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Savoir(s)le magazine dâinformation de
lâUniversitĂ© de Strasbourg
N° 35 | février 2019
#10ansUnistra
Université de Strasbourg
Lâaudace des pionniers
Recherche
Ces Ă©tranges polaritons qui bouleversent la chimie
Formation
Lâimplication pĂ©dagogique rĂ©compensĂ©e
Et ailleurs
Eurolife : la force vitale dâun rĂ©seau europĂ©en
Patrimoine
Lâharmonie du bĂ©ton
Vivre ensemble
Focus =
Sommaire
2 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
Recherche
4 Ces Ă©tranges polaritons qui bouleversent la chimieâŠ
6 Ătudier le moustique sous haute surveillance
8 Un sortilĂšge dâamour dĂ©cryptĂ© dans un papyrus
9 Les robots : nouvelle catégorie du droit ?
10 Le rĂŽle de l'ocytocine dans les liens sociaux
11 « Mettre du liant entre formation et recherche »
Formation
12 Simuler nâest pas jouer
15 Des vikings Ă la rescousse des Ă©tudiants
16 « Se former Ă sâinformer »
17 Lâimplication pĂ©dagogique rĂ©compensĂ©e
= Focus Vivre ensemble
Lâaudace des pionniers
18 Strasbourg pionniĂšre
21 Attractivité fusionnelle
22 Une fusion en direct : « Demain, lâUniversitĂ© de Strasbourg »
23 Les grands chantiers de la fusion
25 Regards sur la nouvelle université
29 « Les donateurs ne sont pas généreux, ils sont plutÎt solidaires et responsables »
Et ailleurs
30 Une avancée mondiale sur le traitement des maladies orphelines
32 Immersion scientifique enthousiasmante en Chine
33 Eurolife : la force vitale dâun rĂ©seau europĂ©en
Patrimoine
34 Lâharmonie du bĂ©ton
36 Une fille de la Guerre froide
37 La passion des modĂšles cristallographiques
38 BrĂšves
La version plurimédia de Savoir(s) sur savoirs.unistra.fr
Savoir(s) n°35 3
L'UniversitĂ© de Strasbourg pionniĂšre. Si lâon peut reprocher Ă cette affirmation un certain manque de modestie, il faut aussi regarder lâhistoire en face et accepter que le pas franchi par les trois universitĂ©s strasbourgeoises au seuil de lâannĂ©e 2009 Ă©tait un moment historique. Il relĂ©guait au passĂ© le modĂšle des universitĂ©s disciplinaires crĂ©Ă©es aprĂšs 1968. Il ouvrait la voie Ă une profonde restructuration du paysage de lâenseignement supĂ©rieur français, restructuration jugĂ©e nĂ©cessaire par la concurrence internationale et â bien que lâon insistĂąt moins sur ce point â devenue indispensable Ă la science dont lâavenir Ă©tait dans la collaboration interdisciplinaire.
Pour toutes ces raisons, et pour bien dâautres encore qui sont trĂšs justement rappelĂ©es dans le focus de ce numĂ©ro, lâUniversitĂ© de Strasbourg Ă©tait pionniĂšre. Toutefois, Ă en juger par lâĂ©tymologie mĂȘme du mot « pionnier », qui dĂ©rive de lâancien français « peon » (piĂ©ton), elle est aussi pionniĂšre par sa constante volontĂ© de cheminer.
En 2009 dĂ©jĂ , elle avait tracĂ© le chemin qui lâa conduite aujourdâhui Ă ĂȘtre une universitĂ© dâ « excellence » et lâun des grands pĂŽles universitaires internationaux. Elle avait compris, en le revendiquant dans son nom, que les universitĂ©s participeraient activement au dĂ©veloppement Ă©conomique et social dâune ville et dâun territoire. Elle avait misĂ© sur lâexcellence de la recherche et compris le besoin de moderniser son enseignement, pour toujours vivre avec son temps.
Si lâon regarde lâhistoire Ă une Ă©chelle de temps plus large, le chemin que sâest tracĂ© lâUniversitĂ© de Strasbourg nâest pas linĂ©aire. Il a connu des ruptures, des fractures mĂȘme ; il a Ă©tĂ© Ă©maillĂ© de renaissances et de retrouvailles. Ă travers ces alĂ©as, le tout est de maintenir un cap. Aujourdâhui, avec une universitĂ© qui rassemble quelque 55 000 Ă©tudiants et personnels, ce cap doit ĂȘtre discutĂ© collectivement. Quelle universitĂ© voulons-nous construire ensemble pour 2030 ? Câest la question Ă laquelle nous invitons toute notre communautĂ© Ă rĂ©pondre dans le cadre de la grande consultation baptisĂ©e « Cap 2030 ».
Parce que, pour rester des pionniers, nous devons tous avoir envie dâavancer ensemble, dans la mĂȘme direction.
Mathieu Schneider Vice-président Culture, Sciences en société
^%e8Quelle université voulons-nous construire ensemble pour 2030 ?
Ădito Ătre pionnier
Savoir(s) n°35 5
Le nouveau terrain de jeu du multiprimé physicochimiste Thomas Ebbesen : les états hybrides lumiÚre-matiÚre qui naissent en cavité micro ou nanométrique, entre deux lames de métal. Cette chimie polaritonique permet de changer les propriétés de la matiÚre et ouvre un pan méconnu de cette science.
«âŻJâai trouvĂ© cela absolument fantastique, câest une maniĂšre de modifier les propriĂ©tĂ©s des molĂ©cules sans les toucher, mais en les mettant dans une cavitĂ© pour contrĂŽler leur environnement Ă©lectromagnĂ©tiqueâŻÂ», raconte-t-il Ă propos de lâarticle du physicien et prix Nobel Serge Haroche en 1989, sur lâĂ©lectrodynamique de cavitĂ©, sa grande source dâinspiration. Celle-ci mĂȘme qui a valu Ă Thomas Ebbesen une dĂ©couverte notoire, la transmission extraordinaire de la lumiĂšre, rĂ©compensĂ©e par le prix Kavli1 en 2014.
Une autre chimie dans les nanocavitĂ©sEn 2012, lâinsatiable curieux reprend ce mĂȘme point de dĂ©part et dĂ©veloppe un autre pan, la chimie polaritonique, selon le terme quâil a inventĂ©. Il est parvenu Ă dĂ©montrer ce rĂȘve quâil caressaitâ: modif ier les propriĂ©tĂ©s des molĂ©cules grĂące Ă lâĂ©lectromagnĂ©tisme quantique, en les plaçant simplement dans une cavitĂ©. La cavitĂ© peut ĂȘtre des nanoĂ©prouvettes ou celle formĂ©e entre deux plaques de verre recouvertes dâune couche mĂ©tallique, des miroirs. Un protocole matĂ©riellement simple, facile Ă mettre en Ćuvre, mais le phĂ©nomĂšne est des plus complexes Ă comprendre et expliquerâ! Thomas Ebbesen et Anoop Thomas2, son doctorant qui mĂšne des expĂ©riences et Ă©crit des publications avec lui, sont les premiers Ă le reconnaĂźtre.Ă lâinstar de mĂ©tronomes ou de pendules qui se synchronisent lorsquâils sont sur un mĂȘme support en Ă©changeant de lâĂ©nergie mĂ©canique, les molĂ©cules peuvent entrer en rĂ©sonance avec
la cavitĂ© en Ă©changeant des photons virtuels (qui disparaissent aussitĂŽt formĂ©s). Il faut pour cela ajuster la taille de la cavitĂ© Ă une longueur dâonde prĂ©cise en rapport avec la molĂ©cule. On crĂ©e ainsi deux Ă©tats hybrides lumiĂšre-matiĂšre, mĂȘme dans lâobscuritĂ©, dits «âŻĂ©tats polaritoniquesâŻÂ». LâĂ©quipe a montrĂ© enâŻ2012 etâŻ2016, que ce phĂ©nomĂšne pouvait modif ier une rĂ©action chimique, sa vitesse mais aussi son sens en favorisant un produit plutĂŽt quâun autre. Ils ont Ă©galement rĂ©ussi à «âŻexalterâŻÂ» la conductivitĂ© des semi-conducteurs organiques, dont on espĂšre quâils pourraient un jour remplacer le silicium de nos ordinateurs. Et tout derniĂšrement, le phĂ©nomĂšne marche aussi sur les enzymes, des molĂ©cules biologiquesâ!
« Je nâai jamais autant Ă©tĂ© excitĂ© que par ça »Si en 2011, les Ă©diteurs des revues scientif iques Ă©taient incrĂ©dules et pensaient quâil sâagissait de science-f iction, ils commentent aujourdâhui leurs publications par «âŻbeautifulâŻÂ», «âŻunbelievableâŻÂ», «âŻso excitingâŻÂ» «âŻremarkableâŻÂ». Thomas Ebbesen a reçu le grand prix de la fondation de la Maison de la chimie en fĂ©vrierâŻ2018 pour ces recherches. «âŻCâest le quatriĂšme sujet de ma carriĂšre, et je nâai jamais autant Ă©tĂ© excitĂ© que par çaâ!âŻÂ». Nous sommes au dĂ©but dâune nouvelle chimie, quâon ne soupçonnait mĂȘme pas il y a quelques annĂ©es. Et le chercheur a encore beaucoup dâidĂ©es dans ses tiroirsâŠ
Stéphanie Robert
1 Habituellement qualifié de prix Nobel des nanosciences
2 Laboratoire des nanostructures, Institut de science et d'ingénierie supramoléculaires (Isis)
En 2011 , les Ă©diteurs
des revues scientifiques pensaient quâil sâagissait de science-fiction
.
Ces Ă©tranges polaritons qui bouleversent la chimieâŠ
1 Thomas Ebbesen et Anoop Thomas manipulant le faisceau à ions focalisé utilisé pour créer des structures optiquement raisonnantes.
Recherche
Les virus de la dengue, de la fiĂšvre jaune, de Zika ou encore du chikungunya ont un point commun : ils peuvent tous
ĂȘtre transmis par la mĂȘme espĂšce de moustique. Aedes albopictus, plus connu sous le nom de moustique tigre, et Aedes aegypti, un de ses cousins, sont le cĆur du sujet dâĂ©tude de lâĂ©quipe RĂ©ponses antivirales chez le moustique Aedes, dirigĂ©e par Joao Marques.
ExceptĂ© pour la f iĂšvre jaune, il nâexiste Ă ce jour aucun traitement permettant de prĂ©venir ou de soigner une contamination par une des maladies transmises par les moustiques Aedes. EmpĂȘcher la transmission est le but de la recherche menĂ©e par lâĂ©quipe de Joao Marques. Pour y parvenir, les chercheurs se focalisent sur les mĂ©canismes de transmission. En donnant du sang contaminĂ© aux moustiques Ă©levĂ©s en laboratoires, ils reproduisent au plus prĂšs le mĂ©canisme naturel dâinfection et en Ă©tudient toutes les phases chez les moustiques Aedes.
Tout commence dans lâintestinChez la majoritĂ© des insectes, le principal mĂ©canisme qui permet de contrĂŽler le processus dâinfection par un virus sâappelle lâinterfĂ©rence ARN. GrĂące Ă elle, lâhĂŽte du virus peut limiter la zone atteinte, pour survivre le plus longtemps possible. Lors dâune contamination, le moustique est dâabord infectĂ© dans lâintestin, oĂč il digĂšre le sang absorbĂ©. En lâabsence de mĂ©canisme antiviral, le virus se rĂ©plique et se propage ensuite dans le reste de lâorganisme, dont les glandes salivaires qui permettent la transmission lors de la prochaine piqĂ»re. «âŻChez les moustiques Aedes, lâinterfĂ©rence ARN fonctionne dans tout le corps sauf dans lâintestin, explique Joao Marques. Câest une des seules espĂšces de moustiques chez laquelle on constate une inhibition de ce mĂ©canisme.âŻÂ» Cette absence intrigue les chercheurs, qui Ă©tudient les particularitĂ©s de lâexpression gĂ©nĂ©tique dans lâintestin de ce moustique, par rapport au reste de ses organes. Ils isolent alors un nouveau gĂšne, directement impliquĂ© dans le fonctionnement de lâinterfĂ©rence ARN, et le baptisent «âŻloqs2âŻÂ».
Des moustiques gĂ©nĂ©tiquement modifiĂ©s«âŻUne fois que nous avons dĂ©couvert «âŻloqs2âŻÂ», nous avons voulu tester lâimportance de son rĂŽle dans le contrĂŽle de lâinfection. Nous avons alors crĂ©Ă© des moustiques gĂ©nĂ©tiquement modifiĂ©s chez lesquels
Maladies tropicales : le moustique comme dernier rempart ?
LâInsectarium, inaugurĂ© en octobre 2018, est une extension de lâInstitut de biologie molĂ©culaire et cellulaire (IBMC). Portrait dâun outil de pointe dĂ©diĂ© Ă lâĂ©tude et Ă la comprĂ©hension des maladies transmises par le moustique.
Ătudier le moustique sous haute surveillance
EmpĂȘcher la transmission est le but
de la recherche menĂ©e par lâĂ©quipe de Joao Marques.
Dans les couloirs de lâInsectariumDans une des huit salles dâĂ©levage, notre guide du jour, Ăric Marois, chercheur Inserm Ă lâIBMC, nous montre les diffĂ©rents stades de dĂ©veloppement du moustique avec, sous nos yeux, « lâennemi public numĂ©ro 1 » Anopheles gambiae, vecteur du paludisme.
O Une visite au cĆur dâun bĂątiment placĂ© sous haute sĂ©curitĂ© Ă
retrouver sur le site unistra.fr rubrique Labos et Ă©quipements
6 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
â Le moustique Aedes, principal sujet dâĂ©tude de lâInsectarium.
Savoir(s) n°35 7
Jules Hoffmann, prix Nobel de médecine et de physiologie en 2011, revient sur la genÚse du projet et les enjeux de cet outil de recherche.
«âŻCâest en 2005 environ que le projet a germĂ© de construire une annexe Ă lâIBMC. Un nouveau bĂątiment dans lequel on pourrait, sous couvert de prĂ©cautions considĂ©rables, Ă©lever des moustiques transporteurs de maladies dangereuses et procĂ©der Ă diffĂ©rentes expĂ©rimentations. En gĂ©nĂ©tique molĂ©culaire par exemple, lâintĂ©rĂȘt est de faire de la transgenĂšse, une technique qui permet de modif ier le gĂ©nome dâun moustique et de dĂ©terminer la responsabilitĂ© des gĂšnes dans les mĂ©canismes de transmissions. Le prix Nobel que nous avons eu en 2011 pour les travaux menĂ©s Ă Strasbourg a certes permis dâapporter une force de persuasion quant
Ă lâintĂ©rĂȘt de ce projet. Les connaissances sur la transmission des virus par les insectes ont depuis, Ă©normĂ©ment progressĂ© ainsi que les techniques pour les Ă©tudier. De ce fait, si certaines questions sont les mĂȘmes, on peut aujourdâhui les aborder de maniĂšres diffĂ©rentes. Ce sont des questions anciennes qui sont aujourdâhui aff inĂ©es avec des techniques beaucoup plus Ă©voluĂ©es. LâĂ©quipe de Jean-Luc Imler, ModĂšles insectes dâimmunitĂ© innĂ©e (M3I) - va ĂȘtre le fer de lance des travaux de lâIBMC au sein de cette nouvelle structure. LâInsectarium est aujourdâhui un outil de pointe pour comprendre de quelle façon les pathogĂšnes comme celui du paludisme, de la dengue, du chikungunya ou encore le virus Zika, infectent les moustiques et comment ces derniers se dĂ©fendent. Des Ă©tudes essentielles pour dĂ©velopper de nouveaux moyens de lutte.âŻÂ»
Propos recueillis par Frédéric Zinck
ce gĂšne est exprimĂ© dans lâintestinâŻÂ», raconte Joao Marques. Lorsque «âŻloqs2âŻÂ» est rendu inactif dans leur organisme, les moustiques nâont plus aucun contrĂŽle sur la propagation du virus. Ils deviennent trĂšs rapidement des vecteurs de transmission. Au contraire, lorsque le gĂšne est gĂ©nĂ©tiquement activĂ© dans lâintestin, les chercheurs constatent une bien meilleure restriction du virus Ă cette zone. Si le virus ne s'Ă©chappe pas de l'intestin, les glandes salivaires ne sont jamais atteintes et lâinsecte, bien que porteur de la maladie, ne peut pas la transmettre Ă lâhomme.
Percer le secret des mĂ©canismes antivirauxSi, dâun point de vue pratique, les moustiques gĂ©nĂ©tiquement modifiĂ©s pourraient dĂ©jĂ servir dâoutils pour rĂ©guler la transmission de maladies dans la nature, le fonctionnement exact de leurs mĂ©canismes antiviraux est encore mal compris. Pour Joao Marques, il faut «âŻcontinuer Ă creuser pour mieux
comprendre pourquoi «âŻloqs2âŻÂ» rend les moustiques plus rĂ©sistants et pourquoi seul Aedes possĂšde ce gĂšne particulier.âŻÂ» Des questions dâores et dĂ©jĂ Ă©tudiĂ©es au sein du tout nouvel Insectarium de Strasbourg.
LĂ©a Fizzala
L'Insectarium en chiffres6,02 millions dâeuros
Ătat (OpĂ©ration campus) et CNRS.
3,2 millions dâeuros Programme
investissements dâavenir Equipex I2MC pour
lâĂ©quipement.
1,15 million dâeuros Ătat, RĂ©gion Grand Est,
Département du Bas-Rhin et Eurométropole de
Strasbourg pour les premiÚres années de fonctionnement.
Les trois prix Nobel Jules Hoffmann (physiologie et médecine), Jean-Pierre Sauvage (chimie), Jean-Marie-Lehn (chimie) et le président de l'université, Michel Deneken signent le ruban d'inauguration de l'Insectarium en octobre 2018.
Recherche
L'Insectarium, la nouvelle extension de l'IBMC.
Un sortilĂšge dâamour copte vieux de plus de 1 300 ans a livrĂ© ses secrets en mai 2018, aprĂšs des annĂ©es dâefforts, Ă Korshi Dosoo, alors enseignant Ă lâUniversitĂ© de Strasbourg. Ce spĂ©cialiste des textes magiques coptes et de leur lien avec la religion a publiĂ© le rĂ©sultat de ses recherches dans le Journal of Coptic Studies.
Lâhistoire du dĂ©cryptage de cette formule magique ne date pas dâhier mais plutĂŽt de 2014. Korshi Dosoo, alors en thĂšse, dĂ©couvre un peu par hasard le papyrus copte Ă la bibliothĂšque de lâUniversitĂ© de Macquarie, en Australie. «âŻJâĂ©tais lĂ -bas en Ă©cole dâĂ©tĂ© pour apprendre le copte Ă des Ă©tudiants. Jâai voulu les familiariser avec les papyrus, je me suis alors rendu dans la collection de lâuniversitĂ© qui en contient plus de 1â000, câest lĂ que je lâai dĂ©couvertâŻÂ», raconte le jeune homme.
Un rituel dâamourSur le papyrus de 8,4âŻcm de longueur et 12âŻcm de large deux oiseaux symbolisant deux personnes se font face. « En faisant un parallĂšle avec dâautres papyrus, on remarque que le face-Ă -face est caractĂ©ristique dâun rituel dâamour alors que le dos Ă dos symbolise plutĂŽt la sĂ©parationâŻÂ», souligne
Korshi Dosoo qui Ă©voque un texte trĂšs fragmentaire faisant probablement partie dâun plus grand ensemble.«âŻDessus, il y a des mots magiques Ă©quivalents à «âŻAbracadabraâŻÂ» qui nâont pas de sens mais donnent un style. Ils sont suivis dâinstructions pour lâoffrande comme «âŻutiliser du muscâŻÂ».âŻÂ» Place ensuite Ă une mention dâAdam, le premier homme et une invocation Ă JĂ©sus Christ de donner grĂące au visage de lâapprenti jeteur de sort. JĂ©sus Christâ? Rien de surprenant pour le chercheur car nous sommes Ă lâĂ©poque de lâĂgypte chrĂ©tienne. «âŻLe papyrus est difficile Ă dater, mais en regardant lâĂ©criture, on devine quâil a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© au VIIe ou au VIIIeâŻsiĂšcle.âŻÂ»
Pouvoir dâattractionLâidĂ©e de la formule magique est ainsi dâapporter Ă celui qui la rĂ©cite un pouvoir dâattraction, lui donner un certain charisme. Au-delĂ du sortilĂšge, le papyrus donne une idĂ©e de la vision du monde des personnes de cette Ă©poque, «âŻĂ§a permet de voir comment ils pensaient leurs relations sociales, les crises de la vie quâils traversaientâŠâŻÂ»La formule fonctionneâ? «âŻJe ne lâai pas essayĂ©e personnellement. Peut-ĂȘtre que dans mes futurs projets au sein de l'UniversitĂ© de Wurtzbourg oĂč je travaille actuellement ce serait quelque chose Ă voirâŻÂ», sourit Korshi Dosoo qui prĂ©cise quâun chercheur allemand avait testĂ© des formules Ă©crites sur des papyrus similaires il y a une trentaine dâannĂ©es, mais sans grand succĂšsâŠ
Marion Riegert
Une vingtaine de papyrus coptes magiques Ă la BNULa BibliothĂšque nationale et universitaire conserve une collection dâenviron 700 papyrus coptes acquis pour l'essentiel par deux professeurs de l'UniversitĂ© de Strasbourg Ă l'Ă©poque allemande (f in XIXeâŻsiĂšcle). En plus des textes littĂ©raires et documentaires, il y a aussi une vingtaine de papyrus magiques dont les plus anciens datent du VIeâŻsiĂšcle. «âŻCe sont Ă la fois des sorts et des formules magiques. Sans oublier des amulettes qui sont des textes de protection que les personnes portaient sur elles par exemple lorsquâelles entreprenaient un voyage ou pour se protĂ©ger contre les maladiesâŻÂ», souligne Esther Garel, maĂźtre de confĂ©rences en papyrologie, langue et archĂ©ologie coptes qui prĂ©cise que tous nâont pas encore Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©s.
Un sortilĂšge dâamour dĂ©cryptĂ© dans un papyrus
8 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
Sur le papyrus de 8,4 cm de longueur et 12 cm de large deux oiseaux symbolisant deux personnes se font face.
FrĂ©dĂ©rique Berrod, professeure de droit public Ă lâInstitut dâĂ©tudes politiques de Strasbourg.
Savoir(s) n°35 9
Le projet de recherche « Droit des robots et autres avatars de lâhumain » a Ă©tĂ© lancĂ© il y a un an dans le cadre du levier SociĂ©tĂ©s de lâInitiative dâexcellence (Idex). FrĂ©dĂ©rique Berrod, professeure de droit public Ă lâInstitut dâĂ©tudes politiques (IEP) de Strasbourg et co-porteure du projet*, nous en explique les tenants et les aboutissants.
Que recouvre le titre du projetâ?Le titre est volontairement trĂšs large pour couvrir toutes les questions soulevĂ©es par les humains technologiquement augmentĂ©s, les robots humanoĂŻdes, les intelligences artif icielles et les personnalitĂ©s virtuelles qui sont trĂšs nouvelles. Ce sujet est devenu rĂ©current dans la presse et lâEurope sâen est emparĂ©e. Une de nos questions consiste Ă
savoir si le droit est le meilleur instrument pour rĂ©guler toutes ces mutations. Le robot est-il une nouvelle catĂ©gorie du droitâ? Il nâest plus une chose quand il peut prendre des dĂ©cisions autonomes. Doit-il pour autant ĂȘtre classĂ© comme personneâ? Câest sur cette distinction entre chose et personne quâa dĂ©butĂ© notre rĂ©flexion.Pour mener Ă bien cette dĂ©marche, vous avez dĂ©cidĂ© dâassocier plusieurs disciplines. Pourquoiâ?LâinterdisciplinaritĂ© sâest avĂ©rĂ©e nĂ©cessaire pour ce projet af in de confronter diffĂ©rentes mĂ©thodes de penser, diverses visions. Le droit est le point focal de lâapproche pour Ă©tudier comment il apprĂ©hende les robots et comment il devrait le faire. Les sciences de lâingĂ©nieur des systĂšmes automatisĂ©s sont convoquĂ©es pour un Ă©tat des lieux de lâactuel et des possibles et la littĂ©rature de science-f iction sert de mĂ©dium pour travailler sur les reprĂ©sentations vectrices de rĂ©flexion ou de brouillage. Nous souhaitons
ainsi travailler par rapport Ă des rĂ©alitĂ©s et non pas par rapport Ă des reprĂ©sentations, des sentiments.Autre levier de ce projet, la participation citoyenne. Pouvez-vous nous expliquerâ?Le thĂšme des robots est trĂšs prĂ©sent dans le discours politique et social et peut donc ĂȘtre lâobjet de rĂ©flexions qui associent la sociĂ©tĂ© civile. En tant que chercheurs, nous nâavons pas toutes les rĂ©ponses. Nous avons donc lâambition de nourrir la recherche de rĂ©flexions citoyennes, en association avec la Ville de Strasbourg et lâEuromĂ©tropole. Nous souhaitons sĂ©lectionner des citoyens reprĂ©sentatifs des conseils de quartiers et des conseils de jeunes pour cheminer en commun sur ce sujet et formuler des propositions. Strasbourg est le territoire rĂȘvĂ© pour avoir ces discussions citoyennes entre lâuniversitĂ©, la citĂ© et lâEurope, naturellement associĂ©e Ă ces rĂ©flexions.OĂč en est le projet aujourdâhuiâ?La premiĂšre Ă©tape de recherche acadĂ©mique sâest terminĂ©e dĂ©but novembre avec une journĂ©e dâĂ©tudes. Celle-ci a permis de dĂ©gager les reprĂ©sentations f ictionnelles du droit des robots et dâanalyser les projets europĂ©ens sur le droit des robots. Une premiĂšre publication, en collaboration avec lâUniversitĂ© polytechnique des Hauts-de-France, est programmĂ©e pour le premier semestre 2019. Aujourdâhui, un jury citoyen doit ĂȘtre constituĂ©â; des ateliers avec des experts scientif iques et des Ă©tudiants du master Communication scientif ique, Droit de lâĂ©conomie numĂ©rique et Cyberjustice sont prĂ©vus, pour prĂ©parer la confĂ©rence citoyenne f inale. Ce projet doit mener Ă des propositions Ă destination des politiques locaux, nationaux et europĂ©ens qui sâappuieront sur la rĂ©flexion commune menĂ©e sur deux ans Ă lâinterface des disciplines qui composent le projet.
Propos recueillis par Floriane Beigbeder
*Avec Philippe Clermont, maĂźtre de confĂ©rences spĂ©cialisĂ© en littĂ©rature de science-fiction (EA 1337). Autres intervenants Ă lâUniversitĂ© de Strasbourg : Louis NavĂ©, doctorant en droit public, Catherine Ledig, professeur spĂ©cialiste de lâĂ©conomie numĂ©rique, Elsa Poupardin, maĂźtre de confĂ©rences en sciences de lâinformation et de la communication, et Bruno Trescher, maĂźtre de confĂ©rences HDR en droit public.
Les robots : nouvelle catégorie du droit ?
«âŻCe projet doit mener Ă des propositions Ă destination des politiques
locaux , nationaux
locaux et
europĂ©ens âŻ.»
Recherche
Marcel Hibert, chercheur au Laboratoire dâinnovation thĂ©rapeutique.
AprĂšs quatorze ans de recherches, le Laboratoire dâinnovation thĂ©rapeutique est parvenu Ă trouver la premiĂšre molĂ©cule capable de rĂ©tablir lâinteraction sociale dans un modĂšle animal dâautisme. Une dĂ©couverte qui ouvre la voie Ă la crĂ©ation dâun mĂ©dicament pour lâhomme.
Quâest-ce que lâamourâ? Câest par cette question inhabituelle dans le domaine de la chimie et des sciences du vivant que Marcel Hibert, chercheur au Laboratoire dâinnovation thĂ©rapeutique, sâest intĂ©ressĂ© aux mĂ©canismes molĂ©culaires impliquĂ©s dans ce sentiment et plus prĂ©cisĂ©ment Ă lâocytocine. DiffĂ©rentes Ă©tudes ont mis en Ă©vidence son rĂŽle dans le rĂ©tablissement du lien social chez les autistes, Marcel Hibert dĂ©cide lui aussi dâĂ©tendre ses recherches Ă ce sujet.
Activer les rĂ©cepteurs de lâocytocine dans le cerveauCâĂ©tait en 2004. Lâocytocine Ă©tant une hormone chimiquement fragile, le projet du laboratoire
sâest orientĂ© vers la recherche de molĂ©cules stables, administrables par voie pĂ©riphĂ©rique, capables dâagir sur le cerveau. «âŻNotre hypothĂšse a Ă©tĂ© la suivanteâ: si on parvient Ă activer les rĂ©cepteurs de lâocytocine dans le cerveau, cela aura une action sur lâautisme. La molĂ©cule recherchĂ©e devra avoir un rĂŽle dâactivateur.âŻÂ»Durant quatorze ans, les chercheurs strasbourgeois ont conçu des molĂ©cules testĂ©es in vitro puis sur les meilleurs modĂšles dâanimaux prĂ©sentant les principaux symptĂŽmes de lâautisme
(problĂšmes dâinteraction sociale, mouvements dĂ©sordonnĂ©sâŠ). «âŻNous avions trouvĂ© rapidement
des molĂ©cules qui se liaient au rĂ©cepteur mais elles le bloquaient au lieu de lâactiver.âŻÂ» En 2018, eurĂȘka. La premiĂšre molĂ©cule capable de rĂ©tablir lâinteraction sociale dans ces modĂšles animaux est dĂ©couverte. «âŻCes rĂ©sultats valident le rĂ©cepteur de lâocytocine comme cible thĂ©rapeutique potentielle.âŻÂ»
Vers la crĂ©ation dâun mĂ©dicamentUn premier pas vers la crĂ©ation dâun mĂ©dicament pour lâhommeâ? «âŻDans 90âŻ% des cas, ce qui fonctionne chez la souris marche chez lâhomme.âŻÂ» Mais la route est encore longueâ: «âŻNous allons vers un processus de valorisation. Il reste Ă optimiser cette premiĂšre molĂ©cule puis Ă dĂ©montrer son efficacitĂ© chez les patients.âŻÂ» Un travail qui devrait prendre huit Ă dix ans.«âŻMa mission va sâarrĂȘter Ă trouver un candidat mĂ©dicament et dĂ©poser un brevetâŻÂ», souligne Marcel Hibert qui va prof iter de cette dĂ©couverte pour poursuivre ses investigations sur les mĂ©canismes en jeu dans le lien affectif. «âŻLes rĂ©sultats expĂ©rimentaux laissent penser que cette molĂ©cule pourrait aider toute personne qui souffre de problĂšmes dans les relations sociales comme lâanorexie, le bĂ©gaiementâŠâŻÂ» Lâamour nâa pas f ini de faire courir notre chimiste.
M. R.
De lâocytocine Ă lâautisme, il nây a eu quâun pasTout commence dans les annĂ©es 2000. «âŻIl nây avait aucune Ă©tude biologique dans le domaine de lâamour. Un thĂšme impossible Ă aborder jusquâĂ une publication de chercheurs amĂ©ricains montrant que lâocytocine Ă©tait impliquĂ©e dans divers comportements dâattachement chez lâanimal. Dans une mĂȘme espĂšce, certains gĂšnes les prĂ©disposaient Ă ĂȘtre fidĂšles et parents attentifs, dâautres Ă ĂȘtre polygamesâŻÂ», raconte Marcel Hibert. En poursuivant leurs Ă©tudes, les chercheurs se sont rendu compte quâun animal privĂ© dâocytocine Ă la naissance prĂ©sentait un comportement asocial. Le parallĂšle a rapidement Ă©tĂ© fait avec lâautisme. «âŻDes chercheurs ont fait inhaler de lâocytocine Ă des personnes autistes et ont constatĂ© que cela avait un impact positif sur leurs interactions sociales.âŻÂ»
Le rĂŽle clĂ© de lâocytocine dans les liens sociaux
«âŻIl reste Ă optimiser cette premiĂšre
molĂ©cule puis Ă dĂ©montrer son efficacitĂ© chez les patients.âŻÂ»
10 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
â Formule chimique de la molĂ©cule d'ocytocine..
Catherine Florentz, vice-présidente Recherche et formation doctorale.
Savoir(s) n°35 11
Sur le modĂšle anglo-saxon des graduate schools, les Ăcoles universitaires de recherche (EUR) ont fait leur premiĂšre rentrĂ©e. Catherine Florentz, vice-prĂ©sidente Recherche et formation doctorale, en explique les particularitĂ©s.
Il y a dix ans, au moment de la fusion, il a Ă©tĂ© nĂ©cessaire, pour «âŻvoir clair dans le paysageâŻÂ», de sĂ©parer les composantes et les unitĂ©s de recherche. Mais les investissements dâavenir, mis en place en 2011, ont permis de f inancer Ă Strasbourg, sur le long terme, onze laboratoires dâexcellence. Il est devenu progressivement Ă©vident quâil fallait remettre plus de liant entre la recherche et la formation.
Lâappel dâoffres national, lancĂ© f in 2016 par lâAgence nationale de la recherche, correspondait exactement Ă ce que lâUnistra souhaitait mettre en place pour atteindre cet objectif. Nous avons lancĂ© un appel Ă candidatures pour dĂ©crocher ce f inancement national et crĂ©er des EUR. Quatre dossiers ont Ă©tĂ© retenus, portĂ©s par des consortiums dâĂ©quipes pluridisciplinaires de recherche en chimie supramolĂ©culaire, biologie molĂ©culaire et cellulaire intĂ©grative, nanoscience-physique quantique et approche de la douleur. Strasbourg est aussi membre dâune EUR nationale en dĂ©mographie.Ce qui est spĂ©cif ique aux EUR, câest la continuitĂ© des parcoursâŠLâEUR Ă©tablit une continuitĂ© du master Ă lâinsertion professionnelle. DĂšs le master 1, on y travaille sur projets. Il y rĂšgne une grande libertĂ© dâinnovation pĂ©dagogique. La formule sâadresse Ă un petit nombre dâĂ©tudiants, trĂšs accompagnĂ©s, ce qui lui donne une grande attractivitĂ© internationale.
Mais il ne sâagit pas de produire des Ă©tudiants «âŻĂ partâŻÂ» ou isolĂ©sâ: lâintĂ©gration est harmonieuse et ils participent aux cours de master avec les autres.Quels sont les impacts attendusâ?La politique de lâUniversitĂ© de Strasbourg vise Ă Ă©tablir des liens, partout oĂč câest possible, entre formation et recherche. Cette mise en place dâinstituts interdisciplinaires permet de faire ressortir des thĂ©matiques fortes de site. On procĂ©dera Ă lâĂ©valuation des EUR aprĂšs cinq annĂ©es de fonctionnement. Lâenjeu sera de dĂ©terminer en quoi elles enrichissent les composantes et comment elles participent au rayonnement international de lâuniversitĂ©.
Propos recueillis par Myriam Niss
ExpĂ©rimenter, innoverEuridol sâappuie sur un consortium de douze Ă©quipes de recherche. Cette EUR dĂ©diĂ©e Ă lâapproche de la douleur constitue un modĂšle dâinterdisciplinaritĂ©â: les neurosciences sont au centre mais sâĂ©largissent aux aspects mĂ©dicaux, pharmacologiques et sociĂ©taux. Pierre Veinante (Institut des neurosciences cellulaires et intĂ©gratives) souligne quâEuridol ouvre «âŻdes pratiques pĂ©dagogiques inĂ©ditesâŻÂ». Quelques illustrationsâ: une nouvelle unitĂ© dâenseignement, intitulĂ©e Expression of pain, sâappuie sur un travail photographique pour dĂ©crire la douleur. Les Ă©tudiants de M1 sont incitĂ©s Ă publier dans des journaux de vulgarisation scientif ique, ont une ouverture aux aspects Ă©thiques et aux sciences humaines, ou encore se servent de vidĂ©os pour visualiser des expĂ©riences scientif iques et ont des contacts avec des associations de patients ou des personnels hospitaliers⊠«âŻLâan prochain, le M2 sâarticulera autour de «âŻla douleur vue parâŻÂ» diffĂ©rents protagonistes, mĂ©decins, sociologues, chercheurs, infirmiĂšres⊠Cette approche serait adaptable Ă dâautres formationsâŠâŻÂ»
O Retrouvez les portraits des quatre EUR de lâUnistra : CSC-IGS, Chemistry
of Complex Systems - Euridol : Graduate School of Pain - IMCBio : Integrative
Molecular and Cellular Biology, QMat - Quantum Science and Nanomaterials sur
recherche.unistra.fr
« Mettre du liant entre formation et recherche » «âŻIl y rĂšgne
une grande libertĂ© dâinnovation
pĂ©dagogique âŻ.»
Recherche
Savoir(s) n°35 13
Les facultĂ©s de mĂ©decine et et de chirurgie dentaire disposent chacune dâoutils de simulation au service dâune pĂ©dagogie active et innovante. Il sâagit pour les Ă©tudiants de maĂźtriser des gestes techniques et de se confronter Ă des situations rares et souvent critiques sous lâĂ©gide dâun mĂȘme slogan : « Jamais la premiĂšre fois sur un patient ».
MaĂźtriser lâimprĂ©vu«âŻIl y a bien sĂ»r toujours une premiĂšre fois oĂč lâĂ©tudiant est confrontĂ© au patientâŻÂ», rappellent Pierre Vidailhet et Gilles Mahoudeau, respectivement directeurs universitaire et mĂ©dical de lâUnitĂ© de simulation europĂ©enne en santĂ© (Unisimes) de la FacultĂ© de mĂ©decine de Strasbourg. «âŻLâactivitĂ© de cette unitĂ© est une Ă©tape supplĂ©mentaire entre les cours en amphithĂ©Ăątre et le stage en milieu hospitalier. Une Ă©tape oĂč lâĂ©tudiant est prĂ©parĂ© au terrain de maniĂšre accompagnĂ©e et rĂ©flexiveâŻÂ», ajoutent-ils.La simulation existait dĂ©jĂ au sein des formations mĂ©dicales mais de maniĂšre Ă©parse. La crĂ©ation dâUnisimes, il y a six ans, a permis de fĂ©dĂ©rer les forces existantes et dâĂȘtre plus performant. Dans une premiĂšre salle, câest un cabinet de consultation qui est reconstituĂ©. Dans une autre salle se trouve un mannequin haute-f idĂ©litĂ© allongĂ© sur une table de soins. Ce dernier est manipulĂ© par les Ă©tudiants et pilotĂ© Ă distance - voix, rythme cardiaque, tension⊠- par un formateur. Les espaces se succĂšdent dans ce bĂątiment de deux Ă©tages situĂ© au cĆur du Centre hospitalo-universitaire de Strasbourg. Les simulations vont du geste technique, en passant par les jeux de rĂŽles, les serious games, ou encore la simulation pleine Ă©chelle. «âŻIci, câest lâensemble de lâĂ©quipe mĂ©dicale qui entre en jeuâ: le mĂ©decin, lâinfirmier, lâaide-soignant, le chirurgien⊠Il sâagit alors dâanalyser le travail en Ă©quipe, la communication, la rĂ©partition des tĂąchesâŻÂ», explique Gilles Mahoudeau.
Chacun est amenĂ© Ă incarner son vrai rĂŽlePlus de 5â000 personnes sont formĂ©es chaque annĂ©e dans cette unitĂ©, dont 20âŻ% en formation continue. Tous les Ă©tudiants de mĂ©decine Ă partir de la deuxiĂšme annĂ©e passent par le jeu de la simulation. «âŻChacun est amenĂ© Ă incarner son vrai rĂŽle. Pour certains exercices, nous faisons appel Ă des comĂ©diens pour tenir le rĂŽle des patients. Lâensemble de ces situations permet Ă lâĂ©tudiant dâacquĂ©rir des compĂ©tences de terrain et surtout de se rendre compte de ce quâil ne sait pasâŻÂ», insiste Pierre Vidailhet. Certains scĂ©narios, comme lâensemble du protocole liĂ© Ă des gestes opĂ©ratoires, sont trĂšs Ă©crits. Pour dâautres, quelques lignes dĂ©crivent la situation comme câest le cas pour lâannonce dâun diagnostic grave. «âŻLe plus important dans lâensemble des simulations reste le dĂ©briefing qui est systĂ©matiquement programmĂ©. Un moment oĂč il est primordial de rĂ©ussir Ă dĂ©terminer et
Simuler nâest pas jouer
«âLâensemble de ces situations permet Ă lâĂ©tudiant de se
rendre compte de ce quâil ne sait pas
.â»
â Des Ă©tudiants en mĂ©decine dans l'une des salles de l'unitĂ© de simulation.
â De gauche Ă droite : Victor Gasia, ingĂ©nieur dâexploitation, Pierre Vidailhet, directeur universitaire et Gilles Mahoudeau directeur mĂ©dical de lâUnitĂ© de simulation europĂ©enne en santĂ© (Unisimes).
Formation
comprendre les processus qui ont permis dâaboutir Ă une situation donnĂ©e.âŻÂ», commente Pierre Vidailhet. Pour les futurs mĂ©decins et spĂ©cialistes, il sâagit en dĂ©f initive dâacquĂ©rir toutes les compĂ©tences nĂ©cessaires pour maĂźtriser au mieux lâimprĂ©vu.
Une expĂ©rience au service du patientLa simulation est une pratique courante dans les facultĂ©s de chirurgie dentaire. Celle de Strasbourg dispose dĂ©jĂ dâune salle de «âŻfantĂŽmesâŻÂ» pour simuler les soins conservateurs et prothĂ©tiques et dâun training center dâimplantologie. «âŻLa crĂ©ation de lâunitĂ© de simulation clinique et radiologique, inaugurĂ©e en septembre dernier et unique en France, est une continuitĂ© dans ce travail dĂ©jĂ bien engagĂ©âŻÂ», explique Corinne TaddĂ©i-Gross, doyen de la FacultĂ© de chirurgie dentaire. Les Ă©tudiants se trouvaient confrontĂ©s Ă leur premiĂšre consultation avec un patient encadrĂ© par des praticiens Ă partir de la quatriĂšme annĂ©e seulement. Avec cette salle, ils sont en situation dĂšs la deuxiĂšme annĂ©e permettant ainsi une articulation plus eff icace entre le prĂ©clinique et le clinique.
AcquĂ©rir de lâexpĂ©rience et de lâassuranceQuatre fauteuils dentaires Ă©quipĂ©s avec des tĂȘtes de mannequins recrĂ©ent ainsi un environnement de consultation ressemblant Ă la rĂ©alitĂ©. Le crĂąne de ces mannequins est en os reconstituĂ©. Les radios qui sont faites sont ainsi Ă lâimage de la rĂ©alitĂ©, dans le geste comme dans le rĂ©sultat f inal. Ce dispositif permet Ă©galement de faire des prises dâempreintes dentaires. «âŻUne rĂ©elle Ă©conomie en termes de temps mĂ©dical dâapprentissage et aussi de matĂ©riaux. Câest gagnant-gagnant, pour le confort du patient et celui de lâĂ©tudiantâŻÂ», insiste Corinne TaddĂ©i-Gross. Dans cette unitĂ©, on retrouve surtout un mannequin haute-f idĂ©litĂ© capable de converser, de ressentir des Ă©motions, dâĂȘtre dans une situation de crise. LĂ aussi câest un formateur qui commande le mannequin depuis un centre de contrĂŽle. Les scĂ©narios sont Ă©volutifs et permettent dâaborder des cas simples comme des cas plus complexes. Le tout est f ilmĂ© en direct pour lâanalyser en f in de sĂ©ance. «âŻLâĂ©tudiant sâentraĂźne ainsi pendant deux ans en prĂ©clinique et se retrouve en face du patient Ă partir de la quatriĂšme annĂ©e avec une solide expĂ©rience. Il acquiert aussi de lâassurance, quâil peut directement mettre au service du patientâŻÂ», argumente Corinne TaddĂ©i-Gross.
F.âZ.
Les Ă©tudiants en chirurgie dentaire en situation clinique.
Travail en groupe des étudiants en médecine.
14 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
Savoir(s) n°35 15
Convoquer des vikings pour aider les Ă©tudiants Ă mieux connaĂźtre leur environnement universitaire ? Cette idĂ©e, saugrenue en apparence, est au cĆur dâune websĂ©rie Ă©crite et rĂ©alisĂ©e par et pour les Ă©tudiants de lâUniversitĂ© de Strasbourg. LâInstitut de dĂ©veloppement et dâinnovation pĂ©dagogiques (Idip) est Ă lâinitiative de ce projet original qui vise Ă amĂ©liorer la rĂ©ussite Ă©tudiante.
« Nous avons basĂ© notre projet sur une enquĂȘte menĂ©e par Espace avenir* auprĂšs des Ă©tudiants de lâĂ©tablissement. Lâune des questions posĂ©es portait sur leur connaissance des diffĂ©rentes structures administratives et des diffĂ©rents services qui leur Ă©taient proposĂ©s. Les rĂ©sultats semblaient indiquer un lien significatif entre la bonne connaissance de leur environnement par les Ă©tudiants et leur taux de rĂ©ussite » explique Alexandra Delaunay, chargĂ©e de projets au sein du PĂŽle dâappui Ă la rĂ©ussite Ă©tudiante de lâIdip.
Outre les questions dâinnovation pĂ©dagogique et la formation des enseignants, lâIdip a en effet Ă©galement pour mission dâĆuvrer au dĂ©veloppement de la rĂ©ussite Ă©tudiante. « JusquâĂ prĂ©sent nous avions surtout ciblĂ© lâapprentissage de maniĂšre gĂ©nĂ©rale, par le biais dâun cours en ligne sur la prise de notes ou dâateliers de mĂ©thodologie du travail universitaire » prĂ©cise Alexandra Delaunay. « LâenquĂȘte dâEspace avenir nous a donnĂ© de nouvelles pistes dâactions pour favoriser la rĂ©ussite des Ă©tudiants, en leur faisant dĂ©couvrir les diffĂ©rents services mis Ă leur disposition ».
Des vikings tout droit sortis de lâimagination des Ă©tudiantsPour mener Ă bien ce projet, lâIdip sâest tournĂ© vers les Ă©tudiants, public concernĂ© en premier lieu. LâidĂ©e dâune « websĂ©rie », sĂ©rie de courtes vidĂ©os diffusĂ©es sur le web, est ainsi venue dâun panel dâĂ©tudiants rĂ©unis lors dâun atelier de crĂ©ativitĂ©. Le scĂ©nario a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© en 48 heures lors du « hackathon scĂ©naristique » auquel 26 Ă©tudiants de toutes filiĂšres ont pris part. Enfin, seize Ă©tudiants ont participĂ©, en tant que stagiaires, au tournage organisĂ© par une sociĂ©tĂ© de production professionnelle.
Ainsi est nĂ©e GalĂšres Vikings, histoire oĂč Ragnard le guerrier, Kaalv le sorcier et Aasveig la princesse rencontrent AmĂ©lie, Ă©tudiante de lâUniversitĂ© de Strasbourg. Leurs pĂ©ripĂ©ties sur le campus leur donnent Ă connaĂźtre lâensemble des structures administratives avec lesquelles les Ă©tudiants sont en interaction et les services quâelles leur offrent.
Les sept Ă©pisodes de la websĂ©rie, au format court et amusant, ont Ă©tĂ© diffusĂ©s sur le site web de lâuniversitĂ©, sur Youtube et les rĂ©seaux sociaux, recueillant une bonne visibilitĂ© et des retours positifs. LâIdip nâentend pas en rester lĂ : « Au premier semestre 2019 nous allons lancer une Ă©tude exploratoire sur les difficultĂ©s rencontrĂ©es par les nĂ©o-bacheliers Ă lâuniversitĂ©. Nous comptons nous baser sur ses rĂ©sultats pour orienter nos prochaines actions ».
Edern Appéré
O L'intégrale de la série est à voir sur galeresvikings.unistra.fr
* Espace avenir est le service dâinformation et dâorientation de lâUniversitĂ© de Strasbourg.
Des vikings Ă la rescousse des Ă©tudiants
«⯠Favoriser la réussite
des étudiants, en leur faisant découvrir les différents
services mis Ă
leur disposition »
Formation sur le terrainSeize Ă©tudiants de lâuniversitĂ© dont plusieurs issus de la licence Arts du spectacle - option CinĂ©ma ont Ă©tĂ© impliquĂ© dans le tournage en occupant diffĂ©rents postes : assistant son, assistant lumiĂšre, rĂ©gisseur, assistant camĂ©ra, etc. Pour Camille, qui a officiĂ© en tant que scripte, « le tournage a Ă©tĂ© un moment intense. Il y avait une trĂšs bonne ambiance sur le plateau, des moments de rires mais le rĂ©alisateur savait impulser une dynamique de sĂ©rieux et de travail. Les professionnels se sont beaucoup impliquĂ©s pour nous former et nous ont confiĂ© beaucoup de responsabilitĂ©s. CâĂ©tait trĂšs enrichissant ! ».
Formation
Enjeu de notre siĂšcle, lâinformation est partout, accessible non plus seulement via les mĂ©dias traditionnels, mais aussi via les rĂ©seaux sociaux, les sites dâinformation ou encore les blogs et forums. De cette profusion naĂźt le besoin grandissant dâoutils et de mĂ©thodes pour utiliser lâinformation de maniĂšre judicieuse. Un besoin que souhaite combler le Service des bibliothĂšques.
Le service coordonne un rĂ©seau de 54 bibliothĂ©caires-formateurs qui assurent prĂšs de 1 600 heures de formation chaque annĂ©e dans les diffĂ©rentes composantes. Lâobjectif ? Sensibiliser les Ă©tudiants Ă l'importance qu'ils doivent accorder, dans leurs travaux universitaires et dans la vie en gĂ©nĂ©ral, Ă la fiabilitĂ© de l'information ; puis leur transmettre les compĂ©tences nĂ©cessaires pour bien rechercher. « Un des premiers enjeux de la formation est de convaincre les Ă©tudiants qu'apprendre Ă chercher est indispensable, explique Damien Laplanche, responsable du service Formation, quâil ne suffit pas de taper quelques mots dans un moteur de recherche. Nous leur faisons ensuite dĂ©couvrir la richesse des ressources qualitatives mises Ă leur disposition par lâuniversitĂ©, les outils pour les trouver
ainsi que les bonnes pratiques pour les utiliser ou les citer dans leurs travaux. »
Des Ă©tudiants « extrĂȘmement reconnaissants »Ces formations, qui s'inscrivent pleinement dans le socle des compĂ©tences transversales Ă l'universitĂ©, se dĂ©roulent principalement dans les cursus selon les partenariats nouĂ©s avec les composantes. « Les Ă©tudiants sont extrĂȘmement reconnaissants, raconte Marie-Jo Thiel, professeure des universitĂ©s et responsable du master Ăthique, elle leur permet de dĂ©couvrir un riche patrimoine et les rend fiers dâappartenir Ă lâUniversitĂ© de Strasbourg. Cela se ressent dans leurs mĂ©moires, mais aussi en cours, câest magnifique ! »
La formation documentaire monte en puissance : toujours plus de bibliothécaires-formateurs mobilisés, de composantes et de formations impliquées. De nombreuses collaborations ont également été mises en place avec la BibliothÚque nationale et universitaire (BNU) et les autres partenaires du site alsacien. Le Service des bibliothÚques est ainsi devenu un acteur incontournable de la formation des étudiants aux compétences informationnelles. Il a déjà dispensé des formations à plus de 10 500 étudiants cette année.
Mathilde Hubert
1 Ăcole nationale supĂ©rieure des sciences de lâinformation et des bibliothĂšques.2 Ce projet de labellisation a Ă©tĂ© menĂ© dans le cadre du volet documentaire du contrat de site 2013-2017, signĂ© entre quatre Ă©tablissements alsaciens dâenseignement supĂ©rieur : UniversitĂ© de Strasbourg, UniversitĂ© de Haute-Alsace, BibliothĂšque nationale et universitaire et Institut national des sciences appliquĂ©es de Strasbourg.
« Se former Ă sâinformer »
Des formateurs labellisĂ©sLes professionnels des bibliothĂšques, en partenariat avec lâEnssib1,
sont Ă lâinitiative dâun dispositif novateur en France : un parcours de
formation et de labellisation de leurs compétences pédagogiques2.
38 bibliothĂ©caires-formateurs de lâuniversitĂ© ont dĂ©jĂ Ă©tĂ© labellisĂ©s.
«⯠Convaincre
les Ă©tudiants qu'apprendre
Ă chercher est indispensable
. »
Damien Laplanche, responsable du service formation des bibliothĂšques lors dâune formation aux Ă©tudiants.
16 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
Ălisabeth Demont, vice-prĂ©sidente Ressources humaines et politique sociale.
NouveautĂ© en 2018, les Primes de reconnaissance de lâimplication pĂ©dagogique (Prip) ont Ă©tĂ© remises aux quinze enseignants-chercheurs laurĂ©ats, sur la centaine de dossiers Ă©tudiĂ©s. Ces primes, une premiĂšre en France, viennent pallier le manque de reconnaissance de lâune de leurs deux missions : enseigner.
« Sâil existe des dispositifs pour valoriser lâimplication des enseignants-chercheurs dans la recherche, il nâen existe pas pour lâenseignement. Nous voulions que soit reconnu cet engagement exceptionnel et continu sur plusieurs annĂ©es de certains », explique Ălisabeth Demont, vice-prĂ©sidente Ressources humaines et politique sociale. Avec comme cadre un article du code de lâĂ©ducation et sa circulaire de 2017, la Prip a Ă©tĂ© approuvĂ©e
par le conseil dâadministration en mars 2018. GrĂące Ă un financement Idex (Initiative dâexcellence), quinze primes de 8 000 euros ont pu ĂȘtre attribuĂ©es.
Les candidats devaient expliciter et dĂ©montrer leur investissement, par exemple Ă travers une dĂ©marche pĂ©dagogique pertinente et ambitieuse, des dispositifs dâinnovation pĂ©dagogique, dâaccompagnement personnalisĂ©, dâaide Ă la rĂ©ussite et Ă lâinsertion professionnelle, lâamĂ©lioration continue des pratiques et leur diffusion, lâautoĂ©valuationâŠ
RĂ©flexivité« Nous avons remarquĂ© quatre points que partageaient les laurĂ©ats. Ils font preuve de rĂ©flexivitĂ© sur leurs pratiques pĂ©dagogiques, avec une prise de recul, une capacitĂ© de rĂ©flexion et dâexamen de leurs mĂ©thodes. Ensuite, ils placent lâapprenant au cĆur du processus de formation, ils amĂšnent les Ă©tudiants Ă sâinterroger sur leurs savoir-faire et savoir-ĂȘtre, Ă sâapproprier
les apprentissages et Ă mieux se connaĂźtre. Ils partagent et diffusent leurs bonnes pratiques avec les autres enseignants, Ă lâintĂ©rieur ou Ă lâextĂ©rieur de lâuniversitĂ©, par le biais de rĂ©unions, publications ou colloques. Enfin, ils mettent en place une Ă©valuation de leurs enseignements et mĂ©thodes, pour mesurer leur pertinence », analyse Ălisabeth Demont.
Attendue par le corps enseignant, cette reconnaissance sera reconduite en fĂ©vrier 2019. Le ministĂšre de lâEnseignement supĂ©rieur va lui aussi lancer une « prime dâengagement pĂ©dagogique et de formation » Ă partir de septembre 2019.
S.R.
Lâimplication pĂ©dagogique rĂ©compensĂ©e
Savoir(s) n°35 17
Les lauréats présents lors de la remise des prix en septembre dernier.
«âŻNous voulions que soit reconnu cet engagement
exceptionnel et continu sur plusieurs annĂ©es.âŻÂ»
b « Pour moi, câest lâapprenant, son bien-ĂȘtre et sa progression qui comptent, je mets beaucoup dâĂ©nergie
pour chercher Ă les connaĂźtre et Ă trouver les astuces pour les faire avancer. Cela implique une expĂ©rimentation permanente, la concertation et le partage avec les collĂšgues, mais aussi la participation Ă des rĂ©flexions nationales et internationales sur la mise en Ćuvre pĂ©dagogique. »
Denyze Toffoli, maßtre de conférences en didactique des langues
b « Il est dâimportant dâavoir une rĂ©flexivitĂ© sur ses pratiques pĂ©dagogiques, pour les faire Ă©voluer et
sâadapter aux Ă©tudiants, qui sont au centre. Câest ĂȘtre dans une dĂ©marche dâamĂ©lioration continue. Jâessaie aussi de faire participer les enseignants, de les fĂ©dĂ©rer autour de ces nouvelles pratiques, de valoriser les personnes qui sâimpliquent. Aujourdâhui, nous avons les moyens de nous former grĂące Ă lâInstitut de dĂ©veloppement et dâinnovation pĂ©dagogiques (Idip). Cette valorisation de la mission dâenseignement insuffle une dynamique positive. »
Clarisse Maechling, directrice adjointe de la Faculté de pharmacie
Formation
des pionniersLâaudace
Université de Strasbourg
#10ansUnistra= Focus
Strasbourg pionniĂšreAlors quâil Ă©tait Directeur gĂ©nĂ©ral de l'enseignement supĂ©rieur et de l'insertion professionnelle (DGESIP), Bernard Saint Girons a accompagnĂ© la fusion des trois universitĂ©s strasbourgeoises. Il revient ici sur le caractĂšre pionnier de la dĂ©marche.
En quoi Strasbourg a-t-elle innové en matiÚre de regroupement des universités ?
Le « cas strasbourgeois » est tout Ă fait remarquable. Câest Ă Strasbourg que sâest engagĂ© le premier processus de fusion des universitĂ©s, dont lâidĂ©e et la conception avaient germĂ© avant mĂȘme la loi de programme pour la recherche (2006) et la loi relative aux libertĂ©s et responsabilitĂ©s des universitĂ©s (LRU-2007). Câest le fruit dâune dĂ©marche bottom up, du bas vers le haut, qui sâinscrit dans la durĂ©e et dans la continuitĂ©
des prĂ©sidents de lâUniversitĂ© Louis-Pasteur (ULP). Car câest clairement Strasbourg 1 qui a initiĂ© et portĂ© le processus, avec un projet fort de reconstruction. LâULP mettait son prestige au service de toute la communautĂ© universitaire, indĂ©pendamment des lois de 2006 et 2007 et en marge des institutions. Jâai retrouvĂ© aussi dans cette dĂ©termination une volontĂ© de reconstituer lâuniversitĂ© unique qui avait Ă©tĂ© dĂ©mantelĂ©e en 1968.
Quelles sont les caractéristiques et la plus-value de cette université unifiée ?
LâUniversitĂ© de Strasbourg a une vision stratĂ©gique en matiĂšre dâoffre de formation, de recherche et de
partenariats. Elle a Ă©galement repensĂ© son rapport Ă la gestion. Elle porte une vision nouvelle du centre et de la pĂ©riphĂ©rie. On peut dire quâelle nâest pas Ă proprement parler centralisĂ©e car, si elle est dotĂ©e de services centraux communs, les composantes gardent leur autonomie au quotidien.
Par ailleurs, les approches interdisciplinaires sont plus faciles Ă mettre en Ćuvre dans les grandes universitĂ©s. Cela va dans le sens dâune « amĂ©lioration de lâordinaire ». Jâestime que la fusion des universitĂ©s strasbourgeoises a apportĂ© une grosse plus-value. La recherche a besoin dâĂȘtre diffusĂ©e et cette visibilitĂ© a indĂ©niablement Ă©tĂ© renforcĂ©e. Si lâon mesure lâefficacitĂ© aux projets du Programme investissements dâavenir, Idex (Initiative dâexcellence) et Labex (Laboratoire dâexcellence), Strasbourg est aujourdâhui lâun des sites les plus performants, mĂȘme si cela ne sâexprime pas obligatoirement dans les classements internationaux. En ce qui concerne ces classements, Louis-Pasteur nâaurait dâailleurs pas eu besoin de la fusion pour ĂȘtre parmi les meilleures.
Et Strasbourg a fait Ă©coleâŠ
La fusion nâest pas le seul modĂšle possible, car cela suppose un travail important et toutes les universitĂ©s nâont pas la possibilitĂ© de lâaccomplir. Ă Lille, par exemple, cette universitĂ© unique est encore en construction. Chaque site universitaire a son histoire propre et les expĂ©riences passĂ©es ont leurs limites. On ne peut pas tout simplement dĂ©cider de les reproduire, il faut aussi prendre en compte les rĂ©alitĂ©s du terrain, voire certains ressentiments ou encore des options politiques divergentes⊠Aix-Marseille sâest reconstruite sur un modĂšle comparable Ă Strasbourg, dans une logique mĂ©tropolitaine. Grenoble sâen rapproche Ă©galement, mais certaines composantes sont restĂ©es Ă lâĂ©cart. LâUniversitĂ© de Lorraine, issue de
â InstantanĂ© lors de la cĂ©rĂ©monie des vĆux, premier Ă©vĂšnement de l'annĂ©e dĂ©diĂ© aux dix ans de l'Unistra.
Le 1er janvier 2009, les trois universitĂ©s strasbourgeoises, Louis-Pasteur, Robert-Schuman et Marc-Bloch, fusionnaient en une seule et mĂȘme entitĂ© : lâUniversitĂ© de Strasbourg. Un pari audacieux aujourdâhui rĂ©ussi.
Retour sur les enjeux de cette premiĂšre fusion dâuniversitĂ© en France et sur le travail accompli depuis dix ans, avec les nombreux acteurs engagĂ©s dans cette dĂ©marche innovante.
Savoir(s) n°35 19
«âŻLa fusion des universitĂ©s strasbourgeoises a apportĂ© une grosse
plus-value .âŻÂ»
Vivre ensemble #10ansUnistra =
Bernard Saint Girons, Directeur général de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle (DGESIP) au moment de la fusion.
En chiffres
lâhistoire rĂ©gionale, regroupe les universitĂ©s de Nancy et de Metz ainsi que lâInstitut Polytechnique. Ă Toulouse par contre, lâintĂ©gration nâa pas Ă©tĂ© trouvĂ©e et lâune des consĂ©quences est que le label Idex nâa pas Ă©tĂ© accordĂ© au site.
10 ans aprÚs⊠un bilan ?
La fusion a un coût, mais elle vient assurer la cohérence des investissements humains et financiers. Le Plan campus de Strasbourg en constitue un exemple
Ă©loquent. Il me semble que la rĂ©ussite dâun tel bouleversement se mesure Ă la capacitĂ© de relais dâun prĂ©sident Ă lâautre, Ă lâaptitude à « passer le virage ». Câest vrai, des prĂ©sidents Ă forte personnalitĂ© sont parvenus Ă imposer une vision. Dâautres nây sont pas arrivĂ©s. Et je dois dire que câest Ă la fois rassurant⊠et tout de mĂȘme un peu inquiĂ©tant de savoir que des personnalitĂ©s de conviction peuvent Ă ce point inflĂ©chir la politique !
Propos recueillis par Myriam Niss
2008 (juste avant la fusion) 2019
1
UniversitĂ© Louis-Pasteur â Strasbourg I
Santé, sciences, sciences humaines
et sociales
2
UniversitĂ© Marc-Bloch â Strasbourg II
Théologie et sciences des religions, langues,
cultures et sociétés, sciences du sport
3
UniversitĂ© Robert-Schuman â Strasbourg III
Droit et études européennes, sciences
politiques, relations internationales
1
Université de Strasbourg
Droit, Ă©conomie, gestion, sciences humaines et sociales, sciences et
technologies, vie et santéPrésident :
Alain Beretz Président : Bernard Michon
Présidente : Florence Benoßt-Rohmer
Président : Michel Deneken
19 000 Ă©tudiants
dont 20 % dâĂ©tudiants Ă©trangers
12 500 Ă©tudiants
dont 25 % dâĂ©tudiants Ă©trangers
10 000 Ă©tudiants
dont 20 % dâĂ©tudiants Ă©trangers
50 822 Ă©tudiants
dont 20 % dâĂ©tudiants Ă©trangers
18 unités de formation et de recherche, facultés, écoles
dâingĂ©nieurs et instituts
59 unités de recherches dont 4 laboratoires communs
10 composantes
20 Ă©quipes dâaccueil, 2 unitĂ©s mixtes de recherche
10 composantes
8 centres de recherche
35 facultés, écoles, instituts
et unités de formation et de recherche
73 unités de recherche et 6 structures fédératives
1 500 enseignants-chercheurs
et 1 400 personnels
500 enseignants-chercheurs
et 400 personnels
391 enseignants-chercheurs
et 343 personnels
2 755 enseignants-
chercheurs et 2 362 personnels
20 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
Savoir(s) n°35 21
Dix ans aprĂšs la fusion, lâUniversitĂ© de Strasbourg est-elle plus performante que les trois Ă©tablissements qui lui prĂ©existaient ? Nous avons posĂ© la question Ă son prĂ©sident, Michel Deneken.
Si lâon se place du point de vue des Ă©tudiants, des enseignants, ou des chercheurs, en quoi la fusion de lâUniversitĂ© de Strasbourg a-t-elle changĂ© leur vie ?
Au risque de vous surprendre je dirais que ça nâa pas changĂ© grand-chose. Un Ă©tudiant choisit une filiĂšre : droit, anglais ou mĂ©decine⊠Il le faisait aussi autrefois. Maintenant il est Ă©tudiant dâune seule universitĂ©. Mais au fond, ça ne modifie pas fondamentalement sa scolaritĂ©. Il en va de mĂȘme pour les enseignants-chercheurs, sauf que les disciplines se rencontrent dans les conseils, des synergies voient le jour, des idĂ©es de parcours pluridisciplinaires deviennent plus Ă©videntes⊠Quant Ă la recherche, elle travaillait dĂ©jĂ en lien trĂšs Ă©troit avec lâenseignement. En fait, ce sont les personnels Biatss (bibliothĂšques, ingĂ©nieurs, administratifs, techniques, sociaux et santĂ©) qui ont Ă©tĂ© les plus impactĂ©s en amont et en aval de la fusion, car nous avons fusionnĂ© les services et unifiĂ© les procĂ©dures. On leur doit une part essentielle dans la rĂ©ussite de cette fusion.
Finalement quel bilan faites-vous de la fusion ?
Est-ce que câest mieux aujourdâhui quâavant ? Contre une certaine mode de la nostalgie, je dirais oui. LâUniversitĂ© de Strasbourg est plus lisible Ă lâinternational, plus riche en disciplines, plus performante. GrĂące Ă la fusion, nous avons Ă©tĂ© la premiĂšre universitĂ© Ă obtenir lâIdEx (Initiative dâexcellence). Par ailleurs, hasard ou pas, trois des quatre prix Nobel en exercice Ă lâUniversitĂ© de Strasbourg ont reçu leur prix depuis la fusion des universitĂ©s. Câest symboliquement trĂšs fort.
Un des paris de la fusion concernait aussi lâouverture de lâuniversitĂ© sur la citĂ©. Lâavez-vous rĂ©ussi ?
Ce qui a toujours caractĂ©risĂ© le site universitaire strasbourgeois, câest son insertion dans la ville : ne serait-ce que du point de vue de la gĂ©ographie. Mais la fusion a incontestablement confortĂ© cette immersion culturelle, scientifique et sociale tant dans la ville que dans lâAlsace en gĂ©nĂ©ral. Et bien sĂ»r, la discussion et les partenariats avec lâensemble des collectivitĂ©s territoriales sâen sont trouvĂ©s grandement facilitĂ©s. Cela nous donne plus de facilitĂ© et dâagilitĂ©.
La fusion a-t-elle facilité la gestion de la rareté des moyens ?
Dâune maniĂšre gĂ©nĂ©rale je dirais quâĂ chaque fois, nous avons retenu, autant que possible, le meilleur des mĂ©thodes de gestion des trois Ă©tablissements prĂ©existant Ă la fusion. Du point de vue de la gestion des ressources humaines, nous avons systĂ©matiquement choisi le mieux disant. Dix ans aprĂšs, lâUnistra est bien gĂ©rĂ©e techniquement et politiquement, ce qui lui permet dâaller vers toujours plus dâautonomie.
Quels sont les grands projets des dix prochaines années ?
DĂ©jĂ nous allons achever le Plan campus engagĂ© un peu avant la fusion. Nous allons multiplier les synergies entre recherche et enseignement, par exemple en crĂ©ant de nouveaux instituts, Ă©coles universitaires de recherche. Nous allons continuer dâaccompagner le rapprochement ou la fusion des composantes qui le souhaitent. Et il nous faudra bien sĂ»r gĂ©rer lâaugmentation de la population Ă©tudiante, trĂšs forte Ă Strasbourg du fait de notre attractivitĂ©.
Propos recueillis par Jean de Miscault
Attractivité fusionnelle
«âŻLâUniversitĂ© de Strasbourg est plus lisible Ă
lâinternational ,
plus riche en
disciplines , plus
performante .âŻÂ»
Michel Deneken, prĂ©sident de lâUniversitĂ© de Strasbourg.
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Alain Beretz, premier prĂ©sident de lâUniversitĂ© de Strasbourg, revient sur le processus et les enjeux reprĂ©sentĂ©s par la fusion de trois universitĂ©s en 2009.
Vous Ă©tiez prĂ©sident de lâUniversitĂ© Louis-Pasteur depuis un an au moment de la fusion. Pourquoi avoir portĂ© ce projet dâuniversitĂ© unique ?
Je ne lâai pas portĂ©, jây ai contribuĂ© ! La fusion est le produit dâune construction progressive, qui ne rĂ©sulte pas dâune politique nationale, mais qui est nĂ©e dâune convergence de convictions, et a Ă©tĂ© portĂ©e par de nombreux acteurs. Rappelons que dĂšs 1991, les trois universitĂ©s strasbourgeoises avaient dĂ©veloppĂ© des activitĂ©s communes Ă travers le PĂŽle universitaire europĂ©en. Et câest Ă lâoccasion de la cĂ©lĂ©bration des dix ans du PĂŽle en 2001 que les
prĂ©sidents des universitĂ©s Ă©voquent la fusion de leurs Ă©tablissements. Le travail sâest poursuivi, surtout
aprĂšs 2005, en trois phases : une premiĂšre phase dâappropriation politique, une deuxiĂšme phase de montage de projet (lors de laquelle seront abordĂ©s une soixantaine de sujets diffĂ©rents), une troisiĂšme phase de mise en Ćuvre, qui aboutira Ă la crĂ©ation de lâUniversitĂ© de Strasbourg au 1er janvier 2009. Il y a eu bien sĂ»r des moments difficiles, mais je garde le souvenir dâune crĂ©ativitĂ© exigeante, et surtout de la dĂ©termination et de lâengagement dâacteurs dâorigines trĂšs diffĂ©rentes.
Quels ont été les premiers projets emblématiques de la fusion ?
Entre rĂ©habilitation de bĂątiments, amĂ©nagement du Campus vert et mise en place de projets emblĂ©matiques comme la Maison universitaire internationale, lâOpĂ©ration campus fut notre premier succĂšs commun. Et avec lui, lâUniversitĂ© de Strasbourg a bĂ©nĂ©ficiĂ© dâune visibilitĂ© symbolique et de lâouverture sur la ville. Sâest ajoutĂ©e Ă cette vitrine lâĂ©mergence dâune forte identitĂ©, celle de lâUnistra, issue de la crĂ©ation dâune communautĂ© acadĂ©mique rĂ©unifiĂ©e. Une vision concrĂ©tisĂ©e par le succĂšs Ă lâIdex (Initiative dâexcellence) en 2012, avec lĂ aussi des projets forts, animĂ©s dâune nouvelle Ă©nergie, comme lâInstitut dâĂ©tudes avancĂ©es ou lâInstitut de dĂ©veloppement et d'innovation pĂ©dagogiques.
« Demain, lâUniversitĂ© de Strasbourg », tel Ă©tait le slogan de la campagne de communication. Que reprĂ©sentait pour vous cette UniversitĂ© de Strasbourg en devenir ?
Il sâagissait avant tout de retrouver une universitĂ© pluridisciplinaire, fidĂšle Ă notre histoire et Ă nos valeurs, celles de lâuniversitĂ© humaniste rhĂ©nane de la Renaissance ou de lâuniversitĂ© impĂ©riale construite sur les principes du philosophe von Humboldt. En couvrant lâensemble des champs du savoir et en Ă©tant plus visible Ă lâinternational, lâUniversitĂ© de Strasbourg a relevĂ© le dĂ©fi de renforcer non seulement son excellence, et donc son attractivitĂ©, mais aussi son offre de formation. Et puis, nous avions lâambition dâune universitĂ© repositionnĂ©e au cĆur de la citĂ© qui partage ses savoirs avec les citoyens tout en Ă©tant Ă lâĂ©coute des interrogations de la sociĂ©tĂ©. Mais le slogan reste valable dix ans aprĂšs ; regarder vers demain, cela doit rester la mission et lâambition de lâUnistra.
M.âH.
Une fusion en direct : « Demain, lâUniversitĂ© de Strasbourg »
â Septembre 2006 - fĂ©vrier 2007 : appropriation politique, qui a conduit les conseils des trois universitĂ©s Ă approuver le principe de l'Ă©laboration d'un projet d'Ă©tablissement commun.
â Mars 2007 - fĂ©vrier 2008 : conception stratĂ©gique et politique, Ă©laboration du Portefeuille dâexpĂ©riences et de compĂ©tences (PEC) du nouvel Ă©tablissement.
â Mardi 26 fĂ©vrier 2008 : les membres des conseils des universitĂ©s Louis-Pasteur, Marc-Bloch et Robert-Schuman adoptent Ă une large majoritĂ© le projet de crĂ©ation d'une universitĂ© unique Ă Strasbourg.
â Mars 2008 - avril 2009 : prĂ©paration et dĂ©marrage de la construction du projet dâĂ©tablissement commun.
â 1er janvier 2009 : les trois universitĂ©s de Strasbourg se regroupent officiellement en un seul Ă©tablissement.
â Avril 2009 - septembre 2010 : intĂ©gration et consolidation du socle qui a consistĂ© Ă expĂ©rimenter les nouvelles fonctions, Ă mettre en place les nouveaux modes opĂ©ratoires et les nouvelles modalitĂ©s de pilotage.
Le processus de fusion en quelques dates
Alain Beretz, premier prĂ©sident de lâUniversitĂ© de Strasbourg, aujourdâhui chargĂ© d'une mission sur les universitĂ©s europĂ©ennes par le Premier ministre, Ădouard Philippe.
22 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
Savoir(s) n°35 23
Lâaudace de la concomitance : fusion et autonomieUn peu plus dâun an aprĂšs le vote de la loi relative aux LibertĂ©s et responsabilitĂ©s des universitĂ©s (LRU), dite loi sur lâautonomie des universitĂ©s, Ă lâĂ©tĂ© 2007, les trois universitĂ©s strasbourgeoises et lâex-IUFM fusionnaient en une seule universitĂ©. Or, cette loi LRU prĂ©voyait les fameuses ResponsabilitĂ©s et compĂ©tences Ă©largies (RCE). Câest-Ă -dire que les personnels, Ă commencer par leurs fiches de paye, nâĂ©taient plus gĂ©rĂ©s par le rectorat
mais directement par les universitĂ©s elles-mĂȘmes. « Ă lâĂ©poque, rappelle FrĂ©dĂ©ric Dehan, aujourdâhui directeur gĂ©nĂ©ral des services, lâinspection gĂ©nĂ©rale avait fait part de ses rĂ©serves sur cette concomitance et proposĂ© de dĂ©caler le calendrier dâapplication du passage aux RCE. Mais le choix politique a Ă©tĂ© de dire :
ââOn fait tout en mĂȘme temps.ââ »
Outre la paye des personnels, qui reprĂ©sente un plus de 70 % des dĂ©penses de lâuniversitĂ©, les RCE donnaient surtout la possibilitĂ© Ă lâuniversitĂ© de gĂ©rer ses ressources humaines de façon plus autonome : concours, gestion des postes, primes⊠« Dix ans aprĂšs, le pari de la concomitance est gagnĂ©, analyse FrĂ©dĂ©ric Dehan. Nous sommes lâuniversitĂ© française qui prĂ©sente les meilleurs ratios financiers. AprĂšs tout, il est peut-ĂȘtre prĂ©fĂ©rable de se faire opĂ©rer une seule fois que deux. Cela nous a sĂ»rement compliquĂ© la tĂąche, mais cela nous a aussi permis de raccourcir la durĂ©e du chantier. »
J.d.M.
PremiĂšre des Initiatives dâexcellence (Idex)Pour mĂ©moire, les Idex, dans le cadre du Programme investissements dâavenir, visent Ă doter la France de grandes universitĂ©s dâenseignement et de recherche capables de rivaliser avec les meilleures au monde. Le projet de lâUniversitĂ© de Strasbourg a Ă©tĂ© lâun des trois seuls Ă ĂȘtre pĂ©rennisĂ©s parmi les huit laurĂ©ats. ClassĂ© premier Ă lâissue de la pĂ©riode probatoire, il a Ă©tĂ© reconduit en 2016 sans limitation de durĂ©e avec un
budget de 25,6 millions dâeuros par an.
« Lâun des nombreux critĂšres Ă©tait la gouvernance et sa simplification, et comme nous Ă©tions la seule universitĂ© Ă avoir dĂ©jĂ fusionnĂ©, cela a facilitĂ© la gouvernance et le pilotage de notre projet », explique Serge Potier, vice-prĂ©sident dĂ©lĂ©guĂ© aux investissements dâavenir. « Nous souhaitions que lâIdex soit inclusive : tout projet dâexcellence et dâinnovation pouvait en
bĂ©nĂ©ficier, quel que soit le domaine, et pas seulement en sciences exactes, comme le craignaient certains. Cela a sans aucun doute participĂ© Ă lâidentification de la communautĂ© Ă lâuniversitĂ© unique, Ă son sentiment dâappartenance, Ă lâacceptation de la fusion. Nos collĂšgues collaborent beaucoup plus dâune maniĂšre pluridisciplinaire. Nous avons pu mener des actions que nous nâaurions pas pu conduire sans ce financement. Câest fantastique pour assouvir lâenvie dâentreprendre de nos collĂšgues, qui ont toujours des projets en tĂȘte. Je pense notamment Ă la crĂ©ation de l'Institut d'Ă©tudes avancĂ©es de l'UniversitĂ© de Strasbourg (Usias) pour favoriser des recherches originales et pionniĂšres., de lâInstitut de dĂ©veloppement et d'innovation pĂ©dagogiques (Idip), et du PĂŽle unique d'ingĂ©nierie (PUI) qui aide au montage de projets nationaux et europĂ©ens. »
S.R.
«âŻNous sommes lâuniversitĂ© française qui prĂ©sente les meilleurs
ratios
financiers . »
«âŻCâest fantastique pour assouvir
l'envie
dâentreprendre de nos collĂšgues, qui ont toujours des projets
en tĂȘte â.âŻÂ»
Frédéric Dehan, directeur général des services.
Serge Potier, vice-prĂ©sident dĂ©lĂ©guĂ© aux investissements dâavenir.
Les grands chantiers de la fusion
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LâOpĂ©ration campusJamais un tel montant dâinvestissements immobiliers nâaura Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© pour lâuniversitĂ© strasbourgeoise, ces cinquante derniĂšres annĂ©es. LancĂ©e avant la crĂ©ation de lâUniversitĂ© de Strasbourg, lâOpĂ©ration campus, qui bat son plein en ce dĂ©but dâannĂ©e 2019, est sans doute lâexpression la plus palpable de la nouvelle universitĂ© unifiĂ©e. AprĂšs un appel dâoffres publiĂ© par le ministĂšre en 2007, les trois universitĂ©s strasbourgeoises ont appris en novembre 2008 que leur dossier Ă©tait retenu. Et le montant financier a
Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ© par la ministre, ValĂ©rie PĂ©cresse, lors de la cĂ©rĂ©monie officielle de la crĂ©ation de lâUnistra, le 5 fĂ©vrier 2009. La fusion a-t-elle jouĂ© un rĂŽle dans le choix du campus strasbourgeois ? « Ce que je sais, câest que nous avons Ă©tĂ© retenus dans la liste des six premiers laurĂ©ats, rĂ©pond Yves Larmet, vice-prĂ©sident Patrimoine. La fusion a-t-elle Ă©tĂ© un argument supplĂ©mentaire en notre faveur ? Je le suppose. »
AprĂšs quelques annĂ©es de prĂ©paration et dâaffinage du bouclage financier avec lâĂtat, les collectivitĂ©s territoriales et les banques publiques, les opĂ©rations ont vraiment dĂ©marrĂ© en 2014, notamment par la crĂ©ation et lâamĂ©nagement du parc du campus central, et devraient sâachever en 2023 par la rĂ©novation de la citĂ© universitaire Paul Appell. En tout, une trentaine de chantiers de rĂ©novation, reconstruction, rĂ©habilitation Ă©nergĂ©tique⊠concernant 75 % des Ă©tudiants de lâuniversitĂ© pour un investissement total de 330 millions dâeuros. « Une des particularitĂ©s des chantiers de lâOpĂ©ration campus est quâils sont le plus souvent rĂ©alisĂ©s en site occupĂ©, insiste Yves Larmet. Câest un Ă©lĂ©ment qui rajoute de la complexitĂ© Ă des opĂ©rations dĂ©jĂ dĂ©licates en termes techniques ou financiers. »
J.d.M.
Une trentaine de chantiers concernant 75 % des Ă©tudiants de lâuniversitĂ© pour un investissement total de 330
millions dâeuros .
Yves Larmet, vice-président Patrimoine.
La rue René Descartes, située sur le campus central en 2009 et aujourd'hui, un campus vert et ouvert.
24 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
Savoir(s) n°35 25
Faciliter la mise en rĂ©seauComment la crĂ©ation de lâUnistra a-t-elle modifiĂ© les pratiques partenariales entre lâEuromĂ©tropole et lâuniversitĂ© ?
Cela a changĂ© beaucoup de choses. La fusion nous permet dâassocier plus facilement lâuniversitĂ© Ă nos projets. Dâautant plus que lâUnistra a vite fait la preuve de son excellence,
de son rayonnement, de son impact sur le territoire. LâuniversitĂ© unique facilite la mise en rĂ©seau avec lâensemble de ses partenaires. Elle nous a permis tous ensemble de remporter des batailles trĂšs importantes comme lâIdex ou le Programme investissements dâavenir (PIA).
Avez-vous un exemple précis ?
En dĂ©cembre dernier, nous avons inaugurĂ© EASE : usine-Ă©cole unique en Europe. Câest un bel exemple de
partenariat entre lâUnistra, le PIA, les collectivitĂ©s territoriales, le privĂ© : nous nous sommes fait confiance. Il faut dâailleurs ajouter dans le tour
de table la Fondation de lâuniversitĂ©, qui est une des trĂšs belles rĂ©ussites de lâUnistra. La fusion nous a
aussi permis de mieux prendre en compte les besoins des Ă©tudiants : logement, accĂšs Ă la culture⊠afin quâils se sentent mieux dans la ville.
LâUnistra a-t-elle amĂ©liorĂ© lâattractivitĂ© de lâEuromĂ©tropole ?
Notre territoire est trĂšs marquĂ© par son histoire et son patrimoine quâil faut Ă©videmment sauvegarder.
Ils ont vécu la fusion et participé à la création et à la vie de l'université. à l'occasion des dix ans de l'Université de Strasbourg, ils témoignent de leur expérience.
Au-delĂ des prĂ©s carrĂ©sJe nâai pas connu la pĂ©riode dâavant, car je ne suis arrivĂ© en FacultĂ© de droit quâen 2012. Je dois dire que jâai encore rencontrĂ© alors des gens qui ne savaient pas que lâlâUniversitĂ© Robert-Schuman avait fusionnĂ© avec les autres ! Avoir une grande universitĂ© unifiĂ©e permet aux associations Ă©tudiantes de se croiser, de se rencontrer plus facilement. Cela a permis de mettre en place une grosse base de donnĂ©es dâassociations Ă©tudiantes.
Selon moi, il y a beaucoup de points bĂ©nĂ©fiques : une plus grande proximitĂ©, une unitĂ© de la communautĂ©, au-delĂ des corporatismes et des prĂ©s carrĂ©s⊠Et le fait dâidentifier un seul acteur permet aussi Ă lâuniversitĂ© dâĂȘtre mieux ancrĂ©e dans la ville.
LâUnistra est le signal dâun territoire entreprenant, capable de dispenser des savoirs de trĂšs grande qualitĂ© et donc de crĂ©er des liens avec le monde Ă©conomique et industriel. Le dĂ©veloppement de la gĂ©othermie profonde dans lâEuromĂ©tropole est un bon exemple de ces liens renforcĂ©s entre universitĂ© et industrie. La forte prĂ©sence des Ă©tudiants Ă©trangers souligne aussi le caractĂšre europĂ©en et international de la ville. La qualitĂ© de nos hĂŽpitaux ou Ă©tablissements privĂ©s de santĂ© ne serait pas la mĂȘme sans lâUnistra. LâuniversitĂ© contribue Ă lâimage dâexcellence et dâinnovation de lâEuromĂ©tropole.
J.d.M.
â Dans l'une des salles blanches de l'usine Ă©cole, Ease ouverte en septembre 2018.
Regards sur la nouvelle université
Robert Herrmann, prĂ©sident de lâEuromĂ©tropole de Strasbourg.
Ilyas Kenadid, vice-président Vie universitaire de 2016 à 2018.
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Développer la qualité de vie au quotidienBrigitte Grosse, directrice des ressources humaines.
En tant que DRH de lâUniversitĂ© Robert-Schuman, jâavais dĂ©jĂ lâhabitude de travailler avec les autres DRH. Cela nâa donc pas Ă©tĂ© difficile de faire fonctionner les groupes de travail. La mise en place des procĂ©dures sâest faite petit Ă petit. On a dĂ©couvert de nouveaux mĂ©tiers, notamment en ce qui concerne la gestion prĂ©visionnelle des emplois et des compĂ©tences ou encore le contrĂŽle qualitĂ©, qui a Ă©tĂ© approfondi. Nous nâaurions sans doute pas pu rĂ©aliser tout cela dans nos universitĂ©s respectives.
à cette échelle, on pourrait craindre que la gestion ne soit anonyme, mais ce risque est compensé
par de nouvelles approches, notamment en ce qui concerne lâaccompagnement des personnes via le Bureau des carriĂšres. Cela
a permis de dĂ©velopper la qualitĂ© de vie au quotidien des personnels. Une universitĂ© de cette taille permet aussi plus de mobilitĂ© au sein mĂȘme de lâĂ©tablissement. Jâai rencontrĂ© de nouvelles personnes, jâai appris Ă construire en commun⊠Participer Ă cette belle aventure mâa beaucoup apportĂ©.
Une force vive de la villeEn quoi la fusion a-t-elle changĂ© les relations que vous entretenez avec lâUniversitĂ© de Strasbourg ?
Jâai la sensation que lâinterface entre lâuniversitĂ© et la citĂ© est devenue plus simple et plus dynamique. LâUniversitĂ© de Strasbourg nâa pas perdu en complexitĂ© mais a gagnĂ© en dynamisme et en fluiditĂ© en termes de projet.
Nous avons pu co-concevoir plus facilement un projet comme celui du Jardin dâhiver en novembre 2015 par exemple. Ce projet qui a reçu le soutien de lâIdex, est le fruit dâune rĂ©sidence de lâOsosphĂšre Ă lâuniversitĂ© pendant un an. Ă partir de ce travail, nous avons construit un Ă©vĂ©nement de quatre jours qui a permis au campus central de revendiquer son statut dâespace public au cĆur de la ville. Ce projet global Ă©manant dâune unitĂ© centrale permet dâouvrir des perspectives et de sâinscrire dans la durĂ©e.
Diriez-vous que lâuniversitĂ© a gagnĂ© en visibilitĂ© dans lâespace urbain ?
Oui, je crois que lâuniversitĂ© est plus ouverte sur la ville, plus visible et plus identifiable. Pour moi, lâexploration du territoire apprenant demeure un Ă©lĂ©ment fondamental de la mission de lâuniversitĂ©. Elle a aussi voix au chapitre en termes de dĂ©veloppement Ă©conomique et par la fusion, cette voix est devenue plus audible. Le dialogue avec lâextĂ©rieur a Ă©tĂ© facilitĂ©.
Selon vous, il y a un avant et un aprĂšs fusion ?
Il y a eu un tournant, câest incontestable. Il sâagit aussi dâune affaire de personne. Le prĂ©sident de lâuniversitĂ© a permis beaucoup de choses, des gens comme Mathieu Schneider Ă©galement. La fusion a Ă©tĂ© bien menĂ©e. LâUniversitĂ© de Strasbourg apparaĂźt dĂ©sormais comme un Ă©tablissement, une force vive de la ville, et non pas comme un Ă©cosystĂšme impĂ©nĂ©trable Ă celui qui nâen possĂšde pas les codes. Cela me semble indispensable car au-delĂ de ses missions traditionnelles, lâuniversitĂ© est un des moteurs de la transformation de la ville. Et aujourdâhui, cette dĂ©marche sâeffectue de maniĂšre partenariale. Une sĂ©rie dâacteurs et de projets naissent Ă lâintĂ©rieur de lâuniversitĂ© et se fertilisent ensuite Ă lâĂ©chelle dâun territoire. LâuniversitĂ© a renforcĂ© sa prĂ©sence dans la ville.
Julie Giorgi
â Le festival OsosphĂšre prend place sur le campus de l'Esplanade en novembre 2015.
Thierry Danet, directeur et cofondateur de lâOsosphĂšre.
26 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
Savoir(s) n°35 27
CohĂ©rence, dynamisme, visibilité« Pour moi, la fusion a poussĂ© lâUniversitĂ© de Strasbourg Ă se rapprocher du modĂšle de rĂ©fĂ©rence des grandes universitĂ©s internationales d'excellence : pluridisciplinaires, puissantes, dotĂ©es dâun projet stratĂ©gique ambitieux pour lâavenir. En France, le milieu de lâenseignement supĂ©rieur et de la recherche est complexe, avec des acteurs non-universitaires (les grandes
Ă©coles, les organismes de recherche), ce qui implique un positionnement prĂ©cis. Dans ce contexte spĂ©cifique, je ne pense pas que les universitĂ©s strasbourgeoises, si elles Ă©taient restĂ©es sĂ©parĂ©es, auraient rĂ©ussi Ă construire un projet stratĂ©gique aussi clair et cohĂ©rent pour lâavenir du site.
La fusion a permis de rationaliser, dâĂȘtre plus efficace, de donner plus de cohĂ©rence aux projets, dâĂȘtre plus dynamique, plus visible aussi : une seule universitĂ©, un seul collĂšge doctoral, une seule sociĂ©tĂ© d'accĂ©lĂ©ration du transfert de technologies, un seul incubateur, une seule fondation, etc. Sans doute beaucoup dâĂ©nergie et de moyens prĂ©servĂ©s par cette absence de dispersion.
LâuniversitĂ© unique sâest aussi considĂ©rablement ouverte sur le monde socio-Ă©conomique et sur la sociĂ©tĂ© civile, comme câest le cas des autres grandes universitĂ©s internationales. Les liens avec les entreprises se dĂ©veloppent et se multiplient. Des partenariats gagnant-gagnant se nouent avec des interlocuteurs qui se comprennent mieux et dont les logiques se rapprochent.
AcquĂ©rir de la maturitĂ©La fusion a apportĂ© une dynamique excitante et motivante. Elle a permis Ă lâuniversitĂ© de gagner en visibilitĂ©, de mutualiser des moyens, de dĂ©velopper la pluridisciplinarité⊠Aujourdâhui, la « marque » est acquise, mĂȘme dans les Ă©coles. Mais il reste du chemin Ă parcourir et il sâagit notamment de rĂ©flĂ©chir aux modalitĂ©s Ă mettre en place pour Ă©viter une trop grande centralisation et pour sâappuyer sur les structures intermĂ©diaires, comme les collĂ©giums, dont il reste Ă dĂ©finir les missions. Une rĂ©flexion sâimpose sur le modĂšle de gouvernance afin dâidentifier « le
bon endroit » oĂč doivent se prendre les dĂ©cisions. Nous avançons par petites touches et devons encore acquĂ©rir de la maturitĂ© pour tirer pleinement les bĂ©nĂ©fices de cette fusion.
Forger une culture collectiveCâĂ©tait un grand dĂ©fi que de vouloir forger, Ă partir de trois cultures assez diffĂ©rentes une culture collective ! Cela a Ă©tĂ© ma priorité⊠Au dĂ©but, je pense que certaines filiĂšres avaient peut-ĂȘtre peur que dâautres prennent le dessus⊠Mais, le temps faisant, cette crainte sâest rĂ©sorbĂ©e peu Ă peu. Lâorganisation de la premiĂšre rentrĂ©e commune des trois universitĂ©s a constituĂ© un gros dossier. Jâai Ă©tĂ© la premiĂšre vice-prĂ©sidente Vie universitaire : cette
vice-prĂ©sidence a Ă©tĂ© une belle innovation dans le cadre de la fusion, une reconnaissance pour les Ă©tudiants, puisquâon lui a donnĂ© la mĂȘme place quâaux autres vice-prĂ©sidencesâŠ
Comme employeurs, les entreprises sont sensibles Ă la crĂ©ation dâun guichet unique et apprĂ©cient de trouver plus rapidement les compĂ©tences dont elles ont besoin. Elles nâont plus quâun interlocuteur, ce qui simplifie grandement la relation. Cet argument vaut aussi pour les partenaires institutionnels territoriaux et nationaux de lâuniversitĂ©, ainsi que pour ceux d'Eucor â Le Campus europĂ©en.
La pluridisciplinaritĂ© a clairement ouvert la voie de lâIdex. GrĂące Ă ces fonds et aussi Ă ceux collectĂ©s par la fondation, un meilleur Ă©quilibre existe entre le financement des projets en sciences dures et ceux en sciences humaines et sociales. Plus personne ne conteste les avantages apportĂ©s par l'interdisciplinaritĂ© dans la recherche, dans ce monde complexe oĂč les solutions innovantes se trouvent souvent justement aux frontiĂšres entre les disciplines. Bref, la fusion a crĂ©Ă© une universitĂ© qui fait le poids et construit son avenir entre excellence et facteurs de diffĂ©rentiation. »
Caroline Laplane
Joannie Crinon, vice-présidente Vie universitaire de 2008 à 2010.
Régis Bello, président de la Fondation Université de Strasbourg, ancien P.-D.G.de De Dietrich
Jean-Marc Planex, directeur de la Faculté de chimie.
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Campagne de communication "Elle est unique" en janvier 2009.
Une rĂ©fĂ©rence dans le paysageJe venais tout juste de prendre mes fonctions Ă lâUniversitĂ© Marc-Bloch⊠Des groupes de travail thĂ©matiques ont Ă©tĂ© constituĂ©s, avec des reprĂ©sentants des trois universitĂ©s. Dans le groupe « finances », cela se passait plutĂŽt bien⊠Je dois dire que la fusion a reprĂ©sentĂ© beaucoup de travail pour les services centraux. La premiĂšre annĂ©e, 2009, a coĂ»tĂ©
beaucoup dâĂ©nergie, dâautant plus quâen mĂȘme temps, les universitĂ©s voyaient leurs compĂ©tences Ă©largies⊠Il
fallait ĂȘtre rĂ©actif ! Câest Ă partir de 2011 que nous avons pu adopter un rythme de croisiĂšre. Avec le recul, je trouve que câest une belle rĂ©alisation⊠La marque Unistra est une rĂ©fĂ©rence dans le paysage, lâuniversitĂ© sâest solidifiĂ©e, de multiples projets y foisonnent⊠Le contrĂŽleur budgĂ©taire rĂ©gional mâa
mĂȘme dit rĂ©cemment quâil en avait le vertige !
10 Ă©vĂšnements pour les dix ans
Croisements⊠et centralisationEnseignant-chercheur Ă Marc-Bloch en 2009, Ă©lu au conseil scientifique, jâĂ©tais favorable Ă la fusion. En Staps, on a lâhabitude des croisements disciplinaires : il me semblait important de pouvoir travailler, dans un cadre plus formel, avec des chercheurs de domaines diffĂ©rents. Par contre, dans les trois universitĂ©s, on pouvait sâidentifier aux figures intellectuelles qui avaient donnĂ© leurs noms
aux universitĂ©s, ce qui est moins le cas aujourdâhui. RĂ©sistant et historien adepte de la comparaison, Marc-Bloch me convenait trĂšs bien.
La fusion a hissĂ© lâuniversitĂ© Ă une autre Ă©chelle avec des aspects positifs tels que son rayonnement Ă lâinternational. Mais avec plus de 50 000 Ă©tudiants, on constate Ă©galement un plus grand Ă©loignement entre centre et pĂ©riphĂ©rie, qui peut entraĂźner des dysfonctionnements. Il a fallu crĂ©er des structures intermĂ©diaires, comme les collĂ©giums, qui ont encore Ă faire leurs preuves.
Anne-Catherine Norberti, directrice des services financiers.
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La cĂ©rĂ©monie des vĆux de lâUniversitĂ© de Strasbourg
- janvier 2019.
6 La cérémonie de remise
des diplĂŽmes de doctorat le 21 juin 2019.
7 La rentrée universitaire en
septembre 2019.
8 Un colloque novateur réunissant les quatre universités françaises
labellisĂ©es Idex (Initiative dâexcellence), fin septembre
/ début octobre 2019.
9 Le séminaire annuel de la
Coordination des universités de recherche intensive françaises (Curif), fin
octobre 2019.
10 Une soirée festive pour
les personnels de lâUniversitĂ© de Strasbourg
en décembre 2019.
2
Les rencontres Ă©conomiques avec lâEuromĂ©tropole de Strasbourg et la Chambre
de commerce et dâindustrie - janvier 2019.
3
LâassemblĂ©e des prĂ©sidents de la LERU (Ligue des
universités de recherche européennes),
les 17 et 18 mai 2019.
4
La cérémonie de remise des distinctions honorifiques,
le 24 mai 2019.
5 Le colloque interdisciplinaire
« Environnements », les 5 et 6 juin 2019.
28 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
William Gasparini, professeur en Sciences et techniques des activitĂ©s physiques et sportives (Staps), directeur dâĂ©cole doctorale.
Vivre ensemble =
Savoir(s) n°35 29
Entretien avec Henri Lachmann, prĂ©sident du comitĂ© de campagne pour lâUniversitĂ© de Strasbourg et les HĂŽpitaux universitaires de Strasbourg de 2008 Ă 20181.
Que faut-il retenir des dix ans dâactivitĂ© de la fondation ?
Je pense que lâuniversitĂ© doit continuer Ă sâouvrir. Elle reste pour lâinstant trop fermĂ©e sur elle-mĂȘme. Il est nĂ©cessaire dâaugmenter la collaboration entre le monde universitaire et son environnement, que ce soit avec les personnes physiques ou morales. Le monde de lâuniversitĂ© ne doit pas et ne peut pas vivre seul. Nous sommes entrĂ©s dans une pĂ©riode oĂč
lâĂtat, le public ne peut pas tout faire. Le privĂ©, dâune façon ou dâune autre doit se montrer plus solidaire et responsable. La premiĂšre campagne de collecte de dons (2010-20142) a Ă©tĂ© formidable. Fin 2017, nous annoncions un chiffre de dons de plus de 30 millions dâeuros, ce qui est Ă©norme. Ce qui a fait ce succĂšs tient surtout Ă la qualitĂ© de lâUniversitĂ© de Strasbourg au travers de ses prix Nobel, de lâInitiative dâexcellence, des projets quâelle engrange et aussi Ă sa dimension europĂ©enne et internationale.
Quels enseignements avez-vous tirés de cette premiÚre campagne ?
En premier lieu, il faut impĂ©rativement mieux accompagner les anciens Ă©tudiants. Il est trĂšs symptomatique quâen France, lâappartenance des Ă©tudiants Ă leur universitĂ© soit si peu exprimĂ©e. Je pense quâaujourdâhui la vie de lâĂ©tudiant sâarrĂȘte quand il quitte lâuniversitĂ© et recommence quand il rentre dans la vie active, comme sâil nâĂ©tait pas actif avant. Il est nĂ©cessaire de travailler Ă faire tomber ces frontiĂšres trĂšs artificielles. Le deuxiĂšme enseignement est certainement la patience. Il faut continuer Ă dĂ©velopper patiemment les relations au sens trĂšs large de lâuniversitĂ© avec la ville et lâensemble de ces acteurs. Il faut que lâuniversitĂ© sâouvre Ă la ville et que la ville sâintĂ©resse Ă lâuniversitĂ©.
Qu'est-ce qui fera le succĂšs de la nouvelle campagne de dons que la fondation sâapprĂȘte Ă lancer avec la Fondation pour la recherche en chimie ?
Lâobjectif de la campagne est de 50 millions dâeuros cumulĂ©s pour 2022. Câest possible parce que les mentalitĂ©s Ă©voluent. LâuniversitĂ© comprend quâelle ne peut pas continuer Ă vivre seule. Il faut que les entreprises se sentent plus responsables et intĂ©ressĂ©es par ce que fait lâuniversitĂ©. De mĂȘme que les citoyens ne peuvent pas ne pas ĂȘtre solidaires de la formation des jeunes. Il faut comprendre que lâon appartient tous Ă un mĂȘme Ă©cosystĂšme, ce nâest pas lâuniversitĂ© dâun cĂŽtĂ© et les entreprises de lâautre et les citoyens en troisiĂšme. Lâappartenance est beaucoup plus globale. Câest la prise de conscience de cette appartenance qui va faire Ă©voluer les mentalitĂ©s, une prise de conscience citoyenne de ce quâest lâuniversitĂ© et de ce quâelle reprĂ©sente. Quelquâun qui donne Ă lâuniversitĂ©, ce nâest pas de la gĂ©nĂ©rositĂ©, câest de la responsabilitĂ© et de la solidaritĂ©.
Propos recueillis par F. Z.
1 Philippe Castagnac a été nommé nouveau président du comité de pilotage de campagne le 8 octobre 2018.
2 La campagne 2010-2014 de collecte de dons pour lâUniversitĂ© de Strasbourg et les HĂŽpitaux universitaires de Strasbourg a Ă©tĂ© menĂ©e par la Fondation UniversitĂ© de Strasbourg en Ă©troite coopĂ©ration avec la Fondation pour la recherche en chimie.
« Les donateurs solidaires et responsables »
Tous Nobels !La Fondation de lâUniversitĂ© de Strasbourg, en coopĂ©ration avec la Fondation pour la recherche en chimie, a lancĂ© en novembre dernier une nouvelle campagne de mĂ©cĂ©nat. IntitulĂ©e « Tous Nobels ! », elle a pour objectif de rĂ©colter 50 millions dâeuros de dons dâici Ă 2022.
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lâUniversitĂ© de Strasbourg
HĂŽpitaux Universitaires de Strasbourg
avec le soutien de
«âŻIl faut que lââ universitĂ© sâouvre Ă la ville et que la ville
sâintĂ©resse Ă l'â universitĂ© âŻ.â»
Henri Lachmann, prĂ©sident du comitĂ© de campagne jusquâen 2018.
Savoir(s) n°35 31Savoir(s) n°35 31
Issue des travaux de recherche de lâInstitut de gĂ©nĂ©tique et de biologie molĂ©culaire et cellulaire (IGBMC) de Strasbourg, la start-up Dynacure dĂ©veloppe de nouveaux traitements pour les patients atteints de myopathies centronuclĂ©aires. Forte dâune levĂ©e de fonds spectaculaire en 2018, lâentreprise lance les Ă©tudes cliniques en 2019.
«âŻDynacure est un bel exemple de rentabilitĂ© de la recherche universitaireâŻÂ», aff irme FrĂ©dĂ©ric Legros, le directeur des opĂ©rations de la sociĂ©tĂ©. Ses succĂšs et son parcours prometteur sont le fruit de lâexcellence scientif ique de lâIGBMC, de la mobilisation de Conectus (SociĂ©tĂ© dâaccĂ©lĂ©ration du transfert de technologies) et dâun partenariat industriel avec une biotech reconnue au niveau mondial, Ionis Pharmaceuticals. Tout a commencĂ© en 1996 Ă lâIGBMC, lorsque lâĂ©quipe de Jocelyn Laporte identif ie les gĂšnes Ă lâorigine de la myopathie centronuclĂ©aire, une maladie neuromusculaire rare, qui touche environ 4â000 patients dans le monde. Poursuivant leurs recherches sur des souris, les chercheurs dĂ©couvrent quâen limitant lâexpression dâun des gĂšnes impliquĂ©s dans la maladie, celui de la dynamine 2, ils parviennent Ă guĂ©rir les souris atteintes de myopathie centronuclĂ©aire. Cette innovation prometteuse est dĂ©tectĂ©e en 2013 par Conectus qui dĂ©pose un premier brevet pour protĂ©ger les dĂ©couvertes et accorde un premier f inancement dans le cadre de
son fonds de prĂ©-maturation et maturation des projets de recherche. Câest Ă©galement en 2013 que Conectus parvient Ă mobiliser Kurma Partners un fonds de capital-risque europĂ©en dĂ©diĂ© Ă la santĂ©. LâannĂ©e suivante, un deuxiĂšme brevet est dĂ©posĂ© et, par le biais de Kurma Partners, un quatriĂšme partenaire-clĂ© rejoint lâaventureâ: Ionis Pharmaceuticals, sociĂ©tĂ© californienne leader dans le dĂ©veloppement de molĂ©cules qui limitent lâexpression des gĂšnes.
Des ambitions internationalesEn 2016, la start-up Dynacure voit le jour Ă Strasbourg et dĂšs juinâŻ2018, elle rĂ©alise une levĂ©e de fonds dâun montant de 47âŻmillions dâeuros, un des records français en la matiĂšre. Deux nouveaux investisseurs, Andera et Pontifax rejoignent le pool dâinvestisseurs dĂ©jĂ prĂ©sents (Kurma Partners, Idinvest Partners, Bpifrance). Cette capitalisation va permettre de lancer les essais cliniques en 2019 sur une quarantaine de patients en Europe. En fonction des rĂ©sultats, un mĂ©dicament pourrait ĂȘtre mis sur le marchĂ© dâici Ă six ans. «âŻNous nâarriverons pas Ă faire marcher les personnes atteintes de myopathie centronuclĂ©aire, mais si grĂące Ă notre traitement ils peuvent manger seuls et respirer sans machine, leur vie et celle de leur famille sera dĂ©jĂ amĂ©liorĂ©eâŻÂ», prĂ©vient StĂ©phane van Rooijen, le P.-D.G. de Dynacure. Aujourdâhui, lâentreprise qui emploie quatorze salariĂ©s souhaite poursuivre le dĂ©veloppement de nouvelles thĂ©rapies pour dâautres maladies rares. «âŻNous voulons devenir un acteur mondial sur le marchĂ© des maladies orphelinesâŻÂ», annonce le P.-D.G..
J.G.
Une avancée mondiale sur le traitement des maladies orphelines
â LâĂ©quipe de Dynacure avec StĂ©phane van Rooijen, le P.-D.G. (au fond Ă gauche) et FrĂ©dĂ©ric Legros, le directeur des opĂ©rations (au fond Ă droite).
Conectus en premiĂšre ligne«âŻLâexemple de Dynacure cristallise les diffĂ©rentes actions et Ă©tapes qui nous permettent de dĂ©velopper des projets. Nous avons pleinement rempli notre rĂŽle dâaccĂ©lĂ©rateur car le transfert de technologies et la crĂ©ation de cette start-up ont Ă©tĂ© extrĂȘmement rapidesâŻÂ», se fĂ©licite Caroline Dreyer, la prĂ©sidente de Conectus.
«âŻDynacure est un bel exemple de rentabilitĂ© de la recherche
universitaire âŻ.â»
Et ailleurs
Fabrice Berna, jeune professeur de psychiatrie Ă lâUniversitĂ© de Strasbourg, a effectuĂ© un sĂ©jour de trois semaines Ă Shanghai en septembre dernier dans le cadre du programme Jeunes Talents France-Chine. Une expĂ©rience qui va donner naissance Ă une collaboration directe entre chercheurs.
Pourquoi avez-vous rĂ©pondu Ă lâappel Ă projet du programme Jeunes Talents France-Chineâ?Je cherchais de nouvelles sources de f inancements pour mes projets de recherche. Les collaborations inter-pays permettent dâaccĂ©der Ă des f inancements spĂ©cif iques, de trouver des post-
doctorats Ă nos Ă©tudiants, de dĂ©velopper de nouveaux projets. Depuis 2011, jâai nouĂ© de nombreux liens avec des Ă©quipes en Allemagne, Angleterre, Belgique, Danemark, Espagne. En tant que jeune professeur de lâuniversitĂ© et des HĂŽpitaux universitaires de Strasbourg (jâai Ă©tĂ© nommĂ© en septembreâŻ2017), je ne peux pas encore candidater sur des projets europĂ©ens. Il faut trouver dâautres voies comme le programme
Jeunes Talents France-Chine que jâai dĂ©couvert grĂące Ă la newsletter de lâInserm. Et en faisant des recherches, jâai identif iĂ© lâĂ©quipe du professeur Kwok Ă lâEast China Normal University (ECNU) qui travaille sur des sujets similaires aux miens.En quoi votre sĂ©jour en Chine a-t-il fait avancer vos recherchesâ?Mes recherches explorent les perturbations de la mĂ©moire autobiographique pour comprendre certains symptĂŽmes clĂ©s de la schizophrĂ©nie comme les troubles de lâidentitĂ©. Cette forme de mĂ©moire se prĂȘte diff icilement Ă des protocoles qui contrĂŽlent les conditions dans lesquelles les souvenirs sont encodĂ©s. Mais en dĂ©couvrant les travaux du professeur Sze Chai Kwok, je me suis aperçu que ses paradigmes pouvaient ĂȘtre appliquĂ©s Ă mes recherches. Par des analyses couplant imagerie par rĂ©sonance magnĂ©tique
(IRM) et stimulation magnĂ©tique transcrĂąnienne (rTMS), il a montrĂ© que certaines zones du cerveau semblaient impliquĂ©es dans lâĂ©laboration des jugements mĂ©tamnĂ©siques. AprĂšs plusieurs Ă©changes et suite Ă mon sĂ©jour, nous avons donc dĂ©cidĂ© dâadapter son protocole pour Ă©tudier le fonctionnement de la mĂ©moire des patients avec schizophrĂ©nie (qui seront Ă©valuĂ©s et imagĂ©s en IRM Ă Strasbourg). En trois semaines Ă Shanghai jâai donnĂ© quatre confĂ©rences et jâai rencontrĂ© beaucoup de scientif iques. Jâai pu Ă©changer sur mes recherches mais Ă©galement sur des questions cliniques et de psychothĂ©rapie. Jâai Ă©tĂ© trĂšs impressionnĂ© par la vitesse Ă laquelle les gens se connectent. Jâai pu obtenir un rendez-vous avec le vice-directeur du CHU la veille pour le lendemain. En France câest inimaginableâ!Comment votre collaboration en Chine va-t-elle se poursuivreâ?Un premier article a dĂ©jĂ Ă©tĂ© soumis, un deuxiĂšme est en cours et nous allons soumettre un projet de recherche sur lequel pourront travailler deux Ă©tudiants en thĂšse en Chine et en France. Il nous reste Ă trouver les volontairesâ: tous nâont pas envie de partir Ă lâautre bout du monde, et les Ă©tudiants chinois prĂ©fĂšrent souvent les Ătats-Unis Ă lâEurope⊠Pour ma part, jâai trĂšs envie de retourner en Chine et de concrĂ©tiser ces collaborationsâ!
Propos recueillis par J. G.
Immersion scientifique enthousiasmante en Chine
Fabrice Berna, au centre, lors dâun atelier dans lâĂ©quipe du docteur Jue Chen, chef du dĂ©partement de psychothĂ©rapie du Shanghai Mental Health Center.
«âŻJâai Ă©tĂ© trĂšs impressionnĂ© par la vitesse Ă laquelle les gens se connectent âŻ.â»
32 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
Savoir(s) n°35 33
Strasbourg est membre depuis 2005 dâEurolife, rĂ©seau de neuf universitĂ©s europĂ©ennes des sciences de la vie. Objectif : favoriser la mobilitĂ© et les collaborations entre Ă©tudiants et chercheurs.
Eurolife a Ă©tĂ© crĂ©Ă© en 1999 par huit universitĂ©s europĂ©ennes parmi les plus rĂ©putĂ©es dans le domaine des sciences de la vie et de la mĂ©decine translationnelle. En 2005, lâUniversitĂ© Louis-Pasteur de Strasbourg a rejoint le rĂ©seau aux cĂŽtĂ©s des universitĂ©s dâEdimbourg et de Barcelone, du University Medical Center de Göttingen, du Leiden University Medical, de la Medical University Innsbruck, de lâUniversitĂ© Semmelweis Budapest, du Trinity College de Dublin et du Karolinska Institute de Stockholm. Eurolife entend faciliter la recherche collaborative entre les diffĂ©rentes institutions acadĂ©miques au niveau de la formation initiale (licence et master) et de la formation doctorale par lâĂ©change de doctorants, dâenseignants-chercheurs et de chercheurs, ainsi que la construction de projets de recherche communs. La reprĂ©sentation de lâUnistra au sein dâEurolife est assurĂ©e par Joern PĂŒtz, biochimiste, vice-prĂ©sident dĂ©lĂ©guĂ©, chargĂ© des relations franco-allemandes, Catherine Schuster, biologiste molĂ©culaire et cellulaire, directrice de lâĂ©cole doctorale des sciences de la vie et de la santĂ© (ED 414) et Sandrine Schott-CarriĂšre du PĂŽle unique dâingĂ©nierie et responsable de la cellule Europe.
DĂ©marche bottom upEurolife se rĂ©unit deux fois par an en assemblĂ©e plĂ©niĂšre gĂ©nĂ©ralement suivie dâun colloque, tel celui sur les vaccins thĂ©rapeutiques contre le cancer organisĂ© Ă Innsbruck, Ă lâautomne dernier. Outre ces grands rendez-vous, Eurolife est le cadre idĂ©al pour organiser des actions bilatĂ©rales ou trilatĂ©rales entre les universitĂ©s adhĂ©rentes. « Nous voulons faciliter la crĂ©ation de projets collaboratifs associant recherche et enseignement, prĂ©cise Joern PĂŒtz. Câest dâailleurs une source de financements supplĂ©mentaires grĂące au rĂ©seau. » Ainsi, du 16 au 21 dĂ©cembre dernier, six Ă©tudiants strasbourgeois (trois doctorants et trois Ă©tudiants en master) ont Ă©tĂ© invitĂ©s Ă participer Ă la winter school dâObergurgl, en Autriche, coorganisĂ©e
par lâUnistra, le University Medical Center de Göttingen et la Medical University Innsbruck sur le thĂšme de la structure et la fonction du gĂ©nome dans lâhomĂ©ostasie et la maladie, avec le soutien dâEurolife et de lâUniversitĂ© franco-allemande.
En tout, seize Ă©tudiants strasbourgeois ont candidatĂ© pour participer Ă lâĂ©vĂ©nement. « Nous nâavions jamais reçu autant de candidatures, se rĂ©jouit Catherine Schuster. AnnĂ©e aprĂšs annĂ©e, grĂące Ă ces confĂ©rences de haut niveau, Eurolife se fait de mieux en mieux connaĂźtre. » Et Joern PĂŒtz se veut encourageant : « Il est important que de plus en plus dâĂ©tudiants intĂšgrent la dimension de la recherche. Eurolife favorise ce mouvement, notamment par les financements quâelle offre pour aider leur mobilitĂ©. La principale force du rĂ©seau, câest la dĂ©marche bottom up : ce sont les chercheurs qui identifient les partenariats possibles dans les neuf universitĂ©s et ce sont eux qui proposent dây envoyer des Ă©tudiants pour un stage. »
J.d.M.
Eurolife : la force vitale dâun rĂ©seau europĂ©en
Les membres du réseau Eurolife lors d'une rencontre à Budapest en 2018.
«âŻGrĂące Ă ces confĂ©rences
de haut niveau , Eurolife se fait de mieux en mieux connaĂźtre.âŻÂ»
Et ailleurs
Il trĂŽne Ă lâentrĂ©e du campus de lâEsplanade. Il est caractĂ©ristique de lâarchitecture fonctionnaliste. LivrĂ© en 1967, lâensemble que forment lâUFR de mathĂ©matique et dâinformatique et lâĂcole et observatoire de la science de la Terre (Eost) nous raconte une Ă©poque oĂč le bĂ©ton Ă©tait roi.
« Je me souviens avoir demandĂ© aux futurs utilisateurs, dĂšs le dĂ©but de mes Ă©tudes, si lâaustĂ©ritĂ© des disciplines enseignĂ©es excluait que lâarchitecture en fĂ»t aimable. Lâon mâassura que non et jâeus Ă©tĂ© bien déçu que lâon me rĂ©pondit le contraire. » Cette citation de Bertrand
Bonnert, architecte en chef des monuments historiques proclamĂ©e lors de lâinauguration permet certainement dâapprĂ©hender cette structure sous un Ćil nouveau. Une fois entrĂ© dans le bĂątiment, câest un espace trĂšs ouvert que lâon dĂ©couvre. Un jardin intĂ©rieur, conçu comme un espace dâĂ©changes et de dĂ©tente, ainsi quâun patio permettent dâaĂ©rer la structure du rez-de-chaussĂ©e et de laisser la lumiĂšre pĂ©nĂ©trer dans les
espaces. « Cette architecture dite fonctionnaliste est assez mĂ©connue », regrette Laurent Kohler. Peut-ĂȘtre Ă cause du bĂ©ton ? Pour autant, ce passionnĂ© apprĂ©cie lâensemble cohĂ©rent que constituent lâaustĂ©ritĂ© du bĂ©ton et lâharmonie du vĂ©gĂ©tal. Architecte de son Ă©tat, il collabore depuis plusieurs annĂ©es avec lâUFR pour redonner son titre de noblesse Ă ce courant architectural et Ă ce bĂątiment. Chaque annĂ©e, des visites guidĂ©es sont organisĂ©es lors des JournĂ©es du patrimoine. Lâinstitut a Ă©galement accueilli, en fin dâannĂ©e derniĂšre, une exposition de ses croquis.
Faire perdurer « lâesprit du bĂątiment »« La forme du bassin dans le jardin intĂ©rieur rappelle la forme dâune galaxie ; une Ă©vocation des sciences de la Terre et de lâUnivers. La sculpture intitulĂ©e lâesprit mathĂ©matique de François Stahly au centre du bassin Ă©voque la science mathĂ©matique », commente Vincent BlanlĆil, directeur actuel de lâUFR. Un esprit incarnĂ© qui sâexplique certainement par lâimplication du directeur
de lâĂ©poque, Jean Frenkel, ainsi que de Janine Le Minor, statisticienne, alors chargĂ©e de la maĂźtrise dâĆuvre du projet.
« Ă lâorigine, il y avait une succession de petites salles de travail au rez-de-chaussĂ©e qui ont depuis Ă©tĂ© attribuĂ©es Ă dâautres fonctions. Nous avons amĂ©nagĂ© les espaces libres proches des amphis avec du mobilier pour que les Ă©tudiants se les approprient. Une maniĂšre de faire perdurer lâesprit du bĂątiment », se rĂ©jouit Vincent Blanloeil. La bibliothĂšque a Ă©galement Ă©tĂ© pensĂ©e comme un lieu central. Un ensemble de brise-soleil permettent de prĂ©server les ouvrages anciens dâune trop forte luminositĂ© et assure le confort des utilisateurs Ă lâimage de ceux que lâon retrouve Ă©galement sur les façades des bĂątiments. Une histoire de bĂ©ton qui garde aujourdâhui toute sa fonctionnalitĂ©.
F.Z.
Lâharmonie du bĂ©ton
Savoir(s) n°35 35
Un ensemble cohérent entre
lâaustĂ©ritĂ© du bĂ©ton
et lâharmonie
du végétal .
â Le jardin intĂ©rieur, conçu comme un espace dâĂ©changes et de dĂ©tente.
Sous lâentrĂ©e de lâun des amphithĂ©Ăątres, des espaces de travail ouverts.
Un peu de poĂ©sie bĂ©tonesque« Le gris du bĂ©ton de Portland des Ă©lĂ©ments porteurs, le blanc dorĂ© du bĂ©ton de Lafarge des Ă©lĂ©ments lĂ©gers, et de la pierre de Fontenille des pignons, la pĂąte de verre des allĂšges, constituent la base de cette polychromie que nous avons voulu discrĂšte, prĂ©fĂ©rant rechercher la vigueur dans le jeu des volumes et lâaffirmation de la structure plutĂŽt que dans une coloration excessive des parements, ce que nous considĂ©rons comme une mode Ă©phĂ©mĂšre, donc peu architecturale. » Extrait du discours de Bertrand Bonnert lors de lâinauguration.
Patrimoine
Le Centre international dâenseignement supĂ©rieur du journalisme (CIESJ), ancĂȘtre du Cuej, est la premiĂšre Ă©cole de journalisme nĂ©e au sein de lâuniversitĂ© française. Les 60 ans de lâĂ©cole, cĂ©lĂ©brĂ©s lâautomne dernier, ont permis dâinterroger le passĂ© pour reconstituer son histoire singuliĂšre et mĂ©connue.
NĂ© en pleine Guerre froide de la volontĂ© conjuguĂ©e de lâUnesco et de lâUniversitĂ© de Strasbourg, le CIESJ, ancĂȘtre de lâactuel Centre universitaire dâenseignement du
journalisme (Cuej), a Ă©tĂ© pensĂ© au dĂ©part, en 1957, comme un centre de formation de formateurs en journalisme en provenance du monde entier. Les premiĂšres licences en formation initiale nây ont Ă©tĂ© dĂ©livrĂ©es quâen 1962. « Toute cette histoire nâĂ©tait ni connue, ni documentĂ©e. » Alain Chanel, directeur de lâĂ©cole de 1989 Ă 2009, qui fut lâassistant du professeur Jacques LĂ©autĂ© fondateur du centre international, est allĂ© Ă la rencontre des traces de ce brillant
passĂ©. « Il ne reste pas beaucoup de tĂ©moins vivants des origines ; il semblait Ă©vident, depuis quelques annĂ©es dĂ©jĂ , de trouver une maniĂšre de reconstituer et matĂ©rialiser cette histoire. Je me suis nourri dâarchives de certains pionniers et jâai exhumĂ© des documents de lâUnesco, de lâUniversitĂ© de Strasbourg et des collectivitĂ©s territoriales. » Et Nicole Gauthier, lâactuelle directrice du Cuej, a saisi lâopportunitĂ© des 60 ans de lâĂ©cole, cĂ©lĂ©brĂ©s en octobre dernier, pour donner une perspective Ă©ditoriale Ă la reconstitution de cette histoire.
Retrouver un rayonnement international : une volontĂ© affirmĂ©e de lâuniversité« Ce travail a Ă©clairĂ© dâune façon concrĂšte les conditions et le contexte de la naissance du CIESJ », explique Alain Chanel. LâUnesco voulait crĂ©er des centres rĂ©gionaux ou internationaux qui sâattacheraient Ă relever le niveau de la formation et lâĂ©ducation des journalistes dans diverses parties du monde, et lâUniversitĂ© de Strasbourg avait « le dĂ©sir farouche » de renaĂźtre aprĂšs-guerre. En saisissant la proposition de coopĂ©ration proposĂ©e par lâUnesco, lâUniversitĂ© de Strasbourg affirmait Ă©galement sa volontĂ© de retrouver un « rayonnement international ». Ă lâĂ©poque de sa crĂ©ation, le CIESJ fut « un des rares lieux oĂč lâEst et lâOuest se retrouvaient pacifiquement pendant la Guerre froide », confie Alain Chanel. Pour preuve, le 3 novembre 1958, la deuxiĂšme session rĂ©unit 26 stagiaires venus de 20 pays et 45 confĂ©renciers. Sur les neuf boursiers de lâUnesco, quatre sont de lâOuest (Danemark, Finlande, GrĂšce, Italie), quatre de lâEst (Hongrie, Pologne, Yougoslavie, URSS) et un du Pakistan. Quelques jours plus tard, deux confĂ©rences prĂ©sentent lâ« Ă©tat de la formation professionnelle des journalistes », lâune aux Ătats-Unis, lâautre en URSS. « Il est difficile dâimaginer aujourdâhui quâen dehors de ce contexte, la crĂ©ation dâun lieu vouĂ© Ă lâenseignement du journalisme eut Ă©tĂ© possible », conclut Alain Chanel.
F.B.
Une fille de la Guerre froide
Le CIESJ fut «âŻun des rares lieux oĂč lâEst et lâOuest se retrouvaient
pacifiquement pendant la Guerre
froide . »
LâĂ©cole du terrainLes six dĂ©cennies dâexistence du Cuej sont retracĂ©es dans un
ouvrage collectif richement documenté et illustré, auto-édité
par le Cuej Ă 2 000 exemplaires, intitulĂ© « LâĂ©cole du terrain ».
En plus de lâhistoire de lâĂ©cole, on y trouve un portfolio des
délocalisations des étudiants du Cuej en territoire étranger.
La troisiĂšme partie de cet
ouvrage raconte le Cuej
dâaujourdâhui avec les mots
de ceux qui le font vivre
au quotidien, journalistes,
enseignants et universitaires
au service de la formation
des futurs journalistes. Enfin,
Noémie Rousseau, diplÎmée de
lâĂ©cole, a menĂ© une enquĂȘte en
douze Ă©pisodes pour proposer
un récit de ces nombreuses
générations de Cuéjiens.
36 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
LâĂ©cole du terrain60 ans dâenseignement du journalisme Ă lâUniversitĂ© de Strasbourg
Cue
j
Savoir(s) n°35 37
Remettre Ă jour la prestigieuse collection du catalogue Krantz, propriĂ©tĂ© du MusĂ©e de minĂ©ralogie : câest le dĂ©fi que sâest lancĂ© Jean Kind, octogĂ©naire passionnĂ© de mathĂ©matiques qui dĂ©die ses journĂ©es de retraitĂ© au calcul de modĂšles cristallographiques.
Au MusĂ©e de minĂ©ralogie, câest dans le groupe des petits modĂšles, le plus important en nombre et en diversitĂ©, que se trouve la prĂ©cieuse collection Hessenberg et Rose, Ă©ditĂ©e en 1880 dans le catalogue de Krantz (Bonn). Elle est tout particuliĂšrement remarquable par la
prĂ©cision avec laquelle ont Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©es les 675 piĂšces en bois dâĂ©rable et de poirier. Mais 75 piĂšces ont Ă©tĂ© dispersĂ©es, suite Ă des prĂȘts effectuĂ©s notamment pour lâenseignement. Un manque que Jean Kind sâest attelĂ© Ă combler, en complĂ©tant et reconstituant intĂ©gralement la collection.
Plus de 400 pages de modĂšles dessinĂ©sFormĂ© Ă lâĂcole de chimie de Nancy, cet octogĂ©naire a, rĂ©sume-t-il, «âŻquittĂ© les burettes pour le spectographeâŻÂ» et consacrĂ© sa carriĂšre professionnelle Ă la physique, travaillant dans les secteurs de lâĂ©nergie, de lâaviation et f inalement chez Peugeot, Ă MontbĂ©liard. Aujourdâhui Ă la retraite, Jean Kind ne compte pas ses heures. Il a dĂ©jĂ procĂ©dĂ© au dessin industriel de plus de 400 pages de modĂšles, avec une prĂ©cision dâun 1/10e de millimĂštre et en respectant scrupuleusement la morphologie des piĂšces, angle par angle, face par face. Ils seront complĂ©tĂ©s par des dessins en 3D pour sâadapter au robot du lycĂ©e Couff ignal qui, plus tard, va fabriquer les modĂšles. Jean Kind entend bien aller au bout de ce travail titanesqueâ:
«âŻEt quand la collection sera reconstituĂ©e, jâespĂšre quâil ne sera plus question de laisser sortir quoi que ce soit du musĂ©e⊠On nâenseigne plus aujourdâhui la cristallographie, mais cette collection a un gros intĂ©rĂȘt culturel et, qui saitâ? Cela va peut-ĂȘtre revenir Ă la modeâ?âŻÂ».
M.N.
La passion des modĂšles cristallographiques
Denis Leypold, responsable scientifique du Musée de minéralogie.
«âŻOn nâenseigne plus aujourdâhui la cristallographie
, mais cette collection a un gros intĂ©rĂȘt
culturel . »
Une collection exceptionnelleQue de trĂ©sors insoupçonnĂ©s et mĂ©connus dans les vitrines, sur les Ă©tagĂšres et dans les grands tiroirs du musĂ©e de minĂ©ralogieâ! Ils abritent une magnif ique collection de modĂšles cristallographiques, grands et petits, rĂ©alisĂ©s en bois de poirier ou dâĂ©rable, qui Ă©taient destinĂ©s essentiellement Ă lâenseignement. 2â885 modĂšles en tout, ce qui constitue un corpus pĂ©dagogique et culturel de grande qualitĂ© et dâintĂ©rĂȘt mondialâ: il sâagit de la collection la plus importante aprĂšs celle de Berlin qui compte environ 3â500 modĂšles. «âŻPaul Groth (1843-1927), physicien cristallographe Ă lâorigine de la version moderne de classification des minĂ©raux, Ă©tait un minĂ©ralogiste gĂ©nial et perfectionniste. Câest lui qui a rĂ©fĂ©rencĂ© les minĂ©raux en notant toutes leurs mesures angulaires, ce qui a servi ensuite Ă lâexĂ©cution des petits modĂšles en boisâŻÂ», commente Denis Leypold, responsable scientif ique du MusĂ©e de minĂ©ralogie. Groth est allĂ© jusquâĂ faire venir en 1877 un «âŻmodeleurâŻÂ» rĂ©putĂ©, le saxon Wenzel, qui a rĂ©alisĂ© ses modĂšles dans les ateliers de lâInstitut strasbourgeois de minĂ©ralogie.
Patrimoine
BrĂšvesInaugurationEn fonctionnement depuis un an, EASE (European aseptic and sterile environment), dĂ©diĂ©e Ă la formation dâopĂ©rateurs en salles blanches, a Ă©tĂ© inaugurĂ©e en dĂ©cembre dernier. LâĂ©vĂšnement, conduit par la directrice de lâusine-Ă©cole, Constance Perrot, sâest dĂ©roulĂ© en prĂ©sence des nombreux financeurs, partenaires et mĂ©cĂšnes de cet ambitieux projet. Avec EASE, premier projet laurĂ©at du Programme investissements d'avenir (volet formation par alternance), lâUniversitĂ© de Strasbourg devient le seul Ă©tablissement dâenseignement supĂ©rieur en Europe dotĂ© dâune plateforme de formation aux mĂ©tiers de la production pharmaceutique en milieu stĂ©rile.
EuropeLe label prestigieux sur les questions europĂ©ennes Jean-Monnet pilotĂ© par lâUnion europĂ©enne a Ă©tĂ© dĂ©cernĂ© Ă lâUniversitĂ© de Strasbourg pour le Centre Jean-Monnet transfrontalier franco-allemand. RattachĂ© Ă Sciences Po Strasbourg, le Centre Jean Monnet a Ă©tĂ© lancĂ© officiellement le lundi 5 novembre 2018. AncrĂ© dans un territoire transfrontalier et engagĂ© dans la construction du campus europĂ©en, il permettra la crĂ©ation dâun bachelor trinational Eucor, dâun dispositif diplĂŽmant de formation continue sur les questions europĂ©ennes et d'une plateforme numĂ©rique de cours sur l'Europe.
Mousses« Comment les bulles sâorganisent ? Quelle est le lien entre cette organisation et les propriĂ©tĂ©s de la mousse ? Comment modifier ces mousses pour leur donner des propriĂ©tĂ©s nouvelles ? » Câest Ă ces questions que Wiebke Drenckhan, chercheuse Ă lâInstitut Charles Sadron, tente de rĂ©pondre depuis sa thĂšse. Objectif : exploiter le vĂ©ritable potentiel des mousses polymĂšres. Son travail dĂ©jĂ rĂ©compensĂ© par une premiĂšre bourse ERC Starting Grant de 1,5 million dâeuros en 2012, vient Ă nouveau dâĂȘtre reconnu Ă travers lâattribution dâun second ERC Consolidator Grant en 2018.
AnniversaireAu cours de ces dix derniĂšres annĂ©es, les travaux pratiques dâOpenLAB (ouverture pĂ©dagogique et novatrice de laboratoires) se sont rĂ©alisĂ©s dans prĂšs de 100 % des lycĂ©es alsaciens. L'opĂ©ration OpenLAB qui a cĂ©lĂ©brĂ© ses dix ans en novembre dernier, est une Initiative dâexcellence (IdEx) nĂ©e de la volontĂ© commune de lâInspection pĂ©dagogique rĂ©gionale et de lâĂcole doctorale des sciences de la vie et de la santĂ© de lâUniversitĂ© de Strasbourg. Lâobjectif : aller Ă la rencontre des lycĂ©ens (de terminale dâabord et de premiĂšre depuis 2011), avec la conviction que le meilleur moyen dâĂ©changer autour de la science est de permettre aux jeunes de rĂ©aliser une expĂ©rience en mettant « la main Ă la pĂąte » avec des doctorants. Selon une enquĂȘte de satisfaction, plus de 80 % des lycĂ©ens expriment une trĂšs grande satisfaction et les professeurs sont trĂšs enthousiastes et satisfaits par lâintervention. Vivement le prochain anniversaire !
38 le magazine dâinformation de lâUniversitĂ© de Strasbourg
Savoir(s) n°35 39
DĂ©couverteUne mission conjointe de l'Institut français dâarchĂ©ologie orientale (IFAO) et de l'UniversitĂ© de Strasbourg a dĂ©couvert une stĂšle et deux sarcophages de la XVIIIe dynastie prĂšs de Louxor en Ăgypte. Les deux sarcophages ont Ă©tĂ© ouverts le 24 novembre dernier, en prĂ©sence du ministre des AntiquitĂ©s Ă©gyptien, Khaled el-Anani. « Cette dĂ©couverte â qui depuis a fait le tour du monde - est importante Ă plusieurs points de vue, dâune part parce quâelle est le rĂ©sultat de lâutilisation dâune mĂ©thode innovante de production et dâenregistrement des donnĂ©es de fouilles et dâautre part par lâhistoire exceptionnelle des objets mis au jour », dĂ©taille le directeur de lâInstitut dâĂ©gyptologie de lâUniversitĂ© de Strasbourg, FrĂ©dĂ©ric Colin.
RĂ©seauPour rĂ©pondre aux besoins technologiques des entrepreneurs et des jeunes entreprises, et pour faciliter le dĂ©veloppement de projets Ă l'interface de plusieurs domaines scientifiques et techniques, l'UniversitĂ© de Strasbourg a crĂ©Ă© un rĂ©seau de laboratoires et dâespaces de coworking. Ce rĂ©seau inaugurĂ© en octobre dernier compte Ă ce jour six fablabs couvrant la biologie vĂ©gĂ©tale, la microbiologie, la chimie, l'Ă©lectronique, la robotique, les impressions 3D, ainsi que l'art et le design. Il est accessible aux Ă©tudiants bĂ©nĂ©ficiaires du statut national Ă©tudiant-entrepreneur, ainsi qu'aux entreprises et aux start-up par le biais de lâembauche dâun stagiaire. Cette initiative unique en France a bĂ©nĂ©ficiĂ© du soutien financier de lâEuromĂ©tropole et du programme Initiative d'excellence, dans le cadre des investissements dâavenir.
RencontreAlain RĂ©gnier, dĂ©lĂ©guĂ© interministĂ©riel chargĂ© de lâaccueil et de lâintĂ©gration des rĂ©fugiĂ©s auprĂšs du ministĂšre de lâIntĂ©rieur a rencontrĂ© les enseignants-chercheurs en exil et les Ă©tudiants rĂ©fugiĂ©s inscrits Ă lâInstitut international dâĂ©tudes françaises (IIEF) de lâUniversitĂ© de Strasbourg, le 21 janvier. Lâoccasion de rappeler lâengagement de lâuniversitĂ© qui a Ă©tĂ© lâune des premiĂšres en France Ă mettre en place un dispositif permettant aux migrants de se former en français par lâobtention dâun diplĂŽme universitaire de Français langue Ă©trangĂšre (FLE), dĂšs la rentrĂ©e 2015.
PĂ©piteLauriane Renaud, Ă©tudiante entrepreneur Ă lâUniversitĂ© de Strasbourg, diplĂŽmĂ©e en master Biologie vĂ©gĂ©tale, est lâun des trois grands prix de la 5Ăš Ă©dition du prix PĂ©pite-Tremplin pour l'entrepreneuriat Ă©tudiant dĂ©cernĂ© en novembre 2018. Un concours qui rĂ©compense chaque annĂ©e au niveau national les meilleurs projets innovants dâĂ©tudiants et de jeunes diplĂŽmĂ©s. Le projet ”P permet le dĂ©veloppement d'un outil qui dĂ©tecte les micropolluants dans l'environnement (rĂ©sidus de mĂ©dicaments, pesticides, insecticidesâŠ). La quantification de molĂ©cules rĂ©siduelles posant certaines problĂ©matiques au vu des technologies existantes, la solution proposĂ©e par le projet ”P permettra de dĂ©velopper des kits de dĂ©tection, sous forme de consommables de laboratoires.
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Alain Beretz, président de l'Université de Strasbourg de 2009 à 2016.
«⯠Regarder vers demain , cela doit rester
la mission , et l' ambition
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