation interne
face au projet, de procurer des occasions d’enracinement et de contaminer notre
186
milieu, nous prévoyons impliquer quelques acteurs organisationnels à ces activités,
tels que des gestionnaires, des employés, des membres de l’équipe de la Direction des
ressources humaines et informationnelles et même des représentants syndicaux.
Assurément, les membres du comité consultatif sur les stratégies à adopter face à la
pénurie de main-d’œuvre seront étroitement inclus à ces démarches. Aussi, suivant
ces rencontres, les constats et informations seront partagés aux divers groupes
d’intérêt, procurant une autre occasion de consolider nos interventions en cours.
Assurément, toutes ces actions contribueront à enrichir notre réflexion en plus
de nous permettre de mieux assimiler les subtilités inhérentes à notre ambition de
devenir L’employeur à choisir.
CONCLUSION
Globalement, cet essai intervention visait à identifier une problématique
organisationnelle, à cerner et à rendre compte ensuite des écrits scientifiques
l’entourant, à effectuer une intervention dans le milieu concerné et enfin à procéder à
une analyse critique de la démarche.
Le principal défi de l’essai consistait à circonscrire le concept d’employeur de
choix, peu étudié, et de dégager des pistes d’action pour orienter les interventions du
CSSS – IUGS, convoitant cette distinction. L’intervention, quant à elle, visait à
mettre en place une structure consultative à la première étape et à obtenir une
orientation stratégique à la seconde. Ces démarches s’avéraient préparatoires au
lancement d’un tel projet au sein de l’organisation.
En substance, l’objectif souhaité a été atteint. Il consistait à mieux
comprendre le phénomène d’employeur de choix pour le devenir. Nous avons
documenté le concept, proposé divers liens et développé des outils de travail,
notamment un plan de travail sommaire. La première étape de notre intervention a
permis de mettre en lumière quelques résultats pour contrer la pénurie de main-
d’œuvre et ce, grâce à la participation d’un groupe d’acteur organisationnel élargi.
Par contre, la seconde étape de notre intervention a été teintée par le départ du
directeur général, ce qui a généré de l’incertitude plus spécifiquement au niveau du
conseil d’administration. Bien qu’une orientation claire ait été obtenue de la part du
comité de direction, nous devrons poursuivre nos démarches d’influence, dès
l’automne, avec le nouveau directeur général et le comité issu du conseil
d’administration.
Tous les concepts étudiés dans le cadre de cet exercice associés à la notion
d’employeur de choix, de même que notre intervention s’étant déroulée sur une
188
période de 15 mois, nous convainquent qu’aspirer à se distinguer en tant
qu’organisation mobilise plusieurs leviers organisationnels complexes et implique de
longues démarches.
Il peut s’agir de l’impact des générations sur le marché du travail, des
phénomènes d’attraction, de rétention ou encore des notions liées à un employeur de
choix, ces concepts pourront s’ancrer aux valeurs organisationnelles à la condition
que l’on installe les processus pertinents, souvent associés à la gestion des ressources
humaines.
Conscients que chacun de ces concepts aurait pu faire l’objet d’un ouvrage
académique, nous ne prétendons pas avoir analysé en profondeur tous ces construits
théoriques. Par contre, à partir de ces différents construits, nous avons tenté de tracer
un fil conducteur faisant ressortir les principaux leviers à articuler pour qui veut
accéder à la reconnaissance d’employeur de choix.
Or, ces balises devront être adaptés à chaque contexte organisationnel et
surtout tenir compte de la philosophie de gestion du milieu; il s’agit là d’une
opportunité, peut-être même d’une limite à considérer avec et par les décideurs.
Effectivement, force est de constater que les pratiques de gestion s’avèreront
déterminantes dans le cheminement aboutissant à la consécration d’employeur de
choix.
Nous pensons que la notion d’employeur de choix sera sujette à changer, à
évoluer suivant l’influence de facteurs internes, notamment associés aux individus
composant l’organisation, ainsi qu’externes, liés à conjoncture environnementale,
dont la démographie. En fait, devenir et demeurer un employeur de choix est une
recherche incessante de nouveaux moyens pour séduire la main-d’œuvre. Les
approches préconisées qui procurent des succès hier seront possiblement périmées
demain. Dans cette optique, établir un système de veille, dont des tableaux de bord,
189
permettra de lire précocement la conjoncture environnementale et d’anticiper de
nouvelles stratégies afin d’opérer un changement lorsque indiqué.
Notre projet de devenir L’employeur à choisir s’avère un vecteur de
changement stimulant, particulièrement au niveau des valeurs de gestion, dans la
mesure où il introduira de la nouveauté visant à ce que l’organisation se démarque.
En considérant les acquis organisationnels, nous sommes confiants que le
CSSS - IUGS sera en mesure de remettre en question certaines valeurs et démontrer
une capacité à se renouveler.
Au terme de notre réflexion, nous pouvons prétendre que devenir
L’employeur à choisir sous-tend d’importants investissements pour l’organisation et
pour les individus qui la composent, spécialement pour les gestionnaires. Car, nous
avons vu que le leadership s’avère une puissante composante pour devenir un
employeur de choix.
Mais, il s’agit là d’un projet de longue haleine, d’une démarche de
transformation qui nécessitera un travail d’équipe bien orchestré, s’inscrivant dans
une vision systémique, intégrée et probablement échelonnée sur trois années, soit le
temps nécessaire pour se préparer à faire face à la crise de main-d’œuvre prévue en
2011.
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ANNEXE A
PLAN STRATÉGIQUE 2006-2011
ANNEXE B
ORGANIGRAMME CSSS – IUGS
200
ANNEXE C
STABILISATION DES RESSOURCES HUMAINES
202
203
204
205
206
ANNEXE D
MANDAT DU COMITÉ CONSULTATIF SUR LES STRATÉGIES À ADOPTER FACE À LA PÉNURIE DE MAIN-D’ŒUVRE
208
209
210
211
212
213
ANNEXE E
PRÉSENTATIONS AUX COMITÉS
215
216
217
218
219
220
221
222
223
224
225
226
227
228
229
230
231
ANNEXE F
PLAN DE TRAVAIL PRÉLIMINAIRE
233
PREMIÈRE SECTION : LES APPUIS ORGANISATIONNELS ET CONCEPTUELS LES APPUIS
ORGANISATIONNELS ET CONTEXTUELS
ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION PISTES D’INTERVENTION EXEMPLES
D’OPÉRATIONNALISATION
1. Le contexte sociodémographique québécois
Mise à jour régulière des informations concernant le marché du travail québécois; veille systématique pour soutirer les faits saillants, les enjeux
Élaboration d’un tableau de bord Discussion aux instances appropriées
Analyse périodique (aux 4 mois) des tendances relatives à la main-d’œuvre active en prévision du déficit majeur prévu en 2010
Présentation des faits saillants aux instances appropriées
2. Les enjeux de main-d’œuvre dans le réseau de la santé et des services sociaux
Prise en compte des données du MSSS et des travaux effectués concernant les démarches de planification de main-d’œuvre, les cadres de référence; vigie régulière sur la documentation disponible
Réseautage avec des personnes ressources du MSSS Présentation des faits saillants aux instances appropriées
Mise à jour régulière des informations sur les pénuries de main-d’œuvre nationales et régionales
Présentation des faits saillants aux instances appropriées
Analyse prédictive en vue d’écart important prévu en 2010
Élaboration d’un tableau de bord Discussion aux instances appropriées
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PREMIÈRE SECTION : LES APPUIS ORGANISATIONNELS ET CONCEPTUELS LES APPUIS
ORGANISATIONNELS ET CONTEXTUELS
ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION PISTES D’INTERVENTION EXEMPLES
D’OPÉRATIONNALISATION
3. Les distinctions du CSSS – IUGS : une organisation visionnaire
Référence et utilisation régulière de la vision et du plan stratégique qui suggèrent une projection vers un milieu de travail stimulant et une organisation apprenante capable d’attirer et de garder un personnel compétent et dévoué et de susciter son esprit de coopération, son sentiment d’appartenance et sa fierté
Utilisation pour le matériel promotionnel Discussion de la portée de ces orientations avec les instances appropriées
Utilisation judicieuse de l’énoncé de positionnement : «La santé, une passion à partager »
Utilisation pour le matériel promotionnel
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PREMIÈRE SECTION : LES APPUIS ORGANISATIONNELS ET CONCEPTUELS LES APPUIS
ORGANISATIONNELS ET CONTEXTUELS
ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION PISTES D’INTERVENTION EXEMPLES
D’OPÉRATIONNALISATION
4. La planification de la main-d’œuvre dans l’organisation
Enrichissements des données issues de l’étude de vulnérabilité par l’élaboration d’un plan d’action avec chacune des directions (en cours)
Tournées des directions (rencontre avec des outils adoptés (en cours)
Actualisation d’un plan prévisionnel triennal de la main-d’œuvre, utilisant les données issues de la veille concernant les enjeux démographiques québécois et régionaux et de la vigie des renseignements en provenance du MSSS
Utilisation dans les démarches de promotion avec des travailleurs jouant un rôle d’ambassadeur
Élaboration d’une stratégie récurrente, impliquant les directions, pour assurer une démarche de planification de main-d’œuvre itérative
Tableau de bord pour chaque titre d’emploi vulnérable fournissant l’information fiable et mise à jour
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PREMIÈRE SECTION : LES APPUIS ORGANISATIONNELS ET CONCEPTUELS LES APPUIS
ORGANISATIONNELS ET CONTEXTUELS
ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION PISTES D’INTERVENTION EXEMPLES
D’OPÉRATIONNALISATION Analyse systématique des enjeux
relevés par l’exercice de planification de main-d’œuvre, dont : • forte féminisation (77 %), étude
groupes d’âge • statuts temporaires (40 %),
validation des enjeux de mobilité • congés de maladie, analyse fine
des diagnostics, services, etc. • départ à la retraite, plan de relève,
prolongation de carrière • recrutement intensif relatif aux titres
d’emploi en pénurie, plan spécifique pour chacun
• taux de rétention des infirmières (70 %), des infirmières auxiliaires (70 %) et des préposés aux bénéficiaires (65 %), étude des causes, entrevues de départs
• nombre de personnes considérées relève (5 %) ou atouts (15 %) à potentialiser ainsi qu’à encourager et soutenir par des projets
Création de groupe de travail spécifique pour les enjeux majeurs (en cours)
Développement d’un plan d’action pour chacun des enjeux majeurs
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DEUXIÈME SECTION : LES AXES DE TRAVAIL LES AXES DE TRAVAIL ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION PISTES
D’INTERVENTION EXEMPLES D’OPÉRATIONNALISATION
1. L’influence des générations (baby-boomers, les X et les Y) sur le marché du travail
Les baby-boomers (1947-1964) : quittent à la retraite bientôt • considèrent le travail comme un ancrage
majeur, ils y ont mis beaucoup d’ardeur et d’énergie
• anticipent un statut eu égard à leurs expertises
• ressentent de la fierté face à leurs réalisations
• aspirent de plus en plus à un équilibre entre le travail et la vie personnelle considérant le temps investi pendant de nombreuses années
La génération X (1965-1976) • s’attend à changer plusieurs fois de
fonctions, considérant l’environnement de travail volatil auquel ils ont été confrontés; ils sont donc assez mobiles
• s’adapte aux changements • est confortable avec les technologies • a développé une capacité de résolution
de problèmes • recherche l’équilibre entre le travail et vie
personnelle; le travail est cependant une source de valorisation
Analyse des caractéristiques retrouvées chez les trois générations qui composent le marché detravail : les baby-boomers, les X et les Y pour discernerles pistes qui enrichiront l’attraction et la rétention des talents Des stratégies conjointes et d’autres plus spécifiques, selon la génération, doivent être orchestrées en concordance avec la figure trois présenté au chapitre deux (Les caractéristiques des générations)
Mise sur pied de programmes de mentorat pour les jeunes avec des personnes de la génération des baby-boomers
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DEUXIÈME SECTION : LES AXES DE TRAVAIL LES AXES DE TRAVAIL ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION PISTES
D’INTERVENTION EXEMPLES D’OPÉRATIONNALISATION
La génération Y (1977-1997) : constitue la relève • est la plus instruite • ressent une aversion des règles et de la
hiérarchie • attirée par les aspects communautaires,
d’équipe • aime le changement, la mouvance; à la
recherche d’une organisation dynamique • possède beaucoup d’aptitudes
technologiques • recherche l’accès à l’information • souhaite émettre son opinion au travail • apprécie un patron qui coach, favorise le
développement et émet des rétroactions • est le plus exigeant travailleur face à son
environnement de travail; sera facilement mobile si des insatisfactions perdurent
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DEUXIÈME SECTION : LES AXES DE TRAVAIL LES AXES DE TRAVAIL ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION PISTES
D’INTERVENTION EXEMPLES D’OPÉRATIONNALISATION
Évaluation des avenues pour rendre le milieu de travail plus flexible avec des opportunités majeures d’apprentissages (générations des X et des Y) tout en valorisant l’expertise des travailleurs seniors (les baby-boomers)
Programmes de coaching et de mentorat
Étude de la dynamique intergénérationnelle
Mise sur pied de groupes de discussion comprenant des membres des trois générations avec des sujets spécifiques : ex. l’appréciation de la contribution, l’orientation.
Analyse spécifique et transposition des données de planification de main-d’œuvre organisationnelle afin d’éclairer nos actions relatives aux différences et aux similitudes entre les générations
Analyse permettant d’identifier le pourcentage d’individu associé à chaque génération de façon à développer des stratégies adéquates
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DEUXIÈME SECTION : LES AXES DE TRAVAIL LES AXES DE TRAVAIL ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION PISTES
D’INTERVENTION EXEMPLES D’OPÉRATIONNALISATION
2. L’attraction de la main-d’œuvre
Inspiration du modèle Person-organisation-fit stipulant que les chercheurs d’emploi sont attirés par des organisations répondant à leurs aspirations, leurs valeurs, soit des milieux stimulants avec un climat de travail positif caractérisés par : • Des investissements majeurs dans la
formation initiale et le développement en cours d’emploi
• De la variété dans le travail quotidien • Du dynamisme, une approche de
croissance, de proactivité dans le domaine d’activités de l’organisation
• Un environnement de travail respectueux, suscitant une contribution distinctive où la personne est perçue comme un membre à part entière d’une équipe ainsi qu’un partenaire
• Des responsabilités interpellant une bonne dose d’autonomie de même que des défis professionnels
• Des possibilités d’avancement et de développement professionnel continu
• De bonnes relations avec les supérieurs immédiats se traduisant par de l’écoute, des encouragements et du soutien
Élaboration d’un site Web tenant compte de l’importance de la compatibilité entre les caractéristiques recherchées par les futurs candidats et celles offertes par les organisations
Programmes de soutien spécifiques lors de l’orientation Programmes de formation en ligne
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DEUXIÈME SECTION : LES AXES DE TRAVAIL LES AXES DE TRAVAIL ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION PISTES
D’INTERVENTION EXEMPLES D’OPÉRATIONNALISATION
• Des gestionnaires qui considèrent la famille et le temps personnel importants, donc des préoccupations concernant le bien-être des employés
• Des conditions salariales et des bénéfices marginaux compétitifs
• Un site Web dynamique, décrivant les atouts organisationnels
Ces caractéristiques organisationnelles prônées doivent être conformes à la réalité observée
Effectuer de la publicité en fonction des caractéristiques réelles
3. La rétention et le roulement de personnel
Importance de la compatibilité entre le travail et les aspirations des travailleurs qui sous-tend la mise en place de mesures inspirées des modèles théoriques Unfolding model of volontary turnover et le Job embeddedness
Programme d’orientation à la tâche soutenant Plan de carrière pour les employés performants Plans de formation selon les catégories d’emploi
Les éléments sous-jacents au Unfolding model of volontary turnover, modèle décrivant la spirale d’étapes menant à quitter l’organisation : • Création d’espaces de discussions et
d’accompagnements liés aux
Développement d’un atelier traitant de l’entrée dans le milieu du travail
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DEUXIÈME SECTION : LES AXES DE TRAVAIL LES AXES DE TRAVAIL ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION PISTES
D’INTERVENTION EXEMPLES D’OPÉRATIONNALISATION
évènements auxquels le travailleur fait face, faisant parfois ressortir les aspects plus insatisfaisants du travail (naissance, séparation, difficultés avec l’équipe ou le supérieur immédiat, etc.)
• Soutien de la génération X relativement au choc de la réalité concernant le milieu de travail (séances de sensibilisation, de soutien
Les éléments sous-jacents au Job embeddedness model », modèle explicitant les facteurs encourageant à rester dans l’organisation, soit fit, links, sacrifice : • Un niveau de compatibilité perçu entre
les valeurs, les aspirations du travailleur et son travail, l’organisation et la communauté
• Des liens étroits avec diverses personnes composant l’organisation, les équipes et les groupes d’appartenance
• Des sacrifices à envisager si le travailleur devait quitter l’organisation.
Créations d’activités par direction, sociales et culturelles Liens avec la Fondation pour des projets dans la communauté Création de groupes de travail impliquant les employés pour organiser des activités (encours) ex. : Party de Noël
Ce modèle encourageant l’enracinement dansl’emploi renforce l’importance du réseautage, de la complicité avec l’entourage au travail
Sensibilisation auprès des gestionnaires de leur rôle déterminant dans la rétention (approche, soutien)
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DEUXIÈME SECTION : LES AXES DE TRAVAIL LES AXES DE TRAVAIL ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION PISTES
D’INTERVENTION EXEMPLES D’OPÉRATIONNALISATION
mais surtout relève le rôle déterminant du supérieur immédiat dans la décision de rester ou non dans une organisation
La relation de supervision est un axe d’investissement privilégié
Développement prof. dans le cadre du projet de contre de formation continue en gestion; Groupe de discussion avec les gestionnaires
4. Les caractéristiques des employeurs qui se distinguent
Étude des caractéristiques d’organisations s’étant distinguées, qu’elles soient du domaine privé ou public, du secteur de la santé ou autre : • Une recherche de candidats ciblés, en
accord avec les valeurs organisationnelles
• Une intégration à l’emploi bien encadrée • Des relations de confiance avec les
collègues et le supérieur immédiat; un esprit d’équipe
• Un pouvoir décentralisé favorisant l’autonomie et la participation
• Une importante participation sociale • Une gestion proactive des carrières et
des hauts potentiels • Un développement continu des
connaissances, basé sur le partage et
Validation, auprès d’un échantillonnage d’employés, de leur évaluation des attributs de l’employeur
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DEUXIÈME SECTION : LES AXES DE TRAVAIL LES AXES DE TRAVAIL ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION PISTES
D’INTERVENTION EXEMPLES D’OPÉRATIONNALISATION
sur l’apprentissage dans l’action • Une rétroaction fréquente et une
reconnaissance du succès • Des activités qui favorisent le bien-être • Du personnel en quantité suffisante pour
fournir des services de qualité • Une structure organisationnelle avec peu
de paliers hiérarchiques, un supérieur immédiat démontrant du leadership
• Un environnement de travail agréable, portant attention au décor, au confort et à l’ambiance
• L’accent mis sur la qualité de la relation entre le client et le travailleur prodiguant un service