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1 Liana Stefani «Il y a 5.000, 15.000, 200.000 ans... Une exposition sur la vie en Macédoine à l'époque préhistorique» La nouvelle exposition sur la période préhistorique en Macédoine, Musée Archéologique de Thessalonique 1 . in Arhaeologia ( sous press ) L'une des nouvelles expositions permanentes du Musée Archéologique de Thessalonique (M. A. de T.) est consacrée à la Préhistoire en Macédoine. La salle qui abrite l'exposition est située au niveau zéro du bâtiment et à proximité des salles d'expositions temporaires et de l'atrium, mais on y accède par l'entrée principale du Musée, la disposition intérieure du bâtiment ayant imposé l'utilisation d'un niveau différent du reste des salles des expositions permanentes. Les visiteurs sont amenés à ce niveau dès leur entrée par des panneaux et ils y sont également invités par les gardiens. Le but recherché est de faire suivre au visiteur la succession des unités des expositions dans l'ordre chronologique, mais il reste libre, cela s’impose, d'élire son propre parcours. Avant de passer à la présentation des grands axes selon lesquels l'exposition a été organisée au M. A. de T., il serait utile sans doute de débattre rapidement de la manière de présenter les antiquités préhistoriques dans les musées grecs, mais aussi du cadre dans lequel a évolué notre problématique et, enfin, des choix que nous avons été amenés à faire. Dans de nombreux musées européens, les civilisations/cultures humaines créées avant le début de l'histoire (sic), soit avant que les hommes n'apprennent à inscrire des pans de leur histoire, trouvent une place aux côtés des civilisations ayant une histoire 2 . Elles sont de surcroît présentées comme les matrices de toutes les réalisations et de toutes les évolutions successives. Dans les musées grecs, les collections consacrées à la Préhistoire d’une part, viennent en seconde position - 1 En 2005, le Conseil central Archéologique (KAS) a approuvé l'étude initiale sur le renouveau des expositions des collections du Musée archéologique de Thessalonique, étude menée sous la responsabilité du conservateur de l'époque, mr Gramménos, l'architecte mr. G. Niaouris et l'équipe des spécialistes. Durant l'été 2004, des modifications ont été apportées sur la planification des expositions tant sur le plan muséologique que sur le plan muséographique. Dans le même temps, ont été réunies selon des critères scientifiques toutes les données sur les matériaux nécessaires à la mise en valeur des objets ayant été sélectionnés de manière définitive. Dès avril 2006, au stade le plus crucial car final, les travaux ont été supervisés par la nouvelle conservatrice du M.A. de T., mme Véléni. Les collections ont ouvert leurs portes au public au cours de l'été 2006. Sur les problématiques théoriques concernant les nouvelles expositions permanentes du M.A. de T., cf. D.B. Gramménos, La nouvelle exposition au M.A. de T. (2001-2006), in Archéologia kai Technes 102, Mars 2007, 73-82 (en grec). 2 B.Wood & J.Cotton, The Representation of Prehistory in Museums, in N. Merriman (ed.), Making Histories in Museums, Leicester & New York, 1999, 28-43.

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    Liana Stefani

    Il y a 5.000, 15.000, 200.000 ans... Une exposition sur la vie en Macdoine l'poque prhistorique

    La nouvelle exposition sur la priode prhistorique en Macdoine, Muse Archologique de Thessalonique1.

    in Arhaeologia ( sous press )

    L'une des nouvelles expositions permanentes du Muse Archologique de Thessalonique (M. A. de T.) est consacre la Prhistoire en Macdoine. La salle qui abrite l'exposition est situe au niveau zro du btiment et proximit des salles d'expositions temporaires et de l'atrium, mais

    on y accde par l'entre principale du Muse, la disposition intrieure du btiment ayant impos l'utilisation d'un niveau diffrent du reste des salles des expositions permanentes. Les visiteurs sont

    amens ce niveau ds leur entre par des panneaux et ils y sont galement invits par les gardiens. Le but recherch est de faire suivre au visiteur la succession des units des expositions dans l'ordre chronologique, mais il reste libre, cela simpose, d'lire son propre parcours. Avant de passer la prsentation des grands axes selon lesquels l'exposition a t organise au M. A. de T., il serait utile sans doute de dbattre rapidement de la manire de prsenter les antiquits prhistoriques dans les muses grecs, mais aussi du cadre dans lequel a volu notre problmatique et, enfin, des choix que

    nous avons t amens faire. Dans de nombreux muses europens, les civilisations/cultures humaines cres avant le

    dbut de l'histoire (sic), soit avant que les hommes n'apprennent inscrire des pans de leur histoire, trouvent une place aux cts des civilisations ayant une histoire2. Elles sont de surcrot prsentes comme les matrices de toutes les ralisations et de toutes les volutions successives. Dans les muses grecs, les collections consacres la Prhistoire dune part, viennent en seconde position -

    1 En 2005, le Conseil central Archologique (KAS) a approuv l'tude initiale sur le renouveau des expositions des collections du Muse archologique de Thessalonique, tude mene sous la responsabilit du conservateur de l'poque, mr Grammnos, l'architecte mr. G. Niaouris et l'quipe des spcialistes. Durant l't 2004, des modifications ont t apportes sur la planification des expositions tant sur le plan musologique que sur le plan musographique. Dans le mme temps, ont t runies selon des critres scientifiques toutes les donnes sur les matriaux ncessaires la mise en valeur des objets ayant t slectionns de manire dfinitive. Ds avril 2006, au stade le plus crucial car final, les travaux ont t superviss par la nouvelle conservatrice du M.A. de T., mme Vlni. Les collections ont ouvert leurs portes au public au cours de l't 2006. Sur les problmatiques thoriques concernant les nouvelles expositions permanentes du M.A. de T., cf. D.B. Grammnos, La nouvelle exposition au M.A. de T. (2001-2006), in Archologia kai Technes 102, Mars 2007, 73-82 (en grec). 2 B.Wood & J.Cotton, The Representation of Prehistory in Museums, in N. Merriman (ed.), Making Histories in

    Museums, Leicester & New York, 1999, 28-43.

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    en superficie comme en valeur- aprs celles qui sont consacres la priode historique et surtout

    la priode classique et, d'autre part, leur organisation suit un acadmisme vident, voire adopte retardement les thories sans cesse renouveles de l'archologie hellnique3. Lexposition prsente en 1975 sur la Prhistoire en Thessalie au Muse archologique de Volos4, est la remarquable exception qui confirme la rgle. Elle est l'oeuvre du conservateur et par la suite professeur G.

    Chourmouziadis, de mme que quelques autres expositions postrieures. Les raisons expliquant ce dsintressement sont nombreuses, la principale rsidant dans le fait que la Prhistoire ne constitue

    pas un domaine qui privilgie la formation de la conscience nationale5. En effet, cette question a constitu le but principal de l'archologie grecque ds ses premiers pas au XIXe s. et ceci jusqu' nos jours. Ce fait n'est videmment pas un phnomne exclusivement grec, puisque les nationalismes des XIXe et XXe s. se sont nourris des thories archologiques mises travers le monde6. De surcrot, les oeuvres d'art prhistoriques ne se prtent pas l'dification d'une thorie du beau dans le cadre d'une archologie conue surtout comme une branche de l'histoire de l'art. Bien

    au contraire, ces oeuvres d'art prhistoriques sont souvent qualifies de primaires par les archologues des dernires dcennies. Il est rvlateur que dans le cas o des objets prhistoriques se trouveraient placs bien en vue dans les muses grecs, cela est d leur valeur particulire d'un point de vue artistique comme le sont les objets des priodes minoenne et mycnienne ou/et en relation avec une civilisation prcise, comme c'est le cas pour la civilisation mycnienne relie la

    notion de grcit. Dans tous les cas de figure, l'accent est mis sur l'volution de la civilisation

    hellnique. Comme la civilisation prhistorique en Macdoine ne saurait prsenter une esthtique de haute valeur ni prouver la grcit de la province, elle est passe au second plan, loin derrire la

    civilisation qui a vu le jour surtout partir de l'poque classique et aprs celle-ci : il tait en effet

    3 Long commentaire sur la prsentation des collections dans les muses grecs et particulirement des antiquits prhistoriques in A. Chourmouziadi, . - - . (Le muse archologique en Grce. L'exposant l'objet expos-le visiteur), Thessalonique; 2006. (en grec)

    4 Cf. la prsentation critique de l'exposition in E.Solomon, ! L'exposition des trouvailles nolithiques dans la salle Chourmouziadis du Muse archologique de Volos : une potique du pass de la Thessalie. In 1 , 9-11 !" 2006. (Actes du premier Congrs International sur la Civilisation et l'histoire de la Thessalie, Larissa 9-11 Novembre 2006) (en cours de publication) (en grec).

    5 Cf. K.Kotsakis, Ideological aspects of contemporary archaeology in Greece in M. Haagsma; P: Den Boer; E. M. Moormann, H.Sancisi-Weerdebung (eds); The Impact of Classical Greece on European and National Identities; Amsterdam 2003, 55-70, et surtout 56-61, o lauteur commente le rle et lutilisation de larchologie dans llaboration de lidentit nationale en Grce, E. Sampanikou, " L. Meskell (Introduction L. Meskell - sous sa direction) # (Larchologie dans le point de mire), 2006 (traduit de langlais en grec), 13, #. #! , $ %& & !. %! ! ! ! (Le pass nous appartient, Reconstitutions de la Macdoine hellnique) in L. Meskell (sous sa direction), op.c., surtout 79-94, Egalement, M. Avgouli, The First Greek Museums and National Identity, in F.S. Kaplan (ed); Museums and the Making of Ourselves. The rle of Objects in National Identity, London & New York; 1994, 246-65.

    6 E. Sampanikou, op. c., 16.

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    facile dy reconnatre les lments permettant de la mettre en relation avec le reste de la Grce et,

    par consquent, en relation avec le pass historique, puisqu'on avait en vue comme toujours la prennit de la civilisation. Il est caractristique qu'aujourd'hui encore, on essaie de dterminer des phases historiques et de saisir des phnomnes de la prhistoire macdonienne en s'appuyant sur l'absence ou la prsence de traits caractristiques de la Grce du Sud. Un exemple: on cherche

    reconnatre la priode moyenne du Bronze dans les habitats de Macdoine en ayant pour critre la prsence ou non de cramique minyenne7, de mme que la cramique mate (&) de la fin du bronze est mise en relation avec les groupes cramiques du Sud mycnien8. Cette tendance n'est pas bien sr un phnomne nouveau: tout le monde occidental, Grce comprise, se sert du pass pour construire des origines culturelles fondes sur des identits opposes9. Autrement dit, ce qui n'est pas nous est aux autres, point de vue qui peut gnrer de rels dangers pour des pays ou des rgions o l'interprtation archologique a une dimension politique norme. Pour clore cette partie, la problmatique tait de dterminer ce qu'il fallait prsenter et comment, et

    le comment est souvent plus important que les objets eux-mmes10. Constater que les objets prsents dans un muse se retrouvent dans un environnement qui leur est totalement tranger celui qui les a fait natre et qui les a utiliss est une vidence11. Rappelons-nous d'une part que l'interprtation des trouvailles archologiques est difficile et encombre de prsupposs ds le moment des fouilles et quand elles sont encore dans leur contexte ; imaginons d'autre part, quel point il est difficile pour un visiteur qui voit seulement

    l'objet et pas l'environnement entier s'y rfrant, d'arriver la comprhension de ces objets, den tirer des renseignements ou encore, un moindre degr, de pouvoir considrer que ces objets constituent un stimulus pour lui et non pas un cadre de rfrences! Sous un aspect similaire, on est en droit de se demander dans quelle mesure il est ralisable d'essayer de reconstituer le pass tel quel12 et, en admettant que cela le soit, est-ce permis, mme dans le but d'enseigner au visiteur

    7 L.Stefani N.Meroussis, ! "% ' . ! ! ! (A la recherche du Bronze moyen en Macdoine: anciennes et nouvelles recherches en Hmathie); in MESOHELLADIKA, (! , % " % ' (Actes du Congrs international, La Grce continentale l'poque moyenne du Bronze), Athnes -11 mars 2006, Suppl: BCH (en cours de publication).

    8 A. Hochstetter, Kastanas. Die handgemachte Keramik, PAS, Band, Berlin, 1984, 187-188. 9 L.Meskell, ". (Introduction. L'archologie prime avant tout), in L.Meskell,

    op.c., annexe 5 surtout p. 23 o bibliographie. 10 T.Bennet, Museums and the people; in R.Lumley (sous sa direction), The Museum Time Machine; London & New

    York, 1988, 25-35. C.Saumarez-Smith, Museums, artifacts and meanings in P.Vergo (ed), The New Museology, London, 1989, surtout 19-21.

    11 Cf. M. Iconomou (OIKONOMOY), : % &! &!; (Muse: Entrept ou organisme vivant?), 2003, 59. (en grec)

    12 Quant la reconstitution, le dbat est ouvert depuis une vingtaine d'annes. Cf. titre indicatif: M.Shanks & C.Tilley, Re-constructing archaeology: theory and practice, Cambridge, (1987), 1992, I. Karp, Culture and Representation in I. Karp & S.D. Lavine (eds.), Exhibiting Cultures: The Poetics and Politics of Museum Display;

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    quelque chose ou de lui faire comprendre quelque chose? Il est sans doute ralisable de dcrire ou

    de reconstituer des pratiques et des technologies, mais certainement pas des idologies ni des symbolismes, puisqu'ils ne s'expriment pas en relation directe avec les vestiges matriels ou, la limite, avec des vestiges matriels qui se laissent interprter. Cette problmatique nous conduits prendre une position sans doute trs commune en musologie contemporaine, c'est--dire qu'une

    exposition ne consiste pas prsenter une seule vrit absolue, la substantifique moelle de la connaissance mais proposer seulement une des lectures possibles et seulement une des

    interprtations possibles du matriel archologique13. C'est sans doute de cette manire-l que nous approchons le plus du but primordial d'une exposition, qui est de stimuler l'intrt du visiteur et de l'amener grer l'information prsente en oprant lui-mme une approche totalement personnelle

    des donnes. Un tel choix n'apparat plus comme risqu ni ne constitue une nouveaut de notre part. Au contraire aprs que les avis sur l'archologie post-procdurire ont exerc pendant des annes leur influence, cela semble tre plutt le rsultat attendu, tandis que la nouvelle tendance de la

    mondialisation, qui s'exerce aussi en archologie, vient offrir tout prt le meilleur alibi idologique: les hommes et leurs oeuvres s'insrent dsormais sur une scne mondiale14. Comme cela a t bien

    formul, les questions qui se poseront l'avenir en archologie pourraient avoir trait aux manires

    dont sont rendues et transmises les significations et les identits, au lieu de leur origine.15 Dans le cadre d'une exposition de muse, ce principe peut tre appliqu non pas en effaant ou en omettant les particularits locales mais en amenant les renseignements fournis des niveaux de signification

    universelle sans ngliger l'aspect d'opposition ou de diffrence. Le but est de faire participer des groupes humains aussi larges que possible une relation dialectique qu'un muse moderne veut

    dvelopper entre ses collections et ses visiteurs16. Comme l'indique le titre donn l'exposition du M. A. de T. Il y a 5000, 15000, 200000 ans... Une exposition sur la vie au Nolithique en Macdoine, nous recherchions ds le dpart rapprocher autant que possible l'poque lointaine de la Prhistoire de l'homme contemporain. On

    Washington; 1991, 11-24, S. Alpers, The Museum as a Way of Seeing in Karp & Lavine (eds), op.c., 25-32, H. Lidchi, The Poetics and Politics of Exhibiting Other Cultures in S. Hall, Representation: Cultural Representations and Signifying Practices, London; 1997, 151-208.

    13 Saumarez-Smith, op.c. (annexe 10), 19, R.A. Joyce & R.W. Preucel, The languages of Archaeology, Dialogue, Narrative, and Writing, Oxford; 2002, surtout 130 et sq., Iconomou, op. c. (annexe 11), 62, #. #!, %& &. ! ! (K. Kotsakis, De l'exposition la signification: L'interprtation dans la thorie contemporaine de l'archologie), in M. Skaltsa, # $ 21 .- % & (La Musologie au 21s. Thorie et Pratique), 2001, 198-199 (en grec).

    14 ). '!, ' ! $, (G. Chourmouiadis, Dispylio Castorias: pour une nouvelle musologie); in M. Skaltsa, (sous sa direction), op. c. (annexe 13), 235, Sampanikou, op. c. (annexe 5), 18, Meskell, op.C. (annexe 5), 31.

    15 Meskell, op. c., 31. 16 Kotsakis, op. c. (annexe 13), 199, Chourmoudiadis, op. c. (annexe 14), 236, cf. in Iconomu, op., c. (annexe 11), 82-

    84.

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    peut retrouver dans la prhistoire la trace des origines de nombreuses pratiques et des points de vue

    de la vie contemporaine comme on peut aussi y retrouver les premiers pas de lhumanit dans le monde des ides et des symbolismes. Les hommes qui vivaient en Macdoine durant les diverses phases de la prhistoire comme le reste des humains dans le reste du monde- devaient faire face des besoins lis leur survie et, paralllement, ils prouvaient besoin de communiquer entre eux,

    de former leur identit individuelle et sociale et dexorciser ou de donner forme leurs peurs. Dans le mme temps cependant, la civilisation prhistorique qui sest dveloppe dans cette rgion

    prcise prsente certains aspects qui lui sont propres et clairement distincts : il serait bon de les voquer et de les prsenter au visiteur daujourdhui. Cette exposition est donc dirions-nous, tourne vers ltre humain sous deux aspects : dune part, en effet, lhomme de la Prhistoire est prsent comme un tre agissant, porteur et rcepteur de cette civilisation et dautre part, lhomme daujourdhui, en tant que visiteur, est appel grer les informations qui lui sont donnes. Ce nest pas un hasard si ds lentre dans la salle dexposition, se trouve une forme humaine, une stle de

    forme humaine de lpoque du Bronze, prsente seule et symbolisant ltre humain qui reoit dautres humains.

    Lexposition sarticule autour de deux axes : dabord la prsentation des units thmatiques, qui concerne les pratiques et les techniques caractristiques de la Macdoine prhistorique, et les questions de communication et didologie, selon une volution continue tout le long de lexposition. Ensuite, et paralllement au premier axe, le second traite de questions

    pistmologiques de larchologie prhistorique, en relation avec la fouille et la prservation, en collaboration indispensable de nos jours- avec les sciences exactes et les sciences sociales. La sensation du lieu, ou en sexprimant diffremment, lorigine des objets, est donn ds le dpart, sur une carte o sont indiqus les sites prhistoriques de Macdoine qui nous sont connus. Les units thmatiques selon lordre de prsentation sont les suivantes : Lenvironnement naturel (courte prsentation du lieu et du paysage lpoque prhistorique en Macdoine) Avant la venue des hommes (la vie existait avant la venue des tres humains) poque palolithique (les premiers pas de lhomme en Macdoine : crne de Ptralona, outils palolithiques). Ltape productive (La rvolution nolithique : de lerrance la sdentarisation * forme des habitats * maisons, les pratiques anciennes sinscrivant dans une continuit chasse et pche, les pratiques nouvelles qui caractrisent le passage une nouvelle poque agriculture * levage). La cramique (Technologie, Conservation et Cuisine. Un mme vase pour diffrents usages Ornementation).

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    Tissage et tressage.

    Technologie (mtallurgie, outils de pierre et dos). Objets au-del de lutilit pratique (tables et poterie de petite dimension, statuettes, bijoux). Echanges (que transportait-on et comment entre les diverses communauts prhistoriques de chaque poque) Distinction sociale (ou comment dpister dans le matriel archologique des phnomnes sociaux complexes). criture (systmes prcdant lcriture, systme pour compter* recenser en Macdoine prhistorique par lusage dimages et de symboles, impossibles dchiffrer) Rites mortuaires (la peur de la mort est universelle et diachronique, les manires de procder aprs le dcs dun individu diffrent).

    Le deuxime axe pistmologique de lexposition, parallle et juxtapos, se droule autour des thmes suivants : Anthropologie naturelle (la science qui nous fait connatre lhomme en tant que sujet naturel : sa longvit, les maladies qui laffligeaient, sa nourriture, lexistence de moyens de se soigner) Fouille (le sens dune fouille en archologie prhistorique, la mthodologie et lventail des donnes quon peut en tirer). Prservation (Les objets sont rarement trouvs intacts dans les fouilles prhistoriques et le processus difficile de leur prservation pour que la trouvaille devienne un objet expos * limportance de largile cause de sa rsistance particulire. Ici se trouve un panneau avec divers

    tessons, que le visiteur peut non seulement observer et toucher, mais il peut aussi essayer de voir sils appartiennent au mme vase. La prsence de ce panneau a pour but de dculpabiliser le public face un objet antique et en mme temps de satisfaire un des sens, le toucher, celui quon lui demande de na pas utiliser dans un muse. Dculpabiliser et familiariser le public avec les objets antiques est le but de lexposition de certains objets en dehors des vitrines).

    Archologie prhistorique et Sciences exactes. (La contribution des sciences exactes dans la comprhension des civilisation du pass : mthode de datation, analyses chimiques etc.) Archologie prhistorique et autres Sciences Sociales (mention a t faite de lanthropologie sociale, de lethnologie et de lethnographie, domaines dans lesquels le visiteur peut puiser du matriel de comparaison grce aux illustrations tires de labondant matriel ethnologique relatif ltude des campagnes grecques). Lenjeu de la multiplicit des interprtations des donnes archologiques -nous nous y sommes dj

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    rfr- laisse la place une approche qui seffectue travers les objets exposs, les textes qui accompagnent les units et les vitrines successives. Dans ces textes, nous avons jug bon de rduire la volumineuse information archologique en allant lessentiel, tandis que paralllement o cela tait ralisable- nous donnons le point de dpart diverses interprtations sur les objets pris de manire isole autant que sur les objets formant un tout. Paralllement nous avons vit de provoquer un parti pris chez le visiteur en mettant laccent sur la possibilit dveiller une problmatique niveau thorique par exemple, pourquoi dcorer un vase? Ou bien pourquoi porte-

    t-on des bijoux, aujourdhui et autrefois? Dans le mme temps, par lintermdiaire des photos prises pendant les fouilles, des croquis et des reprsentations, nous voulons montrer des traits caractristiques, comme la manire de fabriquer des objets, leur fonctionnement et leur usage, la varit des formes et la texture des matriaux, tandis que le matriel photographique tir de la source intarissable que constitue la civilisation populaire grecque offre des donnes proches du visiteur grec- lui permettant de comparer et de comprendre. Lexposition inclut aussi diffrentes

    varits de crales, des os danimaux, des coquilles et des artes de poisson pour, dans le mme temps, montrer la diversit du matriel o sont puiss des informations par larchologie

    prhistorique et prsenter des donnes de niveaux multiples et donc provoquer des stimulations diverses sur le visiteur. Les objets exposs non prsents selon un ordre chronologique, sinsrent dans le cadre dun rcit qui tourne autour de la vie de lhomme qui a vcu en Macdoine pendant lAntiquit. Comme ce point prcis a constitu le noyau de nombreuses problmatiques pour

    lquipe de travail, signalons dabord que nous avons adopt le point de vue qui soutient que lobjet expos peut fonctionner comme objet dune rfrence prcise historique, dont le rfrant chronologique peut ne pas jouer un rle si important, mme pas du tout, mais ce qui peut jouer cest sa mise en relation avec les lments possibles pris sparment de la vie quotidienne17; et quensuite, ce choix a prcisment t dict par les objets eux-mmes, soit le matriel disponible pour lexposition. En effet, le Muse archologique de Thessalonique dispose de rserves

    importantes datant de lpoque du Bronze, tandis que les objets du Nolithique exposables demeurent pour le moment en nombre plus limit. Cela signifie au niveau pratique, quil tait

    impossible de prsenter dans certaines units laspect nolithique dun phnomne prcis, par consquent il fallait se limiter aux caractristiques de ce phnomne durant lpoque du Bronze ou le prsenter consciemment dans sa dimension diachronique. Pensant aux dimensions multiples de linterprtation archologique mais en mme temps, pour mettre en valeur les diffrents niveaux o elle peut se mouvoir, nous avons utilis linformation cache, selon la formule consacre, ou

    17 G. Chourmouziadis, o.c. (paragr. 14), 2001.

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    linformation de deuxime niveau. Il sagit de courts textes, qui parfois sont accompagns dune

    illustration, et que nous avons dposs dans des tiroirs sous les vitrines : nous y prsentons soit quelques informations supplmentaires sur une unit ou sur des objets, soit nous y donnons une interprtation ou une dimension diffrente. Le moyen et de notre point de vue celui qui simpose le plus fortement- que nous avons utilis pour renforcer la direction de lexposition vers la multiplicit

    des interprtations archologiques, cest lapplication multimdia18, organise dans une partie de la salle. La projection sous le titre Trois archologues discutent de la notion de mnage prhistorique19 donne loccasion de parler de manire plus manifeste des objets archologiques qui, pris individuellement, ne rvlent rien et quon ne peut faire parler quen les insrant dans un ou plusieurs cadres dinterprtation. Par consquent, des interprtations multiples peuvent tre prsentes, et certaines ce niveau universel auquel nous nous sommes dj rfr. Grce cette application, larchologue vient sur le devant de la scne, non seulement en tant que scientifique qui, laide doutils mthodologiques prcis, recherche et interprte les vestiges matriels mais en

    tant qutre humain, qui sans se dfaire de son idologie ni du contexte historique dans lequel il se meut, et par lesquels il est influenc, essaie de transformer les rsultats de la recherche

    archologique en bien social. Au moment o on en parle dans le film, on claire les objets retrouvs dans des habitats prhistoriques de Macdoine en relation avec le mnage prhistorique puisquils sont disposs devant les crans. De cette manire, les objets illustrent le discours, et on obtient exactement linverse de la pratique en cours dans les muses, selon laquelle le discours illustre et

    explique les objets. En conclusion de cette brve prsentation de lexposition sur la Prhistoire au Muse

    Archologique de Thessalonique, notons que nous nous sommes efforc de mettre sur le devant de la scne lhomme prhistorique de Macdoine en utilisant une relation dchange de sensations et de penses avec le visiteur contemporain. Comme le rsume une phrase toujours dactualit du professeur Thocharis : Un effort doit tre fourni pour que quelquun arrive comprendre quaucun hrosme et quaucun exploit clbre na dpass la valeur du prsent fait par les hommes anonymes de la Prhistoire qui ont ouvert le chemin menant au progrs et la civilisation20.

    18 Cf. A. Gkazi-A. Nikiforidou, dans ce mme volume. Sur le rle des nouvelles technologies dans les muses, cf. T.

    Higgins, P. Main, J. Lang, Imaging the Past : Electronic Imaging and Computer Graphics in Museums and Archeology S. Thomas & A. Mintz, The Virtual and the Real : Media in the Museum, Washington DC, 1998, Chourmouziadi, op.c. (par. 3), 318-320.

    19 Nous adressons nos chaleureux remerciements aux minents spcialistes de la prhistoire Ch. Koukouli-

    Chryssanthaki, G. Chourmouziadi et R. Treuil, dont les conversations ont constitu la trame et lessence de lapplication multimdia.

    20 D. P. Thocharis, Civilisation nolithique. Bref survol du Nolithique dans le monde grec, Athnes, 1981, 13.

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