problématique de la sécurité alimentaire et de la sécurité sanitaire … · 2016. 11. 10. ·...

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Problématique de la sécurité alimentaire et de la sécurité sanitaire des aliments en Afrique sub-saharienne: cas du Cameroun Présenté par: MOHAMMADOU Bouba Adji Professeur de Microbiologie alimentaire Université de Ngaoundéré Cameroun ESIAB Brest, le 21 Avril 2016 1

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Problématique de la sécurité alimentaire et de la sécurité sanitaire des aliments en

Afrique sub -saharienne: cas du Cameroun

Présenté par:MOHAMMADOU Bouba Adji

Professeur de Microbiologie alimentaire

Université de NgaoundéréCameroun

ESIAB Brest, le 21 Avril 20161

Plan de la Présentation� Présentation du Cameroun;

� Contexte et enjeux;

� Sécurité alimentaire: réalités et défis;

� Qualité et sécurité sanitaire des aliments;

� Appropriation des concepts et structures de contrôle;

� Stratégies mises sur pied.2

Le Cameroun: Afrique en miniature

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475 000 km2

22 Millions d’habitants

253 dialectes parlés

Langues officielles:� Français� Anglais

60% ont moins de 17ans

Diversité géographique

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590 Km de côte atlantique

Monts Cameroun: 4070 m

Hauts Plateaux de l’Ouest: plus de 1000 m

Forêt équatoriale: 2e poumon vert du globe, après Amazonie

Plaine du Nord: 400m

Plateau de l’Adamaoua: Château d’eau du Cameroun; 1000 -2650m

Diversité des climats

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Domaine équatorial: précipitations abondantes, températures élevées,

végétation luxuriante

• Plateaux du Centre et Sud: 4 saisons �2 saisons sèches (juillet-août et décembre-février)

� 2 saisons des pluies ( mars-juin et septembre-novembre)

• Zone occidentale: 2 saisons�Pluies surabondantes pendant 9 mois (mars à novembre)

�Saison sèche (décembre à février)

Domaine tropical: températures élevées, pluies peu abondantes

• Type soudanien: 2 saisons

� Saison sèche (novembre à avril)

� Saison des pluies (mai à octobre)

•Type sahélien: 2 saisons

� Saison sèche (octobre à mai)

� Saison des pluies (juin à septembre)

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Cameroun: terre d’agriculture

Chiffres clés:

� 44% du PIB du pays�56% de la population active�15% des terres arables exploitées� Agriculture essentiellement paysanne

Diversité des productions

�Cultures vivrières (consommation locale et sous régionale)

�Cultures industrielles (exportation)

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Productions agricoles diversifiées: cultures vivrières

Banane plantain: 2 millions de tonnes, Manioc: 3 millions de tonnes, Maïs: 1 million de tonnes, Macabo/ Taro:1,3 million de tonnes,Canne à sucre: 200 000 t de sucre de canneIgnameMil/SorghoPomme de terrePatate douce

Fruits et légumes:Ananas, Melon, tomate, mangue, mandarine, pamplemousse, avocat, haricot rouge, haricot vert, oignon, ail, etc

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Productions agricoles diversifiées: cultures de rente

Caoutchouc: 60000t

Cacao200 000t

Café:32 000t arabica95 000t robusta

Huile de palme:150 000t

Coton:300 000t

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Elevage et pêche

ElevageBovins: 3 000 000 de têtesOvins: 1 500 000 de têtesCaprins: 1 800 000 de têtesPorcins: 800 000 de têtes Volaille: 15 000 000 d’unitésLait: 100 000 tŒufs: 20 000 t

Pêche: Eaux douces: lacs et fleuves

75 000 t de poissonsMaritime : zone côtière

55 000 t de poissons10 000 t de crevettes et mollusques

Sécurité alimentaire, sécurité sanitaire des aliments: Contexte

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1. Démographie galopante:5 millions d’habitants en 1960

22 millions d’habitants en 2015

Fécondité: 4,1 enfant par femme

Taux de natalité: 36,58 pour mille

Taux de mortalité: 10,40 pour mille

Accroissement naturel: 2,72%

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Sécurité alimentaire, sécurité sanitaire des aliments: Contexte

2. Très forte croissance des villes: 55% de population urbaine

VillesPopulation Ratio Ratio

1976 1987 2001 2001/1987 2001/1976

Douala 453 700 801 700 1 494 700 1,9 3,3Yaoundé 318 700 649 000 1 248 200 1,9 3,9Garoua 68 800 142 000 356 900 2,5 5,2

Bamenda 48 000 110 000 316 100 2,9 6,6Maroua 67 100 123 000 271 700 2,2 4,0

Bafoussam 62 100 113 000 242 000 2,1 3,9Ngaoundéré 38 800 78 000 189 800 2,4 4,9

Bertoua 15 000 44 000 173 000 3,9 11,5Loum 26 700 55 600 141 400 2,5 5,3

Kumba 44 200 70 000 125 600 1,8 2,8

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Sécurité alimentaire, sécurité sanitaire des aliments: Contexte

3. Changements climatiques: Pas d’émission de gaz à effet de serre … mais

�Climat instable dans les régions

�Inondations à répétition

�Assèchement des points d’eau

�Limitation de l’accès aux pâturages

�Invasion des cultures par les insectes et oiseaux

�Invasion des villages et dévastation des champs par les éléphants

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Sécurité alimentaire, sécurité sanitaire des aliments: Contexte

4. « Acculturation alimentaire »:

�Nouveaux modes de consommation dans les villes

�Abandon de certains aliments locaux dans les villages

‘Culture’ du pain et du riz (importés)

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Sécurité alimentaire, sécurité sanitaire des aliments: Enjeux

1. Atteinte et consolidation de l’autosuffisance alimentaire

2. Production des aliments de qualitéi. Pour la consommation localeii. Pour la sous régioniii. Pour le marché international

3. Valorisation des aliments traditionnels

4. Apport de la valeur ajoutée aux produits de l’agriculture

5. Contribution au pouvoir d’achat des populations

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Sécurité alimentaire: Réalités et défis

Définition du Sommet Mondial de l’Alimentation (Rome, 1996):« La sécurité alimentaire existe lorsque tous les êtres humains ont, à tout

moment, la possibilité physique, sociale et économique de se procurer une nourriture suffisante, saine et nutritive leur permettant de satisfaire leurs besoins et préférences alimentaires pour mener une vie saine et active. ».

Donc: Sécurité alimentaire = Disponibilité + Qualité

Disponibilité (production-accès et durabilité de l’accès)

qualité (nutritionnelle et sanitaire)

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Sécurité alimentaire: Réalités

1. Production et productivité de l’agriculture

Production globale du pays: 80% des besoins de la population

Agriculture extensive (extensive et faible productivité)

Productivité variable en fonction des zones agro-écologiques:

� Excédants dans les régions équatorialesFortes pluviométries; sols riches (terres volcaniques);

� Déficits dans les régions soudano-sahéliennesTerres semi-aridesEffets plus perceptibles des dérèglements climatiques

sécheresses en 2009, 2011 et 2012,

inondations en 2010 et 2013

Techniques traditionnelles (houe, machettes, …)Peu ou pas d’utilisation des intrants

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Sécurité alimentaire: Réalités

2. Production et productivité de l’élevage

Elevage bovin: activité traditionnelle et culturelle des Peul du Nord� Très extensif� Difficile en zone équatoriale � Faible production de lait

Elevage ovins et caprins: activité nationale mais surtout au Nord du pays en raison du climat et des vastes espaces (extensif)

Elevage des porcins: En pleine croissance mais surtout dans l’Ouest du pays et dans le Nord

Volaille:les oiseaux de la basse-cour (poulets, pintades, canards)De plus en plus de fermes modernes autour des villes (plus de 10 000 unités

par an)

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Sécurité alimentaire: Réalités

2. Production et productivité de la pêche

Pêche artisanale: en constante baisse� Encadrement technique insuffisant des artisans pêcheurs� Manque de financements pour équipements

Pêche industrielle: en baisse de performance� Pêche illégale dans les eaux territoriales par les bateaux étrangers� Concurrence des produits importés

Pisciculture: timide début

Importation de poisson en très nette hausse: Plus de 80 000 t dont 50%

de sardines et maquereaux

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Sécurité alimentaire: Réalités

3. Disponibilité

Conservation des denrées alimentaires:

céréales: greniers, sacs en jute (produits chimiques)

Viandes et produits halieutiques : séchage, fumage

Fruits et légumes: séchage, jus de fruits, fermentation

Absence de la chaîne de froid pour la majorité des producteurs

Très importantes pertes post-récolte60% des oignons perdus30 à 40% de tomates, mangues et avocats

Saisonnalité des productions

Isolement des zones de production Faiblesse de voies de communication entre foyers de consommation et zones de productions

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Sécurité alimentaire: Défis

1. Nourrir les villes

- Citadins au pouvoir d’achat convenable (agriculture péri urbaine)

- Immigrés à la situation précaire

2. Satisfaire les campagnes- Produire malgré l’exode rural- Améliorer la productivité

3. Répondre à la pression de la demande sous-régionale- Exportation toujours plus importante- Valeur ajoutée par rapport au marché local

4. Limiter les importations

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Qualité et sécurité sanitaire des aliments: Etat des lieux

Réalité à plusieurs vitesses pour les populations:

1. Classes aiséesClasses moyennes et catégories supérieures des villes

Bourgeoisies locales des régions

2. Pauvres des grandes villes (22%)Accès à l’eauAlimentation de la rueProduits issus de l’agriculture périurbaine intensive

3. Paysans des campagnes (40%)Accès à l’eauAutoconsommation des productions

Agriculture extensive et sans intrants (bio)

- RAS -

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Qualité et sécurité sanitaire des aliments: Etat des lieux

Qualité nutritionnelle des aliments: Evaluation par les indicateurs de déficience chez les populations

Elle dépend des zones agro-écologiques

Principales statistiques:

�Malnutrition protéino-calorique (32% des enfants de moins de 5 ans)

�Carence en vitamine A (40% des enfants de moins de 5 ans)

�Anémie par carence en fer (53% des enfants de moins de 5 ans et 57% des femmes enceintes)

�Carence en iode (goitre et retard mental chez les enfants, 7 et 5% en baisse sensible suite à la norme sur le sel)

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Qualité et sécurité sanitaire des aliments: Etat des lieux

Causes des déficiences nutritionnelles:

Déficiences protéino-énergétiques: �Difficulté d’accès aux sources de protéines conventionnelles (Viande, poissons…)

�Protéines végétales négligées

Avitaminoses:Disponibilité saisonnière des sources de vitamines A �Méthodes de conservation inappropriées (séchage solaire)�Habitudes alimentaires (huile de palme pas accepté au Nord)

Carences en fer:�Apports insuffisants (régimes alimentaires à base des végétaux; peu de viande)

�Effet d’autres facteurs (infections…)

Carences en iode:�Pauvreté des sources d’iode (eau, sol, plantes)

�Consommation du manioc cyanogène

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Qualité et sécurité sanitaire des aliments: Etat des lieux

Sécurité sanitaire de l’eau et des aliments:

�Disponibilité de l’eau potable et les maladies hydriques

�Les aliments de la rue et les TIA

�Les aliments traditionnels et la sécurité

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Qualité et sécurité sanitaire des aliments: Etat des lieux

Disponibilité de l’eau potable et les maladies hydriques

En zones urbaines: �80% ont accès à l’eau traitée (branché à une adduction d’eau….mais coupures régulières)�20% consomment une eau non traitée (forages, sources protégées et non protégées)�Taux réel d’accès d’environ 50%

En zones rurales:�40% ont accès à l’eau potable (forages traités)�60% consomment les eaux de puits, sources non protégées, rivières

Prévalence des maladies hydriques: 53% de la population affectés�Paludisme (35%)�Fièvre typhoïde (30%) – Salmonella Typhi�Diarrhées bactériennes (15%)- E. coli, entérocoques�Dysenteries amibiennes (10%)�Choléra (épisodique, consécutif aux inondations)

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Qualité et sécurité sanitaire des aliments: Etat des lieux

Les aliments de la rue et les TIA: Aliments vendus sur la voie publique dans les

villes-Moins chers, accessibles pour des personnes à revenus modestes-Prêts à être consommés-Disponibles en tout temps

Quels sont-ils?-Poisson braisé au charbon de bois-Poulet braisé au charbon de bois-Viande grillée (zébu, mouton, chèvre, porc…)-Bouillies de céréales-Bières locales-Vins de palme-‘Odontol’ distillée localement-Diverses boissons fraiches (jus d’agrumes, de bananes….)-Divers autres mets

Souvent associés aux TIA:Diarrhée bactérienne collective des élèves d’une école primaire à YaoundéFièvre typhoïde causée par les saladesIntoxication par l’Odontol (méthanol)….Aflatoxines produites par Aspergillus flavus dans aliments de rue à base de céréalesStaphylococcus aureus, Salmonella sp., E. coli, B.cereus dans les produits carnés

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MicroorganismsVillage

Goumdjel Troua

Goumdjel Pastoral

Walde Sodepa

Mbe Meiganga TignereBelel

ChefferieBelel Ecole

Norm

Total flora (CFU/mL)

1.54 X 104 3.00 X 104 1.3 X 103 1.5 X 102 1.25 X 102 5.9 X 102 2.6 X 105 1.7 X 105 10

Sulfite reducing Clostridia

(CFU/5mL)0 0 0 0 7 0 25 0 Absence

Fecal Coliforms (CFU/100mL)

1.7 X 103 6.9 X 103 0 0 0 30 1.3 X 102 1 X 102 Absence

Fecal Streptocci (CFU/100mL)

0 0 0 0 0 0 14 12 Absence

Salmonella/Shigella (CFU/100mL)

0 2.3 X 103 0 0 0 0 25 30 Absence

Vibrio

(CFU/100mL)0 0 0 0 0 0 0 0 Absence

Pseudomonas

aeruginosa

(CFU/100mL)0 0 0 0 0 0 0 0 Absence

Staphylococcus

aureus

(CFU/100mL)0 0 1 X102 0 0 0 0 0 Absence

Qualité microbiologique des eaux de villages

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Qualité et sécurité sanitaire des aliments: Etat des lieux

Sources de contamination des aliments de rue:

1. Pollution chimique (Production des denrées)� Agriculture périurbaine intensive avec utilisation de pesticides

� Pêche sur des cours d’eau avec déversement des huiles de moteurs dans les eaux

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Qualité et sécurité sanitaire des aliments: Etat des lieux

Sources de contamination des aliments de rue:

2. Pollution microbiologique� Conservation des produits� Distribution et vente des aliments� Préparation des aliments (non respect des bonnes pratiques d’hygiène)

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Appropriation des concepts de la qualité et de la sécurité sanitaire des aliments

1. Au niveau de la population ruraleRisques microbiologiques:Refus d’abattre la volaille lors de la grippe aviaire: mourir de faim ou

mourir de la grippe aviaire?

2. Dans les villesEmergence des associations de consommateursProcès intenté à un gros distributeur de poisson importé

3. Travail de fonds mené par les ONG, FAO, OMS, Le Centre Pasteur du Cameroun

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Appropriation des concepts de la qualité et de la sécurité sanitaire des aliments

4. Création d’une Agence de Normalisation-ANORConstruction d’un catalogue des normes camerounaises

5. Création des brigades de contrôle de l’hygiène et de la qualité

6. Mise aux normes des entreprises locales de production de l’eau et des aliments

7. Dynamique appréciable de certification des entreprises locales

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Stratégies mises sur pied

1. Booster la production locale (sécurité alimentaire)

� Préservation de l’environnement (opération Sahel Vert au Nord)

� Organisation des paysans en ‘Groupements d’Initiative Commune’-GIC

� Création des organismes de micro-finance pour leur accorder des microcrédits

� Formation des paysans aux techniques de production agricole

� Introduction des semences améliorées par l’Institut de Recherche Agricole pour le Développement

� Introduction et croisement des races locales de zébu par les races de vaches laitières étrangères

� Développement des pistes rurales pour l’évacuation des produits

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2. Améliorer l’apport nutritionnel des aliments (qualité nutritionnelle)

� Sensibiliser au respect strict de la norme sur l’iodation du sel

� Encourager la consommation des sources alternatives de protéines accessibles au plus grand nombre (recherches sur les insectes, la spiruline, campagne de communication)

� Valoriser les technologies traditionnelles de transformation des produits locaux

� Encourager la consommation des aliments riches en vitamines A notamment dans les régions en déficit (Huile de palme)

Stratégies mises sur pied

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3. Améliorer la sécurité sanitaire

� Prévenir la contamination fécale des eaux (former à la construction des latrines et au respect des distances réglementaires entre latrines et sources d’eau phréatique)

� Former au respect des bonnes pratiques dans la préparation des aliments de rue

� Encadrer l’usage des pesticides dans les exploitations agricoles autour des villes

� Encourager la construction d’espaces aménagés de vente et de stockage des produits alimentaires

� Former et sensibiliser les populations à l’usage d’emballage non toxique

Stratégies mises sur pied

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Crevettes à la kribienne

MERCI DE VOTRE

AIMABLE ATTENTION