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Nations Unies S/2017/861*
Conseil de sécurité Distr. générale
16 octobre 2017
Français
Original : anglais
17-18255* (F) 271017 271017
*1718255*
Rapport du Secrétaire général sur les femmes et la paix et la sécurité
I. Introduction
1. Ces 17 dernières années, la question des femmes et la paix et la sécurité a
occupé une place centrale au niveau mondial, s’imposant comme un élément
essentiel et un outil incontournable pour rendre plus efficaces les efforts que mène
l’Organisation des Nations Unies dans la prévention et le règlement des conflits et
l’action humanitaire. Elle est un préalable à la mise en œuvre du Programme de
développement durable à l’horizon 2030. Parmi les trois piliers du système des
Nations Unies que sont la paix, les droits de l’homme et le développement, la
question des femmes et la paix et la sécurité est porteuse de transformations
majeures. Les deux dernières décennies ont montré de manière suffisamment
crédible qu’une véritable participation des femmes permet de renforcer
sensiblement les efforts de protection, d’accélérer le redressement économique,
d’œuvrer davantage à la consolidation de la paix, et d’instaurer une paix plus
durable. Des recherches de plus en plus nombreuses menées ces dernières années
mettent également en évidence le lien direct entre, d’une part, l’égalité des sexes,
d’autre part, la résilience aux conflits et la prévention des conflits. En dépit du
pouvoir de transformation que peut véritablement impulser cette question, de la
feuille de route claire et détaillée proposée dans les recommandations de l ’étude
mondiale sur les femmes et la paix et la sécurité menée en 2015, des examens de
2015 consacrés aux questions de paix et de sécurité, et de la nécessité accrue de
trouver des solutions efficaces aux problèmes mondiaux qui ne cessent de
s’accentuer, on est encore loin de la mise en œuvre concrète des priorités concernant
les femmes et la paix et la sécurité1.
2. Le présent rapport est soumis conformément à la déclaration du Président du
Conseil de sécurité en date du 26 octobre 2010 (S/PRST/2010/22), dans laquelle le
Conseil a demandé que lui soient présentés des rapports annuels sur la mise en
œuvre de la résolution 1325 (2000) et de la résolution 2122 (2013) dans laquelle il a
demandé des renseignements sur les progrès accomplis par rapport à toutes les
priorités concernant les femmes et la paix et la sécurité, mettant en évidence les
insuffisances et les difficultés de mise en œuvre. Il fait le point sur l ’état de la mise
__________________
* Nouveau tirage pour raisons techniques (27 octobre 2017).
1 S/2016/673, S/2015/446, S/2015/490, et Radhika Coomaraswamy, « Prévenir les conflits,
transformer la justice, obtenir la paix : étude mondiale sur la mise en œuvre de la résolution 1325
du Conseil de sécurité des Nations Unies », ONU-Femmes, 2015.
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en œuvre de la résolution depuis la publication du précédent rapport (S/2016/822),
en s’appuyant sur les données relatives aux indicateurs2 et en dégageant des
tendances. Il présente également les progrès accomplis dans l ’application de la
résolution 2242 (2015), qui a été adoptée après la conduite en 2015 de trois examens
consacrés aux questions de paix et de sécurité, axés sur la manière dont la mise en
œuvre effective des priorités concernant les femmes et la paix et la sécurité
contribue directement à la prévention des conflits et au maintien de la paix. Il
propose une série de grandes recommandations générales et incitatives qui traitent
des difficultés les plus importantes rencontrées.
3. Le rapport est établi à partir de données et d’analyses communiquées par des
entités du système des Nations Unies, dont les opérations de paix et les équipes de
pays, ainsi qu’à partir de contributions d’États Membres, d’organisations régionales
et de la société civile.
II. Aperçu des progrès accomplis
4. Dans le précédent rapport (S/2016/822), toutes les parties prenantes ont été
invitées à envisager de nouvelles mesures dans cinq domaines prioritaires : a) mettre
la participation et le rôle moteur des femmes au cœur des efforts visant à assurer la
paix et la sécurité; b) protéger les droits fondamentaux des femmes et des filles
pendant et après les conflits; c) instaurer une planification tenant compte de la
problématique hommes-femmes assortie d’une obligation de résultats; d) renforcer
le dispositif relatif à la problématique hommes -femmes et les compétences
techniques en la matière; et e) financer les priorités concernant les femmes et la paix
et la sécurité. Chacun de ces domaines reste une priorité aujourd ’hui encore, et les
progrès accomplis dans chacun d’eux sont examinés dans le rapport.
5. Je suis encouragé tant par l’intensité des réflexions engagées par la
communauté internationale depuis 2015 sur ce que veulent dire concrètement
prévention des conflits et maintien de la paix, que par les efforts visant à mettre les
questions de l’inclusion, de l’égalité et des droits de l’homme au centre de ces
discussions. Toutefois, nos actions – surtout dans le monde d’aujourd’hui en pleine
mutation – ne donnent toujours pas entière satisfaction. Les deux résolutions sur la
pérennisation de la paix (résolution 2282 (2016) du Conseil de sécurité et résolution
70/262 de l’Assemblée générale) soulignent qu’il importe que les femmes
participent concrètement à la prévention et au règlement des conflits, ainsi qu ’à la
consolidation de la paix, et qu’elles jouent un rôle moteur à cet égard, constatent
qu’il demeure nécessaire d’accroître la représentation des femmes à tous les niveaux
de décision, et appellent à un renforcement des partenariats avec la société civile,
notamment les organisations de femmes et les femmes militant pour la paix.
Toutefois, pour qu’elles soient efficaces, les mesures de prévention doivent aller au -
delà des situations de crises imminentes et s’attaquer à leurs causes structurelles et
profondes, notamment aux inégalités.
6. Les engagements ne prennent véritablement corps, ne changent les vies et ne
transforment les sociétés que lorsqu’ils sont mis en œuvre. Dans les efforts visant à
établir un lien entre la paix et la sécurité, le développement durable et les droits de
l’homme, les mots doivent donc être traduits en actions concrètes. Les femmes qui
militent pour la paix ont toujours porté un message de prévention des conflits,
demandant de mettre fin à la guerre et jouant un rôle informel de médiateur et de
premier intervenant. Il y a près de deux décennies, grâce à l’intérêt porté au niveau
mondial au renforcement de la prévention des conflits et de la prise de décisions
__________________
2 Pour les indicateurs, voir S/2010/498, annexe.
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inclusive dans le contexte des problèmes mondiaux complexes liés à la paix et à la
sécurité, on a pu galvaniser les énergies autour des priorités concernant les femmes
et la paix et la sécurité. Aujourd’hui, les faits continuent de montrer que ces
priorités procèdent d’une démarche clairvoyante, que la durabilité de la paix dépend
directement de l’engagement constant des femmes dans les processus de paix, la
politique, la gouvernance, le renforcement des institutions, l ’état de droit, le secteur
de la sécurité et le relèvement économique et que degré d’égalité des sexes et
sécurité des femmes comptent parmi les indicateurs les plus fiables de la paix.
7. Depuis mon entrée en fonctions, j’ai engagé un changement organisationnel
transformationnel vers une approche holistique, robuste et coordonnée de la
prévention des conflits, reposant sur l’égalité des sexes, dans le cadre de la réforme
en cours des dispositifs de l’Organisation relatifs à la paix et à la sécurité, au
développement et à la gestion ainsi que des efforts visant à parvenir à la parité des
sexes et à combattre l’exploitation et les atteintes sexuelles. Les stratégies
essentielles pour l’intégration et le renforcement de l’égalité des sexes dans l’action
de prévention des conflits que mène l’Organisation sont notamment les suivantes :
assurer la participation réelle et le rôle moteur des femmes, renforcer le s
compétences techniques dans le domaine de l’égalité des sexes, investir dans
l’analyse de l’égalité des sexes dans les conflits et garantir un financement suffisant
pour les programmes relatifs à l’égalité des sexes et aux priorités concernant les
femmes et la paix et la sécurité. Je suis déterminé à promouvoir ces priorités et à
leur donner une visibilité plus grande en toutes circonstances. En juillet, la Vice -
Secrétaire générale a conduit une mission conjointe de haut niveau de
l’Organisation des Nations Unies et de l’Union africaine au Nigéria et en
République démocratique du Congo – la toute première du genre à mettre en avant
la question des femmes et la paix et la sécurité et le développement3. Les
conclusions de la mission ont été transmises au Conseil de sécurité le mois suivant
et je me félicite que les membres du Conseil aient demandé que ce type de mission
soit effectué plus régulièrement.
8. À l’ONU, nous avons commencé à prendre des initiatives pour donner suite
aux examens de haut niveau de 2015. Le Women’s Peace and Humanitarian Fund
appuie des programmes sur le terrain4. Désormais, le Conseil de sécurité organise
régulièrement des réunions d’experts sur les femmes et la paix et la sécurité, et
invite les représentants de la société civile à participer aux séances d’information
consacrées à tel ou tel pays. Une large place est faite à l ’égalité des sexes dans
d’autres programmes relatifs à la paix et à la sécurité, y compris la prévention de
l’extrémisme violent, la traite des êtres humains, et les jeunes et la paix et la
sécurité. Je suis encouragé par les nombreuses initiatives sur la médiation inclusive
et la mise en œuvre au niveau national de la résolution 1325 (2000), ainsi que par
les efforts inlassables déployés en faveur de la justice, de la dignité et du soutien des
survivants des violences sexuelles liées aux conflits. Ce sont tous là des signes de
l’intérêt croissant de ceux qui, au sein de la communauté internationale, sont
consternés par la persistance et l’archaïsme de la marginalisation politique des
femmes dans la prise de décisions sur les questions relatives à la paix et à la
sécurité, et sont déterminés à trouver des solutions aux souffrances provoquées par
la récente vague de conflits et de crises humanitaires.
__________________
3 Voir S/PV.8022.
4 Anciennement, Instrument mondial d’accélération de l’action en faveur des femmes, de la paix et
de la sécurité et de l’aide humanitaire, par décision de son Conseil de financement en septembre
2017; voir www.wphfund.org.
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A. Mise en œuvre des priorités concernant les femmes et la paix
et la sécurité dans les processus de paix et les efforts visant
à prévenir l’apparition et la résurgence des conflits violents
9. Le 13 septembre 2017, j’ai annoncé la création d’un Conseil consultatif de
haut niveau sur la médiation, qui me donnera des conseils sur les initiatives de
médiation partout dans le monde. Le Conseil est composé de 18 dirigeants actuels et
anciens du monde, de hauts fonctionnaires et d’experts de renom, dont neuf
femmes. Comme l’ONU entend résolument renforcer sa diplomatie au service de la
paix, mes initiatives de médiation et de prévention des conflits s ’appuieront sur le
travail en cours, notamment celui du programme commun du Programme des
Nations Unies pour le développement (PNUD) et du Département des affaires
politiques sur le renforcement des capacités nationales de prévention des conflits,
qui vise à promouvoir l’analyse des conflits et à rendre les processus de médiation
plus inclusifs, à accroître l’assistance technique, à renforcer les capacités et les
ressources, si nécessaire, l’objectif étant de parvenir à une représentation égale des
femmes parmi les médiateurs nationaux et locaux. Dans mon rapport de 2018 sur le s
femmes et la paix et la sécurité, j’ai l’intention de mettre un accent particulier sur
l’évaluation de la qualité de la participation et de la représentation des femmes dans
les processus de paix, y compris dans les différentes institutions chargées de
l’application des accords de paix. J’exhorte les États Membres à fournir des
informations et des analyses dans ce cadre. Si ces données peuvent être difficiles à
réunir, force est de reconnaître qu’elles sont indispensables pour améliorer les
stratégies de maintien de la paix.
10. L’ONU doit appuyer les mesures qui visent à accroître la participation des
femmes à tous les niveaux des processus de paix. À l’heure actuelle, la mise en
place de processus inclusifs doit être la règle et non l’exception. Si les données
mondiales relatives à la participation et à l’influence des femmes dans les processus
de paix montrent qu’il y a eu une amélioration au fil du temps, les données dont on
disposait en 2016 ont révélé quelques tendances préoccupantes et mis le doigt sur
les obstacles actuels à une participation effective des femmes dans les efforts de
médiation, notamment leur participation aux initiatives de médiation de manière
globale, les demandes d’inclusion et l’inclusion effective de spécialistes de l’égalité
des sexes dans ces processus, les consultations avec la société civile et l ’inclusion
de dispositions tenant compte des disparités entre les sexes dans les accords de paix.
Cette évolution non linéaire montre qu’il convient d’ériger de bonnes pratiques en
pratique normale et de veiller à établir des mécanismes efficaces permettant une
mesure fiable des résultats.
11. Les femmes continuent d’être sous-représentées aussi bien dans les
délégations aux processus de paix dirigées ou codirigées par l ’Organisation des
Nations Unies qu’en tant que négociatrices en chef, malgré l’existence d’un cadre
normatif pour une participation égale et réelle des femmes et les données factuelles
qui attestent qu’il existe un lien entre la participation des femmes et la durabilité des
accords de paix. Le nombre de femmes ayant assumé une fonction de médiatrice en
chef reste faible, même si, en 2016, plusieurs femmes nommées à de hauts postes de
responsabilité ont joué des rôles de médiation et de bons offices5.
12. En 2016, on a relevé, par rapport à l’année précédente, une légère baisse de la
participation globale des femmes dans les délégations aux processus de paix
dirigées ou codirigées par l’Organisation des Nations Unies. Sur les neuf processus
__________________
5 Il s’agit notamment de femmes, occupant des postes de représentant spécial adjoint (5), de
coordonnateur spécial (1) et de conseiller spécial adjoint (3), qui ont appuyé des processus de
médiation et de bons offices, par exemple à Chypre, au Liban, en Libye et en Afrique de l’Ouest.
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suivis, les femmes hauts fonctionnaires étaient représentées dans 11 délégations6,
contre huit processus et 12 délégations en 2015, et neuf processus et 17 délégations
en 2014. Comme les années précédentes, les parties aux négociations ne comptaient
pas toutes des femmes hauts fonctionnaires. Lorsqu’elles étaient représentées, les
femmes étaient minoritaires, comme on peut le voir dans tous les processus de paix.
Par exemple, en 2016, à la Conférence pour la paix dans l ’Union du Myanmar,
processus de paix qui n’était pas codirigé par l’ONU, on comptait seulement sept
femmes dans une délégation de 75 membres.
13. Il y a également eu peu de demandes de spécialistes de l ’égalité des sexes pour
ces processus. En 2016, des services de spécialistes de l’égalité des sexes ont été
demandés et fournis dans quatre seulement des sept processus de paix dirigés ou
codirigés par l’Organisation des Nations Unies (57 %), soit une baisse de 89 % en
2015, 67 % en 2014 et 88 % en 20137. Parmi les processus qui n’ont pas demandé
de spécialistes de l’égalité des sexes en 2016, deux étaient des négociations à long
terme avec les mêmes parties pour lesquelles l’Organisation des Nations Unies avait
fourni des spécialistes de l’égalité des sexes les années précédentes8.
14. Certes, l’amélioration des capacités des fonctionnaires et des hauts
responsables ne peut tenir lieu de mise à disposition de spécialistes de l ’égalité des
sexes, et, depuis 2011, le Département des affaires politiques s ’emploie à
développer des capacités et à susciter une prise de conscience générale dans ce
domaine, en fournissant en même temps les outils et les stratégies nécessaires à la
médiation tenant compte des disparités entre les sexes, y compris par la publication
récente d’un guide sur les stratégies de médiation inclusives et soucieuses de
l’égalité des sexes (Guidance on Gender and Inclusive Mediation Strategies), qui
propose des stratégies et des outils pratiques pour aider à concevoir des stratégies de
médiation inclusives, et à incorporer des dispositions tenant compte des disparités
entre les sexes dans les domaines thématiques des accords de paix. En outre, toutes
les équipes d’appui à la médiation qui, en 2016, ont fourni des services aux
processus de paix en cours dirigées ou codirigées par l ’Organisation des Nations
Unies comprenaient des femmes, acquis qui est maintenu depuis 2012.
15. Tout processus de médiation inclusif impose des consultations avec diverses
parties prenantes, dont les organisations de femmes. Pourtant, si des consultations
ont été menées avec la société civile dans 100 % des négociations de paix dirigées
ou codirigées par l’Organisation des Nations Unies en 2014 et 2015, ce chiffre est
descendu à 86 % en 2016, ce type de consultations n’ayant été effectué que six cas
sur sept9. Plusieurs des consultations, cependant, témoignent de la volonté et de la
capacité de la société civile de participer à des consultations en dépit de contextes
extrêmement difficiles. Par exemple, le Bureau de l’Envoyé spécial du Secrétaire
général pour la Syrie a continué de collaborer avec le conseil consu ltatif des
femmes et ouvert un bureau d’appui à la société civile. Grâce à ces mécanismes,
__________________
6 En 2016, l’ONU a dirigé ou codirigé 11 processus de médiation, dont deux créés pour régler des
différends frontaliers et toponymiques, pour lesquels on ne dispose pas de données, et neuf qui
sont en cours. Les processus en cours ont trait à : Chypre, aux discussions internationales de
Genève, à la Guinée équatoriale et au Gabon, à Guyana et au Venezuela (République bolivarienne
du), à la Libye, au Soudan (Darfour), à la République arabe syrienne, au Sahara occidental et au
Yémen.
7 Comme deux processus de négociation se déroulent au niveau des ministres et des chefs d’État et
portent sur des différends frontaliers et toponymiques, la mise à disposition d’experts de l’égalité
des sexes et les consultations avec les organisations de la société civile n’ont pas lieu d’être.
8 Des experts avaient été précédemment demandés dans le cadre des négociations à long terme
concernant le Sahara occidental et des discussions internationales de Genève.
9 Dans le processus concernant le Darfour (Soudan), il n’y a pas eu de consultations avec la s ociété
civile en 2016.
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l’Envoyé spécial et les conseillers principaux ont consulté plus de 130 représentants
de plus de 500 organisations de la société civile. Entre 30 et 40 % des participants à
ces consultations étaient des femmes, et leur nombre n’a cessé d’augmenter. S’il
importe de mener des consultations pour s’assurer que les vues de la société
syrienne sont prises en compte dans les pourparlers de Genève, ils ne constituent ni
une participation directe ni une inclusion réelle des femmes dans les délégations des
parties aux pourparlers de paix, comme le demande la résolution 2242 (2015) du
Conseil de sécurité. En Colombie, dans le cadre de son mandat actuel de vérification
du cessez-le-feu et du dépôt des armes par les Forces armées révolutionnaires de
Colombie – Armée populaire, la Mission de vérification des Nations Unies en
Colombie a facilité le dialogue entre les organisations de femmes et les membres du
Mécanisme de surveillance et de vérification, suscitant ainsi la confiance des
communautés locales dans le processus.
16. Après une augmentation constante entre 2010 et 2015, le pourcentage des
accords de paix signés contenant des dispositions tenant compte des disparités entre
les sexes a diminué en 201610
, année où la moitié seulement des six accords signés
contenait de telles dispositions, contre 70 % en 201511
. Le nombre moyen de
dispositions tenant compte des disparités entre les sexes figurant dans les accords de
paix en 2016 est très élevé parce que l’accord de paix global colombien en contenait
plus de 10012
. Bien que l’on ne dispose pas de données en expliquant la cause, la
participation et le rôle moteur des femmes dans les efforts de médiation et la mise à
disposition de spécialistes de l’égalité des sexes sont pour beaucoup dans
l’incorporation de dispositions tenant compte des disparités entre les sexes dans les
accords de paix, comme le montre l’exemple colombien.
17. La mise en place de réseaux nationaux et régionaux de femmes médiatrices a
marqué une tendance positive. En mars 2017, l’Union africaine a créé le Réseau
africain des femmes dans la prévention des conflits et la médiation de la paix, connu
également sous la dénomination « FemWise ». Dirigé par l’Italie, le réseau de
femmes médiatrices de la région méditerranéenne devrait être lancé avant fin 2017,
en s’inspirant de l’Initiative pour la médiation en Méditerranée. Les réseaux qui se
mettent en place, à côté de ceux qui existent déjà comme le réseau des femmes
nordiques médiatrices de la paix offrent l’occasion d’échanger des connaissances et
des compétences dans le cadre des efforts de médiation aux niveaux local et
mondial. Je tiens à souligner qu’il importe que ces réseaux collaborent et créent des
synergies pour promouvoir un apprentissage mutuel, l ’échange d’informations, la
viabilité et l’utilisation de l’expertise et des ressources qu’ils produisent au moment
où nous nous employons à parvenir à une participation égale et réelle des femmes
en tant que médiatrices, et j’ai demandé à ma Conseillère principale sur les
politiques d’accompagner les efforts engagés à cet égard.
__________________
10
Aux fins de la collecte de données, le Département des affaires politiques regroupe sous
l’expression « accords de paix » les accords de cessation des hostilités ou de cessez-le-feu et les
accords de paix globale et partielle. Ces accords sont signés entre au moins deux parties à un
conflit, l’objectif étant de mettre fin à un conflit violent ou de faire en sorte qu’il puisse évoluer et
être réglé de manière plus constructive.
11
Accords concernant l’Afghanistan, la Colombie et la République démocratique du Congo.
12
La République démocratique du Congo est le seul pays à avoir signé en 2016 un accord de paix
prévoyant au moins une disposition sur la violence sexuelle liée aux conflits.
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B. Protéger et promouvoir les droits des femmes et des filles
et encourager les femmes à jouer un rôle moteur
dans les missions et les situations de crise humanitaire
18. Le monde traverse actuellement une période critique sur le plan de la
protection des civils; à la fin de 2016, on comptait plus de 65,5 millions de
personnes déplacées de force13
. Il est nécessaire de mettre au point des solutions
durables qui s’attaquent aux causes profondes de la violence et des conflits, de
permettre aux femmes de participer véritablement et sur un pied d ’égalité avec les
hommes à la prise de décisions et d’aider les institutions à répondre aux besoins de
tous, en particulier les personnes les plus à risque et les plus difficiles à atteindre.
Pour que la collaboration soit efficace, il faudra intensifier les efforts déployés dans
un large éventail de domaines. Il importe de lutter contre la violence sexuelle et
sexiste en tant que telle et comme signe précurseur de conflit, et de mettre en place
des conditions de protection tenant compte de la problématique hommes -femmes.
19. Je suis profondément préoccupé par toutes les formes de violence sexiste, y
compris les violations commises contre les défenseurs des droits des femmes qui
œuvrent en première ligne pour protéger et promouvoir les droits des femmes et des
filles et, de manière plus générale, l’égalité des sexes. Dans toutes les régions, des
personnes ou des groupes de personnes continuent de faire l ’objet de menaces et de
violences parce qu’ils dénoncent les violations commises et remettent en cause les
concepts traditionnels relatifs à la famille et au rôle des ho mmes et des femmes dans
leur société. La répression des droits de l’homme, en particulier de la liberté
d’expression et de réunion et d’autres droits fondamentaux des femmes, est un signe
précurseur de conflit14
. De même, de nouveaux travaux de recherche ont mis en
évidence le lien existant entre le taux de violence à l’égard des femmes et
l’éclatement d’un conflit, ce qui montre une nouvelle fois combien il est nécessaire
de prendre en compte la sécurité des femmes et des filles dans les efforts de
prévention des conflits15
. J’exhorte les États Membres à mettre au point et à
institutionnaliser des mécanismes destinés à protéger les défenseurs des droits des
femmes, à condamner publiquement la violence et la discrimination à leur égard, et
à prendre acte de la contribution essentielle que ceux-ci apportent à la paix et à la
sécurité.
Lutter contre les violences sexuelles liées aux conflits
20. Bien que des progrès considérables aient été faits ces dix dernières années
dans le domaine de la prévention des conflits et de l’intervention en cas de conflit,
des violences sexuelles liées aux conflits continuent d’être perpétrées dans diverses
situations et divers contextes nationaux. Des investissements dynamiques doivent
être faits pour s’attaquer aux causes profondes des violences sexuelles liées aux
conflits, y compris aux dimensions multiples et interdépendantes de la violence
sexuelle et sexiste préexistante et à la stigmatisation subie par les victimes de
violences sexuelles et leurs enfants, deux éléments d’importance critique dans le
__________________
13
Voir Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), « Global trends: forced
displacement in 2016 » (Genève, 2017).
14
Pour en savoir plus sur le lien entre taux de répression et imminence d’un conflit, voir Martin
Smidt et al., The Global Conflict Risk Index (GCRI) : Manual for Data Management and Product
Output, version 5 (Union européenne, 2016); Patrick Regan et Daniel Norton, « Greed, grievance,
and mobilization in civil wars », Journal of Conflict Resolution, vol. 49, no 3 (2005).
15 Jocelyn Kelly, « Intimate partner violence and conflict : understanding the links between political
violence and personal violence » (à paraître et cité comme document de référence) in « Pathways for
Peace: Inclusive Approaches for Preventing Conflict – Main Messages and Emerging Policy
Directions », Banque mondiale, Washington, 2017.
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contexte des déplacements et mouvements de population liés aux conflits, ainsi que
pour lutter contre l’enlèvement et la traite des femmes et des filles et assurer le
rapatriement et à la réinsertion des victimes.
21. En 2016, le Conseil des droits de l’homme a enquêté sur des informations
faisant état d’actes de violence sexuelle et sexiste commis en République arabe
syrienne, en Érythrée, en Libye et au Soudan du Sud16
. La Mission
multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République
centrafricaine (MINUSCA) a établi une cartographie très complète des violences
sexuelles et sexistes et autres violations des droits de l ’homme commises à grande
échelle dans le pays depuis 200317
. Je suis encouragé par le fait que de nombreuses
parties collaborent avec ma Représentante spéciale chargée de la question des
violences sexuelles commises en période de conflit en vue de mettre au point des
engagements assortis d’échéances propres à lutter contre ces violations. Par
exemple, grâce aux mesures correctives prises par la Côte d’Ivoire, les forces
armées du pays ont été radiées de la liste des parties qui, selon des informations
crédibles, se seraient systématiquement livrées à des actes de violence sexuelle dans
des situations de conflit armé (voir S/2017/249, annexe).
22. Dans mon dernier rapport sur les violences sexuelles liées aux conflits
(S/2017/249), j’ai appelé l’attention du Conseil sur 19 situations préoccupantes et
sur une liste actualisée de 46 parties à un conflit qui, selon des informations
crédibles, se seraient systématiquement livrées à des viols et à d ’autres formes de
violence sexuelle dans des situations de conflit armé18
. Dans certains pays, comme
au Soudan du Sud et en République arabe syrienne, la violence sexuelle atteint
toujours des niveaux alarmants. Dans d’autres, comme au Népal et à Sri Lanka,
l’impunité qui entoure les violences sexuelles continue d’envoyer un message
inacceptable aux auteurs de tels crimes, à savoir qu’ils n’auront pas à répondre de
leurs actes. Je répète que les parties qui ont été inscrites année après année sur la
liste annexée à mes rapports sur les violences sexuelles liées aux confli ts ne peuvent
participer aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies, et prie
instamment les États Membres et le Conseil de sécurité de veiller à ce que les
régimes de sanctions englobent la lutte contre ces violations.
23. Il est nécessaire d’investir dans des ressources qui permettront de proposer aux
victimes de violences des services juridiques et d’autres services essentiels, et de
remédier notamment aux vulnérabilités qui sont propres à ces personnes, en
particulier celles qui ont été déplacées de force. Pour cela, il est impératif de leur
permettre d’accéder à des services de santé mentale et à un soutien psychosocial, de
bénéficier d’un logement et de moyens de subsistance, d’obtenir justice et
réparation, et de recevoir des services de santé sexuelle et procréative, y compris le
traitement et la prévention du VIH/sida et d’autres maladies sexuellement
transmissibles et l’interruption en toute sécurité d’une grossesse résultant d’un viol,
sans discrimination et conformément au droit international des droits de l’homme et
au droit international humanitaire. Parmi les initiatives axées sur les victimes
existantes, on peut citer les programmes multisectoriels intégrés visant à prévenir et
combattre la violence sexiste mis en œuvre par le Fonds des Nations Unies pour la
population (FNUAP) au Myanmar, et les travaux effectués dans neuf pays par le
__________________
16
Érythrée (A/HRC/32/47), Libye (A/HRC/31/CRP.3), Soudan du Sud (A/HRC/31/49), République
arabe syrienne (A/HRC/31/68, A/HRC/33/55, A/HRC/31/CRP.1, A/HRC/32/CRP.2).
17
Voir MINUSCA et al., « Rapport du Projet Mapping documentant les violations graves du droit
international des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises sur le territoire
de la République centrafricaine de janvier 2003 à décembre 2015 » (mai 2017).
18
Il convient de lire ce rapport en tenant compte des huit rapports précédents sur les violences
sexuelles commises en période de conflit, l’ensemble de l’information qu’ils contiennent
indiquant les raisons qui ont présidé à l’inscription des différentes parties sur la liste.
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Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) pour mettre en place
des systèmes d’orientation médicale des victimes de violences sexuelles et sexistes
et améliorer ceux qui existent, qui ont permis d’offrir des soins de santé à plus de
485 000 réfugiés et autres personnes relevant de la compétence du HCR. Par
ailleurs, plus de 60 pays, organisations internationales et régionales et organisation s
non gouvernementales ont uni leurs forces dans le cadre de l ’Appel à l’action pour
la protection contre la violence sexiste dans les situations d ’urgence. Je salue
également les efforts déployés pour lutter contre la stigmatisation associée à la
violence sexuelle liée aux conflits, comme l’initiative Preventing Sexual Violence
du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et les principes
applicables à la lutte contre la stigmatisation, lancés cette année.
Promouvoir des conditions de protection tenant compte de la problématique
hommes-femmes
24. Je suis heureux de constater que l’application des recommandations tenant
compte de la problématique hommes-femmes formulées à l’intention des opérations
de paix et des entités qui leur succèdent à l’issue des examens concernant la paix et
la sécurité effectués en 2015 a bien progressé. Le Département des affaires
politiques, le Département des opérations de maintien de la paix et le Département
de l’appui aux missions ont continué de s’employer à renforcer les capacités du
personnel et la responsabilité des cadres en ce qui concerne l ’égalité des sexes et les
femmes et la paix et la sécurité. Les mesures prises ont notamment consisté à élever
au rang de Secrétaire général adjoint le directeur de l’Équipe spéciale de la
problématique hommes-femmes du Département des opérations de maintien de la
paix et du Département de l’appui aux missions, à mettre au point un « tableau de
bord de l’égalité des sexes dans les opérations de maintien de la paix » destiné à
aider les hauts responsables à suivre les progrès accomplis en la matière dans les
opérations de paix, et à offrir à ceux-ci une formation ciblée sur les engagements
pris en ce qui concerne les femmes et la paix et la sécurité. Ces initiatives ont
contribué à améliorer la responsabilité dans l’exécution des mandats relatifs aux
femmes et à la paix et la sécurité dans l’ensemble des opérations de maintien de la
paix. En outre, comme l’a demandé le Conseil de sécurité dans sa résolution
2242 (2015), une formation portant précisément sur l’établissement de rapports
tenant compte de la problématique hommes-femmes a été dispensée à plus de
200 fonctionnaires dans les missions et au Siège. J’ai l’intention de faire figurer des
informations sur les résultats de ces mesures dans mon prochain rapport annuel.
25. Les concepts d’opérations du personnel de police et des militaires et les ordres
d’opérations des forces militaires comprennent désormais des dispositions
concernant les femmes et la paix et la sécurité19
, et la question de l’égalité des sexes
est de plus en plus systématiquement abordée dans le cadre de la formation
préalable au déploiement, des manœuvres militaires et des cours sur les opérations
de paix. Le Département des opérations de maintien de la paix et le Département de
l’appui aux missions ont renforcé les éléments du programme de formation
préalable au déploiement qui touchent à la problématique hommes -femmes, et
révisent actuellement les politiques à l’échelle du Département sur l’égalité des
sexes, les missions utilisant déjà largement les outils de la Police des Nations Unies
relatifs à l’égalité des sexes.
__________________
19
À la mi-2017, 100 % des concepts d’opérations militaires et des ordres d’opérations des forces
militaires et 93 % des concepts d’opérations des forces de police comprenaient des dispositions
relatives aux femmes, à la paix et à la sécurité – un niveau atteint en 2015. L’évolution de ces
données fait l’objet d’un suivi systématique.
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26. Bien que la présence de femmes dans les composantes en uniforme des
opérations de maintien de la paix contribue au succès des missions20
, le taux de
déploiement de femmes demeure particulièrement faible. Au 31 décembre 2016, les
femmes représentaient 7,4 % des observateurs militaires et des officiers d’état-
major, mais ne comptaient toujours que pour 4 % des effectifs des contingents
militaires. Elles ne représentaient que 10 % des policiers, soit 17 % des policiers
hors unités constituées et 7 % seulement des membres d’unités constituées, un
pourcentage similaire à celui de 201521
. Toutefois, malgré ces chiffres, des femmes
sont déployées à la tête de contingents et plusieurs missions disposent désormais de
réseaux de femmes policiers et militaires et de conseillers militaires pour l ’égalité
des sexes.
27. L’augmentation du nombre de femmes dans les services en uniforme nationaux
peut contribuer à accroître le nombre de femmes déployées dans les missions des
Nations Unies. Des campagnes de sensibilisation ciblées ont permis d ’informer les
femmes officiers de la possibilité de rejoindre les composantes militaires des
missions. Par exemple, depuis 2015, plus de 240 femmes officiers ont suivi une
formation de deux semaines, organisée par la Chine, le Kenya et l ’Inde avec l’appui
de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des
femmes (ONU-Femmes), dont l’objectif était de les préparer au mieux en vue d’un
déploiement dans les opérations de paix. En 2017, la Finlande a tenu, pour la
première fois, un cours à l’intention des observateurs militaires des Nations Unies
auquel ont participé autant de femmes que d’hommes. En 2016, pour renforcer les
capacités des femmes policiers, la Division de la police a offert une formation à
750 policières de sept pays fournisseurs de personnel de police, à l ’issue de laquelle
358 d’entre elles ont réussi le test d’évaluation des aptitudes en vue d’une
affectation dans une mission et 218 ont été ultérieurement déployées, ce qui
correspond à 32 % du nombre de femmes policiers hors unités constituées déployées
en 2016.
28. Conformément aux engagements pris en 2016 à la Conférence des ministres
sur les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, le Bureau des affaires
militaires a réservé 300 postes à des femmes. Il est également encourageant de
constater qu’on trouve désormais des observatrices militaires à des rangs plus élevés
qu’auparavant et que la période de service a été réduite à six mois pour les femmes
policiers ayant des enfants en bas âge. Je me félicite de la proposition du Conseiller
militaire pour les opérations de maintien de la paix tendant à déployer des
patrouilles mixtes et des équipes de liaison féminines, comme cela a été fait au
Kenya et en Zambie, étant donné que de telles mesures permettront de mieux
comprendre les besoins des populations locales.
29. Je suis encouragé par les efforts que déploie le Département des opérations de
maintien de la paix pour mettre au point un programme destiné à préparer les
femmes officiers de police de haut rang à effectuer les tâches qui seront les leurs
dans les opérations de maintien de la paix.
30. Tous les acteurs concernés doivent toutefois s’employer plus vigoureusement à
atteindre l’objectif mondial consistant à déployer 15 % de femmes observateurs
militaires et officiers d’état-major d’ici à décembre 2017 et 20 % de femmes
policiers d’ici à 2020, qui a été arrêté d’un commun accord à la Conférence des
ministres de la défense sur les opérations de maintien de la paix des Nations Unies
tenue en 2016. J’ai demandé au Département des opérations de maintien de la paix,
au Département de l’appui aux missions, à ONU-Femmes et à mon Cabinet de
__________________
20
Voir, par exemple, A/70/357-S/2015/682, par. 82.
21
Les données les plus récentes sont disponibles à l’adresse : http://www.un.org/en/peacekeeping/
resources/statistics/gender.shtml.
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mettre au point, de concert avec les pays fournisseurs de contingents, une stratégie
destinée à accroître sensiblement le nombre de femmes soldats de la paix et
policiers dans les missions de maintien de la paix. J’exhorte les membres de mon
cercle de dirigeants à prendre les mesures voulues pour éliminer les obstacles
structurels qui empêchent les femmes d’être représentées en nombre suffisant dans
les composantes civiles et militaires des opérations de maintien de la paix et
demande instamment aux États Membres d’examiner les moyens d’encourager
l’augmentation du nombre de femmes dans ces composantes, comme l ’a demandé le
Conseil de sécurité dans sa résolution 2242 (2015).
31. Les progrès accomplis en ce qui concerne les femmes et la paix et la sécurité
ainsi que l’égalité des sexes pendant la durée d’une mission doivent être préservés
pendant la période de transition afin de veiller à ce que la situation ne dégénèr e pas
à nouveau. Le renforcement des fonctions de protection et la désignation de
coordonnateurs pour la prévention des violences sexuelles liées aux conflits dans les
composantes droits de l’homme des opérations de paix ont permis d’améliorer la
surveillance de la situation des droits fondamentaux des femmes et d’améliorer la
coordination des mécanismes de suivi, d’analyse et de communication de
l’information, mais il est essentiel de disposer également d’analyses sexospécifiques
solides et pertinentes à cette fin. L’ONU est déterminée à accélérer les efforts visant
à intégrer l’analyse des conflits tenant compte de la problématique hommes -femmes
et les connaissances spécialisées en la matière à la planification des missions, à
l’élaboration, l’exécution et l’examen des mandats, à l’analyse budgétaire et aux
phases de transition et de retrait des missions. En outre, toutes les activités de
prévention menées par l’ONU, d’autres organisations internationales, les acteurs
nationaux et la société civile devraient tenir compte d’une analyse qualitative
reposant sur des données ventilées de qualité.
32. Les nouvelles équipes de pays des Nations Unies doivent assurer
l’établissement d’un partenariat avec la société civile et la pleine intégration des
compétences en matière d’égalité des sexes, en veillant à ce que les questions
relatives à l’égalité des sexes soient hissées au rang de priorité stratégique dans les
missions effectuées auprès des gouvernements et en leur sein. Le fonds d ’affectation
spéciale pluripartenaires pour le Libéria qu’il est proposé de créer, par exemple, a
pour objectif de combler le déficit de financement qui découlera du retrait, l ’année
prochaine, de la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL) et devrait viser dès
le début à allouer au moins 15 % de ses ressources à la promotion de l’égalité des
sexes et à l’autonomisation des femmes dès le début. De telles initiatives pourraient
servir d’exemple pour le retrait d’autres missions.
Lutter contre l’exploitation et les atteintes sexuelles
33. En 2016, 145 nouvelles allégations d’exploitation et d’atteintes sexuelles ont
été portées contre le personnel des Nations Unies, soit 80 contre du personnel en
uniforme et 65 contre des civils, y compris des fonctionnaires des départements et
bureaux du Secrétariat, ainsi que des organismes, fonds et programmes. Ces
145 allégations concernaient au moins 311 victimes, des femmes et des filles dans la
quasi-totalité des cas. Cent-trois des faits signalés se sont produits dans le cadre
d’opérations de paix, et 73 des 80 allégations visant du personnel en uniforme
concernaient des militaires. En ce qui concerne les allégations relatives aux
missions, 69 % ont été reçues de la MINUSCA et de la Mission de l ’Organisation
des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo
(MONUSCO), et 57 % d’entre elles étaient relatives à des relations sexuelles non
consenties avec un adulte et à d’autres formes d’activité sexuelle avec un mineur.
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34. On trouvera, dans mon rapport sur les dispositions spéciales visant à prévenir
l’exploitation et les atteintes sexuelles, des informations détaillées sur les
allégations reçues en 2016, y compris celles visant des forces autres que les forces
des Nations Unies agissant sous mandat du Conseil de sécurité, ainsi que des
recommandations tendant à intensifier l’action menée (A/71/818). Je me félicite de
la décision sans précédent du Conseil de sécurité d’adopter la résolution
2272 (2016), sur l’exploitation et les atteintes sexuelles. Outre qu’elles détruisent
des vies, ces violations compromettent gravement le travail effectué par les missions
de paix et l’Organisation en général.
35. L’élimination de l’exploitation et des atteintes sexuelles est une priorité et fait
partie des premières tâches que je me suis assignées. Dans le cadre d ’une nouvelle
stratégie globale (voir A/71/818), je me suis engagé à mettre les droits des victimes
au premier plan des efforts déployés par l’Organisation, et j’œuvre sans relâche en
vue de mettre fin à l’impunité des auteurs de tels crimes. J’ai récemment nommé le
tout premier défenseur des droits des victimes, et un fonds d’affectation spéciale
destiné à financer la fourniture de services aux victimes a été mis sur pied en 2016.
Au cours de l’année écoulée, sous l’égide de la Coordonnatrice spéciale chargée
d’améliorer les moyens d’action de l’ONU face à l’exploitation et aux atteintes
sexuelles, l’Organisation a amélioré et harmonisé un certain nombre d’outils dans
l’ensemble du système, et notamment élaboré et mis en œuvre un protocole
d’assistance aux victimes, harmonisé les normes d’enquête et les mécanismes de
plainte, et mis au point un formulaire de signalement standard utilisé par tous les
organismes du système.
36. Comme l’élimination de l’exploitation et des atteintes sexuelles ne pourra se
faire qu’en partenariat avec les États Membres, lors de ma rencontre de haut niveau
sur la prévention de l’exploitation et des atteintes sexuelles, qui s’est tenue le
18 septembre 2017, j’ai lancé plusieurs initiatives qui témoignent de ce partenariat.
J’ai présenté mon cercle de dirigeants, au sein duquel les chefs d ’État et de
gouvernement se sont engagés à appuyer l’action que je mène pour mettre fin à
l’impunité, renforcer les mesures visant à prévenir l ’exploitation et les atteintes
sexuelles, intervenir rapidement et de façon décisive en cas d’allégations crédibles
et répondre sans délai et de façon appropriée aux besoins des victimes. J’ai
également créé un pacte qui sera signé par les États Membres qui souhaitent
renforcer les engagements pris pour lutter contre l ’exploitation et les atteintes
sexuelles. Je me félicite des résultats de la Conférence des ministres de la défense
sur les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, accueillie par le
Royaume-Uni en septembre 2016, à laquelle plus de 60 pays se sont engagés à
adopter des mesures pour lutter contre les faits d’exploitation sexuelle et les
atteintes sexuelles commis par des soldats de la paix des Nations Unies.
Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles
dans le cadre de l’action humanitaire, et notamment garantir l’accès
aux services essentiels
37. En juin 2017, 141,1 millions de personnes avaient besoin d’une aide
humanitaire, soit 125,3 millions de personnes de plus qu’en 2015; en effet, conflits
récurrents et catastrophes sans précédent, aussi bien naturelles que provoquées par
les changements climatiques, continuent d’avoir des effets dévastateurs, notamment
d’entraîner des déplacements forcés22
. L’inégalité entre les sexes exacerbe encore
les obstacles qui empêchent les femmes d’accéder en toute sécurité notamment à la
nourriture, à l’eau, l’assainissement, à l’hygiène, aux soins de santé, à l’éducation, à
l’emploi, au logement, à l’identité juridique et aux ressources, obstacles déjà bien
__________________
22
Voir www.unocha.org/sites/unocha/files/GHO-JuneStatusReport_2017.pdf.
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présents dans les conflits et les situations d’urgence. Des facteurs tels que le sexe,
l’âge, le handicap, l’état matrimonial, l’orientation sexuelle, l’identité de genre, la
race ou l’appartenance ethnique, religieuse et politique peuvent être source de
discrimination supplémentaire. Les connaissances, les réseaux locaux et les
capacités de direction des femmes continuent d’être sous-exploités, ce qui nuit à
l’efficacité de nombre d’opérations humanitaires.
38. Le manque d’accès aux services de santé, notamment en matière de sexualité,
de procréation et de traitement du VIH, a un impact dévastateur sur les femmes et
les filles, en particulier dans les situations d’urgence. Les données disponibles
mettent en évidence des problèmes inquiétants, notamment un taux de mortalité
maternelle presque deux fois plus élevé que la moyenne mondiale dans les
situations de conflit et d’après conflit23
. Il est nécessaire d’offrir aux femmes et aux
filles, dans le respect du droit international humanitaire et du droit international des
droits de l’homme, des services de santé et d’autres services holistiques non
discriminatoires, notamment des services de santé sexuelle et procréative et de santé
mentale ainsi qu’un soutien psychosocial.
39. Parmi les initiatives lancées dans les situations les plus difficiles, on peut citer
notamment la mise en place, avec l’aide de l’Organisation internationale pour les
migrations (OIM), d’un réseau de cliniques de santé maternelle au Soudan du Sud,
et la fourniture, par le Fonds des Nations Unies pour l ’enfance (UNICEF), d’une
assistance médicale et psychosociale aux victimes de violence sexiste en Somalie.
Grâce aux contributions versées par l’Australie, l’International Planned Parenthood
Federation a pu intervenir dans 71 crises humanitaires et fournir des services
essentiels de santé sexuelle et procréative à 890 000 personnes en 2016. Trop
souvent, le manque de moyens et d’appui des autorités nuit à l’efficacité des
services de santé dans ces situations de crise humanitaire. Je prends acte des efforts
déployés par les États Membres pour combler ce déficit de financement, notamment
par l’intermédiaire de l’initiative She Decides.
40. Par ailleurs, les conflits et les situations d’urgence limitent l’accès des filles à
l’éducation ou mettent tout bonnement un terme à leur scolarisation. L’écart entre
les sexes constaté dans les taux de scolarisation primaire e t secondaire corrigés est
bien plus marqué dans les pays en conflit ou sortant d’un conflit, et les filles sont
près de deux fois et demie plus susceptibles de ne pas aller à l ’école lorsqu’elles
vivent dans une zone de conflit24
. L’éducation est un droit de l’homme fondamental,
qui contribue à protéger les filles et les jeunes femmes contre les violations,
notamment la traite, les mariages d’enfants et les mariages précoces. Pourtant,
moins de 2,7 % des fonds consacrés à l’action humanitaire sont alloués à
l’éducation25
. J’encourage les efforts visant à combler ces lacunes, notamment
l’établissement de partenariats privés comme le programme Instant Network
Schools et le fonds L’éducation ne peut pas attendre, premier fonds mondial
accordant la priorité à l’éducation dans les situations humanitaires, dont l’objectif
est de recueillir 3,85 milliards de dollars d’ici à 2020 de façon à dispenser un
enseignement à 75 millions d’enfants vivant dans des pays touchés par une crise.
41. L’apatridie et le caractère inégalitaire des lois sur la nationalité alimentent les
conflits et l’instabilité, et ont des effets disproportionnés sur les femmes et les filles.
Dans 26 pays, dont 8 sont touchés par un conflit26
, les femmes n’ont pas le droit de
__________________
23
Voir S/2016/822, par. 32.
24
Voir http://gem-report-2016.unesco.org/fr/rapport-sur-legalite-des-genres/.
25
Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), « L’aide à
l’éducation stagne et n’est pas attribuée aux pays qui en ont le plus besoin », document
d’orientation n° 31, mai 2017.
26
Burundi, Iraq, Liban, Libéria, Libye, République arabe syrienne, Somalie et Soudan.
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transmettre leur nationalité à leurs enfants. Je suis alarmé par la gravité de la
situation qui règne au Myanmar, où les Rohingyas sont systématiquement privés de
leur droit à la citoyenneté et sont victimes d’actes de violence, y compris de
violence sexuelle et sexiste27
. Dans nombre de pays accueillant des réfugiés syriens,
il reste difficile d’enregistrer les enfants qui n’ont pas de père, notamment ceux qui
sont nés d’un viol, ce qui crée un risque accru d’apatridie28
. Je me félicite des
initiatives telles que celles lancées par le HCR au Tchad, où plus de 6 000 rapatriés
de la République centrafricaine ont fait l’objet d’un enregistrement et d’une
vérification de la nationalité par des moyens biométriques dans le cadre d ’un
programme financé par l’Union européenne visant à prêter assistance aux rapatriés
et à prévenir l’apatridie. L’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au
Darfour (MINUAD) s’est employée à remédier aux risques que courent les femmes
déplacées qui ont renoncé à leurs documents d’identité, condition préalable pour
bénéficier d’une réinstallation.
42. Si l’on veut éviter la détérioration des situations d’urgence humanitaire et
l’aggravation des problèmes de protection à l’échelle mondiale, il est essentiel
d’assurer la mise en œuvre de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les
migrants, adoptée en 2016, et du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de
catastrophe, et de redoubler d’efforts pour concrétiser les engagements pris lors du
Sommet humanitaire mondial de 20161, notamment en aidant les femmes à
participer à l’action humanitaire et à jouer un rôle moteur à cet égard, en prévenant
et combattant la violence sexiste dans les situations de crise, et en garantissant
l’accès universel aux droits en matière de sexualité et de procréation.
Concrétiser les priorités concernant les femmes et la paix et la sécurité
dans le cadre de l’action menée pour prévenir et combattre le terrorisme
et l’extrémisme violent
43. Dans toutes les régions, les groupes terroristes et extrémistes violents ont
continué de lancer des attaques contre des civils, en ayant pour pratique courante
d’assujettir et d’exploiter les femmes et les filles. De ce fait, la promotion de
l’égalité des sexes est essentielle pour venir à bout de la maltraitance, de
l’exploitation et du recrutement que pratiquent les groupes terroristes et extrémistes
violents. La communauté internationale doit continuer de faire preuve de fermeté
pour faire en sorte que ses interventions soient conformes au droit international et
que la pleine mise en œuvre des priorités concernant les femmes et la paix et la
sécurité, qui mettent l’accent sur la prévention et la participation effective des
femmes, fasse partie intégrante de notre action.
44. Les femmes jouent un rôle central dans la prévention des crises, en travaill ant
main dans la main avec les gouvernements et les populations locales pour accroître
la résilience. Les États Membres et les entités des Nations Unies doivent renforcer
leur collaboration avec la société civile, en finançant des projets qui s ’attaquent aux
causes profondes et aux dimensions sexospécifiques des stratégies de recrutement
employées par les groupes terroristes et extrémistes violents. Ainsi, le groupe des
droits de l’homme de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan
(MANUA) a engagé des consultations avec des membres de la société civile pour
comprendre leurs divers points de vue sur l’extrémisme violent et recenser les
initiatives lancées pour résister au patriarcat, à la violence, aux discours extrémistes
et à l’instrumentalisation à laquelle recourent les agents gouvernementaux, ce qui
offre un modèle à suivre pour lancer de nouvelles mesures, fixer les priorités
__________________
27
Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, « Interviews with Rohingyas
fleeing from Myanmar since 9 October 2016 », relevé instantané, février 2017.
28
S/2017/249 et résolution 70/291 de l’Assemblée générale.
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concernant les femmes et la paix et la sécurité et établir une corrélation directe avec
la prévention de l’extrémisme violent.
45. Dans le même temps, certaines femmes appuient activement les groupes
terroristes, sur les plans idéologique et opérationnel, et légitiment haut et fort les
discours extrémistes violents. Selon les chiffres les plus récents, les femmes
représenteraient au moins 20 % à 30 % des combattants terroristes étrangers, ce
pourcentage atteignant des niveaux sans précédent29
. Si la participation des femmes
aux activités terroristes n’est pas un phénomène nouveau, il est désormais admis
qu’il est nécessaire de procéder à des analyses et des interventions tenant compte
des disparités entre les sexes dans le dispositif mondial de prévention de
l’extrémisme violent et de lutte contre le terrorisme.
46. Les groupes terroristes et extrémistes violents exploitent également à leur
avantage les normes et stéréotypes sexistes pour recruter des combattants et lancer
des attaques. Par exemple, Boko Haram ferait de plus en plus appel aux femmes et
aux filles pour perpétrer ses attentats-suicides30
. En conséquence, au Cameroun, au
Niger, au Nigéria et au Tchad près d’un kamikaze sur cinq est un enfant et les trois
quarts des enfants kamikazes sont des filles31
. Les groupes terroristes et extrémistes
violents utilisent également la violence sexuelle et sexiste, y compris la trait e,
l’esclavage sexuel, les mariages forcés et les grossesses forcées, pour terroriser les
communautés et générer des revenus, comme le Conseil de sécurité l ’a souligné
dans sa résolution 2331 (2016).
47. Je salue les progrès réalisés grâce aux recommandations formulées par le
Conseil de sécurité dans sa résolution 2242 (2015), au Plan d’action pour la
prévention de l’extrémisme violent (A/70/674) et à l’examen de la Stratégie
antiterroriste mondiale des Nations Unies effectué en 2016. Les États Membres sont
de plus en plus encouragés à confier des responsabilités aux femmes et à tenir
compte de la problématique hommes-femmes dans les politiques et stratégies visant
à prévenir et à combattre l’extrémisme violent et le terrorisme. Je me félicite des
efforts déployés par les États Membres pour adopter une démarche fondée sur les
droits de l’homme et soucieuse de l’égalité des sexes pour garantir la réadaptation et
la réinsertion des rapatriés et des victimes, des prisonniers libérés et des suspects
qui remplissent les conditions requises pour bénéficier de mesures de substitution
aux poursuites. Je suis encouragé par l’action menée par le Bureau de lutte contre le
terrorisme et la Direction exécutive du Comité contre le terrorisme pour aider les
femmes à participer à la lutte contre le terrorisme et à jouer un rôle moteur à cet
égard, et les efforts déployés par l’Union pour la Méditerranée, en coopération avec
ONU-Femmes et le PNUD, pour recueillir davantage de données sur la mesure dans
laquelle la marginalisation politique et les violations des droits de l ’homme incitent
les femmes et les hommes à rejoindre les rangs des groupes extrémistes violents.
48. Je salue les efforts visant à renforcer les réseaux d’associations féminines de la
société civile œuvrant dans des situations marquées par l’extrémisme violent et le
terrorisme, et à faire en sorte qu’il soit tenu compte de leur point de vue dans les
mesures plus vaste de prévention et d’intervention, y compris, par exemple, les
efforts que déploie la Women’s Alliance For Security Leadership à l’appui de
__________________
29
Voir Direction exécutive du Comité contre le terrorisme, « Mise en œuvre de la résolution 2178
(2014) du Conseil de sécurité par les États affectés par le phénomène des combattants terroristes
étrangers », compilation de trois rapports (S/2015/338; S/2015/683; S/2015/975 (2016).
30
Voir S/2017/563, S/2017/764 et Jason Warner et Hilary Matfes, « Exploding Stereotypes: the
unexpected operational and demographic characteristics of Boko Haram’s suicide bombers »
(Combating Terrorism Center at West Point, 2017).
31
Fonds des Nations Unies pour l’enfance, « Beyond Chibok », avril 2016.
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17-18255 16/36
l’action novatrice menée par la société civile pour prévenir l ’extrémisme violent32
.
Lancé en 2016, le mécanisme Global Solutions Exchange constitue un exemple
positif en ce qu’il favorise la tenue d’un dialogue de haut niveau entre la société
civile et les gouvernements sur la prévention de l’extrémisme violent. Plusieurs
pays et organisations organisent actuellement des programmes de formation et
d’enseignement à l’intention des femmes en tant que mères, éducatrices, membres
des services de répression et chefs religieux, pour prévenir la radicalisation et le
recrutement33
. Toutefois, comme l’a indiqué le Haut-Commissaire des Nations
Unies aux droits de l’homme (A/HRC/33/29), ces interventions ne doivent pas faire
des droits des femmes une question de sécurité, renforcer les stéréotypes sexistes
qui empêchent les femmes d’agir, ou exacerber les inégalités entre les sexes – autant
d’éléments susceptibles de favoriser la radicalisation et la violence et d ’accroître
encore les risques auxquels les femmes et les filles sont exposées.
C. Construire des sociétés ouvertes à tous et pacifiques
49. Des militantes pour la paix de tous âges, issues des milieux les plus divers,
sont aux avant-postes de l’action menée aux fins de la pérennisation de la paix; mais
elles ont besoin d’appui et de se voir ouvrir des portes pour optimiser leur
contribution vitale. Les recherches et les consultations menées avec des jeunes du
monde entier dans le cadre de l’étude sur les jeunes, la paix et la sécurité réalisée à
la demande du Conseil de sécurité (S/2015/2250) et sur le point d’être publiées
apportent déjà des éléments qui mettent en évidence l’apport méconnu des jeunes
femmes à la consolidation de la paix et les discriminations multiples dont e lles font
l’objet en tant qu’actrices de cette consolidation. Une étude menée conjointement
par l’ONU et la Banque mondiale a souligné qu’il pouvait exister une corrélation
entre le degré d’inégalité entre les sexes et de violence sexiste observé dans une
société et la vulnérabilité accrue de celle-ci face aux guerres civiles ou qui opposent
des États34
. Dans une étude consacrée aux diverses formes de la masculinité, on
trouve aussi des recommandations propres à transformer les sociétés pour les rendre
plus paisibles et respectueuses de l’égalité des sexes35
. Je prends note du rôle que
joue la Commission de consolidation de la paix en faveur de la pérennisation de la
paix et rappelle que les États Membres doivent veiller à ce que la stratégie pour
l’égalité des sexes adoptée en 2016 soit appliquée rigoureusement; je note aussi que
la problématique hommes-femmes est prise en compte dans toutes les activités de la
Commission.
Relèvement de l’économie et accès aux ressources
50. L’autonomisation économique des femmes a une influence positive tant sur le
relèvement postconflit que sur la croissance économique. Cependant, à la sortie
d’un conflit, les investissements de grande ampleur se concentrent souvent sur les
infrastructures, les industries extractives et l’agriculture commerciale, secteurs où
__________________
32
Sanam Naraghi Anderlini, « Uncomfortable truths, unconventional wisdoms: women’s
perspectives on violent extremism and security interventions », Women’s Alliance for Security
Leadership, document d’information no 1, mars 2016.
33
Naureen Chowdhury Fink, Sara Zeiger et Rafia Bhulai, eds., « A man’s world? : Exploring the
roles of women in countering terrorism and violent extremism » (Hedayah and the Global Center
on Cooperative Security, 2016).
34
Banque internationale pour la reconstruction et le développement, Pathways for Peace: Inclusive
Approaches to Preventing Violent Conflict (Washington, Groupe de la Banque mondiale, 2017).
35
Shereen El Feki, Brian Heilman et Gary Barker, dir. coll., Understanding Masculinities: Results
from the International Men and Gender Equality Survey – Middle East and North Africa (Le Caire
et Washington, ONU-Femmes et Promundo-US, 2017).
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les femmes sont sous-représentées, voire absentes. Les mesures de redressement
économique destinées aux femmes se limitent souvent à des initiatives à petite
échelle ou de portée locale – il peut s’agir de prêts communautaires ou d’un crédit
renouvelable, voire de la constitution de coopératives génératrices de revenu. Sans
nier leur utilité, il faut toutefois veiller à ce que de telles mesures n ’empêchent pas
les femmes de trouver leur place dans des projets de relèvement économique de
grande ampleur, et ne ménager aucun effort pour éviter toute tentative de retour à
d’anciennes formes de discrimination à l’égard des femmes en matière d’accès aux
ressources économiques, à la propriété, à l’héritage, à l’occupation des terres, à la
propriété foncière et aux ressources naturelles. L’ONU, les États Membres et les
autres parties prenantes doivent faire en sorte que le redressement de l ’économie à
la sortie d’un conflit soit adapté aux besoins de tous les secteurs de la société et que
les femmes se voient confier des postes de responsabilité et participent à la mise au
point et à l’exécution des plans de relèvement.
51. Dans les objectifs de développement durable36
comme dans le Programme
d’action d’Addis-Abeba37
, la communauté internationale a souscrit à des cadres de
développement et de financement prenant en compte les principes fondamentaux de
l’égalité des sexes et de la non-discrimination. L’un et l’autre documents vont au-
delà de la reconnaissance du droit des femmes à la partic ipation à l’économie sur un
pied d’égalité avec les hommes et abordent l’investissement étranger direct, la lutte
contre les transferts illicites de fonds et d’armes et la collecte et la désagrégation
des données par secteur; le Programme d’action d’Addis Abeba insiste aussi sur la
nécessaire prise en compte de la problématique hommes -femmes dans la
budgétisation. Je salue les efforts déployés par les femmes pour faire en sorte que
les sociétés transnationales qui se rendent coupables d’infractions répondent de
leurs actes, ainsi que les initiatives prises par l’Organisation, de concert avec les
États Membres et la société civile, pour que le redressement de l ’économie constitue
un tremplin pour mettre fin à l’inégalité entre les sexes. En 2016, par exemple, le
PNUD a augmenté de plus de 16 millions de dollars, par rapport à 2015, le montant
des avantages monétaires alloués aux femmes occupant un emploi temporaire dans
le cadre de programmes de relèvement économique rapide; dans les pays pour
lesquels on dispose de données ventilées, on constate que les femmes ont perçu
47 % des avantages de ce type en 2016, contre 46 % en 2015 et 38 % en 201438
.
Gouvernance et représentation des femmes dans les corps élus et non élus
52. Il demeure difficile de garantir la participation de tous les citoyens aux
opérations électorales, en particulier en situation de conflit ou d ’après conflit. Des
obstacles structurels à tous les niveaux limitent encore la participation des femmes à
la vie politique, et nombre d’embûches freinent les enquêtes menées au sujet
d’allégations de violence, d’agression ou de harcèlement de femmes élues ou
candidates à des fonctions politiques, ainsi que la traduction en justice des auteurs
de tels actes. Les femmes doivent être plus nombreuses à participer à la
gouvernance et à la prise de décisions et être davantage représentées dans les
instances concernées, y compris dans les organes législatifs nationaux et les
municipalités : c’est nécessaire non seulement dans l’optique de la problématique
femmes, paix et sécurité, mais aussi parce que cela a une incidence directe sur la
pérennisation de la paix. Il existe une corrélation systématique entre la participation
__________________
36
Résolution 70/1.
37
Résolution 69/313, annexe.
38
Afghanistan, Burundi, Colombie, État de Palestine, Guinée, Iraq, Liban, Mali, Mauritanie,
République centrafricaine, République démocratique du Congo, Soudan, Soudan du Sud, Syrie ,
Ukraine et Yémen. L’indicateur utilisé mesure l’équivalent monétaire des avantages en question.
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de femmes à la gestion des affaires publiques, la viabilité de la paix et une
perception positive de la gouvernance39
.
53. Au 1er
juillet 2017, 17 pays seulement, dont un en situation d’après conflit (le
Libéria), avaient élu une femme à la tête de l’État ou du gouvernement40
. Entre
juillet 2016 et juillet 2017, la proportion globale de sièges parlementaires occupés
par des femmes est passée de 22,9 % à 23,6 %, soit une légère augmentation.
Néanmoins, dans les pays en situation de conflit ou d’après conflit, ce pourcentage
est resté stable ces deux dernières années, à 16 %. L’instauration de quotas
législatifs favorise la représentation des femmes, qui augmente lorsqu’ils sont
effectivement appliqués. Dans les pays où ils le sont41
, les femmes occupent en
moyenne 22,5 % des sièges parlementaires, contre 10,7 % dans les autres pays. Par
exemple, en Somalie, du fait de l’application partielle d’une mesure temporaire
spéciale réservant aux femmes 30 % des sièges de la Chambre du peuple, la
représentation des femmes a atteint 24,4 % en 2016, contre 14 % après les élections
de 2012. En ce qui concerne l’occupation des postes non soumis à élection, la parité
des sexes n’est pas non plus respectée; une étude sur les administrations publiques
de 13 pays en situation de conflit ou d’après conflit a montré que, en moyenne,
21,3 % des postes de responsabilité étaient occupés par des femmes42
.
54. En 2016, dans le souci de corriger les tendances décrites plus haut, le
Département des affaires politiques, ONU-Femmes et le PNUD ont fourni une
assistance technique pour que la problématique hommes -femmes soit prise en
considération dans les opérations électorales, tout en continuant de s’attacher
systématiquement à ce qu’il en soit également tenu compte dans toutes les
politiques et activités menées en matière d’assistance électorale. Dans le cadre des
opérations de paix dirigées par le Département des opérations de maintien de la
paix, on a continué d’appuyer les initiatives susceptibles de favoriser la
participation des femmes dans différents contextes, notamment en République
centrafricaine et en Haïti. La Division de l’assistance électorale du Département des
affaires politiques, avec le concours de partenaires de l ’ONU, continue de veiller à
la transversalisation de la problématique hommes -femmes dans l’ensemble des
documents d’orientation de l’Organisation en matière électorale et à ce que tous les
rapports d’évaluation des besoins reposent sur des analyses et comportent des
recommandations prenant en compte cette problématique.
55. Bien qu’elle s’emploie davantage à corriger les habitudes négatives décrites
plus haut, la communauté internationale doit néanmoins aussi s’atteler à la mesure
précise des progrès accomplis. À cet égard, il est possible d’accroître l’efficacité des
systèmes statistiques nationaux en intensifiant et en améliorant la collecte des
données nécessaires à l’établissement d’indicateurs relatifs aux objectifs de
développement durable qui portent sur la proportion de sièges occupés par des
__________________
39
Voir, par exemple, Shair-Rosenfield et Reed Wood, « Governing well after war: How improving
female representation prolongs post-conflict peace », in Journal of Politics, vol. 79, no 3
(juillet 2017), et Thomas Carothers, « Democracy support strategies: leading with women’s
political empowerment » (Washington, Carnegie Endowment for International Peace, 2016).
40
Aux fins du présent rapport, l’expression « pays en situation de conflit ou de sortie de conflit »
désigne les pays ou territoires dans lesquels une mission politique ou une mission de consolidation
ou de maintien de la paix était en cours en 2016, ou dont la situation figurait parmi les questions
dont le Conseil de sécurité était saisi et avait été examinée lors d’une séance officielle entre le
1er
janvier et le 31 décembre 2016, ou qui avaient bénéficié en 2016 de ressources du Fonds pour
la consolidation de la paix au titre de programmes.
41
Afghanistan, Bosnie-Herzégovine, Burundi, Colombie, Guinée, Îles Salomon, Iraq, Kirghizistan,
Libye, République démocratique du Congo, Somalie, Soudan et Soudan du Sud.
42
Rapport du PNUD, « Égalité des sexes dans l’administration publique » (New York, 2014), portant
sur 13 pays où des données sont disponibles : Afghanistan, Burundi, Colombie, Côte d’Ivoire,
Liban, Mali, Nigéria, Ouganda, Népal, Sri Lanka, Tadjikistan, État de Palestine et Kosovo.
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femmes dans les parlements nationaux et les administrations locales [5.5.1b)] et sur
la représentation proportionnelle dans les institutions publiques (16.7.1). Il n’existe
pour l’instant pas de données de référence en la matière, ce qui nuit à
l’approfondissement des recherches sur le rôle joué par les dirigeantes à l ’échelle
locale et à la reconnaissance de celui-ci, notamment dans les zones touchées par un
conflit.
Promotion de la contribution des femmes au désarmement,
à la non-prolifération et à la maîtrise des armements
56. Pendant l’année écoulée, l’utilisation d’armes lourdes et non classiques, y
compris chimiques et explosives, s’est poursuivie dans des zones civiles, avec de
graves conséquences pour la population civile, en particulier en République arabe
syrienne. Je rappelle combien il est important d’accorder toute l’attention voulue
aux répercussions de la violence armée sur les femmes et sur le rôle qu’elles jouent
dans les domaines du désarmement, de la non-prolifération et de la maîtrise des
armements pour comprendre de quelle manière les transferts illicites de fonds et
d’armes et la prolifération des armes légères et de petit calibre entretiennent un
cycle de violence continu. Bien souvent, même après la conclusion d ’accords de
paix formels, les causes premières du conflit et les transferts illicites de fonds et
d’armes persistent, ce qui profite aux bandes organisées et engendre un degré
alarmant de violence quotidienne, y compris des féminicides.
57. Le 7 juillet 2017, 122 États Membres ou observateurs ont adopté à l ’issue d’un
vote le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (A.CONF.229/2017/8),
aboutissement historique de décennies de campagnes contre les armes nucléaires,
auxquelles ont participé de nombreux réseaux et organisations dirigés par des
femmes. À la sixième Réunion biennale des États pour l ’examen de la mise en
œuvre du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le
commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects, qui s ’est tenue en 2016,
les États ont noté que le commerce illicite d’armes légères et de petits calibres
compromettait l’accomplissement de l’objectif no 5 de développement durable, sur
l’égalité des sexes.
58. Le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires et le Programme d’action
appellent tous deux à la participation effective des femmes et des hommes, sur un
pied d’égalité. Dans le Traité, les États se sont engagés à appuyer la participation
des femmes au désarmement et l’aide aux victimes modulée en fonction du sexe. La
troisième Conférence des Nations Unies chargée d’examiner les progrès accomplis
dans l’exécution du Programme d’action, prévue en 2018, sera l’occasion de de
poursuivre sur cette voie et de mettre en lumière l ’importance de la problématique
hommes-femmes dans le cadre de la lutte contre la prolifération des armes légères et
de petit calibre et de l’établissement de rapports à ce sujet, ainsi que la nécessité
d’élargir la participation des femmes aux activités de désarmement et l ’obligation de
tenir compte de leurs préoccupations propres lorsque sont présentées des demandes
au titre du Mécanisme de financement des Nations Unies pour la coopération en
matière de réglementation des armements.
59. Bien souvent, les données et les analyses portant sur le contrôle des armes
légères et de petit calibre illicites n’indiquent pas à quel point les engagements pris
dans l’optique de la parité des sexes sont honorés. Le nouveau modèle de
présentation de rapports au titre du Programme d’action prévoit la communication
de données probantes.
60. Dans sa résolution 2122 (2013), le Conseil de sécurité a demandé la
participation pleine et entière des femmes aux programmes de désarmement, de
démobilisation et de réintégration et aux réformes du secteur de la sécurité, sachant
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qu’ils doivent prendre en considération la problématique hommes -femmes. Je me
félicite que le Conseil, dans celles de ses résolutions récentes qui portent
spécifiquement sur certains pays donnés, ait repris cette exigence à son compte et
j’appelle les responsables de toutes les opérations de paix concernées à s ’attacher,
aux stades de la planification puis de l’exécution, à donner aux femmes toute la place
qui leur revient43
. Les données recueillies au sujet des initiatives en faveur du
désarmement et de la lutte contre la violence au sein de la collectivité menées par
l’Organisation dans le cadre de cinq missions en 2016 font ressortir que 26 % des
personnes ayant participé à des programmes de réintégration d’ex-combattants et de
jeunes exposés à des risques étaient des femmes (contre 12 % en 2015 et en 2014)44
.
Je salue toute initiative visant à renforcer la participation de femmes à la lutte
antimines. Par exemple, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies
pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) a dispensé aux victimes d’explosions et
aux personnes handicapées, pour moitié des femmes, une formation aux risques que
présentent les mines qui leur a permis d’y sensibiliser leurs communautés
respectives.
État de droit et accès à la justice
61. Les inégalités structurelles, la pauvreté et la discrimination entravent l ’accès
des femmes et des filles à la justice et à la sécurité, ainsi qu’aux mécanismes de
justice transitionnelle. L’existence d’un système juridique et judiciaire soucieux de
la problématique hommes-femmes est l’un des éléments de base d’une société
résiliente. Il convient d’appuyer les mécanismes de justice transitionnelle et les
institutions chargées de veiller à la primauté du droit en situation de transition et de
conflit afin de remédier aux inégalités actuelles et de répondre aux besoins les plus
immédiats des femmes touchées par un conflit; les mécanismes et institutions en
question devraient faire en sorte que les auteurs d’actes de violence sexuelle ou
sexiste répondent de leurs actes, veiller à ce que l’administration des procédures
judiciaires formelles ou informelles soit équitable et prendre des mesures
spécifiques pour que des femmes accèdent aux postes de responsabilité. Il faut
renforcer les systèmes judiciaires nationaux pour leur donner les moyens d ’enquêter
sur les actes de violence sexuelle et sexiste et d’en poursuivre les auteurs
conformément aux normes internationales et en application du principe de non -
discrimination. En outre, lorsque des poursuites sont engagées contre des membres
de groupes terroristes et de groupes extrémistes violents, il ne fau t pas se limiter aux
seuls crimes terroristes mais aussi prendre en considération le caractère sexiste de
leurs actes et se prévaloir de toutes les possibilités offertes par le droit pénal
international, y compris la qualification de crime contre l ’humanité et de génocide.
62. Les femmes demeurent inégalement représentées parmi les juges et les
commissaires dans les institutions chargées de la justice transitionnelle et du respect
de l’état de droit. Au 1er
juillet 2017, les commissions de vérité appuyées par les
Nations Unies étaient composées à 27,7 % de femmes; en Tunisie, 5 des
11 commissaires étaient des femmes; au Mali, elles étaient 5 sur 25. Les femmes
sont également sous-représentées dans les juridictions pénales spécialisées dans les
infractions liées à des conflits qui ont été récemment créées au niveau national,
comme la juridiction spéciale du Kosovo, où l’on ne dénombre que 5 femmes parmi
les 25 juges. J’encourage la Cour pénale spéciale de la République centrafricaine à
__________________
43
Voir, par exemple, les résolutions 2295 (2016) (Mali), 2301 (2016) (République centrafricaine) et
2344 (2017) (Afghanistan).
44
À savoir la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), la MINUSMA,
la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République
centrafricaine (MINUSCA), la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM)
et la MINUAD.
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21/36 17-18255
mettre en place des stratégies de recrutement expressément destinées à faire en sorte
que la parité des sexes soit respectée parmi ses effectifs, à tous les niveaux45
.
63. La Cellule mondiale de coordination des activités policières, judiciaires et
pénitentiaires de promotion de l’état de droit au lendemain de conflits et d’autres
crises, qui relève du Département des opérations de maintien de la paix, du PNUD,
du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH), du HCR, d’ONU-Femmes
et de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a beaucoup
contribué à transversaliser la problématique hommes-femmes dans le cadre de
l’assistance dispensée par l’ONU aux États Membres en matière de respect de l’état
de droit, à faire en sorte que les disparités entre les sexes soient pr ises en compte
dans les évaluations conjointes, la planification, la programmation, la mobilisation
de ressources et le déploiement rapide d’experts, et à la généralisation d’une
approche intégrée propre à favoriser la participation des femmes aux programmes
mis en œuvre dans le domaine de la justice. Pendant la période à l ’examen, la
Cellule a appuyé l’élaboration et l’exécution de programmes conjoints au service de
l’état de droit, dont une partie était consacrée au renforcement des capacités des
femmes et à la prise en charge de leurs besoins en Guinée -Bissau, en Haïti, au
Libéria, au Mali, en République centrafricaine, en République démocratique du
Congo, en Somalie, au Soudan (Darfour), dans l’État de Palestine et au Kosovo46
.
Conformément au Plan d’action du Secrétaire général pour la prise en compte de la
problématique hommes-femmes dans la consolidation de la paix, qui s’articule sur
sept engagements (A/65/354-S/2010/466), une part importante du budget de ces
programmes pluriannuels axés sur l’état de droit est consacrée à l’amélioration de
l’accès des femmes à la justice et à l’appui aux victimes de violence sexuelle et
sexiste en République centrafricaine (à hauteur de 16 %), au Mali (20 %), dans
l’État de Palestine (20 %) et en Somalie (27 %).
64. En 2016 et 2017, les États Membres ont contribué à plus d’un titre à la lutte
contre l’impunité. En 2017, des fonctionnaires sénégalais ont arrêté un lieutenant
guinéen, Aboubacar Diakité, en raison de son rôle dans des crimes de violence
sexuelle commis à Conakry; de son côté, la République démocratique du Congo a
arrêté Ntabo Ntaberi Cheka, dirigeant rebelle, pour les viols massifs de civils
commis dans le pays. En Afghanistan, le PNUD s’emploie à instaurer des tribunaux
spécialisés dans les crimes de violence sexuelle et sexiste; au Timor -Leste, il appuie
l’organisation d’audiences foraines pour que les groupes de population isolés
puissent saisir la justice. En outre, la MONUSCO, par l’intermédiaire des cellules
d’appui aux poursuites judiciaires, s’est employée à faire traduire en justice les
auteurs de crimes graves, notamment de violence sexuelle. En 2016, l ’Équipe
d’experts de l’état de droit et des questions touchant les violences sexuelles
commises en période de conflit a continué de renforcer les capacités des
fonctionnaires chargés du respect de l’état de droit et de l’appareil judiciaire; ONU-
Femmes en s’appuyant sur l’Initiative d’intervention rapide au service de la justice,
a missionné 19 spécialistes de la lutte contre les violences sexuelles et sexistes pour
qu’ils participent à des enquêtes et à des mécanismes de mise en jeu des
responsabilités, notamment dans le cadre de l’ensemble des commissions d’enquête
des Nations Unies. J’encourage tous les États Membres à continuer de mobiliser des
spécialistes de la problématique hommes-femmes susceptibles de contribuer aux
enquêtes menées au sujet de viols et de violences sexuelles et autres formes de
violence, de manière à conférer toute la crédibilité voulue à ces enquêtes, dans le
respect des normes internationales en matière de droits de l ’homme.
__________________
45
Voir MINUSCA et al., « Rapport du projet Mapping ».
46
Les références au Kosovo s’entendent dans l’acception qui en est donnée dans la résolution
1244 (1999) du Conseil de sécurité.
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65. Les initiatives menées dans une optique intégrée auprès des victimes ayant
survécu à des actes de violence sexuelle contribuent aussi à améliorer l ’accès à la
justice. Au Mali, par exemple, le Fonds pour la consolidation de la paix appuie une
démarche multisectorielle engagée auprès de rescapés afin de les aider à obtenir
justice : déjà, la proportion des affaires de violence sexuelle dont sont saisis le s
tribunaux dans les régions de Gao et de Tombouctou est passée de 1 % à 14 %. Dans
le Somaliland, en coopération avec l’Organisation mondiale de la Santé et le
FNUAP, l’ONUDC a expérimenté un outil intégré pour établir des passerelles entre
les soins de santé et les mécanismes judiciaires au bénéfice des victimes de violence
sexuelle et sexiste, afin d’encourager la coordination entre le système de santé et
l’appareil judiciaire. Dans des camps de réfugiés en Jordanie, avec le concours du
HCR, des avocats spécialisés facilitent l’accès à la justice de femmes et de filles
ayant subi de telles violences; les entretiens se déroulent dans des espaces sécurisés.
66. Les autorités nationales et la société civile travaillent elles aussi au côté de
l’ONU pour prévenir et combattre la violence sexuelle et sexiste et les violences
sexuelles liées aux conflits en Afghanistan, en Côte d’Ivoire, au Guatemala, en Iraq,
au Libéria, au Mali, en République démocratique du Congo, en Sierra Leone, au
Soudan et dans d’autres pays. L’action menée prend diverses formes : réformes
juridiques, programmes d’assistance juridique, programmes axés sur la sécurité des
populations locales, mise en place de services spécialisés pour les victimes et les
rescapés d’actes de violence, campagnes de sensibilisation et programmes de
relèvement. Au Darfour, un appui a été fourni pour l ’ouverture dans une prison pour
femmes d’une salle de visite pour les familles qui soit adaptée aux enfants et, au
Kirghizistan, grâce à la participation de femmes aux réunions locales concernant la
sécurité publique, la violence sexuelle et sexiste est devenue une priorité dans les
plans de prévention de la criminalité.
67. Ensemble, ONU-Femmes et l’Union européenne s’emploient à obtenir que la
problématique hommes-femmes soit prise en compte dans le cadre de la justice
transitionnelle en Colombie, au Mali, au Népal, aux Philippines et au Kosovo, et
plaident à cet effet pour la participation des femmes touchées par les conflits et pour
l’affectation de conseillers spécialisés dans la problématique hommes-femmes
auprès des mécanismes de justice transitionnelle. Au Libéria, le PNUD et le HCDH,
au côté de la Commission nationale indépendante des droits de l ’homme, se sont
attachés à renforcer le mécanisme de justice transitionnelle couramment désigné
sous le nom de programme Case à palabres et à augmenter le nombre de femmes qui
y participaient. L’Allemagne et le Cambodge coopèrent également à un projet axé
sur la réconciliation, qui consiste à accompagner des personnes ayant su rvécu à un
mariage de force sous les Khmers rouges, en les amenant à raconter leur histoire
dans le cadre d’activités culturelles et en leur dispensant des services de soutien
psychologique.
D. Initiatives visant à suivre la mise en œuvre et à faire progresser
les résultats
Engagements nationaux sur la question des femmes et de la paix et de la sécurité
68. Au 31 août 2017, 68 pays ou zones47
avaient adopté des plans d’action
nationaux sur les femmes et la paix et la sécurité et plusieurs autres plans é taient en
__________________
47
Afghanistan, Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Bosnie -Herzégovine, Brésil,
Burkina Faso, Burundi, Canada, Chili, Côte d’Ivoire, Croatie, Danemark, El Salvador, Espagne,
Estonie, État de Palestine, États-Unis d’Amérique, ex-République yougoslave de Macédoine,
Finlande, France, Gambie, Géorgie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Îles Salomon, Indonésie, Iraq,
Irlande, Islande, Italie, Japon, Kenya, Kirghizistan, Kosovo, Libéria, Lituanie, Mali, Monténégro,
S/2017/861
23/36 17-18255
cours d’élaboration. Toutefois, une analyse plus détaillée montre que plus de
20 plans d’action nationaux sont déjà arrivés à échéance ou y arriveront
prochainement. En outre, sur les plans d’action nationaux adoptés à ce jour,
12 seulement disposent d’un budget et d’autres présentent des lacunes quant à la
mise en œuvre, à une véritable ouverture à la société civile et à la prévention des
conflits, en particulier sur la question du désarmement. Je note les efforts engagés
par la Jordanie et le Népal pour établir un budget pour leur plan d’action national et
prie instamment les États Membres de tenir compte des engagements en faveur des
femmes et de la paix et de la sécurité dans tous les outils et instruments nationaux
de planification, d’adopter et de mettre en œuvre des plans d’action nationaux
exhaustifs et d’autres cadres concernant les femmes et la paix et la sécurité qui
s’accompagnent d’indicateurs pour suivre les progrès accomplis, et de contrôler
l’affectation des fonds. J’encourage les pays dont le plan d’action national est arrivé
ou arrive à échéance à saisir cette occasion pour évaluer les progrès accomplis et
renforcer les politiques, lois et programmes dans ce domaine.
69. Treize pays mettent actuellement en œuvre leur deuxième plan d’action
national et sept autres sont en train d’appliquer leur troisième plan. Sur l’ensemble
des plans en cours, 48 (72 %) sont dotés d’un cadre de suivi qui est assorti d’un
indicateur de progrès et 18 (27 %) disposent d’un budget d’exécution spécifique,
chiffre en légère augmentation par rapport à 2016 (25 %). Ces plans de deuxième et
troisième générations tiennent compte de nouvelles priorités, telles les migrations,
les changements climatiques ou l’extrémisme violent. Au Nigéria, par exemple,
dans le cadre du deuxième plan d’action national, le concept de sécurité a été élargi
pour faire place aux problèmes de l’extrémisme violent, des soins post-
traumatiques, du désarmement et de la démobilisation, et des plans d ’action locaux
ou par zone ont été adoptés afin de mieux adapter les plans à la situation locale.
Sept plans d’action nationaux au moins ont expressément mis en évidence que le
rôle des femmes dans la prévention des conflits constituait un élément essentiel du
programme pour les femmes et la paix et la sécurité48
.
70. Le Réseau des coordonnateurs nationaux pour les femmes et la paix et la
sécurité, lancé l’année dernière par 63 États Membres à l’initiative de l’Espagne, a
tenu sa réunion inaugurale en avril 2017 à Alicante (Espagne) (voir S/2017/485).
Cette réunion a ressemblé une centaine de coordonnateurs nationaux, d ’acteurs
gouvernementaux et de représentants de la société civile venus de 61 pays pour
débattre des applications novatrices des plans d’action nationaux, notamment sur la
question de la suppression des obstacles structurels à l ’égalité des sexes, de la
prévention de l’extrémisme violent et de l’association de la société civile à
l’élaboration, à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation de ces plans.
71. La concrétisation des engagements internationaux, régionaux et nationaux qui
figurent dans les résolutions relatives aux femmes et à la paix et la sécurité en
actions locales peut également permettre que les priorités et les besoins locaux
soient pris en compte dans l’élaboration des politique nationales, régionales et
mondiales. Quinze pays mettent actuellement en œuvre le programme d ’application
locale auquel le Global Network of Women Peacebuilders apporte son concours49
.
En outre, la mise en place de mesures nationales destinées à promouvoir l’égalité
__________________
Népal, Nigéria, Norvège, Nouvelle-Zélande, Ouganda, Paraguay, Pays-Bas, Philippines, Portugal,
République centrafricaine, République de Corée, République démocratique du Congo, Royaume -
Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Rwanda, Sénégal, Serbie, Sierra Leone, Slovénie,
Soudan du Sud, Suède, Suisse, Tadjikistan, Tchéquie, Timor-Leste, Togo et Ukraine.w
48
Italie, Kenya, Nigéria, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède et Tadjikistan.
49
Arménie, Burundi, Colombie, Géorgie, Kenya, Libéria, Népal, Ouganda, Philippines, République
de Moldova, République démocratique du Congo, Serbie, Sierra Leone, Soudan du Sud et
Ukraine.
S/2017/861
17-18255 24/36
des sexes dans les domaines de la politique étrangère et de la coopération
internationale à l’exemple du Canada et de la Suède, qui ont respectivement adopté
une politique étrangère et une politique d’aide extérieure féministes, montre un
esprit d’initiative et une détermination pour s’attaquer aux causes profondes de
l’inégalité entre les sexes.
72. Je me félicite du recours aux mécanismes de suivi de la situation des droits de
l’homme et de signalement des violations en la matière pour que les États Membres
rendent des comptes pour les violations des droits fondamentaux des femmes, y
compris dans les conflits ou les périodes d’après conflit. En 2016, les mécanismes
extraconventionnels du Conseil des droits de l’homme ont conduit à l’envoi de
526 communications au total. Sur ce nombre, 79 ont été envoyées à des pays en
conflit ou sortant d’un conflit50
, dont 5 concernaient des violations des droits des
femmes. Ces dernières portaient sur des allégations de meurtres, d’actes de violence
sexuelle, de harcèlement ou de menaces à l’égard de défenseuses des droits de
l’homme/défenseurs des droits des femmes et de juges, de cas de privation de
nourriture, de poursuites à caractère politique et d’enlèvements de femmes et de
filles à des fins d’exploitation sexuelle.
73. En 2016, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des
femmes a continué de sensibiliser les États à la mise en œuvre du programme pour
les femmes et la paix et la sécurité, et à sa recommandation générale nº 30 sur les
femmes dans la prévention des conflits, les conflits et les situations d ’après conflit.
La même année, trois des quatre observations finales adressées à des pays en conflit
ou sortant d’un conflit mentionnaient le programme en question et la
recommandation générale nº 30, soit le même pourcentage qu’en 201551
. Les
observations finales que le Comité a envoyées en 2016 à 10 pays qui ne sont pas
touchés par un conflit ont également fait référence au programme pour les fe mmes
et la paix et la sécurité52
. En 2017, le Comité a adopté la recommandation générale
nº 35 sur la violence sexiste à l’égard des femmes, portant actualisation de la
recommandation générale nº 19 (CEDAW/C/GC/35), qui établit un lien explicite
entre le sexe, les discriminations et les violences faites aux femmes dans le cadre de
conflits. Je me félicite de la séance organisée par l’Espagne et l’Uruguay selon la
formule Arria le 5 décembre 2016, qui a regroupé des membres du Comité et du
Conseil de sécurité afin d’examiner les relations qui existent entre les droits de
l’homme et le programme pour les femmes et la paix et la sécurité. Au cours de
cette séance, le Comité a été instamment prié de recommander des mesures
concrètes aux États Membres pour mettre en œuvre les droits fondamentaux des
femmes dans la prévention des conflits, les conflits et les situations d ’après conflit,
y compris aux pays qui ne sont pas touchés par un conflit en ce qui concerne le s
obligations extraterritoriales qui découlent de la Convention sur l ’élimination de
toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. J’encourage les États
__________________
50
Sur la notion de pays en conflit ou sortant d’un conflit au sens du présent rapport, voir la note 40.
Des communications ont été adressées aux États suivants : Afghanistan, Burundi, Colombie, État
de Palestine, Guatemala, Guinée, Haïti, Iraq, Kirghizistan, Liban, Libéria, Mali, Myanmar,
République arabe syrienne, République démocratique du Congo, République populaire
démocratique de Corée, Somalie, Soudan, Soudan du Sud, Sri Lanka, Ukraine et Yémen.
51
Burundi (CEDAW/C/BDI/CO/5-6), Mali (CEDAW/C/MLI/CO/6-7) et Myanmar
(CEDAW/C/MMR/CO/4-5). La situation en Haïti a également été examinée par le Comité, mais
sans qu’il soit fait mention des femmes et de la paix et de la sécurité (CEDAW/C/HTI/CO/8-9).
Sur la notion de pays en conflit ou sortant d’un conflit au sens du présent rapport, voir la note 40.
52
Allemagne (CEDAW/C/DEU/CO/7-8), Arménie (CEDAW/C/ARM/CO/5-6), Canada
(CEDAW/C/CAN/CO/8-9), Estonie (CEDAW/C/EST/CO/5-6), Irlande (CEDAW/C/IRL/CO/6-7),
Jordanie (CEDAW/C/JOR/CO/6), Pays-Bas (CEDAW/C/NLD/CO/6), Philippines
(CEDAW/C/PHL/CO/7-8), Rwanda (CEDAW/C/RWA/CO/7-9) et Turquie
(CEDAW/C/TUR/CO/7).
S/2017/861
25/36 17-18255
Membres à profiter de l’Examen périodique universel pour mieux respecter les
obligations relatives aux droits fondamentaux des femmes et les engagements en
faveur du programme pour les femmes et la paix et la sécurité.
74. En 2016, quatre pays en conflit ou sortant d’un conflit ont fait l’objet de
l’Examen périodique universel53
et ont abordé des questions relatives aux femmes et
à la paix et à la sécurité, notamment la violence sexuelle, la participation des
femmes à la vie politique et l’adoption de plans d’action nationaux. Au total, 10 des
14 pays qui ont fait l’objet d’un examen en 2016 se sont vu adresser des questions,
des observations et des recommandations visant à remédier aux séquelles des
conflits ou des actes de violence grâce au programme pour les femmes et la paix et
la sécurité54
.
75. Les institutions nationales de défense des droits de l’homme constituent
également un maillon essentiel de la chaîne de responsabilité en matière de
violations des droits des femmes et contribuent pleinement à la prévention des
violations des droits de l’homme et des conflits. Au 31 juillet 2017, sur les 31 pays
et territoires examinés dans le cadre du présent rapport, 17 disposaient d ’une
institution nationale de défense des droits de l’homme qui était dotée du statut A ou
B et 2 disposaient d’un médiateur officiel. Cela représente une augmentation d’une
institution et d’un médiateur au cours de l’année écoulée. Neuf de ces organismes
comptaient des services, des départements ou des comités chargés des questions de
défense des droits des femmes et d’égalité des sexes.
Efforts régionaux engagés pour renforcer la mise en œuvre du programme
76. À une époque où les causes et les conséquences des conflits débordent
régulièrement les frontières, les efforts régionaux en faveur de la mise en œuvre
coordonnée des engagements pris à l’égard du programme pour les femmes et la
paix et la sécurité sont de plus en plus utiles et je me félicite des possibilités de
renforcer la collaboration à cet égard. Au 31 août 2017, 10 organisations régionales
avaient adopté des cadres spéciaux de mise en œuvre55
, parmi lesquels des plans
d’action régionaux sur les femmes et la paix et la sécurité (en 2017, un nouveau
plan a été adopté par la Communauté de développement de l ’Afrique australe). Les
organisations régionales offrent des moyens importants pour intensifier la
coopération. Ainsi, en 2017, la Commission de l’Union africaine et ONU-Femmes,
avec l’appui de l’Allemagne, ont lancé le Réseau des femmes d’influence en
Afrique, qui réunit environ 80 participantes de toute l’Afrique dans le but de
renforcer le rôle des femmes dans la conduite des affaires, afin que ce continent
puisse envisager un avenir pérenne, ouvert et pacifique.
77. Les données disponibles sur la représentation des femmes dans les
organisations régionales et sur les postes de responsabilité auxquels elles ont accès
montrent des signes de stagnation. En décembre 2016, 27 % des postes de cadre
supérieur (au siège et dans les bureaux extérieurs) des organisations interrogées
étaient occupés par des femmes, ce qui ne représente qu’une légère augmentation
par rapport à 2015 (25 %), les résultats étant assez différents suivant les
__________________
53
Haïti, Somalie, République arabe syrienne et Soudan du Sud.
54
Haïti, Mozambique, Niger, Ouganda, Papouasie-Nouvelle-Guinée, République arabe syrienne,
République de Moldova, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Soudan du Sud, Swaziland, Tadjikistan
et Timor-Leste.
55
Autorité intergouvernementale pour le développement, Communauté de développement de
l’Afrique australe, Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, Conférence
internationale sur la région des Grands Lacs, Forum des îles du Pacifique, Ligue des États arabes,
Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, Organisation pour la sécurité et la coopération en
Europe, Union africaine et Union européenne.
S/2017/861
17-18255 26/36
organisations. J’encourage toutes les organisations régionales à redoubler d’efforts
pour accroître la représentation des femmes à des postes de responsabilité au sein de
leur organisation et en dehors.
Mesures prises par l’ONU
78. Je reconnais que l’ONU a encore beaucoup à faire en interne pour promouvoir
le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, pour aller de l ’avant avec
efficacité et responsabilité et pour renouveler son engagement en faveur de l’égalité
des sexes et de la représentation des femmes. Les informations recueillies jusqu’à
présent montrent que les progrès réalisés dans plusieurs domaines ont été inégaux,
notamment sur la parité des sexes, le dispositif relatif à la problémat ique hommes-
femmes et le suivi et l’affectation des ressources en faveur de l’égalité des sexes.
Les entités qui ont mis en place des mesures et des plans solides en faveur des
femmes obtiennent systématiquement de meilleurs résultats que les autres (voir par
exemple E/2017/57 et Corr.1). Je note avec satisfaction que plusieurs initiatives
nouvelles montrent déjà des signes de progrès. Je prévois de mobiliser l ’ensemble
des organismes des Nations Unies afin d’harmoniser et de renforcer les mécanismes
de collecte et d’analyse des statistiques ventilées par sexe, ainsi que de ventilation
des données, afin d’orienter l’élaboration des politiques et de s’appuyer sur les
informations obtenues pour la planification, la conception des programmes et la
production des rapports.
Représentation
79. La réalisation de la parité des sexes constitue une étape essentielle pour que
l’égalité des sexes soit un des piliers de notre action, que l ’efficacité opérationnelle
soit renforcée et que nos propres normes reposent sur une représentation équilibrée
des sexes. Je suis personnellement déterminé à mettre en œuvre les mesures
concrètes qui sont décrites dans ma Stratégie sur la parité des sexes applicable à
l’ensemble du système des Nations Unies. Une représentation équilibrée des sexes,
y compris en valorisant des expériences diverses, doit guider la composition des
groupes, des missions d’enquête et des missions d’évaluation, ainsi que d’autres
activités limitées dans le temps.
80. Au 31 décembre 2016, les femmes représentaient 23 % des hauts
fonctionnaires (de la classe P-5 au secrétaire général adjoint) en poste dans les
opérations de paix conduites par le Département des affaires politiques et le
Département des opérations de maintien de la paix. Toutefois, seuls 13 % des
secrétaires généraux adjoints étaient des femmes et leur représentation était encore
plus faible parmi les envoyés spéciaux. Le pourcentage d’opérations de paix
dirigées par des femmes était de 23 %, contre 25 % en 2015 et en 2014 et 18 % en
2010. La proportion de femmes occupant un poste de chef adjoint s ’élevait à 35 %,
chiffre en augmentation par rapport à 2015 (18 %), 2014 (24 %) et 2010 (15 %). Sur
les 27 coordonnateurs résidents qui étaient en poste dans un pays en conflit ou
sortant d’un conflit à la fin de l’année 2016, 9 (33 %) étaient des femmes, ce qui
correspond à une légère augmentation par rapport à 2015 (29 %). En dehors des
opérations de paix, la proportion de postes d’administrateur occupés par des femmes
dans les lieux d’affectation situés dans de tels pays est restée inférieure à 50 % dans
toutes les entités qui ont communiqué des données pour 2016, sauf à ONU -Femmes,
où les femmes occupaient 64 % de tous les postes de ce type et 75 % des postes de
haut niveau. Notre objectif doit être d’aboutir à l’égalité des niveaux de
représentation sans exception.
S/2017/861
27/36 17-18255
Spécialistes de la problématique hommes-femmes
81. Je reconnais qu’il reste nécessaire de mettre en œuvre avec détermination le
dispositif de l’ONU relatif à la problématique hommes-femmes et suis conscient de
l’importance des conseillers pour la problématique hommes -femmes et des
conseillers pour la protection des femmes. Les compétences techniques spécialisées
donnent lieu à des engagements normatifs et à des mesures concrètes dans le cadre
de la planification stratégique, de l’analyse, de la préparation du budget et de la
conception et de l’exécution des programmes. Toutes ces considérations sont
essentielles pour que les négociations budgétaires qui ont lieu à la Cinquième
Commission intègrent la question des femmes et de la paix et de la sécurité comme
thème transversal, comme l’a demandé le Conseil de sécurité dans ses résolutions
2122 (2013) et 2242 (2015). Je suis préoccupé de ce que la recherche de l’efficacité
par rapport au coût dans les opérations de paix conduit trop souvent à diminuer
l’appui financier en faveur de l’égalité des sexes et du programme pour les femmes
et la paix et la sécurité, notamment par des suppressions de postes consacrés à
l’égalité des sexes ou une réduction de leur niveau hiérarchique, comme on a pu le
constater à la MINUSCA, à la MINUL et à la Mission des Nations Unies pour
l’appui à la justice en Haïti. J’ai donc demandé à tous les départements du
Secrétariat concernés, notamment le Département des opérations de maintien de la
paix et le Département des affaires politiques, d’analyser leur capacité
institutionnelle à intégrer la problématique hommes-femmes et de présenter un plan
pour la renforcer.
82. Le Département des opérations de maintien de la paix et le Département de
l’appui aux missions comptent 70 spécialistes de la problématique hommes -femmes
et disposent de responsables de la coordination des questions d’égalité des sexes
dans les opérations de maintien de la paix et au Siège. Au 31 décembre 2016, 8 des
16 missions de maintien de la paix disposaient de groupes de la problématique
hommes-femmes dirigés par des conseillers pour la problématique
hommes-femmes56
, qui rendaient compte au représentant spécial ou au chef de la
mission, et deux missions comptaient un responsable de la coordination des
questions d’égalité des sexes57
. Le poste de conseiller principal pour la
problématique hommes-femmes qui est ouvert à la MINUSMA reste toutefois
vacant.
83. En 2016, 23 conseillers pour la problématique hommes -femmes étaient en
poste à plein temps dans 8 des 12 missions dirigées par le Département des affaires
politiques, alors qu’il n’y en avait que dans 6 missions sur 13 en 201558
. En outre, la
même année, deux conseillers pour la problématique hommes -femmes ont travaillé
dans les bureaux de mes envoyés spéciaux59
. Enfin, le nombre total de responsables
__________________
56
MINUAD, Force intérimaire des Nations Unies au Liban, MINUL, Mission des Nations Unies au
Soudan du Sud, MINUSCA, MINUSMA, MONUSCO et MINUSTAH.
57
Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo et Force des Nations Unies
chargée du maintien de la paix à Chypre.
58
Mission d’appui des Nations Unies en Libye, MANUSOM, Bureau intégré des Nations Unies pour
la consolidation de la paix en Guinée-Bissau, Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest
et le Sahel, Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale, MANUA, Mission
d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq et Bureau du Coordonnateur spécial des Nations Unies
pour le Liban.
59
Aux bureaux de mes envoyés spéciaux pour la région des Grands Lacs et la Syrie.
Au 30 septembre 2017, le Bureau de mon Envoyé spécial pour le Yémen avait également recruté
deux conseillers pour la problématique hommes-femmes. Sur les 25 conseillers en poste dans des
missions dirigées par le Département des affaires politiques (23) et dans des bureaux d’envoyés
spéciaux (2), 3 sont de classe D-1 ou P-5 et 6 sont de classe P-4.
S/2017/861
17-18255 28/36
de la coordination des questions d’égalité des sexes dans les missions politiques
spéciales a sensiblement augmenté (50 en 2016 contre 39 en 2015).
84. Je salue les efforts fournis par les deux départements pour accroître la
visibilité et les responsabilités des conseillers pour la problématique hommes-
femmes et des groupes de la problématique hommes -femmes dans les opérations de
paix et au Siège, notamment en créant des postes de conseillers principaux pour la
problématique hommes-femmes dans les bureaux de mes représentants spéciaux. La
responsabilité de l’exécution du programme pour les femmes et la paix et la sécurité
dans les missions incombe principalement aux chefs de mission, mais la présence de
conseillers pour la problématique hommes-femmes devrait favoriser la prise en
compte de ce sujet dans les activités de tout le personnel des missions, afin que les
opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales des Nations
Unies soient davantage sensibilisées à ces questions. Nous devons poursuivre nos
efforts pour mettre en œuvre la résolution 2242 (2015) afin de renforcer la
coopération entre le Département des opérations de maintien de la paix, le
Département des affaires politiques et ONU-femmes, notamment en permettant aux
conseillers sur le terrain et à d’autres responsables des missions de bénéficier
pleinement d’un appui décisionnel, opérationnel et technique pour l’application de
la résolution 1325 (2000) et des résolutions ultérieures, en tirant pleinement parti de
leurs avantages comparatifs respectifs.
85. En 2016, 20 conseillers pour la protection des femmes recrutés sur le plan
international et 5 conseillers recrutés sur le plan national é taient en poste dans des
opérations de paix en Iraq, au Mali, en République centrafricaine, en République
démocratique du Congo, en Somalie, au Soudan (Darfour) et au Soudan du Sud60
.
Cependant, au 30 septembre, 10 des 27 postes de conseillers pour la protection des
femmes demeuraient vacants, notamment en République centrafricaine, en
République démocratique du Congo et au Soudan du Sud. Au Darfour, le poste a été
supprimé.
86. En dehors du Département des affaires politiques et du Département des
opérations de maintien de la paix, de nombreuses autres entités des Nations Unies
qui sont présentes dans des pays en conflit ou sortant d’un conflit dispensent des
conseils techniques sur les femmes et la paix et la sécurité. Ainsi, au 31 décembre
2016, ONU-Femmes était présente dans 25 pays de ce type et menait des activités
dans le domaine de l’aide humanitaire, de la paix et de la sécurité dans 58 pays. La
proportion de bureaux du PNUD installés dans ce type de pays qui disposent d ’une
équipe de coordination pour la problématique hommes-femmes dirigée par un
fonctionnaire de rang supérieur s’élève à 77 %, tandis que le Programme alimentaire
mondial compte 177 responsables de la coordination des questions relatives à la
problématique hommes-femmes. En 2016, 71 des 131 équipes de pays des Nations
Unies (54 %) comptaient un groupe de travail ou un groupe thématique
interinstitutions axés sur l’égalité des sexes. De plus, 21 des 28 équipes de pays
(75 %) actives dans un pays en conflit ou sortant d’un conflit disposaient d’un
groupe de ce type, un chiffre en augmentation par rapport à 2015 (64 %). S’ils
disposent de l’appui hiérarchique de toutes les entités de l’équipe de pays, d’un
mandat précis, de moyens de coordination spécifiques et de ressources et si leurs
membres participent activement à leurs travaux, ces groupes peuvent constituer un
levier important pour promouvoir la cohérence, donner des conseils stratégiques à
l’équipe de pays et fournir un appui technique au pays hôte.
__________________
60
Conformément au rapport portant la cote A/70/357, ils s’acquittent de leurs tâches, notamment la
création et la coordination d’arrangements de suivi, d’analyse et de communication de
l’information sur la violence sexuelle liée aux conflits, au sein des composantes droits de l ’homme
ou en coopération avec elles.
S/2017/861
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Travaux du Conseil de sécurité
87. En 2016, le Conseil de sécurité a procédé à plusieurs innovations importantes
dans le cadre de ses travaux relatifs au rôle des femmes dans l ’optique de la paix et
de la sécurité : il a réuni ses experts dans le cadre d’un groupe informel, invité une
représentante de la société civile à prendre la parole lors d’un exposé sur la situation
d’un pays en particulier61
et adopté pour la première fois une résolution portant
exclusivement sur la lutte contre l’exploitation et les atteintes sexuelles [2272
(2016)] et une autre sur la traite des êtres humains, les violences sexuelles et leurs
liens avec l’extrémisme violent [2331 (2016)].
88. Dans sa résolution 2242 (2015), le Conseil de sécurité a fait part de son
intention de réunir ses experts compétents dans le cadre d’un groupe informel qui
serait chargé de la question des femmes et de la paix et de la sécur ité, l’objectif étant
de faciliter l’adoption d’une approche plus systématique de cette question dans le
cadre de ses propres travaux et de rendre possibles un contrôle plus strict et une
meilleure coordination des efforts de mise en œuvre (voir S/2016/1106). Au cours de
sa première année d’activité – sa coprésidence étant assurée par l’Espagne et le
Royaume-Uni et son secrétariat par ONU-Femmes – le groupe informel s’est réuni à
neuf reprises pour examiner la situation en Afghanistan62
, en République
centrafricaine63
, en Iraq64
et au Mali65
, et pour assister à un exposé thématique sur la
situation en matière de violences sexuelles commises en période de conflit, présenté
par des conseillers pour la protection des femmes issus de plusieurs missions66
. À
chaque séance du groupe, de hauts responsables d’opérations de paix et d’équipes de
pays des Nations Unies ont informé les experts du Conseil des préoccupations liées
aux femmes et à la paix et à la sécurité, et passé en revue les mesures de suivi que
l’Organisation et le Conseil pourraient prendre. Une plus grande précision et
l’actualisation des informations et des analyses fournies ont d’ores et déjà eu une
incidence positive. Ainsi, à l’issue d’un exposé sur le Yémen présenté par le groupe
informel d’experts, le Conseil de sécurité a publié une déclaration de son Président
dans laquelle figurait une recommandation du groupe tendant à ce que les femmes
soient représentées à hauteur d’au moins 30 % dans les négociations de paix et à ce
que l’Organisation rende régulièrement compte des consultations qu’elle menait
auprès de femmes dirigeantes et d’organisations de femmes en application de la
résolution 2122 (2013) du Conseil (S/PRST/2017/7). J’exprime ma gratitude à la
Suède et à l’Uruguay, coprésidents actuels, qui ont renforcé et élargi le programme
de travail du groupe informel d’experts.
89. En 2016, 38 des 77 résolutions adoptées par le Conseil de sécurité, soit
49,4 %, et 11 des 19 déclarations de son Président, soit 57,9 %, mentionnaient le
rôle joué par les femmes au titre de la paix et de la sécurité. S’agissant des
résolutions, le pourcentage était en baisse par rapport à 2015 (64 %), 2014 (60,3 %)
et 2013 (76,5 %). Toutefois, une étude consacrée aux résolutions qui portaient plus
précisément sur les renouvellements de mandat concernant 25 pays, sur 10 questions
thématiques et sur la lutte antiterroriste, a établi que 74 % d’entre elles
mentionnaient la problématique hommes-femmes et que, d’une manière générale, la
qualité et la précision des libellés examinés avaient progressé dans tous les cas67
.
__________________
61
Voir S/PV.7824.
62
Voir S/2016/673 et S/2016/1059.
63
Voir S/2016/672 et S/2016/1105.
64
Voir S/2016/683 et S/2016/1104.
65
Voir S/2016/682 et S/2016/1103.
66
Voir S/2016/1107.
67
Voir Groupe de travail des ONG sur les femmes et la paix et la sécurité , « Mapping women, peace
and security in the UN Security Council: 2016 », 13 juin 2017. Consultable à l’adresse
S/2017/861
17-18255 30/36
90. Il est primordial que le Conseil de sécurité continue d’accorder une attention
particulière à la question des femmes dans l’optique de la paix et de la sécurité,
quels que soient le pays ou la thématique considérés. Pourtant, des lacunes
subsistent en la matière et j’observe que les questions relatives à l’égalité des sexes
et au rôle des femmes au titre de la paix et de la sécurité continuent d ’être négligées
lorsque surviennent de nouvelles crises, lorsque d’autres s’aggravent ou lorsque le
Conseil se penche sur la lutte antiterroriste ou sur le déploiement de contingents.
Moins de 20 % des résolutions qu’il adopte mentionnent qu’il est important et
nécessaire de garantir la liberté de la société civile, des groupes de femmes et des
défenseurs des droits des femmes68
.
91. En 2016, le Secrétaire général a présenté ou transmis 154 rapports au Conseil de
sécurité. La totalité des 38 rapports périodiques sur les opérations de maintien de la
paix et des 26 rapports périodiques sur les missions politiques spéciales faisaient
mention de la question des femmes et de la paix et de la sécurité, ce qui dénote un
certain progrès69
. Je demande néanmoins à mes Représentants spéciaux et aux
responsables des entités des Nations Unies de continuer à améliorer la qualité de leurs
analyses de la problématique hommes-femmes en relation avec les conflits dans les
rapports qu’ils adressent au Conseil, notamment dans les parties consacrées à
l’évolution politique et à la dynamique des conflits. Il faudra, entre autres, améliorer
la ventilation des données et prendre des mesures ciblées pour tenir compte du point
de vue des femmes qui œuvrent à la consolidation de la paix.
92. Les organes subsidiaires du Conseil de sécurité devraient eux aussi accorder
une plus grande importance à la question des femmes dans l ’optique de la paix et de
la sécurité. Au 30 septembre 2017, la violence sexuelle et sexiste comptait parmi les
critères de désignation de 7 (53 %) des 13 régimes de sanctions70
. Dans sa
résolution 2242 (2015), le Conseil s’est engagé à veiller à ce que les groupes
d’experts relevant des divers comités des sanctions soient dotés des compétences
requises en matière de problématique hommes-femmes. Dans le cas de six des
régimes de sanctions, ces compétences sont apportées par des experts en droit
international humanitaire. S’agissant de deux autres régimes de sanctions, qui
concernent la Libye ainsi que l’État islamique d’Iraq et du Levant (Daech), Al-
Qaida et les personnes, groupes, entreprises et entités qui leur sont associés, de
telles compétences ne sont pas disponibles. Les rapports sur la surveillance de
l’application des sanctions rendus publics font rarement référence au rôle des
femmes dans l’optique de la paix et de la sécurité71
. Le Secrétariat élabore
actuellement à ce sujet un module de formation à l’intention des experts. Il importe
que les organes subsidiaires soient tenus d’intégrer cette question dans leurs
analyses, rapports et décisions, et qu’ils disposent des moyens nécessaires pour ce
faire. J’exhorte les membres du Conseil à accorder priorité et visibilité aux droits
des femmes dans les critères de désignation des régimes de sanctions, et à envisager
d’adopter des régimes de sanctions thématiques pour lutter contre les menaces de
portée mondiale que constituent, par exemple, la violence sexuelle et sexiste en
période de conflit, la traite des êtres humains, les enlèvements et les meurtres ciblés
de femmes et de filles et les violations flagrantes des droits des femmes.
__________________
http://www.womenpeacesecurity.org/resource/mapping-women-peace-and-security-in-the-un-
security-council-2016/.
68
Ibid.
69
Ibid.
70
Il s’agit des régimes de sanctions concernant la République centrafricaine, la République
démocratique du Congo, le Mali, la Somalie, le Soudan, le Soudan du Sud, et contre l’EIIL
(Daech) et Al-Qaida.
71
Voir S/2017/326. Ces questions sont abordées également dans les documents S/2016/73 (Yémen),
S/2017/639 (République centrafricaine), S/2016/805 (Soudan) et S/2017/22 (Soudan).
S/2017/861
31/36 17-18255
93. Je le répète, il est important que, dans le cadre de toutes ses missions de visite,
le Conseil accorde une visibilité plus grande à la question des femmes dans
l’optique de la paix et de la sécurité. En 2016, il a effectué cinq missions extérieures
– au Burundi et en Éthiopie, en janvier; au Mali, en Guinée -Bissau et au Sénégal, en
mars; en Somalie, au Kenya et en Égypte, en mai; au Soudan du Sud et en Éthiopie,
en septembre; en République démocratique du Congo et en Angola, en novembre.
Le rôle des femmes dans l’optique de la paix et de la sécurité était mentionné dans
les activités prescrites au titre de quatre72
de ces cinq missions et il a été cité dans
trois73
des quatre séances d’information tenues par la suite à leur sujet.
94. En 2016, des représentantes de la société civile ont présenté un exposé au
Conseil lors de trois débats publics organisés en mars sur le rôle des femmes dans la
prévention et le règlement des conflits en Afrique74
, en juin sur la traite des êtres
humains et les violences sexuelles liées aux conflits75
, et en octobre sur les mesures
à prendre au titre du rôle des femmes dans l’optique de la paix et de la sécurité76
. Je
me félicite que le Groupe de travail des ONG sur les femmes et la paix et la sécurité
veille à ce que la société civile choisisse elle-même ses orateurs en ce type
d’occasion. En 2016, pour la première fois, le Conseil de sécurité a invité une
représentante de la société civile à prendre la parole devant lui, lors d ’une séance
consacrée au Libéria77
. Au cours des mois qui ont suivi, six autres représentantes de
la société civile et une représentante d’une institution nationale des droits de
l’homme ont présenté des exposés consacrés à leurs pays respectifs devant le
Conseil78
. J’exhorte les membres du Conseil à pérenniser cette bonne pratique en
continuant d’inviter des femmes issues d’organisations de la société civile aux
séances consacrées à un pays en particulier, ce qui lui ouvrira d ’autres perspectives
et lui donnera accès à des analyses plus éclectiques des besoins, des priorités et des
solutions.
95. J’encourage le Conseil de sécurité à prier le Secrétaire général
adjoint/Directeur exécutif chargé d’ONU-Femmes et mon Représentant spécial
chargé de la question des violences sexuelles commises en période de conflit de lui
présenter régulièrement des exposés, notamment sur les observations faites lors des
visites sur le terrain, et de mettre davantage à profit les conclusions sexospécifiques
des commissions d’enquête appuyées par le HCDH, ainsi que les informations et
analyses résultant des réunions du groupe informel d’experts et des organes
conventionnels des droits de l’homme, notamment le Comité pour l’élimination de
la discrimination à l’égard des femmes.
96. J’appelle les membres du Conseil de sécurité à utiliser systématiquement les
informations disponibles au sujet de la question des femmes, de la paix et de la
sécurité lors de leurs délibérations et négociations et à solliciter, dans le cadre de
l’ensemble de leurs consultations, des éclaircissements sur des points spécifiques
auprès de responsables sur le terrain. Je prie instamment le Conseil de veiller à ce
que le rôle joué par les femmes au titre de la paix et de la sécurité soit davantage
reflété dans tous les mandats des missions et que les ressources et les compétences
voulues soient mobilisées pour faciliter des progrès constants à cet égard et en
assurer le suivi.
__________________
72
Voir S/2016/215, S/2016/456, S/2016/757, S/2016/948, mais pas S/2016/55.
73
Voir S/PV.7647, S/PV.7696, S/PV.7819, mais pas S/PV.7615. La mission menée au Soudan du Sud
et en Éthiopie n’a pas donné lieu à une réunion du Conseil de sécurité.
74
Voir S/PV.7658.
75
Voir S/PV.7704.
76
Voir S/PV.7793.
77
Voir S/PV.7824.
78
Afghanistan (S/PV.7896), Bassin du lac Tchad (S/PV.7861), République démocratique du Congo
(S/PV.7903), Somalie (S/PV.7873), Soudan du Sud (S/PV.7906) et Yémen (S/PV.7954).
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Les femmes et la paix et la sécurité : financement de l’action à mener
97. Les conflits et les situations d’urgence réduisent à néant les progrès accomplis
au fil des années en matière de développement, touchant de manière
disproportionnée les femmes et creusant encore les inégalités. En outre, bien
souvent, les coupes budgétaires portent en premier lieu sur les programmes axés sur
l’égalité des sexes et sur les compétences à mobiliser pour les mettre en œuvre, et
de nombreuses entités ne disposent toujours pas de mécanismes d’évaluation des
ressources allouées à la promotion de l’égalité des sexes. Il demeure absolument
indispensable de redéfinir les priorités en matière de dépenses, de coordonner plus
efficacement les instruments de financement et de rechercher des formes novatrices
de financement souple.
98. Dans l’ensemble, les entités des Nations Unies intervenant dans des situations
de conflit et d’après conflit ont davantage recours aux systèmes de classement des
activités par degré de contribution à la promotion de l’égalité des sexes dans le
cadre de leurs programmes. En 2016, le Fonds pour la consolidation de la paix a de
nouveau dépassé l’objectif de 15 % minimum en allouant 19,2 % de sa dotation à la
promotion de l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes, qui figurent
désormais parmi les principaux objectifs qui lui sont assignés. Cette évolution
résulte en partie d’une meilleure prise en compte de la problématique hommes -
femmes et du lancement de deux initiatives novatrices, l’une axée sur la promotion
de l’égalité des sexes, l’autre sur la promotion des jeunes. Pour la première fois, le
Fonds a apporté un appui direct aux organisations de la société civile, stimulant
ainsi la constitution de partenariats et la mobilisation d’autres groupes d’intérêt
propres à favoriser la négociation d’une paix durable, qui tienne compte des
préoccupations des femmes. Compte tenu des succès déjà enregistrés, le plan
d’activité du Fonds de consolidation de la paix pour 2017-2019 prévoit de relever de
15 à 30 % du total les montants alloués à la promotion de l ’égalité des sexes.
99. Les fonds consacrés par le PNUD aux projets ayant pour objectif principal la
promotion de l’égalité des sexes n’ont représenté que 4,5 % du total, comme en
2015, 2014 et 2013, mais toujours moins qu’en 2012 (6 %). Néanmoins, si l’on
prend en compte les projets pour lesquels les questions liées à l ’égalité des sexes
revêtent une dimension transversale importante, on atteint un seuil de 46 %, soit
davantage que l’année précédente (31 %). Bien que le HCR ne dispose actuellement
d’aucun mécanisme de suivi à cet égard, l’analyse des informations fournies par son
système de gestion axé sur les résultats montre qu’il a consacré environ 11 % de la
totalité de son budget de fonctionnement en 2016 à des activités dont l ’un des
principaux objectifs était la promotion de l’égalité des sexes79
. Cette même année,
83 % des dépenses humanitaires de l’UNICEF y ont été consacrées. Compte tenu de
l’accroissement des besoins, les fonds alloués par ONU-Femmes à la promotion de
l’égalité des sexes dans les domaines de la paix, de la sécurité et de l ’action
humanitaire ont continué d’augmenter, atteignant 71,42 millions de dollars en 2016,
dont 58,85 millions consacrés à des programmes en faveur de la paix et de la
sécurité et 12,57 millions à des interventions humanitaires.
100. Il importe également d’augmenter la part de l’aide publique au développement
(APD) sectorielle allouée à la promotion de l’égalité des sexes. En 2015, 19,4 % de
l’APD sectorielle a été allouée à des pays en situation de conflit ou d ’après conflit,
dont 40 % au titre de la promotion de l’égalité des sexes. Mais seuls 5 % du montant
de l’APD sectorielle axée sur les besoins des femmes allouée à ces pays étaient
réservés à un emploi déterminé. Je salue l’engagement du Canada d’allouer, d’ici à
__________________
79
Ce pourcentage englobe toutes les opérations du HCR, et pas uniquement celles qui sont menées
dans des situations de conflit et d’après conflit.
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2021/22, 15 % de la totalité de son aide bilatérale en faveur du développement
international à la promotion de l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes
et des filles, et j’engage tous les États Membres à fixer des objectifs de financement
similaires s’agissant de la promotion de l’égalité des sexes. Je salue également la
nouvelle initiative conjointe de l’Union européenne et de l’ONU, Spotlight, qui
donnera lieu à un investissement de 500 millions d’euros dans la lutte contre la
violence à l’égard des femmes et des filles et encouragera d’autres acteurs à
s’associer à cette démarche.
101. Les engagements d’ordre politique peuvent se traduire par une augmentation
des crédits alloués par des mécanismes de financement commun et, surtout, par
l’accroissement des ressources destinées aux programmes axés sur les femmes et la
paix et la sécurité. Le Women’s Peace and Humanitarian Fund, créé à l’issue de
l’examen de haut niveau de 2015, est un mécanisme décisif en ce qu’il remédie aux
déficits de financement auxquels se heurtent les femmes qui œuvrent en faveur de la
paix. C’est le seul dispositif existant qui ait pour unique objet d’appuyer l’action
menée pour que les femmes jouent un rôle en matière de paix et de sécurité. À ce
jour, ce fonds a permis de venir en aide à des organisations de femmes au Burundi,
en Colombie, dans les Îles Salomon, en Jordanie et dans le Pacifique. Malgré des
résultats notables, les contraintes financières font que certains pays ne peuvent en
bénéficier – 19 des 23 pays remplissant les conditions requises sont dans ce cas.
102. Je me félicite que d’autres fonds mis en place en réponse à une situation de
conflit fonctionnent dans le souci de la problématique hommes-femmes et soient le
reflet des bonnes pratiques en la matière. Dans les pays qui font l ’objet du présent
rapport, 25 fonds d’affectation spéciale pluripartenaires ont été créés depuis 2010.
Le document de base de 23 d’entre eux mentionne la parité des sexes. Pourtant,
seuls trois d’entre eux, à savoir les fonds pour l’Afghanistan, pour la Colombie et
pour la Somalie, ont recours à un système de classement des activités par degré de
contribution à la promotion de l’égalité des sexes. Le fonds d’affectation spéciale de
la Stratégie internationale d’appui en matière de sécurité et de stabilisation
(République démocratique du Congo) et le Fonds commun pour la paix (Myanmar)
s’accompagnent chacun d’un dispositif permettant d’établir un tel classement et
d’allouer les moyens voulus aux programmes de promotion de l ’égalité des sexes.
103. J’appelle les États Membres à accroître les montants qu’ils prévoient pour les
activités axées sur les femmes, la paix et la sécurité, notamment au moyen
d’allocations budgétaires nationales, et à prendre davantage en considération la
problématique hommes-femmes lorsqu’ils apportent une aide en situation de conflit
ou d’après conflit, grâce à un soutien logistique direct à la société civile et au
système des Nations Unies, ou en augmentant leur contribution aux fonds spéciaux
tels que le Women’s Peace and Humanitarian Fund, le Fonds d’affectation spéciale
des Nations Unies à l’appui de la lutte contre la violence à l’égard des femmes, le
Fonds pour l’égalité des sexes, le fonds d’affectation spéciale pluripartenaires de la
Campagne des Nations Unies contre la violence sexuelle en temps de conflit, ainsi
qu’à l’initiative Spotlight. Compte tenu du bilan positif qui est celui du Fonds pour
la consolidation de la paix, grâce auquel il a été possible de financer et de stimuler
l’innovation dans les domaines de la consolidation et de la pérennisation de la paix
tout en tenant compte de la problématique hommes -femmes, j’appelle l’ensemble
des donateurs à reconduire, voire à accroître, leur contribution au Fonds.
104. Sur le modèle des bonnes pratiques que j’ai mentionnées plus haut, je
demande que soit adopté et réalisé l’objectif que j’ai fixé, à savoir que 15 % de
l’ensemble des ressources à la disposition des fonds d’affectation spéciale
pluripartenaires mis en place en réponse à une situation de conflit ou de fragilité
soient alloués à des activités principalement axées sur la promotion de l ’égalité des
sexes et l’autonomisation des femmes. Le suivi des ressources doit s’accompagner
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d’un contrôle renforcé pour que les fonds supplémentaires alloués aux activités de
programme contribuent à améliorer la situation des femmes et des filles. J ’engage
les pays donateurs et les banques de développement à fixer des objectifs tels que des
ressources d’un montant suffisant (par exemple 15 % du total disponible) soient
mobilisées pour financer des activités de promotion de l ’égalité des sexes,
notamment les mesures axées sur la problématique des femmes, de la paix et de la
sécurité.
III. Observations finales et recommandations
105. Chaque jour qui s’écoule sans que nous fassions preuve d’une détermination
encore plus résolue à prévenir ou à faire cesser les conflits donne lieu à une
aggravation des souffrances humaines et de la dégradation de l ’environnement
décrites dans le présent rapport. Or, le chemin vers une paix durable, le
rétablissement de l’état de droit et de la confiance du public, et la mise en place de
solides garanties en matière de droits fondamentaux est souvent long et ardu. Si
chaque situation demande des solutions uniques et créatives, toutes requièrent la
participation et la détermination des femmes, sur un pied d’égalité avec les hommes,
car elles ont démontré qu’elles renforçaient l’efficacité des processus de paix et les
ancraient dans la durée, et qu’elles savaient comment dynamiser le développement
économique et œuvrer pour la prospérité sur le plan social.
106. Depuis 2000, le programme d’action axé sur la problématique des femmes, de
la paix et de la sécurité en est venu à servir de référence. Chacun de ses volets a été
adapté, au moyen de cadres politiques et de plans d’action régionaux et nationaux
idoines, au cahier des charges défini pour les trois examens menés en 2015 au sujet
de la paix et de la sécurité, ainsi que pour le Sommet mondial sur l’action
humanitaire de 2016, le Programme de développement durable à l ’horizon 2030, et
l’examen après 20 ans de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme
d’action de Beijing. Dans ses huit résolutions sur les femmes et la pa ix et la
sécurité, le Conseil de sécurité a dessiné des orientations claires et, dans ses
résolutions thématiques ou portant sur un pays en particulier, il a prescrit des
mesures ciblées, notamment dans les nouveaux domaines d’intervention. Les
organes conventionnels des droits de l’homme tiennent de plus en plus souvent
compte des exigences associées à ce programme d’action lorsqu’ils exercent leur
contrôle. Les cadres et outils de mise en œuvre sont en place. À ce stade, il importe
de renoncer aux initiatives ponctuelles, de portée limitée et centrées sur un projet
unique, pour que la thématique des femmes, de la paix et de la sécurité trouve toute
sa place dans des programmes et des stratégies axés sur la prévention des conflits et
sur l’ancrage de la paix dans la durée, qui soient ambitieux et conduisent à des
transformations aussi radicales que profondes.
107. Tout au long du présent rapport, j’ai mis en relief ma détermination à mettre en
œuvre le programme d’action axé sur la problématique des femmes, de la paix et de
la sécurité, notamment en plaçant la promotion de l’égalité des sexes au cœur de ma
stratégie de prévention et de l’action diplomatique que j’ai menée sur tous les
fronts. Soucieux d’appuyer la refonte complète des modes de fonctionnement au
profit d’une stratégie de prévention coordonnée, audacieuse et intégrée, j ’ai pris
l’engagement de privilégier la médiation, de mettre fin à l ’exploitation et aux
atteintes sexuelles, mais également de promouvoir l ’égalité des sexes à l’échelle de
l’Organisation et ce aux niveaux de responsabilité les plus élevés, notamment
auprès des chefs et chefs adjoints de mission et de mes envoyés spéciaux. Je
m’engage à renforcer l’action menée dans les domaines où les Nations Unies
accusent le plus de retard s’agissant de la représentation et de la participation
effectives des femmes. Je veux parler notamment du maintien de la paix, domaine
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pour lequel j’ai demandé l’élaboration d’une stratégie en propre en consultation
avec les pays fournisseurs de contingents, qui nous permette d’atteindre ceux de nos
objectifs qui demeurent en souffrance.
108. Une analyse de qualité de la problématique hommes -femmes en période de
conflit, adossée à des données ventilées selon le sexe, l ’âge et d’autres critères
pertinents, doit faire partie de toute politique de prévention. Il est frappant qu’après
17 ans de mise en œuvre, les données utiles ne soient pas toujours disponibles et que
les analyses de la problématique hommes-femmes en période de conflit ne soient
pas systématiquement exploitées. Nous devons donc redoubler d’efforts à l’échelle
mondiale pour recueillir des données, définir des indicateurs clefs relatifs aux
objectifs de développement durable et améliorer la ventilation des données selon le
sexe, l’âge et d’autres variables. Nous pourrons ainsi mieux comprendre l’incidence
et les résultats de nos opérations, mais également recenser nos lacunes les plus
importantes. J’engage vivement les États Membres, avec l’appui de l’Organisation
et d’autres acteurs, à renforcer leurs capacités d’évaluation et de mesure, pour
permettre aux femmes de jouer un rôle moteur et d’apporter une véritable
contribution dans l’ensemble des domaines abordés dans le présent rapport,
notamment la médiation, les processus de paix, les forces de maintien de la paix et
la gouvernance, la conception et la mise en œuvre de l’action humanitaire et du
redressement économique, ainsi que dans d’autres champs d’action. J’engage en
outre les États Membres à surveiller les indicateurs d’égalité des sexes au niveau
national. Ceux-ci sont des marqueurs fiables de la résilience, or il existe une forte
corrélation entre la brusque dégradation de la situation en matière de droits des
femmes et un risque accru de conflit.
109. Pour que les femmes prennent l’initiative des efforts de paix et y participent
concrètement, il importe avant tout de renforcer la collaboration avec les
organisations issues de la société civile – en particulier celles qui sont dirigées par
des femmes – et avec les femmes qui œuvrent à la consolidation de la paix.
Les militantes de la paix n’ont pas seulement joué un rôle essentiel dans
l’élaboration du programme d’action, mais elles continuent de porter la
responsabilité de sa mise en place et demeurent aux avant-postes de la prévention
des conflits et de la pérennisation de la paix. Toutefois, comme je l’ai souligné dans
le présent rapport, les violences dont sont victimes les défenseurs des droits des
femmes persistent, l’espace occupé par la société civile ne cesse de se réduire dans
de nombreuses régions du monde, et les possibilités offertes d’apporter un appui
financier et technique direct aux organisations de la société civile demeurent
limitées dans la plupart des cas.
110. Les États Membres et les entités des Nations Unies doivent investir dans des
initiatives gérées localement et collaborer davantage avec les organisations de la
société civile, notamment les organisations locales de femmes, et augmenter les
ressources financières et l’appui direct qu’ils leur procurent. Cette stratégie ne
pourra être fructueuse sans investissement financier significatif dans les domaines
d’activité où il est établi que les résultats seront les plus probants. Comme je l ’ai
indiqué tout au long du présent rapport, les déficits de financement persistants dont
le Conseil de sécurité s’était fait l’écho dans sa résolution 2242 (2015) ne se sont
pas résorbés, voire continuent de se creuser, alors qu’il est pourtant incontestable
que l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes contribuent à l’édification de
sociétés pacifiques et justes, où chacun trouve sa place. Sans mobilisation des
ressources nécessaires, aucun des engagements pris en faveur d’un rôle accru des
femmes au service de la paix et de la sécurité, notamment sous la forme de plans
d’action nationaux et dans le cadre des instruments de financement existants, ne
pourra être tenu.
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111. J’appelle les États Membres à prendre des initiatives de portée mondiale et à
faire montre d’une plus grande détermination sur le plan politique en mobilisant un
appui en faveur d’un rôle accru des femmes en faveur de la paix et de la sécurité, à
l’intérieur comme à l’extérieur de leurs frontières, afin de traduire des engagements
symboliques en actes concrets. L’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes
sont deux conditions préalables de la prévention des conflits, ce sont de puissants
vecteurs de pérennisation de la paix et elles sont indispensables pour que soient
atteints les objectifs de développement durable, notamment les objectifs 5 et 16.
Pour remédier aux causes profondes de la violence sexiste et de l ’inégalité entre les
sexes, nous devons mettre fin à l’impunité et garantir le respect de l’ensemble des
droits de la personne, notamment les droits économiques, sociaux e t culturels de
toutes les femmes, quels que soient leur âge, leur état matrimonial, leur orientation
sexuelle, leur identité de genre, leur race, leur appartenance ethnique, religieuse ou
politique, et qu’elles souffrent ou non d’un handicap. S’agissant du rôle des femmes
en faveur de la paix et de la sécurité, j ’attends de l’Organisation des Nations Unies
qu’elle montre la voie et soit une source d’inspiration.