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INTRODUCTION LES ORIGINES LES DISPOSITIONS DU TRAITE DASUNCION LA STRUCTURE DU MERCOSUR LES DEVELOPPEMENTS RECENTS : DU SUCCES

4 5 7 10 11

Graphique 1 : Part du commerce intra-zone des importations et les exportations totales des pays du MERCOSUR 12

A LA CRISE LE MERCOSUR ET LE RETOUR DES BEAUX DISCOURS LINEAMENTS DE LINTEGRATION ECONOMIQUE

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LES CONTRADICTIONS ENTRAVANT LINTEGRATION : LE MERCOSUR AU BORD DE LA DISLOCATION ? 18Graphique 2 : Rpartitions des exportations du MERCOSUR (millions de dollars US) Graphique 3 : Rpartition des importations du MERCOSUR (millions de dollars US) 21 21

ANNEXE 1 : LE MERCOSUR ET SES PARTENAIRESALNA Union europenne Membres associs Chili Communaut andine Bolivie Prou Venezuela Communaut Andine en tant que tel et Colombie + quateur Communaut Sud-amricaine des Nations (CSN) Autres pays ou rgions Inde Union douanire sud-africaine Pays Arabes

2424 25 27 27 28 28 29 29 29 30 31 31 31 32

2 ANNEXE 2. SITES INTERNET UTILES ANNEXE 3. BIBLIOGRAPHIE SUR LE MERCOSUR ANNEXE 4. STATISTIQUESTableau 1 : Origine du commerce intra-zone au sein du MERCOSUR (Millions de dollars) Graphique 4 : Origine du commerce intra-zone au sein du MERCOSUR (Millions de dollars) Graphiques 5 et 6 : Origine du commerce intra-zone au sein du MERCOSUR Tableau 2 : Destination du commerce intra-zone au sein du MERCOSUR (Millions de dollars)

39 42 5151 51 52 53

Graphique 7 : Destination du commerce intra-zone au sein du MERCOSUR (Millions de dollars) 53 Graphiques 8 et 9 : Destination du commerce intra-zone au sein du MERCOSUR Graphiques 10 et 11 : Rpartition des exportations totales de la zone Graphiques 12 et 13 : Rpartition des exportations Extra-zone des pays du MERCOSUR Graphiques 14 et 15 : Rpartition des importations totales de la zone Graphiques 16 et 17 : Rpartition des importations Extra-zone des pays de lALENA Graphique 18 : Commerce extrieur et solde commercial du MERCOSUR (millions de dollars) Graphique 19 : Rpartitions des exportations du MERCOSUR (millions de dollars US) Graphique 20 : Rpartition des importations du MERCOSUR (millions de dollars E.U.) 54 54 55 55 56 57 58 59

Graphique 21 : Balance commerciale du MERCOSUR lgard de certains pays ou blocs rgionaux (millions de dollars) 60 Graphique 22 : Flux d'investissements directs de l'tranger en direction des pays du MERCOSUR (milliards de dollars) 61 Graphique 23 : Flux d'investissements directs l'tranger en provenance des pays du MERCOSUR (milliards de dollars) 62 Graphique 24 : Stocks d'investissements directs de l'tranger en direction des pays du MERCOSUR (milliards de dollars) 63 Graphique 25 : Flux d'investissements directs l'tranger en provenance des pays du MERCOSUR (milliards de dollars) 64 Tableau 3 : Rpartition des IDE entrants pour certains pays du MERCOSUR Graphique 26 : Taux de croissance du PIB rel des pays membres du MERCOSUR 65 66

Graphique 27. Conjonction des cycles. Le cas du Brsil et du Paraguay : taux de croissance du PIB 67

3Graphique 28 : Conjonction des cycles. Le cas de lArgentine et de lUruguay : taux de croissance du PIB 68 Graphique 29. volution du PIB rel des pays du MERCOSUR, milliards de dollars US Graphique 30 : Variation du PIB par habitant en parit de pouvoir d'achat (PPA) en dollars US Graphique 31. Taux d'inflation des pays du MERCOSUR 69 69 70

Graphique 32 : Ratio du service de la dette sur les exportations pour les pays du MERCOSUR (%) 70 Graphique 33 : Dette long terme de l'Argentine, milliards de dollars Graphique 34 : Dette long terme du Brsil, milliards de dollars Graphique 35 : Dette long terme du Paraguay, milliards de dollars Graphique 36 : Dette long terme de l'Uruguay, milliards de dollars 71 72 72 73

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IntroductionLe processus dintgration qui a men la cration du March Commun du Sud (MERCOSUR en espagnol ou MERCOSUL en portugais) est le rsultat des ngociations initiales entre le Brsil et lArgentine visant une plus grande coopration politique et conomique. Le dfi tait norme en raison de labsence dchanges conomiques importants. Le fait que le MERCOSUR soit devenu, en trs peu de temps, le bloc conomique le plus important de lAmrique latine est imputable un important effort politique consenti et llaboration dun calendrier de libralisation fort ambitieux. En effet, laccord fondateur du MERCOSUR, le Trait dAsuncin, que nous examinerons plus en dtail dans les pages suivantes, fixait lobjectif de crer une zone de libre-change devant conduire une union douanire en quatre ans. Lchance venue, les quatre pays membres devaient adopter un tarif extrieur commun (TEC) qui, au dpart, nimpliquerait pas lensemble des produits, certains faisant partie dune liste dexceptions. Lintgration conomique visait aussi, au-del de la libralisation du commerce des biens et services, la libre circulation des facteurs de production, lharmonisation des normes juridiques et institutionnelles, ainsi que la coordination des politiques macroconomiques et sectorielles. Le projet MERCOSUR ne dcoulait pas de la nouvelle vision comptitive de lintgration lconomie mondiale qui stait dveloppe en Amrique latine depuis les annes 1980. Il reprenait, en ladaptant, la vision et les ambitions communautaires des premiers modles dintgration, comme lALALE (Association latino-amricaine de libre-change) et de lALADI (Association latino-amricaine dintgration)1, tirant euxmmes leur inspiration du trait de Rome de 1957. De plus, cet accord est trs rapidement apparu comme une voie dintgration suffisamment crdible pour amener les tats-Unis apporter leur soutien. Toutefois, le soutien politique ncessaire a flchi au moment o les crises financires internationales ont affect les pays de la rgion. Cela a contribu accentuer les divergences entre les quatre partenaires commerciaux. Entre 1999 2002, la crise du MERCOSUR a atteint son paroxysme. Le processus dintgration a alors t suspendu. Cependant, les dmarches des gouvernements en place depuis larrive au pouvoir du gouvernement Luis Inacio Lula Da Silva au Brsil en 2003 pourront peut-tre redresser la situation. En 2005, le MERCOSUR regroupe environ 220 millions dhabitants, soit 44% de la population de lAmrique latine, 59 % de son territoire et 54 % du son PIB2. Il est le sixime march au monde aprs lALENA, lUnion europenne (UE), lASEAN et le Japon et la Chine3.

1 Ce sont ces structures particulires qui font d'ailleurs dire de Almeida qu'il s'agit l d'un hybride conceptuel (Paulo R. de Almeida Presentacion, dans Jos Angelo Faria, O MERCOSUL : Principios, Finalidade e Alacance do Tratado de Asusuno, Ministerion das relaes Exteriores, Brasilia, 1993. p. ix). Il ne s'agit pas d'un simple accord commercial, dot de structures dites souples comme dans le cas de l'ALENA, puisqu'on y retrouve galement, entre autres, une assemble parlementaire, des conseils conomiques et sociaux et des groupes de travail (dix). Les influences sont nombreuses. Si le Trait de Rome a t une source d'inspiration importante sur le plan institutionnel, les signataires du trait d'Asuncin se sont aussi inspirs du GATT, et mme de la Convention de 1944 crant le BENELUX et du Protocole de La Haye de 1947. 2 http://www.mercosul.gov.br/textos/default.asp?Key=71 3 http://MERCOSUR.org.uy

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Les originesCest le 26 mars 1991 que fut sign le trait dAsuncin4 au Paraguay qui devait engager lArgentine, le Brsil, le Paraguay et lUruguay dans la voie dun march commun au terme dune priode de transition se terminant le 31 dcembre 1994. Le 17 dcembre 1994, le protocole dOuro Preto (Brsil), compltait le projet et dotait le MERCOSUR/MERCOSUL dune personnalit juridique internationale. Cependant, avant dexaminer le contenu du Trait dAsuncin, il faut rappeler trois choses : premirement, que ce sont les pays du Cne Sud qui ont t lorigine de la cration de lAssociation latino-amricaine de libre-change (ALALE); deuximement, quun premier accord de coopration conomique fut conclu, en avril 1969 Braslia, avec la signature du Trait du bassin de La Plata, trait par lequel les pays riverains entendaient exploiter en commun cet important cours deau et promouvoir linstallation dindustries sur ses berges; troisimement, quune Entente de coopration conomique (Convenio Argentina-Uruguay de Cooperacin Econmica), connue sous le nom de Pacte conomique de coopration (PEC), avait t signe en aot 1974 par lArgentine et lUruguay. Par ailleurs, mme sils taient prts collaborer entre eux, lArgentine et le Brsil restaient toujours trs rticents sengager dans une forme de coopration conomique avance. La rivalit historique entre ces deux pays pour le leadership rgional et la prsence de gouvernements militaires pendant de longues annes navaient fait que renforcer cette rticence. Larrive au pouvoir de gouvernements civils, en 19835 en Argentine et en 19856 au Brsil, allait modifier cette situation et rapprocher deux pays que la proximit gographique, le commerce bilatral et la complmentarit conomique ne pouvaient quinciter cooprer. Un premier geste fut pos avec la Dclaration dIguau, signe par les gouvernements de ces deux pays, le 30 novembre 1985. Cette dclaration soulignait, entre autres, limportance quils attachaient aux processus de dmocratisation en cours, la ncessit dunir leurs efforts pour dfendre des intrts communs dans les forums internationaux et, finalement, la ncessit dintgrer leurs ressources conomiques pour faire face la nouvelle conjoncture internationale. Une Commission mixte (Comisin Mixta de Alto Nivel) constitue de reprsentants des secteurs public et priv des deux pays, fut alors mise sur pied. Quelques mois plus tard, en juillet 1986, le Brsil et lArgentine signaient le Programme dIntgration et de Coopration conomique (Pacto de Integracin y de Cooperacin Econmica Argentina-Brasil, PICAB, ou Acta para la Integracin Argentino-Brasilea), qui prvoyait louverture graduelle et sectorielle des deux marchs nationaux, la recherche dune plus grande complmentarit dans certains secteurs de production et unehttp://www.MERCOSUR.org.uy/pagina1esp.htm Ral Alfonsin a t lu prsident de la Rpublique Argentine le 13 dcembre 1983, succdant ainsi la Junte compose du Gnral Jorge Rafael Videla, de lAmiral Emilio Massera et du Gnral Orlando Ramn Agosti 6 Cest le 15 janvier 1985 quest nomm par le Congrs le premier prsident civil Brsilien, Tancredo Neves. Son dcs avant linvestiture donna le pouvoir son vice-prsident, Jos Sarney, lui aussi civil, mais plus proche des militaires.5 4

6 coopration dans les domaines du transport, des communications et de lnergie. Ce programme, qui sinscrivait dans le cadre juridique de lAssociation latino-amricaine dintgration (ALADI), devait tre mis en place de manire graduelle, flexible et quilibre. Il plaait la production industrielle au centre du processus dintgration envisag par les deux pays. Mentionnons aussi que cette intgration devait oprer principalement et presque exclusivement travers les instances gouvernementales. La signature de ce programme a t suivie par celle de 24 protocoles sectoriels entre 1986 et 1988, le plus important dentre eux, le protocole 1, prvoyait la libralisation du commerce denviron 50 % des biens produits dans les deux pays. Plusieurs ententes furent par la suite signes entre lArgentine et le Brsil, et les changes connurent un certain essor accompagn dune plus grande diversification. Nanmoins, les rsultats, prometteurs au dbut, ne furent pas vraiment la hauteur des attentes initiales, avec le rsultat que la plupart des engagements souscrits dans le cadre des protocoles ne furent pas respects, notamment cause des problmes de dette extrieure et de mise en place de politiques de stabilisation financire. Lapproche produit par produit adopte dans les ngociations commerciales ntait pas non plus de nature favoriser la signature daccords de grande porte. Cela ne devait toutefois pas empcher les prsidents Ral Alfonsn et Jos Sarney de signer, en novembre 1988, un nouvel accord, le Trait dintgration, de coopration et de dveloppement (Tratado de Integracin, Cooperacin y Desarrollo). Ce trait, ratifi par les parlements des deux pays en aot 1989, prvoyait la mise en place dune zone de libre-change et la libralisation complte des changes au terme dune priode de transition de dix ans, cest--dire la fin de lanne 1999. Il consolidait par ailleurs lide de mettre en place un march commun regroupant lensemble des pays du Cne Sud. Larrive au pouvoir, en 1989, de Carlos Menem en Argentine et de Fernando Collor de Mello au Brsil, au dbut de 1990, accentuera la mise en place du march rgional, puisque lun et lautre sengagent beaucoup plus fermement que ne lavaient fait leurs prdcesseurs dans la voie librale et le dsengagement de ltat. Ils mettront alors en uvre un programme de privatisations, non sans faire, paralllement, de llimination de linflation lune de leurs grandes priorits conomiques7. Autre signe de changement, les deux prsidents devaient signer, en juillet 1990, Buenos Aires, un nouvel accord, appel Acta de Buenos Aires, qui prvoyait ltablissement dun march commun avant la fin de lanne 1994 avec, en contrepartie, la libralisation complte des changes entre les deux pays cette date. Un mois plus tard, en aot 1990, le Paraguay et lUruguay annonaient leur dcision de se joindre ce projet. Il faut cependant noter que lUruguay avait t associ au processus de rapprochement entre lArgentine et le Brsil depuis ses dbuts, ayant sign dailleurs plusieurs accords sectoriels. Pour le Paraguay, linvitation de se joindre au projet de march commun allait tre loccasion de sortir de lisolement7

Il faut rappeler cet gard qu'entre 1984 et 1994, l'inflation avait augment de 700 % par an en moyenne au Brsil. Les plans Cruzado (1986), Bresser (1987), celui de l't 1989, de mme que les deux plans Collor de 1990 et 1991 s'taient tous solds par un chec. L'introduction, en mars 1994, d'un systme transitoire de monnaie de compte fond sur une unit relle de valeur qui devait conduire l'introduction, en juillet 1994, d'une nouvelle unit montaire, le real, dont la valeur sera ancre sur le dollar et l'imposition de svres mesures budgtaires et montaires qui accompagnaient ce nouveau plan finiront par venir bout de l'inflation. Appel Plan real, ce plan contribua grandement l'lection la prsidence de Fernando Henrique Cardoso, alors ministre des Finances.

7 conomique et politique de ses annes de dictature militaire. Le Chili, invit se joindre au projet, dclinera linvitation, prfrant se tourner vers le Nord8, plutt que vers un futur March commun du Sud qui lui semblait moins prometteur sur le plan commercial et surtout, plus instable, sur le plan macro-conomique. Notons que lArgentine, le Brsil, le Paraguay et lUruguay signeront un nouvel accord de complementacin econmica (ACE n 14), juste avant la signature du Trait dAsuncin.

Les dispositions du Trait dAsuncinVoyons ce quil ressort des 24 articles qui constituent le Trait dAsuncin9. Deux remarques prliminaires simposent toutefois. En premier lieu, il convient de noter que le trait a t sign un moment o se dessinaient dimportantes fractures dans les relations conomiques internationales. Le spectre dun monde divis en grands blocs conomiques rivaux apparaissait alors dautant plus menaant que le cycle de lUruguay navait pu tre sauv in extremis, en dcembre 1990, quau prix de nombreux compromis. La communaut conomique europenne (CEE) stait engage sur la voie de lUnion conomique en 1989, et les tats-Unis sengageaient leur tour sur la voie du rgionalisme conomique en ngociant avec le Canada, un accord de libre-change qui entrait en vigueur la mme anne. Les craintes de se voir ainsi marginaliss sur la scne conomique internationale taient alors dautant plus grandes pour les pays en dveloppement, quaprs avoir opt pour la voie librale dun dveloppement ouvert et tourn vers lextrieur, ceux-ci se trouvaient plus tributaires que jamais des conditions daccs aux grands marchs internationaux. En deuxime lieu, il convient de rappeler que, malgr lattrait de lInitiative pour les Amriques propose par le prsident George H. Bush, en juin 1990, la signature daccords bilatraux ou sous-rgionaux ntait pas sans prsenter de multiples avantages pour des pays qui entendaient consolider les fragiles acquis dmocratiques des dernires annes et unir leurs efforts en vue dassurer entre eux une plus grande complmentarit sur le plan conomique, tout en cherchant tre plus comptitifs sur la scne conomique internationale. Ainsi, la voie de lintgration ne simposait pas pour des raisons conomiques seulement, mais elle rpondait galement des proccupations stratgiques. Si nous revenons au trait lui-mme, il convient de distinguer clairement les finalits gnrales du trait, les dispositions relatives limplantation dun futur march commun et celles concernant la structure, qui sont fort diffrentes de celles que lon retrouve dans lALNA. un autre niveau, il convient aussi de prendre en considration les changements institutionnels qua apports le Protocole dOuro Preto10, du 14 dcembre 1994. Le Trait dAsuncin demeure toutefois linstrument juridique de base du projet intgratif.Selon le ministre canadien du commerce international, L'Accord de libre-change Canada-Chili (ALECC) est entr en vigueur en juillet 1997 ; MAECI, http://www.dfait-maeci.gc.ca/tna-nac/ccftabrochure-fr.asp ; Voir aussi lAccord de libre-change entre les tats-Unis dAmrique et la Rpublique du Chili nest entr en vigueur quau premier janvier 2004. 9 Le Trait contient aussi cinq annexes. Annexe 1 : Programme de libralisation commerciale; Annexe 2 : Rgime gnral dorigine; Annexe 3 : Systme de rsolution des diffrends; Annexe 4 : Clause de sauvegarde; Annexe 5 : Groupes de travail. Les 24 protocoles signs par l'Argentine et le Brsil depuis 1985 ont t annexs au Trait. Voir SICE en anglais http://www.sice.oas.org/trade/mrcsr/mrcsrtoc.asp 10 Site en anglais : http://www.sice.oas.org/trade/mrcsr/ourop/index.asp8

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Le chapitre premier du trait dfinit les finalits, les principes et les modalits de limplantation dun futur march commun. Les objectifs du march commun (art. 1) sont: (i) de promouvoir la libre circulation des biens, des services et des facteurs de production; (ii) dtablir un tarif extrieur commun et dadopter une politique commerciale commune vis--vis des tats tiers ; (iii) de coordonner les politiques macro-conomiques et sectorielles dans des domaines comme, par exemple, le commerce extrieur, lagriculture, lindustrie, la fiscalit et la monnaie ; (iv) dharmoniser les lgislations nationales de manire consolider le processus dintgration. Pour atteindre ces objectifs, les quatre pays sentendent pour mettre en place (art. 5) : (i) un programme de libralisation des changes entre les quatre pays devant conduire la cration dune zone exempte de barrires douanires; (ii) une coordination des politiques macro-conomiques; (iii) un tarif extrieur commun; et, (iv) ladoption daccords sectoriels afin doptimiser lutilisation et la mobilit des facteurs de production.11 Le Trait dAsuncin identifie, dans son prambule, les tapes franchir pour arriver au march commun. Le programme de libralisation des changes prvoit deux tapes. Premirement, llimination graduelle des tarifs douaniers aux frontires des quatre pays12. Ce processus devait tre complt le 31 dcembre 1994, pour lArgentine et le Brsil, et le 31 dcembre 1995, pour le Paraguay et lUruguay. La mise en place dune zone de libre-change, le 1er janvier 1995, aurait d constituer la premire tape du processus qui devait conduire la formation dun March commun. Deuximement, le programme prvoit llimination complte des barrires non tarifaires. Notons par ailleurs que le Trait prvoyait galement la mise sur pied de 10 groupes de travail13 dans les domaines suivants : commerce, douanes, normes, politiques fiscales et montaires, transport terrestre et maritime, industrie, technologie, agriculture, nergie, coordination des politiques macro-conomiques, travail, emploi et scurit sociale. Plusieurs sommets ont suivi la rencontre dAsuncin. Le sommet de Las Leas (Argentine) de juin 1992 a permis de consolider lchancier, puis de coordonner les dcisions et les politiques macro-conomiques, en vue de lchance prvue pour la cration du March commun, le 1er janvier 199514. Cest loccasion de ce sommet que la Bolivie, dj membre de la Communaut andine, prsenta sa candidature pour faire partie du MERCOSUR. Toutefois, comme larticle 20 du trait dAsuncin interdit aux pays membres de faire partie dune autre organisation rgionale, cette candidature na pas t accepte et ce, bien que ce pays effectuait prs de 60 % de ses changes avec les pays du MERCOSUR. Lors du deuxime sommet, tenu en dcembre 1992, Montevideo, les questions relatives au tarif extrieur commun et aux relations futures entre le

Traduction des articles 1 et 5 du Trait d'Asuncin : http://www.MERCOSUR.org.uy/pagina1esp.htm La rduction des tarifs devait se faire tous les six mois : 47 % des changes le 30 juin 1991, 54 % des changes le 31 dcembre 1991, et ainsi de suite jusqu' la fin de la priode de transition, pour l'Argentine et le Brsil. Il faut cependant noter qu'un certain nombre de produits taient exclus et inscrits dans des listes d'exception. 13 Actuellement, ils sont 14. 14 Voir Dclaration prsidentielle de Las Leas. En ligne : http://www.MERCOSUR-comisec.gub.uy /DOCUMENT/COMUNIC/IIcumbrePteMjun92/Lenas92.htm12

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9 MERCOSUR et lALENA seront discutes15. Ce sommet fut particulirement prouvant en raison des difficults conomiques que traversait alors le Brsil, et des incertitudes politiques lies laccession rcente de Itamar Franco la prsidence de ce pays. Les prsidents ritrrent nanmoins leur engagement en faveur du processus dintgration amorc et sentendirent aussi sur la formule propose par lun des groupes de travail dtablir le tarif extrieur commun entre 0 et 20 % et, dans le cas de quelques produits, 35 %. Le troisime sommet, tenu Asuncin, le premier juillet 1993, ne permit pas de concrtiser le projet de tarif extrieur commun, lArgentine et le Brsil ne sentendant pas, pour des raisons de politique intrieure, sur le degr et le rythme de la libralisation lintrieur de la zone de libre-change vis--vis lextrieur16. Il faudra attendre deux autres rencontres, Colonia17, en janvier 1994, puis Buenos Aires, en aot 1994, pour que soient dfinitivement prciss et entrins les termes de lunion douanire et les conditions dapplication dune clause commune de la nation la plus favorise . Cest ainsi que la construction du MERCOSUR, en tant que modle dintgration intergouvernemental o les positions communes demeureraient lies la volont de chaque tat impliqu, sera officialise lors de la signature du Protocole de Ouro Preto18, en dcembre 1994. Deux facteurs ont jou en faveur du projet : la mise en place, au Brsil, en juillet 1994, du plan de stabilisation montaire par le ministre des Finances de lpoque, Fernando Henrique Cardoso19, (devenu prsident par la suite, de 1995 2002), et la dcision du gouvernement de rduire de 35% 20% les tarifs douaniers sur 445 produits. Ces mesures devaient donner une nouvelle impulsion au projet, permettre de sortir de limpasse politique et, ainsi, de respecter lchance prvue du premier janvier 1995 pour la mise en place du march commun. Le tarif extrieur commun (TEC) a donc finalement t mis en place, comme prvu, le premier janvier 1995, mais ce fut un TEC partiellement harmonis. Il varie entre zro et 35 % selon les produits, le taux moyenVoir Dclaration prsidentielle de Montevideo. En ligne : http://www.MERCOSUR-comisec.gub.uy /DOCUMENT/COMUNIC/IIIcumbrePteMdic92/Mdeo92.htm 16 Voir Dclaration prsidentielle dAsuncin. En ligne : http://www.MERCOSUR-comisec.gub.uy /DOCUMENT/COMUNIC/IVcumbrePteMjun93/Asunci93.htm 17 Voir Protocole de Colonia. En ligne : http://www.sice.oas.org/trade/mrcsrs/decisions/AN1193.asp 18 Lors de cette rencontre importante, les quatre gouvernements ont convenus de la cration dune liste denviron mille produits. Pour ces produits, les tarifs doivent tre automatiquement limins au terme dun processus de transition fix au 31 dcembre 1998, pour lArgentine et le Brsil, et au 31 dcembre 1999, pour les deux autres partenaires. La signature du Protocole dOuro Preto devait lancer une nouvelle phase dintgration : instaur una organizacin institucional permanente y entr en vigencia el arancel externo comn, que junto con la liberalizacin esencial del intercambio mutuo, dio lugar a la unin aduanera. En ligne : http://www.sice.oas.org/trade/mrcsrs/ourop/ouropins.asp. 19 La stabilisation de la monnaie et l'limination de l'inflation sont sans aucun doute mettre au crdit du prsident Cardoso, et ce, d'autant plus que, dans le mme temps, stimule par les entres de capitaux, au titre des investissements directs notamment, l'conomie brsilienne a connu une croissance conomique d'autant plus forte que la politique budgtaire, relativement souple, est venue compenser les effets ngatifs d'une politique montaire restrictive. plus d'un gard, les rsultats conomiques affichs par le Brsil sont tout fait remarquables : la croissance de la productivit est trs forte, le niveau d'endettement extrieur est relativement modeste, etc. Cela dit, outre le creusement observ des ingalits sociales, force est de noter que la politique conomique suivie a aussi eu pour effet d'entraner, d'un ct, une augmentation du dficit public et, de l'autre, une forte progression des importations. Dj, la runion des ministres de l'conomie et des prsidents des banques centrales du MERCOSUR, le 24 avril 1994, avait permis de surmonter la crise qui tait survenue en son sein la suite de la dcision de la Banque centrale du Brsil d'exiger le paiement au comptant de toutes les importations du 1 avril au 31 juillet pour viter la dvaluation du real. Ces mesures n'ont gure permis au Brsil de s'ajuster. La crise boursire et montaire qui frappa durement les pays d'Asie du Sud-Est a eu des retombes importantes au Brsil.15

10 tant de 14 %. Il faut cependant noter que le TEC touchait environ 90 % des produits imports de lextrieur. Les autres produits taient placs sur des listes dexceptions. Il sagissait, essentiellement, de biens dquipement, de matriel informatique, de produits ptrochimiques et des tlcommunications. Pour ces produits, on prvoyait que les tarifs seraient abaisss sur une base linaire, jusqu ce quils deviennent gaux au tarif extrieur commun moyen de 14 % au 1er janvier 2001 dans le cas de lArgentine et du Brsil et en 2006, pour les biens de production dans le cas du Paraguay et de lUruguay. Dans le cas des tlcommunications, lchance tait fixe au 1er janvier 2006 et le taux prvu tait de 16 %. Un dlai avait toutefois t accord lArgentine en raison des graves consquences de la crise qui a secou son conomie en 2001-2002, lui permettant dajouter 1,5 % tout TEC. En fait, le pourcentage du tarif extrieur est loin dtre harmonis. Lors de la 23me Runion du Conseil du March Commun, en dcembre 2002, les quatre pays ont convenu de prolonger jusqu la fin de 2003 le droit de chaque associ de formuler des listes dexceptions comportant cent produits au total. La stabilisation quont connue les pays du MERCOSUR depuis a permis dabroger les mesures dexception ds le dbut 2004. Le processus dunification des tarifs douaniers a t remis en marche depuis.

La structure du MERCOSURQuant la structure organisationnelle ou administrative du MERCOSUR prvue au chapitre II, elle reposait au dpart sur deux instances: (i) le Conseil du March commun (CMC) qui est linstance de coordination ; et (ii) le Groupe du March commun (GMC), linstance excutive. Le conseil se compose des prsidents, ainsi que des ministres de lconomie (ou des Finances) et des Affaires trangres de chaque pays. La prsidence se fait, par alternance, tous les six mois. Le Groupe voit lexcution des dispositions du trait et des dcisions du conseil. Il supervise onze sous-groupes (sectoriels) ainsi que les commissions et groupes ad hoc. Le sige social du groupe est Montevideo (Uruguay). Depuis le premier janvier 1995 (cest--dire depuis le Protocole de Ouro Preto), la structure institutionnelle du MERCOSUR comprend le Conseil du March Commun, le Groupe du March Commun, la Commission du Commerce, la Commission parlementaire conjointe, le Forum conomique et social caractre consultatif et le secrtariat administratif20. Seuls les trois premiers organes ont des pouvoirs de dcision. La Commission du Commerce est devenue un organe important, puisquelle a le mandat de veiller la mise en place de lunion douanire et de favoriser le rglement des diffrends. La question du rglement des diffrends, reporte lors de la signature du Trait dAsuncin, a fait lobjet dun protocole particulier, sign Braslia le 17 dcembre 199121. Le mcanisme relve du secrtariat et repose sur la formation dun panel compos de trois arbitres, chaque pays choisissant le sien, le troisime tant choisi par accord mutuel.20

Il faut mentionner aussi le Conseil de coopration macro-conomique qui joue un rle important en matire de coordination des politiques macro-conomiques. Ce n'est toutefois pas un organe officiel. 21 Le Protocole de Brasilia, en anglais. En ligne : http://www.sice.oas.org/trade/mrcsrs/decisions/AN0191e.asp

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En plus de ces structures, les membres sentendirent sur le fait que lintgration conomique devait seffectuer dans le cadre des normes de la dmocratie reprsentative22. Ainsi, le 25 juillet 1996, San Luis en Argentine, les prsidents du MERCOSUR et ceux du Chili et de la Bolivie signrent la Dclaration prsidentielle sur lengagement dmocratique du MERCOSUR (Declaracin Presidential sobre el compromiso democratico en el MERCOSUR). Une clause dmocratique fut alors adopte prvoyant la suspension dun membre dont le gouvernement contreviendrait ltat de droit. Les dirigeants du MERCOSUR utilisrent ce mcanisme en 1996 pour avertir les autorits militaires du Paraguay des consquences dun coup dtat et encore une fois en 1998, lors de la confusion entourant les lections au Paraguay. Le 24 juillet 1998, Ushuaia (Argentine) durant le XIV Sommet des prsidents du MERCOSUR, un pas de plus fut franchi avec ladoption du Protocole dUshuaia23 qui incorporait lengagement dassurer le maintien et le respect des normes dmocratiques dans les traits avec le Chili et la Bolivie. Deux remarques finales peuvent tre faites sur le Trait dAsuncin. Premirement, le trait reconnat lexistence de diffrences ponctuelles en faveur du Paraguay et de lUruguay (Art. 6); par contre, il est entirement li par une logique, celle de la rciprocit des droits et des obligations entre les quatre partenaires (Art. 3). Cette logique est entirement traverse par les ides de libre concurrence et de comptitivit et ce, dans les termes juridiques dfinis par le GATT. Deuximement, le trait nentend pas reproduire le modle de dveloppement des dcennies passes, mais au contraire tablir les conditions qui devraient permettre chacun des quatre pays daccrotre la comptitivit de leur conomie respective et de profiter de la cration dun march rgional pour sinsrer plus efficacement dans lconomie mondiale.

Les dveloppements rcents : du succsLa cration du MERCOSUR rpondait, ds le dpart, des proccupations tout autant dordre politique quconomique. Politique tout dabord, dans la mesure o lvolution de la conjoncture politique en Argentine et au Brsil avait jou un rle plus dterminant dans le rapprochement entre les deux pays que les facteurs conomiques. La volont des deux pays de renforcer la stabilit politique et la scurit dans la rgion travers un projet intgratif commun apparat importante ds la fin des annes 1980. un autre niveau, il faut noter une volont trs nette de lArgentine et du Brsil de sinsrer de manire comptitive dans lconomie mondiale. En ce sens, la formation dun espace conomique intgr apparat comme un moyen pour ces deux pays de consolider cette insertion comptitive et comme loccasion de poursuivre dans la voie des rformes conomiques entreprises. Enfin, la cration progressive dun march commun englobant lensemble des pays de la rgion tait perue comme un moyen de renforcer le pouvoir de ngociation vis--vis des partenaires commerciaux de longue date, notamment les tats-Unis et les pays de lUE.22 23

Une proccupation pour la dmocratie est prsente depuis le Sommet de Las Lenas de 1992. Voir : http://www.MERCOSUR-comisec.gub.uy/DOCUMENT/Ushuaia/USHUAIAE.htm

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Au vu des premiers rsultats, la plupart des observateurs saccordent pour dire que le MERCOSUR a t, jusquen 1998, un succs. Premirement, le commerce intrargional24 a connu depuis le dbut de la dcennie une trs forte progression. Entre 1990 et 1998, les exportations intra-rgionales sont passes de 8,9 % 25,2 % des exportations totales, et les importations intra-rgionales de 14,1 % 21,2 % des importations totales25. Tout au long de ces annes, lcart entre la croissance des changes intra-MERCOSUR et celle du commerce avec le reste du monde a provoqu des critiques de la part de la Banque mondiale et des tats-Unis pour qui, cette intgration tait discriminatoire lgard des tats tiers et contrevenait aux principes inscrits dans les accords du GATT. Deuximement, en matire dinvestissements, il y a eu une plus grande interaction entre les membres du MERCOSUR travers des investissements croiss, surtout entre le Brsil et lArgentine. Troisimement, en 1998, lArgentine tait le deuxime partenaire commercial du Brsil, derrire les tats-Unis, et lArgentine maintient cette position encore aujourdhui. Le Brsil tait et est encore aujourdhui le premier partenaire commercial de lArgentine devant les tats-Unis. Graphique 1 : Part du commerce intra-zone des importations et les exportations totales des pays du MERCOSUR30

Commerce intra-zone/exportations Commerce intra-zone/importations

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0 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004

United Nations (2004), Comtrade , UN Commodity Trade Statistics Database, http://unstats.un.org/unsd/comtrade/

Le commerce intra-zone est identique dans le cas des importations et des exportations : les exportations intra-zone dun pays membre sont ncessairement les importations intra-zone dun autre pays membre du Mercosur. Cependant, leur rapport aux importations ou aux exportations totales varie en fonction du niveau de ces deux agrgats. 25 D'aprs : Nation unies, Comtrade , UN Commodity Trade Statistics Database, 2004. En ligne : http://unstats.un.org/unsd/comtrade/

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13 Il faut ajouter que la dynamique dintgration semble aussi avoir eu un impact positif sur les entreprises de la rgion. Une classe dentrepreneurs rgionaux serait en train de se constituer. En 1991, six entreprises brsiliennes taient installes en Argentine, alors quen 1998, elles taient plus de 350. On note un accroissement similaire des entreprises argentines qui stablissent au Brsil. Dans ce contexte, des entrepreneurs brsiliens ont cr Buenos Aires le Groupe Brsil dans le but de mieux grer leurs investissements dans ce pays. Le MERCOSUR tait galement peru comme une russite sur le plan politique. En vertu du Trait dAsuncin, la cration dune zone de libre-change ntait que la premire tape dun processus qui devait conduire la cration dun vritable march commun. Si le Brsil souhaitait aller rapidement dans cette direction, comme lavaient fait les Europens, lArgentine se rapprochait davantage des conceptions libre-changistes vhicules par les promoteurs de lALENA. Fort des premiers succs conomiques obtenus, le Brsil entendait faire du MERCOSUR le point dancrage dun projet plus ambitieux dintgration en Amrique latine. Ainsi, le processus dharmonisation des politiques conomiques que sous-tend le projet de march commun sest acclr lors des premires annes. Si, durant la phase de transition de 1991 1994, laccent a surtout t mis sur la libralisation des changes ; les pays du MERCOSUR, commencer par lArgentine et le Brsil, se sont par la suite engags dans la voie dune convergence de leurs politiques conomiques, industrielles, scientifiques et technologiques.

la criseCependant, le processus dintgration est rest limit. Si la crise financire mexicaine de 1994-1995 ne semble pas avoir eu trop dimpacts ngatifs sur le processus dintgration du MERCOSUR, la situation sera diffrente lors des crises russe et asiatique la fin des annes 1990 qui se sont traduites par un retrait de capitaux touchant les pays mergents. En effet, la mise en place dune zone de libre-change, initialement prvue pour lanne 1999, a t ajourne en raison des difficults financires et montaires rencontres par le Brsil et lArgentine. Ces pays ont alors d prendre unilatralement des mesures durgence et revoir leurs ambitions. LArgentine a souffert normment de la chute du prix du ptrole brut et des produits craliers. Aussi, en 1999, le Brsil effectuera une dvaluation du real (une baisse de 30 % par rapport la monnaie des tats-Unis), ce qui va affecter fortement lconomie argentine. Laugmentation massive des exportations brsiliennes vers lArgentine a provoqu un mouvement de revendications de la part des producteurs argentins qui ont exig plus de protection pour leurs produits. Afin dattnuer le conflit, le Brsil dcida dabandonner son programme de financement des exportations (PROEX)26. Ce ne fut toutefois pas suffisant pour empcher la situation en Argentine de saggraver et en 2001, lorsque la crise clate, les tensions commerciales dj existantes au sein du MERCOSUR samplifieront davantage. Malgr une augmentation globale du commerce entre les tats membres du26

Trotignon, Jrme, Lvolution du commerce extrieur de lArgentine et du Brsil , Revue Tiers Monde, t. XLIII, no 170, avril-juin 2002, pp.447-463.

14 MERCOSUR, ceux-ci seront confronts une vritable remise en question des principes de lUnion douanire au premier semestre 2001. ce moment-l, la crise argentine sapprofondit et la dprciation du real sintensifie. Le gouvernement argentin dcide unilatralement de rtablir certains tarifs douaniers intra-MERCOSUR et de procder des modifications du TEC. Ces modifications ont t officiellement avalises par les partenaires du MERCOSUR, sous forme dune drogation temporaire la rgle du tarif commun, pour une priode allant jusquen dcembre 2002 27. Les frquentes remises en cause du tarif extrieur commun ont soulev le doute quant la volont du gouvernement argentin de prserver une union douanire. Effectivement, Carlos Menem et de Domingo Cavallo28 se sont montrs peu enthousiastes lgard du MERCOSUR dans llaboration de leur politique extrieure. Selon eux, lArgentine gagnerait beaucoup plus dune insertion internationale largie et tourne vers dautres blocs commerciaux (ALENA, UE). Ainsi, lArgentine prnait la transformation du MERCOSUR en une zone de librechange se rapprochant de celle en vigueur en Amrique du Nord. Selon les dirigeants de lArgentine, cela aurait donn aux pays membres plus de libert afin ngocier des accords de libre-change bilatraux, notamment avec les tats-Unis. Paralllement lessoufflement du MERCOSUR, les ngociations continuaient de progresser en vue de la cration dune Zone de libre-change des Amriques (ZLA). cet gard, les tats membres du MERCOSUR ont longtemps eu des difficults coordonner leurs stratgies afin de ngocier dune mme voix. Les crises conomiques et sociales vcues par les membres du MERCOSUR entre 1999 et 2002 ont interrompu la dynamique dintgration quavait connue la zone entre 1990 et 1998. Les exportations intra-zone passent de 25,2 % 11,5 % des exportations totales de la zone (cf. graphique 1, ci-dessus p. 7). Durant la mme priode, les importations intrargionales passent de 21,2 % 17,1 % des importations totales du MERCOSUR29. Par contre, certains vnements sont venus attnuer les perspectives ngatives. Suite la fin de la parit du peso au dollar, lAdministration des tats-Unis a peu soutenu lArgentine au plus fort de la crise. Aussi, la mfiance dclare lgard du multilatralisme commercial du nouveau gouvernement Duhalde a provoqu un sursaut rgional. Au moment de la runion du Conseil du March commun, le 18 fvrier 2002, les plus hauts reprsentants des pays membres du MERCOSUR ont affirm leur volont de poursuivre le processus dintgration commerciale. De plus, larrive de Lula la tte du gouvernement brsilien semble avoir donn un nouveau souffle aux relations rgionales, et plus particulirement aux relations bilatrales entre le Brsil et lArgentine. Ce nouvel lan sera confirm par le changement de gouvernement en Argentine au milieu de lanne 2003.

Le MERCOSUR et le retour des beaux discours27 28

Ibid., p.461. Respectivement, il tait Prsident et Ministre de lconomie en Argentine au plus fort de la crise conomique. 29 Nations unies (2004), op.cit.

15 Dans cette partie, nous tenterons de prsenter diverses initiatives mises de lavant par les dirigeants des pays du Mercosur. Cependant, si les intentions sont bonnes, les propositions des dirigeants ne semblent pas toujours se traduire par une plus grande intgration comme nous le verrons un peu plus loin. En 2002, larrive de Luis Inacio Da Silva (Lula) la prsidence du Brsil a sembl donner un nouvel lan au MERCOSUR. En effet, le MERCOSUR tait sa priorit en termes de politique trangre. Plus largement, le nouveau prsident brsilien va favoriser la dynamique dintgration SudSud, faisant passer les ngociations avec le nord au second plan. Cette nouvelle dynamique dintgration rgionale tente de concilier dveloppement conomique et justice sociale. Cet lan va entraner de nouveaux projets institutionnels. Les voyages de Lula dans la rgion sud-amricaine ont t marqus par une volont de renforcer les liens entre les pays de la rgion par lintermdiaire de lextension du MERCOSUR. ce titre, le nouveau prsident a nomm une personne charge du suivi des ngociations dans le contexte du renforcement du MERCOSUR. Loriginalit de ce poste est quil est rattach directement la Prsidence, disposant ainsi de rels pouvoirs politiques. En fvrier 2003, le secrtariat administratif de Montevideo se transforme en secrtariat technique. Le grand projet propos par Lula sera la cration dun parlement du MERCOSUR, qui donnerait une place la reprsentation dmocratique au sein du processus dintgration. Si lArgentine semble favorable ce projet, les petits pays (Uruguay et Paraguay) sont plus que mfiants son gard. tant donn leur petite taille, ceux-ci ont peur de voir diminuer leur influence dans les processus de prise de dcision au sein du bloc. De nouvelles agences gouvernementales sont galement cres afin de favoriser lintgration. Laxe Argentino-brsilien se veut le fer de lance de ces processus. En mai 2003, les deux excutifs se lancent dans la cration dun Institut de coopration montaire. Les crises issues de la dvaluation du Real et de la fin du Conseil montaire en Argentine ont veill la conscience des autorits des deux pays sur la ncessit dune coopration accrue dans ce domaine. Cest ce moment, en mai 2003, quest lu Nestor Kirchner en Argentine. Le premier prsident lu depuis la crise conomique et sociale se prononce lui aussi en faveur de la relance du processus dintgration au sein du MERCOSUR. Le seul pays du bloc rticent cette politique est lUruguay qui prfre privilgier les ngociations hmisphriques et plus particulirement les pourparlers avec les tats-Unis. Il proposera alors une ngociation 4+1 avec les tats-Unis. En juin, Lula et Kirchner se mettent daccord pour la cration dun parlement du MERCOSUR et lancent lide dune intgration de lensemble du continent sud-amricain. Approfondissement et largissement deviennent alors les deux mots cls des dirigeants du bloc30. Cependant, il faut bien considrer queDu point de vue de lapprofondissement, les pays se fixent comme objectif lanne 2005 pour achever le processus dunification douanire et 2006 pour la cration dun march unique au sein du Cne Sud. Par ailleurs, le Brsil et lArgentine proposent daider les deux petits pays du MERCOSUR en crant des mcanismes institutionnels dont ils bnficieront. En ce qui concerne llargissement, il sagit des multiples initiatives visant renforcer la coopration et lintgration Sud-Sud. Dans cette perspective, le bloc ngocie un accord de libre-change avec la Communaut andine des nations (CAN); des pourparlers sont en cours avec lInde, lAfrique du Sud et les pays arabes. Cest aussi dans cette dynamique que lensemble du bloc sera un membre fondateur du G20. Llargissement se traduira par la multiplication30

16 les annonces ne se traduisent pas toujours en des mesures concrtes. Particulirement dans le domaine de lapprofondissement de lintgration, les contradictions internes empchent davancer concrtement. Le 7 octobre 2003, Eduardo Duhalde, ancien prsident de lArgentine, devient officiellement reprsentant du Comit du MERCOSUR. ce titre, il exercera une influence importante en faveur dune intgration accrue du bloc et de lAmrique latine. Le 17 octobre, Lula et Kirchner concrtisent leur alliance stratgique avec la signature du Consensus de Buenos Aires 31. Cette dclaration vise reconnatre la priorit politique de la lutte contre la pauvret et le chmage. Mme si cette initiative se veut une alternative au consensus de Washington, la promotion des quilibres macroconomiques y reste importante. Cest toutefois lintgration Sud-Sud qui fait figure de priorit durant cette priode. Les ngociations en vue de la signature de la ZLA seront perturbes et le projet original sera remis en cause en novembre 2003, notamment en raison de lopposition de lArgentine et du Brsil. En novembre 2004, llection de Tabar Vsquez la prsidence de lUruguay va se traduire par une implication accrue de lUruguay au sein du MERCOSUR. Cependant, les liens conomiques avec les tatsUnis et lintgration hmisphrique demeurent toujours un enjeu important pour le gouvernement Vsquez Lintgration des pays du Cne Sud prendra galement la forme de la coopration militaire. La premire dcision commune sera de refuser de sengager dans la coalition mene par les tats-Unis pour faire la guerre en Irak. En avril 2004, le MERCOSUR prpare un convoi militaire pour une mission de maintien de la paix en Hati sous lgide de lONU. En septembre 2004, les membres du MERCOSUR annoncent la mise sur pied dun Secrtariat rgional de la Dfense. Celui-ci devrait tre charg daccrotre la coopration militaire, de mettre en place des activits communes et de proposer des outils de formation lchelle rgionale. De nouvelles manoeuvres militaires sont galement ralises en commun en juin 2005.

Linaments de lintgration conomiqueDans cette partie, nous allons tenter dvaluer les effets de ces accords institutionnels sur les structures conomiques. Tout dabord, nous pouvons distinguer trois formes dintgration en profondeur au sein du Cne Sud et, au-del, de lAmrique du Sud : lintgration infrastructurelle, lintgration nergtique et lintgration des chanes de production. Concernant les infrastructures, les projets en cours entre 2003 et nombreux. Lide qui figure derrire tous ces programmes est que la rseaux (routiers, ariens, ferroviaires et de tlcommunications) daccrotre les flux conomiques (commerce, investissement) entre 2005 sont trs construction de est un moyen les agents des

du nombre de pays qui deviendront membres associs du MERCOSUR, tel le Prou (aot 2003), puis lensemble de la Communaut andine. 31 Disponible sur le site : http://www.item.org.uy/Documentos/consenso_portugues.htm

17 diffrents pays membres (et membres associs) du bloc rgional. Conformment au protocole dintgration physique du MERCOSUR, de nombreux projets de rseaux routiers, nergtiques, de transports, etc. - vont tre lancs pour promouvoir lintgration. Ds juillet 2003, les prsidents argentin, brsilien et chilien commencent ngocier la cration dune artre de communication atlantique pacifique. En aot 2004, le projet prend la forme dune liaison ferroviaire Argentine-Brsil-Chili permettant de passer outre les frontires naturelles (cordillre des Andes) pour promouvoir lintgration du Cne Sud. La construction du corridor sera finalement lance le 7 juin 2005 lors dune rencontre entre Nestor Kirchner et Ricardo Lagos (Prsident du Chili). Un autre projet de route transocanique est en cours entre le Brsil et le Prou. Ce projet impliquait lorigine la construction dune route allant de Manaus (Nord-est du Brsil) jusqu locan Pacifique. Les discussions autour du projet ont t lances en aot 2003 et elles ont volu pour devenir un corridor de 2600 kilomtres partant du sud-ouest du Brsil, passant par la Bolivie et ce, jusqu lOcan Pacifique au Prou. Le 5 aot 2005, les pays signaient le trait marquant le dbut de lAutoroute Transocanique. Il sagit dun projet de 1,1 milliard de dollars auquel collaboreront des entreprises brsiliennes et pruviennes. Enfin, lintensification des lignes ariennes rgionales est aussi une des faons dont sest exprime lintgration rticulaire de lAmrique Sud32. Au niveau des tlcommunications, la rgion tente de sassurer une autonomie lgard des oprateurs du Nord. cet gard, Chavez et Lula ont sign une entente visant la signature dun accord sur les tlcommunications. Un autre accord a t sign sur le sujet entre lUruguay et le Brsil. Mme la Chine joue un rle dans ce processus en lanant un satellite pour cette rgion. Le projet le plus important dans ce domaine est la cration dune chane de tlvision dinformation des pays dAmrique du Sud : Telesur. Ce projet vise donner une voix sud-amricaine sur les questions touchant le continent et les autres vnements mondiaux. Le Venezuela est lorigine du projet. La chane est la proprit de quatre pays diffrents : Le Venezuela (51%), lArgentine (20%), Cuba (19%) et lUruguay (10%). La premire mission a t tldiffuse le 25 mai 2005. Cette multiplication des manifestations de lintgration des infrastructures est accompagne par un accroissement de la coopration dans le domaine nergtique. Ce volet de lintgration dpasse lui aussi les frontires du MERCOSUR. LAmrique latine est un acteur majeur au niveau mondial dans ce domaine. En effet, selon la CEPAL, 13 % des rserves mondiales de ptrole se trouveraient dans ce continent33. Dailleurs, le prsident Chavez a t le premier promouvoir lintgration nergtique lors dun voyage en Argentine en mai 2003. Il propose alors de lancer un grand conglomrat ptrolier impliquant tous les gouvernements sud-amricains. Mais, comme cest frquemment le cas, cest une situation de crise qui va entraner lacclration du processus dintgration nergtique. En 2004, lArgentine se relve de la crise et connat une phase de forte croissance conomique. Or, cette forte croissance a entran une trs forte hausse de la consommation nergtique du pays. Dans ces conditions, le32 Nous pouvons en donner quelques illustrations. En mars 2005, LAN Chile achte une partie de la flotte de LAFSA (Argentine) et souhaite ainsi intensifier ses vols en direction de cette dernire. La firme chilienne indique en juin quelle va accrotre ses vols en direction du Brsil. En mai, GOL (compagnie brsilienne) annonce quelle va intensifier le nombre de ses vols en direction de lUruguay. 33 Divisin de Recursos Naturales e Infraestructura [2004], ECLAC, http://www.eclac.cl/drni/

18 gouvernement a t oblig, sous la pression des entreprises, de couper lensemble des exportations de gaz en direction de lUruguay et du Chili partir de mars 2004. Or, le Chili sest retrouv dmuni face cette diminution drastique des quantits de gaz qui lui taient offertes. Cette rupture unilatrale enfreint le trait bilatral sign en 1995. Cest ce moment que le Brsil est venu au secours de lArgentine en lui fournissant de llectricit et du ptrole. Dans un mme lan de solidarit, le Venezuela a offert 5,15 millions de barils de ptrole en change de 25 000 ttes de btail. Enfin, la Bolivie a sign un contrat avec lArgentine en lui proposant la construction dun nouveau gazoduc entre les deux pays34. En avril 2004, le Brsil, la Bolivie et lArgentine parachvent leur accord nergtique qui passe pour une tape fondamentale dans la construction de lintgration rgionale. Le Brsil sengage de son ct fournir le Chili en gaz afin de rgler les diffrends nergtiques au sein du Cne Sud. En mars 2005, une runion tripartie entre le Venezuela, lArgentine et le Brsil donne une autre impulsion lintgration dans ce domaine. terme, le projet devrait aboutir la cration dun grand conglomrat sudamricain du ptrole nomm Petrosur . De nombreuses autres initiatives locales prouvent lintensit de la coopration dans ce domaine. Toutes ont pour perspective dassurer lautonomie nergtique du MERCOSUR et du continent35. Le dernier volet de lintgration que nous dsirons illustrer est celui des liens daffaires qui se nouent dans la rgion (investissement priv, commerce...), et du soutien des milieux conomiques au processus dintgration. De nombreux accords ont t signs afin dencourager ces liens, mme si des difficults persistent en ce domaine. titre dillustration, le Brsil et lArgentine ont sign un nouvel accord en mai 2005 visant multiplier les liens daffaires entre les deux pays et acclrer lintgration productive. Dans le domaine agricole et alimentaire, plusieurs projets sont en cours36. Les milieux daffaires sont partags en ce qui concerne leur soutien lintgration rgionale. Le soutien du secteur agro-alimentaire est clair. La position offensive du bloc lgard des pays du Nord explique ce comportement. Cependant, les milieux industriels sont parfois sceptiques quant lefficacit du processus. Cette perplexit peut tre due limportance des liens dinvestissement avec les pays du Nord et aux difficults chroniques de lunification douanire au sein du bloc, que nous analyserons dans la partie suivante. Les milieux daffaires brsiliens cherchent privilgier les liens avec le Nord et les entrepreneurs argentins sont trs hostiles vis--vis de leurs homologues brsiliens. Ceci est le reflet de contractions internes au MERCOSUR que nous allons explorer dans la partie suivante.

Les contradictions entravant lintgration : le MERCOSUR au bord de laAvec la condition imprative de ne pas renvoyer le gaz bolivien au Chili en raison du conflit frontalier sculaire qui divise les deux pays. 35 Nous pouvons noter : des investissements de 1,4 milliards de Petrobras en Patagonie (aot 2004) ; le rachat davoirs ptroliers de Shell Argentine par le Venezuela (idem) ; un accord de coopration nergtique entre le Brsil et lUruguay (exploration de gaz et de ptrole, lectricit ; avril 2005) ; de nouveaux investissements de Petrobras Mar del Plata (Argentine) de 1,5 milliards de dollars (mai 2005) ; le projet de gazoduc partant du Prou et desservant le Chili, le Brsil, lArgentine et lUruguay (juin 2005) ; des investissements de Petrobras en Uruguay (juillet 2005) ; et enfin, le partenariat nergtique entre le Venezuela et lUruguay (fourniture du ptrole pour 25 ans en Uruguay, construction de rservoirs, aot 2005). 36 Par exemple, en dcembre 2004, lindustrie laitire Argentine prvoyait investir dans des installations de 6 millions de dollars en Uruguay. Lula et Vsquez ont aussi inaugur une usine de traitement du malt en Uruguay, en mars 2005. Il sagit dun projet dinvestissement impliquant des entreprises des deux pays.34

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dislocation ?Dans la partie prcdente, nous avons tent de relever lensemble des processus conomiques et politiques qui montrent que le MERCOSUR semble tre sur la voie de la reprise. Mais nous devons aussi mettre en vidence les contradictions internes au processus dintgration. Celles-ci sont nombreuses, et elles laissent planer un doute sur la possibilit dun rel approfondissement de lintgration rgionale. Deux problmes principaux peuvent tre soulevs : les conflits dintrts entre lArgentine et le Brsil en partie causs par le processus dintgration ; et la perptuation de liens conomiques plus forts avec lextrieur de la zone. Laxe Argentine-Brsil est le pivot du processus dintgration conomique. Or, depuis 2004, un certain nombre de dsaccords, voire de diffrends se sont affirms entre les deux pays. Au mois de juillet 2004, lArgentine dcide de mettre en place un tarif douanier durgence (de 21%) et des quotas sur des produits industriels brsiliens (postes de tlvision et lectromnagers). Lula demandera immdiatement lArgentine, sous la pression des industriels et des travailleurs, dabandonner lensemble de ses barrires tarifaires. Ce conflit particulier ramne sur le devant de la scne trois problmes rcurrents au sein du MERCOSUR : (i) la question du rglement des diffrents ; (ii) le retard accumul dans le processus dunification douanire et dlimination interne des obstacles aux changes ; et (iii) le problme des clauses de sauvegarde. Concernant le premier problme, Lula comme Kirchner ont insist dans cette affaire pour rgler la question politiquement, entre excutifs nationaux. La deuxime question renvoie la difficult de trouver un compromis pour assurer lintgration en profondeur du Cne Sud. Le Brsil comme lArgentine ont des structures productives varies avec des secteurs industriels diversifis. Or lintgration pose la question de la division du travail au sein du bloc, et donc, de la restructuration industrielle. En adoptant ce tarif douanier sur les marchandises industrielles brsiliennes, lArgentine veut envoyer un message clair au Brsil. LArgentine est un fervent partisan de lintgration, mais pas dun processus dintgration qui ait pour consquence la dsindustrialisation du pays. Do lide des clauses de sauvegarde. LArgentine demande au Brsil de donner le temps de sajuster aux industries argentines secoues par la crise de 2001. De son ct, le Brsil va sopposer une telle disposition pendant plusieurs mois, allant mme jusqu menacer dappliquer des mesures de rtorsion. Il faudra attendre juillet 2005 pour que le Brsil accepte de ngocier la cration dun mcanisme dapplication des clauses de sauvegarde. Mais le Brsil demande lArgentine de faire un pas en sa direction en acceptant la mise en place dun mcanisme rgional visant coordonner et harmoniser les politiques industrielles au sein du bloc afin daccrotre lintgration, tout en respectant le tissu industriel de chacun des pays du MERCOSUR. Finalement, le 1er fvrier 2006, les deux pays se sont mis daccord pour la cration dun mcanisme dadaptation la concurrence qui permettra au pays affect de recourir des clauses de sauvegardes. Fondamentalement, le conflit entre les deux pays est aussi un conflit de pouvoir et dinfluence. La politique brsilienne visant accrotre son rayonnement et sa visibilit internationale agace fortement lArgentine. Cest la raison pour laquelle cette dernire refuse de soutenir la candidature du Brsil comme membre permanent du conseil de scurit au sein de lONU.

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Par ailleurs, les petits pays du MERCOSUR (Uruguay et Paraguay) se sentent touffs, au milieu des deux conomies qui les dominent. Malgr les dclarations dintention, la prise en compte de lasymtrie conomique par le Brsil et lArgentine semble un dossier sans cesse remis plus tard. Ceci explique en partie le fait que lUruguay et le Paraguay se retournent maintenant vers les tats-Unis. Effectivement, au mois de septembre 2005, le Paraguay a avou quil cherchait renforcer sa coopration conomique et militaire avec les tats-Unis. Linstallation dune base militaire amricaine sur le territoire paraguayen a cr un fort ressentiment leur gard chez tous les autres membres du MERCOSUR. Par ailleurs, lUruguay a sign en novembre 2004 un trait bilatral sur le commerce et linvestissement avec les tats-Unis. Malgr les difficults que pose sa ratification, le gouvernement uruguayen ne semble pas renoncer la coopration conomique avec lAmrique du Nord. Si les rumeurs de ngociations de libre-change avec les tats-Unis ont longtemps t dmenties, Vasquez affirme aujourdhui quune libralisation est lordre du jour. La volont de ces pays de se librer du poids conomique et politique de leurs puissants voisins explique ces agissements contradictoires avec lapprofondissement du MERCOSUR. Il est vident que si les gouvernements brsilien et argentin ne prennent pas en compte plus srieusement lasymtrie avec les deux autres pays, le MERCOSUR sera vou limplosion. Les gouvernements uruguayen et paraguayen, tout comme les acteurs socio-conomiques de ces deux pays, semblent las de se faire traiter comme des satellites sans importance dans les ngociations. Nous pouvons aussi relever un autre obstacle trs important au processus dintgration en profondeur au sein du MERCOSUR. Comme lindiquent les graphiques 2 et 3 (cidessous), les pays du MERCOSUR sont dpendants conomiquement des pays dEurope et dAmrique du Nord, que ce soit des membres de lALENA ou ceux de lUE. Non seulement, lessentiel des flux commerciaux se fait avec ces deux blocs, mais surtout, les flux dinvestissement proviennent majoritairement de ces deux rgions. Alors quen 1998, les exportations se dirigeaient principalement lintrieur de la zone (25,2 % des exportations totales, contre 24,8 % vers lUE et 17,3 % vers lALENA), en 2004, les exportations intra-zone rtrogradent la troisime place (12,8% du total), loin derrire lUE (22,5 %) et lALENA (23,2 %). Nous pouvons estimer que les crises conomiques et financires successives ont entam largement les marchs des pays membres. Ceci explique aussi la forte diminution gnrale des importations. La crise financire brsilienne et la crise conomique argentine ont contract la taille du march des pays du Cne Sud. cela, il faut ajouter la dvaluation des monnaies de chacun des pays, qui a fortement pes sur la valeur des exportations des pays membres, et qui a contract davantage la demande de produits trangers. Par contre, mme si lessentiel des importations provient de lALENA et de lUE en 2004, la part du Mercosur a repris de poids. Elle est certes passe de 21,2 17,1 % entre 1998 et 2002, mais elle est remonte 18,9 % en 2004. Face cela, les parts des importations europennes et nord-amricaines ont rgress durant la mme priode passant respectivement 27,8 % et 25,2 % 21,1 % et 19,4 %. En dfinitive, nous pouvons noter un net dveloppement des exportations totales (particulirement en direction du Nord) et en parallle un dclin des importations totales entre 1998 et 2004.

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Si une progression des flux conomiques intra-zone sont palpables la suite de la crise, le retard accumul du processus institutionnel dintgration et la relative faiblesse des liens daffaires remettent partiellement en cause lenthousiasme des dirigeants politiques en faveur de lintgration. Dailleurs, les gens daffaires des pays membres du MERCOSUR ne sont pas toujours convaincus de la pertinence de lintgration rgionale. Cela dcoule du fait que leurs principaux marchs sont davantage au Nord que dans le cne Sud. Cette dpendance lgard des dbouchs extrieurs vient mettre en doute la pertinence conomique de persvrer une intgration sans la mise en place dun grand march interne harmonis. Graphique 2 : Rpartitions des exportations du MERCOSUR (millions de dollars US)40

Alena UE

20 Mercosur

Autres, Amrique latine et C.

Chine

Japon

ASEAN 0 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004

Graphique 3 : Rpartition des importations du MERCOSUR (millions de dollars US)

2230

20 Alena

Union Europenne

Mercosur 10

Chine Japon

Autres, Amrique latine et C.

ASEAN 0 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004

Source : Nations unies, Comtrade , UN Commodity Trade Statistics Database. 2004. En ligne : http://unstats.un.org/unsd/comtrade/

Certes, le bloc semble pour la premire fois prt slargir. En effet, les membres du march commun et le Venezuela ngocient actuellement pour que ce dernier devienne membre part entire du MERCOSUR. Le 9 dcembre 2005, lensemble de ces pays sest mis daccord pour mettre en oeuvre le processus dintgration, travers les exigences du trait dAsncion, dOlivo et dOuro Preto. Mais cet largissement semble tre larbre qui cache la fort. Un autre conflit semble vouloir remettre en cause le Mercosur. Lautre conflit qui menace lunit du MERCOSUR oppose lArgentine et lUruguay concernant la construction de deux usines de ptes et papiers. Deux entreprises europennes veulent mettre en place cette unit de production Fray Bentos, en Uruguay, sur le bord du Rio de la Plata. Or, la province de lEntre Rios en Argentine est farouchement oppose cette implantation dans la mesure o les impacts environnementaux sembleraient dommageables. Les citoyens de la ville de Gualeguaych semblent particulirement opposs ce projet. Le gouvernement argentin a fait la demande expresse son homologue uruguayen dattendre les rsultats dune tude dimpacts environnementaux sur le sujet. Or, lUruguay a donn lautorisation de construction en dcembre 2005, la suite dun rapport favorable produit par la Banque mondiale. Les racines du problme donnent des grandes leons quant aux difficults de lintgration rgionale. Premirement, les intrts entre les pays sont trop souvent contradictoires. Ici, dun ct, nous avons un projet conomique avec les emplois et investissement qui vont avec. De lautre, nous observons les inquitudes environnementales. Deuximement, le rglement des diffrends nest ni institutionnalis, ni rgional. Au lieu de tenter de rgler le problme lintrieur du MERCOSUR, la

23 province argentine menace davoir recours la Cour internationale de Justice de La Haye. La population locale argentine a entrepris le blocage des ponts entre leur pays et lUruguay entre les mois de janvier et mars 2006. Le prsident Vasquez a alors dnonc cette entrave la libre circulation des personnes qui est garantie par le MERCOSUR. Malgr les appels au calme de Kirchner, les citoyens de lEntre Rios refusent de cder. Malgr la fin du blocage, les cicatrices sont encore prsentes et il semble que cet lment a accru la fragilit du bloc qui semble plus que jamais sur le bord dexploser. LUruguay avoue aujourdhui penser se distancer de lUnion douanire, voire de la quitter. LArgentine a quant elle annul les festivits entourant le quinzime anniversaire du MERCOSUR. Par ailleurs, le gouvernement brsilien ne semble pas trs enclin tenter de recoller les morceaux. Les mois qui viennent vont probablement dterminer le futur du processus dintgration. Mais loptimisme de llargissement (avec le Venezuela) ne peut gure cacher la fragilit actuelle du bloc.

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Annexe 1 : Le MERCOSUR et ses partenairesALNA Le 19 juin 1991, Washington, les pays membres du MERCOSUR signent avec les tats-Unis un Accord commercial et dinvestissement connu aussi sous le nom de The Rose Garden Agreement37 (nom du lieu de sa souscription) ou sous le nom de cuatro ms uno. Cet accord sinscrivait dj dans le cadre plus vaste de lInitiative pour les Amriques et prvoyait la mise en place dun Conseil sur le commerce et linvestissement compos de reprsentants des cinq pays. Tout dabord, en matire dinvestissement, il proposait de promouvoir et de faciliter les investissements rciproques. Par la suite, en matire de commerce, il reconnaissait la ncessit dliminer les barrires non-tarifaires ainsi que limportance de protger les droits de proprit intellectuelle et datteindre la libralisation mondiale du commerce agricole. Le 16 avril 2002, les pays du MERCOSUR et les tats-Unis se sont runis dans le cadre de la Troisime runion du Conseil sur le commerce et linvestissement au cours de laquelle les participants ont convenu de maintenir le rythme des ngociations en cours au sein de lOMC. En 1995, les ngociations MERCOSUR-ALNA visant la libralisation du commerce ont dbut. En fait, depuis la cration de lALNA en 1994, les relations entre les pays du MERCOSUR et les tats-Unis avait surtout pris la forme de ngociation visant la cration de la ZLA. Dans ce contexte, les relations entre le Brsil, moteur conomique du MERCOSUR, et les tats-Unis, se sont rvles dune extrme importance dans les ngociations hmisphriques, dautant plus que les deux pays ont partag la prsidence dune des dernires phases de ngociation. Larrive de Lula la prsidence du Brsil refroidit les changes entre les deux pays, car celui-ci sest toujours rfr la ZLA comme un trait dannexion aux tats-Unis. Larrive de Kirchner va lui donner un partenaire au sein du bloc pour faire avorter le projet initial. La stratgie brsilienne de ngociation sest rvle gagnante. Premirement, le Brsil a russi maintenir une ngociation par blocs rgionaux plutt que par pays individuel. Deuximement, les objectifs des ngociations ont t largement revus la baisse. La formule de libralisations massives prvue par les tats-unis a t rejete lors de la confrence de Miami les 20 et 21 novembre 2003, pour une ZLA la carte qui comporte deux volets. Le premier volet est la mise en place dun cadre de rduction des tarifs douaniers pour la zone. Mais, comme lavait exig le Brsil, les dlais seront beaucoup plus souples que ce qui tait initialement prvu. Un deuxime volet sest ouvert pour tous les sujets qui portent polmique (par exemple : linvestissement, les marchs publics, les mesures antidumping, et lagriculture, etc.)38. Pour ces sujets, des ententes bilatrales ou plurilatrales seront possibles. Il faut signaler que lUruguay a ngoci un accord-cadre sur le commerce et les investissements en 2004, avant le changement dadministration.

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Voir : http://www.MERCOSUR-comisec.gub.uy/ACUERDOS/EEUU/aceeuu.htm Pour plus de prcisions, voir Turcotte S., La ministrielle de Miami : comment sauver les meubles ? , Chronique des Amriques, Observatoire des Amriques, n 03-21, novembre 2003. En ligne : http://www.ameriques.uqam.ca/pdf/Chro_0321_turcotte-ZLEA.pdf

25 Le MERCOSUR et le Canada ont ratifi une Entente de coopration en matire de commerce et dinvestissement (Entendimiento de cooperacin en materia de comercio e inversiones entre el MERCOSUR y Canad)39 Buenos Aires (Argentine) le 16 juin 1998. En plus de contenir un plan daction en matire de commerce et dinvestissement, lentente a mis sur pied un Groupe consultatif de coopration en commerce et investissement et un Conseil constitu de reprsentants dentreprises. Il sagit, encore une fois, de faciliter la collaboration entre les pays concerns au sein de la ZLA, de lOrganisation mondiale du commerce et du Groupe de Cairns. Le groupe consultatif sest runi pour la premire fois en novembre 1999 Toronto. Cette runion a t loccasion de mettre sur pied deux comits pour traiter de deux questions spcifiques : la coopration douanire et technique, et la promotion et lexpansion du commerce. Des ngociations ont eu lieu entre le Canada et le Brsil (au nom du MERCOSUR) afin daccrotre la coopration entre les deux. Il dagit dun dialogue sur le commerce et les investissements qui a commenc les 22 et 23 novembre 2004, lors de la visite de Paul Martin (premier ministre du Canada) au Brsil. Il sagit dune discussion sur laccs au march, le commerce et les investissements dans le cadre de la ZLA. Deux autres rencontres ont eu lieu cet effet, les 7-8 fvrier et le 18 mai 2005 Le Mexique est galement appel ngocier avec le MERCOSUR. Ces rapports sinscrivent plutt dans la logique de lintgration latino-amricaine, marque par le Trait de Montevideo de 1980. En dcembre 2002, un accord de complmentarit conomique40 a t conclu dont lobjectif final est la cration dune zone de libre-change entre les deux partenaires. Une premire tape a t constitue du renforcement de la coopration conomique et commerciale travers, par exemple, la promotion de rencontres dentrepreneurs, des ateliers, sminaires et missions commerciales. Laccord de complmentarit conomique a t adopt par le Mexique en juillet 2004. Pendant ce temps, ds avril 2004, ladministration mexicaine a fait connatre son voeu de devenir membre part entire du MERCOSUR. Le gouvernement se dit prt entamer les ngociations pour devenir membre associ de linstitution. En juillet 2004, lors dune rencontre prsidentielle du bloc rgional, Lula donne son appui lintgration du Mexique. Le MERCOSUR deviendrait ainsi linstance de coordination des quatre grands pays dAmrique latine (Brsil, Chili, Argentine et Mexique), ou encore sa voix forte (strong voice), selon Vincente Fox (prsident du Mexique). LUruguay avait pris une mesure davance puisque le 14 juillet 2004, un accord de libre-change avec le Mexique a t paraph. La ngociation dun accord de libre-change avec lensemble du bloc commence en mai 2005. Il sagit dune premire tape dans lintgration du Mexique comme membre associ. Union europenne Depuis la constitution du MERCOSUR, lUE ngocie avec le regroupement41, notamment, en 1991, avec la runion des ministres des Affaires trangres de chaqueVoir : http://www.MERCOSUR-comisec.gub.uy/ACUERDOS/Canada/CANADA.htm Voir : http://www.sice.oas.org/Trade/mrcsrmex/indexs.asp 41 LArgentine, le Brsil, le Paraguay et lUruguay avaient tous sparment ratifis des accords avec lUnion europenne durant les annes 90-91.40 39

26 pays membres et du prsident de la Commission europenne. Lanne suivante, un Accord de coopration technique (Acuerdo de Cooperacin Tcnica) fut sign. La signature de cet accord contribua grandement la mise en place de programmes de coopration technique comprenant des sminaires, sessions dtudes et linstauration dinstances de dialogue entre les acteurs politiques, sociaux et conomiques. En 1994, un processus de ngociations politiques, conomiques et commerciales sentama avec la runion des ministres des Relations extrieures des pays de chaque groupe conomique. Ce processus aboutira la signature, Madrid (Espagne) le 15 dcembre 1995, dun Accord-cadre de coopration interrgionale (Acuerdo Marco de Cooperacin Interregional)42. Cet accord avait pour but la libralisation progressive du commerce entre les deux rgions, laugmentation de la rciprocit des relations et la cration dune association caractre politique et conomique regroupant diffrents groupes sousrgionaux. En aucune occasion auparavant, deux blocs conomiques navaient manifest une telle volont de faire converger leurs intrts. Ce qui donna lieu la naissance dun partenariat particulier dans le but de faciliter la ratification daccords de coopration commerciale entre les compagnies intresses des deux blocs rgionaux. Ce partenariat EU-MERCOSUR est une adaptation de lEUROPARTENARIAT, un programme de la Commission europenne. Il est compos de plus de 300 entreprises de lArgentine, de la Bolivie, du Brsil, du Chili, du Paraguay et de lUruguay et de 200 entreprises des 15 tats fondateurs de lUE. Une premire rencontre des membres du partenariat a eu lieu les 3, 4 et 5 dcembre 1997 Montevideo (Uruguay). Une coopration sest tablie dans les secteurs industriels suivants : agro-industriel et alimentaire; produits chimiques, plastique et drivs; textiles et confection; et enfin, mtal et mcanique. En juin 1996 eu lieu la premire runion de la Commission mixte UE/MERCOSUR (une instance tablit dans lAccord cadre de coopration interrgionale de 1995) Bruxelles (Belgique). On y initia la prparation de ngociations commerciales bilatrales et on y tablit un programme de coopration en vue de la construction dune zone de librechange pour lanne 2007. Les obstacles majeurs ces projets apparurent surtout dans le secteur du commerce agricole. En plus de ces dmarches, tait prvue lagenda la cration dun mcanisme de consultation afin de coordonner les positions des deux blocs conomiques lors de forums internationaux spcifiques. Outre la Commission mixte, lAccord-cadre de coopration interrgionale de 1995 prvoyait ltablissement dun Conseil de coopration compos des membres de diffrents groupes sous-rgionaux et une sous-commission commerciale ayant pour fonction, entre autres, de dfinir les produits sensibles et prioritaires, les barrires douanires, une mthodologie danalyse des flux de services, la normalisation et la certification. Au mois de mai 2002, lors du Deuxime Sommet des chefs dtat et de gouvernement du MERCOSUR et de lUE, tenu Madrid, les reprsentants des deux blocs ont ritr leur volont de renforcer les relations entre les deux rgions, en foi de quoi la Commission europenne a propos dintensifier son plan daction en Amrique latine dans plusieurs domaines prioritaires. Pour le MERCOSUR, cette coopration sest traduite par un versement de 48 millions deuros pour le renforcement de ses institutionscomme le42

Voir en anglais : http://www.sice.oas.org/trade/mrcsr/merco_eu/m_eu_toc.asp ou en espagnol: http://www.sice.oas.org/trade/mrcsrs/merco_eu/m_eu_ind.asp

27 Tribunal permanent de rvision de controverses, de ses politiques sectorielles, de ses structures conomiques et commerciales et de ses liens avec la socit civile. De plus, un montant destin chacun des pays pour des projets spcifiques a t prvu43. Quelques mois plus tard, la Commission europenne a lanc son Plan de stratgie rgionale MERCOSUR -UE 2002-200644. La rencontre MERCOSUR -UE, qui sest droule Braslia du 11 au 14 novembre 2002, a t marque par des discussions autour de la question agricole. Les Europens ntaient toujours pas prts faire des grandes concessions et dentamer une rvision de leur Politique Agricole Commune (PAC). Par contre, pour ce qui est des autres produits, lUE souhaite largir le plus possible ltendue du commerce en acclrant la libralisation entre les deux parties. Il sagira des deux points qui vont enrichir le feuilleton de ngociations, despoir, puis de blocage des ngociations entre 2003 et 2005. Une premire offre globale de libralisation tait prvue en avril 2003. Puis la date sest vue repousse la fin de cette anne-l. Dun ct, le MERCOSUR, et le Brsil en particulier, vont tre intransigeants sur le commerce des produits agricoles et alimentaires. De lautre, lUE va demander une forte protection des investisseurs et de la proprit intellectuelle, une libralisation des services (particulirement la finance) et un rythme de libralisation plus rapide. Dbut 2004, les deux blocs semblent optimistes et esprent finaliser laccord fin mai 2004. Tout semblait bien avancer, en avril de cette anne, les deux regroupements semblaient vouloir faire des concessions mutuelles. Mais le fond du problme nest pas rgl et les chances sont une nouvelle fois reportes afin de poursuivre les pourparlers. Le reste de lanne 2004 sera marqu par des checs successifs dans les ngociations sur les pierres dachoppement traditionnelles. En 2005, chacune des parties semble prte reprendre les discussions. LUE propose en juillet 2005 de profiter du Sommet UE-Amrique latine Vienne en mai 2006 pour clore les ngociations de laccord de libre-change avec le MERCOSUR. Membres associs Chili Les accords souscrits par le Chili ont pour objectif la formation de zones de libre-change entre ce pays et le MERCOSUR. Linterdpendance conomique na cess daugmenter et a engendr la cration dinstruments pour faciliter celle-ci. Ainsi, le total des exportations du Chili vers les pays du MERCOSUR a augment de 136 % entre 1991 et 1997, passant de 795 millions de dollars 1,879 milliards. De 1999 2001, les exportations vers les pays du MERCOSUR ont reprsent en moyenne 10 % du total de ses exportations. En 2002, par contre, la chute fut importante, les exportations ont t de 32 % infrieures celles de lanne prcdente. Mais elles ont doubl entre 2002 et 2004 (1,9 milliards de dollars).

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http://europa.eu.int/comm/external_relations/MERCOSUR/intro/bro02_es.pdf http://europa.eu.int/comm/external_relations/MERCOSUR/rsp/02_06en.pdf

28 Laccord de complmentarit conomique sign avec le Chili le 25 juin 199645 comporte un aspect particulirement important. Il permet lincorporation, aprs ngociation, des autres membres de lALADI. Cette clause de laccord avec le Chili savre tre une des conditions du Trait de Montevideo. En plus de cette particularit, laccord avec le Chili contient les objectifs suivants : i) tablir un cadre juridique et institutionnel de coopration et dintgration qui contribuera la libre circulation des biens et des services; ii) tablir une zone de libre-change dici 10 ans; iii) promouvoir le dveloppement et lutilisation de linfrastructure physique dj existante en priorisant tout particulirement ltablissement de liens inter-ocaniques; iv) promouvoir et encourager les investissements rciproques; v) encourager la complmentarit et la coopration conomique, nergtique, scientifique et technologique. Cet accord, en plus des aspects commerciaux, propose lintgration physique en facilitant le transit de personnes et la circulation de biens et en favorisant lexploitation des voies de communication terrestres, fluviales et maritimes. Malgr lchancier fix plus tt, la zone de libre-change MERCOSUR-Chili nentrera en vigueur de faon complte quen 2014. Par contre, pour le MERCOSUR, il sagit daller plus loin que le partenariat offert par le Chili actuellement. Le plus grands obstacles rsident dans lcart entre les tarifs limportation adopts par le Chili dun ct et par les membres du MERCOSUR dun autre. Au dbut de lanne 2005 le Chili a un tarif extrieur moyen sur les exportations qui se situe actuellement 3 %. En comparaison, les pays du MERCOSUR imposent en moyenne un TEC de 14 %. Afin de contourner ce problme, certaines autorits chiliennes ont lanc lide dune adhsion lunion douanire qui nobligerait pas le Chili adopter le tarif extrieur commun. Dans ce cas, il sagirait dune participation plus politique quconomique, ce qui ne satisfait pas compltement les pays du MERCOSUR. Communaut andine Bolivie Pour ce qui est de la Bolivie, bien que le commerce avec les pays du MERCOSUR soit infrieur celui du Chili, il dpasse les niveaux atteints avec le reste des pays de la Communaut andine. La Bolivie a sign un Accord de complmentarit conomique avec le MERCOSUR le 7 dcembre 199546. Cet accord comporte la mme finalit que laccord avec le Chili, cest--dire ltablissement dune zone de libre-change avec un programme de libralisation commerciale de 90 % des produits dici 10 ans. Laccord a fait lobjet en fvrier 1997 dune entente dfinitive sur la question de la consolidation dune zone de libre-change au bout de 10 ans (Acuerdo de Complementacin Econmica No. 36 -ACE36-). Ses objectifs sont les suivants : i) accrotre les relations conomiques et commerciales; ii) mener des actions et des projets conjoints dintgration des voies publiques, de transports et de communications; iii) tablir un cadre normatif pour la promotion et la protection des investissements; iv) favoriser la consultation durantVoir lAccord de complmentarit http://www.sice.oas.org/trade/msch/mschind.asp 46 Voir lAccord de complmentarit http://www.sice.oas.org/trade/mrcsbo/merbo_s.asp45

conomique conomique

avec avec

le la

Chili, Bolivie,

en en

espagnol espagnol

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29 des ngociations commerciales avec dautres pays et blocs conomiques. Comme le Chili, la Bolivie serait une autre candidate potentielle au poste de membre part entire du MERCOSUR. Sous laspect commercial, ce serait une association logique puisque plus du tiers de son commerce, soit 38,9 % de ses exportations et 43 % de ses importations, seffectuent avec le Cne Sud. Toutefois, lobstacle vient du fait quelle appartient la Communaut andine et quune des clauses du MERCOSUR stipule que ses membres ne peuvent pas participer deux regroupements du mme type la fois. Cet obstacle semble pouvoir se rsoudre avec la constitution de la Communaut Sudamricaine des Nations (CSN) dont nous parlerons plus tard. Les pays du MERCOSUR se sont sentis trs concerns par les crises politiques rptition qui se sont droules en Bolivie depuis 2004. Le bloc rgional a tent de simpliquer diplomatiquement ce sujet. Dautre part, la Bolivie fait partie des projets dintgration physique (i.e. infrastructurelle et nergtique) du bloc comme nous avons pu le voir dans le texte. Prou Le Prou a lui aussi mis en oeuvre un chancier plus rapide que pour le reste de la Communaut andine. En aot 2003, le Prou termine les ngociations commerciales pralables lentre au MERCOSUR. Celles-ci aboutissent au traditionnel accord de libre-change entre le pays et la zone. De nombreux projets dintgration infrastructurelle (rseaux routiers et ariens) et nergtique (gazoducs et oloducs) sont en cours de ralisation entre le MERCOSUR et le Prou. Venezuela Les liens entre le Venezuela et le MERCOSUR sont trs forts du fait de la forte volont politique de Chavez de promouvoir lunit de lAmrique du Sud. Essentiellement, les accords conomiques signs entre le Venezuela (sans la Communaut andine) et les pays du MERCOSUR tournent autour du ptrole. LArgentine, le Brsil et lUruguay ont sign des partenariats nergtiques. En change, la zone fournit des produits agroalimentaires, pharmaceutiques ou des biens de consommation. En dcembre 2005, le Venezuela commenc le processus de ratification des Protocoles dAsuncin, dOuro Preto et dOlivo afin dintgrer pleinement le MERCOSUR Communaut Andine en tant que tel et Colombie + quateur Les pays de la Communaut andine (Bolivie, Colombie, Prou, quateur et Venezuela) avaient ritr, lors du Sommet de Sucre en avril 1997, leur intention de former une zone de libre-change avec le MERCOSUR. Un accord-cadre a donc t sign, le 16 avril

30 1998 Buenos Aires (Argentine)47. En dcembre 2002, les deux groupes de pays ont sign un Accord de complmentarit conomique qui recouvre les mmes objectifs des Accords de complmentarit conomique signs avec la Bolivie48. Depuis lors, les deux blocs se sont lancs dans des ngociations de libre-change. Un premier objectif est de donner suite aux pourparlers au 31 dcembre 2003. Les ngociations vont se buter sur les dlais, et lampleur des rductions tarifaires. Lchec des ngociations hmisphriques (ZLA) va retarder les chances. Il faudra attendre le 4 avril 2004 pour que soit paraph un accord de libre-change sur 80 % des produits. Cet accord sera un des piliers de la communaut sud-amricaine des nations. Lors du Sommet prsidentiel du MERCOSUR, du 15 au 20 dcembre 2004, le Venezuela, la Colombie et lquateur deviennent officiellement membres associs du MERCOSUR. La rciproque devient officielle le 12 juillet 2005. Communaut Sud-amricaine des Nations (CSN) Larrive au pouvoir dans les principaux pays du bloc (et dAmrique du Sud) dune gauche tiers-mondiste a favoris la multiplication des liens avec une grande partie des pays du Sud. Mais les liens avec les autres pays de lAmrique latine se veulent davantage quune coopration stratgique. Il sagit dun projet dintgration continentale long terme. De nombreuses instances de coordination des pays dAmrique latine existent dj : ALADI, groupe de Rio, etc. Les ngociations de libre-change entre le MERCOSUR et la Communaut andine des Nations (CAN), qui reprsentent neuf pays sud-amricains sur douze, sont la base de ce processus dintgration multidimensionnel. Cest le 7 aot 2004 que Lula, Prsident du Brsil et Duhalde, secrtaire du comit du MERCOSUR, annoncent officiellement la cration de cette Communaut sud-amricaine des nations. Le projet se traduit par quatre volets : 1) un volet intgration qui comprend un forum de ngociations commerciales visant lintgration continentale plusieurs vitesses. Les pays qui se sentent prts aller plus vite peuvent le faire. Par contre, ceux qui prfrent aller un rythme plus lent on la possibilit de le raliser (il sagit de la clause en or). 2) Un fond de 100 millions de dollars (financ par un impt de 0,1% du PIB des pays membres) servira assister les pays les plus faibles conomiquement. 3) Un protocole dintgration physique va tre sign avec lobtention dun fond multilatral de 70 milliards de dollars. La rgion reprsente une population de 360 millions dhabitants, une superficie de 17 millions de kilomtres carrs, un PIB de 800 milliards de dollars et un commerce international de 188 milliards de dollars. La naissance officielle de la Communaut date du 9 dcembre 2004, avec la signature de la dclaration de Cuzco. Cette ville des temples Inca est un lieu tout fait symbolique pour affirmer lunit politique de lAmrique du Sud. Linitiative se veut un contrepied la ZLA promue par les tats-Unis sans tre une dclaration de guerre conomique contre le Nord de lhmisphre. De la mme manire, le projet souhaite une rupture avec le modle nolibral et le consensus de Washington , en prnant la justice sociale, la rduction des ingalits et le47 48

http://www.sice.oas.org/trade/Mrcsr/MeAnCo_s.asp http://www.sice.oas.org/Trade/MRCSR/acMerAns.asp

31 dveloppement conomique, sans renoncer au prcepte de lquilibre budgtaire et de lorthodoxie financire. Il ne sagit pas dune institution dote dun sige ou dun budget de fonctionnement. Les institutions dj existantes (ALADI, MERCOSUR, CAN) et les pays membres se chargeront de son existence. Le sommet des dirigeants nationaux constituera lexcutif de lorganisation. Step by step CAN and MERCOSUR will converge becoming the South American Community, but gradually disappearing at the same time. But in spite of the haste theres no rush, because we could end with an empty declaration. [...] My idea is that in a few months time CAN should be known as South American Community-CAN and Mercosur, South American Community MS, so we have time to get in touch with the new initials49. Autres pays ou rgions Inde Ds le 17 juin 2003, les pays du MERCOSUR signent un protocole dentente afin de ngocier un accord de libre-change avec lInde. Lobjectif annonc ce moment-l est la cration dun accord de libre-change et dassurer la coopration dans des domaines cls tels que la chimie, linformatique ou les produits pharmaceutiques. la base, la ngociation porte sur la libralisation dune liste de 8000, puis de 1800 produits. Mais laccord a aussi une dimension politique puisque les deux parties sont les principaux animateurs du G20, la coalition des pays du Sud au sein de lOMC. Ds les premiers pourparlers en janvier 2004, la liste de produits se rduit 900. Il faudra attendre la dernire semaine de novembre 2004 pour que les ngociations soient compltes. Cest le 22 mars 2005 que laccord va tre