rendre compte de l’engagement social et environnemental des...
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Rendre compte de l’engagement social et
environnemental des entreprises par les comptes :
Une évaluation du cadre règlementaire OHADA
Résumé
La présente recherche interroge le modèle comptable
OHADA [dans sa forme actuelle], sur sa capacité à
traduire l’engagement sociétal des entreprises. Cette
interrogation s’inscrit en comptabilité dans la
problématique du rattachement ou non du reporting
sociétal au domaine élargi du reporting financier, et
pose le problème du développement d’une
comptabilité unique intégrant aussi bien les
informations financières que les informations
sociétales (approche moniste), ou au contraire le
développement séparé de deux comptabilités
distinctes, l’une étant financière et l’autre sociétale
(approche dualiste) (Antheaume, 1999 ; Ngantchou,
2015 ; Ramanathan, 1976). En appliquant une
démarche de théorisation enracinée (grounded theory)
(Glaser et Strauss, 2009) auprès des entreprises de
l’espace OHADA, il a été possible d’identifier trois
formes de traitement comptable des informations
vertes : l’assimilation des informations vertes aux
informations financières ; l’adaptation du cadre
comptable financier aux opérations vertes ; et le
traitement par omission pure et simple. Ces résultats
soulignent la difficulté du référentiel OHADA à
intégrer les informations vertes, et précisent la
nécessité de construire un cadre comptable pertinent
de comptabilité verte en contexte OHADA.
Mots clés : COMPTABILITE VERTE ;
INFORMATIONS VERTES ; RESPONSABILITE
SOCIETALE DES ENTREPRISES ; GROUNDED
THEORY ; SYSTEME COMPTABLE OHADA.
Abstract
This research questions the accounting model OHADA
[in its current form], its ability to translate the societal
commitment of companies. This questioning is part of
accounting in the issue of the attachment or not of the
societal reporting to the broader field of financial
reporting, and poses the problem of developing a
single accounting integrating both financial
information and societal information (monistic
approach), or on the contrary the separate
development of two separate accounts, one being
financial and the other societal (dualistic approach)
(Antheaume 1999, Ngantchou 2015, Ramanathan
1976). By applying a grounded theory approach
(Glaser and Strauss, 2009) to companies in the
OHADA space, it has been possible to identify three
forms of accounting treatment for green information:
the assimilation of green information to financial
informations; the adaptation of the financial
accounting framework to green operations; and
outright omission treatment. These results highlight the
difficulty of the OHADA framework to integrate green
information, and specify the need to build a relevant
accounting framework for green accounting in an
OHADA context.
Keywords: GREEN ACCOUNTING ; GREEN
INFORMATIONS ; CORPORATE SOCIAL
RESPONSIBILITY ; GROUNDED THEORY ; OHADA
ACCOUNTING SYSTEM.
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Introduction
Cette recherche s’inscrit dans une problématique qui lie la responsabilité sociétale des
entreprises (RSE) à la comptabilité. Cette association est qualifiée de comptabilité sociétale /
verte. Ce concept a été largement abordé dans la littérature scientifique. Toutefois, malgré
l’intérêt qui lui est accordé, ce champ d’étude reste confronté à des difficultés. Comme le
précise Gray (2010) la comptabilité verte manque de cadre théorique et de cadre conceptuel.
Pour pallier ce manquement, de nombreux cadres normatifs offrant des canevas de diffusion
des informations vertes ont été proposés. Ce faisant, malgré les nombreuses solutions
proposées dans la littérature, aucun référentiel ne parvient véritablement à rendre compte de
l’engagement sociétal des entreprises par les comptes. Dans un tel contexte, Comment les
entreprises rendent-elles compte de leur engagement social et environnemental ? Telle
est la question qui fait l’objet de cette recherche. Cette question implique d’identifier les
informations sociales et environnementales concernées, et comprendre comment elles sont
traitées par la comptabilité.
Pour répondre à cette question, la présente recherche procède par une analyse
qualitative au cours de laquelle les entreprises sont observées et questionnées, afin de
comprendre leurs difficultés et essayer de proposer des pistes de solution. Seulement,
contrairement aux études qui se sont basées uniquement sur l’analyse et l’exploitation des
documents financiers comptables fournis par les entreprises (généralement le rapport annuel),
celle-ci interroge d’abord les acteurs, dans l’optique de comprendre comment ils traitent au
quotidien les informations vertes. Pour ce faire, nous nous somme basé sur la démarche de
théorisation enracinée (ou grounded theory). Ainsi, en recueillant la description du vécu des
acteurs qui interviennent dans la procédure de traitement des opérations vertes, nous avons
atteint une compréhension approfondie du phénomène étudié.
Le travail est organisé en deux parties. En premier, nous présentons un état des lieux
de la recherche en comptabilité verte ainsi que la méthodologie adoptée (1). En second lieu,
nous identifions les différentes pratiques de diffusion comptables d’informations vertes
décelées durant l’étude réalisée auprès des entreprises du Cameroun (2).
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1. L’évolution du programme de recherche en comptabilité verte, et le
contexte de l’étude
La montée des considérations sociales et environnementales a résolument orientée le
management vers une nouvelle direction (Freeman, 1994 ; Friedman, 1971). L’idée de
maximisation du profit étant en désuétude, toutes les disciplines du management se retrouvent
profondément impactées par les problématiques du développement durable (Ageron et
Spalanzani, 2010 ; Biwolé Fouda, 2010 ; Christophe, 2003 ; Unerman, 2000). La comptabilité
parmi ces disciplines se doit de s’adapter à cette nouvelle mouvance, dans ce qu’on pourrait
qualifier de démarche proactive (Capron, 2000 ; Petit et Belet, 2013). De nombreuses
entreprises essaient alors de communiquer sur les actions « responsables » qu’elles réalisent
(Alarussi et al., 2009 ; Cauvin et al., 2006), une mission qui n’est pas aisée au regard de la
nature des informations à traiter et à communiquer en direction d’un public de plus en plus
large, hétérogène et exigeant (Gray, 2001 ; Gray et al., 1995 ; Ramanathan, 1976 ; Wood,
1991).
Dans cette section, nous présentons premièrement le programme de recherche en
comptabilité verte, en précisant le positionnement de cette recherche dans cette littérature
(1.1.). Et deuxièmement, nous apportons des précisions sur le contexte de l’étude, ainsi que la
méthodologie utilisée (1.2.).
1.1. La comptabilité verte : un champ de recherche en pleine construction
Avant de présenter le programme de recherche en comptabilité verte et de préciser le
positionnement de cette recherche dans cette littérature, il convient de clarifier au préalable
quelques concepts y relatifs.
1.1.1. Comptabilité verte : un concept sémantiquement floue
La comptabilité verte1 reste un domaine en construction et sujet à de vives polémiques
(Ali et Rizwan, 2013 ; Azizul Islam et Deegan, 2008 ; Bebbington et Gray, 2001 ; Belal et
Cooper, 2011 ; Belal et Momin, 2009 ; Gray, 2001 ; Gray, 2010 ; Gray et Milne, 2002 ;
Haider, 2010). Il semble même que l’intérêt pour ce domaine de recherche contribue à rendre
encore plus ambigüe sa compréhension, suscitant de fait des interrogations sur son devenir.
1 Terme préféré aux autres expressions utilisées pour définir tout système d’information qui va au-delà de la
simple reddition financière.
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Pour Gray (2005), la comptabilité verte n’est pas une activité ou un champ de recherche
organisé et cohérent. C’est un domaine très vaste, mal organisé et hétérogène. A certains
moments, il peut être contradictoire, confus et divergent. Il peut être soit trivial soit profond,
conservateur ou radical.
Cette synthèse sommaire de Gray, rédigée après plus de deux décennies de travaux
consacrés à la construction d’un domaine de recherche, a encore toute sa résonnance
aujourd’hui. Il faut se demander si les partisans du courant critique de la comptabilité n’ont
pas raison quand ils déclarent que la comptabilité verte est l’une des principales sources de
problème de l’organisation du 21ème siècle (Burritt et Schaltegger, 2010 ; Chung et Cho, 2018
; Bebbington et Gray, 2001). Pour cause : les concepts de base restent mal définis (Imbs et
Ramboarison-Lalao, 2013) ; et il n’existe pas toujours de cohérence théorique dans les
recherches (Bebbington et Gray, 2001 ; Gray, 2010 ; Gray et Milne, 2002 ; Gray et al., 1996).
Nous retenons dans le cadre de cette recherche que la comptabilité verte est le champ
de recherche qui étudie la préparation et la diffusion de toute information portant sur
l’engagement social et environnemental des entreprises. Cette définition englobe la
comptabilité verte dans le champ élargi de la comptabilité financière.
1.1.2. Le positionnement de la comptabilité verte par rapport à la comptabilité financière :
une guerre entre l’approche moniste et l’approche dualiste
Un regard analytique de la littérature permet de constater qu’en réalité, le programme
de recherche en comptabilité verte suit une certaine évolution. D’un débat animé autour de
l’appartenance ou non de la comptabilité verte au domaine étendu de la comptabilité
financière (Antheaume, 1999 ; Gray et al., 1987 ; Ramanathan, 1976), la recherche tend à
basculer (sans une véritable conclusion tranchée sur le débat initial) vers l’exploration de
plusieurs voies de recherches (Azizul Islam et Deegan, 2008). La plupart des classifications
antérieures ont présenté l’évolution des travaux portant sur la comptabilité verte sous un angle
historique (ou chronologique) (Nikitin et al., 2008). D’autres ont plutôt distingué les études
normatives et les études explicatives (Oxibar, 2003). Et d’autres encore ont présenté les
études en fonction de la localisation géographique des recherches (Gray et al., 1995).
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L’évolution de la recherche en comptabilité verte2 peut être résumée dans le schéma ci-
dessous.
Figure 1 :L’Evolution du programme de recherche en comptabilité verte
Notes : ISE = informations sociales et environnementales ; PP = parties prenantes
Source : Nos propres soins
Cette recherche se situe dans la « phase 1 » du schéma, sur l’axe de recherche qui
considère que la comptabilité verte est une continuité de la comptabilité financière
(Ngantchou, 2015 ; Antheaume et Teller, 2001 ; Deegan, 2017 ; Degos et al., 2018 ; Tilt, 2018
; Chung et Cho, 2018). Le choix de cette problématique se justifie par le nombre peu élevé de
travaux dans le contexte où se déroule notre recherche (Ndjetcheu, 2013 ; Biwolé Fouda,
2014 ; Ngantchou, 2015 ; Moskolaï et al., 2016).
2 De manière générale, il est possible de recouper l’évolution du programme de recherche en comptabilité verte
dans le temps. Ainsi, la première phase de la recherche irait du début des années 1970 jusqu’au début des années
1990. La seconde phase qui pourrait avoir commencé autour des années 1995 est en cours. Au regard des
incohérences qui existent encore dans les recherches, la question est de savoir si le programme de recherche
continuera à évoluer vers la maturité, ou si au contraire il sera simplement abandonné. Il est important de
préciser qu’en raison sans doute de certaines incohérences dans le programme de recherche, des travaux qui
s’inscrivent dans l’une ou l’autre de ces phases peuvent être identifiées indépendamment de leur époque de
rédaction. Autre précision : il est possible de retrouver des recherches qui empruntent simultanément plusieurs
voies de recherches. Plusieurs autres découpages peuvent être faits, mais l’objectif certes réductionniste de celui-
ci, est de donner une idée générale de l’évolution des débats en comptabilité verte.
Phase 3Objet de la
rechercheDéclinaison les débats Déclinaison Les débats Autres (nouveaux) débats Débats transversaux
Les motivations à diffuser
des ISE
La perception qu'ont les
entreprises ou les PP de la
diffusion d'ISE
la comptabilité verte est
une continuité de la
comptabilité financière
Ce que devraient faire les
organisations pour être
éthiques et responsables
Le lien entre performance
sociale et performance
financière
La diffusion
d'ISE par les
entreprises
Les axes de
recherche
Les voies de
rechercheLa vérification d'ISE
la comptabilité verte est
une comptabilité à part
entière
L'évaluation des coûts
externes
La comptabilisation des
immatériels
L'Evolution et l'analyse critique de
la comptabilité verte
La réaction du marché
suite à la diffusion d'ISE
LE PROGRAMME DE RECHERCHE EN COMPTABILITE VERTEPhase 1 Phase 2
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1.2. La présentation du contexte OHADA et de la stratégie adoptée dans l’étude du
comportement des entreprises en matière de diffusion des opérations vertes
Nous présentons dans un premier temps le contexte OHADA, avant de procéder à la
description de la démarche méthodologique mise en œuvre dans cette recherche.
1.2.1. La pertinence du contexte OHADA pour l’étude du comportement des entreprises en
matière de diffusion des opérations vertes
L’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires en abrégé
OHADA est un organisme qui regroupe une vingtaine de pays d’Afrique Subsaharienne. Le
Système Comptable OHADA (SYSCO ou SYSCOHADA), est le référentiel comptable en
vigueur dans ces pays. Ce référentiel qui est en réalité un produit hybride obtenu de la
réconciliation entre les modèles « européen continental » et « anglo-saxon » (Ngantchou,
2012), a connu récemment un nouvel acte uniforme (Takafo-Kenfack, 2018). Contrairement
aux précédents actes uniformes qui sont resté silencieux sur les questions de RSE, les
innovations contenues dans la nouvelle mise à jour du référentiel SYSCOHADA abordent de
manière explicite ces problématiques. Dans cet ordre d’idées, le nouveau SYSCOHADA
souligne la nécessité pour les entreprises opérant en Afrique Subsaharienne, de rendre compte
de la gestion qu’elles font des hommes et de l’environnement. Pour cela, le SYSCOHADA
met à la disposition des entreprises une batterie d’outils calquée sur le modèle des IAS-IFRS.
La présente étude est menée durant la période de transition entre l’ancien et le nouvel
acte uniforme. Elle a pour avantage d’identifier les informations vertes, et de comprendre le
traitement que les entreprises ont réservé à ces informations. Cette étude porte sur un
échantillon d’entreprise dont les caractéristiques méritent d’être de précisées.
La population d’étude et la mise en œuvre des protocoles de recherche
Dans cette étude [comme c’est généralement le cas dans la plupart d’études qui
utilisent la démarche de théorisation enracinée], les différentes étapes de la recherche ne
suivent pas un processus séquentiel, mais sont plutôt organisées de manière parallèle
(Lejeune, 2014). Ces différentes étapes (problématiser ; collecter ; analyser ; rédiger)
interviennent tour à tour de manière imbriquée, dans un processus itératif. Il est par
conséquent difficile au moment du rendu, de présenter de façon indépendante chacune de ces
étapes. Sinon, pour une clarté de l’exposé, un effort est fait de séparer ces différentes étapes,
et de présenter une synthèse obtenue à la fin de l’analyse des données.
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Les différentes unités d’analyse sont représentées par les entreprises et l’ensemble des
acteurs observés durant la recherche. La stratégie a consisté principalement à profiter du
réseau relationnel pour avoir accès aux entreprises. Au total, 18 entreprises et organismes
(ONG, Organismes ministériels, société civile) ont été abordés. 32 entretiens ont été menés, et
plusieurs documents, archives, images, audio, et données internet ont été utilisés. La
recherche s’inscrit résolument dans une démarche de révélation. Les données collectées lors
des enquêtes ont été analysées. Les étapes de cette analyse sont décrites dans la sous-section
suivante.
1.2.2. La stratégie utilisée pour étudier le comportement des entreprises en matière de
comptabilité verte
La démarche utilisée pour étudier le comportement des entreprises de l’espace
OHADA en matière de comptabilité verte est la méthode de théorisation enracinée (MTE),
plus connue sous le nom de grounded theory. L’analyse commence avec la collecte des
premières données. Ensuite, la collecte de données additionnelles est guidée par les concepts
qui émergent des précédentes données. L’analyse des données se fait suivant trois niveaux de
codages que sont : le codage ouvert, le codage axial et le codage sélectif.
Dans la première phase de codage appelée codage ouvert, l’ouverture a plusieurs
significations. Il s’agit à la fois d’être ouvert aux matériaux de recherche, mais également
d’avoir une certaine ouverture d’esprit. L’approche préconisée consiste à casser, à
défragmenter et à segmenter le texte pour s’intéresser aux données de façon microscopique.
Dans la phase du codage axial, l’objectif consiste à rassembler les codes mis au point
dans la première étape. La logique diffère de celle du codage ouvert. Il s’agit cette fois de
rassembler et d’étoffer les propriétés des codes. Ces codes deviendront des catégories que l’on
pourra décliner en sous-catégories. Dans cette phase, les concepts se dévoilent, et il est alors
nécessaire d’établir des comparaisons systématiques entre les différentes catégories.
Dans la dernière phase (codage sélectif), l’ensemble des codes issus de la précédente
étape doit être rassemblé en une seule catégorie centrale.
Au regard du nombre important des données collectées, l’analyse a été réalisée avec le
support d’un logiciel spécialisé : ATLAS TI. Ce logiciel spécialisé offre des outils qui
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facilitent l’organisation et l’analyse des données, tout en conservant les données de manière
méthodique.
A l’issue de cette analyse, il a été possible d’identifier non seulement les opérations
vertes prédominantes en contexte OHADA, mais aussi de mettre en évidence la divergence
des pratiques de diffusion des ISE dans cet espace géographique.
2. La comptabilisation des informations vertes en contexte OHADA : La
diversité des pratiques déployées
La mise en œuvre des protocoles méthodologiques de cette recherche a permis
d’identifier trois pratiques de comptabilisation des informations vertes. Nous présenterons
d’abord les informations vertes identifiées à l’issue de l’analyse des données par codage
(2.1.), avant de procéder à la présentation des résultats (2.2.).
2.1. Les informations vertes identifiées
L’analyse des données révèle que les entreprises du Cameroun engagent de
nombreuses actions pour contribuer au bien-être non seulement de leurs employés, mais aussi
des collectivités environnantes. Ces informations ont été réparties en de petits groupes en
fonction de leur nature. On distingue ainsi des informations portant sur les actions sociales de
l’entreprise (2.1.1.), le contrôle de la qualité des produits (2.1.2.), la gestion des déchets et des
effluents, la pollution et les dommages causés par les entreprises, et les initiatives de
protection de l’environnement (2.1.3.). Parmi ces actions, il y a certaines qui sont exigées par
la règlementation en vigueur, et d’autres qui sont purement à l’initiative des entreprises.
2.1.1. Les informations concernant les actions sociales de l’entreprise
De toutes les informations vertes identifiées durant la recherche, les actions sociales
des entreprises constituent l’essentiel de la communication. Elles sont de plusieurs natures ; le
tableau ci-dessous résume ces informations.
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Tableau 1 : Les actions sociales de l’entreprise
Actions sociales de l’entreprise Pour l'entreprise responsable, participer au développement de sa région, faire des dons, former son personnel
et lui proposer des couvertures sociales, sont des actions qui font partie de sa mission sociale.
Catégories Informations vertes Commentaires
Assurances et
prévoyance
sociale
"assurance maladie"
"protection des travailleurs"
"assistance femmes enceintes"
"prévoyance sociale"
"congés de maternité"
"assistance invalidité et retraite du
personnel"
L'entreprise responsable fait des
efforts pour respecter les
conventions collectives de travail.
Elle dispose aussi généralement
d'une politique interne d'assurance
pour couvrir ses employés et leurs
familles.
Dons et libéralités "don à l'Hôpital"
"don accordés à la demande"
"don aux lionnes indomptables"
"don à l'église"
l'entreprise responsable fait
beaucoup de dons (aux hôpitaux,
aux églises, pour primer l'excellence
jeune etc.). Le don peut être le fruit
de l'initiative libre de l'entreprise,
ou la réponse à un cri de cœur.
Formation du
personnel et
promotions
"respect de la parité"
"favorable au recrutement des handicapés"
"formation du personnel"
"gestion des compétences"
"sport inter entreprise"
"emploi sous-traitants"
"action sociale : recrutement au mérite"
"amélioration des conditions de travail"
"information du personnel et climat social"
L’entreprise qui forme son
personnel contribue à son
épanouissement. Par ailleurs,
informer les employés sur les
mécanismes de prélèvement
sociaux, permet de réduire les
tensions et d'améliorer le climat
social.
Participation au
développement
rural
"offre gratuite d'eau et d'électricité"
"réponse aux besoins des populations"
"actions volontaires (aide aux populations)"
"développement rural"
"eau potable gratuite pour populations"
"action sociale : sponsoring"
L'entreprise responsable participe
au développement de sa zone
d'implantation en comblant les
besoins primaires des
communautés environnantes, et en
soutenant leurs initiatives.
Source : Nos propres soins
2.1.2. Les informations sur le contrôle de la qualité des produits
En marge des informations sur les actions sociales de l’entreprise, il y a également les
informations sur le contrôle de la qualité des produits répertoriées ci-dessous.
Tableau 2 : les informations sur le contrôle de la qualité des produits
Le contrôle de la qualité des produits Catégories Informations vertes Commentaires
Contrôle
qualité
"contrôle, qualité des matières non recyclée"
"contrôle, systématique des matières premières"
"contrôle, qualité constant"
"contrôle, qualité du gerbage"
"contrôle, outils de contrôle qualité"
"contrôle, tests mécaniques"
le contrôle de la qualité des
produits intervient tout au long
du processus : avant, pendant et
après la commande et la
livraison. aussi bien en
entreprise que chez le client
Source : Nos propres soins
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2.1.3. Les informations au sujet de la gestion des déchets et des effluents
Nous avons également identifié des informations sur la manière dont les déchets et les
effluents sont gérés, ainsi que les dispositions prises par les entreprises pour gérer les cas de
pollution et contribuer à la protection de l’environnement.
Tableau 3 : les informations sur la gestion de l’environnement
La gestion de l’environnement Catégories Informations vertes Commentaires
La gestion des
déchets et des
effluents
"recyclage des huiles"
"recyclage des gâtés de production"
"gestion spécifique des déchets"
"gestion des fumées et des nuisances sonores"
"gestion des gaz"
"gestion des effluents"
"gestion des déchets par sous-traitance"
"gestion des déchets"
les déchets produits par les
entreprises diffèrent en fonction
du secteur d'activité. On peut
distinguer les déchets ménagers
des déchets liés à la production
elle-même.
La gestion des
pollutions et des
dommages
"pollutions diverses (compte pertes)"
"destruction de biens"
"coût de pollution (frais juridiques)"
"gestion des dommages aux clients"
Les cas de pollution sont traités
différemment en fonction de leur
nature.
La protection de
l’environnement
"ISE : protection de l'environnement"
"réparer la pollution"
"prise en compte des générations futures
"coût de pollution (frais juridiques)"
"accident de travail"
"destruction de biens"
"pollutions diverses (compte pertes)"
"gestion des dommages aux clients"
Une fois terminée l'expertise
environnementale, l'entreprise
doit proposer des solutions pour
résoudre les problèmes qu'elle
pourrait causer aux écosystèmes.
Source : Nos propres soins
Finalement nous remarquons que bon nombre de ces informations sont déjà prises en
compte par le référentiel OHADA. Néanmoins, la quasi-totalité de celles-ci concerne les
charges engagées par l’entreprise pour contribuer au développement durable. Les produits
issus de cette prise en compte étant l’apaisement des tensions sociales, l’acceptation de
l’entreprise, la motivation des salariés, le soutien du gouvernement, et même la fidélisation
des gros clients… Après avoir répertorié les informations vertes, voyons dès à présent
comment elles sont prises en compte et diffusées par la comptabilité.
2.2. Le traitement comptable des informations vertes en contexte OHADA
L’analyse des données a permis d’identifier trois modes de traitement des informations
vertes en contexte OHADA. Le traitement par assimilation aux opérations financières (2.2.1.),
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le traitement par adaptation des comptes (2.2.2.), et le traitement par omissions pure et simple
(2.2.3.).
2.2.1. Le traitement par assimilation aux opérations financières
Les informations vertes sont généralement comptabilisées dans des comptes de charge.
Mais il y en a aussi qui sont activées, ou encore constituent des immobilisations. C’est le cas
de la construction des forages et des points d’eau par l’entreprise, pour que les populations
riveraines viennent s’y approvisionner tout à fait gratuitement. Nous présenterons ici le cas
des informations vertes assimilées à des opérations financières, et nous prendrons soin de
préciser la logique de comptabilisation de ces informations.
Les opérations vertes activées / inscrites au bilan
Les entreprises procèdent souvent à des constructions dédiées à servir les populations
riveraines. L’exemple ci-dessous extrait d’un interview en est une illustration :
« Actuellement, un forage est en train d’être construit. La politique de la maison c’est que chaque fois
ou on installe une section, si c’est dans les localités, et cette localité a peut-être des problèmes d’eau et
d’électricité, il y a toujours et toujours un forage qui est accompagné. »
De telles constructions sont dédiées entièrement à assouvir les besoins des
populations. Sans être des dons, ces ouvrages restent à la charge de l’entreprise (entretiens,
réparations, amortissements …) et font partie de son actif immobilisé.
Le respect des principes et des pratiques comptables de l’OHADA
A la fin des interviews, nous avons demandé aux comptables s’ils ont des supports
comptables pour diffuser les informations sociales et environnementales. La réponse a été
généralement « non ». En effet, Les comptables ont évoqué l’impérativité de se conformer
aux normes comptables et fiscales en vigueur. De telles communications pour eux, ne seront
possibles que si la loi l’oblige expressément. Voici en guise d’illustration la réponse donnée
par un comptable :
« Non. Des supports comptables non. En comptabilité on travaille beaucoup plus sur la base des
dispositions fiscales et comptables. Jusqu’à présent, à moins qu’on ne soit pas au courant, mais il n y a pas de
dispositions fiscales ou comptable qui nous impose de faire une communication financière sur ces éléments. On
s’en tient ici, aux textes qui régissent la profession. »
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Ainsi, malgré la difficulté à comptabiliser et à diffuser les informations vertes, le plus
important pour les comptables est de respecter au mieux les lois comptables, en traduisant par
les chiffres le plus grand nombre d’informations possible.
« Nous on s’occupe des chiffres. Quand les factures arrivent à notre niveau, on essaie d’adapter, en fait
d’orienter la facture dans le compte approprié. De telle sorte que les soldes intermédiaires de gestion vont
refléter au mieux, la réalité de l’entreprise »
Après avoir identifié les informations vertes et décrit la manière dont elles sont
souvent assimilées à des opérations financières, nous apporterons des précisions sur les autres
manières de traiter ces informations.
2.2.2. Le traitement par adaptation des comptes financiers
La comptabilisation des opérations vertes se révèle comme un véritable défi pour les
entreprises. En dehors des informations dont les comptes sont clairement précisés dans le plan
des comptes OHADA (charges du personnel en occurrence), les comptables éprouvent des
difficultés à comptabiliser les informations vertes. Dans cette recherche, il ressort que les
comptes utilisés sont fonction de la nature et/ou de la destination des opérations identifiées.
Le SYSCOHADA permet donc une extension horizontale des comptes. Cette règle donne la
possibilité aux comptables de créer à partir des comptes existants, des sous comptes dédiés à
la comptabilisation des opérations vertes. Neuf (09) groupes de compte sont généralement
utilisés pour cette extension.
La comptabilisation des opérations vertes dans les comptes dédiés aux charges
d’achats et services
Par charges d’achats et services, nous entendons toutes les charges résultant des
procédures d’achats de marchandises/matières premières/services… Les comptes dédiés à la
comptabilisation de ces opérations se réfèrent à l’enregistrement exclusif des opérations liées
au processus d’achat comme illustré dans l’extrait de l’acte uniforme OHADA ci-dessous.
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Figure 2 : extrait du compte Achats selon l’AUDCIF
Source : AUDCIF3 JO_OHADA du 15 février 2017 p.433
Nous avons remarqué que les opérations destinées à garantir la qualité des produits se
retrouvent enregistrées dans ces comptes, pourtant ces opérations ne sont pas toujours liées au
processus d’achat. La comptabilisation des opérations relatives au contrôle de la qualité des
produits posent ainsi un réel problème aux comptables.
En effet, certaines entreprises engagent volontairement des initiatives pour garantir la
bonne qualité des produits comme l’illustre cet extrait de retranscription de notre journal de
bord :
« Euh …le laboratoire de référence que nous avons au Cameroun c’est…le centre pasteur. On a les
résultats qui atteste de la qualité de nos produits…ces résultats rassurent davantage le consommateur. Par
ailleurs, nous avons décidé d’aller au delà du centre pasteur. On a donc fait appel aux laboratoires privés pour
contre-expertise...).
De cet extrait, il apparait clairement que les comptables n’éprouvent aucun mal à
décrire leurs engagements sociétaux. Le malaise nait lors la traduction comptable de ces
engagements. Certains comptables se retrouvent même embarrassés par ces questions
puisqu’ils ne se rappellent pas toujours des comptes utilisés pour enregistrer ces opérations.
Nous pouvons lire cet embarras dans la réponse donnée par le même chef service financier
évoqué dans la retranscription précédente, lorsque nous lui avons posé la question de savoir
comment il enregistre les informations liées au contrôle de la qualité de ses produits :
« Ces…ces couts ca entre dans heu…le compte études et recherche parce que c’est…ca constitue pour
nous… les couts de la recherche qu’on fait pour standard…standardiser notre…nos produits et…c est…le
compte de charge des 60 …,61… ».
3 Acte Uniforme relatif au Droit Comptable et à L’information Financière (AUDCIF), Journal officiel de
l’OHADA du 15/02/2017.
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Finalement, dans l’embarras le responsable financier nous informe que les opérations
destinées au contrôle de la qualité des produits sont enregistrées dans les comptes d’achat
(compte 60), ou dans les comptes destinés au transport (compte 61).
De même, comme pour le contrôle de la qualité des produits, l’enregistrement des frais
relatifs au traitement des déchets n’est pas aisé. Le traitement des déchets étant souvent fait
par des incinérateurs électriques, les opérations y relatives sont directement incorporées dans
le coût de l’électricité comme le précise l’enquêté ci-dessous :
« -ca entre dans le cout de production. Généralement les…le cout que ça supporte c’est l’électricité.
C’est automatisé donc c’est c’est…et les moteurs étant associés ce n’est pas évident de mettre un compteur pour
le traitement, pour avoir…pour affiner l’information. »
La comptabilisation des opérations vertes dans les comptes dédiés aux charges des
rapports avec employés
Après avoir identifié les problèmes posés par la comptabilisation des opérations liées
au traitement des déchets et au contrôle de la qualité des produits, nous abordons maintenant
le cas des informations relatives aux rapports qu’entretien l’entreprise et son personnel. C’est
notamment les informations relatives aux conditions de travail (salaires, assurances,
cotisations sociales…). Pour la plupart de ces informations, OHADA prévoit déjà des
comptes dédiés (comptes 66). Cependant, pour des informations comme la création d’emploi
par l’entreprise, l’emploi des personnes handicapés ou défavorisées, il est difficile de les
traduire en termes monétaires. Les comptables répondent que la masse des charges liées au
personnel traduit toutes ces informations, mais qu’il est difficile d’en isoler chacune.
La comptabilisation des opérations vertes dans les charges des rapports avec les tiers
Les tiers de l’entreprise sont constitués de l’ensemble des acteurs avec lesquels cette
dernière interagie ; on peut citer les clients, les fournisseurs, les employés, etc. Les
informations vertes relatives aux rapports que l’entreprise entretien avec ses tiers sont de
diverses natures (communication sociale ; conditions de travail ; étude d’impact
environnemental ; publicité sociale et environnementale ; traitement des déchets ; audit
environnemental ; gestion des dommages aux clients).
C’est au niveau de la comptabilisation de ces informations qu’on décèle une réelle
cacophonie. En effet, les informations de même nature se retrouvent dans des comptes
15
différents d’une entreprise à une autre. Nous avons essayé de résumer les comptes dédiés à
l’enregistrement de ces informations dans le tableau ci-dessous4
Tableau 4 : les comptes de charge des tiers dédiés à la comptabilisation des
informations vertes
La comptabilisation des Informations Vertes Catégories Comptes dédiés aux informations vertes Commentaires
Charges des
rapports aux tiers
(62)
*compte : communication sociale (compte
journaux 62)
*compte : communication sociale (frais de
publicité 62)
*compte : condition de travail (assurance
maladie-62)
*compte : étude d'impact environnemental
(frais d'études et de recherche)
*compte : étude d'impact environnemental
(frais d'études et de recherches)
*compte : étude d'impact environnemental
(frais d'inspection mine)
*compte : étude d'impact environnemental
(honoraires d'experts)
*compte : publicité sociale et
environnementale (frais de publicité)
*compte : traitement des déchets (compte 62-
entretien et réparation du matériel électrique-)
Charges des
rapports aux tiers
(63)
*compte : agent d'inspection (compte 63)
*compte : audit et étude d'impact (63)
*compte : audits environnementaux (frais
d'étude et de recherche)
*compte : audits environnementaux (frais
d'étude et de recherche)
*compte : bureau Veritas (compte 63)
*compte : dépenses environnementales
(compte honoraires-63, 62 ou 61)
*compte : étude d'impact environnemental
(charge, soit 62 ou 63)
*compte : étude d'impact environnemental
(compte 63-fonds spécial du développement
forestier)
*compte : étude d'impact environnemental
(compte 632440-honoraires techniques)
*compte : fonds spécial (compte 63)
*compte : frais d'inspection sanitaire (compte
63)
*compte : gestion des déchets (services
extérieurs : 62 ou 63)
4 Le fait de retrouver des opérations relatives aux rapports que l’entreprise entretien avec ses employés
dans le tableau récapitulatif ci-dessous n’est pas de la redondance, mais traduit plutôt la disparité des pratiques
de comptabilisation qui existe entre les entreprises.
16
*compte : gestion des dommages aux clients
(compte 63)
*compte : inspection (compte 63)
Source : nos propres soins
La comptabilisation des opérations vertes dans les charges diverses
Les autres charges qui ont pour nature d’être des dons ou des libéralités de toutes
natures sont comptabilisées dans les comptes dédiés aux charges diverses. Le même
traitement est réservé aux opérations que les comptables n’arrivent pas à rattacher à un
compte particulier.
Tableau 5 : les comptes de charge diverses utilisés pour la comptabilisation des
opérations vertes
La comptabilisation des Informations Vertes Catégories Comptes dédiés aux informations vertes Commentaires
Charges diverses
(65)
*compte : aide citoyenne (compte 65-dons-)
*compte : autres charges
*compte : don (compte don)
*compte : don (pourboires et don-65)
*compte : don aux lionnes indomptables (don)
*compte : filtres usés (charges diverses)
*compte : pollution de véhicule (pertes diverses)
Source : nos propres soins
La comptabilisation des opérations vertes dans les charges liées au transport des
produits
Comme nous avons observé plus haut, les comptables confrontés à la difficulté de
choisir un compte approprié pour certaines opérations vertes, choisissent de les loger dans des
comptes qui ne traduisent pas toujours la nature de ces opérations. Le tableau ci-dessous
résume les opérations vertes que les comptables ont intégrées parmi les frais de transport.
Tableau 6 : la comptabilisation des informations vertes dans les comptes de
charges de transport
La comptabilisation des Informations Vertes Catégories Comptes dédiés aux informations vertes Commentaires
Charges liées au
transport (61)
*compte : défaut de qualité (frais de transport
61)
*compte : enlèvement des déchets (compte
transport 61)
*compte : traitement des déchets (compte
transport 61 -frais d'enlèvement des déchets)
Source : nos propres soins
17
Après la présentation du cas de l’adaptation des comptes financiers à l’enregistrement
des informations vertes, passons à présent à la présentation du traitement comptable réservé
aux informations qui se prêtent difficilement à la quantification monétaire.
2.2.3. Le traitement par omission pure et simple
Nous abordons maintenant une catégorie atypique d’informations vertes. Elle est
atypique puisque nous n’avons pas pu déceler clairement la manière dont les informations
vertes concernées ont été traitées par les comptables. Ce sont des informations dont la
quantification monétaire s’avère complexe.
Les opérations vertes ignorées ou difficiles à comptabiliser
Les informations vertes qui ne parviennent pas à être comptabilisées sont tout
simplement ignorées. C’est par exemple le cas des informations sur le défaut de qualité des
produits :
« Oui, généralement quand il y a défaut de qualité, ça ne va pas au contentieux. Quand le client
retourne, si c'est non conforme, ça peut être pris comme déchet, ou on peut broyer et utiliser pour fabriquer un
autre produit. Donc ça ne nous engage pas des frais... ».
L’interviewé ne se rend pas compte que ce retraitement induit les frais
supplémentaires.
Dans une autre entreprise, un comptable justifie le fait de ne pas dédier un compte au
traitement des déchets par la difficulté à isoler le coût relatif cette opération :
« Le traitement des déchets est…ne nécessite pas (…) des couts supplémentaires. Euh…vous allez voir
peut être la…la chaudière. Elle est faite de telle manière que, elle traite elle-même ses déchets. La fumée qui
devait repartir vers le haut est bloquée avec un système définit à l’ avance ce qui fait cette fumée se condense à
un niveau devient la cendre. On a juste un endroit où on recueille cette cendre et on utilise pour l’agriculture.
Mais on n’a pas une institution ou une structure qui vient et apprête…et influence sur le traitement de nos
déchets qui…pour entrainer des couts supplémentaires. Bon maintenant en terme…de manière financière ce que
vous voulez savoir est ce que il y a des couts ainsi de suite? Je redirai, il y a toujours des couts, mais des couts
qui sont tellement… comment je peux dire …Infimes que les calculer ce serait…doit couter plus cher que de ne
pas les calculer. Si on veut se renseigner dans un système de comptabilité analytique pour voir peut être la
consommation électrique de ce traitement supplémentaire de nos déchets ca a un cout très élevé donc on préfère
globaliser ça dans… le cout de traitement du produit pour amoindrir les charges de travaux. »
18
Cette analyse montre que les informations vertes posent un réel problème
d’identification, et de comptabilisation. La sous-section suivante essaie d’expliquer les choix
opérés par les comptables en contexte OHADA pour le traitement des informations vertes.
La présentation du scénario central de la recherche
A la fin des analyses menées durant cette recherche, il ressort que de nombreuses
informations sociales et environnementales se retrouvent dans les états financiers, mais ne
sont pas toujours visibles. Ces informations sont le plus souvent intégrées et oubliées dans des
comptes qui ne sont pas toujours adaptés. Par contre, certaines opérations qui font l’objet d’un
traitement particulier sont retrouvées avec aise. Ce sont des opérations à caractère
exceptionnel, qui font l’objet d’une réadaptation ou d’une incorporation dans des comptes
spéciaux. On peut noter ici la création d’un compte « frais et inspection mine », pour
comptabiliser toutes les opérations relatives aux études d’impact environnementaux.
Le processus de comptabilisation des ISE peut être représenté par le schéma suivant :
19
Figure 3 : La comptabilisation des informations vertes en contexte OHADA
Source : nos propres soins
Ainsi, en étudiant la diffusion comptable des informations vertes dans les entreprises
soumises au régulateur OHADA, nous avons réalisé une évaluation indirecte du
SYSCOHADA. Il ressort que le SYSCOHADA autorise l’extension horizontale des comptes
et l’adaptation des libellés en fonction des spécificités des opérations et des entreprises. Cette
flexibilité donne aux comptables la latitude de créer des sous comptes destinés à
l’enregistrement de certaines opérations spécifiques. Seulement, les masses de comptes
contenues dans les états financiers sont standardisées, et ne donnent pas de marge de
manœuvre aux entreprises pour distinguer les opérations vertes des opérations financières
classiques. Et, dans l’analyse du résultat à partir des soldes de gestion, il n’y a pas de
disposition proposant des agrégats d’évaluation de la performance sociétale des entreprises.
20
Conclusion
La présente étude avait pour finalité d'évaluer le référentiel actuel, sur sa capacité à
intégrer et à traduire la responsabilité sociétale des entreprises. Refusant la logique classique
de vérifier une théorie en partant des données secondaires disponibles, cette étude a opté pour
une démarche inductive permettant de comprendre le comportement des acteurs et de révéler
les pratiques de diffusion des informations vertes. La grounded theory ou méthode de
théorisation enracinée a été pour celà très utile, car son application a permis d'identifier les
informations vertes dans les entreprises du Cameroun et de comprendre ensuite le traitement
comptable réservé à ces informations (collecte, codification et diffusion). Compte tenu de
l’incapacité du système comptable actuel à traduire de façon comptable l’engagement sociétal
des entreprises, ces dernières ont développés trois (03) stratégies de traitement des
informations vertes : il s’agit du traitement par assimilation ; du traitement par adaptation ; et
du traitement par omission pure et simple. De ce fait, même si le SYSCOHADA a récemment
apporté des innovations permettant à [certaines catégories] d’entreprises de renseigner [un
certain nombre] d’informations vertes, il n’en demeure pas moins vrai que la forme de
communication proposée est loin d’être comptable. Au regard de ces limites du
SYSCOHADA à rendre compte de l’engagement social et environnemental des entreprises, il
n’est pas exclu que nous assistions très prochainement à une autre mutation radicale et brutale
de l’acte uniforme. Cette recherche ouvre alors des perspectives à d’autres recherches. A cet
effet, des travaux futurs pourront partir des ISE identifiées pour proposer un modèle de
comptabilité verte dans ce contexte.
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23
Annexe 1 : Le groupe de répondants
Entreprises et organisations
Secteur d’activité
Types de données
Personnes rencontrées
Durée (minutes) Lieux
MINEPDED5 Etat Interviews Délégué régional 22 Bureau Archives Chef service DD 62 Bureau Notes Chef service
Environnement 27 Bureau
SABC6 Multinationale Rapports Auditeur interne 15 Bureau Entretien Comptable 7 Bureau Internet Site Internet SABC
BOCOM PETROLEUM
Distribution de produits pétroliers
Interviews Directeur des RH 25 Bureau Images Responsable DD 35 Bureau Audio/Vidéo Chef Comptable 125 Bureau Stage comptables (02) 120 Bureau Internet Directeur (Actionnaire) 45 Bureau
BOCOM INTERNATIONAL
Recyclage Interviews Responsable DD 20 Bureau Interviews Directeur Général 18 Salle de conférence
IARSE(GICAM)
PLASTICAM Industrie Plastique Interviews Chef Qualité 25 Bureau Internet Chef HSE 17 Bureau Chef comptable 35 Bureau Comptables (03) 35 Bureau
UNILEVER Multinationale Audio DG 11 Entretien télévisé (France 24)
Cabinet BERIOT Cabinet d’expertise environnementale
Interviews DG 20 Salle de conférence (locaux du cabinet)
IARSE7 Cabinet d’expertise RSE
Interviews DG 20 Restaurant IARSE(GICAM)
Audio Chefs d'entreprises (08) 160 Salle de conférence IARSE(GICAM)
DEE-PLAST Industrie plastique Interviews DG 15 Salle de conférence
IARSE(GICAM) Chef HSQE 25 Salle de conférence
IARSE(GICAM)
SAAGRY (HUIL'YOR)
Industrie agro-alimentaire
Interviews Chef Service Financier 56 Bureau Directeur des RH / Sous-Directeur 30 Salle de conférence
(locaux de l'entreprise) FAC (TAMPICO)
Industrie agro-alimentaire
Interviews DRH 30 Bureau Auditeur interne 60 Bureau
SEFECAM Exploitation forestière
Interviews Chef HSQE 60 Bureau Rapports Comptable 15 Bureau
SIENCAM Exploitation forestière
Interviews Chef HSQE 60 Bureau Archives Comptable 15 Bureau
Source : nos propres soins
5 Ministère de l’Environnement, de la Protection de la nature, et du Développement Durable
6 Société Anonyme des Brasseries du Cameroun
7 Institut Afrique RSE