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Savoir ( s ) le magazine d’information de l’UniversitĂ© de rasbourg N° 35 | fĂ©vrier 2019 #10ansUnistra UniversitĂ© de rasbourg L’audace des pionniers Recherche Ces Ă©tranges polaritons qui bouleversent la chimie Formation L’implication pĂ©dagogique rĂ©compensĂ©e Et ailleurs Eurolife : la force vitale d’un rĂ©seau europĂ©en Patrimoine L’harmonie du bĂ©ton Vivre ensemble Focus =

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Savoir(s)le magazine d’information de

l’UniversitĂ© de Strasbourg

N° 35 | février 2019

#10ansUnistra

Université de Strasbourg

L’audace des pionniers

Recherche

Ces Ă©tranges polaritons qui bouleversent la chimie

Formation

L’implication pĂ©dagogique rĂ©compensĂ©e

Et ailleurs

Eurolife : la force vitale d’un rĂ©seau europĂ©en

Patrimoine

L’harmonie du bĂ©ton

Vivre ensemble

Focus =

Page 2: Savoir - unistra.fr

Sommaire

2 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

Recherche

4 Ces Ă©tranges polaritons qui bouleversent la chimie


6 Étudier le moustique sous haute surveillance

8 Un sortilĂšge d’amour dĂ©cryptĂ© dans un papyrus

9 Les robots : nouvelle catégorie du droit ?

10 Le rĂŽle de l'ocytocine dans les liens sociaux

11 « Mettre du liant entre formation et recherche »

Formation

12 Simuler n’est pas jouer

15 Des vikings Ă  la rescousse des Ă©tudiants

16 « Se former Ă  s’informer »

17 L’implication pĂ©dagogique rĂ©compensĂ©e

= Focus Vivre ensemble

L’audace des pionniers

18 Strasbourg pionniĂšre

21 Attractivité fusionnelle

22 Une fusion en direct : « Demain, l’UniversitĂ© de Strasbourg »

23 Les grands chantiers de la fusion

25 Regards sur la nouvelle université

29 « Les donateurs ne sont pas généreux, ils sont plutÎt solidaires et responsables »

Et ailleurs

30 Une avancée mondiale sur le traitement des maladies orphelines

32 Immersion scientifique enthousiasmante en Chine

33 Eurolife : la force vitale d’un rĂ©seau europĂ©en

Patrimoine

34 L’harmonie du bĂ©ton

36 Une fille de la Guerre froide

37 La passion des modĂšles cristallographiques

38 BrĂšves

La version plurimédia de Savoir(s) sur savoirs.unistra.fr

Page 3: Savoir - unistra.fr

Savoir(s) n°35 3

L'UniversitĂ© de Strasbourg pionniĂšre. Si l’on peut reprocher Ă  cette affirmation un certain manque de modestie, il faut aussi regarder l’histoire en face et accepter que le pas franchi par les trois universitĂ©s strasbourgeoises au seuil de l’annĂ©e 2009 Ă©tait un moment historique. Il relĂ©guait au passĂ© le modĂšle des universitĂ©s disciplinaires crĂ©Ă©es aprĂšs 1968. Il ouvrait la voie Ă  une profonde restructuration du paysage de l’enseignement supĂ©rieur français, restructuration jugĂ©e nĂ©cessaire par la concurrence internationale et – bien que l’on insistĂąt moins sur ce point – devenue indispensable Ă  la science dont l’avenir Ă©tait dans la collaboration interdisciplinaire.

Pour toutes ces raisons, et pour bien d’autres encore qui sont trĂšs justement rappelĂ©es dans le focus de ce numĂ©ro, l’UniversitĂ© de Strasbourg Ă©tait pionniĂšre. Toutefois, Ă  en juger par l’étymologie mĂȘme du mot « pionnier », qui dĂ©rive de l’ancien français « peon » (piĂ©ton), elle est aussi pionniĂšre par sa constante volontĂ© de cheminer.

En 2009 dĂ©jĂ , elle avait tracĂ© le chemin qui l’a conduite aujourd’hui Ă  ĂȘtre une universitĂ© d’ « excellence » et l’un des grands pĂŽles universitaires internationaux. Elle avait compris, en le revendiquant dans son nom, que les universitĂ©s participeraient activement au dĂ©veloppement Ă©conomique et social d’une ville et d’un territoire. Elle avait misĂ© sur l’excellence de la recherche et compris le besoin de moderniser son enseignement, pour toujours vivre avec son temps.

Si l’on regarde l’histoire Ă  une Ă©chelle de temps plus large, le chemin que s’est tracĂ© l’UniversitĂ© de Strasbourg n’est pas linĂ©aire. Il a connu des ruptures, des fractures mĂȘme ; il a Ă©tĂ© Ă©maillĂ© de renaissances et de retrouvailles. À travers ces alĂ©as, le tout est de maintenir un cap. Aujourd’hui, avec une universitĂ© qui rassemble quelque 55 000 Ă©tudiants et personnels, ce cap doit ĂȘtre discutĂ© collectivement. Quelle universitĂ© voulons-nous construire ensemble pour 2030 ? C’est la question Ă  laquelle nous invitons toute notre communautĂ© Ă  rĂ©pondre dans le cadre de la grande consultation baptisĂ©e « Cap 2030 ».

Parce que, pour rester des pionniers, nous devons tous avoir envie d’avancer ensemble, dans la mĂȘme direction.

Mathieu Schneider Vice-président Culture, Sciences en société

^%e8Quelle université voulons-nous construire ensemble pour 2030 ?

Édito Être pionnier

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Savoir(s) n°35 5

Le nouveau terrain de jeu du multiprimé physicochimiste Thomas Ebbesen : les états hybrides lumiÚre-matiÚre qui naissent en cavité micro ou nanométrique, entre deux lames de métal. Cette chimie polaritonique permet de changer les propriétés de la matiÚre et ouvre un pan méconnu de cette science.

« J’ai trouvĂ© cela absolument fantastique, c’est une maniĂšre de modifier les propriĂ©tĂ©s des molĂ©cules sans les toucher, mais en les mettant dans une cavitĂ© pour contrĂŽler leur environnement Ă©lectromagnĂ©tique », raconte-t-il Ă  propos de l’article du physicien et prix Nobel Serge Haroche en 1989, sur l’électrodynamique de cavitĂ©, sa grande source d’inspiration. Celle-ci mĂȘme qui a valu Ă  Thomas Ebbesen une dĂ©couverte notoire, la transmission extraordinaire de la lumiĂšre, rĂ©compensĂ©e par le prix Kavli1 en 2014.

Une autre chimie dans les nanocavitĂ©sEn 2012, l’insatiable curieux reprend ce mĂȘme point de dĂ©part et dĂ©veloppe un autre pan, la chimie polaritonique, selon le terme qu’il a inventĂ©. Il est parvenu Ă  dĂ©montrer ce rĂȘve qu’il caressait : modif ier les propriĂ©tĂ©s des molĂ©cules grĂące Ă  l’électromagnĂ©tisme quantique, en les plaçant simplement dans une cavitĂ©. La cavitĂ© peut ĂȘtre des nanoĂ©prouvettes ou celle formĂ©e entre deux plaques de verre recouvertes d’une couche mĂ©tallique, des miroirs. Un protocole matĂ©riellement simple, facile Ă  mettre en Ɠuvre, mais le phĂ©nomĂšne est des plus complexes Ă  comprendre et expliquer ! Thomas Ebbesen et Anoop Thomas2, son doctorant qui mĂšne des expĂ©riences et Ă©crit des publications avec lui, sont les premiers Ă  le reconnaĂźtre.À l’instar de mĂ©tronomes ou de pendules qui se synchronisent lorsqu’ils sont sur un mĂȘme support en Ă©changeant de l’énergie mĂ©canique, les molĂ©cules peuvent entrer en rĂ©sonance avec

la cavitĂ© en Ă©changeant des photons virtuels (qui disparaissent aussitĂŽt formĂ©s). Il faut pour cela ajuster la taille de la cavitĂ© Ă  une longueur d’onde prĂ©cise en rapport avec la molĂ©cule. On crĂ©e ainsi deux Ă©tats hybrides lumiĂšre-matiĂšre, mĂȘme dans l’obscuritĂ©, dits « états polaritoniques ». L’équipe a montrĂ© en 2012 et 2016, que ce phĂ©nomĂšne pouvait modif ier une rĂ©action chimique, sa vitesse mais aussi son sens en favorisant un produit plutĂŽt qu’un autre. Ils ont Ă©galement rĂ©ussi Ă  « exalter » la conductivitĂ© des semi-conducteurs organiques, dont on espĂšre qu’ils pourraient un jour remplacer le silicium de nos ordinateurs. Et tout derniĂšrement, le phĂ©nomĂšne marche aussi sur les enzymes, des molĂ©cules biologiques !

« Je n’ai jamais autant Ă©tĂ© excitĂ© que par ça »Si en 2011, les Ă©diteurs des revues scientif iques Ă©taient incrĂ©dules et pensaient qu’il s’agissait de science-f iction, ils commentent aujourd’hui leurs publications par « beautiful », « unbelievable », « so exciting » « remarkable ». Thomas Ebbesen a reçu le grand prix de la fondation de la Maison de la chimie en fĂ©vrier 2018 pour ces recherches. « C’est le quatriĂšme sujet de ma carriĂšre, et je n’ai jamais autant Ă©tĂ© excitĂ© que par ça ! ». Nous sommes au dĂ©but d’une nouvelle chimie, qu’on ne soupçonnait mĂȘme pas il y a quelques annĂ©es. Et le chercheur a encore beaucoup d’idĂ©es dans ses tiroirs


Stéphanie Robert

1 Habituellement qualifié de prix Nobel des nanosciences

2 Laboratoire des nanostructures, Institut de science et d'ingénierie supramoléculaires (Isis)

En 2011 , les Ă©diteurs

des revues scientifiques pensaient qu’il s’agissait de science-fiction

.

Ces Ă©tranges polaritons qui bouleversent la chimie


1 Thomas Ebbesen et Anoop Thomas manipulant le faisceau à ions focalisé utilisé pour créer des structures optiquement raisonnantes.

Recherche

Page 6: Savoir - unistra.fr

Les virus de la dengue, de la fiĂšvre jaune, de Zika ou encore du chikungunya ont un point commun : ils peuvent tous

ĂȘtre transmis par la mĂȘme espĂšce de moustique. Aedes albopictus, plus connu sous le nom de moustique tigre, et Aedes aegypti, un de ses cousins, sont le cƓur du sujet d’étude de l’équipe RĂ©ponses antivirales chez le moustique Aedes, dirigĂ©e par Joao Marques.

ExceptĂ© pour la f iĂšvre jaune, il n’existe Ă  ce jour aucun traitement permettant de prĂ©venir ou de soigner une contamination par une des maladies transmises par les moustiques Aedes. EmpĂȘcher la transmission est le but de la recherche menĂ©e par l’équipe de Joao Marques. Pour y parvenir, les chercheurs se focalisent sur les mĂ©canismes de transmission. En donnant du sang contaminĂ© aux moustiques Ă©levĂ©s en laboratoires, ils reproduisent au plus prĂšs le mĂ©canisme naturel d’infection et en Ă©tudient toutes les phases chez les moustiques Aedes.

Tout commence dans l’intestinChez la majoritĂ© des insectes, le principal mĂ©canisme qui permet de contrĂŽler le processus d’infection par un virus s’appelle l’interfĂ©rence ARN. GrĂące Ă  elle, l’hĂŽte du virus peut limiter la zone atteinte, pour survivre le plus longtemps possible. Lors d’une contamination, le moustique est d’abord infectĂ© dans l’intestin, oĂč il digĂšre le sang absorbĂ©. En l’absence de mĂ©canisme antiviral, le virus se rĂ©plique et se propage ensuite dans le reste de l’organisme, dont les glandes salivaires qui permettent la transmission lors de la prochaine piqĂ»re. « Chez les moustiques Aedes, l’interfĂ©rence ARN fonctionne dans tout le corps sauf dans l’intestin, explique Joao Marques. C’est une des seules espĂšces de moustiques chez laquelle on constate une inhibition de ce mĂ©canisme. » Cette absence intrigue les chercheurs, qui Ă©tudient les particularitĂ©s de l’expression gĂ©nĂ©tique dans l’intestin de ce moustique, par rapport au reste de ses organes. Ils isolent alors un nouveau gĂšne, directement impliquĂ© dans le fonctionnement de l’interfĂ©rence ARN, et le baptisent « loqs2 ».

Des moustiques gĂ©nĂ©tiquement modifiĂ©s« Une fois que nous avons dĂ©couvert « loqs2 », nous avons voulu tester l’importance de son rĂŽle dans le contrĂŽle de l’infection. Nous avons alors crĂ©Ă© des moustiques gĂ©nĂ©tiquement modifiĂ©s chez lesquels

Maladies tropicales : le moustique comme dernier rempart ?

L’Insectarium, inaugurĂ© en octobre 2018, est une extension de l’Institut de biologie molĂ©culaire et cellulaire (IBMC). Portrait d’un outil de pointe dĂ©diĂ© Ă  l’étude et Ă  la comprĂ©hension des maladies transmises par le moustique.

Étudier le moustique sous haute surveillance

EmpĂȘcher la transmission est le but

de la recherche menĂ©e par l’équipe de Joao Marques.

Dans les couloirs de l’InsectariumDans une des huit salles d’élevage, notre guide du jour, Éric Marois, chercheur Inserm Ă  l’IBMC, nous montre les diffĂ©rents stades de dĂ©veloppement du moustique avec, sous nos yeux, « l’ennemi public numĂ©ro 1 » Anopheles gambiae, vecteur du paludisme.

O Une visite au cƓur d’un bĂątiment placĂ© sous haute sĂ©curitĂ© Ă 

retrouver sur le site unistra.fr rubrique Labos et Ă©quipements

6 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

⇗ Le moustique Aedes, principal sujet d’étude de l’Insectarium.

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Savoir(s) n°35 7

Jules Hoffmann, prix Nobel de médecine et de physiologie en 2011, revient sur la genÚse du projet et les enjeux de cet outil de recherche.

« C’est en 2005 environ que le projet a germĂ© de construire une annexe Ă  l’IBMC. Un nouveau bĂątiment dans lequel on pourrait, sous couvert de prĂ©cautions considĂ©rables, Ă©lever des moustiques transporteurs de maladies dangereuses et procĂ©der Ă  diffĂ©rentes expĂ©rimentations. En gĂ©nĂ©tique molĂ©culaire par exemple, l’intĂ©rĂȘt est de faire de la transgenĂšse, une technique qui permet de modif ier le gĂ©nome d’un moustique et de dĂ©terminer la responsabilitĂ© des gĂšnes dans les mĂ©canismes de transmissions. Le prix Nobel que nous avons eu en 2011 pour les travaux menĂ©s Ă  Strasbourg a certes permis d’apporter une force de persuasion quant

Ă  l’intĂ©rĂȘt de ce projet. Les connaissances sur la transmission des virus par les insectes ont depuis, Ă©normĂ©ment progressĂ© ainsi que les techniques pour les Ă©tudier. De ce fait, si certaines questions sont les mĂȘmes, on peut aujourd’hui les aborder de maniĂšres diffĂ©rentes. Ce sont des questions anciennes qui sont aujourd’hui aff inĂ©es avec des techniques beaucoup plus Ă©voluĂ©es. L’équipe de Jean-Luc Imler, ModĂšles insectes d’immunitĂ© innĂ©e (M3I) - va ĂȘtre le fer de lance des travaux de l’IBMC au sein de cette nouvelle structure. L’Insectarium est aujourd’hui un outil de pointe pour comprendre de quelle façon les pathogĂšnes comme celui du paludisme, de la dengue, du chikungunya ou encore le virus Zika, infectent les moustiques et comment ces derniers se dĂ©fendent. Des Ă©tudes essentielles pour dĂ©velopper de nouveaux moyens de lutte. »

Propos recueillis par Frédéric Zinck

ce gĂšne est exprimĂ© dans l’intestin », raconte Joao Marques. Lorsque « loqs2 » est rendu inactif dans leur organisme, les moustiques n’ont plus aucun contrĂŽle sur la propagation du virus. Ils deviennent trĂšs rapidement des vecteurs de transmission. Au contraire, lorsque le gĂšne est gĂ©nĂ©tiquement activĂ© dans l’intestin, les chercheurs constatent une bien meilleure restriction du virus Ă  cette zone. Si le virus ne s'Ă©chappe pas de l'intestin, les glandes salivaires ne sont jamais atteintes et l’insecte, bien que porteur de la maladie, ne peut pas la transmettre Ă  l’homme.

Percer le secret des mĂ©canismes antivirauxSi, d’un point de vue pratique, les moustiques gĂ©nĂ©tiquement modifiĂ©s pourraient dĂ©jĂ  servir d’outils pour rĂ©guler la transmission de maladies dans la nature, le fonctionnement exact de leurs mĂ©canismes antiviraux est encore mal compris. Pour Joao Marques, il faut « continuer Ă  creuser pour mieux

comprendre pourquoi « loqs2 » rend les moustiques plus rĂ©sistants et pourquoi seul Aedes possĂšde ce gĂšne particulier. » Des questions d’ores et dĂ©jĂ  Ă©tudiĂ©es au sein du tout nouvel Insectarium de Strasbourg.

LĂ©a Fizzala

L'Insectarium en chiffres6,02 millions d’euros

État (OpĂ©ration campus) et CNRS.

3,2 millions d’euros Programme

investissements d’avenir Equipex I2MC pour

l’équipement.

1,15 million d’euros État, RĂ©gion Grand Est,

Département du Bas-Rhin et Eurométropole de

Strasbourg pour les premiÚres années de fonctionnement.

Les trois prix Nobel Jules Hoffmann (physiologie et médecine), Jean-Pierre Sauvage (chimie), Jean-Marie-Lehn (chimie) et le président de l'université, Michel Deneken signent le ruban d'inauguration de l'Insectarium en octobre 2018.

Recherche

L'Insectarium, la nouvelle extension de l'IBMC.

Page 8: Savoir - unistra.fr

Un sortilĂšge d’amour copte vieux de plus de 1 300 ans a livrĂ© ses secrets en mai 2018, aprĂšs des annĂ©es d’efforts, Ă  Korshi Dosoo, alors enseignant Ă  l’UniversitĂ© de Strasbourg. Ce spĂ©cialiste des textes magiques coptes et de leur lien avec la religion a publiĂ© le rĂ©sultat de ses recherches dans le Journal of Coptic Studies.

L’histoire du dĂ©cryptage de cette formule magique ne date pas d’hier mais plutĂŽt de 2014. Korshi Dosoo, alors en thĂšse, dĂ©couvre un peu par hasard le papyrus copte Ă  la bibliothĂšque de l’UniversitĂ© de Macquarie, en Australie. « J’étais lĂ -bas en Ă©cole d’étĂ© pour apprendre le copte Ă  des Ă©tudiants. J’ai voulu les familiariser avec les papyrus, je me suis alors rendu dans la collection de l’universitĂ© qui en contient plus de 1 000, c’est lĂ  que je l’ai dĂ©couvert », raconte le jeune homme.

Un rituel d’amourSur le papyrus de 8,4 cm de longueur et 12 cm de large deux oiseaux symbolisant deux personnes se font face. « En faisant un parallĂšle avec d’autres papyrus, on remarque que le face-Ă -face est caractĂ©ristique d’un rituel d’amour alors que le dos Ă  dos symbolise plutĂŽt la sĂ©paration », souligne

Korshi Dosoo qui Ă©voque un texte trĂšs fragmentaire faisant probablement partie d’un plus grand ensemble.« Dessus, il y a des mots magiques Ă©quivalents Ă  « Abracadabra » qui n’ont pas de sens mais donnent un style. Ils sont suivis d’instructions pour l’offrande comme « utiliser du musc ». » Place ensuite Ă  une mention d’Adam, le premier homme et une invocation Ă  JĂ©sus Christ de donner grĂące au visage de l’apprenti jeteur de sort. JĂ©sus Christ ? Rien de surprenant pour le chercheur car nous sommes Ă  l’époque de l’Égypte chrĂ©tienne. « Le papyrus est difficile Ă  dater, mais en regardant l’écriture, on devine qu’il a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© au VIIe ou au VIIIe siĂšcle. »

Pouvoir d’attractionL’idĂ©e de la formule magique est ainsi d’apporter Ă  celui qui la rĂ©cite un pouvoir d’attraction, lui donner un certain charisme. Au-delĂ  du sortilĂšge, le papyrus donne une idĂ©e de la vision du monde des personnes de cette Ă©poque, « ça permet de voir comment ils pensaient leurs relations sociales, les crises de la vie qu’ils traversaient  »La formule fonctionne ? « Je ne l’ai pas essayĂ©e personnellement. Peut-ĂȘtre que dans mes futurs projets au sein de l'UniversitĂ© de Wurtzbourg oĂč je travaille actuellement ce serait quelque chose Ă  voir », sourit Korshi Dosoo qui prĂ©cise qu’un chercheur allemand avait testĂ© des formules Ă©crites sur des papyrus similaires il y a une trentaine d’annĂ©es, mais sans grand succĂšs


Marion Riegert

Une vingtaine de papyrus coptes magiques Ă  la BNULa BibliothĂšque nationale et universitaire conserve une collection d’environ 700 papyrus coptes acquis pour l'essentiel par deux professeurs de l'UniversitĂ© de Strasbourg Ă  l'Ă©poque allemande (f in XIXe siĂšcle). En plus des textes littĂ©raires et documentaires, il y a aussi une vingtaine de papyrus magiques dont les plus anciens datent du VIe siĂšcle. « Ce sont Ă  la fois des sorts et des formules magiques. Sans oublier des amulettes qui sont des textes de protection que les personnes portaient sur elles par exemple lorsqu’elles entreprenaient un voyage ou pour se protĂ©ger contre les maladies », souligne Esther Garel, maĂźtre de confĂ©rences en papyrologie, langue et archĂ©ologie coptes qui prĂ©cise que tous n’ont pas encore Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©s.

Un sortilĂšge d’amour dĂ©cryptĂ© dans un papyrus

8 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

Sur le papyrus de 8,4 cm de longueur et 12 cm de large deux oiseaux symbolisant deux personnes se font face.

Page 9: Savoir - unistra.fr

FrĂ©dĂ©rique Berrod, professeure de droit public Ă  l’Institut d’études politiques de Strasbourg.

Savoir(s) n°35 9

Le projet de recherche « Droit des robots et autres avatars de l’humain » a Ă©tĂ© lancĂ© il y a un an dans le cadre du levier SociĂ©tĂ©s de l’Initiative d’excellence (Idex). FrĂ©dĂ©rique Berrod, professeure de droit public Ă  l’Institut d’études politiques (IEP) de Strasbourg et co-porteure du projet*, nous en explique les tenants et les aboutissants.

Que recouvre le titre du projet ?Le titre est volontairement trĂšs large pour couvrir toutes les questions soulevĂ©es par les humains technologiquement augmentĂ©s, les robots humanoĂŻdes, les intelligences artif icielles et les personnalitĂ©s virtuelles qui sont trĂšs nouvelles. Ce sujet est devenu rĂ©current dans la presse et l’Europe s’en est emparĂ©e. Une de nos questions consiste Ă 

savoir si le droit est le meilleur instrument pour rĂ©guler toutes ces mutations. Le robot est-il une nouvelle catĂ©gorie du droit ? Il n’est plus une chose quand il peut prendre des dĂ©cisions autonomes. Doit-il pour autant ĂȘtre classĂ© comme personne ? C’est sur cette distinction entre chose et personne qu’a dĂ©butĂ© notre rĂ©flexion.Pour mener Ă  bien cette dĂ©marche, vous avez dĂ©cidĂ© d’associer plusieurs disciplines. Pourquoi ?L’interdisciplinaritĂ© s’est avĂ©rĂ©e nĂ©cessaire pour ce projet af in de confronter diffĂ©rentes mĂ©thodes de penser, diverses visions. Le droit est le point focal de l’approche pour Ă©tudier comment il apprĂ©hende les robots et comment il devrait le faire. Les sciences de l’ingĂ©nieur des systĂšmes automatisĂ©s sont convoquĂ©es pour un Ă©tat des lieux de l’actuel et des possibles et la littĂ©rature de science-f iction sert de mĂ©dium pour travailler sur les reprĂ©sentations vectrices de rĂ©flexion ou de brouillage. Nous souhaitons

ainsi travailler par rapport Ă  des rĂ©alitĂ©s et non pas par rapport Ă  des reprĂ©sentations, des sentiments.Autre levier de ce projet, la participation citoyenne. Pouvez-vous nous expliquer ?Le thĂšme des robots est trĂšs prĂ©sent dans le discours politique et social et peut donc ĂȘtre l’objet de rĂ©flexions qui associent la sociĂ©tĂ© civile. En tant que chercheurs, nous n’avons pas toutes les rĂ©ponses. Nous avons donc l’ambition de nourrir la recherche de rĂ©flexions citoyennes, en association avec la Ville de Strasbourg et l’EuromĂ©tropole. Nous souhaitons sĂ©lectionner des citoyens reprĂ©sentatifs des conseils de quartiers et des conseils de jeunes pour cheminer en commun sur ce sujet et formuler des propositions. Strasbourg est le territoire rĂȘvĂ© pour avoir ces discussions citoyennes entre l’universitĂ©, la citĂ© et l’Europe, naturellement associĂ©e Ă  ces rĂ©flexions.OĂč en est le projet aujourd’hui ?La premiĂšre Ă©tape de recherche acadĂ©mique s’est terminĂ©e dĂ©but novembre avec une journĂ©e d’études. Celle-ci a permis de dĂ©gager les reprĂ©sentations f ictionnelles du droit des robots et d’analyser les projets europĂ©ens sur le droit des robots. Une premiĂšre publication, en collaboration avec l’UniversitĂ© polytechnique des Hauts-de-France, est programmĂ©e pour le premier semestre 2019. Aujourd’hui, un jury citoyen doit ĂȘtre constitué ; des ateliers avec des experts scientif iques et des Ă©tudiants du master Communication scientif ique, Droit de l’économie numĂ©rique et Cyberjustice sont prĂ©vus, pour prĂ©parer la confĂ©rence citoyenne f inale. Ce projet doit mener Ă  des propositions Ă  destination des politiques locaux, nationaux et europĂ©ens qui s’appuieront sur la rĂ©flexion commune menĂ©e sur deux ans Ă  l’interface des disciplines qui composent le projet.

Propos recueillis par Floriane Beigbeder

*Avec Philippe Clermont, maĂźtre de confĂ©rences spĂ©cialisĂ© en littĂ©rature de science-fiction (EA 1337). Autres intervenants Ă  l’UniversitĂ© de Strasbourg : Louis NavĂ©, doctorant en droit public, Catherine Ledig, professeur spĂ©cialiste de l’économie numĂ©rique, Elsa Poupardin, maĂźtre de confĂ©rences en sciences de l’information et de la communication, et Bruno Trescher, maĂźtre de confĂ©rences HDR en droit public.

Les robots : nouvelle catégorie du droit ?

« Ce projet doit mener Ă  des propositions Ă  destination des politiques

locaux  , nationaux

locaux et

europĂ©ens  .»

Recherche

Page 10: Savoir - unistra.fr

Marcel Hibert, chercheur au Laboratoire d’innovation thĂ©rapeutique.

AprĂšs quatorze ans de recherches, le Laboratoire d’innovation thĂ©rapeutique est parvenu Ă  trouver la premiĂšre molĂ©cule capable de rĂ©tablir l’interaction sociale dans un modĂšle animal d’autisme. Une dĂ©couverte qui ouvre la voie Ă  la crĂ©ation d’un mĂ©dicament pour l’homme.

Qu’est-ce que l’amour ? C’est par cette question inhabituelle dans le domaine de la chimie et des sciences du vivant que Marcel Hibert, chercheur au Laboratoire d’innovation thĂ©rapeutique, s’est intĂ©ressĂ© aux mĂ©canismes molĂ©culaires impliquĂ©s dans ce sentiment et plus prĂ©cisĂ©ment Ă  l’ocytocine. DiffĂ©rentes Ă©tudes ont mis en Ă©vidence son rĂŽle dans le rĂ©tablissement du lien social chez les autistes, Marcel Hibert dĂ©cide lui aussi d’étendre ses recherches Ă  ce sujet.

Activer les rĂ©cepteurs de l’ocytocine dans le cerveauC’était en 2004. L’ocytocine Ă©tant une hormone chimiquement fragile, le projet du laboratoire

s’est orientĂ© vers la recherche de molĂ©cules stables, administrables par voie pĂ©riphĂ©rique, capables d’agir sur le cerveau. « Notre hypothĂšse a Ă©tĂ© la suivante : si on parvient Ă  activer les rĂ©cepteurs de l’ocytocine dans le cerveau, cela aura une action sur l’autisme. La molĂ©cule recherchĂ©e devra avoir un rĂŽle d’activateur. »Durant quatorze ans, les chercheurs strasbourgeois ont conçu des molĂ©cules testĂ©es in vitro puis sur les meilleurs modĂšles d’animaux prĂ©sentant les principaux symptĂŽmes de l’autisme

(problĂšmes d’interaction sociale, mouvements dĂ©sordonnĂ©s
). « Nous avions trouvĂ© rapidement

des molĂ©cules qui se liaient au rĂ©cepteur mais elles le bloquaient au lieu de l’activer. » En 2018, eurĂȘka. La premiĂšre molĂ©cule capable de rĂ©tablir l’interaction sociale dans ces modĂšles animaux est dĂ©couverte. « Ces rĂ©sultats valident le rĂ©cepteur de l’ocytocine comme cible thĂ©rapeutique potentielle. »

Vers la crĂ©ation d’un mĂ©dicamentUn premier pas vers la crĂ©ation d’un mĂ©dicament pour l’homme ? « Dans 90 % des cas, ce qui fonctionne chez la souris marche chez l’homme. » Mais la route est encore longue : « Nous allons vers un processus de valorisation. Il reste Ă  optimiser cette premiĂšre molĂ©cule puis Ă  dĂ©montrer son efficacitĂ© chez les patients. » Un travail qui devrait prendre huit Ă  dix ans.« Ma mission va s’arrĂȘter Ă  trouver un candidat mĂ©dicament et dĂ©poser un brevet », souligne Marcel Hibert qui va prof iter de cette dĂ©couverte pour poursuivre ses investigations sur les mĂ©canismes en jeu dans le lien affectif. « Les rĂ©sultats expĂ©rimentaux laissent penser que cette molĂ©cule pourrait aider toute personne qui souffre de problĂšmes dans les relations sociales comme l’anorexie, le bĂ©gaiement  » L’amour n’a pas f ini de faire courir notre chimiste.

M. R.

De l’ocytocine Ă  l’autisme, il n’y a eu qu’un pasTout commence dans les annĂ©es 2000. « Il n’y avait aucune Ă©tude biologique dans le domaine de l’amour. Un thĂšme impossible Ă  aborder jusqu’à une publication de chercheurs amĂ©ricains montrant que l’ocytocine Ă©tait impliquĂ©e dans divers comportements d’attachement chez l’animal. Dans une mĂȘme espĂšce, certains gĂšnes les prĂ©disposaient Ă  ĂȘtre fidĂšles et parents attentifs, d’autres Ă  ĂȘtre polygames », raconte Marcel Hibert. En poursuivant leurs Ă©tudes, les chercheurs se sont rendu compte qu’un animal privĂ© d’ocytocine Ă  la naissance prĂ©sentait un comportement asocial. Le parallĂšle a rapidement Ă©tĂ© fait avec l’autisme. « Des chercheurs ont fait inhaler de l’ocytocine Ă  des personnes autistes et ont constatĂ© que cela avait un impact positif sur leurs interactions sociales. »

Le rĂŽle clĂ© de l’ocytocine dans les liens sociaux

« Il reste Ă  optimiser cette premiĂšre

molĂ©cule puis Ă  dĂ©montrer son efficacitĂ© chez les patients. »

10 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

↑ Formule chimique de la molĂ©cule d'ocytocine..

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Catherine Florentz, vice-présidente Recherche et formation doctorale.

Savoir(s) n°35 11

Sur le modĂšle anglo-saxon des graduate schools, les Écoles universitaires de recherche (EUR) ont fait leur premiĂšre rentrĂ©e. Catherine Florentz, vice-prĂ©sidente Recherche et formation doctorale, en explique les particularitĂ©s.

Il y a dix ans, au moment de la fusion, il a Ă©tĂ© nĂ©cessaire, pour « voir clair dans le paysage », de sĂ©parer les composantes et les unitĂ©s de recherche. Mais les investissements d’avenir, mis en place en 2011, ont permis de f inancer Ă  Strasbourg, sur le long terme, onze laboratoires d’excellence. Il est devenu progressivement Ă©vident qu’il fallait remettre plus de liant entre la recherche et la formation.

L’appel d’offres national, lancĂ© f in 2016 par l’Agence nationale de la recherche, correspondait exactement Ă  ce que l’Unistra souhaitait mettre en place pour atteindre cet objectif. Nous avons lancĂ© un appel Ă  candidatures pour dĂ©crocher ce f inancement national et crĂ©er des EUR. Quatre dossiers ont Ă©tĂ© retenus, portĂ©s par des consortiums d’équipes pluridisciplinaires de recherche en chimie supramolĂ©culaire, biologie molĂ©culaire et cellulaire intĂ©grative, nanoscience-physique quantique et approche de la douleur. Strasbourg est aussi membre d’une EUR nationale en dĂ©mographie.Ce qui est spĂ©cif ique aux EUR, c’est la continuitĂ© des parcours
L’EUR Ă©tablit une continuitĂ© du master Ă  l’insertion professionnelle. DĂšs le master 1, on y travaille sur projets. Il y rĂšgne une grande libertĂ© d’innovation pĂ©dagogique. La formule s’adresse Ă  un petit nombre d’étudiants, trĂšs accompagnĂ©s, ce qui lui donne une grande attractivitĂ© internationale.

Mais il ne s’agit pas de produire des Ă©tudiants « à part » ou isolĂ©s : l’intĂ©gration est harmonieuse et ils participent aux cours de master avec les autres.Quels sont les impacts attendus ?La politique de l’UniversitĂ© de Strasbourg vise Ă  Ă©tablir des liens, partout oĂč c’est possible, entre formation et recherche. Cette mise en place d’instituts interdisciplinaires permet de faire ressortir des thĂ©matiques fortes de site. On procĂ©dera Ă  l’évaluation des EUR aprĂšs cinq annĂ©es de fonctionnement. L’enjeu sera de dĂ©terminer en quoi elles enrichissent les composantes et comment elles participent au rayonnement international de l’universitĂ©.

Propos recueillis par Myriam Niss

ExpĂ©rimenter, innoverEuridol s’appuie sur un consortium de douze Ă©quipes de recherche. Cette EUR dĂ©diĂ©e Ă  l’approche de la douleur constitue un modĂšle d’interdisciplinarité : les neurosciences sont au centre mais s’élargissent aux aspects mĂ©dicaux, pharmacologiques et sociĂ©taux. Pierre Veinante (Institut des neurosciences cellulaires et intĂ©gratives) souligne qu’Euridol ouvre « des pratiques pĂ©dagogiques inĂ©dites ». Quelques illustrations : une nouvelle unitĂ© d’enseignement, intitulĂ©e Expression of pain, s’appuie sur un travail photographique pour dĂ©crire la douleur. Les Ă©tudiants de M1 sont incitĂ©s Ă  publier dans des journaux de vulgarisation scientif ique, ont une ouverture aux aspects Ă©thiques et aux sciences humaines, ou encore se servent de vidĂ©os pour visualiser des expĂ©riences scientif iques et ont des contacts avec des associations de patients ou des personnels hospitaliers
 « L’an prochain, le M2 s’articulera autour de « la douleur vue par » diffĂ©rents protagonistes, mĂ©decins, sociologues, chercheurs, infirmiĂšres
 Cette approche serait adaptable Ă  d’autres formations  »

O Retrouvez les portraits des quatre EUR de l’Unistra : CSC-IGS, Chemistry

of Complex Systems - Euridol : Graduate School of Pain - IMCBio : Integrative

Molecular and Cellular Biology, QMat - Quantum Science and Nanomaterials sur

recherche.unistra.fr

« Mettre du liant entre formation et recherche » « Il y rĂšgne

une grande libertĂ© d’innovation

pĂ©dagogique  .»

Recherche

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Savoir(s) n°35 13

Les facultĂ©s de mĂ©decine et et de chirurgie dentaire disposent chacune d’outils de simulation au service d’une pĂ©dagogie active et innovante. Il s’agit pour les Ă©tudiants de maĂźtriser des gestes techniques et de se confronter Ă  des situations rares et souvent critiques sous l’égide d’un mĂȘme slogan : « Jamais la premiĂšre fois sur un patient ».

MaĂźtriser l’imprĂ©vu« Il y a bien sĂ»r toujours une premiĂšre fois oĂč l’étudiant est confrontĂ© au patient », rappellent Pierre Vidailhet et Gilles Mahoudeau, respectivement directeurs universitaire et mĂ©dical de l’UnitĂ© de simulation europĂ©enne en santĂ© (Unisimes) de la FacultĂ© de mĂ©decine de Strasbourg. « L’activitĂ© de cette unitĂ© est une Ă©tape supplĂ©mentaire entre les cours en amphithĂ©Ăątre et le stage en milieu hospitalier. Une Ă©tape oĂč l’étudiant est prĂ©parĂ© au terrain de maniĂšre accompagnĂ©e et rĂ©flexive », ajoutent-ils.La simulation existait dĂ©jĂ  au sein des formations mĂ©dicales mais de maniĂšre Ă©parse. La crĂ©ation d’Unisimes, il y a six ans, a permis de fĂ©dĂ©rer les forces existantes et d’ĂȘtre plus performant. Dans une premiĂšre salle, c’est un cabinet de consultation qui est reconstituĂ©. Dans une autre salle se trouve un mannequin haute-f idĂ©litĂ© allongĂ© sur une table de soins. Ce dernier est manipulĂ© par les Ă©tudiants et pilotĂ© Ă  distance - voix, rythme cardiaque, tension
 - par un formateur. Les espaces se succĂšdent dans ce bĂątiment de deux Ă©tages situĂ© au cƓur du Centre hospitalo-universitaire de Strasbourg. Les simulations vont du geste technique, en passant par les jeux de rĂŽles, les serious games, ou encore la simulation pleine Ă©chelle. « Ici, c’est l’ensemble de l’équipe mĂ©dicale qui entre en jeu : le mĂ©decin, l’infirmier, l’aide-soignant, le chirurgien
 Il s’agit alors d’analyser le travail en Ă©quipe, la communication, la rĂ©partition des tĂąches », explique Gilles Mahoudeau.

Chacun est amenĂ© Ă  incarner son vrai rĂŽlePlus de 5 000 personnes sont formĂ©es chaque annĂ©e dans cette unitĂ©, dont 20 % en formation continue. Tous les Ă©tudiants de mĂ©decine Ă  partir de la deuxiĂšme annĂ©e passent par le jeu de la simulation. « Chacun est amenĂ© Ă  incarner son vrai rĂŽle. Pour certains exercices, nous faisons appel Ă  des comĂ©diens pour tenir le rĂŽle des patients. L’ensemble de ces situations permet Ă  l’étudiant d’acquĂ©rir des compĂ©tences de terrain et surtout de se rendre compte de ce qu’il ne sait pas », insiste Pierre Vidailhet. Certains scĂ©narios, comme l’ensemble du protocole liĂ© Ă  des gestes opĂ©ratoires, sont trĂšs Ă©crits. Pour d’autres, quelques lignes dĂ©crivent la situation comme c’est le cas pour l’annonce d’un diagnostic grave. « Le plus important dans l’ensemble des simulations reste le dĂ©briefing qui est systĂ©matiquement programmĂ©. Un moment oĂč il est primordial de rĂ©ussir Ă  dĂ©terminer et

Simuler n’est pas jouer

« L’ensemble de ces situations permet Ă  l’étudiant de se

rendre compte de ce qu’il ne sait pas

. »

← Des Ă©tudiants en mĂ©decine dans l'une des salles de l'unitĂ© de simulation.

→ De gauche Ă  droite : Victor Gasia, ingĂ©nieur d’exploitation, Pierre Vidailhet, directeur universitaire et Gilles Mahoudeau directeur mĂ©dical de l’UnitĂ© de simulation europĂ©enne en santĂ© (Unisimes).

Formation

Page 14: Savoir - unistra.fr

comprendre les processus qui ont permis d’aboutir Ă  une situation donnĂ©e. », commente Pierre Vidailhet. Pour les futurs mĂ©decins et spĂ©cialistes, il s’agit en dĂ©f initive d’acquĂ©rir toutes les compĂ©tences nĂ©cessaires pour maĂźtriser au mieux l’imprĂ©vu.

Une expĂ©rience au service du patientLa simulation est une pratique courante dans les facultĂ©s de chirurgie dentaire. Celle de Strasbourg dispose dĂ©jĂ  d’une salle de « fantĂŽmes » pour simuler les soins conservateurs et prothĂ©tiques et d’un training center d’implantologie. « La crĂ©ation de l’unitĂ© de simulation clinique et radiologique, inaugurĂ©e en septembre dernier et unique en France, est une continuitĂ© dans ce travail dĂ©jĂ  bien engagé », explique Corinne TaddĂ©i-Gross, doyen de la FacultĂ© de chirurgie dentaire. Les Ă©tudiants se trouvaient confrontĂ©s Ă  leur premiĂšre consultation avec un patient encadrĂ© par des praticiens Ă  partir de la quatriĂšme annĂ©e seulement. Avec cette salle, ils sont en situation dĂšs la deuxiĂšme annĂ©e permettant ainsi une articulation plus eff icace entre le prĂ©clinique et le clinique.

AcquĂ©rir de l’expĂ©rience et de l’assuranceQuatre fauteuils dentaires Ă©quipĂ©s avec des tĂȘtes de mannequins recrĂ©ent ainsi un environnement de consultation ressemblant Ă  la rĂ©alitĂ©. Le crĂąne de ces mannequins est en os reconstituĂ©. Les radios qui sont faites sont ainsi Ă  l’image de la rĂ©alitĂ©, dans le geste comme dans le rĂ©sultat f inal. Ce dispositif permet Ă©galement de faire des prises d’empreintes dentaires. « Une rĂ©elle Ă©conomie en termes de temps mĂ©dical d’apprentissage et aussi de matĂ©riaux. C’est gagnant-gagnant, pour le confort du patient et celui de l’étudiant », insiste Corinne TaddĂ©i-Gross. Dans cette unitĂ©, on retrouve surtout un mannequin haute-f idĂ©litĂ© capable de converser, de ressentir des Ă©motions, d’ĂȘtre dans une situation de crise. LĂ  aussi c’est un formateur qui commande le mannequin depuis un centre de contrĂŽle. Les scĂ©narios sont Ă©volutifs et permettent d’aborder des cas simples comme des cas plus complexes. Le tout est f ilmĂ© en direct pour l’analyser en f in de sĂ©ance. « L’étudiant s’entraĂźne ainsi pendant deux ans en prĂ©clinique et se retrouve en face du patient Ă  partir de la quatriĂšme annĂ©e avec une solide expĂ©rience. Il acquiert aussi de l’assurance, qu’il peut directement mettre au service du patient », argumente Corinne TaddĂ©i-Gross.

F. Z.

Les Ă©tudiants en chirurgie dentaire en situation clinique.

Travail en groupe des étudiants en médecine.

14 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

Page 15: Savoir - unistra.fr

Savoir(s) n°35 15

Convoquer des vikings pour aider les Ă©tudiants Ă  mieux connaĂźtre leur environnement universitaire ? Cette idĂ©e, saugrenue en apparence, est au cƓur d’une websĂ©rie Ă©crite et rĂ©alisĂ©e par et pour les Ă©tudiants de l’UniversitĂ© de Strasbourg. L’Institut de dĂ©veloppement et d’innovation pĂ©dagogiques (Idip) est Ă  l’initiative de ce projet original qui vise Ă  amĂ©liorer la rĂ©ussite Ă©tudiante.

« Nous avons basĂ© notre projet sur une enquĂȘte menĂ©e par Espace avenir* auprĂšs des Ă©tudiants de l’établissement. L’une des questions posĂ©es portait sur leur connaissance des diffĂ©rentes structures administratives et des diffĂ©rents services qui leur Ă©taient proposĂ©s. Les rĂ©sultats semblaient indiquer un lien significatif entre la bonne connaissance de leur environnement par les Ă©tudiants et leur taux de rĂ©ussite » explique Alexandra Delaunay, chargĂ©e de projets au sein du PĂŽle d’appui Ă  la rĂ©ussite Ă©tudiante de l’Idip.

Outre les questions d’innovation pĂ©dagogique et la formation des enseignants, l’Idip a en effet Ă©galement pour mission d’Ɠuvrer au dĂ©veloppement de la rĂ©ussite Ă©tudiante. « Jusqu’à prĂ©sent nous avions surtout ciblĂ© l’apprentissage de maniĂšre gĂ©nĂ©rale, par le biais d’un cours en ligne sur la prise de notes ou d’ateliers de mĂ©thodologie du travail universitaire » prĂ©cise Alexandra Delaunay. « L’enquĂȘte d’Espace avenir nous a donnĂ© de nouvelles pistes d’actions pour favoriser la rĂ©ussite des Ă©tudiants, en leur faisant dĂ©couvrir les diffĂ©rents services mis Ă  leur disposition ».

Des vikings tout droit sortis de l’imagination des Ă©tudiantsPour mener Ă  bien ce projet, l’Idip s’est tournĂ© vers les Ă©tudiants, public concernĂ© en premier lieu. L’idĂ©e d’une « websĂ©rie », sĂ©rie de courtes vidĂ©os diffusĂ©es sur le web, est ainsi venue d’un panel d’étudiants rĂ©unis lors d’un atelier de crĂ©ativitĂ©. Le scĂ©nario a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© en 48 heures lors du « hackathon scĂ©naristique » auquel 26 Ă©tudiants de toutes filiĂšres ont pris part. Enfin, seize Ă©tudiants ont participĂ©, en tant que stagiaires, au tournage organisĂ© par une sociĂ©tĂ© de production professionnelle.

Ainsi est nĂ©e GalĂšres Vikings, histoire oĂč Ragnard le guerrier, Kaalv le sorcier et Aasveig la princesse rencontrent AmĂ©lie, Ă©tudiante de l’UniversitĂ© de Strasbourg. Leurs pĂ©ripĂ©ties sur le campus leur donnent Ă  connaĂźtre l’ensemble des structures administratives avec lesquelles les Ă©tudiants sont en interaction et les services qu’elles leur offrent.

Les sept Ă©pisodes de la websĂ©rie, au format court et amusant, ont Ă©tĂ© diffusĂ©s sur le site web de l’universitĂ©, sur Youtube et les rĂ©seaux sociaux, recueillant une bonne visibilitĂ© et des retours positifs. L’Idip n’entend pas en rester lĂ  : « Au premier semestre 2019 nous allons lancer une Ă©tude exploratoire sur les difficultĂ©s rencontrĂ©es par les nĂ©o-bacheliers Ă  l’universitĂ©. Nous comptons nous baser sur ses rĂ©sultats pour orienter nos prochaines actions ».

Edern Appéré

O L'intégrale de la série est à voir sur galeresvikings.unistra.fr

* Espace avenir est le service d’information et d’orientation de l’UniversitĂ© de Strasbourg.

Des vikings Ă  la rescousse des Ă©tudiants

«  Favoriser la rĂ©ussite

des étudiants, en leur faisant découvrir les différents

services mis Ă 

leur disposition »

Formation sur le terrainSeize Ă©tudiants de l’universitĂ© dont plusieurs issus de la licence Arts du spectacle - option CinĂ©ma ont Ă©tĂ© impliquĂ© dans le tournage en occupant diffĂ©rents postes : assistant son, assistant lumiĂšre, rĂ©gisseur, assistant camĂ©ra, etc. Pour Camille, qui a officiĂ© en tant que scripte, « le tournage a Ă©tĂ© un moment intense. Il y avait une trĂšs bonne ambiance sur le plateau, des moments de rires mais le rĂ©alisateur savait impulser une dynamique de sĂ©rieux et de travail. Les professionnels se sont beaucoup impliquĂ©s pour nous former et nous ont confiĂ© beaucoup de responsabilitĂ©s. C’était trĂšs enrichissant ! ».

Formation

Page 16: Savoir - unistra.fr

Enjeu de notre siĂšcle, l’information est partout, accessible non plus seulement via les mĂ©dias traditionnels, mais aussi via les rĂ©seaux sociaux, les sites d’information ou encore les blogs et forums. De cette profusion naĂźt le besoin grandissant d’outils et de mĂ©thodes pour utiliser l’information de maniĂšre judicieuse. Un besoin que souhaite combler le Service des bibliothĂšques.

Le service coordonne un rĂ©seau de 54 bibliothĂ©caires-formateurs qui assurent prĂšs de 1 600 heures de formation chaque annĂ©e dans les diffĂ©rentes composantes. L’objectif ? Sensibiliser les Ă©tudiants Ă  l'importance qu'ils doivent accorder, dans leurs travaux universitaires et dans la vie en gĂ©nĂ©ral, Ă  la fiabilitĂ© de l'information ; puis leur transmettre les compĂ©tences nĂ©cessaires pour bien rechercher. « Un des premiers enjeux de la formation est de convaincre les Ă©tudiants qu'apprendre Ă  chercher est indispensable, explique Damien Laplanche, responsable du service Formation, qu’il ne suffit pas de taper quelques mots dans un moteur de recherche. Nous leur faisons ensuite dĂ©couvrir la richesse des ressources qualitatives mises Ă  leur disposition par l’universitĂ©, les outils pour les trouver

ainsi que les bonnes pratiques pour les utiliser ou les citer dans leurs travaux. »

Des Ă©tudiants « extrĂȘmement reconnaissants »Ces formations, qui s'inscrivent pleinement dans le socle des compĂ©tences transversales Ă  l'universitĂ©, se dĂ©roulent principalement dans les cursus selon les partenariats nouĂ©s avec les composantes. « Les Ă©tudiants sont extrĂȘmement reconnaissants, raconte Marie-Jo Thiel, professeure des universitĂ©s et responsable du master Éthique, elle leur permet de dĂ©couvrir un riche patrimoine et les rend fiers d’appartenir Ă  l’UniversitĂ© de Strasbourg. Cela se ressent dans leurs mĂ©moires, mais aussi en cours, c’est magnifique ! »

La formation documentaire monte en puissance : toujours plus de bibliothécaires-formateurs mobilisés, de composantes et de formations impliquées. De nombreuses collaborations ont également été mises en place avec la BibliothÚque nationale et universitaire (BNU) et les autres partenaires du site alsacien. Le Service des bibliothÚques est ainsi devenu un acteur incontournable de la formation des étudiants aux compétences informationnelles. Il a déjà dispensé des formations à plus de 10 500 étudiants cette année.

Mathilde Hubert

1 École nationale supĂ©rieure des sciences de l’information et des bibliothĂšques.2 Ce projet de labellisation a Ă©tĂ© menĂ© dans le cadre du volet documentaire du contrat de site 2013-2017, signĂ© entre quatre Ă©tablissements alsaciens d’enseignement supĂ©rieur : UniversitĂ© de Strasbourg, UniversitĂ© de Haute-Alsace, BibliothĂšque nationale et universitaire et Institut national des sciences appliquĂ©es de Strasbourg.

« Se former Ă  s’informer »

Des formateurs labellisĂ©sLes professionnels des bibliothĂšques, en partenariat avec l’Enssib1,

sont à l’initiative d’un dispositif novateur en France : un parcours de

formation et de labellisation de leurs compétences pédagogiques2.

38 bibliothĂ©caires-formateurs de l’universitĂ© ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© labellisĂ©s.

«  Convaincre

les Ă©tudiants qu'apprendre

Ă  chercher est indispensable

. Â»

Damien Laplanche, responsable du service formation des bibliothĂšques lors d’une formation aux Ă©tudiants.

16 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

Page 17: Savoir - unistra.fr

Élisabeth Demont, vice-prĂ©sidente Ressources humaines et politique sociale.

NouveautĂ© en 2018, les Primes de reconnaissance de l’implication pĂ©dagogique (Prip) ont Ă©tĂ© remises aux quinze enseignants-chercheurs laurĂ©ats, sur la centaine de dossiers Ă©tudiĂ©s. Ces primes, une premiĂšre en France, viennent pallier le manque de reconnaissance de l’une de leurs deux missions : enseigner.

« S’il existe des dispositifs pour valoriser l’implication des enseignants-chercheurs dans la recherche, il n’en existe pas pour l’enseignement. Nous voulions que soit reconnu cet engagement exceptionnel et continu sur plusieurs annĂ©es de certains », explique Élisabeth Demont, vice-prĂ©sidente Ressources humaines et politique sociale. Avec comme cadre un article du code de l’éducation et sa circulaire de 2017, la Prip a Ă©tĂ© approuvĂ©e

par le conseil d’administration en mars 2018. GrĂące Ă  un financement Idex (Initiative d’excellence), quinze primes de 8 000 euros ont pu ĂȘtre attribuĂ©es.

Les candidats devaient expliciter et dĂ©montrer leur investissement, par exemple Ă  travers une dĂ©marche pĂ©dagogique pertinente et ambitieuse, des dispositifs d’innovation pĂ©dagogique, d’accompagnement personnalisĂ©, d’aide Ă  la rĂ©ussite et Ă  l’insertion professionnelle, l’amĂ©lioration continue des pratiques et leur diffusion, l’autoĂ©valuation


RĂ©flexivité« Nous avons remarquĂ© quatre points que partageaient les laurĂ©ats. Ils font preuve de rĂ©flexivitĂ© sur leurs pratiques pĂ©dagogiques, avec une prise de recul, une capacitĂ© de rĂ©flexion et d’examen de leurs mĂ©thodes. Ensuite, ils placent l’apprenant au cƓur du processus de formation, ils amĂšnent les Ă©tudiants Ă  s’interroger sur leurs savoir-faire et savoir-ĂȘtre, Ă  s’approprier

les apprentissages et Ă  mieux se connaĂźtre. Ils partagent et diffusent leurs bonnes pratiques avec les autres enseignants, Ă  l’intĂ©rieur ou Ă  l’extĂ©rieur de l’universitĂ©, par le biais de rĂ©unions, publications ou colloques. Enfin, ils mettent en place une Ă©valuation de leurs enseignements et mĂ©thodes, pour mesurer leur pertinence », analyse Élisabeth Demont.

Attendue par le corps enseignant, cette reconnaissance sera reconduite en fĂ©vrier 2019. Le ministĂšre de l’Enseignement supĂ©rieur va lui aussi lancer une « prime d’engagement pĂ©dagogique et de formation » Ă  partir de septembre 2019.

S.R.

L’implication pĂ©dagogique rĂ©compensĂ©e

Savoir(s) n°35 17

Les lauréats présents lors de la remise des prix en septembre dernier.

« Nous voulions que soit reconnu cet engagement

exceptionnel et continu sur plusieurs annĂ©es. »

b « Pour moi, c’est l’apprenant, son bien-ĂȘtre et sa progression qui comptent, je mets beaucoup d’énergie

pour chercher Ă  les connaĂźtre et Ă  trouver les astuces pour les faire avancer. Cela implique une expĂ©rimentation permanente, la concertation et le partage avec les collĂšgues, mais aussi la participation Ă  des rĂ©flexions nationales et internationales sur la mise en Ɠuvre pĂ©dagogique. »

Denyze Toffoli, maßtre de conférences en didactique des langues

b « Il est d’important d’avoir une rĂ©flexivitĂ© sur ses pratiques pĂ©dagogiques, pour les faire Ă©voluer et

s’adapter aux Ă©tudiants, qui sont au centre. C’est ĂȘtre dans une dĂ©marche d’amĂ©lioration continue. J’essaie aussi de faire participer les enseignants, de les fĂ©dĂ©rer autour de ces nouvelles pratiques, de valoriser les personnes qui s’impliquent. Aujourd’hui, nous avons les moyens de nous former grĂące Ă  l’Institut de dĂ©veloppement et d’innovation pĂ©dagogiques (Idip). Cette valorisation de la mission d’enseignement insuffle une dynamique positive. »

Clarisse Maechling, directrice adjointe de la Faculté de pharmacie

Formation

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des pionniersL’audace

Université de Strasbourg

#10ansUnistra= Focus

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Strasbourg pionniĂšreAlors qu’il Ă©tait Directeur gĂ©nĂ©ral de l'enseignement supĂ©rieur et de l'insertion professionnelle (DGESIP), Bernard Saint Girons a accompagnĂ© la fusion des trois universitĂ©s strasbourgeoises. Il revient ici sur le caractĂšre pionnier de la dĂ©marche.

En quoi Strasbourg a-t-elle innové en matiÚre de regroupement des universités ?

Le « cas strasbourgeois » est tout Ă  fait remarquable. C’est Ă  Strasbourg que s’est engagĂ© le premier processus de fusion des universitĂ©s, dont l’idĂ©e et la conception avaient germĂ© avant mĂȘme la loi de programme pour la recherche (2006) et la loi relative aux libertĂ©s et responsabilitĂ©s des universitĂ©s (LRU-2007). C’est le fruit d’une dĂ©marche bottom up, du bas vers le haut, qui s’inscrit dans la durĂ©e et dans la continuitĂ©

des prĂ©sidents de l’UniversitĂ© Louis-Pasteur (ULP). Car c’est clairement Strasbourg 1 qui a initiĂ© et portĂ© le processus, avec un projet fort de reconstruction. L’ULP mettait son prestige au service de toute la communautĂ© universitaire, indĂ©pendamment des lois de 2006 et 2007 et en marge des institutions. J’ai retrouvĂ© aussi dans cette dĂ©termination une volontĂ© de reconstituer l’universitĂ© unique qui avait Ă©tĂ© dĂ©mantelĂ©e en 1968.

Quelles sont les caractéristiques et la plus-value de cette université unifiée ?

L’UniversitĂ© de Strasbourg a une vision stratĂ©gique en matiĂšre d’offre de formation, de recherche et de

partenariats. Elle a Ă©galement repensĂ© son rapport Ă  la gestion. Elle porte une vision nouvelle du centre et de la pĂ©riphĂ©rie. On peut dire qu’elle n’est pas Ă  proprement parler centralisĂ©e car, si elle est dotĂ©e de services centraux communs, les composantes gardent leur autonomie au quotidien.

Par ailleurs, les approches interdisciplinaires sont plus faciles Ă  mettre en Ɠuvre dans les grandes universitĂ©s. Cela va dans le sens d’une « amĂ©lioration de l’ordinaire ». J’estime que la fusion des universitĂ©s strasbourgeoises a apportĂ© une grosse plus-value. La recherche a besoin d’ĂȘtre diffusĂ©e et cette visibilitĂ© a indĂ©niablement Ă©tĂ© renforcĂ©e. Si l’on mesure l’efficacitĂ© aux projets du Programme investissements d’avenir, Idex (Initiative d’excellence) et Labex (Laboratoire d’excellence), Strasbourg est aujourd’hui l’un des sites les plus performants, mĂȘme si cela ne s’exprime pas obligatoirement dans les classements internationaux. En ce qui concerne ces classements, Louis-Pasteur n’aurait d’ailleurs pas eu besoin de la fusion pour ĂȘtre parmi les meilleures.

Et Strasbourg a fait Ă©cole


La fusion n’est pas le seul modĂšle possible, car cela suppose un travail important et toutes les universitĂ©s n’ont pas la possibilitĂ© de l’accomplir. À Lille, par exemple, cette universitĂ© unique est encore en construction. Chaque site universitaire a son histoire propre et les expĂ©riences passĂ©es ont leurs limites. On ne peut pas tout simplement dĂ©cider de les reproduire, il faut aussi prendre en compte les rĂ©alitĂ©s du terrain, voire certains ressentiments ou encore des options politiques divergentes
 Aix-Marseille s’est reconstruite sur un modĂšle comparable Ă  Strasbourg, dans une logique mĂ©tropolitaine. Grenoble s’en rapproche Ă©galement, mais certaines composantes sont restĂ©es Ă  l’écart. L’UniversitĂ© de Lorraine, issue de

← InstantanĂ© lors de la cĂ©rĂ©monie des vƓux, premier Ă©vĂšnement de l'annĂ©e dĂ©diĂ© aux dix ans de l'Unistra.

Le 1er janvier 2009, les trois universitĂ©s strasbourgeoises, Louis-Pasteur, Robert-Schuman et Marc-Bloch, fusionnaient en une seule et mĂȘme entitĂ© : l’UniversitĂ© de Strasbourg. Un pari audacieux aujourd’hui rĂ©ussi.

Retour sur les enjeux de cette premiĂšre fusion d’universitĂ© en France et sur le travail accompli depuis dix ans, avec les nombreux acteurs engagĂ©s dans cette dĂ©marche innovante.

Savoir(s) n°35 19

« La fusion des universitĂ©s strasbourgeoises a apportĂ© une grosse

plus-value  . »

Vivre ensemble #10ansUnistra =

Bernard Saint Girons, Directeur général de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle (DGESIP) au moment de la fusion.

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En chiffres

l’histoire rĂ©gionale, regroupe les universitĂ©s de Nancy et de Metz ainsi que l’Institut Polytechnique. À Toulouse par contre, l’intĂ©gration n’a pas Ă©tĂ© trouvĂ©e et l’une des consĂ©quences est que le label Idex n’a pas Ă©tĂ© accordĂ© au site.

10 ans aprùs
 un bilan ?

La fusion a un coût, mais elle vient assurer la cohérence des investissements humains et financiers. Le Plan campus de Strasbourg en constitue un exemple

Ă©loquent. Il me semble que la rĂ©ussite d’un tel bouleversement se mesure Ă  la capacitĂ© de relais d’un prĂ©sident Ă  l’autre, Ă  l’aptitude Ă  « passer le virage ». C’est vrai, des prĂ©sidents Ă  forte personnalitĂ© sont parvenus Ă  imposer une vision. D’autres n’y sont pas arrivĂ©s. Et je dois dire que c’est Ă  la fois rassurant
 et tout de mĂȘme un peu inquiĂ©tant de savoir que des personnalitĂ©s de conviction peuvent Ă  ce point inflĂ©chir la politique !

Propos recueillis par Myriam Niss

2008 (juste avant la fusion) 2019

1

UniversitĂ© Louis-Pasteur â€“ Strasbourg I

Santé, sciences, sciences humaines

et sociales

2

UniversitĂ© Marc-Bloch – Strasbourg II

Théologie et sciences des religions, langues,

cultures et sociétés, sciences du sport

3

UniversitĂ© Robert-Schuman – Strasbourg III

Droit et études européennes, sciences

politiques, relations internationales

1

Université de Strasbourg

Droit, Ă©conomie, gestion, sciences humaines et sociales, sciences et

technologies, vie et santéPrésident :

Alain Beretz Président : Bernard Michon

Présidente : Florence Benoßt-Rohmer

Président : Michel Deneken

19 000 Ă©tudiants

dont 20 % d’étudiants Ă©trangers

12 500 Ă©tudiants

dont 25 % d’étudiants Ă©trangers

10 000 Ă©tudiants

dont 20 % d’étudiants Ă©trangers

50 822 Ă©tudiants

dont 20 % d’étudiants Ă©trangers

18 unités de formation et de recherche, facultés, écoles

d’ingĂ©nieurs et instituts

59 unités de recherches dont 4 laboratoires communs

10 composantes

20 Ă©quipes d’accueil, 2 unitĂ©s mixtes de recherche

10 composantes

8 centres de recherche

35 facultés, écoles, instituts

et unités de formation et de recherche

73 unitĂ©s de recherche et 6 structures fĂ©dĂ©ratives

1 500 enseignants-chercheurs

et 1 400 personnels

500 enseignants-chercheurs

et 400 personnels

391 enseignants-chercheurs

et 343 personnels

2 755 enseignants-

chercheurs et 2 362 personnels

20 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

Page 21: Savoir - unistra.fr

Savoir(s) n°35 21

Dix ans aprĂšs la fusion, l’UniversitĂ© de Strasbourg est-elle plus performante que les trois Ă©tablissements qui lui prĂ©existaient ? Nous avons posĂ© la question Ă  son prĂ©sident, Michel Deneken.

Si l’on se place du point de vue des Ă©tudiants, des enseignants, ou des chercheurs, en quoi la fusion de l’UniversitĂ© de Strasbourg a-t-elle changĂ© leur vie ?

Au risque de vous surprendre je dirais que ça n’a pas changĂ© grand-chose. Un Ă©tudiant choisit une filiĂšre : droit, anglais ou mĂ©decine
 Il le faisait aussi autrefois. Maintenant il est Ă©tudiant d’une seule universitĂ©. Mais au fond, ça ne modifie pas fondamentalement sa scolaritĂ©. Il en va de mĂȘme pour les enseignants-chercheurs, sauf que les disciplines se rencontrent dans les conseils, des synergies voient le jour, des idĂ©es de parcours pluridisciplinaires deviennent plus Ă©videntes
 Quant Ă  la recherche, elle travaillait dĂ©jĂ  en lien trĂšs Ă©troit avec l’enseignement. En fait, ce sont les personnels Biatss (bibliothĂšques, ingĂ©nieurs, administratifs, techniques, sociaux et santĂ©) qui ont Ă©tĂ© les plus impactĂ©s en amont et en aval de la fusion, car nous avons fusionnĂ© les services et unifiĂ© les procĂ©dures. On leur doit une part essentielle dans la rĂ©ussite de cette fusion.

Finalement quel bilan faites-vous de la fusion ?

Est-ce que c’est mieux aujourd’hui qu’avant ? Contre une certaine mode de la nostalgie, je dirais oui. L’UniversitĂ© de Strasbourg est plus lisible Ă  l’international, plus riche en disciplines, plus performante. GrĂące Ă  la fusion, nous avons Ă©tĂ© la premiĂšre universitĂ© Ă  obtenir l’IdEx (Initiative d’excellence). Par ailleurs, hasard ou pas, trois des quatre prix Nobel en exercice Ă  l’UniversitĂ© de Strasbourg ont reçu leur prix depuis la fusion des universitĂ©s. C’est symboliquement trĂšs fort.

Un des paris de la fusion concernait aussi l’ouverture de l’universitĂ© sur la citĂ©. L’avez-vous rĂ©ussi ?

Ce qui a toujours caractĂ©risĂ© le site universitaire strasbourgeois, c’est son insertion dans la ville : ne serait-ce que du point de vue de la gĂ©ographie. Mais la fusion a incontestablement confortĂ© cette immersion culturelle, scientifique et sociale tant dans la ville que dans l’Alsace en gĂ©nĂ©ral. Et bien sĂ»r, la discussion et les partenariats avec l’ensemble des collectivitĂ©s territoriales s’en sont trouvĂ©s grandement facilitĂ©s. Cela nous donne plus de facilitĂ© et d’agilitĂ©.

La fusion a-t-elle facilité la gestion de la rareté des moyens ?

D’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale je dirais qu’à chaque fois, nous avons retenu, autant que possible, le meilleur des mĂ©thodes de gestion des trois Ă©tablissements prĂ©existant Ă  la fusion. Du point de vue de la gestion des ressources humaines, nous avons systĂ©matiquement choisi le mieux disant. Dix ans aprĂšs, l’Unistra est bien gĂ©rĂ©e techniquement et politiquement, ce qui lui permet d’aller vers toujours plus d’autonomie.

Quels sont les grands projets des dix prochaines années ?

DĂ©jĂ  nous allons achever le Plan campus engagĂ© un peu avant la fusion. Nous allons multiplier les synergies entre recherche et enseignement, par exemple en crĂ©ant de nouveaux instituts, Ă©coles universitaires de recherche. Nous allons continuer d’accompagner le rapprochement ou la fusion des composantes qui le souhaitent. Et il nous faudra bien sĂ»r gĂ©rer l’augmentation de la population Ă©tudiante, trĂšs forte Ă  Strasbourg du fait de notre attractivitĂ©.

Propos recueillis par Jean de Miscault

Attractivité fusionnelle

« L’UniversitĂ© de Strasbourg est plus lisible Ă 

l’international  ,

plus riche en

disciplines , plus

performante . »

Michel Deneken, prĂ©sident de l’UniversitĂ© de Strasbourg.

Vivre ensemble #10ansUnistra =

Page 22: Savoir - unistra.fr

Alain Beretz, premier prĂ©sident de l’UniversitĂ© de Strasbourg, revient sur le processus et les enjeux reprĂ©sentĂ©s par la fusion de trois universitĂ©s en 2009.

Vous Ă©tiez prĂ©sident de l’UniversitĂ© Louis-Pasteur depuis un an au moment de la fusion. Pourquoi avoir portĂ© ce projet d’universitĂ© unique ?

Je ne l’ai pas portĂ©, j’y ai contribuĂ© ! La fusion est le produit d’une construction progressive, qui ne rĂ©sulte pas d’une politique nationale, mais qui est nĂ©e d’une convergence de convictions, et a Ă©tĂ© portĂ©e par de nombreux acteurs. Rappelons que dĂšs 1991, les trois universitĂ©s strasbourgeoises avaient dĂ©veloppĂ© des activitĂ©s communes Ă  travers le PĂŽle universitaire europĂ©en. Et c’est Ă  l’occasion de la cĂ©lĂ©bration des dix ans du PĂŽle en 2001 que les

prĂ©sidents des universitĂ©s Ă©voquent la fusion de leurs Ă©tablissements. Le travail s’est poursuivi, surtout

aprĂšs 2005, en trois phases : une premiĂšre phase d’appropriation politique, une deuxiĂšme phase de montage de projet (lors de laquelle seront abordĂ©s une soixantaine de sujets diffĂ©rents), une troisiĂšme phase de mise en Ɠuvre, qui aboutira Ă  la crĂ©ation de l’UniversitĂ© de Strasbourg au 1er janvier 2009. Il y a eu bien sĂ»r des moments difficiles, mais je garde le souvenir d’une crĂ©ativitĂ© exigeante, et surtout de la dĂ©termination et de l’engagement d’acteurs d’origines trĂšs diffĂ©rentes.

Quels ont été les premiers projets emblématiques de la fusion ?

Entre rĂ©habilitation de bĂątiments, amĂ©nagement du Campus vert et mise en place de projets emblĂ©matiques comme la Maison universitaire internationale, l’OpĂ©ration campus fut notre premier succĂšs commun. Et avec lui, l’UniversitĂ© de Strasbourg a bĂ©nĂ©ficiĂ© d’une visibilitĂ© symbolique et de l’ouverture sur la ville. S’est ajoutĂ©e Ă  cette vitrine l’émergence d’une forte identitĂ©, celle de l’Unistra, issue de la crĂ©ation d’une communautĂ© acadĂ©mique rĂ©unifiĂ©e. Une vision concrĂ©tisĂ©e par le succĂšs Ă  l’Idex (Initiative d’excellence) en 2012, avec lĂ  aussi des projets forts, animĂ©s d’une nouvelle Ă©nergie, comme l’Institut d’études avancĂ©es ou l’Institut de dĂ©veloppement et d'innovation pĂ©dagogiques.

« Demain, l’UniversitĂ© de Strasbourg », tel Ă©tait le slogan de la campagne de communication. Que reprĂ©sentait pour vous cette UniversitĂ© de Strasbourg en devenir ?

Il s’agissait avant tout de retrouver une universitĂ© pluridisciplinaire, fidĂšle Ă  notre histoire et Ă  nos valeurs, celles de l’universitĂ© humaniste rhĂ©nane de la Renaissance ou de l’universitĂ© impĂ©riale construite sur les principes du philosophe von Humboldt. En couvrant l’ensemble des champs du savoir et en Ă©tant plus visible Ă  l’international, l’UniversitĂ© de Strasbourg a relevĂ© le dĂ©fi de renforcer non seulement son excellence, et donc son attractivitĂ©, mais aussi son offre de formation. Et puis, nous avions l’ambition d’une universitĂ© repositionnĂ©e au cƓur de la citĂ© qui partage ses savoirs avec les citoyens tout en Ă©tant Ă  l’écoute des interrogations de la sociĂ©tĂ©. Mais le slogan reste valable dix ans aprĂšs ; regarder vers demain, cela doit rester la mission et l’ambition de l’Unistra.

M. H.

Une fusion en direct : « Demain, l’UniversitĂ© de Strasbourg »

◆ Septembre 2006 - fĂ©vrier 2007 : appropriation politique, qui a conduit les conseils des trois universitĂ©s Ă  approuver le principe de l'Ă©laboration d'un projet d'Ă©tablissement commun.

◆ Mars 2007 - fĂ©vrier 2008 : conception stratĂ©gique et politique, Ă©laboration du Portefeuille d’expĂ©riences et de compĂ©tences (PEC) du nouvel Ă©tablissement.

◆ Mardi 26 fĂ©vrier 2008 : les membres des conseils des universitĂ©s Louis-Pasteur, Marc-Bloch et Robert-Schuman adoptent Ă  une large majoritĂ© le projet de crĂ©ation d'une universitĂ© unique Ă  Strasbourg.

◆ Mars 2008 - avril 2009 : prĂ©paration et dĂ©marrage de la construction du projet d’établissement commun.

◆ 1er janvier 2009 : les trois universitĂ©s de Strasbourg se regroupent officiellement en un seul Ă©tablissement.

◆ Avril 2009 - septembre 2010 : intĂ©gration et consolidation du socle qui a consistĂ© Ă  expĂ©rimenter les nouvelles fonctions, Ă  mettre en place les nouveaux modes opĂ©ratoires et les nouvelles modalitĂ©s de pilotage.

Le processus de fusion en quelques dates

Alain Beretz, premier prĂ©sident de l’UniversitĂ© de Strasbourg, aujourd’hui chargĂ© d'une mission sur les universitĂ©s europĂ©ennes par le Premier ministre, Édouard Philippe.

22 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

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Savoir(s) n°35 23

L’audace de la concomitance : fusion et autonomieUn peu plus d’un an aprĂšs le vote de la loi relative aux LibertĂ©s et responsabilitĂ©s des universitĂ©s (LRU), dite loi sur l’autonomie des universitĂ©s, Ă  l’étĂ© 2007, les trois universitĂ©s strasbourgeoises et l’ex-IUFM fusionnaient en une seule universitĂ©. Or, cette loi LRU prĂ©voyait les fameuses ResponsabilitĂ©s et compĂ©tences Ă©largies (RCE). C’est-Ă -dire que les personnels, Ă  commencer par leurs fiches de paye, n’étaient plus gĂ©rĂ©s par le rectorat

mais directement par les universitĂ©s elles-mĂȘmes. « À l’époque, rappelle FrĂ©dĂ©ric Dehan, aujourd’hui directeur gĂ©nĂ©ral des services, l’inspection gĂ©nĂ©rale avait fait part de ses rĂ©serves sur cette concomitance et proposĂ© de dĂ©caler le calendrier d’application du passage aux RCE. Mais le choix politique a Ă©tĂ© de dire :

‘’On fait tout en mĂȘme temps.’’ »

Outre la paye des personnels, qui reprĂ©sente un plus de 70 % des dĂ©penses de l’universitĂ©, les RCE donnaient surtout la possibilitĂ© Ă  l’universitĂ© de gĂ©rer ses ressources humaines de façon plus autonome : concours, gestion des postes, primes
 « Dix ans aprĂšs, le pari de la concomitance est gagnĂ©, analyse FrĂ©dĂ©ric Dehan. Nous sommes l’universitĂ© française qui prĂ©sente les meilleurs ratios financiers. AprĂšs tout, il est peut-ĂȘtre prĂ©fĂ©rable de se faire opĂ©rer une seule fois que deux. Cela nous a sĂ»rement compliquĂ© la tĂąche, mais cela nous a aussi permis de raccourcir la durĂ©e du chantier. »

J.d.M.

PremiĂšre des Initiatives d’excellence (Idex)Pour mĂ©moire, les Idex, dans le cadre du Programme investissements d’avenir, visent Ă  doter la France de grandes universitĂ©s d’enseignement et de recherche capables de rivaliser avec les meilleures au monde. Le projet de l’UniversitĂ© de Strasbourg a Ă©tĂ© l’un des trois seuls Ă  ĂȘtre pĂ©rennisĂ©s parmi les huit laurĂ©ats. ClassĂ© premier Ă  l’issue de la pĂ©riode probatoire, il a Ă©tĂ© reconduit en 2016 sans limitation de durĂ©e avec un

budget de 25,6 millions d’euros par an.

« L’un des nombreux critĂšres Ă©tait la gouvernance et sa simplification, et comme nous Ă©tions la seule universitĂ© Ă  avoir dĂ©jĂ  fusionnĂ©, cela a facilitĂ© la gouvernance et le pilotage de notre projet », explique Serge Potier, vice-prĂ©sident dĂ©lĂ©guĂ© aux investissements d’avenir. « Nous souhaitions que l’Idex soit inclusive : tout projet d’excellence et d’innovation pouvait en

bĂ©nĂ©ficier, quel que soit le domaine, et pas seulement en sciences exactes, comme le craignaient certains. Cela a sans aucun doute participĂ© Ă  l’identification de la communautĂ© Ă  l’universitĂ© unique, Ă  son sentiment d’appartenance, Ă  l’acceptation de la fusion. Nos collĂšgues collaborent beaucoup plus d’une maniĂšre pluridisciplinaire. Nous avons pu mener des actions que nous n’aurions pas pu conduire sans ce financement. C’est fantastique pour assouvir l’envie d’entreprendre de nos collĂšgues, qui ont toujours des projets en tĂȘte. Je pense notamment Ă  la crĂ©ation de l'Institut d'Ă©tudes avancĂ©es de l'UniversitĂ© de Strasbourg (Usias) pour favoriser des recherches originales et pionniĂšres., de l’Institut de dĂ©veloppement et d'innovation pĂ©dagogiques (Idip), et du PĂŽle unique d'ingĂ©nierie (PUI) qui aide au montage de projets nationaux et europĂ©ens. »

S.R.

« Nous sommes l’universitĂ© française qui prĂ©sente les meilleurs

ratios

financiers . Â»

« C’est fantastique pour assouvir

l'envie

d’entreprendre de nos collùgues, qui ont toujours des projets

en tĂȘte  . »

Frédéric Dehan, directeur général des services.

Serge Potier, vice-prĂ©sident dĂ©lĂ©guĂ© aux investissements d’avenir.

Les grands chantiers de la fusion

Vivre ensemble #10ansUnistra =

Page 24: Savoir - unistra.fr

L’OpĂ©ration campusJamais un tel montant d’investissements immobiliers n’aura Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© pour l’universitĂ© strasbourgeoise, ces cinquante derniĂšres annĂ©es. LancĂ©e avant la crĂ©ation de l’UniversitĂ© de Strasbourg, l’OpĂ©ration campus, qui bat son plein en ce dĂ©but d’annĂ©e 2019, est sans doute l’expression la plus palpable de la nouvelle universitĂ© unifiĂ©e. AprĂšs un appel d’offres publiĂ© par le ministĂšre en 2007, les trois universitĂ©s strasbourgeoises ont appris en novembre 2008 que leur dossier Ă©tait retenu. Et le montant financier a

Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ© par la ministre, ValĂ©rie PĂ©cresse, lors de la cĂ©rĂ©monie officielle de la crĂ©ation de l’Unistra, le 5 fĂ©vrier 2009. La fusion a-t-elle jouĂ© un rĂŽle dans le choix du campus strasbourgeois ? « Ce que je sais, c’est que nous avons Ă©tĂ© retenus dans la liste des six premiers laurĂ©ats, rĂ©pond Yves Larmet, vice-prĂ©sident Patrimoine. La fusion a-t-elle Ă©tĂ© un argument supplĂ©mentaire en notre faveur ? Je le suppose. »

AprĂšs quelques annĂ©es de prĂ©paration et d’affinage du bouclage financier avec l’État, les collectivitĂ©s territoriales et les banques publiques, les opĂ©rations ont vraiment dĂ©marrĂ© en 2014, notamment par la crĂ©ation et l’amĂ©nagement du parc du campus central, et devraient s’achever en 2023 par la rĂ©novation de la citĂ© universitaire Paul Appell. En tout, une trentaine de chantiers de rĂ©novation, reconstruction, rĂ©habilitation Ă©nergĂ©tique
 concernant 75 % des Ă©tudiants de l’universitĂ© pour un investissement total de 330 millions d’euros. « Une des particularitĂ©s des chantiers de l’OpĂ©ration campus est qu’ils sont le plus souvent rĂ©alisĂ©s en site occupĂ©, insiste Yves Larmet. C’est un Ă©lĂ©ment qui rajoute de la complexitĂ© Ă  des opĂ©rations dĂ©jĂ  dĂ©licates en termes techniques ou financiers. »

J.d.M.

Une trentaine de chantiers concernant 75 % des Ă©tudiants de l’universitĂ© pour un investissement total de 330

millions d’euros .

Yves Larmet, vice-président Patrimoine.

La rue René Descartes, située sur le campus central en 2009 et aujourd'hui, un campus vert et ouvert.

24 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

Page 25: Savoir - unistra.fr

Savoir(s) n°35 25

Faciliter la mise en rĂ©seauComment la crĂ©ation de l’Unistra a-t-elle modifiĂ© les pratiques partenariales entre l’EuromĂ©tropole et l’universitĂ© ?

Cela a changĂ© beaucoup de choses. La fusion nous permet d’associer plus facilement l’universitĂ© Ă  nos projets. D’autant plus que l’Unistra a vite fait la preuve de son excellence,

de son rayonnement, de son impact sur le territoire. L’universitĂ© unique facilite la mise en rĂ©seau avec l’ensemble de ses partenaires. Elle nous a permis tous ensemble de remporter des batailles trĂšs importantes comme l’Idex ou le Programme investissements d’avenir (PIA).

Avez-vous un exemple précis ?

En dĂ©cembre dernier, nous avons inaugurĂ© EASE : usine-Ă©cole unique en Europe. C’est un bel exemple de

partenariat entre l’Unistra, le PIA, les collectivitĂ©s territoriales, le privĂ© : nous nous sommes fait confiance. Il faut d’ailleurs ajouter dans le tour

de table la Fondation de l’universitĂ©, qui est une des trĂšs belles rĂ©ussites de l’Unistra. La fusion nous a

aussi permis de mieux prendre en compte les besoins des Ă©tudiants : logement, accĂšs Ă  la culture
 afin qu’ils se sentent mieux dans la ville.

L’Unistra a-t-elle amĂ©liorĂ© l’attractivitĂ© de l’EuromĂ©tropole ?

Notre territoire est trĂšs marquĂ© par son histoire et son patrimoine qu’il faut Ă©videmment sauvegarder.

Ils ont vĂ©cu la fusion et participĂ© Ă  la crĂ©ation et Ă  la vie de l'universitĂ©. À l'occasion des dix ans de l'UniversitĂ© de Strasbourg, ils tĂ©moignent de leur expĂ©rience.

Au-delĂ  des prĂ©s carrĂ©sJe n’ai pas connu la pĂ©riode d’avant, car je ne suis arrivĂ© en FacultĂ© de droit qu’en 2012. Je dois dire que j’ai encore rencontrĂ© alors des gens qui ne savaient pas que l’l’UniversitĂ© Robert-Schuman avait fusionnĂ© avec les autres ! Avoir une grande universitĂ© unifiĂ©e permet aux associations Ă©tudiantes de se croiser, de se rencontrer plus facilement. Cela a permis de mettre en place une grosse base de donnĂ©es d’associations Ă©tudiantes.

Selon moi, il y a beaucoup de points bĂ©nĂ©fiques : une plus grande proximitĂ©, une unitĂ© de la communautĂ©, au-delĂ  des corporatismes et des prĂ©s carrĂ©s
 Et le fait d’identifier un seul acteur permet aussi Ă  l’universitĂ© d’ĂȘtre mieux ancrĂ©e dans la ville.

L’Unistra est le signal d’un territoire entreprenant, capable de dispenser des savoirs de trĂšs grande qualitĂ© et donc de crĂ©er des liens avec le monde Ă©conomique et industriel. Le dĂ©veloppement de la gĂ©othermie profonde dans l’EuromĂ©tropole est un bon exemple de ces liens renforcĂ©s entre universitĂ© et industrie. La forte prĂ©sence des Ă©tudiants Ă©trangers souligne aussi le caractĂšre europĂ©en et international de la ville. La qualitĂ© de nos hĂŽpitaux ou Ă©tablissements privĂ©s de santĂ© ne serait pas la mĂȘme sans l’Unistra. L’universitĂ© contribue Ă  l’image d’excellence et d’innovation de l’EuromĂ©tropole.

J.d.M.

→ Dans l'une des salles blanches de l'usine Ă©cole, Ease ouverte en septembre 2018.

Regards sur la nouvelle université

Robert Herrmann, prĂ©sident de l’EuromĂ©tropole de Strasbourg.

Ilyas Kenadid, vice-président Vie universitaire de 2016 à 2018.

Vivre ensemble #10ansUnistra =

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Développer la qualité de vie au quotidienBrigitte Grosse, directrice des ressources humaines.

En tant que DRH de l’UniversitĂ© Robert-Schuman, j’avais dĂ©jĂ  l’habitude de travailler avec les autres DRH. Cela n’a donc pas Ă©tĂ© difficile de faire fonctionner les groupes de travail. La mise en place des procĂ©dures s’est faite petit Ă  petit. On a dĂ©couvert de nouveaux mĂ©tiers, notamment en ce qui concerne la gestion prĂ©visionnelle des emplois et des compĂ©tences ou encore le contrĂŽle qualitĂ©, qui a Ă©tĂ© approfondi. Nous n’aurions sans doute pas pu rĂ©aliser tout cela dans nos universitĂ©s respectives.

À cette Ă©chelle, on pourrait craindre que la gestion ne soit anonyme, mais ce risque est compensĂ©

par de nouvelles approches, notamment en ce qui concerne l’accompagnement des personnes via le Bureau des carriùres. Cela

a permis de dĂ©velopper la qualitĂ© de vie au quotidien des personnels. Une universitĂ© de cette taille permet aussi plus de mobilitĂ© au sein mĂȘme de l’établissement. J’ai rencontrĂ© de nouvelles personnes, j’ai appris Ă  construire en commun
 Participer Ă  cette belle aventure m’a beaucoup apportĂ©.

Une force vive de la villeEn quoi la fusion a-t-elle changĂ© les relations que vous entretenez avec l’UniversitĂ© de Strasbourg ?

J’ai la sensation que l’interface entre l’universitĂ© et la citĂ© est devenue plus simple et plus dynamique. L’UniversitĂ© de Strasbourg n’a pas perdu en complexitĂ© mais a gagnĂ© en dynamisme et en fluiditĂ© en termes de projet.

Nous avons pu co-concevoir plus facilement un projet comme celui du Jardin d’hiver en novembre 2015 par exemple. Ce projet qui a reçu le soutien de l’Idex, est le fruit d’une rĂ©sidence de l’OsosphĂšre Ă  l’universitĂ© pendant un an. À partir de ce travail, nous avons construit un Ă©vĂ©nement de quatre jours qui a permis au campus central de revendiquer son statut d’espace public au cƓur de la ville. Ce projet global Ă©manant d’une unitĂ© centrale permet d’ouvrir des perspectives et de s’inscrire dans la durĂ©e.

Diriez-vous que l’universitĂ© a gagnĂ© en visibilitĂ© dans l’espace urbain ?

Oui, je crois que l’universitĂ© est plus ouverte sur la ville, plus visible et plus identifiable. Pour moi, l’exploration du territoire apprenant demeure un Ă©lĂ©ment fondamental de la mission de l’universitĂ©. Elle a aussi voix au chapitre en termes de dĂ©veloppement Ă©conomique et par la fusion, cette voix est devenue plus audible. Le dialogue avec l’extĂ©rieur a Ă©tĂ© facilitĂ©.

Selon vous, il y a un avant et un aprĂšs fusion ?

Il y a eu un tournant, c’est incontestable. Il s’agit aussi d’une affaire de personne. Le prĂ©sident de l’universitĂ© a permis beaucoup de choses, des gens comme Mathieu Schneider Ă©galement. La fusion a Ă©tĂ© bien menĂ©e. L’UniversitĂ© de Strasbourg apparaĂźt dĂ©sormais comme un Ă©tablissement, une force vive de la ville, et non pas comme un Ă©cosystĂšme impĂ©nĂ©trable Ă  celui qui n’en possĂšde pas les codes. Cela me semble indispensable car au-delĂ  de ses missions traditionnelles, l’universitĂ© est un des moteurs de la transformation de la ville. Et aujourd’hui, cette dĂ©marche s’effectue de maniĂšre partenariale. Une sĂ©rie d’acteurs et de projets naissent Ă  l’intĂ©rieur de l’universitĂ© et se fertilisent ensuite Ă  l’échelle d’un territoire. L’universitĂ© a renforcĂ© sa prĂ©sence dans la ville.

Julie Giorgi

← Le festival Ososphùre prend place sur le campus de l'Esplanade en novembre 2015.

Thierry Danet, directeur et cofondateur de l’Ososphùre.

26 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

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Savoir(s) n°35 27

CohĂ©rence, dynamisme, visibilité« Pour moi, la fusion a poussĂ© l’UniversitĂ© de Strasbourg Ă  se rapprocher du modĂšle de rĂ©fĂ©rence des grandes universitĂ©s internationales d'excellence : pluridisciplinaires, puissantes, dotĂ©es d’un projet stratĂ©gique ambitieux pour l’avenir. En France, le milieu de l’enseignement supĂ©rieur et de la recherche est complexe, avec des acteurs non-universitaires (les grandes

Ă©coles, les organismes de recherche), ce qui implique un positionnement prĂ©cis. Dans ce contexte spĂ©cifique, je ne pense pas que les universitĂ©s strasbourgeoises, si elles Ă©taient restĂ©es sĂ©parĂ©es, auraient rĂ©ussi Ă  construire un projet stratĂ©gique aussi clair et cohĂ©rent pour l’avenir du site.

La fusion a permis de rationaliser, d’ĂȘtre plus efficace, de donner plus de cohĂ©rence aux projets, d’ĂȘtre plus dynamique, plus visible aussi : une seule universitĂ©, un seul collĂšge doctoral, une seule sociĂ©tĂ© d'accĂ©lĂ©ration du transfert de technologies, un seul incubateur, une seule fondation, etc. Sans doute beaucoup d’énergie et de moyens prĂ©servĂ©s par cette absence de dispersion.

L’universitĂ© unique s’est aussi considĂ©rablement ouverte sur le monde socio-Ă©conomique et sur la sociĂ©tĂ© civile, comme c’est le cas des autres grandes universitĂ©s internationales. Les liens avec les entreprises se dĂ©veloppent et se multiplient. Des partenariats gagnant-gagnant se nouent avec des interlocuteurs qui se comprennent mieux et dont les logiques se rapprochent.

AcquĂ©rir de la maturitĂ©La fusion a apportĂ© une dynamique excitante et motivante. Elle a permis Ă  l’universitĂ© de gagner en visibilitĂ©, de mutualiser des moyens, de dĂ©velopper la pluridisciplinarité  Aujourd’hui, la « marque » est acquise, mĂȘme dans les Ă©coles. Mais il reste du chemin Ă  parcourir et il s’agit notamment de rĂ©flĂ©chir aux modalitĂ©s Ă  mettre en place pour Ă©viter une trop grande centralisation et pour s’appuyer sur les structures intermĂ©diaires, comme les collĂ©giums, dont il reste Ă  dĂ©finir les missions. Une rĂ©flexion s’impose sur le modĂšle de gouvernance afin d’identifier « le

bon endroit » oĂč doivent se prendre les dĂ©cisions. Nous avançons par petites touches et devons encore acquĂ©rir de la maturitĂ© pour tirer pleinement les bĂ©nĂ©fices de cette fusion.

Forger une culture collectiveC’était un grand dĂ©fi que de vouloir forger, Ă  partir de trois cultures assez diffĂ©rentes une culture collective ! Cela a Ă©tĂ© ma priorité  Au dĂ©but, je pense que certaines filiĂšres avaient peut-ĂȘtre peur que d’autres prennent le dessus
 Mais, le temps faisant, cette crainte s’est rĂ©sorbĂ©e peu Ă  peu. L’organisation de la premiĂšre rentrĂ©e commune des trois universitĂ©s a constituĂ© un gros dossier. J’ai Ă©tĂ© la premiĂšre vice-prĂ©sidente Vie universitaire : cette

vice-prĂ©sidence a Ă©tĂ© une belle innovation dans le cadre de la fusion, une reconnaissance pour les Ă©tudiants, puisqu’on lui a donnĂ© la mĂȘme place qu’aux autres vice-prĂ©sidences


Comme employeurs, les entreprises sont sensibles Ă  la crĂ©ation d’un guichet unique et apprĂ©cient de trouver plus rapidement les compĂ©tences dont elles ont besoin. Elles n’ont plus qu’un interlocuteur, ce qui simplifie grandement la relation. Cet argument vaut aussi pour les partenaires institutionnels territoriaux et nationaux de l’universitĂ©, ainsi que pour ceux d'Eucor – Le Campus europĂ©en.

La pluridisciplinaritĂ© a clairement ouvert la voie de l’Idex. GrĂące Ă  ces fonds et aussi Ă  ceux collectĂ©s par la fondation, un meilleur Ă©quilibre existe entre le financement des projets en sciences dures et ceux en sciences humaines et sociales. Plus personne ne conteste les avantages apportĂ©s par l'interdisciplinaritĂ© dans la recherche, dans ce monde complexe oĂč les solutions innovantes se trouvent souvent justement aux frontiĂšres entre les disciplines. Bref, la fusion a crĂ©Ă© une universitĂ© qui fait le poids et construit son avenir entre excellence et facteurs de diffĂ©rentiation. »

Caroline Laplane

Joannie Crinon, vice-présidente Vie universitaire de 2008 à 2010.

RĂ©gis Bello, prĂ©sident de la Fondation UniversitĂ© de Strasbourg, ancien P.-D.G.de De Dietrich

Jean-Marc Planex, directeur de la Faculté de chimie.

Vivre ensemble #10ansUnistra =

Campagne de communication "Elle est unique" en janvier 2009.

Page 28: Savoir - unistra.fr

Une rĂ©fĂ©rence dans le paysageJe venais tout juste de prendre mes fonctions Ă  l’UniversitĂ© Marc-Bloch
 Des groupes de travail thĂ©matiques ont Ă©tĂ© constituĂ©s, avec des reprĂ©sentants des trois universitĂ©s. Dans le groupe « finances », cela se passait plutĂŽt bien
 Je dois dire que la fusion a reprĂ©sentĂ© beaucoup de travail pour les services centraux. La premiĂšre annĂ©e, 2009, a coĂ»tĂ©

beaucoup d’énergie, d’autant plus qu’en mĂȘme temps, les universitĂ©s voyaient leurs compĂ©tences Ă©largies
 Il

fallait ĂȘtre rĂ©actif ! C’est Ă  partir de 2011 que nous avons pu adopter un rythme de croisiĂšre. Avec le recul, je trouve que c’est une belle rĂ©alisation
 La marque Unistra est une rĂ©fĂ©rence dans le paysage, l’universitĂ© s’est solidifiĂ©e, de multiples projets y foisonnent
 Le contrĂŽleur budgĂ©taire rĂ©gional m’a

mĂȘme dit rĂ©cemment qu’il en avait le vertige !

10 Ă©vĂšnements pour les dix ans

Croisements
 et centralisationEnseignant-chercheur Ă  Marc-Bloch en 2009, Ă©lu au conseil scientifique, j’étais favorable Ă  la fusion. En Staps, on a l’habitude des croisements disciplinaires : il me semblait important de pouvoir travailler, dans un cadre plus formel, avec des chercheurs de domaines diffĂ©rents. Par contre, dans les trois universitĂ©s, on pouvait s’identifier aux figures intellectuelles qui avaient donnĂ© leurs noms

aux universitĂ©s, ce qui est moins le cas aujourd’hui. RĂ©sistant et historien adepte de la comparaison, Marc-Bloch me convenait trĂšs bien.

La fusion a hissĂ© l’universitĂ© Ă  une autre Ă©chelle avec des aspects positifs tels que son rayonnement Ă  l’international. Mais avec plus de 50 000 Ă©tudiants, on constate Ă©galement un plus grand Ă©loignement entre centre et pĂ©riphĂ©rie, qui peut entraĂźner des dysfonctionnements. Il a fallu crĂ©er des structures intermĂ©diaires, comme les collĂ©giums, qui ont encore Ă  faire leurs preuves.

Anne-Catherine Norberti, directrice des services financiers.

1

La cĂ©rĂ©monie des vƓux de l’UniversitĂ© de Strasbourg

- janvier 2019.

6 La cérémonie de remise

des diplĂŽmes de doctorat le 21 juin 2019.

7 La rentrée universitaire en

septembre 2019.

8 Un colloque novateur réunissant les quatre universités françaises

labellisĂ©es Idex (Initiative d’excellence), fin septembre

/ début octobre 2019.

9 Le séminaire annuel de la

Coordination des universités de recherche intensive françaises (Curif), fin

octobre 2019.

10 Une soirée festive pour

les personnels de l’UniversitĂ© de Strasbourg

en décembre 2019.

2

Les rencontres Ă©conomiques avec l’EuromĂ©tropole de Strasbourg et la Chambre

de commerce et d’industrie - janvier 2019.

3

L’assemblĂ©e des prĂ©sidents de la LERU (Ligue des

universités de recherche européennes),

les 17 et 18 mai 2019.

4

La cérémonie de remise des distinctions honorifiques,

le 24 mai 2019.

5 Le colloque interdisciplinaire

« Environnements », les 5 et 6 juin 2019.

28 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

William Gasparini, professeur en Sciences et techniques des activitĂ©s physiques et sportives (Staps), directeur d’école doctorale.

Page 29: Savoir - unistra.fr

Vivre ensemble =

Savoir(s) n°35 29

Entretien avec Henri Lachmann, prĂ©sident du comitĂ© de campagne pour l’UniversitĂ© de Strasbourg et les HĂŽpitaux universitaires de Strasbourg de 2008 Ă  20181.

Que faut-il retenir des dix ans d’activitĂ© de la fondation ?

Je pense que l’universitĂ© doit continuer Ă  s’ouvrir. Elle reste pour l’instant trop fermĂ©e sur elle-mĂȘme. Il est nĂ©cessaire d’augmenter la collaboration entre le monde universitaire et son environnement, que ce soit avec les personnes physiques ou morales. Le monde de l’universitĂ© ne doit pas et ne peut pas vivre seul. Nous sommes entrĂ©s dans une pĂ©riode oĂč

l’État, le public ne peut pas tout faire. Le privĂ©, d’une façon ou d’une autre doit se montrer plus solidaire et responsable. La premiĂšre campagne de collecte de dons (2010-20142) a Ă©tĂ© formidable. Fin 2017, nous annoncions un chiffre de dons de plus de 30 millions d’euros, ce qui est Ă©norme. Ce qui a fait ce succĂšs tient surtout Ă  la qualitĂ© de l’UniversitĂ© de Strasbourg au travers de ses prix Nobel, de l’Initiative d’excellence, des projets qu’elle engrange et aussi Ă  sa dimension europĂ©enne et internationale.

Quels enseignements avez-vous tirés de cette premiÚre campagne ?

En premier lieu, il faut impĂ©rativement mieux accompagner les anciens Ă©tudiants. Il est trĂšs symptomatique qu’en France, l’appartenance des Ă©tudiants Ă  leur universitĂ© soit si peu exprimĂ©e. Je pense qu’aujourd’hui la vie de l’étudiant s’arrĂȘte quand il quitte l’universitĂ© et recommence quand il rentre dans la vie active, comme s’il n’était pas actif avant. Il est nĂ©cessaire de travailler Ă  faire tomber ces frontiĂšres trĂšs artificielles. Le deuxiĂšme enseignement est certainement la patience. Il faut continuer Ă  dĂ©velopper patiemment les relations au sens trĂšs large de l’universitĂ© avec la ville et l’ensemble de ces acteurs. Il faut que l’universitĂ© s’ouvre Ă  la ville et que la ville s’intĂ©resse Ă  l’universitĂ©.

Qu'est-ce qui fera le succĂšs de la nouvelle campagne de dons que la fondation s’apprĂȘte Ă  lancer avec la Fondation pour la recherche en chimie ?

L’objectif de la campagne est de 50 millions d’euros cumulĂ©s pour 2022. C’est possible parce que les mentalitĂ©s Ă©voluent. L’universitĂ© comprend qu’elle ne peut pas continuer Ă  vivre seule. Il faut que les entreprises se sentent plus responsables et intĂ©ressĂ©es par ce que fait l’universitĂ©. De mĂȘme que les citoyens ne peuvent pas ne pas ĂȘtre solidaires de la formation des jeunes. Il faut comprendre que l’on appartient tous Ă  un mĂȘme Ă©cosystĂšme, ce n’est pas l’universitĂ© d’un cĂŽtĂ© et les entreprises de l’autre et les citoyens en troisiĂšme. L’appartenance est beaucoup plus globale. C’est la prise de conscience de cette appartenance qui va faire Ă©voluer les mentalitĂ©s, une prise de conscience citoyenne de ce qu’est l’universitĂ© et de ce qu’elle reprĂ©sente. Quelqu’un qui donne Ă  l’universitĂ©, ce n’est pas de la gĂ©nĂ©rositĂ©, c’est de la responsabilitĂ© et de la solidaritĂ©.

Propos recueillis par F. Z.

1 Philippe Castagnac a été nommé nouveau président du comité de pilotage de campagne le 8 octobre 2018.

2 La campagne 2010-2014 de collecte de dons pour l’UniversitĂ© de Strasbourg et les HĂŽpitaux universitaires de Strasbourg a Ă©tĂ© menĂ©e par la Fondation UniversitĂ© de Strasbourg en Ă©troite coopĂ©ration avec la Fondation pour la recherche en chimie.

« Les donateurs solidaires et responsables »

Tous Nobels !La Fondation de l’UniversitĂ© de Strasbourg, en coopĂ©ration avec la Fondation pour la recherche en chimie, a lancĂ© en novembre dernier une nouvelle campagne de mĂ©cĂ©nat. IntitulĂ©e « Tous Nobels ! », elle a pour objectif de rĂ©colter 50 millions d’euros de dons d’ici Ă  2022.

O tousnobels.unistra.fr

Notre recherche

n’a pas de prix.

Avec vous,

elle en gagne !

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l’UniversitĂ© de Strasbourg

HĂŽpitaux Universitaires de Strasbourg

avec le soutien de

« Il faut que l’  universitĂ© s’ouvre Ă  la ville et que la ville

s’intĂ©resse Ă  l'  universitĂ©  . »

Henri Lachmann, prĂ©sident du comitĂ© de campagne jusqu’en 2018.

Page 30: Savoir - unistra.fr
Page 31: Savoir - unistra.fr

Savoir(s) n°35 31Savoir(s) n°35 31

Issue des travaux de recherche de l’Institut de gĂ©nĂ©tique et de biologie molĂ©culaire et cellulaire (IGBMC) de Strasbourg, la start-up Dynacure dĂ©veloppe de nouveaux traitements pour les patients atteints de myopathies centronuclĂ©aires. Forte d’une levĂ©e de fonds spectaculaire en 2018, l’entreprise lance les Ă©tudes cliniques en 2019.

« Dynacure est un bel exemple de rentabilitĂ© de la recherche universitaire », aff irme FrĂ©dĂ©ric Legros, le directeur des opĂ©rations de la sociĂ©tĂ©. Ses succĂšs et son parcours prometteur sont le fruit de l’excellence scientif ique de l’IGBMC, de la mobilisation de Conectus (SociĂ©tĂ© d’accĂ©lĂ©ration du transfert de technologies) et d’un partenariat industriel avec une biotech reconnue au niveau mondial, Ionis Pharmaceuticals. Tout a commencĂ© en 1996 Ă  l’IGBMC, lorsque l’équipe de Jocelyn Laporte identif ie les gĂšnes Ă  l’origine de la myopathie centronuclĂ©aire, une maladie neuromusculaire rare, qui touche environ 4 000 patients dans le monde. Poursuivant leurs recherches sur des souris, les chercheurs dĂ©couvrent qu’en limitant l’expression d’un des gĂšnes impliquĂ©s dans la maladie, celui de la dynamine 2, ils parviennent Ă  guĂ©rir les souris atteintes de myopathie centronuclĂ©aire. Cette innovation prometteuse est dĂ©tectĂ©e en 2013 par Conectus qui dĂ©pose un premier brevet pour protĂ©ger les dĂ©couvertes et accorde un premier f inancement dans le cadre de

son fonds de prĂ©-maturation et maturation des projets de recherche. C’est Ă©galement en 2013 que Conectus parvient Ă  mobiliser Kurma Partners un fonds de capital-risque europĂ©en dĂ©diĂ© Ă  la santĂ©. L’annĂ©e suivante, un deuxiĂšme brevet est dĂ©posĂ© et, par le biais de Kurma Partners, un quatriĂšme partenaire-clĂ© rejoint l’aventure : Ionis Pharmaceuticals, sociĂ©tĂ© californienne leader dans le dĂ©veloppement de molĂ©cules qui limitent l’expression des gĂšnes.

Des ambitions internationalesEn 2016, la start-up Dynacure voit le jour Ă  Strasbourg et dĂšs juin 2018, elle rĂ©alise une levĂ©e de fonds d’un montant de 47 millions d’euros, un des records français en la matiĂšre. Deux nouveaux investisseurs, Andera et Pontifax rejoignent le pool d’investisseurs dĂ©jĂ  prĂ©sents (Kurma Partners, Idinvest Partners, Bpifrance). Cette capitalisation va permettre de lancer les essais cliniques en 2019 sur une quarantaine de patients en Europe. En fonction des rĂ©sultats, un mĂ©dicament pourrait ĂȘtre mis sur le marchĂ© d’ici Ă  six ans. « Nous n’arriverons pas Ă  faire marcher les personnes atteintes de myopathie centronuclĂ©aire, mais si grĂące Ă  notre traitement ils peuvent manger seuls et respirer sans machine, leur vie et celle de leur famille sera dĂ©jĂ  amĂ©liorĂ©e », prĂ©vient StĂ©phane van Rooijen, le P.-D.G. de Dynacure. Aujourd’hui, l’entreprise qui emploie quatorze salariĂ©s souhaite poursuivre le dĂ©veloppement de nouvelles thĂ©rapies pour d’autres maladies rares. « Nous voulons devenir un acteur mondial sur le marchĂ© des maladies orphelines », annonce le P.-D.G..

J.G.

Une avancée mondiale sur le traitement des maladies orphelines

← L’équipe de Dynacure avec StĂ©phane van Rooijen, le P.-D.G. (au fond Ă  gauche) et FrĂ©dĂ©ric Legros, le directeur des opĂ©rations (au fond Ă  droite).

Conectus en premiĂšre ligne« L’exemple de Dynacure cristallise les diffĂ©rentes actions et Ă©tapes qui nous permettent de dĂ©velopper des projets. Nous avons pleinement rempli notre rĂŽle d’accĂ©lĂ©rateur car le transfert de technologies et la crĂ©ation de cette start-up ont Ă©tĂ© extrĂȘmement rapides », se fĂ©licite Caroline Dreyer, la prĂ©sidente de Conectus.

« Dynacure est un bel exemple de rentabilitĂ© de la recherche

universitaire  . »

Et ailleurs

Page 32: Savoir - unistra.fr

Fabrice Berna, jeune professeur de psychiatrie Ă  l’UniversitĂ© de Strasbourg, a effectuĂ© un sĂ©jour de trois semaines Ă  Shanghai en septembre dernier dans le cadre du programme Jeunes Talents France-Chine. Une expĂ©rience qui va donner naissance Ă  une collaboration directe entre chercheurs.

Pourquoi avez-vous rĂ©pondu Ă  l’appel Ă  projet du programme Jeunes Talents France-Chine ?Je cherchais de nouvelles sources de f inancements pour mes projets de recherche. Les collaborations inter-pays permettent d’accĂ©der Ă  des f inancements spĂ©cif iques, de trouver des post-

doctorats Ă  nos Ă©tudiants, de dĂ©velopper de nouveaux projets. Depuis 2011, j’ai nouĂ© de nombreux liens avec des Ă©quipes en Allemagne, Angleterre, Belgique, Danemark, Espagne. En tant que jeune professeur de l’universitĂ© et des HĂŽpitaux universitaires de Strasbourg (j’ai Ă©tĂ© nommĂ© en septembre 2017), je ne peux pas encore candidater sur des projets europĂ©ens. Il faut trouver d’autres voies comme le programme

Jeunes Talents France-Chine que j’ai dĂ©couvert grĂące Ă  la newsletter de l’Inserm. Et en faisant des recherches, j’ai identif iĂ© l’équipe du professeur Kwok Ă  l’East China Normal University (ECNU) qui travaille sur des sujets similaires aux miens.En quoi votre sĂ©jour en Chine a-t-il fait avancer vos recherches ?Mes recherches explorent les perturbations de la mĂ©moire autobiographique pour comprendre certains symptĂŽmes clĂ©s de la schizophrĂ©nie comme les troubles de l’identitĂ©. Cette forme de mĂ©moire se prĂȘte diff icilement Ă  des protocoles qui contrĂŽlent les conditions dans lesquelles les souvenirs sont encodĂ©s. Mais en dĂ©couvrant les travaux du professeur Sze Chai Kwok, je me suis aperçu que ses paradigmes pouvaient ĂȘtre appliquĂ©s Ă  mes recherches. Par des analyses couplant imagerie par rĂ©sonance magnĂ©tique

(IRM) et stimulation magnĂ©tique transcrĂąnienne (rTMS), il a montrĂ© que certaines zones du cerveau semblaient impliquĂ©es dans l’élaboration des jugements mĂ©tamnĂ©siques. AprĂšs plusieurs Ă©changes et suite Ă  mon sĂ©jour, nous avons donc dĂ©cidĂ© d’adapter son protocole pour Ă©tudier le fonctionnement de la mĂ©moire des patients avec schizophrĂ©nie (qui seront Ă©valuĂ©s et imagĂ©s en IRM Ă  Strasbourg). En trois semaines Ă  Shanghai j’ai donnĂ© quatre confĂ©rences et j’ai rencontrĂ© beaucoup de scientif iques. J’ai pu Ă©changer sur mes recherches mais Ă©galement sur des questions cliniques et de psychothĂ©rapie. J’ai Ă©tĂ© trĂšs impressionnĂ© par la vitesse Ă  laquelle les gens se connectent. J’ai pu obtenir un rendez-vous avec le vice-directeur du CHU la veille pour le lendemain. En France c’est inimaginable !Comment votre collaboration en Chine va-t-elle se poursuivre ?Un premier article a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© soumis, un deuxiĂšme est en cours et nous allons soumettre un projet de recherche sur lequel pourront travailler deux Ă©tudiants en thĂšse en Chine et en France. Il nous reste Ă  trouver les volontaires : tous n’ont pas envie de partir Ă  l’autre bout du monde, et les Ă©tudiants chinois prĂ©fĂšrent souvent les États-Unis Ă  l’Europe
 Pour ma part, j’ai trĂšs envie de retourner en Chine et de concrĂ©tiser ces collaborations !

Propos recueillis par J. G.

Immersion scientifique enthousiasmante en Chine

Fabrice Berna, au centre, lors d’un atelier dans l’équipe du docteur Jue Chen, chef du dĂ©partement de psychothĂ©rapie du Shanghai Mental Health Center.

« J’ai Ă©tĂ© trĂšs impressionnĂ© par la vitesse Ă  laquelle les gens se connectent  . »

32 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

Page 33: Savoir - unistra.fr

Savoir(s) n°35 33

Strasbourg est membre depuis 2005 d’Eurolife, rĂ©seau de neuf universitĂ©s europĂ©ennes des sciences de la vie. Objectif : favoriser la mobilitĂ© et les collaborations entre Ă©tudiants et chercheurs.

Eurolife a Ă©tĂ© crĂ©Ă© en 1999 par huit universitĂ©s europĂ©ennes parmi les plus rĂ©putĂ©es dans le domaine des sciences de la vie et de la mĂ©decine translationnelle. En 2005, l’UniversitĂ© Louis-Pasteur de Strasbourg a rejoint le rĂ©seau aux cĂŽtĂ©s des universitĂ©s d’Edimbourg et de Barcelone, du University Medical Center de Göttingen, du Leiden University Medical, de la Medical University Innsbruck, de l’UniversitĂ© Semmelweis Budapest, du Trinity College de Dublin et du Karolinska Institute de Stockholm. Eurolife entend faciliter la recherche collaborative entre les diffĂ©rentes institutions acadĂ©miques au niveau de la formation initiale (licence et master) et de la formation doctorale par l’échange de doctorants, d’enseignants-chercheurs et de chercheurs, ainsi que la construction de projets de recherche communs. La reprĂ©sentation de l’Unistra au sein d’Eurolife est assurĂ©e par Joern PĂŒtz, biochimiste, vice-prĂ©sident dĂ©lĂ©guĂ©, chargĂ© des relations franco-allemandes, Catherine Schuster, biologiste molĂ©culaire et cellulaire, directrice de l’école doctorale des sciences de la vie et de la santĂ© (ED 414) et Sandrine Schott-CarriĂšre du PĂŽle unique d’ingĂ©nierie et responsable de la cellule Europe.

DĂ©marche bottom upEurolife se rĂ©unit deux fois par an en assemblĂ©e plĂ©niĂšre gĂ©nĂ©ralement suivie d’un colloque, tel celui sur les vaccins thĂ©rapeutiques contre le cancer organisĂ© Ă  Innsbruck, Ă  l’automne dernier. Outre ces grands rendez-vous, Eurolife est le cadre idĂ©al pour organiser des actions bilatĂ©rales ou trilatĂ©rales entre les universitĂ©s adhĂ©rentes. « Nous voulons faciliter la crĂ©ation de projets collaboratifs associant recherche et enseignement, prĂ©cise Joern PĂŒtz. C’est d’ailleurs une source de financements supplĂ©mentaires grĂące au rĂ©seau. » Ainsi, du 16 au 21 dĂ©cembre dernier, six Ă©tudiants strasbourgeois (trois doctorants et trois Ă©tudiants en master) ont Ă©tĂ© invitĂ©s Ă  participer Ă  la winter school d’Obergurgl, en Autriche, coorganisĂ©e

par l’Unistra, le University Medical Center de Göttingen et la Medical University Innsbruck sur le thĂšme de la structure et la fonction du gĂ©nome dans l’homĂ©ostasie et la maladie, avec le soutien d’Eurolife et de l’UniversitĂ© franco-allemande.

En tout, seize Ă©tudiants strasbourgeois ont candidatĂ© pour participer Ă  l’évĂ©nement. « Nous n’avions jamais reçu autant de candidatures, se rĂ©jouit Catherine Schuster. AnnĂ©e aprĂšs annĂ©e, grĂące Ă  ces confĂ©rences de haut niveau, Eurolife se fait de mieux en mieux connaĂźtre. » Et Joern PĂŒtz se veut encourageant : « Il est important que de plus en plus d’étudiants intĂšgrent la dimension de la recherche. Eurolife favorise ce mouvement, notamment par les financements qu’elle offre pour aider leur mobilitĂ©. La principale force du rĂ©seau, c’est la dĂ©marche bottom up : ce sont les chercheurs qui identifient les partenariats possibles dans les neuf universitĂ©s et ce sont eux qui proposent d’y envoyer des Ă©tudiants pour un stage. »

J.d.M.

Eurolife : la force vitale d’un rĂ©seau europĂ©en

Les membres du réseau Eurolife lors d'une rencontre à Budapest en 2018.

« GrĂące Ă  ces confĂ©rences

de haut niveau  , Eurolife se fait de mieux en mieux connaĂźtre. »

Et ailleurs

Page 34: Savoir - unistra.fr
Page 35: Savoir - unistra.fr

Il trĂŽne Ă  l’entrĂ©e du campus de l’Esplanade. Il est caractĂ©ristique de l’architecture fonctionnaliste. LivrĂ© en 1967, l’ensemble que forment l’UFR de mathĂ©matique et d’informatique et l’École et observatoire de la science de la Terre (Eost) nous raconte une Ă©poque oĂč le bĂ©ton Ă©tait roi.

« Je me souviens avoir demandĂ© aux futurs utilisateurs, dĂšs le dĂ©but de mes Ă©tudes, si l’austĂ©ritĂ© des disciplines enseignĂ©es excluait que l’architecture en fĂ»t aimable. L’on m’assura que non et j’eus Ă©tĂ© bien déçu que l’on me rĂ©pondit le contraire. » Cette citation de Bertrand

Bonnert, architecte en chef des monuments historiques proclamĂ©e lors de l’inauguration permet certainement d’apprĂ©hender cette structure sous un Ɠil nouveau. Une fois entrĂ© dans le bĂątiment, c’est un espace trĂšs ouvert que l’on dĂ©couvre. Un jardin intĂ©rieur, conçu comme un espace d’échanges et de dĂ©tente, ainsi qu’un patio permettent d’aĂ©rer la structure du rez-de-chaussĂ©e et de laisser la lumiĂšre pĂ©nĂ©trer dans les

espaces. « Cette architecture dite fonctionnaliste est assez mĂ©connue », regrette Laurent Kohler. Peut-ĂȘtre Ă  cause du bĂ©ton ? Pour autant, ce passionnĂ© apprĂ©cie l’ensemble cohĂ©rent que constituent l’austĂ©ritĂ© du bĂ©ton et l’harmonie du vĂ©gĂ©tal. Architecte de son Ă©tat, il collabore depuis plusieurs annĂ©es avec l’UFR pour redonner son titre de noblesse Ă  ce courant architectural et Ă  ce bĂątiment. Chaque annĂ©e, des visites guidĂ©es sont organisĂ©es lors des JournĂ©es du patrimoine. L’institut a Ă©galement accueilli, en fin d’annĂ©e derniĂšre, une exposition de ses croquis.

Faire perdurer « l’esprit du bĂątiment »« La forme du bassin dans le jardin intĂ©rieur rappelle la forme d’une galaxie ; une Ă©vocation des sciences de la Terre et de l’Univers. La sculpture intitulĂ©e l’esprit mathĂ©matique de François Stahly au centre du bassin Ă©voque la science mathĂ©matique », commente Vincent BlanlƓil, directeur actuel de l’UFR. Un esprit incarnĂ© qui s’explique certainement par l’implication du directeur

de l’époque, Jean Frenkel, ainsi que de Janine Le Minor, statisticienne, alors chargĂ©e de la maĂźtrise d’Ɠuvre du projet.

« À l’origine, il y avait une succession de petites salles de travail au rez-de-chaussĂ©e qui ont depuis Ă©tĂ© attribuĂ©es Ă  d’autres fonctions. Nous avons amĂ©nagĂ© les espaces libres proches des amphis avec du mobilier pour que les Ă©tudiants se les approprient. Une maniĂšre de faire perdurer l’esprit du bĂątiment », se rĂ©jouit Vincent Blanloeil. La bibliothĂšque a Ă©galement Ă©tĂ© pensĂ©e comme un lieu central. Un ensemble de brise-soleil permettent de prĂ©server les ouvrages anciens d’une trop forte luminositĂ© et assure le confort des utilisateurs Ă  l’image de ceux que l’on retrouve Ă©galement sur les façades des bĂątiments. Une histoire de bĂ©ton qui garde aujourd’hui toute sa fonctionnalitĂ©.

F.Z.

L’harmonie du bĂ©ton

Savoir(s) n°35 35

Un ensemble cohérent entre

l’austĂ©ritĂ© du bĂ©ton

et l’harmonie

du végétal .

← Le jardin intĂ©rieur, conçu comme un espace d’échanges et de dĂ©tente.

Sous l’entrĂ©e de l’un des amphithĂ©Ăątres, des espaces de travail ouverts.

Un peu de poĂ©sie bĂ©tonesque« Le gris du bĂ©ton de Portland des Ă©lĂ©ments porteurs, le blanc dorĂ© du bĂ©ton de Lafarge des Ă©lĂ©ments lĂ©gers, et de la pierre de Fontenille des pignons, la pĂąte de verre des allĂšges, constituent la base de cette polychromie que nous avons voulu discrĂšte, prĂ©fĂ©rant rechercher la vigueur dans le jeu des volumes et l’affirmation de la structure plutĂŽt que dans une coloration excessive des parements, ce que nous considĂ©rons comme une mode Ă©phĂ©mĂšre, donc peu architecturale. » Extrait du discours de Bertrand Bonnert lors de l’inauguration.

Patrimoine

Page 36: Savoir - unistra.fr

Le Centre international d’enseignement supĂ©rieur du journalisme (CIESJ), ancĂȘtre du Cuej, est la premiĂšre Ă©cole de journalisme nĂ©e au sein de l’universitĂ© française. Les 60 ans de l’école, cĂ©lĂ©brĂ©s l’automne dernier, ont permis d’interroger le passĂ© pour reconstituer son histoire singuliĂšre et mĂ©connue.

NĂ© en pleine Guerre froide de la volontĂ© conjuguĂ©e de l’Unesco et de l’UniversitĂ© de Strasbourg, le CIESJ, ancĂȘtre de l’actuel Centre universitaire d’enseignement du

journalisme (Cuej), a Ă©tĂ© pensĂ© au dĂ©part, en 1957, comme un centre de formation de formateurs en journalisme en provenance du monde entier. Les premiĂšres licences en formation initiale n’y ont Ă©tĂ© dĂ©livrĂ©es qu’en 1962. « Toute cette histoire n’était ni connue, ni documentĂ©e. » Alain Chanel, directeur de l’école de 1989 Ă  2009, qui fut l’assistant du professeur Jacques LĂ©autĂ© fondateur du centre international, est allĂ© Ă  la rencontre des traces de ce brillant

passĂ©. « Il ne reste pas beaucoup de tĂ©moins vivants des origines ; il semblait Ă©vident, depuis quelques annĂ©es dĂ©jĂ , de trouver une maniĂšre de reconstituer et matĂ©rialiser cette histoire. Je me suis nourri d’archives de certains pionniers et j’ai exhumĂ© des documents de l’Unesco, de l’UniversitĂ© de Strasbourg et des collectivitĂ©s territoriales. » Et Nicole Gauthier, l’actuelle directrice du Cuej, a saisi l’opportunitĂ© des 60 ans de l’école, cĂ©lĂ©brĂ©s en octobre dernier, pour donner une perspective Ă©ditoriale Ă  la reconstitution de cette histoire.

Retrouver un rayonnement international : une volontĂ© affirmĂ©e de l’université« Ce travail a Ă©clairĂ© d’une façon concrĂšte les conditions et le contexte de la naissance du CIESJ », explique Alain Chanel. L’Unesco voulait crĂ©er des centres rĂ©gionaux ou internationaux qui s’attacheraient Ă  relever le niveau de la formation et l’éducation des journalistes dans diverses parties du monde, et l’UniversitĂ© de Strasbourg avait « le dĂ©sir farouche » de renaĂźtre aprĂšs-guerre. En saisissant la proposition de coopĂ©ration proposĂ©e par l’Unesco, l’UniversitĂ© de Strasbourg affirmait Ă©galement sa volontĂ© de retrouver un « rayonnement international ». À l’époque de sa crĂ©ation, le CIESJ fut « un des rares lieux oĂč l’Est et l’Ouest se retrouvaient pacifiquement pendant la Guerre froide », confie Alain Chanel. Pour preuve, le 3 novembre 1958, la deuxiĂšme session rĂ©unit 26 stagiaires venus de 20 pays et 45 confĂ©renciers. Sur les neuf boursiers de l’Unesco, quatre sont de l’Ouest (Danemark, Finlande, GrĂšce, Italie), quatre de l’Est (Hongrie, Pologne, Yougoslavie, URSS) et un du Pakistan. Quelques jours plus tard, deux confĂ©rences prĂ©sentent l’« Ă©tat de la formation professionnelle des journalistes », l’une aux États-Unis, l’autre en URSS. « Il est difficile d’imaginer aujourd’hui qu’en dehors de ce contexte, la crĂ©ation d’un lieu vouĂ© Ă  l’enseignement du journalisme eut Ă©tĂ© possible », conclut Alain Chanel.

F.B.

Une fille de la Guerre froide

Le CIESJ fut « un des rares lieux oĂč l’Est et l’Ouest se retrouvaient

pacifiquement pendant la Guerre

froide . »

L’école du terrainLes six dĂ©cennies d’existence du Cuej sont retracĂ©es dans un

ouvrage collectif richement documenté et illustré, auto-édité

par le Cuej Ă  2 000 exemplaires, intitulĂ© « L’école du terrain ».

En plus de l’histoire de l’école, on y trouve un portfolio des

délocalisations des étudiants du Cuej en territoire étranger.

La troisiĂšme partie de cet

ouvrage raconte le Cuej

d’aujourd’hui avec les mots

de ceux qui le font vivre

au quotidien, journalistes,

enseignants et universitaires

au service de la formation

des futurs journalistes. Enfin,

Noémie Rousseau, diplÎmée de

l’école, a menĂ© une enquĂȘte en

douze Ă©pisodes pour proposer

un récit de ces nombreuses

générations de Cuéjiens.

36 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

L’école du terrain60 ans d’enseignement du journalisme Ă  l’UniversitĂ© de Strasbourg

Cue

j

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Savoir(s) n°35 37

Remettre Ă  jour la prestigieuse collection du catalogue Krantz, propriĂ©tĂ© du MusĂ©e de minĂ©ralogie : c’est le dĂ©fi que s’est lancĂ© Jean Kind, octogĂ©naire passionnĂ© de mathĂ©matiques qui dĂ©die ses journĂ©es de retraitĂ© au calcul de modĂšles cristallographiques.

Au MusĂ©e de minĂ©ralogie, c’est dans le groupe des petits modĂšles, le plus important en nombre et en diversitĂ©, que se trouve la prĂ©cieuse collection Hessenberg et Rose, Ă©ditĂ©e en 1880 dans le catalogue de Krantz (Bonn). Elle est tout particuliĂšrement remarquable par la

prĂ©cision avec laquelle ont Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©es les 675 piĂšces en bois d’érable et de poirier. Mais 75 piĂšces ont Ă©tĂ© dispersĂ©es, suite Ă  des prĂȘts effectuĂ©s notamment pour l’enseignement. Un manque que Jean Kind s’est attelĂ© Ă  combler, en complĂ©tant et reconstituant intĂ©gralement la collection.

Plus de 400 pages de modĂšles dessinĂ©sFormĂ© Ă  l’École de chimie de Nancy, cet octogĂ©naire a, rĂ©sume-t-il, « quittĂ© les burettes pour le spectographe » et consacrĂ© sa carriĂšre professionnelle Ă  la physique, travaillant dans les secteurs de l’énergie, de l’aviation et f inalement chez Peugeot, Ă  MontbĂ©liard. Aujourd’hui Ă  la retraite, Jean Kind ne compte pas ses heures. Il a dĂ©jĂ  procĂ©dĂ© au dessin industriel de plus de 400 pages de modĂšles, avec une prĂ©cision d’un 1/10e de millimĂštre et en respectant scrupuleusement la morphologie des piĂšces, angle par angle, face par face. Ils seront complĂ©tĂ©s par des dessins en 3D pour s’adapter au robot du lycĂ©e Couff ignal qui, plus tard, va fabriquer les modĂšles. Jean Kind entend bien aller au bout de ce travail titanesque :

« Et quand la collection sera reconstituĂ©e, j’espĂšre qu’il ne sera plus question de laisser sortir quoi que ce soit du musĂ©e
 On n’enseigne plus aujourd’hui la cristallographie, mais cette collection a un gros intĂ©rĂȘt culturel et, qui sait ? Cela va peut-ĂȘtre revenir Ă  la mode ? ».

M.N.

La passion des modĂšles cristallographiques

Denis Leypold, responsable scientifique du Musée de minéralogie.

« On n’enseigne plus aujourd’hui la cristallographie

, mais cette collection a un gros intĂ©rĂȘt

culturel . »

Une collection exceptionnelleQue de trĂ©sors insoupçonnĂ©s et mĂ©connus dans les vitrines, sur les Ă©tagĂšres et dans les grands tiroirs du musĂ©e de minĂ©ralogie ! Ils abritent une magnif ique collection de modĂšles cristallographiques, grands et petits, rĂ©alisĂ©s en bois de poirier ou d’érable, qui Ă©taient destinĂ©s essentiellement Ă  l’enseignement. 2 885 modĂšles en tout, ce qui constitue un corpus pĂ©dagogique et culturel de grande qualitĂ© et d’intĂ©rĂȘt mondial : il s’agit de la collection la plus importante aprĂšs celle de Berlin qui compte environ 3 500 modĂšles. « Paul Groth (1843-1927), physicien cristallographe Ă  l’origine de la version moderne de classification des minĂ©raux, Ă©tait un minĂ©ralogiste gĂ©nial et perfectionniste. C’est lui qui a rĂ©fĂ©rencĂ© les minĂ©raux en notant toutes leurs mesures angulaires, ce qui a servi ensuite Ă  l’exĂ©cution des petits modĂšles en bois », commente Denis Leypold, responsable scientif ique du MusĂ©e de minĂ©ralogie. Groth est allĂ© jusqu’à faire venir en 1877 un « modeleur » rĂ©putĂ©, le saxon Wenzel, qui a rĂ©alisĂ© ses modĂšles dans les ateliers de l’Institut strasbourgeois de minĂ©ralogie.

Patrimoine

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BrĂšvesInaugurationEn fonctionnement depuis un an, EASE (European aseptic and sterile environment), dĂ©diĂ©e Ă  la formation d’opĂ©rateurs en salles blanches, a Ă©tĂ© inaugurĂ©e en dĂ©cembre dernier. L’évĂšnement, conduit par la directrice de l’usine-Ă©cole, Constance Perrot, s’est dĂ©roulĂ© en prĂ©sence des nombreux financeurs, partenaires et mĂ©cĂšnes de cet ambitieux projet. Avec EASE, premier projet laurĂ©at du Programme investissements d'avenir (volet formation par alternance), l’UniversitĂ© de Strasbourg devient le seul Ă©tablissement d’enseignement supĂ©rieur en Europe dotĂ© d’une plateforme de formation aux mĂ©tiers de la production pharmaceutique en milieu stĂ©rile.

EuropeLe label prestigieux sur les questions europĂ©ennes Jean-Monnet pilotĂ© par l’Union europĂ©enne a Ă©tĂ© dĂ©cernĂ© Ă  l’UniversitĂ© de Strasbourg pour le Centre Jean-Monnet transfrontalier franco-allemand. RattachĂ© Ă  Sciences Po Strasbourg, le Centre Jean Monnet a Ă©tĂ© lancĂ© officiellement le lundi 5 novembre 2018. AncrĂ© dans un territoire transfrontalier et engagĂ© dans la construction du campus europĂ©en, il permettra la crĂ©ation d’un bachelor trinational Eucor, d’un dispositif diplĂŽmant de formation continue sur les questions europĂ©ennes et d'une plateforme numĂ©rique de cours sur l'Europe.

Mousses« Comment les bulles s’organisent ? Quelle est le lien entre cette organisation et les propriĂ©tĂ©s de la mousse ? Comment modifier ces mousses pour leur donner des propriĂ©tĂ©s nouvelles ? » C’est Ă  ces questions que Wiebke Drenckhan, chercheuse Ă  l’Institut Charles Sadron, tente de rĂ©pondre depuis sa thĂšse. Objectif : exploiter le vĂ©ritable potentiel des mousses polymĂšres. Son travail dĂ©jĂ  rĂ©compensĂ© par une premiĂšre bourse ERC Starting Grant de 1,5 million d’euros en 2012, vient Ă  nouveau d’ĂȘtre reconnu Ă  travers l’attribution d’un second ERC Consolidator Grant en 2018.

AnniversaireAu cours de ces dix derniĂšres annĂ©es, les travaux pratiques d’OpenLAB (ouverture pĂ©dagogique et novatrice de laboratoires) se sont rĂ©alisĂ©s dans prĂšs de 100 % des lycĂ©es alsaciens. L'opĂ©ration OpenLAB qui a cĂ©lĂ©brĂ© ses dix ans en novembre dernier, est une Initiative d’excellence (IdEx) nĂ©e de la volontĂ© commune de l’Inspection pĂ©dagogique rĂ©gionale et de l’École doctorale des sciences de la vie et de la santĂ© de l’UniversitĂ© de Strasbourg. L’objectif : aller Ă  la rencontre des lycĂ©ens (de terminale d’abord et de premiĂšre depuis 2011), avec la conviction que le meilleur moyen d’échanger autour de la science est de permettre aux jeunes de rĂ©aliser une expĂ©rience en mettant « la main Ă  la pĂąte » avec des doctorants. Selon une enquĂȘte de satisfaction, plus de 80 % des lycĂ©ens expriment une trĂšs grande satisfaction et les professeurs sont trĂšs enthousiastes et satisfaits par l’intervention. Vivement le prochain anniversaire !

38 le magazine d’information de l’UniversitĂ© de Strasbourg

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Savoir(s) n°35 39

DĂ©couverteUne mission conjointe de l'Institut français d’archĂ©ologie orientale (IFAO) et de l'UniversitĂ© de Strasbourg a dĂ©couvert une stĂšle et deux sarcophages de la XVIIIe dynastie prĂšs de Louxor en Égypte. Les deux sarcophages ont Ă©tĂ© ouverts le 24 novembre dernier, en prĂ©sence du ministre des AntiquitĂ©s Ă©gyptien, Khaled el-Anani. « Cette dĂ©couverte – qui depuis a fait le tour du monde - est importante Ă  plusieurs points de vue, d’une part parce qu’elle est le rĂ©sultat de l’utilisation d’une mĂ©thode innovante de production et d’enregistrement des donnĂ©es de fouilles et d’autre part par l’histoire exceptionnelle des objets mis au jour », dĂ©taille le directeur de l’Institut d’égyptologie de l’UniversitĂ© de Strasbourg, FrĂ©dĂ©ric Colin.

RĂ©seauPour rĂ©pondre aux besoins technologiques des entrepreneurs et des jeunes entreprises, et pour faciliter le dĂ©veloppement de projets Ă  l'interface de plusieurs domaines scientifiques et techniques, l'UniversitĂ© de Strasbourg a crĂ©Ă© un rĂ©seau de laboratoires et d’espaces de coworking. Ce rĂ©seau inaugurĂ© en octobre dernier compte Ă  ce jour six fablabs couvrant la biologie vĂ©gĂ©tale, la microbiologie, la chimie, l'Ă©lectronique, la robotique, les impressions 3D, ainsi que l'art et le design. Il est accessible aux Ă©tudiants bĂ©nĂ©ficiaires du statut national Ă©tudiant-entrepreneur, ainsi qu'aux entreprises et aux start-up par le biais de l’embauche d’un stagiaire. Cette initiative unique en France a bĂ©nĂ©ficiĂ© du soutien financier de l’EuromĂ©tropole et du programme Initiative d'excellence, dans le cadre des investissements d’avenir.

RencontreAlain RĂ©gnier, dĂ©lĂ©guĂ© interministĂ©riel chargĂ© de l’accueil et de l’intĂ©gration des rĂ©fugiĂ©s auprĂšs du ministĂšre de l’IntĂ©rieur a rencontrĂ© les enseignants-chercheurs en exil et les Ă©tudiants rĂ©fugiĂ©s inscrits Ă  l’Institut international d’études françaises (IIEF) de l’UniversitĂ© de Strasbourg, le 21 janvier. L’occasion de rappeler l’engagement de l’universitĂ© qui a Ă©tĂ© l’une des premiĂšres en France Ă  mettre en place un dispositif permettant aux migrants de se former en français par l’obtention d’un diplĂŽme universitaire de Français langue Ă©trangĂšre (FLE), dĂšs la rentrĂ©e 2015.

PĂ©piteLauriane Renaud, Ă©tudiante entrepreneur Ă  l’UniversitĂ© de Strasbourg, diplĂŽmĂ©e en master Biologie vĂ©gĂ©tale, est l’un des trois grands prix de la 5Ăš Ă©dition du prix PĂ©pite-Tremplin pour l'entrepreneuriat Ă©tudiant dĂ©cernĂ© en novembre 2018. Un concours qui rĂ©compense chaque annĂ©e au niveau national les meilleurs projets innovants d’étudiants et de jeunes diplĂŽmĂ©s. Le projet ”P permet le dĂ©veloppement d'un outil qui dĂ©tecte les micropolluants dans l'environnement (rĂ©sidus de mĂ©dicaments, pesticides, insecticides
). La quantification de molĂ©cules rĂ©siduelles posant certaines problĂ©matiques au vu des technologies existantes, la solution proposĂ©e par le projet ”P permettra de dĂ©velopper des kits de dĂ©tection, sous forme de consommables de laboratoires.

La version plurimédia de Savoir(s)

sur savoirs.unistra.fr

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CS 90032 – 67081 Strasbourg Cedex TĂ©l. : +33 (0)3 68 85 00 00 unistra.frDirecteur de la publication : Michel DenekenDirecteur Ă©ditorial : Mathieu SchneiderRĂ©dacteur en chef : FrĂ©dĂ©ric ZinckSecrĂ©tariat de rĂ©daction : Julie GiorgiContact de la rĂ©daction : Service communication de l’Unistra 3-5 rue de l’UniversitĂ© 67000 Strasbourg TĂ©l. : +33 (0)3 68 85 12 51ComitĂ© Ă©ditorial : Rachel Blessig, Sylvain Diaz, Jean-Claude Gall, François Gauer, Emmanuelle Gemmrich, Paul-Antoine Hervieux, Ilyas Kenadid, NoĂ«lie Plasse, SĂ©bastien Soubiran, Armelle Tanvez.Ont participĂ© Ă  ce numĂ©ro : Edern Appere, Floriane Beigbeder, Elsa Collobert, LĂ©a Fizzala, Julie Giorgi Mathilde Hubert, Caroline Laplane, Jean de Miscault, Myriam Niss, Marion Riegert, StĂ©phanie Robert, FrĂ©dĂ©ric Zinck.CrĂ©dits photos :Pascal Bastien : p. 1, 4, 12, 13, 14 gauche, 18, 21, 25 droite bas, 28 droite, 30, 34, 35Catherine Schröder : p. 6, 7, 9, 11 gauche, 16, 17, 22, 23, 24, 25 gauche, 25 droite haut, 26, 27 gauche haut, 27 droite, 28 gauche, 29, 37, 38 droite, 39 droiteDR : p. 8, 10, 11 droite, 15, 19, 27 gauche bas, 32, 33, 38 gauche, 39 gaucheGĂ©rard Brauer : p. 14 droiteConception graphique : Welcome ByzanceImpression : Ott imprimeursISSN : 2100 – 1766

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Alain Beretz, président de l'Université de Strasbourg de 2009 à 2016.

«  Regarder vers demain , cela doit rester

la mission , et l' ambition

de l’Unistra . »