(qu’est ce qu’une marque)
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LA MARQUE:
Identité, Image et Théorie du
Noyau Central
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Synthèse des plusieurs ouvrages sur le sujet (voir liste sur page 17)
Par Flavie Saintclair
Octobre 2012
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Qu’est ce qu’une marque?
Une définition
Pour l'Organisation Mondiale de la Propriété Industrielle (OMPI), la marque est " le nom et
l'ensemble des signes d'un produit, d'un service, d'une entreprise qui ont pour vocation de s'imposer
par leur notoriété, leur part de marché et leur valeur ajoutée sur un segment de marché défini".
La marque, en tant que signe ou repère d'identification a étais toujours un élément de
différenciation.
Un élément de différenciation
La marque, en tant que signe ou repère d'identification, a toujours été un élément de
différenciation. Certains artisans, à l'époque de la Grèce et de la Rome antique, avaient déjà pour
habitude de signer leur production en y apportant une marque distinctive. Au Moyen Âge, les
corporations d'artisans imposaient des critères de qualité bien précis aux objets réalisés par les
membres de la corporation. Ils disposaient également des sceaux d'approbation qui attestaient de la
qualité du produit et en garantissait l'origine. Puis avec la révolution industrielle au XIXe siècle, les
marques se sont développées et ont pris une fonction de signature. Elles sont généralement des
marques patronymes comme ( Peugeot) ou des marques origines ( Vichy).
Aujourd'hui les marques représentent une des manifestations les plus représentatives de l'économie
moderne. Même si elles ont pénétré notre vocabulaire et notre vie quotidienne jusqu'à devenir
quelquefois des noms communs ( Scotch, Aspirine, Frigo), elles restent, indéniablement, un outil de
différenciation qui s'appuie sur des éléments fonctionnels et symboliques selon le type de marché et
selon le positionnement de la marque.
Différenciation fondée sur des éléments fonctionnels
Les marques qui s'appuient sur un bénéfice fonctionnel irrésistible, par exemple «Ariel lave mieux à
40° », «Les piles Duracel durent plus longtemps » , se différencient indéniablement de la
concurrence.
Différenciation fondée sur des éléments symboliques
D'autres marques jouent un rôle de différenciation en s'appuyant sur des éléments symboliques. Les
marques vestimentaires telles que Adidas, Reebook et Nike se différencient essentiellement sur des
valeurs telles que l'effort, le dépassement de soi et l'esprit sportif. Ces marques s'identifient à un
certain style de vie qui leur permet de se différencier plus sur des éléments symboliques que sur les
bénéfices fonctionnels de leurs produits.
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Le capital-marque
Le capital-marque (brand-equity en anglais) se définit comme la valeur ajoutée qu'une marque
apporte à un produit. Le produit offre un bénéfice fonctionnel tandis que la marque, par son nom,
ses symboles, son image, contribue à augmenter la valeur de l'offre au-delà de ses fonctionnalités.
Il faut dissocier la marque de le produit. Alors que le produit se caractérise par des éléments physiques
et tangibles, la marque, elle, apporte une dimension d'identification et tire de sa valeur: le produit est ce
que l'entreprise fabrique, la marque est ce que le client achète. Si l'on prend, par exemple, le cas de
Chanel, il est évident que c'est la marque, et non le produit, qui génère une grande partie de la valeur de
l'entreprise.
Pour développer des marques fortes, les entreprises doivent mettre en place une gestion stratégique
qui implique la définition d'une identité de marque riche et claire.
L'identité d'une marque
L'identité représente la façon dont la marque veut être perçue par les consommateurs. C'est
l'identité qui permet ainsi de guider les décisions importantes sur la marque et qui garantit la
cohérence des diverses actions entreprises dans le temps.
La construction d'une identité doit se définir selon six facettes ( le prisme d'identité):
La dimension physique: correspond aux éléments tangibles de la marque (la qualité du produit, le
dégrée d'innovation et son prix). La marque Luis Vitton est associée à des produits de qualité,
fonctionnels et recouvrant tous les accessoires de la maroquinerie.
La dimension personnalité: représente les traits de caractère humains associés à la marque. Chanel
représente l'élégance.
La dimension culture: correspond au système de valeurs associé à la marque. La culture de Hermès
repose sur la philosophie artisanale des produits.
La dimension relation: sous-entend l'échange implicite que la marque veut faire valoir. La marque
Dior se rattache à une relation de séduction et Christian Lacroix par la passion d'avoir une création
unique. La marque de luxe se mérite. Elle crée des obstacles réels ou virtuels pour entretenir la
tension du désir qui se nourrit d’inaccessibilité.
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La dimension reflet: exprime l'image que la marque donne à sa cible. La Maison de haute Joaillerie
Chaumet est associé à des personnes aisées et raffinées. Van Cleef & Arpels s'associe à des
célébrités de prestige comme Audrey Hepburn, La Callas et Jackie Kennedy.
La dimension mentalisation: correspond à l'objectif que le consommateur cherche à atteindre en
achetant la marque. L'achat des produits Prada s'inscrit dans une recherche de produits élégantes,
fonctionnels et modernes.
Evaluation du capital-marque
Cinq familles d’indicateurs sont utilisées pour évaluer la capacité de la marque
• se faire connaître et entrer en contact avec le consommateur : notoriété
• se faire recommander (afin d’évaluer le potentiel de croissance) : réputation
• attirer et à se faire aimer du consommateur : image de marque
• se distinguer et à se différencier des autres marques : unicité de la marque, évaluation
globale de la marque
• se faire acheter et racheter : pénétration, ventes croisées et part de marché de la marque
Nous allons développer seulement les trois premiers.
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La notoriété, la réputation et l'image de la marque: trois notions à distinguer
La notoriété
La notoriété est un des attributs de la marque qui se réfère à la connaissance de celle-ci. Elle est liée
à sa capacité à être présente dans l’esprit du consommateur et est mesurée en termes de
pourcentage de personnes qui ont en entendu parler. C’est une valeur en soi, et plus la notoriété de
la marque est forte, plus la marque sera importante sur le marché.
Plus l’entreprise va se démultiplier sur les cross média, plus elle sera visible. Ce gain de visibilité
pourra être directement corrélé avec un gain de notoriété. Ce critère est donc purement quantitatif,
contrairement à la réputation ou l’image de marque, mais demeure néanmoins un des indicateurs
qui évaluent l’efficacité d’une stratégie de communication.
La notoriété apparait comme plus complexe depuis l’avènement d’Internet. On peut ainsi parler de
visibilité puisque la notoriété d’une marque peut être celle dans une communauté des réseaux
sociaux, celle dans un moteur de recherche, d’un blog ou d’un site par exemple.
La réputation
La réputation est l’opinion, bonne ou mauvaise, que les personnes ont de quelque chose d’après
l’encyclopédie Bordas. L’image est souvent considérée comme une des facettes de la réputation,
comme étant la vision que les différents acteurs externes, en particulier les consommateurs, ont de
l’entreprise.
La réputation est également affaire de perception du caractère et du comportement de quelque
chose. Elle est donc purement subjective. Un individu ou un groupe d’individus se forgent des
opinions en fonction des éléments qu’ils reçoivent de la part de la marque ou de tiers. C’est en
définitive une image perçue.
La réputation concerne tout l’écosystème de l’entreprise, ses clients, ses partenaires, ses
actionnaires mais également et surtout ses propres employés. La réputation est à la fois le reflet de
l’identité d’une entreprise, mais également le résultat des efforts interne pour nous persuader de sa
valeur.
Une entreprise peut conserver et préserver sa réputation, c'est-à-dire l’image perçue par les
individus cibles, mais dès qu’elle planifie une stratégie de communication, elle part de l’image perçue
et de son image vraie, pour atteindre une image voulue qui la différenciera de ses concurrents.
Réduire l’écart entre l’image voulue et l’image perçue est donc stratégique pour l’entreprise.
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L’image de marque
Kapferer et Thoening définissent l’image de marque comme « l’ensemble des représentations
mentales, tant affectives que cognitives qu’un individu ou un groupe d’individus associent à une
marque. »
L'image de marque fait référence à un concept de perception qui regroupe quatre types de notions:
associations, valeurs, territoire de marque et personnalité de marque.
Les associations
La perception d'une marque se présente comme un ensemble d'associations organisées en mémoire
au tour de la marque et qui représentent l'ensemble des connaissances sur la marque. En fait, les
associations d'une marque représentent toute information liée mentalement à la marque (attributs,
promesses, valeurs ... ).
Le rappel en mémoire de la marque, ainsi que le nombre des associations susceptibles d'être activées
à la mention de cette marque dépendent de l'intensité des liens qui relient la marque aux
associations qui lui sont rattachées.
Ces associations représentent le fondement de la différenciation de la marque, elles créent des
sentiments positifs ou négatifs à l'égard de la marque et sont à la base du potentiel d'extension de la
marque.
Les valeurs
L'individu est lié à un certain nombre de valeurs qui se situent à un niveau plus général que les
motivations. Les valeurs sont plus structurantes que les attitudes car elles sont moins disposées à
évoluer. De même, la marque met en avant des valeurs qui représentent les aspects fondamentaux
de son identité, les valeurs sont donc à la fois considérées comme un concept de perception et de
diffusion. Elles font référence aux motivations profondes des individus. Transposées dans le contexte
de la marque, la définition des valeurs de la marque vise à refléter la culture de la marque.
Le territoire de marque
Le territoire de la marque se définit selon la perception des consommateurs qui s'expriment en
termes de produits et d'associations. Le territoire de marque est donc décrit par les produits qui le
composent ou par des associations qui expriment son contenu. Ainsi, le territoire de la marque
Mercedes peut se définir en terme de sécurité, haut de gamme, robustesse et fiabilité. Selon cette
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notion d'espace perceptuel, les marques ont des frontières au-delà desquelles le développement de
produits ou les changements d'axe de communication ne sont pas possibles.
N'est pas le produit en tant que tel qui appartient ou non au territoire de marque mais le produit
muni d'un positionnement basé sur les associations de la marque. Si l'on prend l'exemple d'un
blouson Lacoste, la question à se poser est ce qu'il faut porter un blouson pour faire partie du
territoire de Lacoste? Un blousant évoquant le sport fait probablement partie du territoire de la
marque alors qu'un blouson exclusivement féminin, de couleur voyante et brillante est certainement
en dehors du territoire de marque.
Le territoire de marque peur être conceptualisé à partir de la gamme perçue et de la gamme
possible. La gamme perçue se compose des produits dont le consommateur, parce qu'il les perçoit
comme très typiques de la marque, pense qu'ils sont déjà commercialisés par la marque. La gamme
possible se compose des produits dont le consommateur sait qu'ils ne sont pas commercialisés par la
marque mais qu'il perçoit comme typiques et donc logiques à commercialiser par la marque". Ainsi,
bien que Téfal ne commercialise pas de friteuse, ce produit appartient au territoire de marque de
Téfal. A l'inverse, dans le registre de la cosmétique, le dentifrice n'appartient pas au territoire de la
marque Nivea qui est décrit essentiellement par des produits hydratants pour le soin de la peau.
La personnalité de marque
La personnalité de la marque se définit comme l'ensemble des caractéristiques humaines associées
à la marque. À la différence de l'image de marque, qui correspond à l'ensemble des représentations
que le consommateur a de la marque, la personnalité de la marque se définit uniquement à partir
des traits utilisés pour caractériser l'individu.
La personnalité de marque est une composante à part entière de l'identité de marque ne peut être
dissocié de l'image plus globale qui les individus ont de la marque.
Elle représente un élément de différentiation stratégique et pour les responsables marketing, un
habile outil pour définir un positionnement plus pertinent de leur marque. La personnalité de
marque tend à jouer une fonction symbolique et expressive de soi. Elle permet au consommateur
de s'identifier à la marque et de valoriser la relation qu'il entretient avec elle.
On étudie la personnalité de la marque essentiellement selon une dimension perceptuelle. Plusieurs
échelles sont aujourd'hui disponibles pour mesurer la personnalité de la marque du point de vue du
consommateur (d'Aaker, de Saucier, d'Ambroise et AI et d'Azoulay) .
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Malgré le nombre important d'études sur la personnalité de marque, ce concept soulève certains
débats:
• Tous les traits de caractère humains sont-ils transposables à la marque?
• Retrouve-t-on les mêmes traits selon les pays, les cultures?
• Est-ce que cela a du sens de parler de personnalité pour une chose?
Mesurer la dynamique de l'image de marque
L'analyse de l’image de marque fondée uniquement sur l’identification des associations rattachées à
la marque rencontre des limites face à la problématique de la dynamique de marque. L'image de
marque n'est pas un concept statique, elle connaît des modifications selon les évolutions de ses
pratiques commerciales et marketing. Face à la dynamique de l'image des marques, il est important
de disposer des
Force des associations entre les deux marques
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outils de mesure qui permettent d'identifier comment la perception des marques évolue dans la
mémoire des individus.
Comment s’organisent ces associations au tour de la marque dans la mémoire des individus ?
Certaines d’entre elles ne jouent-elles pas une fonction spécifique dans le processus d’évolution de la
marque ?
La théorie du noyau central
L’approche des représentations sociales appliquée à la problématique des marques semble
répondre à ces questions. En effet, selon ce cadre conceptuel, les associations attribuées à la marque
ne sont pas organisées de façon aléatoire dans la mémoire des individus. Selon la théorie du noyau
central, l’image de la marque dans l’esprit des consommateurs est régie par un double système
composé d’un noyau central et d’un système périphérique .
Le noyau central
La théorie du noyau central a étais défendu par Jean-Claude Abric dans sa thèse de doctorat en
Physiologie Sociale en 1989. Cette théorie part de l’hypothèse que toute représentation sociale est
organisée autour d’un noyau central et qu’il est l’élément fondamental de la représentation. Les
représentations sociales seraient structurées autour d’un noyau central auquel n’est rattaché qu’un
nombre très limité d’éléments.
Le noyau assure deux fonctions essentielles : une fonction génératrice et une fonction organisatrice.
La fonction génératrice est l’élément qui donne signification à la représentation. C’est ce qui donne
sens aux éléments qui composent la représentation. La fonction organisatrice : détermine la nature
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des liens entre éléments. C’est autour du noyau central que s’organisent les autres éléments de la
représentation.
Le noyau central a la propriété d’être l’élément le plus stable de la représentation et assure un rôle
d’unificateur et de stabilisateur dans des contextes mouvants et évolutifs. En effet, il va résister au
changement car toute modification à l’intérieur du noyau central entraîne une transformation
complète de la représentation. Pour affirmer que deux représentations sont différentes, il faut
qu’elles soient organisées autour de deux noyaux centraux différents. Ceci signifie que repérer les
éléments qui constituent une représentation n’est pas suffisant, il est aussi indispensable de
connaître son organisation. En effet, deux représentations pourraient être définies par les mêmes
éléments et ne pas avoir la même signification si ces éléments étaient organisés différemment.
Dans le domaine du Marketing, le noyau central représente le cœur de la marque. Il regroupe les
association perçues par la majorité de consommateurs cibles comme indissociables de la marque.
Les consommateurs, notamment les consommateurs fidèles, ne reconnaissent plus la marque si elle
ne respecte pas ces associations centrales.
Ces associations centrales forment l'élément le plus stable de la marque, il assure sa pérennité et sa
fonction organisatrice. Les principales associations centrales de la marque Armani sont "la
élégance", "le noir"," la mode", le chic" et" l'Italie". La marque Louis Vuiton est, par exemple,
perçue autour de cinq principales associations centrales: "la qualité"," la création", "la diversité des
styles"," la mode" et "la fonctionnalité".
Le noyau donne la signification aux autres associations de la marque (fonction génératrice). Ainsi,
bien que deux marques soient, par exemple, rattachées à l'association «ancienne », celles-ci n'auront
pas le même sens selon que le noyau de la marque reflète une image vieillotte ou une image
traditionnelle.
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Comparaisons des associations centrales des marques Yves Rocher et The Body Shop
Les marques de cosmétiques Yves Rocher et The Body Shop, présentent des codes de
communication très proches. Les deux marques sont associées à la nature, au respect de
l'environnement et utilisent la couleur verte comme signe de reconnaissance. Toutefois, le noyau des
deux marques est différent. La marque Yves Rocher est essentiellement fondée sur la beauté au
naturel (« on n'a jamais autant respecté la nature des femmes ») alors que The Body Shop parle du
bien-être de la personne. La marque Yves Rocher s'organise autour du savoir-faire des plantes pour
la beauté des femmes. Quant à la marque The Body Shop, elle s'articule autour de revendications de
bien être et de citoyenneté.
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Le système périphérique
Le système périphérique, quant à lui, répond à deux fonctions essentielles :
La première est la concrétisation de la marque, qui intègre les éléments concrets au sein de la
représentation de la marque, par exemple les produits ou services qu'elle propose (un tailleur, un
costume font par exemple partie du système périphérique de la marque Armani).
La seconde fonction est l'adaptation, l'évolution dans le temps. Quand l'image de la marque évolue,
le consommateur commence d'abord par modifier ses associations périphériques. Les incohérences
avec l'extension ne sont ici pas rédhibitoires, elles peuvent au contraire faire évoluer l'image de la
marque sans nuire à sa signification.
Dans une stratégie d'extension de marque, il faudra donc prendre en compte toutes les structures
mentales associés à la marque dans les perceptions des consommateurs fin que le nouveau produit
soit perçu comme cohérent avec l'image de marque.
En ce qui concerne les marques de prêt-à-porter de luxe, l'extension de l'offre peut consister par
exemple en une ligne de chaussures, de maroquinerie, de bijouterie, d'horlogerie, de cosmétiques,
vêtements enfant et d'arts de la table.
La marque Lacoste a vu, par exemple, son système périphérique évoluer à la suite du lancement de
toute une gamme de produits: shorts, lunettes, chaussures, montres, parfums et articles de
maroquinerie, le prêt-à-porter pour femme et enfant. Des associations de féminité et univers
infantile ont en effet été intégrées dans le système périphérique de la marque sans toucher à ce qui
fait la signification fondamentale de Lacoste (la chemise polo avec le crocodile, l’univers du sport
d'élite).
Le rôle des associations centrales et périphériques dans l'évolution de la marque
La théorie du noyau central apporte également des éléments pertinents pour l'analyse du processus
d'évolution de la marque. Le noyau évolue de manière très lente, quelles que soient les extension de
la marque dans de nouvelles catégories de produits et ses implantations dans de nouveaux marchés
géographiques.
Par ailleurs, les pratiques de la marque seront d'autant plus perçues comme incohérentes
lorsqu'elles ne respectent pas les associations centrales de la marque. Quand l'essence de la marque
est menacée par les incohérences des pratiques marketing, le système périphérique fonctionne
comme un bouclier du noyau central. Il intègre de nouvelles informations directement liées aux
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réalités de la marque ou induit de nouvelles interprétations des associations existantes (fonction de
défense). À l'inverse, les associations périphériques ne sont pas au cœur de la signification de la
marque. Leur remise en cause a donc beaucoup moins d'impact sur le changement d'attitude envers
la marque.
L'incohérence entre les pratiques de la marque et ses associations périphériques conduit à des
changements d'image beaucoup plus lents qui permettent de faire évoluer la marque sans modifier
sa signification. Lorsque les pratiques marketing ne sont pas en contradiction avec le noyau central,
la transformation de la marque est ainsi progressive.
Les associations centrales (éléments organisateurs de la marque) évoluent uniquement si les
associations périphériques sont modifiées. L'analyse du système périphérique constitue donc un
élément essentiel dans le repérage des transformations en cours. Il constitue un indicateur très fort
des modifications futures, et un symptôme indiscutable lors de l'évolution de l'image de marque.
La mesure des associations centrales et périphériques
La mesure du noyau central et du système périphérique de la marque permet d’identifier
précisément l’organisation des associations de la marque dans la mémoire des individus.
L'identification du système périphérique et du noyau central s'effectue en deux phases.
Phase 1 : mesure de la force des associations
Pour mesurer la force des associations, une liste d'associations issue d'une étude qualitative est
proposée aux consommateurs. Ces derniers doivent évaluer la force de l'association par rapport à
l'idée qu'ils ont de la marque. Dans la mesure où les associations sont imposées aux individus, il est
difficile de considérer qu'elles appartiennent toutes à la marque et pour tout le monde. Cette
particularité méthodologique conduit à distinguer les associations « véritablement» attribuées à la
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marque des autres. Ainsi, il est préférable de considérer que seules les associations qui ont une force
d'une moyenne égale ou supérieure à cinq, sur une échelle en sept points, appartiennent à la
marque.
Phase 2 : identification des associations centrales et périphériques
L'identification des associations centrales de la marque se fonde sur la méthode de « réfutation » qui
suggère que la remise en cause d'une association centrale a pour conséquence une modification du
sens de la marque.
La mesure des associations centrales consiste à remettre en cause les associations de la marque et à
analyser la réaction des consommateurs face à cette remise en cause.
Si la remise en cause d'une association amène une majorité significative d'individus à rejeter la
marque (réponse 1 ou 2 ou 3), cela signifie que l'élément remis en cause appartient au noyau de la
marque. Dans le cas contraire, si une majorité d'individus considèrent la négation de l'association
comme probable (réponse 4 ou 5 ou 6 ou 7), cela signifie que l'élément remis en cause n'est pas une
association fondamentale de la marque, mais qu'il s'agit d'une association périphérique.
Centralité des associations des deux marques
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Identification des associations centrales et périphériques - le exemple de la marque Apple
À votre avis, les produits suivants peuvent-ils être peu probablement ou très probablement de la marque Appel?
Peu probablement Très probablement
« Si le produit n'est pas pratique peut-il être de la marque Apple ? »
1 2 3 4 5 6 7
« Si le produit n'est pas moderne peut-il être de la marque Apple ? »
1 2 3 4 5 6 7
« Si le produit n'est pas associé aux jeunes peut-il être de la marque Apple ? »
1 2 3 4 5 6 7
Considérons ici l'exemple de l'association moderne de la marque Appel. Cette association est-elle
dans le noyau central de la marque? Si une majorité significative de personnes répond 1, 2 ou 3 cela
signifie que l'association moderne est une association centrale de la marque Appel. À l'inverse, si la
majorité des personnes répond entre 4 et 7, cela signifie que l'association moderne est une
association périphérique de la marque Appel. Une étude menée sur 98 personnes montre que 80
personnes ont répondu 1 ou 2 ou 3 et que 18 personnes ont coché 4 ou 5 ou 6 ou 7. Si l'on compare
cette répartition à une répartition théorique de 49/49, la valeur du test du khi-deux1 d'inférence est
de 39,22 et la probabilité associée est de 0,000. Une majorité significative d'individus a répondu
négativement, l'association moderne est donc dans le noyau central de la marque Appel.
L'identification du noyau central et du système périphérique de la marque apporte un outil précieux
pour la gestion des marques. Le noyau correspond, en effet, au territoire de marque. Il intègre les
associations que les communications et les produits doivent respecter afin de préserver la cohérence
image de la marque.
1 Le test du c
2 (prononcez khi deux ou khi carré) est un test statistique permettant de tester l'adéquation d'une
série de données à une famille de lois de probabilités ou de tester l'indépendance entre deux variables aléatoires.
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BIBLIOGRAPHIE
1 MESURES DU NOYAU CENTRAL ET DE LA PERSONNALITE DE LA MARQUECOMPARAISON DES PREMIERS RESULTATS DE VALIDITE PREDICTIVEVIS-A-VIS DE L’ATTACHEMENT A LA MARQUE ET L’INTENTION D’ACHAT
Actes du XXI° Congrès AFM- 18-20 mai 2005 - NANCY Laure AMBROISE et Pierre VALETTE-FLORENCE, CERAG, Université de Grenoble et Géraldine MICHEL, GREGOR, IAE de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
2 Au cœur de la marque - 2e édition: Les clés du management des marques, par Géraldine Michel.
3 La marque, Georges Lewi, Collection Explicit, Ed Vuibert.
4 L’image de Marque à la Frontière de Nombreux Concepts, Michel RATIER, Juillet 2003, Cahier de recherche no. 2003 – 158, IAE de Toulouse.
5 Evolution d’une marque historique : le cas Lacoste, Michel RATIER, Décembre 2005, Cahier de recherche no. 2005 – 171, IAE de Toulouse.
6 Luxe et licences de marques: Comment renforcer l'image et les résultats ..., Stéphane Lacroix et Emilie Bénéteau, Ed. Eyrolles.
7 Jean-Claude ABRIC, Pratiques sociales et représentations, 1994, PUF , 2ème édition 1997.
8 Les marques de luxe face à l'engouement du grand public, Aurélie ATI KENT, Juillet 2004,
Ecole supérieure de Commerce de Grenoble.
9 LUXE ET BRAND CONTENT, Etude en souscription sur brand content et luxe 2010, institut
Quali Quanti.
10 Luxe et civilisations, Jean CASTARÈDE,2009, Eyrolles
11 LE MARKETING DU LUXE, ENJEUX POUR LES MARQUES EN 2006. Les analyses d’Ipsos.