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* THEATRE ET SPECTACLE VIVANT TARTUFFE, NOUVELLE ÈRE – Éric MASSÉ 2017

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* THEATRE ET SPECTACLE VIVANT TARTUFFE, NOUVELLE ÈRE – Éric MASSÉ 2017

–SOMMAIRE–

Première partie : avant la représentation

I. Des répliques pour ouvrir l’appétit… p.2

II. Le personnage de Tartuffe (hypothèses et attentes) p.4

III. La situation en jeu p.9

IV. Le projet d’Éric Massé p.10

V. Vers la représentation : photographies p.12

Annexes 1. La Distribution du spectacle p.15

2. Dates de tournée 2017 p.16

3. Liens p.16

4. Note d’intention p.17

5. Deux scènes de Molière p.18 (Tartuffe, acte I, scène 1 & Tartuffe, acte III, scène 2)

« Pièces à vivre » : une série de dossiers pédagogiques conçus en partenariat par la Délégation Académique à

l’Action Culturelle de l’Académie de Caen et les structures théâtrales de l’académie à l’occasion de spectacles accueillis

ou créés en Région Basse-Normandie.

Le théâtre est vivant, il est créé, produit, accueilli souvent bien près des établissements scolaires ; les dossiers

« Pièces à vivre », construits par des enseignants en collaboration étroite avec l’équipe de création, visent à fournir aux

professeurs des ressources pour exploiter au mieux en classe un spectacle vu. Divisés en deux parties, destinées l’une

à préparer le spectacle en amont, l’autre à analyser la représentation, ils proposent un ensemble de pistes que les

enseignants peuvent utiliser intégralement ou partiellement.

Retrouvez ce dossier, ainsi que d’autres de la même collection et des ressources pour l’enseignement du théâtre sur

le site de la Délégation Académique à l’action Culturelle de l’Académie de Caen :

http://www.discip.ac-caen.fr/aca/

Délégation Académique à l’Action Culturelle de Caen 1

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I. DES RÉPLIQUES POUR OUVRIR L’APPÉTIT…

Pour faire naître des horizons d’attente chez les élèves et pour les mettre en appétit, il est possible de partir de

quelques répliques du texte de Molière sélectionnées en amont et de procéder à ce que Chantal Dulibine et Bernard

Grosjean appellent dans leur ouvrage Coups de théâtre en classe entière (SCEREN-CRDP de Créteil, 2011) la

« profération de répliques ».

L’intérêt de la profération de répliques est de faire entendre des « bouts de texte » et de commencer à dégager

des thématiques. En outre, cela éveillera l’appétit des élèves qui voudront savoir comment sera « dite » leur réplique.

Voici, par exemple, comment procéder :

- Former un cercle.

- Distribuer la parole (On institue un tour de parole qui sera identique durant tout le jeu : A s’adresse à B qui s’adresse à C…jusqu’à ce que le dernier élève s’adresse à A.).

- Distribution des répliques.

- Tour 1 : Chaque élève dit sa réplique en s’adressant véritablement à son interlocuteur (sans aucune autre indication).

- Tours suivants : contraintes techniques (dire à voix basse pour intensifier l’intensité du regard et l’expression du visage / allonger les syllabes / sur-articuler les consonnes – cf. Charles Dullin avait coutume de dire que l’âme des mots était dans leurs consonnes – / dire la phrase le plus rapidement possible et sans tenir compte de la ponctuation / suspendre l’énonciation et y placer un – long – moment de silence – cette pause artificielle ne coïncide pas avec un signe de ponctuation ou un groupe syntaxique, et met évidemment en valeur le mot de la réplique qui suit ce silence – chanter la réplique sur un air connu…)…

- Tours suivants : différentes « manières » de dire (avec tous les accents possibles – régional, social… – / avec toutes les déformations de la voix – zozoter, bégayer, grommeler, susurrer… – / avec une voix très aiguë ou très grave…)…

-.Tours suivants : dire avec des émotions et/ou intentions (colère, fureur, haine, révolte / joie, allégresse, enthousiasme, exaltation / tristesse, souffrance, désolation, imploration / dégoût, répulsion / peur, anxiété / angoisse, effroi / timidité, fragilité / sacré, religieux, tragique / tribun, harangue, lyrisme / amour, flamme, ferveur, passion / surprise, étonnement, stupeur…)…

Et voici un exemple de répliques choisies dans la pièce de Molière :

On n’y respecte rien, chacun y parle haut, Et c’est tout justement la cour du roi Pétaud.

Enfin il en est fou ; c’est son tout, son héros ; Il l’admire à tous coups, le cite à tout propos.

Votre Monsieur Tartuffe est bien heureux sans doute… Mon frère, vous seriez charmé de le connaître.

C’est un homme de bien qu’il faut que l’on écoute. Que d’affectation et de forfanterie !

Il est de faux dévots ainsi que de faux braves. Vous êtes donc bien tendre à la tentation.

Couvrez ce sein que je ne saurais voir : Par de pareils objets les âmes sont blessées, Et cela fait venir de coupables pensées.

Depuis que de Tartuffe on le voit entêté ; Il l’appelle son frère, et l’aime dans son âme Cent fois plus qu’il ne fait mère, fils, fille et femme.

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Ah ! pour être dévot, je n’en suis pas moins homme. Je tâte votre habit : l’étoffe en est moelleuse.

Mais, Madame, après tout, je ne suis pas un ange. Ah ! de grâce, laissez, je suis fort chatouilleuse.

C’est au chemin du Ciel qu’il prétend vous conduire. Si tu dis un seul mot, je te romprai les bras.

Il passe pour un saint dans votre fantaisie. Approchons cette table, et vous mettez dessous.

Tout son fait, croyez-moi, n’est rien qu’hypocrisie. Vous épousiez ma fille et convoitiez ma femme !

C’est à vous d’en sortir, vous qui parlez en maître. La maison m’appartient, je le ferai connaître.

Je l’ai vu, dis-je, vu, de mes propres yeux vu, Ce qu’on appelle vu.

Nous vivons sous un prince ennemi de la fraude. Il faut, tout sur-le-champ, sortir de la maison.

Ses moindres actions lui semblent des miracles, Et tous les mots qu’il dit sont pour lui des oracles.

De l’hymen de ma sœur touchez-lui quelque chose. J’ai soupçon que Tartuffe à son effet s’oppose.

Tartuffe ? Il se porte à merveille, Gros et gras, le teint frais, et la bouche vermeille.

Hé quoi ? Vous ne ferez nulle distinction Entre l’hypocrisie et la dévotion ?

Oui, je prétends, ma fille, Unir par votre hymen Tartuffe à ma famille.

Si l’on vient pour me voir, je vais aux prisonniers Des aumônes que j’ai partager les deniers.

Et je l’ai surpris là qui faisait à Madame L’injurieux aveu d’une coupable flamme.

Mon fils, je ne puis du tout croire Qu’il ait voulu commettre une action si noire.

On vous aura forgé cent sots contes de lui. Vous ne vouliez point croire, et l’on ne vous croit pas.

Je suis toute ébaubie, et je tombe des nues ! L’homme est, je vous l’avoue, un méchant animal !

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II. LE PERSONNAGE DE TARTUFFE (HYPOTHÈSES ET ATTENTES)

Avant d’assister à la représentation de Tartuffe, nouvelle ère, il peut être intéressant de s’interroger avec les

élèves sur le personnage éponyme qui est, désormais, entrer dans le dictionnaire à la fois comme substantif et adjectif.

Voici d’ailleurs la définition qu’en donne Le Petit Robert de la langue française et qui pourra servir de point de départ à la

réflexion :

TARTUFE ou TARTUFFE, n. m. et adj. – 1665 ; de Tartufo, personnage

de la comédie italienne, it. Tartufo « truffe », repris par Molière en 1664.

◆ VIEILLI Faux dévot. → bigot, cagot.

◇ MOD. Personne hypocrite. → hypocrite. « Il s’y entend pour prendre des airs de tartufe, quand il veut. » (R. Guérin).

– Adj. Il, elle est un peu tartuffe.

A) Formuler des hypothèses sur le personnage à partir de différentes interprétations

Pour faire naître des hypothèses sur la pièce et son personnage éponyme, nous pouvons observer différentes

photographies montrant plusieurs interprétations de Tartuffe. À partir de ces documents, les élèves pourront émettre des

hypothèses et formuler des attentes sur ce personnage.

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Mise en scène de Louis Jouvet (1950)

Mise en scène d’Antoine Vitez (1978)

Mise en scène d’Ariane Mnouchkine (1995)

Mise en scène de Stéphane Braunschweig (2008)

Tartuffe joué par Du Croisy lors de la 1ère représentation selon

une gravure du XIXe siècle

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B) L’entrée en scène du personnage de Tartuffe

Il peut également être intéressant de réfléchir avec les élèves qui auront lu la pièce de Molière à l’un des

événements majeurs de la pièce, à savoir l’entrée en scène du personnage de Tartuffe qui n’intervient qu’au début du

troisième acte. Voici donc quelques éléments de réflexion autour de l’importance dramaturgique de cette scène qui

pourront servir à la discussion avec les élèves ou à une lecture analytique du texte de Molière :

L’entrée en scène de Tartuffe, personnage éponyme, est pour le moins tardive ; on peut même parler de mise à

l’épreuve du spectateur et de sa patience, dans la mesure où on doit attendre le début du troisième acte pour voir celui

dont on ne cesse de parler depuis le début. Si le procédé est connu (Molière « excitera » également l’attente et le désir

du spectateur avec Trissotin dans Les Femmes savantes), il est ici radicalisé, au point qu’il constitue sans doute une

dimension importante de l’appréhension du personnage : avant même de constituer l’origine d’une parole et d’une action

dramatique, Tartuffe apparaît d’abord, au travers des différents portraits de lui (qu’on évoque son être ou son

comportement), comme le thème obsessionnel du discours des autres… En particulier, il représente un tel modèle pour

Orgon qu’il prend, dans la bouche de celui-ci, l’allure d’un fantasme (d’un Dieu ?), concentrant les ambitions bigotes et

les chimères du maître de maison. Autrement dit, est-il un personnage au sens plein, nanti d’une personnalité spécifique ?

On peut en douter, dans la mesure où il est d’abord et avant tout un hypocrite et l’imposteur, et dépend très largement, à

Délégation Académique à l’Action Culturelle de Caen 5

Mise en scène de Brigitte Jaques-Wajeman (2009)

Mise en scène d’Éric Lacascade (2011)

Mise en scène de Galin Stoev (2014)

Mise en scène de Luc Bondy (2014)

Mise en scène de Benoît Lambert (2014)

Mise en scène d’Éric Massé (2017)

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ce titre, du regard et de l’attente des autres personnages, autant que du

public, comme objet de désir ou de répulsion : Tartuffe n’aurait alors

d’autre mission que de conforter les autres dans leurs préjugés, dans

leurs désirs.

Aussi bien, la scène 2 de l’acte III, qui propose un dialogue entre

Tartuffe et l’un de ses opposants les plus francs et les plus résolus,

Dorine, doit être lue en fonction de ce qui précède. En quoi la découverte

de Tartuffe par le public confirme-t-elle, par son caractère spectaculaire,

le savoir préalable de celui-ci ; en quoi, cependant, son entrée constitue-t-elle un moment dramatique majeur, qui dépasse

la simple réalisation concrète, sur scène, de la figure de l’hypocrite ?

Constatons d’abord que cette courte scène aurait pu être encore plus brève, compte tenu de la banalité, voire de

l’aspect strictement pratique de l’information qui y est délivrée, et dont l’intérêt dramatique est limité. Dorine est en effet

seulement censée annoncer la venue de sa maîtresse, et le texte de son ambassade tient en deux vers :

« Madame va venir dans cette salle basse

Et d’un mot d’entretien vous demande la grâce. »

Mais ces vers sont retardés, d’ailleurs par Tartuffe lui-même, qui empêche d’emblée Dorine d’accomplir sa

mission. Le caractère utilitaire de la scène est effacé, au profit de la présentation vivante de Tartuffe. Détachée de tout

événement dramatique, celle-ci s’accomplit alors dans l’ordre de la pure démonstration, spectaculaire, d’autant que

l’affrontement avec Dorine (du même coup réduit, lui aussi, à la représentation du pur conflit entre deux caractères

foncièrement antagonistes) lui confère son dynamisme et sa dimension comique.

Dès lors, la scène paraît entièrement consacrée à la dénonciation, théâtrale, de l’hypocrisie par l’hypocrite lui-

même, qui doit se révéler tel, sans aucune ambiguïté possible, dès sa première parole. Or, c’est bien Tartuffe qui, dès

son entrée, signale justement son statut d’imposteur. La première didascalie (« apercevant Dorine ») fait précéder le texte

d’un geste révélateur : Tartuffe ne parle en dévot que s’il dispose d’un public pour l’écouter. Et la démonstration se

poursuit : « en tirant un mouchoir de sa poche », l’imposteur prépare son effet, théâtral, qui apparaît d’autant plus arbitraire

et gratuit qu’il brise le rythme du dialogue (le vers 858 est disloqué) et empêche ainsi le déroulement naturel de la

conversation. Autrement dit, Tartuffe se met en scène lui-même, et c’est cette ostentation outrancière qui impose au

spectateur une image concrète de la profonde duplicité du personnage.

Précisons que cela est rendu très sensible par les statuts théâtraux forts différents dévolus à Tartuffe et à Dorine.

En celle-ci, le spectateur dispose en effet d’un intercesseur qui commente, grâce à deux apartés, les propos et le

comportement du fourbe. Ainsi, Dorine s’adresse au public (selon la

convention qui préside au discours « en soi-même ») et lui désigne la

comédie jouée par Tartuffe (« Que d’affectation… », « Comme il se

radoucit »), tandis que celui-ci n’a pour spectateurs que les membres de

la maisonnée d’Orgon. Le théâtre de Tartuffe n’est pas aux dimensions

du vrai théâtre : il est identifiable en ce qu’il s’inscrit, concrètement, dans

une représentation dont Tartuffe est l’objet, quand le personnage croit

en être le maître d’œuvre.

Mais c’est surtout dans le langage de Tartuffe que se résout ce paradoxe dramatique consistant en la révélation

immédiate, sur scène, de l’hypocrisie par les moyens mêmes (les paroles) qui sont censés la rendre efficace et traduire,

selon le personnage, une absolue sincérité. Ainsi le premier vers (« Laurent, serrez ma haire avec ma discipline »),

participe pleinement de cette ostentation radicale qui signifie la fausseté de la dévotion : Tartuffe met d’abord en évidence

les accessoires de la piété la plus sévère. Ce faisant, il confère à celle-ci une dimension caricaturale : on assiste à une

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É. Lacascade (2011)

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exhibition de piété, en absence de tout sentiment la motivant. L’humiliation solitaire du corps est scandaleusement

présentée comme un acte d’héroïsme, d’autant plus « théâtral » que les accessoires sont ici de purs signifiants de

l’hypocrite, ne renvoyant évidemment à aucune mortification réelle : Tartuffe n’accomplit ses prétendus actes pieux que

dans la coulisse, mais les dément aussitôt par son discours en les y accumulant, non seulement de manière parfaitement

invraisemblable, mais encore en affectant, et c’est le comble de l’artifice, le naturel forcé de l’habitude. Après un acte de

violente macération, il se rendrait ainsi « aux prisonniers » (visite banale à laquelle il confère une ridicule solennité),

comme on rend quelque visite mondaine après souper, « le teint frais et la bouche vermeille » …

D’ailleurs, toute la scène est organisée, dans la situation comique comme dans le contenu des répliques, autour

du thème de la vision, dans la mesure où voir et être vu constituent pour Tartuffe des outils de son pouvoir, qui sont aussi,

pour le spectateur, des instruments immédiats de sa compréhension. Ainsi, les vers 855 et 856…

« Si l’on vient pour me voir, je vais aux prisonniers,

Des aumônes que j’ai partager les deniers. »

…ne doivent pas être compris comme une information

réellement destinée, par l’intermédiaire du serviteur, à d’éventuels

visiteurs. Ils sont plutôt, encore une fois, une indication de mise en

scène : Tartuffe ordonne la vision que le monde doit avoir de lui, à

l’exclusion de tout autre, et montre ainsi que sa charité ne procède que

d’une stratégie du paraître. Non seulement, donc, il produit (rend visible)

l’artifice de son comportement, mais encore, et à l’inverse, il prétend vouloir masquer la réalité par l’artifice, et donner

cette illusion pour signe de la vraie piété :

« Couvrez ce sein que je ne saurais voir,

Par de pareils objets les âmes sont blessées. ».

La vision, selon Tartuffe (dont le lexique l’obsède : « pour me voir… », « saurais voir… », « pareils objets… »),

se déclare comme le moyen majeur du mensonge ; c’est justement, pour le spectateur, ce qui le rend « visible ».

D’autant que les propos du personnage renvoient à une connaissance préalable : pour « décoder », dans l’instant

même de sa profération, le discours hypocrite, le public dispose de récits antérieurs, que Tartuffe vient complaisamment

confirmer. Ainsi des « aumônes », qui rappellent précisément l’anecdote d’Orgon évoquant sa rencontre avec l’imposteur

(où la générosité, montrée, se mue aussitôt en démarche intéressée) ; ainsi également du mouchoir sur le « sein », qui

fait écho à la colère ridicule de Laurent (acte I, scène 2) découvrant un mouchoir dans une Fleur des « saints » … On est

convié à penser que Laurent imitait là encore son maître, si l’on peut dire littéralement, dans une scène déjà répétée.

Encore l’émoi de Laurent était-il causé par le symbole, quand la cause de celui de Tartuffe est plus charnelle…

Quant aux mots mêmes employés par Tartuffe, ce sont aussi les accessoires d’une mise en scène, clairement

identifiés comme tels. Le verbe « prier », d’abord référé à l’acte chrétien fondamental, accompli dans l’espérance de

l’inspiration divine (« Et priez que toujours le ciel vous illumine »), se voit rapidement dévalué par son utilisation dans un

contexte plus ordinaire (vers 858 : « je vous prie »), où son acception est vidée de tout contenu religieux. « Dieu », dans

le même vers, est également ravalé au rang d’une interjection (« mon

Dieu ! ») dont le sémantisme est à peu près égal au « Ah ! » qui le

précède. À si peu de distance des quatre premiers vers, l’indifférence de

Tartuffe à l’égard des mots « Dieu » et « prier », dont il fait évidemment

un usage excessif, est remarquable. Ce n’est pas que les expressions

lexicalisées qui contiennent des mots par ailleurs sacrés soient en soi

choquantes ; mais dans la bouche de Tartuffe, on entend que ce sont là

seulement des signaux de sa propre présence, des objets pratiques de

la constitution du personnage. Ils prennent alors quasiment l’allure de blasphèmes.

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Aussi bien ce langage est malgré tout révélateur du démon qu’il entend masquer, sinon contraindre. L’apparition

de Tartuffe semble dramatiser les propos de Cléante concernant la distinction du "masque" et du "visage" ; ici, le visage

qui surgit est celui d’une sensualité presque impossible à contenir. Le dialogue entre Tartuffe et Dorine oppose ainsi

nettement un langage contourné (donc vicieux) à un langage clair (innocent). A l’euphémisme hypocrite ("pareils objets"),

Dorine répond par les termes les plus simples et les plus francs, les débarrassant aussitôt de tout aspect "coupable" : "la

chair"…"vos sens"…"je vous verrais nu"…"toute votre peau"… Dorine procède ici à une sorte de dévoilement lexical tout

à fait risqué pour Tartuffe, car elle le "déshabille" : le langage de l’imposteur est alors menacé de découvrir ce qu’il

masque, dans l’ordre de la représentation théâtrale qui expose tout discours à l’interprétation ; il est menacé, en

conséquence, de délivrer sa signification véritable…

En l’espèce, la réelle vexation éprouvée par Tartuffe au vers 869 est avant tout du dépit, tant linguistique que

sensuel : "l’âme blessée" se révèle, grâce à Dorine, désir on ne peut plus

charnel, et celui-ci est proprement ridiculisé dans ses éventuelles

prétentions. Quand échoue la rhétorique dévote, l’amour-propre

reconquiert rapidement la place libérée par l’humilité affectée.

Davantage : la confrontation avec Dorine met Tartuffe, dès son entrée,

en état de fragilité dramatique (ce dont le public était tout de même en

droit de douter) dans la mesure où sa parole, par l’outrance de l’artifice,

met constamment le personnage en demeure de révéler le terrible

appétit de jouissance qui la sous-tend. Dorine explicite ainsi ce dont le délicat Tartuffe affecte d’avoir la bouche et le

regard écorchés. C’est en effet l’imposteur qui provoque la situation dont il devient la victime débusquée. En revendiquant

l’agression (et de "coupables pensées"), il avoue détester les demi-nudités par amour pour les totales. De la même

manière, l’étonnant cri du "cœur" du vers 875 "Hélas ! très volontiers" fait du registre de la mondanité le vecteur du désir :

l’emphase inutile, qui accompagne le rôle de l’hypocrite, est également l’expression nécessaire (et si sincère

inconsciemment) d’une insatiable sensualité.

S’il n’y a pas à promptement parler de surprise du spectateur, la puissance dramatique de la scène tient surtout

à l’outrance avec laquelle Tartuffe accomplit les présupposés du personnage. Cette radicalité est réclamée par le théâtre,

qui veut que les objets du discours deviennent objets au sens strict, choses vues.

Mais on voit dès lors comment le fait même de tenir extrêmement bien (trop bien) son rôle, de parler, constitue

pour Tartuffe un risque absolu, au point qu’il est impossible de faire indéfiniment perdurer l’imposture. Le conscient, qui

ne l’emporte contre Cléante qu’en rompant l’entretien pour se rendre à "certain devoir pieux" (acte IV, scène1), ou qui

menace Dorine de"(lui) quitter la partie" (ce contre quoi la servante intuitive se récrie "Non, non, c’est moi…" ; Tartuffe

doit absolument rester sur scène). Là sans doute est la raison principale du retard de Tartuffe : son pouvoir n’est si grand,

voire n’existe réellement, qu’hors de la scène.

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III. LA SITUATION EN JEU

Afin de faire découvrir quelques situations et enjeux de la pièce de Molière, on peut proposer aux élèves une

mise en jeu, d’abord sans texte, puis avec quelques répliques, voire une scène entière. En détachant, dans un premier

temps, les élèves du texte, cela permet de se concentrer sur le mouvement même de la situation, d’en découvrir les

enjeux et de mettre à nu les mécanismes et les rapports de force de la scène. Cela permet également de « mettre en

appétit » les élèves qui souhaiteront savoir comment Éric Massé a traité telle situation ou telle scène. Voici quelques

activités possibles :

- Improviser par analogie sur le mécanisme de la situation : Le professeur, avant de donner le texte de la

scène aux élèves, en extrait la situation pour en faire ressortir le caractère universel et permettre l’improvisation. À partir

de la situation donnée, les élèves (répartis en groupes) disposent d’un temps de préparation pour inventer un canevas

qui sera ensuite mis en jeu (en imposant une durée maximum de 3 minutes). Voici les situations que l’on peut proposer

aux élèves (par rapport à différentes scènes de la pièce de Molière) :

- Une mère formule de violents reproches à l’encontre

des membres de sa famille. (Acte I, scène 1)

- Un père de famille qui rentre de voyage s’informe

auprès de son valet de l’état d’un hôte qu’il accueille

chez lui et ne se soucie guère de celui de son épouse

qui a pourtant été malade. (Acte I, scène 4)

- Un père de famille impose à sa fille d’épouser un ami,

récemment rencontré, bien qu’il ait promis à celle-ci de

la marier avec celui qu’elle aime. (Acte II, scène 1)

- Une femme demande à son mari de se cacher pour

confondre son ami hypocrite qui tente de la séduire.

(Acte IV, scène 5)

- Jouer quelques répliques d’une scène : À partir des improvisations faites par les élèves autour des situations

données, on peut leur demander de jouer à nouveau leur tableau en ajoutant quelques répliques sélectionnées par le

professeur dans le texte de Molière. Il est préférable de ne donner que très peu de texte pour que les élèves restent dans

une situation de jeu et qu’ils ne se sentent pas bloqués par les répliques. Si le temps manque, on pourra simplement

proposer une lecture expressive des scènes correspondant aux situations improvisées par les élèves.

- Produire une « image synthèse » d’une scène : Suite à la lecture d’une scène de la pièce de Molière, on peut

demander aux élèves d’en faire « l’image synthèse » afin de mettre en évidence les rapports de force entre les

personnages et confronter les représentations qu’ils se font de la situation. Pour cela, après avoir divisé la classe en

groupes, on demande aux élèves de « sculpter » une image fixe de la scène lue. Chaque image est ensuite montrée et

commentée par les autres élèves qui en donnent leur lecture avant que le groupe qui vient de proposer son travail ne

fasse part de son objectif et de ses intentions. On peut, par exemple, leur demander de produire « l’image synthèse » de

la scène 5 de l’acte IV, lorsqu’Orgon, caché sous la table, peine à se rendre compte de l’hypocrisie et de la duplicité de

Tartuffe.

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* THEATRE ET SPECTACLE VIVANT TARTUFFE, NOUVELLE ÈRE – Éric MASSÉ 2017

IV. LE PROJET D’ÉRIC MASSÉ

On peut lire avec les élèves les documents présents dans le dossier artistique de la Compagnie des Lumas à

propos du spectacle Tartuffe, nouvelle ère, afin de voir avec eux quel est le projet d’Éric Massé.

A) À partir de la note d’intention (document disponible en annexe 4)

La note d’intention est un texte de longueur variable écrit le plus souvent par le metteur en scène qui présente la

pièce mais surtout défend la lecture qu’il en fait et annonce ce que sera son projet de mise en scène. La note d'intention

prépare le spectateur à découvrir une mise en scène singulière, des choix, un parti pris. Il peut donc être intéressant, en

amont de la représentation, de lire avec les élèves le texte écrit par Éric Massé pour Tartuffe, nouvelle ère afin d’observer

ensemble quel est son projet et de commencer à émettre des hypothèses quant au spectacle auquel ils assisteront.

B) À partir du projet de scénographie

On peut réfléchir avec les élèves à partir de ce qu’écrit Éric Massé sur le dispositif scénique qu’il souhaite mettre

en place dans son spectacle. Voici un extrait du dossier artistique de la Cie des Lumas parlant de la scénographie :

C’est, sous un dispositif scénique en lévitation, à la fois poétique et menaçant – s’inspirant des

suspensions propres aux « salles des pendus » – que cette tragi-comédie se joue.

L’espace du plateau, d’abord vide, est ainsi surplombé d’un dispositif suspendu à 3 mètres de hauteur :

cloisons, lustre, meubles, dont la célèbre table… sous laquelle Orgon se cache pendant que Tartuffe

« entreprend sa femme ».

Les cloisons qui descendent des cintres, au fur et à mesure que Tartuffe resserre son emprise sur la

famille, sont recouvertes d’extraits du tableau The Triumph of light over Darkness du peintre Franz Matsch.

Cette bataille qu’on entrevoit entre le désir de lumière (savoir et justice) et la violence de l’obscurité

(obscurantisme) traverse la pièce et offre aux spectateurs à la fois un cadre bourgeois où se déroule la pièce

et son cadre spirituel et religieux.

Ces éléments « flottants » descendront peu à peu sur scène, parfaitement ordonnés au début, pour aller

vers un désordre visuel semblable au chaos familial.

Voici une photographie du plateau prise lors des répétitions du spectacle :

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* THEATRE ET SPECTACLE VIVANT TARTUFFE, NOUVELLE ÈRE – Éric MASSÉ 2017

Voici quelques sources d’inspiration ayant servi à la conception du dispositif scénique :

Mobilier suspendu

Dans les mines ont suspendaient les vêtements des mineurs par des filins au plafond.

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V. VERS LA REPRÉSENTATION : PHOTOGRAPHIES

Les photographies peuvent être des éléments importants pour faire naître une certaine curiosité chez les élèves.

Elles peuvent également constituer le point de départ d’une formulation d’hypothèses et d’horizons d’attente en tant que

« futurs spectateurs ». Voici donc des clichés du spectacle qui pourront être commentés avec les élèves en amont de la

représentation (crédits : Jean-Louis Fernandez / Décembre 2016-Janvier 2017) :

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ANNEXES

ANNEXE 1 : La Distribution du spectacle

TARTUFFE – NOUVELLE ÈRE Molière | Éric Massé

Compagnie des Lumas

Texte : Molière

Mise en scène : Éric Massé

Jeu : Léo Bianchi (Damis), Angélique Clairand (Dorine), Pierre-François Garel (Tartuffe / M. Loyal), Iannis

Haillet (Cléante), Simon Lambert-Bilinski (Laurent), Clément Lefebvre (Valère), Laurent Meininger (Orgon),

Mireille Mossé (Mme Pernelle), Sarah Pasquier (Elmire), Edith Proust (Marianne) et la voix de Richard Brunel

(l’Exempt).

Scénographie : Éric Massé, accompagné de Didier Raymond « Les Constructeurs »

Collaboration artistique : Hervé Dartiguelongue

Costumes : Pierre Canitrot

Création sonore : Wilfrid Haberey

Création lumière : Yoann Tivoli

Régie générale : Simon Lambert-Bilinski

Coproduction : Compagnie des Lumas / Comédie de Valence – CDN Drôme Ardèche / Scène nationale 61

Alençon, Flers, Mortagne au Perche / Comédie de Picardie / Théâtre de Cusset / Théâtre de la Renaissance

– Oullins Lyon Métropole / Théâtre du Parc – Andrézieux-Bouthéon

Avec la participation artistique du Jeune Théâtre National et du GEIQ-Compagnonnage-Théâtre

Avec le soutien de la SPEDIDAM

Durée estimée : 2h10

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ANNEXE 2 : Date de tournée 2017

- Du 17 au 21 janvier 2017 : La Renaissance, Oullins Lyon Métropole

- Du 24 au 28 janvier 2017 : La Comédie de Valence, CDN Drôme-Ardèche

- Du 07 au 09 février 2017 : Scène Nationale 61, Alençon

- 15 et 16 février 2017 : Romans Scènes, Romans-sur-Isère

- 09 mars 2017 : Théâtre d’Abbeville (en partenariat avec la Comédie de Picardie)

- 16 et 17 mars 2017 : Théâtre du Parc, Andrézieux-Bouthéon

- 21 mars 2017 : Accès Soirs, Riom

- 23 mars 2017 : Théâtre de Cusset

- 28 mars 2017 : Le Théâtre, Scène nationale de Narbonne

- …

ANNEXE 3 : Liens

- Site de la Compagnie des Lumas : http://www.cie-lumas.fr/

- Texte de Molière : https://fr.wikisource.org/wiki/Tartuffe_ou_l%E2%80%99Imposteur

- Liste des principales mises en scène de la pièce de Molière : http://www.lesarchivesduspectacle.net/?IDX_Oeuvre=126

- Vidéo (Éric Massé parle de sa création.) : https://vimeo.com/165998667

- Vidéo (Quelques images du spectacle) : https://www.youtube.com/watch?time_continue=7&v=ckwi5snVOm8

- La captation intégrale de la mise en scène de Benoît Lambert (uniquement disponible jusqu’au 15/04/2017) :

http://culturebox.francetvinfo.fr/theatre/theatre-classique/tartuffe-ou-l-imposteur-par-benoit-lambert-237587

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ANNEXE 4 : Note d’intention (extrait du dossier artistique de la Cie des Lumas)

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ANNEXE 5 : Deux scènes de Molière

Le Tartuffe ou l’Imposteur, Molière, Acte I, scène 1, 1669

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Le Tartuffe ou l’Imposteur, Molière, Acte III, scène 2, 1669

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Dossiers pédagogiques

Délégation Académique à l’Action Culturelle de l’Académie de Caen

http://www.discip.ac-caen.fr/aca/

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–SOMMAIRE–

Deuxième partie : après la représentation

I. Se souvenir et réagir p.2

II. Écrire p.4

III. Enrichir et prolonger p.6

Annexe Photographies du spectacle p.8

« Pièces à vivre » : une série de dossiers pédagogiques conçus en partenariat par la Délégation Académique à

l’Action Culturelle de l’Académie de Caen et les structures théâtrales de l’académie à l’occasion de spectacles accueillis

ou créés en Région Basse-Normandie.

Le théâtre est vivant, il est créé, produit, accueilli souvent bien près des établissements scolaires ; les dossiers

« Pièces à vivre », construits par des enseignants en collaboration étroite avec l’équipe de création, visent à fournir aux

professeurs des ressources pour exploiter au mieux en classe un spectacle vu. Divisés en deux parties, destinées l’une

à préparer le spectacle en amont, l’autre à analyser la représentation, ils proposent un ensemble de pistes que les

enseignants peuvent utiliser intégralement ou partiellement.

Retrouvez ce dossier, ainsi que d’autres de la même collection et des ressources pour l’enseignement du théâtre sur

le site de la Délégation Académique à l’action Culturelle de l’Académie de Caen :

http://www.discip.ac-caen.fr/aca/

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I. SE SOUVENIR ET RÉAGIR

A) La description chorale

Une des premières étapes après le spectacle peut être de mobiliser les souvenirs des élèves-spectateurs. Avec

des élèves n'ayant pas une grande habitude du théâtre, c'est une étape particulièrement importante, car devenir

spectateur s'apprend, notamment en revenant ensemble sur leur réception du spectacle vu. Il apparaît donc vraiment

nécessaire d’accorder un temps de réflexion puis de parole aux élèves pour qu’ils fassent le point sur :

- ce qui a été compris (ou non compris) du spectacle (du point de vue de la fable mais également de la mise en

scène) ;

- ce qui a été ressenti lors du spectacle (être capable de mettre des mots sur leur(s) émotion(s) de

spectateur).

L’activité propice à ce temps d’échange pourra être « la description chorale » décrite ci-dessous. (La

présentation de cette activité est extraite de l'ouvrage Tous au théâtre, guide de l'enseignant, publié au

SCEREN-CRDP de Caen en 2012.)

« La description chorale, qui conduit à l’analyse du processus de création, est un exercice inhabituel en cours. La

parole vise ici à décrire, sans prise de position mais avec la plus grande précision ; il ne s’agit surtout pas de faire une

critique du spectacle.

La description chorale sollicite l’attention des élèves, elle leur apprend à décrire méthodiquement, elle fait travailler leur

mémoire : collectivement des moments, des images, des sons resurgissent. Les bénéfices de cet exercice sont

nombreux : apprentissage de l’oral, de la citoyenneté, enrichissement des connaissances et du vocabulaire… Il permet

de mobiliser tous les élèves d’une classe, dynamise les échanges, fait circuler la parole et renforce les compétences de

communication des élèves.

Le déroulement

La description commence par ce qui est le plus objectif : l’espace théâtral en général, l’espace de jeu et la

scénographie. Elle va des éléments d’ensemble observables par tous à des observations plus précises comme les

accessoires non liés directement au jeu des comédiens. La description aborde ensuite la lumière, le son, les costumes,

les projections, les accessoires liés au jeu, toujours avec rigueur et précision. Puis, l’échange porte sur les personnages

et le jeu des comédiens en commençant par la description des corps, des costumes, de la gestuelle, des voix. À noter

enfin que l’on ne conclut pas une description chorale, l’exercice s’arrête à la fin du temps imparti, là où en est la description.

On ne la reprend pas en classe lors d’une autre séance, mais le processus enclenché se poursuit individuellement une

fois la porte de la classe franchie… »

Pour approfondir sur la description chorale : voir la revue de l’ANRAT, Continuum, n° 01, février 2010 : « La

Transmission », et consulter le site de l’ANRAT : http://www.anrat.asso.fr/ .

On pourra donc instituer un simple échange en demandant aux élèves de formuler des questions qu’ils se sont

posées sur le spectacle. L’enseignant est bien sûr libre de « laisser la porte ouverte » à des questions assez générales.

Mais il est également possible de mener cette activité en la cadrant davantage afin d’obtenir des remarques et des

questionnements assez précis (les éléments de scénographie, la lumière, l’histoire, le jeu des acteurs…). Et ce sera à

partir de ces réflexions que le travail d’analyse pourra véritablement commencer.

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Voici un exemple possible d’organisation en plusieurs étapes :

- Dans un premier temps : simple description de ce qui se trouvait sur le plateau.

Quel est l’état du plateau au début de la représentation ? Qui sont les premiers personnages à apparaître sur scène ?

Comment se transforme le décor au fur et à mesure de l’avancement du spectacle ? Comment peut-on qualifier les

costumes des comédiens ? …

- Dans un deuxième temps : quelles images ont été données à voir et quelles émotions ont été ressenties ?

Quelles sont vos premières impressions, réactions, émotions après ce spectacle ? Quelles images vous viennent à l’esprit

quand on évoque ce spectacle ? Y a-t-il une esthétique particulière qui se dégage de cette mise en scène ? Ce spectacle

vous rappelle-t-il une autre expérience de théâtre ? une autre œuvre ? (littéraire, artistique…) …

- Dans un troisième temps : les difficultés de compréhension et les critiques éventuelles.

B) Autres activités pour « réagir » …

Pour ce travail de remémoration, puis d’analyse, on pourra également demander aux élèves de réagir à travers

différentes activités qui permettront aux élèves de dégager des effets de sens et de commencer à s’interroger sur les

partis pris de mise en scène. Voici donc quelques exemples (à adapter aux « rituels » mis en place dans le cadre d’un

parcours de spectateur – carnet de bord, journal culturel…) :

- Faire un croquis d’un moment précis du spectacle (la scénographie évoluant, l’élève devra faire des choix qu’il

justifiera.),

- Élaborer un abécédaire pour faire un premier inventaire du spectacle (là

aussi, on peut demander aux élèves de justifier leurs choix.),

- Réaliser un « nuage de mots » de façon collective, à partir des termes

formulés par les élèves pour rendre compte du spectacle (Le « nuage de

mots » est une représentation graphique de mots où les termes les plus répétés

sont les plus gros et ceux les moins répétés sont les plus petits.)

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* THEATRE ET SPECTACLE VIVANT TARTUFFE, NOUVELLE ÈRE – Éric MASSÉ 2017

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II. ÉCRIRE

On pourra également proposer aux élèves des activités d’écriture après la représentation et / ou la lecture de la pièce

de Molière. Voici quelques exemples (à adapter en fonction des compétences du collège ou du lycée) :

- Écrire une critique dramatique (sujet d’invention) : à partir de la lecture d’exemples de critiques de théâtre, on

demande aux élèves de rendre compte du spectacle et de leur avis, à la manière de ce genre particulier de texte.

(Vous pourrez trouver sur internet différentes critiques de ce spectacle, comme par exemple :

- sur le site de la revue en ligne L’Alchimie du verbe : https://alchimieduverbe.com/2017/01/21/une-satire-corrosive-dans-lair-du-temps/

- sur le blog « Les Trois Coups » : https://lestroiscoups.fr/tartuffe-nouvelle-ere-de-moliere-theatre-de-la-renaissance-a-oullins/ ).

- Rédiger « la fable » d’un personnage (sujet d’invention) : cet exercice reprend les termes de Chantal Dulibine et

Bernard Grosjean dans leur ouvrage Coups de théâtre en classe entière (SCEREN-CRDP de Créteil, 2011). La consigne

est la suivante : rédiger un récit du point de vue d’un personnage de la pièce en employant les temps du récit au passé,

à partir de ce qu’on sait de ce personnage. Ce travail a pour objectif de vérifier la compréhension des élèves, de mesurer

le poids et l’influence d’un personnage sur l’action dramatique et de « redynamiser » l’exercice du traditionnel résumé. La

fable ainsi composée pourra servir de « réservoir » à scènes inédites. On pourra en effet demander aux élèves d’écrire

ou d’improviser des scènes racontées et non montrées par l’auteur. Voici par exemple la fable du personnage de Tartuffe

(toujours empruntée à C. Dulibine, B. Grosjean et R. Monod dans le même ouvrage) :

La fable de Tartuffe

Il ne s’appelait pas Tartuffe. Il vécut longtemps de fourberies, d’actions louches et douteuses en conséquence de

quoi la police constitua sur lui un dossier chargé. Alors il disparut et reparut à Paris, dans les années 1660, sous le nom

de Tartuffe. Il se fit passer pour un provincial, noble, dévot, et ruiné par des gens sans scrupules qui avaient abusé de

son manque d’intérêt pour les biens de ce monde. C’est à l’église qu’il attira l’attention d’un homme important, M. Orgon,

par des prières et des pénitences visibles et bruyantes. Orgon s’informa auprès du valet qui l’accompagnait, Laurent, et

lui fit des dons. Tartuffe joua la comédie du refus partiel et de l’aumône ostentatoire. Enfin, M. Orgon l’installa chez lui

comme protégé, confident et maître d’austérité pour toute sa famille. À part la mère d’Orgon qui n’habitait pas la maison,

toute la famille reprochait à Tartuffe le mystère de ses origines, sa pauvreté, son physique, sa gourmandise et sa tenue

à table, ses censures à tout propos, et surtout la gouvernante Dorine insinuait qu’Orgon était quasiment amoureux de

Tartuffe et Tartuffe amoureux de la jeune (et deuxième) femme d’Orgon Elmire.

Orgon confia à Tartuffe une cassette contenant les papiers secrets d’un de ses amis, criminel d’État en fuite. Il décida

de rompre avec Valère, le prétendant de sa fille Marianne, et d’imposer à Marianne un mariage avec Tartuffe. Elmire eut

avec Tartuffe un entretien en tête-à-tête pour s’expliquer avec lui. Tartuffe crut à propos d’en profiter pour lui faire une

déclaration d’amour. Le fils d’Orgon, Damis, surprit ces propos et les dénonça à son père. Orgon n’en crut rien, et dans

un mouvement de colère, chassa et déshérita son fils. Illico, il alla signer une donation de ses biens, notamment de sa

maison, en faveur de Tartuffe. Au retour de chez le notaire, Tartuffe regagna son appartement. Il en redescendit, convoqué

par Elmire pour un nouvel entretien en tête-à-tête. Il se déclara à nouveau, mais Orgon qui assistait, caché, à l’entrevue

voulut le mettre dehors. Il sortit, menaçant. Il alla d’abord chez un huissier pour le prier d’aller signifier à la famille d’Orgon

de quitter une maison qui lui appartenait désormais à lui, Tartuffe. De là il se rendit chez le roi, dénonçant Orgon en

remettant aux mains du roi la cassette compromettante. Le roi dépêcha chez Orgon un Exempt et des gardes. Le roi pria

Tartuffe de conduire le détachement. Mais, chez Orgon, l’Exempt révéla les décisions du Prince : pardon à Orgon,

annulation de la donation en faveur de Tartuffe, arrestation de Tartuffe, identifié à un fourbe renommé. Tartuffe fut arrêté

et expédié en prison…

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- Composer une dissertation : on proposera un des deux sujets suivants aux élèves en leur précisant que le

spectacle qu’ils ont vu pourra leur servir d’exemple.

Sujet 1 : Tartuffe de Molière est-il une comédie ?

Sujet 2 : Voici ce qu’a dit Ariane Mnouchkine à propos de sa mise en scène de la pièce de Molière : « Ce spectacle prouve

également que les grandes œuvres dramatiques du passé sont aussi aptes – sinon plus – que des pièces écrites

aujourd’hui en lien direct avec l’actualité, à mettre en question le monde dans lequel nous vivons. » (Collection Théâtre

Aujourd’hui, n°10, CNDP, 2005, p.117). Vous commenterez ce propos en vous appuyant notamment sur votre expérience

de spectateur.

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III. ENRICHIR ET PROLONGER

A) Enrichir : un texte de Bertrand Leclair (qui a nourri la réflexion d’Éric Massé)

CRITIQUE DE L’IMPOSTURE, IMPOSTURE DU CRITIQUE (extrait)

de Bertrand LECLAIR

« Accepter le doute et le sentiment d’imposture car il n’est qu’un seul moyen de s’en débarrasser, hors la fuite, et c’est,

non pas de se débarrasser de l’imposture, mais de l’incarner : de devenir pleinement l’imposteur à langue de bois sur le

cadavre véreux de ses convictions. C’est que toute forme de pouvoir conduit à l’imposture, sous un ciel vide : et celui qui

l’exerce (au nom de quoi ?) et celui qui s’y plie (mais silencieusement n’en pense pas moins). Il faut ici faire un détour par

les méandres les plus évidents de la langue, et cette contamination du mot très ancien qu’est le mot d’imposture (qui vient

du latin imponere, « tromper ») par le beaucoup plus récent terme de posture, importé de l’italien pour signifier une attitude

particulière du corps ( de la voix aussi bien), une attitude peu naturelle, celle par exemple qu’il m’avait été donné de voir

mon ami adopter, au cours de ce dîner attristant, celle que se croient obligés de prendre tous les individus qui viennent

d’être nommé à un poste de pouvoir. (…)

Sur un sujet aussi large, mieux vaut partir d’un constat : je peux donner une définition de l’imposteur (celui qui s’installe

dans l’imposture, dont bien avant Sartre et les Faux-Monnayeurs de Gide, Molière a dessiné les contours dans le Tartuffe,

ou l’imposteur, puisque tel est le titre exact de la plus belle, peut-être, et la plus aboutie, certainement, de ses pièces),

mais il est impossible en amont d’en donner une de l’imposture, sauf à viser au plus large, tant en la matière le plus petit

dénominateur commun est le plus grand : l’imposture est le propre de l’homme (l’animal ignore l’imposture), en tout cas

de l’homme social, ou, plus précisément, l’imposture est le propre de l’animal parlant qu’est l’homme.

Ceci est une définition qui pourrait passer pour une règle, forte qu’elle est de ses exceptions : l’idiot, le saint (Jean de la

Croix, Gandhi sans doute, Kafka souvent, Rilke assurément lorsqu’il écrit le Chant d’amour et de mort du cornette

Christoph Rilke).

Les idiots et les saints sont gens de parole : ils sont en pleine lumière dans leur parole, et non pas à côté, comme nous

tous. Ils sont dans leur parole, ou du moins le prétendent, car les exceptions qui renforcent les règles sont choses fragiles ;

la posture d’exception dans laquelle elles se placent ne suffit pas à les faire admettre comme telles, il suffira pour seul

exemple d’en référer au personnage historique de Jésus-Christ, avec lequel en matière d’imposture il n’est pas de demi-

mesure qui tienne : il est soit l’incarnation d’une parole de vérité par essence insoupçonnable d’imposture, soit la plus

magistrale imposture dont l’histoire ait gardé la mémoire. Jésus-Christ pour le non-croyant est la figure archétypale de

l’imposteur, celui qui se fait passer pour autre que ce qu’il est, et, qui plus est, agit ainsi à rebours de tout ce qu’il professe

au seul but de s’accaparer le divin et assurer sa domination sur une communauté d’hommes serviles.

Je laisse en suspens cet exemple qui pour être banal n’est pas anodin, puisqu’il montre, d’une part, que l’imposture n’est

jamais aussi potentiellement grande que là où elle est censée n’être pas : là où elle est niée, ce que l’on peut hélas vérifier

régulièrement et plus particulièrement dans les domaines où la valeur est volatile (ainsi du milieu littéraire et, plus

généralement, de tous les milieux échappant à la vérification matérielle et indiscutable qu’offre par excellence le travail

de force) ; d’autre part, que l’imposture, qui renvoie à la notion de vérité, est une figure de l’ambivalence et qu’il faut deux

pôles au moins pour une ambivalence ; c’est peut-être le point limite auquel s’est confrontée la pièce de Molière et en

tout cas ce qui lui a valu une réception impossible à un moment historique précis, celui de la montée en puissance des

libertins, au sens que le XVIIe siècle donnait à ce terme (ceux qui se sont affranchis des lois de la religion), libertins qui

se trouvent en définitif avoir seuls ou presque défendu la pièce. »

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B) Prolonger : un groupement de textes (« le témoin caché »)

On pourra proposer aux élèves, en prolongement, de lire différents textes dramatiques mettant en scène un

« personnage caché » (à l’image d’Orgon dans l’acte IV du Tartuffe), procédé classique au théâtre. Voici donc quelques

références de scènes bien connues (liste non exhaustive…) :

- William SHAKESPEARE, Hamlet, 1603 (acte III, scène 4) : Polonius, caché derrière une tapisserie, espionne

Hamlet alors qu’il vient parler à sa mère.

- MOLIÈRE, Le Tartuffe, 1665 (acte IV, scènes 4 à 7) : Pour révéler la fourberie de Tartuffe, Elmire propose à

son mari, Orgon, de se cacher sous une table. Il entend la déclaration amoureuse de l’imposteur à sa femme et

sort de sa cachette, enfin désabusé.

- MOLIÈRE, Le Malade imaginaire, 1673 (acte III, scène 12) : Toinette, la servante d’Argan, suggère à son maître

de se faire passer pour mort afin de voir les réactions de Béline (et de la confondre, elle qui fait semblant de

l’aimer).

- Pierre CORNEILLE, L’Illusion comique, 1636 (acte III, scènes 8 et 9) : Matamore se cache quand il aperçoit

Clindor et Isabelle et écoute, dissimulé, les propos d’amour des deux jeunes gens et sort enfin de sa cachette.

- Pierre CORNEILLE, Le Cid, 1660 (acte III, scènes 3 et 4) : Rodrigue s’est introduit dans la maison de Chimène

pour lui parler une dernière fois : Elvire, une gouvernante, le cache avant que la jeune femme ne revienne.

- Jean RACINE, Britannicus, 1669 (acte II, scène 6) : Néron observe, caché, la rencontre entre Junie, qui sait

qu’il les observe, et Britannicus, qui l’ignore.

- BEAUMARCHAIS, Le Mariage de Figaro, 1784 (acte I, scènes 8 et 9) : À l’entrée du Comte Almaviva dans la

future chambre de Figaro et Suzanne, le jeune Chérubin se cache derrière un fauteuil. Quand arrive Bazile, c’est

au tour du comte de se dissimuler derrière ce fauteuil, Chérubin en profitant pour se glisser à l’intérieur de celui-

ci (recouvert à l’aide d’une robe par Suzanne). On peut également penser à plusieurs scènes de l’acte V de la

même pièce.

- Alfred de MUSSET, On ne badine pas avec l’amour, 1861 (acte III, scènes 6 à 8) : Camille fait venir son

cousin, Perdican, après avoir caché Rosette, la petite paysanne derrière un rideau. Après s'être échangé des

reproches, les deux jeunes gens se laissent aller à leur passion et tombent dans les bras l'un de l'autre. Rosette

qui a assisté à la scène meurt d'émotion.

- Edmond ROSTAND, Cyrano de Bergerac, 1897 (acte III, scène 7) : Caché dans l’ombre sous le balcon de

Roxane, Cyrano souffle à Christian ses mots, puis prend sa place et déclare à Roxane son amour, la laissant

totalement charmée par un si bel esprit qu’elle pense être celui de Christian.

- Victor HUGO, Hernani, 1830 (acte I, scène 1) ; Le Roi s’amuse, 1832 (acte II, scène 4) ; Ruy Blas, 1838

(acte II, scène 2) ; Angelo, tyran de Padoue, 1835 (2e journée, scène 5)

- Eugène LABICHE, Le Voyage de Monsieur Perrichon, 1860 (acte IV, scène 8)

- Maurice MAETERLINCK, Pelléas et Mélisande, 1893 (acte IV, scène 4)

- … et bien d’autres…

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ANNEXE

Photographies du spectacle

Voici quelques clichés (crédits : © Jean-Louis Fernandez / Décembre 2016-Janvier2017) du spectacle. Vous pouvez

en trouver d’autres dans la première partie du dossier (« Avant la représentation »).

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