texte cartel biabiany images

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Reflet, texte du cartel accompagnant l’œuvre de Minia BIABIANY lors de lexposition Jeune Création 2012 au Centquatre, Paris - http://www.miniabiabiany.com/ « In situ ». Ainsi pourrait-on qualifier le travail de Minia Biabiany. Les œuvres, comme autant de jaillissements de l’espace dans lequel elles prennent forme, découlent de la rencontre intime de l’artiste et du lieu dont elle saisit la vie cachée. Réfléchissant sur la notion d’habitat comme façon « d’être au lieu », Minia Biabiany fait émerger l’existence parallèle des endroits où elle crée: interstices des lames de parquet et moulures du plafond apparaissent alors comme autant de témoins silencieux qui peuplent l’espace. Les gestes de l’artiste deviennent la condition de possibilité de l’expression de ces interstices trop souvent oubliés : le moulage et le tissage, deux procédés récurrents dans son travail, leur donnent forme et vie, et sont la base d’une poétique contemporaine du résidu. Le choix d’une esthétique épurée maintient les œuvres à distance du geste monumental d’un artiste qui voudrait marquer à jamais l’histoire. Au contraire, les lignes conductrices qui structurent Reflet ; entre horizontales et verticales, évoquent avec simplicité les dynamiques de l’être, de l’allongé au debout, du sol au mur. Les matériaux quant à eux évoquent d’autres forces tout aussi primaires : les petites sculpture en argile, naturelles et fragiles, répondent au fer des poteaux, matériau millénaire, seul à peut-être pouvoir subsister à travers le temps. Enfin, le Fil, trace quasi invisible dont les couleurs se confondent à celles des cimaises des Ecuries; faisant ainsi de Reflet une sculpture nomade et évolutive au sein de l’espace d’exposition. Ce fil, en ce qu’il est à la fois structure et forme, se déploie de façon autotélique. Il constitue ainsi ce que l’artiste nomme « système filaire » : lorsqu’il est additionné, le fil forme la surface d’un tissu qui peut alors s’affirmer comme une paroi conférant « au lieu sa qualité d’espace ». À travers Reflet, Minia Biabiany propose au visiteur une nouvelle appréhension de l’espace hors des critères classiques d’opposition entre dedans/dehors et contenu/contenant. Elle s’attache ainsi avec subtilité à mettre en évidence l’immanence propre à chaque espace. Delphine LOPEZ Reflets, Minia BIABIANY, 2012- détail de linstallation, filins dacier, fils de lin et de coton, calque, argile crue, planche de bois, craie blanche, coton

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Page 1: Texte Cartel Biabiany images

Reflet, texte du cartel accompagnant l’œuvre de Minia BIABIANY lors de l’exposition Jeune

Création 2012 au Centquatre, Paris - http://www.miniabiabiany.com/

« In situ ». Ainsi pourrait-on qualifier le travail de Minia Biabiany. Les

œuvres, comme autant de jaillissements de l’espace dans lequel elles

prennent forme, découlent de la rencontre intime de l’artiste et du lieu dont

elle saisit la vie cachée. Réfléchissant sur la notion d’habitat comme façon

« d’être au lieu », Minia Biabiany fait émerger l’existence parallèle des

endroits où elle crée: interstices des lames de parquet et moulures du

plafond apparaissent alors comme autant de témoins silencieux qui

peuplent l’espace.

Les gestes de l’artiste deviennent la condition de possibilité de l’expression

de ces interstices trop souvent oubliés : le moulage et le tissage, deux

procédés récurrents dans son travail, leur donnent forme et vie, et sont la

base d’une poétique contemporaine du résidu. Le choix d’une esthétique

épurée maintient les œuvres à distance du geste monumental d’un artiste

qui voudrait marquer à jamais l’histoire. Au contraire, les lignes conductrices

qui structurent Reflet ; entre horizontales et verticales, évoquent avec

simplicité les dynamiques de l’être, de l’allongé au debout, du sol au mur.

Les matériaux quant à eux évoquent d’autres forces tout aussi primaires : les

petites sculpture en argile, naturelles et fragiles, répondent au fer des

poteaux, matériau millénaire, seul à peut-être pouvoir subsister à travers le

temps. Enfin, le Fil, trace quasi invisible dont les couleurs se confondent à

celles des cimaises des Ecuries; faisant ainsi de Reflet une sculpture nomade

et évolutive au sein de l’espace d’exposition. Ce fil, en ce qu’il est à la fois

structure et forme, se déploie de façon autotélique. Il constitue ainsi ce que

l’artiste nomme « système filaire » : lorsqu’il est additionné, le fil forme la

surface d’un tissu qui peut alors s’affirmer comme une paroi conférant « au

lieu sa qualité d’espace ».

À travers Reflet, Minia Biabiany propose au visiteur une nouvelle

appréhension de l’espace hors des critères classiques d’opposition entre

dedans/dehors et contenu/contenant. Elle s’attache ainsi avec subtilité à

mettre en évidence l’immanence propre à chaque espace.

Delphine LOPEZ

Reflets, Minia BIABIANY, 2012- détail de

l’installation, filins d’acier, fils de lin et de

coton, calque, argile crue, planche de bois,

craie blanche, coton

Page 2: Texte Cartel Biabiany images

Reflets, Minia BIABIANY, 2012, installation in situ au Centquatre, Paris- filins d’acier, fils de lin et de coton, calque, argile

crue, planche de bois, craie blanche, coton