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Observatoire des mutations des industries culturelles
Réseau international de chercheurs en sciences sociales
Série : « Structures et stratégies financières et industrielles »
À propos des mutations des stratégies
industrielles des entreprises médiatiques :
relecture de quelques travaux en économie
politique
Éric George
GRICIS
Université d'Ottawa
Résumé
Ce texte correspond à une synthèse de la lecture de travaux qui ont le plus souvent pour objectif
de faire le point sur les études dans le champ de l’économie politique de la communication. Il est
donc à dominante théorique. Dans celui-ci, l’accent a été mis sur l’analyse des mutations en matière
de structures et de stratégies industrielles et financières des entreprises médiatiques. Toutefois, nous
avons constaté au fil des lectures que l’essentiel du contenu portait sur les stratégies industrielles et
peu sur les structures et les aspects financiers. Ce sont donc surtout les stratégies industrielles qui
sont abordées dans ce texte qui est structuré de la façon suivante. Celui-ci commence par quelques
précisions d’ordre méthodologique. Puis nous rentrons dans le vif du sujet en mentionnant les
mutations qui semblent les plus importantes pour les chercheurs dont nous avons lu les écrits. Nous
verrons d’ailleurs que les questions d’ordre économique et politique sont souvent extrêmement
liées. Après quoi, nous mettrons l’accent sur plusieurs tendances à l’œuvre : premièrement, la
concurrence entre entreprises et la concentration de la propriété ; deuxièmement, le rôle central du
secteur de la distribution et troisièmement, la persistance de filières distinctes et la quête de la
« convergence ».
Texte d’une intervention donnée dans le cadre du groupe « Structures et stratégies industrielles et financières » de l’ACI Mutations des industries de la culture et de la communication, à l’Université de Paris 8 Saint Denis, jeudi 16 juin 2005.
Pour citer ce texte :
<Nom de l’auteur>, <Prénom de l’auteur>. <Date>. <« Titre du texte »>. Accessible à cette adresse : <URL de l’article>. Consulté le <Date de consultation>.
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À propos des mutations des stratégies industrielles des entreprises Éric George
médiatiques : relecture de quelques travaux en économie politique
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1. PRÉCISIONS D’ORDRE MÉTHODOLOGIQUE EN GUISE D’INTRODUCTION
Ce travail repose tout d’abord sur un choix en termes de lecture. J’ai notamment fait celui de lire au
moins autant, si ce n’est plus, de textes en anglais qu’en français, parce que vivant et travaillant en
Amérique du Nord, je pouvais ainsi être plus complémentaire que redondant par rapport aux choix de
l’ensemble des membres de l’équipe en optant pour cette solution. En la matière par exemple,
l’ouvrage de référence est incontestablement le livre de Vincent Mosco The Political Economy of
Communication paru en 1996. Un autre livre, plus récent, datant de 2004, m’a aussi servi d’ouvrage de
référence, celui dirigé par Andrew Calabrese et Colin Sparks The Political Economy of Culture. Côté
francophone, mes deux références de base ont été le numéro spécial de la revue « Sciences de la
société » intitulé Industries culturelles et société de l’information paru en 1997 et l’ouvrage de Bernard
Miège Les industries du contenu face à l’ordre informationnel qui date de 2000. Les autres références
ont été issues de lectures d’articles parus dans des revues académiques. Sur cette base, j’ai rédigé des
fiches de lecture en me concentrant sur l’analyse des mutations en matière de structures et de
stratégies industrielles et financières dans le secteur de l’industrie des communications. Enfin, j’en
profite aussi pour préciser que lorsque je parle de communication ou de médias, cela fait référence
aux industries de la presse écrite, de la radio, de la télévision et d’internet. Je ne parlerai d’autres
secteurs que de façon secondaire.
2. PREMIÈRES TENDANCES GÉNÉRALES
Dans cette première synthèse sur les mutations à l’œuvre au sein des structures et stratégies
industrielles et financières des entreprises médiatiques, il importe tout d’abord de resituer celles-ci
dans un cadre historique, économique, social plus vaste. Ainsi, Luis Cesar Bolano et Alain Rallet
introduisent leurs propos en estimant que l’ensemble des secteurs de la communication
(informatique, télécommunication et industries culturelles) ont connu d’importants bouleversements
depuis le début des années 70 et que ces changements ont eu lieu à la même époque que les
transformations globales du capitalisme parmi lesquelles ils mentionnent les « modifications
profondes des systèmes de production (flexibilité, innovation de process, réorganisation des grandes
entreprises..), du système financier et des relations internationales (crise financière,
internationalisation croissante de l’économie), de l’État et de sa capacité à piloter les régimes
d’accumulation » (Bolano et Rallet, 1998, p.1).
À ce sujet, on peut se demander si la tendance à distinguer systématiquement les industries
culturelles de l’ensemble du système économique en mettant l’accent sur leurs spécificités – ce qui est
pertinent en soi – à partir des années 70 n’a pas malheureusement conduit parfois à trop isoler le
secteur d’une analyse plus englobante des évolutions en cours autour de la transition entre le
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fordisme et le postfordisme. Comme le dit Alain Herscovici, à chaque mode de régulation
correspondent des Systèmes d’Information et de Communication (SIC) compatibles avec les logiques
sociales, politiques et économiques dominantes ; les SIC propres au fordisme se caractérisaient par
une logique d’inclusion, et par des objectifs liés à l’intégration nationale et sociale. Les SIC
correspondant au « post-fordisme » se caractérisent par une logique d´exclusion partielle (Herscovici,
1997). Pour leur part, Bolano et Rallet notent également que la communication de masse et les
industries culturelles ont été « transformées suite aux changements intervenus dans l’audiovisuel et
les télécommunications, ces deux secteurs étant ceux au sein desquels la régulation sectorielle a le
plus fortement changé. Ils pensent d’ailleurs que les modifications structurelles dans les
télécommunications constituent la base de transformations profondes dans l’ensemble de
l’économie » (Bolano et Rallet, 1998, p.2).
C’est aussi le point de vue de Dan Schiller (1999) qui montre de son côté que l’industrie des
télécommunications au sein de laquelle internet se développe est une composante du mouvement de
transnationalisation des activités économiques. L’avènement du capitalisme numérique (digital
capitalism) correspond à un certain nombre de métamorphoses, tant d’un point de vue social que
technique. Il a largement bénéficié de la mise en place de politiques dites néolibérales qui ont cherché
à faciliter le laisser faire sur les marchés, ce qui a d’ailleurs – paradoxalement – impliqué de nouvelles
réglementations, qui montrent bien que le processus est aussi politique qu’économique. La formation
d’entreprises transnationales en fait partie. Celle-ci a bénéficié et a participé au boom des
télécommunications.
Enrique Bustamante (2004) précise qu’au cours des dernières décennies, trois éléments importants
ont conduit à des changements importants : (1) la déréglementation qui a signifié un rôle plus faible de
l’État et du service public et une régulation par le marché. Dorénavant, l’État joue un rôle plus
secondaire par rapport au marché et sa dynamique ; (2) la concentration : celle-ci s’est développée
dans les années 90 à cause des promesses des réseaux numériques mais surtout de la compétition
croissante sur les marchés à la fois nationaux et internationaux ; (3) la globalisation des firmes et des
principes de management. Ici, le poids de la finance s’avère important avec une recherche du profit à
court terme. Les industries culturelles se convertiraient en institutions financières.
À la question, que s’est-il passé au sein des industries de l’information et de la communication au
cours de ces trente dernières années, Andrew Calabrese (2004) mentionne avant tout la
déréglementation, la privatisation et la libéralisation des télécommunications qui a eu lieu dans de
nombreux pays sur le modèle de ce qui s’est passé aux ÉU, le démantèlement d’ATT en 1984 pouvant
être considéré comme le coup d’envoi de cette tendance. Les industriels et les conseillers politiques
ont alors commencé à vanter les mérites des réseaux ouverts en cherchant à reconfigurer
l’environnement des nouveaux médias émergents en vue de favoriser la convergence d’industries
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traditionnellement séparées. Le terme de convergence est « lâché ». Nous aurons l’occasion d’y
revenir. Les compagnies de téléphone, les chaînes de journaux, les systèmes de télévision par câble et
par satellite, les compagnies d’informatique, les fournisseurs de matériels, les radio et télédiffuseurs,
les firmes de recherche et de développement, les chercheurs travaillant sur les médias et les
conseillers politiques se sont mis à partager tous un imaginaire de l’âge de l’information susceptible de
revigorer l’esprit du capitalisme. Dans ce contexte, le gouvernement est apparu au mieux comme un
mal nécessaire, estime Andrew Calabrese (2004, p.5).
L’auteur estime par ailleurs qu’à partir des années 90, deux tendances principales ont affecté le
développement des médias : premièrement, la révolution internet qui consiste dans la diffusion rapide
de réseaux numériques pour le travail et le loisir et, deuxièmement, l’harmonisation transnationale
des politiques de régulation des télécommunications. Aux États-Unis, 1996 a constitué une date
importante avec l’adoption du Telecommunications Act qui a constitué une étape importante dans la
libéralisation du secteur des télécommunications et au-delà des communications médiatiques. La
concentration, l’intégration verticale et la formation de conglomérats multimédias ont pu être
accélérées.
Cette nouvelle politique de libéralisation visait au milieu des années 90 à favoriser le développement
de ce qu’on appelait alors les « autoroutes de l’information ». À ce sujet, l’analyse de Marc Ménard
publiée en 1997 est fort intéressante. Celui-ci pensait que la situation était en train de devenir de plus
en plus complexe. Il envisageait l’hypothèse que l’on assiste à un élargissement substantiel de l’offre
de produits et services culturels et communicationnels sur les réseaux. Tout en ajoutant que ces
derniers ne devraient pas forcément entraîner systématiquement des transformations structurelles.
« Dans certains cas (programmation audiovisuelle, produits et services à nouveaux modes de
commercialisation, interconnexion individuelle), les effets structurants devraient se limiter à des
réorganisations dans les segments de distribution/diffusion et de la consommation, avec surtout, dans
un premier temps, des effets de substitution entre nouveaux et anciens modes et à une redistribution
des cartes entre acteurs. La mise à disposition de ces produits et services – pour lesquels des usages
existent déjà et dont la demande effective est en partie repérable – pourrait toutefois s’avérer
essentielle dans l’amortissement et la rentabilisation des nouvelles infrastructures » précisait-il
(Ménard, 1997, p.68). L’offre de certains nouveaux produits et services pourrait favoriser des
transformations substantielles, y compris en matière de production de contenus (production de
logiciels, de bases de données ou de produits multimédias) mais la concrétisation reste floue.
« Ce qui est clair, par ailleurs, lorsqu’on examine l’ensemble industriel concerné, c’est que cet élargissement
de l’offre, élément fondamental du processus en cours, est concomitant à deux autres tendances [...]. D’abord
on voit apparaître des segments intermédiaires [...]. On pense à la production de logiciels, aux services
informatiques, aux fournisseurs d’accès aux réseaux, aux courtiers en information, etc., ces activités étant
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fondamentalement reliées à la production de contenus, et donc fortement créatrices de valeur ajoutée.
Ensuite, on assiste à la multiplication des acteurs intervenant dans ce domaine, par création de nouvelles
entreprises (surtout dans le segment de la production de contenus), envahissement d’un champ donné par des
acteurs déjà présents dans d’autres domaines de la culture et des communications, ou envahissement par des
acteurs jusque-là totalement étrangers au domaine, mais qui pourraient y trouver la possibilité d’élargir la
commercialisation de leurs produits et services. Du point de vue des structures industrielles, l’implantation des
AI pourrait donc se caractériser par un triple mouvement de multiplication des produits et services,
d’apparition de segments intermédiaires et d’accroissement du nombre d’acteurs » (Ménard, 1997, p.68).
Quant aux stratégies des entreprises, son analyse semble des plus pertinentes au regard des
mouvements d’acquisition et de fusions qui ont eu lieu tant au Canada qu’à l’international au tournant
des années 2000 :
« À la multiplication d’acteurs et à l’affaissement des barrières traditionnelles entre activités s’ajoute une
égale multiplication et complexification des relations entre acteurs. Les achats d’entreprises, fusions,
participations minoritaires et conjointes, coopérations et alliances se multiplient déjà. Les acteurs les plus
importants, ceux qui disposent d’une certaine capacité financière et d’innovation, tentent même d’investir
l’ensemble des différents créneaux présentant un potentiel de croissance, de façon à assurer leur présence,
tout en répartissant les risques et les coûts. On assiste à l’amorce d’un passage d’une logique traditionnelle de
filières étroites, reliant de façon relativement stricte une technologie, un produit et des modes de production,
de distribution et de consommation particuliers, à l’allongement et à l’éclatement des filières et à la
multiplication des combinatoires entre ces éléments et, surtout, entre acteurs. En ce sens, la mise en place des
AI pourrait constituer une nouvelle phase dans le processus historique de ramification et de recoupement des
filières de la culture et des communications propice à la formation d’un vaste marché professionnel et grand
public de produits et services culturels et communicationnels, intégrant notamment ceux qui étaient jusqu’à
présent peu marchandisés et peu industrialisés, ou dont la diffusion répondait à une logique de service public.
La masse des investissements nécessaires, en matériel et plus encore en logiciels et contenus, dans le contexte
encore très grand d’incertitude dans lequel le processus se trouve actuellement en ce qui concerne la formation
de nouveaux usages sociaux, l’importance et le moment d’émergence d’une demande effective, les segments
ou tronçons de distribution à privilégier et les technologies les plus prometteuses, bref, sur les combinaisons
optimales à favoriser – explique ainsi en grande partie l’élargissement des activités des grands groupes et la
multiplication des stratégies d’alliances et de coopération de toutes sortes » (Ménard, 1997, p.69).
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3. LA CONCURRENCE ENTRE ENTREPRISES ET LE PROCESSUS DE CONCENTRATION
Comme je l’ai mentionné plus haut, les politiques de libéralisation ont largement contribué aux
transformations des paysages médiatiques aux États-Unis et ailleurs dans le monde. Aux États-Unis,
1996 a constitué une date importante dans l’histoire des médias avec le Telecommunications Act.
Robert W. McChesney (2003) estime qu’il ne convient pas de parler de passage d’une situation de
régulation vers celle d’un marché libre mais plutôt de l’évolution d’une régulation en faveur de
l’intérêt public vers une régulation pour servir des intérêts privés. Les conséquences se sont
notamment fait sentir à propos de la radio. Suite à l’assouplissement des règles en matière de
concentration, à partir de 1996, plus de la moitié des stations ont été vendues, ce qui a entraîné une
consolidation au sein de l’industrie. Une entreprise, Clear Channel, possède maintenant environ 1200
stations. Chaque marché local est dominé par deux ou trois entreprises qui se partagent les stations
entre elles. Ces entreprises ont supprimé dans les stations le contenu local, notamment le contenu
journalistique au profit d’un contenu national bon marché. La publicité et la commercialisation ont
augmenté. La radio, pourtant un média dont la production est bon marché, est devenue une vache à
lait pour quelques grandes entreprises selon McChesney (2003, p.129). Il n’y a pourtant pas de raison
économique pour justifier la concentration dans l’industrie car les coûts physiques de transmission
sont très faibles, précise-t-il. En fait, comme dans la plupart des autres industries médiatiques, tous les
bénéfices de la concentration du capital profitent directement aux actionnaires par une augmentation
notable des profits. On voit dès lors à partir de cet exemple que l’une des questions sensibles est celle
de la concentration du capital et de la concurrence ou de l’absence de concurrence qui en résulte.
À ce sujet, Jean-Guy Lacroix (1997) explique que les modalités de la concurrence dépendent du
nombre et de la taille respective des acteurs. Or, les secteurs de l’informatique, des
télécommunications, de la câblodistribution et de certaines industries de contenus se caractérisent
par la présence d’entreprises de petite taille ou de taille moyenne qui se développent dans le sillage
des grandes firmes avec une situation souvent précaire et en fonction de leurs stratégies. Il ajoute
que :
« Le plus important, toutefois, dans ce processus, c’est la façon dont cette nouvelle concentration est réalisée.
En effet, elle s’opère par la voie de discussions, d’ententes, de décisions réfléchies, minutieusement soupesées
et, c’est là le plus fondamental, découlant d’évaluations raisonnées, calculées et menées « collectivement »
entre partenaires en concurrence directe, indirecte ou convergente. Il s’agit donc d’une concentration
intentionnelle et consciente, discutée, dont la concrétisation suit un programme à partir de discussions et
d’ententes » (Lacroix, 1997, p.48).
Bernard Miège (2000) rappelle la cohabitation de grandes entreprises et d’entreprises de taille
beaucoup plus petite. Alors que les premières sont surtout présentes au niveau de la distribution, les
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secondes consacrent leurs activités à la production. Pour quelles raisons ? En fait, les industries
culturelles fonctionnent largement sur trois piliers. Premièrement, la dialectique du tube et du
catalogue (Miège, 2000, p.22) de façon à compenser les échecs par les succès, deuxièmement, sur la
recherche de nouveaux talents et le renouvellement des formes (2000, p.24) pour surmonter les crises
de créativité, troisièmement, sur la généralisation de la sous-traitance qualifiée (2000, p.24) qui se
concrétise par le maintien de petites entreprises notamment dans le secteur de la production. À ce
sujet, les disparitions sont nombreuses, soit par faillite, soit par intégration dans des firmes plus
puissantes mais d’autres entreprises se créent aussi. Les firmes monopolistes se positionnent
généralement à un endroit décisif du cycle de production – distribution :
« Si elles ne délaissent pas les tâches de la production, elles se concentrent sur la diffusion, position-clé entre la
production et la distribution finale, soit qu’elles sont soit seules à pouvoir assurer dans des conditions
techniques satisfaisantes l’acheminement rapide des produits grâce à des circuits perfectionnés (messageries,
centres d’acheminement, systèmes de remontées de recettes, etc.), soit qu’elles aient la capacité financière de
détenir d’importants catalogues de droits de diffusion. Les avantages qu’elles tirent de ce positionnement,
sont considérables et ont eu tendance à se renforcer avec la transnationalisation des marchés » (Miège, 2000,
p.25).
Au sujet de la tendance à la concentration du capital, Bernard Miège fait appel à Nicholas Garnham
selon lequel : « la concentration oligopolistique, prenant appui sur un réseau de petites firmes
satellites dépendantes et chargées de la production, est d’ailleurs une tendance croissante des
industries culturelles qui connaissent un haut niveau de « contrôle oligopolistique » sur les marchés
nationaux mais aussi mondiaux, ainsi qu’un haut niveau d’intégration horizontale avec des
conglomérats de plus en plus puissants » (Miège, 2000, p.36).
Enrique Bustamante (2004) signale que c’est au cours de la seconde moitié des années 90 que la
tendance à la croissance et à la diversification des groupes multimédias et multinationaux a augmenté
lorsque la révolution numérique et internet ont pris de l’ampleur. Ces stratégies ont surtout impliqué
des entreprises nord-américaines, européennes et japonaises. Elles peuvent être interprétées comme
des mouvements défensifs mais aussi comme une réponse à l’introduction d’acteurs puissants et à
prétention hégémonique venant de l’extérieur du secteur des contenus. Mais ces stratégies peuvent
aussi être interprétées comme la quête de la colonisation des nouveaux médias et des marchés
attenant par l’acquisition de copyrights et du contrôle du secteur de la distribution avec une
intégration verticale à travers l’ensemble de la chaîne de valeur. Cela permettrait aux transnationales
d’augmenter encore plus la domination inévitable sur les petites et les moyennes entreprises, que
celles-ci soient anciennes ou récentes.
Ces stratégies demeurent toutefois très fragiles, poursuit Bustamante. En témoignent les échecs
des groupes Kirch, Maxwell et Vivendi. Cela montre en fait qu’il demeure difficile d’investir un secteur
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différent de celui d’origine. La tendance vers la formation d’oligopoles devrait néanmoins se
poursuivre. À cause des investissements coûteux et de la logique du marché, nous allons plutôt vers la
constitution d’énormes et puissants intermédiaires (portails, fournisseurs de services internet (FSI),
plateformes de TV payante). Ceux-ci auront parfois une dimension internationale et faciliteront la
transnationalisation de la culture et de la communication.
Mais au fait ceci est-il véritablement nouveau ? En mentionnant les travaux de Smith (1991) et de
Tunstall (1977), Vincent Mosco (1996) rappelle que les entreprises médiatiques transnationales sont
aussi anciennes que les médias de masse eux-mêmes. La production et la distribution de nouvelles au
19e siècle était contrôlée dans une large mesure par trois conglomérats internationaux : la britannique
Reuters, la française Havas et l’allemande Wolf qui divisèrent le monde en marchés régionaux
monopolistiques pour une longue période. Cette tendance s’est généralisée au cours des dernières
décennies au moment où les firmes de communication cherchaient de nouveaux marchés pour leurs
produits, une main d’œuvre meilleur marché et des lieux où la surveillance du gouvernement et la
régulation seraient minimales. En conséquence, on a abouti à la formation de ce que Anthony Smith
(1991) appelle des « behemoths », à savoir Time Warner, Matsushita, Bertelsmann, News Corp.,
Fininvest, Hachette, Disney, et Sony entre autres. Ces firmes sont intégrées verticalement afin d’avoir
le contrôle de la production, de la distribution et de la promotion, horizontalement à travers la
possession d’un ensemble de produits médiatiques, incluant le hardware et le software et afin d’avoir
un avantage compétitif grâce à la division internationale du travail. Vincent Mosco estime pourtant lui
aussi que la forme du conglomérat n’est pas forcément la forme entrepreneuriale la plus efficace à la
restructuration globale. En témoignent l’effondrement de l’empire Maxwell et les dettes de Time
Warner. « The integrated conglomerate benefits from competition within, as it flexes its market
power without » (Mosco, 1996, p.179). Mais ceci a un prix. La forme du conglomérat permet une
énorme flexibilité, mais peut aussi développer des tendances bureaucrates.
Vincent Mosco revient ensuite plus précisément sur la concentration en proposant plusieurs
définitions. Il signale notamment la définition traditionnelle qui met l’accent sur les parts de marché.
C’est celle-ci qui est appliquée dans les processus de régulation. Cette approche met l’accent sur le
marché et aide à déterminer dans quelle mesure celui-ci est ouvert est à une multiplicité de produits,
tels que des programmes de télévision et des journaux. L’unité d’analyse est la firme. Ainsi, deux
journaux de deux entreprises différentes seront considérés comme concurrents alors que deux
journaux de la même entreprise ne seront pas considérés comme concurrents. Une définition plus
large met l’accent sur la taille de la firme et sur la diversité des produits sur le marché. Il s’agit de
porter l’attention au degré de concentration de la propriété qui permet à des firmes d’utiliser leurs
ressources sur la base d’opérations sur un ensemble de marchés. Cela dit, ces deux approches ont
pour point commun de mettre l’accent sur la propriété comme mesure centrale. Une exception
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consiste à faire une analyse des conseils d’administration des entreprises. Plutôt que d’examiner qui
possède le média, cette approche consiste à établir le portrait des relations entre membres des
directions d’entreprises. Formellement, les conseils d’administration sont sélectionnés par les
actionnaires mais en pratique ce sont souvent les membres du conseil qui décident eux-mêmes. Les
dirigeants sont, soit des membres internes, soit des membres externes. Les études sur les conseils
d’administration des entreprises examinent les liens qui relient les membres des conseils à une
responsabilité fiduciaire. On distingue des liens directs entre deux entreprises à travers la participation
d’un membre de l’exécutif d’une autre compagnie au conseil d’administration de l’entreprise et des
liens indirects quand deux compagnies sont reliées à travers la participation commune d’un membre
d’un conseil d’administration à une troisième firme. Ainsi, IBM et Xerox sont directement connectées à
Time Warner par l’intermédiaire de leurs représentants qui ont un poste au conseil de Time Warner.
IBM et Xerox sont aussi de cette manière indirectement reliées entre elles. De cette façon, la
concentration des médias peut être étendue à travers les responsabilités partagées en vue de suivre
les performances des groupes qui se concurrencent sur le marché. En fait, les chevauchements entre
conseils d’administration fournissent l’opportunité de relations de coopération entre représentants de
firmes qui sont normalement concurrentes. D’autres études ont mis l’accent sur d’autres types de
liens comme les clubs privés et les associations professionnelles qui contribuent à reconfigurer les
rapports de pouvoir au sein des entreprises et entre les entreprises. Mosco attire l’attention sur
l’intérêt de réfléchir sur les stratégies d’entreprises à partir de ce point de vue.
Il signale aussi que des recherches récentes ont mis l’accent sur l’importance des alliances qui ne
passent pas forcément par des fusions. Il en est ainsi des partenariats corporatifs et des alliances dites
stratégiques pour des projets spécifiques comme des coproductions ou le développement de
nouvelles technologies. Cela inclut aussi les arrangements de merchandising qui lient des entreprises
par le marketing et les firmes de merchandising. Ces pratiques ne sont pas nouvelles, mais elles sont
devenues plus courantes récemment selon Vincent Mosco. Ce type d’alliance permet de restructurer
des opérations internes et leurs relations avec l’extérieur sur une période déterminée comme la durée
d’un projet. Ces arrangements limités peuvent prendre la forme de nouvelles entreprises. À titre
d’exemple, Time Warner, Telecommunications Inc. et Microsoft ont formé une alliance pour établir
des standards pour distribuer les nouvelles générations de programmes interactifs avec la création
d’une entreprise Cablesoft. Ce type d’alliances a surtout eu lieu entre compagnies de
télécommunication, firmes de télévision par câble, conglomérats spécialisés dans le divertissement et
entreprises informatiques en vue de prendre position sur le marché et de développer une expertise en
matière de création de produits spécifiques autour de la promesse de la convergence.
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4. LE RÔLE CENTRAL DES ENTREPRISES DE DISTRIBUTION
Dans ce contexte, où se situe le pouvoir ? C’est une question souvent centrale dans les recherches
en économie politique de la communication. Or, avec le développement de ce que l’on appelle en
anglais les « new media » (nouveaux médias en français. En fait, il s’agit surtout d’internet et de ses
applications), Robin Mansell (2004) estime que nous avons assisté à un relatif retrait de l’économie
politique en termes d’analyse, ce qui témoigne que la dynamique sociale et économique d’ensemble
de la production et de la consommation des nouveaux médias continue d’être l’objet de spéculations.
Le nombre d’études consacrées aux usages des applications et au contenu des nouveaux médias et
avec un fort accent sur des méthodes qualitatives favorisant des points de vue très situés et
spécifiques ont contribué à développer le corpus de travaux sur les aspects sociologiques des
nouveaux médias mais aussi tendu à éclipser les travaux effectués dans la perspective de l’économie
politique.
Elle constate par exemple que la tendance est plutôt à mettre l’accent sur l’abondance et la variété
des produits et des services et à se concentrer sur la promotion de l’accès sans porter une attention
soutenue aux structures et aux relations de pouvoir qui sont à l’origine des services et produits.
Certes, elle reconnaît qu’il y a des changements importants à propos de l’offre proposée par les
nouveaux médias et dans la façon dont nos vies sont médiées par les technologies et les services. Mais
il y a toujours une notion de rareté à propos de la production et de la consommation de nouveaux
médias. Cette rareté est reproduite comme résultant d’articulations variées de relations de pouvoir.
Elles contribuent au maintien d’inégalités profondes dans les soi-disant sociétés de l’information et du
savoir.
En conséquence, si les ressources sont rares et si le pouvoir est distribué inégalement dans la
société, les questions clés deviennent celle de l’allocation et du contrôle des ressources et celle de
leurs conséquences pour l’action humaine. Les distinctions entre les médias reposent en fait sur le
comment et le pourquoi de l’existence de conditions de rareté et l’ampleur de leur rôle dans la
reproduction des inégalités sociales. La rareté doit être crée par exemple par le copyright, le contrôle
de l’accès, la promotion de l’obsolescence, la formation et la vente d’audiences et par le fait de
favoriser certains nouveaux médias par rapport à d’autres.
Alors, à la question du pouvoir, il semble bien qu’une grande majorité des réponses estiment qu’il
réside au niveau de la distribution. Auteur avec Jean-Guy Lacroix du concept de « logique de club » au
début des années 90, Gaëtan Tremblay a rappelé quelques années plus tard la pertinence de celle-ci
face aux logiques éditoriale et de flot (1997). Ainsi, la logique de club repose essentiellement sur l’idée
de la consécration de l’hégémonie de la distribution. « Elle réduit considérablement l’espace de
fonctionnement de la logique de flot en l’intégrant et elle se présente en compétiteur de la logique
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éditoriale en se substituant à la production matérielle et au réseau de distribution par points de vente.
Elle restructure les relations entre création, production, distribution et consommation. Elle relativise le
rôle du programmateur. En consacrant l’hégémonie de la distribution, elle met à l’avant-scène le rôle
du serveur humain et/ou électronique. Dans cette logique, c’est le serveur qui occupe la fonction
principale : il négocie des droits de diffusion ou de distribution, élabore des stratégies de marketing et
offre, contre abonnement, un ensemble de services (y compris de navigation) et de produits pour un
temps donné d’utilisation » (Tremblay, 1997, p.20). De plus, elle « apparaît pour l’instant comme une
forme institutionnelle avancée de la marchandisation de la culture, de l’information et de la
communication particulièrement adaptée à la convergence de la radiodiffusion, des
télécommunications et de l’informatique » (Tremblay, 1997, p.21). En témoigne le rôle central des
câblodistributeurs, voire des opérateurs de télédiffusion par satellite. Toujours dans les années 90, au
Canada, d’autres chercheurs s’intéressant aux industries culturelles (Finn, McFadyen et Hoskins, 1994)
ont estimé que dans le cadre du renforcement de la compétition entre firmes, les organisations
avaient intérêt à ne pas uniquement porter leur attention sur les opérations de création et de
contenus. Elles avaient aussi intérêt à consacrer plus de moyens au marketing et à la distribution, au
développement de nouveaux produits, aux stratégies internationales, à l’analyse organisationnelle et
aux aspects financiers.
Dans un article paru dans la même revue, Jean-Guy Lacroix s’est aussi interrogé sur les acteurs
principaux. Il rappelle que dans le processus de mise en place des autoroutes de l’information (AI), « la
scène a été dominée dès les débuts par les transporteurs de signaux, principalement les opérateurs de
télécommunications et les câblodistributeurs, autrement dit ceux qui mettent en place les réseaux à
large bande et diffuseront les produits et services sur les AI » (Lacroix, 1997, p.48). Puis il ajoute que
les acteurs informatiques vont devoir jouer un rôle croissant à travers les logiciels nécessaires pour
développer et mettre en place les interfaces d’accès et faire fonctionner adéquatement les réseaux et
les serveurs vidéo. Enfin, il sera nécessaire que pour que de nouveaux services circulent sur les AI, la
production de contenus soit augmentée (Lacroix, 1997, p.48).
Marc Ménard appuie ce point de vue. Ce sont tout d’abord les transporteurs de signaux, opérateurs
de télécommunications et câblodistributeurs, qui ont été les acteurs principaux lors de la mise en
place des autoroutes de l’information car ceux-ci installent les réseaux à large bande et vont donc être
les distributeurs des produits et services sur les AI. Toutefois, il estime que d’autres acteurs ont une
place croissante : « les dépenses en logiciels nécessaires pour développer et mettre en place les
interfaces d’accès et faire fonctionner adéquatement les réseaux et les serveurs vidéo seront
massives, probablement supérieures aux seules dépenses, déjà colossales, qu’implique la mise en
place des réseaux physiques à large bande. Celles qui devront (ou qui devraient) être consacrées à la
numérisation des contenus existants, en particulier du patrimoine culturel, seront également
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massives. Enfin, pour qu’une gamme substantielle de produits et services puisse éventuellement
circuler sur les AI, la production de contenus devra être fortement augmentée » (Ménard, 1997, p.55).
Il conclut qu’en conséquence, l’industrie de la production informationnelle et culturelle devrait avoir
un poids croissant au fur et à mesure que les AI seront créées.
Bernard Miège (2000) met l’accent sur le fait que les firmes tendent à développer des stratégies
multi-support qui concernent à la fois le hors ligne et le en ligne. Mais les supports matériels ne vont
pas forcément laisser place au en ligne, les stratégies des firmes tenant compte de facteurs variés :
habitudes de consommation, gestion de droits, rentabilisation de circuits de distribution existants,
hésitations à s’engager massivement dans de nouveaux produits. Deux raisons expliquent selon
Bernard Miège (2000) les stratégies des entreprises qui cherchent à être présentes à l’étape de la
diffusion :
(a) les réseaux et outils de communication vont donner une impulsion sans précédent à
l’internationalisation des flux de produits et des marchés correspondants ;
(b) les conditions d’acheminement des produits, sans base matérielle, ceux-ci étant éventuellement
même « tronçonnés ».
De telles conditions peuvent certes au départ favoriser de petits joueurs mais assez rapidement,
elles devraient plutôt favoriser les grands groupes. L’enjeu essentiel demeure ici le lien entre
production et consommation à travers l’établissement de liens les plus étroits possibles. Il mentionne
un ouvrage de Robert McChesney et Edward Hermann The global media – The new missionaries of
corporate capitalism paru en 1997 et dans lequel ceux-ci classent les groupes en considérant d’abord
ceux qui sont dominants : News Corporation, Time Warner, Disney, Viacom, Bertelsmann, TCI puis
deux autres cercles avec tout d’abord Universal, Sony, Polygram, General Electric et ensuite, à une
échelle plus réduite, Canal Plus, Havas et Lagardère, Mediaset, Televisa, Globo, Kirch. Évidemment, à
l’instar des deux auteurs étatsuniens, il ajoute immédiatement que cette catégorisation est évolutive
mais aussi que « le but fondamental des futures fusions et acquisitions est le contrôle de la
transmission des trois produits de base des télécommunications : la voix, les données et la vidéo »
(Miège, 2000, p.90).
Selon Enrique Bustamante (2004), la concentration et la commercialisation favorisent la
multiplication des stratégies de distribution et de promotion. L’objectif ne consiste pas à vendre ce qui
est produit mais à produire ce qui peut être vendu selon l’auteur qui mentionne ici les travaux d’Achille
(1997). Le danger consiste ici à voir se répandre une culture du blockbuster qui symbolise la
standardisation de la production pour viser la consommation de la majorité et ainsi menacer la
créativité innovante, minoritaire, ainsi que les entreprises de taille petite ou moyenne. À propos de la
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créativité, les stratégies des grands conglomérats semblent s’orienter vers la fabrication de contenus
capables d’être formatés pour toute plateforme technologique, tout système de support ou de
distribution. On serait alors à l’opposé de ce que permettent les technologies numériques en termes
de démocratisation de la création et de l’expression en réduisant les coûts de création de contenu et
des services. Toutefois, selon Enrique Bustamante (2004), la distribution n’a pas pour le moment été
sérieusement restructurée. Dans le cas des ventes hors ligne, il est toujours nécessaire de recourir à
des distributeurs classiques. En ce qui concerne les ventes en ligne, de nouveaux intermédiaires sont
apparus dans l’environnement numérique. Sur internet, les portails, les outils de recherche, les
fournisseurs de contenus et les fournisseurs de services concentrent et orientent le trafic de masse
mais ils assument aussi des fonctions nouvelles de packaging et de commercialisation.
Dan Schiller (1999) accorde aussi une grande importance à la distribution en mentionnant
notamment le rôle d’internet en la matière. Jusqu’à maintenant, chaque média avait son propre
moyen de distribution, qu’il s’agisse de la presse, des magazines, de la radio ou de la télévision. Mais
maintenant, internet offre une plateforme technique commune à l’ensemble de ces médias, estime-t-
il. En tout cas, il s’agissait de son point de vue en 1999. Cela expliquerait par exemple les rencontres
entre dirigeants de stations et réseaux de radio et responsables de l’industrie musicale en vue de faire
en sorte que la radio demeure le principal véhicule de promotion de la musique. Certes Schiller
reconnaît que les chiffres de téléchargement de fichiers musicaux, de commandes de livres et d’achats
de places de spectacles à distance sont restés modestes au cours de la deuxième moitié des années 90
mais il pense aussi que ceux-ci sont porteurs de changements. Le Web en tant que plateforme s’avère
idéale pour les conglomérats qui se sont formés pendant les quinze dernières années. Les mega media
intégrés verticalement comme Time Warner, Disney et News Corporation ont été créés afin de remplir
l’objectif stratégique de promotion croisée et de développement de programmes multi-médias. Dans
leur quête de la maximisation des profits, les entreprises ont cherché à créer des programmes et à les
diffuser au-delà des frontières habituelles entre filières. Toutefois, s’engager dans la distribution par
internet pose un défi à ces entreprises. D’une part, en tant que fournisseurs de contenus, ils doivent
faire en sorte que leurs produits soient disponibles pour des audiences éventuellement différentes de
celles de leurs réseaux de distribution tout en évitant de cannibaliser leurs propres structures. D’autre
part, en tant que possesseurs de réseaux, ils doivent s’assurer de distribuer les services disponibles.
Schiller estime que de toute façon les grandes entreprises n’ont pas le choix. En témoigne le fait que
dès 1998, plus de 2700 journaux à travers le monde avaient un site web (60% étaient basés aux ÉU), 47
des 50 magazines payants les plus importants avaient aussi lancé leur site. Il en était de même pour
800 stations de télévision, plus de 150 canaux spécialisés et des centaines de stations de radio qui
proposaient du sport en direct aussi bien que des canaux musicaux. En mai 1998, 30 000 pages web
correspondaient à du streaming (transmission vidéo). Les enjeux sont aussi importants pour les
fabricants de matériel audiovisuel (téléviseurs, magnétoscopes, lecteurs de CD, etc.).
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Schiller estime qu’en fait, internet est la plateforme qui doit permettre de gérer et de stabiliser les
relations entre les programmes et les audiences (Schiller, 1999, p.115). Plusieurs stratégies ont été
développées à ces fins : les logiciels de navigation, les services utilisant ladite technologie push (du
pousser littéralement), les exclusivités de licences, l’agrégation de sites en des thèmes cohérents et
l’obsession émergente pour le Top-ten des sites portails. Cet aspect ne doit pas être coupé d’une autre
tendance importante, le développement de la publicité sur Internet. À propos du marketing, nous
pourrions assister à des modifications importantes : d’un marketing national à un marketing
transnational, d’un marketing de masse à un marketing de classe, et d’un marketing probabiliste à un
marketing individualisé (Schiller, 1999, p.135).
En consacrant ses recherches au cinéma, Janet Wasko (2004) souligne également le rôle des
distributeurs. Elle note que depuis les années 50, les majors sont devenues des parties de
conglomérats aux activités diversifiées, ne dépendant plus uniquement des films pour leurs revenus
mais se diversifiant dans la production culturelle, depuis les produits audiovisuels aux parcs à thème.
L’intérêt pour cette diversification a cru à la fin des années 80 avec de nombreuses opérations de
fusions et de consolidation. « La déréglementation, la privatisation, les développements techniques et
l’ouverture de nouveaux marchés internationaux ont contribué à cette augmentation de la
concentration » (Wasko, 2004, p.143). [« Deregulation, privatization, technological developments, and
the opening of new international markets contributed to this concentrated growth »]. Les
investisseurs étrangers commencèrent à regarder du côté d’Hollywood pour la même raison
qu’Hollywood commençait à regarder du côté des marchés étrangers. À la fin du 20e siècle, plusieurs
des majors étaient possédées par des compagnies étrangères : Columbia/Tri Star par Sony, Universal
par Vivendi, Fox par News Corp. Janet Wasko estime qu’Hollywood est dominée par une poignée
d’entreprises qui détiennent du pouvoir grâce à la distribution de films qui constitue une activité
centrale dans l’économie du cinéma. En dépit des risques, les compagnies ont réussi à survivre et à
faire du profit. En tant que conglomérats diversifiés, les majors peuvent aussi compter sur leurs
énormes réserves de films et un accès au capital.
La plupart des compagnies qui ont essayé de concurrencer les majors ont échoué. Des tentatives
ont été effectuées par National General et Cinerama dans les années 70 et 80. Plus récemment, il y a
eu Orion, DEG, Lorimar, Embassy et Allied Artists mais les majors continuent de dominer. En témoigne
le fait que 8 compagnies concentrent 95% des revenus du box office aux ÉU et au Canada.
Historiquement, on pouvait considérer qu’il y avait trois types de studios : les majors – Paramount,
20th Century Fox, Warner, Universal, Disney et Columbia – les entreprises qui ont un rôle en matière
de production ou distribution un peu plus faible – MGM/UA, Orion, Carolco et New Line Cinema – et les
indépendants. Mais il y a maintenant bien peu de petites majors. Des entreprises comme Miramax et
New Line ont été rachetées par des majors. D’autres, comme Orion, sont tombées dans l’oubli. La
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seule qui a émergé récemment sur la scène aura finalement été Dreamworks. Face à ce manque de
compétition, les distributeurs répondent que l’économie du cinéma est trop risquée. On estime par
exemple qu’environ 5% des films réalisés à Hollywood ont permis de gagner environ 80% de la totalité
des profits de l’industrie au cours de la dernière décennie (Wasko, 2004).
Toutefois, faire des films est nécessaire pour toutes ces entreprises même s’ils ne rapportent pas
directement d’argent car le lancement de parcs à thème ou de chaînes de télévision spécialisées
repose souvent sur les films distribués en salles. Avoir un film qui marche très fort permet de faire de
très bonnes affaires dans d’autres secteurs. Et pourtant, les revenus des films peuvent être
relativement faibles parmi l’ensemble des activités : ainsi, le studio Disney génère 23,6% des revenus
du groupe et seulement 2,7% des revenus d’exploitation. La filière divertissement d’AOL Time Warner
génère 21,7% du total des revenus du groupe et seulement 9,1% des revenus d’exploitation. Pour
conclure, Janet Wasko rappelle que la seule raison d’être des studios est finalement de faire de
l’argent et que cela n’a jamais changé. Elle cite alors Taylor qui dit que les studios offrent du
divertissement mais qu’il n’est pas nécessaire d’avoir des studios pour produire du divertissement,
pour faire des films. Les studios sont là pour l’argent (Taylor, 1999, p.59).
5. LE MAINTIEN DE FILIÈRES DISTINCTES ET LA QUÊTE DE LA « CONVERGENCE »
Dans les années 90, des équipes de recherche dirigées en France et au Québec par Bernard Miège,
Pierre Mœglin, Jean-Guy Lacroix et Gaëtan Tremblay ont travaillé sur la convergence en proposant
d’aborder cette notion d’un point de vue à la fois constructiviste et dialectique. Jean-Guy Lacroix,
Bernard Miège, Pierre Mœglin, Patrick Pajon et Gaëtan Tremblay en parlaient en ces termes : elle
« résulte d’efforts concertés, de luttes de pouvoir et de conflits qui s’inscrivent dans le cadre des
logiques structurant les filières actuelles de la radiodiffusion et des télécommunications » (Lacroix et
ali., 1992, p.84-85). Alors qu’un certain nombre d’acteurs sociaux – des agences gouvernementales,
des entreprises privées, des groupes de pression ou des usagers – en font la promotion, adoptent des
stratégies visant à la mettre en place, d’autres acteurs sociaux n’y trouvent pas d’intérêt et mettent
l’accent sur le maintien de distinctions entre filières. En conséquence, ils estimaient ce qui suit :
« La convergence technologique et l’intégration des services constituent donc des objectifs qui connaissent
des contraires – la divergence, la distinction des filières et la concurrence entre elles – paraissant tout aussi
souhaitable aux yeux de certains groupes d’acteurs. Enjeu social plus qu’aboutissement fatal, la convergence
n’emprunte pas nécessairement les mêmes voies d’un contexte à l’autre. Les lois, les politiques
gouvernementales, mais aussi la structure industrielle des pays en influencent profondément l’évolution, de
même que celle des savoirs et des habitus qui y sont liés » (Lacroix et ali., 1992, p.84-85).
Quelques années plus tard, deux des membres des équipes, Gaëtan Tremblay et Marc Ménard
adoptent des points de vue nuancés sur la question. Gaëtan Tremblay estime que « la production de
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produits culturels et informationnels ainsi que de services de communication fait appel à des savoir-
faire spécialisés et reste encore largement fragmentée. On peut même envisager qu’elle le reste
encore longtemps » (Tremblay, 1997, p.15). Marc Ménard (1997, p.55) rappelle qu’il est pertinent de
bien distinguer les filières – presse, édition, disque, spectacle, cinéma, radio, télévision,
télécommunications, etc. – qui se sont d’un point de vue historique, développées et structurées de
façon relativement autonomes. Il propose de distinguer trois segments :
1) le segment de la production de contenu qui comprend la production culturelle
« traditionnelle » (presse, édition, musique, audiovisuel et publicité), la « nouvelle »
production culturelle (élaboration de progiciels, production de bases de données,
production multimédias) et un ensemble de productions informationnelles susceptibles
d’emprunter éventuellement les AI (services financiers, services aux entreprises, services
publics et para-publics, commerce).
2) le segment de la distribution/diffusion qui comprend la distribution de supports matériels
incorporant de l’information culturelle ou autre, qu’ils soient traditionnels (journaux,
revues, livres, disques, cassettes, films, vidéos) ou « nouveaux » (disquettes, CD-ROM, CD-I,
vidéodisques) ainsi que la diffusion de signaux électroniques incorporant de l’information
(diffusion hertzienne, câblodistribution, téléphonie conventionnelle et mobile, diffusion
par satellite, réseaux informatiques).
3) le segment des modes de consommation avec la consommation de supports matériels (au
moyen de ventes au détail, postales ou directes, de la location, de la distribution gratuite
ou à frais indirects – publicité), et celle de signaux électroniques (réception libre, à
paiement indirect – publicité –, par abonnement à des services de base ou spécialisés, ou
par paiement à la carte ou au compteur).
Néanmoins, Gaëtan Tremblay ajoute qu’on voit « émerger, avec les nouveaux produits multimédias,
des entreprises dont les objectifs impliquent la concertation de divers savoir-faire appartenant à
l’informatique, à la culture, à l’éducation et aux communications » (1997, p.15). En conséquence, même
s’il n’y a pas d’intégration complète des secteurs d’activités, il est possible d’envisager dans le
domaine de la production une certaine convergence. Et dans le secteur de la distribution, certaines
entreprises poussent en faveur de la possibilité de proposer des offres intégrées. Cette éventualité
pourrait alors « donner lieu à certaines pratiques de consommation qui renforcent les intersections
croissantes entre la culture, l’information et la communication » (Tremblay, 1997, p.15). Marc Ménard
va dans le même sens en ajoutant que, suite à des évolutions culturelles, technologiques et
économiques et via des processus de marchandisation et d’industrialisation, les filières se sont
modifiées, recomposées et élargies, en plus de se recouper à certains points de leurs chaînes
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respectives. Il en a résulté un double mouvement de ramification et de recoupement qui fait que les
contours d’une filière donnée apparaissent souvent flous (Ménard, 1997, p.55).
Bernard Miège dit de son côté que la tendance est à la multi-médiatisation des activités des
groupes, et ce quelles que soient leurs activités antérieures. C’est là aussi qu’il est pertinent de parler
de convergence (beaucoup plus qu’à un niveau technique). Il estime que « cette construction s’opère
essentiellement à l’initiative de quelques grands groupes de communication, ayant les moyens de
nouer des alliances au-delà des frontières nationales et régionales ; dans cette construction, les États
sont de plus en plus absents ou, ce qui est équivalent, de moins en moins écoutés » (Miège, 2000,
p.94). Toutefois, il est très prudent quant à la convergence en termes de contenu car il tire un bilan
très mince des tentatives de développement de produits réellement multimédias.
De façon générale, on pourrait dire à la suite de Jean-Guy Lacroix, Bernard Miège, Pierre Mœglin,
Patrick Pajon et Gaëtan Tremblay (1992) que les stratégies des entreprises se développent le plus
souvent à l’intérieur de structures, de logiques industrielles qui résultent de l’interaction entre la
tendance inhérente au capitalisme à intégrer toujours plus de champs susceptibles de mettre en
valeur le capital et les conditions politiques et économiques qui permettent l’industrialisation et la
marchandisation des produits informationnels et culturels. Néanmoins, il arrive à certains moments
que certains acteurs tiennent un rôle plus important qui contribue à restructurer un secteur. À ce
sujet, « le potentiel de restructuration des acteurs dépend de leur poids relatif (leur taille et leur
position dans le marché), de leur capacité économique (leurs performances économiques, leur place –
stratégique ou non – dans une conjoncture de réorganisation), de leur volonté de restructuration et
d’innovation, qui est fonction, à la fois de leur intérêt pour la convergence et l’intégration et leur vision
du devenir de l’industrie ou de la branche industrielle » (Lacroix et ali., 1992, p.90). D’ailleurs, les
acteurs qui devraient être plutôt favorables à la convergence devraient être ceux qui se trouvent en
position de force, voire de domination, dans un secteur ou dans un pays, en prenant l’exemple des
opérateurs de télécommunications. À moins que la réglementation en vigueur ne s’oppose à ces
mouvements.
Vincent Mosco (1996) mentionne aussi le fait que de nouveaux acteurs ont tendance à rejoindre les
entreprises traditionnelles qui produisent et distribuent du hardware et des services. Mené par le
secteur des services financiers, cela inclut les puissances industrielles traditionnelles (par exemple
General Motors), les firmes de revente au détail (comme Sears) et mêmes des compagnies d’énergie
qui ont déjà une expertise en matière de réseaux et qui se donnent pour but de pouvoir utiliser cette
expertise pour gérer l’espace des flux de communication. Vincent Mosco estime qu’en conséquence, il
devient très difficile d’identifier des distinctions claires pour délimiter le secteur des industries de la
communication.
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« Qu’est-ce qui sépare une entreprise étatsunienne d’une entreprise japonaise ou une compagnie de
téléphone, du câble ou d’informatique ou un producteur d’un consommateur ? Toutes ces différences tendent
à disparaître alors que nous prenons la direction d’un marché global des services électroniques » (Mosco, 1996,
p.198) [« What separates an American from a Japanese compagny, or a telephone from a cable from a
computer company, or a producer from a consumer ? All of these differences are tending to desappear as we
move into a global electronic services marketplace »].
6. QUELQUES CONSTATATIONS EN GUISE DE CONCLUSION
Il apparaît impossible de conclure un tel travail, surtout étant donné que celui-ci n’est pas basé sur
un corpus exhaustif à propos des recherches en économie politique de la communication. Toutefois,
j’ai effectué deux constatations au cours de la recherche. Premièrement, il est parfois difficile de
séparer nettement les contenus qui portent sur des aspects d’ordre économique et des aspects
d’ordre politique. En conséquence, cela conduit à s’interroger sur la pertinence de la coupure entre les
deux axes dans le cadre du programme de recherche. Non pas que cette coupure ne soit pas
pertinente en termes d’analyse. Mais il est possible de se demander s’il ne serait pas plus « efficace »
que dans certains cas, les fiches de lecture concernant les dimensions économique et politique ne
soient pas rédigées simultanément par les mêmes chercheurs. Deuxièmement, il est surtout question
des stratégies industrielles et peu des structures industrielles et des stratégies financières dans ce
texte. Ceci est peut-être lié aux origines disciplinaires des chercheurs sélectionnés par nos soins. Mais
quoiqu’il en soit, il serait sans doute intéressant de regarder du côté des recherches en économie
industrielle et en économie financière afin de voir si des analyses ont porté plus spécifiquement sur les
entreprises de communication.
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