rapport d'experimentation l'application candide sur
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RAPPORT D’EXPERIMENTATION
L’APPLICATION CANDIDE SUR TABLETTE
DURET Caroline, lycée Vaugelas Classe de 2nde
Année 2012/2013
Préambule « Les nouvelles technologies nous ont condamnés à devenir intelligents ! »1
L’univers de l’écrit s’est métamorphosé sous l’impulsion du numérique, dessinant ainsi les contours nouveaux de la littératie, dont le concept connaît une évolution et un essor considérables depuis plusieurs décennies. En effet, de nouveaux canaux de diffusion et avec eux de nouveaux modes sémantiques -‐ texte, image, son -‐ ont émergé. Ainsi, les « digital natives » baignent dans l’environnement médiatique où ils sont nés. Mais, quoique natifs du numérique, ils n’en sont pas moins naïfs. Autrement dit, l’élève du XXIème siècle doit acquérir des compétences en littératie dite médiatique multimodale s’il veut « être » un homme libre. Bien qu’antérieurs à la révolution numérique, on soulignera la modernité des propos d’Hannah Arendt dans l’Humaine condition en 1958 :"Il se pourrait que nous ne soyons plus jamais capables de comprendre, c'est-‐à-‐dire de penser ou d'exprimer, les choses que nous sommes capables de faire (...). S'il s'avérait que le savoir (au sens moderne de savoir-‐faire) et la pensée sont séparés pour de bon, nous serions bien alors les jouets et les esclaves (...) de nos connaissances pratiques, créatures écervelées à la merci de tous les engins techniquement possibles, si meurtriers soient-‐ils." Ni l’enthousiasme ni la peur face à ce Nouveau Monde numérique ne doivent nous faire oublier l’importance des enjeux dans la formation du futur citoyen. Former « l’honnête homme » de la génération 20-‐20 s’avère donc la mission essentielle de l’enseignant de lettres, en tant que passeur de la culture des Litterae Humaniores. Dans les débats qui animent les chercheurs autour de la littératie aujourd’hui, un terme remontant à l'époque des moines copistes a retenu mon attention. Il s'agit du nom « lettrure » qui, au Moyen-‐âge, désignait la lecture et l'écriture envisagées comme une seule et même activité. Emmanuel Souchier, professeur en sciences de l’information et de la communication au CELSA, en définit les caractéristiques, et c'est en m'appuyant sur celles-‐ci que j'ai imaginé cette séquence pédagogique autour d’un certain nombre de compétences étroitement liées à cette nouvelle littératie. En effet, selon E. Souchier, l'objet informatique présente une caractéristique phénoménologique dans la mesure où il induit une double pratique de lecture et d'écriture. Il paraît donc nécessaire de développer à l'Ecole des compétences qui permettront, dans un environnement numérique, d'accomplir ces activités de lettrure. De plus, il évoque le caractère hypertélique de l'objet informatique. L'élève doit donc devenir compétent dans la maîtrise des gestes indissociables de la pratique de lettrure via les médias informatisés. Ainsi, dans le cadre de cette expérimentation, la séquence pédagogique qui suit se propose de répondre à cette double problématique: En quoi l’usage de l’application Candide favorise-‐t-‐elle l’apprentissage d’une nouvelle littératie, littératie médiatique multimodale, en classe de lettres ? La tablette numérique est-‐elle une machine pertinente pour apprendre à « lettrire » ? 1 Le 11 décembre 2007, à l’occasion des 40 ans de l’INRIA, Michel Serres a donné une conférence sur la révolution culturelle et cognitive engendrée par les nouvelles technologies.
La séquence Des compétences en littératie et en littérature Aux questions citées précédemment est corrélée une problématique littéraire. En effet, la lecture de Candide envisagé, dans cette séquence, comme une œuvre intégrale s’insère dans le cadre de l’objet d’étude consacré aux genres de l’argumentation, et consiste à montrer comment les voyages de Candide reflètent la réflexion philosophique de Voltaire. Dès lors, il s’agira de savoir si l’usage de la tablette numérique, par la combinaison des applications, favorise une appropriation des savoirs et des compétences littéraires, si l’édition enrichie d’une œuvre patrimoniale sur tablette offre un accès privilégié à la lecture et à son interprétation littéraire. Enfin, il faudra se demander dans quelle mesure elle propose des ouvertures qui font percevoir aux élèves les spécificités du siècle ou permettent de situer l’argumentation dans une histoire plus longue, conformément aux programmes. Ces compétences s’ajoutent donc aux compétences spécifiques en littératie, à savoir des compétences d’ordre informationnelle (recherche, analyse, hiérarchisation, critique), et des compétences multimodales, c’est-‐à-‐dire qui consistent à comprendre et à communiquer à partir de supports combinant l’écrit, l’image et le son. Enfin, nous veillerons à mesurer les plus-‐values apportées par l’usage de la tablette concernant les compétences relatives au savoir être. Le scénario pédagogique Quelques remarques préalables Il s’agit de donner du sens à la lecture d’une œuvre en l’inscrivant dans la perspective d’une réalisation concrète. Les élèves sont donc informés dès la première séance que l’étude de Candide doit aboutir à l‘écriture collective d’un conte philosophique du XXIème siècle. Afin de mettre en œuvre ce projet d’écriture, un blog est créé dont l’objet principal est d’offrir aux élèves un espace en ligne où retrouver facilement tous les documents nécessaires à l’élaboration progressive du conte. Un projet d’une telle ampleur nécessite une appropriation réelle de l’œuvre initiale. C’est pourquoi la pratique de la lecture aboutit toujours à une réalisation : d’un tweet à l’écriture d’un sujet d’invention, en passant par une carte du mal ou encore un film. Ces activités constituent autant de stratégies au service d’une implication fictionnelle des élèves. Ce blog présente donc l’ensemble des activités menées dans le cadre de cette séquence. Il est disponible à cette adresse : http://vaugelas2si.wordpress.com/ L’application Candide de la BNF, si elle est largement utilisée, n’est pas le seul outil mis à disposition des élèves. Les élèves ont lu le conte au format papier. Quelques uns, trois seulement, munis personnellement de tablettes, ont téléchargé l’application.
1. Séance inaugurale : Voltaire et l’Esprit des Lumières Des consignes invitent les élèves à faire des choix éclairants pour l’étude de Candide, une œuvre des Lumières. Ainsi, les informations sélectionnées depuis l’application et l’exposition virtuelle de la BNF doivent être explicitement mises en relation avec le conte dans la prise de notes. Outils utilisés : Application Candide BNF (Repères) Exposition virtuelle « Lumières » de la BNF Application Evernote La prise de notes peut être protéiforme (écrit/oral/images). Les élèves sont invités à faire un usage pertinent et raisonné du « copier/coller ». Quelques captures d’écran des notes (enregistrées sur l’application Evernote) montrent un usage pertinent et raisonné du « copier/coller ». En effet, à la suite des informations sélectionnées, l’élève prend le soin de justifier le lien qu’il fait avec l’œuvre qu’il a lue.
2. Lecture analytique du chapitre 1 Problématique : En quoi l’incipit s’affirme-‐t-‐il comme le début d’un conte philosophique ? Objectif : définir quelques caractéristiques du conte philosophique Les élèves, répartis en binômes, ont à peu près 50 minutes pour proposer une réponse argumentée à la problématique. Ils sont invités à utiliser la version numérique du livre qui devra favoriser l’autonomie dans la compréhension du texte et son analyse. L’application propose en effet quelques définitions et permet notamment d’éclairer la dimension philosophique par un accès rapide aux concepts (« c » en marge du texte dans l’Application). On propose également aux élèves d’observer les images, dont certaines illustrent bien la tonalité satirique de l’extrait.
On observe une mise au travail rapide et efficace. Même les élèves généralement peu impliqués dans l’analyse des textes se penchent sur le texte. 3. Atelier d’écriture en module : la TWEETO-‐NIGO-‐LOGIQUE La séance de lecture du chapitre 1 en classe entière est prolongée en module par un exercice d’écriture intitulé la TWEETO-‐NIGO-‐LOGIQUE. Après une phase d’observation visant à faire apparaître les faux raisonnements logiques ainsi que la dégradation parodique du discours philosophique, les élèves ont pour consigne de tweeter à la manière de Pangloss en inventant de faux raisonnements logiques. L’exercice est commencé en classe et les élèves poursuivent leurs tweets en asynchrone. Une sélection de tweets est disponible sur le blog, dans la rubrique « De Candide à Coquebin », et à cette adresse : http://storify.com/cduret/tweeto-‐nigo-‐logique-‐et-‐si-‐nous-‐tweetions-‐a-‐la-‐mani Remarque : cette activité a pour but d’être réinvestie dans l’écriture du conte. 4. Intervention en classe d’un professeur de philosophie du lycée sur les notions de « Bonheur » et de « Vertu ». Cette séance consiste à amorcer la réflexion qui permettra d’écrire collectivement le conte philosophique sur le modèle de Candide, et d'évoquer les conditions d'une telle transposition de nos jours, en soulignant à la fois la permanence et l'actualité des questions soulevées par Voltaire. A la suite de ce débat, les élèves ont pour consigne de partager leurs idées pour l’écriture du conte via le réseau social Twitter pendant une dizaine de jours. Le débat sur Twitter porte donc dans un premier temps sur les questions suivantes : quels maux peut-‐on dénoncer au XXIème siècle ? A quoi un monde utopique peut-‐il ressembler aujourd’hui ? Quels personnages ? Quels lieux ? Quelle morale ? 5. De l'atelier d'écriture au sujet d'invention : les aventures de Coquebin Le sujet : Vous allez écrire collectivement un conte philosophique à la manière de Voltaire. Votre personnage éponyme, Coquebin, est un descendant de Candide qui vit de nos jours. Comme lui, il sera chassé d’un paradis illusoire et séparé de celle qu’il aime. Il sera amené, à l’instar de son aïeul, à parcourir le vaste monde à la recherche de sa bienaimée, et ses aventures prendront la forme d’une quête du bonheur. Comme Voltaire, vous chercherez à invalider la thèse de Leibniz, mais vous proposerez une autre philosophie du bonheur. En classe entière, nous procédons à l’analyse du sujet, à la définition des contraintes d'écriture, et à la recherche d’un certain nombre d’idées.
C’est donc l’occasion, sans en avoir l’air, de commencer à recenser sous la forme d’une synthèse les éléments constitutifs du conte « philosophique » en tant que genre littéraire. En effet, les idées avancées par les élèves sont reformulées dans un langage propre à l’analyse littéraire. Les élèves sont également amenés à réaliser que la quête de Cunégonde prend la forme d’une quête du Bonheur, que les voyages sont l’occasion de dénoncer les maux du monde et que Voltaire se livre à une critique de la société de son époque. Ils saisissent donc ainsi les fonctions philosophique et critique du conte. Un article du blog rend compte de cette construction collective des savoirs littéraires : http://vaugelas2si.wordpress.com/category/les-‐aventures-‐de-‐coquebin/ Remarques : C’est en module, en accompagnement personnalisé et en asychrone que s’effectue l’échange des idées et s’élabore progressivement la structure narrative du conte. Les élèves suivent la construction du conte grâce aux articles publiés sur le blog, dans la rubrique « Les aventures de Coquebin » : http://vaugelas2si.wordpress.com/category/les-‐aventures-‐de-‐coquebin/ Des sélections de tweets sont également disponibles à ces adresses : http://storify.com/cduret/ecriture-‐de-‐coquebin-‐un-‐conte-‐philosophique-‐voltai http://storify.com/cduret/coquebin-‐avance 6. S’ensuivent deux activités visant à appréhender l’oeuvre dans son ensemble. a) Activité n°1 « Mots pour maux » Il s’agit de fabriquer une carte du « Mal » à partir de la carte des voyages disponible dans l’Application Candide de la BNF. Les élèves s’appuient également sur l’outil de recherche pour accéder rapidement aux extraits proposés par le professeur comme supports de réflexion. Ils consultent également l’article « Mal » dans le dictionnaire philosophique de l’application. Ils doivent nommer les différents maux en les associant aux lieux et aux chapitres. C’est l’Application Skitch qui est utilisée pour réaliser la carte. Les élèves travaillent par 2 ou 3. Ne disposant que d’une heure pour cette activité, ils sont scindés en 3 groupes ayant chacun la mission de s’occuper d’un nombre restreint de chapitres. Quelques cartes réalisées sont disponibles sur le blog, à cette adresse : http://vaugelas2si.wordpress.com/2013/02/03/mots-‐pour-‐maux/ Bilan de l’activité Il aurait été nécessaire que nous consacrions plutôt 1h30 à cet exercice. Par manque de temps, nous n’avons pu poursuivre l’activité, et tous les groupes n’ont pas finalisé leur carte. Toutefois, ils ont parcouru le conte à la recherche des différents maux, investissant ainsi l’espace du livre, et le bilan est positif quant à l’acquisition de connaissances sur l’œuvre. Il l’est aussi au regard d’un certain nombre d’autres compétences. En effet, la séance s’est achevée sur une reprise collective au cours de laquelle les élèves ont pu rendre compte oralement des différents mots mis sur les maux de la Terre. Le partage des notes via l’application Skitch a permis d’accéder aux cartes de chacun, soutenant ainsi visuellement les prises de parole. Par ailleurs, une véritable négociation a été à l’œuvre au
sein des groupes. Les élèves s’interrogeaient et les discussions portaient sur les questions suivantes : « Quel est le mal évoqué dans cet extrait ? Comment le nomme-‐t-‐on ? Où se trouvent les personnages dans ce chapitre ? Où se situe ce chapitre dans l’œuvre ?». Enfin, cet usage de l’application Candide met ici en évidence les caractéristiques de la lecture numérique telles que les définissent E. Souchier et Y. Jeanneret. En effet, à travers cette activité, on mesure parfaitement la « dimension manipulatoire » de la lecture numérique. L’appropriation du texte passe par une manipulation de celui-‐ci puisqu’il s’agit de naviguer dans l’œuvre en utilisant différentes fonctionnalités proposées par l’application. Le caractère hypertélique de l’outil est parfaitement illustré par une telle activité, car il faut bien que l’élève soit compétent dans l’accomplissement d’une série de gestes associés à son activité de lettrure pour accomplir la tâche qui lui est assignée. Plus loin, dans le bilan concernant les compétences, nous verrons combien cet aspect de l’outil numérique ne doit pas être négligé dans la formation de nos élèves. b) Activité n°2 « 3 minutes pour Candide » Les élèves, organisés en groupe de 3, doivent réaliser une vidéo de 3 minutes maximum pour rendre compte des aventures de Candide. Elle peut prendre la forme d’une bande-‐annonce. Les contraintes de réalisation de la tâche sont les suivantes : -‐ les élèves ne doivent pas apparaître à l’écran -‐ le film doit refléter les deux aspects de l’œuvre, « conte » et « philosophique ». Ils utilisent l’Application Imovie pour réaliser le film. Plusieurs réalisations sont disponibles sur le blog : http://vaugelas2si.wordpress.com/2013/02/03/candide-‐en-‐3-‐minutes/ Remarques L’application Candide a été utilisée par certains groupes pour visualiser les voyages et illustrer leurs films. J’ai autorisé les élèves à faire des captures d’écran depuis l’application tout en les informant qu’ils devaient en limiter l’emploi pour des raisons de droits. Ils n’en ont effectivement pas abusé et les images ne sont que partiellement reproduites. Dans l’ensemble, les réalisations sont d’assez bonne facture, mais l’activité n’a pas été traitée avec le sérieux que j’attendais. Il me semble notamment que le choix des images a été largement privilégié au détriment de la réflexion sur le texte qui devait les accompagner. Cela m’amène à rappeler un des objectifs de cette séquence qui consiste à mettre en œuvre des compétences dites intermodales. On voit bien ici comment dans une activité apparemment simple, on met en réalité les élèves face à une tâche complexe d’articulation de l’écrit et de l’image. 7. Des lectures analytiques enrichies Organisation de cette séance : -‐ Le séance débute par une « démonstration » par le professeur de ce qui est attendu à l’EAF : une lecture analytique sur le chapitre 1 (connu des élèves) est menée au tableau avec le texte vidéoprojeté depuis l’application de la BNF. Les élèves sont au préalable informés des compétences évaluées dans cet exercice : un document est distribué avec les critères d’évaluation. Ils disposent également d’une fiche « méthode » précisant pas à pas les étapes
de la lecture analytique. Ils ont pour consigne, pendant l’exposé du professeur, de prendre des notes sur le document. -‐ Cette lecture analytique présente la particularité d’être enrichie de références à d’autres œuvres, littéraires ou picturales, qui viennent illustrer le propos, et que l’on trouve dans l’application de la BNF. -‐ La séance se poursuit : les élèves travaillent par 2 ou 3 sur un extrait, avec la consigne de répondre à une problématique sous la forme d’une lecture analytique enrichie. La classe est scindée en 5 groupes (A,B,C,D,E). -‐ La séance s’achève sur deux lectures analytiques menées par les élèves au tableau. -‐ Elle est suivie d’une reprise collective sur la tonalité ironique et les procédés d’écriture propres à l’ironie voltairienne. Remarque : L’activité d’enrichissement de la lecture analytique vise à mettre en œuvre la compétence informationnelle, qui implique une réflexion préalable sur ce que l’on cherche, nécessite ensuite la mise au point d’une stratégie de recherche (par quels chemins vais-‐je passer pour trouver ce que je cherche ?) et une distance critique sur ce qui a été trouvé (mon choix est-‐il pertinent par rapport à mon objectif ?). Voici le document de travail distribué aux élèves :
Parcours de lecture : Candide, encyclopédie du Mal et quête du bonheur Pour réaliser une lecture analytique « enrichie »
Lisez le texte, puis répondez aux questions afin de proposer une lecture analytique répondant à la problématique qui vous est soumise. Vous utiliserez l’application Candide pour enrichir votre analyse grâce aux notes en marge du texte, aux illustrations et aux diverses rubriques qui lui sont liées. Parcourez également le « Monde » dans l’application et sélectionnez le lieu correspondant à votre extrait. Vous pouvez aussi faire des recherches à l’aide de l’outil prévu à cet effet (la loupe en haut à droite). Enfin, dans le « Jardin », vous pourrez certainement découvrir des parcours liés à votre texte. Dans votre présentation, vous introduirez quelques unes de ces références afin que votre lecture analytique soit enrichie de références à d’autres oeuvres. A. Chapitre troisième : la guerre Du début à « … n’oubliant jamais Melle Cunégonde. » 1. Par quels procédés fait-‐on apparemment l’éloge de la guerre ? 2. Quel est le point de vue adopté par le narrateur dans l’ensemble de l’extrait ? Appuyez-‐vous sur l’extrait mais aussi sur la fin du chapitre précédent pour justifier votre réponse. 3. Commentez brièvement le tableau peint dans la 2ème partie de l’extrait. 4. Relevez et commentez les marques d’humour et d’ironie dans l’extrait. Vous identifierez notamment deux figures de style qui servent la dénonciation de la guerre et/ou de l’Optimisme. 5. Montrez, en citant trois expressions, que la guerre est justifiée à la fois par la philosophie optimiste, la religion et la loi. Problématique pour la lecture analytique : Comment Voltaire dénonce-‐t-‐il la guerre ? B. Fin du chapitre quatrième de « Tandis qu’il raisonnait … » -‐ chapitre cinquième jusqu’à « un peu d’eau d’une fontaine voisine» : tempête, naufrage et tremblement de terre 1. En quoi le chapitre 4 constitue-‐t-‐il une pause dans les aventures de Candide ? Quelle forme de paroles rapportées domine dans ce chapitre ?
2. Comment les chapitres 4 et 5 s’enchaînent-‐ils ? Commentez la dernière phrase du chapitre 4 notamment (structure syntaxique, tps verbaux). En quoi la parole optimiste est-‐elle encore mise à mal ? 3. Comment le désordre se manifeste-‐t-‐il dans les 3 premiers paragraphes du chapitre 5, jusqu’à « écrasés sous des ruines » ? Vous vous appuierez notamment sur les temps verbaux et leurs valeurs, la construction syntaxique et le rythme des phrases. 4. Quels maux Voltaire dénonce-‐t-‐il ici ? 5. Comment Pangloss et l’optimisme sont-‐ils mis à mal ? Problématique pour la lecture analytique : Comment Voltaire remet-‐il en cause les préceptes enseignés par Pangloss ? C. Chapitre sixième dans son ensemble : l’autodafé 1. Comment les chapitres 5 et 6 s’enchaînent-‐ils ? Comment la narration passe-‐t-‐elle des suites du tremblement de terre à la cérémonie ? Appuyez-‐vous notamment sur les deux premiers paragraphes du chapitre (indices temporels, tps verbaux, personnages). 2. Faites apparaître les 4 mouvements de ce chapitre. 3. Mettez en relation les motifs de condamnation et les châtiments infligés afin de montrer l’absurdité de l’autodafé. 4. Montrez que Voltaire, par des traits d’humour, rend la cérémonie ridicule en lui ôtant tout caractère sacré. 5. Montrez que le décalage entre le tragique de la situation et la façon dont les événements sont rapportés confère une tonalité ironique à cet extrait. Vous montrerez notamment que voltaire exprime le contraire de ce qu’il pense pour mieux exprimer son indignation. 6. En vous appuyant sur des extraits précis, montrez que Voltaire dénonce l’obscurantisme (ici la superstition), le fanatisme (l’intolérance religieuse) et l’Optimisme. Problématique pour la lecture analytique : Comment Voltaire dénonce-‐t-‐il le fanatisme religieux ? D. Chapitre dix-‐huitième de « Candide et Cacambo montent en carrosse » à « ce n’était pas ce qui l’étonna le moins. » : l’Eldorado 1. Relevez les éléments qui rattachent cette partie du récit au conte merveilleux. 2. L’éloge de l’Eldorado n’est-‐il pas un peu exagéré parfois ? Justifiez précisément votre réponse. Quel effet cela produit-‐il sur le lecteur ? 3. En quoi, à certains égards, l’Eldorado est-‐il un monde inversé ? 4. Recherchez le sens du nom « utopie » ainsi que son étymologie. En quoi l’Eldorado est-‐il une utopie ? 5. En quoi l’épisode de l’Eldorado permet-‐il à Voltaire de faire à la fois la présentation d’un idéal politique et la critique de la société de son temps ? 6. Pourquoi Candide quitte-‐t-‐il ce monde parfait ? Quel sens faut-‐il donner à son départ ? Problématique pour la lecture analytique : quelle est la fonction d’Eldorado dans le conte philosophique ? E. Chapitre dix-‐neuvième de « En approchant de la ville » à « il entra dans Surinam » 1. Quel nouveau mal Voltaire dénonce-‐t-‐il ici ? 2. Qu’est-‐ce qui donne au lecteur l’impression d’assister à la scène ? 3. Commentez les relations maître/esclave telles qu’elles sont présentées ici. 4. Par quel moyen comprend-‐on que la situation de ce misérable est répandue. 5. En quoi peut-‐on dire que l’esclavage fait partie des mœurs de l’époque. 6. Relevez un passage montrant combien cet épisode marque une étape importante dans l’apprentissage de Candide. 7. Identifiez les procédés qui font que, malgré la situation effroyable, la tonalité du texte n’est pas franchement pathétique.
Problématique pour la lecture analytique : Comment Voltaire dénonce-‐t-‐il l’esclavage ? Bilan de l’activité : des remarques sur l’usage de l’application Candide, la qualité des travaux, les compétences mises en œuvre et les perspectives possibles L’application Candide a été utilisée pour : -‐ trouver des définitions -‐ accéder à des informations éclairant le texte -‐ enrichir la lecture analytique avec d’autres œuvres -‐ écouter le texte Tous les groupes ont mené à bien l’activité. Toutes les fiches (au format papier) témoignent d’une démarche de réponse à la problématique sous la forme d’un plan, généralement en deux parties. Les citations sont nombreuses et on constate un recours satisfaisant aux procédés d’écriture, ce qui tend à démontrer que les élèves sont véritablement « entrés » dans le texte. La lecture analytique a effectivement été « enrichie » par des références à d’autres œuvres disponibles dans l’application Candide. Le plus souvent, elles ont été utilisées dans l’ouverture de la conclusion. D’autres groupes ont choisi de mettre en évidence des aspects du texte à travers quelques illustrations. Mais certains n’ont pas réussi à trouver de quoi enrichir leur exposé, soit par manque de temps, soit par manque de compétences pour réaliser cette tâche, soit parce que l’extrait sur lequel ils travaillaient ne trouvait pas d’échos pertinents dans l’application. A cet égard, on pourrait suggérer d’ajouter, par exemple, le Poème sur le désastre de Lisbonne dans l’anthologie. Deux élèves ont été fortement portés par les autres au sein des groupes auxquels ils appartenaient. Ceux-‐là ont dû être davantage accompagnés par le professeur, car ils avaient tendance à « errer » dans l’application, ou dans la tablette, sans être tout à fait capables de dire ce qu’ils faisaient vraiment. Il pourrait être intéressant de demander à chaque groupe d’enregistrer sa lecture analytique. Ainsi, le professeur pourrait évaluer tous les exposés et les diffuser ensuite à l’ensemble de la classe. Toutefois, cela n’est possible qu’à condition de travailler avec un effectif réduit, ou de disposer d’enregistreurs unidirectionnels, car le bruit dans la classe ne permet pas une prise de son satisfaisante. A l’issue de cette activité, les élèves maîtrisent suffisamment bien le conte philosophique voltairien pour entrer dans un travail d’écriture exigeant. 8. Ecriture d’invention collective : les aventures de Coquebin Les réflexions menées en classe, ou sur Twitter en asycnchrone, sont rassemblées par le professeur dans un document distribué aux élèves. Ceux-‐ci sont répartis en groupes, dont chacun est chargé d’écrire un chapitre du conte. L’écriture se fait en classe sur deux séances de 2 heures. Le professeur corrige les brouillons entre les deux séances.
Remarques sur l’usage de l’application et de la tablette, ainsi que sur les productions des élèves Munis du livre et de l’application Candide, les élèves s’appuient sur le conte dont ils relisent (ou écoutent) certains extraits pour trouver l’inspiration, ou formuler plus adroitement une expression. Ils se réfèrent régulièrement aux différentes ressources disponibles sur le blog : http://vaugelas2si.wordpress.com/category/les-‐aventures-‐de-‐coquebin/ On les voit communiquer entre groupes pour harmoniser leurs récits. Les productions sont inégales, mais tous les groupes ont mené à bien ce travail d’écriture long. Le conte sera bientôt disponible en ligne. On pourra y constater la volonté d’imiter certaines tournures très caractéristiques de l’ironie voltairienne, les éléments constitutifs du conte philosophique avec notamment une véritable fonction critique, et la proposition d’une belle morale du bonheur pour notre XXIème siècle. Certains élèves sont même allés jusqu’à réaliser eux aussi une version enrichie de leur chapitre en y insérant des liens hypertextes. 9. Candide en un seul tweet ! Chaque élève a pour mission de proposer le résumé le plus concis possible de Candide, ne dépassant pas un seul tweet, c’est-‐à-‐dire 140 caractères.
Tous les tweets sont disponibles ici : http://storify.com/cduret/candide-‐en-‐1-‐seul-‐tweet#publicize
Cette activité permet, en fin de séquence, de mesurer les acquis des élèves sur l’œuvre par leur capacité à en résumer l’esprit. Elle s’avère également intéressante du point de vue de l’écriture, car c’est un véritable exercice de style que de résumer une œuvre en 140 caractères. 10. Pour un art philosophique : sujet d’invention L’objectif de ce travail est d’offrir aux élèves l’occasion de construire leur propre synthèse sur les constituants du conte philosophique, tout en s’exerçant à un exercice codifié du bac. La correction de ce devoir permet de conclure la séquence sur les caractéristiques du conte philosophique en tant que genre littéraire.
Sujet d’invention : pour un art philosophique En vous inspirant de ces deux poèmes de Raymond Queneau, écrivez à votre tour un texte, de préférence en vers, qui prendra la forme d’une recette pour réaliser un conte philosophique. L’évaluation prendra en compte toutes les caractéristiques du conte philosophique que vous aurez découvertes au fil de la séquence. Vous présenterez donc celles-‐ci comme les ingrédients de votre recette. Votre texte devra faire à peu près une page.
Prenez un mot prenez en deux Faites les cuir' comme des œufs Prenez un petit bout de sens Puis un grand morceau d'innocence Faites chauffer à petit feu Au petit feu de la technique Versez la sauce énigmatique Saupoudrez de quelques étoiles Poivrez et mettez les voiles Où voulez vous donc en venir ? A écrire Vraiment ? A écrire ? Bien placés bien choisis Quelques mots font une poésie Les mots il suffit qu’on les aime Pour écrire un poème On sait pas toujours ce qu’on dit Lorsque naît la poésie Faut ensuite rechercher le thème Pour intituler le poème Mais d’autres fois on pleure on rit En écrivant la poésie ça a toujours kèkchose d’extrême Un poème Raymond Queneau , Pour un art poétique, in L’instant fatal, 1952 Remarques Les productions témoignent d’une bonne appropriation des savoirs littéraires relatifs au genre du conte philosophique. Un florilège sera bientôt en ligne sur le blog.
Bilan de l’expérimentation En quoi l’usage de l’application Candide favorise-‐t-‐elle l’apprentissage d’une nouvelle littératie, littératie médiatique multimodale, en classe de lettres ? La tablette numérique est-‐elle une machine pertinente pour apprendre à « lettrire » ? La tablette, en tant qu’objet informationnel (qui représente), technique (qui agit) et social (qui contacte), permet de développer de multiples capacités dans le domaine de la littératie numérique. 2 En effet, on voit, à travers une activité comme la réalisation de la carte du Mal, que les élèves sont invités à manifester plusieurs capacités de lecture, de navigation et d’écriture médiatiques : -‐ capacités de lecture médiatique L’élève doit en effet être à même de décoder et de comprendre tout le matériel textuel de l’interface de l’Application Candide et plus particulièrement de l’outil de recherche dans le texte pour pouvoir accéder plus rapidement à l’extrait de l’œuvre que la consigne l’invite à lire. -‐ capacités de navigation médiatique L’élève doit être en mesure de faire des choix d’ordre technique parmi plusieurs alternatives. Par exemple, certains groupes ont demandé une seconde tablette, afin de lire dans l’Application Candide de l’une et de réaliser la carte sur l’autre. Ils ont en effet été plus efficaces. -‐ capacités d’écriture médiatique « Les compétences en écriture médiatique concernent quant à elles la création et la diffusion de productions médiatiques, individuelles ou collectives, témoignant de l’appropriation des langages et des genres que ces productions utilisent (écriture informationnelle), de la maîtrise des opérations techniques qu’elles impliquent (écriture technique), et de l’activation de relations interpersonnelles diverses (écriture sociale). »3 En effet, les élèves, pour réaliser la carte sur Skitch, ont dû s’approprier les singularités de l’application, montrer une certaine maîtrise dans la chaine d’opérations nécessaire pour écrire sur la carte. Enfin, l’application permettant de partager les réalisations au fur et à mesure de leur conception, il a fallu aussi qu’ils soient capables de gérer cette dimension sociale de l’écriture collective, en respectant notamment les travaux de chacun. Dans l’ensemble, les élèves ont manifesté un bon niveau de maîtrise de ces capacités. Le fait qu’ils utilisent régulièrement la tablette depuis le début de l’année scolaire n’y est certainement pas étranger. Il faut toutefois noter une très grande hétérogénéité. Plusieurs 2 On retrouve une définition de ces notions dans les travaux de Pierre Fastrez et Thierry De Smedt. A cette adresse, par exemple : http://culturedel.info/grcdi/wp-‐content/uploads/2012/10/Seminaire-‐GRCDI_2012_texte-‐P.Fastrez.pdf ou encore sur le concept plus général de translittératie : http://culturedel.info/grcdi/?page_id=80 3 http://www.csem.cfwb.be/index.php?eID=tx_nawsecuredl&u=0&file=fileadmin/sites/cem/upload/cem_super_editor/cem_editor/Avis_du_CSEM/definitiondescompetencesmediatiquesfevrier2012.pdf&hash=96ced78ba1e375206d7a527a7561945f7f9dd117
groupes ont si bien fonctionné qu’ils ont fini l’exercice bien plus tôt que ce que j’avais imaginé. A contrario, deux groupes ont échoué au point de n’avoir aucune réalisation à la fin de la séance : l’un a supprimé involontairement sa carte peu avant la fin de l’heure. Pour ce groupe, on peut dire que ce n’est pas très grave dans la mesure où il a tout même mené l’activité. Seul le résultat n’en était pas visible. Pour le 2nd groupe, constitué de trois élèves très scolaires et généralement performants, le bilan est très différent : ils n’ont pas su manifester des capacités suffisantes de lecture, de navigation et d’écriture médiatiques pour réaliser la tâche demandée. A chacune des étapes, ils se sont trouvés en difficulté et ils auraient eu besoin de temps supplémentaire pour finir l’exercice. Il ne s’agissait pour eux en aucun cas de difficulté de lecture et d’écriture comme on l’entend généralement. C’est bien dans le contexte spécifique de l’environnement numérique qu’ils n’étaient pas compétents. Les activités intitulées « Candide, une œuvre des Lumières » et « Enrichir sa lecture analytique» visaient l’acquisition d’une compétence informationnelle que l’on peut décliner en plusieurs capacités consistant à rechercher, sélectionner, hiérarchiser l’information, en vue d’un objectif précis. De toutes les compétences en littératie numérique exploitées dans cette séquence, c’est celle dans laquelle les élèves sont les moins performants. En effet, je n’ai pas relevé de difficulté quant aux capacités à rechercher, lire ou comprendre les divers documents mis à la disposition des élèves. En revanche, lorsqu’il s’agit de faire un choix parmi les informations en s’interrogeant sur la pertinence de la sélection, peu d’élèves se montrent compétents. Il y a donc sur cette capacité de sélection un véritable travail à mettre en œuvre, car cette compétence est essentielle dans la question de l’accès au savoir à l’ère numérique. Une édition enrichie telle que l’application de la BNF s’avère, à mon sens, un support efficace pour l’appropriation de la compétence informationnelle. En effet, tout en maintenant l’élève dans un périmètre maîtrisé, celui de l’application, nous l’amenons à rechercher de l’information dans un environnement réticulaire, analogue en ce point à Internet, mais pas infini, ce qui constitue un bon apprentissage, d’autant que nul n’est besoin pour l’enseignant de s’inquiéter de la validité des contenus. L’élève peut donc concentrer son attention sur la recherche et la sélection. La réalisation d’un film pour présenter une oeuvre nécessite des compétences dites mutimodales. Les élèves sont invités à combiner de façon pertinente écrit, image et son pour produire du sens et communiquer, en répondant à des objectifs fixés par une consigne. Les productions sont tout à fait honorables et montrent en général une bonne appropriation de l’œuvre, ce qui relève des compétences de lecture « traditionnelles ». En revanche, comme je l’ai déjà précisé dans le bilan de l’activité, les travaux ne sont pas tous satisfaisants dans l’articulation image/texte, dans la mesure où la partie textuelle a été parfois négligée, proportionnellement à l’importance accordée aux images. La consigne invitait à faire ressortir la dimension philosophique du conte. Or si les images insistent souvent sur les épreuves rencontrées, le texte en revanche ne reflète pas toujours l’esprit de l’œuvre. Certaines productions ont su faire ressortir la tonalité ironique, les dimensions philosophique et critique de façon tout à fait pertinente, mais elles ne sont pas les plus nombreuses. Il apparaît donc que l’usage de l’Application Candide, combinée à d’autres, sur tablette
numérique permet à l’enseignant d’organiser de nombreuses activités propres à la mise en œuvre de compétences en littératie numérique. La tablette numérique, par la combinaison des applications, favorise-‐t-‐elle une appropriation des savoirs et des compétences littéraires ? L’édition enrichie d’une œuvre patrimoniale sur tablette offre-‐t-‐elle un accès privilégié à la lecture et à son interprétation littéraire ? Dans quelle mesure cette application propose-‐t-‐elle des ouvertures qui font percevoir aux élèves les spécificités du siècle ou permettent de situer l’argumentation dans une histoire plus longue ? La lecture de Candide avec l’Application de la BNF est d’une autre nature que celle que l’on pratique avec le livre. En classe, l’Application se prête particulièrement à une lecture transversale. On a pu le voir à travers la réalisation de la carte du Mal. On le constate largement aussi dans les activités menées par mes collègues, qui ont étudié ce même conte dans une autre perspective que celle de l’œuvre intégrale. Le principe des ouvertures sur l’œuvre à partir de la carte des voyages est particulièrement intéressant. Il permet à l’élève d’entrer librement dans le texte. J’y vois un écho à cette lecture affranchie à laquelle fait référence Michel de Certeau, pour qui les lecteurs sont des « voyageurs » qui « circulent sur les terres d'autrui, nomades braconnant à travers les champs qu'ils n'ont pas écrits, ravissant les biens d'Égypte pour en jouir. » A certains égards, l’Application offre un espace de liberté au lecteur qui peut appréhender l’œuvre autrement. Par ailleurs, la richesse de l’appareil textuel qui entoure l’œuvre favorise l’acquisition de connaissances, en matière de savoirs littéraires. Les élèves ont beaucoup utilisé les informations accessibles par un clic en marge du texte, en particulier les articles du dictionnaire philosophique et les fiches des personnages. L’article sur l’ironie, par exemple, a été largement consulté. Il n’est pas entièrement compréhensible par tous, loin de là, mais il contient suffisamment d’éléments accessibles à des élèves de 2nde pour contribuer à la compréhension de la tonalité ironique du conte. De la même façon, l’arbre proposant un parcours sur l’ironie a également été utilisé au cours de plusieurs activités. Enfin, les très nombreux documents contenus dans l’application permettent à l’enseignant d’imaginer de nombreuses activités ouvrant des perspectives culturelles et artistiques. Par exemple, dans la lecture analytique enrichie que des élèves ont menée sur « l’Eldorado », on trouve des références textuelles et iconographiques à Utopia de Thomas More. Les élèves ont découvert cette œuvre par eux-‐mêmes. Ce qui est intéressant, c’est qu’ils ne la cherchaient pas. Ils étaient en quête d’un intertexte sans aucune autre idée précise. Ce concept paraît étrange, rechercher un objet dont on ignore l’existence, mais il correspond bien à une posture intellectuelle fréquente sur Internet, qui se rapproche d’une certaine forme de sérendipité. L’usage des outils médiatiques favorise-‐t-‐il l’acquisition de compétences relatives au savoir être ? On reproche souvent aux médias informatisés d’imposer une temporalité extrêmement réduite, développant chez les élèves l’impatience et l’incapacité à inscrire un travail dans la durée. Et si on parvenait à réinstituer le temps, en classe et hors la classe, nécessaire à une pratique réflexive, en exploitant l’instantanéité constitutive des outils numériques ?
C’est ce que nous avons fait en utilisant le réseau social Twitter en vue de construire collectivement un conte philosophique. L’instantané textuel a été mis au service d’un travail d’écriture long et progressif. D’une certaine manière, nous avons subordonné l’outil à la création intellectuelle. Par ailleurs, la dimension visuelle du texte dans une Application comme celle de la BNF est une qualité à laquelle les élèves sont sensibles. En effet, le texte renvoie une « image » attrayante pour le lecteur, qui s‘y penche plus volontiers. L’édition enrichie d’une oeuvre fait ressortir l’importance du « texte second dont le signifiant n’est pas constitué par les mots de la langue, mais la matérialité du support et de l’écriture, l’organisation du texte, sa mise en forme, bref tout ce qui en fait son existence matérielle »4. Cette attractivité nouvelle du texte n’éclipse pourtant pas le livre papier qui, au contraire, trouve sa place « à côté » de la tablette. On redécouvre en effet la qualité du format papier pour accéder au « texte premier » qui « est littérature ». L’attitude des élèves face au texte est visiblement modifiée : on navigue dans le texte de l’application que l’on manipule, et on réfléchit plus volontiers sur le texte papier.
4 L’image du texte, article d’Emmanuel Souchier dans les cahiers de médiologie, disponible en ligne : http://www.mediologie.org/cahiers-‐de-‐mediologie/06_mediologues/souchier.pdf
Conclusion « Pour un humanisme numérique » en classe de lettres
La préoccupation première de l'enseignant de lettres, quand il conçoit une séquence didactique autour d'une œuvre intégrale, est de créer les conditions d'une immersion dans l'œuvre, qui favorisera l’acquisition des savoirs. Une édition enrichie comme celle de la BNF présente à cet égard de nombreuses qualités. En tant qu’outil intégré à une tablette numérique, elle crée les conditions d’un investissement soutenu des élèves, qui peuvent être mis constamment en situation d’agir. Elle illustre, à ce titre, parfaitement cette citation de Benjamin Franklin : « Tu me dis, j’oublie. Tu m’enseignes, je me souviens. Tu m’impliques, j’apprends. » On a noté, à travers cette expérimentation, des changements de comportement chez l’apprenant. Celui-‐ci, investi intellectuellement et physiquement, penché sur son activité, responsabilisé dans une dynamique de projet collectif, montre un enthousiasme remarquable en classe, et vérifiable dans ses productions. Ni excités ni apathiques, les élèves manifestent leur plaisir d’apprendre. En outre, l’enseignant de lettres voit aussi sa pratique et ses objectifs pédagogiques modifiés par l’émergence du numérique. Ainsi que l'a exposé Milad Douehi dans son essai5, l'entrée dans l'ère numérique a réactivé la réflexion humaniste sur l'Homme, et soulève des questions relatives au savoir, à l'éducation et aux pratiques sociales, sur lesquelles le pédagogue ne peut faire l'impasse. L’utilisation de l’application Candide, coordonnée à d’autres, sur tablette numérique permet de mettre en œuvre des compétences qui sont à la base même de l’accès au savoir à l’ère numérique, compétences en littératie, « traditionnelle » et numérique, en littérature, dans la culture humaniste, ou encore comportementales. C’est ainsi que l’enseignant est invité à adopter une démarche pédagogique qui met le numérique au service d’un nouvel humanisme. 5 Milad Douehi, Pour un humanisme numérique, La librairie du XXIème siècle, Editions du Seuil, 2011