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  • RECHERCHESREGIONALES

    ---

    Alpes-Maritimes

    et

    Contres limitrophes

    SOMMAIRE25e anne

    Lglise luthrienne de Menton par Charles DELORMEAU p. 2

    1984 N1

    Janvier - mars

    Gnalogie et carrire de Joseph de Sabran(1702-1775), comte de Grammont et deBeaudinar, lieutenant-gnral des armes par Michel VERGE-FRANCESCHI p. 7

    87

    Les frres Honor et Antoine Grinda par Mgr Denis GHIRALDI p. 26

    Les lections lgislatives de 1924 Nice vuespar un journal local dextrme-droite par Nadine BOVIS p. 43

    Lhygine dans les Alpes-Maritimes daprs lesrapports du Conseil gnral : 1919-1929 par Nadine BOVIS et Hlne MONTAGNE p. 51

  • 2

    L'EGLISE LUTHERIENNEDE MENTON

    par Charles DELORMEAU

  • 3

    Aprs Nice et Cannes, Menton devint ds le milieu du XIXe sicle un lieu de sjourhivernal. C'est aussi un Anglais, le docteur J.H. Bennett qui, arriv gravement malade en 1859et y ayant recouvr la sant, fut l'origine du succs de la station dont plusieurs mdecinsavaient dj vant les vertus curatives du climat. Il fut bientt imit par beaucoup de sescompatriotes puis par des ressortissants de tous les pays d'Europe et mme d'ailleurs. Aprsles Britanniques, qui formaient la majorit, venaient les Franais, les Allemands, les Russes,les Amricains, etc

    Cette colonie internationale, dont l'effectif tait pass de 67 familles pendant l'hiver1858-1859 594 pendant celui de 1869-1870, diminua naturellement pendant la guerre de1870-1871, en raison surtout de la dfection des Allemands, mais ceux-ci revinrent ds lasaison suivante au nombre de 172 familles (1).

    C'est leur intention que, lors de ses sjours dans la station, le pasteur alsacien EugneMngoz (2) prsida des cultes dans leur langue et contribua ainsi fonder une petitecommunaut, dirige par un conseil officieux. Ce fut mme son instigation que ds leprintemps 1873 ladite communaut, sentant combien "son isolement serait... une cause defaiblesse et de dissolution", demanda tre rattache l'Eglise luthrienne de Nice et quedeux de ses membres furent adjoints au conseil presbytral de cette paroisse, ce qui futaccept par le Consistoire de Paris (3).

    Les services eurent d'abord lieu dans la maison Bosano, rue Castellar, mais bientt lepetit groupe voulut avoir son temple. Dans ce but, le 13 mai 1874, par devant Me Gras,notaire Menton, le pasteur Philippe Frdric Mader acquit des frres Bosano, pour le comptedu conseil presbytral de l'Eglise de la Confession d'Augsbourg Nice et Menton, "une terreen citronniers" d'une contenance de 2313, 12 mtres carrs, sise au quartier Urbana, cadastrssection C, n 48, sur laquelle existaient trois petits btiments usage de remise, curie etlaiterie, et ce pour le prix de 35.000 francs, dont 15.000 comptant, le surplus payable par tiers,les 13 mai 1875, 1876 et 1877. Cet achat fut ratifi par le Consistoire de Paris le 27 novembre1874 (4).

    La mme anne, un certain pasteur Schubart fut appel desservir cette annexe, dont ilfut officiellement nomm pasteur auxiliaire en 1877 (5). Il fut remplac, fin 1880, par lepasteur Ehn, natif de Carrstadt (Wurtemberg).

    A la suite de la campagne de presse dirige en 1882 contre le pasteur Mader, lesluthriens de Menton, solidaires de ceux de Nice, adressrent au Prfet une demande tendant obtenir l'autorisation de constituer une Eglise libre ; leur requte ayant t communique auconseil municipal, cette assemble, dans sa sance du 5 juin 1883, mit un avis favorable maisle synode particulier de Paris exprima le vu que le lien qui avait exist jusque l avec laparoisse de Nice et son annexe ne soit pas rompu et la sparation n'eut pas lieu (6).

    Lors du tremblement de terre du 23 fvrier 1887 les btiments de l'glise furentgravement endommags et le cot des rparations s'leva plus de vingt mille francs, ce quiconstitua une lourde charge pour la communaut.

    En 1896, de nouvelles attaques des journaux contre le pasteur de Nice amenrentencore ses paroissiens et ceux de Menton solliciter leur indpendance mais, en raison desdifficults d'ordre administratif et juridique, le statu quo fut encore maintenu.

  • 4

    Aprs la sparation des Eglises et de l'Etat, les oprations d'inventaire se droulrentsans incidents (13 mars 1906) et les luthriens de Menton formrent une association cultuellequi fut dclare la prfecture des Alpes-Maritimes le 1er juin 1906 mais ne se rattacha pasau Consistoire de Paris.

    Sur la liste des dix-neufs membres la composant se trouvent les noms de quatrersidents permanents (dont le pasteur R. Rutjahr) et quinze saisonniers, savoir neufdomicilis en Allemagne et six en Russie (dont quatre dans les provinces baltes).

    Les biens meubles et immeubles -ces derniers comprenant L'glise, situe rue desBains, le presbytre contigu lev de deux tages sur rez-de-chausse, une maison deconcierge au nord de l'glise et du presbytre et un terrain entourant l'difice et Lui servant dejardin, d'une superficie de 16 ares 36 centiares- furent transfrs le 14 octobre suivant laditeassociation cultuelle et cette dvolution ne donna lieu aucune rclamation.

    Ainsi, les cultes en langue allemande continurent dans l'glise de l'avenue Urbarta(nouveau nom de la rue des Bains) jusqu'en 1914.

    Aprs la dclaration de guerre les biens furent mis sous squestre puis liquids envertu d'une ordonnance du prsident du Tribunal civil de Nice en date du 11 mars 1921.

    Depuis la premire guerre mondiale il ny a plus de communaut luthrienne et leslocaux ont disparu ; leur emplacement est maintenant occup par les jardins de"L'orangeraie", maison de repos de la Mutuelle gnrale des P.T.T., dont l'entre est situe 15rue Patourneaux.

    NOTES

    (1) Liste gnrale des trangers sjournant Menton..., p. 53 et de M. de Saint-Germain, Menton-Portefeuille, p. 218.

    (2) N en 1838 Agosheim (Bas-Rhin), sous-directeur de l'Ecole prparatoire de thologie pour l'Egliseluthrienne de Paris et charg du culte allemand au temple des Billettes (1866), professeur de dogme luthrien ala Facult de thologie protestante (1882), dcd Paris en 1921.

    (3) Voir pices justificatives, I.(4) Id., II. En 1876, la partie sud du terrain, sur laquelle se trouvaient les trois petites constructions, et

    qui n'tait d'aucune utilit, fut revendue avec l'autorisation du consistoire de Paris.(5) Voir pices justificatives, III.(6) Sur cette affaire, voir Ch. DELORMEAU, Le pasteur Philippe Frdric Mader... in Recherches

    rgionales, 1977/1, p. 55 et Histoire de l'Eglise luthrienne de Nice in Nice Historique, 1983/1, p. 26.(7) Id, ibid., Recherches rgionales, 1977/1, p. 55 et Nice Historique, 1983/1, p. 27-28.

  • 5

    PIECES JUSTIFICATIVESIDlibration du Consistoire luthrien de Paris15 mai 1873(Extrait)Lecture est donne 1 d'une lettre en date du 10 mars 1873, par laquelle le Conseil

    officieux de la communaut protestante de langue allemande de Menton demande auConsistoire de vouloir bien reconnatre cette communaut comme annexe de la paroisse deNice et l'autoriser adjoindre deux de ses membres au Conseil presbytral de ladite paroisseet 2 d'une lettre en date du 2 avril par laquelle le Conseil presbytral de l'Eglise de Niceappuie fortement cette demande.

    Le Consistoire, aprs dlibration, dcide qu'il y a lieu d'accueillir la demandeprsente au nom de la communaut protestante de Menton. Cette communaut formera enconsquence une annexe de l'Eglise de Nice, et deux de ses membres seront adjoints auConseil presbytral de cette Eglise.

    (Arch. Consist. luth, de Paris, Dlib., reg. H, p. 20S-209)

    IIDlibration du Consistoire luthrien de Paris27 novembre 1874(Extrait)Monsieur le Prsident donne lecture d'une lettre en date du 24 novembre par laquelle

    Monsieur le pasteur Mader expose la situation de la Communaut de Menton et demande pourle Conseil presbytral de Nice et au nom de celui-ci l'autorisation d'acheter un terrain sis Menton et d'y faire construire un lieu de Culte.

    Le Consistoire, aprs dlibration, accorde l'autorisation demande-(Id, ibid., 272)

    IIIDlibration du Consistoire luthrien de Paris15 juin 1877(Extrait)Lecture est donne d'une lettre en date du 26 mai par laquelle Monsieur le Pasteur

    Mader, de Nice, transmet au Consistoire, avec prire de vouloir bien l'approuver, unedlibration prise par le Conseil presbytral de l'Eglise de Nice le 24 dudit mois. Par cettedlibration le Conseil presbytral appelle dfinitivement au poste de pasteur de l'Eglise deMenton, avec le titre de pasteur-auxiliaire, Monsieur le pasteur Schubart qui la desservaitdepuis trois annes et s'engage pourvoir son traitement.

    La dlibration dont il s'agit est dclare approuve par le Consistoire. (Id, ibid., p.397)

    SOURCES ET BIBLIOGRAPHIEI - Sources manuscrites

    - Archives nationales, Paris

  • 6

    1910.170. Dossier Alpes-Maritimes. Statuts de l'association cultuelle pour l'exercicepublic du culte de la Confession d'Augsbourg en langue allemande de Menton, 12 mai 1906.

    - Archives du Consistoire luthrien de Paris (16 rue Chauchat, IXe)Dlibrations, registres H, I.

    - Archives dpartementales des Alpes-Maritimes300 Q 1366, 1368, Enregistrement, Actes publics civils, Bureau de Menton.S.C. 24687, Liquidation des biens faisant l'objet d'une mesure de squestre, 1921.3 V 327, Constitution d'une Eglise libre allemande Nice et Menton, 1883.3 V 363, Eglise luthrienne allemande de Menton, 1906-1908.

    - Archives communales de MentonD 5, Dlibrations du Conseil municipal, 1883-1885.

    II - Bibliographie sommaire

    - Liste gnrale des trangers sjournant Menton pendant la saison 1873-1874accompagne d'une notice sur Menton, publie par l'Agence Tonin et Gustave Amarante.Nice, Impr. nioise, Vrani et Cie, 1874, in-8.

    - SAINT-GERMAIN (M. de), Menton-Portefeuille. Guide des trangers. Nice, V.-Eugne Gauthier et Cie, 1874, in-16.

    - DELORMEAU (Charles), Le pasteur Philippe Frdric Mader et les dbuts del'Eglise luthrienne de Nice in Recherches rgionales, 1977, n 1, p. 49-62.

    - DELORMEAU (Charles), Histoire de l'Eglise luthrienne de Nice in NiceHistorique, 1982/4, p.149-161 et 1983/1, p. 26-40.

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    GENEALOGIE ET CARRIERE DEJOSEPH DE SABRAN (1702-1775),

    COMTE DE GRAMMONT ET DE BEAUDINAR,

    LIEUTENANT-GENERAL DESARMEES NAVALES

    par Michel VERGE-FRAMCESCHI

  • 8

    Michel Verg a commenc ses tudes historiques sous notre direction ta Facult desLettres de Nice. Licencier en 1972, il a prpar, galement sous notre direction, en 1973, unmmoire de matrise sur Les officiers du Grand Corps de Toulon au XVIIIe sicle (origines,conditions, service) qui lui a valu un prix de l'Acadmie de Marine en 1975. Deux ans aprs,l'Acadmie Franaise lui dcernait le prix Feydeau de Brou pour un ouvrage de vulgarisationintitul, La Royale au temps de l'Amiral dEstaing, Paris, 1977. Reu au C.A.P.E.S en 1975 etnomm au lyce du Havre, il a obtenu son doctorat de 3e cycle Paris l'Ecole Pratique desHautes Etudes en 1980 pour une thse sur Les lves de l'Ecole royale de Marine du Havre auXVIIIe sicle (1773-1775) avec un jury prside" par le professeur Andr Corvisier.

    De 1974 1981, il a publi six articles rfrences surtout provenales dans leBulletin d'Histoire conomique et sociale de la Rvolution, les Actes du 1133e Congrs desSocit Savantes, le Bulletin de la Socit d'Histoire moderne, Provence Historique,Recherches rgionales, les Cahiers de te Mditerrane. Au cours de la mme priode il apubli une dizaine d'articles consacres surtout des familles insulaires dans le Bulletin de laSocit des Sciences Historiques et naturelles de la Corse Bastia.

    Une dizaine d'articles portant la signature de Michel Verg vont paratreprochainement dans diverses revues qui les ont acceptas. Michel Verg prpare en mmetemps une thse d'Etat sur Les officiers gnraux de la marine royale 1715-1774, en lestudiant la fois du point de vue de la famille et de la carrire. Les liens de famille luiparaissent primordiaux pour expliquer certaines carrires, notamment dans la flotte du Levant.Cette tude lui permet, en outre, de constater que les quartiers de noblesse mis en avantcitaient parfois contestables.

    Ajoutons que Michel Verg garde un profond sentiment de reconnaissance l'gard deMadame Andre Devun qui l'a aid pour sa matrise et les dbuts de ses travaux de thse.

    Maurice BORDES

  • 9

    Joseph de Sabran, comte de Grammont et de Beaudinar, est l'un des officiers gnrauxde la marine royale de Louis XV, lev aux grades et dignits suprieurs, autant par son nomque par son mrite. N Sabran, il appartient de par sa naissance l'une des plus illustresfamilles provenales, venue s'tablir dans cette province au XIIe sicle (1), Et avant cetteinstallation, les Sabran languedociens avaient dj donn un compagnon Godefroy deBouillon, en 1099, en la personne de Guillaume de Sabran.

    "Cette illustre maison s'est allie presque toutes les maisons souveraines de l'Europeet a donn des cardinaux, des vques, un saint et une sainte, mari et femme, canonissensemble en 1369, des conntables des comtes de Toulouse... Ils furent comtes souverains deForcalquier au XIIIe sicle" (2).

    On pourrait ajouter que le nom de Sabran a gnralement brill dans la plupart destats-majors de la marine royale, depuis Louis XIV jusqu' Louis XVI. Parmi les illustrationsmaritimes de ce nom, nous allons retenir le comte de Sabran-Gram-mont, chef d'escadre de1764 1774, retir lieutenant-gnral des armes navales en 1774, et son cousin germain deLa Clue-Sabran, chef d'escadre de 1755 1764, retir lieutenant-gnral en 1764.

    LES SEIZE QUARTIERS DU COMTE DE SABRAN-GRAMMONT (1702-1775)

    1. Joseph de Sabran, futur comte de Beaudinar et de Grammont, est sans doute n fin1702, ses parents s'tant maris le 17 janvier 1702 au diocse de Lectoure. Or, il meurt 73ans, le 11 juin 1775 Paris. Fils an, Joseph est aussi fils unique, et on lui connat seulementtrois soeurs cadettes : Madeleine, ne en 1704, clibataire ; Isabeau ou Elisabeth, clibataire,vivante en 1722 ; Jeanne ou Anne, clibataire, vivante en 1722.

    2. Son pre, Joseph de Sabran, seigneur de Beaudinar, est un cadet de famille. N en1670, il est reu chevalier de Malte en 1685. Il est mort entre 1722 et 1743. Connu sous lenom de vicomte de Forcalquier et d'Arian, il fut capitaine-lieutenant d'une compagnie franche.Il a quatre frres ans, quatre frres cadets et trois soeurs :

  • 10

    - Jean-Franois de Sabran, an de famille, baron de Beaudinar, seigneur deMontblanc, comte d'Arian, entre dans la marine royale, malgr son anesse. Capitaine devaisseau, chevalier de Saint-Louis, il est toujours vivant, et fort g, en 1731. En 1679, il apous Isabeau de Glandevs, dame de Montblanc, qui lui apporta cette terre en dot. Excellentparti, elle tait l'"hritire de la branche ane de sa maison" (3), maison qui a d'ailleurs donnde nombreux officiers la marine royale (4). Ce mnage a au moins huit enfants : Elzar deSabran-Beaudinar, chevalier de Malte en 1704, capitaine de vaisseau en 1712, chevalier deSaint-Louis en 1727, tu, sans postrit, en 1736 (5) ; Franois de Sabran-Beaudinar,chevalier de Malte en 1709, mort sans postrit ; Charles de Sabran-Beaudinar, mort Parisen 1716, sans postrit ; Mme de Clari d'Ubraye de Pontevs ; Mme de Broglie, entre elleaussi dans une famille qui a donn un lieutenant-gnral des armes navales de 1737 1750,Achille de Broglie, fils, frre et oncle de trois marchaux de France (6) ; Nicolas-Auguste deSabran-Beaudinar, reu chevalier de Malte en 1703, enseigne de vaisseau en 1726, puislieutenant de vaisseau, parfois appel le "marquis de Sabran", mort Toulou le 17 aot 1744,clibataire et g de 60 ans (il est donc n vers 1684) (7) ; Pierre-Bruno de Sabran-Beaudinar,chevalier de Malte en 1714 et chevalier de Saint-Louis en 1753, officier des milicescoloniales Saint-Domingue, mort sans postrit ; Joseph-Jules-Louis-Maxime-Honor deSabran-Beaudinar (1702-1781), lieutenant des marchaux de France et le seul avoir eu unedescendance de son mariage clbr en 1731 (il laissa deux fils et deux filles ; l'an, Jules-Csar (1735-1829), aussi lieutenant des marchaux de France, se maria en 1759 ; le cadet,Louis-Hector-Honor-Maxime (1739-1811) devint successivement vque de Nancy etpremier aumnier de Marie-Antoinette (en 1774), vque-duc de Laon (en 1778), et grand-aumnier de la reine {en 1780), avant de mourir en Pologne en migration ; quant aux deuxfilles, l'ane fut l'abbesse d Sabran (1734-1820) et la cadette (1736-1817) se maria en 1765.

    - Charles de Sabran-Beaudinar, reu chevalier de Malte en 1668.

    - Nicolas de Sabran-Beaudinar, reu chevalier de Malte en 1674, devient capitaine devaisseau en 1709. Appel le "comte de Sabran-Beaudinar", il meurt Toulon le 15 janvier1725, g de 60 ans. Il est donc n vers 1665 (8). Il tait chevalier de Saint-Louis. C'estgalement Toulon qu'il avait pous le 2 mai 1701, Claire Dasque, fille d'Antoine Dasque,commissaire gnral de la marine et de Catherine de Ripert (9). En 1720, il rdige sontestament Toulon, et sa veuve, Claire Dasque, dcde elle aussi au port le 2 dcembre 1726(10). Elle avait 57 ans. Elle avait donn cinq enfants son poux : Delphine, ne en 1701, trspeu de temps aprs le mariage, ce qui explique sans doute cette alliance Sabran-Dasque;Elisabeth ou Isabeau, ne jumelle en 1701 (elle pousa M. de Grimaudet de Motheux, d'unefamille d'officiers de vaisseau (11) ; ils auront une fille, Marie-Delphine, marie en 1780 Joseph-Augustin de Geoffroy d'Antrechaus, lieutenant de vaisseau retir du service, chevalierde Saint-Louis, de petite noblesse toulonnaise (12)); Elzar, n vers 1703, chevalier de Malteen 1704, mort 22 ans Toulon le 29 avril 1725, lieutenant de compagnie (13) soit trois moisaprs son pre ; Nicolas, n jumeau en 1703, mort aussi sans postrit ; Franois-Elzar, n Toulon le 31 octobre 1707, o il meurt 35 ans le 5 janvier 1742, clibataire (14).

    - Balthazar de Sabran-Beaudinar, reu chevalier de Malte en 1676.

    - Pierre de Sabran-Beaudinar, reu chevalier de Malte en 1692.

  • 11

    - Michel de Sabran-Beaudinar, reu chevalier de Malte en 1693. Capitaine de vaisseaucomme ses frres Jean-Franois (mort entre 1731 et 1743), et Nicolas (mort en 1725). Devenucommandeur de Comps et de Lugan, il dicte son testament le 17 avril 1743 Me Mouton,notaire Toulon (15). Parmi ses legs, 2000 livres sa nice, Claire de Sabran, fille de "feu"Jean-Franois, son frre an. Appel "Messire de Sabran de Bagnol", il meurt Toulon le 12octobre 1745 (16).

    - Jean-Lambert de Sabran-Beaudinar, reu chevalier de Malte en 1694.

    - Elzar de Sabran-Beaudinar, entr dans les ordres, rappelant ainsi Saint-Elzar deSabran, canonis en 1369. Docteur en thologie, sacristain Saint-Paul de Vence, il teste en1721.

    - Claire de Sabran-Beaudinar, marie en 1680.

    - Gabrielle de Sabran-Beaudinar, marie.

    - Madeleine de Sabran-Beaudinar, marie en 1688 Jean-Franois de Bertet de LaClue sur lesquels nous reviendrons ultrieurement.

    3. La mre du comte de Sabran-Grammont est Jeanne-Marie Du Bouzet, dame deRoqupine. Elle a pous Joseph de Sabran-Beaudinar, cadet de famille, le 17 janvier 1702, Montfort, diocse de Lectoure. Par les Bouzet de Roqupine, Sabran-Grammont est gascon.D'une famille connue depuis la fin du XIIe sicle, Jean Du Bouzet est devenu seigneur deRoqupine par son mariage en 1472 avec Catherine de Bordes, dame de Roqupine (terre dudiocse de Lectoure). Par eux, Sabran-Grammont est cousin du chef d'escadre Charles-Denis,marquis Du Bouzet (n en 1738, mari en 1767), et surtout de Claude Cassaignet de Tiliadet(1638-1726), veuve du marquis Gilles Du Bouzet de Roqupine, lieutenant gnral, qu'elleavait pous en 1655 et qui est mort en 1679. Or cette marquise de Roqupine, morte le 16mai 1726, 8S ans, alors que Sabran-Grammont a 24 ans, tait la nice de Louvois, puisquefille de Gabriel de Tiliadet, capitaine aux gardes franaises, et de Madeleine Le Tellier.

    4. Le grand-pre paternel est Elzar de Sabran, baron de Beaudinar, dit "des comtes deForcalquier", syndic de la noblesse de Provence. Il teste en 1707. II eut un frre Honor, reuchevalier de Malte en 1652, mort clibataire en Sardaigne, en 1656, et une soeur, Claire,religieuse Riez.

    5. Il avait pous le 20 novembre 1653 Isabeau de Cabanes de Viens, morte aprs1701, soeur de Franois-Auguste, baron de Viens, conseiller en la cour des Comptes d'Aix en1675, et de Jean-Balthazar, vque de Grasse puis de Vence.

    6. Le grand-pre maternel, Guillaume Du Bouzet de Roqupine, est mort le 29 aot1699, avant la naissance de son petit-fils Sabran-Grammont.

  • 12

    7. Sa femme, Marguerite de Faudoas de Sguinville, pouse Sguinville le 28fvrier 1677, est morte en revanche en 1716. Elle appartient une illustre famille de Guyennequi s'est allie en 1413 aux Pardaillan d'Antin, en 1445 aux d'Estaing et en 1547 nouveauaux Pardaillan de Gondrin-Montespan. Marguerite a onze frres et soeurs : cinq soeurs mortesclibataires, un frre an Jean-Bertrand (mort en 1705), lieutenant au rgiment du Roi decavalerie, et quatre autres frres, Bertrand, Jean-Pierre, Alexandre, lieutenant au rgiment deTournaisis, et Jean-Louis, prvt du chapitre de Montauban, auteur de l'Histoire de la maisonde Faudoas, publie en 1688 et 1724- Le dernier, Paul (mort en 1706), fut lieutenant aurgiment royal marine.

    8- Le bisaeul paternel, Jean de Sabran, baron de Beaudinar et d'Ansouis, n vers 1583,est mort Beaudinar le 14 dcembre 1673. Viguier de Marseille en 1626, il fut maintenu danssa noblesse le 27 janvier 1668. Fils unique, il eut quatre soeurs maries en 1603, 1608 et1611.

    9. Il pousa Marie de Grasse du Bar, au Bar, le 25 octobre 1620. Ayant onze frres etsoeurs, elle apparente Sabran-Grammont (1702-1775) la quasi totalit de la noblesseprovenale. Sa soeur Anne est en particulier la trisaeule du comte Jean-Joseph de Raflis deBrovs (1715-1782), lieutenant gnral des armes navales que nous avons aussi tudi (17).

    10. Le second bisaeul paternel, Balthazar de Cabanes, baron de Viens, fut prsidenten la Chambre des Comptes, Aydes et Finances de Provence, en 1640.

    11. Il pousa Madeleine de Valavoire de Vaulx en 1637, soeur du marquis, lieutenant-gnral, et de Nicolas, vque de Ries.

    12. Le premier bisaeul maternel est Octavien Du Bouzet de Bivs.

    13. Il pousa le 26 juillet 1626 Philiberte de Castelbajac (de Bigorre).

    14. Le second bisaeul maternel est Pierre-Jean de Faudoas, seigneur de Sguinville,mort le 24 dcembre 1673, dont les fils et neveux furent maintenus nobles en 1696 et 1700,sur preuves remontant 1544.

    15. Il pousa le 14 novembre 1648 Lucrce de Roquemaurel (de Saint-Flour).

    16. Le trisaeul paternel, Antoine de Sabran, baron de Beaudinar, fut colonel destroupes de Provence. Il teste le 17 fvrier 1587. Sabran de la branche des "barons d'Ansouis",son propre trisaeul, Elzar, pousa en 1389 Bancette de Blacas, qui apporta en dot labaronnie de Beaudinar. "Ansouis" alla l'an, "Beaudinar" au cadet, Jean, bisaeul d'Antoine,puis Pierre, grand-pre d'Antoine, puis Louis, pre d'Antoine, puis Antoine enfin. Cetrisaeul a le privilge d'avoir des anctres Sabran qui sont aussi ceux de Louis XIV (18).

    17. Il pousa Marguerite de La Garde, des seigneurs de Chambonas en Languedoc, le3 septembre 1577, Barjols, veuve d'un premier mari.

    18. Le second trisaeul, Annibal de Grasse, comte du Bar (1563-1632), seigneur deVallettes, Cannaux, gouverneur d'Antibes (19), est l'anctre de l'amiral de Grasse, celui de laguerre d'indpendance des Etats-Unis d'Amrique (20).

  • 13

    19. Il pousa Claire d'Allagonis-Meirargues Jouques le 11 fvrier 1592. Elle mourutle 3 mai 1642,

    20. Le troisime trisaeul, Claude de Cabanes, est le fils de Bertrand, cuyer mari en1522, premier anctre connu de la maison de Cabanes de Viens.

    21. Il pousa Anne de Bionneau en 1583.

    22. Le quatrime est Pierre de Valavoire de Vaulx, viguier de Marseille en 1628,comme le fut son pre, Palamde, en 1603.

    23. II pousa Gabrielle de Forbin-Soliers le 18 janvier 1618, fille de Gaspard,gouverneur de Toulon, et de Claire de Pontevs-Carcs.

    24. N. Du Bouzet de Roqupine, non identifi.

    25. Inconnue.

    26. Le sixime est Melchior de Castelbajac, seigneur de Bivs en Lomagne.

    27. Il pousa Jeanne Folastre de La Hilre.

    28. Le septime, Henri-Aimery de Faudoas de Sguinville (1589-avt.l633), futlieutenant de compagnie.

    29. Il pousa Catherine de La Mothe d'Izaut, qui teste le 14 mai 1633.

    30. Le huitime, Octavien de Roquemaurel, tait seigneur de Soueich.

    31. Sa femme fut Gabrielle de Siregan.

    LA CARRIERE DU COMTE DE SABRAN-GRAMMONT (1702-1775)

    1702 : naissance en Provence de Joseph de Sabran. Bien qu'hritier d'un nom illustre,il appartient une branche relativement dsargente, celle des barons de Beaudinar, obligede pousser tous ses fils vers la marine, Toulon, mme les ans, o ils n'atteignent d'ailleursque le grade modeste de capitaine de vaisseau. Trois oncles de Joseph le sont : Jean-Franois,an de famille (mort entre 1731 et 1743) ; Nicolas (mort en 1725) ; Michel (mort en 1745).Quant au pre de l'enfant, il n'est que capitaine-lieutenant d'une compagnie franche. A 15 ans,il a t affili Malte, en 1685, comme six de ses huit frres. Le grand-pre, charg de neuffils, confia le dernier (Elzar) l'glise, en affilia sept Malte, et ne put marier que son an l'hritire des Glandeves-Montblanc. Cinq chevaliers respectrent le clibat, mais deuxvoulurent se marier, le pre de Sabran-Grammont, avec une Bouzet de Roqupine, l'oncleavec une Dasque. Alliances aussi modestes que les grades... Le nom port par le petit Josephde Sabran ne doit donc pas nous abuser. Quoiqu'illustre, il est alors port par des officierssuprieurs de la marine royale, au train de vie bien modeste.

  • 14

    1715 : mort de Louis XIV, lointain descendant des Sabran. Le duc d'Orlans devientRgent, et certains Sabran mnent alors un train de vie fort loign de celui que connaissentles Sabran toulonnais. Ecoutons Saint-Simon : "Mme de Sabran, Foix-Rabat par elle (neLouise-Charlotte de Foix)... s'tait chappe de sa mre pour pouser (en 1714, l'ge de 21ans) un homme d'un grand nom (Jean-Honore de Sabran, dit le comte de Sabran, officier desgalres Marseille), mais sans bien et sans mrite, qui la mt en libert. Il n'y avait rien de sibeau qu'elle, de plus rgulier, de plus agrable, de plus touchant, de plus grand air et du plusnoble, sans aucune affectation. L'air et les manires simples et naturelles, laissant penserqu'elle ignorait sa beaut et sa taille, qui tait grande et la plus belle du monde, et quand il luiplaisait, modeste tromper. Avec beaucoup d'esprit, elle tait insinuante, plaisante, robine,dbauche, point mchante, charmante, surtout table, (et elle dne avec les rous)". Louise-Charlotte "avait en un mot tout ce qu'il fallait M. le duc d'Orlans, dont elle devient bienttla matresse, sans prjudice des autres". Position avantageuse qui lui fit penser la fortune deson poux : "Comme elle ni son mari n'avaient rien, tout leur fut bon... Mme de Sabran trouvaque six mille livres de rente taient toujours bonnes prendre pour son mari, dont elle faisaitsi peu de cas, qu'en parlant de lui, elle ne l'appelait que son mtin". Elle obtint du Rgent pourle comte de Sabran, la charge de premier chambellan du duc d'Orlans, qu'il offrit au mari desa matresse, charge de six mille livres d'appointements (21).

    1718 : loin des turpitudes versaillaises de ses cousins, Joseph de Sabran-Beaudinar, 16ans, quitte sans doute le collge et se rend Toulon o rsident ses trois oncles paternels. Il yest fait garde de la marine le 24 septembre 1718 (22).

    1719 : il embarque sur la flte le Dromadaire le 14 mai 1719- C'est sa premire"campagne" (le Rgent a dclar la guerre Philippe V d'Espagne en janvier 1719. Croisireen Mditerrane. Echec du sige de Rosas).

    1720 : le jeune garde passe son anne aux "salles" des gardes de la marine o il fait sestudes, avec application semble-t-il.

    1721 : la peste ravage Toulon. Son oncle Nicolas (1665-1725), appel dans le corps le"comte de Sabran-Beaudinar", capitaine de vaisseau, s'absente de Toulon et amnel'adolescent "la" terre des Ambiers. Un autre adolescent, M. de Sabran, aussi garde-marine(fils ou neveu de Nicolas), les accompagne. Notre jeune garde-marine reste aux Ambiers defvrier 1721 octobre 1721. En revanche son oncle revient Toulon le 24 aot 1721, pendantl'pidmie. Aux Ambiers, l'adolescent est confi son autre oncle, Michel (mort en 1745),appel dans le corps le "chevalier de Sabran-Bagnol", alors lieutenant de vaisseau, qui setrouve "sa" terre des Ambiers, "par ordre de feu M. d'Ailly, commandant du port, du 13octobre 1720, pour veiller aux dbarque" (23). Un autre Sabran est aussi "chez lui, cause dela contagion", l'enseigne de vaisseau de Sabran-Montblanc, cousin germain de notre garde (etfils de Jean-Franois et dIsabeau de Glandevs, dame de Montblanc). Les jeunes Sabrantant labri, la gnration prcdente remplit ses devoirs dans le port pestifr. LoncleNicolas na pas hsit y revenir. Et un lieutenant de vaisseau, Elzar de Sabran, y"commande le dtachement qui est dans l'Amiral" (24).

    1721 : le jeune garde revient Toulon en octobre et reprend le cours de ses tudes.

    1722-1723 : il est toujours prsent Toulon et se rend quotidiennement aux "salles".

  • 15

    1724 : il embarque sur la Loire le 6 avril 1724 jusqu'au 22 mars 1725. Cette frgate estplace avec le vaisseau le Solide sous le commandement de Claude de Beaucaire (1659-1735), chef d'escadre des armes navales en 1734. Cette petite division amne Constantinople M. d'Andrezel, ambassadeur de France (25) (Croisire Alger, Tunis, Tripoli,Constantinople). Le retour de la division a t retard d'une part par l'ancien ambassadeur deFrance, M. Bonnac, qui a d attendre le retour de son secrtaire, envoy prs du czar, pourembarquer, et d'autre part par la peste...qui svissait Constantinople. Au retour Toulonimposa quinze jours de quarantaine. la traverse n'ayant t que de vingt cinq.

    1725 : en arrivant Toulon, le jeune garde apprend la mort de son oncle, le capitainede vaisseau Nicolas de Sabran-Beaudinar (1665-1725), mort au port le 15 janvier 1725. Puisle 29 avril, il perd son cousin germain, Elzar de Sabran-Beaudinar (1703-1725), lieutenant decompagnie et fils de celui-ci.

    1726 : il continue ses tudes la compagnie des gardes, toujours log sans doute chezsa tante, Claire Dasque, veuve de Nicolas de Sabran-Beaudinar. Ambiance maritimepuisqu'elle est fille de commissaire gnral de la marine. Mais elle meurt le 2 dcembre 1726.

    1727 : il est fait garde du Pavillon Amiral le 5 mai 1727 (26). En cette qualit, ilembarque sur le Tigre le 8 mai 1727 jusqu'au 17 septembre 1727. Ce vaisseau appartient l'escadre de Joseph de Mons (1654-1731), chef d'escadre des armes navales en 1720. Sabrany fait son baptme du feu, le Tigre s'emparant d'un navire tunisien de 38 canons.

    1727 : de retour, Sabran embarque sur l'Immacule-Conception le 16 novembre 1727jusqu'au 23 janvier 1728. Il dsarme le 24 dans le port.

    1728 : il embarque sur la Conception du 1er juin 1728 au 30 octobre 1728, dansl'escadre d'Etienne-Nicolas de Grandpr (1661-1731), chef d'escadre en 1728 (Campagne enMditerrane, Tunis, Tripoli). Ds son retour il monte sur l'Envieux du 10 dcembre 1728 au22 juin 1729.

    1729 : il embarque sur la Sibille du 8 octobre 1729, puis passe sur le pink le Saint-Antoine du 6 dcembre 1729 au 2 janvier 1730, pour le commander.

    1730 : en apparence dmuni de ressources,il "a reu Malte de l'argent de M. le baillide Bocage, qu'il lui doit, et il fait billet (de reconnaissance de dette) le 7 mars 1730 au sieurCatelin, crivain de la marine, pour cet argent" (27).

    1731 : il est fait enseigne de vaisseau le 1er octobre 1731, et l'augmentation de sapetite solde doit rparer ses dettes de jeunesse...

    1732 : il embarque sur lEsprance du 1er juin 1732 au 6 octobre 1732. Ce vaisseauappartient l'escadre de Claude Aubery, bailli de Vatan (1664-1738), chef d'escadre depuis1728 (Croisire en Mditerrane, Gnes, Livourne, Tunis, Tripoli, etc.).

    1733 : il embarque sur lHeureux du 24 juin 1733, qui dsarme le 21 mars 1734. Ilappartient l'escadre de Charles-Albert de Luynes (1674-1734), chef d'escadre depuis 1722 etfils du duc de Luynes (1620-1690) (Croisire en Mditerrane, Gibraltar, puis l'Atlantiquejusqu'en Baltique, au moment de Dantzick. Au retour, Brest, puis l'Atlantique, laMditerrane, croisire sur les ctes d'Italie, de Sicile, de Berbrie).

  • 16

    1734 ; il embarque sur le Diamant du 15 mai 1734 jusqu'au 23 octobre 1734. Ilappartient l'escadre de Claude-Elise de Court de La Bruyre (1666-1752), futur vice-amiralde France en 1750 (Croisire en Mditerrane). A peine dbarqu, il embarque sur le Zphyrle 4 novembre 1734, jusqu'au 23 fvrier 1735.

    1735 : il embarque sur le Bore du 3 aot 1735 au 1er septembre 1735. Il appartient lescadre de Claude de Beaucaire (1659-1735), terrass 76 ans par deux attaques d'apoplexie bord de son btiment le 20 aot 1735. Cette disparition brutale entrane plusieurschangements dans l'escadre, et .Sabran passe le 1er septembre 1735 sur le Ferme jusqu'au 26janvier 1736, dans l'escadre alors confie Antoine-Franois de Pardaillan, marquis d'Antin(1709-1741), futur vice-amiral de France en 1737 (Croisire Cadix).

    1736 : il reste terre Toulon. il perd son cousin germain, Elzar de Sabran-Beaudinar, capitaine de vaisseau et chevalier de Saint-Louis, fils de son oncle Jean-Franoisde Sabran-Beaudinar, aussi capitaine de vaisseau.

    1737 : il embarque sur le Diamant du 6 mai 1737 au 9 octobre 1737. Ce vaisseau estcommand par le marquis d'Antin (Croisire en Mditerrane).

    1738: il est fait lieutenant de vaisseau et aide-major de la marine Toulon le 1er avril1738 (28). Il embarque en cette qualit sur la Sibile du 29 novembre 1738 au 24 mars 1739.Mais pendant ces quatre mois de mer il est pass sur la Flore ( une date non prcise) et c'estde cette frgate qu'il descend le 24 mars 1739.

    1740 : il embarque sur l'Esprance du 20 aot 1740 au 18 juin 1741. Il appartient lescadre commande par Charles-Gaspard de Gousse, marquis de La Rochalard (v. 1672-1748), chef d'escadre depuis 1728 et lieutenant-gnral le 1er mai 1741 (Campagne auxAntilles). Mais l'Esprance fait partie des vaisseaux qui ne vont pas en Amrique. Pendantque les autres naviguent vers le Nouveau Monde, l'Esprance rentre Toulon le 15 octobre1740, et part le 27 janvier 1741 Constantinople y conduire notre ambassadeur, M. deCastellane. De retour le 18 juin 1741, l'Esprance ramne notre ancien ambassadeur, M. deVilleneuve. Cette petite division tait place sous les ordres du commandant de l'Esprance,Pierre Gabaret d'Angoulin (vers 1674-1744), hritier d'un nom illustre dans la marine.

    1741 : il embarque encore sur l'Esprance du 25 septembre 1741 au 7 mars 1742. Ilappartient de nouveau une escadre place sous les ordres de Court de La Bruyre(Campagne en Mditerrane, Barcelone, Carthagne, les les d'Hyres, la Spezzia).

    1742 : tant depuis vingt quatre ans au service, il est fait chevalier de l'Ordre Royal etMilitaire de Saint-Louis le 1er janvier 1742. Il n'est toujours que lieutenant de vaisseau, lenom illustre des Sabran ne lui ayant en rien apport un avancement hors de l'ordinaire. Cettejoie est rapidement entache d'un deuil, car Sabran perd le 5 janvier 1742 son cousin germainFranois-Elzar de Sabran-Beaudinar (1707-1742), mort prmaturment Toulon moins de35 ans.

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    1743 : son oncle, Michel de Sabran-Bagnol, capitaine de vaisseau et commandeur del'ordre de Malte, rdige son testament le 17 avril 1743. Ayant perdu ses frres Jean-Franoiset Nicolas, puis ses deux neveux, fils de Nicolas, le vieil officier, cadet de famille, instituepour hritiers, selon l'usage, d'autres cadets de sa famille, mal lotis du ct de la fortune. Illaisse 2000 livres sa nice, Claire, fille de Jean-Franois, et nomme pour hritier universelson neveu, Joseph de Sabran, appel dans le corps "Sabran-Grammont".

    1744 : Sabran-Grammont perd encore un de ses cousins germains, le lieutenant devaisseau Nicolas-Auguste de Sabran-Beaudinar (v. 1684-1744), dit le "marquis de Sabran",mort Toulon 60 ans le 17 aot 1744, dans un grade bien modeste, compte tenu de son ge.Mais cette poque Sabran-Grammont est embarqu sur l'Esprance depuis le 27 janvier1744. Pass sur le duc d'Orlans, il dsarme le 13 octobre 1744. Il appartient l'escadre deCourt de La Bruyre qui soutint le 22 fvrier 1744 le fameux combat franco-anglais, dit du"Cap-Sici". De retour, le roi lui confie le commandement de la Diane, qu'il conserve jusqu'au1er dcembre 1745 (29).

    1745 : il perd son oncle, le capitaine de vaisseau Michel de Sabran-Beaudinar,seigneur de Bagnol, commandeur de l'ordre de Malte, mort Toulon le 12 octobre 1745. Il n'adonc pu l'assister dans ses derniers moments, mais naviguer tait le meilleur moyen de donnerses dernires satisfactions ce vieillard qui l'avait institu son lgataire universel deux ansplus tt.

    1746 : Sabran-Grammont s'absente du port le 1er fvrier 1746, par cong. Il revient Toulon en mai 1746. Le 1er mai 1746, il abandonne ses fonctions d'aide-major et "opte pourlieutenant de vaisseau" (30). De plus, tant enseigne d'une compagnie franche depuis le 12avril 1734, puis lieutenant, il est fait le 17 mai 1746 capitaine d'une compagnie franche. Enfin,en mai 1746, on lui paie ses appointements pour ses mois d'absence, fvrier, mars et avril. Ala fin de l'anne (quatrime "quartier 1746"), il est port sur les registres du port de Toulonavec la mention "au bataillon de la marine".

    1747 : il revient au port le 13 fvrier 1747. Le 9 juillet 1747, en la paroisse de Sainte-Marie de Toulon, il assiste sans doute aux obsques du lieutenant de vaisseau Elzar-Alphonse de Sabran (v. 1667-1747), mort Toulon 80 ans, de mme maison que lui.

    1748 : le 1er avril 1748, 46 ans, Sabran-Grammont est fait enfin capitaine devaisseau aprs 30 ans de services.

    1749-1750 : il est toujours prsent au port de Toulon, terre. Au second "quartier" (outrimestre) de 1750, il fait barrer Grammont sur les registres de "Soldes et Revues" et ne se faitappeler que M. de Sabran.

    1750 : son lointain cousin, Jean-Honor, comte de Sabran, officier des galres etpremier chambellan du duc d'Orlans, pour les raisons que l'on sait, vient mourir. C'est cequi justifie peut-tre le changement de nom de Sabran-Grammont, qui dornavant voudraitlaisser entendre que M. de Sabran, c'est lui.

    1751 : il embarque sur le Triton du 7 avril 1751 au 7 novembre 1751.

    1752-1753-1754 : il est toujours prsent au port de Toulon, terre.

  • 18

    1755 : il part pour Gnes le 25 aot 1755 "en consquence des ordres du ministre". Ilrevient Toulon ds septembre 1755.

    1756 : il commande le Content du 1er avril 1756 au 24 novembre 1756, dans l'escadrede Roland-Michel, marquis de La Galissonire (1693-1756), lieutenant-gnral des armesnavales depuis 1755. Il participe au clbre combat du 20 mai 1756 qui donne Port-Manon etMinorque la France. Le vaincu, Byng, est fusill de retour en Angleterre, le 14 mars 1757. Ason retour, il reprend son ancien nom de "Sabran-Grammont". En mme temps, il est mis lahaute paye de capitaine de vaisseau, partir du 15 novembre 1756.

    1757 : il commande le Triton du 1er juin 1757 au 2k janvier 1758. Avec une petitedivision de trois vaisseaux et de quatre frgates sous ses ordres, il croise en Mditerrane, serend en Levant, et notamment Malte o tant de Sabran ont servi.

    1759 : le roi lui confie le commandement du Centaure qu'il prend le 20 avril 1759,vaisseau qui appartient l'escadre commande par son cousin germain Jean-Franois deBertet de La Clue-Sabran, chef d'escadre des armes navales depuis 1755, sur lequel nousreviendrons ultrieurement. Le 5 aot 1759, l'Ocan, vaisseau de 80 canons, appareille deToulon, La Clue-Sabran son bord, suivi de son escadre. En douze jours les vaisseaux du roisont Gibraltar. L'escadre anglaise de Boscawen en dfend le passage. La Clue donne ordrede rallier Cadix. Pour tromper l'ennemi, il teint ses feux de poupe. Son arrire-garde relche Cadix o les Anglais la bloquent du 19 aot 1759 au 2 janvier 1760. Au matin, lest de sonarrire-garde, La Clue-Sabran n'a plus que sept vaisseaux opposer Boscawen. Le combatest plus un sauve-qui-peut qu'une bataille navale. Seul le Centaure de Sabran-Grammont secouvre de gloire. A l'issue du combat, ce vaisseau de 74 canons n'est plus qu'un ponton, raset mitraill par cinq adversaires. Sabran-Grammont, bless plusieurs fois au cours de ceterrifiant combat, a fait le sacrifice du Centaure pour permettre La Clue-Sabran de sauver lereste de l'escadre. Le sacrifice est norme. Un combat acharn de cinq heures. Deux centsmorts sur le Centaure. Le vaisseau est prt sombrer. A la tombe de la nuit, avec plus de sixpieds d'eau dans la cale et dpourvu de toute munition, Sabran-Grammont, neuf fois bless, serend. Soutenu par M. Abbe, chirurgien-major, il passe sur l'escadre anglaise qui l'amne enGrande-Bretagne o il reste plusieurs mois comme prisonnier de guerre. Le rapport qu'il y fitde son combat est tout son honneur : "J'avais pris toutes mes dispositions pour pouvoir fairela plus longue rsistance qu'il me serait possible... L'tat o je me voyais rduit ne fit rienchanger la rsolution que j'avais prise de tenir bon jusqu' la dernire extrmit... Je meflattais qu'une dfense opinitre de ma part pourrait sauver l'escadre... Quant mon quipage,il est difficile, j'ose le dire, mme impossible, que l'on puisse tre mieux arm que je l'tais, etqu'on trouve ailleurs plus de bravoure et de fermet dans le soldat et dans le matelot. Ilstaient tous anims du mme esprit. Pas un seul n'a quitt son poste et tous ont combattu avecla valeur la plus dtermine... J'ai dfendu mon vaisseau autant qu'il m'a t possible. J'ai tenujusqu'au dernier moment. Je n'ai amen le pavillon que lorsque le danger tait pressant. J'aicru ne devoir pas sacrifier autant de braves gens que ceux que j'avais sous mes ordres et quiavaient si bien fait leur devoir". Sabran-Grammont achve son mmoire adress au ministrede la marine, en ces termes : "Si j'ai pu mriter votre estime, mon malheur m'en paratra moinsgrand" (31). C'est en Angleterre que Sabran-Grammont apprendra le dsastre total de LaClue-Sabran dans les eaux portugaises de Lagos. Ce n'est qu'en octobre 1759 que Sabran-Grammont libr rentre Toulon.

  • 19

    Au passage, il s'est arrt Versailles o il a t flicit par Louis XV devant toute lacour! 1759, anne du combat du Centaure, anne des blessures reues l'ennemi, de ladtention en Angleterre, et des flicitations royales, est aussi l'anne du mariage de son petitcousin, Jules-Csar de Sabran-Beaudinar (1735-1829), lieutenant des marchaux de France,fils de son cousin germain Joseph-Jules-Louis-Maxime-Honor de Sabran-Beaudinar (1702-1781), aussi lieutenant des marchaux de France, fils lui-mme de l'oncle Jean-Franois, mortcapitaine de vaisseau.

    1760-1761-1762 : Sabran-Grammont ne sert plus en mer jusqu' la fin de la Guerre deSept Ans.

    1763 : signature de la paix.

    1764 : il est fait chef d'escadre des armes navales le 1er octobre 1764. Il a alors 62ans dont 46 ans de services (32).

    1765-1766-1767 : il est toujours prsent, terre, au port de Toulon.

    1768 : il perd sa lointaine cousine, Louise-Charlotte de Foix, veuve du comte deSabran depuis 1750. L'ancienne matresse du Rgent meurt Paris, 75 ans (32).

    1769 : Joseph de Sabran, comte de Beaudinar et de Grammont, chef d'escadre desarmes navales, chevalier de Saint-Louis, g de 67 ans, n'hsite pas pouser, le 2 fvrier1769, Franoise-Elonore-Elisabeth de Jean de Mauville (1749-1827). La jeune marie estne Paris le 3 mars 1749, elle a donc 19 ans lors de ses noces, soit plus de 47 ans de moinsque son mari. Elle est fille de Charles-Claude de Jean, seigneur de Mauville et de Genevive-Elonore Mignot de Montigny. Le portrait que nous a laiss d'elle Mme Vige-Le Brun nousla montre sous un aspect fort agrable, propre charmer les vieux jours de Sabran-Grammont.

    1770 : le couple a une fille Louise-Delphine-Elonore-Mlanie de Sabran (1770-1826).

    Elle est baptise Paris, paroisse Saint-Roch.

    1773 : aprs l'ge de la guerre, vient celui des honneurs. Le 1er janvier 1773, Sabran-Grammont est fait commandeur de Saint-Louis 71 ans. Distinction accompagne de 3000livres de pension sur lordre.

    1774 : le couple a son deuxime enfant, un fils, Louis-Marie-Elzar de Sabran (1774-1846), baptise Paris lui aussi. Le 4 novembre 1774, Sabran-Grammont se retire du corps dela marine 72 ans. Le roi le fait lieutenant gnral des armes navales "ad honores" et luiaccorde 8000 livres de pension sur la marine.

    1775 : g de 73 ans, le lieutenant-gnral des armes navales Joseph de Sabran,comte de Grammont, commandeur de Saint-Louis, s'teint chez lui, le jour mme du sacre deLouis XVI. Il laisse une veuve de 26 ans, une fille de cinq ans, un fils de quelques mois.

    1787 : sa fille, ge de 17 ans, pouse le comte de Custine. En 1794 il monte l'chafaud. Jeune veuve de 24 ans, elle prend le chemin de l'exil et mourra en Suisse en 1826,soit un an avant sa mre, la marquise de Boufflers.

  • 20

    1797 : au mois de mai, la comtesse de Sabran-Grammont, veuve du lieutenant-gnral,alors ge de 48 ans, pouse Breslau Stanislas-Jean, marquis de Boufflers (1738-1815),ancien marchal de camp (depuis 1784), ancien gouverneur du Sngal et de Core (en 1785),membre de l'Acadmie franaise (depuis 1788). Le marquis de Boufflers, pote brillant, finlettr et bel esprit, partisan des rformes aux Etats Gnraux de 1789, a pris lui aussi lechemin de l'Allemagne o il sjourna aprs le 10 aot 1792 jusqu'en 1800.

    Sous l'Empire : le fils de Sabran-Grammont, Louis-Marie-Elzar de Sabran (1774-1846) imite davantage son beau-pre, l'acadmicien marquis de Boufflers, que son pre, qu'iln'a du reste pas connu. Il se plonge dans la posie, le thtre, crit drames et tragdies. Sesrelations avec Mme de Stal (1766-1817), fille de Necker, exile par Bonaparte en 1803(aprs "Delphine", paru en 1802), puis par Napolon en 1810, le font enfermer son tour Vincennes (en 1813), puis exiler cinquante lieues de Paris. Sous la Restauration, Mme deStal rentre en France pour mourir. Quant au comte de Sabran, clibataire et dernier de sabranche, il mourra en 1846 72 ans, ct de Saint-Germain-en-Laye.

    Malgr l'illustration de son nom, le comte de Sabran-Grammont est le type mme del'officier de la marine royale sous le rgne de Louis XV, parvenu au gnralat plus par sonmrite personnel, ses blessures et la dure de sa carrire, 56 ans, que par le favoritisme hontde la cour dont jouissaient certains de ses contemporains. Entr aux gardes-marine 16 anscomme la plupart de ses collgues, il a gravi tous les degrs de la hirarchie maritime,lentement mais srement.

    Officier provenal, d'illustre maison, sa carrire, son train de vie, ses revenus, sontassez comparables ceux de son lointain cousin le lieutenant-gnral des armes navalesJean-Joseph de Raflis, comte de Brovs (1715-1782), gentilhomme de petite maison. Leursdeux vies, leurs deux carrires se ressemblent, au point que le comte de Brovs pousa en1782, 67 ans lui aussi, une jeune fille de 22 ans seulement...

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    NOTES

    (1) Voir pour la gnalogie Sabran, ARTEFEUIL, Dictionnaire de la Noblessehroque de Provence, Avignon, Girard, 1759 et 1786, 3 vol. Voir aussi BRIANCON (abb R.de), L'tat de la Provence contenant ce qu'il y a de plus remarquable dans la police, dans lajustice, dans l'glise, et dans la noblesse de cette province, avec les armes de chaque famille,Paris, 1693, 3 vol..

    (2) D'aprs l'Armoriai de POTIER de COURCY, suite du Pre ANSELME, t. IX, 2epartie, p. 104, article Sabran.

    (4) Parmi les officiers du nom de Glandevs, nous citerons les trois officiers gnrauxqu'ils ont donn la marine : Pierre-Andr, commandeur de Glandevs-Castellet (1689-1764),chef d'escadre des armes navales en 1752, retir lieutenant-gnral en 1764. Son frre, lecommandeur Franois de Glandevs-Casteilet (1706-1774), chef d'escadre en 1767. Leurneveu, le chevalier "Franois" de Glandevs-Castellet (en ralit Jean-Baptiste) (1728-1803),chef d'escadre en 1784. Voir pour les Glandevs, notre mmoire de matrise, Les officiers duGrand Corps Toulon au XVIIIe sicle, (Origines, conditions, services), Nice, 1973, sous ladirection de M. le Professeur Maurice Bordes.

    (5) Voir SABRAN-PONTEVES (MM. de), Gnalogie historique de la maison deSabran-Pontevs, Paris, Firmin-Didot, 1897. Bonne monographie familiale, quoiqueincomplte.

    (6) Achille, marquis de Broglie, lieutenant-gnral des armes navales en 1737, meurt Paris le 13 avril 1750. Fils de Victor-Maurice, comte de Broglie (1647-1727), frre deFranois-Maurice, duc de Broglie (1671-1745), oncle de Victor-Franois, duc de Broglie(1718-1804), marchaux de France en 1724, 1734 et 1762.

    (7) Archives communales de Toulon, paroisse Sainte-Marie, 17 aot 1744, f 116.

    (8) Archives communales de Toulon, paroisse Sainte-Marie, 15 janvier 1725, f 5.

    (9) Mariage de Nicolas de Sabran, chevalier, seigneur de Beaudinar, alors lieutenantde vaisseau et capitaine de cie franche, le 2 mai 1701, devant Mouton, notaire Toulon,insinu Toulon le 13 mai 1701, f 1544, Contrat cit dans les tables du marquis deBoisgelins, insinuations de Toulon, Archives communales de Toulon.

    (10) Archives communales de Toulon, paroisse Sainte-Marie, 2 dcembre 1726, f 91.Pour la gnalogie Dasque voir CAILLET (R.), Le livre de raison d'un bourgeois marseillais,Flix-Antoine Dasque, commissaire-gnral de la marine (1710-1779?), in ProvenceHistorique, fasc. hors srie, dcembre 1956.

    (11) Entre autres le capitaine de vaisseau de Motheux et son fils, garde de la marine le10 avril 1714, lieutenant de vaisseau le 1er avril 1738, capitaine de vaisseau le 1er avril 1748,retir du service le 15 janvier 1762,

    (12) Voir pour les Geoffroy d'Antrechaus, GRAS (G.), Le chevalier d'Antrechaus(1693-1762), in Bulletin de la Socit des Amis du Vieux Toulon, n 14 et 15, 2e et 3etrimestres 1927.

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    (13) Archives communales de Toulon, paroisse Sainte-Marie, 29 avril 1725, f 35.

    (14) Archives communales de Toulon, paroisse Sainte-Marie, 31 octobre 1707, f 168.Et 5 janvier 1742, f 6. Son acte de spulture le dit g d'environ 30 ans, au lieu de 35. Notonsau passage, la mort Toulon, cinq ans plus tard, du lieutenant (14) de vaisseau Eizar-Alphonse de Sabran (par forcment Beaudinar), chevalier de Saint-Louis, mort 80 ans, le 9juillet 1747, paroisse Sainte-Marie, f 85.

    (15) Testament de Michel de Sabran-Bagnol, Archives communales de Toulon,Insinuations de Toulon du 28 janvier 1746, f 91,

    (16) Archives communales de Toulon, paroisse Sainte-Marie, 12 octobre 1745, f116.

    (17) VERGE-FRANCESCHI (Michel), Gnalogie et carrire du lieutenant gnraldes armes navales Jean-Joseph de Raflis, comte de Broves (1715-1782), paratre.

    (18) Voir note 5.

    (19) GRASSE (comte de), Les de Grasse et la ville de Grasse, Grasse, 1919. EtGRASSE (marquis de), Histoire de la maison de Grasse, Paris, 1933, 2 vol.

    (20) Franois-Joseph-Paul, marquis de Grasse-Tilly, n au Bar en 1722, mort Parisen 1788.

    (21) SAINT-SIMON (Louis, duc de), Mmoires, d. Jean de Bonnot, Paris, 1967,tome XV, p. 293.

    (22) Archives du Port de Toulon (dornavant abrg A.P.T.), srie "Soldes et Revues",2 E 4 17.

    (23) A.P.T., 2 E 4 18, anne 1721.

    (24) Ibidem.

    (25) Pour la carrire de Sabran-Grammont nous l'avons tablie partir des A.P.T.,srie 2 E 4 de 1718 1774. Voir aussi aux Archives nationales, son dossier personnel, srieC7 et Cl 166.

    (26) A.P.T., 2 E 4 19.

    (27) A.P.T., 2 E 4 20. Et 2 E 4 21.

    (28) A.P.T., 1 L 188, f 161.

    (29) Pour le combat du Cap Sici voir LACOUR-GAYET (G.), La Marine militaire dela France sous le rgne de Louis XV, Paris, Champion, 1902. Voir aussi BRUN (V.), Guerresmaritimes de la France, port de Toulon, Paris, Pion, 1861, anne 1744.

    (30) A.P.T., 2 E 4 28 et I L 190, f 123 v.

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    (31) Pour Sabran-Grammont fait capitaine de vaisseau, voir A.P.T., I L 190, f 169.Pour son rapport sur la perte du Centaure, dat du 26 aot 1759, voir LACOUR-GAYET p.286-287. Lacour-Gayet crit : "C'est une des plus belles pages de notre histoire navale". Dansce rapport trs dtaill, Sabran-Grammont crit aussi : "Pendant que je faisais aux ennemistout le mal que je pouvais, ils m'en faisaient encore davantage. Sur les six heures, toutes mesmanoeuvres taient haches, mes voiles emportes ou cribles de coups, ma grande verguebrise... Il y avait nombre de voies d'eau... Je voyais avec quelque satisfaction notre escadres'loigner et la plus grande partie de celle des Anglais dcide ne pas les poursuivre que jene fusse rendu".

    (32) A.P.T., 2 E 4 42.

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    COMPARAISON DE DEUX CARRIERES*

    Joseph de Sabran-Grammont(noblesse ancienne XIe)

    Jean-Joseph de Raflis de Brovs{noblesse rcente XVIe)

    * Nous ne donnons cette comparaison qu' titre de document. Il ne faut en tirer aucuneconclusion gnrale. Pour ce cas prcis, l'illustration du nom de Sabran ne parait pas avoiravantag le provenal Sabran-Grammont par rapport au comte de Brovs, simplegentilhomme, provenal lui aussi. D'autre part il y a d'autant moins lieu d'opposer les deuxcarrires, que ces deux officiers sont cousins, issus tous deux d'Annibal de Grasse du Bar(1563-1632), trisaeul de Sabran-Grammont, et pre d'Anne de Grasse du Bar, trisaeule deRaflis de Brovs.

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    LES FRERES HOKORE ETANTOINE GRINDA

    PAR Monseigneur Denis GHIRALDIDepuis de nombreuses aimes, Mgr Ghiraldi, vicaire gnral du diocse deNice, poursuit des recherches historiques sur son village natal de Clans. Il aainsi accumul une masse de documents qu'il eut t dommage de laisserdormir dans des dossiers ; trs intressante, en particulier, se rvlent lesrenseignements recueillis sur la vie religieuse, la collgiale de clans, lesecclsiastiques qui ont desservi celle-ci. Mgr Ghiraldi a bien voulu confier Recherches Rgionales une srie d'articles Indits. Dans la prsentelivraison de la revue, nous prsentons une tude relative aux frres Grinda,facteurs des orgues de Clans.

    Ralph SCHOR

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    NAISSANCE ET JEUNESSE D'HONORE GRINDA

    Honor Grinda est n Nice le 30 septembre 1754 comme en fait foi l'acte de baptmedu registre de la paroisse cathdrale Sainte-Rparate : "Au 1er octobre 1754 : Honor Grinda,fils de Dominique et de Marguerite Delmonti pouse Grinda, n hier, baptis par moi FranoisGarcia prtre ; le parrain fut Honor Grinda et la marraine Marie Franoise son pouse" (1).

    Le grand-pre d'Honor tait menuisier et c'est dans l'atelier de l'aeul que tout jeune ilse perfectionna dans l'art de l'bnisterie (2). Comment en arriva-t-il s'intresser la factured'orgue ? On ne sait, les confidences manquent ce sujet. Toujours est-il que pour seperfectionner dans cet art, Honor se rendit dans le sud-ouest de la France auprs d'un expertorganier, Joseph Isnard, parent du clbre Jean Esprit Isnard, auteur de l'orgue de la basiliquede Saint-Maximin dans le dpartement du Var.

    L'APPRENTISSAGE DU METIER ET LES DEBOIRES D'HONORE

    Nous trouvons donc Honor en compagnie du facteur Joseph Isnard arrivant Albipour travailler l'orgue de Sainte-Ccile ; nous sommes en aot 1778, Honor 24 ans (3) ;Joseph est aid de son "garon", comme on disait alors, c'est--dire de son ouvrier appelGrinda (souvent caligraphi Grainda ou Graind ou encore Grind), facteur d'orgue, originairede Nice "en Pimont" (sic). Il faut suivre ici les documents d'archives qui nous relatent lediffrend qui ne tarda pas natre entre Isnard et son "garon" : l'histoire en vaut la peine.

    Tous deux ont trouv logement chez Raymond Bonnet, matre ptissier de la ville, aumois d'aot 1778. Or moins d'un an aprs, au mois de mai 1779, Honor dpose plainte contreIsnard auprs du Tribunal d'Albi dans les termes suivants : "A vous Messieurs les officierstemporels d'Alby, supplie humblement le sieur Graind, facteur d'orgue originaire de la ville deNice, et vous expose qu'ayant eu le malheur de rester quelques temps avec le sieur Isnard,aussi facteur d'orgue, occup dans ce moment rparer l'orgue de Sainte-Ccile, soit jalousie,soit toute autre cause, celui-ci a depuis longtemps conu le projet de ruine au suppliant enprenant les voies les plus malhonntes et les plus injurieuses".

    Et la plainte continue en signalant d'abord que, selon ce qui tait convenu avec le pred'Honor Grinda, le sieur Isnard crivit en novembre, donc trois mois aprs l'arrive Albi,une lettre dans laquelle le dit Isnard se permettait toutes sortes de calomnies contre Honor :mauvaise conduite, drglement total dans les murs, esprit malin et pervers ; mieux quecela, pour le discrditer auprs de son pre, Isnard n'hsitait pas affirmer qu'Honorl'insultait chaque fois qu'il le rencontrait et qu'il tait capable des plus mauvaises actions.

    La diffamation, ajoute le plaignant, devint publique, Isnard disant qui voulaitl'entendre dans la ville d'Albi qu'Honor tait un mauvais sujet.

    Ce qui fut plus grave encore c'est qu'Isnard, alors que Grinda travaillait Toulouseauprs du sieur Rabini, facteur d'orgue, qui l'avait engag par accord du 7 avril 1779 puisqu'ilavait t renvoy par Isnard, celui-ci osa fabriquer une lettre qu'il data de Paris du 1er mai1779 au bas de laquelle il imita la signature de Clicquot, facteur d'orgue du Roi. Cette lettreinvitait Grinda venir travailler Paris chez Clicquot pour se perfectionner dans sa profession; on lui demandait de partir aussitt, de faire un tat des dpenses qu'occasionnerait le voyage,il en serait rembours son arrive Paris. Drle de mthode que celle qu'employait Isnardpour se dbarrasser au plus vite d'un artisan dans lequel sans doute il voyait un concurrentpotentiel : sa supercherie qui aurait pu lui coter cher fut bien vite dcouverte.

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    Grinda, d'abord allch par la soi-disant proposition de Clicquot, proposa Rabini dersilier la convention passe le 7 avril 1779. Cet accord sign pour 3 ans stipulait quemoyennant la somme de 200 livres, Rabini s'obligeait perfectionner l'apprenti Grinda dansl'art de la facture des orgues, sous la condition qu'au cas ou celui-ci quitterait avantl'expiration des 3 annes, il perdrait les 200 livres qui profiteraient Rabini : ce qui arrivaquand Grinda offrit Rabini de rsilier la convention passe entre eux pour aller rejoindreClicquot Paris.

    Grinda faillit tomber dans le pige tendu par Isnard, lorsqu'il dcouvrit la supercherie"par la confrontation des critures", ce qui suppose que Grinda a eu en mains des lettresauthentiques de Clicquot que peut-tre Rabini possdait, puisqu'il dit dans sa dposition "qu'ilfut instruit que la lettre tait falsifie".

    C'est donc quatre griefs graves que Grinda fait valoir dans sa dposition : les injurespubliques profres par le sieur Isnard ; les lettres crites au pre Grinda qui sont de vraislibelles diffamatoires ; le prjudice caus en lui faisant rompre l'accord fait avec Rabini etl'usage de faux dans la lettre soi-disant signe Clicquot.

    Le 22 mai 1779 8 heures du matin, Grinda dpose sa plainte au greffe du Tribunald'Albi, assist de Me Bousquet son avocat, lequel affirme tre venu exprs de la ville deToulouse o il a sa rsidence, distante d'Albi de 10 lieues, pour la poursuite de ce procscriminel pour fait de diffamation, rclamant d'ailleurs a l'inculp Isnard les frais de voyagealler et retour de Toulouse et les frais de sjour.

    Ce mme jour 22 mai 1779, "Raymond Monoron, Huissier reu en la Tour Royaled'Albi, et rsidant Albi convoqua les tmoins : Goudal, bnficier de l'glise Sainte-Cciled'Albi, le sieur Maurel, menuisier, et Franois Salvas, aussi menuisier au faubourg du Vigand'Albi, tous quatre habitants Albi et somms d comparatre ce mme jour une heure et demide l'aprs midi devant Me Lafon, avocat au Parlement, rgent de la Temporalit Albi sise prsde l'Archevch".

    Le 25 mai 9 heures du matin, furent convoqus par l'huissier Monoron, MePeyrouious, bnficier de l'glise collgiale Saint-Salvi d'Albi, et demoiselle Plagie Carret,pouse du sieur Bonnet, matre ptissier, logeur des deux hros du procs.

  • 29

    Le sieur Bonnet, matre ptissier Albi, g de 45 ans, "assign en tmoin, aprs avoirprt serment "la main leve la Passion figure de Notre Seigneur Jsus Christ et promis dedire la vrit", n'tant "ni serviteur ni domestique, ni parent ni alli d'aucune des deuxparties", ayant entendu lecture de la plainte de Grinda, dposa que "le sieur Isnard facteurd'orgues tant venu dans Albi l'anne passe 1778 avait avec lui Grinda et qu'ils vinrent logerchez lui, Bonnet, au dbut du mois d'aot et qu'ils y demeurrent environ 3 mois. Que durantces 3 mois Isnard parla de Grinda "son garon" toujours trs avantageusement et avec les plusgrands loges, que sur la fin du mois d'octobre, lorsque Grinda eut quitt Isnard, celui-cichangea de ton et se mit lui dnigrer Grinda comme tant un dbauch, un libertinsusceptible de lui extorquer des commandes et d'aller travailler ailleurs son prjudice. Il luiaffirma mme qu'il n'osait pas sortir en ville la nuit par crainte que Grinda ne vienne vers luipour "lui donner un coup de couteau au ventre". Isnard affirma bien d'autres choses de cetteespce, dit Bonnet, mais il les a oublies. Cependant il se souvient qu'Isnard lui a dit un jourque, quoique la porte d'entre soit bien ferme avec deux verrous, lorsqu'il et renvoyGrinda, il mettait derrire la porte une barre de bois parce qu'il craignait que Grinda "songaron" ne vint ouvrir pendant la nuit avec de fausses cls. Quant lui, Bonnet, il a connuGrinda comme fort honnte garon et il n'a jamais entendu dire que du bien de lui.

    Le second tmoin cit est Raymond Maurel, matre menuisier Albi, g de 61 ans. Ilconnat d'autant mieux Grinda que celui-ci a travaill dans son atelier durant 3 mois avant "laPque dernire" (c'est--dire Pques 1779). Il n'a rien aperu ni connu de mauvais chez le dit"Graind", bien au contraire, dit-il : de trs bonnes moeurs, beaucoup d'honntet" de politesse,de douceur ; trs bon ouvrier en menuiserie qui s'est toujours comport en honnte homme,Maurel se doit, dit-il, de lui rendre le tmoignage qu'il mrite tous gards.

    Le troisime tmoin, Franois Salivan, matre menuisier habitant Albi, g de 55 ans,apporte un point de vue un peu diffrent et intressant. II affirme que quelque temps aprsqu'Isnard facteur d'orgue fut venu Albi pour rparer l'orgue de Sainte-Ccile, ayant pour"garon" Honor Graind, demeurant tous deux chez Bonnet ptissier, Isnard renvoya Graindau sujet d'une lettre que la femme d'Isnard avait trouv cachete sur la table de la chambre deGraind.

    Qu'tait cette lettre ? Que contenait-elle ? On ne le sait pas. Peut-tre est-ce la soi-disant missive de Clicquot qui fut le prtexte cr par Isnard pour se dbarrasser de Grinda ?Franois Salivan ajoute qu'Isnard, une fois Graind renvoy, se trouva sans "garon" et qu'ildut employer les ouvriers de la ville du nombre desquels lui, Salivan, se trouvait et qu' cettepoque il a entendu dire par Isnard que Graind tait un bon ouvrier mais qu'il empchait lesautres ouvriers trangers de venir travailler avec lui, qu'il lui avait jou bien des mauvaistours, qu'il tait "rapporteur" et qu'il mettait le trouble dans son mnage (!!).

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    Le quatrime tmoin est Messire Pierre Goudal, clerc, tonsur, prbende de l'glisemtropolitaine Sainte-Ccile de la ville d'Albi, g de 61 ans. Messire Goudal, organiste deSainte-Ccile a bien connu Isnard qu'il avait charg de rparer les orgues de ladite glise, etpar le fait mme Graind qu'il a vu pendant 3 mois environ chez Isnard pour lequel il travaillaitcomme "garon". Il a t tmoin qu'Isnard traitait vraiment Grain comme son fils, qu'il luifaisait des "remontrances amicales pour sa conduite" et qu'en cela Isnard ne faisait querpondre aux sollicitations que le pre de Graind lui faisait par ses lettres dans lesquelles il luirecommandait son fils et le priait de le renseigner sur sa conduite. Isnard a d'ailleurs ditplusieurs fois au tmoin que Graind tait un bon ouvrier quoiqu'un peu tourdi et lger et quece n'est que parce que Graind s'est mal comport vis vis d'Isnard que celui-ci l'a renvoy.Graind a dit au tmoin en plusieurs occasions des choses contre la rputation d'Isnard, contresa femme et contre une demoiselle qui est chez lui. Par contre Isnard n'a jamais rien dit autmoin de dfavorable contre Graind qui, tant dj renvoy, est pourtant venu le solliciterd'intercder pour lui auprs d'Isnard ; Messire Goudal a rpondu que c'tait un peu tard, quoiGraind ajouta qu'en conscience il ne pouvait plus demeurer chez Isnard ne pouvant pas y faireson salut.

    Les dpositions continuent le 25 mai et le premier tmoin cit est demoiselle PlagieCarret, pouse Bonnet, ptissier Albi, ge de 47 ans.

    Demoiselle Carret se souvient parfaitement d'Isnard et de son "garon" Graind quiprirent logement chez son mari Bonnet en 1778 o il demeurrent 3 mois : elle ne peut pasprciser la date exacte de l'arrive et du dpart de ces locataires, mais c'tait comme elle dit"sur le dclin de l'anne". En tous cas pendant ces trois mois elle ne trouve rien dire quant la conduite de Graind et ses moeurs ; elle le vit toujours fort exact son devoir, qu'un jourvoulant souper dehors il en demanda la permission son matre Isnard. Une fois brouillsIsnard renvoya Graind avant l'chance des 3 mois et se mit alors dire que ce "garon" taitun mauvais sujet capable de tout entreprendre, aussi demanda-t-il aux poux Bonnet dechanger la serrure de la porte d'entre craignant que Grinda ne la force durant la nuit et qu'illui fasse un mauvais sort. Devant cette crainte Isnard prit la prcaution de mettre une barre debois derrire la porte. La dame Bonnet se rappelle aussi qu'Isnard, parlant d'un voyage qu'ilavait fait Rodez avec Graind pendant qu'ils logeaient encore chez elle, affirma que Graind lepersuada, lui Isnard, qu'un chanoine de Rodez ou un autre prtre du chapitre lui avait prt undouble louis d'or ; Isnard tait persuad que Graind lui avait vol lui Isnard ce louis d'or. Orjustement il y a quelques jours Graind vint montrer la dame Bonnet une lettre de son prequi lui faisait savoir qu'il avait rembours l'ecclsiastique de Rodez le double louis que luiGraind avait emprunt, ce qui montrait bien le mensonge d'Isnard.

  • 31

    Vint encore le tmoignage d'Antoine Peyroulous, bnficier et organiste de l'glisecollgiale de Saint-Salvy d'Albi, g de 21 ans. Peyroulous affirma qu'il connat d'autantmieux Graind que celui-ci vint loger chez lui lorsqu'il eut quitt Isnard chez lequel il tait enqualit de "garon". Il n'a que des loges en faire tant pour sa conduite que pour la rgularitde ses moeurs. Durant son sjour chez lui, Graind a fabriqu un clavecin appel "forte piano",construit avec art et got et qui a t agr de tous les connaisseurs. Lui ne sait rien desdmls qui ont eu lieu entre Graind et Isnard. Il a seulement entendu dire par le nommFonces, matre de chapelle de la mtropole d'Albi, qu'Isnard prtendait que Graind tait unmauvais ouvrier, incapable de faire un bon ouvrage, mme pas de terminer convenablement laconstruction du "forte piano" qu'il avait entreprise, qu'il tait d'ailleurs d'un caractre mauvais.Revenant un jour d'une promenade en compagnie de Graind, ils rencontrrent Isnard qu'ilssalurent en passant ; mais Isnard apercevant Graind dtourna la tte, refusa le salut ets'adressa Graind en ces termes : "Je n'ai que faire de ton salut, tu es un drle, un polisson etje veux te faire chasser de la ville" !...

    Telles furent les dpositions dont la teneur nous est parvenue. Nous ne savonsmalheureusement pas comment se termina le procs, les minutes en sont perdues ainsi que laplaidoirie de l'avocat, Me Bousquet. On peut imaginer que Grinda eut gain de cause, lestmoignages en sa faveur tant indiscutables et les calomnies d'Isnard sans fondement.

    Toujours est-il que le sjour de Grinda Albi et Rodez lui fut bnfique. Il acquitsrement une matrise incontestable du mtier, une connaissance dtaille de la factured'orgue franaise qu'il essaiera d'introduire plus tard dans ses ralisations nioises ; peut-treaussi garda-t-il de ce sjour "en France" une certaine nostalgie qui le dterminera plus tard,lorsqu'aprs la chute de l'empereur en 1814 le comt de Nice redevint sarde, repartir enFrance, se fixer en Roussillon, comme on le verra, d'autant plus facilement que ses gotsdemeurs franais ne furent pas trs priss dans la composition des instruments qu'ilconstruisit dans le Comt.

    Comme l'crit R. Saorgin (4) : "Le comt de Nice, province du royaume de Sardaigne,vit sous l'influence culturelle pimontaise. L'univers culturel pimontais est clos, trsconformiste, conservateur et, surtout, impermable aux courants de pense culturelle quianiment l'Europe au 18me sicle. Or, la facture d'orgue est un art vivant, voluant sans cessetechniquement et esthtiquement et demandant de nombreux changes. Les facteurstravaillent donc un certain temps dans le Comt mais ils n'y restent pas. C'tait le cas de ce deLa Farge qui, quatre ans aprs s'tre install Nice, en 1628, s'en tait all terminer sa carrireen Avignon. C'est le cas aussi, plus typique, des frres Grinda. Ceux-ci, revenant dans leurpays natal, essaieront de fonder un atelier de facture mais, pendant vingt ans, ils ne russiront construire que trois instruments et ils s'occuperont surtout de petits travaux de restauration.Lasss par ce pays difficile ils retourneront finir leurs jours dans le sud-ouest".

    LE RETOUR AU PAYS ET LES PREMIERS TRAVAUX

    Nous ne savons pas quelle poque exacte Honor Grinda revint dans son paysd'origine o il retrouva son frre cadet Antoine, menuisier habile qu'il associa sonentreprise. Toujours est-il que le 20 dcembre 1789 les frres Grinda se voient chargs par leConseil communal de Villefranche de construire un orgue pour l'glise paroissiale Saint-Michel. Ce travail cotera 2.500 lires non compris le buffet (5). Voici ce que dit de ce travailR. Saorgin (6) :

  • 32

    "L'glise Saint-Michel ayant t consacre en 1760, peu de temps aprs saconstruction, il est probable que l'orgue des frres Grinda fut le premier y tre install. Ledevis de construction n'ayant pas t retrouv ce jour, nous ne pouvons fournir que ladescription de cet instrument en son tat actuel. Un simple examen permet cependantd'affirmer que la tuyauterie restante et une grande partie de la mcanique sont authentiques.Absolument semblable a celui de l'Escarne, construit un an plus tard, l'orgue de Villefranchepossde un seul clavier et un pdalier. Le sommier est divis en deux parties diatoniques sanspremier ut dise. Dans le fond de chaque laye on peut lire l'inscription suivante :

    FAIT PAR GRINDA FRERES, FACTEUR D'ORGUE DU ROI DE SARDEGNE CE 25AOUT 1790"

    Peu de temps aprs la signature de la convention avec le Conseil communal deVillefranche, une autre convention est passe entre Grinda l'an et le Conseil de Fabrique del'Escarne, le 30 juin 1790. Grinda propose deux devis, l'un plus important de 30 jeux pour5.000 livres, l'autre plus simple de 10 jeux pour 3-500 livres (7), L'anne suivante l'instrumenttait achev ainsi qu'en tmoigne l'inscription que l'on peut lire dans le fond de la laye : "Faitpar Grinda frres, facteur d'orgue du Roy de Sardgne a Nicca, ce Moy de Mey 1791" (sic).Citons encore R. Saorgin (8) : "II semble que le Conseil de Fabrique se dcida plutt pour le2e devis mais que les frres Grinda, sans doute pour plaire aux fabriciens et s'assurer par lune bonne renomme dans leur rgion, optrent d'eux-mmes et par la suite pour le 1er devisplus riche d'un cornet, d'une pdale et de deux rangs de plein-jeu supplmentaires. En effetdans un procs-verbal de rception de l'orgue, dat du 3 octobre 1791, Giuseppe Castellari,matre de chapelle Nice, constate que les facteurs avaient construit 252 tuyaux en plus deceux qui leur avaient t demands. En signe de reconnaissance, ces adjonctions furent payesaux facteurs la somme de 50 cus de France. Castellari se montra satisfait des travaux,principalement dans leurs parties mcaniques, mais il ne trouva pas la sonorit son got et ilrclama une rharmonisation".

    LE TEMPS DE LA REVOLUTION

    C'est dans le mme temps que Grinda accepta de construire l'orgue de Clans ; il avaitsign la convention avec le Conseil communal le 23 fvrier 1791 et l'inauguration avait eulieu le 8 septembre 1792. Mais les vnements qui se prparaient allaient changer le cours deschoses. Il est difficile de savoir comment Grinda vcut l'entre des troupes franaises dans lecomt de Nice mais, trs vite, nous le retrouvons en activit Nice au service del'administration militaire du district. J'ai dcouvert dans un des registres contenant lesptitions concernant les migrs et les domaines nationaux deux curieuses demandes deGrinda que je vais rapporter telles qu'elles se trouvent consignes dans le document enquestion (y compris l'orthographe et le style) (9) et qui nous montrent de singulires activitsde la part d'un facteur d'orgue, travaillant il est vrai avec son frre qui tait un talentueuxbniste :

    "N 415. Ptition du citoyen Honor Grinda prsente au Dpartement des Alpes-Maritimes, et le Renvoy de ce dernier au district de Nice, tendent rclamer 120 livres pourtrente jours qu'il a travaill au dpt de la Croix. Arrt du Dpartement : Vu la ptition duCitoyen Honnor Grinda en date du 27 nivse de l'anne dernire (donc 27 Nivse an II soitle 15 janvier 1794) tendant rclamer le payement de 120 livres pour trente jours qu'il atravaill au dpt de la Croix.

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    Vu le renvoy de la Commission administrative du Dpartement des Alpes-Maritimesci dessus en date du 9 frimaire de l'an 3e (soit le 30 novembre 1794)

    Considrant que le ptitionnaire ne prsente aucun titre qui constate lgalement lacrance qu'il rclame,

    La Commission administrative du District de Nice, ou l'agent National, arrte qu'il n'ya lieu dlibrer. Nice le 26 Nivse an 3e de la Rpublique franaise une et indivisible (soitle 14 janvier 1795).

    Quel tait "ce dpt de la Croix" dont il est parl et quel travail y fit Grinda ? On ne lesait pas. Il est peu probable que ce soit le local o Grinda dposera les tuyaux des orguesqu'on lui demandera de dmonter comme on le verra plus loin.

    "NQ 416. Ptition du Citoyen Honnor Grinda prsente ce Dpartement. Renvoi dece dernier ce district, dans laquelle dit avoir satisfait les ouvriers et fournisseurs pour laconstruction de l'chafaud (sic) de la guillotine et rclame le payement de deux mois par luiemploys la dite construction en qualit de Directeur.

    Avis du District ; Vu la ptition ci-dessus du Citoyen Honnor Grinda dans laquelle ditavoir satisfait les ouvriers et fournisseurs pour la construction de la guillotine et rclamant lepayement de deux mois par lui employs la dite construction en qualit de Directeur.

    Vu les quittances des dits ouvriers et fournisseurs se montant en tout deux mille huitcent six livres, au nombre de onze, Vu le renvoi de la Commission dpartementale des Alpes-Maritimes Vu l'arrt du Dpartement des Alpes-Maritimes en date du 26 floral de l'annedernire (le 26 floral an 2, soit le 16 Mai 1794)

    Considrant que par le dit arrt il rsulte que le mmoire du susdit Grinda a t rduit la somme de deux mille huit cent six livres dix sols et que mandat lui en serait expdi sousla dduction de deux mille cinq cent livres qu'il avait reu compte la charge dudit Grindade satisfaire tous les ouvriers et fournisseurs et d'en rapporter quittance, Considrant que le ditGrinda a rempli le but dudit arrt, La Commission administrative du District de Nice, oul'agent National est d'avis qu'il doit tre pay au Citoyen Honnor Grinda la somme de troiscent six livres et dix sols, solde des deux mille huit cent six livres et dix sols ainsi qu'il constepar le dit arrt.

    Et quant au payement rclam de deux mois employs par le dit Grinda laconstruction de la guillotine en la dite qualit, arrte qu'il n'y a point lieu dlibrer.

    Nice le 26 Nivse an 3e Rpublicain (14 janvier 1795)

    Le 14 brumaire an III (4 novembre 1794) l'administration du district de Nice ordonnepar un arrt au citoyen Honor Grinda de recueillir dans ses ateliers tous les orgues ou"portions d'iceux" qui restent dans les "ci devant Eglises et Chapelles de la Commune deNice, Villefranche et autres communes de ce district o il pourrait y avoir de ces instruments".On lui demande de prendre un magasin o il puisse dposer tous ces "objets", ce local seraaux frais de l'administration ; quant Grinda, il sera tenu de rendre compte l'administrationde tout ce qu'il aura trouv. Le dcret en question, dat donc du 14 Brumaire an III, est signde Rouchet, Bermondi, Max Laure et Bernard (10).

  • 34

    Grinda se mit au travail qui durera jusqu'en juin 1795 et fit son rapport en date du 23messidor en IV (11 juillet 1796) ; il crit d'ailleurs celui-ci au dos de l'arrt du 14 brumairean III qu'on lui avait remis. Il intitula son rapport : "Note des oprations faite par le CitoyenGrinda, facteur d'orgue, d'aprs la rquisition de l'administration du District de Nice en datedu 14 Brumaire an III de la Rpublique.

    1) L'orgue de l'Eglise des Augustins contient deux cents tuyaux tant en bois qu'enalliage, trois soufflets, une secrte avec son mcanisme, deux claviers, l'un main et unpdalier.

    2) L'orgue de Saint-Jean-Baptiste contient deux cent quatre vingt dix tuyaux tant enbois qu'en alliage, deux soufflets, une secrte, un clavier main et un pdalier avec sonmcanisme.

    3) L'Eglise des Cordeliers (Saint-Franois) contient 340 tuyaux tant en bois qu'enalliage, deux soufflets, une secrte, un clavier main, un pdalier avec son mcanisme.

    4) L'orgue Sainte-Rparate (Cathdrale) consiste en une "garde robe", une secrte, 2claviers, 2 soufflets avec 212 tuyaux.

    5) Les effets du cy devant Club sont les suivants : onze tuyaux de bois, 2 soufflets, unepartie de mcanisme, 67 planches, 53 chevrons.

    Les articles mentionns ci-dessus, ajoute-t-il, sont entre les mains du citoyen Grinda,facteur d'orgue, qui les remettra d'aprs un ordre du Dpartement (11)".

    Un premier inventaire dat du 13 prairial an III (1er juin 1795) sign Grinda, facteurd'orgue, n'est pas identique au prcdent qui lui est postrieur, il ne mentionne pas les dbrisretirs de l'glise des Jsuites (paroisse Saint-Jacques, le Gsu) qui avait t dvolue laSocit Populaire, ou Club. Ce texte est une copie "extrait mot mot de l'original existant auxArchives de la Prfecture du Dpartement des Alpes-Maritimes" dat du 16 fructidor an XI (3septembre 1803), faite par le Garde des Archives Terese qui mentionne en marge : "Pour lesadministrateurs de l'Eglise Cathdrale de Nice" (12).

    Tous ces rapports nous montrent qu'il n'y avait Nice l'poque que cinq instruments,tous trs modestes ; or la ville comptait 25.000 habitants en 1790. Le plus important tait celuides Cordeliers (Saint-Franois) qui n'avait que 340 tuyaux ; celui de la Cathdrale taitridiculement petit puisque contenu dans une "garde robe" (buffet) (sic) ; il ne comptait que212 tuyaux pour un vaisseau aussi important que l'glise Sainte-Rparate, et celui desAugustins (Saint-Martin) ne comptait que 208 tuyaux. Quant celui de Saint-Jacques (Gsu)il ne restait que 11 tuyaux de bois. Il faut remarquer l'a propos de Grinda qui ne toucha pas l'orgue de Villefranche, bien que l'ordre lui en fut donn dans l'arrt du 14 Brumaire ; il estvrai que cet instrument ne lui avait pas encore t entirement pay, comme nous l'apprendune lettre d'Honor Grinda au Prfet, date du 2 janvier 1809, c'est--dire 19 ans aprs laconstruction de l'instrument (13), et une autre du 26 avril 1810 o il est question de la dettequi court toujours en ce qui concerne Villefranche et Clans (14).

  • 35

    Que fit Honor Grinda dans les annes qui suivirent immdiatement, on n'a as derenseignements prcis son sujet. II reoit cependant le 19 frimaire an VI 10 dcembre 1797)une attestation dment signe par l'autorit dpartementale qui le lave de tout soupond'migration si tant est qu'on ait pu avoir des doutes ce sujet (15) : "Nous membrescomposant l'administration centrale du dpartement des Alpes-Maritimes certifions tousqu'il appartiendra que le nom de Honor Grinde (sic), natif de cette commune (Nice), deprofession organiste, ne se trouve point port sur aucune liste des migrs de la Rpublique,en foi de quoi, etc...(16).

    Les archives de la chapelle Sainte-Croix Nice rappellent un pisode intressantconcernant les activits de Grinda (17). Cette chapelle avait t ferme au culte, commebeaucoup d'autres aprs les vnements de 1792. Le 1er frimaire an V de la Rpublique (21novembre 1796), les citoyens de la 6e section du Canton de Nice demandent par ptition"conformment la loi du 11 prairial an III (21 mai 1796) qui prvoit la distribution des lieuxdu culte, de bnficier de l'glise de la Croix, tant entendu que les pices construites au-dessus de l'glise et les maisons contigus appartiennent l'hpital de la Croix, carinalinables en vertu de la loi au profit des hospices.

    L'administration centrale du dpartement laquelle tait adresse la ptition a faitsuivre le 17 nivse en V (10 janvier 1797) l'administration municipale, laquelle donne unavis favorable (18).

    Le 29 floral an V (19 mai 1797), les citoyens de la 6e section adressent une nouvelleptition. Faisant valoir que l'glise est dpourvue d'un orgue, et que d'autre part, "ayant euconnaissance que le citoyen Grinda Aine, organiste en cette commune, tient titre de dptcelui provenant du ci-devant couvent des moines de Saint-Franois d'Assise de cettecommune" (couvent qui tait situ place Saint-Franois) , relevant le fait que cet orguepourrait se dtriorer en restant dans l'inaction, ces citoyens demandent l'administrationcentrale de le mettre en leur disposition, ce qui sera accord le 2 prairial an V (21 mai 1797)(19).

    Comment l'orgue fut-il restaur dans la chapelle Sainte-Croix, on ne le sait pas, maison peut supposer fort logiquement que Grinda lui-mme remonta l'instrument, puisquequelques annes plus tard un registre des dlibrations concernant la chapelle et renfermanttous les actes entre le 1er frimaire an V (21 novembre 1796) et 1808 rapporte le dtail de laMesse de Requiem clbre en la chapelle le 3 mars 1804 l'occasion du dcs en exil deMgr Valperga qui avait du quitter Nice prcipitamment le 30 septembre 1792 lors de l'entredes troupes franaises commandes par le gnral d'Anselme.

    Il tait 9 heures du matin quand commence l'office des morts suivi de la messesolennelle de Requiem. C'est le chanoine Casoni qui prsidait ces crmonies, assist pardiacre et sous-diacre. A la liturgie s'ajoutait la musique ; les chants taient assurs par leprtre Armirotti et taient accompagns par les musiciens d'un orchestre et par les frresMilon, fils du docteur Milon qui tait membre de l'ancienne confrrie des Pnitents Blancs.Enfin, le tout tait complt par les orgues tenus par l'organiste Grinda, facteur d'orgue Nice.Nous ne possdons pas malheureusement le programme musical qui fut excut, mais tasimple numration des moyens mis la disposition, et ce malgr la relative petitesse de lachapelle, nous permet d'imaginer la qualit de ce programme.

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    Le 18 prairial an X (8 juin 1802), les citoyens Honor et Antoine Grinde (sic)effectuent une vente au profit de Etienne May "de trois pices de terre" dont ils sontpropritaires Eze au quartier de la Reviera et ce pour le prix de 400 francs, "en numrairemtallique dont l'acqureur May a pay la moiti immdiatement en bonnes espces ayant faitl'effective numration sur la table et aprs due vrification et reconnaissance faite par lesvendeurs, ont t tout de suite retires et rembourses auprs d'eux, moiti pour chacun d'eux,le tout suivi au vu et prsence de nous notaire et tmoins soussigns" ; quant la somme de200 francs restant due, l'acqureur s'oblige la payer dans le dlai d'une anne et demiemoyennant un intrt annuel de 5 % (20).

    LE TEMPS DU CONSULAT ET DE L'EMPIRE

    La cathdrale ayant t rendue au culte depuis longtemps puisque l'article 1 de la loidu 2 prairial an III (21 mai 1795) avait accord "aux citoyens des communes et des sectionsdes communes le libre usage des difices destins originairement aux exercices du culte", lesresponsables pensrent bien vite faire replacer dans l'difice un instrument conforme ladimension et la majest du lieu ; une dlibration en italien nous renseigne ce sujet (21) :"Le 20 mai 1800 les prieurs de la congrgation du "Corpus Domini" existant en cettecathdrale Sainte-Rparate, les sieurs Alexandre Pauliani et Agostino Massiglia (crit ailleursMasseilla) dcidrent de faire construire pour l'ornementation de ladite cathdrale une tribune(orchestra) suffisante et apte pouvoir supporter un orgue assez important (ampio) convenant la dimension de cette glise et cela avec la plus parfaite disposition afin de ne pas porterprjudice ladite glise, en considration des deux autels latraux du fon (transept), commeaussi en considration de l'lgance de la porte de sortie, et tout cela avec la plus grandeconomie possible. Dans ce but, avant de dcider une telle construction, nous avons demandla constitution d'un devis chiffr en ce qui concerne les colonnes, l'architrage, les frises,balustrades et corniches qui doivent servir de soutien et d'ornement a la tribune en question, difier au-dessus de la grand'porte. Il y aura sur les deux cts de cette tribune deux partiesconcaves avec leurs consoles de soutien ; le tout sera fait en bois de chne cannel,l'architrave, les frises, les corniches, avec tout ce que cela comporte, la balustrade avec sescolonnettes, les panneaux avec leurs montants cannels ; le tout bien ralis avec une soliditsuffisante et travaill avec toute la matrise possible et selon les rgles de l'art, en touteconformit au projet tant sur la qualit du bois que sur le dtail de la construction. Les prieursprirent la dcision de faire excuter le travail, aprs un appel d'offres au menuisier qui feraitles meilleures conditions. On s'arrta sur la proposition de l'bniste Onorato Verani qui avaitaccept de raliser le projet en question pour la somme de 384 Frs, comprenant laconstruction de la tribune, sa mise en place, le bois ncessaire, les ferrures, les cls, lematriel de maonnerie et les journes de travail. Il fut entendu que cette oeuvre serait raliseen toute conformit au projet, selon les rgles de l'art, pour la somme convenue de 384 francs,le tout ralis le plus vite possible sans interruption dans les travaux ; les prieurs s'engagentenvers le matre bniste Vrani lui faire avoir les bois ncessaires, les ferrures, et tout equ'il faut pour cette ralisation ; de plus ils conviennent avec ledit Vrani de lui payer les 384frs en trois chances, la premire au dbut des travaux, la seconde au milieu de la troisime la fin aprs rception officielle ; toutes les parties s'obligent une observation stricte ducontrat. Ont sign : Giacomo Alessandro Pauliani, Agostino Massiglia et Onorato Verani".

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    Ds la promulgation du Concordat, le 8 avril 1802, les administrateurs de la cathdraledemandrent au Prfet la restitution du matriel des orgues dmonts par Grinda afin d'enreconstruire un tout neuf pour la basilique piscopale. A cette demande, le prfetChteauneuf-Randon rpondit le 2 fructidor an X (20 aot 1802) qu'il dsirait que lesadministrateurs lui fournissent le texte de l'arrt qui avait confi le dpt des orgues Grinda, avant de condescendre leur demande (22); ce qui fut sans doute fait bien vitepuisque le 11 fructidor (29 aot), donc dix jours aprs, le Prfet prit un arrt leur donnantsatisfaction par l'intermdiaire du maire de la ville de Nice, Defly. En effet, celui-ci adressads le 16 fructidor (4 septembre) une lettre aux "citoyens Pauliani et Masseilla, administrateurde la mtropole de Nice", leur fournissant l'extrait de l'arrt du Prfet, leur demandant dedonner connaissance de cet arrt Grinda pour que celui-ci s'excute, et leur signalant ques'ils connaissent quelque autre dpositaire ils veuillent bien exiger de lui qu'il fasse aussi laremise de ce qu'il peut dtenir (22). Grinda restitua donc ce qu'il dtenait (23) et un certainDporta Gaspard, ngociant, inscrit sur la liste des notables et lecteurs, qui avait en rservel'orgue de Saint-Jean-Baptiste, remit lui aussi ce matriel l'administrateur Masseilla quisigna le rapport de restitution du 16 nivse an XI (6 janvier 1803) (24).

    Cependant Grinda n'entendait pas se dessaisir du matriel qu'il avait emmagasinpendant de si nombreuses annes, aprs tout le travail et les frais que le dmontage desinstruments, le transport du matriel et sa garde avaient occasionns, sans tre rembours deses dpenses. Il adressa au Prfet (24) lequel en fit part aux administrateurs par une lettre du13 frimaire an XI (4 dcembre 1802) (24). Grinda pouvait esprer toucher le remboursementde ses frais. Les administrateurs tardrent donner rponse, et, finalement, on ignore si lemalchanceux Grinda - qui attendait toujours le paiement de la dette en suspens de l'orgue deVillefranche et de celle de l'orgue de Clans - put un jour entrer dans son d pour les 3.785francs justement rclams par lui.

    Comme le fait remarquer Michel Hernard