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X.Henry/XH- Observatoire des contentieux OBS n° 13 L. 221-1 C. consom. 05/11/2017 Page 1 Tous droits réservés à l’auteur. Reproduction et rediffusion interdite sans autorisation. OBSERVATOIRE DES CONTENTIEUX - OBS N° 13 SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE L’OBLIGATION GÉNÉRAL DE SÉCURITÉ DE L’ARTICLE L. 221-1 DU CODE DE LA CONSOMMATION ET LES ENTREPRISES DE DISTRIBUTION (DEVENU ARTICLE L. 421-3 s. C. CONSOM.) A PROPOS DE CASS. CIV. 1 re 20 SEPTEMBRE 2017 1. Présentation de la jurisprudence de l’arrêt du 20 septembre 2017. Le client d’un supermarché fait une chute sur un tapis anti-dérapant placé devant un rayon du magasin. Il assigne la société exploitante en réparation de ses préjudices. La Cour d’appel de Poitiers, dans un arrêt rendu le 21 janvier 2015 (CA Poitiers, 3 e ch. civ., 21 janvier 2015 : RG n° 14/01042) rejette l’action fondée sur l’ancien art. L. 221-1 C. consom. au motif que cette disposition n’instaure aucun régime de responsabilité autonome permettant à une victime de solliciter des dommages-intérêts pour réparer les dommages causés par un manquement à l’obligation de sécurité et elle rejette aussi l’action sur le fondement de l’ancien article 1384 al.1 er du Code civil (1242 nouveau) au terme d’un raisonnement classique : une chose inerte telle qu’un tapis ne peut être l’instrument d’un dommage que si la preuve est rapportée qu’elle occupait une position anormale ou qu’elle était en mauvais état et la cour d’appel estime que cette preuve n’est pas rapportée en l’espèce, les circonstances de la chute n’ayant pas été établies tout comme le fait que, selon la victime, l’absence de fixation du tapis l’aurait rendu dangereux (le passage des clients contribuerait à le déplacer ou le rouler, alors qu’au surplus l’accident s’est déroulé à 9 heures du matin, qui n’est pas une heure d’affluence. La victime forme donc un pourvoi en cassation de cette décision. Sans examiner le second moyen subsidiaire, critiquant le refus d’application de l’article 1384 al. 1 er , la première Chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt non publié du 20 septembre 2017 (Cass. civ. 1 re , 20 septembre 2017 : pourvoi n° 16-19109) casse cet arrêt, en estimant que la cour d’appel, en se prononçant ainsi, a violé l’ancien art. L. 221-1 C. consom. dès lors « qu’une entreprise de distribution est débitrice à l’égard de la clientèle d’une obligation générale de sécurité de résultat » (sur le texte complet, V. infra l’annexe). Pour apprécier l’apport de l’arrêt (B), il convient de rappeler la jurisprudence accessible antérieure (A) A. RAPPEL DE LA SITUATION AVANT L’ARRÊT 2. Rappel des textes. Selon l’ancien article L. 221-1 du Code de la consommation, alinéa 1 er , « les produits et les services doivent, dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, présenter la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes ». Le texte reprend celui de la loi n° 83-660 du 21 juillet 1983 et il a été transféré par l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 dans le nouvel art. L. 421-3 C. consom. Selon le dernier alinéa de l’ancien art. L. 221-1 C. consom., « les producteurs et les distributeurs prennent toutes mesures utiles pour contribuer au respect de l'ensemble des obligations de sécurité prévues au présent chapitre » (art. L. 421-4 nouveau). L’art. L. 221-1-2-I C. consom. (devenu L. 423-1), disposait « le producteur fournit au consommateur les informations utiles qui lui permettent d'évaluer les risques inhérents à un produit pendant sa durée d'utilisation normale ou raisonnablement prévisible et de s'en prémunir, lorsque ces risques ne sont pas immédiatement perceptibles par le consommateur sans un avertissement adéquat ». Selon le II du même texte (devenu L. 423-2), « le producteur adopte les mesures qui, compte tenu des caractéristiques des produits qu'il fournit, lui permettent : a) De se tenir informé des risques que

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X.Henry/XH- Observatoire des contentieux – OBS n° 13 – L. 221-1 C. consom. 05/11/2017 Page 1

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OBSERVATOIRE DES CONTENTIEUX - OBS N° 13

SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE – L’OBLIGATION GÉNÉRAL DE SÉCURITÉ

DE L’ARTICLE L. 221-1 DU CODE DE LA CONSOMMATION ET LES

ENTREPRISES DE DISTRIBUTION (DEVENU ARTICLE L. 421-3 s. C. CONSOM.) –

A PROPOS DE CASS. CIV. 1re 20 SEPTEMBRE 2017

1. Présentation de la jurisprudence de l’arrêt du 20 septembre 2017. Le client d’un

supermarché fait une chute sur un tapis anti-dérapant placé devant un rayon du magasin. Il

assigne la société exploitante en réparation de ses préjudices. La Cour d’appel de Poitiers, dans

un arrêt rendu le 21 janvier 2015 (CA Poitiers, 3e ch. civ., 21 janvier 2015 : RG n° 14/01042)

rejette l’action fondée sur l’ancien art. L. 221-1 C. consom. au motif que cette disposition

n’instaure aucun régime de responsabilité autonome permettant à une victime de solliciter des

dommages-intérêts pour réparer les dommages causés par un manquement à l’obligation de

sécurité et elle rejette aussi l’action sur le fondement de l’ancien article 1384 al.1er du Code

civil (1242 nouveau) au terme d’un raisonnement classique : une chose inerte telle qu’un tapis

ne peut être l’instrument d’un dommage que si la preuve est rapportée qu’elle occupait une

position anormale ou qu’elle était en mauvais état et la cour d’appel estime que cette preuve

n’est pas rapportée en l’espèce, les circonstances de la chute n’ayant pas été établies tout comme

le fait que, selon la victime, l’absence de fixation du tapis l’aurait rendu dangereux (le passage

des clients contribuerait à le déplacer ou le rouler, alors qu’au surplus l’accident s’est déroulé à

9 heures du matin, qui n’est pas une heure d’affluence. La victime forme donc un pourvoi en

cassation de cette décision.

Sans examiner le second moyen subsidiaire, critiquant le refus d’application de l’article 1384

al. 1er, la première Chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt non publié du 20

septembre 2017 (Cass. civ. 1re, 20 septembre 2017 : pourvoi n° 16-19109) casse cet arrêt, en

estimant que la cour d’appel, en se prononçant ainsi, a violé l’ancien art. L. 221-1 C. consom.

dès lors « qu’une entreprise de distribution est débitrice à l’égard de la clientèle d’une obligation

générale de sécurité de résultat » (sur le texte complet, V. infra l’annexe).

Pour apprécier l’apport de l’arrêt (B), il convient de rappeler la jurisprudence accessible

antérieure (A)

A. RAPPEL DE LA SITUATION AVANT L’ARRÊT

2. Rappel des textes. Selon l’ancien article L. 221-1 du Code de la consommation, alinéa

1er, « les produits et les services doivent, dans des conditions normales d'utilisation ou dans

d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, présenter la sécurité à

laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes ». Le

texte reprend celui de la loi n° 83-660 du 21 juillet 1983 et il a été transféré par l’ordonnance

n° 2016-301 du 14 mars 2016 dans le nouvel art. L. 421-3 C. consom.

Selon le dernier alinéa de l’ancien art. L. 221-1 C. consom., « les producteurs et les distributeurs

prennent toutes mesures utiles pour contribuer au respect de l'ensemble des obligations de

sécurité prévues au présent chapitre » (art. L. 421-4 nouveau). L’art. L. 221-1-2-I C. consom.

(devenu L. 423-1), disposait « le producteur fournit au consommateur les informations utiles

qui lui permettent d'évaluer les risques inhérents à un produit pendant sa durée d'utilisation

normale ou raisonnablement prévisible et de s'en prémunir, lorsque ces risques ne sont pas

immédiatement perceptibles par le consommateur sans un avertissement adéquat ». Selon le II

du même texte (devenu L. 423-2), « le producteur adopte les mesures qui, compte tenu des

caractéristiques des produits qu'il fournit, lui permettent : a) De se tenir informé des risques que

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les produits qu'il commercialise peuvent présenter ; b) D'engager les actions nécessaires pour

maîtriser ces risques, y compris le retrait du marché, la mise en garde adéquate et efficace des

consommateurs ainsi que le rappel auprès des consommateurs des produits mis sur le marché.

Ces mesures peuvent notamment consister en la réalisation d'essais par sondage ou en

l'indication sur le produit ou son emballage d'un mode d'emploi, de l'identité et de l'adresse du

producteur, de la référence du produit ou du lot de produits auquel il appartient. Ces indications

peuvent être rendues obligatoires par arrêté du ministre chargé de la consommation et du ou des

ministres intéressés ». Enfin, sans que la liste soit limitative, l’ancien art. L. 221-1-3 C. consom.

oblige quant à lui le producteur à informer les autorités s’il découvre que le produit ne répond

pas aux exigences légales (devenu L. 423-3).

Il faut noter que jusqu’à l’ordonnance du 14 mars, les art. L. 221-1 s. C. consom. étaient insérés

dans un chapitre intitulé « prévention », alors que la restructuration du code a conduit à la

suppression de cette mention. Ce positionnement initial du texte a pu inciter à une interprétation

restrictive, dissuadant d’utiliser le texte comme un fondement nouveau et autonome pour les

actions en réparation. Les dispositions suivantes précitées explicitent d’ailleurs l’obligation

dans un tel sens en imposant des obligations de vérification des produits ou services fabriqués

ou distribués, d’information, d’alerte des consommateurs et des autorités lorsqu’un problème

de sécurité est décelé (campagnes de rappel), etc. Par ailleurs, à la suite de l’intégration de la

directive sur la sécurité du fait des produits défectueux, la réparation des préjudices causés par

le défaut de sécurité des produits relève des anciens art. 1386-1 s. C. civ., devenus 1245 s.

Pour des décisions privilégiant cette interprétation étroite, V. explicite : l’ancien art. L. 221-1

C. consom. est inclus dans un chapitre expressément consacré à la prévention ; il a vocation à

régir les prérogatives de l'administration en matière de sécurité des produits, ainsi que l'explicite

l'article L 221-2 du même Code en précisant que les produits ne satisfaisant pas à l'obligation

générale de sécurité prévue à l'article L 221-1 sont interdits ou réglementés dans les conditions

fixées ci-après ; ce texte n’est donc pas constitutif d'un fondement de responsabilité civile des

professionnels envers les consommateurs. CA Poitiers (3e ch. civ.), 26 septembre 2007 : RG

n° 06/00855 (explosion dans un bateau en raison d’un défaut de construction ; argument avancé

pour engager la responsabilité du distributeur, dans une espèce antérieure à l’introduction de la

directive). § V. aussi : CA Riom (3e ch. civ. et com.), 1er mars 2017 : RG n° 15/02044 (chute

d’une professionnelle sur le sol humide du rayon d’un magasin réservé aux professionnels de

la restauration – Metro ; victime invoquant l’ancien art. L. 221-1 C. consom. et l’ancien art.

1147 C. civ.) - CA Amiens (1re ch. civ.), 4 avril 2017 : RG n° 15/01416 (l’art. L. 221-1 C.

consom. concerne l'exposition et le conditionnement des produits ; résumé ci-dessous).

1° DOMAINE DU TEXTE

3. Débiteur de l’obligation de sécurité : un professionnel. Les dispositions l’ancien L. 221-1

C. consom., relatives au principe de sécurité des services, ne concernent que les professionnels,

et ne sont pas applicables à une professeure de danse qui n'est pas une professionnelle des

voyages organisés, puisqu’elle ne fait que permettre à quelques-unes de ses élèves de la

rejoindre en Afrique pour participer au stage de ses cours de danse. CA Montpellier (1re ch.

B), 27 février 2013 : RG n°11/08581 (responsabilité en tout état de cause non retenue, la

victime étant tombée lors d’une promenade nocturne qu'elle faisait avec des amis rencontrés

sur place, de sorte que cette sortie n'avait aucun lien avec les cours de danse ou même

l'hébergement). § Rappr. pour l’hypothèse : vendeur opposant à l’acheteur, qui invoquait

l’ancien art. L. 221-1 C. consom., le fait qu’un acheteur professionnel ne peut invoquer ce texte.

CA Angers (ch. com. A), 8 avril 2014 : RG n° 12/02168 (livraison de bombes peinture sans

indication de date de fabrication ou de date limite d'utilisation ; conflit non tranché par l’arrêt,

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dès lors qu’il n’était pas indispensable à la solution du litige).

Comp. relevant le caractère professionnel de la victime, sans en exclure pour autant le texte :

CA Riom (3e ch. civ. et com.), 1er mars 2017 : RG n° 15/02044 (chute d’une professionnelle

sur le sol humide du rayon d’un magasin réservé aux professionnels de la restauration – Metro ;

victime invoquant l’ancien art. L. 221-1 C. consom. et l’ancien art. 1147 C. civ.).

4. Créancier de l’obligation de sécurité : un consommateur. Les dispositions du Code de la

consommation, notamment l’ancien art. L. 221-1 C. consom., ne sont pas applicables aux

relations contractuelles qui se sont instaurées entre deux professionnels, comme tel est le cas

en l'espèce puisque la société est une entreprise ayant acquis un chariot élévateur pour les

besoins de son activité professionnelle. CA Poitiers (1re ch. civ.), 15 février 2013 : RG

n° 11/04330 ; Juris-Data n° 2013-009484 (exclusion de la responsabilité du fait des produits

défectueux, le défaut ne concernant que le chariot lui-même). § V. aussi : CA Chambéry (2e

ch.), 2 juillet 2015 : RG n° 14/01774 (parapente).

Comp. dans une affaire antérieure à l’obligation d’introduire la directive, semblant considérer

que le texte est réservé aux contractants : CA Versailles (3e ch.), 30 avril 2004 : RG

n° 02/05924 ; Juris-Data n° 2004-242294 (distilbène ; responsabilité délictuelle du laboratoire

à l’égard de la fille de la patiente ; décision écartant l’art. L. 221-1 C. consom. ; action

délictuelle fondée directement sur un manquement contractuel) - Versailles (3e ch.), 30 avril

2004 : RG n° 02/05925 ; Juris-Data n° 2004-242293 (idem).

Rappr. : aucune infraction ayant porté un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif des

consommateurs n’est exclue des prévisions de l’al. 1er de l’ancien article L. 421-1 C. consom. ;

cassation de l’arrêt déclarant irrecevable l’action d’une association de consommateurs à la suite

des poursuites pour homicides involontaires à la suite de l’effondrement d’une tribune

provisoire pour un match de football (Furiani), alors que, selon l’ancien art. L. 221-1 du Code

de la consommation, les services doivent, dans des conditions normales d’utilisation, présenter

la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre. Cass. crim., 24 juin 1997 :

pourvoi n° 96-82424 ; Bull. crim. n° 251 (condamnation pour faux et homicides involontaires)

et sans doute sur renvoi CA Paris (20e ch. corr. B), 29 octobre 1999 : RG n° 98/03648 ; Juris-

Data n° 1999-108586 (idem). § Dans le même sens, pour la commercialisation d’un

médicament à base de plantes contenant une plante toxique, faute d’avoir procédé aux

vérifications préalables lors de leur importation de Chine : Cass. crim., 1er avril 2008 : pourvoi

n° 06-88948 ; Bull. crim. n° 88.

5. Nature du produit ou du service. L’ancien art. L. 221-1 C. consom. est inopérant en matière

de travaux de construction. CA Rennes (4e ch.), 5 février 2009 : RG n° 07/02158 (installation

d’une cheminée), pourvoi rejeté par Cass. civ. 3e, 6 juillet 2000 : pourvoi n° 09-14328 (N.B.

l’art. L. 221-1 C. consom. n’était plus invoqué par le moyen).

L’article L. 221-1 C. consom. n’est pas applicable dès lors que le sol, bien immobilier, n'est pas

un produit ou service visé au sens de ce texte. CA Nancy (1re ch. civ.), 24 novembre 2009 :

RG n° 05/02405 ; arrêt n° 3128/2009 (chute d’une cliente sur l’allée extérieure menant au

supermarché et au salon de coiffure où elle se rendait, le sol en mauvais état étant anormalement

glissant ; responsabilité sur le fondement de l’ancien art. 1384 al. 1er C. civ.).

Le tribunal a écarté à bon droit l'application des dispositions de l’ancien art. L. 221-1 C.

consom., ce texte prévoyant les conditions de la mise en œuvre de la responsabilité du seul

fabriquant, producteur ou vendeur d'une chose ou d'un produit dangereux, et non pas de celui,

propriétaire ou détenteur de ce produit ou de cette chose, qui le met à la disposition d'un

utilisateur. CA Grenoble (2e ch. civ.), 9 mai 2017 : RG n° 14/01945 ; Juris-Data n° 2017-

009662 (renversement d’un chariot lourdement chargé par un artisan). § Est inapplicable à

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l’accident provoqué par le renversement d’un chariot, l’ancien art. L 221-1 C. consom., dès lors

que ce texte s'applique aux produits et services que le professionnel propose à la vente, et non

pas au matériel qu'il met à la disposition du public dans l'enceinte de son établissement ; même

si, accessoirement au contrat de vente, le vendeur est tenu d'une obligation générale de sécurité

relativement à ce matériel, il apparaît que la société a satisfait à cette obligation, dès lors que

l'accident n'est pas dû à un vice qu'aurait présenté son chariot, mais à son utilisation anormale

par le client. CA Orléans, 12 mars 2007 : RG n° 06/01289 (client blessé au pied par le chariot

qu'il poussait et qui s’est renversé sous le poids de son chargement ; 1/ action également

infondée sur la garde, le client étant devenu le gardien du chariot ; 2/ faute d’un préposé qui a

reconnu avoir aidé le client à charger le chariot, en vantant sa stabilité, en dépit de son

inadaptation à la lourdeur de la charge, engageant la responsabilité de son commettant, mais

faute de la victime, artisan habitué à transporter des matériaux qui ne pouvait ignorer les risques

de cette manœuvre).

6. Dommages concernés : dommage corporel. Contrairement à la responsabilité du fait des

produits défectueux qui est étendue aux dommages au bien autre que le produit défectueux,

l’ancien art. L. 221-1 C. ne concerne que les dommages corporels. V. par exemple : les

acheteurs ne démontrant pas que la défectuosité du produit ait entrainé un risque pour la sécurité

des personnes ou ait causé un préjudice corporel ou un dommage à un bien autre que celui en

cause, leur droit à indemnisation sur le fondement de l'ancien art. L. 221-1 C. consom. ou sur

celui des articles 1386-1 s. [1245] C. civ. est donc sérieusement contestable. CA Aix-en-

Provence (1re ch. C), 26 mai 2016 : RG n° 15/09552 ; arrêt n° 2016/568 (pourriture du bois

d’une piscine, vendue comme imputrescible). § L'article L. 221-1 C. consom. n'est pas

applicable au dommage causé à une habitation par une surtension de 400 V dans le réseau EDF

à défaut de dommage corporel. CA Grenoble (2e ch. civ.), 19 février 2013 : RG n° 10/01411

(EDF responsable au titre de la responsabilité du fait des produits défectueux).

7. Exclusion par des régimes spéciaux. L'article L. 221-1 C. consom. n'est pas applicable au

litige opposant le fabriquant du vaccin au patient qui allègue un dommage résultant de

l'administration dudit vaccin ; en effet, l'article L. 221-8 C. consom. exclut expressément

l'application de ses dispositions aux produits faisant l'objet d'une réglementation particulière,

ayant pour objet notamment la protection de la santé, ce qui exclut les médicaments, auxquels

sont assimilables les vaccins. CA Versailles (3e ch.), 3 septembre 2009 : RG n° 08/04039 ;

Juris-Data n° 2009-014822. § Dans le même sens : CA Versailles (3e ch.), 7 avril 2006 : RG

n° 04/08722 (vaccin) - CA Versailles (3e ch.), 5 mai 2006 : RG n° 05/00770 (vaccin ; les

vaccins sont assimilés aux médicaments par l’art. L. 5121-6° CSP) - CA Versailles (3e ch.),

12 janvier 2007 : RG n° 03/08485 (médicament) - CA Versailles (3e ch.), 26 janvier 2007 :

RG n° 05/07246 (vaccin) - CA Paris (pôle 2 ch. 2), 17 décembre 2010 : RG n° 08/16254 ;

Juris-Data n° 2010-030920 (vaccin) - CA Paris (pole 2 ch. 2), 9 septembre 2011 : RG

n° 07/15285 ; Juris-Data n° 2011-018413 - CA Paris (pôle 2 ch. 2), 13 janvier 2012 : RG

n° 07/03115 - CA Aix-en-Provence (10e ch.), 25 janvier 2012 : RG n° 10/05359 ; arrêt

n° 2012/37 ; Juris-Data n° 2012-001536 (l'article L. 221-1 C. consom. n'est pas applicable aux

médicaments, lesquels sont définis et régis par les règles édictées aux articles L. 5111-1 s.

CSP). § La personne transfusée ne peut utilement invoquer contre l’ONIAM les dispositions de

l’ancien art. L. 221-1 C. consom. qui n'est pas applicable aux médicaments. CA Paris (pôle 2

ch. 2), 2 mars 2012 : RG n° 08/21871. § Comp. CA Bourges (ch. civ.), 22 janvier 2009 : RG

n° 07/01489 (vaccin ; arrêt mentionnant au préalable que la responsabilité du laboratoire est

recherchée sur le fondement de la responsabilité des produits défectueux régie par les articles

1147 et 1382 du code civil ainsi que par l’ancien art. L. 221-1 C. consom., ces textes devant

être interprétés à la lumière de la directive communautaire du 25 juillet 1985, avant d’estimer

que la preuve de la défectuosité du vaccin n’est pas rapportée).

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2° APPLICATION À DES PRODUITS

10. Présentation. L’obligation générale de sécurité concerne au premier chef les produits

fabriqués et distribués, même si l’introduction d’une responsabilité du fait des produits

défectueux l’a amputée de la réparation directe des préjudices lorsque le bien est atteint d’un

défaut (ce qui n’exclut pas la citation simultanée des textes, V. ci-dessous). Il faut par exemple

noter que l’art. L. 421-1 actuel, repris de l’ancien art. L. 221-1 C. consom. qui définit le

producteur et le distributeur se concentre exclusivement sur les produits et néglige les

prestataires de services ( ce qui s’explique sans doute par le fait que le texte résulte d’une

ordonnance n° 2008-210 du 22 août 2008, prise sur le fondement de la loi du 3 janvier 2008,

qui a inséré dans le code de la consommation les définitions des termes « producteur » et

« distributeur » telles qu'elles résultent de la directive du 3 décembre 2001).

11. Vérification de la composition des produits. Un fabricant, tenu en application des

dispositions des articles L. 212-1 et L. 221-1 C. consom. d'une obligation générale de

conformité et de sécurité des produits qu'elle met sur le marché, connait ou, en tout cas, doit

connaître, après l'avoir vérifiée, la composition de ses peintures. Cass. com., 4 novembre

2004 : pourvoi n° 03-15220. § V. aussi dans un cadre différent : Cass. crim., 1er avril 2008 :

pourvoi n° 06-88948 ; Bull. crim. n° 88 (recevabilité de l’action d’une association de

consommateurs, pour l’infraction commise lors de la commercialisation d’un médicament à

base de plantes contenant une plante toxique, faute d’avoir procédé aux vérifications préalables

lors de leur importation de Chine). § Pour les juges du fond : CA Metz (ch. corr.), 12 mai 2011

(révolver pour enfant dangereux lorsqu’on utilise avec certaines amorces, aucun test sur les

amorces commercialisés ni d’information sur celles compatibles n’étant fournies ; l’art. L. 212-

1 C. consom. sur la conformité des produits instaure une obligation de résultat ; en

commercialisant des jouets comportant indûment le marquage CE, donc présentés conformes à

la réglementation, la société commercialisant le révolver s’est rendue coupable des faits de

tromperie), pourvoi rejeté par Cass. crim., 2 mai 2012 : pourvoi n° 11-84161 (absence de

motivation spécifique).

12. Respect des normes. L’obligation de respecter les normes en vigueur et donc de les

rechercher et les connaître fait partie intégrante de l’ancien art. L. 211-1 C. consom. § Sur le

caractère nécessaire, mais pas nécessairement suffisant de cette obligation, rappr. CA Douai

(3e ch.), 28 février 2008 : RG n° 06/04689 (tondeuse à gazon ne comportant aucun dispositif

de coupure automatique en cas de débourrage ; si l’absence de dispositif est conforme,

l’accident survenu a montré l’insuffisance des normes en vigueur et la nécessité de les

compléter, ce qui conduit la cour à considérer que « le système de sécurité était donc insuffisant

au regard de ce que pouvait légitimement attendre l'usager »).

13. Information du consommateur. Absence de relation de causalité entre la faute imputée à

la Seita (défaut d’information) et le décès d’une fumeuse qui ne pouvait légitimement s’attendre

à la sécurité d’un tel produit, compte tenu de la notoriété des risques à compter de 1976, de la

nécessaire information de ses parents lorsqu’elle était mineure et des médecins lors de ses

grossesses. Cass. civ. 1re, 8 novembre 2007 : pourvoi n° 06-15873 ; Bull. civ. I, n° 350 (le

second moyen qui invoquait l’art. L. 211-1 C. consom., en estimant que les cigarettes étaient

défectueuses et que l’information était insuffisante, est jugé inopérant), rejetant le pourvoi

contre CA Montpellier (1re ch. D), 22 mars 2006 : RG n° 04/01316 ; Juris-Data n° 2006-

309639 ; JCP 2006. II. 10158, note Daille-Duclos (absence de responsabilité au titre de l’art.

L. 221-1 C. consom. en l’absence de défaut du tabac, dont seul l’usage excessif est en cause). §

V. aussi CA Metz (ch. corr.), 12 mai 2011 (résumé ci-dessus), pourvoi rejeté par Cass. crim.,

2 mai 2012 : pourvoi n° 11-84161.

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En application des anciens articles 1146 s. [1231] C. civ., le fabricant d'un produit doit fournir

tous les renseignements indispensables à son usage et notamment avertir les utilisateurs des

précautions à prendre lors de son utilisation et cette obligation générale trouve sa traduction

dans le domaine de la consommation dans l'ancien art. L. 221-1 C. consom. ; cette obligation

ne cesse pas avec la conclusion du contrat mais elle lui perdure quand l'évolution des

connaissances permet l'identification d'un risque inconnu jusque-là, ce principe étant

régulièrement mis en œuvre par les constructeurs automobiles en procédant à des rappels en

atelier lors de la découverte de défauts affectant certaines pièces des véhicules mis en vente ;

manque à son obligation d’information le constructeur qui n’a pas informé l’acheteur des

risques d’interférence entre les pacemakers et le système d’entrée sans clef « smart entry »).

CA Toulouse (2e ch. sect. 1), 4 mars 2015 : RG n° 12/04837 ; arrêt n° 126.

Cassation de l’arrêt condamnant une société commercialisant un produit dangereux, pour

homicide involontaire, sans répondre aux conclusions de celle-ci qui soutenait que les mentions

figurant sur le produit en cause étaient conformes aux prescriptions prévues en matière

d'étiquetage et d'emballage des préparations dangereuses par la directive CEE 88-1379 et par

arrêté du 21 février 1990, pris pour son application. Cass. crim., 24 septembre 1997 : pourvoi

n° 96-81105 (visa global incluant l’ancien art. L. 221-21 C. consom.). § Rejet du pourvoi contre

un arrêt ayant décidé d’écarter les poursuites pour tromperie sur les qualités substantielles et

infraction à la loi du 21 juillet 1983 sur la sécurité des consommateurs, dès lors qu’après analyse

de leur composition, ils n’étaient pas soumis à l’obligation d’étiquetage. Cass. crim., 5

novembre 1996 : pourvoi n° 96-80081 (les mentions « non toxique » ou « non nocif » figurant

sur l'étiquetage des produits litigieux n'étant pas trompeuses en l'absence de dangerosité

résultant de leur absence de teneur en Lindane et DDT supérieure à cinq pour cent). § V. aussi :

CA Paris (20e ch. B), 1er février 1996 : RG n° 95/05302 ; Juris-Data n° 1996-020145

(condamnation pour homicide par inobservation des règlements du dirigeant une société

distribuant un produit décapant, dès lors qu'il est prouvé qu’il ne respectait pas l’ancien art. L.

221-1 C. consom., le danger du produit toxique présent dans la composition n'étant signalé que

par une croix de Saint-André sur fond orange, symbole sans signification pour le profane).

En sens contraire : le contenu rédactionnel du manuel d’entretien d’un avion et le suivi de cette

documentation technique destinée au mécanicien aéronautique ne saurait être qualifiée de

produit ou service au sens de l’ancien art. L. 221-1 C. consom. CA Agen (1re ch. civ.), 9

octobre 2007 : RG n° 05/01593 ; Legifrance ; Juris-Data n° 2007-353447 ; Contr. conc.

consom. 2008, n° 142, obs. Raymond (accident d’un avion de tourisme provoqué par un mauvais

remontage d’une pièce lors d’une réparation, que le réparateur ne pouvait ignorer).

14. Exposition et conditionnement. L’art. L. 221-1 C. consom. concerne l'exposition et le

conditionnement des produits. CA Riom (3e ch. civ. et com.), 1er mars 2017 : RG n° 15/02044

(chute d’une professionnelle sur le sol humide du rayon d’un magasin réservé aux

professionnels de la restauration - Metro ; victime invoquant l’ancien art. L. 221-1 C. consom.

et l’ancien art. 1147 C. civ.). § Absence de preuve d’un manquement de l’exploitant à son

obligation générale de sécurité, la défectuosité de l’emballage n’étant pas établie (douzaine de

flûtes dans un socle en carton recouvertes d’un film plastique dont la cliente prétendait qu’il

était détérioré). CA Dijon (1re ch. civ.), 3 juillet 2012 : RG n° 10/01226 (cliente blessée après

le passage en caisse par la chute d’une flûte à champagne dont un éclat l’a atteint à l’œil ;

absence d’application de l’ancien art. 1384 al. 1er, la cliente étant à ce moment devenue

propriétaire des flûtes ; N.B. les motifs ne visent pas explicitement l’ancien art. L. 221-1 C.

consom., mais la cliente invoquait ce texte en évoquant à cette occasion l’obligation générale

de sécurité).

15. Installation du bien. A supposer les faits établis, l’installation du boitier de désactivation

d’une alarme à côté de la sirène pourrait justifier une action en responsabilité à l'encontre du

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fabricant de l'alarme et de l'installateur sur le fondement général de la responsabilité civile, ainsi

que sur celui de l’ancien art. L. 221-1 C. consom. du chef de l'obligation de sécurité imposée

au professionnel. CA Versailles (14e ch.), 14 janvier 2009 : RG n° 08/04419 (traumatisme

sonore des clients qui avaient voulu tester l’alarme ; désignation d’une expertise).

16. Fourniture de courant. Au sens de l’ancien art. L. 221-1 C. consom., une surtension ne

saurait constituer une condition normale d'utilisation, les conditions normales de

fonctionnement étant celles prévues par la norme NF EN 60335-1 soit une plage de 207 V à

244 V, alors qu’en l'espèce le déshumidificateur avait une valeur de 230 V. CA Caen (1re ch.

civ.), 23 octobre 2012 : RG n° 09/02445 (surtension sur le réseau EDF ayant provoqué un

dommage électrique ayant entraîné un échauffement à l'intérieur du déshumidificateur ; arrêt

retenant finalement la responsabilité d’EDF sur le fondement de la responsabilité du fait des

produits défectueux).

Comp. sans référence au texte, invoqué par le demandeur : la société ERDF étant liée au client

par un contrat de mise à disposition d'un branchement électrique et de fourniture d'énergie, le

litige se place sur le terrain de la responsabilité contractuelle et il en résulte que la société ERDF

est contractuellement tenue d'une obligation de résultat relativement à la sécurité de ses

branchements et responsable des dommages causés au client par un défaut de sécurité de ses

installations. CA Colmar (2e ch. civ. B), 11 mai 2012 : RG n° 11/02059 ; arrêt n° 356/2012

(article L. 221-1 C. consom. visé par le demandeur mais non repris par la Cour). § V. aussi : la

société ERDF, qui a pour unique mission d'assurer le bon fonctionnement, la maintenance et

l'entretien du réseau d'alimentation électrique, est tenue d'une obligation de résultat en ce qui

concerne la sécurité des usagers finaux. CA Reims (ch. civ. sect. 1), 2 septembre 2014 : RG

n° 12/03085 (incendie du sous-sol d’un immeuble provoqué par la défectuosité du tableau de

branchement électrique ; arrêt se fondant sur l’art. 1147 C. civ., alors que le demandeur visait

aussi l’ancien art. L. 221-1 C. consom.).

17. Produit défectueux. V. pour un arrêt rendu avant l’introduction de la directive : le vendeur

professionnel étant tenu de livrer des produits exempts de tout vice ou de tout défaut de

fabrication de nature à créer un danger pour les personnes et les biens et dès lors qu’il en est

responsable tant à l’égard des tiers que de son acquéreur, la cour d’appel a fait une exacte

application du texte visé au moyen. Cass. com., 9 décembre 1997 : pourvoi n° 95-12086

(salarié blessé par l’explosion d’une pile, aucune erreur de manipulation ne lui étant imputable ;

N.B. le texte n’est pas précisé par l’arrêt, mais il semble que ce soit bien l’art. L. 211-1 C.

consom. qui soit visé, puisque il est seul mentionné dans la première branche et que la seconde

branche qui vise deux textes, les anciens art. 1135 et 1147, est examinée après, la preuve d’un

défaut de sécurité de la pile faisant que « l’arrêt n’encourt pas le grief de la seconde branche »

prétendant que l’obligation du vendeur n’est pas une garantie de plein droit). § Dans le même

sens : interprétation du droit antérieur à la directive à la lumière de celle-ci qui apporte « une

définition du produit défectueux rejoignant au demeurant celle donnée en droit français par

l'article L 221-1 du code de la consommation ». CA Douai (3e ch.), 28 février 2008 : RG

n° 06/04689 (tondeuse à gazon ne comportant aucun dispositif de coupure automatique en cas

de débourrage ; si l’absence de dispositif est conforme, l’accident survenu a montré

l’insuffisance des normes en vigueur et la nécessité de les compléter, ce qui conduit la cour à

considérer que « le système de sécurité était donc insuffisant au regard de ce que pouvait

légitimement attendre l'usager »). § Comp. ne se référant pas à l’art. L. 221-1 C. consom.

invoqué par les victimes : CA Lyon (1re ch. civ.), 8 juin 2006 : RG n° 05/01813 ; Juris-Data

n° 2006-307345 (sondes auriculaires équipant des stimulateurs cardiaques, fabriquées selon la

technique du fil de rétention et jugée défectueuses).

V. aussi avant la directive : une bombe aérosol qui ne comporte pas une enveloppe ayant une

résistance suffisante aux chocs présente donc un défaut de sécurité. CA Paris (17e ch. A), 15

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mai 2006 : RG n° 05/01376 ; Juris-Data n° 2006-301077 (explosion de la bombe après une

chute, l’usagère l’ayant fait tomber en saisissant un autre objet dans une étagère). § CA

Bordeaux (2e ch.), 15 mars 2005 : RG n° 04/00699 ; JurisData : 2005-270591 (vente de

viande congelées ; le bref délai de l’ancien art. 1648 C. civ. est inopposable dès lors que les

défectuosités de la marchandise auraient pu résulter d'un manquement du vendeur à l'obligation

de sécurité prévue par l'article L. 221-1 C. consom.). § V. encore : CA Douai (3e ch.), 7 janvier

1999 : RG n° 95/05836 ; Juris-Data n° 1999-040765 (ne satisfait pas aux prescriptions de

l'ancien art. L. 221-1 C. consom. le luminaire qui ne comporte pas de dispositif qui serve de

protection de l'ampoule, non seulement, pour empêcher tout contact direct avec celle-ci, mais

également, pour éviter un risque connu d'explosion de l'ampoule la projection d'éclats

incandescents) - CA Dijon (1re ch. civ.), 9 septembre 1999 : Juris-Data n° 1999-143378

(responsabilité du fabricant d’une prothèse de hanche au titre des anciens art. 1147 C. civ. et L.

221-1 C. consom.) - CA Nîmes (1re ch. A), 9 décembre 1999 : RG n° 1501/97 ; Juris-Data

n° 1999-107664 (en vertu de l’ancien art. L. 221-1 C. consom., l'obligation de sécurité des

producteurs est contractuelle et distincte de la garantie des vices cachés ; responsabilité du

fabricant d’une débrousailleuse pour un dommage causé par une projection de métal dans

l’œil) - CA Versailles (3e ch.), 18 mai 2001 : RG n° 98/08313 ; Juris-Data n° 2001-257987

(blessure d’un enfant par jouet ; les possibilités de chute d'un enfant sur un jouet font partie des

risques prévisibles, au sens de l'art. L. 221-1 C. consom. ; produit accompagné de surcroît d'une

notice non permanente portée sur l'emballage destiné à être détruit ; le distributeur a commis

une faute au sens de l'article 1382 C. civ. et de l'art. L. 221-1 C. consom.) - CA Lyon (1re ch.),

14 juin 2001 : RG n° 1998/06451 ; Juris-Data n° 2001-146864 (incendie provoqué par un

sèche-cheveux ; l’obligation du fabricant, en vertu de l’ancien art. 1147 C. civ., de livrer un

produit exempt de tout défaut de nature à causer un danger est renforcée par l’ancien art. L 221-

1 C. consom.) - CA Montpellier (1re ch. B), 7 janvier 2003 : RG n° 00/05056 ; Juris-Data

n° 2003-209683 (explosion de la vitre d’une cuisinière ; absence de preuve que le produit ne

présente pas la sécurité à laquelle on peut s’attendre, au sens de l’art. L. 221-1 C. consom.,

compte tenu de l’ancienneté de celle-ci).

3° APPLICATION À DES SERVICES

20. Présentation. L’interrogation des bases de données (Légifrance et Jurica) démontre que

l’application de l’ancien art. L. 221-1 C. consom. a déjà été invoqué à des fournitures de

services, ce qui peut fréquemment impliquer l’appréciation de l’obligation de sécurité pour des

établissements ou des activités accueillant du public.

21. Accrobranche. L’activité de loisirs de parcours acrobatique dans les arbres constitue une

activité physique au sens des articles L 100-1 s. du Code du sport ; il s’agit d’une prestation de

services qui, aux termes de l’ancien art. L. 221-1 du Code de la consommation, doit, dans des

conditions normales d’utilisation ou dans d’autres conditions raisonnablement prévisibles par

le professionnel, présenter la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre et ne pas porter

atteinte à la santé des personnes ; la pratique d’un parcours d’aventure dans des arbres en

empruntant notamment des tyroliennes descendantes implique un rôle actif de chaque

participant et de ce fait l’obligation contractuelle de sécurité de l’organisateur d’un tel parc de

loisirs est une obligation de moyens ; en l’espèce, l’accident ne résulte pas d’une faute

d’imprudence, d’inattention ou de négligence de l’exploitant qui n’a pas, de ce fait, manqué à

son obligation contractuelle de sécurité de moyens. CA Aix-en-Provence (10e ch.), 2 octobre

2007 : RG n° 06/01060 ; Legifrance (participant s’étant cassé une cheville, au cours de

l’utilisation d’une tyrolienne descendante du parc acrobatique en venant heurter violemment

l’arbre d’arrivée , l’usagee n’ayant pas freiné à temps ; arg. :1/ les participants étaient

correctement informé ; 2/ ils étaient munis de gants en l’absence de dispositif mécanique de

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freinage qui n’est pas obligatoire ; 3/ des moniteurs étaient présents ; 4/ le matelas entourant

l’arbre était suffisant) et sur pourvoi Cass. civ. 1re, 22 janvier 2009 : pourvoi n° 07-21843 (selon

l’arrêt, la cour d’appel a exactement énoncé que la pratique d’un parcours d’aventure dans des

arbres, en empruntant notamment des tyroliennes descendantes, implique un rôle actif de

chaque participant et qu’en conséquence, l’obligation contractuelle de sécurité de l’organisateur

d’un tel parc de loisirs est une obligation de moyens ; rejet du pourvoi, sans allusion à l’art. L.

211-1 C. consom. visé au moyen, dès lors que la cour d’appel a suffisamment établi l’absence

de faute ; selon ce moyen, le risque d’un freinage insuffisant de la part des usagers d’une

tyrolienne descendante constitue une condition d’utilisation raisonnablement prévisible par

l’exploitant d’un parc de loisirs au sens de l’ancien art. L. 221-1 C. consom. et le texte n’aurait

pas été respecté en raison de l’absence de dispositif mécanique de freinage, remplacé par une

manœuvre de l’utilisateur à qui on se contentait de donner des gants), rejetant le pourvoi contre

CA Aix-en-Provence (10e ch.), 2 octobre 2017 : RG n° 06/01060 ; Legifrance. § Dans le même

sens que l’arrêt attaqué: CA Aix-en-Provence (10e ch.), 16 octobre 2007 : RG n° 06/433 ;

Legifrance ; Juris-Data n° 2007-358327 - CA Aix-en-Provence (10e ch.), 17 septembre

2008 : RG n° 07/05516 ; Legifrance ; Juris-Data n° 2008-005538.

De l'avis du 12 mai 2011 relatif à la sécurité des parcours acrobatiques en hauteur versé au

dossier, bien que postérieur aux faits dont s'agit, il doit être retenu d'une part qu'il n'existe pas,

contrairement aux équipements et aires collectifs de jeux pour enfants, de réglementation

spécifique aux parcours acrobatiques en hauteur imposant, notamment, que soit effectué chaque

année un contrôle technique des installations et d'autre part que les exploitants sont tenus au

respect de l'obligation générale de sécurité posée par l’ancien art. L 221-1 C. consom. CA Caen

(1re ch. civ.), 25 août 2015 : RG n° 12/01818 (possibilité de se référer aussi à la norme

expérimentale XP S 52 902-1, mais pas à la norme postérieure NF EN 15567, ni à la norme NF

EN 15 567-2 dont la date d'entrée en vigueur n'est pas précisée). § Même s'il n'existe aucun

certificat de conformité pour ce type d'installation, a manqué à son obligation générale de

sécurité, posée par l’ancien art. L. 221-1 C. consom., l’exploitant qui n’a installé aucun

dispositif permettant l'arrêt du mouvement de translation avant que la vitesse n'atteigne une

valeur pouvant créer un risque de blessure du pratiquant contre un élément de l'atelier ou de la

plate-forme et que la protection disposée sur l'arbre était insuffisante, au sens de la norme XP

S 52 902-1. CA Caen (1re ch. civ.), 25 août 2015 : RG n° 12/01818 (blessure à la fin d’une

descente en tyrolienne dans le cadre d’une fête de l’escalade).

V. aussi, sans référence explicite, mais avec une logique proche du texte : il est admis que le

responsable d'un parc acrobatique dans les arbres est tenu d'une obligation de sécurité de

moyens à l'égard des utilisateurs. CA Dijon (1re ch. civ.), 5 avril 2016 : RG n° 14/01399 ;

Juris-Data n° 2016-007009 (parcours acrobatique dans des arbres ; faute de la participante qui

a, contrairement aux consignes, mis sa main sur le câble et a été blessée à la main par une

poulie ; demande fondée sur les art. 1147 et L. 221-1 C. consom. ; absence de preuve d’une

faute de l’exploitant en relation avec le dommage : 1/ information sur les consignes de sécurité ;

2/ parcours contrôlé et conforme aux exigences de construction établies par la norme AFNOR

EN 15567-1 ; 3/ équipement doté d’un frein mécanique ; 4/ respect de la norme XP S 52-902-

2 relative au parcours acrobatique en hauteur qui n'impose pas, au niveau de l'équipement des

participants, le port de gants ce qui ne rend pas fautive l’absence de matelas sur l’arbre).

22. Agence de voyages. L'association co-organisatrice de chantier de jeunesse à l'étranger et

seule interlocutrice d'une participante, est débitrice d'une obligation de sécurité de résultat, en

vertu des dispositions de l'article 221-1 C. consom., et responsable de plein droit des dommages

en vertu de la loi du 13 juillet 1992 applicable aux personnes physiques et morales qui

organisent ou vendent des voyages ou séjours. CA Grenoble (ch. urg.), 14 novembre 2001 :

RG n° 00/01745 ; Juris-Data n° 2001-171273 (effondrement du plancher d’un dortoir).

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23. Bowling. En application de l'article L. 221-1 C. consom., l’exploitant d’un bowling doit

dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions raisonnablement

prévisibles par ce professionnel, présenter la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre

et ne pas porter atteinte à la santé des personnes dans son établissement. CA Dijon (ch. civ. A),

15 décembre 2009 : RG n° 08/02082 (absence de responsabilité en l’espèce, la zone d'approche

de la piste étant bien séparée de la piste elle-même et son caractère anormalement glissant

n’étant pas établi, contrairement à la piste elle-même, qui est huilée mais interdite d’accès aux

joueurs, règle que la victime n’avait pas respecté).

24. Centre de bronzage. L’exploitant d’un centre de bronzage par rayonnement UV est tenu

d'une obligation de sécurité de résultat en ce qui concerne les matériels utilisés, mais il

appartient à l'utilisateur de démontrer que le matériel utilisé est à l'origine du dommage ; cette

obligation de sécurité, selon les termes de l'article L.221-1 du Code de la consommation, retenus

par le premier juge, lui impose un service devant, dans des conditions normales d'utilisation ou

dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, présenter la sécurité

à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes ;

dans la mesure où le résultat n'est pas obtenu, l'utilisateur n'est pas tenu de rapporter la preuve

d'une faute du professionnel, que ce dernier doit par contre, pour s'exonérer, rapporter la preuve

qu'il a rempli son obligation, ce qui n’est pas le cas en l’espèce où l’exploitant n’a pas fait

contrôler l'appareil avant sa mise en service, contrairement aux préconisations du vendeur, la

société ne justifiant pas dès lors avoir mis en œuvre toutes les diligences lui incombant dans le

cadre de la sécurité due aux utilisateurs. CA Montpellier (1re ch. sect. B), 23 mars 2010 : RG

n° 09/05237 (brûlures dans un centre UV).

25. Cinéma. L’exploitant d'une salle de cinéma est tenu d'une responsabilité contractuelle à

l'égard de ses clients sur le fondement de l'ancien art. 1147 C. civ. [1231-1], ainsi que d'une

obligation générale de sécurité sur le fondement de l'article L. 221-1 C. consom. ; aux termes

de ce dernier texte, l'obligation générale de sécurité suppose l'utilisation du produit ou du

service concerné dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions

raisonnablement prévisibles par le professionnel ; le cinéma est un lieu public où il est habituel

de se rendre avec des enfants, qui doivent pouvoir se déplacer à l'intérieur en sécurité sans se

trouver sous le regard et la surveillance constante de leurs adultes accompagnateurs, y compris

dans des conditions d'obscurité ou de semi obscurité ; pour atteindre cet objectif, les exploitants

ont l'habitude d'éviter la présence de quelque obstacle que ce soit dans les couloirs de

circulation ; la configuration des lieux permet rarement d'éviter un passage en escalier et des

portes sont toujours nécessaires pour isoler les salles de projection. CA Chambéry (2e ch.), 3

juillet 2014 : RG n° 13/01747 ; Juris-Data n° 2014-015597. § Absence de manquement de

l’exploitant à son obligation générale de sécurité et absence de responsabilité contractuelle pour

la blessure d’un enfant qui s’est caché derrière une porte en laissant ses doigts dans la porte qui

a été refermée par sa sœur, la preuve n’étant pas établie que la porte se serait refermée

automatiquement alors qu’un système « anti pince-doigts » n’est pas obligatoire. CA

Chambéry (2e ch.), 3 juillet 2014 : préc.

26. Location de meubles. Rappr. pour une action en concurrence déloyale intentée par une

société de location de vélos contre une agence immobilière exerçant une activité similaire à titre

accessoire, en violation de son bail, l’arrêt notant que de surcroît, l’agence pouvait pratiquer un

prix plus bas, dès lors qu'elle s'exonérait de la réglementation en vigueur, en ne proposant pas

aux locataires de vélos des équipements, tels que les casques, aux fins de respecter son

obligation générale de sécurité édictée par l'article L. 221-1 C. consom. CA Bordeaux (2e ch.

civ.), 21 février 2012 : RG n° 10/04301.

27. Logement meublé. Dès lors que c'est dans le cadre de son mandat de régisseur que la société

a fourni une prestation de service consistant dans le fait, notamment, de mettre à la disposition

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des personnes ayant réservé un séjour un logement meublé, seul son mandant, une association,

doit répondre des manquements susceptibles d'être commis dans le cadre de cette prestation,

même ceux pouvant relever de l'obligation de sécurité de résultat édictée par l'art. L. 221-1 C.

consom. CA Grenoble (2e ch. civ.), 24 février 2015 : RG n° 12/01374 (chute d’un enfant d’un

lit superposé ; responsabilité du mandataire retenue sur le fondement de l’ancien art.1384 al. 1er

C. civ., en qualité de gardien du lit qui a été l’instrument du dommage dès lors que le matelas

supérieur, trop épais, avait son sommet au niveau de la barrière de protection).

28. Parapente. Après avoir, à bon droit, retenu que le contrat formé entre la personne qui

participe à un stage de parapente et le professionnel qui l’organise met à la charge de celui-ci

une obligation de sécurité de résultat en ce qui concerne le matériel utilisé pour exécuter sa

prestation, la cour d’appel a relevé que la radio attribuée à la victime lors d’un vol en solo avait

connu une panne inexpliquée, dont la soudaineté avait troublé l’intéressée pendant la phase

d’atterrissage, ce dont elle a exactement déduit que le manquement du professionnel à son

obligation de sécurité de résultat était à l’origine du dommage dont l’irrésistibilité de la cause

n’était pas établie. Cass. civ. 1re, 11 janvier 2017 : pourvoi n° 15-24696 ; arrêt n° 54 (N.B.

l’obligation de résultat a été fondée par la cour d’appel sur l’ancien art. L. 221-1 C. consom.,

mais la Cour de cassation n’évoque pas explicitement ce fondement), rejetant le pourvoi contre

CA Chambéry (2e ch.), 2 juillet 2015 : RG n° 14/01774 (« en application de l’article 1147 du

Code civil, il lui appartient de démontrer l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de

causalité ; que toutefois, ayant la qualité de consommateur au sens de l’ancien art. L. 221-1 du

code de la consommation, elle est en droit d’exiger de la société A. une obligation de sécurité

des produits et des services mis à sa disposition dans le cadre contractuel » ; partage de

responsabilité, l’erreur de la victime à l’atterrissage étant qualifiée de fautive).

29. Parc de loisirs. L'exploitant d'une structure gonflable, utilisable par des enfants jusqu'à 8

ans, est tenu d'une obligation de résultat en ce qui concerne la sécurité des enfants qui l'utilisent

(affirmation suivant directement la reproduction de l’ancien art. 1147 C. civ. et celle de l’ancien

art. L. 221-1 C. consom.). CA Reims (1re ch. civ. sect. inst.), 10 juin 2016 : RG n° 15/02097

(parc de loisirs payant comportant une structure gonflable ; enfant s’étant blessé en rebondissant

par-dessus les boudins blancs gonflables qui étaient censés jouer le rôle de garde-corps ;

responsabilité retenue ; absence de force majeure).

30. Portique de lavage. Comp. pour un arrêt de cassation privilégiant le droit commun :

cassation du jugement qui a mis à la charge de l’exploitant d’un portique automatique de lavage

de voiture une obligation de résultat et de sécurité, alors qu’en application de l’article 1789 C.

civ., celui-ci peut s’exonérer en prouvant qu’il n’a pas commis de faute. Cass. civ. 1re, 13

décembre 2012 : pourvoi n° 11-23786 (visa de l’art. 1789, sans aucune allusion dans la

décision à l’ancien art. L. 221-1 C. consom.), cassant Jur. proxim. Angoulême, 2 mai 2011 :

Dnd (le jugement estime qu’il s’agit d’un contrat d’entreprise, que l’action en réparation de

préjudice lié à l’utilisation du matériel a une nature contractuelle, ce que reconnaissent les deux

parties, qu’il n’est pas discutable que pèse sur l’entrepreneur, et notamment sur l’exploitant

d’une installation de lavage automatique de véhicule, une obligation de résultat et

accessoirement de sécurité et qu’au « demeurant, cette dernière obligation ressort de l’ancien

art. L. 221-1 du Code de la consommation qui dispose que les services doivent, dans des

conditions normales d’utilisation, ou dans d’autres conditions raisonnablement prévisibles par

le professionnel, présenter la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre »).

31. Ski. Application de l’ancien art. L. 221-1 C. consom. à l’exploitant d’un télésiège, mais

rejet de l’action en l’absence de preuve que le télésiège n’aurait pas présenté la sécurité qu’on

peut attendre d’un tel matériel, sa défaillance ou son dysfonctionnement le rendant dangereux

n’étant pas établis. CA Aix-en-Provence (10e ch.), 13 mars 2014 : RG n° 12/15930 ; arrêt

n° 2014/136 (blessure d’une skieuse par le télésiège dont elle descendait ; application de la

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solution classique : la responsabilité de l'exploitant d'une remontée mécanique ne peut être

engagée, s'agissant d'un accident survenu à un skieur, au moment où il descend du télésiège,

que sur le fondement d'une obligation de sécurité de moyens, la faute n’étant pas établie en

l’espèce).

Responsabilité de l’exploitant d’un domaine skiable, tenu d’une obligation de moyens, qui a

manqué à son obligation générale de sécurité, en négligeant non seulement de procéder à cet

endroit précis à une signalisation spécifique, mais encore en omettant de mettre en place un

dispositif de protection adéquat sous la forme de filets. Cass. civ. 1re, 17 février 2011 : pourvoi

n° 09-71880 (N.B. l’arrêt de cassation, contrairement à l’arrêt d’appel, ne vise pas explicitement

le texte), rejetant le pourvoi contre CA Paris, 5 octobre 2009 (« force est de constater que

l’exploitant, en négligeant non seulement de procéder à cet endroit précis à une signalisation

spécifique mais encore de mettre en place un dispositif de protection adéquat sous la forme de

filets, a manqué à son obligation générale de sécurité au sens de l’ancien art. L. 221-1 du Code

de la consommation et qu’il est entièrement responsable des conséquences de l’accident »).

32. Supermarchés : accident de piétons. L’hypothèse des supermarchés, qui est celle de l’arrêt

de cassation, est un peu à la frontière des produits et des services, puisque l’exploitant distribue

des produits, ce qui implique une information, un emballage correct, la transmission des

rappels, etc. et que par ailleurs, l’organisation même des magasins en libre-service peut poser

des problèmes de sécurité (sols, rayonnages, caddies, etc.). § V. d’ailleurs illustrant cette

proximité : absence de preuve d’un manquement de l’exploitant à son obligation générale de

sécurité, la défectuosité de l’emballage n’étant pas établie (douzaine de flûtes dans un socle en

carton recouvertes d’un film plastique dont la cliente prétendait qu’il était détérioré). CA Dijon

(1re ch. civ.), 3 juillet 2012 : RG n° 10/01226 (cliente blessée après le passage en caisse par la

chute d’une flûte à champagne dont un éclat l’a atteint à l’œil ; absence d’application de l’ancien

art. 1384 al. 1er, la cliente étant à ce moment devenue propriétaire des flûtes ; N.B. les motifs

ne visent pas explicitement l’ancien art. L. 221-1 C. consom., mais la cliente invoquait ce texte

en évoquant à cette occasion l’obligation générale de sécurité).

L’art. L. 221-1 C. consom. ne prend aucune position sur la nature du lien contractuel ou

délictuel entre les parties ; le simple fait d'effectuer des courses dans un magasin n'entraîne pas

la création d'une relation contractuelle tant que le client n'a pas franchi les caisses et payé ses

achats. CA Riom (3e ch. civ. et com.), 1er mars 2017 : RG n° 15/02044 (le magasin n’est pas

tenu d'une obligation contractuelle de sécurité ; rejet de l’art. 1147 invoqué par la cliente et

application des règles de la responsabilité délictuelle, en l’espèce la responsabilité du fait des

choses de l’ancien art. 1384 al. 1er C. civ. ; action rejetée, la preuve n’étant pas rapporté de

l’anormalité d’un sol humide au rayon marée de l’établissement).

* Portes automatiques. Aucun manquement, du fabricant de portes automatiques, aux règles de

sécurité des consommateurs de produits et services prévues à l'article L. 221-1 C. consom. ne

peut être retenu, dès lors qu'il n'est pas démontré un dysfonctionnement de la chose pas plus

qu’une faute de celui-ci au titre du devoir de conseil. CA Pau (1re ch.), 14 mai 1997 : RG n°

95000256 ; Juris-Data n° 1997-042318 (accident d’une personne âgée lors du passage d’une

porte automatique ; supermarché condamné par le jugement, devenu définitif, sur le fondement

de l’ancien art. 1384 al. 1er, aux motifs que la porte s’était refermée au passage de la cliente et

se retournant contre le fabricant en qualité de subrogé dans les droits de la victime sur le

fondement l’ancien art. L. 221-1 C. consom. ; rejet également de l’action délictuelle au titre de

la garde de la structure, le supermarché étant devenu le gardien de l’appareil, compte tenu

notamment du délai de deux ans écoulé depuis son installation ; N.B. 1 l’arrêt qualifie la règle

posée par l’ancien art. L. 221-1 C. consom. de « règle de bon sens » ; N.B. 2 l’arrêt estime que

l’exploitant du supermarché a l’obligation d’assurer la sécurité de sa clientèle, notamment en

mettant en garde les personnes handicapées sur le danger des portes automatiques).

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* Rayonnage. Est responsable, sur le fondement de l’ancien art. 1384 al. 1er C. civ., l’exploitant

d’un supermarché, en qualité de gardien d’un objet métallique qui était placé à mi-hauteur

d'homme, sans protection particulière, dans un rayon vers lequel les clients étaient attirés par

une guirlande lumineuse un jour d'affluence, et qui se trouvait dès lors dans une position

anormale. CA Angers (ch. civ. A), 9 décembre 2014 : RG n° 13/03115 ; Juris-Data n° 2014-

031320 (cliente se blessant grièvement à l’œil en chutant sur un objet métallique dépassant d’un

présentoir au rayon rideau ; art. L. 221-1 C. consom. invoqué à titre subsidiaire par la victime,

après l’ancien art. 1384 al. 1er).

* Saisie d’un article en rayon. Absence de responsabilité de l’exploitant d’un supermarché, sur

le fondement de l’ancien art. L. 221-1 C. consom., de l’accident subi par une cliente qui a fait

tomber sur son pied un colis dont le poids l’a surpris, dès que le dommage ne vient pas du colis

mais de sa manipulation, que rien ne pouvait lui indiquer que la manipulation de ce colis pouvait

provoquer un dommage, qu’aucun dysfonctionnement du service de vente en libre-service n'est

mis en évidence et que le fait de ne pas inviter les clients à se faire aider en cas de besoin, à le

supposer établi, ce qui n'est pas le cas, ne constitue pas, en soi, une violation de ce texte. CA

Aix-en-Provence (10e ch.), 19 mars 2015 : RG n° 14/01637 ; arrêt n° 2015/136 ; Juris-Data

n° 2015-009254 (cliente saisissant un colis, dont le poids l’a surpris, ce qui l’a incité à le placer

rapidement dans le caddie, qui s’est dérobé, provoquant la chute du colis sur son pied ; arrêt

rejetant au préalable la responsabilité du supermarché sur le fondement de l’ancien art. 1384 al.

1er, dès lors d’une part, que la garde du caddie avait été transférée à la cliente, aucune preuve

du caractère défectueux du chariot n’étant rapportée et, d’autre part, dans un magasin en libre-

service dans lequel la clientèle accède elle-même aux produits mis en vente et les dépose dans

un chariot, la garde d'une marchandise inerte est transférée au client qui a le pouvoir d'en

surveiller et d'en contrôler le maniement et partant, sauf circonstance particulière, le pouvoir

d'éviter que la chose ne cause un dommage).

33. Supermarchés : accident de caddies. Le tribunal a écarté à bon droit l'application des

dispositions de l’ancien art. L. 221-1 C. consom., ce texte prévoyant les conditions de la mise

en œuvre de la responsabilité du seul fabriquant, producteur ou vendeur d'une chose ou d'un

produit dangereux, et non pas de celui, propriétaire ou détenteur de ce produit ou de cette chose,

qui le met à la disposition d'un utilisateur. CA Grenoble (2e ch. civ.), 9 mai 2017 : RG

n° 14/01945 ; Juris-Data n° 2017-009662 (renversement d’un chariot lourdement chargé par

un artisan).

Une grande surface de bricolage ne manque pas aux obligations résultant de l'art. L. 221-1 C.

consom. dès lors que l'accident mortel causé par la chute des plaques d'aggloméré achetées par

un client et chargées par lui sur un chariot de transport mis à sa disposition a pour origine les

modalités inadaptées de chargement par ce client. CA Poitiers (3e ch. civ.), 19 décembre

2007 : RG n° 06/02333 ; Juris-Data n° 2007-362689 (décès de l’enfant du client). §

Responsabilité délictuelle pour faute des employés qui n’ont pas mis en garde le client sur

l’inadaptation de son chargement. Même arrêt. § Comp. : est inapplicable à l’accident provoqué

par le renversement d’un chariot, l’ancien art. L 221-1 C. consom., dès lors que ce texte

s'applique aux produits et services que le professionnel propose à la vente, et non pas au matériel

qu'il met à la disposition du public dans l'enceinte de son établissement ; même si,

accessoirement au contrat de vente, le vendeur est tenu d'une obligation générale de sécurité

relativement à ce matériel, il apparaît que la société a satisfait à cette obligation, dès lors que

l'accident n'est pas dû à un vice qu'aurait présenté son chariot, mais à son utilisation anormale

par le client. CA Orléans, 12 mars 2007 : RG n° 06/01289 (client blessé au pied par le chariot

qu'il poussait et qui s’est renversé sous le poids de son chargement ; 1/ action également

infondée sur la garde, le client étant devenu le gardien du chariot ; 2/ faute d’un préposé qui a

reconnu avoir aidé le client à charger le chariot, en vantant sa stabilité, en dépit de son

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inadaptation à la lourdeur de la charge, engageant la responsabilité de son commettant, mais

faute de la victime, artisan habitué à transporter des matériaux qui ne pouvait ignorer les risques

de cette manœuvre).

Sur les accidents de caddies, V. plus généralement la synthèse n° 3 (Obs n° 3).

34. Traitement anti-parasitaire. Il résulte des dispositions combinées des articles 1787 C. civ.

et L. 221-1 C. consom., que l’entrepreneur est garant de la sécurité des produits qu’il met en

œuvre et de leur innocuité sur la santé des personnes dans des conditions d’utilisation normales

ou du moins prévisibles pour un professionnel ; cette obligation de sécurité ne revêt pas les

caractères d’une obligation de résultat, à laquelle le professionnel n’échappe que par la preuve

d’une cause étrangère, contrairement à ce qu’a énoncé le tribunal, mais constitue une obligation

de moyens, certes renforcée lorsque le produit mis en œuvre est intrinsèquement dangereux ;

l’entreprise s’acquitte de cette obligation par l’observation, dont la preuve lui incombe, des

règles d’information, de prudence et de surveillance qu’impose l’emploi d’un tel produit. CA

Angers (1re ch. A), 11 mars 2008 : RG n° 07/00098 ; Legifrance (incendie dans des combles

à la suite d’un traitement anti-parasitaire).

35. Transport. V. pour une décision peu claire, mais semblant ne pas appliquer le texte :

obligation de résultat pesant sur le contractant qui s’est engagé à transporter sain et sauf les

clients par car en Pologne et rejet de l’argument selon lequel il ne serait qu’un mandataire du

transporteur, en vertu d’un accord avec ce dernier, inopposable aux passagers. CA Paris (17e

ch. A), 2 mai 2006 : RG n° 04/12445 (arrêt ayant noté au préalable que les clients invoquaient

la loi de 1992 sur les agences de voyages, l’art. L.221-1 C. consom. et l’obligation de résultat).

4° AUTONOMIE DE L’OBLIGATION

40. Nature délictuelle ou contractuelle de l’obligation générale de sécurité. L’art. L. 221-1 C.

consom. ne prend aucune position sur la nature du lien contractuel ou délictuel entre les parties ;

le simple fait d'effectuer des courses dans un magasin n'entraîne pas la création d'une relation

contractuelle tant que le client n'a pas franchi les caisses et payé ses achats. CA Riom (3e ch.

civ. et com.), 1er mars 2017 : RG n° 15/02044 (le magasin n’est pas tenu d'une obligation

contractuelle de sécurité ; rejet de l’art. 1147 invoqué par la cliente et application des règles de

la responsabilité délictuelle, en l’espèce la responsabilité du fait des choses de l’ancien art. 1384

al. 1er C. civ. ; action rejetée, la preuve n’étant pas rapporté de l’anormalité d’un sol humide au

rayon marée de l’établissement). § Comp. CA Nîmes (1re ch. A), 9 décembre 1999 : RG n°

1501/97 ; Juris-Data n° 1999-107664 (en vertu de l’ancien art. L. 221-1 C. consom.,

l'obligation de sécurité des producteurs est contractuelle et distincte de la garantie des vices

cachés).

41. Décisions privilégiant le droit commun de la responsabilité contractuelle. V. par exemple

privilégiant la responsabilité contractuelle de droit commun, pour la Cour de cassation : Cass.

civ. 1re, 22 janvier 2009 : pourvoi n° 07-21843 (accrobranche ; arrêt rejetant le pourvoi sur le

seul fondement de la responsabilité contractuelle et l’absence de faute dans le cadre d’une

obligation de moyens, sans examiner le second moyen visant l’art. L. 221-1 C. consom.) - Cass.

civ. 1re, 13 décembre 2012 : pourvoi n° 11-23786 (portique de lavage de voiture ; visa de l’art.

1789, sans aucune allusion dans la décision à l’ancien art. L. 221-1 C. consom. appliquée par

le jugement), cassant Jur. proxim. Angoulême, 2 mai 2011 : Dnd.

Pour les juges du fond : CA Versailles (3e ch.), 10 mars 2006 : RG n° 04/05195 (rejet de

l’action explicitement fondée sur l’art. L. 221-1 C. consom., sans aucune allusion au texte, au

motif que la preuve du défaut n’est pas établi) - CA Paris (17e ch. sect. A), 14 avril 2008 : RG

n° 06/11174 (incident de plongée sous-marine ; arrêt affirmant que s'agissant des obligations

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de l'organisateur d'une activité sportive, il résulte des dispositions de l'article 1147 du code civil

sur lequel l'appelant fonde sa réclamation, que celui-ci est tenu envers les participants d’une

obligation de sécurité de moyens, alors que le demandeur invoquait aussi l’ancien art. L. 221-1

C. consom.) - CA Montpellier (1re ch. D), 2 juillet 2008 : RG n° 08/00737 (paralysie à la suite

d’un plongeon dans la piscine d’un camping ; action fondée sur l’ancien art. 1147 C. civ. et

d’une obligation de sécurité de moyens, alors que les demandeurs invoquaient aussi l’ancien

art. L. 221-1 C. consom. ; absence de preuve d’une faute) - CA Rennes (7e ch.), 13 mai 2009 :

RG n° 06/01160 ; arrêt n° 204 (responsabilité du médecin, le patient invoquant les anciens

art.1147 C. civ. et L. 221-1 C. consom.) - CA Rennes (7e ch.), 4 novembre 2009 : RG

n° 08/02524 (insert de cheminées ; responsabilité retenue au titre de l’ancien art. 1147 C. civ.,

alors que le demandeur visait subsidiairement l’ancien art. L. 221-1 C. consom.) - CA Nîmes

(1re ch. civ. B), 27 avril 2010 : RG n° 07/02299 (rupture de la fourche d’un VTT dont le modèle

avait fait l’objet d’un rappel par le fabricant qui en avait décelé la faiblesse ; texte visé par le

demandeur, mais non repris par la Cour) - CA Bordeaux (1re ch. civ. B), 12 janvier 2012 : RG

n° 10/05917 ; Juris-Data n° 2012-018099 (responsabilité d’un restaurant pour le dommage

subi par une cliente qui a été blessée à la bouche en consommant le dessert qui lui a été servi et

qui contenait des morceaux de plastique pointus dissimulés dans une boule de glace, sur le seul

fondement de l’art. 1147 C. civ., alors que la victime invoquait aussi l’ancien art. L. 221-1 C.

consom.) - CA Colmar (2e ch. civ. B), 11 mai 2012 : RG n° 11/02059 ; arrêt n° 356/2012

(fourniture de courant).

Pour une limitation explicite de la portée du texte : les art. L. 221-1 C. consom. ancien et L

1110-5 CSP, de portée générale, posent des principes relatifs à la sécurité des produits et

services due aux consommateurs dont on ne peut déduire un régime spécifique de responsabilité

entre professionnels ; ainsi, l’ancien art. L. 221-1 C. consom. est issu des dispositions de la loi

du 21 juillet 1983 relative à la sécurité des consommateurs et figure dans un chapitre instaurant

des mesures de prévention. CA Amiens (1re ch. civ.), 4 avril 2017 : RG n° 15/01416

(implantation d'une prothèse de hanche ; l'article L. 1110-5 CSP rappelle le principe de

l'obligation de sécurité pesant sur les fournisseurs de produits de santé à l'égard des malades et

usagers du système de santé ; impossibilité de contourner les règles sur la responsabilité du fait

des produits dérectueux par ces dispositions, en l’absence de preuve d’un défaut du produit).

V. aussi difficile à interpréter : Cass. civ. 1re, 17 février 2011 : pourvoi n° 09-71880 (N.B.

l’arrêt de cassation, contrairement à l’arrêt d’appel, ne vise pas explicitement le texte et se réfère

à une obligation de sécurité de moyens), rejetant le pourvoi contre CA Paris, 5 octobre 2009

(référence explicite à l’ancien art. L. 221-1 C. consom.).

42. Décisions privilégiant le droit commun de la responsabilité délictuelle. V. par exemple

pour la responsabilité délictuelle de droit commun : a commis une faute, engageant sa

responsabilité sur le fondement de l’ancien art. 1383 C. civ., l’exploitant d’un supermarché qui

a omis d'informer ses clients, par panneaux ou annonces, des dangers créés par tout enfant

circulant à vélo dans la zone de vente et, le cas échéant, d'interdire cette activité à l'intérieur de

ses locaux. CA Aix-en-Provence (10e ch.), 27 février 2014 : RG n° 12/14939 ; arrêt

n° 2014/108 (chute dans un supermarché provoquée par un enfant roulant sur un mini-vélo ;

N.B. la victime n’invoquait plus en appel l’ancien art. L. 221-1 C. consom., mais seulement la

responsabilité délictuelle pour faute), annulant TI Marseille, 19 juin 2012 : RG n° 1112-25

(jugement saisi d’une demande sur le fondement de l’ancien art. L. 221-1 C. consom. et retenant

la responsabilité du magasin au titre de l’obligation de sécurité de moyens des établissements

recevant du public, alors qu’il avait choisi ce fondement sans solliciter les observations des

parties). § Pour d’autres illustrations : CA Angers (ch. civ. A), 9 décembre 2014 : RG

n° 13/03115 ; Juris-Data n° 2014-031320 (supermarché ; cliente se blessant grièvement à l’œil

en chutant sur un objet métallique dépassant d’un présentoir au rayon rideau ; art. L. 221-1 C.

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consom. invoqué à titre subsidiaire par la victime, après l’ancien art. 1384 al. 1er C. civ. seul

visé par l’arrêt ).

43. Décisions citant simultanément le droit commun de la responsabilité contractuelle et

l’ancien art. L. 221-1 C. consom. Les décisions recensées montrent que les juges visent parfois

simultanément la responsabilité contractuelle traditionnelle et l’ancien art. L. 221-1 C. consom.,

le plus souvent sans préciser comment les deux dispositifs s’articulent. V. par exemple : CA

Aix-en-Provence (10e ch.), 2 octobre 2007 : RG n° 06/01060 ; Legifrance (accrobranche ;

obligation de sécurité de moyens) - CA Aix-en-Provence (10e ch.), 16 octobre 2007 : RG n°

06/433 ; Legifrance ; Juris-Data n° 2007-358327 (idem) - CA Aix-en-Provence (10e ch.), 17

septembre 2008 : RG n° 07/05516 ; Legifrance ; Juris-Data n° 2008-005538 (idem) - CA

Versailles (14e ch.), 14 janvier 2009 : RG n° 08/04419 (installation d’une alarme) - CA

Chambéry (2e ch.), 3 juillet 2014 : RG n° 13/01747 ; Juris-Data n° 2014-015597 (cinéma) -

CA Toulouse (2e ch. sect. 1), 4 mars 2015 : RG n° 12/04837 ; arrêt n° 126 (obligation

d’information trouvant sa « traduction » dans l'ancien art. L. 221-1 C. consom.) - CA

Chambéry (2e ch.), 2 juillet 2015 : RG n° 14/01774 (parapente) - CA Reims (1re ch. civ. sect.

inst.), 10 juin 2016 : RG n° 15/02097 (parc de loisir).

V. aussi : l’obligation du fabricant, en vertu de l’ancien art. 1147 C. civ., de livrer un produit

exempt de tout défaut de nature à causer un danger est renforcée par l’ancien art. L 221-1 C.

consom. CA Lyon (1re ch.), 14 juin 2001 : RG n° 1998/06451 ; Juris-Data n° 2001-146864

(incendie provoqué par un sèche-cheveux). § Comp. CA Grenoble (2e ch. civ.), 18 décembre

1995 : Juris-Data n° 1995-047638 (l'ancien art. L. 221-1 C. consom. n'a fait que confirmer la

jurisprudence antérieure).

44. Décisions citant simultanément le droit commun de la responsabilité délictuelle et

l’ancien art. L. 221-1 C. consom. Rappr. pour une décision admettant implicitement cette

combinaison : CA Versailles (3e ch.), 18 mai 2001 : RG n° 98/08313 ; Juris-Data n° 2001-

257987 (le distributeur a commis une faute au sens de l’ancien art. 1382 C. civ. et de l'art. L.

221-1 C. consom.) - CA Riom (3e ch. civ. et com.), 1er mars 2017 : RG n° 15/02044

(application de l’art. 1384 al. 1er, dès lors que l’ancien art. L. 221-1 C. consom. ne donne aucune

indication sur la nature de l’obligation).

45. Décisions citant simultanément la responsabilité du fait des produits défectueux et

l’ancien art. L. 221-1 C. consom. Lorsque la responsabilité du fait des produits défectueux est

applicable, elle s’impose nécessairement et le visa de l’ancien art. L. 221-1 C. consom. ne vient

qu’en complément. V. par exemple : CA Versailles (14e ch.), 10 décembre 2008 : RG

n° 08/01728 (expertise ; souplesse de la chaussure ayant provoqué une chute par un excès

soudain d’adhérence ; un fabricant de chaussures est soumis aux dispositions des articles 1386-

1 s. C. civ. et L. 221-1 C. consom.) - CA Caen (1re ch. civ.), 23 octobre 2012 : RG n° 09/02445

(fourniture de courant).

V. aussi : CA Reims (ch. civ. sect. 1), 16 février 2009 : RG n° 07/02129 (explosion de la vitre

d’un insert ; responsabilité retenue sur la fondement de la responsabilité du fait des produits

défectueux, le client invoquant aussi l’ancien art. L. 221-1 C. consom., non cité par la cour).

46. Décisions ne se fondant que sur l’ancien art. L. 221-1 C. consom. Pour des illustrations

résumées ci-dessus : CA Dijon (ch. civ. A), 15 décembre 2009 : RG n° 08/02082 (bowling) -

CA Montpellier (1re ch. sect. B), 23 mars 2010 : RG n° 09/05237 (centre de bronzage) - CA

Bordeaux (2e ch. civ.), 21 février 2012 : RG n° 10/0430 (location de vélos sans casque) - CA

Grenoble (2e ch. civ.), 24 février 2015 : RG n° 12/01374 (logement en meublé ; art. L. 221-1

C. consom. applicable au bailleur et application de l’ancien art. 1384 al. 1er C. civ., à l’encontre

du régisseur de l’ensemble immobilier en qualité de gardien) - CA Aix-en-Provence (10e ch.),

19 mars 2015 : RG n° 14/01637 ; arrêt n° 2015/136 ; Juris-Data n° 2015-009254 (cliente

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saisissant un colis, dont le poids l’a surpris, ce qui l’a incité à le placer rapidement dans le

caddie, qui s’est dérobé, provoquant la chute du colis sur son pied ; arrêt rejetant au préalable

la responsabilité du supermarché sur le fondement de l’ancien art. 1384 al. 1er) CA Caen (1re

ch. civ.), 25 août 2015 : RG n° 12/01818 (accrobranche) - CA Riom (3e ch. civ. et com.), 1er

mars 2017 : RG n° 15/02044 (victime invoquant l’ancien art. L. 221-1 C. consom. et l’ancien

art. 1147 C. civ.).

V. aussi : Cass. com., 9 décembre 1997 : pourvoi n° 95-12086 (salarié blessé par l’explosion

d’une pile, aucune erreur de manipulation ne lui étant imputable ; rejet de la première branche

apparemment fondée sur le seul art. L. 221-1 C. consom. et de la seconde, au motif que les art.

1135 et 1147 sont inapplicables en l’absence de défaut).

5° NATURE DE L’OBLIGATION

47. Obligation de résultat : responsabilité du fait des matériels. Pour des décisions estimant,

en se fondant sur l’ancien art. L. 221-1 C. consom., que le professionnel qui offre un service est

tenu d’une obligation de sécurité de résultat quant aux matériels qu’il utilise, V. pour les juges

du fond : CA Montpellier (1re ch. sect. B), 23 mars 2010 : RG n° 09/05237 (centre de

bronzage).

Comp. pour la Cour de cassation, sans référence au texte : Cass. civ. 1re, 11 janvier 2017 :

pourvoi n° 15-24696 ; arrêt n° 54 (parapente : après avoir, à bon droit, retenu que le contrat

formé entre la personne qui participe à un stage de parapente et le professionnel qui l’organise

met à la charge de celui-ci une obligation de sécurité de résultat en ce qui concerne le matériel

utilisé pour exécuter sa prestation).

48. Obligation de moyens. Pour des illustrations de décisions combinant l’ancien art. L. 221-1

C. consom. et une obligation de moyens : CA Angers (1re ch. A), 11 mars 2008 : RG n°

07/00098 ; Legifrance (entrepreneur pour un traitement antiparasitaire) - CA Aix-en-Provence

(10e ch.), 13 mars 2014 : RG n° 12/15930 ; arrêt n° 2014/136 (blessure d’une skieuse par le

télésiège dont elle descendait, cette phase de descente n’imposant traditionnellement qu’une

obligation de moyens).

B. ÉLÉMENTS DE COMMENTAIRE DE L’ARRËT DU 20 SEPTEMBRE 2017

50. Présentation. La solution posée par l’arrêt du 20 septembre 2017 - « une entreprise de

distribution est débitrice à l’égard de la clientèle d’une obligation générale de sécurité de

résultat » - est apparemment nouvelle, en tout cas pour la Cour de cassation : l’ancien art. L.

221-1 C. consom. est pour la première fois utilisé pour fonder une action en réparation d’un

préjudice dans un établissement accueillant du public, sans aucune référence à une

responsabilité délictuelle ou contractuelle. La description ci-dessus des décisions antérieures

des juges et de la Cour permet toutefois de mesurer plus exactement l’originalité et la portée de

l’arrêt.

51. Autonomie de l’obligation. L’arrêt de la Cour de cassation casse une décision ayant refusé

d’appliquer l’ancien art. L. 221-1 C. consom. sans même examiner le second moyen concernant

le refus d’appliquer l’ancien art. 1384 al. 1er C. civ., en l’absence de preuve du caractère anormal

du tapis. Dans cette perspective, l’arrêt semble bien consacrer la possibilité de fonder

directement une action en réparation d’un préjudice sur l’obligation générale de sécurité de

l’art. L. 221-1 C. consom. Cette analyse peut être renforcée par la formule originale utilisée par

la Cour qui adosse cette obligation aux « entreprises de distribution », cette généralisation

s’appuyant implicitement sur le texte consumériste qui vise les distributeurs. La formule est

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pourtant ambiguë, car l’obligation de sécurité est qualifiée de « générale », ce qui recouvre les

produits et la façon dont ils sont distribués, ce qui en réalité correspond à ce qu’une décision

des juges du fond a appelé le « service de vente ». Au regard des décisions de cours d’appel

recensées, cette solution n’est pas nouvelle, quelques décisions se fondant déjà exclusivement

sur l’ancien art. L. 221-1 C. consom., même si la tendance majoritaire est plutôt de combiner le

texte avec les règles de la responsabilité délictuelle ou contractuelle, le texte consumériste

faisant à la fois office de fondement général et de mécanisme subsidiaire pouvant le cas échéant

venir combler leurs lacunes (V. ci-dessous).

52. Nature de la responsabilité. L’ancien art. L. 221-1 C. consom. ne précise pas la nature de

la responsabilité concernée. L’arrêt de cassation ne tranche pas non plus cette question, même

si l’expression « obligation de sécurité de résultat » évoque plutôt la responsabilité

contractuelle. Les décisions du fond recensées adoptent sur ce point des solutions diverses, mais

elles admettent souvent que l’obligation « générale » de sécurité du texte puisse se combiner

avec des responsabilités contractuelle ou délictuelle selon les cas. Le cas des supermarchés

illustre parfaitement la situation puisqu’en général la responsabilité est délictuelle sauf pour

l’utilisation des chariots qui font l’objet d’un prêt à usage. Les obligations mises à la charge des

producteurs et distributeurs de produits et services (contrôle de la conformité, information,

alerte, etc.) pourraient aussi être considérées comme des obligations légales. Le choix entre les

qualifications n’est pas sans conséquences, notamment pour la force majeure, la définition en

matière contractuelle étant désormais différente de la définition jurisprudentielle classique

toujours en vigueur en matière délictuelle. Par ailleurs, le traitement des produits défectueux

doit nécessairement s’inscrire dans le cadre de la responsabilité spécifique figurant désormais

aux art.1245 s. C. civ. Enfin, il faut rappeler que le projet de réforme du droit de la responsabilité

civile envisage de transférer à la responsabilité délictuelle la réparation des préjudices corporels

survenus à l’occasion de l’exécution d’un contrat.

53. Nature de l’obligation. Selon la Cour de cassation, l’obligation générale de sécurité des

entreprises de distribution de l’art. L. 221-1 C. consom. est une obligation de résultat. Sur ce

point, l’arrêt est totalement novateur, cette originalité étant encore renforcée par le fait qu’elle

s’applique à une « entreprise de distribution » et non à un contrat déterminé. La solution est

différente des solutions antérieures, qu’il s’agisse des décisions précitées, qui ont limité

l’obligation de résultat à des hypothèses précises (fourniture de courant, matériel utilisé pour

l’exécution du contrat) ou celles adoptées de façon plus générale pour l’obligation de sécurité

qui n’est que de moyens lorsque le créancier joue un rôle actif dans l’exécution du contrat :

accidents de quai avant le revirement de 1989, tire-fesses, télésiège lors de l’embarquement ou

du débarquement, hôtel, etc. Il n’y a guère que dans les contrats de transport qu’un

consommateur peut bénéficier d’une obligation de résultat tout en conservant une certaine

liberté de mouvement.

Sur ce point, la pérennité de la solution proposée par la Cour semble douteuse, quand on la

compare à la multitude d’obligations qui peuvent être en jeu : information, emballage,

agencement du magasin, exposition des produits, matériels utilisés pour les rayonnages, sols,

responsabilité du fait des préposés, rôle dans les dommages causés par les clients, etc. Il est

difficile d’envisager comment toutes ces hypothèses pourront être traitées par un seul régime

uniforme, rendant systématiquement le distributeur responsable sauf preuve d’une faute de la

victime ou d’un cas de force majeure qui en pratique est rarement admise, ce qui semble peu

compatible avec certaines des hypothèses traitées par les juges du fond plus haut.

Pour affaiblir l’arrêt, on pourrait invoquer la formulation du moyen (« qu’en affirmant

péremptoirement ») et le fait que la Cour a voulu condamner un rejet de toute utilisation directe

de l’ancien art. L. 221-1 C. consom. affirmé de façon trop catégorique, mais cette interprétation

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cadre mal avec la netteté de la formulation du conclusif et la référence à une obligation de

résultat qui n’était dans ce cas nullement indispensable.

Il est possible également de s’interroger sur les conséquences de cette solution quant aux autres

services : au vu des exemples traités ci-dessus, il paraît impossible d’appliquer une obligation

de résultat à des entreprises de parcours acrobatique dans les arbres (sauf pour les matériels), à

un cinéma, un hôtel, etc.

54. Impact pratique. Traditionnellement, la responsabilité de l’exploitant du supermarché est,

sauf pour les caddies, de nature délictuelle : faute, fait des choses et fait des préposés.

L’application uniforme d’une obligation de résultat risque de modifier certaines solutions, dans

un sens clairement favorable au consommateur.

Ainsi, si un client glisse sur le sol, il ne semble plus nécessaire de prouver le caractère

anormalement glissant de celui-ci et l’exonération totale pour force majeure risque d’être

quasiment impossible. Dans l’espèce traitée par la Cour, il n’est sans doute pas imprévisible

qu’un client trébuche sur un tapis, même antidérapant.

Certaines hypothèses sont en revanche plus incertaines. Lorsqu’un client s’empare d’un produit

et le laisse tomber sur son pied, l’exploitant est-il présumé responsable ou cette hypothèse

échappe-t-elle à l’obligation de résultat ? Si un enfant roulant à vélo renverse un client, le

supermarché est-il là encore responsable ? Son exonération par la force majeure risque d’être

illusoire et c’est dans l’exercice de recours contre ses parents que le supermarché pourrait

atténuer sa responsabilité finale. Dans cette perspective, il est certain que les discussions sur les

fautes des victimes vont se multiplier.

55. Conclusion. La portée de l’arrêt du 20 septembre qui n’a pas été retenu pour une publication

au bulletin ne doit pas être surestimée. L’impression d’ensemble est mitigée.

En attachant un rôle central à l’obligation générale de sécurité de l’ancien art. L. 221-1 C.

consom., devenu L. 421-3, découlant du « service de vente » offert par les entreprises de

distribution, l’arrêt vient consacrer une évolution qui se faisait jour depuis des années chez les

juges du fond et qui était déjà apparue moins nettement dans d’autres arrêts de la Cour de

cassation. Cette évolution semble plutôt positive et la Cour sera peut-être amenée à la préciser

et la renforcer pour d’autres services, comme ont déjà pu l’illustrer les cours d’appel.

En qualifiant sans nuance cette obligation de résultat, l’arrêt emporte moins la conviction et la

mise en pratique d’un tel principe risque de se heurter très vite à la variété des situations qu’il

prétend embrasser. Au fond, la Cour de cassation semble avoir toujours eu du mal à traiter les

dommages corporels sous une forme composite, en distinguant par exemple ceux impliquant

des préposés, les matériels utilisés pour exécuter l’obligation (hésitation entre 1384 al. 1er, la

responsabilité contractuelle du fait des choses comme dans l’affaire du cerceau et obligation de

résultat) et ceux dont la détention a été transférée au cocontractant, les manquements à

l’information, etc. Les décisions des juges du fond montrent pourtant que l’obligation générale

de sécurité peut aider à structurer cette constellation.

L’obligation générale de sécurité de l’ancien art. L. 221-1 s. C. consom, transféré aux art. L.

421-1 s. semble en réalité naturellement composite, tant quant à sa nature que son intensité.

Certaines obligations sont incontestablement légales comme l’information des autorités ou le

rappel de produits, qui doit s’accomplir en l’absence de tout manquement contractuel (tous les

produits ne sont pas défectueux). Par ailleurs, certaines obligations s’inscrivent dans des

contrats qui peuvent avoir leur règles propres, tant que le projet de réforme n’aura pas généralisé

en la matière la responsabilité délictuelle. En dehors de tout contrat, l’obligation peut

correspondre à une responsabilité légale ou extra-contractuelle. L’art. L. 221-1 peut donc

constituer la source d’une obligation propre ou le fondement d’une obligation ayant son propre

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régime (responsabilité du fait des produits défectueux). Le texte pourrait aussi influencer le

régime d’une obligation préexistante ou mieux justifier ces altérations actuelles : ainsi, la

responsabilité du prêteur de caddie suppose qu’il ait eu connaissance du vice, solution qui n’est

pas respectée, soit parce que le prêt est qualifié de prêt intéressé et non gratuit, soit parce qu’on

évoque le régime spécifique de la gratuité d’affaires, soit parce qu’on étend au prêt à usage la

présomption de connaissance des vices existant dans les ventes professionnelles, ce qui pourrait

s’expliquer finalement plus commodément par une référence à cette obligation générale de l’art.

L. 221-1 C. consom. Enfin, ces rôles multiples pourraient même conduire à combler certaines

lacunes, comme l’illustre le projet de réforme du droit de la responsabilité. Si, en effet, les

dommages corporels en cours de contrat sont traités par la responsabilité extra-contractuelle,

que se passera-t-il pour les dommages causés par un bien transmis à un consommateur ? Pour

reprendre l’exemple du caddie, privé de la responsabilité du fait des choses, le recours sur les

obligations du prêteur lui sera retiré, puisqu’il n’existe aucune responsabilité délictuelle pour

des biens défectueux dont la garde a été transmise.

ANNEXE : CASS. CIV. 1re, 20 SEPTEMBRE 2017, pourvoi n° 16-19109 ; non publié,

cassant CA Poitiers (3e ch. civ.), 21 janvier 2015 : RG n° 14/01042

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l’ancien art. L. 221-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à

l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X., qui avait fait une chute sur un tapis anti-dérapant

placé devant un rayon situé dans un magasin exploité par la société Centre E. Leclerc

supermarchés charentais (la société) a, au vu d’un rapport d’expertise judiciaire, assigné la

société en réparation de ses préjudices ;

Attendu que, pour rejeter les demandes de M. X. tendant à l’indemnisation des conséquences

dommageables de sa chute, l’arrêt retient que l’ancien art. L. 221-1 du code de la

consommation, dans sa rédaction alors en vigueur, n’instaure aucun régime de responsabilité

autonome permettant à une victime de solliciter des dommages-intérêts pour réparer les

dommages causés par un manquement à l’obligation de sécurité ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’une entreprise de distribution est débitrice à l’égard de la clientèle

d’une obligation générale de sécurité de résultat, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 21 janvier 2015, entre les

parties, par la cour d’appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état

où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel

de Bordeaux ;

Condamne la société Centre E. Leclerc supermarchés charentais aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la SCP Claire Leduc et

Solange Vignaud, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, la somme de 3.000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera

transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

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Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président

en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXÉS au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour

M. X.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir débouté la victime d’une chute dans un grand magasin

de sa demande tendant à être indemnisée des conséquences dommageables de ladite chute ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE l’appelant invoque la responsabilité du Centre E. Leclerc aux

motifs que celui-ci aurait manqué à l’obligation de sécurité résultant de l’ancien art. L. 221-1

du Code de la consommation car le tapis de sol, non fixé, présentait des défauts de

positionnement alors que le carrelage était particulièrement glissant ;

AUX MOTIFS ENCORE QU’aux termes de l’ancien art. L. 221-1 du Code de la consommation

: « Les produits et les services doivent, dans des conditions normales d’utilisation ou dans

d’autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, présenter la sécurité à

laquelle on peut légitimement s’attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes » ;

que suite à l’arrêt de la CJCE du 25 avril 2002 (Commission c/ France, affaire C 52/00), cet

article n’instaure pas un régime de responsabilité autonome permettant de solliciter des

dommages et intérêts pour réparer les dommages causés par un manquement à l’obligation de

sécurité mais conserve son intérêt quant aux pouvoirs de contrôle accordés aux autorités

publiques relativement à la santé et à la sécurité des produits ; que la responsabilité du Centre

E. Leclerc ne peut donc être engagée sur ce fondement ;

ALORS QUE, D’UNE PART, une entreprise de distribution à prédominance alimentaire est

débitrice à l’égard de la clientèle d’une obligation générale de sécurité de résultat tirée de

l’ancien art. L. 221-1 du Code de la consommation, obligation de sécurité mise en relief par la

Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes qui

a clairement spécifiée que : « La protection physique des consommateurs sur les lieux de vente

et les surfaces d’exposition incombe aux vendeurs professionnels qui, conformément au Code

de la consommation et à son article L. 221-1, doivent prendre les précautions nécessaires » (cf.

ce qui a été rappelé par l’appelant à la page 6 de ses conclusions en réponse signifiées le 3

novembre 2014) ; qu’en affirmant péremptoirement que l’article 221-1 du Code de la

consommation n’instaurait aucun régime de responsabilité autonome permettant à une victime

de solliciter des dommages et intérêts pour réparer les dommages causés par un manquement à

l’obligation de sécurité, laquelle n’aurait d’intérêt qu’à l’endroit du pouvoir de contrôle accordé

aux autorités publiques relativement à la santé et à la sécurité des produits, la Cour viole par

fausse interprétation l’ancien art. L. 221-1 du Code de la consommation ;

ALORS QUE, D’AUTRE PART, ET EN TOUTE HYPOTHÈSE, s’évince ou encore ressort

de cet article L. 221-1 du Code de la consommation tel qu’il doit être interprété, l’existence

d’une obligation de sécurité qui s’impose à une grande surface à l’endroit des consommateurs,

ainsi que l’a précisé la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la

Répression des Fraudes (Bulletin officiel de la Concurrence, de la Consommation et de la

Répression des Fraudes n° 8 du 11 juillet 2003) ; qu’en jugeant comme elle l’a fait, sans

examiner le point pertinent de savoir si ce qui ressort de l’ancien art. L. 221-1 du Code de la

consommation ne met pas nécessairement à la charge de l’exploitant d’une grande surface une

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obligation de sécurité et de résultat à l’endroit des consommateurs, comme l’appelant le faisait

valoir, la Cour méconnaît son office au regard de l’article 12 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir débouté la victime d’un accident dans une grand surface

de sa demande d’indemnisation dirigée contre ladite grande surface ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE la présomption de responsabilité de l’article 1384, alinéa 1, du

Code civil à l’encontre de celui qui a sous sa garde la chose inanimée qui a causé un dommage

à autrui, rapporté par la victime, la preuve que la chose a été, ne fut-ce que pour partie,

l’instrument du dommage ; qu’une chose inerte ne peut être l’instrument d’un dommage si la

preuve n’est pas rapportée qu’elle occupait une position anormale ou qu’elle était en mauvais

état ; que l’appelant prétend que l’absence de fixation du tapis antidérapant, chose inerte, crée

une présomption de déplacement de ce tapis par la très importante clientèle du magasin un 24

décembre ou par les agents du Centre E. Leclerc, ce qui aurait conféré à ce tapis un caractère

dangereux ; qu’une telle présomption ne peut être retenue alors que l’assertion initiale de

Monsieur X. est d’avoir trébuché sur un tapis roulé à terre devant le rayon fruits et légumes ;

que, dans la sommation interpellative que l’appelant a fait délivrer, il fixe l’accident à 9 heures

du matin, soit à une heure à laquelle le tapis qui vient d’être posé, ne peut avoir eu le temps

d’être déplacé par les clients ;

ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES DES PREMIERS JUGES, QU’aux termes

des dispositions de l’article 1384 du Code civil, alinéa 1er, on est responsable des choses que

l’on a sous sa garde ; que l’application de ces dispositions suppose que soit rapportée par la

victime la preuve que la chose a été, en quelque manière et ne fut-ce que pour partie,

l’instrument du dommage ; en outre, une chose inerte ne peut être l’instrument d’un dommage

si la preuve n’est pas rapportée qu’elle occupait une position anormale ou qu’elle était en

mauvais état ; qu’en l’espèce, Monsieur Claude X. prétend, dans sa déclaration adressée à la

MACIF, que, le 24 décembre 2010 à Lagord, il faisait ses courses au magasin E. Leclerc, est

passé devant le rayon fruits et légumes et s’est pris les pieds dans un tapis roulé par terre, qu’il

n’avait pas vu, a perdu l’équilibre, est tombé et a ressenti une très forte douleur à l’épaule

droite ; qu’il résulte de la déclaration manuscrite de Monsieur Y., salarié du magasin E. Leclerc,

que Monsieur Claude X. a chuté sur un tapis au rayon fruits et légumes, aux termes de la

sommation interpellative du 13 décembre 2011, il précise que Monsieur Claude X. était tombé

sans qu’il ait pu voir les raisons de sa chute et que le responsable adjoint du magasin, il est

certain que les trois tapis devant le rayon étaient dépliés ; que s’il est établi au vu de ces éléments

que Monsieur Claude X. a chuté sur un tapis au rayon fruits et légumes du magasin E. Leclerc

à Lagord, la preuve n’est cependant pas rapportée au vu des pièces versées que ce tapis occupait

une position anormale, aucun témoignage n’étant rapporté sur les circonstances de la chute de

Monsieur Claude X. et le fait notamment que le tapis était roulé par terre et, les photographies

versées aux débats par Claude X., au demeurant non prises au moment de l’accident, ne

permettent pas de dire que les tapis posés sur un sol carrelé uniforme devant les étals de fruits

et légumes aient une surépaisseur anormale ;

ET AUX MOTIFS ENCORE TOUJOURS, A LES SUPPOSER ADOPTÉS, QUE Monsieur

Claude X., ne rapportant pas la preuve que le tapis au rayon fruits et légumes du magasin E.

Leclerc, a été, de par sa position anormale, l’instrument du dommage qu’il a subi à l’épaule

droite, la responsabilité de la société Centre E. Leclerc ne pouvant être engagée sur le fondement

de l’article 1384, alinéa 1, du Code civil, il convient de débouter le susnommé et la Caisse

Primaire d’Assurance Maladie de Charente Maritime de leurs demandes ;

ALORS QUE, D’UNE PART, la responsabilité du fait des choses inertes ne saurait se limiter

à l’anormalité de la position ou à la défectuosité de la chose, mais également par l’état de

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dangerosité initiale de ladite chose et des mesures prises par son gardien pour éviter tout

dommage, ce que celui-ci doit établir ; qu’il en va ainsi dans une grande surface, d’un tapis dans

un rayon fruits et légumes, non fixé au sol, en lui-même de nature à créer un état de dangerosité

initiale ; qu’en ne s’expliquant pas sur cette charnière des écritures de l’appelant de nature à

avoir une incidence directe sur la solution du litige (cf. notamment p. 10 et 11 des conclusions

en réponse signifiées le 3 novembre 2014), qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour viole

l’article 1384, alinéa 1, du Code civil tel qu’il doit être interprété ;

ET ALORS QUE, D’AUTRE PART, ET EN TOUTE HYPOTHESE, lorsque la chose a été

l’instrument d’un dommage, comme ce fut le cas en l’espèce, l’anormalité de sa position doit

être présumée dès lors que ladite chose est soumise à une exigence de repositionnement que ne

peut ignorer son gardien (cf. p. 11 des conclusions précitées) ; qu’en examinant pas le litige

sous cet angle, la Cour méconnaît de plus fort son office au regard des articles 455 du Code de

procédure civile et 12 du même Code.