platon, 5.2 cratyle

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COLLECTION DES UNIVERSITÉS DE FRANCE publiée sous le patronage de l'ASSOCIATION GUILLAUME BUDÉ PLATON OEUVRES COMPLÈTES TOME V a* PARTIE CRATYLE TEXTE ÉTABLI ET TRADUIT Louis MÉRIDIER Professeur à la Faculté des Lettres de l'Université de Paris. PARIS SOCIÉTÉ D'ÉDITION « LES BELLES LETTRES » 95, BOULEVARD RASPAIL

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COLLECTION DES UNIVERSITÉS DE FRANCEpubliée sous le patronage de l'ASSOCIATION GUILLAUME BUDÉ

PLATONOEUVRES COMPLÈTES

TOME V — a* PARTIE

CRATYLE

TEXTE ÉTABLI ET TRADUIT

Louis MÉRIDIERProfesseur à la Faculté des Lettres

de l'Université de Paris.

PARISSOCIÉTÉ D'ÉDITION « LES BELLES LETTRES »

95, BOULEVARD RASPAIL

ig3iTous droits réservés.

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Conformément aux statuts de l'Association Guillaume

Budé, ce volume a été soumis à l'approbation de la

commission technique, qui a chargé M. Emile Chambryd'en jaire la revision et d'en surveiller la correction en

collaboration avec M. Louis Méridier.

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CRATYLE

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NOTICE

Il n'est pas un dialogue de Platon qui ait suscité chez les-

modernes plus de discussions que le Cratyle. Dans ses ana-

lyses parues entre 1891 et 1901, H. Kirchner 1

passait en

revue trente-deux études consacrées à cet ouvrage, et depuislors ce nombre a continué de s'accroître. Quel est le but du

Cratyle ? Quelle opinion l'auteur y exprime-t-il sur l'origine

du langage?

Contre quelles écoles ou quelles personnes est

dirigée sa polémique ? Dans quelle mesure la plaisanterie s'y

mêle-t-elle au sérieux ? Autant de questions sur lesquelles les

commentateurs n'ont cessé de se diviser. C'est assez dire

qu'en ajoutant à cette longue liste un nouvel essai d'inter-

prétation, on ne prétend point donner une solution défini-

tive des problèmes soulevés par le Cratyle. Du moins paraît-il

possible

d'atteindre sur un certain nombre depoints, parun examen attentif de la marche du dialogue, à des conclu-

sions vraisemblables 2.

ANALYSE DU DIALOGUE

Préambule. Le dialogue met en scène trois person-

Exposé nages, Hermogène, Cratyle et Socrate.

du problème. \\ s'ouvre brusquement : Hermogène, en

discussion avec Cratyle, lui propose de383 a-384 e).

faire part de leur entretien à Socrate, qui vient d'arriver. De

1. Die verschiedenen Auffassungen des platonischen Dialogs Kratylus.

Progr. Brieg, 1891/2, 1892/3, 1896/7, 1900/01.1. Nous avons tiré un profit tout particulier du travail pénétrant et

vigoureux, bien qu'un peu systématique, de F. Horn, Platonstudien,.

Neue Folge, Wien, 190^, p. 1 et suiv.

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8 CRATYLE

quoi s'agit-il ? Suivant Cratyle. il existe naturellement (cpûaei)

pour chaque objet une juste dénomination (ôvouaro; ôpôoVrc,383 a b) qui est la même pour tous, Grecs et Barbares. Mais

Hermogène ne peut obtenir de lui l'explication de ses proposobscurs. Que Socrate veuille bien les interpréter, ou donner

son avis sur la question ! Socrate répond que le problème est

difficile et qu'il en ignore la solution. D'ailleurs il est prêt à

la rechercher de concert avec ses interlocuteurs. Hermogène

expose sa thèse, opposée à celle de Cratyle: la justesse des

noms est affaire de convention et d'accord(ffuv<hjxi)

xal

fc|u>AGV''a, 384 d). Le nom qu'on attribue à chaque objet est

juste ;si on le change pour un autre, par exemple en nom-

mant un serviteur, le dernier n'est pas moins juste. Il n'ya pas de nom donné par la nature

; l'usage et la coutume

(vo'jao) xal lOet) font tout en cette matière.

Entretien ^a longue discussion qui s'engage alors

de Socrate entre Socrate et

Hermogène occupela

et d'Hermogène pius grande partie du dialogue. Elle(385a-421 d).

r °, EH-xi

r comprend quatre étapes :

I (385 a-3o,i b). Au cours de la première, Socrate fait

admettre à son interlocuteur les propositions suivantes :

i . Les choses ont une essence fixe et stable (*i¥« (UCaifaiyrq

TYp cùsi'as, 386 a; oùcc'av Ttvà péêatov, 386 e) qui ne dépend

pas de nous;

2. Les actes(-zpâîjciç) qui se rapportent aux choses sont

une forme déterminée de réalité (sv ti elooç tcov èVrwv, 386

e). Ils se font en conformité avec leur propre nature, et non

selon notre façon de voir ;

3. Or parler est un acte, et nommer (to âvopoÇttv) en est

une partie. Il faut donc nommer les choses suivant le moyen

qu'elles ont naturellement de nommer et d être nommées

(i) 7téwuxe xà tç,t.';ilx-x ovouâwSiv t£ xal ôvopaÇtafoc, 387 d) ;

4. C'est à l'aide du nom qu'on nomme. Le nom est un

instrument qui sert à instruire et à distinguer la réalité

(ovojia... ô*ioa<7xaXixd'v xl Istiv opyavov xal cta/.p'.Ttxov tt,ç

oùcia;, 388 b c);

5. C'est le législateur (vouioôfr^ç) qui établit les noms

(388 e);

6. Il doit avoir les yeux fixés sur ce qui est le nom en soi

(xcoç ttxnh èxEtvo l<mv ovojxa, 38g d), pour imposer aux sons

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NOTICE 9

et aux syllabes le nom approprié naturellement à chaque

objet ;

7.

Peuimporte que

les

législateurs n'opèrent pas

sur les

mêmes syllabes, pourvu qu'ils leur imposent la forme de nom

(to -ou ovoaaTo; elBot;, 390 a;cf. tSéav, 38o, e) requise par l'objet ;

8. L'homme capable de juger l'ouvrage du législateur (le

nom) est celui qui s'en servira, c'est-à-dire l'homme qui sait

interroger et répondre (tov èpwTâv xat ànoxpiveaOai ixiarci-

[xsvov), en d'autres termes le dialecticien (oiaXtxTixdv, 390

c). C'est lui qui devra diriger (siziaxàir^, 390 d) le travail

du législateur.

Résumé et conclusion. Fixer les noms n'est pas l'œuvre

du premier venu, comme le croyait Hermogène ;et Cratyle

a raison : les noms appartiennent naturellement(cpùc£t)

aux

choses, et il n'est donné d'être un artisan de noms (Sri%atoup-

yoç ôvoy.àTtov) qu'à celui-là qui, le regard attaché sur le nomnaturel de l'objet, sait en imposer la forme aux lettres et aux

syllabes (3go d e).

II (3g 1 b-396 c).Il faut maintenant rechercher en quoi

consiste cette justesse naturelle du nom, c'est-à-dire comment

se réalise cette destination idéale. Pour le savoir, Socrate

propose de s'adresser aux sophistes. Mais Hermogène lui

ayant fait observer que la démarche serait illogique, puis-

qu'on a réfuté précédemment la thèse de Protagoras, il

décide de consulter Homère et les poètes. En se fondant surles noms d'Astyanax et d'Hector, Socrate tire d'Homère les

lois que voici :

1 . Il est juste de donner au fils le nom du père, quand la

génération se fait suivant l'ordre naturel (3g3 c) ;

2. Peu importe alors que le même sens s'exprime partelles ou telles syllabes: des lettres peuvent être ajoutées, ou

retranchées,ou

déplacées ;

elles

peuventêtre entièrement

différentes; il suffit que l'essence de l'objet se manifeste dans

le nom (3g3 d-3g4 c) ;

3. Les êtres dont la génération s'est faite contre nature

(toi; 7rapà cpùciv, 3g4 d) doivent être désignés non par le nomde leur père, mais par celui du genre (yevoç) auquel ils appar-tiennent. Explication des noms d'Oreste, Agamemnon, Atrée,

Pélops, Tantale, Zeus, Rronos, Ouranos (3g4 d-396 d).

III (3g6 d- 421 c). Mais les noms donnés aux héros et aux

hommes risquent d'induire en erreur. Beaucoup d'entre eux

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io CRATYLE

sont établis d'après les appellations des ancêtres, et sans

aucune convenance;d'autres expriment un souhait. Il faut

examiner plutôt les noms appliqués à ce qui a par nature

une existence éternelle Qzk àei ovra xaiirecpuxdxa, 397 b).

Ici, une digression où Socrate explique l'étymologie de

6sdç (397 c d), celles deSafjuftv, d'après Hésiode (397 e-

398 c), de vjpwç (3g8 c-e), d'àv6p(07roç (399 a), de ^/jr, (399 d-

400 b), de coma (4oo bc).

Ramené par Hermogène à la recherche annoncée, Socrate

commence son examen. Il passe successivement en revue

trois groupes de noms, dont il indique l'étymologie :

1, Ceux des dieux : Rhéa, Kronos, Poséidon, Pluton,

Hadès, Déméter, Héra, Pherréphatta, Apollon, les Muses,

Léto, Artémis, Dionysos (ici, étymologie de olvoç, le vin),

Aphrodite, Pallas, Athéna, Héphaïstos, Ares, Hermès, Pan

(4oo e-4o8 d) ;

a. Ceux des astres et des phénomènes naturels : le soleil

(tjXioç), la lune (seÀTJvy), oeXavata), le mois (|Jt.etç), l'éclair

(<x<7Tpa7CYj),le feu

(rciïp),l'eau (uowp), l'air (àVjp), l'éther

(aîôrjp),la terre (yti, Ya'°0> ^es saisons (wpai), l'année et l'an

(IviaoTOç, exoç, 409 a-4ioe).3. Ceux des notions morales:

cppôVrçatç, vdrjatç, <rcocppo<juv7i,

£7ti<7x>i[ji.r , <7uv£(7tç, compta, àyaô^v, StxaioauvTj, oixouov (et

àStxta), àvBpeta, appyjv, àv/jp, yuviq, 6r,Xu (ici, étymologie de

ôàXXstv), tiyyriy \li\/

}

vrt\ , xaxia, BetXi'a, xrcopia, àpsTTj, xaxdv,acaypô'v, xaXô'v, (jujAcpÉpov, xspoaX^ov (et xepBoç), XuaireXouv,

wcpsXt|/.ov, pXaSepdv, Ci)|M<3&cç, o«ov(ici, parenthèse sur l'étymo-

logie de 7]p.spa), 7]OOV7], Xu7CY], àvia, àXYTjSwv, 88uvtj, à^ôrjScav,

yapà,Tip<|/tç, T£p7tvd;, EÙcppoffuvTj, £7u6u[xta, 6u;xdç, tjXEpoç, 7ro8oç,

èpwç, Bolja, ot'y,<7'.ç, fouX*/], àêouX''a, àxoyta, èxououov, àvaYxatov.

Etymologies de ovojxa, àXVjGeta, ov, ouata (4n c-42i c).

IV. Les noms examinés jusqu'ici sont des dérivés et des

composés. Pour les interpréter, on remonte nécessairement

aux noms primitifs (xà ^pàixa ovdjxaxa) dont ils proviennent.Mais ceux-ci, par définition, ne peuvent s'expliquer à la

lumière d'autres noms, et leur explication requiert un pro-cédé différent. Quelle est la méthode à suivre ?

1 (4a 1 c- 4a5 b). Il faut partir du principe déjà posé : pourêtre juste, le nom doit faire voir la nature de l'objet désigné

(olov Exacrô'v £<jTt xôôv ovxtov, 422 d). Il est une façon demimer à l'aide de la voix. Mais imiter le chant du coq, ce

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NOTICE ii

n'est pas nommer le coq. L'imitation obtenue par le nom ne

portera ni sur le son (sans quoi elle se confondrait avec la

musique), ni sur la forme ou la couleur (ce qui est le proprede la peinture) : c'est Yessence de l'objet que le nom doit

imiter par des lettres et des syllabes (pupLcfatau.. sxâaxou r^v

oùstav YpàjxfxaCTtxe xat auXXaêalç, 423 e). Il importe donc de

distinguer d'abord les éléments (BisXssôac xà axoi/sTa, 424

b) : voyelles (xà cpwvrj^vTa), muettes (xà àcpcova xai dfcp6oyYa)j

« demi-voyelles » (xà cptoviqsvxa jxev ou, où [xevxot y £ acpôoyYa),

et les classer par espèces (xaxà e"oyi) ;on distinguera et on

classera de même tous les êtres auxquels doivent s'appliquer

les noms. Dès lors, on saura attribuer chaque élément,

d'après sa ressemblance avec l'objet ;à chaque être on attri-

buera, pour le désigner, soit un élément unique, soit une

réunion d'éléments (syllabe) ;les syllabes seront assemblées

pour composer les noms et les verbes (xa xe ôvdtxaxa xat xà

pr^fxaxa) ;avec les noms et les verbes on constituera le discours

(xbv Xovov) par l'art approprié:

onomastique ou rhétorique.Toute autre méthode serait défectueuse.

2 (4a5 b-427 d). Ces distinctions nécessaires, Socrate se

déclare incapable de les établir. Il essaiera pourtant de le

faire. Car si l'on ignore en quoi consiste la justesse des

noms primitifs, il est impossible de reconnaître celle des

dérivés, et l'on se condamne à ne dire alors que des sor-

nettes.Là-dessus il passe en revue un certain nombre de lettres.

Le pest propre à l'expression du mouvement

;l'i exprime la

légèreté ;le

cp,le

<]/,le 5, le Ç, comportant une aspiration,

expriment Yagitation ;le S et le x, Yarrêt

;le X, le glisse-

ment;le v, Yintérieur

;l'a et I'yj la grandeur et la longueur,

l'o, la rondeur. Pour chaque être, le législateur semble avoir

créé unsigne

et un nom, et être

parti

de là

pour compo-ser le reste. Voilà en quoi consiste la justesse des noms.

Socrate, en terminant, a sollicité l'avis de Gratyle. Hermo-

gène le demande à son tour (427 d- 428 b).

Ce second entretien comprend troisEntretien

%{&i.

de Socrate [,, c , /2 r n

avec Cratyle.[ ^2b b_ ^6b c

) :

a (428 b- 43o a). Cratyle approuve les

propos tenus par Socrate. Mais celui-ci fait des réserves

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i2 GRATYLE

sur ses propres conclusions, et juge nécessaire de reprendrel'examen. Cratyle admet que la justesse du nom consiste

à montrer la nature de la chose; que les noms sont faits

pour instruire, et que les établir est un art, pratiqué

par les législateurs. Mais il se refuse à croire que certains

noms puissent être mal établis. Selon lui, tous les noms

qui sont vraiment des noms sont justes : il est impossiblede parler faux (^soSr, Xsyeiv to Ttapànav oùx laxtv, 429 d).

Socrate lui prouve par un exemple qu'on peut affirmer ou

énoncer des faussetés. Gratyle le nie : en pareil cas, dit-il,

on ne parle point ; on n'émet que du bruit Qboz>dv, 43o a).

b (43o a-43i c).Mais Socrate démontre que le nom est,

comme la peinture, une imitation de l'objet. Comme dans

la peinture, l'imitation peut être inexacte. Il est donc pos-sible de parler faux, c'est-à-dire d'attribuer inexactement les

noms et les verbes. Et il en va de même pour les phrases.c (43 1 c-433 c).

Les mots eux-mêmes peuvent avoir été

formés inexactement. Quand il s'agit d'un nombre, toute

suppression ou addition qu'on y opère en fait aussitôt un

autre nombre. Mais le nom est une image ; pour rester

image, il ne doit pas être un double exact de l'objet; il suffit

qu'il en représente l'essentiel. Cette image existera, mêmesi elle ne renferme pas tous les traits appropriés. Si elle les

contient tous, le nom sera bien établi;

il le sera mal, si ces

traits ne s'y retrouvent qu'en petit nombre.d (433 c-435 c). Gratyle n'accepte ces conclusions qu'à

contre-cœur. Il a peine à convenir qu'il existe des noms mal

faits. Socrate reprend alors l'étude des éléments;

il lui fait

voir, par un exemple, qu'un nom peut être compris de ceux

qui l'emploient, bien qu'il renferme des éléments incompa-tibles avec la notion qu'il exprime. L'usage féOo?) se subs-

titue ici à la ressemblance

(ôuoiott^)

commemoyen

de

repré-senter(oYjXeotxa).

Il serait à souhaiter que les noms fussent

autant que possible semblables aux objets; mais en fait on

doit y admettre une part de convention ((Juvô^xti).

II (435 c-439 b) :

a (435 d-437 d). Quelle est la vertu (ouvauic) des noms ?

C'est d'enseigner (oiSàay.Eiv), dit Cratyle : quand on sait les

noms, on connaît aussi les choses. Socrate lui objecte qu'on

risque de se tromper dans la recherche des choses, si l'on

prend les noms pour guides. Celui qui, le premier, a établi

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NOTICE i3

les noms s'est réglé sur l'idée qu'il se faisait des choses. Mais

qui garantit qu'il en avait une idée juste? L'accord prétendudes noms ne

prouverien; il est d'ailleurs contestable. Cer-

tains d'entre eux, précédemment expliqués comme mar-

quant le mouvement, semblent au contraire exprimer le

repos.

b (437 d-43q b). Supposons que l'auteur des noms primi-tifs les ait établis en connaissance de cause. Sur quoi a-t-il

pu se fonder ? Ce n'est pas sur d'autres noms : il n'y en avait

pas encore. Est-ce sur les choses? Mais on a dit que ce sont

les noms qui les font connaître.

Cratyle, embarrassé, suggère que les noms primitifs ont

peut-être été établis par une puissance surhumaine ( as îÇw xivk

Sûvauuv r) àvOcwirs-'av), ce qui en garantirait la justesse. Mais

alors, dit Socrate, il faut admettre qu'elle s'est contredite.

Serait-ce qu'une des deux catégories distinguées ne repré-

sente pas vraiment des noms? Mais laquelle? On arrive ainsi

aux conclusions suivantes : il est possible de connaître les

choses sans l'aide des noms; le moyen le plus naturel de les

connaître est de s'adresser à elles-mêmes, et non pas aux

noms qui n'en sont que les images.III (439 b-fin). Reprenant un point précédemment indi-

qué, Socrate déclare que les noms marquant le mouvement

risquent d'induire en erreur. Leurs auteurs les ont établis

dans la croyance que tout se meut et s'écoule sans cesse (w;ïdvTiov àuàvxwv àei xat ^sovtojv).

Mais peut-être est-ce une

illusion, que leur esprit, entraîné par une sorte de vertige,

a transportée dans les choses. Il existe un Beau et un Bien

en soi;

il est toujours pareil à lui-même. S'il passait sans

cesse, il serait impossible de lui assigner une appellation

juste. On ne peut attribuer l'être à ce qui n'est jamais dans

le mêmeétat;

il nepeut davantage

être connu depersonne.Car aucune forme de connaissance ne saurait s'appliquer à

ce qui n'a point d'état déterminé. En tout cas, il n'est pastrès prudent de s'en remettre aux noms pour affirmer quetout s'écoule. L'examen du problème doit être repris et pousséà fond

;Socrate engage Cratyle à

s'y employer. Cratyle pro-teste qu'il ne cesse de réfléchir à ces questions, et qu'il reste

fidèle à la théorie d'Heraclite. — Là-dessus, l'entretien prendfin

; Cratyle se dispose à partir pour la campagne, accompagné

d'Hermogène.

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i4 CRATYLE

. _ . . Dans ses grandes lignes, le plan du Cra-Le plan du Cratyle. .. S

,. ,

°n ;

r. c

(y/erappelleceluiduProtagoras 

. socrate,

dans ce dernier dialogue, commencepar

contester la thèse

de Protagoras que la vertu peut s'enseigner. Mais la discus-

sion aboutit à renverser les positions prises au début;et c'est

Socrate qui finit par prouver à Protagoras, et contre lui,

qu'il est possible d'enseigner la vertu. Il y a pourtant entre

les deux ouvrages une différence essentielle. Dans le Protagoras,Je deuxième partie semble réfuter entièrement la première ;

il en est autrement dans le Cratyle, où le second entretien se

borne à corriger fortement, mais sans les annuler, les conclu-

sions tirées du premier.

L'analyse précédente permet de saisir la

du*CfraLtvlemarche et d'apercevoir le sens généraldu dialogue. Deux thèses sont en pré-

sence : l'une, celle de Cratyle, consiste à soutenir que les

noms sont justes par nature; l'autre, celle d'Hermogène,

prétend que la nature n'est pour rien dans cette justesse, qui•est affaire de convention. Pris pour arbitre, Socrate montre

que, les choses ayant une réalité permanente qui ne dépend

pas de nous, la tâche de fixer les noms n'appartient pas au

premier venu, mais au législateur, qui, sous la direction du

dialecticien, doit leur imprimer la forme requise par chaque

objet. Les noms semblent posséder, contrairement à l'opinion

d'Hermogène, une certaine justesse naturelle. En quoiconsiste cette justesse ? Après avoir expliqué l'étymologie

d'un grand nombre de noms dérivés, Socrate arrive aux

.noms primitifs. Il détermine exactement les principes et la

méthode à suivre, puis, passant à l'examen des lettres et de

leur valeur, il conclut que le législateur paraît avoir créé

pour chaque objetun

signeet un

nom,et être

partide là

pour composer le reste : c'est en quoi consiste la justesse des

.noms.

La question qui faisait l'objet du débat semble donc

résolue. Mais dans le second entretien, Socrate en reprendl'examen avec Cratyle. C'est à Cratyle qu'il semblait jus-

qu'ici donner raison contre Hermogène. Maintenant, il

combat la thèse de son interlocuteur que tous les noms sont

I. Voir F. Horn, o. I, p. t8.

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NOTICE i5

justes par nature. Et à ses conclusions précédentes il ajoute

des réserves : les noms peuvent être inexacts; l'usage et, sans

doute, la convention ont une part dans leur formation; et,

pour connaître les choses, mieux vaut s'adresser à elles-

mêmes qu'aux noms qui les désignent.

Prié de départager les deux thèses adverses, Socrate n'accorde

donc son adhésion complète ni à l'une ni à l'autre;ou plu-

tôt, il leur en oppose une troisième. Après avoir paruadmettre la justesse naturelle des noms, il restreint expres-

sément ïa portée de cet acquiescement en faisant une place

à l'usage. Et il donne tort à ses deux interlocuteurs, en mon-trant que les noms, soit qu'on les suppose établis par une

convention avec Hermogène, ou fixés par la nature avec

Cratyle, ne sont pas toujours justes.

Les intentions de l'auteur se dégageront plus nettement,

si l'on étudie de près, une à une et dans leur succession, les

dilférentes parties du Cratyle.

II

LES PARTIES SUCCESSIVES DU DIALOGUE

Ayant déterminé les conditions idéales

et Homère^ans lesc

ïueUes doivent être formés les

noms (390 de), Socrate entreprendd'examiner en quoi consiste leur justesse naturelle et, pours'en instruire, il propose de s'adresser aux poètes (3q[ c d).

Que vaudront les résultats de cette consultation? On sait

par ailleurs ce que pense Platon de la «sagesse » poétique

1.

Protagoras, dans le dialogue qui porte son nom, estime que« la partie la plus importante de l'éducation consiste à être

un connaisseur en poésie » (338 e). Mais Socrate n'est pasde cet avis : les gens cultivés n'ont aucun besoin de ces

poètes qu'il est impossible d'interroger sur ce qu'ils veulent

dire;

ils s'entretiennent entre eux par leurs propres moyens ;

c'est avec des propos qui leur appartiennent qu'ils se mettent

1. Cf. A. Kiock, De Cratyli Platonici indole ac fine, Diss. Breslau,

19 13, p. 36, note. Kiock signale çà et là des trimètres ou fragmentsde trimètres dans le langage prêté à Socrate.

V. 2. — 2

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î6 CRATYLE

les uns les autres et se laissent mettre à l'épreuve (347 e"

348 a). Nous voilà donc, dès le début, fixés sur la valeur de

cette déclaration : « C'est Homère et les autres poètes qu'il

faut prendre pour maîtres » (391 c d), et sur la valeur desconsidérations qui vont suivre *.

La fantaisie de Socrate s'y révèle aussitôt. Chez Homère,

dit-il, le fils d'Hector porte deux noms : Scamandrios et

Astyanax. Il est appelé Astyanax par les Troyens2

,d'où

l'on peut conclure qu'il était appelé Scamandrios par les

Troyennes ; or, les hommes étant plus sages que les femmes,

il en résulte que pour Homère Astyanax était le nom juste(392 b-392 d). Le malheur est que YIliade 3 dit très claire-

ment : a Cet enfant, Hector l'appelait Scamandrios;

les

autres, Astyanax. » De ces vers que Platon n'ignorait évi-

demment pas, il serait naturel d'induire que le nom juste

était Scamandrios, donné parle père de l'enfant. Ils excluent

en tout cas l'hypothèse, toute gratuite d'ailleurs, que Sca-

mandrios était le nomemployé par

les femmes.

La prétendue loi que Socrate croit tirer d'Homère n'a pas

beaucoup plus de consistance. Astyanax et Hector, le nom du

fils et celui du père, ont à peu près le même sens. C'est qu'il

est naturel de donner à l'enfant le nom de son père, et d'ap-

peler lion le petit d'un lion (3g3 a b). En quoi ce principe

peut-il rendre compte de la justesse du nom ? Il n'explique

point l'appellation donnée au père. Un instant après, Platon

a soin d'avertir le lecteur que les propos qui vont suivre ne

doivent pas être pris au sérieux: « Surveille-moi bien, dit

Socrate à Hermogène, de peur que je ne t'induise en erreur ! »

(3g3 c).Et en effet, que dit-il? En cas de filiation naturelle,

l'enfant doit porter le nom du père ;mais il doit être appelé

d'après le genre auquel il appartient, si la filiation se fait

contre nature (393c-394d). Mais ce nouveau principe ruine

le précédent, car il en résulte que la seule dénomination

juste dans tous les cas est celle qui se fonde sur le genre, non

sur le nom du père.

A l'appui de ses conclusions, Socrate passe en revue les

noms des Pélopides, et donne de chacun d'eux une expli-

1. F. Horn, 0. Z.,p. 3i;A. Kiock, o. /., id.

2. Iliade, XXII, 5o6.3. VI, 402-3.

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NOTICE 17

cation étymologique. Il considère apparemment les représen-tants de cette famille comme les produits d'une génération

anormale, car il explique chaque nom par le caractère de

son possesseur, et, au lieu de commencer par le fondateur de

la race, il débute par reste pour remonter à Tantale, puis

Zeus, Kronos et Ouranos. Du premier principe posé il n'est

plus question (3g3 a b).

Arrivé au bout de cette première série d'explications éty-

mologiques, Socrate s'émerveille de sa propre sagesse. Her-

mogène renchérit sur cette admiration : Socrate semble avoir

été brusquement saisi par l'inspiration, et il s'est mis à

« rendre des oracles » (3g6 cd).

C'est avertir assez clairement le lecteur du peu de crédit

qu'il doit attribuer à ce qui précède. Platon indique ailleurs

ce qu'il pense de l'inspiration, capable tout au plus de ren-

contrer l'opinion droite, mais dépourvue de toute valeur scien-

tifique. Or, d'où vient l'inspiration de Socrate? Il l'attribue

lui-même à Euthyphron, avec qui il s'est longuement entre-tenu le matin du même jour. Nous connaissons, par le dia-

logue auquel il a donné son nom, ce devin d'Athènes, esprit

étroit et dévot jusqu'au fanatisme, qui se donnait à la fois

pour un inspiré et pour un docteur en matière de religion.

Les gens le tenaient pour un fou et se moquaient de lui '. Et

Socrate, en réfutant sa conception de la piété, lui démontre

dans cet ouvrage qu'il n'entend rien aux choses dontil

dis-court. On voit par là quelle est la qualité de l'inspiration

derrière laquelle s'abrite Socrate, et le cas qu'il peut en faire

lui-même 2. Il ajoute d'ailleurs un commentaire signifi-

catif : demain « il exorcisera cette sagesse divine et s'en

purifiera » (396 e). Enfin, pour achever d'éclairer le lecteur

sur ce qu'il doit penser des étymologies précédentes, il

remarque,

au moment de

reprendre

sonexposé, que

les

noms donnés aux héros et aux dieux risquent de fourvoyer,et il en donne les raisons (397 b).

1. Euthyphron, 3 6.

2. 0. Apelt, Plaions Dialog Kratylos, 1922, Einleitung, p. i3.

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18 CRATYLE

Or, c'est encore à l'inspiration d'Eu-Les autres

thyphron qu'il rattache les considérationsé

dIsocratl

S

étymologiques quivont de 3o6 d à

42 1 c. Il y insiste à plusieurs reprises :

il félicite ironiquement Hermogène d'avoir foi dans cette

inspiration (399 a) ; après avoir expliqué le mot 'W/r, il

propose une nouvelle étymologie, beaucoup plus recherchée,

et par suite plus plausible aux yeux des Euthyphron

(399 e); parodiant un vers d'Homère, il se vante de faire

voir à Hermogène ce que valent «les chevaux d'Euthyphron »

(407 d) ;embarrassé par l'origine du mot ttuç,

il craint que« la Muse » d'Euthyphron ne l'ait abandonné (409 d); enfin,

il justifie l'accumulation précipitée de ses étymologies en

alléguant que « l'inspiration du dieu touche à sa fin »

(420 d). Par ces allusions répétées, Platon nous invite évi-

demment à ne pas prendre au sérieux la contenu de ce long

développement : il ne saurait y avoir de doute sur ses inten-

tions.

Qu'il ait eu lui-même le goût de l'étymologiel

,on croit

en trouver la preuve en d'autres endroits de son œuvre 2»

1. F. Schâublin, Ueber den Platonischen Dialog Kratylos, Diss.

Bàle, 1891, p. 67 sq. ;I. v. Ijzeren, De Cratylo Heracliteo et de

Platonis Cratylo (Mnemosyne, N. S. XLIX, 1921, p. 192, note1) ;

Wilamowitz, Platon, Erster Band, Berlin, 1920, p. 289.

a. Dans le Protagoras (36 1 d) il rapproche Hçop.rfis-jq de-pojrr,-

^ûjjjlevoçj 3i2 c il tire aooicTr^ de cosô; (savant) et de la racine igt-

(savoir) ;dans le Phèdre, 287 a, il fait venir Xfrftcu de Aiy-js; j 244

b c, [xavxixride u.aviX7j ;

il explique oîtovia-ix7J par o?rjatç-vou;

-îsTOp-a ;dans le Théétete, 194 c, il rattache xsap (cœur) à xr,po; (cire) ;

dans la République, II, 36g c, il rend compte de -dÀtç par -oaaoî;dans

le Sophiste, 221 c, il fait venir oaxaXteâs (pêcheur à la ligne) de à(va)-

ujgSv (tirer en haut) ;dans les Lois, II, 654 a, il interprète /opoç par

yapa; VII, 816 a, Kupp:y>T\ par nup ;et XII, 967 c, vo'jjloc par voj;.

Quelques-uns des noms étudiés dans le Cratyle le sont dans d'autres

dialogues: Gorgias, 4g3 a, aûua est expliqué par c^ua (cf. Crat.,

4oo b c) ;le rapprochement n'est d'ailleurs pas de Platon, qui

l'attribue lui-même à un savant homme (cf. Philolaos, fragm. i5 d) ;

dans Phèdre, 238 c, epw; est expliqué par pwtxr, (cf. Crat., 420 b) ;

25 2 c, le nom d'Eros est chez les Immortels Ptéros (citation poétique) ;

25i c, Tfxepo; est interprété par uipr, borfrra xxl pedvTa, et, 255 c, par

peuaa (cf. Crat., 420 a) ; Phédon, 80-81 d, "A:St]ç est expliqué par

QLEiBrJç (étymologie mentionnée, mais rejetée dans le Cratyle, 4o4 b)-

T

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NOTICE 19

Mais il n'y a point à en conclure, comme le fait Schâublin 1

,

que dans ces endroits et dans Cratyle il ait utilisé avec

sérieux le procédé étymologique. Les rapprochements rap-

pelés ci-dessous sont parfois de simples jeux de mots ; en

plusieurs cas le ton du badinage est manifeste;et même si

Platon n'est pas le premier à en sourire, il ne peut certaine-

ment y voir autre chose que des vraisemblances.

Dans le long développement qui prend fin à 421 c, il y a

sans doute des idées intéressantes et justes. Platon a bien vu

que la forme des mots se modifie avec le temps, quoiqu'il

l'attribue en partie à une action consciente des sujets par-

lants, au parti pris d'enjoliver le langage, et non au jeunaturel des lois phonétiques. Il n'a pas tort de dire que,sous leur forme ancienne, les mots laissent voir plus claire-

ment leur étymologie que dans l'état actuel du langage. Son

ignorance des langues étrangères2

l'empêche de deviner le

parti que l'étymologie peut tirer de la comparaison du grec

avec les parlers de la même famille ;

au lieu de dire,commeSocrate, que certains mots ont une origine barbare, la science

moderne les expliquerait par la parenté du grec avec le sans-

krit ou telle autre langue « indo-européenne ». Mais elle lui

donnerait raison dans l'ensemble, puisqu'il est admis aujour-d'hui qu'une grande partie du vocabulaire grec est faite

d'emprunts étrangers à l'indo-européen. Socrate est dans le

vrai en recourantparfois, pour expliquer

des motsattiques,

à d'autres dialectes grecs qui peuvent avoir gardé une forme

plus voisine de l'état primitif. Il fait une observation ingé-nieuse et pénétrante en notant que les femmes restent plusfidèles que les hommes à l'ancien parler. Toutefois la ques-tion n'est pas de savoir si ces idées sont justes pour nous,

mais si elles semblent telles à Platon, et, en tout cas, si leur

application peut produire ici des résultats qui aient à ses

yeux une valeur scientifique. Or, la suite du dialogue conduit

à une conclusion négative.

Les étymologies du Cratyle, on l'a vu, sont présentées dans

Sophiste, 228 d, ffuvsat; est rattaché àcrûvetjxt (cf. Crat., £12 a).

1. O.I., p. 67.2. Il n'en cite qu'une, le phrygien, à propos du mot rup (£io a),

et avec raison semble-t-il. Le fait est

qu'en

arménien feu se dit hur

(Boisacq, Dict. étym., s. v., p. 828), et que les Arméniens passaient

pour descendre de colons phrygiens.

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20 GRATYLE

l'ensemble avec une intention fort nette de dérision. Il est tout

à fait vain, avec Cucuel ' et surtout Schâublin, de dresser la

liste des étymologies « sérieuses »,à côté de celles

qui

sont

des moqueries évidentes 2. Rien ne sert d'objecter que même

les plus extravagantes pouvaient être prises au sérieux

par l'auteur, ou l'ont été après lui, dans un temps où la

science étymologique n'avait pas à sa disposition les moyensdont elle use aujourd'hui : l'attitude de Platon ne permet pasd'hésiter. Peu importe qu'il se rencontre, sur le nombre, des

étymologies justes : elles se réduisent d'ailleurs à peu de

chose, un peu plus de vingt3 sur cent douze mots étudiés et

cent trente-neuf ou cent quarante étymologies. Et il fau-

drait prouver que l'auteur du Craiyle les tenait pourexactes.

Non seulement « l'inspiration » d'Euthyphron, alléguée

avec tant d'insistance, est là pour nous mettre en garde,mais Socrate se charge à plusieurs reprises de nous ouvrir

les yeux. Il déclare, 399 a, qu'il lui est venu des idées ingé-

nieuses, et qu'il risque d'être plus sage que de raison. Aprèsavoir improvisé une explication de 'bv^ >

^ se n^te d'en Pr0~

poser un autre, moins banale, dont il signale ironiquementle caractère recherché, comme s'il ne s'agissait dans cet

examen que de faire montre de bel esprit (£oo a et 4oo b,

1. Quid sibi in dialogo eut Cratylus inscribitur proposuerit Plato.

Thèse, 1886, Paris, p. i3.

2. Socrate déclare (4o6 b) que les noms de Dionysos et d'Aphro-dite ont un sens à la fois sérieux et plaisant. Il ne retiendra pour sa

part que le second — « les dieux aussi aiment le badinage » — en

expliquant A'.dvuaoç par : ô S'.Soù; tôv olvov.

3. "ExTcop, 393 a (ï/oi) ; 'Opia-r,;, 394 e (000;) ; 'Axpsuç, 3g5 c

(à, -cps'to) ; TavtaXoç, 3g5 e (TaXavTeta) ; A-'sp'.Xoç, 399 b (Ati çt'Xo;) ;

^u/tJ, 399 e (àva-vetv, àva^uyouv) ; IIÀoutwv, 4o3 a (rXouxoç) ;

oeXr)V7), 409 b (<réXa;) ; ànfp, 4iO b (àr[Tr,ç) ; atucppocjuvr), 4i2 a (atoTT,-

pta ttjç opovrjaetoç) ; à&xia, 4i3 d (à, 81'xaiov) ; 6f]Xu, 4i4 a (6tXt;) ;

à-op:a, £i5 c (à, ropeucaôa:) ; xêpBaXso;, £17 a (xép8o;) ; ouuçipov,

4x7 a(crtiv, sps'pa)) ; XuariTeXouv, 417 c (Xuetv téXo;) ; àX^Saiv, £19 c

(àXyetvoç); à^ÔTiSaiv, £19 c(à'x.û°s) > **?ty lSi 4 J 9 d (T£p7cvdv) ; 0uadç,

À19 e (Ôjciç) ; (BI6a:oç, 477 a((3àfo:ç) ; lizi<j-i\u.rh 437 a (è~i, t<jT7]tA'.),

Plusieurs de ces   étymologies » ne sont d'ailleurs que des rappro-

chements avec des mots de la même famille;d'autres ne sont qu'in-

complètement exactes ou se trouvent noyées parmi des étymologies

fantaisistes.

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NOTICE 21

xojrJ/euofjLsvov Xeye'.v).Il ne cache pas d'ailleurs que cette

seconde étymologie lui paraît risible (4oo b, yskoîov). C'est

bien de bel

esprit qu'ils'agit encore dans celle de

Téthys(402 d, xo{x<|/dv). Hermogène lui-même juge « étrange »

(«xtottov, 4o5 a) la quadruple explication donnée par Socrate

du nom d'Apollon. La fantastique étymologie de deXrjVY), ou

plutôt «jgXavoua, tirée de asXaç-Évov-veov-dUi ((jeXaevovso^eta)

le frappe par son allure « dithyrambique » (409 c). Et il

ne peut s'empêcher de trouver « bien laborieuse » (u,aXa

yA''(T/ pw;, 4i4 c) celle de tê/vt}, qui équivaut à sçiç vou, pour

peu qu'on retire le t et qu'on ajoute deuxo. Quand il entend

Socrate expliquer pXaëepov par ^ojXa7rT£pouv (PouXou.evov

Stcteiv($ouv, 417 e),

il s'écrie que les noms sortis de ses mains

sont singulièrement compliqués (icoixiXa): Socrate lui fait en

ce moment l'effet de « jouer sur la flûte le prélude de l'air

d'Athéna ».

On arrive aux mêmes conclusions si l'on examine les pro-

cédés mis en œuvre dans ces explications étymologiques.Socrate pose les trois principes suivants : i° la forme primi-tive des noms a été profondément altérée par le temps et parle désir qu'avaient les hommes de les enjoliver en leur don-

nant une allure pompeuse (4 i4côtto twv fJooXouivc>>v TpaycoBEcv

aura,... eù<rrou.''aç svsxa, xal utzÙ xaXX<t>7Uffu,oiï xai utco ^povou);

2° quand on est embarrassé sur l'étymologie d'un nom, on

peut supposer qu'il est d'origine barbare (4og d); 3° toutes

les difficultés disparaîtront (uoXXïj sùirop-'a 'éVrat), et n'importe

quel nom pourra s'ajuster à n'importe quel objet, si l'on peut

y ajouter et en ôter ce qu'on veut (4x4 d)l

. Ici, le persiflage

saute aux yeux. Aussi bien Socrate ne cache-t-il pas que le

recours à l'origine barbare n'est qu'un expédient (fx-yj^av^ ,

409 d, 4 16 a). Il est clair qu'avec ces « facilités » l'étymo-

logiste peut toujoursse tirer d'affaire et ne

jamaisrester

court. Mais quelle garantie offriront les résultats? Le seul

fait qu'en un très grand nombre de cas deux ou trois, par-fois quatre étymologies sont proposées pour un même nomsemble prouver qu'aux yeux de Platon cet exercice n'est

qu'un jeu, où la recherche de la vérité n'a rien à voir.

1. Socrate, il est vrai, fait une réserve : il faut veiller « à la

mesure et à la vraisemblance » . Mais aussitôt après il invite Hermo-

gène à ne pas se montrer trop « pointilleux » .

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22 GRATYLE

Lui-même, il a pris soin de lever tous les doutes. Arrivé

aux noms primitifs, Socrate expose la méthode à employer,et se livre à une critique impitoyable des étymologies précé-

dentes. On pourrait, dit-il, se tirer d'affaire en recourant au

deus ex machina, c'est-à-dire en admettant que les noms pri-

mitifs sont l'œuvre des dieux, et justes pour cette raison. On

pourrait encore leur attribuer une origine barbare, ou allé-

guer que leur ancienneté en rend l'examen impossible. Mais

ce sont là de simples échappatoires, d'ailleurs fort ingé-nieuses (sxoucs'.ç xat (xaÀa xoix^aQ pour se dispenser d'expli-

cations. Si l'on ignore en quoi consiste la justesse des noms

primitifs, il est impossible de reconnaître celle des dérivés;Von

se condamnera, alors, à ne dire que des sornettes (cpXuapfaei,

426 ab). Or Socrate n'a pas fait autre chose, en discourant

sur l'étymologie des noms dérivés sans avoir examiné les

noms primitifs. Il en résulte que le développement qui pré-

cède, fondé sur les procédés que Socrate raille et condamne,

et manquant de la base indispensable, doit être considérécomme un amas de fantaisies sans valeur.

Il en est tout autrement dans la partieLZ^!^^iS '

suivante (£21 c-/p5b). On aborde iciMéthode à suivre. v

. . .? {., , . . ,.

les noms primitifs, qu il était indispen-sable d'examiner avant de passer aux dérivés. Ce qui précèdene

peutrien

apprendresur

l'épôôririç

twvévoaaTwv,

et ne

compte pas. La question est donc entièrement à reprendre.Le changement de ton indique aussitôt que Platon quitte

la plaisanterie pour une recherche sérieuse : « Ici, dit Socrate,

les excuses ne sont plus recevables;

il faut essayer d'examiner

le problème à fond » (£2 1 d). On a vu par l'analyse du dia-

logue avec quelle précision et quelle rigueur la marche à

suivre est indiquée par Socrate (4 2 1\ c d). Mais la méthode

qu'il trace ne vise pas seulement la formation des mots ;elle

embrasse l'ensemble du langage. Cette formation n'est quela première étape d'un même processus, qui va des lettres

aux syllabes, des syllabes aux noms et aux verbes, et s'étend

à tout le discours (4a 5 a). Avec une hauteur de vues, une

lucidité et une fermeté admirables, Platon a esquissé ici la

première philosophie du langage.

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NOTICE 23

Ayant ainsi défini la méthode, SocrateEtude

essaie de faire les distinctions qui doi-des éléments. -

, ,.^

j »

vent iormer la première étape de la

recherche. Il passe en revue un certain nombre de lettres

(consonnes et voyelles), en marquant pour chacune ses pro-

priétés expressives, c'est-à-dire son rapport naturel avec telle

ou telle manière d'être.

Quelle est dans la pensée de Platon la valeur de ce nou-

veau développement ? Les avis des commentateurs sont par-

tagés. Leky*

étend, sans hésiter, à cette étude des éléments

l'admiration légitime que lui inspirent les considérations pré-cédentes sur la méthode à suivre. Il fait ressortir la richesse

et la clarté de la conception platonicienne, la valeur scienti-

fique du point de départ qu'elle fournit. Horn 2, par contre,

sépare entièrement ces deux parties et les oppose l'une à

l'autre. Suivant lui, Socrate revient à la satire à partir de

4a5 b;

il montre la disproportion qui existe entre les condi-

tions idéales de la langue, telles qu'il vient de les définir, etl'état réel du langage

3;ses considérations sur les éléments

n'ont pas à ses yeux plus de poids que celles qu'il dévelop-

pait auparavant sur les noms.

On aurait évidemment tort, croyons-nous, de ne pas dis-

tinguer de l'exposé relatif à la méthode l'étude suivante sur

les éléments. Cette méthode qu'il a tracée avec tant de sûreté,

Socrate avertit Hermogène qu'il se sent incapable de l'appli-

quer (^25 b). Il juge « téméraires et risibles au plus haut

point »(-rcàvu... Gêpi<mxà... xat yeXoîa, 426 b) les opinions

personnelles qu'il va exprimer sur les noms primitifs. Tout

à l'heure il était sérieux, et marchait d'un pas délibéré sur

un terrain solide; ici, il hésite et recommence à sourire.

Comment procède-t-il, d'autre part, dans cette étude des élé-

ments ?'*

Il avait annoncé commeindispensables

la distinc-

cion et le classement des voyelles et des consonnes, puis des

objets à désigner. Et il faisait entrevoir, conduite parla même

1. Max Leky, Plato als Sprachphilosoph, Wûrdigung des platonis-

then Kratylus (Studien zur Geschichte und Kalturdes Altertums), Padcr-

born, 1919, p. 1-87.

2. O. I., p. 45 et suiv.

3. De même Kiock, 0. /., p. 39.

4. Horn, o. /., p. 48 et suiv.

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24 GRATYLE

méthode rigoureuse, une recherche qui s'élargirait jusqu'audiscours. Or dans la revue des éléments nous ne trouvons

que des traces de cette série d'opérations. Socrate se borne à

énumérer un certain nombre de lettres, quatorze sur vingt-

quatre, sans justifier le silence qu'il garde sur les autres.

Non seulement il ne les classe point avec exactitude, mais il

ne distingue même pas entre voyelles et consonnes. Il cite

pêle-mêle celles dont il s'occupe : d'abord une « demi-

voyelle »(p, vibrante), puis une voyelle (t), ensuite une

muette (s, labiale aspirée), une consonne double(*}),

une

« demi-voyelle » (s, spirante), et une autre consonne double

(Ç) ; après quoi il examine deux muettes (B,t, dentales), une

« demi-voyelle » (À, vibrante), une muette (y, gutturale),

une « demi-voyelle »(v, nasale) ;

enfin trois voyelles (a, tj, o).

Le nombre des notions auxquelles répondent les lettres énu-

mérées est fort réduit : mouvement, légèreté, agitation,

arrêt, glissement, glissement ralenti, intérieur, grandeur,

longueur, rondeur. Sont-ce donc là toutes les notions essen-tielles ? Socrate ne parle même pas de celles qui s'opposent aux

quatre dernières : l'extérieur, le petit,le court, l'anguleux.

L'énumération, à peine commencée, est interrompue parune parenthèse. Socrate vient de dire que le

pest propre à

rendre le mouvement(y.tvrjat;). Là-dessus, il s'arrête, pour

expliquer que xifotyvtfc est formé d'un mot étranger, xt'siv, et

de ttmç;

puisil

ajoute une remarque sur l'origine etla

formeprimitive du mot <rr:t<yiç, tiré par « enjolivement » de à,

t£(Tiç ; après quoi il revient aup (4a6 c-d). Cette parenthèse

est déconcertante à tous égards. Il est singulier que Socrate

reprenne ici les procédés qu'il a expressément condamnés :

étymologie d'un nom dérivé, sans explication préalable du

nom primitif dont il procède ;affirmation que la forme d'un

mot a été altérée

par

le

temps, prise

à unelangue

étran-

gère, ou modifiée par désir d'enjolivement. Le fait est d'au-

tant plus surprenant que la remarque sur xtv7)<7iç est intro-

duite à propos dup, dont le caractère propre est d'indiquer

le mouvement : or, cette lettre est absente de xi'vijai;. La place

donnée à ces considérations n'est pas moins bizarre : s'il est

un endroit où on les attendrait, ce n'est certainement pas

ici, mais dans la partie « étymologique ». Horn i ne juge

i. O. L, p. 47.

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NOTICE 25

possible qu'une explication : cette parenthèse annonce quePlaton reprend le ton de la moquerie, et que l'étude des

éléments est à mettre sur le même pied que les étymologies.Cette conclusion nous semble prématurée et excessive

;la

pensée de Platon a plus de nuances 1. Il n'est pas tout à fait

juste de prétendre que la méthode décrite et annoncée comme

indispensable est entièrement abandonnée dans l'étude des

éléments. Socrate fait un certain effort pour les classer: il

groupe sous le même chefcp,

fc a, Ç, comme « comportantune aspiration »

; plus loin, il cite ensemble les deux dentales

3 et t, et il montre l'effet du groupe yÀ. Il essaie de mêmede classer les notions auxquelles répondent les lettres étu-

diées : mobilité, légèreté, agitation, glissement, se ramènent

à la notion de mouvement 2. Il n'est pas démontré que les

remarques relatives à l'a, à l'r), à l'o, soient d'une absurdité

voulue. Est-il sûr que dans l'a et Fi) Socrate considère, non la

valeur des sons, mais la forme des signes qui les représentent,

comme si l'écriture avait précédé le langage3

? L'emploi dumot ypau.ua ne prouve pas qu'il confonde en fait le son avec

la lettre qui le désigne : dans ce qui précède, la confusion

n'est commise en aucun endroit; partout Socrate y considère

les sons. S'il s'agissait de la forme, on ne voit pas sur quoiil se fonderait pour réserver la « grandeur » à A et H plutôt

qu'à telles autres lettres, I, Y, par exemple. On peut

aussi bien admettre qu'il parle des sons

4

, car la voyellelongue 7) se retrouve dans u/f,xo;; il est vrai que l'a n'est pas

long de nature, mais long ou bref suivant les cas, et quedans le mot ujyaç il n'est long qu'au nominatif singulier

i. En ce qui concerne le mouvement, m'écrit M. Diès, ce n'est pasà xtvqoiç, mais à sopa que pense directement Platon quand il parle de

« toute espèce possible de xfcqoiç ».

2. Il n'est pas exact de dire, comme le fait Walther Freymann(Platons Suchen nach einer Grundlegung aller Philosophie, Leipzig, 1980,

p. 127), que Platon cherche ici à reproduire phonétiquement la doc-

trine d'Heraclite sur le mouvement. C'est le mouvement qu'expri-

ment, sans doute, la plupart des consonnes examinées par Socrate;

mais il mentionne aussi le 8 et le t, qui marquent Varrêt;le v, qui

indique « l'intérieur »;

et il note l'effet du y, qui est de ralentir le

glissement du À dans le groupe yX.3. Horn, 0. I., p. 5o.

4. Schàublin, 0. I., p. a5, note.

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26 GRATYLE

masculin. Horn croit découvrir aussitôt après une « absur-

dité » du même genre, aggravée d'une pétition de principe :

« Ayant besoin du o, dit Socrate, pour désigner la rondeur

(to ygyy^ov), c'est cette lettre qu'il a fait dominer dans le

mélange dont il voulait former le nom. » Mais il faut forcer

le sens de oso'ogvo; pour trouver la pétition de principe ; et,

ici encore, est-il certain que Socrate parle de la forme de la

lettre ? >* 'attribue- t-il pas la rondeur à l'o parce que les lèvres

s'arrondissent pour le former *? Tout au plus peut-on

accorder que Platon a relevé d'un grain de plaisanterie des

considérations auxquelles il n'attribuait lui-même qu'une

portée incertaine.

On reconnaît généralement que cette étude sur la valeur

des sons isolés contient quelques vues géniales, par où le

Cratyle annonce et devance de vingt siècles les recherches

de Leibnitz et de Jacques Grimm 2. Rien n'indique, d'autre

part, comme l'ont soutenu Horn 3et Kiock 4

, que Platon ait

voulu montrer la disproportion qui existe entre les conditionsidéales et l'état réel du langage, en faisant ressortir le carac-

tère défectueux des moyens dont dispose la parole humaine.

Du moins cette idée n'apparaît-elle point en cet endroit du

dialogue. Socrate termine son exposé par ces simples mots :

c Voilà en quoi me semble consister la justesse des noms. »

Mais il reste incontestable que la partie relative à l'étude des

sons nepeut

êtremise

sur le

même plan que l'exposéde la

méthode. L'hésitation de Socrate, l'aveu de son impuissance,le jugement sévère qu'il porte sur les considérations qui vont

suivre, le caractère incomplet, fragmentaire, de son étude en

sont la preuve manifeste. Platon a tracé le plan et fixé les

conditions de la recherche, mais il n'a pas voulu se chargerde la poursuivre jusqu'au bout. Il s'est borné à une ébauche,

en

indiquant par quelques exemples

les résultats auxquels

pourrait conduire la première étape de l'enquête. Selon le

1. Molière, Le Bourgeois gentilhomme, II, 4 : « L'ouverture de la

bouche fait justement comme un petit rond qui représente un O. »

Voir Schâublin, o. L, p. 0,5, note.

2. Th. Gomperz, Les penseurs de la Grèce (trad. Rey), II, p. 588 ;

cf. P. E. Rosenstock, Platos Kraiylos und die Sprachphilosophie der

Neuzeit, Progr. Ostern, i8q3, p. 6 et suiv.

3. 0. I., p. 46 et suiv.

h. O. /., p. 38, 39 .

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NOTICE 27

mot de Wilamowitz 1

,ces résultats sont tout au plus, aux

yeux de Platon, des « opinions droites » 2— et il faut ajou-ter : provisoires.

Socrate a ainsi résumé ses réflexions : « Le législateur

semble ctéer pour chacun des êtres un signe et un nom, au

moyen de lettres et de syllabes, et partir de là pour compo-ser le reste, par imitation, avec ces mêmes éléments. » Loin

d'infirmer ces conclusions, qu'elle prépare, l'étude des élé-

ments a paru la justifier. L'entretien avec Cratyle va y appor-ter de fortes réserves, mais en faisant valoir des considérations

toutes nouvelles.

Dès le début, Socrate s'empresse de dire

Si Convention. ¥Û ne.garanti t rien des propos qu'il a

tenus : il a simplement examiné la ques-tion de son point de vue (428 a). Depuis longtemps, il est

tout le premier surpris de sa propre sagesse, à laquelle il ne

peut croire. Un nouvel examen lui paraît nécessaire, car il

faut prendre garde de s'abuser soi-même (4^8 d). C'est annon-

cer au lecteur que les résultats acquis dans la première par-tie sont sujets à caution, et appelleront des retouches.

Dans le premier entretien, Socrate a réfuté la thèse

d'Hermogène, en montrant qu'il existe pour les noms une

justesse naturelle qui n'est point affaire de convention.

Contre Cratyle, il critique maintenant la thèse de la justesse

naturelle des noms. Il avait déjà soutenu qu'il est possible

de dire faux (385), mais Hermogène l'avait admis sans diffi-

culté. La résistance de Cratyle l'oblige à reprendre cette affir-

mation, en l'appuyant d'une démonstration en règle. C'est

ici qu'interviennent la comparaison du mot avec la peinture,et la théorie de l'imitation. Socrate en conclut que les noms

peuvent être, comme les peintures, des copies inexactes, et il

fixe les conditions d'un nom bien fait, c'est-à-dire juste3

.

1. 0. 1., p. ag5.2. Au reste, comme me le fait observer M. Diès, « toute explication

scientifique du monde expérimental est telle aux yeux de Platon et

restera telle (Timée). L'étude scientifique du langage, même conduite

rigoureusement selon la méthode indiquée plus haut, n'eût jamaisdonné que des résultats vraisemblables ».

3. Suivant Horn, 0. I., p. 57 et suiv., Socrate découvre ici en

quoi il s'était trompé lui-même (cf. 428 d). Son tort avait été de

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28 CRATYLE

Mais l'examen du motcxXrjpoTr,; lui fait voir que ce nom ne

peut s'expliquer par la théorie de la justesse naturelle. AÉrétrie on dit

cxXrjpdTTjp,et non GxXr)pdnr]ç, comme en Atti-

que ;et pourtant c'est la même notion qu'on exprime. Le c

n'a cependant pas ici la valeur dup

? Le nom signifie dureté;

or, le X qu'il renferme indique, on l'a vu, le contraire de la

dureté. Néanmoins les gens se comprennent fort bien dans

l'emploi de ce mot. Il faut donc admettre que l'usage est

un moyen de représenter, à l'aide du semblable et du dis-

semblable, et faire dans le langage une part à la conven-

tion.

Voilà une réserve capitale apportée aux conclusions de la

première partie. Elle montre en quoi les conditions idéales

indiquées plus haut sont en désaccord avec la réalité. On s'est

même demandé i

si, aux yeux de Platon, ce n'est pas l'usage

et la convention qui déterminent, plutôt que la convenance

naturelle, la justesse du langage2

.

Au cours de sa discussion avec Hermo-

et laVoTna^sance. &ène 'Socrale avait lui"même d

.

éfini le

nom comme un instrument qui sert à

instruire, et à discerner l'essence des choses (388 b c).Dans

l'hypothèse de la justesse naturelle des noms, ces deux fonc-

tions étaient admises sans peine : si le nom exprime l'essence

deschoses, on

connaîtral'une en connaissant

l'autre. Il en va

croire, comme le vulgaire, que la copie (le nom) doit être entière-

ment semblable à l'objet. Il constate maintenant que par définition

elle doit présenter, avec des éléments semblables à l'objet, des élé-

ments dissemblables. Par là, le débat sur la nature de l'ôpôoTTjç

prend une direction nouvelle : on prévoit la part qui va être faite à la

convention. — Cette interprétation nous semble inexacte. QuandSocrate déclare que la copie (le nom) ne doit pas viser à reproduire

en tous ses détails l'objet représenté, il ne veut pas dire qu'elle

comportera nécessairement des éléments sans ressemblance avec

l'objet, mais qu'elle ne retiendra que les traits essentiels. Plus loin,

il s'exprime fort clairement: « Le nom bien fait aura les lettres

appropriées (c.-à-d. semblables à l'objet) ;le nom mal fait sera formé

de lettres appropriées, mais il en contiendra quelque autre mal

appropriée » (433 c). Ceci n'a encore rien avoir avec la convention.

i. Horn, o. L, p. 59.

2. Voir Platon, lettre VU, 343 a.

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NOTICE 29

autrement si la convention a eu son rôle dans la formation

des noms, comme on vient de le montrer. Socrate demande

à

Gratyle

: « En quoi consiste la vertu des noms ? » Gratyle,

qui croit à leur justesse naturelle, est conséquent lorsqu'il

répond : « C'est d'instruire; qui connaît les noms connaît

aussi les choses. » Mais il va beaucoup plus loin que n'allait

Socrate, car il ajoute : « Il n'est pas d'autre moyen pourinstruire

;c'est à la fois le seul et le meilleur. » Le nom ne

sert donc pas seulement à transmettre la connaissance des

choses; pour acquérir cette connaissance, il suffit d'étudier

le nom.On a vu les objections décisives que Socrate fait à cette

thèse;elles appellent quelques remarques. Si les restrictions

apportées à la justesse naturelle des noms pouvaient justifier

une reprise du principe admis sans discussion dans le premier

entretien, il est à noter que Socrate n'y fait pas appel pourréfuter les affirmations de Cratyle. En réalité, il complète ici

ses conclusions précédentes. En faisant une part à la conven-tion, Socrate modifiait profondément sa propre thèse. Il

introduit maintenant de nouvelles réserves, portant sur les

conditions mêmes dans lesquelles a travaillé l'auteur des

noms. Il avait montré précédemment que les noms peuventêtre inexacts, et le « législateur » bon ou mauvais. Revenant

à cette idée pour l'approfondir, il observe que l'auteur des

noms a pu se faire une idée fausse des choses à nommer. Ducoup, il indique la portée de son étude sur les éléments : ses

remarques touchant la valeur expressive des sons perdent déci-

dément toute certitude. Nous savions déjà que la partie « éty-

mologique » n'était qu'un jeu : Socrate le confirme, en expli-

quant que plusieurs des noms rattachés d'abord à l'expressiondu mouvement semblent plutôt exprimer le repos. Il avait

admis avec

Hermogène,avant d'examiner les noms

quidésignent les choses éternelles, qu'ils ont peut-être été établis

par une puissance supérieure à l'homme (397 b c). Plus

loin, cette explication était écartée comme un expédient sans

valeur (426 a b). Ici elle est définitivement réfutée, par des

raisons tirées des contradictions que révèlent les noms.

Enfin, Socrate arrive à cette conclusion : puisque les nomssont des guides dangereux, et qu'il est possible sans eux de

connaître les choses, mieux vaut demander cette connaissance

aux choses elles-mêmes, et partir de la réalité plutôt que des

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3o GRATYLE

noms qui en sont l'imagei

. Et une autre conclusion se

dégage, que Platon ne formule pas, mais qui se présented'elle-même à

l'esprit : peu importe que la justesse des noms

soit l'effet d'une convenance naturelle ou le résultat d'une

convention, si c'est aux choses qu'il faut s'adresser pour les

connaître.

Nous voilà donc ramenés à la théorie de la connaissance

que Platon définissait dès le début du dialogue (386 d e) en

rejetant les thèses de Protagoras et d'Euthydème. Ainsi se

découvre le véritable sens du Cratyle. Le dialogue est avant

tout l'esquisse d'une théorie de la connaissance : l'étude lin-

guistique qu'il présente n'en est que l'enveloppe et le pré-texte

2. Au terme du débat, Platon constate que le problème

agité est d'intérêt médiocre pour la recherche de la connais-

sance, et il renvoie les deux adversaires dos à dos avec une

sorte d'ironie supérieure. A cet égard, le Cratyle apparaît

comme une œuvre de polémique, une « opération de déblaie-

ment »3

, à l'occasion des théories contemporaines du lan-

gage. Aux auteurs de ces théories Platon montre qu'il serait,

le cas échéant, capable de rivaliser avec eux. Mais à quoibon ? Ce n'est pas la linguistique, mais la dialectique qui peutconduire à la vérité 4

.

Socrate a déjà fait voir que les nomsLa. doctrine • . j»» ? • ti

d'HA rtrisquent d induire en erreur. 11 y revient

pour ceux qui servent à marquer le

mouvement. Deux points sont à retenir dans ce développe-

i. Sur la signification et l'importance de cette fin du Cratyle,

consulter A. Diès, Autour de Platon, II, p. /j82-5.

2. Je dois beaucoup ici aux observations de M. Diès.

3. L'expression est de M. Diès.

4- Ainsi s'explique que le Cratyle soit isolé dans l'œuvre de Pla-

ton (Horn, o. I., p. 6a ; Wilamowitz, o. /., p. 290). Toutefois Platon

reparlera dans le Théélete de la valeur des éléments, et le Sophiste fera

la théorie de la proposition. Enfin il exposera dans la lettre VII des

vues qui rappellent de très près celles du Cratyle : le \6yoc y est défini

un composé de noms et de verbes (3^2 b) ;le nom n'a aucune fixité

;

rien n'empêche que ce que l'on appelle aujourd'hui circulaire se trouve

appelé droit;on peut en dire autant de la définition (ou du discours),

343 ab. — Mais dans le Politique, 261 e, Socrate dira à l'Étranger:

« Si tu te gardes avec soin de t'appliquer aux mots, tu apparaîtras

plus riche en raison dans ta vieillesse. »

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.NOTICE 3i

ment final. Socrate admet l'existence d'une chose « belle et

bonne en soi » et pense qu'il en est de môme « pour cha-

cun des êtres en particulier » (43o b). Cette allusion fort

claire à la théorie platonicienne des Formes f est introduite

avec une apparente réserve : c'est une rêverie, qui occupesouvent la pensée de Socrate (7roXXàxtç àveipioTTw). Or, cette

conception est incompatible avec la doctrine du mouvementet de l'écoulement universels soutenue par Heraclite. Le Beau

en soi doit être toujours pareil à lui-même, ce qui serait im-

possible s'il passait sans cesse. Il échapperait, dans la thèse

d'Heraclite, à toute connaissance et à toute dénomination.

De ce qui n'est jamais dans le même état on ne saurait

rien dire de déterminé;

si la connaissance était elle-même

soumise à la loi du changement, elle perdrait sans cesse son

caractère, et il n'y aurait plus de connaissance.

Dans son entretien avec Hermogène, Socrate s'était mo-

qué (4 » i b) de ces «sages » qui transportent aux choses le

vertige dont ils sont atteints, et croient les voir en proie à

un mouvement perpétuel, sans se rendre compte de l'affec-

tion dont ils souffrent. Il recommence, à la fin du dialogue,à railler la doctrine qui représente toutes choses dans un

écoulement continuel, comme a les gens affligés d'un ca-

tarrhe ».

Cette polémique contre la doctrine d'Heraclite se rattache

dans une certaine mesure aux discussions linguistiques duCratyle. Étudiant les noms de Rhéa, Kronos et Téthys, So-

crate disait y retrouver déjà, bien avant Heraclite, la théorie

de l'écoulement (402 a). C'est par la croyance au mouve-

ment et au tlux universel qu'il prétendait expliquer d'abord

toutes les notions morales (4n c et suiv.). Cependant le

développement sur la théorie des Formes et le mobilisme

i. On peut en trouver une autre dans la première partie du Cra-

tyle (cf.O. Apelt, o, /., Einleitung, p. 17), où Socrate parle de la

navette en soi (38g b, aùxô loti xepxi;), sur laquelle le menuisier doit

se régler pour fabriquer la navette, et plus loin du nom en soi (38g d,

aùfo bcetvo è<rciv 6'vou.a), que doit avoir en vue le « législateur ». Il est

difficile de ne pas rapprocher cet endroit du livre X delà République^

et du lit en soi (597 c, sutixX''vt)) d'après lequel travaille le xXivo-

roioç. Cependant, d'après Horn (0. /., p. 28) et Racder, Platons phi-

losopUische Entwickelung, p. 1 53, Socrate vise ici non la Forme (ou

Idée), mais seulement la notion générale de navette et de nom.

V. a. - 3

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3a GRATYLE

d'Héraciite — deux thèses inconciliables — a souvent été

considéré comme un hors d'œuvre par les commentateurs

modernes : depuis longtemps les étymologies « héracli-

téennes » ont été enveloppées par Socrate dans la condamna-

tion qui frappe toute la partie étymologique, et le débat

linguistique ouvert dans la Cratyle a déjà reçu sa conclu-

sion.

Mais les remarques présentées plus haut permettent de

mesurer la portée véritable de celte dernière partie, et d'aper-

cevoir le lien profond qui l'unit à l'objet essentiel de l'ou-

vrage. On voit ici reparaître au grand jour la doctrine quePlaton esquissait au début, en opposition avec les théories de

Protagoras et d'Euthydème. Les choses, disait-il alors, ont

leur nature propre, leur essence définie et stable, et leur

forme (eTooç); cette forme est but de connaissance et règle

d'action, et c'est le dialecticien qui juge de l'appropriation

des actes à cet eTooç. Cette doctrine fondamentale a pu être

perdue de vue à travers les longues discussions sur les éty-

mologies, les noms primitifs, les éléments, etc. : à la fin du

dialogue elle surgit de nouveau, avec une netteté et une

force singulières, attestant que le problème du langage est

jusqu'au bout resté pour Platon un simple aspect du pro-

blème de la connaissance *.

Après avoir donné un grand nombre de mots pour des ex-

pressions du mouvement, Socrate, on l'a vu, a repris certainsd'entre eux

(èicurnQp.i), jiéêaioç, taroptac, tt'.gto'ç, tr^u/r,) pourmontrer qu'ils marquent plutôt le repos. Il se fondait ici sur

la doctrine des Éléates. Notons qu'à la fin du dialogue il

ne dit rien de la théorie éléatique, dont il ajournera encore

la discussion dans le Théétète : c'est seulement dans le So-

phiste qu'il se prononcera nettement contre la conception de

Parménide. Toutefois Socrate déclare dans le

Cratyle quel'enquête sur le mobilisme a besoin d'être reprise et pousséeà fond. C'est ce que fera le Théétète (179 c-i84b)en réfutant

la thèse de la mobilité. Le Sophiste fixera la position de Pla-

ton entre Heraclite et Parménide : contre le premier, l'au-

teur du Cratyle établira que le repos ou l'immutabilité est

condition nécessaire de l'Intellect, mais en montrant,

1. Je me borne à résumer ici les précieuses indications qu'a bien

voulu me communiquer M. Diès.

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NOTICE 33

contre le second, que le mouvement doit être compté commeune des formes nécessaires de l'être

1. Ainsi, sans nier le

mouvement, Platon refuse d'en faire l'uniqueprincipe

de la

réalité, et d'admettre que tout soit dans un écoulement per-

pétuel2

.

III

LES PERSONNAGES DU DIALOGUE

On convient en général que la composition du Cratyle

n'offre pas la belle ordonnance ni l'équilibre si sensibles

dans d'autres dialogues platoniciens. On s'est montré surtout

cboqué du développement disproportionné donné à la partie

étymologique3

. Platon croyait avoir ses raisons;mais il est

certain que du point de vue artistique l'économie de l'œuvre

en a souffert4

.

Le Cratyle n'est d'ailleurs pas dépourvu de valeur drama-

tique. Cette valeur résulte du plan même de l'ouvrage et des

revirements successifs qu'offre la marcbe du dialogue. Elle

est sensible dès le début, qui s'ouvre avec une brusquerie

pleine de vivacité. Après le premier entretien, on peutcroire la recherche terminée : il a donné raison à Cratvle

contreHermogène.

Or voici

que l'enquêteest

reprise, etaboutit à justifier partiellement la thèse d'Hermogène contre

Cratyle. Sommes-nous arrivés au terme ? Non, car Platon

fait voir que les deux thèses ont en fait peu d'intérêt, puis-

que la vraie connaissance des choses ne doit pas être deman-

dée aux noms. A l'intérieur même des développements se

i. Édition du Sophiste par A. Diès, Notice, p. 289-290.2. Horn, o. I., p. 63.

3. C'est une des raisons qu'invoquait Schaarschmidt (Ueber die

Unechtheit des Dialog's Kratylos (Rhein. Mus., XX, 1 865) pour nier

l'authenticité du Cratyle. Cucuel s'est efforcé de réfuter cette thèse

par des arguments qui-ne sont pas toujours très solides, notamment

(p. 25) en expliquant les imperfections de l'œuvre par sa date. Aujour-

d'hui, surtout depuis la démonstration donnée par Th. Benfey et

Lehrs, personne ne met en doute l'authenticité du dialogue (Th.

Gomperz, 0. I.. IT, p. 587, note).

4. Wilamowitz, 0. /., p. 297; cf. Horn, 0. L, p. 36.

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34 GRATYLE

produisent des retours inattendus où se joue l'ironie plato-nicienne. Après avoir consacré de longues explications aux

étymologies,Socrate les déclare

sans fondement;les

procé-dés employés ne sont que des expédients, et l'ensemble reste

en l'air, car il eût fallu étudier auparavant la formation des

noms primitifs. On croit être parvenu à une définition du

nom, quand Socrate constate soudain qu'elle n'est pas bonne

(423 b c) et qu'ilfaut en trouver une autre. Ayant défini la

méthode à suivre pour étudier la formation des noms pri-

mitifs, il

parait

se dérober tout à

coup,

se disant

incapabledéfaire les distinctions nécessaires (425b), etc.

La valeur dramatique du dialogue réside aussi dans l'atti-

tude des personnages mis en scène. Gomme d'habitude, c'est la

figure de Socrate qui domine l'entretien. On retrouve ici ses

traits ordinaires : son affectation d'ignorance, sa dialectique

patiente et rigoureuse, qui ne se satisfait point d'à-peu-près et

revient sans cesse sur les résultats acquis pour en contrôler la

justesse, sa bonhomie railleuse dont l'ironie, paraissant

s'exercer sur lui-même comme sur l'interlocuteur, déconcerte

l'adversaire et ménage à la marche du dialogue des revire-

ments imprévus. Cette souple dialectique se joue avec une

sûreté infaillible des contradictions apparentes et des diffi-

cultés. Sous des dehors capricieux elle sait où elle va, et sa

prudence s'arrête où il faut. Autant que les idées qu'il ex-

prime, les diverses attitudes de Socrate, ses changements de

ton, ses avertissements dessinent la courbe de l'entretien, et

nous renseignent au fur et à mesure sur la pensée de l'au-

teur. Mais le Socrate du Cratyle est un Socrate tout plato-

nicien, qui a médité sur la philosophie du langage et « rêvé »

à la théorie des Formes.

Hermogène, fils d'Hipponicos, est un des fidèles disciples

de Socrate!

.

Le Pliédon le nomme parmi ceux qui ont assistéle philosophe à ses derniers moments 2

. Quant à l'assertion

de Diogène de Laërte 3

qu'Hermogène fut un des maîtres de

Platon, elle est extrêmement suspecte *. Hermogène était de

noble famille, et frère cadet du riche Callias, mais le Cra-

i. Stoxporaxoç, dit Proclus, éd. Boissonade, p. 55.

2.

5gb.

3. III, 6.

4- Stallbaum, Platonis opéra omnia, vol. II, p. 18-19.

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NOTICE 35

tyle fait plusieurs fois allusion à l'état précaire de sa for-

tune l. Il ressort de notre dialogue

2

qu'il connaît les théories

deProtagoras.

D'autre

part

il est lié avec

Gratyle,qu'il a

souvent l'occasion d'entretenir et qu'il accompagne, à la fin,

dans son départ pour la campagne.Tel que le dépeint Platon, il n'a pourtant pas, malgré ces

fréquentations, de grandes aptitudes à la discussion philoso-

phique. Il ne fait l'effet ni d'un philosophe, ni même d'un

esprit personnel et vigoureux. En face de Socrate il repré-

sente « l'adversaire commode », qui ne se départ guère d'un

rôle passif3

. Il soutient que l'établissement des noms est

affaire de convention, mais à la démonstration de Socrate,

qui renverse sa thèse, il ne trouve rien à répondre. Il accepte

sans discussion l'explication du nom d'Astyanax, avec un

empressement qui devance l'interlocuteur;mais comme So-

crate déclare ne pas découvrir encore la raison de cette

appellation, Herrnogène avoue aussitôt qu'il ne la comprend

pas davantage (392 e). Il n'aperçoit pas les faiblesses des

raisonnements de Socrate dans la partie étymologique. Il

admire de confiance la « savante » étymologie de<jtt)yVj,dont

Socrate se moque incontinent. Il s'ébahit naïvement d'ap-

prendre que l'idée du mouvement a déterminé l'attribution

des noms aux notions morales : « Je n'y avais point du tout

songé », confesse-t-il (4n c). Socrate vient de suggérer une

définition du nom:

Herrnogène se hâte de l'approuver, sansen voir l'insuffisance, qui la fait immédiatement après reje-

ter par Socrate (^23 bc).

Il s'émerveille de la vaillance quemet son interlocuteur à accumuler les étymologies, mais,

après en avoir admis sans observation les procédés et, la

plupart du temps, le détail, il acquiesce pleinement à l'im-

pitoyable critique qu'en fait Socrate.

Néanmoins,il n'a

pas l'espritassez obtus

pourne

passentir çà et là l'extravagance des explications qu'on lui

propose. A plusieurs reprises4 on le voit se récrier sur le

caractère étrange et recherché, la complication laborieuse et

l'audace des étymologies mises en avant. Il semble entrer à

1. Cf. Xénophon, Mém., II, 10; Banquet, III, i/j ; IV, £7, 5o.

2. 386 a.

3. Leky, 0, /., p. i4-i5.

4. Voir plus haut, p. 21

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36 CRATYLE

demi dans la plaisanterie, avec une admiration légère-ment railleuse qui fait écho à l'ironie de Socrate. Il est

frappédu ton

inspiré que prendson

maître,comme s'il

débitait des oracles, et dans la confiance que lui donne,

assure-t-il, l'inspiration d'Euthyphron on discerne une

pointe de badinage. De même dans son éloge de l'éty-

mologie de Téthys, qui est «jolie

»(<oa*}ov, £02 d), et

dans les compliments qu'il fait à Socrate sur ses progrès

(4 10 e). Bref, Hermogène nous présente comme une

moyenne des auditeurs habituels de Socrate, avec ce

mélange de curiosité naïve et de finesse naturelle que l'on

rencontre si souvent, chez Platon et Xénophon, dans les

jeunes disciples du maître, déconcertés par la subtilité

retorse de sa dialectique, mais sensibles à l'attrait de son

ironie.

Il n'y a aucune raison * de ne pas identifier Cratyle avec

le philosophe du même nom dont parlent Aristote et Dio-

gène de Laërte. L'un et l'autre le donnent comme ayant été

le maître de Platon, avant Socrate selon le premier2

, aprèsla mort de Socrate suivant le second 3

. Disciple d'Heraclite,

il renchérissait encore sur la doctrine du maître, au pointde dire qu'on ne peut entrer, même une fois, dans l'eau du

même fleuve, et de rendre sa pensée par un mouvement du

doigt, pour éviter la parole qui l'eût fixée. L'indication de

Diogène est en partie erronée, et il faut admettre que Platona suivi les leçons de Cratyle avant d'entendre Socrate. Il est

permis d'attribuer à cet enseignement la profonde influence

que le système d'Heraclite a exercée sur sa pensée* en le

persuadant que les choses sensibles, en proie au changement

perpétuel, ne sauraient être objet de connaissance 3.

Si c'est bien son ancien maître que Platon a introduit

dans le Cratyle, il est intéressant de se demander quels traitsil lui a prêtés. Cratyle est évidemment un adversaire d'une

tout autre taille qu'Hermogène. Il n'est pas, comme lui,

simplement curieux de philosophie; c'est un philosophe, qui

1. Stallbaum, o. /.. p. 20.

2. Métnph., A 6 déb., et T 5, ion a7~i5.

3. III, 6.

4- Wilamowitz, o. /., p. 90.

5. Aristote, Métaphysique, 987 a 3a — 987 b.

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NOTICE 3 7

défend la doctrine d'Heraclite. Est-il vrai que Platon l'ait

ménagé et traité avec égard1? Mais le rôle qu'il lui prête n'a

rien de flatteur. Ce qu'il montre en lui, c'est un attachement

têtu à ses idées 2, qui va jusqu'à lui faire reprendre un assen-

timent déjà donné, une certaine mauvaise grâce à reconnaître

les raisons de l'adversaire, des illogismes manifestes, des argu-ties assez misérables quand il se voit battu— brefun ensemble

de caractères qui font de Cratyle un esprit à courte vue et une

sorte de sophiste. Comme le premier entretien paraît confir-

mer la thèse qu'il défend lui-même, celle de la justesse

naturelle des noms, il approuve en gros les explications de

Socrate, sans discerner les diverses parties de l'exposé—

pourtant si différentes de ton et de valeur — ni distinguer le

sérieux du plaisant. Soutenant que tous les noms sont justes,

il s'abrite derrière le sophisme d'Euthydème : il est impos-sible de dire faux, car on ne peut exprimer ce qui n'est pas,— sans voir que ces deux propositions sont inconciliables avec

sa thèse3

.

Quand il objecte plus loin que l'omission, l'addi-

tion, ou le déplacement d'une lettre suffisent à faire d'un

nom un autre nom, il oublie que les étymologies de Socrate,

approuvées par lui sans réserve, reposaient précisément sur

des modifications de ce genre. Délogé de toutes ses positions,

il finit par se rabattre sur l'hypothèse que les noms primitifs

ont peut-être été établis par une puissance supérieure à

l'homme, sans s'aviser qu'elle est ruinée d'avance par lesconstatations précédentes.

D'autre part, son attitude n'est pas exempte de morgue.Invité par Hermogène à faire part de leur entretien à

Socrate, il répond par un laconique: « Si tu veux », et

garde un silence complet dans la plus grande partie du dia-

logue. Hermogène se plaint de l'obscurité dédaigneuse et

ironique

dont il

enveloppeses

réponses,

comme un oracle 4.

i . C'est l'avis de G. Ritter, Platon, sein Leben, seine Schriften, seine

Lchrc, Mûnchen, 1910. I, p. 476, et de Wilamowitz, 0. I., p. 91 et

2. Wilamowitz reconnaît lui-même cet entêtement.

3. Horn, o. L, p. 58. S'il est impossible de dire ce qui n'est

pas, on sera dans le vrai en donnant, par exemple, le nom d'Hermo-

gène à Cratyle.

427 d.

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38 CRATYLE

Et quand Socrate le prie de l'inscrire lui-même parmi ses

disciples, il répond avec une amusante condescendance qu'ille prendra « peut-être »

pour

élève (4a8 b) *.

Que le portrait soit ressemblant, c'est une autre question,d'ailleurs insoluble, puisque nous ne savons presque rien du

vrai Cratyle. Tout au plus peut-on dire que cette obscurité

et cette affectation de silence se concilient assez bien avec les

brèves indications d'Aristote. Sans aller jusqu'à croire, avec

van Ijzeren, que Platon a voulu tracer une « caricature »

de son ancien maître 2, on a l'impression qu'il n'avait pas

gardé de lui un souvenir très favorable.

IV

CONTRE QUI EST DIRIGÉ LE CRATYLE?

Les conclusions du dialogue, on l'a vu, sont pour la plu-

part négatives : on ne peut admettre avec Hermogène que la

justesse des noms soit purement affaire de convention; mais

on ne saurait affirmer avec Cratyle que les noms soient justes

par nature. L'enquête étymologique ne conduit qu'à des

résultats contradictoires et incertains, parce qu'il n'est passûr

quel'auteur des noms se soit fait une idée

justedes

choses à nommer. Bref, le problème agité en sens contraire

par Hermogène et Cratyle est au fond négligeable pourla recherche de la connaissance. Contre quels individus

ou quelles écoles sont dirigées ces conclusions 3? Sur ce

i. Voir J. van Ijzeren, De Cratylo Heracliteo et de Platonis Cra-

tylo (Mnemosyne, N. S. XLIX, 1921), p. 176 sq.

2. M. Diès rapproche la peinture que fait le Thêétete (179 e sq.)

de l'école d'Heraclite, et se demande si Platon n'a pas voulu, dans le

personnage de Cratyle. représenter un type plutôt qu'un individu.

3. D'après Wilamowitz, o. L, p. 287, Platon a voulu seulement

mettre en garde ses propres disciples contre des tendances que cer-

tains d'entre eux étaient portés à suivre, et se guérir avec eux

d'illusions longtemps caressées par lui. Suivant Steinlhal, Schâublin,

Kirchner, après avoir cru à la possibilité d'une science étymolo-

gique, Platon a renoncé à cette croyance: le Cratyle atteste sa

conversion, et l'ironie de Platon est surtout dirigée contre lui-même.

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NOTICE 39

point encore, les avis sont très partagés. Bornons-nous à

les rappeler, en indiquant les solutions les plus vraisem-

blables.

Ilermogène n'est qu'un amateur de philosophie et un dis-

ciple, non un chef d'école. Il serait donc fort improbable quePlaton eût pris la peine de critiquer si longuement sa thèse,

si elle lui était personnelle. Bien que les idées qu'il lui prête

soient assez superficielles, et répondent à une façon de voir

qui devait être celle du vulgaire, il n'est pas impossible qu'il

ait voulu combattre ici les doctrines de Démocrite sur le lan-

gage. Pour Démocrite, le langage était d'origine purementconventionnelle ! : les premiers hommes s'étaient entendus

pour assigner des noms aux choses afin de pouvoir commu-

niquer entre eux 2.

La théorie contraire, celle de la justesse naturelle des

noms, est soutenue par Gratyle, disciple d'Heraclite. Commeson maître, il croit au mouvement et à l'écoulement univer-

sels, et il s'imagine en trouver l'expression dans le langage.

Dans la première partie du dialogue, Socrate, abordant les

noms des Dieux, observe avec une ironie sensible qu'ils ont

dû être établis par de « sublimes spéculateurs» et des discou-

reurs subtils qui avaient conçu avant Heraclite la théorie du

mouvement, et ont formé d'après elle les noms des divinités :

peut-être Hestia, en tout cas Rhéa, Kronos et Téthys. Il

explique par la même croyance les dénominations donnéesaux notions morales. Or on sait la valeur qu'il attribue

ensuite à ce long développement ;on se souvient de ses sar-

Mais ces hypothèses n'excluent point la possibilité d'une polémiquecontre les représentants des théories rejetées. Ces théories, Platon les

avait évidemment rencontrées autour de lui;la question est de savoir

où.

i. Proclus, in Cratylum, p. 7.

2. Gomperz, o. I., p. 427 sq. Cependant R. Philippson (Platons

Kratylos und Demokrit (Philol. Wochenschrift, 1929, p. 923 sq.) le

conteste. Suivant lui, le jugement de Proclus sur Démocrite est

sommaire et peu exact : si Démocrite admettait que, dans la suite des

temps, les mots ont été altérés et détournés de la réalité par l'effet

du hasard et de la convention, i! les considérait probablement comme

étant, à l'origine, des images ou copies des choses; la façon de voir

de Platon s'accorde pour l'essentiel avec cette théorie, que l'auteur

du Cratyle a vraisemblablement connue,

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4o CRATYLE

casmes contre la théorie du mobilisme universel. Les

conclusions du dialogue prouvent que l'ouvrage est sur-

tout

dirigé

contre la thèse défenduepar Cratyle.Cette thèse était-elle déjà celle d'Heraclite? Crovait-il à

la justesse naturelle des noms? On pourrait le supposer,

d'après certains fragments où il semble invoquer la forme et

la valeur de certains noms à l'appui de sa doctrine. Il est

douteux, toutefois, qu'il ait expressément formulé cette

théorie; ce sont plutôt ses disciples qui ont dû développer

des vues dont ils trouvaient le germe chez leur maître. Or

comment faire voir que les noms expriment l'idée du mouve-ment universel? Pour le prouver, l'école d'Heraclite était

naturellement amenée à l'exégèse étymologique. Cette exé-

gèse, on la voit poindre déjà chez Heraclite (fragments

25, 32, 48, 1 14), bien que dans la plupart des cas il

s'agisse plutôt de jeux de mots que d etymologies propre-ment dites 1

. Le premier, disait-on, il avait considéré le mot

comme une onomatopée 2 . Il est probable que le procédé éty-

mologique fut systématiquement employé et élargi après lui.

Le développement consacré à la partie« étymologique »

frappe par son ampleur autant que par l'impitoyable critique

dont Platon l'a fait suivre. L'insistance de l'auteur atteste

l'importance prise par cette méthode d'explication, et la

nécessité où il croyait être de la ruiner définitivement. Est-ce

Cratyle en personne qu'il attaque sur ce point3

? Le titre

du dialogue semblerait l'indiquer. Mais rien ne permetd'affirmer que Cratvle, si mal connu d'ailleurs, se soit

adonné à l'étymologie. Son attitude ici donne même l'im-

pression contraire. D'étvmologie, il n'en propose ni n'en

discute aucune;il se borne à accepter docilement en bloc celles

de Socrate, et, s'il se hâte de les approuver, c'est parce qu'il

trouvedans certaines d'entre

elles une confirmation du

mobilisme d'Heraclite. Et parmi les autres, il y en a beau-

coup qui sont sans rapport avec cette doctrine et n'intéressent

même pas la philosophie *.

i. I. van Ijzeren, o. /., p. 188 et suiv.

a. Gomperz, o. /., I, p. £17; cf. Kirchner, o. /., Progr. 1891/2,

p. ,6.

3. C'est l'avis d'Ijzeren, o. L, p. 199 et suiv.

4. Il est inutile de nous arrêter à la thèse étrange soutenue par

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NOTICE 4 i

Récemment Max Warburg1

, prenant pour point de départles vues de Wilamowitz, a soutenu que la partie « étymolo-

gique » du Cralyle était dirigée par Platon contre son propre

disciple Héraclide du Pont. C'était un sectateur d'Heraclite,

et plus tard des étymologies d'Héraclide sont souvent citées,

en particulier par Orion. Platon lui confia la direction de

l'Académie, en 36 1 suivant M. Warburg, lors de son troi-

sième voyage en Sicile. Le père d'Héraclide se nommait

Euthyphron, dont on s'expliquerait ainsi la mention répétée

dans le dialogue. Cette hypothèse originale repose malheu-

reusement sur une base des plus fragiles2, et ne résout les

difficultés existantes que pour en soulever d'autres, commel'a bien mis en lumière H. von Arnim 3

.

Les étymologies qu'il entasse avant d'en venir aux noms

primitifs, Socrate les attribue dans l'ensemble à 1' «inspi-

ration » d'Euthyphron. En sa qualité de théologien, Euthy-

phron peut s'être complu aux étymologies qui concernaient

les noms des dieux*, et il ne serait pas impossible a priori

que Socrate eût visé sous son nom une certaine catégorie

d'exégètes. Mais tout le reste, et notamment ce qui s'y rat-

tache à la théorie héraclitéenne du mouvement, était à coupsûr hors des préoccupations d'Euthyphron et de ses pareils.

En mettant sous son inspiration l'exposé étymologique, Pla-

ton, nous l'avons dit, semble avoir eu surtout pour but

Ch. Lenormant {Commentaire sur le Cratyle de Platon, Athènes,

1861). D'après lui, Platon n'attaque ici que Cratvle, représentant du

« parti religieux » et de « l'école sacrée », qui dans la préparationaux mystères d'Eleusis donnait une place à l'étude de la langue et

àl'étymologie.i. Zwei Fragen zurn « Kratylos » (iVeue philol. Untersuchungen,

fùnftes Heft), Berlin, 1929.2. Il est, en particulier, fort hasardeux d'identifier avec l'auteur

des étymologies mentionnées par Orion le célèbre disciple de Platon :

des nombreux ouvrages que lui attribue Diogène de Laërte aucun, à

en juger par les titres, n'avait trait à l'étymologie.

3. Die sprachliche Forschung als Grundlage der Chronologie der

platonischen Dialoge and des « Kratylos » (Sitzungsber. d. Akad. der

Wissensch. in Wien, phil.-hist. Klasse, 210 Band, l\ Abh., 1929, p. 21

et suiv.).

4- Steiner, Die Etymologien in Platons Kratylos (Archiv f. Geschichte

der Piiiiosophie, N. F., XXIf. 1916, p. 125 et suiv.), estime que dans

cette partie c'est lui que Platon a en vue.

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*2 CRATYLE

d'éclairer le lecteur sur le peu de valeur qu'ilfaut y accor-

der. Que ce médiocre devin et les gens de son milieu ne

soient pas le véritable objet de ses attaques, il le laisse

d'ailleurs entendre quand il fait dire à Gratyle (4^8 c) :

i Tes oracles, Socrate, sont tout à fait à mon goût, que tu

tiennes ton inspiration d'Euthvphron ou de quelque autre

Muse ».

Faut-il songer aux sophistes? Tout au début du Cratyle

Socrate, consulté surl'opâoTT,;,

déclare qu'il saurait répondre,si ses moyens lui avaient permis de suivre les leçons à cin-

quante drachmes que Prodicos donnait sur la question

(384 bc).

Mais il n'a pu les entendre, et c'est par ses propres

moyens qu'il va chercher, de concert avec Hermogène, la

solution du problème. Il semble donc que Prodicos soit hors

de cause. Sans doute, ce pourrait être là un simple détour;

Socrate devait avoir eu un écho des enseignements de Pro-

dicos, et Horn 1 considère comme probable que c'est lui qui

est visé dans la partie étymologique. Mais rien ne prouveque ce sophiste, particulièrement soucieux, comme on sait,

de la propriété du langage et attentif à distinguer les syno-

nymes2

, se soit occupé d'étymologies, ni ait étudié la justesse

des noms au sens où elle est examinée dans le Cralylez

. La

remarque de Socrate a plutôt l'air d'une boutade malicieuse,

amenée et rendue presque inévitable par la mention de

l'osOoTY.Ç.Si le nom de Prodicos ne figure qu'incidemment dans le

dialogue, celui de Protagoras y revient à plusieurs reprises.

Socrate s'arrête assez longuement, pour la réfuter (385 e-

386a), sur sa thèse de « l'homme-mesure ». Il montre qu'elle

est inconciliable avec sa propre thèse : le nom a un être

propre qui ne dépend pas de nous. Protagoras avait-il une

doctrine sur le

problèmede la

justessedes noms *

? On sait

i. O. Z.,p. 39 .

a. Stallbaum, o. l.y p. 16. Voir le Protagoras, 877 a sq., et

YEuthydeme, 277 e.

3. O. Apelt, o. /., 1922, Einleitung. p. 3.

4- Socrate veut démontrer contre Hermogène que les noms ont

une justesse naturelle; or, pour y parvenir, il fait voir que la thèse

de l'homme-mesure est inacceptable. Doit-on en induire que les vues

d'Hermogène sur la justesse des noms étaient celles de Protagoras ?

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NOTICE 43

qu'ilrecherchait les conditions de ïopboi-zv.'x,

et que ses

études sur les genres des noms et les temps des verhes le font

apparaître

comme un fondateur de la science grammaticale.

D'autre part il professait avec Heraclite : « Jamais rien n'est,

toujours il devient » *; Peut-être partageait-il les idées de

l'école d'Heraclite sur la justesse des noms. Ce qui le ferait

croire, c'est qu'après avoir réfuté les vues d'Hermogène,Socrate propose (391 h c) de s'adresser à lui, ou à son élève

Gallias, pour savoir en quoi consiste cette justesse naturelle.

La proposition étant repoussée par Hermogène, Socrate se

tourne d'un autre côté. On serait tenté d'en conclure que les

considérations suivantes ne doivent rien à Protagoras : s'il

en était autrement, seraient-elles admises sans protestation

par Hermogène, qui connaît évidemment T'AXi^eia du

sophiste et en rejette avec mépris l'enseignement?Prenons garde cependant qu'il n'y ait là un jeu de l'iro-

nie socratique— ou platonicienne. On a rappelé plus haut

que Protagoras, dans le dialogue qui porte son nom, préco-nisait l'étude des poètes comme une part importante de

l'éducation. Or, nous voyons Socrate consulter les poètes et

préluder à ses fantaisies étymologiques en étudiant les noms

d'Astyanax et d'Hector dans Ylliade, pour en tirer les pré-

tendues lois de la dénomination homérique. Plus loin il in-

voque et il cite Hésiode et Orphée. L'étymologie, qui plus

tard, d'après Gicéron2

, sera pratiquée à la fois par l'Aca-démie et le Lycée, et dont l'origine doit être cherchée dans

certaines croyances religieuses— la foi à la valeur magique du

nom — apparaît dans les plus anciens monuments de la

k première vue, la thèse de l'horame-mesure paraîtrait plutôt en

effet s'accorder avec la théorie de « l'arbitraire », soutenue par Her-

mogène (Kirchner, 0. /., p. 16). Mais en ce cas, comment expliquer

qu'Hermogène lui-même condamne expressément cette thèse, commeil rejettera plus loin l"AX7)'6cta de Protagoras, sans indiquer que sur

d'autres points il s'accorde avec le sophiste ? On pourrait, il est vrai,

soupçonner Hermogène d'illogisme; mais il est plus probable qu'aux

yeux de Socrate la contradiction est dans les idées de Protagoras qui,

partisan de la justesse naturelle des noms, ne voit pas l'incompatibi-

lité de cette théorie avec celle de l'homme-mesure.

1. Théétete, i5a e.

2. Academica posteriora, 1,8, 32.

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txlx GRATYLE

poésie grecque. On la note déjà chezHomère;on la retrouve

chez Hésiode et chez les tragiques1

.

Il est difficile, crovons-nous, de ne pas être frappé du rap-

prochement qui semble s'imposer entre le procédé mis en

œuvre par Socrate dans cette partie du Cratyle et la méthode

de Protagoras. Si l'on admet, d'autre part, que Protagorastirait de la doctrine d'Heraclite les mêmes conclusions que

Cratyle sur la justesse naturelle des noms, on inclinera

à penser que l'école de ce sophiste a particulièrement été

visée par Platon 2. Mais, pas plus que pour Prodicos, on

n'a la preuve que Protagoras lui-même ait pratiqué l'étymo-

logie; et il est vraisemblable que la partie étymologiquetourne en ridicule les abus où tombaient, sinon les grands

sophistes du passé, du moins certains de leurs disciples,en

prétendant justifier par ces procédés fantaisistes la théorie

d'Heraclite.

L'opinion de Schleiermacher que le Cralyîe livre bataille à

Antisthène a souvent été reprise et discutée. Dûmmler, quis'en est fait le principal champion, a tenté de l'étayer pardes vues nouvelles. Leur goût pour les étymologies et leur

doctrine étymologique, les stoïciens les auraient reçus d'An-

tisthène, qui les tenait d'Heraclite, et c'est Antisthène quePlaton tournerait ici en dérision. Steiner 3

pense qu'Antis-

thène est directement visé au moins dans les étymologies

des noms relatifs aux notions morales, et

— ce qui nous pa-rait extrêmement douteux — dans les considérations sur la

valeur des sons isolés. Suivant Raeder*, Antisthène est at-

taqué dans le Cratyle comme dans VEuthydème, et toutes les

discussions intéressant la langue sont vraisemblablement

dirigées contre lui. Il disait : « Le principe de l'éducation

est l'étude des noms », et il avait écrit un ouvrage en cinqlivres Sur l'éducation ou les noms 3

. GommeCratyle,

il soute-

nait qu'il est impossible de parler faux. Socrate ne fait-il pas

clairement allusion à lui quand, au moment d'examiner les

notions morales, il déclare qu'ayant « revêtu la peau du lion »,

i. M. Warburg, o. /.. p. 70 et suiv.

2. Stallbaum, o. L, p. l\.

3. O. I., p. 127 sq.

4. O. L, p. i48.

5. Diogènede Laërte, VI, 17.

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NOTICE 45

il ne se croit plus en droit de reculer f? L'image fait naturel-

lement songer à Héraclès, qu'Antisthène avait pris pourmodèle avant les Stoïciens, et dont il avait donné le nom à

plusieurs de ses écrits 2 .

Il est peu probable, cependant, que l'ensemble du Cratyle

ait été inspiré à Platon par son hostilité contre Antisthène.

On n'a pas le droit de rattacher Antisthène à l'école d'Hera-

clite, en croyant l'apercevoir derrière Cratyle, ni de lui at-

tribuer les théories de celui-ci sur la justesse naturelle du

langage ;il se fondait au contraire sur les principes des

Éléates3

.

On a fait justement ressortir qu'adversaire déclaréde la théorie platonicienne des Formes, il n'aurait pu y don-

ner son assentiment, comme le fait sans hésiter Cratyle4

.

La thèse qu'il est impossible de dire faux, d'origine éléa-

tique, n'appartenait pas en propre à Antisthène; c'était

devenu un lieu commun de la sophistique : a Elle a été

souvent soutenue, dit Socrate, autrefois comme de nos

jours » (429 a). Quant à la plaisanterie sur la peau dulion, il est possible qu'elle s'adresse à Antisthène, car

c'est bien aux travaux d'Héraclès que Socrate paraît faire

allusion;mais elle peut être aussi un souvenir de l'apologue

(Uâne qui passait pour être un lion) qui figure dans les fables

d'Ésope.En somme, sans nier que certaines attaques du Cratyle

aient

puatteindre

Antisthène,ou même être orientées contre

lui, on ne voit pas le moyen de leur prêter cette significa-

tion avec certitude 5. Ici comme dans d'autres dialogues, le

TJtééiète par exemple, Platon semble avoir en vue plusieurs

sortes d'adversaires, et il serait imprudent de vouloir mettre

des noms sur des théories qui n'étaient sans doute pas le

fait de tel ou tel, mais se retrouvaient dans divers milieux

sous l'influence d'une sophistique plus ou moins rattachée

au système d'Heraclite.

1. 4n a.

1. Kiock, 0. L, p. 44 et suiv., estime que Platon, attaquant le

type du sophiste grammairien, a eu surtout en vue Antisthène, bien

qu'il ait réuni des traits pris çà et là, dont quelques-uns n'appar-tiennent pas à Antisthène.

3. Gomperz, 0. L, II, p. 191 ; Wilamoïvitz, o. L, p. 297.

4- Horn, 0. L, p. 61, note; Kiock, 0. L, p. 44.

5. I. van Ijzeren, 0. L, p. 193-194.

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46 GRATYLE

LA DATE DU CRATYLESA PLAGE DANS L'OEUVRE DE PLATON

Le Cratyle ne contient aucune indication extérieure ni sur

le moment où le dialogue est censé avoir lieu, ni sur l'épo-

que de sa composition. On est mieux renseigné sur ce der-

nier point par les caractères du style et par le contenu de

l'ouvrage. Personne ne songe plus à y voir une des pre-

mières œuvres de Platon, comme le faisait Slallbaum ' en

le plaçant vers 402, avant la mort de Socrate, ou commeGucuel 2

. Le Cratyle doit avoir suivi YEuthydème2

, dont il

est inséparable, et probablement à peu d'intervalle. Il se

rattache d'autre part au groupe formé par le Parmênide et

le Théétète*, mais il est sûrement antérieur à ces dialogues,

qui reprennent avec plus d'ampleur, pour les soumettre à

une critique décisive, quelques-uns des problèmes soulevés

par le Cratyle. Or le Thèétète* semble avoir été écrit après

36g, et n'a peut-être été publié qu'après le second voyagede Sicile (367). Le Cratyle doit l'avoir précédé de plusieurs

années. On y trouve esquissée, mais avec réserve, la théo-

rie des Formes, et pour la première fois l'auteur montre que

le caractère immuable de ces Formes est une condition né-cessaire de leur connaissance. Mais elles ne sont pas encore,

comme dans le Phédon, un monde à part, séparé du do-

maine des choses sensibles, et le Cratyle ne laisse rien soup-

çonner de cette gradation qui, d'après le Banquet, doit parune série d'étapes conduire de l'objet sensible à la Forme

intelligible et parfaite.On peut en conclure que le Cratyle

est antérieur au Banquet, composé vers 385 environ

6

et auPhèdon. Si, d'autre part, il se place à la suite de YEutky-

1. 0. t., p. 26.

a. 0. L, p. 25.

3. Wilainowitz, 0. /., p. 286. Le Cratyle, 386 cl, cite commeconnu

un sophisme d'Euthydème.

4. Horn, 0. t., p. 272 sq.

5. Voir la notice du Théétete, par A. Diès, p. 121.

6. L. Robin, Notice du Banquet, p. xi.

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NOTICE 47

dème, écrit sans doute vers 386, on voit que sa date doit tom-

ber à peu près entre 386 et 385.

Horn a fort bien montré la place occupée par le Cratyledans le développement de la pensée platonicienne

É. Le Cra-

tyle clôt une phase de cette pensée et en ouvre une nouvelle.

D'une part, il ferme la série des écrits dirigés contre la

sophistique.Le Gorgias et le Protagoras en combattaient la

doctrine morale : le Cratyle réfute la thèse de Protagoras

que « l'homme est la mesure de toutes choses ». Cette pro-

position sophistique qu'il

est

également impossible

deparler

et de penser faux avait été effleurée dans YEuthydème : elle

est examinée et réfutée parle Cratyle. Mais le Cratyle, d'autre

part, s'en prend à l'école d'Heraclite;

il attaque avec viva-

cité la théorie du mouvement universel. Recherchant ce

qu'ilfaut penser de la justesse des noms, il conclut que

le langage n'est pas un moyen sûr de connaître les choses, et

que c'est aux choses elles-mêmes qu'il faut demander cette

connaissance. Il pose enfin le problème des Formes im-

muables.

Ces diverses questions seront reprises et approfondies dans

la suite. Le Théétète reconnaîtra que la thèse de Protagorassur l'homme-mesure a été insuffisamment réfutée dans le

Cratyle. Il la soumettra à un nouvel examen et y opposerades objections plus décisives. De même il reviendra, pour la

ruiner définitivement, sur cette affirmation qu'il est impos-sible déparier et de penser faux. La réfutation de la doctrine

d'Heraclite, amorcée par le Cratyle, sera poussée à fond

dans le Théétète. Le Cratyle a posé le problème de la connais-

sance, mais sans indiquer ni les moyens de le discuter, ni les

limites de la connaissance. Cette recherche fera l'objet du

Théétète, tandis que Parménide examinera la permanence des

Formes. Le Théétète touchera encore au langage, mais seule-ment pour l'étudier dans son rapport avec la connaissance,

et en apportant des changements à certaines conceptions du

Cratyle. Socrate y énoncera, d'ailleurs sans l'adopter, une

définition du Xdyoç assez différente, en le représentant comme« un entrelacement de noms » (202 b), tandis que le Cratyle

distinguait, à côté du nom (ovofjia), le verbe ou prédicat

(pr,{jt.a) ;

auxsyllabes, connaissables

etexprimables,

il

oppo-

1. O. L, p. 62 et suiv.; p. 272 et suiv.

V. 2. - 4

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48 CRATYLE

sera les éléments, irrationnels et inexprimablesl

. D'une façon

générale, le Cratyle a déblayé le terrain pour les recherches

ultérieures, et

préparéla voie au

Parménide,au Théétète et

au Sophiste2

.

i. A. Diès, Notice du Théétète, p. 1 44 suiv.

2. Pour l'établissement du texte, j'ai entièrement collationné les

manuscrits B (sur la reproduction en phototypie donnée par de Vries)

T et W (sur les photographies de l'Association Guillaume Budé). Je

suis heureux de dire tout ce que mon travail doit à l'obligeance de

M. A. Diès, qui, pour certaines parties de la Notice et pour l'interpré-

tation du texte, m'a fait bénéficier de sa connaissance approfondie de

la pensée platonicienne, et j'ai à cœur de remercier If. E. Chambry,

qui, en revisant la traduction avec le soin le plus éclairé, m'a suggérédes améliorations nombreuses.

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CONSPECTUS SIGLORUM

B = God. Bodleianus uel Glarkianus 39 (anno 8g5

post I. G. nat.).

T = God. Venetus append. class. 4, cod i (sub. fin.

xi uel init. xn saec).W z= God. Vindobonensis 54, suppl. phil. gr. 7 (for-

tasse saec. xn). In hoc codice desunt 4i4 d 8 Serrai

—422 c 3 txpaXrp'fynù ;sed post 423 b 10 y.al ovo|j.a^£i

interpositi sunt uersus 4*5 d 3 wç loiy.e— 4 18 e 1

âyar/v-v ; sequunlur u. 426 a 5 à&iycrccYv tccu — 426 e 6

IwTa wpôç, deinde 419 d 1 tc ce Tgptfvbv usque ad finem.

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CRATYLE

[ou sur la justesse des noms.]

HERMOGENE, CRATYLE, SOCRATE

383 a Hermogene *. — Yoici Socrate. Y eux-tuPréambule. i

• •1 • . j

Les deu ^ue nous *ul communiquions le sujet de

thèses en présence.notre entretien 2

?

Grattle. — A ta guise.

Hermogene. — Suivant Gratyle que voici, Socrate, une

juste dénomination existe naturellement pour chacun des

êtres;un nom n'est pas l'appellation que certains donnent à

l'objet après accord, en le désignant par une parcelle de leur

b langage, mais il existe naturellement, et pour les Grecs et

pour les Barbares, une juste façon de dénommer qui est la

même pour tous. Je lui demande donc, moi, si Cratyle est ou

non son nom véritable : il en convient. « Et celui de Socrate ?

lui dis-je.— C'est Socrate, répond-il.

— De même aussi

pour tous les autres hommes, le nom dont nous appelonschacun d'eux, c'est là le nom de chacun ? — Et lui : « Pas

i. Sur Hermogene, voir la Notice, p. 34- Son père, Hipponicos

(nommé plus bas, 384 a), était fils de Callias ; Thucydide le men-tionne (III, 91) comme exerçant dans l'été de 426 les fonctions de

stratège. Hipponicos appartenait à une des familles d'Athènes les

plus riches et les plus en vue. Sa fille Hipparété épousa Alcibiade

(Plutarque, Aie., VIII).

2. Ce début (noter ojv et -ôv Xôyov) montre que l'entretien d'IIer-

mogène avec Gratyle dure déjà depuis un moment. Hermogene va le

résumer un peu plus bas. Il l'interrompt sans doute en voyant

arriver Socrate. Pour cette vive entrée en matière, comparer le

début du Phiïebe.

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RPATYAOE[r\ Tzspl ôvo[xaTtov ôpôo'rjxoç.]

EPMOTENHZ KPATYAOZ ZQKPATHZ

EPM. BouXei oSv kocI ZcùKpdtTEi tÇ8e àvaKoivoùa&HESa 383 a

tôv X6yov ;

KP. EïaoïSoKEÎ.EPM. KpaxùXoç cprjalv 88e, S> Z&KpaxEÇ, ôvd^axoç

ôp86TT)Ta sîvai EKaaTCù tûv ovtcov <f>ùa£i TTE<J>UKiuav, Kal ou

toCto £Îvaiovou.ao av tiveç ouvBé^evoi KaXEÎv KaXcoai, xf]ç

aÔToàv cfxavfjç uopiov ETtupSEyyéuEvoi, àXXà ôp86Tr)Tà Tiva

tcov ôvou.<xtcùv TTEc|>uK£vai Kai "EXXtïch Kal |Jap6apoic; Tfjv b

aÙTfjv anaaiv. 'Epcoxô ouv auxov lyw aÔTco noTEpov Kpa-tuXoç tt] àXrjSEia 6vo^a eqtlv

f)où"* ô 8è ou.oXoyEÎ. « Tt 8è

ZcoKpàxEL ;»

Ic{>r|v lyo. « ZcoKpdtTrjc; », ?\8' 8ç. « OukoOv

<ai toÎç aXXoiç àvSpcimoiç Tt&ouv, S-nsp koXoO^ev Svo^a

Teslim. : 383 a 5 xat où — b 2 ôacaaiv Euseb., Praep. euang., n ?

6;

Greg. Corinth., Walz,Rhet.

graeci,uol.

7, p. 109,4.

KporcuXo; y] repl ovop.àxa>v opOoTr^o; BTW (Xoytxôç post op6dxT)To;

add. b) H~k xou SiaXdyou -po'stora 'EpjAoyévY]; KpotTuXoç Utoxpatr^ç

Wt 'EpjxoYévrjç Kpa-uXoç Swxpàxr); man. recentiss. b||383 a 1 àvct-

xotvtoawasOa BW :-vo>acofi.£v

T||

6 T7j; auxwv çtovf)? tidptov T :T7JÇ

aùtàiv çtov^; uo'ptov B Euseb. ttjç aùtôjv [Aoptov ©cdvtjç W xrjç aurôiv

«paivTî; jxepLÔa Greg. Cor.||b 2 aùtw Trdxspov Stallbaum : si aui(p

îîo'-cspovBW et oturâS T

||3 ïa-iv

r\ou om. T

|j ôuoXoyst xl 8è BT (sed

in B ti oè euanidum) :ôfioXoyEÏ aùxtot ys toûto) ovoixa sîvai Tt 8s Waùiw ye toâtcd ô'votxa stvott tt ôat b

||4 èyoi om. T.

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383 b CRATYLE 5o

pour toi, en tout cas, dit-il; ton nom n'est pas Hermogène,même si tout le monde te le donne. » Là-dessus, je le ques-

tionne, désireux de savoir ce qu'il veut dire; mais, sans rien

384 a expliquer, il me traite avec ironie, affectant de nourrir

quelque idée en son for intérieur, et d'avoir sur ce sujet

une connaissance qui me déterminerait, s'il voulait la dire

clairement, à lui donner mon approbation et à soutenir sa

propre thèse. Si donc tu as quelque moyen d'interpréter

l'oracle de Gratyle, je l'écouterai avec plaisir. Et surtout,

j'apprendrai encore plus volontiers ce que tu penses de la

justesse des noms, s'il te plaît de le dire.

Socrate. — Fils d'Hipponicos, Hermogène, un vieux pro-

b verbe dit que « les belles choses sont difficiles » quand il

s'agit d'en apprendre la nature. En particulier, l'étude des

noms n'est pas une petite affaire. Si, pour ma part, j'avais

déjà entendu de la bouche de Prodicos la leçon de cinquantedrachmes 1

qui, à l'en croire, donne à l'auditeur une connais-

sance complète de la question, rien ne t'empêcherait desavoirà l'instant la vérité sur la justesse des noms. Mais en fait je

c n'ai entendu que la leçon d'une drachme; j'ignore donc

quelle peut être la vérité en ces sortes de matières. D'ailleurs

jesuis prêt à la rechercher de concert avec toi et Gratyle.

Quant à nier qu'Hermogène soit ton vrai nom 2, c'est, à

ce que je soupçonne, une plaisanterie de sa part : peut-être

pense-t-il que tu échoues dans tous tes efforts pour acquérir lafortune. Mais, je le répète, ce sont là des matières difficiles à

connaître. Il faut mettre la recherche en commun, pour exa-

miner si c'est toi qui as raison ou Gratyle.

Hermogène. — Ma foi, Socrate, je me suis souvent, pourma part, entretenu avec lui et avec beaucoup d'autres, sans

d pouvoir me persuader que la justesse du nom soit autre

chosequ'un

accord et une convention. A monavis,

le nom

qu'on assigne à un objet est le nom juste ;le change-t-on

i. Sur ces leçons, voir Aristote, Rhêt., III, i/i, i/ji5 b. Prodicos

vint plusieurs fois à Athènes, envoyé en ambassade par ses conci-

toyens de Géos. L'Hippia* majeur, 282 a, atteste la grande réputation

que lui valut son éloquence, et les sommes prodigieuses que lui firent

gagner ses leçons. Dans le Ménon, 96 d, Socrate dit avoir suivi son

enseignement. Le souci que manifestait Prodicos de la justesse du

langage est parodié dans le Protagoras, 337 a-c -

2. Le nom signifie : de la race d'Hermès, dieu du gain. Il con-

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5o KPATTAOS 383 b

EKaorov, to0t6 ecttiv EKaoTop SvoLia; »eO Se, « Ofticouv aoi

yE », r\S

s

8ç, « ovo(iae

Epu.oy£vr)ç, ouSè av TtàvTEç koÀcocrv

avSponoi. » Kalêu.oO IpcùTCùVToc; KalnpoSuLiouLiEVOUEtSÉvai

8 tl tcotè XÉyEi, oôx£ à*noaacj>EÎ ouSèv ELpcovEÙETal te Trp6ç 384 a

lie, npooTTOLOÛLiEvoç tl <xut6ç èv âauTo 8iavo£Îa8at g>ç

eISgùÇ TTEpl aUTOU, O El ftoûXoiTO CTacJïCOC; ELTTELV, TIOUr)aELEV av

Kal elie ÔLioXoyEÎv Kal XÉyELV &Tt£p aÔTÔç XÉyEL. El o8vTir)

£X£LÇ auLiôaXEiv Tf)v KpaTuXou LiavTElav, fjSÉQÇ av àKoù-

aaiLu* ll&XXov Se auTcp aot oTtrj Sokel £Xelv TiEpi ôvoluxtcdv

ôp86Tr|Toc; etl avî^Slov TTu8olu.r)v, eï aot fiouXo(iÉvG> èaTiv.

ZO. *C1 Ttaî'lTmoviKoue

Ep^6yEVEç, TiaXaLa TtapoLu/La 8tl

XaXETià Ta «xXa ecftlvottt] exel ^a8£Îv Kal

Sf]Kal to TtEpl b

tcûv ôvolloctcùv ou au.iKpov TuyxavEL ov Lia8r)u.a. El llev oSv

syà) fjSï] ^kt]k6ti napà npoSUou t^v TtEVTr)KovTaSpaxLiov

ettlSel^lv, f]vaKouaavTt u*nàpx£L TtEpl toOto TtETtatSEGaSaL,

&ç <pr\oiv ekelvoç, ouSèv âv ekcoXuév aE auTLKa LidXa EtSÉvai

Trjv àXr)8ELav TiEpl ôvolkxtcùv bpQ6Tr\ioq' vOv 5è ouk aKrjKoa,

àXXà tt]v Spaxu-Lalav. Oôkouv oTSaTtfj

tiote t6 àXr)8Èç C

E)(El TTEpl TCOV TOLOUTOV Ca)C^r|TELV U.EVTOL ETOLLLOÇ ELLLL Kal

aol Kal KpaTÛXcp Koivfj. "Otl 8è ol» q>r\ai aotc

Epu.oyÉVT]

ovoLia eIWitt] àXrjSEla, waiTEp ûtiottteùco aÔTSv aKamTELV

otETat yàp Xacùç <je xptjimxtqv £<Jhélievov KTr|aEcoç àno-

TuyxavELV EKàaTOTE. 'AXX', S vOv5f| IXsyov, ElSÉvat u.Èv

Ta ToiaOTa xaXETi6v, elç t6 kolvSv Se KaTa8ÉvTaç XP^I

aKOTTELV EÏTE <3Ç 0"Ù XÉyELÇ ttyei ELTE G>Ç KpaTuXoÇ.

EPM. Kalu.f|v lycoyE, S ZcùKpaTEÇ, ttoXXocklç Sf]

Kal

touto SloXexSeIç Kal aXXoiç ttoXXolç, où 86vau.aL Tt£ia8î]vaL

obç ocXXrj tlç 6p86Tr|ç ôv6u.aToç f\ £,uv8r)Kr| Kal oLLoXoyla. d3

Eu.ol yàp Sokel o ti av t'lç tcû SfJTaL ovoLia, toOto EÎvai t6

b 6 Tou-ro B : -cojt' T toj-o) W|| 7 ovotxa BT : ovotxa iatw W

Il384 a 6

k'/éivom. T

|| 7 ôpOdTrj; Schanz pro opG6x7)Toç j|eaxtv om.

Td b 3

iptï)X<fo)T : ^xipcoctv W ày.Tjxo'stv B ||

5 sxoiXus TW : -luaév B

(-Xuae b) D

c 3 08pijatt

BtW||

4 «dwiv in

marg.add. T

||

6

É/.asTOT£ om. T H d 2 elvat BW : eivat xal T r

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384 d CRATYLE 5i

ensuite en un autre, en abandonnant celui-là, le second

n'est pas moins juste que le premier ;c'est ainsi que nous

changeons le nom de nos serviteurs, sans que le nom subs-

titué soit moins exact que le précédent. Car la nature n'as-

signe aucun nom en propre à aucun objet : c'est affaire d'usageet de coutume chez ceux qui ont pris l'habitude de donner

e les noms. Mais s'il en va autrement, je suis prêt, quant à

moi, à m'en instruire, et à l'entendre non seulement de la

bouche de Cratyle, mais de n'importe quel autre.

385 a Entretien Socrate. — Peut-être as-tu raison 1 ,

de Socrate Hermogène; mais examinons la chose.

et d'Hermoffène. L'appellation qu'on attribue à chaqueLe nom peut être

b-

t t le nom de chacun?vrai ou faux. TT

J~,

Hermogène. — L est mon avis.

Socrate. — Que ce soit un particulier ou la cité qui la

donne ?

Hermogène. — Oui.Socrate. — Gomment? si j'appelle, moi, un être quel-

conque,—

par exemple, ce que nous appelons aujourd'huiun homme, si, moi, je le nomme cheval, et ce que nous

appelons cheval, sije l'appelle homme, le même être por-

tera-t-il pour tout le monde le nom d'homme, mais pour moi

en particulier celui de cheval ? Et inversement, le nomd'homme

pour moi,mais celui de cheval

pourtout le

monde ? Est-ce là ce que tu veux dire ?

b Hermogène. — C'est mon avis.

Socrate. — Voyons, dis-moi encore. Y a-t-il une chose

que tu appelles dire vrai et dire faux ?

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Il y aurait donc un discours vrai et un faux 2?

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Celui qui dit les choses qui sont comme elles

sont est vrai, et celui qui les dit comme elles ne sont pas est

faux ?

Hermogène. — Oui.

vient mal à Hermogène qui a des embarras d'argent (cf. 4o8 b).

i. Ti àsyê'.v : dire quelque chose qui compte, est un emploi fré-

quent. Comp. xtç elvat : être quelqu'un d'importance.2. Ceci est une allusion à la thèse célèbre soutenue par les

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5i KPATTAOS 384 d

ôp66v Kal av aQSiç y£ iTEpov LiETaSfJTai, IkeÎvo 8e latjkéti

KaXfj, oùSèv fJTTov t6 SaTEpov ôpScoç £XELV T0^ TipoTÉpou,

CùOTTEp TOÎÇ otKETaiÇ f\ ^EÎÇ U.£TaTl8£U.£8a, OuSèv ?)TTOV ToGt'

eIWl Ôp88v to u.ETaT£8èv toO TrpéxEpov keiljlévou' oô yàp

<f>ùasiÉKaaTCû TtEcpUKÉvai ï>vou.a oôSèv ouSev'i, àXXà v<5u.a>

Kal e8el t&v ISiaàvTCùV te Kal KaXoûvTcov. Et Setït] aXXrj

e)(ei, etoilioc; lycoyE Ka^ u.av8àvEiv Kal àKouEiv ou u.6vov e

Ttapà KpaTuXou, àXXà Kal Ttap' aXXou ôtouoGv.

Zft. "lacoç lievtoi ti XéyEiç, o 'Epu.éyEVEç* <jK£ip&u.£8a 385 a

Se.nO av

Qr\KaXEÎv tiç EKaaxov, toOt' IgtIv EKàaTep

ovou.a;

EPM. "Eu-otyE SokeÎ.

ZO. Kal làv 18i£ttiç KaXfj Kal làv tt6Xiç ;

EPM.<t>r|jJLt.

ZO. Tl o3v;làv lyà> KaXô ôtioOv tôv ovtcdv, oîov

o vOv KaXoO^iEv avBpcûTiov, làv lyô toOto ïtitiov npoa-

ayopEuco, S Se vOv 'itittov, av8pGmov, l'axai 8n,u.oala u.èv

8vou.a ctvSpcoTioc; iQ> auTcp, t8la 8è ÏTïTtoç ;Kal tS'icc u.èv au

avBpamoç, 8r|u.oala 8è ïtïtïoc; ;oOtco XÉyEiç ;

EPM. "'E^otyE SokeÎ. 1)

Zft. <(>ÉpE Si*) fcioit68e eltté- KaXsiç tl

àXr)8f} XÉyEiv Kal

tyevSf) ;

EPM. "EycoyE.

ZO. OukoOvEtr)

àv X6yoç àXi^ç, Ô Se ip£u8r)ç ;

EPM. nàvuyE.

ZO. *Aps

ouv outoç oç av Ta ovTa Xéyrj â>ç egtiv, aX^S^ç*

oç 8' av coç ouk eotiv, ipEuSrjç ;

EPM. Nat.

d 3 xal èàv Wy 6 oùosv— 7 -/.sitjivou om. T

||8 èOtaàvxtov BT yp.W : asOtcxàvxwv W

||385 a 2 av T : 6 èàv BW y 6îj xaXeîv BW :

97;; (Ofjin marg. t) xaXst T

||ïottv om. T

||5 xat èàv BtW : /.al àv

T H èàv 7:0X1; BtW : àv *d).iç T || 7 èàv B : àv TW||b 1 xi yàp àv

à'XXottç çat7)

ad oV/.eï add.

W||

a xi Bt et

W(?):

xà T||

5 àXrjO:^BT : ô aèv àXrjO^ W.

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385 b CRATYLE 02

Socrate. — Il est donc possible de dire par le discours ce

qui est et ce qui n'est pas?Hermogène. — Parfaitement,

c Socrate. — Et le discours vrai, est-ce dans l'ensemble

qu'il est vrai, sans que ses parties le soient ?

Hermogène. — Non, ses parties le sont aussi.

Socrate. — Est-ce les parties principales qui sont vraies,

et non les petites ? Ou le sont-elles toutes ?

Hermogène. — Toutes, à mon avis.

Socrate. — Peux-tu donc énoncer une partie du discours

plus petite qu'un nom ?

Hermogène. — Non, c'est la plus petite.

Socrate. — Alors, le nom qui fait partie du discours vrai,

on l'énonce ?

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Et il est vrai, suivant toi.

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Et la partie du discours faux, n'est-ce pas unefausseté ?

Hermogène. — Sans doute.

Socrate. — On peut donc dire un nom vrai ou faux, si

c'est possible du discours ?

d Hermogène. — Évidemment.

Socrate. — Le nom que chacun attribue à un objet est

donc le nom de chacun?Hermogène. — Oui.

Socrate. — Chaque objet aura-t-il autant de noms qu'onlui en attribuera, et au moment qu'on les lui attribuera ?

Hermogène. — En effet, Socrate, je ne conçois, pour ma

part, qu'une juste façon de dénommer : je puis1

appeler

chaque objet2 de tel nom, établi par moi

; toi, de tel autre,

établi

partoi. Il en est de même

pourles cités. Je les vois

e parfois assigner chacune un nom différent aux mêmes objets,

sophistes que l'on ne peut dire ce qui n'est pas, et par suite qu'il est

impossible de parler faux (voir l'Euthydeme). Elis sera reprise plus

loin par Cratyle (£29 c d), et réfutée par Socrate. Platon y reviendra

dans le Sophiste (a36 e-2^6 a), jugeant alors que cette proposition

paradoxale mérite un examen approfondi.

1. Elva r. équivaut à èÇeïvat.

2. La construction habituelle est xaXetv ovoudt x:va, mais on trouve

souvent chez Platon l'objet nommé au datif (cf. 419 ce).

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52 KPATTAOS 385 b

ZH. "EaTtv apa toOto, X<5yo XâyEiv Ta ovtcc te Kal ^r) ;

EPM. nàvu ye.

ZQ.cO

Xoyoq

S' eœtIv 6

àXi^ç nàiepovoXoç u.èv àXrj- c

8f)ç, Ta u.<5pia S3

auxoO ouk àXrjSî] ;

EPM. Ouk, àXXà kccI Ta \x6pi*.

ZO. FldTspov 8è Ta u-èv u.£yàXa u.6pia àXrjBfj, Ta 8è

au.LKpà ou-f\

TràvTa;

EPM. riàvTa, oî^ai êycoye.

ZO. "EaTtv ouv o tl

XéyELç Xoyou au.iKp6TEpov ^épiovocXXo

f\ Bvo^ia ;

EPM. Ouk, àXXà toOto au.iKpéTaTov.

ZO. Kal to ovo^a apa to toO àXr)8o0ç Xéyou XéyeTat ;

EPM. Nat.

ZO. 'AXt}8éç ys, ôç <f>f|c;.

EPM. Nat.

ZO. Tô Se toO ipEuSoOç u.6piov oùiJjeOSoc; ;

EPM. 4^ pi.

ZO. "Egtlv apa 2>vou.a ij^euSèç Kal àXr)8èç XéyEtv, EÏTiEp

Kal Xoyov ;

EPM. ricoç yàp oO;

d

ZO. nO av

apaEKaaToq

q>r\

tg> Bvou.aEÎvai,

to0t6 eqtiv

EKaaTcp ovou.a;

EPM. Nat.

ZO. *H Kal ÔTi6aa âv<J>fj tiç IxaaTcp ôv6paTa Eivai,

ToaaOTa laTai Kal t6te ÔTioTav<{>fj ;

EPM. Où yàp e)(cû lycoys, où ZcoKpaTEç, ôvôu.aToç aXXrjv

op86Tr|Ta f\ TaÙTrjv,

èu.ol u.èv

ETEpovEÎvai KaXEÎv EKaaTCd

ovou.a, S lyà) eSeutjv, aol 8è ETEpov, o a3 au. OOtco 8è Kal

Taîç tt6Xecjiv ôpco 18ta EKaoraiç evIot' ItiI toîç aÙToîç e

C i oXoç jxlvBW : txèv okoç T

|| 9 touto T : -à BW|| i£ ^euBoiïç

Ven. i85 : $efôou< ||16 <J/eu8è;

W : ^euSoç BT ||d 5 tiç 97; T || 9 aoî

8s btdtspov WH au Hirschig

:

av || e 1 éxàaTa-.ç ora. T || Mot'Buttmann : Iv'oi; BW om. T.

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7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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385 e GRATYLE 53

des Grecs se séparer1 ainsi des autres Grecs, et les Grecs des

Barbares.

Les choses Socrate. - Or çà, voyons un peu,ont une Hermogène. Crois-tu qu'il en soit ainsi

essence stable, des êtres eux-mêmes, et que leur

qui ne dépend pas essence varie avec chaque individu ? —c'était la thèse de Protagoras, quand il

386 a déclarait que l'homme « est la mesure de toutes choses» 2,

voulant dire sans doute que telles les choses me paraissent,

telles elles mesont,

et

quetelles elles te

paraissent,telles

elles te sont— ou bien te semblent-ils par eux-mêmes avoir

dans leur essence une certaine permanence ?

Hermogène. - Il m'est déjà arrivé, Socrate, de me lais-

ser entraîner 3 dans mon embarras à la thèse de Protagoras.Et pourtant, ce n'est pas précisément* mon opinion.

Socrate. — Eh bien, t'es-tu déjà laissé entraîner à croire

bqu'il n'existe absolument pas d'homme méchant ?

Hermogène. — Non, par Zeus ! J'en ai fait assez souvent

l'épreuve pour croire qu'il y a des hommes tout à fait

méchants, et en très grand nombre.

Socrate. — Et des hommes tout à fait bons, n'as-tu pas

encore cru qu'il en existe ?

Hermogène. — Fort peu.Socrate. — Mais enfin tu l'as cru ?

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Quelle est donc ton opinion là-dessus? Ne

penses-tu pas que les hommes tout à fait bons sont tout à

fait raisonnables, et les hommes tout à fait méchants tout à

fait déraisonnables ?

c Hermogène. — C'est mon avis.

Socrate. — Se peut-il donc, si Protagoras disait vrai et

si la vérité est que les choses sont ce qu'elles paraissent à

i. ïlapx : à côté de, par suite : en dehors de, à la différence de.

2. Cette formule fameuse de Protagoras est de nouveau examinée

dans le Théélete, qui reproduit presque littéralement (i52 a) ces

lignes du Cratyle. Mais Platon l'y soumet à une réfutation plusdétaillée et décisive (178 b sq.). Voir la Notice, p. 47-

3. 'EvcaCGa est expliqué par dç a~ep—

Xéyet.

4. Où 7:àvj est souvent une litote exprimant une négation éner-

gique ;voir plus loin (3 19 c) oXo>ç où*.

Page 57: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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53 KPATTAOS 385 e

kel^evoc ov6u.aTa, Kal "EXXrjaL napà toùç aXXouç "EXXrjvaç,

Kal "EXX^ai napà ftap6àpouç.

Zfl. cpépeS^ IScùliev, coe

Epu.<$yEV£Ç, ndTEpov Kai Ta ovxa

oôtcûç £XELV aoL 4>oclvETai, tô Ict auToovf\ouata EÎvat EKàaTcp,

ûSansp npooTayépaç IXeyev, XÉycov « nàvTCOv )(pr)^dcTCùv

u.ÉTpov » EÎvat ocvBpcoTiov, a>ç apa ota llev avIljloI cf>alvr|TaL 386 a

xà npàyu.aTa EÎvai, xotaOTa u.èv eotlv èu-ol, oîa S' av aot,

ToiaOxa Se aot'f\ e^elv Sokel aot aÛTa aÛT&v TLva fÎEÔaid-

TT^xa xfjç oualaç ;

EPM. "HSrj ttotè lycoyE, o ZoDKpaTEÇ, ànopcov Kal ev-

Ta08a £H,r|VÉ)(8r]v elç an£p npOTayépaç XÉyEt" ou tiocvu tl

U.EVTOL LIOL SoKEL OUTCOÇ £X£LV -

Z.C1. Tl Se; lç t<58e fjSn â£jrjvÉ)(8ï]ç &œte

u.f|nàvu aot

Sokelv EÎvat Ttva avSpcùTiov novrjp6v ; b

EPM. Ou u.à t8v ALa, àXXà noXXàKLç 8f]aûxè nénovSa,

ôaiE u-ol Sokelv nàvu novr|poùç EÎvat TLvaç àv8pa>nouç,

Kal u.àXa au^voùç.

Zft. Tt 8é;nàvu xp^axol où'nco ctol ISo^av EÎvat av8po>

tiol;

EPM. Kal u.àXa èXlyoï.

ZO. "ESoÉ.av S' oCv;

EPM. "Eu-oiys.

ZO. ricoc; o3v touto TlSsaaL; Sp

s

oSe, toùç lièv nàvu

XpriaToùç -nàvu cf>povlu.ouç, toùç Se nàvu novrjpoùç nàvu

a<f>povaç ;

EPM. v

Eu.0LyE Sokel outcûç. C

ZO. OÎ6v te ouv eotlv, eI RpcoTayopaç àXî]8^ eXeyev

Kal eotlv aÛTrj r\ àXrj8£La, t6 oîa &v SoKrj EKàaTO TOLaOTa

3 rcapà om. B add. b||

4 lotolu v Wbt : e-.8(o- BT||

5 aot om.

WIIéxaaTw f^cov W ||

386 a 2 elvou om. T||

3 xoiauxa 5é aot T :

xoiâos B xotauxa ô' au aot W||

Zo/.ii aot axxa T||aOxûv B : au- TW

H 8Se

Bz

8al TWb||

b2 aGxô

TW: tau-

B||

5 8è

B: 8aî

Tb fat WIl àv6pio7;cu om. T||c 2 èaxiv om. T.

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7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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386 c GRATYLE 54

chacun, que parmi nous les uns soient raisonnables et les

autres déraisonnables  ?

Hermogène. — Non certes.

Socrate. — Et ainsi, j'imagine, tu es tout à fait d'avis,

puisqu'il y a une raison et une déraison, qu'il est tout à fait

impossible que Protagoras ait dit vrai. Car l'un ne saurait

point sans doute être plus raisonnable que l'autre, si les

d opinions de chacun sont pour chacun la vérité.

Hermogène. — C'est cela.

Socrate. — Mais tu n'admets pas non plus, je pense, avec

Euthydème 2 , que toutes choses soient pareillement à tous à

la fois et toujours. Car les uns ne sauraient non plus être

bons, ni les autres méchants, si à tous pareillement et tou-

jours appartenaient vertu et vice.

Hermogène. — Tu dis vrai.

Socrate. — Par conséquent, s'il n'est pas vrai que toutes

choses soient pareillement à tous à la fois et toujours, ni que

e chacune soit propre à chacun, il est clair que les choses ont

par elles-mêmes un certain être permanent, qui n'est ni

relatif à nous ni dépendant de nous. Elles ne se laissent

pas entraîner çà et là au gré de notre imagination ;mais

elles existent par elles-mêmes, selon leur être propre et

conformément à leur nature.

Hermogène. — C'est mon avis, Socrate.

Socrate. — Les choses elles-mêmesIl en est des actes lui »* »i

comme des choses,auront-elles donc cette nature sans qu il

en soit ainsi des actes qui s'y rappor-

tent 3? Ceux-ci, je veux dire les actes, ne sont-ils pas, eux

aussi, une forme déterminée de réalité?

Hermogène. — Parfaitement, eux aussi.

387 a Socrate. — C'est donc en conformité avec leur proprenature que se font les actes, et non pas selon notre façon

de voir. Par exemple, si nous entreprenons, nous, de cou-

per quelque objet, devons-nous couper chacun comme il

nous plait et avec ce qu'il nous plaît ? N'est-ce pas en voulant

i. La distinction entre sages et non sages reparaît dans le Théétete,

I 7 IC -

2. C'est le sophiste mis en scène dans le dialogue du même nom.

Pour la thèse qui lui est attribuée ici, cf. Euthyd., 2q4 a sq. ; 296 c.

3. L'expression a un sens à la fois actif et passif : c'est la façon

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54 KPATTAOS 386 c

Kal eÎvou, toùç u.èv f|u.oùv cf>poviu.ouç eÎvou, toùç Se ôu|>po-

vaç ;

EPM. Ou Sf)T<x.

T.CI. Kal TaOTa yc, cbç Ey£u.ai, aol navu Sokeî, cppovr)-

ascoç otfarjç Kal à<J>poauvr)c; ^if)nàvu Suvaxôv eîvaL ripco-

xaydpav àXrjSfj XÉyeiv ouSèv yàp av ttouTfl àXT}8Eia ô

ETEpOÇ TOO ETÉpOU (fjpOVL^lOTEpOÇ ELT) , EÏTtEp S &V EKOCOTCO

SoKfl EKaaTQ àXr|8fj iaTai. d

EPM. "Eaxi TaOxa.

ZO. 'AXXà^lt)v

ouSè KaT3

Eu8uSrj^6v yE oî^ai aol Sokeî

Tiocai TiàvTa ôu.oioùç EÎvat ay.a Kal ocel* ouSè yàp âv oôtcoç

eÎev ol u.èv xpr)axol, ol oè Tiovrjpol, el o^iolcoç cmaai Kal asl

àpETrj te Kal KaKiaEÏrj.

EPM. s

AXn8f} XéyELc;.

Zfï. OukoOv elLjifjTE

Ttaai TtàvTa eotIv ôliolcùç au.a Kal

àci, lii^te EKaaTcp IS'ia EKaaxov tôv Svtcûv eot'lv, SfjXov Bï]

otl auxà auTcov oûalav I)(ovTà Tiva f}É6aiov kaii Ta irpà- e

yu.aTa, ou Tipèç fju.aç ouSè iôcf>" rju.cùv, IXK6u.£va avco Kal Kàxco

xû rju.£TÉpcp <f>avxàau.aTt, àXXà Ka8' auxà npoç xf)v aûxwv

oualav I^ovTa f^TTEp TtÉ<f>UKEV.

EPM. AOKEÎ LIOL, O ZoKpaTEÇ, OUTCÙÇ EXELV -

ZO. riÔTEpov o3v auxà laèv avEÏr)

outco TTEcpUKéTa, al

8è Tipà^Eiç auTcov ou Kaxà tôv auxèv Tpdirov ; fjou Kal

auxat ev tl eÎSoç tôv Svtcov EÎalv, at Tipà^Eiç ;

EPM. nàvu yE Kal auxai.

ZO. Kaxà TTjv aÛTcov apa <J>uatv Kal at npà£,ELç Tipàx- 387 a

TOVTau, ou KaTà xf)v fj^ETÉpav 86£av. OTov iàv tiETTi)(Eipf)-

aCù^lEV fjfciSU;TCÙV OVTCOV TÉU.VELV, TtÔTEpOV f\

U. LV TU.TJTEOV

âaTlv EKaaTov cbçocv rçu-Eiç ftouXobu.E8a Kal S âv 3ouXrj865u.EV,

C io ÉTÉpou fjp.tovW

||o èàv T

IId 9 tu>v ovzojv èati'v om. T

||

6 I auxtov B : au- TW||2 xpoç r,{xa;

Ôvra W||3 àXXà xai T

||aÙToiv

codd.|| 4 *i*x«p B ||

5 outwç I/eiv BW : outco T||6 av tïr\ BW in

marg.T : iit

fjT

j|

8-9aurai

(bis)

Heindorf : au-||

387 a I autiov

T : au- H 4 èa-àv om. T.

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387 a GRATYLE 55

couper chacun suivant la façon naturelle de couper et d'être

coupé, et avec ce qui y est naturellement propre, que nous

couperons et réussirons et ferons correctement la chose,

tandis qu'en allant contre la nature, nous manquerons le

but et n'aboutirons à rien ?

b Hermogène. — C'est mon avis.

Socrate. — Et si nous entreprenons de brûler quelquechose, ce n'est pas en nous réglant sur n'importe quelle opi-nion qu'il faut le faire, mais sur l'opinion juste? Et c'est

celle qui indique comment et avec quoi chaque chose est

naturellement propre à être brûlée et à brûler ?

Hermogène. — C'est cela.

Socrate. — De même aussi pour le reste?

Hermogène. — Parfaitement.

Nommer Socrate. — Et parler, n'est-ce pasest une partie aussi un acte ?

de l'acte de parler.Hermogène. — Oui.

Socrate. — Est-ce donc en suivant son opinion particulière

c sur la façon dont on doit parler qu'on parlera correctement?

N'est-ce pas en se réglant sur la manière et les moyens

qu'ont naturellement les choses d'exprimer et d'être expri-

mées par la parole, qu'on réussira à parler, sans quoi l'on

manquera le but et l'on n'aboutira à rien ?

Hermogène. — Je suis de ton avis.

Socrate. — Or nommer, n'est-ce pas une partie de

l'action de parler? Car en nommant, n'est-ce pas ? on parle.

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate.— Nommer est donc un acte, si parler était bien

un acte qui se rapporte aux choses *?

Hermogène. — Oui.

d Socrate. — Et les actes, nous l'avons vu, ne sont pas rela-

tifs à nous, mais ont une certaine nature qui leur est propre ?

qu'ont les choses d'agir et d'être « agies » (Voir plus loin). Sur la

notion de npSÇiç, cf. Théétete, i55 e, et Sophiste, 262 b sq. Les

rpacj-etç sont définies ici « une forme déterminée de réalité »;le

Théétete parle de ces gens qui refusent au contraire de les admettre

au partage de l'être.

1. Horn (Platonsiudien, Neue Folge, iqo4, p. 25) note le caractère

remarquable de cette définition. Pour Socrate, le langage est moinsun moyen qu'ont les hommes de se comprendre qu'une forme d'acti-

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55 KPATYAOS 387 a

f)làv u.èv Kaxà Tf)v <J>ùaiv (iouXr|8co^Ev ekocctov té^veiv toO

TEfclVElV TE KCcl TEfclVEaSai Kal CDTtÉ<|>UKE, TE^oOfclÉV TE Kal

tiXéov tl f^îv ferrai <al ôpBcoç Ttpà£ou.Ev toOto, làv 8è

•napà cf>ûaiv, E^a^apTr)ao^E8à te Kal ouSèv Ttpà£opEV ;

EPM. "Eu.oiyE Sokel outo. b

ZO. OukoOv Kal làv kocelv Tt ETTt^Eipi'jacù^EV ,ou Kaxà

Tt&aav SéÉjav 8ei kocelv, àXXà KaTà ttjv ôp8f)V ; aÔTT^ S'

ECTTivf[ TT£C|>UK£V EKaCJTOV KOCEcOal TE Kal KOCELV Kal S

TTE(|>UK£V ;

EPM. "Egti TaOTa.

Zfï. OukoOv Kal TaXXa outo;

EPM. nàvu yE.

ZO. *Ap' ouv où Kal t6 XÉyEtv u/ia tiç tSv npa^Eûv

ecjtiv;

EPM. Nat.

ZO. ri6TEpOV OUVfl

Sv TO SoKfj XeKTEOV EtVai, TaUTT]

Xéycov ôpBcoç Xe^ei, fjèàv u.èv

î\ tié^uke xà TTpàyu.aTa XÉyEtv c

te Kal XÉyEaSat Kal S, TauTrj Kal toutcùXÉyfl,

TtXéov té ti

Ttoir)aEL Kal èpEÎ- âv Selit), l£au.apTf)a£Tal te Kal ouSèv

TtoufjaEi ;

EPM. OuTCO U.OI Sokeî coç XÉyElÇ.

Zft. OukoOv TOO XÉyELV L^épiOV t8 ÔVOLAOCC^ELV ;ÔVOLià-

£ovteç yàp ttou XÉyouai toùç Xôyouç.

EPM. ndcvu yE.

ZO. OukoOv Kal t6 ôvou.ࣣiv Trpa£,ic; tiç Icjtiv, EÏTCEp

Kal t8 XéyEiv TtpccE,lç tiç rjv TtEpl xà Ttpàyu.aTa ;

EPM. Nal.

ZO. At 8è Ttpà^ELÇ £<f>àvr|aav t^lilvou Ttpèç r|fciaç oîîaai, d

àXX3

auTcov Tiva ISlavc|>ucnv I^ouaat ;

a 5 -etxeTv W||b 3 BoxeïW pro oct

||4-5 xéçu/cv Hermann :

bcEfûxct BT : ^ccpuxct et mox i-.iz-jy.v. W|| 9 |xta xt'ç êaxi W

||

12 Tzdxspov ouv au èàv W (in marg. yp. r{ av) |j

C 3 av BT : èàv

Wj|6 èvoixaÇovTcç BW : xat StovojiaÇovxeç T || 9 xt'ç om. B

|| eirep

BT : tXr.to ye W ||10 ?jv BT : Ion W ||

d 3 auxtov B : au- TW.

V. 2. — 5

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387 d CRATYLE 56

Hermogène. — C'est cela.

Socrate. — Il faut donc nommer les choses suivant la

manière et le moyen qu'elles ont naturellement de nommer

et d'être nommées, et non comme il nous plaît, si nous vou-lons être d'accord avec les conclusions précédentes ? C'est

ainsi que nous pourrons réussir à nommer;autrement nous

ne le pourrons pas?Hermogène. — Il me le semble.

Socrate. — Voyons donc. Ce gu'ilLe nom est un ,. . ,

J.,

. „ .. A.•

instrument qui sert s agissait de couper, il fallait, disons-à instruire, nous, le couper avec quelque chose ?

et à distinguer Hermogène. — Oui.

ela réahté -

Socrate. — Et ce qu'il s'agissait de

tisser, le tisser avec quelque chose? Ce qu'il s'agissait de per-

cer, le percer avec quelque chose ?

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate.

—Et ce

qu'il s'agissaitde

nommer,il fallait le

nommer avec quelque chose ?

388 a Hermogène. — C'est cela.

Socrate. — Et de quoi fallait-il se servir pour percer ?

Hermogène. — De la tarière.

Socrate. — Et pour tisser ?

Hermogène. — De la navette.

Socrate. — Et

pour

nommer ?

Hermogène. — Du nom.

Socrate. — Tu as raison. Ainsi le nom aussi est un ins-

trument.

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Si donc je demandais : quel instrument est

la navette? N'est-ce pas celui qui sert à tisser?

Hermogène. — Oui.

b Socrate. — Et en tissant que faisons-nous? Ne distin-

guons-nous pas la trame et la chaîne confondues ensemble ?

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Et de la tarière et du reste, pourras-tu en

dire autant ?

Hermogène. — Parfaitement.

vite

par laquelleils se mettent en

rapportavec les choses. Du moins

est-ce là son point de départ. ,

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56 KPATTAOS 387 d

EPM. *EaxLxaOxa.

ZO. OôkoOv Kal ovopaaxÉov èaxlvf[ tié<|>uk£ xà Ttpa-

y^axa ôvolloc£elv xe Kal ôvoLià£Ea8aL Kal S, àXX' oû)( f\Sv

fjfcieu; 3ouXn8ôu.£v, Einep xl xoîç ILmpoaScv laéXXel ÔLioXoyo^-

lievov Eivai;Kal ouxco u.èv âv ttXéov xl ttololljiev Kal ôvoLià-

£olli£v, aXXcoc; Se o$;

EPM. 4>aiVET0tl u.ol.

ZO. <t>ÉpE S^, 8 ISel xéllvelv, ISel tû, <j>au.Év, xéllvelv;

EPM. Nal.

IQ, Kal S 15 si kepkl^elv. ISel xco KEpKic^ELv ;<al 8 ISel e

xpuTiâv, ISel xa> xpunSv ;

EPM. nàvu yE.

Zd. Kal o ISel8f) ôvoll<x£elv, ISel xcp ôvolkx^elv ;

EPM. "EcmxaOxa. 388a

Zft. Tl 8èt]v ekelvo S ISel xpunav ;

EPM. Tpùiravov.

Zfï. Tl Se o kepkl£elv ;

EPM. Kepk'lç.

ZO. Tl Se cû Svou.a£sLV ;

EPM. vOvoLia.

ZO. Eu Xeyelç. "OpYavov apa xl eoxl Kal xo ovoLia.

EPM. riavu y£-

ZO. El ouv ey&5 EpoLLLr|v« Tl fjv SpYavov f\ KEpKiç ;

»

OU)( Ç KEpKl£o U.EV;

EPM. Nal.

Zft. Kepk'l£ovxeç 8è xl SpÔLiEv ;ou xfjv KpéKrjv Kal xoùç b

axfju.ovaç o~UYKEXu biEVOUCî SuxKplvoiiEV ;

EPM. Nal.

ZO. Oukouv Kal TtEpl xpunàvou e^elç oôxqç eItteîv Kal

TtEpl xcov aXXcov;

EPM. nàvu ye.

d 'a Iotîv om. TIj

5 cvofiaÇecv Te xaî om. B add. b in marg. ||

10 o om. B add. b||

toj T : :w BW||

e i tôj et statim codd.|J

388 a 2 o\ BW : Sa? Tbj|4 8s BW : Sa» Tb

||iô lyuy' W.

Page 64: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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388 b CRATYLE 57

Socrate. — Peux-tu donc en dire autant du nom? Si le

nom est un instrument, en nous en servant pour nommer,

que faisons-nous ?

Hermogène. — Je ne puis le dire.

Socrate. — N'est-ce pa3 que nous nous instruisons les

uns les autres, et que nous distinguons les choses suivant

leur nature ?

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Ainsi le nom est un instrument qui sert à

c instruire *

,et à distinguer la réalité comme la navette fait le

tissu.

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Or la navette est un instrument de tissage?

Hermogène. — Évidemment.

Socrate. — Un bon tisserand se servira donc comme il

faut de la navette, et « comme il faut » veut dire : de façon

propre au tissage ;un bon instructeur, comme il faut du

nom,et c

commeil faut »

signifie:

de façon propreà ins-

truire.

Hermogène. — Oui.

Établir les noms Socrate. — De qui donc est l'ouvrageest l'œuvre dont le tisserand se servira comme il

du législateur. faut en se servant de la navette ?

Hermogène. — Du menuisier.

Socrate. — Et tout homme est-il menuisier? ou seule-

ment celui qui possède cet art ?

Hermogène. — Celui qui possède cet art.

d Socrate. — Et de qui est l'ouvrage dont le perceur se

servira comme il faut en se servant de la tarière ?

Hermogène. — Du forgeron.Socrate. — Tout homme est-il donc forgeron, ou seule-

ment celui qui possède cet art ?

Hermogène. — Celui qui possède cet art.

Socrate. — Bien. Et de qui est l'ouvrage dont se servira

le bon instructeur en se servant du nom ?

Hermogène. — Je ne le sais pas davantage.Socrate. — Ne peux-tu dire non plus qui met à notre

disposition les noms dont nous nous servons ?

i . La proposition est admise ici sans discussion, ce qui s'explique

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5 7 KPATTAOS 388 b

ZO. "Exelç Br\<al TïEpl ôvÔLiaToc; oïjtcoç elttelv

; ôpyàvcp

Svtl tô ôv6^axu 6vo\xàC,ovzEq t'l ttoloGliev;

EPM. OukIxco Xéyeiv.

ZO. *Aps

oSv SiSdcaKO^Év tl àXXf]Xouç <al Ta npàyLLaTa

StaKpivoLiEv f\ e^eu ;

EPM. riàvu y2 -

ZQ. "OvoLia apa StSaaKotXtK^v tl eotlv opyavov Kal Sia-

KpLTLKOV Tf]Ç OUaiaÇ, COOTTEp KEpKLÇ VJ^àCLLaTOÇ. C

EPM. Nai.

ZQ. e

Ycf>avTLKov 8é yE t} KEpKiç ;

EPM. ricoçS' ofl;

ZO. e

Y<j>avTLK6ç ljlev apa kepklSl koXcoç ^prjaETaL, koXûûç

S' ecttIv û<|)avTLKÔc;• $LSaaKaÀLicèç Se ôve>LiaTL (icaXcûc;)*

koXSç S* ecftl SLÔaaKaXLKÔc;.

EPM. Nat.

ZO. Tc£ t'lvoç oSv Ipycp ô ûcfxxvTrjc; koXcûç ^pfjaETai,

8Tavtt] kepk'lSl )(pf]TaL ;

EPM. TQ toO tektovoç.

ZO. riaÇ 8è TÉKTCÙVf\

Ô Tf]V TE^VT^V E)(CÛV ;

EPM. eOtt*)v TÉxvrjv.

Z£L TG> t£voç 8è Epycp ô

TpxmrjTfjçKaXcoç

xP^

aETaL>

d

cWav tcû Tpimàvco XPnToa >

EPM. T&toO xaXKÉQç.

ZO. *Aps

oSv tiSc; xoXksùc; f\o tt]v té^vt^v e^ov ;

EPM. 'O TT)V TÉ^VT^V.

Zft. EÎev. Tô 8è t'lvoç Ipycp ô SiSacncoXiicôc, wqoziOLi,

cWav tcù èv^LiaTL xp^Ta»- ;

EPM. OôSè toOts

iXcû.

ZO. OuSè to0t6 y' £Xei-Ç eltteÎv, tlç TtapaSiScoaLV f)LiLv

Ta ôv^LiaTa oîç xp&LLESa ;

b 8 tïoioTllsv B||

10 ouv codd. sed litera v punctis notata in B où

Stephanus ||C 5 xb/ p^azza.: T ||

6 xaXwç* x.aXw; man. rec. Goislin.

i55 : xaXw; ||12 TexTtov laxtv Wb

||d 2 otsv tw Tpu7:àvw ypfzai

om. T d 4 ô ttjv TeyvYjv om. B ô ttjv Ti/vrjv I/gjv add. b in marg. ||

5 6 tt)v xéy vtt;vom. W

j| 9 touto y' BW : tout' T.

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388 d GRATYLE 58

Hermogène. — Certes non.

Socrate. — N'est-ce pas la loi (l'usage) à ton avis qui les

met à notre disposition ?

Hermogène. — Apparemment,e Socrate. — C'est donc l'ouvrage du législateur

*

que le

bon instructeur utilisera en se servant du nom?Hermogène. — C'est mon avis.

Socrate. — Et législateur, tout homme l'est-il à ton

avis, ou seulement celui qui possède cet art ?

Hermogène. — Celui qui possède cet art.

Socrate. — Ainsi, Hermogène, ce n'est pas au premier389 a venu qu'il appartient d'établir le nom, mais à un faiseur de

noms;et celui-là, semble-t-il, est le législateur, c'est-à-dire

l'artisan qui se rencontre le plus rarement chez les humains.

Hermogène. — Il le semble.

Socrate. — Or ça, examine donc sur

j iA~*Ji~*— quoile

législateurfixe les

yeux quanddu législateur. ? o J

\l établit les noms, nemonte, pour 1 exa-

miner, aux exemples précédents. Sur quoi le menuisier a-t-il

les yeux quand il fait la navette ? N'est-ce pas sur un objet

naturellement propre au tissage ?

Hermogène. — Parfaitement.

b Socrate. — Et si la navette se brise pendant la fabrica-

tion, en refera-t-il une autre en tenant les

yeux

sur la na-

vette brisée, ou sur cette forme dont il s'inspirait en faisant

la navette qu'il a brisée ?

Hermogène. — Sur cette forme-là, ce me semble.

Socrate. — Nous serions donc tout à fait en droit de

l'appeler la navette en soi ?

Hermogène. — C'est mon avis.

Socrate. — Quand il s'agit de faire une navette pour un

si les noms ont « une certaine justesse naturelle ». Plus loin elle sera

reprise par Gratyle, qui lui donnera d'ailleurs une forme plus précise

et absolue. Socrate alors la combattra, en montrant qu'elle n'est

plus soutenable si la convention a une part dans la formation du

langage.

i. Socrate laisse dans le vague cette notion du législateur, dont

les commentateurs ont beaucoup discuté, les uns y voyant le peuple,

d'autres un personnage mythique ou un homme doué d'un instinctdivin, d'autres enfin les premiers hommes.

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58 KPATYA02 388 d

EPM. OuSfJToc.

ZO. *Aps

ou)(l ô v6uoç Sokel ooi eÎvocl ô napaSiSoùç

aÛTocj

EPM. "Eolkev.

ZO. NouoBétou apa £py<*> XP 1laETai ° SiSaoKaAticèç oTav e

ôvéLiaTL xpf^Tai ;

EPM. Aokel LHH.

ZO. NouoBÉTrjç 8é aot Sokel Trac eÎvoci àvfjp f\h tf]v

xÉ)(vr|v e)(cùv ;

EPM. C

TT]V TÉXVT^V.

ZO. Ouk apa Trocvtoç àvhpéq, o 'EpLiàyEVEÇ, SvoLia 8éa6at

èaTiv, àXXà tlvoç ôvoLLaToupyoG*

oCtoç 8° egt'lv, â>q eolkev, 389 a

o vouoBÉxrjc;, Sç bt\tôv

Sr) Luoupyôv cmavicûTaToc; lv àvBpob-

ttolç ytyvETai.

EPM. "Eolkev.

ZO. *I8i 8rj, ETilCTKEt|iaLttoî (iXÉnov ô

voljloBettjc;xà

ôvéuaxa tIBetou,* ek tûv ELiTTpoaBEv 8è àvàaKELpaL. l"loî

[iXÉTTQV Ô TEKTCÛV TT)V KEpKlSa 7TOLEÎ; Sp' OU Ttpèç TOLOUT<5v

Tl 8 TT£(j>UKE KEpKL^ELV ;

EPM. riàvu yE.

ZO. Tt 8é;

SlvKotTayfl autcp ^ KEpKlç ttoloOvul, ndTEpov b

ttocXlv TTOLf)aEL aXXrçv Tipôç xf]v KaTEayuîav (îXéttcov, f) Ttpoç

ekelvo to eÎSoç npôç BîtEp Kalf\v KaTÉafJEv etcoéel

;

EPM. ripèç EKEÎVO, ELlOLyE SoKEÎ.

Zft. OuKoOv EKELVO SlKaLÔTaT* OCV aUTO 8 EOTLV KEpKLÇ

KaXÉactLLLEV;

EPM. "EuOLyE Sokel.

ZO. OUKOOV ETT£L$àv SÉT] XeTCTQ iLlOtTlCOf) TTa^EL f)

XlVÔ

d 12 6 vouo; BW in marg. t : ovdjxaToç T [jelvai om. T

|ji3 aùxà

BT : xaîha Wj|e A *aç av êTva: W

||389 a i èoriv om. T

||2 lv

om. T|| 7 toiouto' W

||8 -s<puxe cum duobus codd. Stallbaum :

-ecpuxs: BW £7:ecpy/EtT

(|b i 8s TW : 8<xi B uel b

||r

t supra uers.

add. t ||

5 oùxouv — 7 Soxst om. B in marg. add. b||

8 Xivû BW etman. recentiss. T : Xi'vw Tb.

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389 b CRATYLE 59

vêtement léger ou épais, de lin, de laine ou de toute autre

sorte, toutes doivent avoir la forme de la navette, et, d'autre

part, il faut appliquer à chaque ouvrage' le type qui est natu-

c Tellement le plus approprié à chaque objet2 ?

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Et de même pour les autres instruments :

une fois trouvé l'instrument qui, par nature, est approprié à

chaque objet3

,on doit en appliquer la forme à la matière * dont

on fait l'ouvrage5

,en la choisissant non pas comme on veut,

mais d'après sa propriété naturelle. Par exemple, c'est la

forme de tarière naturellement appropriée à chaque objet

qu'il faut, semble-t-il, savoir imposer au fer.

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Et au bois la forme de navette naturelle-

ment appropriée à chacun.

Hermogène. — C'est cela.

d Socrate. — INous avons vu en effet qu'à chaque genre de

tissu était naturellement propre, semble-t-il, chaque sortede navette, et de même pour le reste.

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Eh bien, mon excellent ami, le nom qui est

naturellement approprié à chaque objet, notre législateur ne

doit-il pas savoir l'imposer aux sons et aux syllabes, et

avoir les yeux fixés sur ce qui est le nom en soi, pour créer

et établir tous les

noms,s'il veut faire autorité en cette ma-

e tière ? Si chaque législateur n'opère pas sur les mêmes syl-

labes, voici ce qu'il ne faut point oublier 6: tous les forgerons

n'opèrent pas non plus sur le même fer en fabriquant pourle même but le même instrument

; néanmoins, tant qu'ils

390 a lui donnent la même forme, même si ce n'est pas le mêmefer, l'instrument est bon, qu'on le fabrique chez nous ou

chez les Barbares 7. N'est-ce pas ?

i. C'est-à-dire à chaque instrument (opyavov).

2 Ici : à chaque espèce de vêtement.

3. A la confection de chaque travail (comme p. ex. un vêtement).

l\. Par ex. le bois, pour la navette.

5. L'instrument.

6. 'Ayvoeîv a paru impropre ;diverses corrections ont été propo-

sées, dont la meilleure semble être àaoïyvosiv. Mais on peut garder

le texte, en admettant avec Stallbaum que touto annonce la suite.

7. Argument contestable. Deux forgerons façonnant le même

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5g KPATYA02 389 b

f\ epEco f\ôttolooOv tlvl KEpKlSa ttolelv, Ttàaaç liev Sel t6

TfjÇ K£pKl$OÇ E)(ELV EÎSoÇ, OÏa S' EKOKJTCÛ KaXXiOTT] TtÉ<f>UKE,

Tauxrjv

ànoSiSovaixf]v (|>uctlv

elç t6Ipyov

EKaaxov;

C

EPM. Nat.

ZQ. Kal TiEpl tôv &XXcov6t) Spyàvoûv ô auTÔç Tpénoç*

to<J>\3aEL EKdaxcp tie(J>uk6c; Spyavov EÉJEupévxa Sel ànoSouvaL

elç IkeÎvo !£ oC av Tïotfjto Ipyov, ou)( oîov av atVuèç

ftouXr]8fl,àXX' oîov ttécJ)Uke. T6 <j>ua£L yàp EKdarcp, âç eoike,

TpÙTtavov tte<J)ukô<;elç t&v

atSrjpov

Sel ETTiaraaSou tlSévol.

EPM. riàvu y£.

Zft. Kal Tfjv cpuaEi KEptclSa EKocaTcp TiEcpUKULav elç £ùXov.

EPM. "EaxL TaOxa.

Zn. <Pûoei yàp r\v EKadTO elSel ûcjjàauaToç, ôbç eolkev, d

EKaCJTn KEpKLÇ, <al T&XXa outcûç.

EPM. Nat.

ZQ. *Ap' oCv, O &ÉXTLQTE, Kal t6EKOCCTTCp (JjUCTEL TT£<|>UKOÇ

SvoLia t6v vouoSéti-jv ekelvov eIç toùç cf>86yyouç Kal t<xç

auXXa6àç Sel lTtlaTaa8aL tlSévol, Kal (îXÉrrovTa *np6ç aôxo

Ikelvo 8 laTLV 5voLia, navra Ta SvéuaTa ttolelv te Kal

TlSEaSaL, eI lleXXel KupLoç stvaL ôvoll<xtcùv BÉTrjç ;eI Se

Lif]

EiçxàçaÔTàç auXXaôàç EKaoroç ô vouoSétiiçTlBrjaLV,

ouSèv

Sel toOto àyvoEÎv ouSè yàp elç tov aiVrSv atSrjpov &Ttaç e

)(aXKEÙç TlSrjaLv, toO auToO IvEKa ttolûùv to auTÔ opyavov

àXX' Suûjç, ecùç âv t^jv auT^v tSÉav ôlttoSlSô, èàv Kalèv aXXo

aLS^pcp, 8uqç op8ôç Iv^el t6 opyavov, làvTE evSocSe eocvte 390 a

lv 3ap6àpoiç tlç TtoLfj. *H yàp ;

b g IpsaS Bt(man. recentiss.) etprimitus W ut uidetur: èpito TWb

||

Set BW et man. recentiss. t : 8f, T j|io oia W : ola BT

||8' BT : Ô'

av W|| rcéçuxe Stallbaum : bcfféxsi ||

C 3 8è W pro ôt] || 4 "ô punc-tis notatum in T

||5 ~6 epyov om. T

||6 reçu/e Stallbaum :

È*JCs?6xS(

|| 7 8eT BWt (man. recentiss.) : 8rj T || 9 iîç ÇuXov 8ei TiÔéW. W||

d 7 ovocia TWb : ôv6;a.a"a B || 9 ëxaaTOç ôvoaaxoôitrj; W ||e 1 àjiçc-

yvoeiv Peipers pro àyvoeîv ||ouoè BW : où T

||aùtôv om. T

|j3 av

om. B y èàv xai èv à'XXto arôr-pco ô|xa>; Stallbaum : èàv Te èv àXXto

c.or|poj 0{xw; codd. eàv te èv (tû aùrto èâv Te èv)aXXio oato; Ast secl.Schanz.

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390 a CRATYLE 60

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Ne jugeras-tu pas ainsi du législateur, aussi

bien du nôtre que de celui des Barbares ? Tant qu'il impri-

mera la forme de nom requise par chaque objet à des syllabesde n'importe quelle nature, ne sera-t-il pas aussi bon

légis-

lateur, chez nous ou partout ailleurs ?

Hermogène. — Parfaitement.

ba

Socrate. — Quel est donc celui qui

du dialecticien.saura reconnaître si la forme convena-

ble de navette a été donnée à n'importequel bois ? celui qui l'a faite, le menuisier, ou celui qui s'en

servira, le tisserand?

Hermogène. — Apparemment, Socrate, ce sera plutôtcelui qui s'en servira.

Socrate. — Qui donc utilisera l'ouvrage du fabricant de

lyres ? N'est-ce pas l'homme le plus capable de diriger le tra-

vail, et

déjuger, l'ouvragefini, s'il est bien fait ou non ?

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Qui est-ce?

Hermogène. — Le joueur de lyre.

Socrate. — Et l'ouvrage du constructeur de navires ?

c Hermogène. — Le pilote.

Socrate. — Et l'ouvrage du législateur? Qui donc saura

par excellence le diriger et juger du travail exécuté, chez

nous comme chez les Barbares? N'est-ce pas celui qui s'en

servira ?

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Celui-là n'est-il donc pas l'homme qui connaît

l'art d'interroger?Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Et en même temps de répondre ?

Hermogène. — Oui.Socrate. — Mais celui qui connaît l'art d'interroger et de

répondre, l'appelles-tu autrement que dialecticien ?

Hermogène. — Non, c'est le nom que je lui donne.

instrument n'emploient pas une matière différente, mais différents

morceaux de la même matière. Il en va autrement du langage. Si les

lettres et les syllabes sont les matériaux dont se forment les mots, il

est clair que avôpw^o; et homo sont faits de matériaux différents

(Horn, 0. L, p. 29-80).

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7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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60 KPATYAOS 390 a

EPM. ridcvu ys.

ZO. OukoOv ourcoç à^i<*>aELÇ Kal t6v vou.o8étt|v tôv te

Iv8<x8e Kal xov âv toÎç 3ap6àpoiç, ecûç âv t6 toO

ôvé^atoçEÎSoq octtoSiSô t6 Ttpoaî^KOv EKaaico ev ÔTtoioiCToOv auXXa-

6aîç, ouSèv X^P 00 vou.o8ÉTr)v EÎvat t6v evScxSef)tov ôttouoCv

aXXo8i;

EPM. ridcvu yE.

ZO. Ttçouv ô yvcoa6^EVoç el xè Ttpocrqicov eÎSoç KEpKiSoç b

ev cVttoicûoOv £,uXco KEÎTai;ô TtoLl

£

|aaç, ô téktcov, f\b XP7)'

aé^Evoç, ôûcf>àvTT)Ç ;

EPM. Eticdç uèv laSIXXov, co ZcbKpatEÇ, t6v )(pr|a6ji£vov.

ZO. Tlç ouv ô t§ toO XupoTTotoO Ipycû \pr\o6\iEvoc; ; Sp'

ou)( oCtoç oç ETrtoTaLTo av Epya£oLA£vcû KàXXiora ETiicrraTEtv

Kal EÎpyaauÉvov yvoir| eït' eu" EÏpyacrrai eitejx/j ;

EPM. llavu yE.

ZO. Ttç ;

EPM. eO KieapiaT/jç.

ZO. Tic; 8è ô tco toO vauTTrjyoO ;

EPM. KuÔEpv^T^ç. c

ZO. Tlç 8è tco toO vou.o8étou Epyci> ETiiaTaT^aEiÉ t" av

<àXXiaxa Kal EipyaaiiEvov KptvEiE Kal ev0<x8e Kal ev toiç

|}ap6àpoiç ; Sps

oôx ScrnEp \pi)OziaLi ;

EPM. Nat.

ZO. *Ap3

oQv oô^ ô Ipcoxav ETuaTa^Evoc; o$t6ç ectiv;

EPM. ridcvu yE.

ZO. eO 8è ocut8ç icai àTTOKplv£a8ai ;

EPM. Nat.

ZO. T6v Se èpcoTav Kal àTtoKplv£a8ai èmcrràiAEVov aXXo

xi ab koXeÎç ¥\SioXektikcjv

;

EPM. Oôk, àXXà toOto.

Testim. : 390 a k oùxouv — 8 aXXoôt Euseb., Praep. euang., n, 6.

il390 a 5 tÔ BTW : xat «cô Euseb. ||b 3 ô om. B

||5 ap' om. W

||

6 2-i'aTaxat tôjàvepya^otxévto B

||

7 yvo^T)av

W||

9tic

8r)

W||

11 8at

b pro SI y O a R TW : 8aî B.

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CRATYLE 61

Socrate. — Ainsi, le travail du charpentier consiste à fa-

briquer le gouvernail sous la direction du pilote, si le gou-vernail doit être bien fait.

Hermogène. — Apparemment.Socrate. — Et celui du législateur, semble-t-il, à établir

le nom sous la direction du dialecticien 1

,s'il veut établir les

noms comme il faut.

Hermogène. — C'est cela.

Socrate. — Il ya donc des chances,

et conclusion. Hermogène, pour que l'établissement dunom ne soit pas, comme tu le crois 2

,une

petite affaire, œuvre de gens médiocres et des premiers ve-

nus. Cratyle a raison de dire 3

que les noms appartiennente naturellement aux choses, et qu'il n'est pas donné à tout le

monde d'être un artisan de noms, mais à celui-là seulement

qui, les yeux fixés sur le nom naturel de chaque objet, est

capable d'en imposer la forme aux lettres et aux syllabes.Hermogène. — Je ne vois pas, Socrate, ce que l'on peut

a opposer à ta thèse. Peut-être toutefois n'est-il pas facile

d'y acquiescer ainsi sur l'heure, et il me semble que je te

croirais davantage si tu me montrais quelle est cette justesse

naturelle du nom dont tu parles.

En quoi consisteSocrate. —

Moi,bienheureux Hermo-

la justesse naturelle gène, je ne parle d'aucune. Tu as

des noms. oublié ce que je disais un peu plus haut4

,

que je n'en savais rien et que j'allaisl'examiner avec toi.

Pour l'instant, tout ce que nous révèle l'examen, à toi et à

moi, c'est que, contrairement à la première opinion, le nom

i .

Socrate ne veut pas dire que les deux fonctions doivent êtrenécessairement distribuées entre deux personnes différentes. Elles

peuvent être unies dans la même;mais c'est à la dialectique que

revient la direction (Horn, o. L, p. 29).

2. Gela résulte de ce que disait Hermogène 384 c d.

3. De ce qu'on doit établir les noms en imposant aux lettres et

aux svllabes la forme de nom la plus appropriée à l'objet, Socrate

conclut que Cratyle a raison de considérer les noms comme justes

par nature et non par l'effet d'une convention (voir 383 a b).4. 384 c

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61 KPATYAOS 390 d

ZO. Téktovoç uèv apa Ipyov êcrrlv Ttoifjaai Tir|SàXiov d

EmaraToOvToç <u6Epvf^Tou, eî jiéXXei icaXov eîvat Tè

TtrjSdXiov.

EPM. <t>atvET<xi.

EH. No^oSéxou Se yc, coç eoikev, Svoua, EmaTàTT)v

I^ovxoç SiaXEKTiK6v âvSpa, ei ^iéXXel koXcûç ôv6^iaxa

6rjoEa8ai.

EPM. ''EaTi TaOxa.

ZO. KivSuveûel apa, q e

Ep^6yEVEÇ, EÎvai ou cpaOXov, coç

où olel, f|toO ôvo^aToç 8ÉCTLÇ, ouSè <|>auXcov àvSpov ouSè

tqv etutu)(6vtcov. Kai KpaTÙXoç àXr]8fj XéyEi Xéycùv c(>ùcei

t« ÔvouaTa sîvai toîç Tipày^aat, Kal ou TtavTa 8r)u.ioupyôv e

cvou.gctcov EÎvat, àXXà ^6vov ekelvov t&v omo6XÉTTOVTa eiç

xèir\ c|>ua£i ovop.a Sv ekocotco ical 8uvàu.£vov auToO t6 eÎSoç

TiSÉvai eïç te Ta ypap.u.aTa Kal Tac; auXXaBàç.

EPM. Ouk ex", S ZcoKpaTEç, cmcoç XP^) Tipôc; a Xéyeiç

EvavTioOaScu. "lacoç u.évtoi ou £<&8i6v ecjtiv oÛTcoçl^atc^vrjc; 391 a

Ti£io8f)vai, àXXà Sokco ^ol qSe âv u.&XXov TtEi8Ea8at aoi, eï

^loi SeIEJemxç fjvTiva cpflçEÎvai ttjv cpuaEi ôp86TT]Ta ové-

u.aToç.

ZO.s

Eycb ^Év, co ^aKapiEe

Epu.6y£V£c;, ouSEu/iav Xéycù,

àXX' ETtEXà8ou y£ gùv êXtyov npéTEpov IXEyov, 8ti ouk

elSeitiv, àXXà OKEi|;olu.r|v u.£Ta aoO. NOv 8è o-kottouu.évoiç

fjfcuv,eu.oI te <al aot, toqoOtov (ièv fjôrj c|)atvETaL Trapà xà

Testim. : d i xsxxovoç txev — e 3 éxaaxio Greg. Gorinth., Walz,Rhet. graeci, vol. 7, p. 1094 ||

d I tÉxtovo; — e 4 auXXaSa; Euseb.,

Praep. euang., 11,6.

d 1 xô 7:otT]aat Euseb.||5 ôvouaxoôéxou Greg. Cor. pro vouoOe'xou

j|6 xô ovoua Greg. Cor. pro ovouaxa

|| 7 xeÔTJceaôa: Euseb. et Greg.Cor. H 9 où çauXov tiç elvai, ai 'Ecuoyéveç Greg. Cor.

||10 oXaùpwv

W pro çaùXcov j|1 1 twv xuy dvxcov Greg. Cor.

|[e 3 ov ovoaa W

||

xd te T y 4 xa xe Euseb. pro xe xà||391 a 2 àXXà ooxto aot a>8e av

aàXXov re-'ôeaGat ao: el' ixo 1. Hirschig: àXXà — raiOeaôaL om. B àXXà

ooxw uoi u>8e av uaXXov zeiôrJaeaOa: ae el' uoi b àXXà ÔoxaS(j.o:

a>ô'e av

aaXXov xi'6ea6ai(î:£i6eaQaî

exemend.)

oe el' ixot

TàXXà Boxto

ptotoJ8e

xv aaXXov 7ïeia0TÎaec6ai el' aot W ||6 ye wv ôXt'yov BW : ôXi'yov yàp T.

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391 a CRATYLE 62

semble posséder une certaine justesse naturelle, et qu'il

b n'appartient pas à tout le monde de savoir l'appliquercomme il faut à n'importe quel objet. N'est-ce pas ?

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Il nous faut donc chercher ensuite, si tu

tiens à le savoir, en quoi peut à son tour consister cette jus-tesse.

Hermogène. — Mais certainement, je tiens à le savoir.

Socrate. — Eh bien, examine-le.

Hermogène. — Comment faut-il l'examiner ?

Socrate. — La méthode la plus juste, mon camarade,est de suivre les savants, en leur payant de l'argent et en

leur rendant grâces. Ceux-là, ce sont les sophistes, à qui ton

c frère Callias1 a versé beaucoup d'argent, d'où sa réputation

de sagesse. Mais puisque tu n'as pas la disposition de ton

patrimoine, il te faut implorer ton frère, et le prier de t'en-

seigner en quoi consiste la justesse en ces matières, telle

qu'ill'a

apprisede

Protagoras.Hermogène. — 11 serait absurde à moi, Socrate, d'en

faire la prière, si, tout en rejetant absolument la Vérité 2 de

Protagoras, j'accueillais comme ayant quelque valeur les

propos tenus par une vérité de cette sorte.

Socrate. — Eh bien, s'ils ne te satis-

j

m™. font pas non plus, c'est Homère et les

d autres poètes qu'il faut prendre pourmaîtres.

Hermogène. — Et que dit Homère, Socrate, au sujet des

noms ? En quel endroit ?

Socrate. — En maint endroit. Les plus importants et

les plus beaux sont ceux où il distingue pour les mêmes

objets les noms donnés par les hommes et par les dieux. Ne

trouves-tu pas important et admirable ce qu'il y dit de la

justesse des noms ? Car il est clair que les dieux donnent

e avec justesse ces noms qui sont les noms naturels;ne crois-tu

pas ?

1. Voir YApologie, 20 a sq. C'est dans la maison de Callias qu'a

lieu l'entretien du Protagoras. Sa richesse et ses libéralités faisaient

de lui la

proiedes

sophisteset des

parasites.a. Hermogène veut parler de l'écrit intitulé 'AXt-Osioc, où Prota-

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62 KPATYAOS 391

Tip6TEpa, cpùaci té xiva 6p86TT|xa exov E^vaL T0 ovotia Kal

ou Travroç àvSpàç ETiLaTaaSaL KaXcSç aôiô TrpayLiaTL ôt&oOv b

BÉaBai-f)

otf;

EPM. nàvu yc.

ZO. OukoOv to lletà toOto xpf) £r|T£Îv, EÏTTEp ettlSulieÎç

EtSévai, fJTLÇ ttot' aS Icjtlv auxoOf| ôpSoTîjç.

EPM. 'AXXàLifjv

ettl8uligo y£ etSévat.

ZQ. Zk6ttel toIvuv.

EPM. nôç oSv XP^I cjkottelv;

Zft.s

Op8oTaTr| lièv tt^ç aKÉLpEcoç, S âxaîpE, lletà toùv

EmaT<xu.Évcov, )(piJ

|tJia

'ra ekelvolç TEÀoOvTa Kal )>âpi.Taç Kaxa-

tlSéllevov. Etal SèoSxoL ol aocjHOTal, oîcrnEp Kal ôà8EÀ<|><5ç

crou KaXXlaç TroXXà TEXÉaaç xprjLiaTa aoc|>6ç Sokel EÎvat. C

'EttelSi*) Se ouk EyKpaTfjç eT tov *naTp<*>G>v, XtnapEiv )(pf]

tov à8EX(|)6v Kal 6£Îa8ai auToG SiSà^ai ge xf)v o*p8<STr|Ta

TTEpl tcov toioùtqv fjv ELiaSEv napà npcoxayopou.

EPM. ^Atottoç llevtocvEÏrj liou, o ZobKpaTEç, t^ SÉrjaLÇ,

el Tf)v u.èv3

AXr]8ELav t^jv npcoTaydpou SXooç ouk à*rro8É-

)(ou.aL, xà 8èxf] ToiauTr| àXrjSELa pT}8ÉVTa àyaTrc&rjv &q tou

a£,ta.

ZO. 'AXXS

elLif]

a3 a£ xauTa àpéaKEL, nap' 'OjJi^pou \pi)

Liav8àvELV Kal napà tqv aXXcov tuoli"|tôv.d

EPM. Kal tI XéyEL, S ZoKpaTEÇ, "O^poç TtEpl ôvoLia-

tcûv, Kal-noO;

ZO. noXXaxoO* LLÉyLaxa 8è Kal KaXXLaxa ev oîç Slop'll^el

ettI tolç auTOÎç a te ot avSpoTTOL ôvoLLaxa KaXoOaL Kal ot

8eoI. *H ouk olel auTÔv Liéya tl Kal 8au(iàaLov XéyELV lv

toùtolc; TTEpl ôvoLtàxcûv ôp86Tr|To<; ; 8f]Xov yàp 8f]otl ot yE

8eoI auTà KaXoOaLv irpôç ôp86xr|Ta cmEp ecttl ^aELÔv^LiaTa*

f\au oôk olel

;6

a n

a 9 Tzpdispov W ]|b i /.aXwç om. T

|| rpày|iaTt TWb : ^pay^a Xl

B||

5 au èa'tv aùxou B : au aùxou èaxiv W àv fotty aùxou TJjC 9 au

ce -auTa BT : xauxa aoc W ||d 6 6auuaacov BT : -LiaaTdv W.

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391 e CRATYLE 63

Hermogène. — Je suis persuadé au contraire que, s'ils

donnent des noms, ils les donnent justes. Mais de quel genresont ceux dont tu parles ?

Socrate. — Ne sais-tu pas que, parlant du fleuve deTroie qui livrait un combat singulier à Héphaistos, il

dit 1:

Les dieux le nomment Xanthe et les hommes Scamandre ?

Hermogène. — Si.

392a Socrate. — Et alors? IS'est-il pas, à ton avis, précieux

de connaître en quoi l'appellation de Xanthe donnée à cefleuve peut être plus juste que celle de Scamandre ? Prenons,si tu préfères, l'oiseau dont le poète dit 2

:

Les dieux rappellent yaXx:ç ;les humains xûix-voiç.

Trouves-tu négligeable d'apprendre combien l'appellation

de yaÀxtc est plus juste que celle de xûpivStç donnée au

même oiseau ? Et de mêmepour

les noms de Batiée 3et de

b Myriné, et pour tant d'autres, cbez ce poète et d'autres en-

core ? Mais ceux-là, il est peut-être au-dessus de mes forces

et des tiennes d'en découvrir l'explication ; Scamandrios et

Astyanax sont plus à la portée de l'intelligence humaine, ce

me semble, et il est plus facile de discerner dans les noms

qu'Homère donne au fils d'Hector quelle justesse il leur at-

tribue. Tu connais sans doute les vers où se trouvent ceux

dont je parle.

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Quel est à ton avis, des noms donnés à

l'enfant, celui qu'Homère regarde comme le plus juste :

Astyanax, ou Scamandrios ?

c Hermogène. — Je ne puis le dire.

Socrate. — Examine ainsi le problème. Si l'on te de-

mandait : les noms les plus justes sont-ils, à ton avis, donnés

par les plus sensés ou les plus insensés ?

goras exposait sa thèse de l'homme-mesure. Cf. Théétète, 162 a,

170 e, 171 c. Plus haut (386 c) àXr^6eia semble déjà y faire allusion.

1. Iliade, XX, 74.

2. Iliade, XXIV, 291. Il s'agit d'une sorte de hibou.

3. Tertre escarpé qui, suivant l'Iliade, s'élevait devant Troie, à

l'écart dans la plaine:

« Les hommes l'appellent Batiée ; les immor-tels, le tombeau de la bondissante Myriné » (Iliade, II, 8i3-8i4).

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63 KPATYAOS 391 e

EPM. ES oîSafcièv

oSv eyoûye, EÏnep KaXoOaiv, 8Ti8p86ùc;

KaXoOaiv. 'AXXà ttoî<x xaOxa XÉyEiç ;

Z£l. Ouk oîa8a Stinspl

toOttotcc^oO

toO IvTfl Tpoia,

8ç ly.ovou.axEi tSe

H<|>aiaTCù,a 8v HàvSov », <t>r|al,

« koXé-

ouat 8eot, avSpEÇ Se ZK<xu.av8pov »;

EPM. 'EyoùyE.

ZO. Tl ouv8f| ;

ouk oïei toOto ae^vdv tl EÎvai yvcovai, 392 a

8ttt] ttotè ôp8ôç ttys.iekeÎvov tôv Tioxa^àv ZdvSov koXeîv

u.&XXovf\ Zicà^avSpov

;eI Se

(SouXel, TtEpl t?\ç opviScç fjv

XÉyEt 8ti

XocXiclSa KLKXrjaKoucru 8eoi, avSpsç Se kûuavSiv,

<|>aOXov fjyEÎt6 u.a8T]u.a oacp Sp9oT£p6v Icrn KaXEÎa8ai ^ocXkIc;

kuu.Iv8l8oç tû aÙTQ opvÉ© ; f) tt^v BaTiEiàv te kocI Mupl-

vr)V,Kal aXXa noXXà Kal toutou toO TroirjToO Kal aXXov

;b

'AXXà tocOtoi u.iv Xaaq u.ei£cd eqtIv f) Kax' eu.e Kal aè e£eu-

pEÎv S Se ZKau.av8pi6ç te Kal S 'AaxuàvaE, avSpcomvoTEpov

SiaaKÉi^aaSai., ôbç è\xoï SokeÎ, Kal £&ov, & (pr|aiv ôv6u.axa

EÎvat TCÛ TOO "EKTOpOÇ uei, xlva TTOTÈ XÉyEL TT^V Ôp86lT|Ta

auxcov. Ota8a yàp 8r|Trou TaOTa Taetit]

ev oîç eveœtiv a

èy<a Xéyco.

EPM. nàvu yE.

ZO. nàTEpov o3v oïei °Ou.r)pov SpSàxEpov rjy£Îa8ai xéov

ovou.octcdv KEÎaSai tcù TiaiSl, t6v « 'AaxuàvaKTa »f)

x8v

« ZKau.av8pi.ov »;

EPM. Ouk ex» XéyEiv. C

ZO. *08ESf)

aK6TT£l.. Eï TIÇ EpOt/u6 <7E TlétEpOV OtEl

Sp86xEpov KaXEtv Ta 8v6u.axa toùç <f>poviu.QTÉpouç fj toùç

àcppovEaTÉpouç ;

Testim. : 391 e 5 ov Sav0ov — 6 Sxajxavôfov II., 20, 74 [|a 5 yaÀ-

x:8a — xâfUV&V IL, i4, 291.

392 a 5 xixXVjoxouat B || 7 xujxivSioçW

|| yj ttjv BT : xal xr;v W j|

b 1 itol à'ÀXa BT :r]

xai aXXa W||

2 èui xal TW :

Ijiite xal B

j|

3 axaaavôpto; Wb : axâfxavôpdî BT ||4 paov BW: potôtov

T|| çtJjcv W.

V. 2. — 6

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392 c CRATYLE 64

Hermogène. — Évidemment je répondrais : par les plussensés.

Socrate. — Sont-ce donc dans les cités les femmes ou

les hommes qui te paraissent les plus sensés, pour parler dusexe en général ?

Hermogène. — Les hommes.

Socrate. — Or tu sais que, suivant Homère, le jeune en-

tl fant d'Hector était appelé Astyanax par les Troyens, et quele nom de Scamandrios lui était évidemment donné par les

femmes, puisque ce sont les hommes qui l'appelaient

Astyanax*

?

Hermogène. — Il le semble.

Socrate. — Et Homère, lui aussi, considérait les Troyenscomme plus sages que leurs femmes ?

Hermogène. — C'est mon avis.

Socrate. — Par suite, le nom d'Astyanax donné à l'en-

fant lui semblait plus juste que celui de Scamandrios ?

Hermogène. — Apparemment.Socrate. — Examine donc pour quelle raison. Mais lui-

même ne nous en indique-t-il pas le pourquoi à merveille ?

Il dit 2:

e Car, seul, il défendait leur ville et leurs grands mars.

Voilà pourquoi, ce semble, il est juste d'appeler le fils du

sauveur YAstyanax

de ce

queson

pèresauvait, suivant

Homère.

Hermogène. — Il me le semble.

Socrate. — Mais enfin, pour quelle raison ? Car moi-

même je ne le comprends pas encore, Hermogène ;et toi, le

comprends-tu ?

Hermogène. — Non, par Zeus !

393 a Socrate. — Mais, mon bon, Hector lui aussi n'a-t-il

pas reçu ce nom d'Homère lui-même ?

Baiièe veut dire : la colline des ronces (ou des mûres). Myriné, épo-

n\me de la ville éolienne du même nom, était une Amazone tombée

devant Troie, suivant la légende.

i. Sur la fantaisie de ce raisonnement, où Platon néglige l'indi-

cation donnée par l'Iliade, VI, 4oa-4o3, voir la Notice, p. 16.

a. Iliade, XXII, 507. Le vers se lit dans les plaintes d'Andro-

maque. Mais le texte homérique donne ïp'jso et non ïp-j~o (Andro-maque s'adresse à Hector), et 7:uXaç au lieu de -dXiv.

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64 KPATTAOS 392 c

EPM. Af^Xov Sf)8ti toùç (ppovincùTÉpouç cpotlrjv &v.

ZQ. néTepov oSv al yuvaÎKEÇ èv Taîç Tt6Xcaiv c|>povi-

u.coT£pal aot SokoOoiv eÎvocif)

ol avSpEÇ, coç tS 8X0v eItteÎv

yÉvoç ;

EPM. Ot SvSpEÇ.

ZQ. OukoOv oîaGa oti "Ofcirjpoç tô tiouSIov x6 toO

"Etcxopoç ûttS tcov Tpcocov cprjalv KaX£Îa8ai 'AaxuàvaKxa, d

ZKajjiàvSpLov Se Sf^Xov 8ti ôtt6 tcov yuvauccov, ETiEiSf) oî yE

oîvSpEÇ ocôtov 'AoTuàvctKTa ekcxXouv;

EPM. "Eolké yE.

Zft. OukoOv Kale,

0^r|poçToùçTpcùaç oocfxoTÉpouç fjyEÎTo

f) xàç yuvaÎKocc; ocutûv;

EPM. Oî^ca lycoyE.

ZQ. T6v « 'AaTuàvaKTa » apa SpBÔTEpov &eto keîoBoci

tco tiouSIf)

tôv « ZKau.ctvSpiov »;

EPM. «ÊCUVETOCl.

IQ. Zkottcou.£v Sf)Sià tI tiote. "H ocutoç fj^îv k<xXXicttoc

ûcprjyEÎTai to Si6ti; cf>r)alv ycxp*

oîoç ydcp acpiv Iputo tt6Xlv koù teI^ec* jiaKpdc. e

Aià tcxOtoc Sf), ccç eoikev, opBcoc; I)(el kocXeÎv t6v toO ccùTfjpoc;

ûèv 'AaTuàvaKTa toutou 8 ectcù£ev ô TtaTfjp ccôtoO, <£çcf>r)cnv

°0^poç.EPM. <J>cuvetcxI u.oi.

Zft. TtSf)

tiote;ou ydcp tico ouS

s

ocutoç lycoyE iiavBàvcù,

co 'Ep^éyEVEÇ* où Se u.av8àvEtç ;

EPM. Ma Al' ouk lycoyE.

IQ.S

AXX

S

oipa, coyaBÉ, Kal tô "EKTopt auTOÇ IBeto t6 393 a

ovo^cc "Ou-rjpoc; ;

Testim. : 392 e i cuo;—

uaxpà Ji\, 22, 507.

C 6 sv xaï; ^dÀsaiv aï yuvaïxeçW ||d 2 ye Ven. i85 (man. rec): Tg

H 3 IxàXouv TWb : èxaXo%7îv B||

5 xai BT : au xaî W|| TjysÏTO

an d

elvat

W118 oiexat

W||

11t]Wb :

vjBT

||

12 8ta tï

W||

e i

ipvtzoW II 7 au hï T et in marg. b : où5ï B où 5' au W.

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393 a CRATYLE 65

Hermogène. — Et alors ?

Socrate. — Eh bien, à mon avis, celui-là est voisin d'As/va-

nax, et ces noms ont l'air grec1

. Anax et Hector ont à peu

près le même sens, indiquant que l'un et l'autre sont des

noms de roi. Car ce dont on est le chef (anax), on en est

sans doute aussi le détenteur (hectôr)2

;il est clair en effet

b qu'on en est maître, qu'on le possède et le détient (èkhèi). Oubien trouves-tu que j'ai tort, et me fais-je illusion à moi-

même, en croyant saisir comme une trace de la penséed'Homère sur la justesse des noms ?

Hermogène. — Non, par Zeus!

ce n'est pas ton cas, il mesemble, et peut-être en saisis- tu quelqu'une.

Le nom Socrate. — On est assurément en

et la génération droit, à mon avis, d'appeler lion le pe-naturelle. tit d'un lion, et cheval le petit d'un

cheval 3. Je ne parle pas du cas où, par une sorte de mons-

truosité, un cheval donne naissance à autre chose qu'unC cheval

; j'entends ce qui est le fruit naturel de la race : si

un cheval donne le jour, contre nature, à ce qui est le pro-duit naturel d'un taureau, ce n'est pas un poulain qu'il faut

l'appeler, mais un veau;

et si d'une créature humaine, je

suppose, naît autre chose que le rejeton d'un homme, le

nom d'homme ne doit pas davantage être donné à ce reje-

ton;de même

pourles arbres et

pour

tout le reste. Nepar-

tages-tu pas mon avis ?

Hermogène. — Je le partage.

Socrate. — Tu as raison : surveille-moi de peur que je

ne t'induise en erreur. C'est en effet d'après le même prin-

,d cipe que le rejeton né d'un roi doit porter le nom de roi.

Que le même sens s'exprime par telles ou telles syllabes, peu

importe; qu'une lettre soit ajoutée ou retranchée, cela non

plus n'a aucune importance, tant que domine l'essence de

l'objet manifestée dans le nom.

i. Quoique portés par des Barbares.

2. L'étymologie est exacte. "Extwp est donné comme épithète à

Zeus chez Sappho (Bergk, Poetae lyrici graeci, i£g [107], Hésychius) ;

chez Lycophron (v. 100) et Lucien (Lexiphane, i5), le mot est pris

au sens d'ancre.

3. Sur la valeur des considérations qui suivent, voir la Notice,

p. 16.

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65 KPATTAOS 393 a

EPM. Tt ttj ;

ZO. "Otl u.01 SokeÎ Kal toOto TrapaTiX/jauév ti eÎvcci tco

'AcruuavaKTi, Kal eoikev 'EXXtjvlkolç xaOTa Ta ôv<5u.aTa.

cO yàp « avo^ » Kal o « EKTcop » oy^Bôv ti TaÛTOv aT}u.a'iv£t,

ftaaiXiKa àu.c|>0TEpa EÎvaiTa êv6u.aTa # oS yàp av tiç « ava£»

f|,Kal « Eicxcop » Srjirou laTiv toutou '

SfjXov yàp Sti KpaTEÎ

te auToO <at KÉKTrjTai Kal £X EL auT6. *H ouSév aoi 8okô b

XÉysiv, àXXà XavSàvco Kal êu.auTèv oî6u.£v6ç tlvoç ôScmEp

ï)(vouç EcpàTtTEaSai t^ç 'Ou.ï'jpou BôE^q TtEpl ôvou.aTcov

op86TT]Toç ;

EPM. Ma Al' ou cû yE, wç iu.ol SokeÎç, àXXà ïcjcùç tou

ECfXXTTTEl.

ZO. AixauSv yé toi ecjtiv, œç elioI <|>alvETai, t6v Xeovtoç

EKyovov XéovTa kocXeiv Kal t6v ittttou EKyovov Thrrnov. OO ti

XÉyco èàv ôoTtEp TÉpaç yévrjTai ê£ ïttttou aXXo tif) ïtttcoç,

àXX' o âvfjtoO ysvouç EKyovov Tf]v <|>ùaiv, toOto XÉycù* C

làv fioèç EKyovov cpuaEi ïttttoç Trapà <|>uaiv TÉKrj [u.6a)(ov],

ou ttqXov KXrjTÉov, àXXà u-oaxov oû8' av èE, avBp&nou oîu.ai

u.^)to avBp&nou EKyovov yÉvrjTai, [àXX' 8 av] to EKyovov

av8pcùTioç KXrjTÉoç* Kal xà SévSpa waauTcoc; Kal TaXXa

aTtavTa'fj

ou ÉJuvSokeî ;

EPM. ZuvSokel.

ZO. KaXcoç Aéveiç* <|>uXaTT£ yàp d.eu.r| Ttr| TrapaKpoùaco-

u.al oe. KaTà yàp tôv auTov X6yov k&v ek (SaaiXÉcdç ylyvT)-

Tal tl EKyovov, fraaiXEÙç kX^téoç' eu 5è ev ÉTÉpaiç auXXa- d

6aîç fjev ETÉpaiç t6 auTÔ ar)u.atvEi, ouSèv TTp6cyu.a- ouS

s

eI

TrpoaKEiTal Tt YpàLiu.a fj à<f>rjpr|Tai, ouSèv ouSètoOto, Icoçav

èyKpaTi^c; ?\ fjouala toO Ttpàyu.aToc; 8r|Xouu.ÉvT] ev tg>

OVÔLiaTl.

393 a 5 xauxa xà BWt : xaiïxa T|| 7 (3acr.Xixà

—ovoptaTa secl.

Stallbaum||b I xe aùxou BT : xe XOUXOU W

|| 7 aiç [j.otW

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Vind. 3i : o5 av||

2 jaôV/ov secl. Ast.|| 4 SÂX* èàv BWt : à'XXo

èàv T secl. Peipers ||5 xàXXa a7:avxa T : 7:oXXà à^av~a B xà àXXa

r.dvza W||

9x&v BT : za\ èàv

W||

d 3y]TW et in

marg.b : où8*

B oùô*' d b.

Page 82: Platon, 5.2 Cratyle

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393 d GRATYLE 66

Hermogène. — Qu'entends-tu par là ?

Socrate. — Rien de compliqué. Les éléments, par exemple,tu sais que nous les désignons par des noms, et non par les

éléments eux-mêmes, à l'exception de quatre : l'e, l'u, l'oetl'ô.

e Les autres, voyelles et consonnes 1

,tu sais que nous y ajou-

tons, pour les nommer, d'autres lettres2

. Mais, tant que nous

y exprimons clairement la valeur de l'élément, il est juste de

donner à celui-ci le nom qui le désignera clairement pournous. Soit, par exemple, le bêta. Tu vois que l'addition de

l'ê, du t et de l'a, n'a rien gâté et n'empêche point de mani-

fester la nature de cet élément à l'aide du nom tout entier,

comme le voulait le législateur ;tant il a su donner aux

lettres les noms convenables !

Hermogène. — Tu me parais avoir raison.

394a Socrate. — Et du roi, n'en dira-t-on pas autant?

D'un roi naîtra un roi, d'un homme bon un bon, d'un bel

homme un beau, et ainsi de tout le reste; chaque race don-

nera naissance à un rejeton semblable, sauf en cas de mons-truosité

;il faut donc employer les mêmes noms. Mais on

peut en varier la forme au moyen des syllabes, de sorte quele profane pourrait s'imaginer qu'ils diffèrent, bien qu'ils

soient les mêmes. Les drogues des médecins, extérieurement

variées par la couleur ou l'odeur, nous paraissent diffé-

b rentes, tout en étant les mêmes; mais le médecin, qui en

considère la

vertu, yvoit les mêmes remèdes, sans s'en

laisser imposer par les accessoires. Il en est sans doute ainsi

de celui qui a la science des noms : il en examine la valeur,

et ne s'en laisse pas imposer si une lettre a été ajoutée, dépla-

cée ou retranchée, ou même si c'est par des lettres en-

tièrement différentes que s'exprime la valeur du nom.

Gomme nous le disions à l'instant, Astyanax et Hector n'ont

c d'autre lettre commune que le t, et pourtant leur sens est

le même. Et le nom d'Archépolis , quelle lettre a-t-il en

i. Socrate ne distingue ici que deux catégories d'éléments. Plus

loin, ^24 c, il en indiquera une troisième : a ceux qui, sans être

des voyelles, ne sont pourtant pas des muettes ».

2. Les quatre voyelles mentionnées sont les seules lettres de

l'alphabet grec qui soient désignées par le son qu'elles représentent.

Les autres portent un nom dont la lettre elle-même ne forme que

l'initiale. Les dénominations d'epsilon, upsilon, oméga, omicron,

datent de l'époque byzantine.

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66 KPATYAOS 393 d

EPM. nôç toOto XÉyeLÇ ;

ZO. OuSèv ttolkiXov, àXX' dScrnep tSv axoL^cicùv oîo8a

8tl ôvcSfciaTa XÉyo^sv, àXX3

ouk aÔTa Ta axoi^Eia, TrXf|v

TETTttpCOV, ToO E Kal ToO U KOtl ToO O Kal ToO ©' TOIÇ S'

âXXoiç cpcov/jEaiTE <al àcf>Qvoic; ota8a 8tl ttepitlSevtec; aXXa 6

ypà^aTa XÉyou-Ev, ôv6u.aTa '^oloOvT£c;• àXX' eqç av aôxoO

SrjXoujiÉvrjv xfjv 8uvau.iv evti8cou.ev, ôp8éùç e)(el ekeîvo t6

5vou.a koXeîv S auxèf)u.îv 8r)Xcoa£i. OTov t8 ce

(SfJToc»* ope^ç

8tl toOr\

Kal toO t Kal toO a ttpoctteSévtcùv ouSèv eXu-

TiT]a£v, coctteu.f) oô)(l xf]v ekeIvou toO otol)(eIou cfïûaiv

SrjXôaat 8Xco t& Ôvôu.aTi oS e6ouXeto Ô vou.o8ÉTr)Ç' oôtcoç

f)TttaTf)8r| KaXoç 8Éa8ai toîç ypàu.u.aai Ta ôvou.aTa.

EPM. 'AXr|8fï u.oi SokeÎç XÉyEiv.

T.C1. OôkoOv Kal TiEpl lîaCTiXÉcoc; ô aÔToç X6yo<; ;"Eaxai 394 a

yàp ttote ek (iaaiXicûç liaaiXEUç, Kal l£ àyaSoO àyaSéç, Kal

ek KaXoO KaX6ç, KalT&XXa TTàvxa oOtcûç, e£ ekocotou yévouc;

ETEpov toioOtov EKyovov, èàvpi) xépac; y^Lyv^Tau* kXtjtéov

Sf]Tauxà ôv6u.aTa. rioïKlXXEiv 8s ec^ecjti Taîç auXXaôaîç,

©ctte BàBfOLi av Tcp ISuûtikoûc; e)(ovtl ETEpa EÎvai àXX^Xov Ta

aÔTa ovTa" coaTtEp f\\ilvTa tqv taTpûàv c|>dpu.aKa xpou.aaiv

f[ ocru.aîc; TtETiOLKiX^Éva aXXa cpalvsTai Ta aÔTa ovTa, tcS Se

yE taTpû, cxte ttjv Suvauiv tSv cJ>apu.dKQV aKOTrouu.Évcp, Ta b

aÔTa cjjalvETai, Kal ouk EKTiX^TTETai unô tôv TtpoaévTCov.

OOtco 8è lacùç Kal ô Emcnrà^EVoc; Ttspl ovou.aTCûv Tfjv Suva-

U.IV aÛTQV CTKOTIEÎ, Kal OÛK EKTtXrjTTETai El TL TTpOCJKElTai

ypàu.u.a r) ^ETaKEiTaL J\ àc|>/|pr|Tai, f\Kal ev aXXoiç navTd-

aaatv ypàu.u.aalv eotivf\

toO ôv<Su.aTo<; 8uvau.iç. "OanEp S

vOv 8f) âXÉyo^EV, c< 'Ac7Tudva£ » te Kal ce "EKTeop » ouSèv

tôv auTcov ypau.u.àTcov I)(el tiX^v toO t, àXX' 8u.cùç TauTOv C

OT](ialvEL. Kal a 'Ap^ÉTtoXlç » y£ tSv u.èv ypau.u.dTcov tI

e i ^poaTtôe'vteç Naber pro T^sptxtôévTeç ||4 xaXeïv o T : xaxsîvo BW

|| prj-ca TW : f B ||5 tou f BW: xou xaCf T

||394 a 5 Taùxà Ven.

i85 : -auxa|jrotxiXXstv xs W

||8

r]B : xaî TW

j|xà aùxà BT : xauxa

W |j b 2 Tîooadvxcov TW : -idvxwv B ||c i x BW : xau T.

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394 c CRATYLE 67

commun avec eux ? Cependant ilsignifie la même chose, et il y

en a bien d'autres qui n'ont d'autre sens que celui de « roi ».

D'autres, à leur tour, signifient « chef d'armée », comme

Agis, Polémarchos et Eupolémos; d'autres sont des noms de

médecin, Iatroclès et Acésimbrotos l;

et sans doute en trou-

verions-nous une foule qui, tout en rendant un son différent

par leurs syllabes et leurs lettres, disent, pour ce qui est de

la valeur, la même chose. Est-ce ton avis, oui ou non ?

d Hermogène. — Absolument.

Socrate. — Les êtres dont la génération est conforme à

la nature doivent donc recevoir les mêmes noms.

Hermogène. — Parfaitement.

Le nom Socrate. — Et les êtres contre nature,

et la génération qui naissent sous la forme de monstres?contre nature. par exemple, quand un homme bon et

pieux donne naissance à un impie, n'en est-il pas comme du

cas précédent, où le produit d'un taureau, même né d'un

cheval, devait évidemment porter, non pas le nom de son père,

mais celui de la race dont il était 2?

Hermogène. — Parfaitement,

e Socrate. — L'impie né de l'homme pieux, il faut aussi,

par conséquent, l'appeler par le nom de son genre.

Hermogène. — C'est cela.

Socrate. — Non pas Théophile, semble-t-il, ni Mnésithéos 3,

ni d'aucun nom de cette sorte, mais d'un qui signifie le

contraire, si l'on veut que les noms tombent juste.

Hermogène. — Rien de plus vrai, Socrate.

Socrate. — C'est ainsi qu' Oreste, Hermogène, risqued'être justement nommé, qu'il ait dû ce nom au hasard ou à

quelque poète, car sa nature farouche, son caractère sauvageet montagnard (oréinos) se manifestent par son nom.

395 a Hermogène. — C'est vraisemblable, Socrate.

1. Archépolis veut dire chej de la cité; Agis, conducteur, chej ;

Polémarchos, chef de guerre ; Eupolémos, bon (ou heureux) à la guerre.

Iatroclès signifie glorieux comme médecin, et Acésimbrotos, qui guérit

les mortels.

2. On attendrait quelque chose comme xat Tourev toj ysvou; Set

e/etv ttjv btawupiav. La phrase reste en l'air. Mais plus loin Socrate

la complète en disant : xcû :û ex tou euasSouç, etc.

3. Théophile signifie ami de Dieu; Mnésithéos, qui pense à Dieu.

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67 KPATTAOS 394 c

etukoivcûveî; SrjXoî 5e ou.cùç to (xôt6' Kal &XXa TtoXXà èariv

S ouSêv àXX3

fj[5aai.XÉa arju-alvEi* Kal aXXa ye a3 aTpaxrjyév,

oTov « *Ayiç » Kal a r"loXéu.ap)(oç » Kal « Eutn5Xe^oç ». Kal

taxpiKà y£ ETEpa, a 'laxpoKXf^c; » Kal « 'AKEalu-BpoToç »*

Kal ETEpa av ïaoç au)(và Eupoi^iEV Talc u.èv CTuXXa6aîç Kal

toîç ypa^aai SiacfxovoOvTa, TrjSe 8uvau.£i xaÔTov (pSEyyo-

jiEva. <t>alvETai otSxoç î^0$

;

EPM. nàvu u.èv o8v. d

EH. Toîç u.èv Sf]Kaxà <|>ùaiv yLyvo^ÉvoLÇ là aûxà

àTioSoTÉov ôv6u.axa.

EPM. nàvu y£.

Zft. Tt 8è xoîç napà (f>uaiv,oî av lv xépaxoç eïSei

yévcùvxai ;oTov Bxav eE, àvSpbç àyaôoO Kal GeocjeBoOç

àaEÔf)ç yÉvrjxai, Sp' ou)( gSottep lv xoîç I^TrpoaSEV, kôîv

"tttioç fioèç iKyovov tekt], ou xoO xek6vxoç S^ttou ISei xf]v

£Tï<avuu.lav e^elv, àXXà toC yÉvouç oueït] ;

EPM. nàvu y£.

Zft. Kal x£> ek toO euoeBoOç apa yEvou.Évcp occeBeÎ to e

toO yÉvouç ovofcia oittoSoxéov.

EPM. *Eaxi xaOxa.

ZO. Où « Oe6<JhXov », obç eoikev, ouSè « MvrjalBEOv »

oûSè xéov xoioùxcûv oùSÉv, àXX' 8 xi xàvavxla xoùxoiç ar]^al-

vel, èàv-nEp xfjç opBdxrjxoç xuy)(àvr] xà ôv<5u.axa.

EPM. riavx6ç y£ u.SXXov, co ZoKpaxEÇ.

ZO. "OoriEp y£ Kal ô a 'OpÉaxrjç », S 'Epu-àyEVEÇ, klv-

Suveuel ôpBoàç ^XELV >E*T£ TL<» ^XT ^0£TO auxS t6 ovou.a

eïte KalTtoir)xf]çxiç, x6 Bt^plcoSeç xfjç cj>uaECùc;Kal xô aypiov

aÛToO Kal tô ôpELvèv evSeikvù^levoç xcp Ôv6u.axi.

EPM. <J>alvExai ouxcoç, o ZcoKpaxEÇ. 395a

C 7 cupotsv W |Jd 5 8è B : Soti Tb ft W

||e i àae6et où tô W

||

2-3 àroBoT&v . eoxt ToSta BT : àxoiïoxiov èstev W|j 9 ~u/*) T :

r-Syr, B tj/yj (sic) W II395 a 1 ojtioç

— 4 saivsTai om. W in

marg. add.

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395 a GRATYLE 68

Socrate. — Son père aussi a, semble-t-il, un nomconforme à sa nature.

Hermogène. — Apparemment.Socrate. — Agamemnon, en effet, a chance de désigner

un homme capable d'aller jusqu'au bout de ses décisions

avec ténacité, en accomplissant ses projets à force de vail-

lance. La preuve en est dans le long séjour et la ténacité de

son armée devant Troie. Que cet homme soit admirable

b (agastos) par sa persévérance (épimonê), c'est ce qu'indique le

nom à'Agamemnon. Peut-être A trée, lui aussi, est-il justement

nommé. Car le meurtre de Chrysippe  

commis par lui, sa

conduite si cruelle envers Thyeste2

,tous ces actes sont nui-

sibles et funestes (atêra) pour la vertu. Le nom qui le dési-

gne est légèrement détourné et obscurci, de sorte qu'il ne

révèle pas à tout le monde la nature du personnage ;mais

pour les connnaisseurs en onomastique, Atrèe a un sens

assez clair : aussi bien au sens à'inflexible (atéïrès) que d'm-

c trépide (atrestos) et de funeste (atêros), de toute manière sonnom est juste. Pélops lui-même me paraît avoir reçu un

nom approprié, car ce nom signifie [que] celui qui ne voit

que Vimmédiat (pelas, opsis) [mérite cette appellation].

Hermogène. — Comment cela ?

Socrate. — La légende, par exemple, montre cet homme,dans le meurtre de Myrtilos, incapable de rien pressentir et

prévoirdu sort futur de toute sa

race,de l'étendue des mal-

ci heurs dont il était en train de l'accabler;

il ne voyait quel'immédiat et l'instant présent

— c'est-à-dire auprès de lui

(pelas)—

quand il recherchait à tout prix l'union d'Hippo-damie 3

. Pour Tantale, tout le monde estimera que son nomest juste et naturel, si ce qu'on dit de lui est vrai.

i. Chrysippe, fils de Pélops, passait pour avoir été tué par Atrée

et Thyeste, ses frères, jaloux de l'affection que lui portait son père.2. Thyeste, ayant séduit sa belle-sœur Aéropé, et s'étant emparé

de l'agneau « d'or » donné par Hermès à son frère Atrée, voulut

prendre le pouvoir. Atrée le chassa, puis feignit de se réconcilier avec

lui, et lui fit servir les membres de ses deux fils coupés en morceaux-

3. Pour s'assurer la victoire et épouser Hippodamie, Pélops avait

corrompu le cocher d'GEnomaos, Myrtilos. Celui-ci ôta la clavette à

une des roues du char de son maître et causa ainsi sa mort. Mais

comme il essayait de séduire l'épouse de Pélops, il fut précipité parlui dans la mer.

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68 KPATTAOS 395 a

Zft. "Eoikev 8é ye Kal tco TtaTpl auToO Kaxà cfuiaiv to

ovojaa EÎvai.

EPM. <t>aiv£Tat.

ZO. Kiv8uve\3el yàp toio0t6ç tiç EÎvai « ^yauÉjjLvcûv »,

oîoç S 86£,eiev aÔTcp SuxTtovEÎaSai Kal KapTEpEÎv téXoç

etutiSeIç toiç S6£aai Si' àpsTrjv. ZrjUEÎov 8è auToOf]

ev

Tpola uovf) toO TtXrjSouc; te Kal KapTEpia. "Oti oSv àyaa-

t&ç Kaxàti*)v ETti^iovf]v ouroç ô àvfjp £var|ualv£i t6 b

8voua ô «

'Aya^iÉuvcov

». "lacoc; 8è Kal ô «

'AxpEÙç

»

ôpScoçI^el. "O te yàp toO XpualTTTtou auT& <j>6voç Kal Sirpèç t8v

OuÉcjTrjv oc; couà SiETipaTTETO, TtàvTa xaOxa ^T^iLcoSrj Kal

àxr|pà Ttpoç àpETrjv.eH ouv toO ôvduaToçETtcûvujjLiaauAKpôv

•napaKÀlvEi Kal ImKEKoXuTTTai, (Scjte\l1)

Ttâai St]XoOv TTJV

cptiaiv toO àySpôç* toîç 83

ETta'Couai TiEpl Ôvo^àxcov ÎKavcoc;

8t]XoÎ 8 fioûXETat ô «

'ATpEÙç

». Kalyàp

Kaxà t6

àTEipèçKal Kaxà tô aTpEaTov Kal Kaxà to àxr)p8v TtavTa^f] C

5p8coç auTcç tô ovoua KEÎxai. Aokeî Bè u.oi Kal tc3 riÉXom

to Svoua èu^ÉTpcoc; KEtaGaL* arj^alvEi yàp toOto Toôvo^ia

t6v là Eyyùç ôpcovTa [a£iov EÎvai TatiTr|<; tî^ç ettcû-

vuulaç].

EPM. US>q Si) ;

Zn. OÎ6v ttou Kal KaT5

ekelvou XÉyETai toO àvSpèç lv

tco toO MupTtXou cjiévcûouSèv otou TEyEvéaSat TtpOVOT]8fjVai

ouSè Trpo'iSsîv tcov Tidppco tcov elç to TtSv yâvoç, Sarjc; auTÔ

SuaTU^laç EVETtt^TtXr| ,to Eyyùç |i<5vov ôpcov Kal t6 Ttapa- d

Xp^jia— toOto 8' eœtI a TTÉXaç » — fjviKa TtpoESuuEÎTo

XaÔEtv TtavTl TpoTtcp t8v tÎ]çe

lTtTto8a^ELaç yà^iov.

Tco 8è

TavTàXco Kal Ttaç av ^yrjaatTo Totfvoua ôpScoç Kal «xià

cfrôdiv T£0fjvaL, st àXrjSf) Ta TtEpl auT6v XEyéusva.

a 6 a Hermann : av BT oc av W|| 7 kiziMç T |j 8 xaprepia Ven. i84 :

-:a;Ilb 5 àrsipà B |j

8 àxetpès B : à^p- TW ||c 2 aÙTto B : -xô T

d

-Ttot Wj|

Soxt? BW : -xto T sed si supra ô5 add. tj]4 à'Çtov BT : xal

à^tov

Wy a^'.ov

— bcwvuplac secl. Hermann|| 8 chou b

:

oïot BTW||

9 auTO b : --rto BTW||d 5 aÛTÔv BW : -twv T.

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395 d GRATYLE 69

Hermogène. — De quoi veux-tu parler ?

Socrate.— Des in fortunes, nombreuseset terribles, essuyées

par lui de son vivant, qui finirent par la ruine totale de sa pa-trie ; et, après sa mort, de cette pierre suspendue (talantéïa) dans

e l'Hadès sur sa tète, par une merveilleuse conformité avec

son nom 1. On a tout à fait l'impression que, voulant l'appe-

ler le plus éprouvé (talantatos) des hommes, on a, sous une

forme voilée, substitué à cette appellation celle de Tantale :

voilà le genre de nom que semble lui avoir donné le hasard

de la légende. Le père qu'on lui attribue, Zeus, parait avoir

été, lui aussi, très bien nommé. Mais il n'est pas facile de le396 a concevoir clairement. En effet le nom de Zeus est à propre-

ment parler comme une définition. En la coupant en deux,

nous employons tantôt l'une des parties, tantôt l'autre : les

uns l'appellent Zêna, les autres Dia. Réunies en un seul,

elles font bien voir la nature du dieu, ce qui est précisément,

disons-nous, l'effet qu'un nom doit produire. Car il n'est

personne qui, pour nous et pour tous les autres êtres, soitcause de la vie

(zêri) plus que le chef et le roi de l'univers.

b Ce dieu se trouve donc justement nommé, celui par qui

(di 'hori) tous les êtres vivants obtiennent la vie(zêri) tour à

tour. Mais son nom, qui était un, a été, je le répète, par-

tagé en deux, DU et Zêni. Le dire fils de Kronos semblerait

outrageant2 au premier abord

; pourtant il est logique que Zeus

(Dia)

soit issu de

quelquehaute

intelligence (dianoïa).

C'est en

effet netteté (koros) que signifie Kronos; le nom désigne, non

pas un enfant (koros), mais la pureté sans mélange de son esprit

(nou). Ce dieu est fils d'Ouranos, suivant la tradition. Or, la

contemplation du monde supérieur est elle-même bien nom-c mée ourania (céleste), puisqu'e//e voit ce qui est en haut (horosa

ta anô) ;c'est cette contemplation, Hermogène, qui, suivant

ceux qui discourent des choses célestes, produit la pureté de

1. Tantale, riche et puissant roi de Lydie, invité par les dieux à

leur table, avait dérobé du nectar et de l'ambroisie et révélé aux

hommes les secrets divins. Puis, ayant reçu les dieux à son tour, il

osa leur servir le corps de son propre fils. Dans YOdyssèe (XI, 582 sq.),

on le voit aux enfers dévoré par la faim et la soif sans pouvoir

saisir les fruits ni l'eau qui sont à sa portée. Pindare (01., 1, 57) le

montre, comme Platon, avec un énorme rocher suspendu sur sa

tête.2. Dans le langage courant, Kronos était devenu synonyme de

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69 KPATYAOS 395 d

EPM. Ta nota xaOxa;

Zfl. °A té tiou etl £Svtl Suaxu)(r) u.axa lyâvEto noXXà

<alSelvoc,

5v Kal

teXoç f\ TiaTplçauxoO

8Xr) àvExpànETo,Kal TEÀEUTriaavTL Iv "AlSou

t\ unèp xf]Ç KEcpaXf^ç toO X'l8ou

TaXavTsta 8auu.aaTtj êbç auLtcpcovoc; tcû ôv6u.aTL* Kal e

àxE^vcùç eolkev, ûSortEp âv El tlç fiouXoLiEVoç TaXàvxaTov

ôvoLiàaat àTtoKpuTTT(5LiEvoç ôvou.aaEi£ Kal eÏttol àvr' eke'lvou

« TàvTocXov », tolo0t6v tl Kal toutcû to ovou.a eolkev ektto-

plaai f\ x\j)(r| t^ç (J>f)u.rjc;.

«PalvExaL Se Kal tco

naTplauToO

XEyoLjiÉvcp tô Ad TrayKàXcùç t6 ovoljloc KEtaSau* ecttl Se. oô

pàSiov Kaxavof]aai. 'Ate^voç y<fcpectiv oîov X6yoç to toO 396 a

Alèç OVOLia' 8leX<5vT£Ç SE aUTO St^fj ol U.EV T& ETÉpCÛ LlÉpEL,

ot Se tô ETÉpcp ^poLisSa. Ol LiÈv yàp « Zf)va », olSè « A ta »

KaXoOaiv auvxLSÉLiEva S' elç ev 8r|Xoî Tf)v <f>uatv toO 8eo0,

oSf) *npoar]KELv cpau-Èv

ôv6u.aTL oXcù te eIWlàTtEpyà^EaSai.Ou yàp ecjtlv f\\ilv Kal xoîç aXXoLÇ tt&ctlv baTLÇ èaxlv aÏTioç

ljlSXXov toO £f^v f)ô ap^cov te Kal (iaauXEÙc; tcùv nàvTcov.

ZuLi6alv£L ouv ôpScùç ôvoLiàc^EaSat oCxoç b Bsbc; EÎvat, Si b

ov £f]v &eI nfiat tolç £ôaiv unàp^EL* SiEtXrjTTTaL Se Sl^a,

oùCJTTEp Xéyco, iv 8v tô SvoLia, tcû a AlI » Kal tcû « Zrjvl ».

ToOxov Se

Kp6vou

u6v sîvaL

ûfrpiaTiKèv

llèv av tl S6£,elev

EÎvaLaKouaavTL Et^alcpvric;, EuXoyov Se u.EyàXr)ÇTLvèc;SLavoLac;

EKyovov EÎvaL tôv Ala #

Képov yàp arjU-alvEL, ou TraîSa, àXXà

to KaSapèv auxoO Kal aKrjpaTOv xoO voO. "'Ecjtl Se outoç

OùpavoO Û6ç, qç Xéyoç- f\Se au èç to aveo

8l};lc; KaXcûç I)(el

toOto t6 3vou.a KaXEÎaSaL, « oupavla », ôpcoaaxà aveû, c

<58ev 8f) Kal cj>aaLV,cû

e

Epu.6ysvEç,

t6v

KaSapôv

voOv

napa-

Testim. : 396 a 3 ol txàv yàp—

7 tôv xravxwv Stob., Eclog., I, 2, 27,

e 1 TaXavceia Spalding : xavcocXeiajj OaujxaaTr, T : -tioç BW

[

ç'jtxçtuvoçW :

auLtcpaivto; BT jj3 ovo{j.aaat à^oxpu^To'[xevoç om. W

|

4 -coutw BW : touxo Tj]

396 a 2 cusXov-s? 8È BW : cueXdvTe; Tj

4 K'

eîç (uel 8è sic) BT : Se xau-a et; W ||b i ôV 6v TWb : Sto B

|

4 Otov slvac

W:

tôv BT(] aàv av BT

:

jjlÈv ouv W|| tt bt

:

-ci;

BTWj

C i xouto 6'vou.a W.

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396 c GRATYLE 70

l'esprit,et justifie le nom donné au ciel (ourano). Si je me

rappelais la généalogie hésiodique, et les ancêtres encore

plus reculés qu'elle donne à ces dieux, je ne me lasserais pas

d'expliquer la justesse de leurs noms, avant d'avoir mis à

l'épreuve, pour voir comment elle se comporterait—

je veux

dire: si elle resterait court ou non —,cette sagesse qui

d vient de me tomber si soudainement, je ne sais d'où.

. _ Hermogène. — Le fait est, Socrate, queL'inspiration , . , . \, . , ,

9\d'Euthyphron.

tu m as tout bonnement 1 air, a la fa-

çon des inspirés, de te mettre soudain àchanter des oracles.

Socrate. — Oui, Hermogène, et c'est surtout à Euthy-

phron, du dème de Prospalte, que j'attribue mon accès de

sagesse. Dès l'aurore, je suis longtemps resté avec lui, et je

prêtais l'oreille à ses propos. Peut-être l'inspiration qui l'agi-

tait n'a-t-elle pas seulement empli mes oreilles de cette di-

vine sagesse, mais s'est-elle encore emparée de mon âme.e Voici donc, à mon avis, comment il nous faut faire: pour

aujourd'hui, l'utiliser, en achevant ce qui reste à examiner

sur les noms; demain, si vous en êtes d'accord avec moi, nous

l'exorciserons et nous nous en purifierons, après avoir dé-

couvert un homme habile à ce genre de purification, soit un

397 a prêtre, soit un sophiste.

Hermogène. — Moi,je

veux bien;car

j'aurais

le

plusgrand plaisir à entendre ce qui reste encore à dire des

noms.

Socrate. — Eh bien, c'est ainsi qu'il faut faire. Par où

veux-tu donc que nous commencions l'examen — mainte

nant que nous sommes engagés dans un exposé d'ensemble—,

pour savoir si vraiment les noms nous attesteront par eux-

mêmes que chacun d'eux, bien loin d'avoir été ainsi établi au

b hasard, possède quelque justesse? Les noms donnés aux

héros et aux hommes risqueraient peut-être de nous trom-

per : beaucoup d'entre eux ont été établis d'après les appel-

lations des ancêtres, parfois sans aucune convenance, commenous le disions au début

; beaucoup sont comme l'expression

radoteur (cf. Euthyd., 287 b).— De

/.o'po;, jeune garçon, Platon

distingue xoco; (apparentéà

y.opifo, nettoyer),dont le sens habituel

est immondice, mais auquel il prête celui de netteté.

Page 91: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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7o KPATYAOS 396 c

ylyvEaSai oî ^EXEQpoXéyoi, Kal xcp oôpavcç ôpGûc; x6 Svo^ia

KEÎaBaf eI 8' E^E^vr)^r|v xfjvc

Hoi6Sou yEVEaXoylav, Tlvaç

EXl XOÙÇ àvCOTÉpCÛ 7TpOy6vOUC; XÉyEtTOlJTOÙV, OÔK &VETTaU<S^LT]V

Sie^uwv obç ôpScoç aôxoîç xà ôv6^axa keÎtou, Icoç àTTETiEi-

pà6r|v xfjç aocjuaç xauxrjal xi TtoiijaEi, eI apa àîTEpEl f) oO,

f) e^loI E^atcpvrjç vOv oôxoal ttpoottétttcokev apxi ouk oÎS' d

ôtt68ev.

EPM. Kal^ièv Sr),

S ZoKpaxEç, olte^voùc; yé fcioi SokeÎç

ôSaTTEp ol evSouoicùvxeç EÉjat^vric; xprja^aSEtv.

Zft. Kai alTico^at yE, S e

Ep^6y£V£Ç, jiàXiaxaauxfjv ànb

Eu8u<f>povo<; toO npoaTraXxlou TTpooTTETtxoùKÉvai poi* ecdSev

yàp TtoXXà aôxû cruvfj Kal napEL^ov xà OTa. KlvSuveùei oSv

èvSouaiûv oô ji6vov Ta Sxà ^iou è(iTTÀfjaai xf]ç Sai^iovlaç

aocjuaç, àXXà Kal xfjç ipu)(f]ç £TUEiXf}<f>8ai. Aokei oSv ^01

Xpf^vai ouxcoalf)fci&ç Troi^aai* xè

(jlèv xfj^Epov EÎvai xpi]- 6

aaaSai auxfl Kal xàXomàTTEplxoàv ovo^àxcov ImaKÉi^aaSat,

atfpiov Se, âv Kal à\\.lv ^uvSokt], àTToSioTio^Tir)<j6^£8à te

aôxf)v Kal Ka8apo\j^iE8a è^EupdvTEÇ Saxiç xà xotaOxaSEivèç

Ka8alp£LV, ELTE XCÛV tEpECÙV XIÇ ELTE XQV OOtylOltùV . 397 a

EPM. 'AXA' !y<h jièv E.uyxopcD' tkxvu yàp av r|8Écûç xà

ETtlXoLTta TiEpl xcov ôvo^iàxcav aKoûaaitii.

Zft. 'AXXà XPT °8t<3 ttoleÎv. F168EV oSv 3oùXei àp£db-

^ESaSiaOKOTtoOvTEC;, £Tr£l8f)Tt£pElÇX\3TTOVXI.và E^6£8l£

)Ka^£V,

tva eIScû^jlevel apa f)fcûv Em^apxupï

£

)(7£iauxà xà ôvéjiaxa

pf| Ttàvu àîiè xoO auxo^àxou oôxcûç EKaoxa KEÎaSai, àXXs

I)(£iv xtvà ôpSôxrjxa ;xà ^èv ouv xcov f^pobeûv Kal àv8pQTtcùv b

XEyé^tEva Ôv6^iaxa ïacoç avf\\^oLç E^aTrax^aEiEV TtoXXà

jjlèv

yàp auxôv KEÎxai Kaxà Trpoy6vcov ETicovu^lac;, oàSèv Ttpoor]-

KOV EVLOIÇ, OOTIEp Kax' àp)(àç IXÉyO^EV, TToXXà 8è OOTtEp

C 3 jjLeTewpoXdyo'. TWb : -yu> B || oucav*(f) T j|5 è^audtxrjv BT :

~ca}U)V t in marg. -aat;j.r,v (sic) W [|6 i'wç av W

|| 7 xautTjat Tt T :

Ta^ç t! xi BWt H8

ï)TWB :

f)B

||d 7 cnnHj B : -^v TWb ||

e 3 Zl

av B : 8' èàv T Sa èàv

W||

397 a 2 av om. T||

7kr.o

Tau-:o;jLaTOU

W II b 3 hwovuulc^ T : ôtxwv- BW.

Page 92: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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397 b CRATYLE 71

d'un souhait: ainsi Euthychidèsl

,Sosias 2

, Théophile3 et

maint autre. Ceuxde ce genre, il faut, à mon avis, les laisser de

côté;mais il y a apparence que nous découvrirons surtout les

dénominations justes dans ce qui a, par nature, une exis-

tence éternelle. Car c'est là surtout que l'attribution des

c noms doit avoir été faite avec soin; peut-être même certains

d'entre eux sont-ils l'œuvre d'une puissance plus divine quecelle des hommes 4

.

Hermogène. — Tu me parais avoir raison, Socrate.

_ Socrate. — Dans ces conditions, n'est-ilLes noms •

, , ».

des dieux Pas juste °-e commencer par les dieux,

en examinant comment peut bien se

justifier ce nom même de dieux qu'on leur a donné ?

Hermogène. — C'est naturel.

Socrate. — Voici donc ce que je soupçonne, pour ma

part. A mon avis, les premiers habitants de la Grèce croyaient

d seulement aux dieux qui sont aujourd'hui ceux de beaucoupde Barbares : le soleil, la lune, la terre, les astres et le ciel

;

les voyant tous agités d'un mouvement et d'une course per-

pétuels, c'est d'après cette faculté naturelle de courir (thèin)

qu'ils les nommèrent dieux (théoi)5

; plus tard, quand ils

reconnurent tous les autres, c'est désormais ce nom qu'ils

leur appliquaient. Mon explication a-t-elle ou non quelque

apparence de vérité?

Hermogène. — Oui, bien certainement.

Socrate. — Qu'examiner après cela ? N'est-ce pas évidem-

e ment les génies, les héros et les hommes ?

1. Euthychidès vient desûrugijç,

heureux.

2. Sosias est rattaché à aw^w, sauver.

3. Voir plus haut, 394 e, et la note.

4- Plus loin (4a5 d) Socrate lui-même rejettera cette explication,

comme un expédient trop commode. Mais l'on verra Gratyle y recou-

rir (438 c) à son tour quand l'argumentation de Socrate l'aura réduit

aux abois.

5. Hérodote propose pour Qso; une autre étymologie, qui n'est pas

moins fantaisiste. D'après lui (II, 5a), les Pélasges donnaient ce nomaux dieux comme ayant mis en ordre (xoau.to Ôs'vtsç) toutes choses.

—L'étvmologie indiquée par Socrate est de nature à plaire aux

disciples d'Heraclite, comme Cratyle, partisans du mouvement per-

pétuel.

Page 93: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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7 i KPATYAOS 397 b

eu)(<5uevoi xlBEVxai, otov a Euxu^tS^v » Kal » Ecùcrlav » Kal

« Oe6<|uXov » <al otXXa TioXXà. Ta uèv ouv xoiaOxa SokeÎ

uoi xpfjvai èav eIk8ç Se uàXiaxa rjuaç EupEÎv Ta ôpBôç

KElusva TtEplxà &eI Svxa Kal TTEc|>UK6Ta. 'E<mou8àa8ai yàp

èvxaOBa jiàXiaxa TipÉTTEi xr^v Béauv x&v Ôvo^àxcùv* ïaoç S' C

Ivia aÛTcov Kal ûtto BEioxÉpaç SuvàuECùç ¥\ xf)ç xov àvBpcb-

TtOV EXÉSrj.

EPM. Aokelç uoi KaXcoç XÉyEtv, & ZcoKpaxEÇ.

ZO. ""Ap' ouv où SlKatov ànè xcov Becùv ap^EaBai, ctkottou-

uévouç Tirjtioxe aùxô xoOxo x6 ovo^ia ol « BeoI » ôpBSç

EKXr)8r|aav ;

EPM. EIk<5ç Ye.

ZQ. Tol6v8e xolvuv lycoyE û•^0TtxEucD• <J>alvovxal \ioi

ot Tipoûxoi xôv àvBpoùTïcov tûv TiEpl xfjvc

EXXaSa xoùxouç

jjl6vouç xoùç Beoùç ^ystaBai ouortEp vOv TtoXXol xSv frap6à- d

pov, fjXiov Kal aEXr|vr|v Kalyfi,v

Kal aaxpa Kal oupav6v &xe

ouv auxà ôpovxEÇ *navxa àsl lévxa Spé^icp Kal BÉovxa, àno

xauxr|Ç xf^ç (J>ùcte<3Ç xf]Ç xoO Beîv a Beoùç » auxoùç ettovo-

uàaai' ûaxEpov Se KaxavooOvxEÇ xoùç otXXouç Ttavxaç fjSrç

xoùxcp x£> ôvôuaxiTipoaayopEÙEiv. *Eoiké xi o Xéyco xfj àXn,-

8eI(xf\ouSév

;

EPM. riaVU UEV oSv EOLKEV.

ZQ. Tl o\3v av usxà xoOxo okotioluev; $ SfjXov Sn, 8x1

Saluovàç xe Kal fjpcoaç Kal àvBpamouç ;

Testim. : 397 b 8 èa-ou5aa8at — c 3 £TÉ07j Euseb., Praep. euang.,

11, 6IIC 9 cpa-'vovTai

— d 2 oùpavôv Euseb., Praep. euang., 3, 2||

8 «paivovxai— d 4 inovotxàaat Theodoret., Therapeut., p. 69 et

p. 107 ; Euseb., Praep. euang., 1,9 ||10 xotStouç — d 2 oùpavdv

Euseb., Praep. euang., 3, 10.

b 5 eÙTuy;t'8rjv T (sed 8 in ras., ut uidetur) W : -y iàô*T]v B || 7 ypîjvai

BT et yp. W in marg. : yaipeiv W ||c 3 èyevTJ0T] Euseb. pro kzébr\ ||

10 izs.pl Theodoret. pro twv 7:epl ||d 1 txdvouç Yjyeïaôou ôeoùç Theodo-

ret. y xo'jç om. Euseb.||

ot r.oXXol Theodoret.||

l\ èrcovouaaai : yp. xa\

è^txaXéaat W||

5 aXXouç Tcàvxaç BT : aXXouç àrcavxaç W ||6

Tfj

àXY]8eiaB : :w

àXrjôsî TW||

9 *) BfjXov

W probauitHeindorf

qui per-sonas recte primus distinxit : SfjXov BT.

V. 2. — 7

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397 e GRATYLE 72

Hermogène. — Les génies.

Socrate. — A vrai dire, Hermogène, que peut bien signi-

fier le nom de génies ? Vois si tu trouves que j'ai raison.

Hermogène. — Tu n'as qu'à parler.

Socrate. — Sais-tu qui sont les génies d'après Hésiode ?

Hermogène. — Je ne vois pas.

Socrate. — Ne sais-tu pas non plus qu'elle fut d'or,

suivant lui J

,la première race d'hommes ?

Hermogène. — Oui, cela je le sais.

Socrate. — Eh bien, il dit d'elle :

Depuis que le sort a recouvert cette race,

398 a On les appelle les saints génies de la terre ;

Bons, secourables, ils sont les gardiens des mortels 2.

Hermogène. — Et après ?

Socrate. — Mon opinion est que, par « race d'or », il

entend non pas « née de l'or »,mais oc bonne et belle » . Et la

preuve, pour moi,c'est

qu'ilnous

appellenous-mêmes

« race de fer » 3.

Hermogène. — Tu dis vrai.

Socrate. — Et parmi les hommes d'aujourd'hui, crois-tu,

b s'il en est un bon, qu'il le rattacherait à cette race d'or ?

Hermogène. — C'est probable.Socrate. — Mais les bons ne sont-ils pas sensés?

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Voici donc essentiellement ce qu'il entend,

à mon avis, par les génies (daimones) : c'est parce qu'ils étaient

sensés et savants (daêmones) qu'il les a nommés daïmones.

Et anciennement dans notre langue, ce nom lui-même se

1. Dans le mythe des cinq races, Hésiode nomme d'abord la race

d'or, celle des hommes qui vivaient au temps de Kronos, « sans

souci,à l'abri des

peineset des misères », et

qui,sans

travail,recueillaient tous les fruits de la terre (Travaux, V, 109-126).

2. Les trois vers cités par Socrate se lisent dans les Travaux (121-

123). Le texte d'Hésiode donne yat' au lieu deu.otp',

et au vers

suivant : toi uiv 8atu.ovéç efoi Aiô; [xsyàXou ôià (tauXaç.

3. La cinquième et dernière race, dont les misères arrachent à

Hésiode le souhait désespéré d'être mort plus tôt ou né plus tard.

Les hommes de cette race ne sont pas seulement consumés par les

fatigues

et les soucis, mais untemps

viendra où ne

régnerontparmi eux que la dureté, la perfidie et le crime (Trav., v. 174-201).

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7* KPATYAOS 397 e

EPM. Aotl^ovotç. e

ZQ. Kal ebç àXrjScàç, co 'Ep^dyEVEÇ, tI av tiote uool to

ovoua ol ce SocI^ovec; »; aKÉipai av xt aoi 56£,co eIttelv.

EPM. AÉyE u6vov.

Zft. Oîa8a ouv nclvaç cj^alv 'HaloSoç EÎvai toùç Sal-

fciovaç ;

EPM. Ouk EVVOCÛ.

ZQ. OùSè 8ti xpuaoOv yÉvoç t6 npcoT6v cJ>r|CTtv yevéaBcu

tSv àvSpamcùv ;

EPM. OÎSa to0t6 yE.

ZO. AÉyEL TolvUV TTEpl autoO,

Auxàp ETTEtSf) toOto yévoc; Kaxàfcioîp

9

EKaXl>l|j£V,

ol uèv Sat^ovEÇ àyvoi etil)(86vlol KaXéovTai, 398 a

âaSXol, aAsc^tKaKOL, cpuXaKEç 8vr|T»v àvBpcoTTov.

EPM. Tiouv 8^;

T.C1. "Oti oîuai èyco XéyEiv auT6v to yj>uaoOv yÉvoç oôk

ek xpuaoO tte<|>uko<;, àXX' àya86v te Kal koXôv. TEK^piov8é uol ecjtiv 8ti Kal

f\\ioic; cprçaiv aiSrçpoOv EÎvai yévoç.

EPM. s

AXn 8^ XéyEiç.

Zn. OûkoOv <al tôv vOv olel av cjxxvat auxèv eï tcç

àya86<; laxiv ekeivou toO yjnjaoO yÉvouç EÎvai ; bEPM. EIk6c; Ye.

Zft. Ol 8'àya8ol aXXo tlf) cj>p6viuoi ;

EPM. <Pp6vi\xoi.

ZO. ToOto xolvuv TtavToç jiaXXov XéyEi, èbç êuol SokeÎ,

toùç Saiuovaç' 8ti <|>p6viuoi Kal Sa/juovEÇ fjaav, a Saiuo-

vaç3>

auToùç a>v6uaaEV Kal Iv yE Tfj appâta Tfj f)UETEpoc

Testim. : 397 e n aùxàp— 398 a 2 àv0ptox:a>v Hesiod., Op., I2J

sq. ||398 a i oï txsv — 2 àvÔpairoov Plat., Resp., V, 469 a.

6 2 àXTjôtoç ye W ||398 a 1 eTCiyGovioc W (idem Plato in Rep., A69

a, ubi xeXéOouaiv pro xaXéovccci et u-epdrtov pro 6v7]Ttov scrips.) : ùtzo-

BT (sed u in ras. T) ||5 ysyovévat W pro îcecpuxoç ||

xai om. W||

6 ai5r,pouç W sed v supra ç scrips. ||b 1 ylvouç TWb : -voç B

||elvac

aùtôv W U 7 covdixacrev Bt : -aav W.

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398 b GRATYLE 73

rencontre 1. Notre poète et bien d'autres qui tiennent ce lan-

gage ont raison de dire qu'un homme de bien, après sa

mort, obtient une haute destinée et de grands honneurs, et

c qu'il devient génie, suivant le nom que lui vaut sa sagesse.En ce sens, j'admets à mon tour que tout homme de bien a

le caractère d'un génie, vivant et mort, et que le nom de génielui est justement donné.

Hermogène. — Moi aussi, Socrate, je crois être sur ce

point pleinement d'accord avec toi. Et le héros, que peut-il

être ?

Socrate. — Voilà qui n'est pas bien difficile à conce-voir. Ce nom, dont la forme a été légèrement détournée,

indique la naissance due à l'amour.

Hermogène. — Que veux-tu dire ?

Socrate. — Ne sais-tu pas que les héros sont des demi-

dieux 2?

Hermogène. — Eh bien?

d Socrate. —Tous, évidemment,

sont nés del'amour d'undieu pour une mortelle, ou d'un mortel pour une déesse.

Considère encore ce nom à la lumière de l'ancienne langue

attique, et tu t'en rendras mieux compte : tu verras qu'il a

été dérivé du nom de Yamour (éros), auquel les héros ont dû

la naissance, avec un léger changement pour la forme. Voilà

comment il définit les héros, ou bien il veut dire qu'ils

étaient savants, orateurs éloquents et bon dialecticiens, étant

habiles à questionner (érôtân) et à parler (èïrèïri),car èlrèîn

est synonyme de légèïn {dire). Gomme nous venons de le

e dire, les héros, en langue attique, se trouvent être des ora-

teurs et des questionneurs habiles, si bien que la race

héroïque devient une espèce de rhéteurs et de sophistes.

i. Le mot 8<27Ju<ov appartient surtout à la langue poétique. Onle trouve chez

Homère,mais il est rare en

prose.2. Chez Homère f.pco; est une épithète honorifique, généralement

appliquée aux personnages de l'épopée, non seulement aux rois et

aux chefs, mais aux gens de leur entourage. L'aède Démodocos est un

héros. La conception reprise ici par Platon est celle d'Hésiode, quifait du héros un être intermédiaire entre le dieu et l'homme. Dans les

Travaux, les hommes de la quatrième race, sont la race divine des

héros que l'on appelle demi-dieux (v. i5()-i6o). Tombés dans la

guerre,devant Thèbes ou à

Troie,ils habitent

aprèsleur mort les Iles

des Bienheureux, au bord de l'Océan. — Le mot rt ç>t»ç signifie protec-

Page 97: Platon, 5.2 Cratyle

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73 KPATYAOS 398 b

cpcovflaÔTfc cn>^6ai.v£i t6 ovo^a. AéyEi oSv KaXSç Kat oCxoç

Kal &XX01 TToirjTal TioXXol 8aoi XÉyouaiv ôç, ETrsiSàv tiç

àya8o<; wv TEXEUTrjarj, iiEyàXrçv jioîpav Kal Tipfjv e\ei Kal

ylyvETai Sal^ov Kaxà xfjv Tf)ç c|>povf|a£Cù(; ETtovu^ilav.C

Tatixr| ouv xlSE^ai. Kal lycb [tov Sarj^ova] TràvT* av8pa 8ç

av àya86ç fj, Saifciéviov EÎvai Kal £SvTa Kal TEXEUT/jaavTa,

Kal ôpScoç « Sal^ova » KaXsîaSat.

EPM. Kal èycô fcioi Sokcd, o ZcoKpaTEç, toutou Ttavu aoi

aù^i|jr|(|)oc; EÎvai.

e

O 8è 8f) « fjpcoç » tI av eïtj ;

ZQ. ToOto Se oô nàvu ^aXE-nèv êvvofjaai. Z^iKp8v

yàp TiapfJKTai aôxôv t8 Svo^ia, SrjXoOv Tf)v Ik toO IpcoToç

yâvEaiv.

EPM. ricoç XÉyEiç ;

ZQ. Oôk oîa8a oti ^18eoi oî fjpa>Eç ;

EPM. TioSv;

ZO. riàvTEÇ SrjTrou yEyovaaiv Epaa8ÉvToçfj 8eoG 8vr|Tfijçd

fj 8vrjToO BeSç. 'Eàv o8v qkottt]ç Kal toOto Kaxà xf]v

'AvciKn.v Trjv TuaXaiàv cf>ovf|v, ^aXXov EiaEf SrjX&asi yàp aoi

8ti Tiapà t6 toO IpcoToç ovo^ia, o8ev yEyovaaiv ol fjpcûEÇ,

cr^LKpèv TTaprjy^Evov IotIv ôvdjiaToç x<xpiv. Kal fJToi toOto

XéyEL toùç fjpcoaç, î} 8xi ootyoi fjaav Kal prjTopEÇ SelvoI Kal

SioXektikoI, èpcoTÔv (Kal EÏpEtv) tKavol Svteç'- to yàp

CC EÏpELV » XÉyELV EOTLV. "OîTEp OUV CCpTl XÉyO^lEV, EVTrj

'AtTiKfj cpcovfj XEyd^iEvoi ol fjpcûEÇ pf)Tops<; tiveç KallpcoTT)-e

tlkoI au^ôaivouaiv, &cte prjTopcav Kal aocjuaTcov yévoç

Testim.:

398 b 9 w; S7:ei3àv

— c 2 àvBpa Theodoret., Therapeut.,

p. 323.

b 10 èxeï e/et Theodoret.|J

C 2 tov 8ar[aova secl. Hermann xôv

Sou^ova àvêpa Theodoret.||

5 eywy^ T ||1 1 7jpioes etatv W

||d 1 èpa-

aOévTOç t]6sou 8vrjT7Jç rj 0vt)xou ôeâ; anonymus in 06s. MisceîL, VII,

p. 273 : èpaaOivxos f,ôsou 6v7]T7js r| 6eaç Ovtjxou W IpaaôévTe; r]

ôsot

6vy]t^ç f, QvyjTot ôeaç BT ||5 [xcxpôv

W|| axopaxoç Peipers pro ôvdpia-

toç y 6 Sétvot T (sed ras. ante 8) W : -/.où 8stvo\ B|| 7 (xaù el'peiv)

add.

H. Schmidt || 8 Xéyouev B: XEyousv (sic) W

:IXéyoïxsv T || e 1 o( om.W

y èptu-rj-ixo: BW : èptoTtxot T.

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398 e CRATYLE 74

Mais ce n'est pas cela qui est difficile à concevoir; c'est plu-tôt le nom des hommes (anthrôpoi). Pourquoi sont-ils appelés

anthrôpoi? Toi, peux-tu le dire?

Hermogène. — Comment le pourrais-je, mon bon ?

Même sij'étais capable de le trouver, je ne m'en donnerais

pas la peine, car je pense que tu sauras le découvrir mieux

que moi.

399 a Socrate. —L'inspiration d'Euthyphron te donne

confiance, paraît-il!

Hermogène. — Evidemment.

Socrate. — Et tu as raison d'avoir confiance. Car, en ce

moment, je crois qu'il m'est venu des idées ingénieuses, et

je risquerai, si je n'y prends garde, d'être encore aujourd'hui

plus habile que de raison. Fais attention à ce que je vais

dire. En premier lieu, voici ce qu'on doit se mettre dans

l'esprit au sujet des noms : souvent nous ajoutons des lettres,

nous en ôtons d'autres, en dérivant les noms d'où il nous

plaît, et nous déplaçons les accents. Voilà, par exemple,DU philos (ami de Zens) ; pour faire un nom de cette locu-

b tion 1

,nous enlevons le second i, et à la syllabe du milieu,

qui est aiguë, nous substituons une grave2

. Dans d'autres cas,

inversement, nous ajoutons des lettres, et faisons passer dans

la prononciation le grave à l'aigu.

Hermogène. — Tu dis vrai.

Socrate. — Ehbien,

c'est un de ces

changements qu'aéprouvé le nom des hommes, il me semble. De locution il

est devenu nom, par la suppression d'une lettre, l'a, et la

transformation de la finale en grave.

Hermogène. — Que veux-tu dire?

c Socrate. — Ceci. Ce nom d'anthropos signifie qu'aucontraire des animaux, incapables d'observer rien de ce

qu'ils voient, d'en raisonner et de l'examiner, l'homme,dès qu'il a vu, — et opôpé a ce sens — applique son examen

et son raisonnement à ce qu'il a vu. Et voilà pourquoi,

teur •

cf. latin servo (Boisacq, Dictionnaire étymologique, p. 32g, s. ».).

i. C'est-à-dire de ce prédicat. Plus loin, Platon distinguera,

comme éléments de la définition (ou de la phrase), \6yoq, le nom

(ovoua) et le verbe ou prédicat (orjua). Le second indique ce qui est

dit du sujet, et peut prendre diverses formes.

2. Au 91X0; est remplacé par AtçtXoç. La syllabe oi-, frappée dans

le premier cas de l'accent aigu (o£sta), devient, dans le second, grave

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74 KPATYAOS 398 e

ytyvETai t6 fjpa>iK8v <|>0Xov.'AXXà oô toOto xaX£Tt6v èariv

âvvofjaai, àXXà ^aXXov to tcùv àvBpcoTicûv, 8ià xl ttote

a avBpcoTioL » kccXoOvtou- au £Xe,-Ç eIttelv;

EPM. ri68EV, <àya8É, exo ;oôS' eï tl oÎ6ç t' av eït^v

EÛpEÎv, ou auvTEtvco Sià to f)y£Îa8ai aè fciâXXov EÔpr|CTEiv f)

ljiauT6v.

ZQ. Tfl toO Eu8u<|)povoc; ETUTivola TticruEUEuq, oç loucaç. 399 a

EPM. Af]Xa W|.

Zfl. 'Op8cûÇ yE où -niaTEucov oç Kal vOv yé u.oi (jjatvo^aL

ko^cùç IvvEvorjKÉvaL, Kal KtvSuvEuaco, èàvpf| EuXa6ô^iai,

etl xf)u.Epov crocpcoTEpoç xoO Séovtoç y£VÉa8ai. Zkôttel Sf)

S XÉyco. npÔTov ^èv yàp to toi6v8e Sel âvvof]aai TTEpt ôvo-

LidTCûv, 8tl noXXaKu; £Tt£u.6àXXoLiEv ypàji^aTa, Ta S' l£ai-

pouu.Ev, nap3

S |5ouXou.E8a ôvou.oc^ovte(;, Kal t<xç 5E,\JTT]Tac;

LiETa6àXXou.Ev. Otov « Ail cpiXoç » — toOto ïva àvxl

jS^aToç 8vou.a rj^îv yévrjTai, to te Ixepov <xôt68ev tûxa b

eEJeiXo^jlev <al àvxl ô^euxç Tfjç ^Éarjç <juXXa6f]ç (iapEÎav

E<f>8Ey£,au.£8a. "AXXov 8è TouvavTiov eu.6oXXo^ev ypà^u.aTa,

*rà 8è fiapuxEpa (ô^ÙTEpa) <J>8Eyyô^£8a.

EPM. 'AX^Sfj XÉyEiç.

ZO. Toutcov toivuv Iv Kal t8 Tcàv àvSpamcov OVOjJia

ttéttovSev, mç è^iol SokeÎ.s

Ek yàp ^ï^aToç ovo^ia yéyovEv,

evôç ypà^^axoç toO aXcjja E^aipESÉvToç Kal fiapuxépaç Trjç

teXeutt^ç yEvo^Évrjç.

EPM. ricoc; XÉyEtç ;

Zft. *Ti8E. Zr^xalvEL toOto to ovopa ô a avSpcmoç » C

8ti Tafcièv

aXXa 8r|pla Sv ôpS ouSèv etuctkotteî oôSè àvaXo-

yl^Exat ouSè àva8pEÎ, ô8è av8pcû*noc; a^iaicopaKEv — toOto

8' êarl « Sttcùtte » — Kal àva8pEÎ Kal Xoyt^ETai toOto o

Teslim. : 399 C 3 ô 8s avôpw^o;— 6 07îa>^ev Euseb., Praep.

euang., n, 6.

6 5t]

tj Heindorf||399 a 5 8s

0*7)W

||b 4 ôÇurspa add. Butt-

mann||

6 toutwv BW: touto

T||

8 aXça B:

â TW||

c 4onuiTts

WEusebius : ~o otîw^s BT.

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399 c GRATYLE 75

à la différence des animaux, l'homme a été justement nommé

anthrâpos : car il examine ce qiïila va (anathrôn ha opôpë)

l*

Hermogène. — Et la suite ? Dois-je te la demander? J'au-

rais plaisir à l'apprendre.Socrate. — Parfaitement.

d Hermogène. — Eh bien, à ces questions me semble pourainsi dire s'en rattacher une autre. Nous attribuons, n'est-

ce pas ? une âme et un corps à l'homme.

Socrate. — Naturellement.

Hermogène. — Essayons donc d'analyser ces mots encore,

comme les précédents.Socrate. — Veux-tu dire : d'examiner à propos de l'âme

en quoi ce nom lui convient, et de même ensuite pour le

corps?Hermogène. — Oui.

Socrate. — Eh bien, pour improviser une explication,

voici à peu près, je crois, la pensée de ceux qui ont nomméYâme

(psukhêy.c'est ce

qui, parsa

présence,

est

pourle

corpscause de la vie, en lui procurant la faculté de respirer et en le

e rafraîchissant (anapsukhon)-

;dès que ce principe rafraîchis-

sant vient à manquer, le corps périt et meurt;de là, selon

moi, le nom de psukhê qu'ils lui ont donné. Mais, si tu pré-

fères, prends patience : je crois apercevoir une explication

400 a plus plausible aux yeux des Euthyphrons3

. Car la première,

j'imagine, leur semblerait méprisable et vulgaire. Examine

donc si toi-même tu trouveras celle-ci à ton goût.

Hermogène. — Tu n'as qu'à parler.

Socrate. — La nature du corps tout entier, qu'est-ce qui,selon toi, la maintient et la véhicule, pour la faire vivre et

circuler ? N'est-ce pas l'âme ?

(,3ap£ta), c'est-à-dire atone. Car l'accent grave ((3<xpu;)est en réalité

l'absence d'accent (J.

Vendryès,

Traité d'accentuation grecque, p. 35 et

suiv.).

i. On faisait encore venir âv6pto7to; de âvw à6pe!v (regarder

en haut), ou de IvapOpov s/.etv ïr.oç, (avoir une parole articulée).

2. Aristote, De anim., I, a (fin) cite l'étymologie qui rattache }j/t)

à d»uypd;, à cause de l'idée de respiration (àva7îvor[) et de rafraîchisse-

ment(xaxdtyuÇtc).

3. L'expression dont se sert Platon (toi; àacpi 'E.) désigne propre-ment le maître et ses disciples. Ici elle vise ironiquement Euthyphronet ses pareils, ou les gens de son milieu.

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7 5 KPATYAOS 399 c

ott cotte v. 'EvteOGev8f) fci6vov Tcov Grjplcov opGcoç ô avGpo-

ttoç « avBpcûTToç » ôvou.àa8r), àvaGpcov a ottcûtte.

EPM. Ti ouv;t6 \xztol toOto Epatai as, S f^Sécoç av

TTuBot^rjv ;

ZQ. riàvu y£.

EPM. "Clanzp Totvuv jioi8okeî toutoiç ec^ç EÎval ti d

Xpfj^a. « S'u^y » yap tiou Kal «aco^icx

» ti KaXoO u.ev toO

àvGpcoTrou.

ZQ. ricoç yàp ou*;

EPM. riEipCOJIESa Sf) Kal TOCOXOC SleXeÎV CùOTÏEp Ta

E^mpoaBEv.

ZQ. H'u^fjv XéyEiç ETuaKÉipao-Gai coç eIk6tcùç toutou toO

ôv6u.aToç Tuy)(àvEL, ettelt3

aQ to aéou.a;

EPM. Nat.

ZO. e

Clç u.èv Totvuv ek toO Ttapa^p^a XÉyEiv, oîu.al ti

toioOtov voelv toùç tt*]V ^u^v ôvo^àaavTaç, coçtoOto B.pay

oTav Trapfj tco acbu.aTi, aÏTiév ecxti toO £fjv aÔTÔ, ttjv toO

ocvomvE'LV Sûvapiv Tïapé)(ov Kal àvai|»0)(ov, au.a Se IkXeI- e

ttovtoç toC àvai|jû)(ovToç t6 acûjia àTioXXuTai te Kal teXeutS*

SGevSr) (jlol

SokoOcjiv aÛTè « ipu^v » KaXÉaai. Et oè |Jo\jXei,

ttyjE r|pÉ^a- Sokco yàp ^ol ti KaQopâv mGavcùTEpov toutou

toîç apcpl Eu6ùcf>pova. Toutou ^ièv yàp, coç êu.ol Sokeî, 400 a

KaTac|>povr)aaL£v ocv Kal f^yrjaaivTo cf>opTiK8v EÎvar toSe 8è

aKÔTiEi làv apa Kal aol àpÉarj.

EPM. Aéys fciôvov.

Zn. Tf]v c|>uaiv TtavTèc; toO aco^aToç, coctte Kal £fjv Kal

TïEpuÉvai, tI aot Sokeî e^elv te Kal ô^eiv ocXXof\ ^v^f) ;

Tes^'m. : 399 C 5 ôp6aiç— 6 or.ur.e Stob

, Eclog., 1, 3g, 3j|

d 10 cujxat— e 3 xaXsaai Stob., Eclog., 1, 4i> 10.

C 5 8rj TW : 8è 8t] B || av0pa>7:oç semel Stob.|| 7 -et ouv —

î:u8o([j.tjv

Hermogeni primus attribuit Heindorf|| ïpcouai b : èpwjxa». BW

IpOftatT y d 2 cw{jia te W : a&aa tf T

a65;j.aB

||xou om. W

|{11

toioutov ti Stob.Il

e1 8è xoù

WH èxXt7rdvToç

WII

2 rs

om. Stob. |j

3 evGev W pro oOev|| «J^xV a"T° Stob.

||400 a 3 àp£rx7] W.

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400 a GRATYLE 7 6

Hermogène. — C'est bien elle.

Socrate. — Et la nature de tous les autres êtres ? Necrois-tu pas avec Anaxagore que c'est un esprit et une âme

qui les ordonne et les maintient * ?

Hermogène. — C'est mon avis,

b Socrate. — On aurait donc raison de donner le nom de

phusékhê à cette force qui véhicule (okhèi) et maintient (ékhéï)la nature

(jphusis).Mais on peut aussi, par enjolivement, dire

psukhê.Hermogène. — Parfaitement, et même, à mon avis,

cette explication est plus savante que l'autre.Socrate. — Elle l'est en effet; néanmoins le nom paraît

vraiment risible, sous la forme qu'il a reçue.

Hermogène. — Et la suite, que devons-nous en penser ?

Socrate. — Le corps (sôma), veux-tu dire?

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Le nom m'en paraît complexe ; pour peuc

qu'onen modifie la

forme,il l'est au

plushaut

point.Cer-

tains le définissent le tombeau (sema) de l'âme, où elle se

trouverait présentement ensevelie 2; et, d'autre part, comme

c'est par lui que l'âme exprime ses manifestations, à ce titre

encore il est justement appelé signe (sema) d'après eux.

Toutefois ce sont surtout les Orphiques qui me semblent avoir

établi ce nom, dans la pensée que l'âme expie les fautes pour

lesquelles elle est punie, et que, pour la garder (sôzètai) ,elle a

comme enceinte ce corps qui figure une prison ; qu'il est

donc, suivant son nom même, le sôma (la geôle) de l'âme,

jusqu'à ce qu'elle ait payé sa dette, et qu'il n'y a point à

changer une seule lettre.

d Hermogène. — Ces explications, Socrate, me semblent

i. Aristote, De anim., I, 2, kol\ a : « Anaxagore identifie l'âme

(^uyr))et

l'esprit (vouç) »,mais il fait du vou; le

principede toutes

choses. Suivant Anaxagore, les éléments, primitivement confondus,

ont été séparés et mis en ordre par l'Esprit. Platon lui emprunte le

mot 8taxoa|j.eiv dont il se sert ici.

2. Dans le Gorgias, 4q3 a, Socrate déclare avoir entendu dire aux

sages que notre vie présente est une mort, et que le corps (awua) est

un tombeau (arjtxa). Ils'agit probablement de Philolaos. — Sur

l'étymologie de awjxa attribuée aux Orphiques (le corps considéré

comme la

prisonde

l'âme),cf.

Phédon,62 b : Socrate

rappelleune

formule que l'on prononçait dans les Mystères : « Nous sommes,

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76 KPATYAOS 400;

EPM. OôSèv aXXo.

ZO. Tt Se;

Kal Tf)v tûv aXXov àTiàvTCûv <J>ùaivoà

TTiaxeiieLc; 'Ava£ay6pa voOv Kal

4»uxVetvaiTf|v SLaKoaLioO-

aav kocI Ixouaav ;

EPM. "EycoyE.

ZQ. KaXûç apa av xè BvoLia toOto I)(ot tfl8uv<xliel b

Tauxr| fj tyûoiv &X*Î Kal £X EL «<t>ua^Xr

l

v J> ettovolkx^eiv.

"E£,EaTt Se iccd « Lpuxf)v * kolll[;£V)6lievov XÉyciv.

EPM. nàvu llèv oSv, Kal Sokel yé fcioLtoOto IkeIvou

TEXVIKOTEpOV slvai.

ZO. Kal yàp ecjtiv yEÀoîov llevtol <J>aivETaL ôç oÀt]8oùç

ôvoLia£éLLEVov àç .eteBt].

EPM. s

AXXàBf\

to LiETa toOto ttôç $Sliev ex^lv ;

ZO. T6c6ûfcioc XÉyEiç ;

EPM. Nal.

ZQ. rioXXaxfj liol Sokel toOto yE* av Lièv Kal o\iiKp6v

tlç TrapaKXtvT], <al nàvu. Kal yàp afJLià tlvéç <J>ac7LVauTÔ C

Etvai xf]ç ^x^ç, &ç TE8a^i^ÉVT]ç ev tû vOv TïapévTf Kal

Slotl aC toutcùar) ^atv el S âv

arjLialvr| f\ v^ux^l'Ka^ TaUT

TI

«aï]

Lia » opScoç KaXEÎo-SaL. AokoOgl llévtol liol LiàXiaTa

8éa8aL oîàLi<f>l 'Op<J>Éa toOto xè ovoLia, oç Slktjv 8L8oûar|ç

t^ç Lpux^ç SvSi*)

êvEKa SlScoaLv, toOtov SÈTïsplôoXov exelv,

tva a&£r)TaL, SEaLLCûxrjpiou ELKÔva - EÎvaL oSv tt^ç ipux^ç

TOOTO, &OTZZp aUTO ÔvOLlà^ETaL, EOÙÇ &V EKTELOTJ làÔ(f>£L-

XÔLiEva, t6 « acùLia », Kal ouSèv Selv napàyELV oôSè

ypàLiLia.

EPM. TaOxa llev liol Sokel LKavcoç, o ZoKpaTEÇ, ELpf)- d

Testim, : 400 b 9 xo aûtxa — c 10ypàjjijxa Stob., Eclog., 1,35,

9 IIC 1 xat yàp ar)tj.a

— 6 8tô*toaiv Glemens Alex., Strom., 3, 3, 16.

a 8 Tt oat by b 2

i)BW : J T ||

C '1 *âvo tt W||

2 x$ Ttapô'vTt

xal vuv Stob. D 3 au om. Clem. Alex.||

touto Stob. pro toutio||

aY][xa''v7)Stob. : -txrjvr) BT -[J.^V7)

W||

(\ [xotom. Stob. Clem. Alex.

||

6 ttjç ^uyîjç om. Clem. Alex.j|8 touto, (Sanccp

aùxo BTW : touto

auTÔcfaictp

Stob.jl

9xà aroixaTa Stob.

proxo

aâjxa||

oùôè

T: -Skv

BW Stob.

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400 d CRATYLE 77

suffisantes. Mais, pour les noms des dieux, pourrions-

nous, comme tu le faisais tout à l'heure en parlant de Zeus,

examiner de la même manière en vertu de quelle justesse

leurs noms ont été établis ?

Socrate. — Par Zeus ! Hermogène, si nous étions raison-

nables, il y aurait pour nous une manière, la meilleure de

toutes : ce serait de dire que nous ne savons rien des dieux,

ni de leurs personnes, ni des noms qu'ils peuvent bien se

donner à eux-mêmes, — car il est clair qu'ils emploient, eux,

e les vrais noms. Une seconde manière de justesse serait de faire

comme dans les prières, où nous avons pour loi de les invo-

quer « sous les noms, n'importe lesquels ni de quelle ori-

gine, qui leur plaisent »*, comme n'en sachant pas davantage.401 a C'est en effet une loi sage, à mon avis. Faisons donc, si tu

veux, notre enquête, après avoir pour ainsi dire prévenules dieux qu'elle ne portera point sur eux — car nous nous

en reconnaissons incapables—

,mais sur les hommes et sur

l'opinion qu'ils pouvaient avoir quandils

leur ont donnéleurs noms : ce procédé ne saurait éveiller leur colère.

Hermogène. — Ta proposition, Socrate, me paraît sage2.

Faisons comme tu dis.

b Socrate. — N'est-ce point par Hestia qu'il nous faut

commencer, suivant le rite3?

Hermogène. — Ce serait justice.

Socrate. — Quelle intention

pourrait-on

attribuer à

celui qui a nommé Hestia ?

Hermogène. — Par Zeus, voilà encore qui ne me semble

pas facile!

Socrate. — Il y a des chances, en tout cas, mon bon

Hermogène, pour que les premiers auteurs de ces noms

aient été non des esprits médiocres, mais de sublimes spécu-lateurs et des discoureurs subtils.

Hermogène. — Comment cela ?

nous autres hommes, dans une sorte de geôle («ppoupo), d'où l'on ne

doit pas se libérer ni s'évader » .

1. Sur cette formule prudente usitée dans les prières, cf. Euthy-

deme, 288 a, etc.

2. Littéralement : dans la juste mesure. Pour ce sens de lurpuo;,

cf.Criton, 46 c,

etc.

3. C'est par Hestia que l'on commençait les sacrifices.

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77 KPATYA02 400 d

oBoli" TiEpl 8è toùv 8ecûv tûv ôvou.<xtcdv, OÎOV KCll TtEpl toO

« Aibç » v0\>8f| IXeyec;, e)(oiu.ev av ttou <aTà tov ocût6v

Tp6Tiov ETuaKÉi|;aa8ai KaTa Tiva ttotè ôpSdxrjTa auTcov Ta

5v6u.aTa keÎtou;

Zfï. Nai u.à Aux r|u.£Îç y£, o "Ep^yeveç, EÏTTEp y£ voCv

E^OlU-Ey, EVa U.EV TÔV KaXXiaTOV TpOTTOV, STLTTEpl 8ecov oûSèv

ÏCJU.EV, OÔTE TIEpl aÔTCùV OÔTE TTEpl TÛV ÔVOU.OCTOV, &TTO

ttotè éauToùç KaXoOaiv Sf^Xov yàp ôtl ekeîvoI ys TaXrjSfj

«xXoOai. AEÙTEpoç 83

au Tpénoc; ôpSoTTiToç, ûSanEp êv Taîç e

EÙ^aîç v6(jloç Eaxivf}u.tv Eu^EaSai, oitiveç te Kal ôtï<S8ev

Xaipouaiv ôvou.a£6u.EVoi, xaOxa Kal Tju.aç auTOÙç koXeîv,

a>ç &XXo u.r)8èv ElSéTaç* KaXoç yàp Sf) Eu.oiyE Sokeî vevou/i- 401 a

a8ai. Et ouv (5ouXei, gkottco^ev cSoTTEp npo£iTi6vTEc; TOÎÇ

Beolç 8ti TtEpl auTcov ouSèvt)u.eÎç <JKE^;<5u.£8a

— oô yàp

à£ioGu.£V oîol xsav sîvai okotielv — àXXà TTEpl tcùv àv8pob-

TTCÛV, fjvTLVÛC TTOTE 86^aV £)(OVTEÇ EtISeVTO aÛTOÎÇ Ttt Ôv6-

jiaTa' toOto yàp àvEU.Éar|Tov.

EPM. 'AXXà u.oi SokeÎç, & ZooKpaTEç, u.ETplcoç XéyEiv,

Kal 0\5tû5 TTOlSu.EV.

Zft. "AXXo tl o8và<J>

9 e

EaTtaç àp^oau-ESa KaTa t6v b

véy.ov ;

EPM. A'iKaiov yoOv.

ZO. Tt ouv av tiç <|>airj8iavoouu.svov tov Ôvou.àaavTa

'EaTiav ovo^iàaai ;

EPM. Ou u.à tov Ala ouSè toOto otu.ai jSdtSiov EÎvai.

ZO. KivSuvEÙouaiyoOv, àya8èe

Epu.6y£VEÇ, ot Tipcoxoi Ta

ov6u.aTa tl8éu.evol ou cpaOXoi EÎvai, àXXà u.ETECûpoX6yoi Kal

àSoXéa^ai tlvéç.

EPM. T18/| ;

d 7 e/.otxev éd. Basileensis altéraj| 9 aùxot iauxoùç W (fortasse

recte) ||401 a 2 et pouXei ouv TW

||5 tjv 7iOTe Tiva BT

|| 7 pcrpicos

BT et in marg. W : xaXwç W||b 1 ouv BT : ouv

rjW

j| àp/o'[i&8aWH 3 oïxaiov

youv

BT : ôtxaiov

yi

xot âoxî W||

8-9 [AeTeiopoXoyoiTiveç xal àooXéa^ai W.

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401 b GRATYLE78

Socrate. — L'établissement de ces noms dénote claire-

c ment, pour moi, des hommes de ce caractère. Et si l'on

examine les noms étrangers à l'attique, on découvre tout

aussi bien ce que veut dire chacun d'eux. Par exemple, ce

que nous appelons, nous autres, ousia certains l'appellent

essia, d'autres encore ôsia 1. Eh bien, en premier lieu, que

Yessence (ousia) des choses soit appelée Hestia, d'après le

second de ces noms'2 ,voilà qui est logique ;

et quand, d'autre

part, nous désignons, nous, par Hestia ce qui participe à l'exis-

tence (ousia)3

,en ce sens encore Hestia est le nom juste: car

nous-mêmes, semble-t-il, nous appelions anciennement essiaYexistence (ousia). En outre, si l'on y réfléchit à la lumière

d des sacrifices, on interprétera ainsi la pensée de ceux qui ont

établi ces noms : avant tous les dieux, c'est à Hestia

la première que doivent naturellement sacrifier les hommes

qui nommèrent Hestia l'essence de toutes choses. Quant aux

auteurs à'ôsia, ceux-là doivent croire à peu près, comme

Heraclite, queles choses

quisont se meuvent toutes et

querien ne demeure ; qu'elles ont donc pour cause et pour prin-

cipe directeur Y impulsion (to ôthoun), bien nommée par suite

6 ôsia. Mais c'est assez parlé sur ce sujet pour des gens qui ne

savent rien. Après Hestia, il est juste d'examiner Rhéa et

Kronos. Le nom de Kronos, à vrai dire, nous l'avons déjà

passé en revue 4: mais peut-être mes propos sont-ils sans

valeur.

Hermogène. — Comment cela, Socrate ?

Socrate. — Mon bon, il m'est venu à l'esprit tout un

essaim de savantes pensées.

Hermogène. — De quelle nature ?

402 a Socrate. — La chose est tout à fait risible à dire, et pour-

tant, à mon avis, ne manque pas de vraisemblance.

Hermogène. — Quelle vraisemblance ?

Socrate. — Je crois voir Heraclite énoncer d'antiques et

i. La forme dorienne ûo£a se rencontre chez Stobée, Ed., i, ^24

Ocellos) et I, 712 (Archytas).— Quant à luoia, c'est aussi une forme

dorienne qu'on retrouve ailleurs : Stobée, Ed. phys., I, p. 8 (Philo-

laos). Voir Bergk, Zeitschr. f. Alterthumswissenschaft, i843, p. a4-

1. C'est-à-dire èaaia.

3. Une chose est parce qu'elle participe à Yexistence, Cf. Soph.,

a46 a, et la note de M. Diès.4. 396 b.

Page 107: Platon, 5.2 Cratyle

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78 KPATTAOS 401 b

ZO. KotToccfxxlvETai uoifj Qkoiq tcûv àvo^iàxcûv toioûtcûv

TIVGÙV àvSpOTTCùV EÎvai, Kal èécV TlÇ Ta ^EVlKa ôvéuaTa C

àvaaKOTtfj, ou)( ?)ttov àvEuplaKETai. 8 EKaaTov (iouXeTai.

OTov Kal Iv toutcû S fluEiç « ouaiav » koXoOuev, elalv ot

« êaalav » KocXoOaiv, ot 8' au « oalav ». ripcoTov uèv ouv

KaTà t6 ETEpov 3voua toùtqvfj

tcùv irpayuaTov ouata

ae

Earia » «xAEÎaBai e^el X6yov, Kai 8ti yE aS fjuEÎç t6

xfjç ouataç uetÉ)(ov ae

EaTiav »<j>auÉv, Kal KaTà toOto

Ôp8coç av KotXotTo « 'Ea-cla ». 'Eo'iKauEv yàp Kal tj^eÎc; t6

•naXaiov a èaatav » kccAeÎv Tfjv ouaiav. "Etl 8è Kal KaTaTccç

Bualaç av tlç Ivvo^aaç /jy^aaiTo outcù voeiv xaOTa toùç d

tiSeu-evouç' to yàp Tip6 TtàvTcùv 8eoûvrr\

e

EaTia Ttp&Trj

TtpoSuEuv eIk6ç Ikeivouç oTtiveç Tf)v nàvTov ouaiav

« 'EaTlav » ETtcovduaaav. 0aoi 5' a8 « oalav », cj\eB6v ti

aQ oStol Ka89

'HpàKÀELTOv av fjyoîvTo Ta Svxa levai te

Ttàvxa Kal uéveiv ouSév t6 oOv aiTiov Kai ib àpxrjyov auTÛv

EÎvai t6 â>8o0v, 88ev§fj KaXcoç £XELV aUT0 <( àaiov » <*>vo-

uàa8ai. Kal xaOxa uèv8f) TaÙTfl a>ç Ttapà ur)8èv eISotoov e

ElprjaScù' uet& 8'e

EaTiav SlKauove

PÉav Kai Kp6vov èma-

KÉipaaSat. Kalxot t6 ys tou Kpévou SvouafjSrj 8if|X8ou£v.

"lacoç uévtoi ouSèv Xéyo.

EPM. Tt Si1

),S ZÔKpaTEç ;

ZO. 'ftya8É, èvvEv6r)K<x ti auf]voç ao<J>laç.

EPM. rioîovSf)

toOto;

ZQ. TeXoIov uèv ttocvu eIttelv, oîuai uévtoi Ttvà m8a- 402 a

v6xr|Ta ex°v.

EPM. Ttva TaÙTr)v ;

ZQ. Tov 'HpoikXeitov uoi Sokcù KaSopav TtaXal' axTa

C i elvai om. T|| 4 Sootev W : éaaiav T èat'av B

||oî 8' au BT :

oi ôè W||6 écria W (ut uidet.) b : èa- B éa- (sic) T ||

ots W pro

fat|| 7 *™™ Tb : èa- B ea- (sic) W ||

8 éaxîa TWb : èa- Bj|

d 2 sema TW : èa-B||e 2 kaziav TW : èa- B

||402 a i (asv om.

T|| 4 *aXa{' cod. Gud. 44 : KdiXai BW racXat T

||

5-cta BW :

âxia Tb.

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402 a GRATYLE 79

sages propos, aussi vieux, sans mentir, que Kronos et Rhéa,ceux que tenait aussi Homère.

Hermogène. — Qu'entends-tu par là ?

Socrate. — Heraclite dit, n'est-ce pas ? que « tout passe et

rien ne demeure »; et, comparant les choses au courant d'un

fleuve, il ajoute qu' « on ne saurait entrer deux fois dans le

même fleuve ».

Hermogène. — C'est exact.

b Socrate. — Eh bien, à ton avis, avait-il une autre concep-tion qu'Heraclite, celui qui donnait aux ancêtres des autres

dieux les noms de Rhéa et de Kronos

1?

Crois-tu que ce soit

par hasard qu'il leur ait donné, à l'un et à l'autre, des noms

exprimant l'écoulement? De même Homère dit à son tour :

Océan, père des dieux, et leur mère, Tèthys2

et, je crois aussi, Hésiode 3. Et Orphée déclare lui-même:

Océan au beau cours se maria le premier

e avec Tèthys, sa sœur née de la même mère.

Considère que ces indications s'accordent ensemble, et se ra-

mènent toutes à l'idée d'Heraclite.

Hermogène. — Tu me parais avoir raison, Socrate;mais

le nom de Tèthys, je ne conçois pas ce qu'il veut dire.

Socrate. — Cependant il l'indique presque de lui-même :

c'est un nom de source déguisé. Car ce qui est criblé (diat-

d tôménon) et filtré (êthouménori) figure une source; de ces

deux noms a été formé celui de Tèthys.

Hermogène. — Voilà, Socrate, qui est joli.

Socrate. — Je le crois bien. Mais qu'est-ce qui vient en-

suite ? De Zeus nous avons déjà parlé.

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Passons donc à ses frères, à Poséidon, à Plu-

ton et à l'autre nom qu'on lui donne.

1. Socrate a plus haut rattaché Kpovoç à xopoç (netteté). Ici, bien

qu'il ne le dise pas expressément, il explique ce nom par xpouvoç

(source).

2. Iliade, XIV, 201.

3. Socrate ne fait ce rapprochement qu'avec réserve (olixat).En fait,

suivant la Théogonie, la plupart des dieux sont issus de la Terre et du

Ciel(Gaiaet

Ouranos),notamment

Océanet

Tèthys, quise sont unis

à leur tour pour donner naissance aux Fleuves et aux Océanines.

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79 KPATYAOS 402 a

ao<f>à XéyovTa, àxE^voùÇ xà eni Kp6vou Kale

Péaç, fi Kal

"Ojirjpoç IXeyEv.

EPM.IIôçtoOto XÉyEu;

;

ZO. AÉyElTTOU 'HpaKXElTOÇOTl « TiàvTa xopEÎ Kal OÛÔÈV

jiéve^ », KalîTOTa^oO po?\ aTXELKà^cûv Ta 8vxa XéyELcSc; « 8lç

eç aov auTÔv •noTajxèv ouk av £u.6alr)ç ».

EPM. "Ecru xaOxa.

ZO. Tt OUV;SOKEL COL àXXoiÔTEpOV 'HpaKXE'lTOU voeÎv ô b

tiSe^evoçtolçtôv oXXcùv 8eSv

Tipoyévoïc;

«e

Péav » te Kal

« Kpdvov »; Spa olel octt& toO auTou.axou aux&v à(i(|>oTÉpoi<;

pEUjiàTcav ôvé^axa 8Éa8aL; ôcmEp au "O^ripoç « 'OKEavév

te 8eôv yévEatv »<|>r)aLV

« Kal u.T]tépa TrjSuv »• oîu.ai Se

Kal 'HaioSoç. AÉyEi SE ttou Kal 'Opc|)EÙç 8tl

'OKEavôç TtpcoToç KaXXlppooç fjp^E yàu-oio,

8ç pa Kaaiyv^TT^v ô^ou.r|Topa Tt]8ùvSttulev. C

TaOTs

oSv ctk6tï£i 8tl Kal àXXfjXoiç auy.<f><A>v£Î Kal Tip6ç Ta

toOc

HpaKXEiTou TtàvTa te'lvei.

EPM. <t>alv£i Tt ^01 XÉyELV, OÙ ZeûKpaTEÇ' xè u.évtoi t^ç

TrjSùoç ouk evvoco 8vou.a tC (ùoùXETai.

ZQ. 'AXXà u.fjvto0t6 y£ ôXtyou autd XéyEt oti tttjy^ç

OVOU.a ETUK£Kp\;U.U.£VOV ECTTIV. T6 yàp StaTTCO^lEVOV Kalt6 f]8ouu,Evov TTrjyfjc; ànEiKaajJià ecttiv ek 8è toûtqv d

à^oTÉpoùv tôv ôvou-octcùvf\

« Tr)8ùc; » x6 Svo^a £uyK£iTai.

EPM. ToOto ^iév,où ZcbKpaxEc;, Ko^ivpév.

ZO. Tt 5' ou u.eXXei;'AXXà tt t6 ^Exà toOto

;tôv \ikv

A la ELTTOU.EV.

EPM. Nal.ZO. Toùç àSEXqjoùc; Sf|

aÔToO XÉycùu.£v, t6v te rioaEuSoà

Testim. : 402 b 4 'Ûxeavdv — 5 Tr|6uv //., i£, 201.

b 1-2 ô TtGéexevoç Bt : oti ôéjxevoç TW ||5 çrjaiv B : ÇTjat Wb om.

T|| 7 xaXXi'ppooç Ven. i85 man. rec. : xaXXtpdouç B xaXXippdou;

T xaXXtpoou b xaXXt'ppouç t xaXXlpou; W ||c i ôjJtOfXTJTspa

W sed o

supra sscrips. j|

to7:u£V BW||

a fcgiaxdsctt W|| aXXot; B pro àXXrJXotç

D l\ «paivet ~i T:

^aivexat B cpaivï] t( Wb|| 7 8iaTTO[xgvov b |j d 3 fxèv ouv

W D 4 fiéXXet W : -to BT d 7 xoùç 8è àSeXçoù; M) W || Xéyojuv W.

V. 2. — 8

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402 d GRATYLE 80

Hermogèke. — Parfaitement.

Socrate. — Le nom de Poséidon me semble avoir été

e donné par son premier auteur parce qu'il fut arrêté dans sa

marche par la nature de la mer, qui l'empêcha d'aller plus

loin et fut comme une entrave à ses pieds. Le dieu qui

commande à cette force reçut donc de lui le nom de Po-

séidon, comme entravant les pieds (j)osidesmon) : l'e a été

ajouté sans doute pour l'élégance'

. Peut-être toutefois n'est-ce

pas là le sens, et à la place du s prononçait-on deux 1 à l'ori-

403 a gine, pour indiquer que ce dieu sait bien des choses (polC

èidôs) ; peut-être aussi a-t-il été nommé ¥èbranleur(ho séïon),

de sèièïn (ébranler), avec addition du p et du d. Quant à

Pluton, il a dû son nom à ce qu'il donne la richesse 2, car

c'est des profondeurs de la terre que la richesse (ploutos)

monte au jour. Pour Hadès, la plupart me semblent ad-

mettre que ce nom exprime Y invisible (aèidès)3

,et c'est par

crainte de ce nom qu'ils l'appellent Pluton.

b Hermogène. — Et toi, Socrate, que t'en semble?Socrate. — Les hommes, à mon avis, ont commis bien

des erreurs sur la fonction de ce dieu, et le redoutent sans

raison. Que chacun de nous, une fois mort, habite là-bas

pour toujours, ils le redoutent;

et que l'âme s'en aille le

trouver dépouillée du corps, voilà encore qui les emplit de

crainte; mais, selon moi, tout converge vers le même sens,

le

pouvoirdu dieu comme son nom.

Hermogène. — Gomment cela ?

c Socrate. — Je vais t'expliquer ma pensée. Dis-moi : des

liens qui obligent n'importe quel être vivant à demeurer

n'importe où, quel est le plus fort, la nécessité ou le désir?

i. A plusieurs reprises Socrate fait entrer en compte, dans ses

explications étymologiques, le désir qu'ont eu les hommes d' « enjo-

liver » les noms, quittes à les défigurer. Voir notamment 4i4 c.

2. L'explication est exacte. Pluton est le distributeur de la richesse,

plus exactement le dieu de l'abondance agricole, car la terre dont il

habite les profondeurs produit les fruits qui sont la nourriture de

l'homme. C'est à ce titre que le laboureur, suivant les Travaux

(v. 465 sq.), doit invoquer, en même temps que la « pure » Déméter,

celui qu'Hésiode appelle le « Zeus chthonien ».

3. Dans le Phédon, le nom d'Hadès est expliqué par le caractère

invisible (àstSrjc) du lieu qui est le séjour de ce dieu — interprétationécartée ici par Socrate.

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80 KPATYAOS 402 d

Kal tôv nXotiTcova Kai tô eTcpov Svo^ia S êvou.a£ouaiv

auTov.

EPM. nàvu ye.

ZQ. Tô uèv xolvuv toO l~loaEL8cov6c; u,oi cpalvETai àvé-

^àaôai, toO TipcaTou 8vou,àaavToç, 8ti aÔTÔv fta8l£ovTa e

ETTÉCTXEV Tj Tfjç8aX<XTTT)<; <J>à<7lÇKal OÔKÉTLELaaEVTTpOEXSEÎV,

àXX' ô5cm£p SEafciôç tcûv tïoScov auTÛ EyévETo. Tôv oSv

ap^ovTa Tfjç Suvà^EOûç TaÙTrjç 8eôv àvôuaaEV « rioCTEt-

SSva », ôbç a TtoatSEa^ov » ovTa* tô 8è e lyKEiTai ïacoç

EUTipETiEiaç EVEKa. Tà)ra Se oûk av toOto Xéyoi, àXX' àvxi

toO aîyy.a 8ûo Xà68a tô npcùTov èXÉyETO, QÇTioXXà ei86toç 403 a

toO 8eo0.vI<jcûç Sa ànô toO oeIelv « ô cxeUdv » â>v6^aaTou'

npdaKELTai 8è tô tteÎ Kal tô SéXTa. Tô Se nXoÛTcovoç,

toOto uèv KaTà t^]V toO ttXoûtou Bàaiv, bii ek Tfjç yf]<;

k<xt<û6ev àviETat ô ttXoOtoç, ETtcûvo^àaST]* ô 8è « "AiSrjç »,

ol TtoXXol uév uoi SoKoOatv ÛTtoXauBàvEiv tô aEiSèç TtpoaEi-

pfjaSaiTÔ ôvôuaTi toùto, Kai (|>o6o\juevoi tô Svoua « nXou-

Tova » KaXoGaiv auTÔv.

EPM. Zol Se néoç (jjalvETai, S ZcoKpaTEÇ ; b

ZO. rioXXaxîl luoiyE SoKoOaiv avSpamoi SirjuapTTjKÉvat

TiEpl toutou toO BeoO Tfjç Suvocueqç Kai (|>o6EÎa8at auTÔvouk a£,iov. "Otl te yap, ETtEiSàv anaÉ, tlç fjuâv aTto8àvr|,

à£l ekel egtiv, <{>o6o0vTai, Kal 8tlf) ^X 1

^) Yuu-V^)

T0U%

acouaTOÇ nap' ekeîvov à*nÉp)(£Tai, Kal toOto TtEc|><$6r]VTai'

to 8' êuol Sokeî TtàvTa iç TauTÔv tiouvteCveiv, Kalf\ àp^f)

toO 8eo0 Kal tô Svoua.

EPM. nôç 8/| ;

Zft. 'Eycb aot èpco a yÉ uoi cpalvETai. Etnè yàp uoi, c

Seguôç ^4>9 otcùoOv ôote uéveiv ôtïouoOv, Tt^TEpoç iayypà-

TEp6ç laTiv, àvàyKT] f)ETuBuuia

;

e i tou BT : Otzô too W||403 a i aiyu.a (sic) B : â TW

||8uo

Xa68a B (XX etp. supra scrips. b) : 8uo XX TW"

||3 xi xou tô 8eXxa

B : 7c xai to 8 TW || 5 wvojxaaGr) W|| b 4 à'Çtov (ôv) Baiter || 5 yo6ei-

Tat T||6 7teod67]Tou T.

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403 c GRA.TYLE 81

Hermogène. — Sans comparaison, Socrate, c'est le désir.

Socrate. — Ne crois-tu donc pas que bien des gens échap-

peraient à Hadès, s'il ne liait par le lien le plus fort ceux qui

s'en vont dans l'autre monde ?

Hermogène. — Évidemment.

Socrate. — C'est donc, semble-t-il, par quelque désir

qu'il les enchaîne — s'il est vrai qu'il les enchaîne par le

lien le plus puissant—

,et non par la nécessité.

Hermogène. — Apparemment.Socrate. — D'autre part, il existe bien des désirs ?

Hermogène. — Oui.d Socrate. — C'est donc par le plus puissant des désirs

qu'il les enchaîne, si c'est par le lien le plus puissant qu'il

doit les maintenir.

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Or est-il de plus grand désir que celui de

vivre dans la société d'un être par lequel on espère devenir

meilleur?

Hermogène. — Non, par Zeus ! Socrate, en aucune façon.

Socrate. — Pour ces raisons, Hermogène, affirmons

donc que nul ne veut quitter l'autre monde pour revenir

ici-bas, pas même les Sirènes   en personne, mais qu'un charme

e les retient enchaînées, elles et tous les autres;tant sont beaux,

semble-t-il, les discours que sait tenir Hadès ! D'après notre

thèse, ce dieu est unsophiste accompli,

et

grand

bienfaiteur de

ceux qui sont à ses côtés, lui qui, même aux habitants d'ici-

bas envoie des biens si nombreux, tant il a là-bas de riches-

ses en réserve ! C'est ce qui lui a valu le nom de Pluton. Que,d'autre part, il refuse de vivre dans la société des hommes,tant qu'ils ont leur corps, et qu'il ne se mêle à eux que quand

404 a leur âme est purifiée de tous les maux et désirs corporels,

n'est-ce pas à ton avis le fait d'un philosophe, et qui a bien

su comprendre que le moyen de retenir les hommes est de

les enchaîner par le désir de la vertu, tandis que, quand ils

sont en proie aux transports et à la folie du corps, Kronos

i. Proclus, in Cratylum, 167 : Platon distingue trois sortes

de Sirènes : les Sirènes célestes, celles qui aident à la génération,

celles qui purifient, placées sous le pouvoir d'Hadès. Elles

sont souventmises en

rapportavec le

monde infernal ;elles

figurentdans certaines versions de la légende de Perséphone ; Hélène, dans

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81 KPATYAOS 403 c

EPM. l~loXù Sia<f>ÉpEi, S Z<*>Kpaxeç, f\ EmBujila.

ZO. Oïet ouv t6v "AiStjv ouk av ttoXXoùç EK<f>£ÛyEiv,cl

\jlÎ)

tô ta)(upoTaTa> Sect^icû ISei toùç ekeioe Î6vxaç;

EPM. AfjXaSf).

ZO. 'EmBu^la apa Tivl auToùç, &ç eoike, Sel, EÏTTEp Tcp

LiEylcrap Sec^co Seî, Kal oùk àvàyKr|.

EPM. <l>atvETai.

Zft. OùkoOv ETitSuLitat aS TtoXXai eictiv;

EPM. Nai.ZO. Trj LiEylcTri apa ETitSuLita tôv etilBulxlwv Seî auTouç, d

EÏTTEp L^ÉXXeU T$ ^EytCTTtt SeCJLIÔ KaTE)(ElV.

EPM. Nal.

ZO. "Eaxiv oî5v tlç lieI^cùv ETu8uu.laf\

bxav tic; tcj>

auvcbv oïrjTau Si3

ekeîvov laEaBai à^Eivcov àvfjp ;

EPM. Ma Ai' ou8

s

ÔTtcùaTioOv,co

ZcîxpaTEç.Zfl. Aux xaOxa apa cJjco^ev,

S 'Ep^oyEVEc;, ouSÉva SEOpo

IGEXf^aai ànEXBEÎv tôv IkeîBev, ouSè auTaç Taç ZEipfjvaç,

àXXà KaTaKEKrjX^aGat EKEivaç te Kal toùç aXXouç TtavTaç* e

oôtcû KaXouç Ttvaç, <5>ç eoikev, ETtioraTai Xôyouç XÉyEiv

S "AiSiic;, Kal ecxtiv, &ç y' ek toO Xoyou toutou, ô Beoç

oCtoç téXeoç ooq>ioir\qte Kal

LiÉyaç EUEpyÉTrjçtôv

naja

aÙTCû, 8ç yE Kal toîç evBocSe ToaaOTa àyaBà àviiicxiv oôtco

TtoXXà auTcp Ta TiEpiovTa ekeî eotlv, Kal t6v « nXouTcova»

àn6 toutou eo^e t6 Svo^a. Kal to au(if)

eBéXeiv auvEÎvai

toîç àvBpcoTioiç I)(ouaL Ta aa>u.aTa, àXXaTéTE auyylyvEaBai,

ETtEtSàvf| ^u^f] KaSapà ?\

TrdvTov tcov TtEpl t6 acou.a KaKÔv 404 a

Kal etuBu jjlicov ,

oucf>iXoa<5cf>ou

Sokel aot EÎvai Kal eS evteBu-

^t)^évou Sti oôtq ^èv av KaTÉ)(oi auToùç Srjaaç i?\ TtEpl

àp£Tf]v £Tu8uu/ia, E^ovTaç Se Tf)v toO acb^aTOç TTTOLrjaLV Kal

d 2 xû §£auu£ iw (xeytaToj W ||5 eaECJ0ai BWt : serai T

||8 èXÔeïv

W||e i xaxsivaç xè W

|| (\ outoç om. T|| téXoç W pro xiltoi ||

8 auyYtveaOai B||404 a 2 cptXoaoçou

—âv:e0yp.7){j.évo

,

j Heusde :

^piXosocpov — !vTeGup.7jfi£vov BTW || aot Ôoxst T || 4 7tT07)aiv

W(^xotrjaiv primit.).

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404 a CRATYLE 82

lui-même, son père, ne pourrait l'aider à les retenir en les

assujettissant dans ses liens légendairesl?

Hermogè.ne. — Tu as probablement raison, Socrate.

b Socrate.— Et le nom d'Hadès, Hermogène, bien loin d'être

dérivé d'invisible (aéïdês), indique beaucoup plutôt la connais-

sance (éïdènaî) de toutes2 les belles choses

;c'est de là que le

législateur a tiré l'appellation d'Hadès.

Hermogène. — Bon. Et Déméter, Héra, Apollon, Athéna,

Héphaïstos, Ares et les autres dieux, qu'en disons-nous ?

Socrate. — Déméter semble avoir dû au don de la nour-

riture, qu'elle nous fait comme une mère (didousa ... mêtêr),le nom de Déméter

;Héra est aimable (érate) t

et c'est ainsi,

c dit-on, que Zeus, s'étant épris d'elle, l'a pour épouse. Peut-

être aussi le législateur, occupé des phénomènes célestes,

a-t-il, sous une forme déguisée, donné le nom d'Héra à

l'air (aêr), en mettant le début du mot à la fin;tu t'en ren-

drais compte si tu répétais plusieurs fois le nom d'Héra 2.

Pherréphatta

3

est encore un nom que beaucoup redoutentcomme celui d'Apollon, par ignorance, semble-t-il, de la

juste valeur des noms. Car ils le modifient pour le considé-

rer sous la forme de Pherséphone, et il leur paraît terrible;

.

d En réalité il indique la sagesse de cette divinité;

les choses

en effet étant en mouvement, y atteindre, les toucher et

pouvoir les suivre sera marque de sagesse. C'est donc le nom de

Phérépapha quecette

sagesse

et ce contact avec le mouvement

(épaphê tou phéromènou) vaudraient justement à la déesse,

ou un nom analogue. C'est aussi pourquoi Hadès, sage lui-

même, vit avec elle, parce qu'elle a ce caractère. Seulement

YHélène d'Euripide, les invoque comme des divinités chthoniennes (v.

167 et sq ). Leur image était fréquemment mise sur les tombeaux.

1. Père d'Hadès, comme de Zeus et de Poséidon, Kronos, détrôné

par Zeus, fut précipité et enchaîné dansles

profondeurs du Tartare,d'après l'Iliade (XIV, 2o3-ao4).

2. "A:5t,ç est ici tiré de a (collectif ou intensif)— efttéva:.

3. Si l'on répète plusieurs fois de suite le mot "Hca sans observer

de pause, l'oreille entend a.Ttc aussi bien que

r

Hpa.A- Au lieu de <I>£paeçôv7j ou nepaeçov^, qui sont des formes

poétiques, les inscriptions attiques en prose emploient la forme 4>ê?pi-

çarca. Les décrets disent Kopr, (cf. Meisterhans, Grammat. der att.

Inschr., p. 100, 3).5 . Parce qu'ils font venir ce nom de

<ps p 1 1 v et ç ô v ç : qui apporté

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8a KPATYAOS 404 a

jiavtav ou8' av b Kpdvoç SùvaiTo b Traxf]p auyKaTÉ^eLV

aÛTÔ èv toîç Sea^oîç Srjaac; toîç auToO XEyo^Évoiç ;

EPM. KlvSuVEUElÇ TL XÉyElV, S Z&KpOCTEÇ.

EH. Kal t6 \e Svo^ia b « "AuSr|c; », S 'Ep^dyEVEc;, b

ttoXXoO SEtaTià toO àEiSoOç ETTcovo^àaBai, àXXà tïoXù yaXXov

à-nb toO TtdvTa Ta KaXà EiSévai, an6 toutou ott6 toO

vo^oSétou « "AiSrjç » ekXt)8t].

EPM. EÎev tL 8e Arj^nTpà te Kal "Hpav Kals

Att6XXcd

Kal'A8r)v&v Kal°Hc|>aicrTov Kal "Aprj KaWoùç aXXouç 8eoù<;,

ttSç XÉyofciEv ;

ZQ. Ar)^f)Tr)p ^èv <|>aiv£Tai KaTà Tfjv Socnv i?\q eScoS^ç

SiSoOaa a>ç (if]Trjp « Arj^Trçp » KEKXfjaSai, °Hpa 8è

IpaTrj tiç, «crnEp oSv Kal XéyETai 6 Zeùç auTfjç IpaaGElç C

e^elv. "laoç 5e ^ETEcopoXoycov b vo^oSÉTrjç tov àépa« "Hpav » a>v6^ao£v etukputtt6^evoç, 8eIç Tf)v ap)(f)v lui

teXeuti^v yvolrjc; 8' av, eI TtoXXaKtç XÉyotç tô Tfjç "Hpaç;

Svo^a. « <t>£ppÉ<£aTTa » 8é, TtoXXol ^îèv Kal toOto (|>o6o0vTai

t6 ovo^a Kal tôv « 'Att6XXcû », ûttô àTTEiplaç, cùç eolkev,

àvo^ioiTCùv op8ÔTr|Toç. Kal yàp u.ETa6àXXovT£Ç aKonoOvTai

Tf]v « <t>Epa£c^6vr|v », Kal 8eiv6v auToîç <J>alv£Tai' tô 8è

u.t)vijei aocpn.vEÎvat ttjv 8e6v. "Ate yàp (pEpo^Évcov tôv d

Ttpay^àTcov to l<|>aTiT6u.Evov Kal ETtacpâv Kal Suvà^iEVov

ETTaKoXouSELV aotyia. âv etr| . « ^EpÉTtacpa » oSv 8ià ii\v

aocf/iav Kal ttjv £Tia<|>f)v toO <f>£pou.£vou f\ 8e8ç Sv ôpGôç

KaXoÎTo, f)toloOtov tl— Si' 8-riEp Kal ouvecttiv auTrj b "AiSrçç

aocpôç ov, 8l6tl ToiaÛTr] eqtIv— vOv 8è auTn,ç EKKXlvouai t6

à 6 sfrcfi W : au- BT et primit. W ||b a àei&ouç W : it- BT

||

3 (àel)etSévat Hermann

j|5 8a l b pro

?À|| A7,|nr|Tpa Gobet : Bï^Tpàv

BW ôrjarîrpav T||

àrcdXXco BWt : -XXto T||6 <JA| BW :

-prjvT

||

9 [XTJxrjp 8t);j.7;tt;pTW :

|J.7Ï"CT)pB

||C I èpaaOstç ïyeiv Ven. i8£ : ô

èpaaOetç eyet jj4 "ceXêUT^v BT : ttjv teXcUTz^v W ||

5 çeppiçarra BWç£pg- T jj

6 à^o'XXto W : à^dXXà) Bt: cctîoXXo) T||8 çepae^dvrjv BW

ppso*- T H d i Ôêo'v BW : 0eav T||3 «peppÉTraça B (?) et corr. W .

ftpcxàfaT

çsppc-âsab

çêpeçaTxain

marg.t

çsppIçaTxa W||

5f)

Wb :f,B

r,T

||6 toSvopux W.

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404 d CRATYLE 83

on modifie son nom, en préférant l'euphonie à la vérité,

pour en faire Pherrêphatia. De même aussi pour Apollon ; je

e le répète, beaucoup redoutent le nom de ce dieu, comme s'il

avait une signification terrible l . Ne t'en es-tu pas aperçu?Hermogène. — Parfaitement, et tu dis vrai.

Socrate. — En fait, il est, à mon avis, très heureusement

approprié à la fonction du dieu.

Hermogène. — Gomment cela ?

Socrate. — Je vais essayer de dire ce que j'en pense. Il

405 a n'est pas de nom qui, à lui seul, aurait pu mieux s'ajuster aux

quatre attributions qui sont celles du dieu ; il touche à toutes,et les fait voir, pour ainsi dire : musique, divination, méde-

cine 2 et science de l'arc.

Hermogène. — Explique-toi : voilà un nom bien étrange,à t'en croire !

Socrate. — Dis plutôt : plein d'harmonie, comme il sied

à un dieu musicien. Tout d'abord, la purification et les pro-cédés

purificatoires,soit de la

médecinesoit delà

divination,h les fumigations de soufre au moyen des drogues médicinales

et divinatoires, les bains employés dans les opérations de ce

genre, et les aspersions d'eau lustrale,— toutes ces pratiques

semblent avoir un seul et même pouvoir, celui de purifier

l'homme dans son corps et dans son âme;n'est-il pas vrai ?

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Ainsi ce dieu sera celui

qui purifie,

et celui

qui lave et délivre des maux de ce genre ?

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — D'après les délivrances et les purificationsc qu'il opère, considéré comme guérisseur des maux de ce

genre, il serait donc justement nommé Apolouôn (qui lave).

D'après son art divinatoire, sa vérité et sa sincérité (haplouri)

la mort violente. Dans YIliade, notamment, la déesse participe au

caractère redoutable d'Hadès son époux.i. En le rattachant à à^oXXuvat (détruire). Ainsi fait Gassandre

dans Eschyle, Agamemnon, 1080-1082 : « Apollon , Apollon ,dieu des

routes ! Apollon qui me perds (kr.okXoyv zpôç) ! Tu m'as perdu (£7:06-

Xeaa;) sans peine une seconde fois. »

2. Si Apollon est le dieu redoutable qui extermine par ses traits,

il est aussi le dieu 'AXeÇixaxo;. 11 a

pour

fils

Asclépios;lui-même il

est le Guérisseur (Païôri), que l'on invoque dans le péan.

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83 KPATYAOS 404 d

ovolioc, EucxTOLLlav TUEpl ttXe'lovoç ttoloullevol Tf)ç àXrjQelac;.

ôSaxE «<t>Eppé(|)aTTav » aÔTfjv kccXelv. TaÔT&v Se Kal TTEpi

tov 'AnéXXco, OTtEp XÉyco, ttoXXoI

TtEcf>66r|VTaLTTEpl t6 cîvoLia e

toO 8eo0, coç tl Selvov jitjvuovtoc;' fjoôk fja8r|aat ;

EPM. ndvu jièv oSv, KalàXrj8f) XÉyELÇ.

ZO. T6 Se y' ecjtlv, 6c; IlioI Sokeî, KaXXiaTa ke'llievov

Ttpèç tt)v SùvaLuv toO 8eo0.

EPM. r\8>ç 8f| ;

ZQ. 'Eycb TTEipctao^aL cf>pàaaL ci yé liol cjjalvETau' ou yàp

Iotlv 8tl av LiaXXov ovoLia fjp^oasv ev 8v TÉTxapai Suvcxu-eol 405 a

Taîç toO 8eo0, £ctt£ Tcaacov Ecf>d*nTea8at Kal SrjXoOv TpcVnov

Tivà ^LouaLKrjv te Kal LiavTLKfjv Kal taTpiKfjv Kal Toc^iKrjv.

EPM. AéyE Sf)-axoTtov ydp tl liol XÉyEiç tS ovoLia

EÎvai.

ZO. EuàpLioarov lièv oî5v, Ste llouctlkoO ovtoç toO 8eo0.

ripcoTov liev yàp fj Kà8apatc; Kal ot Ka8apLiol Kal KaTà tf]v

taTpi.Kf)v Kal KaTà xf]v LiavTLKfjv Kal ai tolç laTpLKoîç

cpapLiaKOLÇ Kal al tolç LiavTLKoîc; tieplBelcocjelc; te Kal Ta b

XouTpà Ta EV TOLÇ toloûtoiç Kal at TtEpippàvaELÇ, TtOCVTa

Iv tl TaCTa SuvaLT* av, KaSapèv TtapÉ^Eiv tov avSpcoTtov

Kal KaTà t6 aÔLia Kal KaTà Tf]v ipu)(r)V f)ofl

;

EPM. nàvu lièv oSv.

Zn. OùkoOv S KaBalpcov 8eôç Kal o ànoXoticov te Kal

aTtoXucov tcov toloutcov KaKcov outoç otvEÏT] ;

EPM. nàvu u.Èv oQv.

Zn. KaTàljièv

to'lvuv Tàç aTToXùcJELc; te Kal ànoXouaELÇ,

é>q taTpèç côv tcov toloutcov, c 'AttoXoucov » av op8coç c

KaXoÎTo* KaTà Se tt^v LiavTLKTjv Kal t6 àXr)8éç te Kal tô

d 8 yepptf&rav B : çepe- ÏW ||e i àzdXXco Bt: à-oXXw T <x7:oXXco

W||5 eî; T7]v 5ûvap.tv

W||405 a i f

( pu.oaev ev 6v TW : f( p;jLoaaévov

B et yp. in marg. W || 7 xai xatà BT : xatà W||8 ai om. W

||

b 1 ai om. WD 7:ept6ett6a£tç TWb :

îtepiôeï wç eîç B|j

2 xau-ra ev

ti

TII

70 ante àroÀutov Tj|

c1

à^oXoutDv BT:

cnzolvuiv

W (sed ousupra u scrips.) kizoXûoiv

r]à^oXoucov Heindorf.

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405 c CRATYLE 84

— c'est la même chose — le nom qu'on lui donne effective-

ment en Thessalie serait tout à faitjustifié : c'est Aploun en

effet que tous les Thessaliens appellent ce dieu 1. De plus,

comme il est toujours maître de ses coups par sa science de

l'arc, il est celai qui atteint toujours (aéï ballon). Enfin, en ce

qui concerne l'art musical, voici ce qu'on doit supposer.Comme dans les mots akolouthos et akoïlis, l'a signifie

souvent ensemble (homou). De même ici, il faut entendre

cette rotation simultanée (homou polêsis) qui se fait dans

d le ciel, ce qu'on appelle révolutions (poloi), comme dans

l'harmonie du chant, ce qui se nomme consonance ; car tousces mouvements, affirment les beaux esprits versés dans la

musique et l'astronomie, se règlent tous en même tempssur une harmonie. Ce dieu préside à l'harmonie, en les dé-

terminant tous simultanément et chez les dieux et chez les

humains. En conséquence, de même que le compagnon de

route et la compagne de lit ont été appelés par nous akolou-

thos etakoîtis, par

substitution de l'a à

homo,ainsi nous

e avons appelé Apollon Vauleur du mouvement simultané (homo-

polôn), en insérant un second 1, parce que le nom était

identique à celui dont le sens est fâcheux. C'est pour soup-

çonner ce rapport que de nos jours certaines gens, faute de

considérer justement la valeur du nom, le redoutent comme406 a annonçant quelque destruction. En fait, comme nous le di-

sions tout à l'heure, il touche à toutes les fonctions du dieu :

simple, toujours atteignant le but, purifiant, auteur du mouvement

simultané. Quant aux Muses et à la musique en général, c'est

du fait de désirer (mô&thaïf , sernble-t-il, de la recherche et

de l'amour de la science que ce nom a été tiré. Celui de Lêto

vient de la bienveillance de cette déesse, en tant qu'elle

consent 3 aux demandes qu'on lui adresse. Peut-être aussi s'ex-

plique-t-il comme le prononcent les étrangers, car beaucoupdisent Lêtho. C'est donc, semble-t-il, pour l'absence de rudesse,

i. Les formes "àtcàouv, *Aj:àouvoç, "A^àouv. (pour 'ArcoXXcov, etc.)

se lisent en effet sur des inscriptions thessaliennes d'Erétrie (IG, IX,

a, 199), de Larissa (IG, IX, 5i2, 517), de Pharsale (IG, 1234), etc.

2. Ce mot dorien {désirer, rechercher), apparenté à l'épique

tA£jj.<xak, se rencontre chez Epicharme, Théognis, et aussi chez le*

tragiques. La forme dorienne Mwaa (pour MoSaa) a dû faciliter le

rapprochement dans l'esprit de Platon.3. Arxoi est expliqué ici par Xaw, vouloir, synonyme dorien de

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84 KPATTAOS 405 c

aTtXoOv — tciut&v yàp êaTiv — &anep ouv ol OettoXoI

KaXoOaiv auxév, èpBéxaT' av koXoîto" « "AtiXouv » yap <J>aai

TtàvTEç OettoXoI toOtov tov 8e6v. Aià Se t6 &eI (ioXSv

EyKpaTf]ç EÎvou To^iKrj « oleI ftàXXcov » ecttiv. KaTa Se

Tf]v ^ouaLKf]v Sel ÛTioXaBEÎv QcrnEp t6v &k6Xou86v te Kal

t^)v &KOLTLV 8tl to aXcf>a arj^alvEi TtoXXa)(oO to ô^ioO, Kal

IvxaOBa ttjv ô^oO TréXrjaiv Kai TtEpl tôv oupav6v, oOç Sfj

« TtéXouç » KaXoOatv, Kal TTEpl ttjv evxfj àSfj àp^ovlav, d

f) Si*] <ru^<|)covta KaXEÎTat, oti tocOtoc navTa, &q <|>a(7ivot

Ko^ol TiEpl ^iouatKf]v Kal àaTpovofcuav, àp^ovla xtvl

•noXEiTat Sjia •nàvTa # âmaTaTEÎ Se oOtoç o Beoç Tfl

âp^iovla Ô y ottoXSv auxà TràvTa Kal KaTa Beoùç Kal KaT*

àv8pamouc;' ôanEp oCv tov ô^iokéXeuBov Kal Ô(i6koltlv

« aKoXouBov » Kal « &koitiv » EKaXÉaayiEV, ^ETa6aX6vT£Ç

&vtI toO «0^10- » « à- », oôtco Kal « 'AnàXXcova » EKaXÉaa-

^ev oç îjv«

e

0^o7ToXcûv », ETEpov Xd68a £^6aX6vT£(;, 8ti e

ô^iobvu^ov EylyvETO tg> )(aXETTcp ovo^iaxt. ''OîiEp Kal vOv

ûttotiteijovtéç tlveç Sià t6\xt\ ôp8oç aKOTtELoBai Tfjv Sùva-

juv toO ôv6(iaToç <£o6o0vTai auxè oçarniaîvov (|>8opav Tiva*

t6 Se, Qansp apTt âXéyETo, Ttaacov E(paTiT6^Evov KEÎTai 406 a

tov toO BeoO Suvà^iECùv, à-nXoO, aEl (JàXXovToç, àno-

Xoùovtoç, S^ottoXoOvtoç. Tàç Se a Moùaaç » te Kal

oXcoç Tf)v ^ouaiKT^v ano toO fcicoaSai, a>ç eoikev, Kal Tfjç

^rjTi'jaECùc;te Kal cpiXoaocpiaç to ovo^ia toOto ETTcov6jiaaEv.

Ar)TcoSÈ ànô Tfjç TtpaoTrjToç ir\q BeoO, KaTa tô èBEXrj pvaEÎvai 5v av tiç SÉrjTau. "\ooc; Se cbç ot £évoi KaXoOaiv

TtoXXol yàp « Arj8à> » KaXoOaiv eolkev oSv npàç t6\ii\

C l\ "AtcXouv Boeckh : aTiXwy BW à;:Xôv T||

5 lui po'Xtov BW :

àei6<$Xcov Td6 ToÇ'.x.TJç

W y d 1 nal -ept t : xat xr(v

7:0,01BTW

|| rapt

ttjv w8r)vW IIA -oXei-ai Ast : -Xsî

||5 oiaotïoXûv : yp. xai baoxojcflw

W D 8 àvT? tou ôao aXoa Hermann : àvtl xou à'X<pa B <xvt! tou ô â T

àvTi toO âXça W D e 1 Xà6oa B : Xà[x68a Wb X T|| èfxCaXdvxeç Ven.

8 :

-6<£XXovteç H406 a 1 ôè

W: hï tcoXÙ BT

||

3ô}A07:oXoùyToç

om.

B (add. b) y5 è7:tovo}JLaaav

AV||6 OeXTj'aova T (corr. t).

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406 a GRATYLE 85

pour la douceur et la facilité de son caractère (to léïon tou

b êthous) qu'elle a été appelée Lêtho par ceux qui lui donnent

ce nom. Pour Artémis, c'est ïintégrité (to artèmès) et la

décence que son nom parait signifier, à cause de son amourde la virginité. Peut-être aussi est-ce experte en vertu (are tés

histôr) que la déesse a été appelée par l'auteur du nom ;ou

bien il voulait dire quelle a pris en horreur la fécondation

(aroton misêsasês) de la femme par l'homme. C'est pour une

de ces raisons ou pour toutes ensemble que ce nom a été

donné à la déesse par celui qui Ta établi.

Hermogène. — Et Dionysos et Aphrodite?Socrate. — Graves questions, fils d'Hipponicos ! En fait,

c'est dans un sens à la fois sérieux et plaisant que leurs noms

C ont été donnés à ces dieux. L'intention sérieuse, demande-la

à d'autres; quant à la plaisante, rien n'empêche de l'expo-

ser : les dieux aussi aiment le badinage. Dionysos serait celui

qui donne le vin (ho didous ton oïnori), appelé Didoînusos par

manière de plaisanterie. Et le vin (oïnos), parce qu'il donneà la plupart des buveurs l'illusion d'avoir la raison dont ils

manquent, serait à fort bon droit appelé oïonous (qui fait

croire quon a de la raison). Quant à Aphrodite, il ne vaut

pas la peine de contredire Hésiode, et il faut lui accorder qued c'est pour être née de Yécume (aphros) qu'elle a été nommée

Aphrodite *.

Hermogène. — Mais en ta

qualitéd'Athénien, Socrate, tu

n'oublieras pas non plus Athéna, ni Héphaïstos et Ares 2.

Socrate. — Non, cène serait pas naturel.

Hermogène. — En effet.

Socrate. — L'autre nom de la déesse, il n'est pas diffi-

cile d'en dire la raison.

Hermogène. — Lequel ?

Socrate. — C'est Pallas, n'est-ce pas? que nous l'appelons.

Hermogène. — Évidemment.

Socrate. — En faisant venir ce nom de la danse en

e armes, nous serions, je crois, dans le vrai. Car s'élever soi-

même en l'air ou élever autre chose, soit en partant de terre,

èOÉXto. Osthoff (Boisacq, Dict. êtym., p. 555, 5. r.) le rattache à

Xavôdtvco. Cf. plus loin Ar,6oi.

i. Cf. Théogonie, v. 195-197.2. Athéna, on le sait, était la protectrice particulière d'Athènes.

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85 KPATYA02 406 a

xpa)(ù toO fjSouç, àXX1

fj u.£p6v xe Kal Xeîov « Arj8à> »

KEKXf]a8ai ûtto xôv xoOxo KaXouvxcov. « "ApxELuç » 8è xo b

àpTE^ièç cpalvExaiKal xà

kôcjluov,Sià

xf|V xfjç TtapSEvlac;ETu8uu.lav ïacoç Se àp£xr]ç taxopa xf)v 8eov ek&Xecjev ô

KaXÉaaç, xoc)(a S' av Kal â>ç xov apoxov Liiarjaàar|ç x6v

àvSpôç èv yuvaiKt' f)Sià xouxov xi

fj8ià Ttavxa xaOxa xè

Svo^ia xoOxo ô xiSéljlevoç I8exo xfj 8eô.

EPM. Tt 8è ô « Aiévuaéç » xe Kalf\

« 'AcppoSixrj »;

Zft.MEyàXa,

S naî'ItittovIkou, êpcùxfiç.

'AXXà laxt

yàp Kal anouSaCcoç EÎpr)u.Évoc; ô xpônoç xcov ôvou.axa>v xou-

xoiç xoîç Ssoîç Kal TTaiSiKcoç. Tov l^èvo8v arrouSaîov c

aXXouç xivàç âp<*>xa, xov 8è TtaiSiKov ouSèv kcoXuei 8leX8elv

<J>iXoTTaiau.ov£c; yàp Kal ol 8eoI. "O xe yàp Aiovuaoç eXt\av

ôSiSoùçxov otvov a AiSolvuaoç »Evnai8i& koXou^evoç,

oîvoç 8',

oxl oÏEaSat voOve^eiv

ttoleî xqv tuv6vxcov

xoùçttoXXoùç ouk Ixovxaç, « ot6vouç» StKatéxax

9

av koXoul^evoç.

riEpl 8è 'AcppoStxrjç ouk a£,iov 'HaiéSco àvxiXÉyEiv, àXXà

£juy)(Cùp£Îv oxl 8iàxi*)v (ek) xoO à<J>poO yÉVEaiv «

s

A<J>po- d

8lxrj»

EKXr)8rj.

EPM. s

AXXà ujqv oûS'3

A8r)vaç 'A8r|vaî6c; y' qv, S Zo-

KpaxEç, ETtiXr|aEL,

ouS3

'Hcpaloxouxe Kal

"ApECoç.Z£l. OuSè eIk<5ç yE .

EPM. Ou yàp.

ZO. OukoOv x6 u.èv IxEpov ovou.a auxfjç ou xoXettôv

eIttelv Si9

o KEÎxai.

EPM. Tô Tioîov;

Zn. « llaXXàSa » itou

auxf]vKaXo0u.£v.

EPM. n&ç yàp où;

ZO. ToOxo lièv xolvuv octi8 xr]ç iv xoîç otiXoiç Ôp^GECÛÇ

f)youu.EVOL x£8fjvai ôp8coç av, â>ç lycûu.ai, niyolu.£8a- x8 yàp e

a 9 Xtj6w BT : Izrfiù W Utrflà Heindorf||b 1 U

(ô-.a) Stephanus

Il5-6 xà ôvd

(

aaTa W pro xo ovoixa|| 7 8s BW : 8ai Tb

|| 9 arcouBaio;

prim. T d c 3 çiXo7raiyp.ovsç bt || 6 xaXoïxo Hermann pro xaXou-[asvo; Il

d 1 sx add. Hermann.

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406 e GRATYLE 86

soit en se servant des mains, c'est ce que nous nommonspa//ém407 a

(agiter) etpallesthai (s'agiter), mettre en danse et danser.

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Pallas s'explique donc ainsi.

Hermogène. — Et avec raison. Mais l'autre nom, qu'endis-tu ?

Socrate. — Celui à'A théna ?

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Voici qui est plus malaisé, mon ami. Déjàles anciens, semble-t-il, jugeaient d'Athéna comme aujour-

b d'hui les connaisseurs en poésie homérique. La plupart de

ceux-ci, commentant le poète, prétendent qu'il a fait

d'Athéna l'esprit et la pensée même ;l'auteur des noms avait

d'elle, apparemment, une idée analogue ; allant plus loin

encore, et voulant désigner l'intelligence de la divinité (théou

noêsis)1

,il déclare, pour ainsi dire, qu'elle est la raison divine

(ha théonoa), en substituante l'è l'a d'un dialecte étranger, et

en ôtant l'i et le s. Mais peut-être n'est-ce pas non plus la

raison, et estimait-il qu'elle conçoit mieux que les autres les

choses divines (ta thêïa noousa), en l'appelant Théonoê. Rien

n'empêche, d'ailleurs, que ce soit l'intelligence naturelle (hè

en tô êthéî noêsis), identifiée par lui avec cette déesse, qu'il ait

c voulu nommer Êthonoê;mais on a modifié— soit l'auteur

lui-même, soit d'autres après lui— le nom qu'on croyait em-

bellir, et l'on en a fait Athênaa.Hermogène. — Et Héphaïstos ? Gomment l'expliques-tu ?

Socrate. — Veux-tu parler de ce grand maître dans la

connaissance de la lumière (phaeos histôr)2?

Hermogène. — Apparemment.Socrate. — Le premier venu ne reconnait-il pas en lui

Phaïstos (brillant), avec adjonction de l'ê ?

Hermogène. — Probablement, à moinsque

tu n'aies

encore quelque autre idée, comme il est vraisemblable.

Les Athéniens honoraient Héphaïstos avec Athéna dans la fête des

Apaturies ; ils lui avaient élevé un temple dans la ville. Quant à

Ares, c'est à lui que la colline de l'Aréopage devait son nom : il y

avait été jugé, suivant la légende, pour avoir tué Halirrhotios.

i. Suivant l'hymne homérique (XXVIII, 4-5), Athéna était sortie

de la tète de Zeus. Cf. Pindare, 01., VII, 35 sq.

a. Héphaïstos est présenté comme dieu de la lumière, parce qu'il

est celui du feu.

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86 KPATTAOS 406 e

Ttouf]aûx6v

fjti aXXo uETEOpl^Eiv f)

ànà t^ç yfjç flev

Taîç ^epalv « tkxXXelv » te Kal a TiàXXEaSai » Kal Ôp^Eiv 407 a

Kalôp)(EÎa8ai

koXoÛuev.

EPM. nàvu uev oCv.

Zft. « riaXXàSa » uèv tolvuv Taoxfl.

EPM. Kal èpBcoc; ys. 'AXXàSrj

to ETEpov ttôç XÉyEiç ;

ZO. T6 t^ç 'Ae^vSç ;

EPM. Nat.

ZO.ToOto

E^6pi8ÉaTEpov,S

<J>IXe.'Eo'iKaai

8rjKal ot

naXaiol xf^v 'ASrjvav vou'i£eiv oonEp ol vOv TTEpl "O^rjpov

SelvoI. Kal yàp toùtcdv ot TtoXXol è^rjyoû^Evoi t6v TtoirjTrjvb

<J>aat Tfjv 'AGrjvâv auTÔv voOv te Kal Siàvoiav Ti£Tioir)K£vai,

Kal ô là ôvôuaTa ttoiûùv eoike toioGt6v tl TTEpl avTfjç 8ia-

voEÎaGai, etl 8è uei£6vcoc; XÉyov 8eo0 vôrjaiv gùottepeI XéyEi

8xi « a 8£ovéa » ecjtIv

auTr),t&

aX<j>a E,evlkcùçàvxl toO

fjxa

Xprjaà^Evoç Kal tô tÔTa Kal t8 aîyua ou|>£Xcûv. "lacoç Se

oùSè TaÛTrj, àXXs

a>ç Ta 8eux voouar|ç aÙTfjç 8ia(f>EpovTeù(;

tcov aXXcov « 0£ov6rjv » ekoXegev. OuSev 8è à*n£)(£i Kal if\v

ev t& tj8el vérjaiv a>ç ouaav ttjv 8e8v TaÙTrjv a 'H8ov<5r|v »

^.èv fiouXEaSat TTpoaELTiELV napayayàv Bkf) auTÔç fj tiveç C

CcxTEpovetïI t6

koXXiov, oç $ovto,«

'ASrjvàav» EKaXEaav.

EPM. Tl 8è8f)

t6v "H^aicruov, ixf\ XéyEiç ;

ZO. *H tôv yEvvatov t6v «cjnxeoç ïaropa » èpoTSç ;

EPM. "Eouca.

ZQ. OûkoOv oStoç uèv TTavxl SfjXoç « <l>aîaToç » ©v, tô

f)Ta TtpoaEXKuaàuEvoc; ;

EPM.KivSuveuei,

làvurj Tir) aoi, &ç eoikev,

etiaXXrj

86£r,.

e a au-rôv B (?) : aùxàv TW (ut uidet.) b (?) ||kxo W pro r] àrcô

!|407 a 9 ojjLTjpov

B : orfpo» TW ||b 4 Xfyn W pro Xéyet ||

5 à

Oeovo'a Buttmann : rt 6eovdrj BWt tjÔovo't) T ||

xà T pro tw|| àX?a : â

W|| r,Ta BW :

y)T

||6 tô uotcc xat to atyixa BW : to t xai to â T

||

7 où T pro où&è || C 2 àôrjvaav T:

-vav BWt|| 3 tî 6*at b || 4 ?,

B(ut uid.) W : ^ Tb

|| 7 ?JTa B :t)TW.

Page 124: Platon, 5.2 Cratyle

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407 c CRATYLE 87

Socrate. — Eh bien, pour la prévenir, interroge-moi sur

Ares.

Hermogène. — Je t'interroge,

d Socrate. — Si tu veux, c'est à sa nature mâle (arrhèn) et

virile qu'Ares devra son nom; ou, si tu préfères, à son ca-

ractère dur et inflexible — ce qui se dit arrhatos (infran-

gible^—

;en ce sens, le nom d'Ares conviendrait de toute

façon au dieu de la guerre.Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Laissons donc là les dieux, par les dieux !

Car je crains, pour ma part, de discourir sur eux '. Mais pro-

pose-moi d'autres problèmes à ta convenance, et a tu verras

ce que valent les chevaux » d'Euthyphron2

.

e Hermogène. — Je n'y manquerai pas. Mais encore une

question sur Hermès, puisqu'aussi bien Gratyle nie que je

sois Hermogène3

. Essayons d'examiner ce que signifie le nom

d'Hermès, pour savoir si cet homme a raison.

Socrate. —Eh bien,

mais il

paraîtse

rapporterau dis-

cours, ce nom d'Hermès; les caractères d'interprète (hermê-408 a neus), de messager, d'adroit voleur, de trompeur en paroles

et d'habile marchand, c'est au pouvoir du discours que se

rattache toute cette activité. Comme nous le disions plushaut *, parler (èirèïn), c'est faire usage du discours, et le mot

qu'Homère emploie en maint endroit — mêsato (il imagina),dit-il — ce mot

équivaut

à machiner. C'est d'après ces

deux éléments que celui qui imagina le langage et le

discours — [or, légéïn, c'est eïréïn]—

,ce dieu dont nous

parlons, le législateur nous prescrit pour ainsi dire de

bl'appeler: « hommes, nous dit-il, celui qui imagina la

parole (to éïréïn èmêsato), c'est à bon droit que vous l'appelle-

riez Eirémês. » Mais nous autres, nous croyons enjoliver son

nom en l'appelant Hermès. [Et Iris, elle aussi, c'est de

1 . On a vu plus haut (4oo d sq.) que Socrate n'a entrepris cette

enquête sur les noms des dieux qu'avec les plus expresses réserves.

2. Parodie des v. 221-2 du chant V de Ylliade. Énée dit à Pan-

daros : « Allons, monte sur mon char, si tu veux voir ce que valent les

chevaux troyens (otot Tptotxoi tacot), habiles à bondir çà et là dans la

plaine pour la poursuite comme pour la fuite » .

3. Cf. 383 b.

4. Cf. 398 b.

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87 KPATTA02 407 c

EH. 'AU' ïvocn^| &6£,r\,

xàv "Apr) êpàxa.

EPM. 'EpcoxS.

Zft. OôkoOv, eI lièv ftotiXEi, KaTà x8 Sppcv te Kal Kaxà d

x8 àvSpEÎov « "Aprjç » avEÏr)'

eI S' a8 Kaxà t6 aKXr|p6v te

<al aLiExàaxpocpov, 88f)

« appaxov » KaXEÎxai, Kalxatixfl

Siv navra^fj ttoXelukô 6e$ TipÉnot « "Aprj » KaXEÎoGai.

EPM. nàvu lièv o5v.

Zfl. 'Ek Lièv oSv xov Gecûv Ttp8ç Geqv àTtaXXaycDLiEv, êbç

lycû 8é8oiKa TiEpl aûxov SiaXÉyEaGai' TiEpl Se aXXcov zï

xivcov (So\jXel TtpôBaXXé liol, a3<f>pa tSrjaL otoi » Eu8ù<J>povoç

« ÏTTTIOL ».

EPM. 'AXXà iroLr)acD xaOxa, exl yE EV EpoLiEvôç <je TtEpl e

e

EpLioO, ETtEiSr) lie Kal off q>r\oiv KpaxtiXoç 'EpLioyÉvT] EÎvai.

riELpo^EBa ouv xèv « 'EpLif^v » aKÉipaaQai xl Kal voeÎ t8

Bvc-Lia, ïva Kal eîSSllev el xl S8e XéyEi.

ZO. 'AXXàLif)v

xoOxé yE eolke TtEpl Xdyov xi EÎvai ô

«e

Eptif]ç », Kal xà EpLii^vÉa EÎvat Kal to ayyEXov Kal x6

kXotuk6v xe Kal to ànaxr|X6v ev X6yoLÇ Kal xè àyopaaxtKév, 408 a

TtEpl X6you SùvaLitv laxtv Tt&aa aSxr] f\ TipayLiaxEla* oTtEp

o3v Kal ev ToîçTtp6a8£v IXÉyoLiEv, xè « EÏpEiv » Xdyou XP£La

èaxt, to 8é, otov Kal °OLir|poç TtoXXa^oO XéyEi, « ELi^aaTÔ »

(prjaiv,xoOxo 8è Lnrjxavi^aaaGal écjtiv. 'E£ àLicpoTÉpcov o3v

xoiixcov tov x6 XéyEiv xe Kal tov Xôyov LirjaaLiEvov [to 8è

XÉyElV 8r)laXLV EÏpELv] XOOXOV TOV 6e8v ûboTÏEpEl ETTLXOtXXEL

f|Liîv8 volioBéttjç' a *0 avGpcûTtoi, Sç x8 EÏpEiv ELifjaaxo, b

SiKalcoç av koXoîto ûtt8 Sllqv EtpÉLirçç »' vOv 8è tJlielç,

&ç otéLiEGa, KaXXcùTil^ovxEÇ x8 5voLia a 'EpLif^v » koXoOliev.

Testim. :||407 d 8 IL, 5, 221 o<ppa t'Srjai 0X01

Tpco-.oi ïnr.oi\\

408 a 4 l[xr[aaTo, cf. Il, 2, 6, 167 al.

d 4 *avxaxou W || r.pér.&iTW

||6 oSv om. T

|| 7-8 el' Ttvcuv T :

Ttvwv B (bvTtvwv W xtvtov et b[Je 3 voeï Tb : vdsi BW

II 4 K*J om. T

||el' ti xaî W

||6 xxl xà : ~o yàp W ||

408 a 2 ?:paY[xaT£:a Wb :

-ça B -Teia (sic) T ||6 8î om. T |J

to — 7 et'petv secl. Cornarius

H 7 coa^sp el BW corr. b||b 2

etpejxriçBW :

etp- T (prim. £p(xr)ç).

V. 2. - 9

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408 b CRATYLE 88

êïréîn qu'elle semble avoir tiré son nom, car elle était mes-

sagère.]

Hermogë.ne. — Par Zeus !

Cratyleavait bien

raison,

à ce

compte, de me refuser le nom d'Hermogène : je n'ai certes

pas grandes ressources de parole !

Socrate. — Et même que Pan, fils d'Hermès, présenteune double nature, voilà qui est vraisemblable, mon cama-

rade,

c Hermogène. — Gomment cela ?

Socrate. — Tu sais que le discours exprime tout, roule et

met sans cesse tout en circulation. Et il est de deux sortes :

vrai et faux 1.

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Ce qu'il a de vrai est poli et divin, et habite

là-haut avec les dieux, tandis que le faux reste en bas avec

le commun des hommes, rude et rappelant le bouc (tragikon).

Car c'est ici, dans la vie tragique2, que se trouvent pour la

plupart fables et mensonges.Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — C'est donc à bon droit que celui qui fait tout

(pan) connaître, et sans cesse met tout en circulation (aéî po-

d Ion) sera nommé Pan aïpolos (Pan chevrier). Fils d'Hermès 3,

il a double nature : poli par en haut, mais, par en bas, rude

et semblable à un bouc. Et Pan est ou bien le langage lui-

même, ou le frère du langage, s'il est vraiment fils d'Her-mès

;or qu'un frère ressemble à son frère, rien d'étonnant.

Mais, comme je le disais, bienheureux Hermogène, lais-

sons-là les dieux.

Les astres Hermogène. — Du moins ceux de cette

et les phénomènes sorte, Socrate, si tu y tiens. Mais quinaturels.

t'empêche de parler des dieux tels quele soleil, la lune, les astres, la terre, l'éther, l'air, le feu,

e l'eau, les saisons et l'année ?

Socrate. — C'est bien de l'ouvrage que tu me donnes I

Pourtant, si tu dois y prendre plaisir, je consens.

Hermogène. — Assurément tu me feras plaisir.

i. Cf. 385 b.

2. Platon joue sur le sens de xpa^ixôç, et songe aux légendes mises

à la scène par les tragiques, qu'il condamne dans la République.

3. Il était né d'Hermès et de la fille de Dryops. Suivant l'hymne

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88 KPAÏVAOS 408 b

[Kal fj yc "Ipu; àno toO EÏpEiv eoikevKEKXr)fciÉvr|,

^ L

ayyEXoç fjv.]

EPM. Ni] tov Ala, eC Spa ^01 Sokel KpaTÙXoç XéyEiv t6

e^è jif]EÎvai

e

Ep^oY£vr|' otteouv Eu^xavéç yé eI^l Xôyou.

ZG. Kal tô y£ tôv riâva toOe

Ep^oO eÎvcu ûèv8u|>uf}

i\Ei t6 eIk<5ç, S ETaîpE.

EPM. riSçSl*) ;C

Zfï. Oîa8a oti ô Xoyoç t8 Tt&v arj^alvEi Kal kukXeî Kal

ttoXei àsl, Kal ecjti SlttXoOç, àXrjSi'iç te Kal i^EuSfjç.

EPM. nàvu yE.

ZO. OùkoOv t6^ièv àXr|8èc; auToO Xelov Kal BeÎov *al

&vcû oIkoOv ev toÎç8eoÎç, to 8e ^eOSoç KaTco èv to lç ttoXXoÎc;

tôv âvBpcûTïcov Kal Tpa)(ù Kal TpayiKOV IvTaOGa yàp ttXel-

qtoi ol ^i08ol te Kal Ta ipEuSrj eotIv, TTEpl t6v TpayiKèv

fclov.

EPM. nàvu yE.

ZO. 'OpBûùc; ap' (av) ôïïSv ^vùov Kal «SceI tioXSv

« riàv aiTt6Xoç »EÏrj, 8i<|n>f]<;

e

Ep^oO û<5ç, Ta ^èv ocvcùGev d

XeÎoç, Ta Se k<xtcû8ev Tpa^ùç Kal TpayoEi8is

|ç. Kal ecjtiv

fJToi Xdyoç fj X6you oiSeXcjj&c;o riàv, EÏTtEp

e

Ep^oO àdç

ECTiv &8eXc|)ô 8è loLKÉvat ol8eX(|>6v ouSèv Sau^acruév.S

AXX'

8nEp êyo IXEyov, S ^aKapiE, àTtaXXayoà^EV ek tgùv Geoûv.

EPM. Tqv yE toioutcov, o ZoKpaTEÇ, eI &oûXei. ïlEpl

8è tôv tolôvSe tI oe kcûXùei SieXSeîv, oîov t^XIou te Kal

QEXl^vriç KalâaTpcov Kalyf|ç Kal aîSépoç Kal àÉpoç Kalnupèç

Kal CSaToç Kal obpôv Kal êviauToO;

e

ZO. Zu)(và \lé.V fclOl TUpOOTàTTElÇ, O^iCÙÇ 8É, ELTTEp GOt

KE^apta^Évov laTai, eSeXco.

EPM. Kalfcif]v XaP LEÎ -

b 4 xai — 5 rjv secl. Heindorf||8 ov (pro uiôv) T corr. man.

recentiss.||C 8

^sûSir)B :

<]/£uoy]TW

j|il av add. Stallbaum

||d i 7;àv

afodXoç B(ut uid.):

7:avat7i:dXoç TWb|j3 rcàv BW : xxv ï et

prim.W ||6 rapi os twv xotwvoe Wb :

7cspt tôv TOtwvôe BTcepi

t65v toiou-

to)v 8e T|| 7 ae xwXusi BW : xwXuet ae T.

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408 e CRATYLE 8g

Socrate. — Par où donc commencer ? Veux-tu que nous

suivions ton ordre, en parlant du soleil (hêlios) ?

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — On y verrait plus clair, semble-t-il, si l'on pre-

409 a nait le nom dorien — halios est en effet l'appellation do-

rienne—;

il peut être halios en tant qu'il rassemble (halizèîri)

les humains au même endroit, quand il se lève;

il peut l'être

aussi parce qu'il roule sans cesse (aéï héïlèïn) autour de la

terre dans sa course, ou encore, semble-t-il, parce que dans

sa marche il nuance (poïkilléi) de couleurs variées les produc-tions de la terre

; or poïkilléïn et aîoléîn reviennent au même.Hermogène. — Et la lune (sélênê) ?

Socrate. — Voilà un nom qui paraît accablant pour

Anaxagore.Hermogène. — Pourquoi?Socrate. — Il a bien l'air de montrer une conception

b plus ancienne dans cette thèse récente du philosophe que la

lune reçoit sa lumière du soleil * .

Hermogène. — Gomment cela ?

Socrate. — Clarté (sélas) et lumière sont, n'est-ce pas?une même chose.

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Cette lumière de la lune est toujours « nou-

velle et ancienne », si l'école d'Anaxagore dit vrai 2. Car le

soleil, tournant sans cesse autour d'elle, projette sans cessesur elle une lumière « nouvelle », et celle du mois précé-

dent est « ancienne ».

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Or sêlanaia 3 est le nom que beaucoup don-

nent à la lune.

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. —Puisque

son éclat(sêlas)

esttoujours (aéi)

nou-

homérique à Pan, les immortels lui donnèrent son nom parce que sa

vue les avait tous (rcaaiv) égayés quand son père l'avait apporté, nou-

veau-né, dans l'Olympe (v. ^7).

1. Plutarque, De placitis philosophorum , II, 27, attribue cette

théorie à Thaïes et à son école.

2. Anaxagore passait pour avoir expliqué le premier les phases de

la lune. Mais d'après Plutarque, Nicias, 23, ses théories étaient encore

tenues secrètes au ve siècle, et acceptées seulement d'un petit nombre.3. La forme aeXr]vou7) se trouve chez Aristophane, Nuées (6i4);

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89 KPATTAOS 408 e

ZO. Tt8f|

ouv TipÔTov [îouXei ; f) ûcrnsp eTtïeç tov

fjAiov 8iéX8co^Ev ;

EPM. nàvu ys.ZO. "Eolke toIvuv KaxàSrjXov yEvé^iEVov âv ^aXXov eI

xép Aopiicô tlç ôvo^axi XP^T0—

<( °&L0V » Y*P KaXoOaiv 409 a

ot Acopif]ç— « &Àioç » o8v

EÏr) fcièvav Kaxà t6 aXi^Eiv eIç

xauTOv toùç àvSpcîmouç, ETTEtSàv àvaTEtXrj, EÏT)S' &v Kal

tô TtEpl xf]v yf]v &eI eIXeÎv tc*>v, IoIkoi 8s

av Kal 8ti ttol-

kIXXei tebv

xà Y>-Yv<5^

Eva ek i?\q y?\c;' tb

8è ttoikIXXeiv Kal

atoXEÎv TaÔTév.

EPM. Ti 8èf)

« aEX^vr) à;

ZO. ToOto 8è _t6 Svo^ia <J>alvETai tovs

AvaE,aY6pav

TUÉ^EIV.

EPM. T18/| ;

ZO."Eolke

8t]Xo0vtl TtaXaidTEpov8

ekeîvoçveghttI

IXeyev, otif\ aEX^vrj amb xoO /jXlou îiyzi t8

<f>éùç. b

EPM. nûçS^ ;

ZO. T6 uév mou « aÉXaç » Kal t6 «<|>coç

» Taux6v.

EPM. Nat.

ZO. Néov 8é ttou Kal evov &eI eœtl TiEpl xf]v aEXfjvrjv

toOtotô

<J>cûç, EÏTtEp àXr)8r]ol

'Ava^aY^pEiot XéyouctlvkùkXcû

Y&p TtOU àEl aUTf)V TT£pil<A>V VÉOV (&eI ETTlBdXXEL, EVOV 8È

ÔTràp)(£L t6 toO npoTÉpou yr|v6ç.

EPM. n&vu ye.

ZO. « ZEXavatav » 8é \e KaXoOaiv auTijv ttoXXoI.

EPM. nàvu ye-

ZO. "Oti 8è aéXa ç véov Kal evov e)(ei &sl,«

aEXaEvo-

e 5 xt o'

ouv W|| r,

Wb : ^ B rjT

||409 a 2

fjisvom. B

||4 e(Xeiv

B : et- TW et primit. B ut uid.||

êofxot BT : tout* W|| 7 « BW :

8<xt Tb sed e supra uers. add. T||8 touto 8à tÔ ovotxa tpalvixat BT

Yp. W : touto ol Eotxs t6ovo|j.a

W||

11 ÔtjXouvt: Heusde : SrjXouv ti

(uel tî) Ilb 5 evov W : e'vov B Ivov T et prim. W evvov b

|| 7 7C£puwv

TW : ^eptwv B||

êvov B : evov TW evvov b}j

12 xat B : Te xaî TW||

evov codd. || aeXaevoveoâeta Heindorf : aeXaevveoàeta BW aeXXaev-

vsoàeta T.

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409 c GRATYLE 90

c veau et ancien (néon te kaï hénon) à la fois, sélaénonéoaeîa est

le nom qu'il serait le plus légitime de lui donner; mais, par

contraction, on l'a appelée sélanaïa.

Hermogène. —Il a une allure dithyrambique, ce nom-là *,

Socrate ! Mais ceux du mois et des astres, qu'en dis-tu ?

Socrate. — Le mois (meis)2 serait justement appelé méïês,

de mêïousthaï (diminuer) ; quant aux astres, c'est de Yéclair

(astrape) qu'ils semblent tirer leur dénomination. L'éclair,

qui fa it détourner lesyeux (anastréphéî ta ôpà), devrait s'appe-

ler anastrôpê, mais on en a fait astrapêen l'enjolivant.

Hermogène. — Et le feu et l'eau ?

d Socrate. — Lefeu (par) m'embarrasse. Il faut sans doute ou

que la Muse d'Euthyphron m'ait abandonné, ou que ce mot

soit des plus difficiles. Examine donc l'expédient que j'appliqueà tous les cas de ce genre qui me mettent dans l'embarras.

Hermogène. — Quel expédient ?

Socrate. — Je vais te le dire. Réponds-moi : pourrais-tu

m'expliquer la formation du mot pur?Hermogène. — Non, par Zeus ! pas moi.

Socrate.— Eh bien, examine ce que je soupçonne là-dessus,

e pour ma part. J'imagine que les Grecs, et notamment ceux

des pays soumis aux Barbares, ont emprunté aux Barbares

un grand nombre de noms 3.

Hermogène. — Et alors?

Socrate. — Si l'on en cherchaitl'étymologie probable

d'après la langue grecque, et non d'après celle dont le nomse trouve provenir, tu sais qu'on serait embarrassé.

Hermogène. — Vraisemblablement.

410 a Socrate .— Prends donc garde que ce nom de pur ne soit, lui

aussi, d'origine barbare. Il n'est pas facile de le rattacher à la

langue grecque, et en outre on voit les Phrygiens désigner

asXrjva-'a (forme « dorienne »), chez Euripide, Phén., 176, et

Théocrite, II, i65.

1. Par son ampleur et sa complexité, il rappelle les composéshardis dont la lyrique chorale fait si grand usage.

2. Le nom qui désigne le mois a deux formes : urjv et u.ei'ç.

Celle-ci se trouve non seulement en éolien, dans une partie du

dorien et en ionien, mais même en attique. La première est néan-

moins la plus usitée chez les prosateurs attiques.

3. Cette hypothèse, que Socrate traite d'expédient, et qu'il rejettera

plus loin, se trouve répondre à la réalité. Voir la Notice, p. 18.

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410a CRATYLE 91

ainsi le feu, avec un léger changement. De même pourhudôr (eau), kunas (chiennes), et bien d'autres.

Hermogène. — C'est exact.

Socrate. —Il ne faut donc pas faire violence à ces noms,— sans quoi l'on aurait à dire sur leur compte. Le feu et

b l'eau, je les écarte de la sorte. Quant à l'air (aêr), Hermogène,est-ce parce qu'iï enlève (aïrêi) ce qui est sur la terre qu'il

est nommé aêr? ou parce qu'il est dans un flux perpé-tuel (aéï rhêl) ? ou parce que le souffle du vent naît de son

cours? Car les poètes, n'est-ce pas ? appellent aêtaï les souffles

du vent. Peut-être veut-il donc dire aêlorrhous (qui s'écouleen haleines), comme qui dirait pneumatorrhous (qui s"écoule

ensouffles). Quant à Yéther, Yoici à peu près mon opinion :

comme il court sans cesse en circulant (aéï thèï rhéôn) autour

de l'air, il mériterait le nom de aéïthèêr (qui court toujours).

La terre (gê) manifeste plus clairement sa signification si on

c la nomme gaïa. Car gaïa serait justement appelée procréa-

trice,suivant

Homère: il dit

eneffet

gégâasi pour gégennês-thaî (avoir été enfante). Eh bien, que nous restait-il aprèscela?

Hermogène. — Les saisons, Socrate, l'année et l'an.

Socrate. — Le nom des saisons (hôraï), c'est à l'ancienne

mode attique1

qu'il faut le prononcer, si tu veux en connaî-

tre le sens probable. Elles sont horaï parce qu'elles déter-

minent (horizéïn) les hivers et les étés, les vents et les fruits

de la terre; or, en tant qu'elles déterminent, elles méritent le

d nom de horai. Éniautos (année) et ètos (an) ont chance

d'être une seule et même chose. Ce qui amène tour à

tour à la lumière les productions et les êtres, et les contrôle

soi-même en soi-même rappelle, en effet, ce que nous di-

sions plus haut de Zeus, dont le nom, coupé en deux, était

Zêna pour les uns et Dia pour les autres. De même ici les

uns disent éniautos, de en héautô (en soi-même), les autres ètos,

de élazeî (contrôle). L'ensemble de l'explication est que cette

expression, en héautô étazon (contrôlant en soi-même), se pro-

nonce en deux parties, bien que faisant un tout, de manière

e à former deux noms, éniautos et ètos, issus d'une seule locu-

tion.

1 . L'ancien alphabet attique n'avait pas de signe particulier pourl'io. L'o notait aussi ou et to.

Page 133: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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9 r KPATTAOS 410;

<Pp\jyEÇ a\iiKp6v ti TtapaKXlvovTEÇ* Kal t<5 yc « 68op » Kal

Tàç « KÙvaç » Kal aXXa TtoXXà.

EPM. "Ecjti xaOxa.

ZO. Ou tolvuv Sel TaOTa Ttpoa6iࣣa8ai, ItteI e^oi y* &v

TlÇ ELTTEÎV TTEpi aUTCOV. ToLJLEV

o8v TlOp Kal TÔ OScùp TaÛTT]

àTtoùBoO^af ô Seotfjp Spà y£, & e

EpLjt6yEVEc;, 8ti aïpEi b

Ta àno Tf]ç yfjç,« àf)p » KÉKXrjxat ; f)

8ti cceI £eÎ ; f\8ti

TtvEO^a è£ aÔToO ytyvExai £éovtoç ;oî yàp TtoirjTal nou to

TuvEÙ^axa«

àfjTaç» KaXoOaiv

ïacoçouv

XéyEi, &on£pav eI

eïttol TivEu^iaTéppouv ,« àr)TÔppouv « [S8ev Sf) (ioûXETai

aôxôv outoç eItieÎv, 8ti ecjtIv à^p]. Tèv Se atSépa xf]8É Ttrj

ÛTioXa(i6àvco, 8ti àsl 8eî TtEpl t6v àépa £écov « àEi8Ef)p »

SiKalcoç &v koXoîto. Tf] Se n&XXov ar^ialvEi 8 (io\jXExat, èàv

tiç « yaîav » ôvo^àarj* yaîa yàp yEvvfjTEipa aveix] c

opBôç KEKXrj^Évrj, ôç <|>r)aiv "O^rjpoç"t6

yàp«

yEyàaaiv»

yEyEvvfjaSai XÉyEi. EÎev tI oSvf\\xlv fjv

to jiExà toOto;

EPM. *Opai, S ZoKpaxEç, <al evuxutSç Kal etoç.

ZO. Aljièv Sf) opai 'AttikiotI â>ç t6 TraXaifcv £r|TÉov,

EÎTTEp (SoûXei t6 eIk&ç EÎSévai' 8pai yàp Etat Sià t6 ôpl^Eiv

XEitiQvàç te Kal Géprj Kal TtVEtijiaTa Kal toùç Kapnoùç

toùçek

Tfjç y^ç* ôpi£ouaaiSe

SiKaicoc;

av «

Spai» kocXoÎvto.

'EviauTèç Se Kal etoç ku/Suveùei ev tl EÎvai. Tô yàp là d

(|)u6^Eva Kal Ta yLyv6jiEva IvfciÉpEi EKaaTov Ttpoàyov eIç

<|>cûçKal aÛTè Iv aÛTÉp e£,et<x^ov, toOto, ôSonEp ev toiç

TtpéaÔEV t6 toO Ai6ç ovo^ia SL^a Sirjprj^iÉvov ot ^èv Zf^va,

ot Se Ata EKaXouv, outcû Kal EVTaOBa ol ^tèv« Ivicxutov »,

8ti ev

êauTÔ,ol 8è «

etoç»,8ti

et^ei-ô Se

8Xoç XcSyoçeotIv t6 « ev aÔTÔ £Ta£ov » toOto TrpoaayopEiÛEaSai ev Sv

Stya, ûSctte Sûo ôvé^iaTa yEyovévat, a IviauTov » te Kal

« Itoç », e£, ev6ç X6you. e

410 a k y.ixpovW

||b i N BT : U 8^ Wt || tdpm W ||

5 8fcv —6 àï)p secl. Heindorf

||C a yeysvv^aQat B : -yevT)a8at

TW||6 wpat

TW|| 8 Ôpat TW

|| d 3 auxw B:

auTû T iauTÔi

W|| 4 I{Mcpo<j6«v

W||

7 au-cà) B : éau- TW||

sv 8v Tb : ht 6v (uel ivôv) B evov W

Page 134: Platon, 5.2 Cratyle

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410 e GRATYLE 92

Hermogène. — Mais vraiment, Socrate, tu fais de grands

progrès !

Socrate. — J'ai l'air, ce me semble, d'être déjà fort

avancé en savoir.

Hermogène. — Tout à fait.

Socrate. — Bientôt tu le diras encore davantage.

411 a.

Hermogène. — Après cette catégorie,

^ro

.

JODSj'aurais personnellement plaisir à voir

comment peuvent se justifier ces beaux

noms qui se rapportent à la vertu, comme pensée, compré-

hension, justice et tous les autres de même sorte.

Socrate. — Tu réveilles là, mon camarade, une espèce de

mots peu ordinaire! Cependant, puisque j'airevêtu la peau

du lion 1

,il ne s'agit pas de reculer, mais il faut, ce semble,

soumettre à l'examen pensée, compréhension, connaissance,

b science et tous ces autres beaux noms dont tu parles.

Hermogène. — Parfaitement;

nous ne devons pas lâcher

pied avant de l'avoir fait.

Socrate. — En vérité, par le chien I je ne crois pas avoir

été mauvais devin en imaginant tout à l'heure 2

que les

hommes du passé le plus lointain, ceux qui établissaient les

noms, ont fait essentiellement comme la plupart des sages

de nos jours ; à force de tourner en rond en cherchant la

nature desêtres,

ceux-ci sontpris

devertige

;et

par suite,les

choses leur semblent tourner, emportées dans un mouvement

c universel. Ce n'est pas à l'affection dont ils sont atteints qu'ils

attribuent cette façon de voir, mais à la nature même des

choses : suivant eux, il n'y a en elles rien de permanent ni

de fixe;elles s'écoulent et se meuvent, et sont entièrement

pleines de mouvement et de devenir. En parlant ainsi, je

songe à tous les noms qui nous occupent en ce moment.

Hermogène. — Comment cela, Socrate ?

Socrate. — Peut-être n'as-tu pas compris ce que nous di-

1. Voir la Notice, p. 45. La fable d'Ésope conte qu'un âne, revêtu

d'une peau de lion, mettait en fuite hommes et animaux. Mais le

vent ayant fait tomber son déguisement, l'âne, reconnu pour tel,se

vit rossé par tout le monde. — D'ailleurs Platon fait aussi allusion

aux luttes d'Héraclès, couvert de la dépouille du lion de Némée.2. Voir 4oi d, 402 a, etc.

Page 135: Platon, 5.2 Cratyle

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92 KPATTAOS 410 e

EPM. D

AXXà 8f)T<x, & Z6KpaTEç, ttoXù ItiiSIScùç.

ZQ. riéppco fjSrj, oîu.ai, <|>alvou.ai crocf>la<; èXaùvEiv.

EPM.nàvu u.èv oSv.

Zfl. Tà^a u.aXXov cf>r)a£ic;.

EPM. 'AXXà u.ETà toOto t6 eÎSoç lycoyE ^Seqç av 411 a

8£aaalu.rjv xaOxa ta KaXà ôv6y.aTa tIvi noTè op8ÔTî)Tt

KEÎTat, xà TTEpl Tf)v àpET^jv, otov «c{>p6vr|alç

» te Kal

« aûvEaiç » Kal « SiKaioaùvr) » Kal TaXXa Ta ToiaOTa

TïàvTa.

ZO. 'EyElpEiç u.év, S ETaîpE, ou <|>aOXov yÉvoç ôvou.àT©v

Su.CûçSÈETTEl8l£

}TI£pTf|V X£OVTf]V IvSÉSuKa, OUK àTToSElXiaTÉOV,

àXX' êmaKETTTÉov, eùç eolke, <f>p6vr)CTivKal ouveciv Kal yvcb-

u.rjvKal ETuaTf)u.rjv Kal T&XXa

8f)fi

<pflçnàvTa TaOTa Ta

KaXà ôv6u.aTa. b

EPM.nàvu u.èv o8v ou SeÎ

f)u.aç TTpoaTTOOTfjvai.ZO. Kal

u.f)v, vf)tôv KÛva, Sokq yé u.oi oô KaKcoç

u.avTEÛ£a8ai 8 Kal vOv8f) lvEv6T]oa, 8ti ot nàvu naXaiol

avSpcûTtoi ot Tt8éu.EVOL Ta Ôv<5u.aTa TtavTÔç u.&XXov, ôoriEp

Kal TÔV VOV ot TtoXXol TWVCTO<|>CÛV

ÛTt6 TOO TTUKVà TtEpt-

<jTpÉc|>Ea8ai ^rjToOvTEÇ Btït] £XEL T<* ovTa EtXiyyiôaiv, KaTtEiTa

aÔToîç <J>alvETai TTEpic|>ÉpEcr8aiTa

Tipàyu.aTaKal

TtàvTCùç

(f)ÉpEa8ai. AÎTioovTai8f]

où t6 IvSov t6 Tiapà otyioiv Ttà8oç c

aÏTtov EÎvai TaUTrjc; Tf^ç 8ô£t}ç, àXXà aUTà Ta npàyu-aTa

oOtcù TiEcpuKEvai, ouSèv aÔTÔv u.ôviu.ov EÎvai oûSè [iéôaiov,

àXXà pEÎv Kal cf>ÉpEa8ai Kal u-sarà EÎvai Ttàarjc; <J>opaç Kal

yEvéaEcoç àsl. AÉyco '8è èvvofjaac; npôç TtàvTa Ta vOv8f)

8v6|iaTa.EPM. nôçSfj toOto, o Zci>KpaTEç ;

ZO. Ou KaTEv6r|aaç lacoç Ta apTi XEy6u.Eva 8tl TiavTà-

6 3 rfîr\ oTjxat çaivojxatB : ^8tj çpatvoaat W hï

oT;j.atT

||5 iç7(asi;

T|j411 a 9 a ©r

(; : a

çf); BTàcp' tjç W ||b 7 elÀ'.yY

l^atv B : àete'.Àiy-

ytoiai Tàtl iXiyyicoai

W iXtyytwîtv b j| c 3 aùttov uovtjjiov BT:

pUfvtftOV

aùxôSv W y 5 SI B : 8' W &\ T||8 xà yàcp âpxt W.

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411 c CRATYLE 93

sions tout à l'heure : c'est essentiellement cette idée qu'elles

sont en proie au mouvement, à l'écoulement et au devenir

qui a déterminé l'attribution des noms aux choses.

Hermogène. — Je n'y avais point du tout songé.d Socrate. — Eh bien, pour commencer, le premier nom

que nous avons cité suppose essentiellement que les choses

ont ce caractère.

Hermogène. — Quel nom ?

Socrate. — La pensée (phronêsis). Elle est, en effet, Vin-

tellection dû mouvement et de l'écoulement (phorâs noêsis) ;

on peut aussi l'entendre comme Yauxiliaire du mouvement

(phorâs onêsis) ;en tout cas, c'est au mouvement qu'elle se rap-

porte. Veux-tu un autre exemple ? La connaissance {gnome)

exprime essentiellement l'étude et Yexamen de la génération

(gonês nômêsis) : car examiner et étudier sont une même chose.

e Autre exemple : Yintellection (noêsis) en soi est le désir du

nouveau(néou hèsis). Or la nouveauté des êtres signifie qu'ilssont

sans cesse dans le devenir. C'est à quoi l'âme aspire, commel'indique l'auteur de ce nom, nèoèsis. Car noêsis n'était pas

l'appellation ancienne : au lieu de l'é il y avait deux é ' à pro-

412 a noncer : noéésis. La sagesse (sâphrosuné) est la conservation

(sôtêria) de ce que nous venons d'examiner, la pensée (phro-

nêsis). Voici encore la science (épistêmê) : elle montre l'âme,

l'âme de quelque valeur, suivant les choses dans leur mou-

vement,sans rester en arrière ni courir en avant. Il faut

donc, en rejetant l'é, la nommer pistêmê2

. La compréhen-sion (sunésis), à son tour, peut sembler analogue au rai-

sonnement (sullogismos) ;mais le mot suniénaï (comprendre,

de suniêmi), se trouve dire exactement la même chose que*

épistasthaï (se tenir en contact avec), car suniénaï (aller avec,

b de sunéïmî) signifie que l'âme accompagne les choses dans

leur marche. Quant au mot sophia (savoir),il

marqueun contact avec le mouvement. Le nom est assez obscur,

et de forme étrangère. Mais il faut partir des poètes, et

se souvenir qu'en maint endroit, amenés à parler de ce

qui commence à avancer rapidement, ils disent : « il bon-

i. Le texte dit : deuxel. Dans l'alphabet ionien, adopté à Athènes

à la fin du vesiècle, l'a est appelé il

;Yo est appelé ou.

a. De -tGTÔ; (fidèle). Texte incertain dont on a beaucoup discuté.Il est assurément tentant d'écrire, avec Heindorf, é7set<JT7; ut, v

,

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g3 KPATYAOS 411 C

naaiv cùç <|>EpoLi£voi(; te Kal jSéouai Kal yiyvoLAÉvou; toîç

TtpayLiaaL Ta ôv6^octoc ETTiKELTai.

EPM. Ou Tràvu êvE8uu.r|8r|v.

Zft. Kalu.r)v TipÔTov lièv toOto 8 TtpOùTOV eïtioliev d

•nocvTaTTccaiv eSç lui toloûtcùv eotIv.

EPM. T6ttoÎov;

ZO. eH «(f>p6vT]au;

»* <J>opaç yàpêaTL Kal £o0 vàrjatç.

ETr| 8S

Sv Kal SvrjaLv ûnoXaBEÎv c^opâç* àXX* ouv TtEpt y£

t6 c|>Ép£a8al eotlv. El Se |}oùXei, f\ « yva>Lir) » TtavTàTtaaLV

StjXoî yovfjç aKÉipiv Kal v<ûu.r)aiv t6 yàp « vcûlji8v »

Kal t6 « ctkottelv » TauTov . Et Se (SoùXei, aux6f\

« v6r)aiç »

toO véou ecxtIv êatç, t6 Se véa EÎvat Ta 8vxa ar)u.alvEL

yLyv6u.Eva àeI EÎvaf toutou o3v IcfuEaSaL ttjv i|»u^f)v LirjvuEL e

t6 8vou.a o Sellevoç Tfjv « vE<$Eaiv ». Ou yàp « v6rjCTiç» to

àp^atov EKaXEÎTo, àXX

s

àvTl toO t\tol EÎ ISel XâyEiv Suo,« voÉEaiv ». « Zcùcppoauvr) » Se acûTrjpla ofl vOv

Si*|èaKÉu.-

u.E8a, cppovrjaEOùç. Kalu.fjv fj y£ èmaTT£

|u.r) u.rjvuEi â>q 412 a

<J>Epou.ÉvoLÇ tolç TTpdyLiaaLv EnoLiÉvrjç Tf]ç ij;u^ç t^ç à£laç

Xéyou, Kal oÙte àTroX£iTtou.£vr)ç oute Ttpo8EouoTjç- Sl6Sf]

EKÔàXXovTac; Sel t6 el « TuaTrjLArjv » auTfjv ôvolaoc^elv.

a Zuveoic; » S

s

au oôtco u.èv S6£elev âv ôSortEp auXXoyiau-ôçEtvai* ÔTav Se auviévat XÉyrjTat, TaÙT&v TiavTaTTaaLv t$£TtlaTaa8aL auu.6alvEL Xey<5u.evov auLmop£U£a8aL yàp XéyEt

tt)v ^u)(f)v toÎç Tipàyu-aat t6 a auviévai ». 'AXXàLirjv f] yE b

«ao<pioL

»<|>opo:ç ècf)à*nT£a8at aT)LjiaivEi. ZkotcùSeotepov Se

TOOTO Kal £,£VLKQTEpOV àXXà SEL £K TGÙV TTOLr)T6dV àvaLuu.vfl-

OKeaSaL 8tl TtoXXa^oO XéyouaLV TtEpl 8tou av TU)(CûaLV TÛV

C 9 cpepotiévatç—

yr/voficvaiç W ||d 4 *« po3 Bt : xatpou TW ||

5 àXX' ouv ye TceptW

||8 Taïkôv èaxtv W

||e 2 xà ovd(xaTa W |j

3 r,Ta et B :tj ëë T r,Ta et et W tjtoc eë b

||4 voieatv Ven. 8 : veâeatv

||vùv Srj âayJaaeOa BT : vuv

8teaxé[i{jLe0aW

||412 a i el' yeW pro ^ ye ||

4 èxoaXXovra; ôet xô el 7:tax^u.T(v Turicenses codd. : ètj.6àXXovTaç oeT

xà et (uel ê) bcton((fti)V || 6 XéyrjTat Heindorf :Xe'yrj (sed puncto supra

r( posito uitium indic. B) j

b 3iva;jLt[xvr(

axesOat B : -LLVïfaxesôat TW.

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412 b CRATYLE 9 4

dit » (ésuthé). Un Laconien célèbre avait pour nom Soos l

,

appellation que les Lacédémoniens donnent à l'élan rapide.

C'est le contact (êpaphé) avec ce mouvement que désignedonc sophia, dans l'hypothèse que les choses se meuvent.

c Voici maintenant le bien (agathon). Ce mot tend à désignerce qui est admirable (agaston) dans toute la nature. Car,

puisque les êtres sont en marche, il y a en eux de la vitesse,

et il y a aussi de la lenteur. Ce n'est donc pas l'ensemble quiest admirable, mais une partie de l'ensemble, l'élément rapide

(thoon)2

;à cette partie admirable (agaston) s'applique cette

dénomination, le bien (agathon).

Quant à la jastice (dikaîosuné) ,ce nom a été donné à la

compréhension du juste (dikaïou sanésis), comme il est aisé de

le deviner;mais c'est le nom même du juste (dikaïon) qui

est difficile. Jusqu'à un certain point, semble-t-il, beaucoupd sont d'accord sur le sens, mais ensuite commencent les

controverses. Pour ceux qui croient l'univers en mouvement,

sa plus grande partie n'a d'autre caractère que de se dépla-

cer, et ce tout est parcouru d'un bout à l'autre par un prin-

cipe auquel tout ce qui naît doit la naissance. Ce principe,

d'après eux, est très prompt et très subtil;autrement il ne

pourrait traverser tout le réel, s'il n'était assez subtil pour quee rien ne pût l'arrêter, ni assez prompt pour qu'auprès de lui

le reste fût comme immobile. Quoi qu'il en soit, comme il

gouverne tout le reste en le parcourant (diaïori), on lui adonné avec raison le nom de juste (dikaïon), en y ajoutant

pour l'euphonie l'effet du k. Jusqu'ici, encore une fois, beau-

413 a coup s'accordent sur cette explication du juste. Pour ma

part, Hermogène, à force de m'y appliquer, j'airéussi à

m'instruire, dans le mystère3

,de toute la question : ce juste

à cause de ércouivrjç plus haut. Mais cette forme parait inconciliable

avec les explications fournies plus loin, 43" a.

i. Plutarque(Lvc, i)cite un ancêtre de Lycurgue qui portait ce nom.

2. Le texte des mss. est évidemment altéré. La plupart des édi-

teurs adoptent la correction de Baiter qui, gardant tô toc/y, corrige

simplement toûto oy en tou 6oou. Mais, comme l'a bien vu Stallbaum,

l'idée doit être, non pas qu'un* partie de l'élément rapide mérite le

nom d'iyaorov, mais que, seule, la rapidité, par opposition à la

lenteur, est digne de cette épithète.

3. C'est-à-dire : secrètement, sans témoin, pour ne pas ébruiter

l'affaire. Cf. Thééteie, i5a c (èv àrroppr^Tto), où il s'agit de l'enseigne-

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94 KPATTAOS 412 b

àp^oLiÉvov toc^ù Tipotévai, a IcniST} »<J>aatv.

AaKQVLKÛ Se

àvSplxéov eùSok'lllcùv KalSvojJia r\v «Zôoç»' xfjv yàp xa)(EÎav

ôpLii^v ot AaKE8aiLi6vL0i xoOxo koXoOcuv. Taùxr|(; oSv xfjç

<{>opaç ETia^vari^alvEi f\ aoc|>la, <5>ç <|>£poLiÉvcov xSv Svxcùv.

Kaill^jv

t6 ye « àYa^v "> toOxo xf^ç (jrôaEcoç *nàor|ç x& c

ày aaT$ (iouÂETai t6 8voLia ETUKEtoSaL. 'EttelS^ yàpTtopEÙ-

ETai xà Svxa, evi liev aps

auxoîç xà^oç, evl Se (ipaSuxfjç.

"Eaxiv o3v où ttSv, [xo xa)(ù] àXXà xl aôxoO àyaaxôv, (xà

86ov). Toùxcp oSv 8fj xcà àYaaT$ aftxr) f) ETtovu^ita loxtv,« xaYa86v ».

«AiicaioCT\Svr)

» 8é, 8xl Lièv ènlxfj

xoO 8 iKalou auvÉaEi

xoOxo KEÎxai x6 Svo^a, £<£8iov auLiBaXELV aôx6 8è x6

« Slicaiov » \oiken6v. Kal yàp 8f)Kal eolke LiÉxpL liev xou

ô^oXoYEÎaBai napà noXXôv, InELxa 8è àLL(f>La6r|XELa8ai. "Oaoi d

yàp tJy°^vt<xl T0 "^ e^vaL ^v TtopEla, xè lièv ttoXù ocuxoOûnoXaLi6àvouaLv xolo0x6v xl EÎvai oûSèv aXXo

f\ )(copELV, 8ià

8È xouxou navxàç EÎvat xl 8le£l6v, 8ls

oS nàvxa xà \iyv6-

LiEva Yi-Yvea^aL' E^voa Se x<&)(Laxov xoOxo Kal XEnxôxaxov.

Oô yàp &v 8uvaa8aL ocXXcùç ÔLà xoO o'vxoç lÉvaL navx6ç, ci

Lif)XETix6xax6v xe ^v ôaxE aôxo

LirjSèv qxéyelv, Kal xà)(Laxov

&ax£ xpfjaSaL oanEp êaxoaL xoîç ccXXolç. 'EtieI 8' ouv etil-

xpoTiEUEL xà aXXa Ttàvxa S Lalé v,xoOxo x8 cSvoLia EKXrjSr] e

ÔpSéùç « SiKaLov », EÔaxoLuaç EVEKa xf)v xoO Kànna SuvaLuv

npoaXa66v. MÉ^pL Lièv o8v IvxaOSa, 8 vOv8f] eXeyoliev,

napà noXXcov ÔLioXoYSLxaL xoOxo EÎvaL x6 SlKaiov âyà Se, 413 a

»e

EpLi6Y£VEç, &xe XLTrapfjq &v TtEpl auxoO, xaOxa lièv

b 5 Aaxu>v:/<p — 7 xaXouaiv secl. Heindorf || 6 Zo'oç Valckenaer :

aouj|| 7 xaXouai xouxo W

||C i onzdcr^ W ||

3 yàp Wpro àp' || [\ xo

~a.yy secl. Stallbaum|| (xô Odov). Touto> ouv Stallbaum : touto ou

||

5 xôv àyaatwv W pro x<£ à^aaTto ||6 xà àyaôôv W j| 9 xou W

jj

d 2 èv JCtpciaVen. i84 (si

ex emend.) : eù-opt'a BW eù^opta T ||

6 ovxoç : idvxoç y?- in marg. W || 7 îjW pro tjv || {JLr,8sv

TW : -81 B

(I8 écxcoç T (yp. xa6â;:ep éaxwat xoiç à'XXot;) || i^siôr) ouv W

|j

6 1 8tïwv W pro Staïo'v||

2 ôp6w; kylrfa W ||y.dxr.a BW : x T

||

413 a 1 xouxo xô 81'xatov elvat

W || 2 Xtnaprj; a>v

Wet man. recen-

tiss. t : XtTcapTjawv BT.

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413 a CRATYLË 95

dont nous parlons est aussi la cause — car la cause est ce

par quoi (dV ho) une chose existe — ,et par conséquent, disait

certain, il est correct de lui donner ce nom en propre. Mais

quand, après avoir écouté cette explication, je reviens néan-

moins à la charge et demande aux gens, bien doucement :

« Que peut donc bien être le juste, mon bon, s'il en va ainsi? »,

j'ail'air de prolonger l'interrogatoire au delà des conve-

b nances et de sauter par-dessus les bornes 1. J'en ai, disent-ils,

assez appris [entendu] ; ils essaient, en voulant assouvir ma cu-

riosité, de parler chacun à sa mode, et ils ne s'accordent plus.

Suivant l'un le juste, c'est le soleil, car lui seul, en les parcou-rant (diaïon) et les échauffant (kaôn), gouverne les êtres. Or,

quand je le dis à un autre, tout aise de ce beau renseigne-

ment, il se moque de moi en m'entendant, et me demande

si je pense qu'il n'y a rien de juste chez les humains aprèsc le coucher du soleil. Comme j'insiste alors pour connaître son

avis, à lui, il déclare que c'est le feu  ;mais voilà qui n'est pas

facile à comprendre. D'après un autre, ce n'est pas le feu lui-

même, mais la chaleur elle-même contenue dans le feu.

Tel autre déclare se moquer de toutes ces explications : il

définit le juste d'après Anaxagore, en disant que c'est Yesprit

(nous); indépendant, sans aucun mélange, il ordonne, dit-il,

toutes choses en parcourant tout 3. Là-dessus, mon ami, je

me trouve, moi, bien plus embarrassé qu'avant toutes mes

tentatives

pourm'instruire de la nature du

juste*.En tout

d cas, pour en revenir à l'objet de notre recherche, voilà les

raisons qui semblent lui avoir valu ce nom.

Hermogène. — Tu m'as l'air, Socrate, de rapporter là

une leçon apprise, au lieu d'improviser.

ment donné par Protagoras à ses disciples, qu'il instruisait de la vérité,

tandis que ses doctrines demeuraient une énigme pour le vulgaire.

i .

Locution proverbiale.2. C'est l'idée d'Heraclite, suivant qui le feu est à la fois principe

de toutes choses, et loi ou pensée unique de l'univers.

3. Le juste est comme plus haut identifié avec la cause (tô al'tiov).

Aux yeux. d'Anaxagore, l'Esprit (vou;) est chose infinie, indépendante

(aÙTO/.paTs'ç) ou maîtresse absolue;seul il est en soi-même et pour soi-

même. Il est à la fois une cause motrice et une intelligence qui a mis

en ordre le monde.

4. Platon fait lui-même dans le Phédon(gr

] h et suiv.) la critiquede la théorie d'Anaxagore et montre en quoi elle est décevante.

Page 141: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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95 KPATYAOS 413 a

Tràvxa StaTTÉTtua^at lv àTtoppfjToïc;, 8tl toOto eo~tl t6

SiKatov Kal x6 aÏTLOv — Su' o yàp ylyvETaL (tl), toOt' eotl

to acTtov — Kal ISla KaXsîvecjjrj

tiç toûtoôpScoç ^X

eLV ^ l°L

Taura. 'ETretSàv 8' ^pÉ(ia aÔToùç InavEpcoTco àKouaaç

TaOTajjt|Sèv ?jttov « Ti oSv tiot' ecttlv, o aptaxe, S'iKatov,

et toOto outcoç £Xel *iSokq T£ T^r) u-aKpoTEpa toO

TTpocrfj-

kovtoç epcoT&v Kal ÛTièp Ta EaKaLiu.Éva aXXsaSaL. 'iKavôç

yàp l^é (paai TtETtùaSaL [aKrjKoâvai] Kal ETtL^EipoOaLv, fiouXo- b

Ljlevol

àTromLmXàvaL lie, aXXoç aXXafj8r| XéysLv,

Kal

oukétl au^i^covoOaiv.cO laèv yàp t'lç cfjrjCTtv

toOto EÎvau

5'iKaiov, t8v fjXLov toOtov yàp laôvov Sioclôvtoc Kal

KàovTa ImTpoTtEUELV îà 8vTct. 'EtcelSoiv oQv tcç XÉyco aux6

aa^isvoç ûbç KaXov tl àKr|Kocoç, KaTayEXS llou oStoç àKouaaç

<at èpcoTâ eI ouSèv SlKatov oÎLiat eÎvocl ev tolç àvSpccmoLÇ

ETtEiSàv ô

fjXioç Sur|. AiTtapoOvToço5v

ELjioO

c

ô tl a3 ekelvoç o

XéyEL, auT6 tô TiOp cfirjaLV toOto 8èoupàSL6v ecttlv ElSÉvaL.

cO 8è ouk auTo to nOp cjjrjOLV,àXX' auTÔ t8 BEpLiov tô ev tS

TTupl èv6v.cO Se toutcùv llèv TiàvTcov KaTayEXSv c^rjaLV,

EÎvaL 8è tô Slkcclov o XéyEL 'Avac^ayôpaç, voOv eÎvcxl toOto #

aÔTOKpdcTopa yàp auTÔv ovtoc Kal ouSevI (jleuelyuevov TtàvTa

cf>r|cjlv

auTÔv KoaLLEÎv TaTtpàyLmTa

8Là TtàvTcov t6vTa.

»EvTa08a8f) lyco, S

<f>lX£,ttoXù ev ttXe'lovl aTropla eIljlI fj

Ttplv ETU)(ELpf}aaL LiavBàvELv Tïspl toO SiKatou 8 tl ttot' d

EQTLV. 'AXX' OUV OUTTEp EVEKa EaKOTtoOtLEV, TO yE BvOLia

toOto <f»atvETaL auTco Slcx TaOTa KEÎaBaL.

EPM. <t>aLV£LL^OL,

<ù ZcbKpaTEÇ, TaOTtt U.EV àKr)KO£vat

TOU Kal OUKaUTOa^ESLàl^ELV.

b 4 (ti)add. Stallbaum

j|5 A!x Hermann pro toia

|| 7 tô oîxaiov

Wtj| 9 èj/.£u.u.£va B (corr. b) i|

b 1 7ce7cua0ai tô cuxatov àxTjxosvai

W|j àxYixoivat secl. Schanz

j|2 ixî ar:or:i'

ii.n\iva.i W

||3 toîîto prim.

W pro toOtovjj

4 tô Suaiov W||

5 xaovTa BT : à/touovTa W|

ovtoc BT : oXa W||

Tto TWb : to> Bj|6 àaasvo; B ut uid. :

aj[j.svoç;

TW (sed supra to scrips. W) || outoç a/oujaç B : oZzoç ô àxouaa;

TWd 7 èptoTa lu W d c 1 8uvï] B II

2 X^rj T||3 àXX' — 4 frjaiv

om. W in marg. add. ||4 où oï

W pro ô 8àj| d 2 ècrxoTùouasv BT :

«jxo.t- Wj|3 outo) W pro aÙT(£ |j

5 tou TWb : toj B.

V. 2. — 10

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413 d GRATYLE 96

Socrate. — Et pour les autres noms ?

Hermogène. — Tu n'en avais pas du tout l'air.

Socrate. — Écoute donc : peut-être réussirai-je à t'abu-

ser sur le reste, en te faisant croire que je ne parle point

par ouï-dire. Après la justice, que nous reste-t-il? Le cou-

rage, si je ne me trompe ;nous ne l'avons pas encore passé

en revue. Il est clair que Y injustice (adikia) est essentiellement

e l'obstacle à ce qui parcourt (tou diaîontos)l

;d'autre part le

mot courage indique que c'est dans la lutte que le courage

reçoit son nom. Or dans le réel, si vraiment il s'écoule, la lutte

n'est autre chose que le courant (rhoê) contraire. Si doncon ôte le d à andréïa (courage), par lui-même le nomà'anrêïa indique cette activité

2. Il est clair que le courage

n'est pas le courant contraire à n'importe quel courant,

mais à celui qui va contre le juste; autrement on ne loue-

414 a rait pas le courage3

. Les noms de virilité (arrhén) et d'homme

(anêr) sont voisins de celui-ci : le courant dirigé en haut (anô

^ rhoe). Gunê (femme) me paraîtvouloir être

gonê (génération).Quant au féminin (thêlu), c'est de la mamelle (thêlê) qu'il pa-raît avoir tiré son nom. Mais la mamelle, Hermogène, ne

signifie-t-elle pas qu'elle est cause d'épanouissement (téthê-

lénaï), comme pour les plantes qu'on arrose ?

Hermogène. — Apparemment, Socrate.

Socrate. — Eh bien, le mot même s'épanouir (thalléîn)

me semblefigurer

la croissance de la

jeunesse,

dans sa

promptitude et sa soudaineté. C'est ce que l'auteur a, pour ainsi

b dire, reproduit à l'aide du nom, en le formant de thèïn (courir)

et hallesthaï (bondir). Mais tu ne t'aperçois pas que je me laisse

comme emporter hors de la carrière, quand j'ai trouvé un sol

uni 4. Pourtant il nous reste encore à traiter nombre de ques-

tions, de celles qui passent pour sérieuses.

Hermogène. — Tu dis vrai.

Socrate. — L'une d'elles consiste à voir ce que peut si-

gnifier notamment tekhnê (art).

1 . C'est-à-dire au principe qui a été identifié plus haut avec lejuste.

2. 'Avpeia est expliqué par Socrate comme formé de àv(â) : en

sens contraire (ou peut-être àvw : vers le haut; cf. plus bas), et de

pcïv (couler).

3. Littéralement : car on ne louerait pas le courage (sous-ent. s'il

n'était pas le courant contraire à celui qui va contre le juste).

4- C'est-à-dire des problèmes faciles à résoudre.

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96 KPATYAOS 413 d

ZO. TtôèxSXXa;

EPM. Ou nàvu.

EH. "AkoueSrj'

ïacoçyàp

av <je Kai là êniXoiTta

è^omcc-T^aaiua coç ouk àK^Kocbç XÉyco. Mexà yàp SiKaioauvrjv tI

f\\il\fXElTiETat

; àvSpEiav, otu.ai, oÛTtco Slt'jXBou.ev. 'ASiKla

^.èv yàp ôfjXov 8tl IcjtIv Svtcoç E[rrT<58i.au.a toO Sia'i6vToç, e

àvôpEia 8è ar]u.aiv£i coç èv ^ô\yr\ ETtovo^a^ou.Évn.ç Tfjç

àvSpElaç" ^axrl

v &" EÎvai ev tco ovti, EÎTtEp pEÎ, ouk aXXo tu

f) Tf]v

EvavTiavpofjv

èàv ouv tiçE^éXr)

t8 BeKicl toO 6v6-

u.ai"oç Tfjç àvSpEiaç, auTO LirjvuEL t6 Ipyov to ovou.af\

« àvpsla ». Af^Xov ouv 8ti ou nàcr} pofj fjtvavTia pot)

àvSpEia iaTtv, àXXà Tfj napà t6 SlKaiov ^souarj* ou yàp av 414 a

ETir|V£ÎTo f\ àvSpEla. Kal t6 « Sppsv » Kal & « àvfjp » Inl

napaTtXrjaLcp tlvI toùtco laTt, Tfj avcp pofj.« Tuvf) » 8è

yo vf) ljiol cfxx'ivETai(SoùXEcrBai EÎvai. T6 5è a

BfjXu

» ànoTfjç

SrçXfjç tl cpalvETat ETrcovou.àcr8ai-f\

Se «8r|Xf) » apà ys,

Sc

Ep^6yEVEç, 8ti TE8r|Xév ai ttolel coanEp Ta àpSo^iEva ;

EPM. *EoiK£V y£, co ZcOKpaTEÇ.

ZQ. Kal ^f)v auT6 y£ t6 a BocXXelv » tï]v aû'E.rjv u.01 SokeÎ

àTTELKà^Eiv tt)v Tcov vécov, otl Ta)(EÎa Kai E^aupviôla ytyvE-

Tat.OT6v*nEp

ouvu.£u/iu.r)Tai

tcùov6|j.aTi, cruvapu.6aaç

ànô b

toO 6e tv Kai aXXEaSai t6 ovou.a. 'AXX' ou yàp EmcrKOTiEÎç

U.E ÔOTTEp EKTÔÇ 8pÔU.OU <J)Ep6u.£VOV, ETÏEtSàv XeIoU ETTlXà-

6cou.ai' Xomà 8èrjfcûv

ETL 0"U)(và laTi tcov Sokouvtcov anou-

Salcov slvat.

EPM. 3

AXr|8Ti XÉyEiç.

ZO. *ftvy

3

IaTtv ev Kai «

te)(vt]v» ISeÎv 8 ti tiote

fiouXETat EÎvai.

Testim. : 414 a 3 yÙvyj— 4 lfo« Euseb., Praep. euang., n, 6.

d 6 8au b pro Sa|| 7 où 7iatvu ys W ||

10 àvSpiav b||e 1 ovtoj; W :

-to; BTj|

3 cul supra âv -cep ovti man. rec. add. in Wj|5 xouvofxaW

j|6 àvpeîa T : àvSpeia BW àvô*pta b (àvpi'a in marg.) jj

414 a 2 è^et

W pro beij|

3 ttvi xouxwv W|| f)

8syuvr] Euseb.

|]5 -et B : xl TW

||

9 à|cuçvi8ta TWb (?) : -amena B(?)t j|b a xojyojxa W ||

4 saxi W :

krA BT.

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414 b GRATYLE 97

Hermogène. — Parfaitement.

Sograte. — N'indique-t-il donc pas la possession de la rai-

c son (hèxis non), si l'on ôte le t, et si l'on insère o entre le

kh et le n, le n et l'ê1?

Hermogène. — C'est bien laborieux, Socrate !

Socrate. — Bienheureux Hermogène, ignores-tu que les

premiers noms établis ont été comme enfouis par ceux quivoulaient leur donner de la pompe ? Ils ont ajouté et retran-

ché des lettres pour l'euphonie ;ils ont tordu les noms dans

tous les sens, par désir de les enjoliver comme par l'eiTet

du temps. Ainsi dans katoplron (miroir) ne trouves-tu pasbizarre l'introduction dur 2

? Mais de tels procédés, selon moi,

d sont l'œuvre des gens qui, sans aucun souci de la vérité,

travaillent à façonner l'articulation ;à force d'ajouter aux noms

primitifs, ils font si bien, finalement, qu'aucune créature

humaine ne serait en état de comprendre ce que le mot peutbien signifier. Par exemple pour la Sphinx, au lieu de phix

3

ils disent sphinx, et de même pour beaucoup d'autres noms.Hermogène. — C'est bien la vérité, Socrate.

Socrate. — Mais qu'on permette d'ajouter aux noms et

d'en ôter ce qu'on veut, alors on éprouvera une grande faci-

lité, et n'importe quel nom pourra s'ajuster à n'importe

quel objet,

e Hermogène. — Tu as raison.

Socrate.— J'ai

raison,à

coupsûr. Mais c'est à la

me-sure, je crois, et à la vraisemblance qu'il te faut veiller, en

sage président.

Hermogène. — Je le voudrais.

Socrate. — Et moi, je le veux avec toi, Hermogène.415 a Mais ne sois pas trop pointilleux, mon divin ami,

pour ne pas énerver mon ardeur 4;

1. De manière à transformer ts/vt) en kyovor\.

2. La forme primitive devait être, suivant Socrate, xûcto^tov. Le p

est considéré par lui comme une addition superflue et une altéra-

tion : il ne reconnaît pas ici le suffixe --po- qui sert, dans les noms

neutres de ce genre, à marquer Yinstrument.

3. La Théogonie hésiodique parle (v . 3a6) de « Phix la pernicieuse »,

fille d'Orthos et d'Echidna, dont on plaçait le séjour en Béotie sur

le mont Phikion. Plus tard elle fut confondue avec la Sphinx.4. Iliade, VI, 264-5. Hector dit à sa mère, qui veut lui apporter à

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97 KPATYAOS 414 b

EPM. l"làvu uèv o8v.

ZO. OukoOv to0t6 ys eéJlv voO ar)u.atv£t, t6 u.èv xaO

à(f>EX<5vTi, êu.6aX6vTi Se oS u.ETa£jù toO yz! Kal voO vu Kal c

(toO vO <al) toO fJTa ;

EPM. Kal uàXa y£ yXiaxpcoç, " ZcùKpaTEÇ.

ZH. *C1 u.aKapi£, ouk oîaS'STiTa TtpÛTa ôvou.aTa TEBévTa

KaxaKÉ)(OCTTaL fjSr|Stt6 tcov (5ouXou.évcùv TpaycpSEÎv auTa,

TT£piTi8ÉVTa>v ypdcu.u.aTa Kal l^aipouvTCùv EuaTOu.laç EVEKa

Kal TuavTa)(fj aTp£<f>6vTCûv, Kal ûttô KaXXcûmau.oG Kal ûttô

Xp6vou. 'EtteI ev tô « KaTé-nTpcp » ou Sokeî aot otottov EÎvai

t6 lu.6E6Xf)a8aL to pu ;àXXà ToiaOxa, oîu.ai, TroioOaiv ol xfjç

u-èv àXr|8£iac; ouSèv 4>povtI£ovteç, t6 Se <JT<5u.a TtXàTTovTEç, d

ttox' £TT£^6dXXovx£<; TioXXà ettI Ta TtpcoTa Ôv6u.aTa teXeu-

tcùvteç TtoioOaiv u-^S' âv sva àvSpcùTTQV auvEÎvai 8 ti ttote

(SoûXETai t6 ovoua' cocmEp Kal xf]v Zcf/iyya àvxl « (jhkôç »

« cKplyya » KaXoOaiv, Kal aXXa TtoXXà.

EPM. Tauxa u.èv ecttiv outcdç, cù ZcùKpaTEÇ.

Zn. Et 8S

au tlç làcEL Kal IvTiSÉvai Kal lÊjaipEiv Stt'

av (ioùXrjTal tic; elç ta ov<5u.aTa, TtoXXf] EÛTtopla laxat Kal

tt&v av Ttavrl tic ovou.a Ttpàyu.aTi Trpoaapu.6aEi.EV.

EPM. 'AXt]8î] XÉyEtç. e

Zn. 'AXrjSfj U.ÉVTOL.s

AXXà t6 u.ÉTptov, oîu.ai, Sel <J>uXaT-

teiv Kal t6 elkôç aè tôv aocpôv ETuaT<xTr|v.

EPM. BouXolu.r|v av.

ZO. Kal èycb aot auu.6ouXou.ai, o e

Epu.6y£V£Ç.s

AXXàuf)

Xlav, S Satu.6viE, aKpiBoXoyoO, 415 a

« u.fj u' àTToyutoarjc; u.éveoç ».

Testim. : 415 a 2 77., 6, 2Ô5[xrf

tx'a7:oyut(j$a7)ç, tiivsoç 5' àXxrjç

TEXà0to;j.at.

b io tau BW : î: T||C i ou BW : ô T

||toS yl xat tou vu xat tou

yjxa BW : tou y xat tou v xat toutjT

||tou vu y.at add. Stophanus |j

6 xpooTifc'vtcuv Naber pro KÇfiTcOtivTcuv ||8 èxct xai Wt

||aot om. B

|j

g pô5 BW : p T ||d 3 ivOpc&fcwV Tb : avOpojzov BW et primit. ï ut

uid.|| t\

cptxo;

Par. i8i3(ei Hesiod., Theog.,

u. 326)

:

cpiyô;

T©i-ryô?

W a«tyyô; B astyô? (et in marg.) b|| 7 fcÇatpsiv

T||8 JCoXXrj T15

surcopia W [ï415 a 2 axoyvcfogc prim. T.

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415 a CRATYLE 98

car j'arrive au couronnement de mon exposé, quand nous au-

rons examiné, après Yart (tekhnê), l'activité industrieuse

(mêkhanê). Mêkhanê me semble indiquerle fait

de parvenir àun résultat (anéïn *)

étendu. Car le mot mêkos désigne la

grande étendue. Voilà donc les deux éléments, mêkos et

anéin, qui composent le nom de mêkhanê. Mais, je le répète,

il faut arriver au couronnement de notre exposé : ce que si-

gnifient les noms d'arétê (vertu) et de kakia (vice), il s'agit

b de le rechercher. Dans l'un je ne vois pas encore clair, mais

l'autre me sembletransparent

: il s'accorde en effet avec tous

les précédents. Puisque les choses se meuvent, tout ce qui

va mal (kakôs ion) sera vice (kakia). Et quand l'âme est le

siège de ce mouvement mauvais vers les choses, c'est surtout

alors qu'il porte l'appellation de vice donnée à l'ensemble.

Mais ce mouvement mauvais, en quoi peut-il consister ? Il le

fait voir, je crois, dans la lâcheté (déïlia), qui n'a pas encore

été soumise à notre analyse, et que nous avons sautée,

c quand il eût fallu l'examiner après la bravoure 2; je crois, du

reste, que nous avons sauté aussi beaucoup d'autres noms.

Quoi qu'il en soit, déïlia désigne un lien qui enchaîne

l'âme fortement ;car lian (très) exprime une force. La lâcheté

(déïlia) sera donc un lien (desmos), le lien fort (lian) et le

plus puissant de l'âme;de même aussi que Yembarras

(aporia) est un mal, et, semble-t-il, tout ce qui fait obstacle

au mouvement et à la marche (poreuesthaï). Aller mal (kakôs

iènal) semble donc désigner la marche gênée et entravée;

quand l'âme en est atteinte, elle s'emplit de vice (kakia). Si

c'est à ces conditions que s'applique le nom de kakia, le

contraire sera arétê (vertu). Ce nom signifie d'abord l'aisance

d de la marche, puis le cours, toujours libre, de l'âme bonne;

bref, c'est ce qui coule toujours (aéî rhêon) sans gène et sans

obstacle qui a été, semble-t-il, qualifié de ce nom. Il est juste del'appeler aéïrhèîtê, mais peut-être l'auteur veut-il dire haïrétê

(préférable), pour indiquer que cette disposition est préfé-

boire après la bataille : « Ne m'offre pas de vin à la douceur de miel,

mère auguste, pour ne pas énerver ma force, ni me faire oublier monardeur et ma vaillance. »

2. "Àveiv est synonyme de àwfctv, àvuxsiv. Voir Odyssée, III, 4g6,

r,yovôBôv : ils

accomplirentle

trajet.3. Le mot àvBpct'a (bravoure) a été examiné plus haut 4*3 e, et

tiré de « àvpsc'a».

Page 147: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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98 KPATYAOS 415 a

"Ep^ouaL yàp ettI xf)V Kopu<$>r)V uv etprjKa, ETtEiSàv LiExà

TÉ)(vrjv ur))(avr|v EmaK£i|jcoLi£8a. « Mrj^avf] » yàp llol Sokel

toO avEiv InlTtoXù arju.£Lov EÎvat* to yàp«

^fJKÔç » ticûç

t6 TtoXù arjjiatvEi* !£j àLK^oîv oSv xoùxolv auyKELxaL,

«Lll'jKOUÇ

» TE Kal XoO « &VELV », t6 OVOLLaf\

«Lir))(.

av^ ».

'AXX', bîTEp vOvSf) eTtcov, etù xfp Kopu<f>f|V Sel xcov EtprjLiE-

vcov eXGelv « àpETf) » yàp Kal « Koucla » 8 xi frouXExai xà

SvdLiaxa ^rjTrjTÉa. T6 ljlèv ouv EXEpov ounco KaSopô, to S' b

ETEpov Sokelllol

KaxàSrjXov eÎvccl. Zullc|>cùV£l yàp xoîç

ELjmpoaSsv Tt&CTLv. "Axe yàp I6vxccv xcov Tipaytiàxcûv, Ttfiv x6

KaKÔç tôv « kcckloc » &velt]* xoOxo Se oxav èv

ipu^fj rj,xo

KaKÔç ÎÉvaL ettI xà TipàyLiaxa, LiàXiaxa xrjv xoO 3Xou

ETTCÛVULUaV E)(EL XT]Ç KaKlaç. Tô SE KaKWÇ ÎÉvaL 8 XL ttox'

laxLv, Sokel ljlol SrjXoOv Kal lvxfl

« SelX'loc », 8 oûttcù SirjX-

Sollev àXX

s

ÛTtEpÉ6r|LiEv, Séov auxô u.£xà xrjv àvSpElav ctké- c

cpaaSaL* SokoOllev Se liol Kal ccXXa noXXà UTT£p6£6r|K£vaL.CH

S' ouv SsiXla xfjç Lpu)(f]ç arjLLalvEL Seqllôv EÎvaL layypév xô

yàp « Xiav » loyfiq xlç ectxlv. Ae<jll6ç ouv ô Xlav Kal ô

LLéyLOXoç xfjç ipu^ç f\SelXlo ôtv

elt]* <SoTT£p yE Kalf\ ànopla

KaK6v, Kal nav, &ç eolkev, 8 xl av ELmoSobvfj

xco IEvaL Kal

TtopEUEaSaL. ToGx' ouv <^alvExaL x6 KaKOùÇ levai SrjXoGv, x6

to^oLLÉvcoc; xe Kal elattoSl£ollévcûc; TtopEUEoQaL, o8rj Lpu)(r)

oxavI^fl, KaKlaç LiEaxf] yiyvExaL. Et S' IttI xoloùxolç f\

« KaKLa » laxlv xotfvoLia, xouvavxlov xcuxouf\

« àpExrj » âv

elt], arjLLatvov npSxov lièv Eunoplav, ETtELxa Se XEXuu.Évr)v d

xrjv jSorjv xfjç àya8r]c; ipu^ç sîvaL olel, oSaxE xô ào"X£-

XQÇ Kal XO àKoXuXCOÇ àEl £ÉOV ETICDVULliaV EÏXrjcpEv,

(3Ç EOLKE, XOOXO XOÔVOLia. 'OpScOÇ LIÈV E)(EL« aELpELXrjV »

a 5 aveiv B et slatim : àvetv T et statim|| xtaç Par. i8i3 :

rcpôç

BT||

8 vdv Srj Par. 1811 : Sr, vOv BT || C I àvopfev B ||6 xa/.tov B

(corr. b) |j y T :stVj

Bjj

ts'va-. b : clvat BT|j8 IV/OLtai taon (corr.

b in marg.) || lxxo8iÇo(i&a>$ BT sed{x supra x add. T

||ô'

rjB

(corr. b in marg.) \\ g /.a/.ia; Laur. 85, 6 man. rec. : -xi'a B -/.''a

Til d 3 àei B : 8rt T.

Page 148: Platon, 5.2 Cratyle

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415 d CRÀTYLE 99

rable entre toutes : la contraction a donné le mot arétê.

Peut-être diras-tu encore *

que j'invente ;mais moi je prétends

que

si celui dontj'ai

parlé précédemment

est

juste.

— le nome de kakia

(vice), — le nom d'arétê (vertu) est juste, lui aussi.

416 a Hermogène. — Et le nom de kakon (ma[) qui t'a servi à

expliquer bien des précédents, que peut-il signifier ?

Socrate. — Il est bizarre, par Zeus ! à mon avis, et diffi-

cile à interpréter. Je lui applique donc, à lui aussi, l'expé-

dient de tout à l'beure 2.

Hermogène. — Quelle sorte d'expédient?

Socrate. — Celui qui consiste à lui attribuer encore une

origine barbare.

Hermogène. — Et tu parais avoir raison. Mais, s'il te

plaît, laissons ces noms pour passer à kalon (beau) et aïskhron

(laid); tâchons de voir comment ils se justifient.

Socrate. — Eh bien, aïskhron me semble dès main-

b tenant avoir un sens parfaitement clair; il s'accorde en

effet avec les indications précédentes. Ce qui entrave et

arrête les êtres dans leur cours me parait être malmené en

toute occasion par l'auteur des noms;et ici, en particulier,

ce qui arrête toujours le cours (aêi iskhon ton rhoun) a reçu

de lui le nom de aéïskhorrhoun;mais aujourd'hui, par

contraction, on dit aïskhron.

Hermogène. — Et kalon (beau) ?

Socrate. — Celui-ci est plus difficile à bien saisir

3.

Ce-pendant l'auteur ne l'appelle ainsi que pour l'harmonie, et

la forme a été modifiée par la quantité de l'o *.

Hermogène. — Comment cela ?

Socrate. — C'est la pensée (dianoïa) que semble qualifier

ce nom-là.

Hermogène. — Que veux-tu dire?

c Socrate. —Voyons. Quelle est,

selontoi,

la cause de

l'appellation donnée à chaque chose ? >'est-ce pas ce qui fixe

les noms ?

i. Voir4i3d.2. Voir 4ogde.3. Allusion au proverbe rappelé 384 b (les belles choses sont

difficiles) ?

4- Le texte porte où, qui est le nom de la lettre o dans l'alphabet

ionien-attique. Voir plus haut la note à 411 e.

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99 KPATTAOS 415 d

KaXsîv, ïacoç 8e alpETrjv XÉyEL, a>ç otfoT|ç TaÛTi^q if\q eÉJecùç

atpETC0TàTr)ç, auyKEKpéTrjxai 8è Kal KaXeÎTai « apETf) ».

Kal Xooç \ie aQ ^>r\asiq ttXAttelv lyo 8é (prjLu, Einsp 8

ellttpoo8ev eÎttov èp8coc; £XeL > *)« icaicla », Kal toOto t6

OVOLia TT]V « àpETT]V » Op86ûÇ E)(ELV. e

EPM. T6 8è8f)

« kcck<5v », Si' 06 TtoXXà tôv ellttpocjSev 416 a

EÏpr|Kaç, tl av vooî TOtïvoLia;

ZQ. "Ato7t6v tlvf]

Ala eliolye Sokel Kal ^aXETrèv oull-

6oXelv. 'ETtàyco o5v Kal toùtg> IkeIvi-jv Tf)V Lir)xavtf)v.

EPM. riolav TaÙTr^v ;

ZQ. Tf]v toO 3ap6aptKov tl Kal toOto (bavai EÎvaL.

EPM . Kal loLKàç yE ôp8Sç XÉyovTL. 'AXX' st Sokel, xauxa

llev ecùliev, to 8è c< KaX&v » Kal to « ata)(pèv » TtELpG>LiE8a

ISelvnfj EuXéycoç zyzi.

Zft. Ta lièv tolvuv « ataxpov » Kal 8^ KaTaSi^Xov llol

4>alvETaL o voEL* Kal toOto yàp tolç ELmpoaBEV oLLoXoyEÎTaL. b

Tô yàp ELmo8i£ov Kal ïa)(ov tî^ç por\q Ta ovTa XoiSopElv

\ioi cf>alvETaL Sià TtavTèq o Ta 8v6^iaxa tlSelç, Kal vOv

tô à£i ïo)(ovtl tov poOv toOto to ovoya e8eto (tô)

«dtELa)(oppoOv »• vOv 8è auyKpoTrjaavTEc; « ataj^pov »

KaXoOaLV.

EPM. Tl 8èt6 « koXov »;

ZO. ToOto ^aXETtQTEpov KaTavofjaaL. KalTOL XÉyEL yE

auTè àpLiovla llovov, KalLirjKEL toO oS TtapfJKTaL.

EPM. ricoç8r| ;

ZQ. Tf^ç SLavolaç tlç eolkev èncovuLLla EÎvaL toOto to

ovoLia.

EPM. nôç XéysLc; ;

Zfl. ^Éps, tl oïel au EÎvaL to aÏTLOv KXrj8f]vaL ÉKàaTca c

tcov Bvtcùv; ap

s

oùk ekelvo t8 Ta ôv<5LLaTa Seljlevov;

d 5 i£eu>ç BW : Xs£- T jj416 a 4 toutw T (prim. touto) j|

5 r.o'.av

-ctvi tœuttjv W ||8 xaï BVV : te xaî T

||b a afo^pôv W pro î'a-/ov ||

U tô add. Heindorf||5 acto/oppoûv BW : -yooouv T || 7 $s BW : ôac

1bjj g tov ou BVV : tô H T xou o b

||11 couù tiç W,

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416 c GRATYLE îoo

Hermogène. — Sans aucun doute.

Socrate. — Et ce sera la pensée, soit des dieux, soit des

hommes,ou les

deux à la fois?

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Ce qui a donné leur appellation (kalésan) aux

objets et ce qui la leur donne (kaloun), c'est donc cette mêmechose, la pensée ?

Hermogène. — Apparemment.Socrate. — Or, tout ce que produisent l'esprit et l'intel-

ligence, voilà ce

qui

est à louer, tandis

quele contraire est

à blâmer ?

Hermogène. — Parfaitement.

d Socrate. — L'art du médecin produit des médecines, et

celui du constructeur des constructions? Gomment l'en-

tends-tu ?

Hermogène. — Comme toi, pour ma part.Socrate. — Et alors le beau produit de belles choses ?

Hermogène. — Nécessairement.

Socrate. — Et cela, disons-nous, c'est la pensée?Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Cette appellation, kalon (beau), est donc

justement donnée à la pensée qui exécute les ouvrages aux-

quels nous faisons fête en les déclarant beaux !.

Hermogène. — Apparemment,e Socrate. — Que nous reste-t-il encore en ce genre?

Hermogène. — Les noms qui ont trait au bon et au beau :

417 aavantageux, profitable, utile, lucratif, et leurs contraires.

Socrate. — Pour sumphèron(avanlageux), lu pourrassans

doute, dès maintenant, en trouver toi-même l'explication

à la lumière des précédents : c'est à'épistêmê (science) qu'il

paraît être frère. Car il ne traduit pas autre chose que le

mouvement simultané de l'âme avec les choses ; et il montreque les effets d'une telle activité tirent leurs noms— sumphé-

i. Le raisonnement de Socrate est le suivant: la pensée (otàvoia)

est ce qui fixe les noms;elle est donc ce qui appelle. Or tout ce que

produit la pensée est bon (è^atvtiâ, digne d'éloge) : elle produit donc

de belles choses;

il est donc juste de l'appeler to y.aXôv (le beau).

Les deux participes zaXsaav (aoriste) et xaXouv (présent) s'expliquent :

Socrate, parlant de l'auteur des noms, emploie, on l'a vu, tantôt le

présent, et tantôt l'aoriste (ô xiÔéjxevoç,ô ÔEUivoç).

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ioo KPATYAOS 416 c

EPM. n<&VTCdÇ TTOU.

ZQ. OukoOv Siavoia aveïrj toOto fjxoi 8ecùv

fj àv8pcîmcùv

f) àu.cf>6x£pa ;

EPM. Nat.

ZQ. OukoOv x6 KaXÉaav xà TTpàyu.axa Kal t6 KaXoOv

xaux6v Igtlv toOto, Siàvoia;

EPM. 0OUVETOU.

ZQ. OôkoOv Kal oaa u.èv av voOç te Kal Siàvoia Ipyà-

arjxai, xaOxà iaxi xà ETtaivExà, S Se \xr\, i|;ekx<x ;

EPM. ndvu yE.

ZQ. Tô ouv taxptKèv locxpiicà ipyà^Exai Kal x6 xekxo- d

vikôv xekxovlkoc; r) Ttcoç XéyEiç ;

EPM. Ouxcoç lyoyE.

ZQ. Kal xo KaXôv apa KaXà;

EPM. Ael yé xoi.

Zft. "Eoxl 8é yE xoOxo, coç cj>au.£v,Siàvoux

;

EPM. nàvu yE.

ZQ.3

Op8coç apa cjjpov^aEcoc; aôxr) ^ £Ttcovuu.ta êaxlv

x6 « KaXov » xf]ç xà xoiaOxa àTt£pya£ou.£vr|c; aBi]

KaXà

cj>àaKovxEÇ EÎvai àcma£ou.E8a.

EPM. <l>aiv£xai.

ZQ. Tt ouv exi^u/lv Xoittov xcov xoiouxcov;

e

EPM. TaOxa xà TTEpl xo àya86v xe Kal KaX6v, E,uu.-

cpÉpovxà xe Kal XuaixsXoOvxa Kal coc£ÉXiu.a Kal KEpSaXsa Kal 417 a

xàvavxla xoûxcov.

ZQ. OùkoOv xè U.ÈV « £>UU.C|>£pOV

»f]Sr)

tïou Kâv où ESpOlÇ

ek xcov Trpoxspov ETtiaKOTicûV xf]ç yàp ETTLax^u-rjc; àS£X<f)6v

xl cpalvExai. OuSèv yàp otXXo StjXol f) xf]v au. a cjjopàv xfjç

4,UX^ C> u-E^à^cov Tipayu-àxcov, Kalxà ûno xou xoioùxou Ttpax-

C 3 -yy-.u)ç 07j-ou W J|5 à^oTepwv T

|| 7 xetXouv Badham : /.aXôv

||11 a Heindorf : "à

||d 1

"'' ouv prim. W ||2

r,BW :

r\T et primit.

Bjj 9 xà om. T

jje 1

7]{xtv Ix» Tj|417 a 1

toçpéXi(i.àte xou W

j|3 -ou

Tj|xav T : xat B xàv W j|

4 rcpoTepov T : -poxspcov BW j{ârciaxoTitoV

B : a/.o^tov ÏW.

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417 a CRATYLE 101

roula et sumphora— de ce mouvement simultané et circulaire

(sumpériphéresthaï).

Hermogène. — Il le semble.

Socrate. — Kerdaléon (lucratif*)vient de kerdos {lucre).

Or kerdos, si l'on y substitue le n au d pour former le nom,a un sens clair : c'est le bon qu'il nomme d'une autre ma-

nière. Parce que le bon se mélange (kérannutaï) à toutes

choses en les traversant, c'est cette propriété qu'on a voulu

désigner par ce nom;mais en introduisant un d au lieu du

n, on a prononcé kerdos.

Hermogène. — Et lusitéloun (profitable), qu'est-ce donc?Socrate. — Apparemment, Hermogène, on ne doit pas

le prendre à la façon des boutiquiers quand ils couvrent

leurs dépenses.* Ce n'est pas là, je crois, ce que signifie

lusitéloun, mais qu'étant ce qu'il y a de plus rapidedans l'être, il ne laisse pas les choses s'arrêter ni le mouve-

ment prendre fin pour s'immobiliser et cesser; toujours il

l'affranchit de cette fin, si elle tente de se produire, pour le

rendre incessant et éternel. C'est en ce sens, selon moi,

qu'on a donné au bon le titre de lusitéloun;

c'est ce qui

affranchit de la fin (luon lo télos) le mouvement que l'on a

nommé lusitéloun (profitable). Quant au nom d'ôphélimon

(utile),il est étranger : Homère notamment s'en est servi

en plusieurs endroits sous la forme ophelléïn (enfler)2

, qui est

une façon de désigner l'accroissement et la création.Hermogène. — Et les contraires de ces noms, qu'en fai-

sons-nous ?

Socrate. — Ceux qui ont une valeur négative, il est inu-

tile, suivant moi, de les passer en revue.

Hermogène — De quelle sorte sont-ils ?

Socrate. — Désavantageux, inutile, non profitable,non lu-

cratif.Hermogène. — Tu as raison.

i. A'Jîtv TÉXr, signi6e proprement: acquitter la dépense faite, c'est-

à-dire couvrir les frais engagés—

par suite, être avantageux, ce qui

est le sens habituel de XtxnTcXeFv.

2 Homère emploie fréquemment ôf&Xctv : faire grossir, accroître,

mais jamais $f&tpo£. Si l'on garde <t> donné par les mss. (mais sup-

primé par Cornarius). il faut considérer X& ôçiXXi»v (apposition à tu)

comme une restriction, l'idée étant : Homère s'est souvent servi de

lofîÀ.txoç, je veux dire sous la forme OyéÀÀïi/.

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toi KPATTAOS 417 a

Tou.sva a o"u^cf>ÉpovTà » te Kal «cnj|i<f>opa

» KEKXf^aSai àno

toO cru^TiEpupépEaSai..

EPM. "Eouce.

Zft. Tè Se y£ « KEpSaXÉov » ànè toO KÉpSouç. « KépSoç »

8è vO àvTl toO SéXtoc àTto8iS6vTi eç t6 ovou.a 8r|Xoî 8 fioù- d

XExaf tô yàp àya8ôv koli3

aXXov TpoTtov ôvoy.ࣣi. "OTiyàp

KEpàvvuxat eç TtàvTa Sie^uSv, TaÛTrjv aÔToO t^jv Sùva^uv

ETtovo^ia£cov IGeto Toû'vou.a* SéXxa (8a

) evSeIç &vtI toO vO

«

KÉpSoç»

ECjjSÉy^aTO.EPM. « AuaiTEXoOv » 8è xt

5rj ;

Zft. "Eoikev, o e

Epu.6yEV£ç, oô^l Ka8a*n£p ot KocnrjXoi

aÔTcjS xpcovxaL, làv x6 àvàXcùy.a ôVnoXurj, ou TaÛTrj XéyEiv

U.01 SoKEÎ TÔ « XuaLTEXoOv », àXX' OTl Tà)(iaTOV OV ToO SvTOÇ C

ïaTaaSai ouk eS là Ttpàyu.aTa, ouSè téXoç Xa6oOaav ttjv

<|>opàv

toO<J>Ép£a8ai CTTfjval

te KalTTauaacrBai,

àXX' àsl

Xùei auTfjç av tl ETtiXELpfj teXoç EyylyvEaSaL, Kal TtapÉ)(Ei

aTtauaTOV Kal àSàvaTov auTf)V, TauTt] ^ou Sokeî£TU(f>rj fierai

t6 àyaSôv XucrteXoOv t6 yàp Tf^ç (pop&ç Xuov tôtéXoç«XuatTEXoOv» KaXÉaat. « 'n^ÉXiu-ov » 8è ^evikov Toûvou.a,

^ Kal "Ou-ripoç TtoXXa)(oO KÉxpr|Tai, TÉp «ôcjjéXXeiv »• eotl

8è toOto toOaû^Eiv

Kal tcoielv ETrovuu.la.

EPM. Ta 8èS?)

toùtcov EvavTta Ttâç e^el rju.îv ;d

ZO. °Oaa ^èv aTt6<|>r|(Hv aÔTcov, &q yé u.oi SokeÎ, ouSev

Seî TaOTa SiE^iÉvai.

EPM. nota TaOTa;

Zfï. «s

AE)oy.(j>opov » Kal « àvaxpEXèc; » Kal « àXuaiTEXèç »

Kal «

aKEpSÉç».

EPM. 3

AXn 8îi XéyEiç.

Testim. : 417 C 8 ôçAXsi IL, 3, 62.

a 8<ju|j.-epicp£pe<j0ai.

c

Eptx. "Eoixe StalJbaum (au vu7tsptcpspea8at :

eotx.ôv W) : outxîiepifÉpîaOat loàcf T aup:spiçspsa0ai B ||b 1 vu BW :

v T y8=Xxa BW : 8T

j|4 UXza 8' Bekker : SiXra BW 8 T

||vu

BW: v T d c 6 TayaBôv W

|| 7 xô Ôvou.a

Wj| 8 wptXstv T || 9 aù^elv B

Ilnoieïv codd. : tîXsov -oisïv Orelli Xtftlvttv uel Ttïova izoïeïv Heindorf.

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417 d GRATYLE ioa

Socrate. — Mais il faut s'arrêter sur nuisible et domma-

geable.

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Blabéron (nuisible) désigne ce qui nuit aue cours des choses (blapton ton rhouri). Blapton {ce qui nuit), de

son côté, marque la volonté d'attacher (bouloménon haptéïn) ;

or, attacher et lier reviennent au même et impliquent tou-

jours un blâme. Ce qui veut enchaîner le cours des choses (to

bouloménon haptéïn rhoun) serait donc très justement nommé

boulaptéroun ;mais par enjolivement, me semble-t-il, le mot

est devenu blabéron (nuisible).Hermogène. — Ils sont bien compliqués, Socrate, les

noms qui sortent de tes mains ! En ce moment tu m'as l'air

d'avoir, pour ainsi dire, joué sur la flûte le prélude de l'air1

418 a d'Athéna, en prononçant ce nom de boulaptéroun.

Socrate. — La faute n'en est pas à moi, Hermogène, mais

à ceux qui ont établi le nom.

Hermogène. — Tu dis vrai;

maispassons

à zêmiôdés(dom-

mageable). Que peut-il être ?

Socrate. — Que peut bien être zêmiôdés ? Considère,

Hermogène, comme j'ai raison de dire que l'addition et la

suppression de lettres altèrent profondément le sens des

noms, si bien qu'avec des changements minuscules on leur

b fait parfois signifier le contraire. Ainsi, notamment, dans

déon (obligatoire). J'ai pensé à lui et m'en suis souvenu

tout à l'heure en songeant à ce que je voulais te dire : c'est

que notre langue d'aujourd'hui, cette belle langue, a re-

tourné les noms d'obligatoire et de dommageable au point de

leur faire indiquer le contraire en en effaçant le sens, tandis

que l'ancienne montre clairement ce que signifient l'un et

l'autre nom.

Hermogène. — Qu'entends-tu par là ?

Socrate. — Je vais te le dire. Tu sais que nos ancêtres

faisaient très grand usage de l'i et du d, surtout les femmes,

i. Littéral, du nome. On appelait ainsi le grand air de concert,

exécuté particulièrement en l'honneur d'Apollon par un citharède

qui chantait en s'accompagnant sur la cithare. C'était une composi-tion musicale fort longue, comprenant sept parties, et précédée d'un

prélude. Pollux (IV, 77; cf. IV, 66) mentionnele

nome d'Athéna.—

L'étymologie compliquée de pXa6epov est pour Hermogène comme

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ioa KPATYAOS 417 d

ZO. 'AXXà « (SXa6ep6v » yc Kal «£t]uico8£<; ».

EPM. Nat.

ZQ. Kal x6 ^iév ye « frXaÔEpov » t6 fiXairrov xôv

poOv eîvou XÉyEr to Se « (iXdtTiTov » au arjuatvEi (iouX6- e

(ICVOV OTTTEIV x6 8È « OTTTEIV » Kal SeÎv TauT<5v laTt,

toOto Se navTa)(oO ^ÉyEi. T6 3ouX6(ievov ouv Stttelv

poOv ôp86Taxa ^ièvav

zïr]« (iouXaiTTEpoOv », KaXXcomcjSÈv

Se KaXEÎaBal uoi cpa'iVExai « (SXaÔEpôv ».

EPM. rioLKlXayé aoi, co ZcoKpaxEÇ, EKÔaivEiTa ôvéuaxa.

Kal yàp vOv uoi ISoÉjaç cocmEp toO xfjç 'A8r)vàaç v6^ou

npoauXiov axouauXf]aai, toOto t6 ovoua TtpoEmcbv t6

« liouXanxEpoOv ». 418a

ZQ. Ouk EycayE, coe

Epu.éyEV£c;, aïiioç, aXX' ot Sé^evoi

t6 8voua.

EPM. 3

AXrj9fj XéyEic;- àXXàSf]

n:è « £r)uico8£c; » xl av

Zfl. Tt S' avEtrj TtoTè « c^t^icoSec; »

; 8Éaaai, coe

Ep^i6-

yEVEq, côç êycb àXn.8^ XÉyco XÉycov 8ti ttpocjtiSevtec; ypa^-

uata Kal E^aipoOvTEç a<f>o8pa àXXoioOai Taç tqv ôvà^iaxcov

Siavoiaç, outcoç cocxte auiKpà nàvu TtapacrrpÉcfiovTEc; evlote

TàvavTta ttolelv arjuaivEuv. Otov Kal ev tco «Seovtl»* eve- b

vdrjaa yàp auxè Kal àvEu.vrja8r|v apxi à*n6 toOSe 8 eueXXov

aoL Epsîv 8tif\

u.Èv véa<|>covr] rjuîv r\ KaXf] auTrj Kal tou-

VaVT'lOV TTEplETpEl^E UrjVUElV TO « SÉOV » Kal t6 «C,T\ UICoSeÇ »,

àc|>avt£ouaa b tl voeî, f\Se TtaXaià àucf>6T£pov SrjXoî S (ioù-

XETai Toôvoua.

EPM. ricoç XÉyEic; ;

Zft. 'Eyco aot âpco. Oîa8a 8tl ot naXaiol ot TJ^ÉTEpoi

tco tcoTa Kal tco SeXto eu uàXa E^pcovTO, Kal oô)( fJKiOTa

e 3 àîzavxayou W || l\ ôpQoxaxov avsI'tjW

l| (EouXa7;xepouv Tb :

-Jtxipouv BWt |î 7 à6r]vàa; B : -vaç TW||418 a i (3o'jXa;:xepouv T :

jcrépow BWt |]a èyoS

T||

3 xouvojaoc W j| 7 ;:poaxi0Evxeç evtot W||

8 rtW pro xai

||b 1 otov xe xai W

||a

àvs|AVTÎa0Y]v TW :

-(jlvtj<j6t)V

B|j

5

àaçdxepatW

(sed

in

Wov

supra a)||

9xw itoxa xai xai SéXxa

BW : xw i xai xcp ô T|| f^xtaxa ye W,

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418 c CRATYLE io3

c qui conservent plus que nous l'ancien parler1

. Aujourd'huion remplace l'i par ï'é ou l'ê

;et le d par le z, comme

ayant évidemment plus grand air.

Hermogène. — Comment cela ?

Socrate. — Par exemple, dans les temps les plus reculés

on appelait le jour himéra ou hêméra, tandis qu'aujourd'huion dit hêméra.

Hermogène. — C'est exact.

Socrate. — Or sais- tu bien que, seul, cet ancien nom

exprime la pensée de l'auteur ? C'est parce que les humains

d éprouvaient de la joie à voir la lumière sortir de l'obscuritéet la désiraient Qiimeïrousin) qu'on a fait le mot himéra

(désirée).

Hermogène. — Apparemment.Socrate — Aujourd'hui il a reçu une forme pompeuse

2 et

l'on ne peut plus comprendre ce que veut dire hêméra.

Toutefois, selon certains, c'est parce que le jour appri-voise

(Jiêmèra poiéï) qu'ila

été appelé ainsi.Hermogène. — C'est mon avis.

Socrate. — Quant au joug (zugon), tu sais que les anciens

lappelaient duogon3

.

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Si zugon n'indique rien, le nom de duogon

e a été justement donné aux deux animaux attachés pourconduire (duoïn...

agôgên);mais

aujourd'hui

on dit

zugon.Et il a une foule d'autres cas du même genre.

Hermogène. — Apparemment.Socrate. — C'est de même, tout d'abord, que le mot

dèon, ainsi prononcé, a un sens contraire à tous les noms quiconcernent le bien

;car l'obligatoire (dèon), qui est une

forme du bien, a l'air d'être une chaîne (desmos)el un obsta-

cle au mouvement, comme s'il était frère du nuisible (bla-

bèron).

un prélude qui en annonce une série d'autres plus compliquées encore.

i. Cf. Gicéron, De orat., 12 : « Facilius mulieres incorruptam

antiquitatem conseruant, quod, multorum sermonis expertes, ea

tenent semper quae prima didicerunt » .

a. Cf. 4i4 c ("cpaytoôsiv).

3. L'Etymologicum magnum,

s.

v., explique l'étymologiede

£

-

jyoçpar Buayo? .

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io3 KPATTAOS 418 c

at yuvaÎKEÇ, atTiep ^àXurta xfjv âp^alav <J>a>vfjv aco^ouai. c

NOv 8è àvxl \xkv xoO taxaf\

eTf) ?JTa ^ETaarxpÉcpouaiv, àvxl

8è xoO SÉXxa ^f)ia, cbç 8fj UEyaXoTtpETTÉaxEpa ovxa.EPM. nôc;S/| ;

ZO. OTov oî yèv àp\ai6xaxoi « t^iÉpav » xfjv f^Épav

EKàXouv, oi 8è « âuépav », ot Se vOv « ^uépav ».

EPM. "Eaxi xaGxa.

ZO. OîaGa o3v 8xi u6vov toOto SrjXoî x6 àp^atov

o'vau.a xf]v Siavotav xoO Beuévou; 8xt yàp aauÉvoiç xoîç

àvSpcbTTOLc; Kal tjiEtpouatv ek xoO ok6xouc; x6 <Jjqç lyi- d

yvEXo, xauxfl <av6uaarav « î^iépav ».

EPM. 4>atvExai.

ZQ. NOv 8é y£ XExpayQSrjuEVov ou8' av Kaxavo^craiç 8

il (SouXExait)

« T)uÉpa ». Kalxot xivèç otovxai, à>ç 8f) f\

f\\ié.pcL fjuEpa TioLEÎ, Sià xaOTa ovouàaSai auxfjv ouxoç.EPM. AokeÎ

JlOl.

ZO. Kal x6 yE « £uyèv » oîa8a 8xi « Suoyèv » ol TtaXaiol

l<àXouv.

EPM. nàvu yE.

ZO. Kal xofciév yE « £uy6v » oôSèv StjXoî, x6 8è tolv

Suolv EVEKa tt]ç Sécecùç lç xfjv àycoy^v ETtov6uaaxai e

« Suoyov » SiKaicùÇ' vOv 8è « £uy6v ». Kal &XXa Ttà[rnoXXa

ouxcoç ev^ei.

EPM. <l>aiv£Tai.

ZO. Kaxà xaGxa xolvuv TTpSxov uèv t6 « Séov » ouxco

XEy6^iEVov xouvavxlov arniatvEi Tiacri xoîç TiEpl xo àyaBov

ôv6uaaiv àya8o0 yàp t8éa ouaa x& Séov <j>alv£xai 8Eaji6çEÎvai <al KÔXujia cj>opâç, ôSariEp à8EXc|>8v Sv toO (iXaÔEpoO.

C i awÇouot B : oto- TW||

2 twia r] R r)r'.a BW : c

r]f

t] t] T ||

3 ÔéXxâ pjW BW : 8 £ T ||6 01 8s

ifxe'pavW

||8 touto BW : toutwv

T D 9 àsjxévotç B : àa- TW d a tjjipav t : rjue'pav B et ut uid. T

ctjv fijjLepavW

D 5-6tj fjfxépa f^aeca BT :

f]u.spa rj rjuipa W || 7 lait

xaijTa W pro Boxeï jxot JJ 8 /.ai xdv ys W j| $uayôv J. G. Schneider ex

Etym. Magn. s. v. Çuydç ||6 1 evexev W (sed a supra ev) ||

8 ov om. B.

V. 2. - 11

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418 e GRATYLE io4

Hermogène. — Il en a tout à fait l'air, Socrate.

Socrate. — Mais pas si tu prends l'ancien nom, qui appa-419 a remment était beaucoup plus juste que le nom actuel : il

s'accordera avec les biens déjà mentionnés1

,si tu remplaces

l'é par l'i comme autrefois;car dion 2

(parcourant), et non

dèon (enchaînant), désigne à son tour le bien, qui est traité

avec éloge. Et ainsi l'auteur des noms n'est pas en contra-

diction avec lui-même : obligatoire, utile, profitable, lucratif,

bon, avantageux, facile semblent être la même chose;sous

des noms différents ils signifient que ce qui ordonne et qui va

est célébré en tous lieux ; ce qui arrête et enchaîne, blâmé aub contraire. Voici notamment dommageable (zêmiôdés) ;

rem-

place, suivant l'ancienne prononciation3

,le z par un d, et

le nom te paraîtra s'appliquer à ce qui entrave la marche

(doun to ion) sous l'appellation de dêmiôdés.

Hermogène. — Et plaisir, douleur, désir, et les noms du

même genre, Socrate?

Socrate. — Ils

ne me paraissent pastrès

difficiles,

Hermogène. Pour hêdonê (plaisir), c'est la tendance à

la jouissance (hê onêsis) qui semble porter ce nom, mais le d ya été inséré, si bien qu'on dit hêdonê au lieu de hêonê

; lupêc

(douleur) paraît avoir tiré son nom de la dissolution (dialu-

sis) physique que le corps éprouve en cet état. Ania (chagrin)est ce qui empêche le mouvement (an

—iénaï). Algêdôn (peine)

m'a l'air d'un nométranger

4,tiré de algéïnos

(pénible).

Odunê

(souffrance) doit son appellation, semble-t-il, à la pénétra-tion (endusis) de la tristesse. Quant à akhthêdôn (affliction),

le premier venu verra figurée dans ce nom la pesanteur quialourdit le mouvement. Khara (joie) semble ainsi appelée

d'après Yeffusion (diakhusis) et la facilité du cours (rhoê) de

l'âme 3. Terpsis (agrément) vient de terpnon. Et terpnon

i. Qui tous marquaient le mouvement.2. Aiôv, c'est-à-dire §>.i6v.

3. Voir plus haut, 4i8 b c.

A C'est-à-dire, suivant une façon de parler déjà vue, étranger à

l'attique. 'Alyrfîtnv paraît être en effet un mot ionien et poétique,

bien que Platon l'emploie lui-même en plusieurs endroits.

5. L'étymologie est particulièrement contournée. Socrate rattache

la première partie du mot à yioi (verser, répandre), et la deuxième

à po7j. Lesanciens estimaient

que l'âmeest détendue

parla

joie,tandis qu'elle est contractée par la tristesse.

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io4 KPATYAOS 418

EPM. Kal L^àXa, S Z&KpaTEÇ, oôtcù cpalvETaL.

Zfl. 'AXXS

oôk làv t& àp^aio ôv6^aTt XP?1>8 ttoXù

ll&XXov elk6ç iaxtv ôp8coç KEÎa8aL fj t5 vOv, àXX

3

ôlujXo- 419

y/ja£u tolç npôaSEv àyaSoLÇ, làv &vtI toO eÎ to tÔTa àrto-

SlScoç, ôanEp to naXaiov Siov yàp aS arj^atvEi, AXX3

8éov, Tàya66v, frrtEp 8f]ETtaLVEÎ. Kal oÏJtcù oôk IvavTLoOTaL

aÔTÔç aûxcù ô ià Ôv6^axa tlSeljlevoç, àXXà « 8Éov » Kal

«axpÉXiLjLov » Kal « XuqlteXoOv » Kal « KEpSaXÉov » Kal

«

àya86v»

Kal«

£mi<f>Épov»

Kal«

EÔnopov»

t6 aÔTO<J>alvETaL, ETÉpoiç ôvéLiaai arj^iaîvov t8 SiaKoajioOv Kal tov

Tiavxa^oO lyKEKCûLuacrLiÉvov, t8 Se ïctxov Kal SoOv ipEyé- b

ljlevov. Kal8f)

Kal to « £t)lu6ù8eç », làv KaTà t^jv ap^alav

<{>covf|V âttoSôç àvTl toO £f]Ta SÉXTa, <f>av£ÎTal aot KEtaBai

t6 ovoLia ettItô SoOv tl tô tô" v, âiTovoyaaGèv «8rj luoùSeç » .

EPM. Tl Se 8f)«

r)8ovf]»

Kal«

Xi!mr)» Kalcc

ImBu^la»

Kal Ta TouxOTa, S Za>KpaTEÇ ;

Z£l. Où nàvu xaXETtà fcioL cJ>alvETau, S c

Ep^6yEVE<;. "H

te yàp «rjSovfj », f\ Ttpôç Tf)v Bvrjaiv eolke TElvouaa

TTpa^tç toOto e^elv tô Svouia— tô SéXxa 8è lyKELTai, &gte

«fjSovf) » àvxl « fjovfjç » KaXEÎTai —

f^te «

Xtinr)» àirô C

tt^çStaXiùaECû

çtoO

ctoluxtoc;eolkev

ETrcovo^àaSat fjvèv

toûtcû t$ ttoiSel ïa^Et t6 aÔLia. Kalfj yE « àvla » tô

elltio8l£ov toO levai.eH 5è «àXyrjSov » £evlkôv tl (palvETal

poi, àno toO àXyEtvoO ôvoLiaaLjiévov. « 'OStivn, » Se à-nô

TfjÇ IvSÙCECûÇ TÎ^Ç X^TTT^Ç K£KXï]LlÉVT] EOLKEV. « 'A^r^V »

Se Kal navTl SfjXov àTtr|Kaaji£vov tô SvoLia tô Tfjç <J>opôç

(iàpEL.«

Xapà» 8è

Tj| 8La)(iJaELKal

Eunopla Tfjç jSofjç

6 10 làv —yj37)

B : èv — -^p^ T jj419 a 2 êî B : ë T é b

j|îwxa

B : t T|j owco8i8cjii

b : -8i'8coç BT ||3 8iôv T et in marg. b : 8iaïov B

8iaïôv b 8uov Heindorfl|

au om. T|j

A §h B : àel T||

6 xep8aXe'ov

Tb : -8àXeov B||8 fôv Bekker : ov B ov T

||b 3 ÇîJTa UXxa B : Ç 8 T

|| .patvexat B (corr. b) ||5 8e B : 8ai Tb

j| g 8&xa B : 8 T||c i rjovTJç

B: îjdvrjaiç T ouxw; rj ovri<jiç in marg. b||

a lîctovoijLàaOat T :-(J.aa6î)vat

B || 5) Stallbaum pro ^v || 6 xexXiqtxsvT) BT et statim (primum tamenxexXrj|jiivr)

fortasse T) : -ij.£vr] Heindorf.

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41 9 d CRATYLE io5

d (l'agréable) tire cette appellation de ce qu'il se glisse (herpsis)

à travers l'âme, assimilé à un souffle (pnoê) ;il serait à bon

droit nommé herpnoun, mais avec le temps il a été déformé

en terpnon. Euphrosanê (gaîté) se passe d'explication : tout le

monde voit qu'elle a reçu son nom du mouvement de l'âme bien

accordé (eu sumphéresihaï) à celui des choses. Ce nom serait

euphérosuné en bonne justice ; pourtant nous l'appelons euphro-sanê. Épithumia (passion) non plus n'est pas difficile : la force

qui tend vers le principe irascible (épi ton thumon ïousa) lui a

e évidemment valu ce nom. Thumos (principe irascible) doit

tirer son nom de l'impétuosité (thusis) et du bouillonnementde l'âme '

. Voici d'autre part himéros (désir) : il a dû son

nom au courant qui entraîne le plus puissamment l'âme;

420 a comme il coule avec impétuosité (hiéménos rhèï) et à la poursuite

(éphiéménos) des choses, et qu'ainsi il attire fortement l'âme

par rimpétuosité de son cours, c'est en vertu de toute cette

puissance qu'il a été appelé himéros. Passons maintenant à

pothos (regret) :

son nom indique qu'il n'appartient pasau [désir et courant] présent, mais à ce qui est quelque part

(pou)2 ailleurset absent, d'où ladénomination depothos donnée

à ce qu'on appelait himéros quand son objet était présent ;lui

disparu, ce même sentiment a été nommé pothos. Quant à érôs

b (amour), c'est parce qu'il coule en l'âme du dehors, et que ce

courant, au lieu d'appartenir en propre à celui qui l'éprouve,

s'introduit de l'extérieur parles yeux

3

, qu'il était anciennementappelé esros, de esrhéïn (couler dans), car nous employions o *

à la place de ô; aujourd'hui on l'appelle érôs par changement

de o en ô. Mais que te reste-t-il à proposer à notre examen?

Hermogène. — \Jopinion et les noms de ce genre, que t'en

semble ?

Socrate. — Doxa (opinion) a dû son nom soit à la pour-

i. Cf. Timée, 70 b sq.

2. Ou plutôt 7:06t.

3. Gomp. Phèdre, a5i b, où Socrate décrit l'effet produit par la

vue d'un beau visage ou d'un beau corps sur « celui qui a été initié

depuis peu, ou qui a beaucoup contemplé » dans le ciel : « Quand il

a reçu par les yeux les effluves de la beauté (roù xàXÀou$ ttjv

à-opcorjv), il s'échauffe, etc.» Cf. Euripide, Hippolyte, 5a5-6 :

« Éros, qui par les yeux distilles le désir... »

4. Le texte dit: nous employions ou. (Voir 4i6 b, 4n e, note).Sur cet usage de l'ancien alphabet attique, cf. 4 10 c et note.

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io5 KPATYA02 419 d

Tf)Ç IpU^fjÇ EOIKE KEKXrj^ÉVT|. « TÉpijnÇ » SE aTl6 ToO d

TEpnvoO' to 8è « TEpTiv6v » àn6 Tfjç 8ià i?\ç ^w^fjç

ipipECùç TTvofj àTtELKaaGèv KÉKXrjTai, ev oIkt\ ^ièv av<( EpTIVOUV » KoXoÛ^LEVOV, ÛTtÔ )(p6vOU 8è « TEpTTV&V »

naprjYtiévov. « EuûJ>poaùvr} » Se ouSèv TipoCTÔEÎTai toO 8i6ti

£r|8f|var TiavTl yàp SfjXov 8tl à-nb xoO eS tolç Ttpày^aai

ti*)v ifuX^v ^u^i(J)ÉpEa8aL toOto IXaÔE xô Svoua, «

eugJ>e-

poauvr|v » tô y£ S'iKaiov b\xcaq 8è aùxo koXoOjiev « EÙcppo-

auvrjv ». Ouô'«

ETuBu^ia»

^oXeti6v tt] yàp ettI tov8u^ôv îoùarj Suvà^iEi SrçXov otl toOto EKXf)8r| to bvojia.

6

c ©u^iôç » 8è ànô Tfjç 8ùctecûç Kal £écteco<; xf]ç ipu^ç

I)(ol av toOto to ovo^ia. 'AXXà\x1\v

« Xpcpôq » yE t$ \x6l\i-

axa eXkovti xfjv vpu^v p& ETTCùvo^àaSï]* 8xi yàp îé^levoç 420a

pEÎ Kai ecJ)1£^£vo<; xôov Tïpay^dTCùv, Kal ouxcoBï)

èmcrn&

acj>o8pa x^v ipu^v Stà xf)v iaiv xfjç pofjç, àno xaùxrjc;ouv

Ttàarjc; xfjç Suvà^ECùÇ a t(AEpoç » EKXfjSrj. Kalyifjv

« tt68oç » au KaXEiToti arjuatvcov ou toO napévxoç sîvai

[t^iÉpou te <ai p£Ùu.axoç], àXXà xoO aXXoGi ttou Bvxoç

Kai &tt6vtoç, 88ev « tt68oç » ETtcùvô^aaxai Sç x6xe, 8xav

Ttapfj oS xiç IcJjIeto,« t^iEpoç » ekoXelto -

àTtoyEvo^iÉvou 8è

ô

auxoç oCxoç«

tt68oç»

EKX/)8rj.«

"Epax;»

Se,8xl

èapEte£co8ev Kal ouk olKEta iaxlv

fj j$of| aôxr) xô I)(ovxi, àXX' b

ETtElaaKToç 8ià xâv ôu.u.àxcov, 8ià xaOxa àno xoO èapEiv« tfapoç » x6 yE TtaXaièv ekoXeîxo — x<£ yàp oS àvxl xoO S

è)(pG>u.£8a— vOv 8' « Ipoç » KÉKXr|Tai 8ià xf)v xoO où àvxl

xoO oS u.£xaXXayr)v. 'AXXà xl exi ai) XéyELc; ô tl aKOTtû^EV ;

EPM.«

A6£,a» Kal

Ta ToiaOxa Ttfjctol

<|>a(vETat ;

ZO. « A6£,a »8f) fjxoL Trj Sioocveu ETTCov6^aaxat, îjv f\

d 3 ép^cto; B et man. rec. W :

-csp-T et primit. W || 7îvof} man.

rec. W :-tfj || 4 i'pîîvouv B : ep7cvouv T ïpnvov W || 7 eùçepoffiSvr

v

Bekker : eùçpoauvr,v B eù<pspoaûvrj W èsspwauvTj T eùçsptoauvri bt||

420 a 6 tfiipoo T6 xatpsyti-a-coç secl. Ast

|| 7 ôvdjxa-coç supra xaî b

Il 9 lape? BW: eta- T || b 3 eapou; primit. b || ou B

:

ô TWb ||

5 ôû B : ô TWb D au (uel au) Heindorf : où{{ 7 9 Ast pro ^v.

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420 b GRATYLE 106

suite (diôxis) que mène l'àme, cherchant à savoir la nature des

choses, soit au coup parti de l'arc (toxon). C'est plutôt, sem-

c ble-t-il, cette explication1

. En tout cas, la croyance (eïêsis)

s'accorde avec elle. C'est en effet l'élan (oïsis2

) de l'âme vers

l'objet, pour connaître la qualité de chaque être, que le nom

parait indiquer, de même que la volonté (boulé) désigne le

jet (bolê) et que boulesthaï (vouloir) signifie éphiesihaï (tendre

vers) comme aussi bouleuesthaï (délibérer). Tous ces mots, à

la suite de doxa, semblent figurer le jet (bolê), de même

qu'inversement Y irréflexion (aboulia) parait être le fait de

manquer le but (atukhia), en tant que l'on ne frappe (ou

balon) ni n atteint (ou tukhôn) ce qu'on cherchait à frapper, ce

qu'on voulait, l'objet d'une délibération et d'une aspiration.d Hermogène. — Tu te mets là, Socrate, il me semble, à

accumuler les explications !

Socrate. — C'est que l'inspiration de la divinité touche

à sa fin 3. En tout cas, je veux encore expliquer le nom

d'anankê (nécessité)

— car il fait suite à ceux-là — et celuid'hékousion (volontaire). Pour hèkousion, c'est ce qui cède

et ne résiste pas, mais, je le répète, cède au mouvement

(éïkon tôiontî),

—j'entends : le mouvement volontaire — *

qui doit avoir été désigné par ce nom. Le nécessaire (anan-

kaîon) et le résistant, étant contraire à la volonté, concer-

nera l'erreur et l'ignorance ;il est assimilé au trajet par

eles ravins (ankê), où des endroits difficiles, raboteux et touf-fus arrêtent la marche 5

. C'est de là, sans doute, qu'il a tiré

son appellation d'anankaïon, ayant été comparé à un trajet

par le ravin. Mais, tant que nous avons la force, ne la lais-

sons pas relâcher. Toi-même, tiens bon et questionne.

i. C'est-à-dire la seconde, comme le montre la suite.

2. Platon forge le mot d'après oIito; (trait), en le tirant de oipo>

(oiaw).3. Cette phrase a été entendue de diverses façons par les commen-

tateurs, et l'on a proposé des corrections. Malgré la concision de la

formule, le sens paraît clair. Socrate veut dire qu'il sent arriver à

son terme l'inspiration divine» que lui a communiquée Euthyphron.

4- Or Socrate a expliqué un peu plus haut{3o-jXr[ (volonté) par

poXr] (jet), rattachant ainsi cette notion à celle du mouvement.

5. 'Avayxr,, c'est la nécessité, qui contrarie l'élan de la volonté,

donc le mouvement. Socrate l'explique par àva (le long de) et Syxtj

(ravins).

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io6 KPATYAOS 420b

ty^Xh SidbKouoa t6 ElSÉvaioTtfl exe». TaTupàyiiaTa TtopEÙETai,

fj Trjànô toO t6^ou froXfl.

"Eoike 8è TOUTE}) u.&XXov.eH

yoOv«

oïrjaiç»

tout© auu.({>cov£Î.aOîaiv

»

yàp Tfjç i^u^çC

ettI tô Trpayu.a, oî6v taTiv EKaaTov tqv ovtcùv, Sr|Xoûar)

TTpOaÉOLKEV, CùOTtEp y£ Kalf}

« (SouXl5

)

» TTCÛÇ TfjV fr O X ^ V,Kal

tô « |JoùXe<j8<xi » t6 E(|HEa8ai arjiiaivEi Kal (to) « [JouXeu-

Eo8ai»' TtàvTa TaOxa 86£t] ETtéu-Ev' &TTa c[>alv£Tai Tf]ç

[io Xfi, <; aTtEiKàa^axa, ôonEp aS KalTouvavTiovf\

« àBouXla »

oTU)(ioSokeÎ

EÎvai, côçoù

ftaXévToçouSè

tu)(6vtoc;o\5

lôaXXÉ te <al o eôoùXeto Kal TtEpl ou e6ouXeùeto Kal oS

E(|H£TO .

EPM. TaOxafjôrj

u.01 SokeÎç, éo ZcoKpaTEÇ, TtuKVÔTEpa&

ETtàyEiv.

ZO. TéXoç yàp fjSrj8eco. « 'Avày^v » 8' oSv etl (iou-

XoiiaiSiaTTEpavai,

oxixoùxoiç eE^ç ectxi,

Kalxô « ekoùcxiov ».

Tô u.èv o8v a EKoùaiov », tô eÎkov Kalu.f| àvxiximoGv, àXX',

ôoTtEp XÉyco.,eÎkov tô Î6vtl 8E8r|Xcou.Évov av

elî)xouxco

t£> Ôv6u.axi, tô KaTà xfjv frouXrjaiv yiyvo^EVCd' tô Se a àv-

ayKatov » Kal àvxlxuTtov, Ttapà xf)v (iouX^atv 3v, tô TtEpl

xfjv aiiapxuxv av Eir|Kal àu.a8lav, àTtr|Kaaxai Se

xfjKaTà

TaayKT) Trops'ia,

oxiSûanopa

Kalxpa)(Éa

Kal Xàaia Svxa e

ïa^Ei toO levai. 'EvteOSev oSv ïacoç EKXr)8rj « àvayKaîov »,

tt]8ià toO ayKouç ànEiKaaSèv TTopEia. "Ecoç 8è TràpEaxiv

f\ pcou.ïj, \xr\àvicoiAEv atJTrjv àXXà Kal crû

iif] àv'iEi, àXXà

Ipcoxa.

b 8 "6 BW : xou T|| 9 touxw T : touto BW

||C i oïatv yàp in

marg. t :

otsstv icrtoç yàp B efotv yàp T olcuv latoç yàp Woiasiv

l'acoç yàp (interpunct. deleta) in marg. bj|

a xô BW : rcav T||3 xios

Hermann : rpôç || 4 tô add. Heindorfjj

5xfj 80Ç7] W ||

6 fiokriç T :

{Bou- BW j| 7 paXdvxo; B et sine accentuT: jBaXXov-W ||oùc>è xuy/a-

vovxoç W jjoy T : ouV B oux

'

b S W||8 ïSaXXé Te Bekker : E&ftXctfl

BT ir.zUkki.xo W||

BW : ou T(Id 3 06w TW : 0sw B (punctis

in marg. uitium indicare uoluit b) ||8 ivritunov T: àvxtTU7iouv BW

Il 9 âx^xttatoi T : dbcc(- BW||

xaxà rà àyxT)b et yp. in marg. W :

xaxà àvàyxrjy BT /.atavayxrjv

W|| e 4 àvtâijjLSV BW

: -{totJLSv T || àvi'ei

TW :-tî|

B-iTj b.

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421 a CRATYLE 107

421 a Hermogène. — Ma question va donc porter sur les nomsles plus importants et les plus beaux, sur la vérité et le men-

songe, sur l'être, enfin sur l'objet même de notre entretien,

le nom. Pourquoi est-il ainsi nommé ?

Socrate. — Voyons, est-il une chose que tu appellesmaïesthaï ?

Hermogène. — Oui, rechercher.

Socrate. — Eh bien, ce nom semble forgé d'après une pro-

position disant que le nom (onoma) est Y être sur lequel porte la

recherche. Tu le reconnaîtras encore mieux dans ce que nous

appelons onomaston (ce qui est à nommer). Car ici l'ex-

pression est claire : ils'agit de Vêtre qui est objet d'enquête (on

b hou mâsma). Alêtheïa (vérité), à son tour, ressemble aux

autres noms, et paraît être un composé ;c'est le mouvement

divin de l'être qui semble désigné par cette locution, alêtheïa,

entendue comme une course divine (aie Ihêïa). Pseudos (men-

songe ) est l'opposé du mouvement ; nous voyons encore

revenir les

injuresadressées à ce

quiest arrêté et contraint

de rester en repos ;il a été formé par comparaison avec les

gens endormis ([kath]eudousî), mais l'addition du ps cache

le sens du nom. On (être) et ousia (essence) disent la mêmechose que alêthés (le vraî), en prenant l'i

; être, en effet,

c signifie allant (ion), et non-être (ouk on), à son tour, comme

l'indique le nom que certains lui donnent, veut dire n'allant

pas (ouk ion)1

.

Hermogène. — Ces analyses, Socrate,e

^

n.î

)

.?s

tu me semblés les avoir poursuivies avec

la plus grande vaillance. Mais si l'on

demandait, à propos de ion (ce qui va), rhéon (ce qui coule),

doun (ce qui enchaîne), quelle est la justesse de ces noms?

Socrate. — Que répondrions-nous, veux-tu dire? N'est-ce

pas?Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Eh bien, un expédient2

que nous avons fourni

tout à l'heure peut donner quelque apparence à notre ré-

ponse.

1. Pour l'oreille, ovx fov se confond avec oyxi (forme ionienne de

lanégation)

ov.

a. Sur cet « expédient », voir 409 b.

Page 165: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

http://slidepdf.com/reader/full/platon-52-cratyle 165/229

io7 KPATYAOS 421a

EPM. 'EpoTÔ 8f]t<x uÉyicrra Kal xà KaXÀioTa, Tf|v te 421 a

« àXrj8ELav » Kal tô a ^eOSoç » Kal to « 8v » Kal auTÔ

touto TiEpl o vOv é X<$yoç fiu.îv Èaxiv,«8voLia», ÔV

S tltô

Svoua e^el.

IO. M a le a8 ai ouv koXeÎç ti;

EPM. *EyG>y£, to ye £t]teîv.

Zfl. "Eoike toIvuv ek X6you ôvéuaTt oruyK£KpoTr|u.Év(j>,

XéyovToc; oti toOt* eotiv 8v, oS Tuy^àvEi frfjTr)ua, tô

« bvou.a». M&XXov Se av aÙTÔ yvolrjç

ev

Ç XéyouEVtô

« ovouaaxov »• IvTaGSa yàp aac^Gûç XsyEi toOto EÎvai o v o 6

u.àau.a èaiiv.CH Ô° ce àXf|8£ia », Kal toOto toîç aXXoiç b

eoike a\>yKEKpoTf]a8ai- f\ yàp 8£la xoO ëvxoç <|>opàeoike

TtpoaELpfjaSat touto xw jSfjuaTi, Trj« àXr|8Eta », â>ç Ssla

ouaa aXr|. Tô Se «ijjeOSoç » TouvavTiov Trj <J>opS

#

TiàXiv

yàpau

Xoi8opoùu.£vov fJKEitô

Io^6u.evovKal tô

àvayKa£6-lievov T^<ju)(à^Eiv, aTtr)KaaTai Se toîç KaGsûSouai' tô

\\>sï

ÔÈ TTpoayEVOU.EVOV ETTLKpÙTTTEL xf]V frouXrjCJlVTO0 ÔVOLiaTOÇ.

Tô ôè « 8v » Kalf\

« ouata » ôuoXoyEÎ t$ àXr|8EÎ, tô lôxa

ànoXaôév lôv yàp arju-alvEi, Kal tô a ouk 8v » a3, &q tlveç C

Kal ôvou.à£ouaiv auT<5, « ouk Î6v ».

EPM.TaO-ra u.év u.oi

Sokeîç,o

ZcbKpaTEÇ, àvôpEiQÇnàvu SLaKEKpoTrjKEvaL' eI ôé tiç IpoLTo toOto tô « tôv » Kal

TÔ « £ÉOV » Kal TÔ « SoOv », TLVa E)(Et èpQ6iT\ia TaOTa xà

ôvou.aTa —ZH. Tl av auT$ aTTOKpivalu.E8a, XéyEiç ; îj yàp ;

EPM. nàvu u.èv oSv.

ZQ.°Ev u.èv tolvuv

apTittou

ETtopiaàuESa,qote Sokeîv

TL XéyELV àTIOKpLV6u.EVOL.

421 a 2 xat xô ôv om. B add. bj|3 o man. rec. Laur. 85, 6 : wv

||

5 xi W||6 y£ om.T

||io 6v ou

4ua7|xa êaxtv Buttmann : ôvdlu.a?[j.a

èoxtv

||b i xouxto W (sed o supra io) ||

i auyxexpoxrjaôou secl. Hermann||

3 7rposipîja6ai W ||4 âXr, B

|j12 Wt : om. BT

|| àXTjv W.pro ~aXiv||

6 krcQxaoxai scripsi (cf. supra): -etxaaxatj| ij/t

BW :<]>T

||8 îwxa

BW: t

T H C 2 où/. ?ôv BT: oJxïov W

jj 4 Ipoixo BW:

as ïpotxo T ||

au xouxo W || ioxt T: xt'BW.

Page 166: Platon, 5.2 Cratyle

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421 c CRATYLE 108

Hermogène. — Quel expédient ?

Socrate. — Celui qui consiste à attribuer un caractère

d barbare à ce que nous ne connaissons pas. Peut-être y a-t-il

vraiment en eux un caractère de ce genre ; peut-être aussi

l'ancienneté l des noms primitifs les rend-elle impossibles à dé-

couvrir. Gomme les noms ont été retournés en tous sens 2,

rien d'étonnant si l'ancien parler, comparé à celui de nos

jours, ne diffère aucunement d'une langue barbare.

Hermogène. — Ton idée n'a rien de déplacé3

.

Socrate. — C'est qu'elle est naturelle. Cependant les

excuses ne me paraissent pas recevables en la cause4

, et il

faut s'efforcer d'examiner les choses à fond. Réfléchissons

donc : suppose que les locutions qui servent à former le nome fassent chaque fois l'objet d'une question, et qu'à leur

tour les parties dont les locutions sont formées suscitent

une enquête, et ainsi de suite sans répit. Celui qui répondne doit-il pas nécessairement finir par quitter la place?

Hermogène. — C'est mon avis.Socrate. — A quel moment celui qui quitte la place

422 a aura-t-il le droit de s'arrêter ? N'est-ce pas quand il en sera

à ces noms qui sont, pour ainsi dire, les éléments du reste,

phrases et noms? Car ceux-là ne doivent plus apparaître

comme composés d'autres noms, s'il en est ainsi. Voilà par

exemple agathon (bien) : nous le disions tout à l'heure

composéde

agastonet de thoon 5

;le mot thoon, nous

pour-rions sans doute le tirer de noms différents, et ceux-là, d'au-

tres encore. Mais si nous venons à prendre ce qui n'est plush composé de noms différents, nous aurons le droit de dire

que nous sommes arrivés à un élément, et que nous ne de-

vons plus le rapporter à d'autres noms.

Hermogène. — Ton idée me semble juste.

Socrate. — Les noms sur lesquels porte en ce moment ta

i . On a vu que ce genre d'explication a souvent été mis en avant

par Socrate.

a. Voir plus haut, l\il\ c.

3. Pour le sens de anà rpo'-ou, comparer Phèdre, 278 d, etc.

4. Allusion aux excuses (axrj^stç) qu'alléguait un témoin cité en

justice pour ne pas se présenter devant le tribunal. L'expression

paraît être proverbiale. Cf. Aristophane, Acharniens, 892 : « Ce débat

n'admettra pas d'excuse » (axrjiiv àywv c-uto; oùx etaBiÇexat).

5. Voir 4i2 c.

Page 167: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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io8 KPATTAOS 421 c

EPM. Tô tcoîov toûto;

ZQ. <l>àvai, o &v\jl1) yiyvcùaKCûjiEv, (Sap6apiK<5v ti toOt'

EÎvai. Eïrj u.èv oSv ïa(oç av ti t{} àXr|8eta Kal toloOtovd

auTÛv, Eirj8è Kav uttô TtaXai6Tr|Toç Ta Ttpôxa tqv ôvou.aT<av

àvEupETa EÎvai- Siàyàp to TtavTaxf} aTpé<|>Ea8aiTà ôvépaTa,

ouSèv 8aupaaT6v avEÏr)

eIf)

TtaXatà<J>covf) irpôç Tfjv vuvl

3ap6apLKÎ)c; u.r|S£v 8iac|>ÉpEi.

EPM. Kal ouSév y£ &tt6 TpôTtou XéyEiç.

Zft. AÉyco yàp oCv eikôto. Ou u.évtoi u.01 SokeÎ Trpo-

cfxxCTEic; àycbv 0£)(Ea8ai, àXXà Ttpo8u^r|TÉov xaOTa SiaaKÉ-

ifjaoBai. 'Ev8u^ir|8co^EV 8é, eT tiç asl, 8i' 5v âv XÉy^Tat t&

ovojia, EKEÎva EprjaETai Ta pr)u.aTa, Kai a38iç au Bi Sv e

av Ta pf)u.aTa XE^8fj, EKEÎva TtEÙŒTai, Kai toOto\xi\

Ttau-

asTai TtOLCùv, ap' ouk àvàyKr) TEXsuTSvTa omEiTTEÎv t8v oitto-

Kptv6^iEvov ;

EPM. *Eu.oiyE Sokel.

ZO. FI6te ouv aTTELTicbv ô à-nayopEucov SiKalcoç TïaûoiTo 422 a

av; &p

3

ouk etteiSAv eti3

ekeLvoiç yÉvrjTai toÎç ôv6^aaiv, S

oanEpEl aToi^EÎa tôv SXXcûv egtI Kal X6ycov Kai ôvo^àxcùv ;

TaQxa yàp ttou oôketi S'iKaiov (f>avf)vai IE, ocXXcov ôvou.àTcov

£uyK£lu.£va, âv o&tcoç EXÏ1- O^ov v^v Sf) to«

àyaSôv»

I<|)a^EV ek toO àyaaToO Kal ek toO 800 ^uyKEÎaBai, x6

Se « 8oôv » l'acoç c|>aîu.Evav è£ ETÉpcav, EKEÎva Se !£, &XXcov

àXX' làv TTOTÉ yE Xà6cûU.EV 8 OUKETl EK TCVOÙV ETEpCDV b

£ûyK£iTat ôvo^iaTcùV, SiKalcoç Sv<J>aî^i£v

ettI oioiyziq te

fjSrjEÎvai Kal oukéti toOto ^u.Sç Seîv elç aXXa ôv6^iaTa

àvacpépEiv.EPM. "Eu-oiyE SokeÎç ôp8coc; XéyEiv.

ZO. *Ap3

oQv Kal vuv S. IpcoTfiç Ta ôvé^iaTa aTot^EÎa

C 12 av TW : èàv B|| yivojaxoiixev W ||

tl om. Tj|d 1 ouv ora. W

i|3 àvsp£uvT)iaW d 4 sXf\ ti b et man. recentiss. t : eu; BT tj r]

W||

6 ye om. W|| Xe'yei;

TW : sép- B|| 7 Soxeiv W

||8 xauxa B : aùxà

TW d e 1 èprjaexa'. BW : av èp^astai T ||3 10 B pro xôv (corr. b) |j

422 a 1 av JWtuoitO

W || b 1 tcoxe ys B : r.oxe TW || 6 a èpwTa; T:iypoTa'.ç BW yp. àyptoTaiç t.

Page 168: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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422 b CRATYLE 109

question sont-ils donc élémentaires, et faut-il par suite un

autre procédé pour examiner quelle en est la justesse?

Hermogène. — C'est probable.

Socrate. — Oui, c'est probable, Hermogène. En tout cas,

•C tous les noms précédents semblent se ramener à ceux-là.

S'il en est ainsi, comme je le crois, çà, voyons ;examine en-

core la chose avec moi, pour m'empêcher de radoter 1 sur ce

que doit être la justesse des noms primitifs.

Hermogène. — Tu n'as qu'à parler. Dans la mesure de

mes forces 2

je l'examinerai avec toi.

Socrate. — Eh bien, qu'il y ait une seule façon d'être

juste pour n'importe quel nom, du premier au dernier, et

qu'aucun d'eux ne se distingue des autres 3 en tant que nom,tu en es d'accord, j'imagine.Hermogène. — Parfaitement.

à Socrate. — Mais dans les noms que nous venons de pas-

ser en revue la justesse consistait à faire voir la nature de

chaqueêtre.

Hermogène. — Bien entendu.

Socrate. — Ce caractère doit donc se trouver au même

degré dans les noms primitifs et dans les dérivés, du moment

qu'ils seront des noms.

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Mais les dérivés, c'est, semble-t-il, au moyendes premiers qu'ils pouvaient produire ce résultat.

Hermogène. — Apparemment.Socrate. — Bien. Et les noms primitifs, qui ne reposent

point sur d'autres, comment nous feront-ils voir la réalité

e avec la plus grande clarté possible, pour être vraiment des

noms ? Réponds-moi : si, à défaut de voix et de langue, nous

voulions nous représenter les choses les uns aux autres, n'es-

1.

Comparerl'avertissement donné

parSocrate à

Hermogène,3g3 c

;voir aussi [\ik e.

a. La modestie de la formule et la restriction qu'elle impliquesont justifiées. Hermogène ne fait guère qu'acquiescer aux propo-sitions de Socrate

;en réalité, c'est Socrate seul qui depuis le début

a mené la recherche, bien qu'il associe courtoisement l'interlocuteur

à l'élaboration de ses hypothèses (v. par ex. 428 a).

3. Ou: ne l'emporte sur les autres. Voir un peu plus bas: « Ce

caractère doit donc se trouver au mêmedegré,

etc.. » A cet

égardtous les noms — primitifs ou dérivés — sont sur le même plan.

Page 169: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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log KPATYAOS 422 b

5vxa xuy)(àvEi, ical Seî aux&v aXAcp xivl tpéTïcp fjSrj xf|V

6p86xr)xa êmaKÉipacrSai fjxiç èaxlv;

EPM. EtK6ç Ye.

ZO. EÎk6ç Sf^xa, S 'EpuoyEVEÇ* nàvxa yoOv <J>aivExat xà

iuTtpoaSEv eIç xaOxa àv£Xr)Xu8Évat. Et Se xoOxo ouxcûç c

I)(Et, &ç uot SokeÎ e)(elv, SEOpo <x3 auvEntoKEipai uex' luoO

la/jxl TTapaXrjpfjacû Xéycùv otav Seî xfjv xôv Ttpoxoùv ôvoLià-

xcov 6p86xr|xa EÎvai.

EPM. AéyE u6vov, cbç 8aov yE SuvàuEooç Ttap' èuot ectxiv

auvEmaKÉipouai.

ZQ. "Oxi uèv xotvuv ula yé xiç fj Sp86xTjç Ttavx&ç

ôvéuaxoç <al Ttpoxou Kal uoxàxou, Kal oôSèv SiacpâpEi xô

Bvoua EÎvai ouSèv auxov, oîuai Kal ool ouvSokeÎ.

EPM. nàvu y£.

Zfï. 'AXXà ufjv Sv ys vOv SiEX^XùSauEv xôv Svolju&xqv d

fj Sp86xT]c; xoiaûxr| xiç eôouXexo EÎvai, ota StjXoOv oîov

fKacxév eoxl xov Svxov.

EPM. nûç yàpoû" ;

Zft. ToOxo uèv apa ouSèv fjxxov Kal xà npcàxa SeÎ ixeiv

Kal xà uaxEpa, eïttep ôvduaxa laxai.

EPM. nàvu yE.

ZO. 'AXXà xà uèv îJoxEpa, àç eoike, Sià xoov TtpoxÉpov

oîà xef^v xoOxo àTt£pyà^Ea8ai.

EPM. «ÊaivExai.

ZO. EÎev xà 8è8f) TrpSxa, oîç oAtiq ëxEpa (méKEixai,

xlvi xpéîicp Kaxà x6 Suvaxôv 8 xi uàXiaxa <J>avEpà fjuîv

Ttoif|CTEi xàSvxa, eTttep uéXXei Ôv6uaxa EÎvai ; àn^Kpivat Se 6

laoi x68e* eI <|>ovf)v ufj ei^ouev urjSè yXôxxav, è6ouX6uE8a

Se SrjXoOv àXXi^Xoiç xà Ttpàyuaxa, Sp' ouk &v, &cmEp vOv

C 8 tw B (sed -Cfo in marg. b) :w W (primit. xô ut uidet.) ||

d l vuv8t] Heindorf||

a xiç BW||

ola TW||

6 eVîtepo xe 8tà ttov

rpoxÉptov vdijuxTa serrai T (sed t punctis uerba maie inserta not.|

eaxt (at supra t)xal -cà uaxepa W.

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422 e GRATYLE no

saierions-nous pas, comme le font en réalité les muets, de

les indiquer avec les mains, la tête, et le reste du corps ?

Hermogène. — Le moyen autrement, Socrate?

423 a Socrate. — Si nous voulions, je suppose, représenter le

haut et le léger, nous lèverions la main vers le ciel, pourmimer la nature même de la chose

;si c'était le bas et le

lourd, nous l'abaisserions vers le sol 1. Et pour représenter en

train de courir un cheval ou quelque autre animal, nous

rendrions, tu le sais, notre corps et nos attitudes aussi sem-

blables que possible aux leurs.

Hermogène. —Il ne peut, je crois, en être autrement.

Socrate. — C'est ainsi, je pense, que le corps serait unb moyen de représentation

2,en mimant, semble-t-il, ce qu'il

voudrait représenter.

Hermogène. — Oui.

Socrate. — Mais puisque c'est de la voix, de la langue et

de la bouche que nous voulons nous servir pour représenter,

n'obtiendrons-nous pas la représentation de chaque chose, celle

qui s'acquiert parlées moyens, quand nous les appliqueronsà mimer n'importe quoi ?

Hermogène. — Nécessairement, à mon avis.

« •! jz*. •*• Socrate. — Ainsi, le nom est, semble-Première définition . .,

» . ,

du nom. t_li»une lacon de mimer par la voix ce

quel'on

mimeet

nomme, quand onse

sert de la voix pour mimer ce qu'on mime.

Hermogène. — C'est mon avis.

c Socrate. — Ce n'est pas le mien, par Zeus! La définition,

mon camarade, ne me semble pas encore bonne 3.

Hermogène. — Pourquoi donc?

Socrate. — Ces gens qui imitent les brebis, les coqs et

les autres animaux, nous serions forcés de convenirqu'ilsnomment ce qu'ils miment.

i. ïlpàç tîjv y^v dépend d'un irréel sous entendu : xaôceu-ev av, qui

répondrait à rjpop.evav. 11 y a ici un zeugma.

a. Tw awu.aTi est un datif instrumental dépendant directement de

$7[Àtou.a. La construction, qui n'est pas rare en grec, s'explique parla notion verbale impliquée dans Sr|Xa>ij.a. jStallbaum compare Rép.,

III, 397 b, ixtjjurfasan çtovatç Te y.cù a^Tfaaaiv : imitation qui se fait au

moyen de sons et de gestes.

3. Suivant un procédé caractéristique de sa manière, Socrate

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7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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no KPATYAOS 422 e

ot IveoI, ETTEXEipoO^ev &v orjpaivEiv Taîç \zpol Kal"tf\

KEc|>aXfj Kal tô aXX© aco^axi ;

EPM. I~Icûç yàp av aXXcoç, S ZcoKpaTEç;

ZO. Et pév y', oîu.ai, t6 ocvcù Kal t6 koOcJ>ov è6ouX6^E8a 423 a

SrjXoOv, rfpou.Ev av Tïp6ç tov oupavov Tfjv )(£Îpa, u.iu.oûpEvoi

aÛTf)v Tfjv <|>uaiv xoO TTpàypaToç- ei Se Ta kAtco Kal Ta

liapéa, npôç Tf]v yfjv. Kal eI ILtcttov SÉovxafj

tl aXXo tqv

£(Soùv l6ouX6^iE6a SrjXoOv, oîaSa 8tl â>q o\xoi6xoli3

av Ta

f)|j.ÉT£pa auTÔv acb^aTa Kalo^rjjiaTa ettoioO^ev ekeIvoiç.EPM. 'AvàyKT] pot Sokeî ébç XÉyEtç e^elv.

ZO. OîJtq yàp av, otu.ai, 8r)Xcau.à tou tô a<*>u.aTi êyl-

yvETo, jjuu.rjaau.Evou, ôbç eoike, toO aa>u.aTO<; ekeÎvo 8 è6oû- b

Xeto SrjXcoaai.

EPM. Nat.

ZO. 'EttelS^] 8è cj>covf] te KalyXobTTrj Kal arôpaTi (SouX6-u.E8a SrjXoOv, ap' ou t6te EKacrrou S^Xco^a f|u.îv laTai t6

ànè toutqv yiyv6u.£vov, &Tavu.lu.r)u.a yÉvrjTat 8ià toùtcùv

TiEpl ôtloOv;

EPM. 'AvàyKr) u.oi Sokeî.

ZO. "Ovou.' ap' egtIv, cùç eoike, pipi)(ta cj>covf]ekeivou o

U.lU.£ÎTai Kal OVOU-à^El Ô U.IU.OUU.EVOÇ TT] cf>covf] OTaV U.lU.fJTai.

EPM. AoKEÎ ^01.

ZQ. Ma Al' àXX' ouk êpol ttco Sokeî KaXâç XéyEa8ai,C

cô ETaîps.

EPM. Tl8f) ;

Zfï. Toùç Ta Tip66aTa (jliu.ouu.evouc; toùtouç Kal toùç

àXEKTpu<5vaç Kal xà aXXa £$a àvayKa£olu.£8' âv ôu.oXoy£Îv

ovopà^Eiv TaOTa &TT£p u.iu.oOvTai.

e4^ om. BT||423 a i yàp W pro y* ||

3 xà xàrto Wt : xaTto

BT||

5 ouv W pro oti||

8 tou :waaijjLaT'.

Heindorf : toutou tw

aaitxaTi W et yp. t : tou acôu-aTo; BT tou scrips. et crtotiaTOç secl.

Schanzj| ÈyeveTO W ||

b Ifi.tjjLTjcrau.evou

TWb : -vou; B || 9 çpcavr}

£/.î;vou B: oaiv7j? èxsivou Wb çwvt.î (sic) ixêivo T||

10 OTav Hein-

dorf: 6 av BT av W II C 1 àXX' oùx W yp. T: oùx âXX' B oux àXX*T

y ou 7:10 T pro ttco||5 TaXXa T.

Page 172: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

http://slidepdf.com/reader/full/platon-52-cratyle 172/229

423 c CRATYLE mHermogène. — Tu dis vrai.

Socrate. — Et tu approuves cette conclusion?

Hermogène. — Non pas. Mais, Socrate, quelle sorte d'imi-

tation sera donc le nom ?

Socrate. — Tout d'abord, à mon avis, il n'y en aura pas, si,

dpour imiter les choses, nous employons un moyen analogue à

la musique— et dans ce cas-là pourtant c'est aussi la voix

qui nous sert à imiter —; ensuite, si ce sont les objets imi-

tés par la musique que nous imitons à notre tour, notre opé-

ration, à mon avis, ne sera pas celle de nommer. Voici ce

que je veux dire : les choses ont chacune un son et uneforme, et même beaucoup d'entre elles, une couleur ?

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Si l'on imite ces propriétés, ce n'est donc pasnon plus dans ces formes d'imitation, semble-t-il, que l'art

est celui de nommer. Car l'une, c'est la musique, et l'autre,

la peinture. N'est-ce pas ?

Hermogène. — Oui.e Socrate. — Et ceci, qu'en penses-tu? chaque chose, à ton

avis, n'a-t-elle pas son essence de même que sa couleur et

les autres propriétés dont nous parlions à l'instant  ? Et

d'abord, la couleur elle-même et le son n'ont-ils pas chacun

son essence, comme tout ce qui a mérité l'appellationd'être ?

Hermogène.

— C'est

monavis.

Socrate. — Eh bien, si cela même, jeSeconde définition

yeux dire regsence de ch objet onau nom. . .,. .

* •,

pouvait 1 imiter par des lettres et des

syllabes, ferait-on voir chaque chose dans sa réalité, oui ou

non?424 a Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Et comment appellerais-tu l'homme doué de

ce pouvoir? Les précédents, tu les appelais l'un, musicien,

l'autre, peintre. Et celui-là, comment?

rejette comme imparfaite, pour lui en substituer une autre plus

exacte, la définition qu'il vient lui-même de proposer, et qui a été

acceptée de confiance par Hermogène.

i. Voir plus haut, 4^3 d, où Socrate a nommé, avant la couleur,le son et la forme.

Page 173: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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m KPATTAOS '

423 c

EPM. 'AÀT)8f| XéyEiç.

ZO. KaXcoç oîîv Ixelv Sokel ooi;

EPM. Ouk I^oLye.s

AXXà tlç àv, o Z&KpaTEÇ, ^tjirjaLÇ

Etr|t6 ovou.a

;

Zfi. ripÔTov llev, ôbç el^oI Sokel, ouk èàv, KaSànEp Tfl

LtouatKfj uiLL^oÙLiESa xà TipàyLiaTa, oBtcd Luu.6u.E8a, Kalxoi d

<f>COvfj yE Kat t6t£ LULLOUU.£8a* ETCEITOC OUK EOCV, OTÏEp f\

LLOU-

CTIKT) LlLU-EÎTat, Kal ^LIEÎÇ LULUÛLIESa, Olf LLOL 8oKo0u.£V ÔVOLia-

aEiv. AÉyca Se toi toOto* ectti tolç Tipàyu-aat qjcovf) Kai

affina Ikoccttcû, Kal XP^t1* YE ttoXXolç ;

EPM. riàvu yE.

ZO. *EoLKE TOIVUV OUK, £(XV TLÇ TaOTa LULl^TaL, OÔSè TlEpl

TauTaç Tàç llill^ctelç f\ ^É^vr) ôvoLiaaTiKfj EÎvai. Aurai

LiÈv yàp Eiaivf^

lievllouctlkt), f\

Se ypacJuKr)* r\ yàp ;

EPM. Nat.

Zfl. Tt SeSf)

t68e;ou Kal ouata Sokel aoi EÎvaL EKaaTto, e

ÔOTtEp Kal xpôu.a Kal S vOv 8f] êXÉyoLiEV ; TtpoTov aÔT$ tô

Xpwu.aTL Kalir\ <|>Qvfj

ouk ectlv ouoia tlç EKaTÉpa) aÔTÔv

Kal toÎç aXXoiçTïaaivoaa f]£icùTai TauTrjç TfjçTTpoapfjaEeaç,

toO EÎvaL;

EPM. "Eliolye Sokeî.

Zn. Tt o3v;eï tiç auT& toOto Luu.EÎa8ai SuvaiTo ÉKa-

otou, Tf]v ouatav, ypaLiLjiaai te Kal ouXXa6au;, Sp' ouk &v

SrjXoî êKaaTov 8 egtlv; f\

oO;

EPM. nàvu laèv ouv. 424a

ZH. Kal t'l av <^alrjç t6v toOto Suvocllevov, wonEp toùç

TipoTÉpouç t6v liev llouoikov I<f>r|a8a, tov Se ypa<J>LKév.

ToOtov 8è Tlva;

d i Luaou;j.£0a Tb :-{xoS t

u.e0a BW||

2 xï) ^tovrjW

||3 u.tusïxai Ven.

8 man. rec. :-jjLTj-cat ||

4 8s toi Ven. 8 : 8s xi BT 8s xi Wt||

to-jto

b-zi Eati W||

8 ovofj.aaxixTjB :

r\ ôvou.aaxixr] TW j| g u.ouatX7) BW :

-xf, (sic) T ||e i 8è BT : 8al Wb

||xdxs B pro xo'8e

||3 xcç B

||aùxwv

BT : xoutcov W (sed au supra ou) || 9 rjWb :

r\BT

||424 a 2 xouxo

fecit T ex xou||

3 sçrjaQa Wb :s:p7]a- T èçrja- B ||

xôv 8è BW xôv 8c

xiva T xôv 8e ypaçuôv. xouxov os xi'va t||4 xotfxtov W.

V. a. — 12

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424 a CRATYLE na

Hermogène. — Voilà, je crois, Socrate, ce que nous cher-

chons depuis longtemps : ce sera l'homme capable de dé-

nommer.

Socrate. — Si c'est vrai, il faut désormais, sembie-t-il,

examiner ces noms dont tu demandais l'explication : rhoê

{courant), iénaï (aller) et skhésis (empêchement), pour voir si,

oui ou non, au moyen de leurs lettres et de leurs syllabes,b l'auteur se saisit de leur être, de manière à en imiter

l'essence P

Hermogène. — Parfaitement.

Socrate. — Eh bien, voyons si ce sont là les seuls noms

primitifs, ou s'il en existe encore beaucoup d'autres.

Hermogène. — Je crois qu'il y en a encore d'autres.

Socrate. — C'est probable. Mais com-

\ ^suivre

&ment distinguer ce qui sert de pointde départ à l'imitation de l'imitateur ?

Puisque c'est avec des syllabes et des lettres que se fait l'imi-

tation de l'essence, le procédé le plus juste n'est-ii pas de

distinguer d'abord les éléments ? Ainsi font ceux qui s'atta-

c quent aux rythmes ;ils commencent par distinguer la valeur

des éléments, puis celle des syllabes, et c'est alors, mais alors

seulement, qu'ils abordent l'étude des rythmes.Hermogène. — Oui.

Socrate. — Ne devons-nous donc pas, nous aussi, distin-

guer d'abord les voyelles ; puis, dans le reste, classer par es-

pèces les éléments qui ne comportent ni son ni bruit(les

muettes l

)— c'est ainsi que disent les connaisseurs en ces ma-

tières —; puis passer aux éléments qui, sans être des voyelles,

ne sont pourtant pas des muettes, et, dans les voyelles

elles-mêmes, discerner les différentes espèces ? Quand nous

d aurons fait ces distinctions, il nous faut, à leur tour, distin-

guer correctement tous les êtres qui doivent recevoir des

noms, en cherchant s'il est des catégories auxquelles ils

se ramènent tous, comme les éléments, et d'après les-

quelles on peut à la fois les voir eux-mêmes et reconnaître

i. Cf. Philèbe, 18 b c, où Platon distingue i° les voyelles

(ta cpiovT)ev-ca) ;2° ce qui participe non du son, mais du bruit (xàjçtov^ç

[XcV où', ç8oyY°w Se ij.£-ci/ovTa tivoç), les demi-voyelles, appelées plusloin xà aeaa

;3° t& ascova, ou Ta açpcova xaî acpôOYya

: ce qui n'a ni

Page 175: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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na KPATTAOS 424

EPM. ToOto I^oiyE Sokeî, co ZcoKpaTEÇ, SnEp TtàXat

^toOjisv, outoç av EÎvai 8 àvo^aaTiKdc;.

ZO. El apa toOto àX^Séç, fjSr| eoikev ETuaKETtTÉov TtEpl

EKEÎ.VCOV TCOV ÔVOL^CXTCÙV COV <JÙ fjpOU, TTEpt «pofjç:» TE KCtl ToO

« levai » Kal « oykozcùç », eI toîç ypd^aai KalTaîç cruXXa-

6at<; toO ovtoç EmXa^6àv£Tai auTÔv GSaT£àTT0ku^LEÎa8aiTf)v b

oûatav, eïte <al ou";

EPM. nàvu \ikv oCv.

ZQ. <Pkpz Sf] ïScojiev TioTEpov apa TaOTa \i6va. êarl tcov

npcoTCOv ôvoljl(xtcovf\

<al aXXa ttoXAqc.

EPM. OTjiai lycoyE Kal aXXa.

ZO. Elkoç yàp. 'AXXa tIç aveït]

8 Tpô-noc; Tfjç SiaipÉaEcoc;

o8ev ocp)(ETai ^L{iEta8au 8 ^ll^ioij^evoç ; apa ouk etteIttep

auXXa6aîc; te Kal ypà^jiaaiv f\ \ii\xr\aiq Tuy^avEi oSaa Tfjç

ouaiaç, ôp8oTaT6v EaTiSiEXÉoGaiTà aToi)(£ÎaTTpcoTov, cocrruEp

01 ETIL)(ELpoOvTEÇ TOÎÇ £u8fclOÎÇ TCOV OTOl)(£lCOV TtpCOTOV T<XÇ C

Suvà^iEiç SieiXovto, ETiELTa xcov auXXa6cov, Kal outcùç fjôr)

Ip^ovxat ettI toùç puSiaoùç OKEvp6^iEvoi, *np6TEpov 8' ofl;

EPM. Nal.

Zft. *Ap3

OUV Kalfj^lfiç

OUTCO SEÎTtpCOTOV ^.EV Ta <|>CùVT)EVTa

SiEÀÉcrôai, ETtEixa tcov ETÉpcov KaTa eïSt] toc te acjscova Kal

a(f>8oyya— oÛTCoal yàp Trou XÉyouaiv ol SelvoI TiEpl toûtcov

— Kal Ta aC cf>covf)£VTa u.èv oÛ\ ou ^évtoi yE a<f>8oyya ;Kal

auTÛv tcûv cpcovrjÉvTcov oaa Siàcpopa etSrj e^ei àXXrjXcov ;Kal

ETiEiSàv TaOTa SiEXcou.£8a, Ta ov Ta e3 nàvTa a8 oTçSeîôvo- d

iiaTa ETuSEÎvai, eI Iotiv sic S àva<|>Ép£Tai ndcvTa coaTUEp Ta

CTTOl)(ELa, EC^COV ECJTIV ISeÎV aUT<X TE Kal Et EV aUTOÎÇ EVECJTIV

eïStj KaTa t8v auTèv Tpénov coanEp ev tolç cttoixeIoiç*

TaOTa TtàvTa KaXcoç Sta8Eaaau.Évouç ETTiaTaaSai âmcpÉpEiv

a 6 XrjTOUfiev Vind. 3i : bÇ*j- || 7 sotzev B : &ç sotxsv TW[|8 te om.

W y b 1 ovtoç du W||wra om. B

j|4 t'8to|xev

Tb et W (sed g(

supra t):

efôcofiâvB

||5

r,T pro f) ||

6 ye W pro ïvcoye || 7 ys VV pro

yàp D 8 efctp W pro i~dr.zp ||C 8 ou om. T || 9 twv om. B ||

d 1 TauTa TW : nàvTa B||au oi? Badham : auOt;

j|5 7:àv:a xaÙTa W.

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424 d GRATYLE nâ

s'il existe en eux des espèces comme dans les éléments. Tous

ces problèmes une fois bien examinés à fond, nous saurons

attribuer chaque élément d'après sa ressemblance, qu'il faille

en attribuer un seul à un seul objet, ou en mélanger plusieurs

pour un objet unique. Les peintres, pour obtenir la ressem-

blance, posent tantôt une simple teinte de pourpre, et tantôt

e quelque autre couleur; parfois aussi ils en mêlent plusieurs^

comme quand ils préparent un ton de chair ou tel autre du

même genre, suivant, j'imagine, que chaque portrait semble

demander une couleur particulière. De même nous appli-

querons, nous aussi, les éléments aux choses, à une seulel'élément unique qui paraîtra nécessaire, ou plusieurs à la

fois en formant ce qu'on nomme des syllabes ;nous assem-

425 a nierons à leur tour les syllabes, qui servent à composer les

noms et lés verbes;et de nouveau, avec les noms et les verbes

nous nous mettrons à constituer un grand et bel ensemble,

comme tout à l'heure l'être vivant reproduit par la peinture ;

ici, c'est le discours que nous constituerons, par l'art desnoms ou par la rhétorique, bref, par l'art approprié. Ou

plutôt ce n'est pas nous — la parole m'a entraîné —,

car cette composition, telle qu'elle existe, a été l'œuvre des

anciens. Notre rôle à nous, si nous savons examiner tous ces

problèmes suivant les règles de l'art, c'est, après avoir fait

b ces distinctions, de voir de la même manière si les noms

primitifs

et les dérivés ont été ou non établis comme il faut.

Adopter un autre enchaînement risquerait d'être défectueux

et contraire à la méthode, mon cher Ifermogène.Hermogène. — Par Zeus ! Socrate, c'est bien possible.

Socrate.— Eh bien, te crois-tu capable, toi, le cas échéant,

de faire ces distinctions? Moi non.

Hermogène. — Alors, j'en suis bien éloigné pour mon

compte !

Socrate. — Y renoncerons-nous donc, ou veux-tu que

nous essayions selon nos moyens, si peu que nous soyonsc

capables d'y voir clair ? Un peu plus haut, nous avons pré-

venu les dieux que, dans notre ignorance de la vérité, nous

son ni bruit (les muettes). Il en résulte qu'ici Ta açtova xaî ayboyya

désigne une seule et même catégorie ;la particule Te rattache ce pre-

mier groupe ausecond

(xatTa au

<ptov7Îev-auiv

ou, etc.).Cf.

Bergkr

Zeitschrift f. Altertumswissenschaft, i&^3, p. 24,.et Théét., 2o3 ab.

Page 177: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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n3 KPATYAOS 424 d

CKoccrTov Kaià t?)v ôuoidTrjTa, èàvTE iv évl8éfl ImcpÉpEiv,

ê<xvte auyKEpavvuvTa TioXXà évl, ûSanep ol £cûypa<|>oi (SouXd-

UEVOL OCCpOUOloOv EVIOTE UEV SoTpEOV LJlévOV £Tir|VEYKaV, EVIOTE

5è ôtloOv aXXo tcov cpapuàKcov, ecttl 8è Ste TioXXà auyKEpa- e

oavTEÇ, oîov Sxav àvSpEiKEXov aKEuà£cùaiv f)aXXo ti t£v

toioùtcûv — ôç av, oîuai, 8o<f] EKàaxrj f\eIkqv 8£Îa8ai

EKàaxou cpapuaKOU— outcù 8f)

Kal fjUEÎç Ta aTOL^EÎa ettI

xà TipàyuaTa EnoiaouEV, Kal lv ettIev, oC âvSoicfj Seîv, Kal

auLrnoXXa, ttoioOvteç 8 8f) auXXa6àç KaXoOaiv, Kal auXXa6àça5 auvTiBÉVTEÇ, l£ Sv Ta te ôv6u.aTa Kal Ta pfjuaTa ctuv- 425 a

TtSEVTaf Kal TtàXiv ek tôv ôvouoctcov Kal pr|u.aTcov LiÉya

fjSrjtl Kal KaX&v Kal 8Xov auaTf)aou£V, ôScmEp ekeÎ t6 £Sov

tî] ypacjHKfj,IvTaOSa t6v X6yov Trj ôvouaaTiKf} f) j5T]TopiKfj

fj fJTtç ecttIvfj 'zkyyr]. MSXXov 8è oty f)fc*£Îç,

àXXà XÉyov

IE,r|V£X8TTV. ZuvÉ8£aav uèv yàp outoùç fjnEp otiyKEiTai ot

TTaXaiol'f\\iS.ç

Se Sel, EÏTiEp te)(vlkcùç EmaTr|a6u£8a oko-

TtEÎaSai auTà TtàvTa, outcù SieXouévouç, elte KaTà Tp6nov b

toc te TtpcùTa ôvôuaTa KEÎTai Kal Ta SaTEpa eutelit],

outq

8£&a8ai* aXXcoç 8è auvElpEiv lit) <|>aOXov ?\Kal ou Ka8' ô86v,

Sc|>iXe

c

Epu6yEVEç.

EPM. "lacoç vf) AI

3

,

o Z&KpaTEÇ.ZO. Tl ouv

;où tucjteueu; aauTÛ oî6ç t

9

av EÎvai TaOTa

outq StEXÉaSat; êyo Lièv yàp oû\

EPM. rioXXoO apa Sécû lycoyE.

Zfl. 'Eaaousv ouv, f) (SoûXei outcûç oticoç av Suvcb(JiE8a,

Kal âv aUAKp6v TL aUTOÙV otol T* &L1EV KaTlSEÎV, ETTL^EipÔLlEV,

TTpOElTTÔVTEÇ, ÔSoTIEp ÔXlyoV TTpÔTEpOV TOÎÇ 8eOLÇ, 8ti OÔSèv C

d 6 xaô'êxaaTOv T (sed xa8' punctis nol. t) j|èv B pro ev

||

7 évl om. T||

e i aXXo tt W pro aXXo||xwv -/ptouaTojv W (in

marg. yp. xat twv ©apuàxtov) ||5 av 80x75 ôsîv T : av 8ox^ îàeîv B èàv

8oxf} f3av W||6 aiifx-oXXa BW : -6oXa f

||425 a i (WVTÉOrc» Vatic.

896 D 2 :wv prjixdtxwv W D 3au(TTT)(jo{jLevov

W|]

4 ^ttaeîjW pro

prjTop'.xrj y 6 7)^ep Par. i8i3, ut uidetur : ttxÊp || auyxeivTat W ||

b 1 xpôKov Ttvà Ta W D 2 xal supra ei'ts add. T || 9 r] B :7) in ras.

T3|W

II10 xav W d Ttov Lt=v T (corr. t).

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425 c CRATYLE n4

expliquions par conjecture les opinions des hommes à leur

endroit 1. Faut-il nous mettre à l'œuvre en nous disant cette

fois à nous-mêmes que, si ces distinctions devaient être

faites, soit par tout autre, soit par nous, c'est ainsi qu'il fau-

drait les faire, mais qu'en l'état présent, c'est « suivant nos

forces », comme dit le proverbe2

, que nous devrons nous

en occuper? Est-ce ton avis, ou quelle est ton idée?

Hermogène. — C'est absolument mon avis.

d Socrate. — Il paraîtra, je crois, risible, Hermogène,

d'expliquer les choses par les lettres et les syllabes qui les

imitent. Cependant c'est une nécessité. Car nous n'avons riende mieux à quoi nous référer pour la vérité des noms primi-

tifs, à moins, si tu préfères, d'imiter les auteurs tragiques

qui, lorsqu'ils sont dans l'embarras recourent, aux ma-

chines en élevant des dieux dans les airs 3. Devons-nous de

même nous tirer d'affaire en disant que les noms primitifs

ont été établis par les dieux, et sont justes pour cette rai-

e son ? Pour nous aussi est-ce là la meilleure réponse ? Ou faut-ildire que nous les avons reçus de certains Barbares et queles Barbares sont plus anciens que nous ? Ou encore queleur ancienneté en rend l'examen impossible, comme pour

426 a les noms barbares ? Autant d'échappatoires qui seraient fort

ingénieuses si l'on se refusait à rendre compte de la justesse

des noms primitifs. Mais de quelque façon que l'on ignore

enquoi

consiste lajustesse

de ces nomsprimitifs,

il est bien

impossible de connaître celle des dérivés, qui s'expliquent

nécessairement par les premiers, dont on ne sait rien. Quise dit compétent sur les derniers doit évidemment pouvoirfournir l'explication la plus complète et la plus nette des

b noms primitifs, ou bien se persuader que sur les dérivés il

ne dira dès lors que des sornettes. Es-tu d'un autre avis?

Hermogène. — Pas le moins du monde, Socrate.

i. Cf. 4oia.

2. Ces mots paraissent faire allusion au proverbe : « Faisons, non

comme nous voulons, mais comme nous pouvons. » Cf. Hipp. maj .

3oi c.

3. Le procédé du deus ex machina était assurément commode pourl'auteur dramatique. Euripide, comme on sait, en a usé jusqu'à

l'excès, bien qu'il s'en serve non seulement pour dénouer des situa-

tions difficiles, mais aussi pour annoncer l'avenir. Aristote dit dansla Poétique, i454 ab : « Il est clair que le dénouement de l'action

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ixZ» KPATTAOS 425 c

eISoteç xfjç àÀrj Belote;Ta tûv àv8pcimov 86yuaxa TTEpi aÔTÔv

eIkoi^oliev, oïïtco SèKalvOv <x8 eIti6vteç fjuîv auToîç ïouev,

&TL EL UEV TlXP^\

V

[^Et

]

auT<* 8lEXÉa8aL EÏTE &XX0V ÔVTLVoOv

eïte fjLA&ç, outcùç ISel auTà SioupEÎaBou, vOv 8è t& XEy6-

uevov Kaxà Sùvauiv Setjctel rjuâç TTEpi aUTQV TTpayuaTEUE-

a8ai;SokeÎ xaOxa, f) ttcoç XéyEiç ;

EPM. nàvu llev oCv ac}>68pa luoiyE SokeÎ.

Zft. TEXoîa uèv otuai <|>avEÎcr8aL,o 'EpLj^yEVEÇ, ypàfciuaai

d

KalaruXXa6aîç

xàTTpàyLAaTa u.EuiLnr|uÉva KaTaSrjXa yiyvé-

uEva* Bucoç 8è àvàyKrj. Ou yàp e^oliev toutou (ÎéXtlov elç

8 tu âTcavEvÉyKCûLiEv TtEpl àXr|8£iaç tov npoTcov ovolioctcov.

el uf| apa (SoûXel, ôortEp ot TpaycpSoTTOiOL, ETTEiSàv tl

âmopôaLV, ettI Taç Lir))(avàc; KaTa<f>EÛyouaL 8eoùç aïpovTEÇ,

Kal ^u-elç oôtcoç eltt6vtec; àTTaXXaycoLiEv, 8tl Ta TtpÔTa

ôv6u.aTot ol 8eoL I8Eaav Kal Sià TaOTaôp8âç tx

e1,

*ApaKai t^uîv KpaTioroç oCtoç tôv X6ycov ; f) ekeîvoç, 8tl Ttapà

6

(Sap6àpcùv tlvôv auTà TrapEiXr|<|>au£v, eIctI Se f)uSv àpyaLiô-

TEpot (iàpBapoi ; f)8tl ûtto TTaXaLéTrjToç àSùvaTov auTà

ETtLaKéi|iaa8aL, cùcraEp Kai Ta |5ap6apiKa ;aurai yàp av 426 a

Traçai ekSuqelç eTev Kai u.àXa Kouipal téùlit*)

I8éXovtl X6yov

8L86vaLTTEpi

TOÙV

TUpOTCOV

ÔVOU(XT<3V 0>ÇOpBcûÇ

KELTai. KatTOL

8T<p TlÇ TpÔTTCÛ TCÙV TTpG>TG>V ÔVOUOCTCOV Tf|V Op66Tr|Ta uf)

oTSev, à8ûvaT<5v tiou tcov y£ uaTÉpcov EtSÉvaL, a eE, Ikelvcov

àvàyKr) STjXoOaBai ov tlç TTEpi urjSÈv oÎSev àXXà SfjXov 8tl

T6v <|)àaKOVTa TTEpi aÔTÔV TE)(VIKÔV ELVai TTEpi TCÛV TtpOTOdV

ovouaTcov uocXtaTa te Kai KaBapoTaTa Sel e)(eiv àTtoSEÎ^ai,  

f)eC EtSÉvaL 8tl Ta

y£ uaTEpafjSr)

<|>Xuapr|a£i.

"H aolaXXcoç

SokeÎ;

EPM. OuS' ÔTtoaTLoOv, oo ZcbKpaTEÇ, ôlXXqç.

C 3 aùtoï"; W : au- B au- T|| l\ ypr^y Ast : ypîjaTÔv |j

e5et del. Ast

||otiv' ouv W

|| 7 y]W :

tJ BT ||d 5" [3ouXec Hermann 5tt BT 8tj W ||

TpaywBio^oiot b||e 3

vjWb :

rjT et ut uidet. B

||426 a 2 èxSuaet;

Tb: ifo- B et in marg.t èx-W (sed da supra èx) || ÔcXovtc (id est

'GiXovTi) W y 6 oùSàv W pro çtTjoèv ||b 2

tjB : rj TW et primit. B.

Page 180: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

http://slidepdf.com/reader/full/platon-52-cratyle 180/229

426 b CRATYLE n5

Socrate. — Mes impressions personnelles sur les noms

primitifs me semblent être au plus haut point téméraires et

risibles. Je t'en ferai part, si tu veux;mais si tu peux tirer

de quelque endroit une explication meilleure, tâche à tontour de m'en faire part.

Hermogène. — Je n'y manquerai pas. Parle donc hardi-

ment.

Q Socrate. — Eh bien, pour commencer,Valei

élémentsiVerS

le r m '

a rair d'

être comme^^^ntpropre à rendre toutes les sortes de

mouvement. Nous n'avons pas même dit pourquoi le mouve-ment (kinêsis) porte ce nom

;mais il est clair qu'il veut dire

l'action d'aller (iésis) : car ce n'est pas ê, mais é que nous

employions jadis1

. Le début vient de kiêïn, mot étranger2

qui signifie aller (iènaï). Si donc on voulait trouver son an-

cien nom en accord avec notre langue, iésis serait le mot

juste ; aujourd'hui on en a fait kinêsis, avec le mot étranger

kiêïn, le changement en ê et l'insertion du n [mais c'estd kiéïnêsis qu'il fallait dire ou

éïsis]. Stasis (repos) veut expri-

mer la négation du mouvement, mais pour l'enjoliver on

en a fait stasis 3. Quoi qu'il en soit, revenons à la lettre r. Je

le répète, c'est un instrument fort propre à rendre le mou-

vement que l'auteur des noms a cru y trouver pour leur

faire reproduire la mobilité. En tout cas, il s'en est mainte

fois servi

pourla rendre :

d'abord,dans le mot même de

rhéïn (couler) et dans celui de rhoê (courant), c'est au moyende cette lettre qu'il imite la mobilité

;ensuite dans tromos

e(tremblement), puis dans trakhus *

(raboteux) ;en outre, dans

des verbes tels que krouèïn (heurter), thrauéïn (broyer),

éreïkéïn (déchirer), ihruptéïn (briser), kermatizèïn (déchi-

queter), rhumbéïn* (faire tournoyer). Tous ces mots-là, en

général, il les rend expressifs au moyen du r : il voyait,

doit venir de l'action elle-même, et ne pas être amené par une

machine comme dans Médée ».

i. Dans l'ancien alphabet attique, qui employait l'H pour marquer

l'aspiration, l'E servait à désigner en outreI'tj

et la fausse

diphtongue st.

2. Le mot xîetv est, en effet, exclusivement épique.

3. Socrate veut dire que la vraie forme serait oc-teatç.

l\. Pour rpayjiç, voir l'apparat critique.5. Le mot puuêeiv (cf. pujj.6dç, toupie) est un hapax eirémênon.

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ti5 KPATTAOS 426 b

ZO. aA yèv toIvuv lyà fjaBrj^at TtEpl tSv ttp&tcûv ôvo-

^àxcùv Trdvu jioiSokeî ûôpicrriKà EÎvai Kat yEXoîa. Toûtcûv

o3v aoi^ETaSoacû,

avlioûXrj*

au 8S

av tlz\r\q |JéXti6v

tioBev XaÔEÎv, TtcipSaSat Kal Ijiol iAETa8i86vai.

EPM. rioLf)CTco TauTa. 'AXXà Bapp&v Xéye.

ZO. ripoTov fcièvxotvuv tè

j5to EJXOLyE cpatvETai &cm£p c

opyavov EÎvai nâaT)<; xfjç Kivn,a£Cùc;, fjv oô83

eltto^ev 81' 8 ti

e)(el toOto xoÙvo^a- àXXà yàp Sfi,Xov bxi ÏEaiç fiotiXETat

EÎvai' oô

yàp f^Ta êxp&jiEBa,àXXà eÎ t8 TraXai6v.

eH 8è

àp)(f]àTt6 TOO « KIEIV » ^EVIK&V 8È ToffvOfclOt TOOTO 8'

èarlv levai. El oSv tiç t8 naXaibv aÔT^ç Eupoi ovo^a eIç

*rf)v fj^iETÉpav cpa>vf)v crujiBaîvov, « ïeqiç » av ÔpBôç KaXoÎTo*

vOv 8è &tt6 te toO ÇevikoO toO kIeiv Kal aTt8 Tfjç toO rjxa

jiETaBoXfjç <al tt^ç toO vO evBéo-ecoç «KlvrjCTtç » KÉKXrjTat,

[e8ei

8e «

KtElvrjaLV

» KaXEÎcrBaif\ EÎaiv].

CHSÈCTTaaiç

ànà- d

cpaaiç toO levai (iotiXETai EÎvai, Sià Se tov KaXXoma^ov« oxaaiç » a>v6^acrrai. T8 8è oSv

j§cùto axot^Etov, «aortEp

Xéycù, KaXèv e8o£ev Spyavov EÎvai xfjç kiv^gecdc; tS Ta ôv<5-

fciaxa tiBejiévo Ttpoç to àcpojioioOv Tfj <J>op&* TtoXXa)(oO yoGv

Xpf^Tai auTÔ eiç aôxl^v TipcoTOV fcièvev aôxô tS «

jSeîv »

Kal «fiorj

» 8ià toutou toO

ypà^aToç xfjv <|>opàv ^îi^EÎTai,EÎTa Iv t& « Tpé^cû », EÎxa Iv tS « xpa^Eλ, eti 8è ev toîç e

TOIOÎoSe fJ^aaiV OÎOV « KpO^ElV », « BpaÙElV», « IpElKElV»,

« Bp^TITElV », « KEpfciaxi^Eiv «, «jSvfci6£Îv », TiavTa TaOTa t6

ttoXù aTtE iKa^EiSiàToO pa> .

£

E<ï>pa yàp, ot^iai, *rf)v yXâTTav Iv

Ci

£â> BW: ô

TII

3l'eatç T Teatç

Bleaaiç

Wet statim

||

4 ?jxaBW :fj T ||

sT BW : ê Tb||6 ïévat T : té- BW

||8 ?JTa BW :

rjT

||

9 vu B : v T||d I 'éôet — d 3 wvdtxaaTat secl. Heindorf

j| xsxXrjaSat

W pro xaXstaOat||

etatv BT: l'eatv W||

a Êévat T : té- BW||3 xô U

ouv BV : tô 8t] ouv b xô 8è au W in marg. t|| (bw W : pw B p T ||

6 êv om. T||e i

xpe'y^eivPar. i8i3 Hirschig, Schanz, Burnet pro

xpayet (sed cf. 434 c xô pu tt, <fopa xat xtvrjaet xat axX7)pdxr)Xt

{== x(p xpa/et) 7ipoaéotx£v) ||ôà xat W pro os

||3 puu.6s?v BW :

pû(j.6etv T|| xauia BT

:

:à xotauxaW|| 4 pïô BW

: p T|| itopa Hein-

dorf: èw.

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426 e CRATYLE 116

je suppose, que c'est sur cette lettre que la langue s'arrête le

moins et vibre le plus ;aussi me semble-t-il en avoir tiré

parti pour les former. L'i, à son tour, lui a servi pour tout

ce qui est léger et particulièrement capable de traverser

toutes choses. Voilà pourquoi l'action d'aller (iènaï) et celle

427 a de s'élancer (hiesthal), c'est au moyen de l'i qu'il les reproduit,

comme au moyen du ph, du ps, du s et du z, lettres qui com-

portent une aspiration, il a imité, en le nommant par elles,

tout ce qui a ce caractère, par exemple psukhron (froid),

zéon (bouillant), séïesthai (s'agiter) et, en général, Yagitation

(séïsmos). Et quand son imitation vient à porter sur ce quiest plein de vent (phusôdés), partout, en général, ce sont les

lettres de ce genre que semble y employer l'auteur des

noms. D'un autre côté, l'effet du d et du t, qui est de com-

b primer la langue et d'appuyer sur elle ', semble lui avoir paruutile pour imiter Venchaînement (desmos) et Yarrêt (stasis).

Voyant que la langue glisse particulièrement sur le 1, il

adésigné par

des noms faits à cette ressemblance cequi

est

lisse (léïon),l'action même de glisser (olisthanèîn), Vonc-

Uieux (liparon), le collant (kollôdés) et toutes les autres

notions du même genre. Et comme la langue, dans songlis-

sement, est arrêtée par l'effet du g, il s'en est servi pour imi-

ter le visqueux (gliskhron), le poisseux (gluku), le gluantc

(gloïôdés). Remarquant, d'autre part, le caractère interne

du n 2,

il a donné leur nom au dedans (endon) et à l'inté-

rieur (entos), avec le sentiment de reproduire les faits par

les lettres. A méga (grand) il a attribué l'a, et à mêkos

(longueur) l'ê, parce que ces lettres sont longues3

. Ayantbesoin de l'o pour désigner le rond (gonggulon), c'est cette

lettre qu'il a fait dominer dans le mélange dont il formait

le nom 4. Et de même pour les autres notions : le légis-

lateur semble les ramener à des lettres et à des syllabes, en

créant pour chacun des êtres un signe et un nom, et partir de

i . Pour articuler les dentales (o, t), on appuie en effet l'extrémité

antérieure de la langue contre la barrière des dents, qui la comprime.2. Le v est une nasale, c'est-à-dire se prononce tandis que le voile

du palais est abaissé, de telle sorte que l'air expiré vibre dans la

cavité des narines (îv(iov).

3. Sur le sens de ce passage discuté, et sur la valeur de iie-fâXa

voir la Notice, p. 2 5.

4. Voir la Notice, p. 26.

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n6 KPATYAOS 426 e

xoùxco fJKioxa jiévouaav, LiàXiaxaSè aeLo^évrjV 810 (palvExal

lioi xoux<3Tip6ç xauxa KaTaKs^pf^aGat. TS> 8è a3 tcoxa Ttp&ç

xàXETtxàTtàvxa,fi

Sf)LiàXiaxa SiàTiàvxcDV lot

av. Aià xaOxato a levai » Kal x& « teaSai » Sià toO loxa aTtoLULiEÎxai, ôSancp 427 a

ye S ta toO tyzi Kal xoOiJjeî

koc! xoO aîyLia Kal toO £f^xa, 8xi

TïvcuLiaTcbSr) xà ypàLiLiaxa, Ttàvxa Ta xoiaOxa LiELULirjxai

auxoîç ôvoLià£a>v, oîov xô « ipu^p6v » icat x& « £éov » Kal

xo « aEiEaGai» Kal SXcoç cteictli6v. Kal 8xav ttou xfc (puacoSEç

LULifjxat, TiavxaxoOIvxaOBa

a>çx8 ttoXù xà xoiaOxa

ypàu.-Liaxa £TTLcj)ÉpELV <|>alv£xai o xà ôvéLiaxa xiSélievoç. Tf^ç 8'

a3 toO 8ÉXTa cruLmiÉaEQÇ Kal toO xaO Kal àTTEpEiaEOÇ xf]ç

yXcoTTrjc; xfjv SuvaLnv )(pr)aiu.ov cpalvETai ^yrjaaaGai rrp&ç b

xf)v (iiLiriaiv xoO « 8£au.o0 » Kal xf^ç « axàaECùç ». "Oxi 8è

oXiaSàvEi LiàXiaxa lv xôXà68af\ yXSxxa KaxiScbv, àcJ>oLioicûV

a>v6u.aa£ xà xe « Xsîa » Kal aôxà x6 « ôXiaSàvEiv » Kal x6

« Xunapôv » Kal xô « koXXGSeç » Kal xaXXa Ttàvxa xà xoiaOxa.

*Hi 8e ôXioGavoùarjç xf^ç yXa>xxr|ç àvxiXaLi6àvExaif\

xoO

yàtiLia SùvaLuç, x6 « yXlaxpov » àTT£LULir|aaxo Kal « yXuKÙ »

Kal « yXotSSEç ». ToO 8S

au vO x6 elooù alaQéLiEvoç xfjç C

<j>covî]ç,x6 « evSov » Kal xà a ivxôç » àvÔLiaaEV, à>ç à<|>o-

lioloùv

xoîç ypaLiLiaaLxà

Ipya.Tô 8

S

aSaXcJ>a xcp

«(jLEyàXcp

»

aTXÉScùKE, Kal xû « litjkei» xôfjxa, bxi LiEyàXa xà ypaLiLiaxa.

Etç 8è x6 « yoyyuXov » xoO ou 8e6 lievoç arjLiEiou, xoOxo

ttXelgxov aux& eiç x6 ovou.a EVEKÉpaasv. Kal xSXXa oOxcû

<f>alvExai Trpoa6i6ࣣiv Kal Kaxà ypà^Liaxa Kal Kaxà auXXa-

e 6 xoJxtp xat rpô; T||427 a i '.'esôat Schanz : ï'ea- TWb ievia- B

J|îwxa B : i T ï W || à;:ofJLtLietTat BT : -jxeïa6at W ||

2<p? BW : f

T|| $i BW : Z T

|| cri'YfxaBW : g T

|j Çfjxa BW : £ T ||3 ypajxfxaxaW pro xà

ypâjjLjjLaxa |j5 atajjiov Heindorf

||6 w; rcoXu W

|| 7 ox' av

ôvojxaxa W || xt0é|jievoçB : 8é- TW_|| 8 8éXxa BW : 8 T

||b 2 Ôè om .

Ty3 ÔXia8ai'v£i b

||XàCSa BW : X T

||6 ^ T :

?iB ^ W j| 7 T<W<x

BW : y TIIc 1 yXuco8s ? ex YXotwSe; fecitW

||vu BW : 7 T

||2 xà

ev8ov W y 3 àX?a BW : â T||k xô rjxa W : xà f[

B xài tj T ||5 yo'Y-

Y'jXov T I] ou W:

où B ô Tb H 6 èvcy.spaasv b: ov èxépaaev B èvexspaae

TW.

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427 c CRATYLE 117

là pour composer le reste, par imitation, avec ces mêmeséléments. Voilà, Hermogène, en quoi me paraît consister

d la justesse des noms, à moins que Cratyle ici présent ne

soit d'un autre avis.

Hermogène. — Ma foi, Socrate, Cratyle me met souvent

dans un bien grand embarras, comme je le disais au début *.

Il affirme qu'il existe une justesse des noms, mais en quoiconsiste-t-elle? il ne le dit pas clairement, de sorte que je ne

puis savoir si c'est exprès ou sans le vouloir qu'il en parle

chaque fois avec cette obscurité. Eh bien, maintenant, Cra-

e tyle, dis-moi en présence de Socrate:

approuves-tu les vuesde Socrate au sujet des noms, ou as-tu quelque chose de

mieux à dire? En ce cas parle, soit pour t'instruire auprèsde Socrate, soit pour nous instruire l'un et l'autre.

Entretien Cratyle. — Hé quoi, Hermogène ?

de Cratyle Crois-tu facile de recevoir et de donner

et de Socrate. si vite

un enseignement quelconque,à

Préambule.pjug

rorte ra ison sur un sujet qU j pa

_

raît être des plus importants ?

Hermogène. — Non, par Zeus ! moi je ne le crois pas.

Mais le mot d'Hésiode me semble juste : « amasser, fût-ce

petit à petit, est profitable » 2. Si donc tu es capable de réa-

liser un gain, si petit soit-il, ne te rebute pas : rends ser-

vice à Socrate

quevoici, et comme tu le dois, à moi-même 3

.

Socrate. — A la vérité, je suis le premier à dire, Cratyle,

que je ne puis rien garantir des propos que j'ai tenus; j'ai

examiné la question de mon point de vue avec Hermogène.En conséquence, parle hardiment, si tu as un avis meilleur,

en te disant que je l'accueillerai. Que tu aies de plus belles

choses à nous dire, je n'en serais pas surpris. Tu me parais

avoir étudié personnellement ce genre de problèmes et t'en être

instruit chez d'autres. Si donc tu as un avis meilleur, moi-

1. Voir 383 bsq.

2. Hésiode, Travaux, 36 1-2 : « Si tu amasses peu sur peu et fais

cela souvent, ce peu-là pourra devenir beaucoup » (trad. Paul Mazon).3. Hermogène s'est clairement expliqué au début du dialogue sur

la thèse qui était la sienne (la justesse des noms est affaire de conven-

tion). Cratyle a le devoir d'y répondre par une explication aussi nette

de sa propre thèse, d'autant plus qu'il a prétendu refuser à son inter-locuteur le nom d'Hermogène, sans consentir à en donner les raisons.

428 a

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ii 7 KPATYAOS 427 c

6<XÇ EKOCaTCÛ TCDV OVTCDV arUlEtÔV TE Kal OVO^a TTOttoV Ô VOJIO-

8ÉTr)Ç, £K SE toùtcùv xà XomàfjSrj aUTOtÇ TOUTOtÇ OUVTt-

8Évat àTTOfcuuoùuEVoc;. Autt) uot <{>atvETat, Se

Ep^6yEV£<;,

fJoùXEaSat EÎvatf)

tcov ôvouoctcov ÔpBoTrjÇ, eIpf)

ti aXXo d

KpaTÙXoç ZSe XéyEt.

EPM. Kal ufjv, o ZÔKpaxEÇ, TioXXà yé yot TioXXàKtç

TipàyuaTa TrapÉ^Et KpaTuXoç, ôartEp Kax* apx^ç cÀeyov,

(f>àaKov uèv EÎvat ôpGôTrjTa Ôvouoctcûv, fJTtç S' êarlv oôSèv

aacpèç XÉycov, ûSote ue ^xrj S\jvaa8at EÎSévat TrÔTEpov EKebv fj

a<cov oîJtcdç àaacpéoç ekoccjtote TiEpl aÛTÛv XéyEt. NOv ouv

uot, o KpaTÙXs, evocvt'iov ZcùKpaTouç eItie TiéTEpov àpÉaKEi e

aotfj XéyEi ZcoKpàTrjc; TiEpl ôvouoitcùv, fj e)(elç Trrj aXXrj

kocXXiov XéyELV <ai eI e)(Eu;, XÉys, tva fJTOt H«8r|Ç Trapà

ZcùKpaTouç f\ St8a£,r]c; rçufiç àucpoTÉpouç.

KP. Tt Sat, o

c

Epu6y£VEç;

Sokeî aot fiàBiov EÎvat oôtcù

xa)(ù ua8EÎv te Kal StSàÉjatÔTtoGv Ttp&yua, uf) StitoctoOtov,

8Br\

Sokeî ev toÎç uâytaTov EÎvat;

EPM. Ma Als

,ouk luotyE. 'AXXà t6 toO

eHat6Sou 428a

KaXcoç uot cJ>atv£Tat E^Etv, to Et Kal Ttç autKpfcv ettI autKpû

KaTa8Elr), Trpoupyou EÎvat. Et ouv Kal autKp6v Tt oîéç t' eÎ

ttXéov Ttotfjaat, uf) àTt6Kauv£, àXX' EUEpyÉTEt Kal ZcoKpaTrj

t6vSe, StKatoç S' eÎ Kal eue.

ZO. Kal uèv8f] lycoyE Kal auT<Sç, o KpaTùXE, ouSèv av

îaxv)ptaat(jir]v Sv EtprjKa, fjSi uot ècpalvETo ue8'

e

EpuoyÉ-

vouç ETiEaKEipày.r)v, oSaTE toutou y£ EVEKa Sappoùv XéyE, Et

Tt E)(Etc; fiéXTtov, aq èuoO IvSe^ouevou. Et uÉvTot £XEtÇ **• D

où KaXXtov toûtcov XéyEtv, ouk av 8auuà£otuf Sokeîç yàpuot auT6ç te !(7KÉ<|>8at Ta TotaOTa Kal Ttap' aXXcov UEuaSrj-

C 8a7j|j.eïdv

Tt xai W|| 9 r}87) W :

el'i5yiBT

j|d 6 roTepov TW : a

TTpd-repovB

IIe 2 post ôvofiâtwv uerbum quoddam erasum (fortasse

opOoTTixoç) T D 5 8aî Wb : U BT||

6 utj TWb :jjB

|| 7 {Asytaiov

Ven. i84 : [LtyLaxoiç jj-sytaiovBTW et altéra man. Ven. i84

||

428 a 2 9{uxp$ TW: -xpou B et primit. W ut uidetur || b 1 (xév 11

primit. T pro txivxot||

xi BW.

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428 b GRATYLE 118

même inscris-moi comme un de tes disciples en ce quiconcerne la justesse des noms.

Gratyle. — Il estvrai, Socrate,

comme tu ledis, que jec m'en suis occupé, et peut-être te prendrai-je pour disciple.

Je crains pourtant qu'il m'arrive tout le contraire, car il mevient je ne sais quelle envie de t'adresser la réponse d'Achille,

celle qu'il fait à Ajax dans les Prières *. Il dit :

Divin Ajax, filsde Télamon, chef d'armée,

Tout ton discours me semble être selon mon cœur.

Moi aussi, Socrate, je trouve tes oracles tout à fait à mongré, que tu doives ton inspiration à Euthyphron, ou que

depuis longtemps quelque autre Muse t'habitât à ton insu.

d Socrate. — Mon bon Gratyle, voici

de la guestioii.longtemPs que j

e m'étonne moi-mêmede ma propre sagesse, et que je n'y puis

croire. Il me paraît donc nécessaire de soumettre ce que je

dis à un nouvel examen. Car s'abuser soi-même est un sort fâ-

cheux entre tous : quand le personnage prêt à vous tromperne s'éloigne pas un instant, et se tient toujours à vos côtés,

n'est-ce pas une situation terrible? Il faut donc, je crois, se

retourner fréquemment vers les propos déjà tenus et s'effor-

cer, selon le mot du poète, de regarder « à la fois en avant

et en arrière »

2.

C'est le cas en ce moment:

voyons ce quee nous avons déjà dit. La justesse d'un nom, suivant nous,

consiste à faire voir la nature de la chose. Trouvons-nous

cette définition suffisante ?

Gratyle. — A mon avis, elle l'est parfaitement, Socrate.

Socrane. — Ainsi, c'est pour instruire que sont faits les

noms?Gratyle. — Absolument.

Socrate. — Devons-nous affirmer que c'est là un art et

qu'il a ses artisans ?

i. Iliade, IX, 644-5. Pour ce titre, cf. Hippias mineur, 364 e. La

division actuelle de VIliade et de YOdyssée en vingt-quatre chants

ne semble pas antérieure à l'époque alexandrine. Platon et Aristote

désignent les diverses parties des poèmes homériques par le nom des

épisodes qu'elles renferment, la Colère (ou la Querelle), les Ser-

ments, etc.

2. Iliade, I, 343 : « Son esprit, dit Achille d'Agamemnon, ne sait

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n8 KPATTAOS 428 b

KÉvai. 'Eàv ouv Xéyrjc; ti KàXXiov, eva tcùv ^ia8r|TÔv ncpl

op86Tr)Toç ôvou,àTcov Kal è\xà ypà<|>ou.

KP.3

AXXà jièv 8r), S> Z&KpaTEÇ, ôonEp au XÉyEiç,

^EjiéXT] kév té u.ot Ttcpl auTÛv <al ïaoç av <jeTTourjaa'nirjv

jiaSi^Ti'iv. <J>o6o0^ai ^iévtoi u.f)toutou tt&v TouvavTiov

?j,C

8ti^iot ttcoç ETtÉp)(£Tai XéyEiv TTpôç aè to toO 'A^lXXécûc;,

S ekeîvoç ev AiTaîç Ttp6ç tôv AïavTa XéyEi. 0rjai Se

Aîav AïoyEvÈç TEXa^coviE, KolpavE Xa&v,

TràvTa t'i^ioi KaTà 8uu.ôv eelgco ^iu8r)aaa6ai.

Kal lu.ol au, S ZcoKpaTEÇ, etueikqç <J>alv£i KaTà voGv XP 1!-

a^LCûSEÎV, EÏTE TTOCp' EuBÛCppOVOÇ ETUTTVOUÇ yEv6u,£VOC;, E"TE

Kal aXXrj tiç MoOaa TtàXai aE IvoOaa IXEXrjSEL.

ZO.3

Oya8è KpaTÙXE, 8auu.à£co Kai auTèç TtàXat t^jv d

êuauToO aocplav Kal àmaTco. AokeÎ ouv u.ol xp^vai ETtava-

aKÉipaaSai t'l Kal XÉyco. T6 yàp E^anaTaaSat auTûv û^>'

auToO TtàvTcov xaXETtcùTaTov bTav yàp u.r)8è ajJUKpov aTto-

araTf], àXX' &eI Tcapfj 6 IE)aTTaTl£

)acov, noàç ou Seivov; Seî Sfj,

<oç eolke, 8au.à ^L£TaaTpÉ<f>£a8ai lui Ta Trpo£ipr)u.Éva, Kal

TtEipSaSai, t6 ekelvou toO •noirjTou', 3XÉTi£i.v « au.a Ttpoaaco

Kal ÔTtlaacû ». Kal8f)

Kal vuvl ^Etc; ïScduev t'if\\iiv

EÏprjTai. 'Ovô^aToç, <f>au.Év, ôp86Tr)ç èaTlvaîÎTrj, rJTiç e

EvSEi^ETai oîôv êaTi t6 Ttp&y^a' toOto<|>ôu.ev iKavcùç

EtpfjaSat ;

KP. 'Ey.ol ^lèv Sokel Ttàvua<J><5Spa,

a Z<3KpaT£Ç.

ZQ. AtSaaKaXlaç apa EVEKa Ta ov6^iaTa XÉysTai ;

KP. nàvu yE.

ZO. OukoOv<J>coy.£v

Kal TauTT]V TÉ)(vrjv EÎvat Kal8rj-

fcuoupyoùç auTfjç ;

Testim. : 428 C 4 Aîav — 5 txuôr^aaaGat //., 9, 644 ||d 3 xo yàp

—5 Sstvôv Stob., Flor., 23, 17 ]| 7 âu.a — 8 ô^tcaw //., 1, 343 ; 3, 109.

b 4 Xi T: xi B 011 W|| 7 èjxoî ti W pro té

p.ot ||C 5 èetarao Gobet

Il 7 èTvtyvou; B (corr. b) |j8 Ttç T : ti'ç BW ||

d 3 auxôv B|| 7-8 jrpo'aw

xaî ôtzIguj W II8 vuv T ||

l'8totxev T: el8à>|j.sv BW (sed i supra eî

scrips. W y e a touto T : xal touto BWj|6 7îâvu

fxèvouv W.

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428 e CRATYLE n^

Gratyle. — Absolument.

Socrate. — Lesquels?

429 a Gratyle. — Ceux dont tuparlais

au début, les

législa-teurs.

Socrate. — Affirmerons-nous que cet art existe chez les

humains dans les mêmes conditions que les autres, oui ou

non ? Voici ce que je Yeux dire. Les peintres sont les uns in-

férieurs, les autres supérieurs ?

Gratyle. — Parfaitement.

Socrate. — Les œuvres que produisent les peintres supé-rieurs — leurs peintures — sont plus belles, et celles des

autres, plus médiocres ? Et de même pour les constructeurs,

les maisons exécutées par les uns sont plus belles, et celles

des autres plus laides?

Gratyle. — Oui.

b Socrate. — Et les législateurs? Les œuvres produites parles uns sont-elles plus belles, et celles des autres plus

laides ?

Gratyle. — Je ne ne suis plus de cet avis.

Socrate. — Alors les lois ne te semblent pas les unes

meilleures, les autres plus médiocres ?

Gratyle. — Non certes.

Suivant CratyleSocrate. — Et le nom, probablement,

tous les noms ne te semble pas non plus avoir étésont justes. établi tantôt moins bien, et tantôt

mieux ?

Gratyle. — Non certes.

Socrate. — A ce compte, tous les noms sont justes?

Gratyle. — Tous ceux du moins qui sont des noms.

Socrate. — Eh bien, pour reprendre ce qu'on disait tout

àl'heure,

devons-nousprétendre qu'Hermogène

ici

présentc n'a pas même reçu ce nom, s'il n'a rien de commun avec la

race d'Hermès ? ou qu'il l'a reçu sans doute, mais inexac-

tement ?

Cratyle. — Il ne l'a pas même reçu, à mon avis, So-

crate: il paraît l'avoir reçu, mais en fait ce nom appartient

à un autre, à celui dont c'est aussi la nature.

pas voir à la fois en avant et en arrière » (considérer à la fois le

passé et l'avenir). Cf. III, 109-110.

Page 189: Platon, 5.2 Cratyle

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n 9 KPATTAOS 428 e

KP. ridcvu y£.

ZO. Tlvaç;

KP. OuariEpau <aT

s

ap^àç eXcyEÇ, toùç vo^ioBÉTaç. 429 aZQ. nétEpov oSv Kal TauTT|v (jjcù^iev Tf]v TÉ)(vr|v ev toîç

àvBpamoiç EyYiyvEaBai, cSarrEp Kal tocç ctXXaç, f) p/) ; ftoùXo-

^ai 8è XÉyEiv t6 toiovSe. Zcùypàcj>oi stalv itou ol ^èv ^clpouq,

ol Se à^Elvouç ;

. KP. nàvu ys.

ZQ.OukoOv ot

^ièv à^Etvouçxà aÛTWv

è'pyaKaXXtco

TrapÉ)(ovTaL, xà £&a, ot 8è cf>auXÔT£pa ;Kal oikoSô^oi coaaû-

tcûç ol ^èv KaXXlouç iàq otKiaç Epyà£ovTai, ot Se ala^'iouç;

KP. Nat.

T.C1. "Ap3

ouv Kal vo^oBÉTai ot ^ièv KaXXlco là a^Tcov b

Ipyoc TTaps^ovTai, ot Se aîo^'icù ;

KP. OÔfclOl

SOKEL TOOTO ETl.

ZO. Ouk apa SoKoOal aoi vo^ioi ot^lev (^eXt'iouç, ot Se

<j>auXoTEpoL EÎvau;

KP. Ov SfJTa.

ZO. OûSèSf] bvo^ia, cùç eolke, SokeÎ aoi KEÎoBai tô yèv

XEÎpov, to Se cî^eivov ;

KP. OôSf^Ta.

ZO. IlàvTa apa xà ôv6^axa ôpBoùç KEtxai;

KP. °Oaa y£ ôvéjJiaTà laxLV.

Zft. Tlouv; o Kal apxi IXÉyETo,c

Ep^oyéveltS8e TîÔTEpov

jjirjSè ovo^a toOto KEÎaBai $cû^ev, eIp-f)

11 aÔT&e

Ep^oO c

YEVÉaEOÇ TipOOT^KEL, j\KEÎaBai ^lEV, OIJ ^EVCOl ÔpBcùÇ \E \

KP. OuSèK£ta8aL£{jioLYE Sokel,

5Z&KpaxEç,

àXXà Sokeîv

KEÎaBat, ELvat Se ÊTÉpou toOto Toffvo^ia, oSiTEp Kalr| <J>ûaiç

[f\to ovo^ia SrjXoOaa].

429 a 4 ^toypâipoi T || 7 t* o&tôv epya xaXXi'w BT : xaXXi'w auTcov

xà epya W ||b i ta auTôSv k'pya Baiter : T« Ipya a&xcîfo B ta spya

aÙTtîiv TWII 4 oi

[xàv {SeXxiouç oi 8è çauXoxepot Bï : ot(xiv yeîpouç 01

8k {3ôXtiouç

W|| 7 o'j&s 8r]

— b 9 où Sr^a om. W in marg. add. ||

12 apTt W y c i xi BT : Tt à'pa W ||5

rj— SrjXouaa secl. Schanz.

V. 2. — i3

Page 190: Platon, 5.2 Cratyle

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429 c CRATYLE iao

Socrate. — Faut-il croire qu'on ne ment pas non

plus en l'appelant Hermogène ? Car il n'est pas possible

non plus de l'appeler Hermogène, s'il ne l'est pas'?

Gratyle. — Gomment l'entends-tu ?

d Socrate. — Qu'il soit absolument impossible de parler

faux, est-ce là ce que tu veux dire? C'est une thèse souvent

soutenue, mon cher Gratyle, de nos jours comme autrefois.

Gratyle. — En effet, Socrate, en disant ce qu'on dit,

comment ne pas dire ce qui est  ? Parler faux ne consiste-t-il

pas à ne pas dire ce qui est ?

Socrate. — Le raisonnement est trop subtil pour moi et

pour mon âge, mon camarade. Cependant, une question en-

core : s'il est impossible de parler faux, n'est-il pas possible,e à ton avis, d'affirmer des faussetés?

Cratyle. — Pas davantage d'en affirmer.

Socrate. — Ni d'en énoncer, ni d'en adresser ? Suppose,

par exemple, que quelqu'un, te rencontrant à l'étranger, te

prenne la main en disant: « Salut!

étranger athénien, Her-mogène, fils de Smicrion »

;ces mots, les dira-t-il, ou les

affirmera-t-il, ou les énoncera-t-il ? S'adressera-t-il ainsi,

non pas à toi, mais à Hermogène ici présent ? ou à per-sonne ?

Gratyle. — A mon avis, Socrate, il n'émettra que de

vains sons.

430 a Socrate. — Contentons-nous de cette

réponse.Sont-ils

vrais ou faux, ces sons qu'il émettra ? Ou vrais en partie, et

en partie faux? La réponse encore suffira.

Cratyle. — Il ne fait que du bruit, voilà ce que je dirai,

moi, de cet homme;

il s'agite inutilement, comme s'il agi-

tait un vase d'airain en le frappant.

Le nom Socrate. — Voyons, Cratyle, s'il y a

est une imitation moyen de nous entendre. N'admettras-tu

qui peut êtrepas que le nom est une chose, et que

inexacte.l'objet auquel appartient le nom en

est une autre ?

i . L'existence du discours faux avait été admise sans discussion par

Hermogène comme une chose évidente (385 b).— Sur le sophisme

déjà ancienet fort

répandu dont parle Socrate,voir la

Notice, p. 45.2. Affirmation présentée sous forme interrogative. Mr; (et non où)

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lao KPATYAOU 429 c

ZQ. n6x£pov ouSè ipEiiSexau bTav tiç <J>fj 'EpjioyÉvri

aôxov EÎvai; ^if| yàp oôôè toOto au

f|,to toOtov (pavai

c

Ep^oyÉvr) EÎvai, et ^f] ecttiv ;

KP. ricoç XÉyEiç ;

ZO. "Apa StlvjiEuSfj XÉyEtv t6 TiapaTtav oôk laTiv, apa d

to0t6 aot Suvaxat ô X6yoç ; a\))(vol yap tiveç ot XÉyovTEç,

S<|>tÀE KpaxuXE, Kal vOv Kal TtàXai.

KP. FI coq yàp av, o Z&KpaTEÇ, Xéycùv yé tiç toOto

S XéyEi, |j.f] to 8v Xéyot; f) ou toGt6 èaTiv x6 ipEuSf^ XÉyEtv,

t6u.f|

là ovTa XÉyEtv ;

ZO. Kou.i|;6TEpoç u.èv ô X6yoç f\KaT

s

l^è Kal Kaxà

Tf|V EU.f)V fjXlKlaV, O ETOCtpE. "Ou-CûÇ U.EVTOL EtTlÉ^101 TOCXiSvSE'

TtéxEpov XÉyEtv u.èv oô Sokel aot eÎvcu vpEuSf^, <j>àvau 8e;

e

KP. Otf u.ol8okel oôSe (|>àvai.

ZO. OuSè eItteîv ouSè TipoaELTTEÎv ; oîov eï tiç àTtavTrjaaçaot ETtl ^Evtaç, Xa66jJlEVOÇ Tf)Ç ^(EipÔÇ ElTTOl* « XaîpE, S

£,év£3

A8r|vaLE, ûè Zu.tKptcovoc;e

Ep^6yEVEÇ », oCtoç Xe^eiev

àv tccOtocf[ (f>atr)

&v TaOTaf]

eïtiol av TaCTaf) TipoGElnoi

av oÎjtco aè u.èv oÔ,e

Epu.oyÉvr| Se t6v8e; fj

ouSéva;

KP.s

Eu.ol(jlèv Sokeî, S ZoKpaxEc;, aXXcoçav ouxoç xaCta

<J>8Éy£,aa8ai.

ZH. 'AXX' àyaTtT]T6v Kal toOto. flÔTEpov yàp àXr)Gfj âv 430 a

<j>8Éy£aiT0 xaOTa ô (f>8£y£a^£Voç f\ ipEuSf^ ; f\tô jiév ti

aÔTÔv àXr)8É<;, t6 8è iJjeOSoç ;Kai yàp av Kal toOto l^apKoî.

KP. M'ocJjeîv lycoy' avcj>alr|v

tôv toloOtov, jiàTrçv aÔTÔv

âauTÔv KtvoOvTa, ôanEp av el ti xaXKiov riv^oele Kpoûaaç.

ZO. <!>ÉpE Sf), èàv Ttr) 8taXXa)(8cù^Ev, o KpaTûXE" Sp'ouk aXXo ^ièv

av<f>alr)Ç

to bvo^a EÎvai, aXXo 8è ekeivo oC

to Bvo^à eotiv;

C 7 to touto çàvat W ||d 5

f]W :

f,B

rjT

||e 3 aoi ànavxrjaaç

W||

(x £évr] ? Gobet pro Çevtaçj|

to om. W||430 a 2 xauxa om. T

||

3 touto W pro y.a.1 touto|| èÇapxoï BW :

-xo-'r] Tb ||5 xi B : ni TW

|| ^aX/.tov BW: ydXxiov T yaXxeov et yaAxeiov b |j 6 ôiaÀXaytofxev

Hirschig ||co om. W

|| 7 xouvojxa W.

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430 a CRATYLE 121

Crattle. — Oui.

Socrate. — Tu conviens aussi que le nom est une imita-

b tion de la chose ?

Cratyle. — Absolument.

Socrate. — Et les peintures, tu les considères commeune autre façon d'imiter certaines choses?

Cratyle. — Oui.

Socrate. — Voyons. Il se peut que je n'entende pas bien

ta pensée1

,et qu'elle soit pourtant juste. Est-il ou non pos-

sible de répartir ces deux sortes d'imitations — les pein-

tures et les noms dont nous parlions — et de les appliqueraux choses qu'elles imitent ?

Cratyle. — C'est possible.

Socrate. — Commence donc par examiner ceci. Peut-on

rapporter 

l'image de l'homme à l'homme, et celle de la

c femme à la femme, et ainsi du reste?

Cratyle. — Parfaitement.

Socrate. — Et inversement, celle de l'homme à la femme,et celle delà femme à l'homme?

Cratyle. — C'est encore possible.

Socrate. — Ces deux sortes d'attributions sont-ellesjustes,

ou seulement l'une des deux ?

Cratyle. — L'une des deux.

Socrate. — Celle, je suppose, qui rapporte à chaque ob-

jetce

quilui convient et lui ressemble.

Cratyle. — C'est mon avis,

d Socrate. — Pour nous épargner une bataille de mots, puis-

que nous sommes amis, toi et moi, accepte donc ma défini-

tion. C'est cette sorte d'attribution, mon camarade, que pourles deux genres d'imitation, les peintures

3 et les noms, j'ap-

pelle juste, et pour les noms, non seulement juste, mais

s'explique comme se rapportant, non à l'ensemble de la phrase, maisà TÔ ov (cf. plus loin Ta

iat) ovt<x).

1. Il s'agit, bien entendu, de l'affirmation énoncée plus haut par

Cratyle, que tous les noms sont justes s'ils sont vraiment des noms.

Socrate, qui s'apprête à la réfuter, admet courtoisement qu'il a puse méprendre sur l'idée de l'adversaire.

a. "Av... àjcoootTj a un sens très net de potentiel : peut-il arriver

que ? Cratyle le fait ressortir en répondant "Eaxt xat TaSta.

3. Le mot £àSov équivaut ici à Çajyf<£?Tjp.a (peinture), comme plushaut 4^9 a.

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i2i KPATYAOS 430 a

KP. "EycoyE.

ZQ. OukoOv Kal tô ovoua ouoXoyEÎc; ulurjuà tl EÎvai toO

TTpdy^aToc; ; bKP. riavxcûv uàXiaxa.

Zfï. OukoOv <al Ta £coypa(f>ï£

)uaxa xponov xivà aXXov

XéyEiç ui^r|uaxa EÎvai npay^axcov xivqv;

KP. Nat.

Zfï. <t>épe ôi^—

Xacùq yàp lyco ou uavSàvco axxa ttox'

laxiv S XéyeLÇ, au Se xà^' av ôpBcoç Xéyoïç — taxi 8ca-

VEÎuai Kal TTpoaEVEyKEÎv xaOxa aucf>6x£pa xà uiurjuaxa, xà

xe £a>ypac|>if)^axa KaKEÎva xà ôv6uaxa, xoîç Tïpàyiiaaiv Sv

(ruui£

|uaxà taxiv, f\ou'

;

KP. "Eaxtv. C

Zft. ripôxov uèvSf)

GK6TTEL xoSe. *Ap' av xiç xf)v fcièv

xoO àvSpbç EiKÔva xéo àvSpl ànoSolrj, xf)v Se xf)ç yuvaiKèç

xfl yuvaiKL, Kal xaXXa oïïxcoç ;

KP. nàvu uèv oSv.

EH. OukoOv Kal xouvavxlov xf)v uèv xoO àvSp6ç xf]

yuvaiKL, xf]v 8è xfjç yuvaiKàç x& àvSpl ;

KP. "Eaxi Kal xaOxa.

ZO. *Ap

s

o8v aCxai at Siavoual àuc|>6xEpai ôp8al, f} r)

txépa ;

KP.eH Ixépa.

ZO. °H âv EKaaxcp, oîuai, x8 TtpoafjKÔv xe Kal x6 Suoiov

àTtoSiSS.

KP. "Euoiys SokeÎ.

ZO. "Iva xolvuv uf) ua)(6uE8a ev xoîç X6you; lyco xe Kal d

au, (plXoi ovxeç, aTtôSE^al ^ou 8 XÉyco. Tfjv xouaûxr)v yàp,

o IxatpE, KaXco lycoyE Siavour^v ett' àucpoxépoiç uèv xolç

uiuf)uaaiv, xoîç xe &$oiç Kal xoîç ôvôuaaiv, ôpGf^v, Inl 8è

b 7 aï^s:; etiam T, sed X in ras.||

8 xà post (x'-ar^aaTa om. B

(add. b) |jio r]

Wb :rjBT

||C i fort jxévxot W ||

3 kr.oZolr\ etiam

T sed to supra ot scrips. j| g r] Wb:

r] BT || d 3 xaXw sytoys B :i-fù

xaXû ye T lytoys xaXôî W.

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430 d GRATYLE 122

vraie; l'autre, celle qui consiste dans l'attribution et l'applica-

tion du dissemblable, je l'appelle inexacte, et en outre fausse,

quand elle porte sur les noms.

Gratyle. — Prends garde, Socrate, que l'attribution

e inexacte, possible dans les peintures, ne l'est pas dans les

noms, et que l'exactitude y règne nécessairement toujours.

Socrate. — Que veux-tu dire ? Quelle différence y a-t-il

entre les deux cas ? Ne peut-on aller trouver un individu

quelconque et lui dire : a Voici ton portrait'

>,en lui mon-

trant, au hasard des circonstances, sa propre image ou celle

d'une femme? Par montrer, j'entends : faire tomber sous le

sens de la vue 2.

Gratyle. — Parfaitement.

Socrate. — Eh bien, ne peut-on encore aller trouver le

même individu pour lui dire : « Voici ton nom »? Le nom,n'est-ce pas? est lui aussi une imitation, comme la peinture.

431 a Je m'explique : ne peut -on lui dire : « Voici ton nom », et

ensuite offrir à son sens de l'ouïe, suivant le hasard des cir-

constances, ce qui est son imitation, le nom d'homme, ou ce

qui imite la partie féminine du genre humain, le nom de

femme ? Ne crois-tu pas que la chose soit possible et se pro-duise quelquefois ?

Gratyle. — Je veux bien te le concéder, Socrate 3. Admet-

tons-le.

Socrate. — Tu asraison,

moncher,

s'il en est vraiment

ainsi : ce n'est point le moment de batailler avec obstina-

b tion là-dessus. Quoi qu'il en soit, s'il existe, sur ce point

encore, une répartition de ce genre, nous voulons appelerl'un des deux cas dire vrai, et l'autre dire faux. Or, s'il en

va ainsi, et s'il est possible de répartir inexactement les

noms en n'attribuant pas à chaque objet ceux qui lui

conviennent, mais en lui donnant parfois ceux qui ne lui

conviennent pas, on peut en faire autant des verbes. Et s'il

est possible d'appliquer ainsi les noms et les verbes, il en va

1. rpajxjxa est synonyme de ÇaSypaçrjjxa : portrait exécuté en

peinture. Cf. 43 1 c.

2. Socrate éprouve le besoin de définir le sens de 8e:Çat, parce

que le mot peut signifier aussi démontrer (par le raisonnement, et

non par un appel aux sens).

3. Sur l'obstination de Cratyle et la mauvaise grâce qu'il montreà accepter les conclusions de Socrate, voir la Notice, p. 37.

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i22 KPATTAOS 430 d

toÎç ôvou.acuv TTp6ç tco ôpSi^v Kal àXr)8^" Tf)v S' ETÉpav, xfjv

toO àvo^otou Socriv Te Kal £mc}>opav, oôk Ôp8r)V, Kal ipEuSf^

ÔTav en' ôvôu.aaiv î|.

KP. 'AXA* ottcdç la/),cô ZcoKpaTEÇ, èv lièv toÎç £coypac}>/)-

jiaatv r\ toOto, tou.f] ôpScoç Suxvélielv, InlSè tolç Sv6u.acnv e

ofl, àXX' àvayKaîov r^àsl ôpGcoç.

ZO. riôc; XsyEic; ;t'l toOto ekelvou SLacpÉpEL ; Sp* ouk

Icttl TTpoaEXSovxa àvSpl tco elttelv c>tl « Toutl Icttl aèv

ypau-^a », Kal Ssî^ai aÔTcp, avllèv

TÙ^fl,ëicelvou

EtKova, av8èTÙ)(r|, yuvaLKÔç ;

t6 Se SEt^at XÉyco eIçt/jv tcov ôc}>8aX^cov

aïa8r|aLv KaTaaxfjaat.

KP. riàvu y£.

ZQ. Tt Se;ttoXlv auTcS toutq TtpoaEXSovxa elttelv 8tl

«Toutl ecttlv a&v ovoLia »;

ecttl Se ttou Kal t& ovou.a

LALLiT]u.a, ôoTTEpt6

£cûypacj>r|u.a. ToOtoSr

) XÉycû' ap* ouk àvEÏr|

aÔTcS elttelv c>tl « Toutl ectti aèv 6vou.a », Kal LiETa 431a

toOto elç t/)v Tfjç ctKofjç au aïaBrjaiv KaTaaTrjaai, av u.èv

Tuxr|, t6 Ike'lvouu.!u.r|u.a,

ELTtovTa 8tl<xv/)p, av 8èTU)(fl,

TO

toO 8/jXeoç toO àvGpcoTtlvou yÉvouç, ELTtovTa 8tl yuv/j ;où

Sokel aot toOto oîov ts

EÎvai Kal ylyvEaSaL evIote;

KP.

3

E8éXcoaoi,

ZcoKpaTEÇ, £uy)(copf}aaL KallaTco

oCtcoc;.

ZO. KaXcoç ys au ttolcov, cocjjIXe,

el ecttl toOto oStcûç*

ouSèv yàp Sel vOv Ttàvu 8Lau.à)(Ea8aL TtEpl aÙToO. Et S3

oQv

ECTTL TOiaÙTT] TLÇ 8iaVOLJlf| Kal EVTaOSa, T8 U.EV ETEpOV toutcov b

oXtjSeuelv fiouXôu.E8a KaXsîv, t6 S' ETEpov t|»£u8ea8ai. El Se

toOtooutcoç £X

et5

Koc ^ ^aTtpi) opQQq Stavé^ELV xà ôv6u.aTa

LjtrjSèaTtoSuSôvaL Ta TtpoarjKovTa ekoicttco, àXX' evlote Ta pi]

Trpoar|KovTa, eït]av Kal p/ju.aTa TauTov toOto ttolelv. El 8è

d 5 ta B pro t<S (sed corr. b) ||8 oîkoç, w StoxpaTeç, {jltj

W||

Çtoypaiprjuaai T ||e 2 où/,

îjW pro ou

j|àet primit. omis. W

||4 xa>

Wb : tôS BT|| 9 oat b pro 5s

]|io Sè'om. B

||431 a 4 e^ovG' OTt

W|| 8 xol add. t pro s: || ou-toç BT: oûxtoç e/ov Wt || 9 où8àv

T : -ôè BW.

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7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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431b GRATYLE i*3

nécessairement de même pour les phrases. Car les phrases, à

c mon avis, sont l'assemblage de ces éléments 1. Gomment l'en-

tends-tu, Gratyle ?

Gratyle. — Gomme toi; tu me parais avoir raison.

Socrate. — Si, d'autre part, nous comparons à des pein-

tures les noms primitifs, il en est d'eux comme 2 des ta-

bleaux, où l'on peut donner toutes les couleurs el formes

appropriées, et inversement ne pas les donner toutes, mais en

négliger quelques-unes, comme en ajouter d'autres, plus

nombreuses et plus grandes. N'est-ce pas ?

Cratyle. — Oui.Socrate. — En les donnant toutes, on produit de belles

peintures et de belles images ; quand on y ajoute ou y ôte,

on exécute sans doute aussi des peintures et des images, mais

mauvaises ?

d Gratyle. — Oui.

Socrate. — Et celui qui se sert des syllabes et des lettres

pour reproduire l'essence des choses? N'est- il pas vrai, d'aprèsle même principe, que, s'il attribue aux objets tout ce qui leur

convient, l'image sera belle,— c'est-à-dire le nom, — tan-

dis que, s'il néglige de menus détails ou parfois en ajoute, il

y aura bien une image, mais qu'elle ne sera pas belle;

bref, que les noms seront les uns bien exécutés et les autres

mal?

Gratyle. — Peut-être,

e Socrate. — Peut-être, à ce compte, l'artisan de noms

sera-t-il tantôt bon, et tantôt mauvais ?

Gratyle. — Oui.

Socrate. — Or c'est lui que l'on nommait le législateur3

.

Cratyle. — Oui.

Socrate. — Peut-être en sera-t-il donc ici, par Zeus !

I. Platon ramène la phrase à deux éléments : le nom (ovouo), et

le verbe ou prédicat (p7ju.a). Le sens du mot prj[xa, qui ailleurs chez

Platon paraît signifier locution, est ici très net. Cf. l\2§ a.

a. "QoTTcp fait attendre une proposition introduite par û'jtgj et

signifiant à peu près : de même aussi dans les noms, il est possible de

leur attribuer tous les caractères appropriés. La phrase reste en l'air

et ne sera complétée que plus loin, 43id(aoa où xarà xôv ccùtôv

Àoyov, etc.).3. Voir 388 e sq.

Page 197: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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i23 KPATTAOS 431 b

pf)^axa <al ôv6^axa faxtv ûCtcù xtSévat, àvàyKr) Kai X6youç-

X6yot yàp ttou, oç êycS^ai, f\xoùxcov E,\jv8eaLÇ êaxtv

t\ ttôç c

XÉyEiç, o KpaxûXE ;

KP. Ouxw KaXôç yap ^îot Sokeîç XéyEtv.

ZO. OukoOv et Ypà^aaiv a3 xaTtpcoxa ôvo^axa àTtEtKa-

£ou.ev, faxtv oanep ev xoîç £<aypa<|>rniaaiv Kal Ttàvxa xà

TtpoafjKovxa ^p&^axa te Kala)(f) yiaxa ànoSoOvai, Kal

pf|

Ttàvxa au, àXX' evta eXXelttelv, fvta 8è Kal TrpoaxtSÉvai, Kal

tiXeico Kal \xziCcu' f) oùk laxtv ;

KP. "Eaxtv.

ZH. Oûkouv ô \xèv à"noSt8oùc; Ttàvxa KaXà xà ypà^axàte Kal xàç EiKovaç ocTToSLSoaiv, ô ôè

f] TtpoaxtSElç f) à<f>at-

pôv ypàu.u.axa jjlevKal eIkôvoç êpyà^Exat Kal oCxoç, àXXà

Ttovr|pàç ;

KP. Nat. d

ZQ. Ti 8è 6 Stà xûv auXXaBSv te Kal ypa^àxcov xf)v

oùalav xûv Ttpay(jLàxcdv àTtou.i^oùti£voç ; apa ou Kaxà xov

aux6v Xoyov, av yèv Ttàvxa ànoSô xà Ttpoaf)Kovxa, KaXf)

f\elkov l'axai — xoOxo 8' laxlv ovou.a — làv 8è a^iKpà

EXAELTir) f\ TtpoaxiBfj EvloTE, eIkgûv U.EV yEVrjGETaL, KaXf] 8È

o0 ; ôScjte Ta u.èv KaXcoç Etpyaa^Éva l'axai xov ôvou.àxcov, xà8è KaKÔç ;

KP. "lacùç.

Zfï. "lacoç apa laxat 8 ^tèv àyaGôç Sr)^toupyoc; ôvo^àxcov, e

8 Se KaKÔç ;

KP. Nal.

ZQ. OukoOv xoûxcp o a vou.o8Éxrjç » ^v ovo^a.KP. Nal.

ZH. "lacoç apa vf)Ai' laxat, ûSanEp êv xaîç aXXatç

b 6 xai ovx ôvdaaTa T sed où* punctis not. t||

c i r, Wb :r,

BT||

3 àXÀ' outJ; W pro o5x<ojj8 ^ Wb :

?jBT

||d i ÔÈ BW :

ô*ai Tb et suprascr. W || 4 à~o8tôco W j|e 4 ^v — e 7 vouloôstt); om.

W in marg. add.

Page 198: Platon, 5.2 Cratyle

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431 e GRATYLE 124

comme dans les autres arts : le législateur sera tantôt bon,

tantôt mauvais, si nous sommes tombés d'accord sur les

points précédents.

Cratyle. — C'est exact. Mais tu le vois, Socrate : quandles lettres, comme l'a, le b et chacun des éléments, sont parnous attribuées aux noms suivant les règles de la grammaire,

432 a si nous faisons une suppression, une addition ou un change-

ment, le nom se trouve écrit sans doute, mais non correc-

tement, et même il ne se trouve pas écrit du tout;

il est

autre, dès qu'il subit un de ces traitements J.

Socrate. —J'ai peur, Gratyle, que cette manière de voir

ne soit pas la bonne.

Gratyle. — Gomment cela ?

L'image Socrate. — Peut-être l'accident dont

22 'est pas identique tu parles arriverait-il à ce qui doit te-

à l'objet. n'

ir son existence d'un nombre, sous

peinede ne

pasexister.

Prenons, par exemple,le nombre

b dix lui-même, ou tel autre à ton gré : une suppression ou

une addition en fait aussitôt un autre nombre. Mais pour la

qualité et pour l'image en général, je crains que la justesse

ne soit autre chose, et qu'il ne faille même, au contraire,

éviter absolument de rendre en tous ses détails le caractère de

l'objet représenté, si l'on veut obtenir une image. Examine

sij'ai

raison. N'y aurait-il pas deux objets, tels que Gratyle et

l'image de Cratyle, si un dieu, non content de reproduire ta

couleur et ta forme, comme les peintres, figurait en outre,

tel qu'il est, tout l'intérieur de ta personne, en rendait

c exactement les caractères de mollesse et de chaleur, et y met-

tait le mouvement, l'âme et la pensée, tels qu'ils sont en

toi; bref, si tous les traits de ta personne, il en plaçait au-

près de toi la copie fidèle? Y aurait-il alors là Gratyle et

une image de Cratyle, ou bien deux Gratyles 2 ?

1. Ici encore Gratyle se contredit. Il a accepté en bloc toutes les

étymologies proposées par Socrate dans la première partie de l'entre-

tien;or elles reposaient précisément sur des suppressions, additions,

ou déplacements de ce genre.

2. Comme veut bien me le signaler M. Diès, il y a ici, en quelque

sorte, une réponse anticipée à cette critique d'Aristote que la théorie

des Idées double inutilement les choses; suivant Platon, les choses,

images des Idées, n'en sont pas les doubles.

Page 199: Platon, 5.2 Cratyle

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ia4 KPATTAOS 431e

TÉxvaiç, Kal vo^oSéTrjq ô llèv àya86ç, ô Se Ka<6ç, èàvriEp

xà ELmpoaSEV EKEÎvaôu.oXoyr)8fl ^U-îv.

KP. "Eotl TaOxa. 'AXX

3

SpSç,co

ZobKpaTEÇ,Stocv

xaOxaxà ypàu.LiaTa, t6 te aX<£a Kal t6 (ifJTa Kal EKaarov tcov

qtoi)(elcov, tolç ôv6u.aaLv àTToSiSô^EV t^ ypau.LLaTLKfj TÉ)(vr|,

êdtv tl àcpéAcù^Ev f) Ttpoa8ô^£v f)u.£Ta8coLi£v tl, yéypafruu 432 a

lièvrjLiïv

t6 8vou.a, ou llévtol ôpScoç, àXXà t6 TtapàTtav oùSè

ysypaTiTai, àXX' eu8ùç ETEpov ecjtlv, làv tl toutcov Ttà8r|.

ZQ. Mi*] yàpou

KaXcoçaKOTtcoLLEV oxîtcù

aKOTtoOvTeç,S

KpaTuXE.

KP. riSç Si1

) ;

ZO. "'lacoç 8aa ek tlvoç àpu8u.o0 àvayKaïov EÎvaif) u.f|

EÎvat Ttàa)(OL av toOto 8 au XéyELÇ, ôSonEp Kal aÔTa

Ta 8É<a¥\ oaTtç (SouXel aXXoç àpt8u.6ç, làv àc^ÉXrjç ti

f^

TtpoaSfjç, ETEpoç eu8ùç yÉyovE

- toO Se. ttoloOtlvoç

Kal b

£u(jmàar)ç elkovoç y.]*) où)( auTT] f] ÔpSoTrjç, àXXà t6

IvavTlov otjôè t6 napàTtav ôérj TtàvTa ànoSoûvaL otov ecjtlv

o eIkoc^el, Et u-ÉXXei elkov eivoi. Zk<5ttel Se eï tl Xéycû.

*Ap' av Suo TipàytiaTa eïtj tolocSe, otov KpaTÛXoç Kal Kpa-

tuXou elkcùv, el tlç 8eôvu.f]

llovov t6 aàv xpÛLia Kal

ax^aaTtELKaCTELEv

cScrrtEp

ol£oùypà<t>oi,

àXXà Kal xàevtôç

TtàvTa TotaÛTa TroLfjaELEv oîaTïEp Ta aà, Kal LiaXaKOTr|Taç

Kal 8EpLi6Tr|Tac; Taç aÛTàç ànoSotri, Kal KlvrjCTLV Kal Lpu^fjvC

Kal q>p6vr)oi\> oïaTTEpfj Ttapà aoltvScti] auToîç, Kal ivl Xoycp

TtàvTa aTTEp au e^elç, TOLaOTa ETEpa KaTaaTrjaELEv TïXrçalov

aou; nÔTEpov KpaTuXoç av Kal elkcov KpaTûXou t6t*

eut]t6

toloutov, f)

SuoKpaTuXoL

;

676 vojjloôÉtt); TIj8 ijucpoafs W J|

10 aXça xaî tÔ (E^ia BW :

â xa\ tô(3T

y exxcjtov B : ëv exaa-ov TW[|

11a7:oÔt8o[jL£v (sic) T ||

432 a 1 (où) ysypa-Tat Bekker||

2 xà ovdtxaTa W pro to ovoaa

Iloù Ltévcot y'

WII

5 axo^oCiaev ooxwç W|| 9 aùxtxa coni. Ast pro

aùxàII

10 Tt B : xi TWIIb 2 J Stallbaum :

yjBT

tjW g) J)

Hein-

dorfII

3 àv aùtôi ov ut uidet., T èv aùit'ov (sic) t pro svavuov||

4 «MSI oè BT:

xai axoîrci or\

Waxo'-et ôrj t || 5 -à xoiaSe W

||

C 2 coc BT : (soi èax'.v W.

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432 c CRATYLE ia5

Gratyle. — Deux Cratyles, Socrate, il me semble.

Socrate. — Tu vois donc, mon ami, qu'il faut chercher

un autregenre

dejustesse pour l'image

et

pource dont nous

parlions tout à l'heure 1

,sans vouloir à toute force 2

que l'ab-

d sence ou l'addition d'un détail fasse disparaître l'image ? Ne

sens-tu pas combien les images sont loin de renfermer le

même contenu que les objets dont elles sont les images ?

Gratyle. — Si.

Socrate. — Il serait risible en tout cas, Gratyle, le trai-

tement que les noms infligeraient aux objets qu'ils désignent,s'ils étaient faits de tout point à leur ressemblance. Tout

serait double, sans qu'on pût y distinguer où est l'objet lui-

même et où est le nom.

Gratyle. — Tu dis vrai.

Conditions Socrate. — Admets donc hardiment,d'un nom mon brave, que le nom lui-même est

bien établi. tantôt bien et tantôt mal établi ; n'exigee

pas qu'il ait toutes ses lettres pour être exactement semblable

à l'objet qu'il désigne, et laisses-y même ajouter la lettre quine convient pas. Si tu le fais pour une lettre, fais-le aussi

pour un nom dans la phrase ;si tu le fais pour un nom,

laisse aussi s'introduire dans le discours une phrase sans rap-

port avec les choses, et admets néanmoins que le nom et la

phrase énoncent l'objet, tant qu'on y trouve le caractère dis-

tinctifde l'objet dont on parle, comme on le trouvait dans

433 a les noms des lettres, si tu te souviens de ce que nous disions

tout à l'heure 3, Hermogène et moi.

Gratyle. — Je m'en souviens.

Socrate. — A la bonne heure. Quand ce caractère y est,

même à défaut de tous les traits appropriés, l'objet se trou-

veraénoncé, bien,

s'il

y sont tous, mal,s'ils

n'ysont

qu'enpetit nombre. Que l'objet est énoncé, admettons-le en tout

cas, bienheureux Gratyle, pour ne pas payer l'amende,

comme les gens d'Égine quand ils circulent tard dans la nuit'f

i. Le nom.

2. 'AvayxâwE'.v signifie ici : juger nécessaire que.

3. 4^6 c sq.

4. On no sait à quoi ces lignes font allusion. Il est possible

d'ailleurs que le passage soit altéré et incomplet.

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125 KPATYAOS 432 c

KP. Aùo ELioiyE SokoOoiv, £ ZcûKpaTEÇ, KpatùXoi.

ZO. 'Op&ç oSv, où<}>IXe,

8ti aXXr|v \p-f] eIkcivoç ôp86xr)Ta

£r)T£tv Kal Sv vOv Si*) èXÉyo^ev, Kal oôk avayKat^Eiv, âàv tl

ànfi f\ Ttpoafj, Lar|KÉTi auxrjv etK6va EÎvai; f)

ouk ataBàvEL d

oaou evSéouchv al eIkoveç Ta aôxà e^euv ekeLvoiç «v eik6vec;

EÎatv;

KP. "EycoyE.

ZQ. TEXota yoOv, S KpaxùXE, ûtt6 t&v Ôvo^àxov TtàSoi

Sv EKEÎva ov ôvéïiaxà èaxiv là ôv6iiaxa, eI Ttàvxa Travxa)(fj

auxoîç ÔLiouoBEir). Aixxà yàp av ttou Ttàvxa yÉvoixo, Kal

otÔk av e)(olç auxcov eItteÎv oûSÉTEpov ÔTtdTEpôv ectti t6fcièv

auTé, t6 Se ovo^a.

KP. 'AXnSfj XÉyELÇ.

ZO. ©appèov toIvuv, o yEwatE, la Kal Bvo^a to laèv eC

KEtaGat, to Se jjnq , Kal \xr\ àvàyKat^E TtàvTs

£XELV Ta YP^l1" e

jiaxa, tva KoiiiSf] rjtoioOtov oîovTtEp oS ovoixà ecttiv,

àXX' la Kal tôiif) Ttpoafj kov ypàji^a ETtupÉpEiv. El Se

ypà(Ji^a, Kal ovo^ia ev X6ya>' eI Se ovoiia, Kal Xéyov êv X6yo

jjifj TcpoafjKovua tolç Ttpayu.aaiv £TU<|>ÉpEa8ai, Kal jirjSèv

fjTxov ôvo^à^EaSai t6 Tipay^a Kal XÉyEaBai, ecùç av S tùttoç

èvrj toO Tipày^aToç TtEpl oS av ô Xéyoç fl, cooTTEp ev toîç

tûûv aTOL)(Elcov ovo^aatv, Et (i£LAvr|aai oc vOvSrj èyèb Kal 433a

'EpiAoyÉvrjç èXÉyoïiEV.

KP. 'AXXàiiÉiivrjiiaL.

Zfï. KaX&ç tolvuv. "Oxav yàp toOto àvfj,kSv

jjif|nàvTa

Ta Ttpoar|KovTa I)(T], XEXÉ^ETal ys to TtpâyLia, KaXcoç OTav

TtàvTa, KaKcoç Se oxav SX^a* XÉysaBaL S3

o3v, o LiaKapiE,

eqlaev, 'iva\xi] ocjjXco^ev ôSaTtEp ot ev Atylvrj VÛKTCDp TTEpi-

i6vteç btyè. ôSoO, KalfjfciEÎç

ênl Ta TTpàyiiaira S<S£oolaev a3

C8:t BW : xiç T||d 2 taux' W pro xà aùxà

|j6 av om. W

||

8e/o'.ç

Heindorf : -yot ||n ôvdjxaxa W pro ovojxa ||

e i 8s(xr}

eliam

T (sed t]in ras.") ||

6 xe xô7cp.ay{jia

W|| wç B pro ïon;

\\433 a 5 XeXé-

Çsxai Ven. i84 : Xs£-|| 7 a T pro tva (sed tva in marg. t) j| ôçXtDjxev

TWb : -Xôjtxev B ôçXoj[x£v o:>cr|v Heindorf yiXtoxa oçXwjxsv Ast

lacunam post o«pXo>(i.£v indic. Schanz||8 ay x^ Heindorf: aùx^ x^.

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433 b CRATYLE ia6

b sur la route, et ne pas avoir l'air, nous aussi, d'être vrai-

ment de la sorte arrivés trop tard jusqu'aux choses. Sinon,cherche une autre définition pour la justesse du nom, et garde-toi de reconnaître dans le nom une représentation de l'objet

à l'aide de syllabes et de lettres  . Car si tu soutiens ces deux

propositions à la fois2

, tu ne pourras être d'accord avec toi-

même.

Cratyle. — Ce que tu dis là, Socrate, me semble raison

nable et je l'admets.

Socrate. — Puisque nous voilà d'accord là-dessus, pas-

sons à une autre question. Pour être bien fait, disons-nous,le nom doit avoir les lettres appropriées ?

Cratyle. — Oui.

c Socrate. — Et les lettres appropriées sont celles qui res-

semblent aux objets ?

Cratyle. — Parfaitement.

Socrate. — Voilà donc pour les noms bien faits. Pour

celui qui a été mal établi, la plus grande partie en sera sansdoute constituée par des lettres appropriées et semblables à

l'objet, s'il doit être une image, mais il en contiendra quel-

que autre mal appropriée, qui empêchera le nom d'être

beau et bien exécuté. Sommes-nous de cet avis ou d'un

autre ?

Cratyle. — Je pense, Socrate, qu'il ne faut point éterni-

ser la bataille. Maisje

ne suis

pascontent de voir affirmer

l'existence d'un nom mal fait,

d Socrate. — N'es-tu pas content que le nom soit défini

comme une représentation de l'objet?

Cratyle. — Si.

Socrate. — Que, parmi les noms, les uns ont été compo-sés à l'aide de noms plus anciens, et que les autres sont pri-

mitifs, ne te paraît-on pas avoir raison de le dire ?

Cratyle. — Si.

Socrate. — Mais si les noms primitifs doivent être des

représentations, as-tu un meilleur moyen d'en faire des re-

présentations que de les rendre aussi semblables que possi-

I. SuXXa6aiç et Ypajxfjiaai dépendent deôrjXtofxa.

Cf. 4^3 a, et note.

a. A savoir que le nom est une représentation de l'objet à l'aide

de lettres et desyllabes,

etque,

d'autrepart,

il

n'ya

pasde

nomsi

l'on n'y retrouve pas tous les traits appropriés à l'objet.

Page 203: Platon, 5.2 Cratyle

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i26 KPATTAOS 433 b

irj àXT]8£ta oÎJtcû ttcùç IXr|X\)8£vai ÔifiiaiTEpov toO Seovtoç, b

f) ^tei Ttvà aXXr)v èvàpaioc; ôp8oTrjTa, KalLif] ÔLAoXôyEi

S^Xco^a auXXa6aîc; Kai ypaLiLiaai mpayLiaToç ovoLia eîvai.Et yàp tocOtoc àLtcpoTEpa EpEÎç, oô)( oT6ç t' e<jei

ctuli<|>cûv£Îv

aauTcp.

KP. 'AXXa lioi Sokeîç y£, où ZcbicpaxEÇ, ^lETpicoq XéyEiv,

Kal oStcù tISeljmxi.

ZQ. 'E-riEiSf) Tolvuv TaOxa f|Lnv ^uvSokel, LieTa t<xOtcx

tASe ctkottcùliev eI l^éXXei, cpa^Év, KaXcoç KEÎoSai t& ovoLia,

Ta Ttpoar]KOVTa Sel aÔT6 ypaLiLtaTa e^eiv ;

KP. Nat.

Zfï. npoafjKEt Se xà Blaoux toîç TTpayLiaaiv ;c

KP. nàvu yE.

ZO. Ta ^èv apa KaXcoç KEiLiEva ovîtcù KEÎxai' eI Sejjuf)

ti KaXcàç ETÉ8rj, t6 Lièv av TtoXù ïacoç ek ttpootik6vtcùv eïtj

YpaLiLidcTCùv Kal Sliolcov, EÏTiEp iaTai eIk&v, e)(ol S' av tl

Kal oô Ttpoaf]Kov, 8is

8 oôk av KaX6v str\oôSè KaXSç

EÎpyaaLiÉvov tô Svojia. Outco<f>a(jLÈv f) aXXoç ;

KP. OuSèv SeÎ, oÎLtaL, SiaLià)(Ea8ai, ôo Z&KpaTEç* etteI

oùk àpéaKELyÉ ljleto cfxxvaiovo^a lièv £*vat, Lif)

liévtol koXôç

yE KEÎaSai.ZQ. riéTEpov toOto oùk àpéaKEt oe, t& EÎvat t6 SvoLia d

SrjXcoLia toO TtpàyLiaToc; ;

KP.3

Ell£ Ye.

ZO. 'AXXà t6 Eivai tcùv ôvolloctcùv Ta llèv ek TupoTÉpcov

^uyKELLiEva, Ta Se TtpcùTa, oô koXcoç aoi Sokel XÉyEaSat ;

KP. "EtioiyE.Zfï.

s

AXXà Ta TipcoTa el lléXXel SrçX&LiaTa tlvcùv ylyvE-

a8ai, e^elç Tivà KaXXtco Tpô-nov toO ST]XwLJiaTa aÙTa yEvéaSat

b I îkoç Tb : 7câSç BW|| g 8é T pro xà8e

||io aùxô B : aùxio T

aÙTÔ 6*ei W||

c 7 <pc5(jievW pro ?à 4

uev|| î)

Wb :r\BT

||8 jxâyeaôac

T|| g yi [jloc

W pro yé fxe ||d i ae BT : ooi Wt

||3 ejxé ye Bekker :

luoiye BW :Ijxoi T || ye

— d 6 l(

ao! om. T add. tj|

5 ou xaXto;

Wt : ovx oc'aXioç B || 7 xtvtov — d 8 èr)XaS|xaTa om. W in marg. add.

|| TtVOJV B : TtVCOV TW.

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7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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433 e GRATYLE 127

e ble aux objets qu'ils doivent représenter? ou es-tu pluscontent de cette explication, donnée par Hermogène

1et beau-

coup d'autres, que les noms sont des conventions et qu'ils

représentent les objets pour ceux qui en sont convenus et

connaissaient les objets par avance ? Admets-tu que la justesse

d'un nom consiste dans cette convention, et que cette conven-

tion, il est indifférent de l'établir comme nous la voyons éta-

blie,ou, tout au contraire, d'appeler grand ce que nous appe-lons aujourd'hui petit, et petit ce que nous appelons grand?

Lequel de ces deux modes préfères -tu ?

434 a Gratyle. — En tout et pour tout, Socrate, une imitationressemblante est préférable au premier moyen venu, pour

représenter ce qu'on représente.

Socrate. — Tu as raison. Donc, pour que le nom soit sem-

blable à l'objet, les éléments dont on constituera les noms

primitifs doivent, de toute nécessité, être naturellement sem-

blables aux objets ? Je m'explique : aurait-on jamais composé

le tableau dont nous parlions tout à l'heure

2

à la ressem-b blance de la réalité, si la nature ne fournissait, pour compo-

ser les tableaux, des couleurs 3 semblables aux objets qu'imitela peinture? Ne serait-ce pas impossible?

Gratvle. — Impossible.

Socrate. — De même aussi les noms pourraient-ils jamaisressembler à aucun objet, si ces éléments dont se composentles noms ne se trouvaient à

l'origine

offrir

quelqueressem-

blance avec les objets dont les noms sont les imitations? Or

ces éléments qui doivent servir à la composition, ce sont les

lettres ?

Cratyle. — Oui.

ri ,r „ w„„„ Socrate. — Suis-moi donc, à ton tour,Il y a dans . ., . .

rétablissement dans la question que jexaminais tout a

c des noms l'heure avec Hermogène. Voyons : avons-

une part nous, selon toi, raison de dire, oui oude convention.

nQn) que le r a de la ressemblance avec

l'élan, le mouvement et la dureté 4?

1. 384 d sq.

2. 43o b sq.

3. Propr. drogues.II. Cf. 426 c.

Page 205: Platon, 5.2 Cratyle

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i27 KPATYAOS 433 1

aXXovf)aÔTa Ttoif)aai 8 Ti^aXiara ToiaOxa ota EKEÎvaS Sel e

8r|Xo0v oiùxâ; f\

88e ^i&XXov cxe àpéaKEi ô Tpàncx; 8vc

Ep-

^oyÉvr|ç XÉyEt

Kal aXXoittoXXoI,

t6

£uv8/niaTaEÎvai Ta

6v6yaTa Kal SrjXoOv toîç ^uvGe^évoic;, TTpoEi86ai Se Ta

Tipày^iaTa, Kal eÎvou TatiTrjv ôpSôrrjTa ôv6y.aToç, £uv8r|Kr)v,

8ia<J)ÉpELV Se ouSèv tàvTE tiç £uv8f]Tai cbcrriEp vOv £,ùy-

KELTat, làvTE Kal ToôvavTlov ettI ytèv cpvOv a^LKpdv, ^Éya

KaXEÎv, ettI Se $ t^Y01» o\^<pàv î TtoTEp6ç ae ô Tp6no<;

àpéaKEt;

KP. "OXcp KalîravTl 8iac|>ÉpEi, o ZcbKpaTEÇ, to S^oicb^aTL 434*

SrjXoOv 8 tl av tiç SrjXoî, àXXà^f]

tco ettltu^ovti.

Zfï. KaXcoç XÉyEtç. OukoOv EÏTtEp ferrai tô Bvo^a S^oiov

tc«S TTpày^aTt, àvayKaîov TtEcf>UK£vai Ta o*Toi)(£Îa b^oia tolç

•npay^aaiv, èE, ov Ta TtpcoTa ôv6^aTa tiç E,uv8f)a£i ;S8e

Se

Xéyo'Spà ttot

s

av tiç ^uvÉSrjKEv o vOv8f)

IXÉyo^Ev^coypàcjjrj \xct %\xoiôv tcû tcov Bvtgùv, el

^f) cf>ùasi \JTif]p)(E

cjjap^aKEÎa o^oia ovTa, !£ &v E,uvTi8ETai xà ^cùypa<|)ou^iEva, b

IkeIvoiç S ^mEÎTaL r| ypacfuKr) ; f)àSûvaTov

;

KP. 'ASiJvaTov.

ZQ. OukoOv coaraÙTCùÇ Kal ôvé^iaTa oôk av ttote S^ota

yÉVOLTO OuSeVL, El\li\ îmapÉJEl EKELVa TtpCOTOV Ô^OLéTTJTà Ttva

I)(ovTa, è£ Sv ^uvTCBsTat Ta ôvo^aTa, ekeLvoiç cov ectti Ta

ôv6fciaTa ^nifj^aTa ;ecjti Se, eE, ov ouv8etéov, aTot^Eta ;

KP. Nal.

ZQ. "HSrj toIvuv Kal ab koivcSvel toO X6you oCnEp apTi

'Ep^oyÉvrjç. ^ÉpE, KaXcoç aoi SokoOjiev XÉyEiv 8ti to j5ô Tf]c

c})op& Kal Kivi'jCEL Kal aKXrjp6Tr|Tt TTpoaÉoiKEV, f)oô KaXcoç ;

e i auxà edd. : auxôv BTW xô b||a om. T

||2

rjW :

tj T xcù \ Bxal

fjb

|jaoc W pro ae

|| 7 w W : ô BT (sed ex emend. B) ||

8 xaXei W pro xaXeiv|| $ BW : tô T

||aot W pro as

||434 a 3

xouvoua W|| l\ àvayxatôv èaxi W

|J xoiç ex emend. B||6 apa îcox'

av W : bizôz* av uel ôîzoxav BT et corr. W|| 8r] W pro 8 vuv or\

j| 7 Çorfpàfor [jLaT

|| opoiov xw B corr. b||b 1 çapfxaxeia (sic) T :

cpapiiaxeîa B çpapjxaxsta b çaptxaxa W||

Çwypaçoutxeva T||

CI

pw W:

pw Bp T y 2

rjb:

r\.

V. 2. - i(x

Page 206: Platon, 5.2 Cratyle

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43-4 c CRATYLE 128

Gratyle. — Oui, à mon avis.

Socrate. — Et le 1, avec le lisse, le doux et les autres pro-

priétés dont nous parlions à l'instant 1?

Cratyle. — Oui.Socrate. — Or sais-tu que pour la même notion nous

disons, nous, sklêrolês (dureté), et les gens d'Érétrie sklêrotêr 2?

Cratyle. — Parfaitement.

Socrate. — Le r et le s ressemblent-ils donc l'un et l'autre

à la même chose ? La même notion est-elle représentée par ces

gens-là avec le r final et par nous avec le s, ou ne l'est-elle

pas

dans l'un des deux cas ?

d Cratyle. — Elle l'est dans les deux cas.

Socrate. — En tant que le r et le s se trouvent être sem-

blables, ou en tant qu'ils ne le sont pas ?

Cratyle. — En tant que semblables.

Socrate. — Sont-ils donc semblables partout ?

Cratyle. — Du moins, peut-être, pour la représentation

de la mobilité 3.

Socrate. — En est-il ainsi du 1 placé dans le nom ? N'ex-

prime-t-il pas le contraire de la dureté 4?

Cratyle. — C'est peut-être qu'il n'est pas bien à sa place,

Socrate. Comme dans les cas que tu citais tout à l'heure à

Hermogène, en retranchant et insérant des lettres où il fal-

lait — et justement, selon moi —,ici encore il faut peut-

être substituer un r au 1.

e Socrate. — Tu as raison. Mais quoi ! avec la prononciationactuelle 5 ne nous comprenons-nous point l'un l'autre quandon dit sklêros (dur), et toi-même ne sais- tu pas en ce momentde quoi je parle?

Cratyle. — Je le sais par l'usage, mon cher ami.

1. Cf. 427 b.

a. L'ionien parlé en Eubée (à Erétrie et Chalcis), offrait des traits

particuliers, notamment le passage de o intervocalique à p. De plus,

un a final pouvait être remplacé par un p devant la voyelle initiale

du mot suivant : ontop av se lit dans une inscription d'Erétrie, pour

o^toç àv(A. Meillet, Aperçu d'une histoire de la langue grecque1

, p. 77).

3. 427 a, Socrate a dit que le a est propre à exprimer l'agitation.

l\. En effet le À (voir plus haut, 434 c) exprime une notion de

glissement et de mollesse.

5. C'est-à-dire en prononçant axX7jpoç, et non axpripdç, comme le

propose Cratyle.

Page 207: Platon, 5.2 Cratyle

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ia8 KPATYAOS 434 c

KP. KaXcoç IfcioiYE.

ZQ. T6 Se Xà6Sa tco XeIco Kal LiaXaKcp Kal otç vOvSfj

IXÉyoLiEV ;

KP. Nal.

ZO. OîaSa ouv 8ti IttI tû auT$ ^lieÎç liévcf>aLi£v

« a<Xr|péTr|c; »,s

EpETpif]ç Se a a<Xr|p6Tr|p »;

KP. riovu yE.

ZO. ridxEpov oSv T^TEpco Kal tô aîyjjia eoikev &Lic}>6TEpa

tco aÛTcp, Kcci Sî]Xoî eke'ivoiç te t8 auT& teXeutcovtoç toO

£co Kal f]\xîvtoO aîyLia, f) tolç tTÉpoiç fjfcicov

ou SrjXoî ;

KP. ArjXot lièv o5v à^cjsoTépoLÇ. d

ZO. riÔTEpov 7j8u.oia Tuy^dcvsL ovTa t&£co koI t6 aîyLia,

KP. *Hi OLuua.

ZO. *H oSv 8u.oià ectl TtavTa^f] ;

KP. r\péç ys tô ïacoç cpopàv SrjXoOv.

ZO. *H Kal to Xà68a lyKEl^Evov ;où tô evcxvtIov SrjXoî

CKXr)p6Tr|Toc; ;

KP. "lacoç yàp ouk ôp6coç eykeitou, co ZcoKpaTEç* &oTtEp

<al S vOv Sr| au Ttpèç 'Ep^oyévrj eXeyeç Ic^aipcov te Kal

evtiBeIç ypocLiLiaTa oS 8éol, Kal ôpScoç I86kelç I^oiyE. Kal

vOv ïacoç àvTlToO Xà68a pco Sel XÉyEiv.

Zfi. Eu XéyEiç. Tl ouv;vOv côç XéyoLiEv, ouSèv L^avGà- e

vollev àXXrjXcov, ETtEiSàv tiç q>f[« aKXrjp6v », oùSè oîaBa au

vOv S tl eycb Xéyco ;

KP. ''EycoyE, 8ià y£ t6 ISoç, co cpUraTE.

C 4 XacÔa B : Xâfj.63a W X T|| 7 to aùxo T pro tco aùrcp ||

8 axXi|p<foip Par. 1808 : -pot^p BW -poxrjp (sine accentu) T jj10 pu

W :pcâ

B p T|| crïyjla

B :

ffiyijLaW â T

||eotxev — c 12 crty^a om.

W in marg. add.||12 pèô BW : p T || aiy|xa BW : â T

|| rjWb :

t\B

t)T

y d 2 tô tê W pro tô y pto W :pcô B p T ||

xai TW : ts

xai BII oi'Yjxa

BW : â T||

4 post r{ 05x01a ras. in T

||5

flT pro 7j

Il ^ ouv 05x01a om. W\\_j

Xà68a B : XàtcSSa W I T|j

10 èÇaipûv

Heindorf : -a(pcov ||12 Xctë&a B : Xa{x68a W X T

|| £co W : pcô B p T.

Page 208: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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434 e GRATYLE 129

Socrate. — Mais, en disant l'usage, crois-tu dire autre

chose que la convention ? Par l'usage, ne veux-tu pas dire

que moi, quand j'articule ce mot 1

, j'ai cette chose-là dans

l'esprit, et que toi, tu reconnais que c'est elle que j'ai dans

l'esprit? N'est-ce pas là ta pensée ?

435 a Cratyle. — Oui.

Socrate. — Par conséquent, si tu la reconnais quand

j'articule, tu obtiens de moi une représentation ?

Cratyle. — Oui.

Socrate. — Et à l'aide d'une chose qui ne ressemble pas

à ce que j'ai dans l'esprit quand j'articule, puisque le 1 estsans ressemblance avec cette dureté (sklêrotês) dont tu parles.

Mais, s'il en est ainsi, n'est-il pas vrai que tu en es convenu

avec toi-même, et que la justesse du nom devient pour toi

une convention, puisque les lettres semblables et dissem-

blables sont également expressives, une fois admises parb l'usage et la convention ? Même si l'usage n'a absolument

rien d'une convention, ce n'est

plus

la ressemblance

qu'onaura raison de définir un moyen de représenter, mais

l'usage. Car il se sert également, paraît-il, du semblable et

du dissemblable pour représenter. Mais puisque nous

en sommes d'accord, Cratyle— car je prendrai ton silence

pour un acquiescement—

,la convention, en quelque ma-

nière, et l'usage doivent nécessairement contribuer à la

représentation de ce que nous avons dansl'esprit en parlant.

Prends-en effet, si tu veux, excellent Cratyle, le nombre pour

exemple. Comment crois-tu pouvoir appliquer à chacun des

c nombres en particulier des noms qui leur ressemblent, si tu

ne laisses à ton accord et à ta convention une autorité déci-

sive en ce qui concerne la justesse des noms? Moi aussi,

j'aime que les noms soient autant que possible semblables

aux objets: mais je crains qu'en réalité il ne faille ici, pour

reprendre le motd'Hermogène, tirer laborieusement 2 sur la

ressemblance, et qu'on ne soit forcé de recourir encore,

pour la justesse des noms, à cet expédient grossier de la

convention. Autrement, la plus belle façon possible de par-ler consisterait sans doute à employer des noms qui fussent

1. Touto : c'est-à-dire oxXripdç, autrement dit, le nom', âxavo : la

notion représentée par le nom.

a. Cf. l\\!\ c, xa: tiaXa ykiaypaiç.

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i29 KPATYAOE 434

Zft. "E8oç 8è Xéyov olel tl Biàtyopov Xéyeiv £uv8f)Kr|<; ;

f)aXXo tl XéyEtç to I8oç f) Bxieycb, bxav toOto ^SÉyycoLiai,

ÔLavooO^atekeîvo, au 8è

ytyvcbaKELÇ

otl ekeîvo

SiavooO^ai;ou toOto XÉyELÇ ;

KP. Nat. 435 i

ZQ. OukoOv el yLyvobaKELÇ elaoO <J>8£yyoLiÉvov, Si^XcùLià

aot ylyvETat Ttaps

elioO;

KP. Nat.

ZO. 'Atto toO àvoLiotou

yEf)

8 Siocvooulievoç (J>8ÉyyoLiai,

EinEp xè Xà6Sa ocv6liol6v laxtxrj fj <pf\<;

où aRX^pôtriTL* eI

8e toOto oStcùç e^ei, tI aXXof\ aux&ç aauxô £uvé8ou Kai

aoi yLyvETaL f} opSoTrjç toO ov<5lioctoç ^uvSi^Kri, ETtEiSr) yE

SrjXoî kocl xà OLiota Kal Ta àvoLioia ypdcLiLiaTa, ISouç te Kal

£uv8rjKr|ç TU)(6vTa ;eI 8' 8 ti u-àXtaxa

u.rjeotl to I8oç

£juv8r|Kr|, ouk àv kcxXcûç etl I^ot XéyELv ttjv olxouSttjto:b

8r)XcoLia EÎvat, àXXà to eSoç* ekeîvo yàp, êbç eolke, Kal

ollo'lco Kai àvoLtolcp SrjXoî. 'EtielSi^ 8è TauTa ^uy^copoOLiEV,

S KpaxuXE— xf]v yàp aiyfjv aou ^uy^cbprjaLV 8r)aco—

àvay-

Kaîov nou Kal 5,uv8r)KT]v tl Kal I8oç £uu6àXX£a8aL npbç

SfjXcOQlV GÙV 8taVOO\JLlEVOL XÉyOLLEV ETTEL, Si (iÉXxLOTE, eI

SéXeiç ettI tov àpi8Li6v IXSeîv, tt68ev olel e^elv ôv6u.aTa

S^ota Ivl EKàaxcp tgùv àpiSLicàv etteveykeîv, ààvlit) eSç tl

*rf]v ar)v ÔLLoXoylav Kal ^uvGfjKrjv Kupoç e^elv t&v ôvoll<xtcùv C

ôpBoxrjToç TTÉpL ;IlloI llev ouv Kal aÔTco àpéaKEL ljlèv KaTa

t6 SuvaTèv ÔLjioLa EÎvaL xà ov<$LiaTa TOÎÇTTpàyLiaaLV àXXàLif)

cûç àXr|86ùç, x6 toO 'EpLioyâvouc;, yXia^pa f\ rj oX<i] axixr) tîjç

ÔLLOLOTr|TO(;, àvayKaîov 8èf\

Kal iQ> (popTLKcp toùtq Ttpoa-

Xpfja8aL, ttj E.uvS^Krj, elç ôvolioctcûv ôp8oTr|Ta. 'EtieI ïaoç

Kaxd yE tô Suvaxèv KaXXLaT* âv XÉyoLxo oxavf)

Tt&aLVf|

e 5 BtaçpÉpsiv W (sed o supra e et si) yp. xaî Biaçopov in marg.j|

435 a 6 Àopa B : X TW|j

àvduoiov TWb : opoiov B|| 7 aÙTÔ W

pro aauTtoj|8 s-e-'-ép W pro £7C£t5rj ||

b 1 ht om. W|j e/_otév

v. pro

I/o: Wjj

2èxttvo* B (È/.etvo b)

||

5 aup.5aˣa0ai T (corr. T)||

6Xéya3U.ev T ||si èOcX^cie'.; W.

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435 c GRATYLE i3o

tous, ou pour la plupart, semblables aux objets, c'est-à-dire

d appropriés ;et la plus laide, dans le cas contraire. Mais dis-

moi encore après cela : quelle vertu nous font voir les noms,et quel bon effet devons-nous leur attribuer ?

Gratyle. — C'est d'enseigner, à monaJff ^JH?**™ avis> Socrate, et on peut dire absolumentdes noms. '

.r

que, quand on sait les noms, on sait

aussi les choses.

Socrate. — Sans doute veux-tu dire, Gratyle, que quand

on saura de quelle nature est le nom —et il est de même

e nature que l'objet—

,du même coup l'on connaîtra aussi

l'objet, puisqu'il se trouve être semblable au nom, et qu'à ce

compte il n'existe qu'une seule et même science pour toutes

les choses semblables entre elles. Telle est, je crois, ta pen-

sée, quand tu dis que celui qui connaîtra les noms connaîtra

aussi les choses.

Gratyle. — Rien de plus vrai.Socrate. — Or çà, voyons quelle peut bien être cette

manière dont tu parles maintenant d'enseigner les choses

qui sont. En existe-t-il encore une, inférieure toutefois à

celle-là, ou n'y en a-t-il pas d'autre? quel est ton avis?

436 a Cratyle. — Moi, je crois qu'il n'en existe absolument pas

d'autre, et que celle-là est à la fois la seule et la meilleure.

Socrate. — Et la découverte de ce

qui est,se confondra-

t-elle aussi avec elle? En découvrant les noms, aura-t-on

découvert aussi les objets désignés par les noms? Ou bien

recherche et découverte doivent-elles se faire d'une autre

façon, tandis qu'on apprendra de cette manière *?

Gratyle. — Recherche et découverte doivent se faire

absolument de cette même manière dans les mêmes condi-

tions.

Socrate. — Voyons, Gratyle, réfléchis-

bLes noms risquent gons g. dans lft recherche des choses

de tromper.'

. . . ,

on prend les noms pour guides, en

examinant le sens de chacun d'eux, réfléchis-tu qu'on court

grand danger de se tromper ?

i. La connaissance toute faite (fiaOetv)des choses par les noms,

connaissance qui n'implique ni contrôle ni enquête, est nettement

distinguée de la recherche (Çt,x£Ïv xal eupiaxsiv) personnelle (cf. aù-obç,

Page 211: Platon, 5.2 Cratyle

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i3o KPATTAOS 435 c

cbç tiXeIcxxoiç oLioioiç XÉyrjxai, toOto 8' laxl Tipoaf)KOUcuv,

atc7)(iaxa 8è xoôvavxlov. T68e Se lioi exi eItie LiExà xaOxa, d

xlvaf)LÛv

SuvaLuve^el

ta ôvoLiaxa Kal t'l

<|>colievauxà KaXôv

àTt£pya£Ea8ai ;

KP. AiSàaKEiv ELioiyE SokeÎ, S> ZcoKpaxEç, Kal xoCxonavu

â-nXoOv EÎvai, 8ç &v xà ôvc$Liaxa ETTiaxrjxai, ETTicxxaaBai Kal

Ta TtpàyLiaxa.

ZQ. ^lacoçyàp, & KpaxûXE, t6 tolôvSe XÉyEiç, coçETTEiSàv

xiç EiSf}xè ovoLia otov laxiv — ectxi 8è

oîovTiEpxo

TtpayLia— EÏasxai Si) Kal x& TtpayLia, ette'lttep Bllolov xuy)(àvEL 8v e

XCÙ OVOLiaXL, XE)(VT) 8È{JLLOC &p' ECJTLV

f\ aÔxf) TtàvXCOV X&V

aXXfjXoiç ôllolcov. Kaxà toOtoSrj liolSokeîç XÉyEtv oc; 8ç av

xà ovÔLiaxa etôfj EÏaExai Kal Ta irpàyLiaxa.

KP. 'AXr)8ÉaxaTa XÉyEtç.

ZQ."E^e 8r),

ïScoliev

xlçnox' âv

EÏrj

ô

xponoç oCxoç xfjçSiSaCTKaXlaç xcov Svxcov 8v ai) XÉyEtc; vOv, Kal Tt6x£pov ectxl

lièv Kal aXXoç, oCxoç llévxol (^eXtIcov, f^oàS

3

ectxlv aXXoç

fj oCxoç. rioTÉpcoc; olel;

KP. Ouxcoç lyoyE, où nàvu xl eIWl aXXov, xoOxov 8è Kal 436 a

li6vov Kal frÉXxiaxov.

ZO.rioTEpOV

SE KalEÎÎpECXLVXéùV

OVXCOVX1*)V aux^vxaùxrjv

EÎvat, xèv xà ôvéLiaxa EÎipovxa Kal EKEÎva rjûprjKÉvaL ov

Ictti xà ovéLiaxa'f) £t]xelv llèv Kal EÔplaKEiv EXEpov Selv

xpoTiov, LiavSàvELV Se xoOxov;

KP. flàvxcov ^àXiaxa Kal t^rjxEÎv Kal EÛpiaKEiv xèv aôxôv

xpoTiov xoOxov Kaxà xauxà.

ZO.0Ép£

Sf)

Evvof)aco^Ev,

SKpaxuXs,

el xlç£r)xcov

TXpdyLiaxa aKoXouGoî xoîç ôvoLiaaL, cxkottcov otov EKaaxov b

C 8bpolo'.ç

W : -:co; BT et primit. W ||d 5 è-iaxaaOat in marg.

add. t||8 $g T

||e 3 xati yàp touto or, W ||

8 «jlsv om. W|| f]

Wb :

r\B

9;T

||oùoiv ÈaTtv W

||436 a 3 xot om. W

|| aipeaiv T (eûpeaiv in

marg. t) l| [\ xoxstva W|| 5 r\

B|| 8 toutovI W

||

-aù-k Heindorf:

tocutcc || b i àxoXou6or B : -Oei TW.

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436 b GRATYLE i3i

Cratyle. — Comment cela ?

Socrate. — Celui qui le premier a établi les noms se

réglait évidemment, pour établir les noms, sur l'idée qu'il

se faisait des choses. C'est notre avis, n'est-ce pas ?

Cratyle. — Oui.

Socrate. — S'il ne s'en faisait pas une idée juste, et

qu'il ait établi les noms sur cette idée, que nous arrivera-

t-il selon toi, en le prenant pour guide? Ne nous trompe-rons-nous pas ?

Cratyle. — Mais peut-être n'en est-il pas ainsi, Socrate,

cet l'auteur des noms

les établissait-ilnécessairement en

connaissance de cause; sans quoi, comme je l'ai dit depuis

longtemps1

,il n'y aurait même pas de noms. La meilleure

preuve, sache-le, que leur auteur a bien rencontré la vérité,

c'est qu'il n'eût jamais réalisé un accord si complet. Toi-

même, ne remarquais-tu pas, tout en parlant, l'analogie et

la tendance commune de tous les noms 2?

Socrate. — Mais, mon bonCratyle,

cela n'est

point

un

argument. Suppose que l'auteur se soit trompé au début, et

dqu'il ait de force ramené la suite à ce point de départ, pour

l'obliger à être d'accord avec lui-même ; il ne serait pointextraordinaire qu'il en fût ici comme dans les figures géomé-

triques, où, la première étant parfois devenue une cause

d'erreur par sa petitesse et son manque de netteté, on voit à

sa suite toute la foule des autres s'accorder entre elles. C'est

donc sur le point de départ qu'en toute chose tout le mondedoit faire porter la plus grande partie de sa réflexion et de

son étude, pour chercher s'il a été posé correctement ou non;

et c'est quand il a été bien éprouvé qu'on doit en voir

e découler le reste. D'ailleurs, je serais surpris que les nomsfussent d'accord entre eux. Reprenons en effet l'examen de

ceux que nous avons déjà passés en revue. C'est, disons-nous,

efôoTaç, 438 b), qui mène à la connaissance. Une opposition analoguese relève dans le Phédon, 85 c:

f] fjLaôetv... rj eôpeîv.

i. Cratyle rodent obstinément à son affirmation, pourtant réfutée

par Socrate, que tous les noms dignes de cette appellation sont justes.

2. Socrate avait en effet déclaré (4n c), en commençant l'examen

des notions morales, que l'attribution des noms aux choses s'est

essentiellement réglée sur l'idée qu'elles sont en proie au mouve-

ment. En ce sens, les nomstémoignaient

tous de la mêmetendance,et Socrate l'a fait observer plusieurs fois.

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i3i KPATYAOS 436 b

(iouXETai EÎvai, &ps

evvoeîç 8ti ou auAKpèç kiv8uv6ç lariv

l^aTtaTT)8^vat ;

KP. nôç;

ZO. Af^Xov 8tio Sélievoç TtpcoToçTà ôvÔLuxTa, oîafJyE'iTo

EÎvai xà npocy^axa, TOiaÛTa et18eto Kal Ta ôvÔLmTa, cSç

<J>aLiEv. *H yàp ;

KP. Nat.

ZO. Et ouv ekeivoç \x1] ôpScoç f^yEÎTo, ISeto Se oîa

T^yEtTo,tu olei

f\\xoiç toùç àKoXouSoOvTaçauxô TTEiaEoSai

;

aXXo tifj E^aTtaTr|8f)aEa8at ;

KP. 'AXXà\ir\ ou)( oÏJtcoç I)(r|,

S ZcbicpaxEÇ, àXX' àvayKaîov

îjEiSôTa Ti8Ea8at tov tiBelievov Tàôv6^aTa* eI Se

ljl/), SîTEp c

•nàXai èyà) IXEyov, ouS' av ôv6^aTa zir\. MÉyiaTov Se aoi

eotco TEK^fjpiov Sti ouk lacpaXTai Tf]ç àXr)8£uxç ô tiSeu-evoç-

ouyàp

av ttote outcùE,ÙLi({>cùva rjv

auTcS anavTa. "H ouk

EVEvéELçauxèc; XÉycov oç TtavTa KaTàxauxôv Kal ETïlxaÙTèv

EytyvETo xà ôvÔLiaTa;

ZO. 'AXXà toOtol^év, oyaBè KpaTuXs, ouSÉv eotiv àno-

X6yr|u.a. El yàp to TipcoTov acpaXElç o tiSe^evoç TaXXafjSrj

npoç toOt' e6ux£eto <al auTÛ^uljlc|>coveîv rjvayKai^Ev, ouSèv d

OTOTTOV, &OTï£pTûûV

SiaypaLjLLlàTCùVEVIOTE TOG

TtpOÙTOU

a^iKpoO Kal à8f]Xou ipEuSoOç yevoliévou, Ta Xomà nàLmoXXa

fjSr)5vTa ETtd^Eva 5u.oXoy£Îv àXXrjXoiç. AeÎ 8^ Ttspl Tfjç

àp^ç TravTÔç Trpayu.aToç Travxl àvSpl tôv ttoXùv Xéyov

EÎvai Kal TT]V TtoXXf)V OKElJjlVEÏTE ÔpScOÇ EÏTE

U.f]ÛTtàKElTai*

ekeivtjç 5è I^ETacrSEianç iKavcùç, Ta Xomà <J>aLvEa8at

EKEtvr) ETtéLjiEva.

Oùljlévtou

àXXà8auLjiàc^ouLji

s

av eÎ Kal Ta

èvé^aTa E,ULU|>covEt auxà aÛTOÎç. riàXiv yàp EmcrK£i|i6bu.£8ae

8. to Ttp6TEpov Stf)X8oLji£v.

c

Oç toO navTbç 16vtoç TE Kal

b 2 ô xivBuvd; W II12 àXXà

jjlt]

— c 1 T:Gea8at om. W sed in marg.add.

D syr, B: -yei TW ||C 3 saxw aot W

||5 êwoeiç W

||xaià

xauTÔv W: x<rc' auTÔ B om. T || 6 èyévsTO W

jj d 1 ay-cài T:

aù-BWD3 $suoou; T :

<{,su5ou;BW

||e 1 a&tùïi B : au- TW.

'

Page 214: Platon, 5.2 Cratyle

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437 a

436 e CRATYLE i3a

en ce sens que tout marche, se meut et s'écoule, que les

noms nous indiquent la réalité. N'est-ce pas là ce qu'ils

montrent, â ton avis ?

Cratyle. — Parfaitement. Et j'ajoute qu'ils l'indiquent

justement.

Noms qui peuventSocrate. — Parmi eux reprenons donc

indiquer le repos d'abord ce nom d'épistêmê (science), et

aussi bien considérons combien il est équivoque.que le mouvement,

jj paraît signifier qu»ji arrête (histêsï)

notre âme sur les objets plutôt qu'il n'accompagne leurmouvement

;et il est plus juste d'en prononcer le début

comme nous faisons maintenant que de retrancher l'é pourdire pistêmê

*. Ensuite le mot bébaion (stable) paraît être l'imi-

tation d'une base (basis) et d'un arrêt, non d'une mobilité.

Le mot hisioria (connaissance) signifie par lui-même Varrêt

(histêsî) de Vécoulement (rhous). Et piston (sûr) signifie

expressément,lui

aussi,arrêtant

(histan).Ensuite mnêmê

(mémoire) indique pour le premier venu une halte (monê)dans l'âme, et non un élan. Prenons encore, si tu veux,

hamartia (erreur) et sumphora (accident) ;si l'on se règle

sur le nom, ils apparaîtront identiques à cette compré-hension (sunésis) dont nous parlions, à la science (épistême) et

à tous les autres noms qui désignent des choses de prix2

.

Allons plus loin : amathia (ignorance) et akolasia ( dérèglement)

paraissent en être très voisins. L'un, amathia, semble être la

démarche qui accompagne Dieu dans son mouvement (hama théô

ionios) ;et akolasia paraît désigner expressément Yaction de

suivre (akolouthia) les choses. Ainsi, les noms que nous croyons

appliqués aux choses les plus mauvaises apparaîtront tout

à fait semblables à ceux qui désignent les meilleures. Et

en s'en donnant la peine, on en trouverait, je crois, beau-

coup d'autres dont on pourrait conclure au contraire que

i. Cet endroit, où Socrate rattache le mot ït:'.jzt1 u.ti

à la notion

de repos (ou d'arrêt), est inséparable de 4i2 a, où il expliquait le

même nom par une idée contraire, celle du mouvement. Mais dans

les deux cas le texte est incertain (voir la note à l\ 1 2 a). En suivant

Schanz, comme nous l'avons fait, on est obligé d'écrire é/.SaXXov-rî;,

et de considérer comme une intrusion les mots àXAà—îS>za.

2. Rattaché à ôu.apxeïv, accompagner (et non à àtxapTeïv),

Page 215: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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i3 2 KPATTAOS 436 e

<|>Epou.Évou Kat pioviéq cpaLiEV an^alvELv fJLiîv tfjv oualav

Ta ôv6^iaTa. "AXXo tl oBtcù ool SokeÎ SnXoOv;

KP. riàvu aq>68pa,<ai

ôpBcoç ye anr^aLVEi. 437 aT.C1. Ekottôl^ev 8f] l£ ocôtcov àvaXa6<Svx£ç TipÛTov Lièv

toOto t6 BvoLia, xfjv« tmaTf)L^r)v », êbç àLi<ju6oX6v ectti,

Kal lloXXov eolke arj^atvovTi 8tl lo^^oiv f)LicovettI tolç

TrpàyjiaaL xf)v ifux^)v 1 ^TL £uLm£pL<|>ÉpETaL, Kal ôp86TEp6v

eqtlv ôoTUEp vOv auxoO Tf)v àpxV XéyEiv llSXXovfjekBoX-

XovTaçib eÎ «

TuaTl^rjv»

[,àXXà xf)v £Li6oXf)v TioiijaaaSaiàvul xfjç ev tô eÎ Iv *u5i IcoTa] . ^EîTELTa to « [iÉBaiov », 8tl

(iàaEcbq tlvoç eotlv Kai axaaEOÇ LiLLir|Lia,àXX' ou

<J>op3c;.

"EîTELTafj

« laxopta » auTÔ" ttou ar)u.alvEi 8tl tciTr|aL tov b

poOv. Kal x6 « max&v » îaTàv TiavTàTTaCTL an^alvEL.

^EîTEiTa Sefj

«Livr)u.r)

» TtavTi tiou lltjvùel 8tl Liovf) eotlv

evif\ 4^X0'

°^S

ou

$ Pa - El 8è

(SouXel, f\

«

aLiapTia» Kal

fj« £i\)\i.q>op& », eI Kaxà to ovou.à tlç àicoXou8f)(JEi, cpavEÎTai

TaÙTOVTfi

« E,UVÉaEL » TaUTT| Kal « êmaTf) LAfl» Kal TOLÇ

aXXotç Ti&ai tolç TtEpl Ta arrouSaîa ôvétiaatv. "Etl tolvuv

fj« àjiaSla » Kal

f\« aKoXaoia » TrapaTcXrjoia toûtolç

c^alvETai* fjllèv yàp toO a Lia 8eS l6vxoçTtopEta cpaivETaL, c

fj

« àu.a8ta», fj

S' a aKoXaala » TtavTàTraaLV àKoXouBta

tolç TTpày^iaaL cpalvETaL. Kal outcùç, a volll£ol^ev ettI tolç

KaKlaTOLÇ ôvoLLaxa EÎvaL, ÔLioLéxai-' av cpalvoLTO tolç ettI

tolç KaXXlaTOLÇ. Oîu.aL 8è Kal aXXa ttoXX' av tlç EÛpoL, eI

TXpayLjiaTE\joLTO, ê£, a>v oli^Betrjav au TtàXLV tov Ta ôvéu.aTa

Testim. : 437 b fj [xvr[txri — 4 ?opà Stob., Flor., 25, 2.

e 3 péovcoç om. sed in marg. ante iôvzoç add. W||

4 aXXo fi t\b

|| StjXouv Boxêï W||437 a 2 ivaXauSàvovcs; W

||llèv Stj T sed 8tj

punctis not. t||3 èaTi om. T

|| 4 ar,|Aa:'vovTiW : ayjLLOuvov xt Bt

ar,txatvovc. (sine accentu) T ||6 Àsyeiv tyjv àp/Tjv W || èx6âXXovxaç B :

IfjL-TW

y 7 ei W : si B ë Tb|| 7itaTr[jxrjV Gornariiis_

:

£î:!0T7]|jlt]v ||

àXXà — 8 îoka secl. Ast||

8 n BW : ï Tb||

ïâÎTa BW : t T||

b 2 îa-càv Gobet:

-xav || 5 it ttç xa-cà xà ôvdtjiaTa àxoXou6r{aet W jj

C 1 io'vto; B (corr. b).

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CRATYLE i33

l'auteur des noms désignait les choses comme étant, non pasen marche ni en mouvement, mais en repos.

Cratyle. — Tu vois pourtant, Socrate, que la plupart du

temps c'est l'autre sens qu'il donnait.Socrate. — Qu'importe, Cratyle? Irons-nous compter les

noms, comme des bulletins de vote, et est-ce en cela queconsistera leur justesse? Est-ce du côté où l'on verra les

noms désigner le plus grand nombre d'objets que se trou-

vera la vérité ?

Cratyle. — Ce n'est pas vraisemblable.

L'auteur des noms Socrate. — Non, mon cher, en aucune

apu nepas les établir façon. Mais laissons-là ce sujet, pour re-

en connaissance venir au point de départ qui nous avaitde cause. amenés ici. Tout à l'heure, dans la

discussion précédente1

,si lu t'en souviens, tu affirmais que

l'auteur des noms devait nécessairement connaître les objets

auxquelsil les

appliquait.Es-tu encore de cet

avis,oui ou non ?

Cratyle. — Je le crois encore.

Socrate. — Et l'auteur des noms primitifs, est-ce en

connaissance de cause qu'il les établissait aussi, à ton avis?

Cratyle. — Oui.

Socrate. — A l'aide de quels noms avait-il donc pu ap-

prendre ou découvrir les choses, si les noms primitifs n'étaient

pas encore établis, et si d'autre part il est impossible, selon

nous 2, d'apprendre et de découvrir les choses sans avoir appris

ou découvert soi-même les noms qui les désignent ?

Cratyle. — L'objection, Socrate, me paraît sérieuse.

Socrate. — Comment donc dirons-nous qu'ils les ont

àjxapTta indiquera le mouvement, qui est le bien suivant l'école d'He-

raclite. De même ayuçopà, expliqué par ou;j.<pépea6at, se mouvoir avec.

Ces deux noms deviendront ainsi

synonymesde ouveatç

(rapportéà

CTÛveifxt, aller avec, cf. 4 12 a, et non à avvtr,ui) et de è^iaT^uT],

entendu dans le premier sens. — Il va sans dire que cette nouvelle

série d'étymologies n'a pas plus de valeur scientifique que la premièreaux yeux de Platon. Le procédé auquel revient Socrate a été expres-

sément condamné par lui. L'auteur s'achemine à la conclusion

finale : il est imprudent de demander aux noms la connaissance

des choses.

1. 436 bsq.

a. Voir 435 de.

Page 217: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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i33 KPATTAOE 437 c

tiBé^evov ou)(l l6vTaoô 8è <j>£p6jiEva, àXXà ^ÉvovTa Ta *npà-

y^axa arj^aLvEiv.

KP. 'AXA

3

,

S ZoKpaTEç, SpSç 8ti Ta noXXà ekeIvcoçd

lai'njiai.vEv.

ZQ. Tt oSv toOto, o KpaTÙXs ; ûSottep i[nr}c{>ouç8i.api8fci.r|-

a6(jiE8a Ta ôv6^aTa, ical ev toùtcû laTaif\ ôp86Tr|ç ; ônoTEpa

av ttXeIcù cpalvrjTaLTà 6v6^iaTa or)tialvovTa, TaOTaSf) lançai

TàXT]6f) ;

KP. Oukouv eIkoç y£.T.C1. Ovh

3

ôttcûotioOv, Sc|)IXe.

Kal TaOTa^iév y£ aÔToO

làacù^iEv, ETiavÉX0cù^£v Se TxàXiv §8ev 8s0po ^etéBtihev. 438 a

"ApTt yàp ev toîç Trp6a8Ev, si ^É^vr|aai, tov tlSélievov Ta

ôvÔLiaTa àvayKccîov £<|>T]a8aEÎvai EiS6Ta Ti8Ea8ai otç

EtOeTO. ri6TEpOV OUV ETl <JOl 80KEL OUTCÛÇ f)o{J

;

KP.*Etl.

ZQ. *H Kal t6v Ta TtpÔTa ti8élievov Ei86Ta<pf\q

Tt8Ea8at;

KP. El86Ta.

ZO. 'Ek Tto'lCùV o3v ÔVOLJlàTCÛV f\ LlELia8r|KOÇ f^ T)Ûpr|KG)Ç

fjv Ta TupàytiaTa, EÏTiEp Ta yE TtpcoTa litjttco ekeito, Lia8EÎv b

S* au$a^Ev

TaTrpàyLiaTa

KalEÛpEÎv

àStivaTov EÎvaiocXXoç

f\Ta ôvo^iaTa Lia86vTaç f) auToùç è^EupàvTaç otà laTi

;

KP. Aokeîç Ti LIOU XÉyELV, S ZcûKpaTEÇ.

ZO. Ttva oCv Tpénov <f>co^£v auToùç EtS^Tac; 8Éa8aif\

C 8 aY)txa''vet W ||d i èxeiveo B (corr. b) ||

438 a i post èàatojxev

add. W:

xaoê 8è £7;iax£'}tofj.£6a tt r^iv xal T^oe ôti.oXoy£t; ifn xatoj. çsps, toÙ; Ta ôvdfxaxa èv Taî; 7;oXscr. Ti0ejj.svouç éxâVcoTe, ev xe Tatç

'EXXYjvixaiç xat (3ap6aptxatç, oûx àpTtcoç o5j.oXoyou1j.6v vojxoOÉTa; elvat

xat Trjv tI^vtjv ttjv touto 8uva[xévr)v vo{j.o0£Ttx7Jv ; (KP.) Ilâvu ye :

(2Q.) AÉye orj, 0? 7:pc5TOt vOfxoôc'Tat Ta îïpcoTa ôvdixaTa rcoTEpov

ytyvojGXOvTsç Ta7ïpày|j.aTa, oïç stiôevTO, ètîOsvto

y] àyvoouvTsç ; (KP.)

0^[J.at |j.£v èyc6,ai Sojxpaxe;, ytyva>axovTeç : (SQ.) Où yap îuou, & lxaTp£

KpaxuXi, àyvoouvTÉç y£ : (KP.) Où'{J.ot

Soxet : mox add. ix ttoicov 8e,

significans a 1 £7rav^X6totx£v

— a 8 £t8o'xa omittenda esse || 81 om. W|! A o-jTtuç ex ouxoç fecit T

|| j\Wb :

r,BT.

Page 218: Platon, 5.2 Cratyle

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438 b GRATYLE i34

établis en connaissance de cause, ou qu'ils faisaient œuvre de

législateurs, avant l'existence d'aucun nom qu'ils pussent

connaître, si vraiment ou ne peut apprendre les choses qu'à

l'aide des noms ?

c Cratyle. — A mon avis, Socrate, voici sur ce sujet l'ex-

plication la plus vraie : c'est une puissance supérieure à

l'homme qui a donné aux choses les noms primitifs, en

sorte qu'ils sont nécessairement justes.

Socrate. — Alors, à ton avis, cet auteur se serait contre-

dit lui-même   en les établissant, bien qu'il fût un génie ou

un dieu? Ou n'accordes-tu aucune valeur à ce que nous di-sions il y a un instant ?

Cratyle. — C'est peut-être que l'une des deux catégories

ne représente pas vraiment des noms.

Socrate. — Laquelle, excellent Cratyle? Veux-tu parler

de ceux qui se rapportent au repos, ou de ceux qui ont trait

au mouvement ? Car, comme nous le disions tout à l'heure,

cen'est

sansdoute

pasle

nombre quidécidera.

d Cratyle. — Non, Socrate, ce ne serait pas juste.

Socrate. — Dans cette guerre civile où sont entrés les

noms, chaque parti revendiquant le privilège d'être semblable

à la vérité, sur quoi nous fonderons-nous désormais pour

décider, ou à quoi aurons-nous recours? Ce ne sera sans

doute pas à d'autres noms différents de ceux-là — il n'en

est

point

—,et il faut évidemment chercher, en dehors des

noms, d'autres lumières capables de nous montrer sans

l'aide des noms laquelle des deux catégories est la vraie,

évidemment en faisant voir la vérité de ce qui est.

e Cratyle. — C'est mon avis.

/] faut s'adresserSocRATE -

— ll es* donc possible, ce

aux choses semble, Cratyle, d'apprendre ce qui est

pour les connaître, sans l'aide des noms, s'il en va ainsi.

plutôt Cratyle. — Apparemment.qu'aux noms.

Socrate. _ De quel autre moyen at-

tends-tu donc encore cette connaissance, sinon de celui qui

est à la fois naturel et le plus légitime, en apprenant à

connaître les choses les unes par les autres, si elles ont quel-

que parenté, ou en soi et par elles-mêmes? Car sans doute,

i. Voir 437 c sq.

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i34 KPATYAOS 438 b

vou.o8ÉTaç sîvai, nplv Kal ôtioOv ovou.a KEÎa8al te ical

ekeIvouç EiSÉvai, ELTtEp u.f]IcTL xà TtpàyLiaTa ^a0EÎv àXX'

f\ek tcov ôvou.cxtcùv

;

KP. OÎLiai u.èv èycb t6v àXrjSÉCTTaTov X6yov TiEpl toutcov c

eÎvoci, co ZcoKpaTEÇ, u.ei£co Ttvà ouvau.iv EÎvaif) àvGpco-

•nEtav Trjv BELtÉvrjv xà Tipcoxa ôvo^axa toiç mpay^aaiv,

ôSaxE àvayKaîov eÎvoci auxà ôpBcoç e^eiv.

ZO. EÎtoc, oïei, èvavTta av etlSeto auT&ç aÛTcp ô SeIç,

8>v Saluicov tiç fj Beôç ; fjouSév aoi eSokoOu.ev apTi XéyEiv ;

KP.J

AXXàLif]

oukfj

toutcov xà ETEpa ôv6u.aTa.

ZO. rioTEpa, co apiaTE, xà ettI Tf)V aTdcaiv ayovTa fjTa

ItiI xf]v c|>opàv ;ou yàp tïou Kaxà t6 apTi Xe^Bèv TtXf)6£i

KpiBfjaETa»..

KP. Oïïtol8f|

Sixaiév yE, co ZcÔKpaTEÇ. d

ZQ. 'Ovolicxtcov oSv aTaaiaacxvTCùv, Kal tcov u.èv <J>acxK<Sv-

tcov iauTà EÎvau xà 8u.oiaTrj àXrjBEla, tûv 8' iauxà, tIvi

etl 8iaKpivo0u.£v, rjettI t'i eàBovteç ;

ou yàp mou ettI ôv<5-

u.aT<x yE ETEpa aXXa toutcov ou yàp ecttiv, àXXà SfjXov 8ti

aXX' êtTTa £r)Tr)TÉa TiXi^v ôvou.aTcov, Sfju.îv èu.c|>avi£Î

avEU

ovolioctcov ÔTTÔTEpa toutcov IotI TàXrjSfj, §Et^avTa SfjXov 8tu

ttjv àXr)8£iav tcov ovtcov.

KP. Aokeu u.oi oîJtco. e

ZO. "Ecxtiv apa, coç eolkev, co KpaTuXs, SuvaTov u.a8£Îv

avEU ôvou-cxTcov Ta ovTa, EÏTiEp TaOTa oôtcoç £Xet «

KP. <t>alv£Tai.

ZO. Aux t'ivoç aXXou oSv eti TTpoaSoKfic; av aÔTa

u.a8Etv; apa Si

3

aXXou toufj ouYiEp eIkoç te Kal SiKaiÔTaTov,

Si3

àXXfjXcov y£, eltut) 4uYYev ^l ^onv, Kal auTà Bi aÛTÔv

;

b 6 xeïaÔai : 8éc8at in marg. t|| 7 àXX'

t]BW : iXXr) T ||

c 5 ô ôelç

oiv W et in marg. t : ô ôrjcrwv BT j|6 tiç B || rj

W :r\B ^ T || 7 rj

:

?jv codd. y g auixçpopàv T pro ç;opav (sed au|x punctis not.t) ||

r.tà T

pro r.ouj|d 1 oj-ot W : outcd BT et primit. W j|

3 tûv 8s aùxk WIl 4 è^î xi : ixi rt codd.

||6 âxTa T

|| eLKpavtei B et in ras., ut

uidet., W: èiiçavr]el T

||

e 5 aùxà W: xauxa

BTxaùxà t

||

6 tou b

H Jj BW :?jT d 7 tê Heindorf pro ye ||

aÙTtuv T.

Page 220: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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438 e GRAÏYLE i35

ce qui diffère d'elles et leur est étranger indiquera un objetdifférent et étranger, et non pas ces choses-là.

Gratyle. — Tu me parais avoir raison.

439 a Socrate. — Un instant ', par Zeus!

Et les noms, n'avons-nous pas reconnu à plusieurs reprises que, quand ils sont

bien établis, ils ressemblent aux objets qu'ils désignent et

sont les images des choses ?

Gratyle. — Oui.

Socrate. — Si donc on peut acquérir par les noms une

connaissance des choses aussi parfaite que possible, et si on

le peut aussi par les choses elles-mêmes, quelle sera, de cesdeux formes de connaissance, la plus belle et la plus exacte?

Est-ce de l'image qu'il faudra partir pour apprendre, en

l'étudiant en elle-même, si la copie est bonne, et connaître

en même temps la vérité dont elle est l'image ? Ou est-ce de

b la vérité, pour la connaître en elle-même, et voir à la fois si

son image a été convenablement exécutée?

Gratyle. — C'est de la vérité

qu'il

faut nécessairement

partir, à mon avis.

Socrate. — Connaître de quelle manière on doit

apprendre ou découvrir les choses qui sont est peut-êtreau-dessus de mes forces et des tiennes 2

. Contentons-nous

de convenir que ce n'est pas des noms qu'il faut partir, mais

qu'il faut et apprendre et rechercher les choses en partantd'elles-mêmes bien plutôt que des noms.

Cratyle. — Apparemment, Socrate.

Socrate. — Prenons garde encore que tous ces noms de

c même tendance ne réussissent à nous induire en erreur, si

vraiment leurs auteurs les ont établis dans l'idée que tout est

en proie à un mouvement et un écoulement perpétuels—

car à mon avis, ils avaient, eux aussi 3,cette idée —

,et si,

d'aventure, loin que les choses se passent ainsi, c'est eux qui

i. La locution eye 8r[, qu'on trouve plusieurs fois chez Platon,

marque comme une pause dans le raisonnement, en appelant sur ce

qui va suivre l'attention de l'interlocuteur.

2. Platon a voulu seulement, sur un point particulier, dégagerles abords du problème de la connaissance. Ce problème fondamental,

il ne l'examinera que plus tard. Mais il a déjà réfléchi aux conditions

dans lesquelles il doit être posé.

3. C'est-à dire : comme ceux

qui plus

tard ont

expressémentformulé et développé cette théorie.

Page 221: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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i35 KPATYAOS 438 e

to yocp Trou ETEpov eke'lvoov Kal àXXotov ETEpov av TL Kal

àXXoîov arj^ialvoi, àXX' ouk EKEÎva.

KP. 'AXrjGfj l^ol cpalvEi XéyELv.

ZO. ^E^e 8^ Ttpbq Aloç* Ta Se ôvàuaTa ou TtoXXaKLÇ 439 a

llévtol o^oXoyfjaa^iEV Ta koXcùç KEl^Eva loLKÔTa EÎvat

IkeIvolç 5>v ôv<5u.aTa KEÎTat, Kal EÎvat ELK6vaç t«v Ttpay-

lâoctcûv;

KP. Nat.

ZQ. El oQv eotl p.èv o" ti LiàXtaTa 8l' ÔvopàTCùv Ta Ttpà-

ytiaTa LjiavSàvEtv, ecjtl 8e Kal Bi aÛTÔv, noTÉpa av£*r|

KaXXlov Kal aa<f>EaTÉpa f\ u.à8r|ai<; ;ek Tfjç elk6voç p.av8a-

velv auTrjv te aÙTfjv el KaXûç fJKaoraL, Kal Tf)v àXf)8Eiav

fjç f\v eÎkov, f)ek Tfjç àXrjSElac; auTrjv te aÔTfjv Kal tt^v b

EtKéva aÙTÎ^ç el TtpETr6vTCùç EÏpyaaTai ;

KP.s

Ek tÎ]ç àXT]8£Laç ljlol Sokel àvàyKr) EÎvat.

ZO. "OvTtva \xkv to'lvuv Tpénov 8el Ljiav8dvEuv fj EÛpt-

okeiv Ta ovTa, u.el£ov lacoç egtIv lyvcoKÉvai f)Kax' lue Kal

crÉ" àyaTtrjTèv 8è Kal toOto ÔLjLoXoyrjaaaSaL Btl oôk IE, ôvo-

LiàTcov, àXXà ttoXù ljl&XXov aÛTa e£ auTÔv Kal u.a8ï]TÉov Kal

£r|Tr)TÉ0V f]EK TCOV ÔVOLlàTCOV.

KP. <t>alv£Tai, a> ZoKpaTEÇ.ZO. "EtL TOLVUV t68e CKELp0ùU.E8a, OTtCÙÇ Llf) T^LLCCÇ Ta

TioXXà TaOTa ôv<5^aTa eç TaÙTfcv TEtvovTa ê^anaTS, el iQ> c

Svtl U.ÈV ol 8ÉLLEVOL auTa SLavorjGÉVTEÇ y£ eSevto 6ç lovtcùv

anavTCûv à£l Kal £e6vtcdv—

cpalvovTaL yàp luoLyE Kal auTol

outûù SLavorjSfjvat— t6 S', el etu)(£v, ou)( outoùç £Xel ,

4XX'

e 8 àWoïov yp. in marg. W : aXXo 6v BT|| 9 ar)u.ai'vet W ||

439 a 2(jJU.oXoy7Ï<jau.ev

BT : -xatxev Wt|| 7 auxàiv Baiter : au-

||

xrdxepa T y8 xaXX-'io T

|| 9 xe aùx7)V T : t« a0x7jv BW || rjxacxac scripsi :

el'x-H b 1 elxwv B :

rjecxwv TW

||xe aùxY]v edd. : xe aux7jv BW

(primit. aù-W ut uidet.) xe auxrjv (sic) T ||xat om. W, sed post

auxTjv unum uel plura uerba erasa||

5 uei'Çcov B||

6 xo'Se W proTouxo

II 7 auxtov B : éau- W au- T||

c 1 I$a7:axa, ti Wyttenbach :

èÇa-axaxai xa\ B èÇa;:axa xa ;. TWb ||

a ye -^st : T£Il

îovt'ov T :

îdvxo>v B 'dvxtov xe WII3 eu-otys

aùxot W.

V. 2. — i5

Page 222: Platon, 5.2 Cratyle

7/29/2019 Platon, 5.2 Cratyle

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439 c CRATYLE i36

sont tombés eux-mêmes dans une sorte de tourbillon ' où ils

se brouillent et se confondent, et où ils nous précipitent à

leur suite. Examine en effet, admirable Cratyle, la rêverie

2

qui m'occupe souvent. Devons-nous dire ou non qu'il existe

une cbose belle et bonne en soi, et qu'il en est de mêmed pour chacun des êtres en particulier ?

Cratyle. — Oui, Socrate, à mon avis.

_ _ . Socrate. — Examinons donc cette choseLe Beau en soi. . ...

n soi, nonpour

savoir si unvisageou un objet du même genre est beau et si tout cela parait être

en proie à l'écoulement, mais en considérant le beau en soi.

Ne dirons-nous pas qu'il est toujours pareil à lui-même ?

Cratyle. — Nécessairement.

Socrate. — Est-il donc possible, s'il passe sans cesse, d'in-

diquer par une appellation juste d'abord qu'il est cela, en-

suite qu'ila ce caractère? Tandis que nous parlons, ne doit-il

pas devenir autre à l'instant, se dérober et ne plus être en

cet état ?

Cratyle. — Nécessairement,

e Socrate. — Gomment donc attribuer l'être à ce qui n'est

jamais dans le même état ? Si à un moment quelconque il

s'arrête dans le même état, pendant ce temps-là du moins

il est clair qu'il ne se déplace point ;et s'il est toujours dans

le même état et toujours le même, comment pourrait-il

changer ou se mouvoir, en ne s'écartant pas de sa forme ?

Cratyle. — Il ne le pourrait en aucune façon.

T , . . Socrate. — En outre, il ne saurait nonLa doctrine , , ...

440 a d'Heraclite. plus être connu de personne. A I appro-Nécessité che de qui voudrait le connaître, il de-

d'an nouvel viendrait autre et différent, si bienexamen.qu'on ne pourrait plus savoir ce qu'il

est ou quel est son état. Aucune connaissance, évidemment,

ne connaît l'objet auquel elle s'applique, s'il n'a point

d'état déterminé.

Cratyle. — Il en est comme tu dis.

Socrate. — De connaissance non plus il ne peut être

i. Cf. 4nb.2. Dans la République, 533 c, ovstpoSx-reiv désigne une conception

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i36 KPATTA02 439 c

oCtOL aUTot TE ÔùOTTEp ELÇ TLVa StvTjV ELriTEaévTEÇ KUKOVTOl

Kalf\\xoLq Ic^eXkôlievoi -npoaELiBàXXouaLV. ZKÉLJjaL yàp, ô

8au^àaiE KpaTuXE. o sycoys noXXàKLÇ ovELpebTTco. rioTEpov

cpûiiév tl EÎvai aùx6 koX6v Kal àya86v Kal iv EKaarov tqv

SVTCOV OÛTO, f) (JLT) ; d

KP. "E^toiyE Sokeî. & ZcoKpaTEÇ, EÎvai.

ZO. Aùxè to'lvuv Ikelvo aK£iJ;cbu£8a, Lif]eI Ttpôccmév tI

laTiv KaXôvfj

tu tôv toloijtcùv, Kai Sokel TaGTa TTCXVTa pELV

àXX' <xut6, <J>ûllev,tô KaXov oô toloGtov à£L ectlv oT6v

laTtv :

KP. 'AvàyKrj.

ZO. "Ap' oSv oîoV TE TTpOCFELTtELV aUT& Ôp8Gç, EL àsl

UTtE^Ép^ETaL. TipÛTOV LLEV 8tL EKELVO EOTIV, ETCELTa 8tL

toloGtov,r\ àvàyKrj ôxLia

fjLicov XsyévTov aXXo auTÔ euSùç

YLYVE06CU Kal ÛTTE^LEVaL Kal L1T]KÉTL OUTOÇ E^ELV ;

KP. 'AvàyKr).

ZO. Ilûàç OUV OÎV£11")

TL EKELVO 8 LLT)SÉTtOT£ CùaaÛTCùÇ e

I)(el ;el yàp ttote ôbaraÙTcaç ïct^el, Iv

y' ekelvûd tcù XP°v9

Sf^Xov 8tl oôSèv LLETa6alv£L" el Se oel <aaa\jToç ^XEl KaL T0

aÔTo laTL, nôc; av toOto y£ L^ETa6àXXoL f) klvolto, LLrjSèv

l£,LaTàLji£Vov ttjç aÛToO îSÉaç ;

KP. OûSaLuoq.

ZQ. 'AXXàLif]v

ouS' av yvcoaSElr) y£ un3

oùSevoç. °ALia

yàp âv ettlôvtoç toO yvciaoLjiÉvou aXXo Kal àXXoîov ytyvoLTO, 440 a

gSote ouk av yvcùoSelt) etl ottolov yé tl eotivf) ttqç £Xov#

yvûaïc; Se SrjTcou ouÔELua yLyvobaKEi o yLyvcbaKEL LnjSatiôc;

IXov.

KP.vEaTLV â>q XÉyELÇ.

Zfï. 'AXXS

ouSè yvôaLV EÎvai (pavai elkoç, o KpaTijXE, el

C 5 Èfuccavvrct Wbt : ï/.- BT|| 7 iyco T pro lytoye ||

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T II e 3 a-To orirtà

W pro to aJTÔ ij 7 ye om. W|j On' —44o a 2 yvcdoOcfr] om. W sed in marg. add.

jj440 a 2

-fiz: b :

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B (?)--• T d n W.

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440 a CRATYLE i3 7

probablement question, Cratyle, si tout se transforme et rien

ne demeure. Car si cette chose même que nous nommons la

connaissance ne cesse, par transformation, d'être connaissance,

toujours la connaissance subsistera et il y aura connaissance.

Mais si la forme même de la connaissance vient à changer,h elle se changera en une autre forme que la connaissance et, du

coup, il n'y aura pas de connaissance. Et si elle change toujours,

jamais il n'y aura de connaissance; d'où il suit qu'il n'exis-

tera ni de sujet pour connaître, ni d'objet à connaître. Si au

contraire le sujet connaissant existe toujours, comme l'objet

connu, comme le beau, comme le bien, comme chaque être

en particulier, ce dont nous sommes en train de parler me

paraît n'offrir aucune ressemblance avec un écoulement et

c une mobilité. En serait-il ainsi, ou bien la vérité est-elle dans

l'autre théorie, celle de l'école d'Heraclite et de beaucoupd'autres  

? C'est là, je le crains, un point difficile à élucider.

Peut-être n'est-il pas très sensé de s'en remettre, soi et son

âme, aux bons offices des noms avec une entière confianceen eux et leurs auteurs, pour affirmer, comme si l'on avait

quelque savoir, et décider contre soi-même et contre les

choses que rien de rien n'est sain, et que tout s'écoule et s'en

va comme vases d'argile ; bref, de se représenter les choses

d dans le même état que les gens affligésd'un catarrhe, en ju-

geant que tout est atteint de flux et d'écoulement. Il se peut,

Cratyle, qu'ilen soit ainsi

;il se

peutaussi

quenon. Il

faut donc procéder courageusement à un examen dans les

règles, sans rien admettre à la légère— tu es encore jeune

et à la fleur de l'âge—

,et après enquête me faire part, s'il

y a lieu, de tes découvertes.

Cratyle. — Je n'y manquerai pas. Sache-le pourtant,

Socrate : même en ce moment, je ne suis pas sans y réflé-

e chir, et à examiner ce problème qui me tracasse, je préfère

de beaucoup l'opinion d'Heraclite.

vague et lointaine par opposition à la vue directe du réel (Sxop) ;

476 c, le mot est défini : confondre soit en songe, soit pendant la

veille, la simple ressemblance avec l'objet lui-même. Mais la réserve

apparente avec laquelle la théorie des Formes est introduite dans le

Cratyle n'est peut-être qu'un procédé de l'ironie socratique. Dans ie

Charmide, i~3 a, Socrate présente de même comme un radotage

(/.r.ociv) et un rêve (ovao) des conclusions qui sont pourtant nettes.

1 . En particulier les sophistes et notamment Protagoras.

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i37 KPATTAOS 440 a

u.£Ta*niTtTEi TtavTa xP^IHaTOC <al u.rj8Èv jiévei. Et \ikv yàp

auTè toCto, f) yvoûCTic;,toO yvcoaic; EÎvai

jif) ^exaTutTiTEi,

u.evoi te av oleI f\ yvcoaiç Kal El'rj yvcocnç. Et 8è Kal auTèT6 eÎSoÇ ^ETaTÏLTTTEt TfjÇ yVCOCJECOC;, §U.a T* OtV ^ETaTtCTITOl b

Etç aXXo eÎSoç yvcocECOç Kal oùk avelt] yvcoatc- Et 8è cxeI

^ETaTtinTEi, &eI ouk aveut| yvcoaic;, Kal Ik toutou toO Xéyou

oûte tô yvcoaéu-Evov oute tô yvcùa8r)côu.Evov avEÎrj.

Et 8è

eotl U.ÈV cxeI tô yiyvcoaKov, ecxti 8è tô yLyvcoaK6^£vov, ecjti

8è tô KaXôv, ecjti 8è tô aya86v, ecjti 8è ev ekcxcttov tcov

ovtcov, oÔfcioi cpatvETai TaOTa ëu.oia ovTa, a vOv t^eîç

XÉyou.Ev, £ofj ouSèv ou£è $op6L TaOT* ouv Tt($TEpov ttote C

OUTCOÇ £)(El. f\ EKEIVCÙÇ QÇ OL TtEpl 'HpoCKXElTÔV TE XÉyOUCJlV

Kai otXXoi tioXXol, u.f)ou pcxSiov r\ ETTLaKÉij;aa8aL, oùSè Ttavu

voOv £)(ovtoc; àvBpcoTiou ETtLTpÉi|;avTa ôv6u.aaiv aÛTÔv Kal

tt^v aÛToO ^"XV BepaTTEÛEiv, TtETtLaTEUKÔTa ekeIvoiç Kal

Totq 8eu.évoiç aÛTa, BuoyypiC,EaQon &q ti EiScWa, Kal auToO

te Kal tcov ovtcov KaTayiyvcooKEiv coç ouSèv ûyiÈç ou8ev<5ç,

àXXà TTOCVTa COOTtEp KEpàu.t.a p£Î, Kal àTE)(VQC; COOTtEp ot

KaTappcp voaoOvTEÇ avSpcoTtoi oïjtcoç 0Ï£o8ai Kal Ta Ttpcx- d

yu.aTa SiaKEÎaSai, ûttô pEu^aToç te Kal KaTappou TtavTa Ta

Xpf)u.aTa E)(£a8at. ^lacoc; u.èv o3v 8^, co KpaTuXE, outcoç

e^ei, ïacoç 8é Kal oû\ ZKOTtEÎaSai ouvxpi*] àvSpEicoç te Kal

eS, Kalu.r) paSlcoç à7io8É)(Ea6at

— etl yàp véoç eT Kal

r|XiKlav £XEtÇ—

aKEipa^iEvov 8é, làv Euprjç, u.£Ta8i86vai. Kal

EU.OL.

KP.s

AXXà ttoli^oco TaOTa. ES jiÉvToi Îa6i, co EcoKpaTEÇ,

8ti ouSè vuvl àaKÉTTTcoc; EX", aXXa u.01 cjkottouu.£Vcù Kal

Ttpdy^aTa e'xovtl ttoXù u.aXXov Ikelvcùc; cfialvETai exelv coç 6

'HpockXeltoc; XÉyEL.

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440 e CRATYLE i38

Socrate. — Eh bien, mon camarade, à une autre fois !

Tu m'instruiras à ton retour. Aujourd'hui, comme tu en as

fait les préparatifs, mets-toi en route pour la campagne.Voici Hermogène qui t'escortera.

Crattle. — C'est entendu, Socrate. Mais, de ton côté,

tâche aussi d'y penser encore.

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i38 KPATYA02 440 e

ZO. ElaaOSiç toIvuv ^e, S ETCtîpE, StSà^Eiç, ETTEiSàv

fJKr|ç-vOv Se, aSoTTEp TiapEaiCEÙaaou, nopEÛou eiç àypôv

•npoTté^Ei Se cte kocI

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Ep(ioyÉvrjc; 88e.KP. TaOx' Icttou, a ZcbicpocTEç- àXXà <al où TiEipco eti

evvoelv TaOTarjSrj.

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ora. W.

CHARTRES. IMPRIMERIE DURAND, RUE FULBERT (5-ig3l).

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