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UFR Sciences de l'homme et de la société
Département des sciences de l’Education
Master 2 pro métiers de la formation
Parcours ICF FOAD
Année Universitaire 2011- 2012
Mémoire
L’insertion professionnelle de Travailleurs Handicapés en entreprises ordinaires : L’analyse des stéréotypes en entreprise pour construire sa politique de sensibilisation
Directeur de mémoire : Jacques Wallet
RELANDEAU
Audrey
N° étudiant : 21109686 Septembre 2012
Remerciements
Je tiens à remercier l’ensemble des personnes ayant contribué, de prés ou de
loin, à la réalisation de cette année studieuse dont le travail final se trouve dans ce document.
En premier lieu, mes anciens collègues d’Handicap International, dont certains, par leur exemple, m’ont montré que tout était possible, même reprendre une
formation universitaire après 10 ans de vie professionnelle, et qu’il est toujours enrichissant de se remettre sur les bancs de l’école ;
Je tiens aussi à remercier l’équipe de mon terrain de mission professionnelle, et en particulier Valérie Paparelle, ma tutrice, qui m’a accompagné tout au long de
celle ci. Nos échanges et débats animés m’ont permis d’avancer dans ma réflexion.
Merci aussi à toutes mes collègues de formation, dont certaines ont su, par leur sympathie et partage d’expériences, m’aiguiller au mieux pour la réussite de
cette année. Je leur souhaite de réussir ce même chemin, et de retrouver un calme et une harmonie familiale bien mérités après cette année éprouvante pour toutes ces
mamans étudiantes.
Enfin et bien sur, je tiens à remercie mon directeur de mémoire, Jacques Wallet, qui a eu la patience et la réactivité nécessaire à calmer mes innombrables questions et doutes. Grâce à lui, je crois ne pas m’être trop perdue sur le chemin.
~
A vous, mes parents, pour votre indéfectible soutien tout au long de cette année, et sans qui je n’aurais pu mener ce travail à
terme ;
A vous, mes amis, qui avaient su me détendre et m’encourager aux bons moments ;
Et surtout à toi, Maël, à qui je dédie ce travail. Tu m’as donné l’énergie pour avancer dans les moments difficiles.
J’espère que cet exemple te montrera la voie pour réaliser tous tes rêves à venir.
Je t’aime.
~
0
SOMMAIRE
Remerciements
INTRODUCTION..............................................................................................................................1
I. L’INSERTION PROFESSIONNELLE DE TRAVAILLEURS HANDICAPES EN FRANCE ........................3
I.1. LES REPRESENTATIONS DU « HANDICAP » ................................................................................3 I.2. LE SYSTEME FRANÇAIS POUR L’INSERTION PRO DE TRAVAILLEURS HANDICAPES…………...….7 I.3. LES POLITIQUE DE FORMATION ET POLITIQUE HANDICAP : LIENS ? ..........................................14 I.4. PREMIERS QUESTIONNEMENTS .................................................................................................21
II. DES CONCEPTS POUR ECLAIRER ET PRECISER NOS QUESTIONNEMENTS..................................23
II.1. NOTRE RECHERCHE DANS LE CADRE DE L’INGENIERIE DE FORMATION.....................................23 II.2. ANALYSE DES BESOINS ............................................................................................................24 II.3. DE LA REPRESENTATION SOCIALE AU BIAIS DECISIONNEL FACE AU HANDICAP EN ENTREPRISE28 II.4. SENSIBILISATION : DE QUOI PARLE T ON ? ................................................................................44
III. NOTRE APPROCHE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE.....................................................53
III.1. TERRAIN DE L’EXPERIMENTATION ...........................................................................................53 III.2. LA PROBLEMATIQUE ET SES HYPOTHESES.................................................................................58 III.3. NOTRE METHODOLOGIE D’ENQUETE ........................................................................................62
IV. ANALYSE DE NOTRE PROBLEMATIQUE ......................................................................................77
IV.1. RESULTATS DE L’ENSEMBLE DU QUESTIONNAIRE POUR NOTRE ECHANTILLON.........................77 IV.2. QUEL IMPACT DU MANAGEMENT SUR LES STEREOTYPES DES CADRES ? ...................................97
V. CONCEVOIR LA REPONSE-ACTION DE NOTRE PROBLEMATIQUE............................................105
V.1. SYNTHESE DES PRINCIPALES PRECONISATIONS ISSUES DE NOTRE RECHERCHE – ACTION........105 V.2. NOTRE ACTION DE SENSIBILISATION POUR LES CADRES MANAGERS D’AIR LIQUIDE ..............106
CONCLUSION……………………………………………………………………………………………….…………….…………………………....119
BIBLIOGRAPHIE…………………………………………………………………………………….……………………….……...………………..121
LISTE DES FIGURES, TABLEAUX ET GRAPHIQUES……………………………………………………….……..………………...………….......125
TABLE DES MATIERES………………………………………………………………………………………………………………………….………...127
ANNEXES………………………………………………………………………………………………………………………………………………….……..I
1
INTRODUCTION
Depuis 1987, la loi impose aux entreprises de plus de 20 salariés un quota de 6% de salariés
handicapés. Plus de vingt ans après, les résultats escomptés ne sont toujours pas à la hauteur : même
si le taux d'emploi des personnes handicapées progresse, les entreprises, dans leur majorité, restent
encore loin des 6 % fixé par la loi. Le taux de chômage des personnes handicapées est toujours à
plus du double de la moyenne nationale.
Et pourtant ! Les entreprises ne lésinent pas sur les moyens. Accords Entreprises, partenariats
institutionnels et associatifs, forums emploi, processus RH d’intégration, adaptation des postes,
mise en accessibilité, actions de formations et/ou de sensibilisation des salariés ou encore tutorat de
personnes handicapées… Les plus grandes entreprises s’investissent aujourd’hui dans des politique
Handicap internes, mais restent confrontées à la réalité : les stéréotypes ont la vie dure ! Ces
stéréotypes, souvent à l’origine de discrimination dans le recrutement, l’intégration ou l’évolution
de carrière, jouent un rôle majeur dans l’évolution des mentalités et les entreprises n’ont, pour
l’instant, pas les moyens d’analyser leurs besoins pour adapter leur politique handicap au regard de
ces stéréotypes.
Professionnelle dans le champ du Handicap depuis plus de 10 ans, nous avons souhaité mettre à
profit cette année universitaire pour travailler sur cette question des stéréotypes et sur l’enjeu de
réponses adaptées. Nous pensons que l’ingénierie de formation pourrait et devrait jouer un rôle dans
l’amélioration de ces réponses, dont les principales sont des actions de formation et de
sensibilisation.
Nous commencerons par vous présenter le contexte du monde du Handicap en entreprise en France,
avec un accent particulier sur le concept du Handicap, sur la loi 2005 qui a renforcé les obligations
des entreprises et les droits des travailleurs handicapés et sur les acteurs et modalités d’actions
principales existant dans ce secteur. Nous clôturerons ce premier chapitre par une discussion sur les
2
liens possible entre une politique de Formation professionnelle continue en entreprise et une
politique handicap, pour conclure sur nos premiers questionnements.
Puis nous prendrons le temps de discuter des approches conceptuelles que nous utiliserons tout au
long de cette recherche à savoir l’ingénierie de formation, l’analyse des besoins, les représentations
sociales et stéréotypes, avec un regard particulier sur les représentations sociales liées au handicap,
et enfin l’épineuse question des actions de sensibilisation.
Nous entrerons ensuite au cœur de notre travail, à savoir l’analyse de notre problématique
concernant les stéréotypes sur les personnes handicapées en entreprise. Celle-ci est issue d’un
travail de recherche documentaire, de notre expérience professionnelle et de questionnements
rencontrés sur notre terrain d’expérimentation. Nous vous présenterons notre méthodologie
d’enquête et ses limites, ainsi bien sur que l’analyse des résultats de celle-ci. Nous confirmerons
ainsi une de nos hypothèses de recherche.
Enfin, dans une perspective professionnelle, nous construirons une action de sensibilisation adaptée
à la situation rencontrée dans l’entreprise partenaire ayant accepté de mettre en œuvre notre enquête
sur les stéréotypes.
Nous espérons ainsi discuter et démontrer l’importance de la prise en compte des stéréotypes dans
la mise en place de politiques handicap efficaces et du rôle à jouer par l’ingénierie de formation.
3
I. L’INSERTION PROFESSIONNELLE DE TRAVAILLEURS HANDICAPÉS EN FRANCE
I.1. LES REPRESENTATIONS DU « HANDICAP »
I.1.1. DE LA NEGATION DE L’HUMANITE A LA DEFENSE DES DROITS DE L’HOMME
Etapes d’évolution
Périodes Caractéristiques Exemples
Antiquité (il y a plus de 2000 ans)
• la volonté des dieux Ce qui ne peut être expliqué est une manifestation des dieux et une source de croyances. La réponse de la société au handicap : pratiques rituelles, croyances
Des nouveaux-nés « malformés » sont abandonnés dans la nature en sacrifice aux dieux, afin d’éloigner le mauvais sort des familles. Certaines maladies mentales sont considérées comme une capacité surnaturelle à communiquer avec les dieux.
1.Une condition supra ou infra-humain
Moyen-Age (- 1500 à 500 ans environ)
• la charité Les personnes handicapées sont une charge pour la société, elles vivent principalement de la charité et ont un statut social inférieur. La réponse de la société : aide charitable, traitement médical élémentaire
Les personnes handicapées sont considérées comme des indigents, pour certains leur souffrance les rend « méritants », ils sont soignés et habillés dans des hospices. Exceptions dues à des croyances populaires : les personnes ayant certains types de déficiences ont un statut social particulier (les « bossus » portent chance, certaines personnes handicapées mentales sont des « innocents », considérées comme des Chrétiens privilégiés, certains sont acceptés et pris en charge à la cour du Roi, …)
2. Un premier pas précaire vers l’égalité
L’époque « classique » ( 500 à 1200 ans environ)
• La base d’une philosophie occidentale moderne
des Droits de l’Homme est créée, le principe d’égalité apparaît. Mais ce principe n’est pas encore universel et les personnes handicapées ne sont pas toujours (ou parfois avec réticence) reconnues comme des êtres humains. Des croyances demeurent autour du handicap
des questions commencent à être posées concernant la condition des personnes handicapées mentales. Concrètement, la réponse de la société reste pratiquement inchangée
3. La science toute-puissante
19è siècle – début 20è siècle
• Classification scientifique et curiosité publique
Une classification médicale est établie, basée sur la description des symptômes ; essais de thérapies La réponse de la société : exposition,
Les personnes physiquement différentes sont désignées comme des « monstres » et parfois présentées au public dans des foires ou des expositions. Elles sont
4
études scientifiques, soins médicaux considérées comme « moitié homme, moitié animal ».
4. Réparer les personnes « cassées »
Après les 1è et 2è Guerres Mondiales (1945 – 1970)
• La réadaptation médicale Ce mouvement a commencé lorsque les Etats se sont sentis responsables de la situation des mutilés, blessés ou invalides de guerre. Les personnes handicapées sont « défectueuses » ; elles doivent être « réparées », ramenées autant que possible à la normalité La réponse de la société : les débuts de la réadaptation fonctionnelle
L’Etat procure des prothèses pour les personnes amputées, des fauteuils roulants, etc. ; La rééducation progresse Les « héros » de guerre bénéficient d’un traitement particulier
5. Le handicap devient un sujet social puis des Droits de l’Homme
depuis les années 70
• le « disability movement » et l’inclusion sociale
Les personnes handicapées font partie de la société et une attention doit être portée à leur inclusion dans la société (secteurs de la santé, de l’éducation, de la formation, de l’emploi…) Le « Independent Living Movement » est créé dans une université de Californie et se répand aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et dans quelques autres pays Les organisations de personnes handicapées (DPOs : Disabled People’s Organisations) s’organisent et se renforcent. La réponse de la société : l’institutionnalisation et/ou l’inclusion dans la société via des services « ordinaires » (pour tous)
En France : des institutions étatiques ou associatives fournissent souvent des services spécialisés selon les types de défciences (école pour enfants sourds, centre de formation pour les personnes handicapées mentales, …) D’autres pays choisissent de développer des services pour tous avec une attention pour les personnes ayant des besoins particuliers L’accessibilité devient un sujet public, …
l’approche basée sur les Droits de l’Homme gagne du terrain
Aujourd’hui • responsabilité collective La communauté a le devoir de permettre aux personnes handicapées de participer pleinement au sein de la société. Les personnes handicapées et leurs représentants réclament la reconnaissance et le respect effectif de leurs droits. La réponse de la société : Au niveau international : promotion des droits des personnes handicapées et mise en place de politiques tournées vers l’égalisation des chances et l’autoreprésentation… …mais cela est progressif et cet objectif est loin d’être atteint !
Cette perspective « historique » met en avant les différentes conceptions telles qu’elles apparaissent schématiquement au cours du temps…
…mais la réalité est souvent une combinaison de ces différentes conceptions, qui coexistent au sein d’une société !
5
Figure 1 : Evolution des représentations du Handicap – A. Relandeau
Comme nous le voyons à travers ce tableau, des conceptions différentes du Handicap engendrent
des réponses différentes de la société dans la gestion de celui-ci. Et au-delà des réponses, ce sont les
relations elles mêmes et la « valeur » que l’on attribue à cet autre différencié qui change et évolue.
Cette première présentation pointe donc déjà l’importance des représentations dans l’approche et la
compréhension du « handicap » et dans la possibilité ou pas pour les personnes handicapées de
s’intégrer dans une société, au-delà de leurs qualités propres. On parlera alors plus bas de la notion
de « stéréotypes ».
I.1.2. LE MODELE THEORIQUE : APPROCHE PAR LA « SITUATION DE HANDICAP »
Pendant longtemps le handicap a été considéré uniquement comme une question médicale, à traiter
par le soin. Le handicap est entré dans le champ des questions sociales. La nécessité d’un
changement physique et social de l’environnement des personnes handicapées est reconnue. Le
handicap est maintenant considéré comme une question des Droits
de l’Homme : l’enjeu est l’égalisation des chances et l’accès aux mêmes droits pour tous, sans
discrimination.
Les références pour ces positions : 2 grandes catégories de modèles de représentation du handicap :
• modèle médical
• modèle social
Généralement désigné "modèle social"Parfois : les personnes handicapées sont vues comme une minorité discriminée
Le problème principal est au niveau de l’environnement et de la société
Le handicap est principalement le résultat de manques en termes d’accessibilité et d’égalisation des chances
Accent mis sur l’élimination des barrières physiques, économiques et sociales
2 catégories de modèles opposées
Le handicap vu commeune pathologie individuelle
Le handicap vu commeune pathologie sociale
Généralement désigné "modèle médical"
Le problème est au niveau de l’individu : le handicap résulte directement de la déficience de la personne
Le handicap est uniquement un problème de santé (donc une question médicale)
Les solutions sont pensées par des "experts"sur la base de diagnostics
Accent mis sur l’élimination ou la guérison du handicap, normalisation
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Figure 2 : les modèles du handicap – A. Relandeau
Nous faisons le choix scientifique de baser notre approche du Handicap sur le modèle social, en
particulier sur le modèle du Processus de Production du Handicap (PPH), modèle québécois que
nous présentons plus loin. Rappelons que l’OMS a fait évoluer, en 2001, son approche théorique du
Handicap, « la classification internationale des handicaps : déficiences, incapacités et
désavantages » (CIH) vers une nouvelle « classification international du fonctionnement, du
handicap et de la santé » (CIF), prenant en compte les apports du PPH sur la place donnée à
l’environnement dans la définition et évaluation du Handicap.
Le processus de production du Handicap :
A partir des évolutions de ces 30 dernières années, Patrick Fougeyrollas, chercheur anthropologue
québécois, a développé le concept du «Processus de production du Handicap» (PPH) en 1996. Ce
modèle conceptuel québécois est innovateur par la clarification de la différence entre les facteurs
personnels intrinsèques (intégrité/déficience et capacités/incapacités de la personne) et les facteurs
situationnels extrinsèques (environnement facilitateur/obstacle) et la place prépondérante donnée à
ces derniers dans la compréhension du ‘’Handicap’’. Le PPH est actuellement largement utilisé sur
le plan international. Selon cette approche, la déficience correspond à une altération du système
organique (ex : perte d’une jambe), l’incapacité à la conséquence physique/moteur de cette
altération (incapacité de marcher) et le Handicap, ou plutôt ‘’la situation de Handicap’’ à la
limitation de la réalisation des activités de la vie quotidienne (dit ‘’habitude de vie’’) due à
l’interaction entre les facteurs intrinsèques et extrinsèques (ne peut aller faire ses courses - car a
perdu sa jambe, n’a pu s’offrir une prothèse et habite au 3eme sans ascenseur)1. On parle alors de
personne en situation de handicap (PSH).
Ainsi le PPH met en avant le poids important que joue l’environnement dans la situation de
Handicap de la personne. Celle-ci ne peut plus être réduite à sa déficience ou incapacité. Nous
avons tous notre responsabilité dans le développement ou la réduction de la situation de Handicap
d’une personne. L’environnement professionnel joue donc un rôle déterminant dans l’insertion
professionnelle des personnes en situation de handicap, et en particulier l’environnement humain, à
savoir nous et notre regard sur le Handicap.
1 Schéma du PPH en annexe 1
7
I.2. LE SYSTEME FRANÇAIS POUR L’INSERTION PROFESSIONNELLE DE TRAVAILLEURS HANDICAPES
I.2.1. UN CADRE JURIDIQUE INCITATIF
I.2.1.1. Principes
Dans le champ de l’insertion professionnelle de PSH, bien du chemin fut fait depuis la première loi
de 1898 sur les accidents du travail2. Ce sont surtout les lois de 1975, 1987 et 2002 qui permettront
les avancées les plus marquantes. C’est dans la loi du 10 juillet 1987 qu’apparait pour la première
fois une obligation pour tout employeur du secteur privé et tout établissement public à caractère
industriel et commercial occupant 20 salariés ou plus, à employer, dans une proportion de 6 % de
son effectif salarié, des travailleurs handicapés (TH). Par travailleur handicapé, la loi entend3 :
Cette reconnaissance, la RQTH (Reconnaissance de Qualité de travailleur Handicapé) est délivrée
par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH), présente dans
chaque maison départementale des personnes handicapées (MDPH)4, selon son degré d’incapacité
et son projet professionnel. Dans l'intention de garantir le principe d'égalité de traitement à l'égard
des travailleurs handicapés (TH), les employeurs sont tenus de prendre des mesures appropriées, en
fonction des besoins dans une situation concrète. Ceci pour permettre aux TH d'accéder à un emploi
correspondant à leur qualification ou de le conserver, de l'exercer ou d'y progresser et/ou de se voir
dispenser une formation adaptée à leurs besoins.
Les entreprises assujetties peuvent répondre a cette obligation par 5 types de modalités, cumulables
entres elles :
- l’emploi de travailleurs handicapés,
- l’accueil de stagiaires handicapés
- la sous traitance d’une partie de ses activités a des structures spécialisées adaptées aux travailleurs
handicapés (Entreprise Adaptée et ESAT),
2 qui mit à la charge de l’employeur une assurance spécifique permettant le versement d’une indemnisation au titre des infirmités acquises dans le cadre du travail 3 Article L.5213‐1 du Code du travail
4 Les MDPH furent créées en 2006. Elles furent définies par l'article 64 de la Loi n° 2005‐102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Elles ont deux objectifs : offrir aux personnes handicapées ainsi qu'à leurs familles la possibilité d'accéder aux principaux droits et prestations favorisant l'accueil et l'accompagnement de ces derniers et de sensibiliser les personnes sur les problèmes liés au Handicap. Dans chaque département, vous pouvez trouver une Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH). Chaque MDPH s'occupe des démarches liées aux différentes situations de handicap.
Toute personne dont les possibilités d’obtenir ou de conserver un emploi sont effectivement
réduites par suite d’une altération d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales
ou psychiques.
8
- la conclusion d’un accord de branche ou d’entreprise prévoyant un programme pluriannuel en
faveur des personnes en situation de handicap
- ou le versement d’une contribution financière à l’AGEFIPH5 pour le secteur privé à au FIPHFP6
pour le secteur public. Celle-ci est une contribution annuelle pour chacun des bénéficiaires que
l’entreprise aurait dû embaucher, en fonction de son effectif total.
I.2.1.2. La loi de 2005
Sous l’impulsion des associations de PSH et de professionnels du secteur, les évolutions de
l’approche du Handicap présentées précédemment se sont traduites par des évolutions successives
de la loi concernant les droits des personnes en situation de handicap et les obligations des acteurs
de la société. Ainsi, les toutes premières lignes de la loi du 11 février 2005 dite ‘’Loi n° 2005-102
pour l’Egalité des Droits et des Chances, la Participation et la Citoyenneté des personnes
handicapées’’ rappellent les droits fondamentaux des PSH. Elles donnent une définition du
Handicap, prenant en compte les recommandations de l’OMS et des associations nationales et
internationales de PSH :
La loi du 11 février 2005 apporte des modifications significatives dans le calcul plus strict7 des
bénéficiaires et impose une sanction plus sévère pour les entreprises qui ne respectent pas cette
obligation en augmentant le montant de la contribution à l'AGEFIPH.
Et en plus de réaffirmer de grands principes (les principes de compensation, d’égalité de
traitement…), de redéfinir certaines notions (définition du « handicap » et des bénéficiaires de
l’obligation d’emploi…) ou de renforcer des données déjà existantes (l’obligation d’emploi…),
cette loi favorise l’extension du champ de la négociation collective. Dès lors, l’insertion des
personnes handicapées entre de façon obligatoire dans le cadre de la négociation collective.
Désormais, l’employeur est tenu d’engager chaque année, dans le cadre de la négociation annuelle
5 AGEFIPH : Association pour la Gestion des Fonds pour l’Insertion Professionnelle des Personnes Handicapées. Elle gère le fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées. Issue de la loi du 10 juillet 1987, elle a pour objet de favoriser l’accès et le maintien dans l’emploi des personnes handicapées en milieu ordinaire de travail. Nous en reparlerons plus en détail dans le paragraphe suivant. 6 FIPHFP : Fond pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique 7 Les TH étaient catégorisés selon leur degré d’incapacité. L’emploi d’un TH ayant une lourde incapacité au travail (dit de catégorie C) était comptabilisé pour 2 dans le calcul final des TH recrutés. Suite à la loi de 2005, un TH compte pour 1, quelque soit le degré de son incapacité.
Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de
participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une
altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles,
mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant.
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obligatoire, une négociation sur les mesures relatives à l’insertion professionnelle et au maintien
dans l’emploi des travailleurs handicapés.
Cette négociation doit porter notamment sur :
- les conditions d’accès à l’emploi, à la formation et la promotion professionnelle,
- les conditions de travail et d’emploi,
- la mise en place d’actions de sensibilisation au handicap de l’ensemble du personnel de
l’entreprise.
L’article L. 132-27 du code du travail est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
I.2.2. MAIS UNE DIFFICILE MISE EN ŒUVRE EN ENTREPRISES
Sujet périphérique il y a quelques années, le ‘’Handicap’’ fait aujourd’hui partie des cinq premières
préoccupations des entreprises, au même titre que le vieillissement ou la couverture sociale.
«Depuis deux ans, la situation évolue avec les questions de développement durable et la remise en
chantier de la loi de 75 et 87»8, (qui a aboutie à la loi de 2005), explique Pierre Blanc, directeur du
service aux entreprises de l'Agefiph. L’obligation d’emploi de TH a permis d’impulser une
dynamique nouvelle. En 2006, 122 800 entreprises privées sont obligées de questionner leurs
pratiques au regard des enjeux d’insertion professionnelle de TH. Mais malgré une certaine
croissance du nombre de TH embauchés, il n’en reste pas moins que, dans les entreprises de plus de
20 salariés, l’on ne comptait que 209 700 TH en 2006, soit à peine 16,15% de la population active
handicapée (estimée à 1,3 millions9).
L’insertion professionnelle de TH reste très complexe. Elle interpelle en effet les organisations et
les professionnels de différentes manières, sur le plan politique, organisationnel et sociétal. Ainsi,
pour la prise en compte et en charge d’une situation de handicap, pour la réussite de l’insertion
professionnelle de TH plusieurs questions se percutent. Celles de la motivation des entreprises (loi
imposée), de l’inadéquation des profils professionnels des TH (le plus souvent peu ou pas qualifiés,
dû aux difficultés d’accès aux systèmes d’éducation) avec les besoins des entreprises, de la
8 L’entreprise paralysée face au Handicap, http://www.journaldunet.com 9 Ce chiffre correspond au nombre de travailleurs handicapes ayant une reconnaissance administrative. Pour une vision plus juste de la réalité, devrait s’y ajouter les 7,9 millions d’autres personnes qui déclaraient souffrir d'un problème de santé ou d'un handicap depuis plus de 6 mois, sans pour autant avoir de reconnaissance. Soit une population de personnes handicapées active totale de 9,2 millions.
Dans les entreprises mentionnées au premier alinéa, l'employeur est également tenu d'engager,
chaque année, une négociation sur les mesures relatives à l'insertion professionnelle et au
maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés. La négociation porte notamment sur les
conditions d'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelle, les conditions de
travail et d'emploi ainsi que les actions de sensibilisation au handicap de l'ensemble du personnel
de l'entreprise.
10
méconnaissance des règlementations et des acteurs/partenaires du champ du Handicap de la part des
entreprises, des besoins éventuels d’adaptations de postes, et celles de l’incontournable et nécessaire
pluridisciplinarité (médecine du travail, ergonomie, structure d’insertion, RH…). Mais surtout, nous
semble-t il, du poids des expériences individuelles et des représentations sociales du ‘’Handicap’’
en entreprise - d’autant plus complexe que peu reconnues ou pris en compte par les organisations.
Nous en reparlerons plus loin.
De cette complexité se sont développées des approches du Handicap et un investissement différents
de la part des entreprises. Alors que les PME se sont encore peu investies sur le sujet, car finalement
peu impactées (financièrement) par la loi 2005, les grandes entreprises se sont vues dans la
nécessité de penser et de mettre en œuvre de nouvelles stratégies pour répondre à l’obligation
d’emploi, et non plus de continuer à payer des cotisations de plus en plus lourdes. Ceci ajouté au
fait que la question du handicap est aujourd’hui devenue un « sujet social » en soi, les entreprises
commencent aussi à vouloir répondre à une certaine pression sociale et à s’engager dans une
« responsabilité sociale ». Effet de communication ou vrai engagement, ceci est une autre question.
En tout cas, les entreprises voulant s’investir sur le sujet se sont vite aperçues qu’elles n’avaient pas
les compétences pour dessiner et mettre en œuvre ce type de stratégie. Elles ont alors la possibilité
de faire appel à des experts externes pour les accompagner dans la réalisation de leur stratégie, ou la
mise en place d’actions spécifiques, ou encore dans le renforcement de leurs compétences en
interne.
I.2.3. UN ACTEUR CLE : L’AGEFIPH ET SES ACTIONS
I.2.3.1. Généralités
L'Agefiph, créé en 1987, lors de la refonte de la loi, est investie d'une mission de service public et
apporte des services, des aides financières ainsi que l'appui d'un réseau de professionnels spécialisés
pour les entreprises et travailleurs handicapés. Elle est gérée par les représentants des salariés,
employeurs et personnes handicapées. Ses fonds proviennent directement des contributions
obligatoires des entreprises lorsque celles-ci ne répondent pas à leur obligation d’emploi des 6% par
les 4 autres modalités possibles, comme vu précédemment.
Ses missions consistent à :
- Gérer les contributions des entreprises ;
- Développer des coopérations avec d’autres institutions travaillant dans le champ du
Handicap type les Pôles Emploi ou les conseils régionaux ;
- Financer des projets
- Et organiser et animer un réseau de professionnels
11
En termes d’actions, l’Agefiph:
- alloue des aides : Aide à la construction du projet professionnel, formation, sensibilisation,
compensation du handicap, création ou reprise d’activité, accès ou maintien dans l’emploi…
Les personnes handicapées et les entreprises sont les destinataires directs des aides
financières ;
- Et propose des services : l’Agefiph a construit un réseau de partenaires-services et de
prestataires qui lui permet aujourd’hui de proposer aux personnes handicapées comme aux
entreprises un ensemble étendu de services et de prestations. (tel que des bilans conseils, des
interventions directes en entreprise lors de situation de crise, d’évaluation du handicap, de
conseils techniques sur l’aménagement de postes, de conseils juridiques……)
Au titre de l’année 2010, 476M€ de contributions lui furent versées par 46 565 établissements
privés10. Et en 2011, près de 200 000 interventions de l’Agefiph ont bénéficié aux personnes
handicapées et près de 115 000 interventions ont concerné les entreprises. Par rapport à 2007, et à
budget sensiblement égal, les interventions de l’Agefiph en 2011 ont augmenté de 9% pour les
personnes et 21% pour les entreprises11.
I.2.3.2. L’appui de l’Agefiph aux entreprises : « l’accord Entreprise »
Dans le cadre de ses missions, une entreprise a la possibilité de négocier avec l’Agefiph un
« Accord Handicap » ou un « Accord Entreprise » suivant les dénominations utilisées.
L’entreprise peut décider de signer une convention ou un accord d’entreprise :
La convention :
La convention (régionale ou nationale selon le périmètre) permet à des grandes entreprises
françaises, en partenariat avec l’Agefiph, de mettre en œuvre, sur du moyen ou long terme (de 12
mois à 2 ans renouvelable 1 fois) une politique d’emploi en faveur des personnes handicapées. Les
entreprises doivent, dans le cadre de cette convention dite « convention d’objectifs » justifier des
moyens utilisés et des résultats apportés en matière d’emploi. Toutes les organisations syndicales
s’engagent également dans cette démarche de sensibilisation tant de leurs responsables que de leurs
élus…
La Convention, signée uniquement par la Direction de l’entreprise et l’Agefiph, ne libère
aucunement l’entreprise de son obligation d’emploi et par-là même de sa contribution, et n’a aucune
influence sur le calcul de la contribution. Si les représentants syndicaux n’interviennent pas dans la
conclusion et la mise en œuvre de la convention, les Institutions Représentatives du Personnel (IRP)
sont toutefois consultées pour avis. En contre partie, l’Agefiph s’engage à apporter une aide
10 Une offre d’intervention modernisée et simplifiée, Communiqué de presse de l’AGEFIPH, le 10 novembre 2011
11http://www.agefiph.fr/L‐Agefiph/Que‐faisons‐nous, Site de l’Agefiph, visité le 8 juillet 2012
12
spécifique adaptée au contexte de chaque entreprise. Les financements qui peuvent être apportés par
l’Agefiph sont négociés en concertation avec l’Agefiph et sont subordonnés à la présentation d’un
bilan quantitatif et qualitatif. La convention est a priori destinée à des entreprises en phase de
démarrage en matière d’insertion des personnes handicapées, qui souhaitent être accompagnées. De
nombreuses entreprises choisissent cette modalité comme étape de préparation à un accord
d’entreprise agréé.
L’accord Entreprise :
Cet accord d’entreprise, de branche ou d’établissement en faveur des travailleurs handicapés peut
être annuel ou pluriannuel. Il est négocié entre la direction de l’entreprise et les organisations
syndicales puis agréé par l’Etat. Il doit prévoir obligatoirement un plan d’embauche en milieu
ordinaire et au moins deux des actions suivantes :
- un plan d’insertion et de formation.
- un plan d’adaptation aux mutations technologiques.
- un plan de maintien dans l’entreprise en cas de licenciement.
L’agrément d’un accord exonère totalement l’entreprise de son obligation sous réserve d’une
réalisation effective des actions qu’il prévoit. La contribution est alors valorisée au titre du budget
dédié aux dispositions de l’accord. L’ensemble du budget prévu des contributions est donc dédié à
la réalisation de cet accord. Enfin, l’accord permet d’appliquer le principe de péréquation : toutes
les personnes handicapées concernées de l’entreprise sont décomptées, qu’elles travaillent dans des
établissements assujettis ou non, même au-delà du taux légal de 6%.12
I.2.3.3. Le « diagnostic conseil approfondi », dans le cadre d’un accord Entreprise
Pour que les entreprises assujetties à l’obligation d’emploi de TH puissent signer un accord
Handicap avec l’AGEFIPH, celle-ci les incite fortement à mener en premier lieu un « diagnostic
conseil approfondi ». L’entreprise a bien sur le choix du prestataire mais celui-ci devra être validé
par l’AGEFIPH pour que l’entreprise espère avoir un appui financier à la réalisation de ce
diagnostic.
Le diagnostic s’adresse ainsi aux entreprises volontaires qui veulent se lancer dans une politique
Handicap soutenue par l’AGEFIPH. Il s’agit d’une photo à l’instant T de la situation du Handicap et
de ses évolutions possibles au sein de l’entreprise. Il comprend la préconisation de stratégies de
développement afin de rendre la démarche plus efficace et de l’ancrer dans le long terme. Il
s’appuie en général sur trois étapes : le recueil de données, l’analyses quantitatives et qualitatives,
les recommandations et plan d’action.
12 Guide pratique Agefiph : « Construire un accord entreprise pour les personnes handicapées ; recueil d’expérience », 2005, AGEFIPH
13
Au niveau du recueil des données, il s’agit d’interroger l’entreprise sur différents volets :
l’entreprise et son contexte socio-économique ; les travailleurs handicapés dans l’entreprise, le
maintien dans l’emploi et le niveau de perception et d’intégration du Handicap dans l’entreprise.
L’AGEFIPH et autres experts du Handicap préconisent à l’entreprise de s’interroger sur le niveau
de sensibilité, d’information, de représentation lié au handicap des principaux acteurs de l’entreprise
(managers, personnes en charge du recrutement dans les établissements, partenaires sociaux,
salariés valides, équipes d’accueil de clients handicapés, travailleurs handicapés eux-mêmes) et
d’identifier les facteurs favorables ou défavorables à l’insertion professionnelle de personnes en
situation de handicap.
Suite à cette première étape vient celle de l’analyse qualitative et quantitative. Les informations
recueillies, quantitatives et qualitatives, font l’objet d’une analyse et d’une mise en cohérence,
permettant de dégager plusieurs options stratégiques possibles. Plusieurs «scénarios» sont explorés
et argumentés (avantages/inconvénients), qui permettent à l’entreprise d’arrêter son choix : nature et
volume des objectifs stratégiques, forme envisagée (accord d’entreprise, convention …), etc. Le
scénario peut faire l’objet d’une déclinaison en plans d’actions opérationnels. L’objectif de
l’analyse est de mettre en exergue les actions réalisées, de mener des études comparatives, de
répondre aux questions posées sur la situation du handicap, ainsi que de faire des comptes rendus
des enquêtes menées. Il s’agit aussi d’effectuer la synthèse de toutes les entrevues et de toutes les
données compilées.
Enfin la troisième et dernière étape est celle des préconisations et plan de l’accord Handicap. Il
regroupe la plupart du temps les sujets suivants :
Préconisations d’emploi : recours aux différents types de contrats
Préconisations maintien dans l’emploi
Préconisations de sous-traitance : recours au secteur protégé
Préconisations d’organisation : intégration, formations, postes à pouvoir etc.
Préconisation de communication : sensibilisation, identification des travailleurs handicapés
déjà en poste etc.
De ces données découlera le plan de la politique Handicap définie dans l’accord Handicap dont
nous avons parlé plus haut. D’où l’extrême importance de la qualité de ce diagnostique conseil
approfondi. C’est donc bien dans ce cadre la et à ce moment là que l’entreprise devrait s’interroger
sur les représentations et stéréotypes de son collectif sur la question du handicap, afin d’en ressortir
les points saillants pour pouvoir adapter les réponses sensibilisation et/ou formation adéquates.
14
Et pourtant :
D’après les résultats d’une analyse des accords Entreprises signés, voici ce que relève l’Agefiph13 :
Ainsi, bien que les entreprises se doivent aujourd’hui de questionner, mettre en œuvre et évaluer les
actions menées en faveur de l’insertion professionnelle de travailleurs handicapés dans leur
organisation, et ce avec un accent particulier porté sur les actions de formation et de sensibilisation
au Handicap, elles semblent avoir des difficultés à mener à bien les étapes de diagnostics et
d’analyse préalable à l’action.
Nous voyons donc combien la mise en place de politique handicap en entreprise peut être complexe
et sollicite fortement la mise en place de stratégie de formation/sensibilisation. Or il existe déjà une
politique de formation dans chaque entreprise.
Il nous parait donc intéressant maintenant de discuter du système de la formation professionnelle
continue en entreprise et de voir si des liens ou caractéristiques communs peuvent se retrouver avec
la mise en place d’une politique Handicap, ou comment l’une peut servir l’autre ?
I.3. LES POLITIQUE DE FORMATION ET POLITIQUE HANDICAP : LIENS ?
I.3.1. LA POLITIQUE DE FORMATION PROFESSIONNELLE CONTINUE EN FRANCE
I.3.1.1. Approche et définition de la FPC
Pour l’Union Européenne, la formation professionnelle continue correspond à :
13 Construire un accord pour les personnes handicapées : recueils d’expériences, Agefiph, 2005
Toute activité d'apprentissage entreprise à tout moment de la vie, dans le but d'améliorer les
connaissances, les qualifications et les compétences dans une perspective personnelle, civique,
sociale, et/ou liée à l'emploi. Toutes les formes d’apprentissage sont ainsi valorisées :
l’apprentissage formel, tel qu’un cursus diplômant suivi à l’université; l’apprentissage non-
formel, telles que les compétences professionnelles acquises sur le lieu de travail; et
l’apprentissage informel, tel que l’apprentissage intergénérationnel.
L’état des lieux ou « diagnostic » permet à l’entreprise de connaître sa situation d’emploi des personnes handicapées au sein de son périmètre. « Le diagnostic alimente la réflexion de l’entreprise en lui fournissant les informations indispensables à la prise de décision et en l’aidant à dégager les conditions nécessaires pour mettre en place une politique d’emploi intégrée réussie ». Cette analyse quantitative et qualitative constitue donc un préalable à la mise en place d’une politique d’emploi car l’entreprise aura alors l’occasion de cerner les problématiques rencontrées en matière d’emploi, de maintien,…. Elle identifiera les enjeux, les objectifs, les freins, les représentations du handicap par les salariés, les divers responsables de l’entreprise... Néanmoins [ …], de nombreuses entreprises ne font pas état dans leur accord de l’existence d’un diagnostic ou d’un audit en phase préparatoire.
15
La France se distingue de bien des autres pays européens par le fait que la formation professionnelle
continue se fait et surtout se finance aujourd’hui, pour l’essentiel, par les entreprises14 (41% du
financement total du dispositif est financé par les entreprises, en 200915), donc de l’employeur, et
non des individus (contrairement à l’Allemagne, les Pays-Bas, le Luxembourg, la Belgique et même
Italie, Portugal, Espagne). Ce qui a conduit, en France, à penser la formation professionnelle
comme un outil de management et moins comme un outil de développement personnel et civique.
Cela se traduit directement dans l’article L.6311-1 du code du Travail français, pour qui la finalité
de la formation professionnelle est de:
La formation professionnelle continue constitue par conséquent une obligation nationale, et non un
service public. Les objectifs initiaux d’éducation permanente des personnes et de promotion sociale
ou de seconde chance se sont donc petit à petit estompés au profit d’une vision plus économique de
la formation professionnelle continue et de la préoccupation de son efficacité. La formation
professionnelle continue est aujourd’hui un moyen d’adaptation des personnels aux changements
techniques dans un contexte de mondialisation des économies. Elle devient source de performance
et donc d’investissement. Elle participe a développer ce que l’on a appelé l’employabilité des
personnes face à un chômage grandissant. Tout ceci s’articule avec de nouveaux modes de gestion
des ressources humaines dans l’entreprise et de logique « compétence ». C’est d’ailleurs dans ce
contexte que l’ingénierie de formation a pu faire son apparition dans les entreprises, comme le
rappelle Thiery Ardouin16 : « On voit que l’ingénierie de la formation s’est peu à peu imposée
comme une nécessité dès lors que la formation est devenue une préoccupation pour les entreprises,
dans la mesure où elle est apparue comme un facteur de développement de leur compétitivité ».
I.3.1.2. Les acteurs de la FPC
Le système de formation professionnelle continue français est fondé sur une vision pluraliste, et non
sur une construction administrée à l’image du système de formation initiale. Il vise à répondre à des
objectifs multiples : insertion, réinsertion, qualification, adaptation, retour à l’emploi, promotion
sociale. Une grande diversité d’acteurs concourt à le faire fonctionner.
14 La France a mis en place un système de contributions obligatoires des entreprises au développement de la FPC. Chaque entreprise de plus de 20
salariés doit par exemple dédié 1,6% de son chiffre d’affaire à la formation. 15 Analyses, numéro 082, novembre 2011, DARES
16 Ardouin T. : « Ingénierie de formation pour l’entreprise », Dunod, 2010 (3eme édition), p 19
Favoriser l'insertion ou la réinsertion professionnelle des travailleurs, de permettre leur
maintien dans l'emploi, de favoriser le développement de leurs compétences et l'accès aux
différents niveaux de la qualification professionnelle, de contribuer au développement
économique et culturel, à la sécurisation des parcours professionnels et à leur promotion
sociale.
16
Par construction, la formation professionnelle continue est un domaine partagé entre l’Etat et les
partenaires sociaux d’abord, puis à partir de 1983, l’Etat, les conseils régionaux et les partenaires
sociaux. Tant au niveau de l’élaboration du cadre normatif qu’au niveau de la conception et de la
mise en œuvre des politiques, les responsabilités sont partagées entre trois acteurs qui interviennent
chacun au nom de sa légitimité :
L’Etat au nom de l’égalité des chances et de la solidarité nationale, les partenaires sociaux au nom
de la compétitivité des entreprises et en tant qu’acteur fondamental de la reconnaissance des
compétences, les collectivités régionales au nom du développement territorial économique et social.
L’Etat :
L’État exerce différentes fonctions dans sa mission de régulation du système de formation
professionnelle continue visant à garantir l’égalité des personnes et celle des territoires :
– une fonction normative : la définition du cadre institutionnel, la production des normes
législatives et réglementaires. Les partenaires sociaux sont étroitement associés à l’élaboration de
ces normes ;
– une fonction de contrôle de l’utilisation des fonds de la formation professionnelle : d’abord porté
sur l’obligation de financement des employeurs, il s’est étendu aux dépenses des dispensateurs de
formation et aux organismes collecteurs de fonds ;
– une fonction d’animation cherchant à favoriser le dialogue et la concertation entre les acteurs.
Par ailleurs il exerce également une mission de mise en œuvre d’actions de portée générale ou de
mesures spécifiques en faveur de publics particuliers en lien avec les politiques de l’emploi dont il a
la responsabilité : développement de la validation des acquis de l’expérience, lutte contre
l’illettrisme et accès aux savoirs de base, politique européenne de formation. Dans ce cadre, il
intervient, pour une faible part, comme acheteur sur le marché de la formation. Enfin, l’État, à
travers différentes composantes ministérielles, intervient comme offreur de formation : GRETA,
CFPPA, AFPA, CNED, CNAM…
Les collectivités régionales :
Les conseils régionaux sont responsables du développement économique et de l’aménagement du
territoire. Dans le prolongement de cette responsabilité, le législateur leur a confié en 1983 celle de
la formation professionnelle continue. Les régions sont désormais responsables de la définition et
de la mise en œuvre de la politique régionale de formation professionnelle des jeunes et des adultes
à la recherche d’un emploi ou d’une nouvelle orientation professionnelle. L’exercice de cette
compétence se traduit notamment par l’adoption d’un plan régional de l’apprentissage et de la
formation professionnelle.
17
Les partenaires sociaux :
Les partenaires sociaux définissent les politiques de formation des professions qu’ils représentent.
Ils contribuent à l’élaboration du droit par la négociation collective, laquelle intervient aux niveaux
interprofessionnel, des branches professionnelles et de l’entreprise. Les partenaires sociaux gèrent
paritairement les institutions chargées de la mise en œuvre du droit de la formation continue et des
politiques qu’ils définissent. La gestion paritaire se traduit par l’adhésion des entreprises à un
organisme paritaire collecteur agréé (OPCA). Ainsi, l’entreprise joue un rôle central dans la mise en
œuvre de la formation professionnelle continue qui fait partie intégrante de sa stratégie.
I.3.1.3. Les modalités de mise en œuvre de la FPC en entreprise
Un salarié dispose de plusieurs voies pour accéder à la formation. Ces voies d'accès sont énumérées
à l'article L6312-1 du code du Travail :
Nous ne détaillerons que la modalité du plan de formation, colonne vertébrale d’une politique de
formation cohérente et lieu privilégié pour discuter d’une politique Handicap, comme nous le
verrons par la suite.
Le plan de formation :
« Le plan de formation s’inscrit dans une double démarche : c’est à la fois la traduction des
orientations de la direction et de la stratégie de l’entreprise […] et la prise en compte des réalités
sociales, techniques et économiques de l’organisation »17
Le plan de formation rassemble l’ensemble des actions de formation définies dans le cadre de la
politique de gestion du personnel de l’entreprise. Le plan de formation peut comporter deux types
d’actions :
- des actions visant à assurer l’adaptation du salarié au poste de travail ou liées à l’évolution ou au
maintien dans l’emploi dans l’entreprise et ;
- des actions ayant pour objet le développement des compétences des salariés.
17 Ardouin T. ,id, p66
L'accès des salariés à des actions de formation professionnelle continue est assuré :
1° A l'initiative de l'employeur, dans le cadre d'un plan de formation ;
2° A l'initiative du salarié notamment dans le cadre du congé individuel de formation ;
3° A l'initiative du salarié avec l'accord de son employeur dans le cadre du droit individuel à la
formation ;
4° Dans le cadre des périodes de professionnalisation ;
5° Dans le cadre des contrats de professionnalisation.
18
Il peut également prévoir des actions de bilan de compétences et de validation des acquis de
l’expérience et proposer des formations qui participent à la lutte contre l’illettrisme.
L’élaboration du plan de formation est assurée sous la responsabilité pleine et entière de
l’employeur. Il n'est pas négocié au sein de l'entreprise mais l'employeur a un devoir d'information.
Chaque année, le comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel émettent un avis sur
l’exécution du plan de formation de l’année précédente et sur le projet de plan pour l’année à venir.
L’objectif de cette procédure de consultation est de permettre aux représentants du personnel de
faire des propositions pour modifier ou améliorer le plan de formation envisagé par l’employeur.
I.3.1.4. Le système de financement de la FPC
Comme nous l’avons dit, les entreprises sont tenues de participer au financement de la FPC, en
particulier pour la population active. Elle en est même aujourd’hui le premier financeur. Il s’agit
d’une obligation légale, instituée par la loi de 1971.
Le système français de FPC est construit juridiquement comme un ensemble de sous-systèmes
comportant chacun un ensemble de dispositifs offrant des voies d’accès à la formation à une
catégorie de publics. Chaque sous-système relève d’un jeu d’acteurs particulier et de modalités de
financement spécifiques. Nous faisons le choix de ne présenter que le système de financement de la
FPC pour les salariés, contexte de notre recherche.
Les entreprises occupant au minimum dix salariés doivent dépenser chaque année au titre du plan
de formation 0,9 % de leur masse salariale minimum (article L. 6332-7 du code du Travail). Les
entreprises peuvent s’acquitter de cette obligation de plusieurs manières. Elles peuvent effectuer un
versement à un OPCA, libre ou obligatoire en application d’une convention collective de branche ;
l’OPCA remboursera ensuite à l’entreprise les frais de formation engagée. Elles peuvent également
s’en acquitter par l’achat d’actions de formations au bénéfice de ses salariés ou bien par
l'organisation interne de formations au sein de l'entreprise. A défaut de pouvoir justifier de l’un ou
l’autre de ces modalités d’acquittement, elles doivent verser le solde au Trésor Public.
En voici un tableau récapitulatif :
En % de la masse salariale
Entreprises de moins de 10 salariés
Entreprises de 10 à 19 salariés
Entreprises de 20 salariés et plus
Plan de formation 0,4 0,9 0,9
Professionnalisation 0,15 0,15 0,5
C.I.F 0 0 0,2
Total 0,55 1,05 1,06
Ainsi, au total, et outre la contribution spécifique pour le congé individuel de formation des CDD,
Il est intéressant de noter que dans la pratique et en moyenne les entreprises dépensent un montant
supérieur à leur obligation, environ 3% de la masse salariale.
Tableau 1 : Tableau des taux de financement obligatoire des entreprises par type d’action – P. Le douaron1
19
Une partie de cette obligation fait l’objet d’un versement systématique par l’entreprise à un OPCA.
0,7% de la masse salariale est gérée dans des institutions paritaires, fondées sur le principe de la
mutualisation, les objectifs et les priorités d’affectation de ces ressources étant elles-mêmes définis
par voie de négociation collective interprofessionnelle et/ou de branche. Aucun employeur
n’échappe à ces dispositifs de mutualisation au bénéfice des salariés. L’autre partie de l’obligation
légale a un fonctionnement plus complexe et peut faire l’objet soit d’un versement obligatoire à
l’OPCA (cas des petites entreprises), soit d’un versement décidé par accord de branche (obligation
conventionnelle) soit d’un versement libre par l’entreprise. Elle peut enfin ne pas faire l’objet d’un
versement à l’OPCA et être dépensée par l’entreprise dans des actions de formation au bénéfice de
ses salariés. Au total, c’est la moitié environ des dépenses de formation des entreprises qui
transitent par le système paritaire de gestion des fonds de la formation, soit plus de 5 milliards
d’euros. L’Etat, garant du financement et maître du contrôle des fonds, laisse cependant les
opérateurs privés agréés (OPCA) ou faisant l’objet d’un contrôle spécifique (entreprises,
organismes de formation) intervenir dans la gestion et l’utilisation des fonds de la formation
professionnelle soumis à cette obligation légale.
I.3.2. L’ARTICULATION ENTRE LA FPC ET LA POLITIQUE HANDICAP EN ENTREPRISE
Comme nous avons pu le voir précédemment, l’Agefiph est un acteur institutionnel pouvant
intervenir auprès des entreprises pour les accompagner dans la mise en œuvre d’une politique
Handicap pertinente. Cet acteur, ainsi que l’ensemble des acteurs travaillant dans le champ de
l’insertion professionnelle de personnes en situation de handicap (autres services publiques tel que
les CAP emploi, ou les associations de professionnels ouvrant dans ce champ d’intervention),
reconnait et encourage la mise en place d’actions de formation et de sensibilisation des salariés des
entreprises. Tous reconnaissent l’importance18 du développement en interne de compétences
spécifiques pour certains salariés clés (RH, managers…) et de l’accompagnement d’un changement
de regard et du développement d’aptitudes collectives internes permettant de favoriser la prise en
compte des différences dans le travail en équipe, afin de minimiser l’impact des stéréotypes et des
préjugés sur le travail et l’intégration de travailleurs handicapés.
Pour ce faire, les entreprises doivent, la plupart du temps, ou du moins devraient mettre en place
une politique formation intégrant les enjeux liés au développement de la politique Handicap.
18 En complément des nécessaires réorganisations des processus, tel que celui du recrutement par exemple, ou les réflexions sur les
aménagements de postes, ou les partenariats avec les acteurs de l’éducation et de la formation professionnelle extérieurs à l’entreprise.
20
Deux choix s’offrent alors à eux :
- L’intégration de la thématique du Handicap dans le plan de formation de l’entreprise, par la
proposition de formations spécifiques à certains salariés et des sessions de sensibilisation
ouvertes à l’ensemble des collaborateurs. Sur ce deuxième type d’actions, il existe un vrai
flou dans l’imputabilité des coûts de ce type d’action. Cela dépend souvent des OPCA et de
leur choix de financement. En effet, il n’existe pas aujourd’hui de ligne comptable pour
identifier clairement les actions de sensibilisations. Celles-ci doivent donc trouver leur place
dans la ligne comptable de la formation ou celle de l’information/communication. Elles
doivent donc respecter un certains nombre de critères qu’une action de sensibilisation peut
parfois avoir du mal à intégrer. En effet, les objectifs pédagogiques et méthodologies
d’intervention peuvent ne pas tout à fait correspondre à ceux d’actions de formation ou
d’information. Il s’agit donc pour chaque responsable formation de pouvoir trouver une
présentation et argumentation acceptable pour les OPCA. L’absence de ces critères de
qualité spécifique aux actions de sensibilisation, en maintenant un flou important, risque de
pénaliser la qualité et surtout à l’impact de ces actions de sensibilisation. Nous émettons
l’hypothèse que ce flou a permit le développement d’un marché spécifique de prestataires de
la formation et de la sensibilisation sur le champ du handicap en entreprise, du fait que les
responsables de formation et parfois les OPCA soient un peu perdu dans ce marché, face à
tant d’offres sans réel cahier des charges. C’est pourquoi l’Agefiph a créé une liste de
prestataires privés « agréés » par l’Agefiph, même si celle-ci se décharge de toute
responsabilité dans la prestation rendue.
- Intégrer dans l’accord Handicap l’ensemble des actions de formation et de sensibilisation à
réaliser durant la période de l’accord. Cette option est plus simple à gérer d’un point de vue
comptable puisque les fonds utilisés seront ceux libérés par la signature de l’accord. Ceci
implique un acteur-contrôle qualité en moins, à savoir les OPCA, qui n’interviennent pas
dans la validation et le financement de ces formations et sensibilisations. Ce qui d’après
nous facilite un peu le travail du responsable formation dans le choix des formations et
sensibilisation mais ne change en rien la difficulté d’une approche qualité pertinente. Là
encore, et peut être plus encore, les responsables formations des entreprises ont peu de
moyens (autre que leurs propres compétences et le bouche à oreille) pour définir la qualité
des prestataires et des actions menées, ainsi que de leur réel impact.
21
En toute logique, le processus de mise en place d’une politique de formation dans le champ du
handicap devrait donc suivre, voir s’intégrer à la logique et au processus de développement du plan
de formation de l’entreprise.
Mais ce n’est pas le cas :
- L’analyse des besoins a du mal à se faire en entreprise, encore plus sur le champ spécifique
du Handicap
- Le développement d’un marché important de prestataires de la formation sur le champ du
handicap et l’absence de normes qualité sur les actions de sensibilisation, rend très complexe
le choix du prestataire et donc de son suivi qualité et son évaluation.
Pour synthétiser cela dans le cadre du modèle de la servuction, nous dirions que le système
fournisseur n’étant pas réglementé ou normé, le système client est peu à même de jouer son rôle de
contrôle et suivi qualité que ce soit au niveau du commanditaire ou celui du bénéficiaire final. Et
donc participer à maintenir un certain flou dans l’analyse des besoins et dans l’évaluation de
l’impact de ces actions.
I.4. PREMIERS QUESTIONNEMENTS
Suite à cette présentation du contexte de l’insertion professionnelle des personnes en situation de
handicap en France et celui de la formation professionnelle, plusieurs questionnements nous
viennent :
- La loi 2005, tout comme la loi sur le financement de la FPC, a libéré un certain budget pour
des actions favorisant l’insertion professionnelle de PSH en entreprise. Elle a aussi permis
d’insuffler une certaine dynamique et « prise des conscience » des entreprises qui se doivent
d’intégrer des PSH. Or les résultats, malgré une certaine amélioration de l’embauche globale
de TH, ne semblent pas être à la mesure des investissements réalisés, pourquoi ?
- Et qu’en est-il de la démarche d’ingénierie de formation dans ce contexte ? Quelle est la
place réelle de l’analyse des besoins dans la mise en œuvre des actions de formation et
sensibilisation pour les entreprises ? Car le diagnostic conseil proposé par l’Agefip participe
à ce processus d’analyse des besoins mais l’Agefiph elle-même constate qu’il est peu mis en
œuvre.
22
- Et même si l’entreprise met en place une analyse des besoins dans le champ du handicap,
prend t elle et si oui, comment prend elle en compte les effets des représentations que la
société se fait du handicap et des personnes handicapés ? puisque le concept du PPH
rappelle l’importance de l’environnement dans la définition du Handicap et donc dans les
interactions de la personne handicapée et de son environnement, comment est il prit en
compte dans les analyses de besoins ?
Notre réflexion de recherche va donc s’articuler autour de ces questionnements, en particulier
autour de la question de l’analyse des besoins, qui ne nous semble pas assez bien exploitée par
les entreprises, et surtout pas complète car elle semble omettre la question des représentations
sociales. Et en quoi une démarche d’ingénierie de formation bien menée pourrait-elle participer
à améliorer les effets des actions de formation et surtout de sensibilisation sur l’insertion
professionnelle de travailleurs handicapés ?
Ce sont des questionnements provisoires et assez larges que nous aimerions alimenter par
d’autres lectures, réflexions avant de vous proposer un objet d’étude plus ciblé.
23
II. DES CONCEPTS POUR ÉCLAIRER ET PRÉCISER NOS QUESTIONNEMENTS
II.1. NOTRE RECHERCHE DANS LE CADRE DE L’INGENIERIE DE FORMATION
Comme nous l’avons pointé plus haut, certaines similitudes semblent exister entre politique de
formation et politique Handicap en Entreprises. Et parler de politique de formation en entreprise
nous amène logiquement à faire le lien avec la démarche de l’ingénierie de formation. Nous
entamons donc ce chapitre par une rapide présentation de la démarche d’ingénierie de la formation,
sans toutefois entrer dans les détails afin de nous laisser la possibilité d’y revenir dans les chapitres
suivants.
Comme le rappelle Thierry Ardouin19, l’ingénierie de formation s’est développée afin de répondre
aux enjeux de développement des compétences et de flexibilité de l’organisation du travail,
nécessaire aux entreprises pour rester compétitives. Il s’agit alors d’appliquer à la formation les
démarches de l’ingénierie, démarches fondées sur les notions de conduite ou de management de
projet. «Il ne s’agit plus, désormais, simplement d’organiser des actions de formation, mais de
construire au sein d’un projet plus global, une réponse spécifique à un problème qui n’est
d’ailleurs pas nécessairement éducatif» (André Voisin)20.
Y.Minvielle définit l’ingénierie de formation comme « l’architecture de dispositif d’action allant
de la simple séquence cours, au système de formation complet en passant par des programmes et
des programmations plus ou moins définis et définitifs » 21. Bien qu’en accord sur cette définition de
l’ingénierie de formation, elle nous apparait trop technique pour notre thème de recherche et nous
lui préférons celle donnée par T. Ardouin22, qui nous parait mettre plus en avant l’importance de la
prise en compte de l’environnement et qui interpelle autant le collectif que l’individu :
Ainsi cette approche de l’ingénierie de formation nous semble parfaitement pertinente dans le cadre
d’un projet sur l’insertion professionnelle de TH, qui se doit de questionner tout autant 19 Ardouin T., id
20 Voisin A. : « la formation professionnelle en France », Centre européen pour le développement de la formation professionnelle, 1988
21 Minvielle Y. : « L’Ingénierie de la formation, initiation à l’ingénierie de la formation, 1994, p51
22 Ardouin T., id
L’ingénierie de formation [est] une démarche socioprofessionnelle ou l’ingénieur-formation a,
par des méthodes appropriées, a Analyser, Concevoir, Réaliser et Evaluer [(ACRE)] des
actions, dispositifs et/ou systèmes de formation en tenant compte de l’environnement et des
acteurs professionnels. Ces actions, dispositifs ou systèmes sont mis en œuvre de manière
optimale en vue du développement des organisations et des personnes […].
24
l’organisation que l’individu. La finalité première restant bien la production de compétences et de
savoirs en lien avec les situations professionnelles ou sociales.
Bien que nous reviendrons sur la démarche d’ingénierie de formation, nous nous interrogeons dés à
présent sur une de ses étapes clés, l’analyse de besoins, point central de nos premiers
questionnements.
II.2. ANALYSE DES BESOINS
II.2.1. DES BESOINS DE FORMATION ?
Comme le terme de besoin est déjà ambiguë en soi23, il en va de même du terme de besoin de
formation. Dans ce domaine, Misanchuk (1982) présente le besoin comme étant constitué de trois
éléments : la compétence qu’un individu possède pour accomplir une tache, la pertinence de cette
compétence ou de celle habilité par rapport à la fonction qu’il occupe et la motivation qui l’anime
afin de l’acquérir par le truchement d’activités de perfectionnement. Rolland Barker (1981),
introduit le concept de besoin selon trois perspectives : une conception « dogmatique » du besoin-
devoir, une conception qualifiée de « behaviouriste » qui présente le besoin comme la résultante
d’un écart entre une situation normative désirable et une situation actuelle, et une conception
qualifiée « d’humaniste» qui présente le besoin comme subjectif, qui correspond aux intérêts, aux
préférences et aux aspirations conçues, ressenties ou extériorisées par les individus. Cette dernière
perspective renvoie a l’approche de Barbier et Lesne (1977) qui soulignent « l’ambiguïté du
concept par ses connotations subjectives, dans la mesure où il n’existe qu’à travers le filtre des
perceptions»24. Ils identifient aussi une connotation objective du besoin, « dans le sens où le besoin
est sensé être le reflet d’une nécessité naturelle ou sociale»25. L’approche behaviouriste a quant à
elle été reprise par De Ketele, Chartrette, Cros, Mettelin et Thomas (1988) puisqu’ils considèrent «
le besoin comme un décalage entre une situation réelle et une situation idéale ». C’est Kaufman
(1972) qui introduit pour la première fois la notion d’écart associé au concept de besoin. Il le définit
comme étant « l’écart mesurable qui existe entre ce qui est et ce qui devrait être»26. Nous
retiendrons pour cette recherche cette dernière approche, le besoin vu comme la résultante de la
différence entre la situation actuelle et la situation idéale (désirable). Le besoin de formation en soi
ne peut donc exister. La formation doit être entendue comme un des moyens de réponse a un
besoin et non comme une fin. Jacques Soyer27 propose d’ailleurs de remplacer besoin de formation
23 Par exemple, le sociologue P.Albou (1975) le considère «comme une idée fort ancienne, vague qui se laisse difficilement cerner et plus
difficilement encore enserrer dans les mots. Son ambiguïté tient a sa fonction qui est de rendre compte de l’ensemble des variétés de la conduite» 24 Cité par Xavier Roegiers, Pascale Wouters, F.M Gerard ‘’du concept d’analyse des besoins en formation a sa mise en œuvre’’, Revue européenne
des professionnels de la formation, 1992 25 idem
26 Traduit de l’anglais :’’the measurable gap between ‘’what is’’ and ‘’what should be’’ , dans ‘’Educational system planning’’. Englewood cliffs, New
Jersey,prestige Hall, 1972 27 ‘’Fonction formation, Edition d’organisation, p100, 1998
25
par objectif à atteindre par la formation. G. Quittet parle lui de besoins de compétences28. A.
Meignant pourtant assure que besoin de formation et besoin de compétence ne sont pas
équivalents29. En accord avec ceci, nous maintenons donc pour cette recherche le terme de besoin
de formation, entendu au sens d’objectif à atteindre, comme le dit J. Soyer
II.2.2. L’ANALYSE EN QUESTION
L'analyse de besoins de formation est donc un processus nous permettant de cueillir les
données les plus valides afin de pouvoir mesurer avec le plus de précision possible l’écart
existant entre la situation réelle et la situation idéale. Cette étape est essentielle à l’ingénierie de
formation comme le rappelle P. Caspar et M.J. Vondescher30 «Bien connaitre cet existant constitue
la première condition de réussite».
Pourquoi lancer une analyse des besoins de formation ? Parce que des facteurs externes et/ou
internes poussent l’organisation à se questionner sur sa performance et compétitivité au regard de
ces facteurs. C’est au carrefour de ces deux environnements que se situe la stratégie de l’entreprise :
« comment répondre aux défis extérieurs en tenant compte de façon réaliste des forces et faiblesses
de l’intérieur»31. Dans le cadre de notre recherche, les entreprises ne peuvent ignorer le facteur
externe, la loi de 2005 imposée par l’Etat, mais sont souvent peu enclin à questionner les forces et
faiblesses de l’intérieur, si ce n’est les services des Ressources Humaines, et donc peu d’analyse de
besoins de formation est menée32, sauf en auto commande de la part des services RH, ou sous la
pression des syndicats et/ou Comités d’entreprise. On parle alors de demandes et attentes internes.
On peut donc considérer qu’une analyse des besoins est un effort systématique de réflexion,
d’observation et de collecte de données (faits, opinion, demandes, attentes) provenant de sources
multiples visant à identifier et documenter les écarts (besoins) entre une situation actuelle et une
situation désirée.
Cependant la diversité des contextes professionnels, institutionnels et historiques rend cette analyse
des besoins bien compliquée. Cela interdit en tout cas de «réduire une analyse des besoin en
formation à une simple équation pour laquelle il suffirait d’entrer la valeur de quelques
paramètres» 33. Mais des critères de qualité existent tout de même. A. Meignant en cite quatre : (1)
l’analyse des besoins doit permettre de prendre en compte, parmi les raisons de sa mise en œuvre,
celles qui sont pertinentes ; (2) Elle doit permettre une implication des acteurs concernés ; (3) elle
doit être adaptée au type d’objectif de formation qu’il s’agit d’atteindre (en lien avec les
28 ’Développer les compétences par une ingénierie de la formation’’, Paris, Edition ESF. Collection : Formation permanente
29 Car d’après lui « on peut parfaitement devenir compétent sans suivre une formation et suivre une formation sans devenir compétent». Manager
la formation (2009), éditions Liaisons 30 ‘’Profession, responsable de formation, Editions d’organisation
31 Meignant A., ouvrage déjà cité, p117
32 Déduction faite du peu d’entreprises assujetties qui se sont investie dans le recrutement de TH.
33 Texte de Roegiers X. déjà cité
26
performances, de nouveaux projets ou des parcours professionnels) ; (4) elle doit rendre le meilleur
résultat possible au moindre cout (efficience).
Bourgeois (1991) s’est particulièrement intéressé au processus mis en œuvre lors d’une analyse des
besoins de formation. Pour lui, «l’analyse des besoins est un processus d’élucidation et de
négociation sociale». 34 L’analyste doit mener un travail de décodage des représentations des
individus concernés puis de négociations avec les différents acteurs afin d’aboutir à une prise de
décision. Selon Bourgeois, « quelle que soit la décision prise, l’adhésion de tous les membres
concernés par la décision est requise».
II.2.3. COMMENT LA METTRE EN ŒUVRE ?
II.2.3.1. Par l’indispensable approche systémique
Le constat de la complexification de notre environnement, les progrès scientifiques, sociologiques
ont montré « la nécessité d’un concept d’organisation qui ne se réduise pas à celui de structure »
(Le Moigne 1977 d’après F. Varella p17). Le besoin d’intégrer les interactions et la globalité dans
les systèmes est devenu une évidence. La systémique, qui permet de montrer la complexité d’une
organisation, correspond à cette attente. C’est une méthode d’analyse qui a pour ambition de rendre
compréhensible une réalité complexe. Elle doit permettre de lire l’action, de l’inscrire dans une
logique, dans une finalité. L’intérêt majeur de la systémique consiste donc à permettre la
compréhension des stratégies, des intentions, des buts de chaque sous-système et de l’ensemble de
l’organisation afin d’envisager des pistes d’évolution et de préconiser des actions de progrès
adaptées.
Pour toutes ces raisons et plus, l’ingénierie de formation, et en particulier la phase d’analyse des
besoins s’appuie bien logiquement sur l’approche systémique, comme le souligne J.Aubigny «
l’ingénierie de formation est un ensemble de démarches méthodologiques et instrumentales, se
référant au paradigme systémique et visant dans une perspective prévisionnelle et concertée, à
créer ou à modifier des systèmes d’action en vue d’une efficience ». 35
II.2.3.2. Par la nécessaire analyse du travail
Comme nous le cite T, Ardouin36, Maurice de Montmillon écrivait « Pour former a un travail
précis, il faut définir des objectifs précis, qui eux même ne peuvent être dégagés que si le travail,
origine et fin de la formation, est analysé ». De lourds enjeux économiques et sociaux planent sur
l’analyse du travail. D’après J.Leplat « l’analyse du travail est une méthode d’acquisition de
connaissances sur le fonctionnement réel des situations de travail ; elle vise par l’analyse de
l’activité à comprendre les déterminants et les modalités de l’organisation des conduites […] Elle 34 Cité par X. Roegiers dans son article déjà cité.
35 Dans ‘’formation et développement : vers une ingénierie de la formation, l’Harmattan, Paris, p33
36 Dans son cours sur l’analyse du travail, des emplois et compétences, p1, , Master II ICF, Université de Rouen)
27
est le lieu privilégié de l’interaction entre ce que l’on sait déjà et ce qui est à connaitre » 37. Nous
pouvons ainsi dégager 3 grands objectifs de l’analyse du travail : C’est un instrument pour aider les
acteurs a mieux maitriser leur propre situation de travail ; c’est un instrument d’implication des
salariés dans le changement technique ou organisationnel et c’est un préalable aux décisions dans le
domaine technique et organisationnel ou pédagogique.
En s’appuyant plus particulièrement sur le deuxième et troisième objectif cité, nous confirmons
donc l’importance de l’analyse du travail dans la mise en œuvre de l’obligation d’emploi de TH. En
effet, celle-ci suppose une parfaire connaissance des situations de travail existantes (formelles et
informelles) pour pouvoir les adapter si nécessaire aux capacités des TH recrutés, sans oublier de
prendre en comptes les nouvelles interactions professionnelles que cela pourrait générer. C’est dans
ce contexte que prend tout le sens du travail de l’ergonome38, très sollicité lors de l’insertion
professionnelle de TH. L’analyse du travail vient donc enrichir la phase d’Analyse du processus
d’ingénierie de formation, et nous parait même nécessaire à celle-ci dans le cadre de notre
recherche.
II.2.3.3. Et par une participation active recherchée
Ce terme a des significations différentes selon qui l’emploie et en quelles circonstances. Il s’est
dernièrement beaucoup développé dans le cadre de projets de développement, en particulier dans le
secteur de la solidarité internationale. En effet, la plupart des efforts d’analyse des besoins, ont été
faits par des gens de l’extérieur. Mais au fur et à mesure qu’émergeait le concept de participation,
les gens du dedans, les bénéficiaires, se sont trouvés de plus en plus impliqués, pour fournir puis
pour rassembler des données, identifier les thèmes de recherche, lors de la présentation des
résultats, etc. Ce concept relève de plusieurs niveaux. La participation peut signifier simplement
que les personnes concernées participent aux activités du projet. Dans la plupart des cas il veut dire
que certaines personnes ont été consultées. Dans les cas les plus avancés de participation il signifie
que l’ensemble des personnes concernées contrôle tout ou partie du processus. Fondamentalement,
le terme participation signifie que les bénéficiaires d’un projet sont impliqués activement dans les
différentes étapes de ce projet - préparation, réalisation ou évaluation de ses résultats - plutôt que de
le recevoir d’autres personnes. La participation signifie alors que les intérêts particuliers et
l’expérience de tous les membres du groupe du projet sont pleinement pris en considération.
Dans le cadre de notre recherche, l’unité sociale de référence est l’organisation. La participation est
alors comprise comme le fait d’avoir accès à des instances formelles permettant l’expression des
membres au sein d’une organisation. Ceci suppose qu’il existe des structures de participation,
37 Leplat J. : ‘’L’analyse du travail en psychologie ergonomique, Octares, 1992
38 ‘’L’ergonomie est l’étude scientifique de la relation entre l’homme et ses moyens, méthodes et milieu de travail’’, d’après le congrès international
d’ergonomie, en 1969.
28
prévues dans l’organigramme de l’institution. Ceci entraîne également que la mise en place de la
participation dépend toujours de l’autorité formelle. Ainsi, participer dans le cadre d’une
organisation, c’est disposer d’un droit de parole pour donner librement son avis lors de rencontres
formalisées. Librement veut dire que le droit de parole est théoriquement total, pour autant que
l’expression soit respectueuse des personnes et demeure en rapport avec l’ordre du jour de la
rencontre. Or, la psychologie sociale nous apprend que, au sein de la dynamique des groupes,
chaque membre ne dispose pas du même poids dans les débats. Ainsi, même si l’égalité de principe
de tous les membres est postulée au sein du groupe, cette égalité n’est pas pour autant une réalité
vécue dans les organisations. Sur le plan formel, les membres d’une instance de participation sont
autorisés, de par leur fonction de membre, à s’exprimer en toute indépendance. Mais cela ne peut
être réalisé que si l’organisation met en place ces instances de participation et les fait vivre au sein
de son collectif. Certaines organisations ont cette culture de la participation, d’autres pas. Il est clair
que cela peut avoir un impact important dans le champ de notre recherche.
II.3. DE LA REPRESENTATION SOCIALE AU BIAIS DECISIONNEL FACE AU HANDICAP EN ENTREPRISE
Dans cette partie nous allons discuter des différents éléments et concepts amenant une personne à
développer des biais décisionnels, car nous partons de l’hypothèse que ceux-ci ont un impact
important sur la question du Handicap en entreprise. Nous verrons en fin de paragraphe si nous
pouvons confirmer cette hypothèse, à travers la revisite de chacun de ces concepts.
Figure 3 : la construction des biais décisionnels – G.Tisserant39
39 G. Tisserant : « Le handicap en entreprise, contrainte ou opportunité », ed Pearson, 2012, p36
GENERAL I SAT ION
29
II.3.1. REPRESENTATIONS SOCIALES
II.3.1.1. Généralités
Le concept de représentation sociale est si riche et si complexe qu'il n'est pas toujours évident de le
définir. De nombreux auteurs, dans de nombreuses disciplines se sont attachés à expliciter ce
concept.
Dans point de vue sémantique, représenter vient du latin repraesentare, rendre présent. Le
dictionnaire Larousse précise qu'en philosophie, " la représentation est ce par quoi un objet est
présent à l'esprit " et qu'en psychologie, " c'est une perception, une image mentale dont le contenu
se rapporte à un objet, à une situation, à une scène (etc.) du monde dans lequel vit le sujet. "
D’un point de vue historique et scientifique, c’est Emile Durkheim qui fut le premier à évoquer la
notion de représentations qu'il appelait ''collectives'' à travers l'étude des religions et des mythes.
Pour ce sociologue, " les premiers systèmes de représentations que l'homme s'est fait du monde et
de lui-même sont d'origine religieuse''. Il distingue les représentations collectives des
représentations individuelles : " La société est une réalité sui generis ; elle a ses caractères propres
qu'on ne retrouve pas, ou qu'on ne retrouve pas sous la même forme, dans le reste de l'univers. Les
représentations qui l'expriment ont donc un tout autre contenu que les représentations purement
individuelles et l'on peut être assuré par avance que les premières ajoutent quelque chose aux
secondes. "40
Sur les traces de cette tradition sociologique de Durkheim, Serge Moscovici, dans ses travaux
pionniers, définit quant à lui, les représentations sociales comme des éléments de la conscience
sociale extérieure aux individus et s'imposant à eux. Il s'attache à montrer « comment une nouvelle
théorie scientifique ou politique est diffusée dans une culture donnée, comment elle est transformée
au cours de ce processus et comment elle change à son tour la vision que les gens ont d'eux-mêmes
et du monde dans lequel ils vivent ». 41 Pour lui, on peut parler de représentation sociale car « les
représentations sociales sont à la fois générées et acquises, on leur enlève ce coté préétabli
statique, qu’elles avaient dans la vision classique. Ce ne sont pas les substrats, mais les
interactions qui comptent. D’où, la remarque parfaitement exacte que ce qui permet de qualifier de
40 E. Durkheim : « Les formes élémentaires de la vie religieuse », Paris, Le livre de poche, 1991. 41 S. Moscovici : « La psychanalyse, son image et son public », Paris, PUF 1961 (2è éd. 1976)
La représentation est " l'action de rendre sensible quelque chose au moyen d'une figure, d'un symbole, d'un signe" (dictionnaire Larousse )
30
social les représentations, ce sont moins leurs supports individuels ou groupaux que le fait qu’elles
soient élaborées au cours de processus d’échanges et d’interactions »42.
Pour comprendre le monde environnant, les individus ont besoin de cadres de référence, de normes
sociales pour se situer et développer des relations. Selon W. Doise, « une représentation sociale
consiste toujours à ancrer nos connaissances dans un monde de valeurs sociales hiérarchisées
résultant des positions asymétriques occupées par des groupes et individus dans un champ
social »43. Les représentations sociales sont donc des savoirs qui jouent un rôle dans le maintien des
rapports sociaux ; en même temps qu'elles sont façonnées par eux, elles véhiculent directement ou
indirectement un savoir sur ces rapports. Cette imbrication des représentations dans le tissu des
rapports sociaux est souvent méconnue des acteurs sociaux. C’est une « manière d'interpréter et de
penser notre réalité quotidienne »44. Elle se constitue par toutes sortes d'expériences et
d'informations, reçues et transmises par la tradition, l'éducation et la communication sociale. Il s'agit
donc d'une connaissance socialement élaborée et partagée qui concourt à la construction sociale
de notre réalité. Denise Jodelet (1984) constate que toute représentation est définie par un contenu
se rapportant à un objet : elle est représentation de quelque chose et de quelqu'un, c'est-à-dire d'un
individu, d'une famille, d'un groupe, d'une classe, etc. Devenue une sorte de code commun, la
représentation sociale sert à classer les individus, les événements et les objets, à élaborer des
prototypes permettant à leur tour d'évaluer d'autres objets. Le prototype qui n'est jamais neutre,
oriente les classements en offrant une matrice de traits par rapport auxquels les objets nouveaux
seront catégorisés. Par exemple, les systèmes d'opposition comme nature/culture, féminin/masculin
constituent, entre autres, ces principes “organisateurs”.
Mais selon Denise Jodelet, c'est parce que la représentation sociale est située à l'interface du
psychologique et du social, qu'elle présente une valeur heuristique pour toutes les sciences
humaines. Chacune de ces sciences apporte un éclairage spécifique sur ce concept complexe. Tous
les aspects des représentations sociales doivent être pris en compte : psychologiques, sociaux,
cognitifs, communicationnels. Il n'est ni possible, ni même souhaitable pour l'instant, estime
Jodelet, de chercher à établir un modèle unitaire des phénomènes représentatifs. Il paraît préférable
que chaque discipline contribue à approfondir la connaissance de ce concept afin d'enrichir une
recherche d'intérêt commun.
De ces différentes approches, nous faisons le choix de nous référer plus particulièrement aux
travaux de Jean Claude Abric.
42 S Moscovici : « Des représentations collectives aux représentations sociales : éléments pour une histoire », Dans Denise Jodelet (éd.), Les
représentations sociales. Paris, P.U.F, 1989 43 W. Doise : « Les représentations sociales, définition d’un concept » in L’étude des représentations sociales, Delachaux‐Niestlé, 1986, pp. 81‐94.
44 D. Jodelet : “ Représentations sociales : phénomènes, concepts et théories ”, in S. Moscovici (ed) Psychologie sociale, PUF, 1984, p 357‐378.
31
Pour lui :
Il la définit comme « une vision fonctionnelle du monde, qui permet à l'individu ou au groupe de
donner un sens à ses conduites, et de comprendre la réalité, à travers son propre système de
références, donc de s'y adapter, de s'y définir une place ».45
II.3.1.2. Le concept du noyau central et les conditions d’évolution d’une représentation sociale
Mais c’est surtout son travail sur les évolutions et méthodes de transformations des représentations
sociales (questionnement de notre recherche) qui nous a interpelés lors de notre recherche. En effet,
J.C Abric a repris et surtout développé la notion de noyau figuratif, élaborée par Moscovici, sous le
terme de noyau central (ou noyau structurant). Selon sa théorie, une représentation est un ensemble
organisé autour d'un noyau central, composé d'éléments qui donnent sa signification à cette
représentation. Ce noyau structurant est l'élément fondamental de la représentation ; son repérage
permet l'étude comparative des représentations sociales. Selon lui, « tous les éléments de la
représentation n’ont pas la même importance. Certains sont essentiels, d’autres importants,
d’autres, enfin, secondaires »46. Sa dimension est essentiellement qualitative : la fréquence
d'apparition d'un ou de plusieurs éléments dans le discours des sujets, ne suffit pas à affirmer qu'il
s'agit d'éléments constitutifs du noyau central. Par contre, lorsque ceux-ci entretiennent un nombre
élevé de relations avec l'ensemble des autres éléments et surtout leur donnent leur signification, on
considère que l'importance quantitative de ces liaisons est un indicateur pertinent de la centralité.
L'étude des différents items d'une représentation doit donc prendre en compte les relations
entretenues entre les éléments pour pouvoir déterminer le noyau central.
Le noyau structurant a deux fonctions principales : une fonction génératrice car le noyau central est
à l'origine des différents éléments de la représentation ; il leur donne sens et valeur et c'est par lui
que peuvent se transformer ces éléments, et une fonction organisatrice car il « détermine la nature
des liens qui unissent entre eux les éléments de la représentation. Il est en ce sens l'élément
unificateur et stabilisateur de la représentation ».47
Il est constitué des éléments qui donnent sens à la représentation : la nature de l'objet représenté, la
relation de cet objet avec le sujet ou le groupe, le système de valeurs et de normes (le contexte
idéologique).
45 J.C Abric : « Pratiques sociales et représentations », sous la direction de J‐C Abric, PUF, 1994, 2ème édition 1997.
46 J.C Abric: “ Méthodes d’études des représentations sociales”, sous la direction de J.C Abric, Eres « hors collection », 2003, p 59 – 80.
47 J.C Abric : « Pratiques sociales et représentations », sous la direction de J‐C Abic, PUF, 1994, 2ème édition 1997, p22
Une représentation sociale est un ensemble organisé d’informations, d’opinions, d’attitudes et de
croyances à propos d’un objet donné. Socialement produite, elle est fortement marquée par des
valeurs correspondant au système socio-idéologique et à l’histoire du groupe qui la véhicule
pour lequel elle constitue un élément essentiel de sa vision du monde.
32
Le noyau central est l'élément le plus stable de la représentation. Il est très difficile de le modifier,
c'est pourquoi Mugny et Carugati48 parlent de ''noyau dur''.
Autour de ce noyau s'organisent les éléments périphériques. Même si le noyau central est le
fondement de la représentation, les éléments périphériques tiennent une place importante dans la
représentation. En effet, « ils comprennent des informations retenues, sélectionnées et interprétées,
des jugements formulés à propos de l'objet et de son environnement, des stéréotypes et des
croyances … Ils constituent l'interface entre le noyau central et la situation concrète dans laquelle
s'élabore ou fonctionne la représentation »49. Ces éléments fonctionnent comme grille de
décryptage d'une situation, selon l'expression employée par Claude Flament50 qui leur assigne trois
fonctions essentielles :
(1) Une fonction prescriptive : les éléments périphériques indiquent ce qu'il convient de faire (quels
comportements adopter) ou de dire (quelles positions prendre) selon les situations. Ils donnent des
règles qui permettent de « comprendre chacun des aspects d'une situation, de les prévoir, de les
déduire, et de tenir à leur propos des discours et des conduites appropriés »51.
(2) Une fonction de personnalisation des représentations et des conduites qui lui sont rattachées : ils
autorisent une certaine souplesse dans les représentations, qui tient compte de l'appropriation
individuelle et du contexte dans lequel elles s'élaborent. Cette fonction rejoint la fonction de
régulation définie par Abric, selon laquelle les éléments périphériques permettent l'adaptation de la
représentation aux évolutions du contexte. (3) Une fonction de protection du noyau central (ou
fonction de défense chez Abric) : le système périphérique fonctionne comme pare-chocs de la
représentation, d'après l'expression de Flament.
Les recherches de Flament sur les processus d'évolution des représentations sociales, ont mis en
évidence que ce ne sont pas les discours idéologiques qui ont une influence sur leur transformation,
mais les modifications des pratiques sociales.
Deux cas de figure existent :
48 G. Mugny et F. Carugati, 1985, p. 183, cités par J‐C ABRIC, op. cité, p. 16
49J.C Abric, op. cité, p. 25.
50 C. Flament: “ Méthodes d’études des représentations sociales”, sous la direction de J.C Abric, Eres « hors collection », 2003, p 201‐220
51M.L Rouquette et P. Rateau, op. cité, p. 38.
Ce n'est que lorsque le noyau central est modifié que la représentation se transforme.
Le noyau central est très résistant au changement. Les éléments périphériques permettent
l'intégration d'éléments nouveaux dans la représentation, ce qui conduit, à terme, à sa
transformation.
33
- dans le premier cas, les pratiques nouvelles sont en contradiction explicite avec la représentation :
des schèmes étranges apparaissent, la représentation se désintègre brutalement et sa transformation
est radicale, en rupture avec le passé.
- dans le second cas, des pratiques sociales qui étaient rares, deviennent fréquentes. Les éléments
périphériques sont alors activés et modifient progressivement la structure du noyau central. La
représentation a bougé mais sans rupture avec le passé.
II.3.1.3. Le champ des représentations sociales sur le Handicap
Ainsi les représentations sociales induisent chez l’acteur social une manière de penser et
d’interpréter la réalité quotidienne. Nous nous intéresserons dans ce paragraphe à discuter de
l’impact des représentations sociales dans le champ du Handicap. Nous basons notre analyse
présente essentiellement sur le travail de M. Mercier, docteur en psychologie, impliqué dans le
champ du handicap et en particulier sur son travail sur les représentations sociales du handicap et de
la mise au travail des personnes en situation de handicap.52
Le « Handicap » semble porteur de contradictions dans les représentations qu’il véhicule. Il faudrait
pouvoir analyser très précisément les éléments constitutifs de cette représentation pour pouvoir en
faire ressortir ceux qui sont des éléments périphériques et ceux qui appartiennent au noyau central,
comme vu plus haut. Si l’on se réfère aux représentations sociales liées à la mise au travail de
personnes en situation de handicap, 3 facteurs semblent déterminer le noyau central :
- La nature de l’objet présenté,
- La relation que le sujet entretien avec l’objet,
- Et le système de valeurs et de normes sociales ancré dans l’environnement idéologique et
culturel du groupe.
Ces trois facteurs peuvent engendrés des contradictions dans les représentations sociales suivant
leurs éléments constitutifs. Ainsi, les représentations sociales dans le champ du Handicap sont
particulièrement sensibles à ces trois facteurs. De plus, en lien direct avec la nature de l’objet
présenté, nous ne faisons pas appel aux mêmes représentations sociales lorsque l’on parle de
« personne handicapée au travail », selon que l’on met l’accent sur le travail ou sur le
« handicap ». Le « handicap » et le « travail » donneront l’un et l’autre une dimension spécifique à
la représentation « personne handicapée au travail », le handicap sous entendant une dimension
normative, tandis que le « travail » une dimension fonctionnelle. Ceci participe ainsi fortement
aux contradictions rencontrées dans le champ des représentations sociales sur le Handicap, ce qui
en fait un champ complexe d’étude et de transformation. Pour ce qui concerne le « handicap »
donnera une dimension normative du noyau central de la représentation en faisant apparaitre des
52 M Mercier, G. Bazier: “les représentations sociales du handicap et de la mise au travail des personnes handicapées », dans « manuel des
psychologies des handicaps, sémiologie et principes de re‐médiation » , sous la direction de J.A Rondal, édition Margada, 2001, chapitre 13.
34
éléments en termes de dignité humaine, de respect de la différence, d’intégration et de
participation sociale mais aussi d’enfant à protéger, de dépendance qui nécessite de l’aide, d’un
manque à combler, d’un reste d’autonomie à sauvegarder…
II.3.1.4. Réalités des représentations sociales sur le Handicap
Selon J.S Morvan53, 5 catégories d’images sous entendent les représentations des personnes en
situation de handicap. Nous les avons synthétisés et vous les proposons en annexe 2. Ces cinq
catégories sont :
- Images sémiologiques
- Images figure porteuse
- Images secondaires
- Images affectives
- Images relationnelles
Comme nous le voyons bien dans le schéma, les images liées au Handicap sont globalement
négatives. Les images de désavantages, inadaptation, crainte, malaise, prédominent : elles sont
prégnantes pour les personnes ayant une déficience mentale et sont un peu compensées par le désir
de vivre et d’être autonome attribué à la personne ayant une déficience physique.
Ces images se regroupent et s’articulent pour former des représentations sociales, elles mêmes liées
à nos modes culturels, nos idéologies et nos connaissances scientifiques du Handicap (cf le 3eme
facteur présenté plus haut).
Ainsi, J.S Morvan peut mettre en avant 5 types de représentations sociales du Handicap :
Des représentations qui sous tendent et sont sous tendues par des concepts qui classifient les
handicaps ;
Des représentations qui sont sources d’exclusions ; de rejet, de refus des différences ;
Des représentations qui ramènent le handicap à des prothèses techniques, humaines, physique ou
institutionnelles
Des représentations qui réduisent le handicap à des affects de souffrance
Des représentations qui assimilent la personne ayant une déficience à un enfant
La combinaison de ces différentes représentations génère des images complexes de la personne
ayant une déficience :
53 J.C Morvan: Représentations des situations de handicaps et d'inadaptations : Itinéraire d’un concept et d'un objet de recherche », dans
“Représentations et handicap : vers une classification des concepts et des méthodes », CNTRHI, 1990, p77‐98
Le « handicapé » est enfant, classé, prothèsé, rejeté, institutionnalisé, souffrant.( M. Mercier – 2001)
35
II.3.1.5. Poids des représentations sociales du Handicap dans l’Entreprise
Il est un fait aujourd’hui, reconnu par toutes les associations et acteurs travaillant dans le champ du
handicap, que les compensations techniques ou aménagements de postes ne garantissent pas, à eux
seuls, une mise à l’emploi de travailleurs handicapés. Bien qu’un nombre important d’expériences
réussies montrent que le Handicap n’est pas insurmontable pour une insertion professionnelle, la
pratique nous conduit à dire que l’insertion professionnelle dans le milieu de travail ordinaire reste
très difficile.
A compétences égales et pour un même poste de travail, M. Mercier rappelle qu’en 2001 le choix
se portait toujours prioritairement sur une personne « valide » plutôt que sur une personne en
situation de handicap. L’employabilité d’une personne en situation de handicap apparait comme
dépendant d’une série de facteurs objectifs (l’accessibilité, la perte de rendement, le manque
d’expérience professionnelle ou de formation…) et de facteurs plus subjectifs (l’image de la
personne, les attitudes discriminatoires à son égard, la crainte du handicap, la méconnaissance des
compétences…).
D’après M. Mercier54,
M. Mercier constate, et nous le confirmons par notre expérience professionnelle, que, même si les
employeurs se disent prêts à engager des personnes en situation de handicap, ceci reste trop souvent
au niveau du discours. Dans la pratique, leurs attitudes et leurs comportements mettent en place des
freins et des obstacles à la mise au travail réelle. Il y a contradiction entre leurs discours, leurs
attitudes et leurs actions. Ils font appel à un jugement de valeur et à des jugements évaluatifs pour
justifier le non engagement de personnes en situation de handicap. Selon M. Mercier, ces jugements
se fondent sur des représentations sociales qui interprètent le travail des personnes handicapées. Les
employeurs véhiculent ainsi des stéréotypes et des stigmatisations largement répandues dans note
société à propos du handicap et de la mise au travail des personnes handicapées. Pour eux le
handicap est synonyme de manques, d’incapacités, de désavantages, de dépendances etc..
Nous n’allons pas ici plus loin dans le détail de ces représentations véhiculées en entreprise puisque
nous faisons le choix de nous intéresser maintenant aux stéréotypes. En effet, bien que les
54 M. Mercier, id, p 525
Force nous est de constater que les représentations des employeurs sont liées à l’objet même de
la mise au travail de la personne handicapée, aux relations qu’ils entretiennent avec l’objet, aux
stéréotypes culturels et idéologiques véhiculés par les entreprises.
36
représentations sociales soient le port d’attache des stéréotypes, c’est bien ceux-ci, comme l’a
souligné M. Mercier qui constituent les véritables freins et qui entravent l’insertion professionnelle
de travailleurs handicapés, du fait de leur existence auprès des décideurs et salariés et de leur
acceptation et reproduction par les travailleurs handicapés eux même.
Enfin, une étude, dont nous parlerons plus bas, a pu mettre en avant, en 2010, les grandes
caractéristiques des représentations sociales liées au handicap.
Dans cette étude55 , les chercheurs ont demandé à 400 managers de citer spontanément tous les mots
qui leur venait à l’esprit concernant le handicap, selon la méthode de l’évocation libre et de leur
attribuer une valence (positif, négative ou neutre) L’étude a ainsi pu disposer de 2975 évocations,
qui ont été réparties en 3 catégories :
- Evocations positives : 30%
- Evocation neutres : 21,1%
- Evocations négatives : 48,9%
Cette étude a donc aussi confirmé les premières recherches sur le sujet de M. Mercier, à savoir que
la représentation sociale du handicap est majoritairement négative. L’étude citée souligne que cette
représentation sociale négative du handicap semble assez homogène, quelque soit le contexte
professionnel dans lequel il est étudié.
II.3.2. STEREOTYPES ET ATTITUDES
II.3.2.1. Généralités
Le terme « stéréotype » provient de l'art de l'imprimerie. Il vient du grec stereos, solide, et de tupos,
empreinte; un stéréotype est par suite une plaque d'imprimerie coulée dans un moule. Comme cette
plaque est en métal, il est difficile de la changer lorsqu'elle est moulée. Chaque fois qu'elle imprime,
elle produit la même impression, la même image. L'usage quotidien du terme a retenu les éléments
essentiels de cette définition puisqu'il fait apparaître l'idée d'une répétition, d'une duplication du
phénomène toujours identique à lui-même. Ainsi, le dictionnaire anglais d'Oxford définit le
stéréotype comme :
Le terme est introduit dans le domaine des sciences sociales en 1922 par W. Lippmann dans
l'ouvrage « L’Opinion publique »56. Pour Lippman le stéréotype est une sorte de «carte du monde»
qui permet de s’orienter dans la réalité. Étant trop difficile de saisir la réalité dans sa complexité, on
55 “Les stéréotypes sur les personnes handicapées – comprendre et agir dans l’entreprise », IMS entreprendre pour la cité, 2010.
56 W.Lippman : « Public opinion », New york, 1922
Le stéréotype est un élément/effet qui rend les choses inchangeables, leur impriment une
régularité monotone fixe dans tous les détails, les formalisent... .
37
en crée des représentations simplifiées. La relation à la réalité est donc immédiate, médiatisée par
ces représentations. C'est à elles que l'on réagit et par elles que l'on voit le monde. Lippman peut
ainsi affirmer que "la plupart du temps, nous ne voyons pas d’abord pour ensuite définir, nous
définissons d’abord pour voir ensuite."
Mais précisons tout de suite que l’hétérogénéité de l’emploi et la diversité des domaines rendent la
définition du concept de « stéréotype » problématique à plus d’un titre : d’abord, il y a le vague de
son contenu qui, selon Charles Grivel (1998), rend inutile de « rechercher [sa] définition passe-
partout ». Rien qu’à voir le nombre de mots ou expressions attachés à définir ce concept (premier
cercle du schéma) ainsi que tous les termes qui entretiennent avec lui des rapports d’affinité,
d’inclusion ou même parfois de synonymie (deuxième cercle du schéma), on comprend la
complexité d’une harmonisation de définition !
Figure 4 : Stéréotype et autres mots associés, d’après différents auteurs (Putnam (1975), Barthes (1975), Amossy (1998) ou encore Fradin…) – A. Relandeau
Si nous tentions de synthétiser les nombreux débats existants sur ce concept, nous dirions qu’à peu
près la moitié des auteurs définissent le stéréotype comme une « mauvaise » généralisation, une «
mauvaise » catégorie. Tandis que l'autre moitié n'inclut pas de jugement de valeur dans la définition
du terme.
Nous pouvons donc opposer deux grands courants :
Le premier courant considère que les stéréotypes sont des produits d’un processus déficient de la
pensée selon 4 raisons sur lesquelles mêmes les défenseurs de ce courant ne sont pas forcement
d’accord. En synthèse, les stéréotypes sont, pour eux, des produits d’un processus déficient de la
pensée car ils sont incorrectement appris, parce qu’ils sont des sur-généralisations, pacque qu’ils ne
Cliché
Poncif
Formules
banales
Lieu
communIdée reçue
Langue de bois
Prototype
Etc..
38
coïncident pas avec les faits qu’ils décrivent et enfin parce qu’ils sont rigides. Le second courant
défend l’idée que les stéréotypes ne sont pas des produits déficients de la pensée car ils sont plutôt
des catégories/concepts, des généralisations, et sont plutôt des inférences fondées sur des théories
implicites de la personnalité.
En définitive, la définition du stéréotype semble poser le problème des caractéristiques et de la
fonction (ou des fonctions) du stéréotype.
Figure 5 : Caractéristiques et fonctions du stéréotype – A. Relandeau
2 remarques complémentaires qui ont leur importance pour notre sujet d’étude :
Les stéréotypes fonctionnent comme une grille de lecture de la réalité. Une fois que l’on a
stéréotypé un individu on lira tous ses comportements en les rapportant à cette classification : les
informations ambiguës seront interprétées de façon à s’adapter à la grille, et un même
comportement sera lu différemment selon l’appartenance de la personne à tel ou tel groupe.
Les stéréotypes se constituent à partir des informations disponibles sur un groupe. Quand les
informations sont rares, la stéréotypisation57 et l’homogénéité attribuée au groupe seront plus
importantes (en cela le choix du type de personnes dont on parle ou pas, dans les médias est le fruit
et le ciment des stéréotypes).
57 Processus de création et de développement d’un stéréotype
Le stéréotype
39
II.3.2.2. Effets de l’activation des stéréotypes sur les personnes
Sur le comportement des gens face à l’objet de stéréotypisation
La discrimination (fait de distinguer et de traiter différemment – et le plus souvent plus mal –
quelqu’un ou un groupe par rapport au reste de la collectivité ou d’une autre personne58) s’appuie
sur les stéréotypes. Ce constat peut s’illustrer par :
Autrement dit, la représentation que chaque groupe se fait des autres groupes se manifeste par deux
tendances :
- Dans la plupart de cas, chaque groupe a tendance à se voir sous un œil plus favorable
que les autres groupes
- Les personnes adaptent leurs représentations des autres groupes en fonction des
relations qu’ils entretiennent ou d’une façon qui permet de justifier le sort qu’ils subissent.
Dans cette logique, toute personne perçue comme appartenant à un groupe stéréotypé sera plus
« jugeable » qu’une autre, aux yeux des Autres. Dés lors, si des observateurs ont a juger le
comportement réalisé par la personne stéréotypée, leur jugement sera alors plus accentué. Cette
hypothèse a déjà été testée dans diverses études (Schadron et Yzerbyt 1993). Nous retiendrons les
résultats de deux d’entres elles59 :
Des sujet sont plus surs de leur jugement envers
une personne si celle-ci est présenté comme
membre d’une catégorie sociale plutôt que si
elle ne l’est pas, bien que cette information
catégorielle n’ait en fait aucune valeur
informative
Des sujets estiment qu’il est plus facile de juger
la personnalité d’une personne lorsque celle-ci
leur est présentée comme faisant partie d’un
groupe que lorsqu’elle est définie faisant partie
d’un agrégat
Ces résultats ne démontrent pas forcement que le jugement, bien qu’accentué, soit plus négatif. Ce
jugement dépend du type de stéréotypes attachés au groupe ciblé. Or, comme nous avons pu le
démontrer plus haut, les stéréotypes s’appuient plutôt sur des critères négatifs. Nous pouvons donc
58 Définition du dictionnaire Larousse
59 d’après le travail et l’article réalisé par G. Schadron : « De la naissance des stéréotypes à leur internalisation », posté sur le site « préjugés et
stéréotypes », 2012.
Nous valons mieux qu’eux. D’ailleurs si nous nous comportons ainsi avec Eux, c’est que Nous ne
pouvons pas faire autrement, étant donné ce qu’Ils sont. Et puis, Ils sont ce qu’ils méritent !
40
supposer qu’une personne appartenant à un groupe cible stéréotypé sera plus facilement et plus
durement jugée, à partir des stéréotypes véhiculés sur « son » groupe. Les stéréotypes vont ainsi
guider nos comportements et relations à l’Autre stéréotypé.
Une autre recherche étonnante menée par Bargh, Chen et Burrows en 1996 a mit en évidence des
effets non conscients des stéréotypes sur les personnes chez qui s’activent ceux-ci. En effet, ils ont
pu démontrer par exemple qu’un agrégat de personnes soumises à une activation non consciente de
stéréotypes liés à la personne âgée (ex : gris, têtu, vieux, lent…) avaient elles même adopté
certaines des caractéristiques de ces stéréotypes. A la sortie du test, les groupes soumis aux
stéréotypes de la personne âgée marchaient moins vite que l’autre groupe de comparaison.
L’activation non consciente de stéréotypes aurait donc aussi pour effet de modifier le comportement
des personnes chez qui le stéréotype s’est activé, pour le faire correspondre aux stéréotypes activés.
Donc que ce soit en relation à l’Autre stéréotypé ou sur nos propres comportements, les stéréotypes
joue un rôle important dans notre vie quotidienne. Cela ne veut cependant pas dire que nous ne
sommes que dépendants de ceux-ci et dirigés par eux. Ces effets ne sont pas systématiques et
peuvent être limités voir disparaitre lorsque les personnes ont une conscience de soi élevée (moins
influençable ou dans la comparaison avec l’autre, lorsque la tâche sur laquelle porte la mesure n’a
aucun lien avec le stéréotype) ou lorsque les personnes sont informés, c'est-à-dire lorsqu’elles sont
conscientes des effets des stéréotypes sur leurs comportements.
Rattaché au champ du Handicap en entreprise, ces éléments nous pousseraient à dire que plus les
salariés se sentent reconnus dans leur travail et ont un certain niveau de connaissance du champ du
Handicap et des stéréotypes afférents, moins leurs comportements auront tendance à discriminer les
travailleurs handicapés, ou tout autre groupe stéréotypé.
Sur le comportement des groupes cible de la stéréotypisation
Mais les stéréotypes n’ont pas qu’un effet sur les personnes chez qui s’active ces stéréotypes. Il
existe aussi un effet boomerang pour les personnes stéréotypées. Celles-ci, sous la pression des
stéréotypes qu’elles connaissent et subissent, ont une tendance à s’y conformer, plutôt qu’a les
combattre. Ce sont C. Steele et J. Aronson (chercheurs américains) qui ont mis à jour ce phénomène
en 199560. Ils l’ont appelé « la menace du stéréotype ». Ils l’ont découvert lorsqu’ils s’intéressaient
à comprendre les échecs scolaires de minorités et notamment au rôle que pourraient avoir les
stéréotypes dans ces échecs. « Leur idée principale était que le fait d’être la cible d’un stéréotype
négatif, et de potentiellement être jugé en fonction de ce stéréotype induirait chez les participants
60 D’autres avant, tel que Rosenthal, avaient déjà souligné ce phénomène. Il parlait alors d’effet pygmalion
41
[des tests expérimentaux] une pression psychologique supplémentaire. »61 C’est cette pression qui
viendrait interférer avec les performances des personnes stéréotypées. Les résultats des tests menés
donnent raison à cette hypothèse. « C’est cette pression psychologique particulière, relative à
l’existence d’un stéréotype concernant les performances d’une catégorie sociale particulière, et
influant sur les performances des représentants de cette catégorie, qui est nommée « menace du
stéréotype »62. Cette menace se caractérise par la peur de confirmer, par ses performances, le
stéréotype négatif de son groupe. Et donc cette peur viendrait perturber les performances de la
personne.
Ces études portaient entre autre sur les stéréotypes liés aux minorités noires aux Etats Unis. Cela ne
prouve pas que cette menace du stéréotype existe pour tous les autres groupes stéréotypés mais nous
pouvons tout de même faire l’hypothèse que si. Il est facile de comprendre l’importance et l’impact
que pourrait avoir un tel phénomène sur les travailleurs handicapés. En effet, aujourd’hui il n’y pas
d’espace plus soumis à la pression et à l’évaluation permanente que le milieu professionnel. Les
travailleurs handicapés, se sachant stéréotypés pourraient subir cette menace du stéréotype et donc
le confirmer par leur baisse de performance. Nous faisons le pari que c‘est une des raisons qui
explique le stress et la perte de confiance en soi que peuvent développer les travailleurs handicapés.
Certains d’entres eux préfèrent finalement soit cacher leur handicap pour ne pas être assimilé au
groupe stéréotypé des travailleurs handicapés, soit faire le choix de fuir - consciemment ou
inconsciemment - ce milieu professionnel.
Il nous parait donc important d’intégrer les travailleurs handicapés eux même dans tout travail sur
les stéréotypes, pour tenter de réduire les effets néfastes de ceux-ci sur eux.
II.3.2.3. Les stéréotypes sur les PSH en entreprise
Rappelons que la représentation sociale correspond à la perception d’un objet social (la retraire par
exemple) alors que le stéréotype correspond à la perception que nous avons d’un groupe réel de
personnes (les personnes retraités dans notre exemple). Les fonctionnements mentaux qui leur sont
associés ne sont pas forcement les mêmes et, de fait, les contenus peuvent diverger. Il est possible
d’avoir une représentation sociale positive de la retraite (temps libre, disponibilité, vacances
perpétuelles…) et avoir des stéréotypes négatifs des personnes retraitées (inutiles, apathiques,
vieux…).
Etrangement, la question des stéréotypes sur le Handicap en Entreprise est un sujet d’étude assez
jeune. Bien que de nombreux professionnels du handicap soient en mesure, au travers de leurs
61 F. Gabarrot : « la menace du stéréotype », article posté sur le site de « préjugés et stéréotypes »,
62 id
42
expériences professionnelles, d’identifier les grandes lignes de ces stéréotypes et de tenter de les
combattre par les sessions de sensibilisations et formations, aucun chercheur en France ne s’y était
scientifiquement intéressé avant 2010.
Nous présenterons plus bas la seule étude sur le sujet, ses objectifs, sa méthodologie et le détail de
ses résultats. Mais nous souhaitions au moins ici présenter les grandes caractéristiques des
stéréotypes sur le handicap identifiés lors de cette première étude sur le sujet63.
5 grandes catégories d’adjectifs ont pu être construites à partir des 1551 adjectifs proposés par les
répondants sur la question des stéréotypes.
- Caractéristiques positives (courageuses, volontaires, fortes, sympathiques….) : 33,3%
- Les personnes handicapées vu comme victimes de la société (isolée, discriminée, mises
à l’écart….) : 25,1%
- Caractéristiques négatives (dépendantes, fragiles, lentes, inadaptées, faibles…) : 23,9%
- Les personnes handicapées vues comme les autres ( comme tout le monde, des
personnes normales…) : 6,8%
- Les personnes handicapées vues différentes (différentes, à part, …) : 4,1%
Ainsi, à la différence de la représentation sociale, le stéréotype apparaît comme plutôt positif. La
catégorie la plus représentée concerne les qualités des personnes handicapées (33,3%). Cette
perception positive recouvre deux axes essentiels. D’une part, celui du courage et de la volonté. On
reconnaît aux personnes handicapées une force leur permettant de dépasser les contraintes
personnelles et fonctionnelles liées au handicap (mobilité, adaptation…) et les contraintes sociales,
réelles ou symboliques (accessibilité, regard des autres…). D’autre part, celui de la « chaleur
humaine ». Les personnes handicapées sont perçues comme sympathiques, sociables, désireuses de
construire des relations sociales.
63 D’après « Les stéréotypes sur les personnes handicapées – comprendre et agir en entreprise », sous la coordination de l’IMS entreprendre pour
la cité, 2010
Elles sont définies comme courageuses, volontaires, déterminées et sympathiques. Mais elles
sont aussi identifiés comme lentes et fragiles, voir tristes et perturbées.
Les stéréotypes positifs portent sur une dimension affective, non reliée à l’emploi. Alors que
ceux négatifs, lentes et fragiles, donc moins productifs, renvoient à une inadaptabilité, une
difficulté voir une incompétence à occuper un emploi.
43
La deuxième catégorie renvoie également à un contenu assez positif, malgré sa dénomination
(25,1% des évocations). Elle concerne tout ce qui touche à leur victimisation. En disant que les
personnes handicapées sont discriminées, exclues, mises à l’écart, c’est le procès de la société en
général qui est fait ici, et cela renforce le degré d’empathie pour le groupe.
Avec près de 24% des évocations, on retrouve la catégorie des défauts et caractéristiques négatives
associés aux personnes handicapées. Ces évocations sont très homogènes et concernent quasiment
toutes la question de la performance. La personne handicapée est perçue comme lente, inadaptée et
fragile, ce qui pose question quant à leur intégration dans un environnement professionnel.
II.3.2.4. Attitudes
Historiquement, l'étude des stéréotypes était liée à la notion d'attitude. L'attitude est une position du
corps qui exprime un sentiment et prépare en principe à une action. Exemple : une attitude
conquérante traduit le désir de conquête et peut se transformer en acte visant à la conquête.
L'attitude désigne donc une disposition psychique ou affective envers un but (objet, individu ou
groupe 'individus). Ainsi peut-on parler d'attitude bienveillante ou d'attitude hostile à l'égard de...
L'aboutissement à un acte de bienveillance ou d'hostilité se traduit par un ou plusieurs
comportements du sujet. De fait, l'attitude est antérieure au comportement, autrement dit elle en est
inférée. L'attitude s'exprime par des actes mais aussi par des croyances (qui constituent l'armature
cognitive des attitudes), par des préjugés et par des stéréotypes. Pareillement à la distinction entre
attitude et comportement, une différenciation peut être opérée au sein du couple préjugé et
stéréotype. On peut dire qu'un préjugé est une attitude favorable ou défavorable, positive ou
négative vis-à-vis d'une personne (ou groupe de personnes), d'un objet ou d'un concept en dehors de
toute expérience personnelle. Un stéréotype est, comme nous l’avons vu plus haut, un jugement
qualitatif vis-à-vis d'une personne (ou groupe de personnes), d'un objet ou d'un concept toujours en
dehors d'une expérience personnelle. A l'examen conceptuel, le préjugé semble se confondre avec
l'attitude. Le stéréotype en découle et le manifeste. Par exemple, à propos du « Noir » (dans un
grand nombre de situations), le préjugé c'est la haine du « Noir », le mépris du « Noir ». Les
stéréotypes en conséquence sont : le « Noir » est malpropre, paresseux, malhonnête, incapable,
dangereux...
II.3.3. LES BIAIS DECISIONNELS
Comme nous l’avons vu dans la figure 5, les représentations alimentent les stéréotypes qui
participent à développer des préjugés, qui induisent des comportements différents. Et c’est ce
processus que les chercheurs appellent « le biais décisionnel », effets de l’émotion sur la cognition.
44
Nous avons largement détaillé les notions de représentation et stéréotypes, cœur de notre recherche
et pour nous cœur du biais décisionnel. Nous ne présentons ici que très succinctement les concepts
de préjugés et de comportements, les 2 autres éléments participant au biais décisionnel.
L’impact principal des stéréotypes et de la généralisation réside dans la construction de préjugés, et
repose en grande partie sur la notion de réification, qui consiste à faire d’une abstraction un objet
concret, à appréhender un concept comme une réalité tangible. « Le terme « préjugés » signifie
« Juger avant », c'est-à-dire « formuler un jugement préalable définitif, sur une personne ou un
groupe de personnes, sans posséder de connaissances suffisantes pour évaluer la situation. Il est
défini comme une opinion hâtive et préconçue souvent imposée par le milieu, l’époque, l’éducation,
ou due à la généralisation d’une expérience personnelle ou d’un cas particulier. »64
Le comportement est l’ensemble des actions et réaction d’un individu dans une situation donnée.
Conduite d'un sujet, inscrite dans un contexte environnemental et temporel. Tout comportement a
une motivation visant la satisfaction d'une tension. Le comportement peut s'orienter vers la
recherche d'un objet ou la mise en place d'une certaine situation. Tous les comportements sont
adaptatifs. La qualité de l'adaptation est fonction des croyances et capacités physiques,
économiques et intellectuelles du sujet, ainsi que de son expérience.
Les préjugés conditionnent des comportements qui, au final, induisent ce que l’on nomme des biais
décisionnels, c'est-à-dire que les comportements sont biaisés (attitudes inadéquates) par des
croyances non objectivées, à savoir les stéréotypes.
II.4. SENSIBILISATION : DE QUOI PARLE T ON ?
II.4.1. ACTION DE SENSIBILISATION ?
Dans le cadre de notre recherche, nous avons vu que deux types d’actions étaient proposées pour le
développement d’une culture d’entreprise autour du handicap en entreprise : des actions de
formation et des actions de sensibilisation. La loi de 2005 s’y réfère ainsi que l’Agefiph et autres
acteurs du Handicap.
Mais pourquoi deux actions différenciées ?
L’intitulé « actions de formation dans le champ du handicap » renvoie à des pratiques bien
spécifiques et il en va de même pour les actions de sensibilisation.
La différence entre actions de formation et action de sensibilisation se situe certainement dans les
méthodologies mais surtout dans les objectifs distincts de ces actions. Entre professionnels du
64 G. Tisserant, id, p35
45
Handicap, nous utilisons les sessions de sensibilisation en entreprise pour travailler sur «un
changement de regard sur le handicap ». Nous n’appelons jamais ces actions des actions de
formation, car nous n’avons pas pour objectif de développer des compétences, objectif principal de
toute formation. Et même si nous pensons qu’une action de sensibilisation peut participer à
développer des compétences, à terme, nous pensons qu’elle n’est pas suffisante. Nous reviendrons
sur cette notion de compétence un peu plus loin.
Le terme « sensibilisation » est l’action de « sensibiliser ». Et « être sensibilisé » signifie :
Ainsi, si nous suivons cette définition, et la replaçons dans le contexte du handicap en entreprise,
cela pourrait donner :
Cette proposition n’est qu’un jeu de mots bien sur. Il ne s’agit pas, lors d’une session de
sensibilisation, de simplement mettre en contact salariés « valides » et « salariés handicapés » mais
il est certain que cela fait parti d’une des méthodes de sensibilisation possible et nous dirions, à titre
personnel, nécessaire à la réussite d’une sensibilisation. En tout cas, il nous semble important de
préciser qu’une action de sensibilisation n’a pas pour objectif, nous semble t il, de développer des
compétences en soi mais bien plutôt des capacités de réactions.
Sensibiliser, c'est aussi le fait de susciter l'intérêt d'une personne, d'un groupe, ou d'une population.
C'est rendre sensible ou éveiller la sensibilité de la personne, du groupe ou de la population, pour
faire réagir voire même provoquer un changement. Exemple: nous voulons sensibiliser des salariés
d’une entreprise aux problèmes rencontrés par des travailleurs handicapés. Nous voulons donc
toucher la sensibilité de cette population afin qu'elle réagisse, qu'elle change, voire même qu'elle
participe à l'amélioration des problèmes rencontrés par les personnes handicapées...
Cette définition induit plusieurs réflexions:
1. D'abord il faut connaître cette population pour éveiller sa sensibilité.
2. Ensuite, il faut que nous sachions communiquer avec cette population.
Etre sensibilisé : Etat d’un organisme, qui après un premier contact avec un antigène, acquiert
à son égard des capacités de réaction (dictionnaire Larousse)
Etre sensibilisé : Etat d’un salarié, qui après un premier contact avec un travailleur handicapé,
acquiert à son égard des capacités de réaction.
46
3. Enfin, il faut identifier sur quoi précisément nous voulons que cette population réagisse, ou en
quoi voulons-nous qu'elle change.
Ainsi, nous pensons que sensibiliser c'est bien plus qu'informer. L'information vise simplement à
transmettre un message ou des signes. Si l'information est un système de signes, la sensibilisation
qui inclut la relation avec autrui leur donne du sens. Et c'est essentiellement l'estime, la confiance, la
valorisation réciproques qui facilitent l'intégration des informations et apporte tout son sens à la
sensibilisation.
Une action de sensibilisation a donc comme objectif de « faire changer le regard », « de
sensibiliser » le public au thème concerné. C’est un type d’action qui s’est fortement développé
autour des questions de santé publique et plus généralement d’éducation citoyenne, et en particulier
dans le monde de la solidarité internationale. Ainsi nous pouvons trouver de nombreux exemples de
guides et d’actions sur des campagnes de sensibilisation de lutte contre le VIH, sur les risques de
mines, sur les discriminations, et donc aussi sur le Handicap. En France, ces actions de
sensibilisation sur le thème du Handicap se sont surtout développées dans les écoles, auprès de
jeunes publics et dans les entreprises auprès des salariés et possibles collaborateurs de travailleurs
handicapés.
« Faire changer le regard » passe par un travail sur les stéréotypes, comme nous l’avons vu plus
haut.
Et transformer les stéréotypes suppose de travailler sur les connaissances, les savoirs et sur la
« mise en contact » des salariés avec l’objet des stéréotypes, avec l’objectif de développer des
« capacités à réagir ».
Nous atteignons ici une des limites de notre recherche car nous n’avons pu aller plus loin dans la
recherche d’une définition et approche conceptuelle de l’action de sensibilisation, la littérature sur
le sujet se centrant essentiellement sur une approche pratique de cette action, et non conceptuelle.
Nous ne pouvons donc aller plus loin dans notre démarche scientifique de distinction entre action de
formation et action de sensibilisation.
Et cela rend complexe notre approche de la compétence dans le cadre d’une action de
sensibilisation.
Nous faisons donc le choix de présenter les notions de savoirs et connaissances, participant
indéniablement à la transformation de stéréotypes et d’introduire dans un second temps la complexe
47
question de la différence entre « aptitudes », « capacité à réagir » et « compétenceS », comme
objectif d’une session de sensibilisation.
II.4.2. SENSIBILISATION : PARLE T ON DE SAVOIRS ET CONNAISSANCES ?
Après avoir défini les représentations sociales, stéréotypes et attitudes et avoir compris comment ils
fonctionnaient, nous cherchons à comprendre comment les transformer. Quels sont les éléments que
nous devons travailler pour que les stéréotypes ne soient plus un frein à l’insertion professionnelle
de travailleurs handicapés ?
Comme nous le rappelle T. Ardouin65, il n’existe pas de compétence en soi, celle-ci s’inscrit dans
un certain continuum, de la théorie à la pratique, du savoir à la performance :
Théorique
Savoirs Connaissances Capacités Compétences Performance
Pratique
II.4.2.1. Connaissances
Les connaissances, leur nature et leur variété, la façon dont elles sont acquises, leur processus
d'acquisition, leur valeur, et leur rôle dans les sociétés humaines, sont étudiés par une diversité de
disciplines. La connaissance est, d'une part, l'état de celui qui connaît ou sait quelque chose, et
d'autre part, les choses qui sont sues ou connues. Par extension, on appelle aussi connaissance tout
ce qui est tenu pour su ou connu par un individu ou une société donné.
P. Zarifian s’est aussi intéressé à cette notion. Il avance qu’« une connaissance ne s'applique pas,
elle s'appelle, elle se mobilise intellectuellement et affectivement dans l'exercice de la
compétence. « Elle s'appelle, elle est interpellée ». Pour lui « la connaissance ressort du langage
démonstratif et du développement de la signification sociale (et non du "sens" subjectif) ».Ainsi, «
du point de vue de la signification, nous considérons toujours les éléments d'une proposition
énonçant une connaissance comme "signifiant" des implications de concepts qui peuvent renvoyer à
d'autres propositions, capables de servir de prémisses à la première»66. Le champ de la
connaissance nous parait donc être essentiel a interpeller dans la réflexion sur les représentations
sociales du ‘’Handicap’’, et donc dans le cadre de notre recherche.
II.4.2.2. Savoirs
Le Dictionnaire actuel de l’éducation (Legendre, 1993) définit l’information comme la matière
première qui consiste en une collecte de données. Les données retenues composent les 65 T. Ardouin : « de la compétence individuelle aux capacités organisationnelles : regard croisés France Quebec »,colloque ACFAS, 2008
66 idem
48
connaissances qui une fois organisées et approfondies constituent un savoir relatif à un domaine
d’activités, à un objet, à une personne, etc. En ce sens, Jean Pierre Astolfi67conceptualise le savoir
comme :
Figure 6 : Modèle de construction du savoir de J.P Astolfi (1992)
L’ensemble des connaissances est classifié pour être intégré à l’ensemble des choses sues. Les
connaissances sont donc unifiées dans le savoir. En opposition à l’information, qui est extérieure à
l’individu, et à la connaissance, qui est liée à l’histoire de chacun, le savoir résulte d’un travail
d’objectivation, d’un processus de construction individuelle. La résultante de l’information est
l’accroissement des connaissances, qui résulte en l’augmentation du savoir.
Comme nous le rappelle T. Ardouin, les savoirs sont l’ensemble des concepts et théories connus
concernant un objet. S’ils sont visibles, les savoirs ne sont pas pour autant directement exploitables
dans l’action ni pour l’enseignement. Ce sont les connaissances qui permettent cette transposition,
c'est-à-dire des « savoirs utilisables ».
J.P Astolfi nous rappelle que alors que la connaissance « relève de la subjectivité » où « chaque
individu construit son propre système explicatif du monde », le savoir, lui, « relève de
l’objectivation […] il est toujours le fruit d’un processus de construction passant par l’élaboration
couteuse d’un cadre théorique ou d’un modèle formalisé ».
Il s’agit donc bien, pour transformer un stéréotype de travailler à la fois sur les connaissances
(vision du monde subjectivé) et sur les savoirs (vision objectivée).
67 Astolfi J.P. : L'école pour apprendre. Paris, ESF, 1992
Le savoir est un ensemble articulé et organisé de connaissances
49
II.4.3. OU PARLE T ON PLUTOT D’« APTITUDES », DE « CAPACITE » ET/OU « COMPETENCES ?
André Guittet68 propose une définition de ces trois éléments, que nous allons présenter et discuter
au regard de la question de sensibilisation.
II.4.3.1. Aptitudes
« Qualités attachées à un individu, elles caractérisent des dispositions naturelles ou acquises.
Utilisées ou non dans un poste, elles sont constituées d’aptitudes physiques (aptitudes sensorielles
ou motrices, comme la dextérité manuelle ou la résistance physique), d’aptitudes intellectuelles
(intelligence abstraite, concrète, créative…) et d’aptitudes relationnelles (autonomie, stabilité
émotionnelle…). »
Si les aptitudes sont questionnées lors d’une action de sensibilisation, elles le sont essentiellement
du coté des aptitudes relationnelles. De « bonnes » aptitudes relationnelles de la part des
participants sont des facteurs de réussite d’une action de sensibilisation mais ne sont en aucune
façon les éléments qui peuvent être transformé lors d’une session de sensibilisation.
II.4.3.2. Capacité
« Elles sont mise en œuvre dans les savoirs et les savoirs faire maitrisés : « être capable de ». Les
aptitudes dépendent des capacités mais sont plus particulièrement le résultat des acquis des
apprentissages, de la formation. Les capacités ne sont pas directement observables, elles se
définissent à partir des opérations mentales nécessaires pour maitriser un savoir, un savoir faire :
informer, rédiger, argumenter, négocier. […] les capacités définissent le niveau de qualification de
la personne »
Lors d’une action de sensibilisation, il n’est pas encore question de qualification. Les participants à
une action de sensibilisation n’en sorte pas avec un niveau de qualification formalisé. Par contre, il
est bien question de travailler sur le « être capable de », dans des situations particulières
d’interactions professionnelles avec des travailleurs handicapés. Il nous semble donc bien que
l’action de sensibilisation questionne les capacités.
II.4.3.3. CompétenceS ?
De nombreux travaux furent et sont menés sur le concept de « compétence ». Nous ne la traiterons
pas en détail ici. Rappelons simplement quelques approches qui nous semblent intéressantes pour
notre recherche.
68 Guittet. A : « Développer les compétences par une ingénierie de la formation », ESF éditeur ; paris, 1994, 230p
50
Compétence ?
Comme le rappelle André Guittet, une compétence peut demander plusieurs capacités.
« Les compétences représentent la mise en œuvre [effective] de savoirs et de savoirs faire pour la
réalisation d’une tache.la compétence dépend en premier lieu des aptitudes et des capacités mais
elle résulte surtout de l’expérience professionnelle [et de la mise en action de ces capacités].
L’AFNOR donne cette définition de la « compétence » : « [elle] est la mise en œuvre de capacités en situation professionnelle qui permettent d’exercer convenablement une fonction ou une activité »
Cette approche de la « mise en action » de la compétence ne correspond pas vraiment à ce qui se
travaille lors des actions de sensibilisation. Il y a, en effet, peu de « mise en situation »
professionnelle, d’apprentissage concret de gestes, attitudes ou de pratiques professionnelles
permettant de tenir « convenablement » un poste de travail particulier. Les actions de sensibilisation
ne visent pas à trans-former chaque professionnel, mais plutôt à développer un meilleur collectif de
travail.
Compétences collectives ?
Pour Y. Schwartz69, « ce qu’on appelle de façon obscure, la capacité à travailler en équipe suppose
en fait la capacité à mesurer lucidement et son propre profil de compétences et celui de ses
collègues de travail, les manques, les lacunes, les points forts respectifs et à ajuster stratégies et
décisions d’actions à cette approche synthétiques des profils ». Nous ne sommes pas tout à fait
d’accord avec cette définition de la compétence collective, si serait alors de la seule responsabilité
du manager, seul habilité a réellement « ajuster les stratégies ». Or la question du Handicap en
entreprise est affaire de tous, et ne peut se réduire à un ajustement de stratégies ; mêmes si celles-ci
sont nécessaires.
Nous nous sentons plus proche de l’approche de G. Leboterf, pour qui la compétence collective
« n’est pas l’addition de compétences individuelles mais un ensemble qui s’appuie sur « une
élaboration de représentations partagées, une communication efficace, une coopération entre les
membres de l’équipe, et un savoir apprendre collectivement de l’expérience ».
Nous retrouvons ici des éléments qui se travaillent lors d’actions de sensibilisation. En particulier la
question de représentations partagées et de communication efficace. Les actions de sensibilisation
sont sensées faciliter fluidifier les échanges et la communication au sein d’une équipe de travail et
plus globalement dans une organisation, pour que la question du handicap et le travailleur
69 Y. Schwartz : « Les ingrédients de la compétence », EDUCATION PERMANENTE n° 133/1997-4 , p32
51
handicapé ne soit pas exclu des échanges. En cela, une action de sensibilisation participe à
développer des compétences collectives. Mai ces compétences ne sont toujours pas en lien direct
avec des postes de travail. Alors peut-on parler de compétenceS ?
Agir avec compétence ?
Les objectifs d’une action de sensibilisation, au-delà de l’information, nous semble plutôt tourner
vers la question du « comment agir et réagir avec compétence » ? Plutôt que de développer des
compétences professionnelles. Lors des actions de sensibilisation, les compétences professionnelles
ne sont pas questionnées ou peu abordées, si ce n’est pour proposer des jeux de rôles crédibles au
regard des réalités professionnelles des participants. Par contre, l’ensemble des différents modules
d’une action de sensibilisation vont tous avoir pour objectif de questionner le « comment agir et/ou
réagir » dans différentes situations pour respecter et faciliter le travail d’un travailleur handicapé et
de son collectif. Il nous semble donc plus juste de parler d’ « Agir et réagir avec compétence » que
de compétenceS. Mais Agir et réagir à quoi ?
Compétence « douce » ?
Depuis environ quinze ans, plusieurs chercheurs ont souligné l’importance des compétences dites
“douces” dans le domaine du management et de la performance au travail. Ces chercheurs
supposent que la performance au travail n’est pas seulement dépendante de la connaissance et des
compétences directement liées à l’activité de travail mais aussi des habiletés dédiées à la gestion des
émotions intra- et interindividuelles. Ces compétences « douces » ont été principalement théorisées
à travers le concept d’Intelligence Emotionnelle (IE). Salovey et Mayer (1990) ont défini le premier
modèle consistant et précis de l’IE. A partir de ce travail initial, d’autres chercheurs ont développé
de possibles applications dans différents domaines tels que l’éducation, les sciences de gestion, etc.
(i.e., Goleman, 1995 ; Bar-On & Parker, 2000).
Cette approche de la compétence fait écho à ce que nous cherchions à mettre en avant dans les
objectifs des actions de sensibilisation.
Nous ne pouvons aller plus loin dans ce travail sur les concepts de notre recherche, faute de temps
et de moyens. Il serait pourtant très intéressant de poursuivre cette réflexion, en particulier sur une
possible conceptualisation des actions de sensibilisation et des objectifs spécifiques de celles-ci.
Notre analyse, de part notre expérience professionnelle et la recherche effectuée sur le concept de
52
compétence, est que l’action de sensibilisation n’est ni une action d’information « améliorée », ni la
« première étape » d’une action de formation, comme nous l’entendons souvent de la part des
OPCA ou autres professionnels de la formation. L’action de sensibilisation mériterait d’être
reconnue en soit.
Soulignons juste ici nos limites dans cette recherche conceptuelle, peu d’études et recherches
n’ayant été encore réalisé sur ce sujet en sciences de l’éducation.
Nous vous proposons d’entrer maintenant dans la partie plus « action » de notre recherche –action.
Dans le chapitre suivant , nous vous présentons notre terrain d’expérimentation qui nous a amené,
en plus des questionnements déjà posés plus haut, à définir précisément notre problématique et
hypothèses de recherche. Et nous vous ferons part des difficultés et limites rencontrées lors de la
mise en place de notre méthodologie d’enquêtes, limites qu’il faudra prendre en compte lors de
l’analyse de notre enquête.
53
III. NOTRE APPROCHE MÉTHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE
III.1. TERRAIN DE L’EXPERIMENTATION
Comme nous le présentions en introduction de cette recherche, c’est par le biais de notre expérience
professionnelle dans le champ du handicap et plus particulièrement de l’appui techniques à la mise
en œuvre de politiques et projets dit « inclusifs » que nous nous sommes particulièrement intéressée
à la question de l’analyse des besoins dans le champ du Handicap en Entreprises. Dans le cadre de
l’ingénierie de formation, la question de la qualité et de l’adéquation de l’action proposée, en
particulier des actions de sensibilisation, avec les besoins des participants nous interpellait.
Notre projet de stage ainsi que notre projet de mémoire portent donc tous les deux sur cet aspect de
l’ingénierie de formation dans le contexte du Handicap en entreprise.
Nous avons réalisé notre projet de stage au sein de l’association L’ADAPT et notre projet de
recherche avec Air Liquide, entreprise partenaire de L’ADAPT. Notre sujet de stage portait sur la
réalisation d’un outil d’analyse de l’environnement professionnel, que nous avons pu créer, tester et
analyser au sein de L’ADAPT. Nous avons monté notre projet de recherche avec une entreprise
privée, assujettie à l’obligation d’emploi et ayant déjà mis en œuvre un accord Handicap avec
l’Agefiph et pouvant donc être intéressée à questionner les stéréotypes et leurs impact sur l’insertion
professionnelle de travailleurs handicapés. Nous avons envoyé un mailing de proposition de
recherche action auprès d’un grand nombre de partenaires de L’ADAPT. Air Liquide fut la seule à
y répondre favorablement. Nous nous sommes positionnée comme chercheuse soutenue par
L’ADAPT dans ce projet de recherche action. Notre terrain de stage n’a ainsi pas été le même que
notre terrain de recherche mais le sujet (l’analyse des besoins), les approches (les approches
conceptuelles du handicap, l’approche inclusive des outils), voir une partie de la méthodologie (le
choix d’une enquête quantitative, la matrice d’enquête et le logiciel d’analyse..) furent les mêmes.
Nous présenterons donc rapidement ces deux terrains, puis présenterons notre problématique et ses
hypothèses, en lien avec nos premiers questionnements mais surtout avec une étude réalisée en
2010. Etude que nous présenterons bien sur avant d’entrer dans les détails de la méthodologie
choisie, de la mise en œuvre de l’enquête et des limites que nous avons pu observer durant toute
cette phase d’enquête.
54
Figure 7 : organigramme de la direction SEDI – A. Relandeau – rapport de stage 2011
III.1.1. MISSION : L’ADAPT
L’ADAPT fut créée en en 1929 par Mme fauché, jeune femme tuberculeuse voulant développer un
réseau de personnes tuberculeuses pour défendre leurs droits à une insertion sociale et économique,
en particulier par le travail. C’est une association Loi 1901, reconnue d’utilité publique depuis sa
création en 1929. Son objet d’action est l’insertion sociale et professionnelle des personnes en
situation de handicap70.
Nous avons mené notre stage au sein de la direction des « Services aux entreprises, du
développement et de l’innovation », en lien privilégiée avec ma tutrice, directrice de cette direction.
Nous sommes entrée en contact avec l’entreprise Air Liquide à travers le travail de réseautage et
partenariats du chef de projet « Partenariats Entreprises ». Nous avons pu travailler notre projet en
lien avec la responsable formation du même service.
Nous n’entrerons pas dans les détails de notre mission dans le cadre du stage. Disons simplement
que nous avons élaboré un outil d’analyse de l’environnement professionnel, afin d’identifier les
freins environnementaux à l’insertion professionnelle de travailleurs handicapés. Lors de la
construction de cet outil – un questionnaire – nous avions imaginé d’intégrer une partie sur les
facteurs environnementaux humains, à savoir les représentation sociales et stéréotypes, qui
influencent les relations et donc l’environnement social de l’entreprise. Mais il nous est vite apparu
nécessaire de proposer un travail d’analyse spécifique sur ce sujet, celui-ci étant si complexe et
dépendant de nombreux éléments distincts qu’il nous fallait présenter.
70 Pour plus d’information sur L’ADAPT, se référer à l’annexe 3
Direction du service aux entreprises, du développement et de l’innovation (Direction SEDI) 1 directrice, adjointe de la direction générale
Service développement et innovations : 2 chargés de développement
Service aux entreprises : 1 chef de projet partenariat Entreprises 1 chef de projet développement/ prospection Entreprises 1 chef de projet Actions/Evénementiels Emploi actions/événementiels Emploi 1 responsable de formation et son assistante
55
Nous avons donc fait le choix de centrer notre projet de stage sur une analyse globale de
l’environnement professionnel71 et notre travail de recherche sur l’analyse des stéréotypes sur le
handicap en entreprise, comme phase essentielle d’une politique de formation et sensibilisation dans
ce champ.
III.1.2. TERRAIN : AIR LIQUIDE
III.1.2.1. Le groupe
Air Liquide est le leader mondial des gaz pour l’industrie, la santé et l’environnement. Le
groupe est présent dans 80 pays avec 46 200 collaborateurs. Air Liquide produit des gaz à forte
valeur ajoutée, pour ses clients internationaux et pour la société, dans les domaines de
l'industrie, de la santé et de l'environnement. À partir de l'air ou en utilisant les ressources
naturelles de la planète, Air Liquide produit des gaz. Ils sont ensuite conditionnés puis
distribués chez les clients du Groupe, jusqu’au cœur de leurs procédés, ou administrés aux
patients72.
III.1.2.2. La Mission Handicap d'Air Liquide
La Diversité est un des piliers de la politique de Ressources humaines chez Air Liquide. Avec une
présence dans 80 pays et 46 200 collaborateurs à travers le monde, la diversité des cultures et des
expériences est une réalité. En octobre 2009, Air Liquide a signé la Charte de la Diversité pour
lutter contre toute forme de discrimination (nationalité, sexe, âge, expérience, origine ethnique,
formation). L’engagement d’Air Liquide, en faveur de l’intégration des personnes handicapées,
s’inscrit dans cette politique. Des actions de formation auprès des collaborateurs d’Air Liquide ont
été engagées pour les sensibiliser aux enjeux de la diversité. Ces sessions portent sur les obligations
légales en termes de diversité, les acteurs, les engagements du Groupe, l’égalité professionnelle
entre hommes et femmes, l’inter-culturalité et le handicap.
Air Liquide a formalisé son engagement sur le handicap avec la création de la « Mission
Handicap » en 2007 afin de recruter, former et maintenir dans l’emploi les personnes
handicapées, une dimension faisant partie intégrante de la politique de Diversité menée par le
Groupe.
71 Vous trouverez en annexe 4 le document de présentation du questionnaire créé dans le cadre de notre travail d’analyse de l’environnement
professionnel. 72 Pour plus d’information sur Air Liquide, se référer à l’annexe 5
56
Un premier accord 2007-2009, suivi d’un 2ème accord 2010-2012 d’entreprise sur le handicap
ont été signés avec les partenaires sociaux en France. La « Mission Handicap s’est engagée sur
cinq types actions :
• Recruter des personnes handicapées en CDI, CDD, contrats d’alternance et stages
• S’assurer de la formation des salariés handicapés
• Collaborer avec des structures du secteur protégé
• Maintenir les personnes handicapées dans leur emploi
• Sensibiliser et communiquer sur le handicap dans l’entreprise
Les actions concrètes du groupe Air Liquide en faveur de l’intégration des personnes
handicapées se déroulent tout au long de l’année: participation à des forums en France dédiés
au recrutement des personnes en situation de handicap, tel que la semaine pour l’emploi
organisée en novembre chaque année par L’ADAPT; manifestations au cours de cette même
semaine pour sensibiliser au handicap les collaborateurs des différents établissements (pièces
de théâtre, démonstration de basket en fauteuil, conférences, parcours sensoriel en aveugle,
apprentissage de la LSF…) ; course relais « Special Olympics » organisée chaque année en
juin sur le parvis de la Défense ; participation à des journées de sensibilisation au handicap
pour les jeunes dans les écoles ; partenariat avec des associations et des organismes dédiés…
57
Voici un extrait du rapport annuel 2011 sur le développement durable au sein d’Air Liquide, se
rapportant aux actions et missions de la « mission Handicap » :
En 2011, les collaborateurs handicapés en France représentaient 4% de l’effectif sur le
périmètre de l’accord. Pour rappel, le taux moyen de travailleurs handicapés dans les
entreprises de + de 20 salariés est d’environ 2, 48%. Air Liquide reste bine loin des 6%
obligatoire mais fait tout de même partie des entreprises les plus actives, ou en tout cas les plus
efficace quant à leur taux d’emploi de travailleurs handicapés, au regard des autres entreprises
présentes sur le territoire français.
Air Liquide est donc déjà bien investie dans le champ du handicap, et son taux d’insertion de
TH est supérieur à celui de la moyenne nationale. Ce contexte professionnel nous a permis de
questionner l’analyse des besoins et les stéréotypes dans une structure expérimentée sur le sujet
et que l’on pourrait supposer « favorable » à la question du Handicap. Air Liquide fut la seule à
à avoir répondu positivement à notre projet d’étude. La mission Handicap de cette entreprise
était dans une phase d’évaluation des résultats des actions menées et elle commençait, lors de
notre premier contact, à se questionner sur l’existence de freins invisibles pouvant faire
Pour Air Liquide, la diversité et l’égalité des chances passent aussi par une meilleure insertion des personnes handicapées au sein de ses équipes, mais également au travers de la sous traitance dans des établissements du Secteur Protégé, particulièrement en France. En 2011, les collaborateurs en situation de handicap représentent 1,3 % des effectifs du Groupe. En France, l’ensemble des actions concernant le handicap est coordonné par une Mission Handicap selon les termes d’un accord d’entreprise signé avec les partenaires sociaux en 2010. Fin 2010, le taux de travailleurs handicapés en France était de 4 % sur l’ensemble des filiales France. Air Liquide décline à travers cet accord d’entreprise une politique d’emploi avec des objectifs dans les domaines du recrutement, de l’intégration dans l’entreprise, de la formation, du maintien dans l’emploi, de la sensibilisation et de la sous-traitance auprès du Secteur Protégé. Pour mener à bien ces actions sur le terrain en faveur des personnes handicapées, la Mission Handicap d’Air Liquide s’appuie sur 14 collaborateurs « Référents Handicap » répartis dans chacune des principales filiales françaises. Ils sont accompagnés par des groupes de travail pluridisciplinaires qui se réunissent trois fois par an pour travailler sur différents sujets liés au handicap. Parmi les nouvelles actions mises en place en 2011, la collaboration avec les entreprises du Secteur Protégé a été renforcée en France. Un Comité de Pilotage du Secteur Protégé a été mis en place afin de développer les achats auprès de différents établissements du Secteur Protégé. Par ailleurs, un contrat-cadre de référence a été signé par le Groupe avec un imprimeur dans ce secteur, ainsi que dans le domaine du nettoyage industriel des vêtements. Des actions de sensibilisation ont été menées auprès des services Communication, Actionnaires et Achats du Groupe pour les inciter à consulter des entreprises du Secteur Protégé dans le cadre des appels d’offres.
58
obstacle l’intégration de travailleurs handicapés au sein des équipes. Elle pointait en particulier
la question du rôle des managers, étant interpellée aussi par la lecture de l’étude sur les
stéréotypes que nous avons déjà mentionnée. Notre projet d’étude s’intégrait ainsi parfaitement
dans leurs préoccupations du moment et pouvait leur permettre de faire ressortir des éléments
intéressants pours leurs prochaines actions de formation et/ou de sensibilisation.
III.2. LA PROBLEMATIQUE ET SES HYPOTHESES
III.2.1. L’ETUDE DE REFERENCE SUR LES STEREOTYPES SUR LE HANDICAP EN ENTREPRISES
Lors de notre phase d’état des lieux de l’existant en France dans notre domaine de recherche, à
savoir l’analyse des représentation sociales et stéréotypes dans le champ du Handicap en entreprise,
nous avons chercher à découvrir et connaitre les travaux, expériences ou recherches déjà réalisées
sur ce sujet en France. C’est ainsi que nous avons pu prendre connaissance d’une étude sur les
stéréotypes sur le handicap en entreprises, que nous avons déjà mentionnée plus haut.
Cette étude a été développée en 2010 par IMS-Entreprendre pour la Cité. Créée en 1986 par des
dirigeants d'entreprises, cette association qui regroupe plus de 230 entreprises engagées dans des
démarches de responsabilité sociétale (RSE) a souhaité lancer un programme de recherche-action,
auquel Patrick Scharnitzky73, chercheur en Psychologie Sociale à l’université de Picardie, a apporté
sa contribution.
Durant 18 mois, ces équipes ont évalué les stéréotypes de 400 managers issus de quatre grandes
entreprises françaises. Elles ont cherché à établir des méthodologies scientifiques pour mieux
comprendre ces phénomènes et les limiter le plus possible.
Les auteurs de cette étude reprennent la définition suivante des stéréotypes :
Ils rappellent l’importance de l’impact des stéréotypes sur les personnes handicapées dans
l’ensemble des processus d’une entreprise (production, RH, sécurité, Santé..). Pour le recrutement :
le recruteur, dans une situation d’évaluation, peut être influencé par ses stéréotypes et, de ce fait,
être moins à même de juger les candidats sur leurs seules compétences. Le recrutement peut alors
s’en trouver biaisé et moins objectif. De la même façon, dans le cadre de l’activité professionnelle :
les stéréotypes de l’entourage professionnel concernant les travailleurs handicapés peuvent
constituer un frein à leur intégration dans l’équipe de travail et/ou leur maintien dans l’emploi.
73 Cf son cv en annexe 6
Il s’agit d’un ensemble de croyances individuelles relatives aux caractéristiques ou attributs
d’un groupe. Le stéréotype est naturel, positif ou négatif, pas nécessairement faux et peut être
personnel et/ou partagé.
59
Concernant l’évolution professionnelle: Dans une situation d’évaluation, la personne handicapée,
qui se figure être stigmatisée, a généralement peur de confirmer le stéréotype que l’évaluateur aurait
à son égard. Son appréhension peut engendrer une pression supplémentaire, qui peut amener une
dispersion de ses ressources mentales. La conséquence est que sa performance au cours de
l’évaluation peut s’en trouver amoindrie….…
L’étude IMS de référence rappelle la nécessité absolue de prendre en compte ces stéréotypes lors de
la mise en place de toute politique Handicap.
Voici une synthèse des résultats et analyses de cette étude :
Caractéristiques Détails
Le handicap est perçu globalement
négativement
Un sujet sensible, une perception négative, une
difficulté à faire le lien entre l’emploi et le
handicap, le handicap principalement perçu
sous un angle moral
Une perception caricaturale du handicap et
des personnes handicapées
Une réduction au handicap moteur, le handicap
comme inné et permanent, une vision faussée
du niveau de formation des personnes
handicapées, la diversité des handicaps peu
perçue
Des stéréotypes ambivalents « Les personnes handicapées sont courageuses
mais improductives » : des personnes
courageuses, mais surtout hors de l’entreprise
Plus les managers sont diplômés, plus le Les caractéristiques sociodémographiques n’ont
L’impact des stéréotypes se fait ressentir dans tous les domaines de la vie professionnelle,
autant pour la personne handicapée que pour son collaborateur.
60
stéréotype est fort pas d’impact sur le stéréotype
Plus les managers perçoivent l’engagement de leur entreprise en faveur de la diversité, plus
ils ont une image positive du handicap et des personnes handicapées
Seul le contact professionnel influe sur le
stéréotype
Plus les managers ont de contacts
professionnels avec des personnes handicapées,
plus l’image du handicap et des personnes
handicapées devient positive
Plus les managers s’identifient aux personnes handicapées, plus leurs stéréotypes sont
positifs
Des outils de sensibilisation peu connus et peu utilisés par les managers
Figure 8 : caractéristiques des stéréotypes sur les personnes handicapées en entreprise74 – A. Relandeau
Nous avons été fortement interpelés par cette étude sur les stéréotypes.
En effet, cette étude répond en grande partie aux premières interrogations que nous avions sur la
question des représentations sociales et stéréotypes en Entreprises. Comme nous l’avons déjà
souligné, il nous étonnait que malgré les efforts de formation et sensibilisation fournis depuis 1987,
et surtout 2005, dans le champ du Handicap en entreprise, la situation des travailleurs handicapés
reste aussi précaire et fragile. Nous nous interrogions sur la place et l’importance de la prise en
compte des stéréotypes comme facteur d’insertion ou d’exclusion professionnelle des travailleurs
handicapés.
La loi de 2005 a insufflé une nouvelle dynamique autour de la question du Handicap en entreprise,
en particulier du fait de l’augmentation du montant des contributions obligatoires en cas de non
respect de cette loi. Elle a aussi, pour la première fois, intégré la notion « d’environnement » et de
« compensation du Handicap », se rapprochant ainsi du concept du PPH déjà présenté plus haut. Du
fait de cette nouvelle dynamique, de nombreux acteurs du conseil et formation dans le champ du
Handicap se sont développés pour aujourd’hui créer un vrai « marché du handicap en entreprise »,
appuyé par l’obligation donnée par l’AGEFIPH de mettre en œuvre un « diagnostic conseil
approfondi » de sa situation au regard du Handicap avant toute possibilité d’accord avec eux sur
l’utilisation des contributions obligatoires.
Ces diagnostics doivent prendre en compte l’ensemble des éléments internes et externes d’une
entreprise pour proposer une politique Handicap globale. Y compris la question de l’environnement
et en particulier de la sensibilisation et formation des collaborateurs afin que ceux-ci puissent faire
évoluer leurs regards sur les personnes handicapées et adapter si besoin leurs attitudes et pratiques
en conséquence. Les plans d’actions des entreprises intègrent tous ou presque des sensibilisations et 74 D’après l’étude « Les stéréotypes sur les personnes handicapés – Comprendre et agir en Entreprise », équipe de recherche coordnnée par l’IMS –
entreprendre pour la cité, 2010
61
des formations de leurs collaborateurs, mais le contenu de ces modules sont pratiquement toujours
les mêmes, seules les modalités pédagogiques semblent changer pour être plus attrayantes pour les
entreprises et répondre surtout à leurs contingences organisationnelles internes. Et nous avons vu
que les diagnostics conseils semblent peu mis en œuvre. Et nous rajouterons que dans ceux mis en
œuvre, peu cherchent à identifier les stéréotypes sur le handicap dans leur entreprises. Il est connu
qu’il existe des représentations sociales négatives sur le Handicap, mais très peu d’entreprises ont
cherché à identifier les stéréotypes sur les personnes handicapées qui, comme nous l’avons vu,
peuvent être différents des représentations sociales et sont plus « mouvants », « changeants »
suivant le contexte professionnel questionné.
Ainsi l’étude sur les stéréotypes de « l’IMS-entreprendre dans la cité » montre bien que
l’historique, la pratique et l’engagement des entreprises sur la question du Handicap a un impact sur
les stéréotypes présents dans celles-ci. Il s’agirait donc de pousser plus loin les analyses sur les
représentations des collaborateurs, pour identifier les stéréotypes spécifiques à chaque entreprise, et
ainsi adapter les contenus des sensibilisations et formations en conséquence en fonction du public et
de l’entreprise.
Notre problématique se portera donc sur la question des différences entres collaborateurs au sein
d’une même entreprise, afin de les comprendre et de pouvoir proposer des actions adaptées à la
réalité de cette entreprise, en l’occurrence Air Liquide dans le cadre de notre recherche.
Les managers ont une position bien particulière au sein des entreprises, souvent clés dans les
politiques de management de proximité. Ils sont soumis quotidiennement aux pressions de leurs
hiérarchies en attente de résultats et de performance et de leurs équipes en attente de cadre d’écoute
et de prise en compte de leurs situations personnelles. Cette position « charnière », stratégique pour
les entreprises, mais complexe pour les managers, doit peut être avoir des conséquences sur leur
vision des travailleurs handicapés, et donc un impact sur la réussite de l’insertion professionnelle ou
le maintien dans l’emploi de ceux ci. L’étude IMS s’étant attachée à ne traiter que de la question
des stéréotypes sur le handicap de managers, nous souhaitons aller un peu plus loin et donc
interroger l’impact du management sur les stéréotypes en proposant une analyse comparée des
stéréotypes entre des managers et non managers.
Dans cette recherche, nous souhaitons questionner en particulier l’impact de la responsabilité de
manager sur les stéréotypes de la catégorie socio –professionnel des cadres.
III.2.2. PROBLEMATIQUE DE LA RECHERCHE
Notre problématique :
Le fait d’avoir la responsabilité de manager a-t-il un impact sur les stéréotypes sur les travailleurs handicapés de 131 cadres d’Air Liquide ?
62
III.2.3. HYPOTHESES
III.3. NOTRE METHODOLOGIE D’ENQUETE
III.3.1. CHOIX DE NOTRE METHODE D’ENQUETE
Cette enquête est une recherche-action. En effet, elle vise à :
- Du point de vue de la recherche : développer les connaissances sur les stéréotypes sur le
handicap en entreprise, et en particulier sur les critères d’influence
- Du point de vue de l’action : développer un outil pratique d’analyse des stéréotypes sur le
handicap en entreprise et accompagner la réflexion sur l’amélioration des actions de
sensibilisation sur le Handicap au sein d’Air Liquide.
Nous avons suivi les étapes d’une recherche action, à savoir :
- Une présentation de notre projet à la mission handicap d’air Liquide et une négociation sur les
attendus et sa faisabilité au sein d’Air Liquide
- Nous avons construit l’outil questionnaire de l’enquête et l’avons discuté et validé avec notre
partenaire terrain
Trois hypothèses :
H1 : La responsabilité de manager a un impact positif sur les stéréotypes des
cadres sur les travailleurs handicapés
H2 : La responsabilité de manager a un impact négatif sur les stéréotypes des
cadres sur les travailleurs handicapés
H3 : La responsabilité de manager n’a aucun impact significatif sur les
stéréotypes des cadres sur les travailleurs handicapés
63
- Et enfin, nous avons présenté notre bilan d’enquête aux partenaires et soumis des
préconisations d’actions.
Bien que notre partenaire, Air Liquide, ne fût pas à l’initiative de cette recherche action, elle
participe pleinement et répond en partie à leurs préoccupations actuelles concernant leur politique
Handicap.
Concernant la construction de notre outil d’enquête, nous avons fait le choix de nous baser sur la
méthodologie de l’enquête réalisée en 2011 par l’IMS-entreprendre pour la cité sur les stéréotypes
sur les personnes handicapées. Comme nous l’avons dit plus haut, c’est la première étude de ce
type et de cette envergure sur le sujet en France et nous avons eu le privilège de pouvoir avoir
accès au questionnaire de base de cette enquête75. D’un point de vue méthodologique, disons
simplement ici que l’enquête IMS cherchait a répondue à deux objectifs :
1. Identifier les stéréotypes liés au handicap et en mesurer leur poids et impact
2. Évaluer l’impact des outils de sensibilisation sur les stéréotypes présents en entreprise
Sa méthodologie fut à la fois quantitative, avec un questionnaire de mesure des stéréotypes qui fut
animé en direct et spécifiquement conçu pour ce programme, et qualitative avec des entretiens
individuels et collectifs ayant permis la conception du questionnaire et de répondre à l’objectif 2.
Nous avons fait le choix méthodologique de nous concentrer sur son premier objectif
d’identification des stéréotypes. Et ce pour plusieurs raisons :
- Nous n’avions pas les moyens temps et humains pour reproduire l’ensemble de l’enquête
- Notre intérêt, dans cette recherche, se porte principalement sur l’analyse des stéréotypes.
- Les analyses faites sur l’impact des outils de sensibilisation ne semblent pas être pertinents à
re-questionner, car moins influencés par le contexte professionnel. Nous présenterons dans
notre dernier chapitre les grandes lignes de l’analyse de l’impact des sessions de
sensibilisation de cette étude. En tout cas, nous avons donc pris le parti de ne pas les ré-
questionner et de nous appuyer sur les résultats de l’étude IMS concernant ce second objectif.
- Nous voulions tenter de proposer un outil d’analyse des stéréotypes plus « accessible » et
« reproductible » pour d’autres entreprises ou prestataires de formation. Profiter donc de notre
recherche pour essayer de produire un nouvel outil d’analyse des stéréotypes pour les
entreprises.
75 Vous trouverez en annexe 7, les consignes du questionnaire et son carnet de réponse, utilisé pour réaliser l’étude de référence, qui doivent restés
confidentiels.
64
Nous avons donc décidé de créer – adapter un questionnaire quantitatif. Questionnaire qui reprend
les questions de l’étude IMS liées à l’identification des stéréotypes, avec toutefois quelques
adaptations que nous présentons plus bas.
Bien que nous ayons décidé d’adapter un questionnaire existant, nous avons pris le temps de
vérifier la pertinence de ce type de méthodologie pour l’étude spécifique de notre sujet. Et le
questionnaire quantitatif s’est bien relevé comme la méthode la plus pertinente. En effet, les
enquêtes par questionnaire « constituent des outils essentiels de la perception du réel et de
l’élaboration de modèles permettant d’accéder à la compréhension de phénomènes
complexes. »76. Nous savons maintenant que la question des stéréotypes sur le handicap est un
phénomène bien complexe, fluctuant suivant les contextes et, nous le verrons plus tard en détail,
suivant les modes d’identification et les interactions. Ainsi, le questionnaire quantitatif a
l’avantage d’assurer une distance entre le chercheur et le répondant et un anonymat de celui-ci,
pouvant, dans le cas de notre étude, avoir son importance quand à « l’honnêteté » et la
participation des personnes contactées.
Comme nous le rappelle Laurent Lescouarch77, le questionnaire est souvent un complément de
l’enquête par entretiens, puisque ceux-ci permettent de construire celui là. Nous n’avons
cependant pas pensé pertinent de relancer des entretiens préalables à l’élaboration du
questionnaire, ayant décidé de nous baser sur le questionnaire déjà créé par l’équipe de l’étude de
référence. Et qui donc avait déjà fait l’objet de réflexions poussées de plusieurs chercheurs en
psychologie sociale ainsi que d’éléments complémentaires recueillis lors des entretiens qualitatifs
réalisés.
Enfin, dans une démarche d’efficacité et d’approche écologique, nous avons proposé de concevoir
ce questionnaire via un logiciel informatique, « survey shaker »78, qui nous permettait d’envoyer
un simple lien informatique à un listing mail défini par la mission handicap d’Air Liquide. Les
personnes recevant ce lien pouvant directement remplir le questionnaire en ligne en ouvrant
simplement le lien. Cette approche nous a permit d’envoyer le questionnaire à prés de 1000
salariés d’Air Liquide.
76 L. Lescouarch et D. Trancart, cours de méthodologie, Master ICF FOAD, 2012
77 id 78 www.surveyshaker.com
65
III.3.2. LIMITES METHODOLOGIQUES
III.3.2.1. Adaptation d’une enquête existante, limite de comparaison
Nous avons conscience qu’en adaptant une enquête déjà existante, sans toutefois en maintenir
l’ensemble des objectifs, outils et méthodes utilisées, nous risquons de faire naitre un biais dans la
qualité des analyses. Nous n’avions pas les moyens techniques et humains pour reproduire à
l’identique l’étude de référence et ce n’était pas notre objectif. Nous avons fait le choix de la couper
et de l’adapter à notre réalité et à nos besoins. Nous n’allons de toute façon pas faire de
comparaison exhaustive entre ces deux enquêtes. Rappelons toutefois que nous nous étions fixés
comme objectif d’action de pouvoir créer un outil d’analyse des stéréotypes pratique et utilisable
par les entreprises. Ainsi, sans nous baser complètement sur les résultats de l’étude de référence,
nous allons cependant tenter de vérifier les cohérences et différences rencontrées entre ces deux
études, afin de vérifier si notre proposition de questionnaire reste pertinente pour analyser les
stéréotypes en entreprise.
III.3.2.2. Problème d’échantillon : ajustement de la problématique
Nous souhaitons ici présenter la manière dont nous avons dû surmonter un problème lié à une
inadéquation entre notre objet de recherche et notre échantillon de répondants au questionnaire.
Nous souhaitions originellement discuter des stéréotypes suivant les catégories professionnelles.
L’étude de référence n’ayant traité que de la question des managers, il nous paraissait intéressant
d’aller questionner les autres catégories professionnelles sur leurs stéréotypes sur le handicap en
entreprise. Et tenter de démontrer ou pas l’impact de l’appartenance à une catégorie professionnelle
sur les stéréotypes sur le handicap, par le biais d’une comparaison des résultats de chaque catégorie
professionnelle. Ceci en postulant que nous aurions la possibilité de construire des sous groupes
homogènes à partir du groupe de répondants à notre questionnaire.
Nous avons énoncé cet objectif dés le début de notre collaboration avec la mission handicap d’Air
Liquide, et celle-ci n’a soulevé aucun doute quant à sa faisabilité au sein d’Air Liquide.
Mais après l’envoi du questionnaire aux salariés des 4 sites d’Air Liquide, nous nous sommes vite
aperçu qu’une forte majorité de répondants étaient de la catégorie professionnelle des cadres et que
nous avions peu de répondants pour les autres catégories professionnelles. Nous avons alors alerté
la mission Handicap d’Air Liquide pour discuter de la possibilité de rééquilibrer les écarts entre
catégories professionnelles. Nous avons proposé de faire une relance, via les référents handicap,
auprès des managers pour que ceux-ci sollicitent leurs équipes (agents de maitrise et
employés/ouvriers) à répondre à ce questionnaire. Les ouvriers/employés n’ayant peut être pas tous
66
accès à internet ou ne se sentant pas forcement à l’aise avec cet outil, nous avons aussi proposé en
parallèle de nous rendre sur les sites.
Pour des raisons indépendantes de notre volonté, nous n’avons pu mettre en place aucune de ces
actions correctives proposées.
Nous nous sommes ainsi retrouvés avec trois groupes professionnels de répondants très différents:
- 5,3% (soit 9 personnes) d’employés/ouvriers
- 18,7% (soit 32 personnes) d’agents de maitrise
- Et 76% (soit 131 personnes) de cadres.
Nous ne pouvions plus tenter de répondre à notre problématique à partir de ces trois groupes, la
comparaison entre eux ne pouvant avoir de valeur scientifique au vue de l’importance de différence
numéraire entre chaque groupe.
Réajustement :
Nous avons dû rapidement penser à un réajustement, sans toutefois dévier du cadre général de notre
recherche et de notre intérêt pour la question des stéréotypes. Et ce, tout en s’assurant que notre
analyse soit scientifiquement valable.
Nous avons alors décidé de réorienter notre problématique comme nous l’avons présenté plus haut,
à savoir questionner, au sein de la population des répondants (172), la catégorie professionnelle des
cadres (131 répondants), et voir si la responsabilité de management avait un impact sur les
stéréotypes de ceux ci. L’étude IMS de référence, n’a questionné que des managers. Amener un
complément de réflexion quand à l’impact du management sur les stéréotypes nous est ainsi paru
intéressant.
Nous avons choisi de ne traiter que le critère de management à l’intérieur du groupe professionnel
des cadres (131 répondants), et non de notre population total de référence (les 172 répondants), pour
plusieurs raisons :
Choix de ne questionner que le groupe des cadres : C’est le groupe majoritaire de la population
de référence (131/172). Dans notre population de référence (172), le nombre de managers non
cadres (2) n’est pas suffisant pour être mis en comparaison avec les managers cadres (52). Autant
ainsi ne travailler qu’a l’intérieur du groupe des cadres. L’étude IMS de référence a démontré
que les différences sociodémographiques ne semblaient pas avoir d’impact significatif sur les
67
stéréotypes sur le handicap en entreprise, sauf le niveau de qualification et la proximité avec le
handicap en entreprise. Ainsi il ne nous parait pas pertinent de re-questionner l’impact du
management suivant les critères sociodémographiques. Par contre, en faisant le choix de ne
travailler qu’au sein du groupe des cadres, nous espérons ainsi limiter le biais de la différence du
niveau de qualification (qui se retrouve souvent dans la différence de statut professionnel). Nous
tiendrons compte du biais que pourra être le critère de proximité professionnelle dans notre analyse
mais n’avons pas l’objectif d’en faire une analyse complète.
L’analyse de ce contre temps nous amène à reconnaitre que nous n’avons certainement pas assez
insisté sur nos exigences et besoins d’informations et retours de la part d’Air liquide sur les salariés
contactés (population de référence) pour répondre à cette enquête et n’avons pas été assez vigilant
quand aux motivations « personnelles » d’Air Liquide qui ont certainement participé à ce contre
temps. En effet, ils étaient particulièrement intéressés par la situation de leurs cadres managers et
n’ont, de ce fait pas cherché à satisfaire nos besoins ou à répondre à nos demandes concernant les
autres catégories professionnelles. Il s’agira à l’avenir de formaliser plus clairement les devoirs de
chacune des parties et de comprendre toutes les motivations, si nous sommes amenée à réaliser à
nouveau ce type d’enquête auprès d’une autre entreprise.
III.3.2.3. Attention aux zones muettes
Comme le rappelle J.C Abric, dans « méthodes d’étude des représentations sociales » « la quasi
totalité des études de représentations reposent sur la production verbale des individus ou des
groupes. Faute de mieux, on demande aux gens de s’exprimer sur l’objet étudié et tout le travail des
chercheurs consiste à utiliser les outils les plus appropriés pour permettre aux personnes
interrogées de dire ce qu’elles pensent » 79. J.C Abric introduit ainsi la question des jeux de
masquages et de ce qu’il appelle les zones muettes, qui peuvent apparaitre lors de l’étude des
représentations sociales. Au vue des caractéristiques des stéréotypes, nous partons du postulat que
l’étude de ceux-ci peut être soumise aux mêmes risques que pour les représentations sociales.
Il nous apparait donc important de faire un point ici sur ce que sont ces zones muettes et quels
risques elles cachent pour l’analyse des stéréotypes.
Ce risque se traduit par cette simple question : les personnes que l’on interroge nous disent-elles
réellement ce qu’elles pensent ?
D’après diverses expériences, JC Abric est amené à répondre NON à cette question. Pour certains objets, dans certains contextes, il existe une zone muette de la représentation sociale.
Mais ne concerne que celles qui portent sur des objets imprégnés par des valeurs sociales reconnues
79 Abric Jean‐Claude, « La recherche du noyau central et de la zone muette des représentations sociales », in
Jean‐Claude Abric , Méthodes d'étude des représentations sociales, ERES « Hors collection », 2003 p. 59‐80.
68
et partagées. Des objets « sensibles », c’est-à-dire dont le champ représentationnel comporte des
cognitions et des croyances qui, si elles étaient exprimées (notamment dans certaines situations),
pourraient mettre en cause des valeurs morales ou des normes sociales valorisées par le groupe
(Deschamps et Guimelli, 2001). Ce qui est tout à fait le cas de la question du Handicap, devenue
très « politiquement correct » et avec une valeur normative très forte. Cette zone muette est
constituée d’éléments de la représentation qui ne sont pas verbalisés par les répondants avec les
méthodes classiques de recueil. « Cette zone muette est constituée par les éléments de la
représentation qui ont un caractère contre-normatif »80 Elle peut être définie comme un « sous-
ensemble spécifique de cognitions ou de croyances qui tout en étant disponibles, ne sont pas
exprimées par les sujets dans les conditions normales de production… “et qui”, si elles étaient
exprimées (notamment dans certaines situations), pourraient mettre en cause des valeurs morales
ou des normes valorisées par le groupe » (Guimelli et Deschamps, 2000).
Ces zones muettes pourraient ne pas beaucoup perturber l’analyse des représentations sociales, si
certains chercheurs ne s’étaient aperçue qu’elle pouvait contenir des éléments constitutifs du noyau
dur, du noyau central81 de la représentation, et donc biaiser en grande partie, dans le cadre de notre
recherche, notre analyse des stéréotypes existants dans le champ du handicap en entreprise.
Ces éléments de la zone muette ne sont pas produits car ils marqueraient un écart du sujet vis-à-vis
des normes de son groupe d’appartenance. Ainsi, puisque la zone muette est constituée d’éléments
contre-normatifs, il est nécessaire de réduire la pression normative pour faciliter sa verbalisation.
Réajustements :
D’après JC Abric, deux techniques existent aujourd’hui en psychologie sociale pour réduire les
effets des jeux de masquage et permettre la verbalisation de la zone muette :
La technique de substitution : poser la question en demandant ce que, d’après le répondant, en
pense un autre groupe. Déplacer le sujet de réponse. Ne pas faire porter la responsabilité de la
réponse au répondant mais au groupe de référence. Suivant cette technique testée par Guimelli
(Guimelli et Deschamp, 2000) sur la question des représentations sociales des gitans, des
représentations sociales plus négatives et non encore énoncées sont alors apparues. Bien entendu,
comme le rappelle JC ABric, « la substitution ne permet que de formuler une hypothèse sur la zone
muette. Rien n’empêche de penser que dans certains cas ce que les sujets produisent en substitution
concerne bien la représentation qu’ils se font du groupe de référence qu’on leur propose et non la
zone muette de leur propre représentation. C’est une limite importante de l’outil. »82.
En suivant toutefois cette technique, nous avons insérer une question formulée de la façon suivante :
80 JC Abric, id
81 Cf le paragraphe sur les représentations sociales
82 JC Abric, id
69
« Dans quelle mesure pensez vous que les salariés de votre entreprise sont d’accord avec les
affirmations suivantes ? » en fin de questionnaire, sachant que la même question avait été posée en
début de questionnaire, mais cette fois ci en demandant l’avis directement de la personne
répondante. Il sera intéressant d’analyser le comparatif de réponses à ces deux questions.
La technique de décontextualisation normative : le chercheur/intervieweur se positionne comme
appartenant à un groupe différent de celui du répondant, groupe « reconnu » par le répondant
comme moins normatif sur le sujet du questionnaire que son groupe d’appartenance propre. Il s’agit
ici de mettre à distance le répondant du chercheur/intervieweur.
Nous n’avons pas réellement mis en place cette seconde technique. Toutefois, nous avons fait le
pari qu’un questionnaire en ligne, anonyme et proposé par un chercheur extérieur à l’entreprise
pourrait aussi participer à faciliter la verbalisation des éléments pouvant être présents dans la zone
muette des stéréotypes sur le handicap en entreprise.
Mais le fait que nous nous soyons présenté comme chercheuse ET professionnelle du Handicap
depuis de longues années a peut être limité les effets d’anonymat et de décontextualisation que nous
voulions mettre en place dans un premier temps.
III.3.2.4. Quelques biais d’analyse
En choisissant de proposer un questionnaire par voie informatique, envoyé directement sur les
adresses mails professionnelles de salariés d’Air Liquide, induit automatiquement quelques biais à
noter :
Comme c’est le cas dans la plupart des enquêtes par questionnaire, ce sont souvent les personnes
déjà intéressées à la thématique proposée qui répondent au questionnaire. Ainsi, dans notre
recherche, nous pouvons supposer que ce sont les personnes déjà un peu sensibilisées à la question
du Handicap qui ont répondu. On ne saurait y attribuer un impact positif ou négatif. Toutefois, il est
reconnu que la question du Handicap soulève plutôt des rejets et une mise à distance. Ce qui laisse à
penser que ce sont plutôt les personnes ayant une sensibilité « positive » qui ont répondu.
Les répondants ont pu utiliser une aide extérieure à leurs propres croyances, connaissances ou
expériences pour répondre à ce questionnaire. En effet, le questionnaire ayant été envoyé par mail,
nous n’avons eu aucun moyen de vérifier ou contrôler le mode de remplissage de celui-ci. Ceci peut
avoir un effet, en particulier sur les questions finales du questionnaire, sur les connaissances lié au
Handicap.
Comme nous l’avons déjà dit plus haut, nous avons tenté de limiter les biais pouvant être induit
par les autres caractéristiques sociodémographiques. Seul la situation de proximité professionnelle
n’a pas été isolée et peut participer à biaiser l’analyse de notre problématique.
70
Réajustements :
Ces trois biais d’analyses furent présents dans notre esprit tout au long de l’enquête et de son
analyse. Il s’agira ainsi de pondérer notre analyse au regard de l’impact possible de ces biais. Et, si
nouvelle enquête il y a, proposer une méthodologie de passation limitant le biais et (par
exemple en rendant obligatoire le remplissage du questionnaire et le faire sur place, avec le
chercheur présent) et relancer une analyse des résultats de l’enquête pour comprendre l’impact de la
proximité professionnelle.
III.3.2.5. Question de représentativité
Une difficulté rencontrée dés le départ fut notre impossibilité, malgré nos requêtes régulières,
d’avoir accès à des informations concernant les caractéristiques sociodémographiques de la
population de référence, à savoir les salariés des 4 sites ciblés d’Air Liquide. Nous avions donc déjà
en début de projet, une difficulté à construire un échantillon représentatif de notre population de
référence.
Réajustement :
Comme nous l’avons présenté plus haut, nous avons finalement dû modifier notre problématique.
Nous en avons alors profité, lors du travail de ré-échantillonnage et adaptation de notre démarche,
pour assurer la représentativité de notre échantillon. Nous présentons ces deux points en détail dans
le paragraphe suivant.
Nota Bene : la responsable de la mission Handicap d’Air Liquide a pointé une certaine
ressemblance entre les caractéristiques du groupe de répondants (172) au questionnaire avec les
caractéristiques générales qu’elle connait des salariés des 4 sites visés d’Air Liquide, en particulier
sur les écarts entre catégories professionnelles. Mais cela ne peut bien sur en aucun cas être
considéré comme scientifiquement fiable.
Conclusion :
Nous reconnaissons que ces difficultés et limites ont certainement réduit l’intérêt de notre enquête,
puisque nous ne pouvons proposer d’analyse qu’au regard d’un groupe très restreint de salariés
d’Air Liquide, sans en connaitre vraiment le potentiel d’extrapolation. Nous avions l’ambition
initiale de pouvoir proposer une analyse assez représentative de la situation des stéréotypes au sein
d’Air Liquide. Et de pouvoir en faire des extrapolations réalistes. Ceci ne sera pas possible. Nous
avons décidé de privilégier ici la qualité méthodologique et scientifique à l’intérêt des résultats. Il
71
s’agit d’une première démarche, et nous espérons avoir l’opportunité de poursuivre nos recherches
et engagements professionnels sur cet objet d’enquête.
Toutes ces limites, mis à part celle d’ordre conceptuelle que sont les zones muettes, nous
interrogent sur notre collaboration de travail avec Air Liquide et sur les difficultés à mettre en
place un processus d’ingénierie de projet lorsque les engagements de chaque partenaire n’est pas
clairement formalisé.
III.3.3. NOTRE ENQUETE EN 15 ETAPES
III.3.3.1. De la conception à la validation de la méthodologie et de son outil -questionnaire
Voici une schématisation des étapes ayant aboutie à la validation du questionnaire :
72
: En prenant en compte le besoin de questionner les stéréotypes de différentes manières, afin
de pouvoir croiser plusieurs indicateurs et faire clairement ressortir les stéréotypes; En
faisant le choix de ne pas questionner les représentations sociales mais bien s’attacher aux
stéréotypes ; en tentant de simplifier certaines questions tout en en maintenant l’objectif.
: En prenant en considération les risques liés à l’objet même de la recherche. Les stéréotypes
sont des objets peu visibles, qu’il est difficile d’identifier. Nous avons cherché un moyen de
les mettre à jour, sans trop biaiser les réponses. Une attention particulière a donc été portée aux
1
2
3
4
5
6
7
8
3
4
Figure 9 : les 15 étapes de notre enquête ‐ A.Relandeau
73
mots choisis pour les questions, à leur ordre de présentation ainsi qu’au mode de diffusion, devant
assurer un anonymat de la réponse suffisamment rassurant pour « libérer » la parole. Ces
précautions ne peuvent suffire pour certifier de « l’honnêteté » des réponses mais nous en
reparlerons dans le paragraphe suivant.
: En suivant les demandes de la mission handicap d’Air Liquide, en terme de faisabilité
d’envoi du questionnaire et de leurs intérêt, négocié avec notre intérêt scientifique et
question de recherche. Le choix s’est porté sur l’ensemble des salariés de 4 des filiales France d’Air
Liquide, ce qui correspond à environ 1000 salariés. Comme nous l’avons déjà souligné dans nos
limites, nous n’avons pu avoir accès aux informations sociodémographiques de la population cible,
et n’avons donc pu construire un échantillon représentatif au regard de notre question de recherche
initiale. La conséquence directe de ceci fut que les caractéristiques de notre groupe de répondants
(172) ne nous permettaient pas de répondre à notre problématique. Nous verrons plus tard l’impact
que cela a eu sur les phases de recueil de données et analyse.
: Une vingtaine de référents handicap ont répondu à un premier test du questionnaire.
Comme nous l’avons dit plus haut, une attention particulière a été portée à la présentation de
chaque question, pour essayer à minimum d’induire des réponses. Or, dans le champ du Handicap,
utiliser tel ou tel mot est déjà une connotation en soit. Nous avons fait le choix d’utiliser des termes
assez familier, les plus « brut » possibles, et pouvant donc choquer ou étonner certains. Nous nous y
attendions et avions prévenu la mission handicap de ces possibles retours étonnés voir choqués. Ce
qui n’a pas manqué d’arriver. Nous avons alors rappelé que ces commentaires sont très intéressants
en soi pour démontrer toute la complexité de ce sujet et le nécessaire travail restant à faire. Mais
sous la pression de l’entreprise, nous avons du modifier une question et en ajouter une autre. En
effet, le questionnaire était bâti sur le mode « questions fermées », « obligeant » ainsi les personnes
à se positionner. Mais au vu des commentaires, nous avons ajouté une question ouverte pour
justement laisser la possibilité aux répondants de s’exprimer et donc clarifier ou justifier leurs
réponses. Nous n’utiliserons ces commentaires que comme un élément complémentaire intéressant
mais ne baserons pas notre analyse sur ceux-ci.
5
6‐ 7
74
III.3.3.2. De la diffusion à l’analyse des résultats
Voici la suite de la schématisation de notre démarche :
: Un écrit fut inclus en introduction du questionnaire et un mail de contextualisation de la
démarche fut travaillé par l’équipe d’Air Liquide afin de présenter l’intérêt de ce questionnaire, de
son objectif et des consignes pour remplir celui-ci, ainsi que le lien permettant d’ouvrir et de donc
de répondre directement en ligne au questionnaire. Nous nous étions proposé de passer sur chacun
8
9
10
11
12
13
14
15
8
Figure 10 : les 15 étapes de notre enquête, suite‐ A.Relandeau
75
des sites afin de présenter notre étude et notre démarche mais cela n’a pas été jugé pertinent par la
mission Handicap d’Air Liquide.
: Le questionnaire fut donc envoyé à prés de 1000 salariés d’Air Liquide83. Il fut envoyé via
les référents handicap des 4 sites visés. Un délai de 15 jours fut donné pour remplir ce
questionnaire.
: cf paragraphe sur nos limites. Nouvelle problématique sur l’impact du management sur
les stéréotypes sur le handicap de cadres d’Air Liquide
: Ne pouvant relancer un questionnaire auprès d’un nouveau panel, nous avons proposé une
problématique pertinente au regard de notre groupe de répondants. Sachant que nous allons, par
cette approche, à l’encontre de tout guide de bonnes pratique de mise en œuvre d’une enquête, qui
préconise très fortement la définition de la méthodologie et de l’échantillon APRES celui de la
problématique ; ce qui est somme toute logique.
Donc, dans l’idéal, si nous avions voulu directement questionner les stéréotypes des cadres d’Air
Liquide et vérifier si le critère de management avait un impact sur leurs stéréotypes, nous aurions :
1) Identifié les caractéristiques sociodémographiques des cadres d’Air liquide (en tout cas, au
moins des 4 sites ciblés par la mission Handicap d’Air Liquide)
2) Envoyé le questionnaire en ligne à l’ensemble de ces cadres, si le nombre total de cadres
était supérieur à 1000, pour assurer au moins un retour de 100 à 150 questionnaires
(moyenne de retour d’un questionnaire par voie postale ou électronique). Si cela n’avait pas
pu être possible, nous aurions changé notre méthode de passation du questionnaire pour
assurer un meilleur taux de retour, et donc maintenir un potentiel de questionnaires remplis
de 100 à 150.
3) Défini un échantillon représentatif de la population de référence des cadres des 4 sites d’Air
liquide, à partir du groupe de cadres ayant répondu au questionnaire
4) Analysé cet échantillon en y comparant les réponses au regard du critère de management.
5) Proposé une extrapolation à l’ensemble des cadres des 4 sites d’Air Liquide, l’échantillon
étant représentatif de la population de référence.
83 Vous trouverez le questionnaire complet en annexe 8
9
10‐11
12
76
Mais, dans la pratique, nous avons :
1) Identifié les caractéristiques sociodémographiques des cadres ayant répondu au
questionnaire. Ce groupe de 131 cadres devient alors notre population de référence pour
notre enquête
2) Défini un échantillon représentatif de notre population de référence. Il nous est apparu peu
pertinent de construire un échantillon à partir d’une population de référence de 131
personnes. Nous avons donc fait le choix de ne pas faire d’échantillon.
3) Analysé cet échantillon-population de référence en y comparant les réponses au regard du
critère de management.
Au final, nous pensons avoir respecté la méthodologie d’enquête, même si celle-ci a dû subir
quelques modifications au cours de sa mise en œuvre. Mais n’est ce pas le signe d’un bon dispositif
Salariés d’Air Liquide
Les 172 répondants au questionnaire
Pop de référence : Les cadres de
4 sites d’Air Liquide
Echantillon : Un groupe
représentatif de la pop de
référence, ayant répondu
au questionnaire
Pop de référence : Les cadres
ayant répondu au questionnaire
(131)
= Echantillon : les 131 cadres
ayant répondu au questionnaire
Ce qui aurait dû être: Ce qui est :
Notre échantillonnage
Figure 11 : Notre échantillonnage ‐ A.Relandeau
77
de contrôle que d’avoir pu intervenir et modifier notre démarche à temps, au nom du respect de
l’approche scientifique ?
Pour plus de lisibilité, nous proposons de vous présenter les étapes 13 à 15 dans le chapitre suivant,
en y ajoutant des actions de préconisations en lien avec l’analyse des résultats.
IV. ANALYSE DE NOTRE PROBLÉMATIQUE
Pour rappel, cette enquête s’est réalisée dans le cadre d’une recherche action, avec des objectifs
croisés de la part de l’entreprise partenaire et de nous même.
Ainsi certaines questions n’avaient d’autre intérêt que d’alimenter l’objectif de connaissance et de
réflexion du partenaire, sans avoir de lien direct avec notre problématique de recherche.
Nous présenterons dans ce paragraphe :
- Les résultats à plat de l’enquête complète, pour notre échantillon de 131 cadres ; accompagnée
d’une analyse de ces résultats ;
- Puis nous tenterons de répondre à notre problématique et à ses 2 hypothèses en comparant les
résultats des cadres managers avec ceux des cadres non managers, uniquement pour les
questions en lien avec notre problématique ;
IV.1. RESULTATS DE L’ENSEMBLE DU QUESTIONNAIRE POUR NOTRE ECHANTILLON
Notre échantillon – population de référence fut construit à partir d’une population globale de 172
salariés de 4 sites d’Air liquide.
Profil de l’ensemble de la population:
plutôt des hommes (51,8%), de plus de 45ans (40%), avec une ancienneté de + de
6ans au sein de Air Liquide (68%), sur des postes cadre (76%) sans management
(68%).
Une majorité côtoie au moins une personne handicapée dans leur entourage
personnel (62%)
Par contre, seul 45% d’entres eux travaillent avec au moins une personne
handicapée, dans son service ou un autre.
Nous avons été amenés à faire une analyse complète de l’ensemble de la population car c’était un
des rendus attendu de la part de l’entreprise partenaire. Vous trouverez en annexe 9 le document de
synthèse réalisé pour Air Liquide et présenté aux responsables syndicaux et référents Handicap des
4 sites ayant participé à cette enquête. Nous ne passerons pas plus de temps à discuter de ces
78
résultats ici, mais pourront être amené à y faire référence lors de notre analyse d’échantillon, car de
nombreux résultats se ressemblent (ce qui semble assez logique vu le peu d’écart de réponses entre
la population globale et notre échantillon, 131/172).
IV.1.1. DESCRIPTION DES VARIABLES SOCIODEMOGRAPHIQUES ET DE PROXIMITE AVEC LE
HANDICAP DE NOTRE ECHANTILLON
Vous trouverez en annexe 10 l’ensemble des tableaux et graphiques à plat de l’ensemble des
questions de cette enquête.
Cette première partie de questionnaire concerne les questions Q1 à Q9.
Comme nous le voyons, ce sont les questions 4, 5 et 6 qui nous ont permis de dégager notre
échantillon de 131 cadres, et de distinguer les cadres managers des cadres non managers. Pour Air
Liquide, un cadre « manager » est un cadre ayant formellement la responsabilité hiérarchique sur au
moins un salarié. Toutefois, à la construction du questionnaire, il nous a paru intéressant de
proposer une distinction entre les cadres ayant moins de 5 salariés sous leur responsabilité, ceux en
ayant entre 5 et 20 et ceux qui en ont plus de 20, le « poids » du management ayant certainement un
impact sur leurs pratiques. Nous avons cependant fait le choix de ne pas les distinguer lors de notre
analyse, car cela nous aurait donné de trop nombreux sous groupes, peu représentatifs par leur
nombre. Dans le cadre de cette recherche donc, un cadre est considéré comme manager à partir d’un
salarié sous sa hiérarchie directe. Si le temps nous l’avait permis il aurait été bien sur intéressant de
comparer aussi les résultats des cadres par nombre de salariés managés.
Notons aussi que la question 9, sur la reconnaissance de Travailleurs handicapés, est une question
intégrée au questionnaire à la demande de notre partenaire, qui souhaitait avoir une idée du nombre
de travailleurs handicapés ayant répondus. 13 cadres ont dit avoir une reconnaissance de
Travailleurs handicapés. Nous avons décidé de maintenir ces 13 personnes dans notre échantillon,
Q1 : Age Q2 : Sexe Q3 : Ancienneté dans l’entreprise
Q4 : Statut dans l’entreprise Q5 : Avez-vous à manager une
équipe en direct ?
Q6 : Si oui, combien ?
Q7 : Côtoyez-vous des personnes
handicapées dans votre entourage
personnel ?
Q8 : Dans votre entreprise,
travaillez vous avec des personnes
handicapées ?
Q9 : Avez-vous une reconnaissance de
travailleurs handicapés ?
79
malgré leur appartenance au groupe visé par notre enquête. En effet, leur nombre ne nous parait pas
suffisant pour avoir un impact scientifiquement vérifiable (13/131 = moins d’1% de l’échantillon) et
que nous avons déjà vu plus haut que les personnes « stéréotypées » peuvent elles même être
porteuses, voir alimenter (par l’effet de « la menace du stéréotype ») elles même les stéréotypes leur
étant associés.
Résultats : Notre échantillon est constitué principalement de cadres hommes (56,9%), entre 45 à
55 ans (31,3%), d’une ancienneté de + de 6 ans (67,9%) et plutôt non manager (60,3%). 61,1% de
l’échantillon dit côtoyer au moins une personne handicapée dans son entourage personnel et 47, 3%
affirme travailler avec au moins un travailleur handicapé dans son entourage professionnel (dans
leur propre service ou pas). Soulignons que seuls 17,6% de cet échantillon travaillent directement
(dans leur service) avec un travailleur handicapé.
Analyse : Notre échantillon est donc plutôt âgé, avec une expérience au sein d’Air liquide assez
conséquente et ayant une proximité avec la thématique assez forte, bien que cette proximité soit
plus marquée dans l’entourage personnel que professionnel. Ces résultats semblent confirmer l’idée
que ce sont surtout des personnes déjà sensibilisées par la thématique qui ont en priorité répondu au
questionnaire. Il s’agira donc de pondérer un peu à la baisse l’ensemble des résultats. Toutefois,
n’oublions pas que l’étude IMS de référence a démontré que la proximité avec une personne
handicapée dans l’entourage personnel ne semble avoir aucun impact sur les stéréotypes des
Travailleurs handicapés. Seule la proximité professionnelle jouerait un rôle important, comme nous
l’avons vu plus haut.
IV.1.2. RESULTATS DES DIFFERENTES MESURES DU STEREOTYPE SUR LES PERSONNES
HANDICAPEES EN ENTREPRISE
Cette partie est le cœur de notre questionnaire. Comme nous l’avons vu dans le chapitre sur le cadre
conceptuel, il est important de pouvoir questionner les stéréotypes de différentes façons, suivant
différentes mesures afin d’essayer de limiter ou du moins de faire ressortir les jeux de masquages
qui existent souvent sur ce type de thématique.
Q10 : Comment qualifieriez vous (en donnant des adjectifs) en général les personnes
handicapées ? (citez spontanément 3 adjectifs qui vous viennent à l’esprit concernant les personnes
handicapées. Inscrivez-les en commençant par l’adjectif qui vous semble le plus représentatif des
personnes handicapées, puis le second et le troisième.)
Résultats : Nous avons pu recueillir 325 propositions, dont 142 différentes.
Pour une lecture plus simple, nous avons regroupé les propositions par catégories.
80
Nombre de propositions %
caractéristiques positives (forte, déterminée, combative, dynamique…)
59 41,5%
Caractéristiques négatives (aigri, dépendant, anormale, faible, gênante….)
27 19,1%
les PH victimes de la société (isolée, marginalisée, discriminée…)
18 12.7%
Les PH différentes /compensations nécessaires (singulière, différente, accès protégé, spécifique..)
9 6,3%
Les PH comme les autres (normal, égal, identique…)
6 4,2%
PH: un intérêt pour la société (stimulante, enrichissante, innovante…)
5 3,5%
Autres (caractéristiques non catégorisables…)
18 12,7%
Total 142 100%
Pour prendre en compte l’ordre de citation des adjectifs et respecter ainsi le « poids » donné à
chaque adjectif (suivant la consigne de la question), nous avons attribuez un score de 3 points aux
mots proposés en premier, un score de 2 points à ceux proposés en second et un score d’1 point à
ceux cités en troisième place.
En voici le résultat comparé sur les 30 premiers items.
Liste des 30 propositions les plus citées – par nombre de propositions
Courageuse 32 9,8%
normale/comme les autres 18 5,5%
volontaire 18 5,5%
différente 13 4,0%
fragile 13 4,0%
ouverte 11 3,4%
motivée 7 2,2%
Sensible 7 2,2%
forte/caractère fort 6 1,8%
humaine 6 1,8%
battante/combative 6 1,8%
isolée 5 1,5%
gentille 5 1,5%
Sympathique 4 1,2%
défavorisé 4 1,2%
déterminée 4 1,2%
gênée 3 0,9%
joyeuse 3 0,9%
Liste des 30 propositions pondérées par ordre d’appariation
Courageuse 80 12,0%
normale/comme les autres 48 7,2%
volontaire 37 5,5%
différente 33 4,9%
fragile 29 4,3%
ouverte 20 3,0%
motivée 16 2,4%
Sensible 15 2,2%
forte/caractère fort 13 1,9%
humaine 12 1,8%
Sympathique 11 1,6%
battante/combative 10 1,5%
isolée 9 1,3%
défavorisée 8 1,2%
gentille 7 1,0%
déterminée 7 1,0%
gênée 7 1,0%
joyeuse 7 1,0%
Tableau 2 : Les 7 catégories d’adjectifs PH‐ Q10 ‐ Cadres
81
généreuse 3 0,9%
riche 3 0,9%
attachante 3 0,9%
curieuse 3 0,9%
positive 3 0,9%
affaiblie 2 0,6%
difficulté 2 0,6%
incapacité 2 0,6%
Mobilité difficile 2 0,6%
optimiste 2 0,6%
timide 2 0,6%
dépendante 2 0,6%
……..
Total 325 100%
généreuse 6 0,9%
riche 6 0,9%
affaiblie 6 0,9%
difficulté 6 0,9%
incapacité 6 0,9%
Mobilité difficile 6 0,9%
optimiste 6 0,9%
timide 6 0,9%
attachante 5 0,7%
dépendante 5 0,7%
discrète 5 0,7%
vulnérable 5 0,7%
……..
Total 668 100%
Nous remarquons que peu de différences apparaissent entre la liste des citations par nombre
d’apparition et celle des citations avec pondération. Nous décidons donc de ne pas poursuivre cette
comparaison qui ne semble finalement pas pertinente. Notons toutefois que les adjectifs négatifs
semblent « remonter » dans la liste pondérée. Cela signifie que ces adjectifs ont plutôt été proposés
en première ou seconde position. Nous pouvons faire l’hypothèse que les stéréotypes négatifs sont
plus marqués, sont plus présent à l’esprit des cadres répondants que les stéréotypes positifs, les
adjectifs positifs restant toutefois majoritaires. Il s’agit là d’une tendance sur laquelle nous ne
pouvons faire qu’une hypothèse mais celle-ci se confirme avec ce que l’on connait du
fonctionnement des stéréotypes, vu plus haut. Les stéréotypes négatifs sont souvent plus « ancrés »
que les stéréotypes positifs.
Pour faire ressortir les stéréotypes majeurs, nous avons décidé d’analyser plus particulièrement les
trois catégories au dessus de 10% de représentation, en omettant la catégorie « Autre » trop
hétérogène pour être analysé. Nous ne prendrons en compte que les 10 premiers adjectifs les plus
cités par catégorie.
Tableau 3 : tableau de comparaison des adjectifs suivant la pondération – Q10 ‐ Cadres ‐
82
Caractéristiques positives
1. Courageuse 32 18,9%
2. Volontaire 18 10,7%
3. Ouverte 11 6,5%
4. Motivée 7 4,1%
5. Humaine 6 3,6%
6. Forte 5 3,0%
7. Gentille 5 3,0%
8. Déterminée 4 2,4%
9. Sympathique 4 2,4%
10. Attachante 3 1,8%
….
Total 169 100%
Caractéristiques négatives
1. Fragile 13 25,5%
2. Gênée84 3 5,9%
3. Affaiblie 2 3,9%
4. Dépendante 2 3,9%
5. Difficulté 2 3,9%
6. Incapacité 2 3,9%
7. Lente 2 3,9%
8. Malheureuse 2 3,9%
9. Mobilité difficile 2 3,9%
10. Nécessitant l'aide 2 3,9%
…..
Total 51 100%
Tableau 4 : Liste des 10 adjectifs principaux PH par catégorie ‐ Q10 ‐ Cadres
Analyse : Les adjectifs librement exprimés par les 131 cadres sont principalement des adjectifs
positifs envers les personnes handicapées (41,5%). Si nous associons les adjectifs en lien avec la
victimisation des PH par la société et ceux sur l’intérêt des PH pour la société, c’est plus de la
moitié (57,7%) des adjectifs que l’on peut considérer comme positifs.
D’après les adjectifs cités, nous pouvons dire que les 131 cadres de cette enquête voient les
personnes handicapées comme des personnes volontaires, courageuses, ouvertes mais fragiles,
gênées et affaiblies. Nous remarquons que les adjectifs négatifs sont principalement liés aux
limitations physiques supposées des personnes handicapées.
Les catégories « comme les autres » et « différents » ont à peu prés le même poids. Ceci démontre
toute l’ambigüité liée à la problématique même de la question du Handicap, à savoir de reconnaitre
les différences pour mettre en place les moyens de compensation si nécessaire, tout en
reconnaissant les personnes handicapées comme les autres. Cette question va bien au-delà de notre
recherche et nous ne pourrons y répondre ici.
Q11 : Et dans le monde du travail ? (mêmes consignes que Q10)
Résultats : Nous avons recueilli 287 propositions, dont 144 différentes. De la même façon que
pour la question précédente, nous avons proposé de classer les adjectifs proposés sur les travailleurs
handicapés par catégorie, pour faciliter la lecture et analyse :
Nombre de propositions % observations
84 Nous avons intégré cet adjectif dans la « caractéristique négative » car nous avons jugé que ce terme induisait une connotation négative de la
personne handicapée par une limitation supposée.
83
caractéristiques positives (gai, généreuse, dévouée…)
54 37,5% Dont que 16 (soit 29,5%) en lien avec le travail (travailleuse, performante, intégrée, …)
Caractéristiques négatives (lente, limitée, aigri…)
28 19,4% Dont 10 (soit 35,7%) en lien avec le travail et la production (lente, limité, non capable….)
les TH victimes de la société/exclues de l'entreprise (mal aimée, sous estimée, ignorée…)
27 18,8% dont 12 sur la difficulté d'être présent en entreprise (inexistantes, absentes, rare….)
TH: un intérêt pour l'entreprise (nécessaire, dynamisant, valorisante…)
9 6,3%
Les TH comme les autres (comme les autres, pareil …)
6 4,2%
Les TH différentes (différentes, adaptation nécessaires….)
6 4,2% dont 3 (soit 50%) sur adaptation et compétences différentes
Autres 14 9,7%
Total 144 100,% Tableau 5 : les 7 catégories d’adjectifs TH – Q11 ‐ Cadres ‐
Liste des 15 adjectifs les plus cités, sans prise en compte de l‘ordre de citation :
Caractéristiques positives
1. Courageux 22 15,3%
2. Volontaire 21 14,6%
3. Motivé 10 6,9%
4. Sympathique 6 4,2%
5. Travailleur 6 4,2%
6. Déterminé 5 3,5%
7. Combatif 4 2,8%
8. Engagé 4 2,8%
9. Ouvert 4 2,8%
10. Riche 4 2,8%
….
Total 144 100%
Caractéristiques négatives
1. Fragile 5 13,2%
2. Effacé 2 5,3%
3. Gêné 2 5,3%
4. Incapacité 2 5,3%
5. Lente 2 5,3%
6. Limité 2 5,3%
7. Timide 2 5,3%
8. Aigri 1 2,6%
9. Assisté 1 2,6%
10. Dépendant 1 2,6%
….
Total 38 100%Tableau 6 : Liste des 10 adjectifs principaux TH par catégorie ‐ Q11 ‐ Cadres
Analyse :
Les stéréotypes sur les travailleurs handicapés sont donc aussi plutôt positifs. Toutefois, des
nuances sont à apporter :
Nous retrouvons plus d’adjectifs proposés en proportion du nombre total d’adjectifs, en
comparaison avec la question précédente sur les personnes handicapées. En effet, 144 propositions
différentes sur 287 propositions au total furent proposées dans la première question, tandis que 142
propositions sont différentes pour 325 propositions au total dans la seconde question. Cela tendrait à
84
démontrer que les stéréotypes sur les travailleurs handicapés sont plus « volatiles », moins ancrés
que ceux sur les personnes handicapées. Ceci se confirme d’ailleurs par le fait que peu de
différences existent entre les réponses aux deux questions. Les stéréotypes sur les travailleurs
handicapés sont pratiquement les mêmes que pour les personnes handicapées, à savoir : courageux,
volontaire, motivé mais fragile.
Si l’on regarde en détail les types d’adjectifs proposés dans cette question, peu sont finalement en
lien direct avec le travail. Mise à part la notion d’adaptation (proposé en cinquième position, mais
ne représentant que 2,8% de l’ensemble des propositions faites) qui semble être plus ou moins
intégrée par les cadres, peu font le lien entre « handicap » et « travail », si ce n’est avec un regard
plutôt négatif (35,7% des adjectifs négatifs sont en lien avec le travail tandis que seul 29,5% le sont
pour les adjectifs positifs).
Ainsi nous pouvons dire que les cadres ne font pas le lien entre handicap et vie professionnelle, si
ce n’est sur ses aspects négatifs. Ce ci peut être un frein psychologique fort à la prise en compte du
handicap dans l’entreprise et à leur engagement dans ce sens. D’un autre coté, le fait que les
stéréotypes sur les travailleurs handicapés ne semblent pas encore clairs peut être un atout pour les
faire évoluer plus facilement, dans un sens comme dans l’autre. Les actions de sensibilisations
devraient donc s’attacher tout particulièrement à travailler la question des stéréotypes
spécifiquement dans le cadre de l’entreprise afin de les faire évoluer. Les actions de sensibilisation
sur le handicap en général ne peuvent, selon nous, avoir un impact suffisant sur les stéréotypes sur
les travailleurs handicapés.
Q12 : Dans quelle mesure êtes vous d’accord avec les affirmations suivantes ? (1 correspondant
à « pas du tout d’accord » et 9 a « tout à fait d’accord)
Les PH représentent une opportunité de développement pour l'entreprise
Les PH donnent une mauvaise image de l'entreprise auprès de la clientèle
Je me sens mal à l'aise quand je suis auprès d'une PH
Les PH sont plus souvent que les autres en congé maladie
Les PH sont plus motivées et plus engagées dans leur activité professionnelle
Le handicap doit se définir par rapport à un poste
Un candidat a raison de cacher son handicap lors d'un entretien d'embauche
Le handicap est un frein pour la progression dans la carrière professionnelle
Les PH sont aussi performantes que les autres
Cette question avait pour objectif d’essayer de comprendre le regard porté sur les travailleurs
handicapés au sein de l’entreprise. Cette question est d’autant plus intéressante qu’elle est posée à
85
des personnes pouvant avoir un rôle (en particulier les cadres managers) à jouer sur le recrutement
et la carrière professionnelle des travailleurs handicapés.
Résultats :
Graphique 2 : Quelque s notes moyenne par affirmations – Q12 ‐ Cadres
Analyse :
Les cadres ont globalement confirmé les propositions « positives » et récusé celles « négatives », ce
qui semble confirmer des stéréotypes plutôt positifs sur les travailleurs handicapés. Mais nous
émettons une réserve quand à la totale sincérité des répondants sur certaines questions, en
particulier celles pouvant être étiquetées comme « politiquement correct ». En effet, certaines
contradictions apparaissent lorsque l’on croise des réponses :
Les personnes handicapées sont aussi performantes que les autres mais le Handicap est un frein à la
carrière professionnelle. Toutefois les travailleurs handicapés ne doivent pas cacher leur handicap
lors d’un entretien d’embauche: difficile position! Comment peut-on être d’accord avec
Graphique 1 : Taux d’accords et désaccords par affirmations – Q12 ‐ Cadres
86
l’équivalence de performances et reconnaitre en même temps que le Handicap est un frein à la
progression professionnelle? Serait ce dire que les critères de progressions professionnelles ne sont
pas les mêmes pour les travailleurs handicapés, et donc reconnaitre implicitement l’impact des
stéréotypes sur le développement de carrière des travailleurs handicapés ? Pour nous, cela démontre
de réponses politiquement corrects mais aussi d’une confusion dans l’approche du Handicap et
encore une fois, d’une difficulté à le lier à la notion de travail et de production.
Les travailleurs handicapés semblent globalement bien vu en entreprise, mais plus par leur « image
sociale valorisante » (bonne image, opportunité de développement..) que par leur participation à la
production!
A noter que prés de la moitié des répondants se disent mal à l’aise auprès d’une personne
handicapée.
Ainsi les actions de sensibilisations devraient mettre en avant les capacités professionnelles des
travailleurs handicapés, par un regard sur « ce qu’il sait faire », plutôt que sur ce « qu’il ne peut
plus/pas faire » avec un lien fort sur les moyens de compensations existants. Et favoriser au
maximum les échanges et rencontres entre travailleurs handicapés et non handicapés, afin de réduire
les possibles appréhensions des uns vis-à-vis des autres
Q13 : D’après la liste d’adjectifs proposée ci-dessous, êtes vous d’accord avec les propositions
suivantes concernant les personnes handicapées ?
Cette question est une question fermée et visait à mesurer d’une autre façon les stéréotypes
attachées aux personnes handicapées. Nous verrons si ses résultats confirment ceux identifiés avec
la mesure ouverte des questions 11 et 12.
Résultats :
Voici le tableau des résultats. Ce tableau présente la note moyenne donnée à chaque proposition
d’adjectif. Au dessus d’une note de 4.5 (moyenne de la notation, entre 1 et 9), la proposition est
considérée comme confirmée par les répondants.
Notons que l’effectif de réponses sur cette question fluctuait entre 126 et 129 répondants suivant les
propositions. Les moyennes proposées dans le graphique ci-dessous prennent en compte ces
différents effectifs.
87
Les propositions qui ont obtenu une moyenne inférieure à 4.5 ne sont pas validées par les 131
cadres répondants.
Il est intéressant de noter que certaines propositions, bien que pas confirmées (leur moyenne en
dessous de 4.5), obtiennent un pourcentage d’accord (de 5 à 9) assez élevé :
Affirmations Note moyenne Nombre de personnes d’accord
(entre 5 et 9) Accord (entre 5 et 9) en %
Lentes 4.2 75/128 58.7%
Effrayantes 2.6 30/126 24.3%
Dérangeantes 3.1 39/127 30.5%
Perturbées 3.3 45/128 34.8%
Tristes 3.5 55/128 42.6%
Tableau 7 : Récapitulatif des taux d’accord de quelques adjectifs – Q13 ‐ Cadres
Analyse :
Il est intéressant de noter que les adjectifs ayant une valeur plutôt positive sont confirmés, et celui
d’une valeur neutre (positif ou négatif selon chacun) n’est ni confirmé ni récusé. Il s’agit ici encore
peut être d’un effet de politiquement correct. Cette question est certainement celle qui lève le plus
fortement des mécanismes de défense par rapport à l’opinion réelle envers les personnes
handicapées. En effet, les cadres sont interrogés dans leur entreprise, à propos d’un sujet sensible et
sujet aux tabous. Ainsi, il est classique que certaines réponses données passent par le filtre du
« politiquement correct », ce que certains chercheurs appellent « le biais de désirabilité sociale ».
Graphique 3 : Notes moyenne par adjectifs positifs et négatifs– Q13 ‐ Cadres
88
Les scores sur les traits positifs mettent en évidence trois traits de personnalité qui sont au cœur des
stéréotypes. La moyenne globale sur les 8 traits positifs (qualités) étant de 6,5, les trois seuls
critères qui génèrent des moyennes supérieures à celle-ci sont « motivés », « déterminés » et
« sympathiques ». Ces résultats confirment bien l’analyse des stéréotypes de la question ouverte
présentée plus haut. On y retrouvait le thème du courage, de la volonté et de la détermination, et
celui de la « chaleur humaine ».
Concernant les items négatifs, on retrouve également un consensus fort dans les réponses des
participants mais davantage centrés sur deux dimensions de la personnalité. Les personnes
handicapées sont perçues comme des gens « fragiles » et « lents » avec des scores significativement
au dessus de la moyenne générale des traits négatifs (3,38). Là encore cela confirme l’analyse de la
question ouverte. A noter aussi les scores intéressants des mots « tristes » et « perturbées », mais
trop faiblement supérieur à la moyenne de cette catégorie pour être vraiment intégré aux
stéréotypes.
Ainsi, cette mesure fermée des stéréotypes met en évidence un stéréotype construit autour de cinq
éléments : les personnes handicapées sont perçues comme des gens motivés, déterminés et
sympathiques mais fragiles et lents.
Q14 : Par type de handicap proposé, êtes vous d’accord avec les propositions suivantes. (cochez
un chiffre entre 1 – pas du tout d’accord- à 9 – tout à fait d’accord)
C’est la troisième question fermée proposé pour mesurer les stéréotypes. Cette question est axée sur
les différences d’appréciation des personnes handicapées suivant leur type de handicap/déficience.
En effet, comme nous l’avons déjà vu, les stéréotypes sur les personnes handicapées ne sont pas
forcement homogènes et peuvent évoluer suivant la représentation que l’on se fait du type de
handicap/déficience et la « distance » que l’on prend avec ceux-ci.
Résultats : Ce tableau reprend, de manière comparative, les moyennes obtenues pour chaque
affirmation par type de déficience proposée. Pour faciliter la lecture, nous avons fait le choix de ne
pas y inclure les valeurs exactes, mais de faire ressortir les différences d’appréciation par type de
handicap.
89
Graphique 4 : Notes moyenne comparatives par affirmations et types de handicap – Q14 ‐ Cadres
Analyse :
Tout type de déficience confondue, les désaccords sont bien marqués sur les affirmations négatives
(faible rendement et problème de communication). Tandis que les résultats sur les affirmations
positives (acceptation par les collègues et bonne adaptation) sont plus hétérogènes, voir avec de
vraies différences par type de handicap.
Les personnes dépressives subissent les stéréotypes les plus négatifs, quelque soit la proposition
faite, mise à part sur la question de l’adaptation aux conditions de travail, bien qu’il soit étonnant
qu’il soit si « devancé » par les personnes asthmatiques et diabétiques. Cela montre un rejet massif
de ce type de déficience/handicap, surement du fait de la complexité de cette maladie. En effet, la
dépression est une maladie qui inspire souvent de l’incompréhension, parfois du mépris, en
particulier dans un contexte professionnel qui pousse à l’excellence et à la performance continue.
Cette maladie met à distance « les autres », qui ne souhaitent pas se reconnaitre ou s’identifier aux
personnes dépressives. Il serait important d’aborder cette question lors des actions de
sensibilisations afin de dédramatiser et démystifier cette maladie.
Les autres maladies, dites invisibles, sont par contre très bien perçues. Cela peut s’expliquer par
deux choses : elles permettent une forte identification (« cela peut m’arriver », « elle n’y est pour
rien ») mais surtout elles ne sont pas perçues comme un handicap En effet, de nombreux
commentaires nous sont parvenues sur la surprise de voir les diabétiques, asthmatiques et
épileptiques associés au groupe des personnes handicapées. Elles ne « subissent » donc pas les
effets des stéréotypes sur les personnes handicapées. Enfin, invisibles, elles ne sont aussi tout
simplement pas connues (et pourtant représentent 80% des causes de handicap).
90
Enfin, les personnes en fauteuil roulant sont aussi bien appréciées, et sont reconnues comme celles
qui posent le moins de difficulté en entreprise, au sein du groupe des « handicaps visibles », même
pour l’adaptation aux conditions de travail. Les personnes en fauteuil roulant « profitent » des
conséquences des campagnes de communication sur le handicap qui mettent très souvent en avant la
personne en fauteuil comme représentative du groupe des personnes handicapées, alors qu’elles
représentent moins de 3% de la population handicapée. Elles ne sont en plus, pas affublées de
représentations négatives quand à leurs capacités professionnelles, seule la question de
l’accessibilité physique des locaux fait débat. Elles sont donc plutôt perçues comme victime de la
société et plutôt bien intégrées dans les entreprises.
En résumé, il semble exister une forte dichotomie entre les handicaps « visibles » et « invisibles »,
plus important que les différentes typologies de handicap. A l’exception de la dépression! Il s’agira
de développer des modules de sensibilisation sur les différents type de déficience, en essayant au
maximum de limiter l’utilisation du « symbole » du fauteuil roulant, et en appuyant
particulièrement sur les handicaps dits visibles, en particulier ceux liés à la dépression.
IV.1.3. RESULTATS DE LA MESURE DU NIVEAU DE CONNAISSANCES DES 131 CADRES
Nous ne proposerons pas une analyse détaillée pour chacune de ces questions, mais donnerons à
chacune la bonne réponse. Une analyse globale sera proposée en fin de paragraphe.
Q16 : Quel est selon vous le groupe de personnes handicapées (selon le type de handicap) le
plus présent dans le monde?
Q17 : et en France ?
Type de déficience nbre Taux
Diabétiques 27 25,2%
handicap moteur 25 23,4%
Sourds 15 14,0%
Dépressifs 12 11,2%
NSP 12 11,2%
Aveugles 10 9,3%
Déficience mentale 2 1,9%
maladie invalidante 2 1,9%
Asthmatiques 1 0,9%
Epileptiques 1 0,9%
total 107 100,0%
Tableau 8 : Les types de handicaps les plus proposés et son graphique attaché –Q16 ‐ Cadres
91
Tableau 9: Les types de handicaps les plus proposés et son graphique attaché –Q17 ‐ Cadres
Réponse : Dans le monde = Pour l’instant il s’agit des personnes malentendantes, bien que le
diabète devrait devenir la première cause de handicap en 2015 selon l’OMS . En France, il s’agit de
la déficience auditive.
Le cliché du fauteuil roulant reste très fort. Toutefois, la connaissance sur ce sujet n’est pas si mal,
si ce n’est l’étonnante apparition de la dépression, qui est très minoritaire, même si elle est
effectivement de plus en plus présente dans les pays occidentaux.
Q18 : Comment attirez vous selon vous l’attention d’une personne malentendante ?
Nous avons proposée cette question, pour deux raisons :
- C’est une question qui oblige le répondant à réfléchir à ses propres attitudes, et peut être à
s’interroger sur celles-ci. Cette question avait un premier objectif pédagogique, que l’on ne
pourra bien sur mesurer immédiatement.
- Elle nous permet d’avoir une idée succincte du type de comportement des cadres et de leur
prise en compte ou pas des spécificités de certaines déficiences dans la communication. Elle
ne suffit pas pour poser une analyse pertinente, mais pouvait donner quelques indications.
Cette question permettait des réponses multiples, mais seuls 14 cadres l’ont fait.
types de déficience nbre taux
Dépressifs 34 30,9%
Diabétiques 24 21,8%
Sourds 16 14,5%
handicap moteur 13 11,8%
NSP 8 7,3%
Asthmatiques 6 5,5%
Aveugles 3 2,7%
déficience mentale 3 2,7%
maladie invalidante 2 1,8%
Epileptiques 1 0,9%
Total 110 100,0%
92
Résultats :
Tableau 10 : Comment attirer l’attention d’une personne malentendante, et son graphique attaché–Q18 ‐ Cadres
Réponse : Il n’y a bien sur pas de
« mauvaise » réponse. Mais il semble plus respectueux du corps de l’autre d’agiter les mains, signe
reconnu par les personnes sourdes (remplace les applaudissements par ex), plutôt que de lui toucher
l’épaule. Cela nous facilite le contact mais n’est peut être pas le plus agréable pour la personne
malentendante. Il serait intéressant, lors d’une action de sensibilisation de travailler « les bonnes
pratiques de communications » entres collègues et collègues handicapés suivant les types de
handicap (sans caricaturer).
Q 19 : Quelle est selon vous la proportion de personnes handicapées en France ?
Tableau 11 : Proportion de PH en France et son graphique attaché –Q19 ‐ Cadres
Réponse : selon l’étude 2002 de l’INSEE, prés de 26,4% de la population ont déclaré avoir une
limitation dû à un problème de santé en France, ce qui ne signifie bien sur pas qu’il y a 26% de
personnes « reconnues » handicapées en France. Pour information, l’OMS vient de porter
l’estimation mondiale à 15% de la population.
Q20 : En France, quel est selon vous le taux légal minimum de personnes handicapées dans les
entreprises de plus de 20 salariés ?
Modalité Effectifs %
En parlant plus fort 19 14,5%
En lui touchant l'épaule 90 68,7%
En agitant les mains 35 26,7%
Total 129
Nombre Taux
de 0 à 4% 15 12,2%
De 5 à 6% 30 24,4%
De 7 à 9% 12 9,8%
De 10 à 12% 31 25,2%
De 13 à 16% 19 15,4%
De 17 à 20% 7 5,7%
De 21 à 30% 7 5,7%
plus de 31% 2 1,6%
Total 123 100,0%
nombre Taux
De 0 à 2% 13 10,6%
De 3 à 4% 13 10,6%
93
Tableau 12: Taux légal TH en France et son graphique attaché –Q20 ‐ Cadres
Réponse : le taux minimum légal de travailleurs handicapés est de 6% en France.
Q21 et Q22 : Quel est selon vous le taux moyen réél dans ces entreprises (Q21) et au sein d’Air
Liquide (Q22) ?
Réponse : D’après une dépêche de l’AFP85 le taux
d’emploi de TH en 2009 en France était de 2,8%.
Les salariés d’air liquide pensent, pour la grande
majorité, que le taux d’emploi de TH chez Air
liquide est supérieur (voir le double pour certains)
au taux moyen français. Ce qui laisse à
Graphique 5 : Comparatif des taux réels cités pour la Fr et Air liquide –Q21 et 22 ‐ Cadres
penser qu’ils ont une bonne image de l’engagement de l’entreprise sur le sujet. Le taux réel au sein
d’Air Liquide est de 4%.
Analyse globale des questions de connaissance :
Les cadres ne semblent pas avoir une vision correcte du « monde du handicap ». En effet, chaque
question a reçu, en moyenne, moins de 30% de bonnes réponses. Toutefois, ce pourcentage
augmente pour les questions liées à l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés. Nous
avons remarqué, lors de la saisie des réponses, que les cadres avaient tendance à doubler le taux
proposé au sein d’Air Liquide par rapport à celui proposé pour l’ensemble des entreprises
françaises. Il semble qu’ils aient une appréciation plutôt positive de l’engagement d’Air Liquide
concernant l’insertion professionnelle de travailleurs handicapés.
85 paru sur le site « handicap.fr », visité le 8.05.12
5 44 35,8%
6 35 28,5%
De 7 à 10% 16 13,0%
Plus de 11% 2 1,6%
Total 123 100,0%
94
IV.1.4. VERIFIER LES JEUX DE MASQUAGE
Nous avons voulu tester les jeux de masquages pouvant exister sur ce type de questionnaire et de
thématique, comme nous en avons déjà parlé plus haut. Pour vérifier leur existence, et nous
permettre peut être de pondérer notre analyse, nous avons voulu comparer les réponses à une même
question proposée deux fois, incluant une variante dans la consigne lors de la seconde proposition
de la question. Pour ce faire, nous avons utilisé le principe de substitution dont nous avons parlé
dans notre paragraphe sur les stéréotypes. Rappelons que ce principe tend à démasquer plutôt les
stéréotypes négatifs.
Nous avons choisi de re-proposer la question 12, car c’est une question qui permet de balayer
différents aspect de la question du handicap en entreprise. Nous en avons simplement changé la
consigne de départ.
A noter que cette question fut une des questions modifiée suite au pré-test et à certains retours de
référents handicap qui se disaient gênés de répondre à la place des autres. Nous avons donc dû
ajouter une modalité « je ne sais pas ». Mais l’analyse de celle-ci devient alors difficile, ne sachant
distinguer les répondants qui ne savaient vraiment pas répondre et ceux qui étaient trop gênés pour
le faire. Nous décidons donc de ne pas proposer d’analyse particulière sur cette modalité de
réponse, si ce n’est de remarquer qu’elle correspond en moyenne à 20% des réponses. Toutes les
moyennes proposées dans cette question le sont en ne prenant pas en compte les réponses à cette
modalité.
Q15 : Dans quelle mesure pensez vous que les salariés de votre entreprise sont d’accord avec
les affirmations suivantes ?(cochez entre 1, pas du tout d’accord, et 9, tout à fait d’accord)
Les affirmations proposées sont des affirmations très fortement connotées. Un effet de
« politiquement correct » joue dans les réponses données à ces affirmations. Nous présentons donc
cette question en deux graphiques, un graphique pour les affirmations dites « positives », c'est-à-
dire dont le « politiquement correct » serait de confirmer l’affirmation (+ de 4.5) et un autre pour les
affirmations dites « négatives ou neutres », c'est-à-dire dont le « politiquement correct » serait de
réfuter l’affirmation (- de 4.5).
Résultats comparatifs avec la Q12 :
Notes moyennes pour les affirmations dites « positives »
95
Graphique 6 : Comparatif des notes moyennes par affirmation obtenue aux Q12 et Q15 ‐ Cadres
Analyse :
De façon générale, les réponses de la question 15 suivent les mêmes orientations que celles de la
question 12, c'est-à-dire que les affirmations validées restent validées et vice versa, qu’elles soient
positives ou négatives.
Toutefois, les moyennes des affirmations positives « perdent » toutes au moins un à deux points par
rapport à celles de la question 12. Cela signifie que les accords sur ces affirmations sont moins
marqués, voir sont à la limite du désaccord (trois d’entres elles ont moins de 0,5 points au dessus de
la moyenne d’accord de 4,5).
Les réponses aux affirmations négatives ou neutres sont quant à elles plus hétérogènes, avec des
différences moins marquées (moins d’un point de différence en moyenne) et des
Ces différences nous apparaissent cependant assez significatives pour dire que les cadres ont jugé
plus durement les travailleurs handicapés à travers la question 15.
Notes moyennes pour les affirmations dites « négatives ou neutres »
96
De ce fait, et en lien avec ce que nous avons pu dire sur les zones muette et les jeux de masquage,
nous pouvons affirmer que les cadres répondant à cette enquête ont bien mis en place un certain jeu
de masquage et que très probablement les réponses à la question 15 se rapprochent plus de la réalité
des stéréotypes sur les travailleurs handicapés que celles de la question 12.
Nous nous baserons donc plutôt sur les résultats de cette question (Q15) lors de notre travail sur la
problématique.
IV.1.5. SYNTHESE DE NOTRE ANALYSE
Les résultats de cette enquête auprès de 131 cadres d’Air Liquide vont dans le même sens que ceux
obtenus par l’étude IMS de référence.
Soulignons avant tout que la thématique du handicap est fortement sujette au « politiquement
correct » et que nous avons pu mettre en évidence des jeux de masquages significatifs. Il s’agit ainsi
de pondérer « à la baisse » les résultats obtenus lors de cette enquête. Nous pouvons toutefois
présenter les faits marquants identifiés lors de cette enquête :
Les personnes handicapées sont globalement perçues comme courageuses, volontaires, motivées
et déterminées, mais fragiles et lentes ;
Distinction entre les « personnes » handicapées et les « travailleurs » handicapés: Ces deux
catégories de stéréotypes sont positifs et pratiquement équivalent, ce qui nous amène à dire qu’il
n’existe finalement pas encore de stéréotypes marqués sur les travailleurs handicapés. De plus, le
peu de lien fait entre travail et handicap démontre que les travailleurs handicapés ont encore du mal
à être perçu comme facteur de productivité et de développement, leur intégration étant plutôt vu
comme un acte social à réaliser par l’entreprise ;
Une proportion non négligeable de cadres disent avoir du mal à travailler auprès de travailleurs
handicapés, qu’ils peuvent voir comme effrayants ou perturbés ;
De par certains commentaires et réponses, les cadres ont pointé l’impact de l’environnement
professionnel sur la réussite de l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés mais se
questionnent sur la faisabilité des adaptations et la réelle productivité de ceux-ci ;
La diversité des handicaps ne semble pas bien appréhendée par les cadres. Les personnes
diabétiques, asthmatiques ou épileptique ne sont pas intégrées au groupe des personnes handicapées
et ne subissent donc pas les stéréotypes qui leur sont associés. Par contre, la dépression, autre
maladie « invisible » est, elle, cause de puissants rejets.
97
Les cadres ont plutôt une mauvaise connaissance des réalités du monde du Handicap, en
particulier sur la diversité des typologies de handicap. Toutefois, plus les salariés sont jeunes, plus
ils le connaissent. Et ils semblent avoir une image positive de l’engagement d’Air liquide sur la
question.
A partir de cette analyse, nous serons amenés à proposer des préconisations d’actions, pouvant
permettre de faire évoluer les stéréotypes identifiés. Nous verrons cela dans le prochain chapitre.
Avant cela, nous allons chercher à approfondir notre question et tenter de répondre à notre
problématique, à savoir si le fait de manager à un impact sur les stéréotypes des cadres ? Ceci afin
de permettre d’affiner et adapter les actions de sensibilisation en fonction des réalités analysées.
IV.2. QUEL IMPACT DU MANAGEMENT SUR LES STEREOTYPES DES CADRES ?
Maintenant que nous avons identifié les caractéristiques marquantes des stéréotypes sur les
personnes handicapées en entreprise, sur les travailleurs handicapés, nous allons chercher à
répondre à notre problématique.
En effet, nous avons posé trois hypothèses. L’une que les cadres managers de notre échantillon
avaient des stéréotypes plus positifs que les cadres non managers, l’autre l’inverse et enfin la
troisième que le fait de manager n’avait aucune influence sur les stéréotypes des cadres. Nous
espérons ainsi pouvoir définir si le critère de management est un critère de corrélation pertinent
dans l’analyse des stéréotypes des cadres.
Pour vérifier cela, nous allons analyser les résultats des cadres managers et les comparer à ceux des
cadres non managers, et ce, que pour les questions en lien direct avec les stéréotypes, à savoir les
questions 10, 11, 13, 14 et 15.
IV.2.1. CONSTITUTION DES GROUPES DE CADRES MANAGERS ET CADRES NON MANAGERS
Comme l’étude IMS de référence a prouvé que les critères sociodémographiques n’impactent que
très faiblement les stéréotypes sur le handicap en entreprise (mis à part le niveau de qualification et
la proximité professionnelle, dont nous avons déjà parlé plus haut) nous faisons le choix de
comparer simplement l’ensemble des réponses des cadres managers avec l’ensemble des réponses
des cadres non manager.
Voici les caractéristiques de ces deux groupes :
Les cadres managers (Groupe 1) : Les cadres non managers (Groupe 2) :
98
Effectif : 52
Age : 56% ont plus de 45ans
Sexe : 73% sont des hommes
Ancienneté : 86% ont plus de 6ans d’ancienneté
Contact personnel avec au moins une personne handicapée : Oui à 65%
Contact professionnel avec au moins un travailleur handicapé : Oui à 67,3%
Effectif : 79
Age : 57% ont entre 25 et 45ans
Sexe : 54,4% sont des femmes
Ancienneté : 55,7% ont plus de 6ans d’ancienneté
Contact personnel avec au moins une personne handicapée : Oui à 58,2%
Contact professionnel avec au moins un travailleur handicapé : Non à 44,3% et 21% ne sait pas
Tableau 13 : Caractéristiques sociodémographiques de notre échantillon
Ainsi les deux groupes sont assez différents de par leurs critères sociodémographiques mais encore
une fois, ceux-ci n’impactent pas sur les stéréotypes. Nous aurons toutefois un regard particulier sur
les réponses du groupe 1, qui ont une proximité professionnelle plus importante que le groupe 2, ce
qui est reconnu comme ayant un impact positif sur les stéréotypes. Nous garderons cela en tête lors
de notre analyse comparée.
IV.2.2. COMPARAISON DES QUESTIONS 10 ET 11
Graphique 7 : Comparatif des adjectifs cités pour PH et TH, par groupe d’échantillon – Q10 et 11
Analyse : Les cadres non managers semblent avoir un jugement plus « indulgent » avec les
personnes handicapées et surtout avec les travailleurs handicapés, puisque peu d’items négatifs sont
99
proposés à leur encontre, ou alors en moindre proportion que d’après les cadres managers. Les
cadres managers sont aussi étonnamment les seuls à introduire la question de l’adaptation
nécessaire aux travailleurs handicapés, ce que l’on aurait pu supposer être une interrogation de la
part des managers, qui ont la responsabilité d’assurer des bonnes conditions de travail à leurs
équipes. Nous ne savons comment expliquer ce fait. Pour cela, il serait intéressant d’avoir plus
d’informations sur les actions de formation/sensibilisation proposées par Air Liquide et déjà suivies
par ces 131 cadres. Cela nous donnerait peut être une idée des raisons de ces différences.
Mais globalement les différences sur ces deux questions ne sont pas marquantes.
IV.2.3. COMPARAISON DE LA QUESTION 13
Graphique 8 : Comparatif des accords et de quelques notes moyennes par adjectif et par groupe d’échantillon – Q13
Analyse :
100
Cette question semble confirmer la tendance déjà pointée plus haut, à savoir que les cadres
managers ont un regard plus « dur » sur les personnes handicapées que les cadres non managers.
En effet, quant les cadres non managers ne confirment que deux items à valeur négatives (lentes et
fragiles) les cadres managers en confirment 4 (tristes, perturbées, lentes et fragiles) et ce, avec des
niveaux d’accord bien plus élevés que pour les cadres non managers (sauf pour « fragile »).
Les adjectifs « dérangeantes » et « effrayantes » obtiennent des scores importants (prés de 25%
chaque), au regard de leur valeur extrêmement négative, auprès des cadres managers et des cadres
non managers. Les cadres managers trouvent même les personnes handicapées dérangeantes à prés
de 38%.
Par contre, si l’on regarde le tableau non plus des accords/désaccords mais des moyennes, cette
tendance se confirme aussi, en particulier pour les adjectifs « perturbées », « dérangeantes » et
« intelligente ». Par contre bien que 51% des cadres managers trouvent les personnes handicapées
« tristes » (contre 37,7% des cadres non managers), la note moyenne de cet item ne varie pas
beaucoup pour les deux groupes. Ce qui tend à montrer une forte disparité dans les réponses des
cadres managers, car si plus de la moitié est plutôt d’accord mais que la moyenne de la note globale
reste en dessous de 4,5, cela signifie que les 49% de désaccords étaient fortement marqués (entre 1
et 2), tandis que les accords l’était moins (plutôt 5).
Les autres moyennes suivent à peu prés la même orientation, à savoir une plus grande indulgence de
la part des cadres non managers. La moyenne globale des items positifs est de 6,3 pour les cadres
managers et de 6,5 pour les cadres non managers. Tandis que la moyenne globale des items négatifs
et neutre est de 3,6 pour les cadres managers et de 3,4 pour les cadres non managers. Ce qui
confirme encore que les désaccords et accords sont un peu plus marqués du coté des cadres non
managers.
Donc si l’on prend le tableau complet des moyennes86, nous pouvons dire que :
- les cadres managers trouvent les personnes handicapées motivées (7,1), déterminées et
sympathiques (7) et ponctuelles (6,6) mais fragiles (5,4), lentes (4,4) et perturbées (3,9)
- Les cadres non managers trouvent les personnes handicapées motivées (7,4), déterminées et
sympathiques (7) et ponctuelles (6,5) mais fragiles (5,4), lentes (4,1) et tristes (3,4)
86 En annexe 11
101
IV.2.4. COMPARAISON DE LA QUESTION 14
1 : Les PH posent des problèmes de communication dans les équipes
2 : Les PH sont bien adaptées aux conditions de travail
3 : Les PH ont un rendement plus faible
4 : Les PH sont bien acceptées par leurs collègues
Graphique 9 : Comparatif des notes moyennes par affirmation et type de handicap et par groupe d’échantillon – Q14
Analyse : Encore une fois, pas de différences significatives sur cette question. Si ce n’est une
légère tendance de la part des cadres managers à être plus « durs » avec les personnes dépressives
102
que les cadres non managers. Les cadres non managers ont globalement des accords et des
désaccords plus marqués que les cadres managers.
IV.2.5. COMPARAISON DE LA QUESTION 15
Graphique 10 : comparatif des notes moyennes par affirmation, et par groupe d’échantillon – Q15
Analyse :
Les moyennes entre les deux groupes ne varient pas beaucoup (moins d’un point en général).
Toutefois, soulignons que les accords et les désaccords sont plus marqués chez les cadres non
managers.
Les cadres managers sont plus durs concernant les affirmations en lien avec la productivité des
travailleurs handicapés. Ils les considèrent tout aussi performant que les autres salariés avec une
note d’accord de 5,9 (moyenne à 4,5) quand les cadres non managers notent cette affirmation à 6,2.
Les mêmes types d’écart d’accord existent pour les affirmations suivantes : « Le handicap est un
frein à la progression professionnelle » et « les PH représentent une opportunité de développement
pour l’entreprise ». Deux hypothèses possibles pour expliquer cela : soit les cadres managers d’Air
Liquide ont des expériences professionnelles allant dans le sens d’une plus faible productivité des
travailleurs handicapés ; soit ceux-ci étant plus sensibles à cette question de productivité - puisque
responsables des résultats de leur équipe - ils ont tendance à sous évaluer ou à supposer moindre le
103
travail d’un travailleur handicapé. Nous pencherions pour la seconde hypothèse d’appréhension, à
priori, sous la pression de performance.
Une autre réponse nous interpelle:
Cadres managers :
Notes de 1 à 4 Notes de 5 Notes de 6 à 9 Ne sais pas
Je me sens mal à l'aise face à une PH 32,0% 14,0% 40,0% 14%
Cadres non managers :
Notes de 1 à 4 Notes de 5 Notes de 6 à 9 Ne sais pas
Je me sens mal à l'aise face à une PH 36,1% 9,7% 30,6% 24%
Les cadres managers se sentent plus mal à l’aise face à une personne handicapée que les cadres non
managers. Or, la proximité professionnelle des cadres managers avec des travailleurs handicapés est
plus importante (cf les caractéristiques des deux groupes) que pour les cadres non managers. Serait
ce dire qu’au sein d’Air liquide, les contacts professionnels avec les travailleurs handicapés ont
plutôt un effet négatif sur les interactions avec les travailleurs handicapés ? Ceci irait à l’encontre de
l’analyse faite dans l’étude IMS de référence qui affirme que le contact professionnel participe à
développer des stéréotypes plutôt positifs. Ou alors il s’agit, de la part des cadres non managers,
d’une difficulté à évaluer leurs ressentis face à un travailleur handicapé, n’ayant pas beaucoup
d’occasion d’être confrontés à cette situation. Nous ne pouvons confirmer l’une ou l’autre des
suppositions mais pencherions pour la seconde explication.
IV.2.6. SYNTHESE DE NOS HYPOTHESES
Nous avions émis trois hypothèses concernant l’impact du management sur les stéréotypes des 131
cadres d’Air Liquide ayant répondu à notre enquête :
H1 : La responsabilité de manager a un impact positif sur les stéréotypes des
cadres sur les travailleurs handicapés
H2 : La responsabilité de manager a un impact négatif sur les stéréotypes des
cadres sur les travailleurs handicapés
H3 : La responsabilité de manager n’a aucun impact significatif sur les
stéréotypes des cadres sur les travailleurs handicapés
104
D’après notre analyse comparative entre les réponses des cadres managers et des cadres non
managers, nous avons tendance à penser que le fait de manager a un impact négatif sur les
stéréotypes des 131 cadres interrogés.
En effet, bien que les résultats globaux à chaque question ne varient pas de manière significative –
les adjectifs les mieux notés/proposés restent les mêmes, les accords /désaccords sur les
affirmations sont du même ordre et les appréciations par type de déficience aussi – une tendance
générale s’est confirmée tout au long de notre analyse : les cadres manager ont des stéréotypes un
peu plus négatifs que les cadres non managers. En particulier sur les questions liées directement au
travail et à la productivité. Par contre, ils semblent être moins catégoriques dans leurs réponses, au
contraire des cadres non managers qui sont plus marqués dans leurs accords et désaccords.
Ainsi, nous validons l’hypothèse 2 :
Mais nous pensons que cette validation mériterait une confirmation lors d’une nouvelle enquête
auprès d’un plus grand nombre de cadres.
Notons que cette hypothèse va à l’encontre d’un des résultats de l’étude IMS de référence qui
affirme que la proximité professionnelle avec les travailleurs handicapés a plutôt tendance à faire
évoluer positivement les stéréotypes.
Rappelons que le contexte professionnel a un impact sur les stéréotypes sur les personnes
handicapés des salariés. C’est de cette analyse que nous avons basé notre réflexion tout au long de
cette recherche, afin de démontrer l’importance d’une analyse fine des stéréotypes pour chaque
entreprise, et non un état des lieux global sur la question. Nous ne pouvons malheureusement pas ici
donner plus de détails sur le contexte professionnel d’Air Liquide, au-delà de ce que nous avons pu
déjà présenté dans le paragraphe sur le terrain d’expérimentation. N’ayant pu avoir accès à des
informations complémentaires sur les répondants, il ne nous est pas possible de définir ce qui, dans
le contexte professionnel d’Air Liquide et l’expérience professionnel des cadres répondants,
pourrait expliquer cette différence dans les stéréotypes sur les personnes handicapées. La première
hypothèse serait de dire que les expériences vécues par les cadres managers renforcèrent plutôt les
stéréotypes négatifs. Pour faire une analyse plus fine et comprendre ce qui entraine ces stéréotypes
au sein d’Air Liquide, il serait pertinent de compléter cette enquête par des entretiens qualificatifs
avec des cadres managers, l’équipe de la mission Handicap et des travailleurs handicapés.
H2 : La responsabilité de manager a un impact négatif sur les stéréotypes des
cadres sur les travailleurs handicapés
105
V. CONCEVOIR LA RÉPONSE-ACTION DE NOTRE PROBLÉMATIQUE
V.1. SYNTHESE DES PRINCIPALES PRECONISATIONS ISSUES DE NOTRE RECHERCHE – ACTION
Les préconisations présentées ici sont directement issues de l’analyse de notre enquête mais aussi de
l’enquête IMS de référence, sur les quelques analyses comparables.
V.1.1. EN AMONT DES ACTIONS DE SENSIBILISATION :
Intégrer la question du Handicap dans le processus d’élaboration de la politique formation d’Air
Liquide, en s’appuyant sur la signature d’un accord Entreprise avec l’Agefiph ;
Lancer un diagnostic participatif sur la situation des travailleurs handicapés au sein d’Air Liquide
et relancer l’enquête réalisée lors de cette recherche-action auprès d’un panel plus important de
salariés pour confirmer et/ou identifier les stéréotypes des autres catégories professionnelles d’Air
Liquide.
Définir un calendrier pluri annuel des actions de formation et sensibilisation sur le champ du
Handicap des salariés d’Air Liquide, pour en faciliter la mise ne œuvre effective ;
V.1.2. CONCERNANT LES ACTIONS DE SENSIBILISATION EN ELLES MEMES
Rendre obligatoire la participation des salariés aux actions de sensibilisation, pour s’assurer d’un
impact collectif de ces actions et démontrer l’engagement d’Air Liquide sur le sujet;
Construire des actions de sensibilisation adaptées suivant les caractéristiques professionnelles
des participants, en particulier des sessions spécifiques pour les cadres managers ;
Les actions de sensibilisation doivent être fortement voir uniquement orientées sur la question du
Handicap en Entreprise, des travailleurs handicapés ;
Celles-ci doivent :
Intégrer un module de discussion autour du fonctionnement des représentations sociales et
stéréotypes pour en diminuer les effets (cf notre chapitre conceptuel) ;
Intégrer un temps spécifique sur l’ensemble des typologies du handicap existantes, et un
point particulier sur la dépression. Mais attention à plutôt « utiliser » la bonne image des
maladies pour améliorer celle du handicap plutôt que l’inverse;
106
Ne plus s’appuyer sur l’image du travailleur handicapé motivé et déterminé, qui ne fait que
renforcer des caractéristiques affectives au détriment des caractéristiques de production. Et
éloigne finalement encore plus le travailleur handicapé du monde du travail;
Intégrer une discussion sur le concept de « situation de handicap », qui introduit fortement la
question de l’impact de l’environnement dans la définition même du « handicap » et celle de
d’adaptation, clé du « travailler ensemble avec nos différences » ;
Dans la même ligne, présenter les différents moyens de compensation existants, sans
focaliser sur les aspects purement techniques;
Proposer, par le biais de jeux participatifs, une réflexion sur « les bonnes pratiques de
communication » entre personnes ayant des différences, dans le cadre du travail.
Enfin, il est essentiel de monter des actions qui permettent la rencontre entre les salariés d’Air
Liquide et des travailleurs handicapés (témoignages, journée de « stage » en entreprise pour des
travailleurs handicapés, faire appel à des « pairs » émulateurs, projets collectifs avec des entreprises
adaptées…);
V.1.3. EN COMPLEMENT AUX ACTIONS DE SENSIBILISATION
Développer des débats/échanges entre salariés sur l’intégration de travailleurs handicapés,
s’appuyant sur les expériences de chacun (par exemple, une réunion mensuelle ou trimestrielle
inter-équipe sur la question de la diversité);
Proposer tous les deux ans un module de formation de mise à jour pour les acteurs clés
(Direction, RH, Responsable formation, référents handicap, médecin du travail….) sur la question
du Handicap en entreprise ;
S’appuyer sur les expériences réussies internes et proposer aux travailleurs handicapés d’Air
Liquide de participer/animer des échanges avec les autres salariés ;
Et surtout planifier ces actions pour qu’elles ne soient pas trop nombreuses mais pas moins d’une
par an. En effet, trop nombreuses ou trop espacées, elles sont alors contreproductives ou inefficaces.
V.2. NOTRE ACTION DE SENSIBILISATION POUR LES CADRES MANAGERS D’AIR LIQUIDE
Comme le rappelle T. Ardouin87, « le cahier des charge est un instrument pertinent dans
l’ingénierie de formation. […] Ces outils sont […] indispensables pour la réalisation finalisée et
87 Ardouin T : « Ingénierie de formation pour l’entreprise », Dunod, 3eme édition, 2010, p123
107
une implication importante des différents acteurs dans un projet plus global. Le cahier des charges
est donc ce document qui va faciliter et permettre la contractualisation entre le client et le
prestataire, l’entreprise et le fournisseur. »
Et selon les termes de l’Afnor, « le cahier des charges d’une action de formation est « un document
contractuel fixant les modalités d’exécution d’une action de formation. Ce document contient les
éléments administratifs, pédagogiques, financiers et organisationnels pour atteindre des objectifs
déterminés. »88
C’est un document essentiel dans la relation client- fournisseur, car il permet de contractualiser les
attentes de l’un et de construire le service adapté à la demande de l’autre.
V.2.1. PROPOSITION DU CAHIER DES CHARGES
Ce cahier des charges est une proposition virtuelle, non discutée formellement avec la mission
Handicap d’Air Liquide. Mais celui-ci s’appuie sur les réalités des besoins identifiés et des
discussions entamées en fin de mission professionnelle avec Air Liquide concernant une suite
éventuelle à donnée à notre collaboration. Nous n’intégrons pas dans cette proposition de cahier des
charges les éléments d’ordre administratif, financier ou de détails organisationnels, car nous n’en
avons pas les informations. Par contre, nous les faisons bien apparaitre dans notre proposition,
comme éléments constitutif de celle-ci.
CAHIER DES CHARGE - ACTION DE SENSIBILISATION – AIR LIQUIDE
PRÉSENTATION DE L’ENTREPRISE
…………
LE RÉSUMÉ DE L’ACTION
Titre de l’action : o « Handicap : travailler ensemble avec nos différences »
Domaine de l’action : o L’insertion professionnelle de travailleurs handicapés
Objectif général :
o Sensibiliser les cadres managers d’Air Liquide à l’intégration de travailleurs handicapés dans leurs équipes
Cette action s’inscrit dans le cadre de la politique Handicap d’Air Liquide. Elle vient en complément d’autres actions visant à favoriser l’intégration et/ou le maintien dans l’emploi de travailleurs handicapés
88 NF X50 ‐750‐1
108
LE CONTEXTE DE L’ACTION
Cette action fait suite à une recherche action que nous avons menée sur l’identification des stéréotypes sur les travailleurs handicapés des cadres d’Air Liquide ; Cette recherche action fut commanditée par l’équipe de la mission Handicap France d’Air Liquide qui s’interrogeait sur les freins à l’intégration de travailleurs handicapés au sein de leur organisation. En effet, malgré les diverses actions menées depuis 2006 par Air Liquide (partenariats avec des acteurs extérieurs du handicap, sous-traitance auprès d’entreprises adaptées, formations des responsables RH sur l’intégration de travailleurs handicapés, la mise en place de référents handicap sur chaque site, des actions de communication…), le taux d’emploi de travailleurs handicapés reste assez faible. Suite à différents échecs d’intégration de travailleurs handicapés, la mission Handicap d’Air Liquide s’est interrogée sur les raisons de ces échecs et a émis l’idée qu’une des raisons pouvait être liée à « la mauvaise image » que pouvait soulever les travailleurs handicapés et aux appréhensions que pouvaient ressentir les salariés, en particulier les responsables d’équipe, à travailler avec un travailleur handicapé. Intéressée par une étude présenté en 2011 sur les stéréotypes sur les personnes handicapées en entreprise, la mission handicap a souhaité identifier les stéréotypes présent dans son organisation, permettant ainsi de peut être comprendre certains freins à l’intégration de travailleurs handicapés et y remédier par des actions de sensibilisation adaptées à leur contexte. Cette analyse des stéréotypes a été réalisée au premier semestre 2012 auprès de 172 salariés d’Air Liquide dont 131 cadres. Cette enquête a révélé que les cadres managers semblaient avoir des stéréotypes un peu plus négatifs que les cadres non managers. La mission Handicap d’Air Liquide a donc souhaité cibler une action de sensibilisation spécifique pour ce public là.
LE PUBLIC VISÉ
Profil professionnel des participants : o Les cadres managers
Nombre de participants : o L’ensemble des cadres managers de 4 sites ciblés par Air Liquide, par sessions de
25 participants maximum Pré-requis nécessaires pour suivre l’action :
o Etre, au moment de la formation, sur un poste de cadre manager depuis au moins un an, avec ou sans expérience de management d’équipe intégrant un ou plusieurs travailleur(s) handicapé(s)
OBJECTIFS DE LA FORMATION
Les objectifs généraux de l’action : o Les cadres managers participants seront sensibilisés à l’intégration de travailleurs
handicapés dans leur équipe, par une meilleure connaissance des réalités du monde du handicap, par une prise de conscience des effets des stéréotypes sur l’intégration de travailleurs handicapés et par une approche des « bonnes pratiques » dans le « travailler ensemble ».
Les objectifs pédagogiques : A l’issue de l’action de sensibilisation, le participant :
o Dispose de connaissances de base sur l’évolution historique des représentations du handicap et sur la situation actuelle du monde du handicap, en particulier lié à l’emploi ;
o Sait définir ce qu’est une situation de handicap et identifier les différents facteurs qui créent cette situation ;
109
o Connait les droits fondamentaux des personnes handicapées et les principes de la politique Handicap mise en application en France ;
o Connait les processus internes à Air Liquide quant à l’intégration de travailleurs handicapés et les moyens mis à sa disposition en tant que manager ;
o Prend conscience de l’importance de l’approche inclusive et de son application au sein de l’entreprise ;
o Prend conscience des stéréotypes existants sur les travailleurs handicapés, les questionne et prend conscience de leurs impacts sur l’intégration professionnelle de travailleurs handicapés ;
o Dispose d’exemples, de témoignages et de préconisations concrètes, lui permettant de développer des « bonnes pratiques » dans l’intégration de travailleurs handicapés.
LA CONCEPTION PÉDAGOGIQUE DE L’ACTION
L’action de sensibilisation est répartie en 6 séquences : 1. Qu’est ce qu’une situation de Handicap – Mise en situation ; 2. Réflexion autour du modèle de référence de compréhension du handicap 3. Les travailleurs handicapés : chiffres, diversité des situations, loi 2005, processus interne
Air Liquide 4. Stéréotypes et autres freins environnementaux 5. L’approche inclusive 6. Des bonnes pratiques d’intégration de travailleurs handicapés ? : Témoignages, débats,
visite et travail en groupe pour l’élaboration d’un mini-guide pratique ;
Méthodes pédagogiques envisagées pour l’animation de l’action : L’animateur – formateur devra être en mesure de varier son animation en fonction des sujets abordés, pour assurer la meilleure compréhension et implication des participants tout au long de l’action. Ainsi, l’animateur-formateur proposera les méthodes suivantes :
o Expositive : Temps structurés pour transmettre des connaissances sous forme d’exposé, avec des temps de débats collectifs et exercices. ;
o Par témoignages : Temps d’échanges avec des intervenants spécialistes de la thématique abordée, en particulier de travailleurs handicapés et salariés d’entreprise adaptée, venant témoigner et discuter de leur parcours personnels et expériences professionnelles et participer a certains travaux en groupe ;
o Active : Temps de travail en groupe où l’expérience personnelle des participants est sollicitée pour apprécier les situations et résoudre les questions/problèmes ;
o Participative : Temps de mise en situation, jeux de rôle Modalités d’accès à l’action de sensibilisation :
o Présence obligatoire o Délivrée sur place, au sein d’un des sites d’Air Liquide, durant le temps de travail
Calendrier : o Une session de 3 jours temps plein o Une session sera proposée toutes les deux semaines, les lundis, mardi et mercredi.
Le nombre total de sessions sera à déterminer avec la mission Handicap d’Air Liquide
110
L’ÉQUIPE DE FORMATION
Acteur de la formation Rôle
1 Animateur-formateur Animation de l’ensemble des séquences, en assurant le bon déroulé de l’action
Responsable des apports théoriques
2 Intervenants - Témoins Partage d’expérience avec les participants
Experts Handicaps participant à certains travaux en groupe
LES MOYENS ET LES RESSOURCES MIS A DISPOSITION
……….
BUDGET DE L’ACTION
………..
EVALUATION DE L’ACTION
Modalités d’évaluation: o Deux méthodes d’évaluation :
o un questionnaire d’évaluation des connaissances/ idées posé en amont et un mois après l’action
o un questionnaire de satisfaction à remettre à l’animateur-formateur en fin d’action
FIN
V.2.2. PROPOSITION DE RÉPONSE PÉDAGOGIQUE
Nous nous proposons maintenant de créer l’action de sensibilisation préconisée dans le cahier des
charges comme réponse à la situation rencontrée lors de notre recherche-action au sein d’Air
Liquide.
Tout comme le cahier des charges, cette proposition d’action de sensibilisation est une proposition
virtuelle. Mais nous l’avons construite comme une réelle action de sensibilisation, basée sur notre
expérience professionnelle et sur les préconisations extraites de notre recherche actions sur les
stéréotypes des cadres managers d’Air Liquide. Et nous espérons bien la mettre en œuvre
prochainement dans le cadre de notre nouveau poste de formatrice « sensibilisation » au sein de
L’ADAPT.
111
ACTION DE SENSIBILISATION – AIR LIQUIDE
INTRODUCTION
Cette action de sensibilisation répond à une demande de l’entreprise Air Liquide.
Celle-ci souhaite en effet proposer une action de sensibilisation à l’ensemble de ses cadres managers. Cette décision fait suite à une enquête interne qui a mis en avant les stéréotypes sur les travailleurs handicapés des cadres managers d’Air Liquide.
L’objectif général de cette action : Les cadres managers participants seront sensibilisés à l’intégration de travailleurs handicapés dans leur équipe, par une meilleure connaissance des réalités du monde du handicap, par une prise de conscience des effets des stéréotypes sur l’intégration de travailleurs handicapés et par une approche des « bonnes pratiques » dans le « travailler ensemble ». Le cahier des charges de cette action propose 6 séquences :
1. Qu’est ce qu’une situation de Handicap – Mise en situation ; 2. Réflexion autour du modèle de référence de compréhension du handicap 3. Les travailleurs handicapés : chiffres, diversité des situations, loi 2005, processus interne
Air Liquide 4. Stéréotypes et autres freins environnementaux 5. Approche inclusive et ses outils (approche des « chemins jumeaux » et principe du dessin
universel) 6. Des bonnes pratiques d’intégration de travailleurs handicapés ? : Témoignages, débats,
visite et travail en groupe pour l’élaboration d’un mini-guide pratique ; Voici notre proposition pédagogique : La première séquence sera bien sûr précédée d’un temps d’introduction du module de formation pour lequel il ne sera pas donné de détails :
- Présentation des objectifs du module ; - Présentation du programme et des horaires ; - Présentation individuelle et brève des différents participants ; - Présentation des règles de fonctionnement de l’animation et de la prise de parole au
cours de la formation ; - Retour sur les attentes des participants (questionnaire envoyé en amont de la
formation) qui seront présentés aux participants en début de séance.
112
SÉQUENCE 1 : QU’EST CE QU’UNE SITUATION DE HANDICAP – MISE EN SITUATION.
Objectifs pédagogiques :
- Les participants prennent conscience, par le vécu, du caractère situationnel du handicap ;
- Les participants prennent conscience que la situation de handicap est une interaction de facteurs personnels et de facteurs environnementaux ;
Contenu
Il s’agit d’une mise en situation des participants pour une démystification de la question du handicap et une identification individuelle, vécue et sensible des facteurs constituant une situation de handicap.
Cette mise en situation est suivie d’un débriefing collectif et d’un échange sur les situations de handicap.
Il pourrait être envisagé d’associer des personnes handicapées membres d’une ou plusieurs associations partenaires de l’organisation ou proposé par l’animateur -formateur. L’organisation de cette section pourrait même être totalement confiée à une association partenaire.
Durée
La durée prévue est de 3 heures.
Etat donné qu’il s’agit du premier temps du module et de la nécessité d’un temps d’introduction qui peut prendre jusqu'à une heure, la partie débriefing pourrait être réalisé après le repas de midi, ce qui permettrait de laisser les participants mûrir et digérer le vécu de la première matinée.
Notions essentielles :
Situation de handicap ; Facteurs personnels ; Facteurs environnementaux ; dynamique/évolution de la situation de Handicap
Activités de réalisation :
Activités Durée Matériels / supports
Mise en situation :
- Expliquer les objectifs de la mise en situation en n’évoquant pas les différents facteurs de situation de handicap ; Constituer les binômes ; Présenter les consignes et rôle de chacun dans le binôme
30 mn
Parcours établis préalablement
Matériel : foulards
Réalisation des parcours par les participants 1 h 30– Matériels prévus
Débriefing collectif sur les ressentis, les rôles de chacun, les difficultés, la communication dans le binome…)
Conclure en introduisant les notions de situation de handicap, de facteurs environnementaux et facteurs personnels
1 heure
Paper board
113
SÉQUENCE 2 : RÉFLEXION AUTOUR DU MODÈLE DE RÉFÉRENCE DE COMPRÉHENSION DU HANDICAP
Objectifs pédagogiques
- Les participants maîtrisent les notions essentielles de compréhension du handicap ; - Les participants savent faire la différence entre déficience, incapacité et handicap. - Les participants savent repérer dans une situation de handicap, les différents facteurs
qui interagissent pour constituer cette situation ;
Contenu
Présentation et échanges autour du modèle de référence de compréhension du Handicap, le Processus de Production du handicap (PPH) et autour de l’évolution historique des concepts de compréhension du Handicap.
Proposition d’exercices d’application pour maîtriser les notions essentielles de compréhension du handicap : cause, déficience, incapacité, obstacle, facilitateur, handicap.
Durée
La durée prévue est de 2h30.
Notions essentielles
Ce sont l’ensemble des notions permettant la construction et la compréhension du modèle PPH :
causes du handicap ; - facteurs personnels ; - systèmes organiques : intégrité – déficience ; - Aptitudes : capacité – incapacité ; - facteurs environnementaux : obstacle – facilitateur ; - habitudes de vie : participation sociale – situation de handicap.
Activités de réalisation :
Activités Durée Matériels / supports
Présentation de l’évolution historique des modèles de compréhension du handicap
30min PPT
Présentation du modèle de référence PPH
- Introduction : lien avec les notions identifiées et présentées en fin de séquence 1 ;
- Présentation du PPT.
45h Power Point (PP)
Echanges autour de la présentation précédente 15 mn
Exercices d’application
- Reconstituer les groupes de la matinée ;
- Distribuer les fiches d’exercice vierge ;
- Répartir les groupes dans différentes salles ;
- Correction collective avec présentation des résultats sur PPT.
1 h
Fiches d’exercice préparées et reproduites préalablement
PPT exercices
114
SÉQUENCE 3 : TRAVAILLEURS HANDICAPÉS ?
Objectifs pédagogiques :
- Les participants connaissent les droits fondamentaux des personnes handicapées et les principes de la politique Handicap mise en application en France ;
- Ils reconnaissent les différents types de déficience/handicap, et en particulier les niveaux de représentativité des maladies dont la dépression ;
- Les participants connaissent les processus interne à Air Liquide quant à l’intégration de travailleurs handicapés et les moyens mis à sa disposition en tant que manager ;
Contenu :
Les participants connaissent les éléments principaux de la loi 2005 sur l’emploi de travailleurs handicapés. Ils prennent connaissance de la diversité des handicaps pouvant être reconnus (avec un point particulier sur la dépression), de la situation actuelle des travailleurs handicapés en France et au sein d’Air Liquide.
Un représentant de la mission handicap d’Air Liquide vient présenter la politique handicap de l’entreprise et les actions/moyens/outils à la disposition des cadres managers pour favoriser l’insertion de travailleurs handicapés
Durée :
La durée prévue est de 2h
Notions essentielles :
Loi 2005, RQTH, handicaps visibles/invisibles ; adaptations, moyens de compensation
Activités de réalisation
Activités Durée Matériels / supports
Droits des personnes handicapées :
- Présentation de la convention internationale des droits des personnes handicapées, ratifiée par la France
- Réflexion sur l’approche « Droits »
La loi 2005 en France :
- Quizz Loi 2005 sur l’emploi, réalisé en collectif
- Synthèse des informations
45min Video projecteur
Discussion sur les différents types de handicap :
- Identification, par le biais d’un jeu en petit groupe, des différents type de handicap existants
- Point sur la dépression et ses réalités
30mn Paper board
115
Intervention de la mission handicap Air Liquide :
- Présentation de la politique Handicap du groupe
- Discussions sur les actions/moyens mis à disposition
45min PP
Etude de cas
SÉQUENCE 4 : STÉRÉOTYPES ET AUTRES FREINS ENVIRONNEMENTAUX
Objectifs pédagogiques :
- Les participants savent identifier les freins environnementaux au sein d’Air Liquide
- Ils comprennent le fonctionnement des représentations sociales et des stéréotypes et prennent conscience de leur impact sur l’intégration professionnelle de travailleurs handicapés et sur leur management
- Ils sont en mesure de faire des recommandations quant à la réduction des freins environnementaux
Contenu
Les cadres définissent leurs stéréotypes sur les travailleurs handicapés à partir d’un jeu de rôle. L’animateur formateur leur présente l’étude sur les stéréotypes en entreprise et leur propose de réfléchir à l’impact de ceux-ci sur l’intégration des travailleurs handicapés.
Ils identifient les freins environnementaux existants au sein d’Air Liquide, et proposent des recommandations d’action pour les réduire.
Durée :
La durée prévue est de 2h
Notions essentielles
Représentation sociale du handicap, stéréotypes, biais décisionnel, freins environnementaux
Activités de réalisation
Activités Durée Matériels / supports
Stéréotypes :
- Jeu de rôle afin de lancer la discussion sur les stéréotypes
- Identification des stéréotypes existants par un jeu de post it, réalisé en petit groupe
- Synthèse des stéréotypes
- Présentation de l’étude IMS sur les stéréotypes en entreprise
45min Post it
Video projecteur
116
Fonctionnement des représentations sociales et stéréotypes
Présentation et débat sur les définitions et fonctionnement des représentations sociales, en particulier sur les effets de ceux ci sur nos comportements (« menaces du stéréotypes, activation des stéréotypes, jeux de masquages)
30mn Paper board
Identification des freins environnementaux
En groupe de travail, identification des freins environnementaux au sein d’Air Liquide et proposition d’actions pour les réduire
45h Paper board
SÉQUENCE 5 : APPROCHE INCLUSIVE
Objectifs pédagogiques - les participants prennent conscience des deux principaux modes d’interventions pour
permettre la participation sociale des personnes handicapées : l’approche spécifique et l’approche inclusive ;
- ils sont sensibilisés à l’importance de privilégier l’approche inclusive, tout en comprenant la complémentarité avec l’approche spécifique (conditions nécessaires et préalables pour l’utilisation d’une approche inclusive) ;
- ils s’interrogent sur leurs propres pratiques, champs et modes d’intervention dans le domaine du handicap.
Contenu
Les cadres managers identifient, au sein d’Air Liquide les actions, liées à l’intégration de travailleurs handicapés, qui tiennent plutôt d’une approche spécifique ou plutôt d’une approche inclusive.
Ces deux notions sont ensuite introduites et discutées en insistant sur les arguments pour privilégier autant que possible l’approche inclusive.
La complémentarité des deux approches est ensuite discutée en introduisant la notion de chemins jumeaux (Twin Track approach), du principe du dessin universel et des règles pour une meilleure participation sociale des travailleurs handicapés, ce qui permet de faire le lien avec la séquence 3 et 4 qui aborde la question des droits des travailleurs handicapés.
Durée
La durée prévue est de 2 heures
Notions essentielles
- Approche inclusive;- Approche spécifique ; - Approche intégrée ;- Approche des chemins jumeaux
Activités de réalisation
Activités Durée Matériels / supports
Témoignage d’un parcours personnel et professionnel d’un 1h
117
travailleur handicapé.
- Un intervenant vient présenter son parcours et échanger sur son expérience avec les participants
En groupe de travail, repérage des modes d’action présenté lors du témoignage qui relèvent d’une approche spécifique et ceux qui relèvent d’une approche inclusive. (Participation de l’intervenant à ces différents groupes, pour alimenter les débats, donner des détails….)
Paper board à remplir par groupe
Présentation l’approche des chemins jumeaux 30mn PPT
Principe du dessin universel et adaptations de communication suivant les types de handicap
30mn
SÉQUENCE 6 : DES BONNES PRATIQUES D’INTÉGRATIONS ?
Objectifs pédagogiques :
- Les participants prennent connaissance d’expériences réussies du « travailler ensemble »
- Ils sont en mesure d’identifier des « bonnes pratiques » pour l’intégration de travailleurs handicapés
Contenu
Les participants vont visiter une entreprise adaptée et discuter avec le responsable de l’entreprise sur son expérience professionnelle, sur les différences, ressemblances, difficultés, atouts à travailler avec des équipes « mixtes » (en situation de handicap ou pas).
Les cadres participent à la construction d’un guide de bonnes pratiques sur l’intégration de travailleurs handicapés, à destination de l’ensemble des cadres managers d’Air Liquide, avec la participation d’un intervenant/travailleur handicapé.
Durée :
La durée prévue est de 5h
Notions essentielles :
Communication, différences, ensemble, bonnes pratiques, compensation
Activités de réalisation :
Activités Durée Matériels / supports
118
Visite d’une entreprise adaptée :
- Visite de l’entreprise
- Echange avec le responsable sur son expérience
- Débriefing
3h
RDV devant l’EA, ou mini car devant Air Liquide pour y aller tous ensemble.
Construction du guide des bonnes pratiques :
- Comme synthèse de ces trois jours, en petit groupe, construction d’un guide de bonnes pratiques, qui s’alimentera au fur et à mesure des sessions de sensibilisation et sera diffusé à la fin des sessions à l’ensemble des participants
- L’intervenant/travailleur handicapé participera aux différentes réflexions des groupes
2h
PLANNING GÉNÉRAL
JOUR 1
Horaire
Objectif
Activités
Intervenants
Méthodologie
9h – 9h30 Lancement de l’action, prise de contact
Accueil des participants
Présentations des participants
Connaissances des attentes
Présentation du planning général
Animateur - formateur
Paper board
9h30 – 11h30
Appréhender corporellement une situation de handicap
Mise en situation de handicap :
Parcours à réaliser
Animateur – formateur ou association de personnes handicapées
Parcours à l’aveugle en binôme
Paper board
11h30-12h30
Réflexions sur la notion de « situation de handicap » et sur « environnement »
Débriefing de la mise en situation sur :
Ressentis, relationnel dans le binôme, réflexions sur l’environnement….
Animateur - formateur
Paper board, en petit groupe puis en grand groupe
12h30-13h30
DEJEUNER
13h30 - Approche Présentation de l’évolution de la Animateur- Power Point
119
14h historique du Handicap
représentation du handicap à travers les âges
formateur (PP)
14h30 -15h30
Comprendre le concept de « situation de handicap »
Présentation du concept du Handicap, le PPH
Echanges sur la présentation
Animateur formateur
PP
15h30 – 16h30
Exercices PPH Exercices pour distinguer les principaux éléments de ce concept
Animateur formateur
Fiches d’exercice
JOUR 2
Horaire Objectif Activités Intervenants Méthodologie
9h – 9h15 Synthèse jour 1 Retour sur les principales informations de la journée 1
Animateur - formateur
Plénière
9h15-10h Droits des personnes handicapées
Présentation de la convention internationale des droits de l’Homme
Présentation de la loi 2005, en particulier sur l’Emploi
Animateur -formateur
PP
10h-11h Situation des TH Diversité des handicaps, en particulier les handicaps invisibles
Chiffres, réalités TH
Animateur -formateur
PP
Echanges plénière
11h- 11h45 Politique Handicap Air Liquide
Présentation de la politique handicap d’Air Liquide
Échanges sur les actions/aides à destination des cadres managers
Un membre de l’équipe d’Air Liquide
PP
11h45 – 12h30
Stéréotypes Identification de quelques stéréotypes
Présentation étude IMS sur les stéréotypes en entreprise
Animateur - formateur
Jeu de rôle
PP
12h30-13h30
DEJEUNER
13h30 – Impact des stéréotypes sur les
Présentation du fonctionnement des représentations sociales et
Animateur - PP
120
14h comportements stéréotypes et débat sur leurs impacts sur l’intégration de travailleurs handicapés
formateur
14h – 14h45
Autres freins environnementaux
Identification d’autres freins environnementaux existant au sein d’Air Liquide et propositions d’actions pour les limiter
Animateur - formateur
Groupes de travail
14h45 – 15h45
Approche inclusive Identification de la distinction spécifique/inclusif
travailleur handicapé
Témoignage
Groupes de travail
15h45 – 16h15
Approche des chemins jumeaux
Présentation de la « twin tracks approach »et discussion
Animateur formateur
PP
16h15 – 16h45
Dessin universel et règles de communications inclusives
Présentation du principe du dessin universel
Règles de communication
Animateur formateur
PP
Jeu
JOUR 3
Horaire Objectif Activités Intervenants Méthodologie
9h30– 12h00 Visite Entreprise Adaptée
Visite de l’entreprise adaptée
Rencontre avec le responsable et quelques managers
Animateur formateur
Responsable de l’EA
Visite sur place
12h00-13h30 DEJEUNER
13h30 – 14h Débriefing de la visite de l’EA
Retour sur la visite et discussions autour du « travailler ensemble »
Animateur formateur
Plénière
14h -16h Construction d’un guide de bonnes pratiques
Quizz test sur les attitudes et connaissances du monde du handicap, comme petite synthèse des deux premiers jours
Travail en petit groupe pour construire un guide de bonnes pratiques pour l’intégration de travailleurs handicapés au sein d’Air Liquide
Animateur formateur
Participation de
l’intervenant/travailleur
handicapé (si possible)
Vidéo projecteur
Groupes de travail
16h – 16h30 Conclusion et Evaluation
Passage d’un questionnaire de satisfaction
Visionnage de 2 spots de sensibilisation handicap et
Animateur formateur
Fiche de satisfaction
Vidéo
121
discussion -conclusion projecteur
FIN
122
CONCLUSION
De tout temps la « différence » interroge ! Certaines sont valorisées, d’autres ignorées voir rejetées.
Le « handicap » subit un peu tout cela à la fois. Et parce que cette différence résonne d’une façon
particulière en nous, nous ne savons pas vraiment comment l’appréhender. Les entreprises en font
aujourd’hui l’expérience. Bien qu’elles s’investissent de plus en plus sur le sujet, du fait de la loi
2005 plus stricte sur l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés mais aussi d’une prise de
conscience de la société, elles ne semblent toujours pas au fait des mécanismes et leviers favorisant
l’intégration de travailleurs handicapés. Malgré les actions menées, et en particulier les actions de
formation et de sensibilisation, la question du handicap reste très complexe et les résultats
d’intégrations ne sont pas à la hauteur des attentes et investissements. De quoi user rapidement la
dynamique lancée !
C’est pourquoi nous avons voulu nous investir sur le sujet, en partant du constat que peu
d’entreprises prennent réellement en compte les effets des représentations sociales et stéréotypes sur
les personnes handicapées lors de la mise en œuvre de leur politique Handicap. Ceux-ci sont
invisibles, complexes à identifier et bien encrés dans l’inconscient collectif. Il parait alors difficile
de travailler sur le sujet. Mais une première étude sur les stéréotypes en entreprise de 400 managers
a démontré le contraire et nous a éclairé sur les réalités des stéréotypes sur les personnes
handicapées en entreprises : celles-ci sont perçues comme des personnes motivées, déterminées et
sympathiques mais fragiles et lentes. En résumé, les stéréotypes sur les personnes handicapées sont
plutôt positifs…à l’extérieur du monde du travail. Cependant l’étude a aussi démontré que ces
stéréotypes sont sensibles aux variations du contexte professionnel et à certaines variables
professionnelles des managers. On peut donc espérer les faire évoluer.
Nous avons, dans cette étude, tenté de comprendre l’impact d’une de ces variables : le fait de
manager une équipe a t il un impact sur les stéréotypes des cadres. Ceci afin d’appuyer l’idée émise
dans l’étude de référence, à savoir qu’il est important d’identifier les stéréotypes existants dans
chaque entreprise pour construire une politique handicap pertinente, et donc des réponses-actions de
sensibilisation adaptées aux besoins des salariés de l’entreprise concernée.
Nous avons pu confirmer que le management semblait avoir un impact plutôt négatif sur les
stéréotypes de 131 cadres de notre entreprise partenaire dans cette enquête. Il s’agit donc bien de
123
prendre en compte ces différences de stéréotypes lors de la mise en place d’actions de
sensibilisation dont l’objectif est de travailler/faire prendre conscience, modifier ces stéréotypes.
La démarche d’ingénierie de formation devient alors pour nous essentielle dans la mise en œuvre
d’une politique handicap. Car elle agit comme une démarche structurée et structurante : structurée
parce qu’elle procède par étape successives mais non déterminée et inflexibles. Structurante
parcequ’a l’occasion de chacune de ses étapes, les acteurs de la politique handicap et de la politique
de formation, qui se doivent de coordonner leurs pratiques, entrent dans une démarche réflexive qui
leur permet de s’approprier et d’inscrire l’acte formatif comme vecteur d’une transformation et de la
modélisation de la politique handicap à venir. Tout au long de notre recherche action, nous avons
tenté de suivre cette démarche : nous avons créer un outil d’analyse des stéréotypes – notre
questionnaire d’enquête, version adaptée et simplifiée du questionnaire de l’étude de référence –
comme outil d’analyse des besoins pour les entreprises, et nous avons conçu une action de
sensibilisation correspondante aux besoins identifiés des cadres managers de notre entreprise
partenaire. Nous espérons rapidement, suite à cette recherche-action pouvoir réaliser et évaluer cette
action. Nous aurons alors mis en œuvre les 4 étapes primordiales de l’ingénierie de formation et
confirmer l’intérêt du processus d’ingénierie de formation pour l’amélioration des politiques
Handicap des entreprises.
Toutefois, au-delà de la production d’un outil d’analyse et de la validation de notre problématique,
cette recherche action nous a aussi amené à nous interroger sur l’objet « action de sensibilisation ».
En effet, nous avons trouvé très peu de littérature scientifique sur le sujet. Elle n’est pas identifiée
dans le systéme juridique de la formation, tout comme d’autres novelles pratique de la formation en
entreprise tel que la validation des acquis ou le tutorat d’ailleurs. Elle se rattache aujourd’hui à une
action d’information améliorée ou à une première étape de formation. Or, un important marché de
« la sensibilisation » s’est développé ces dernières années et pourtant aucune norme qualité ou
cahier des charges partagé n’a encore été discuté sur le sujet. Quels sont ses objectifs spécifiques ?
ses modalités de mise en œuvres, ses critères d’évaluation? Et pourtant, dans les faits, elles existent,
sont mis en œuvre et sont même préconisées par l’Agefiph. Il nous semble qu’il y a ici un vrai
challenge et une nécessité pour les sciences de l’éducation et pour le systéme juridique français de
s’approprier cette question. Nous pensons que la « sensibilisation » mériterait d’être reconnue
comme un champ d’intervention spécifique, avec son propre paradigme. Nous serions ravie que ces
questions aient un écho favorable et puissent permettre ainsi de poursuivre le travail engagé sur
l’amélioration des pratiques de sensibilisation au handicap, afin de favoriser l’intégration de
travailleurs handicapés.
124
Enfin, un dernier enjeu nous semble important de souligner : celui de la participation. Sans
participation des travailleurs handicapés eux même, point de politique handicap efficace. Pour
rappel, la devise du monde du Handicap : « Jamais rien POUR nous SANS nous !! »
125
BIBLIOGRAPHIE
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Les stéréotypes sur les personnes handicapées – comprendre et agir dans l’entreprise, IMS- entreprendre pour la cité, 2010
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Site de l’Agefiph, Une offre d’intervention modernisée et simplifiée. Consulté le 8.07.2012 http://www.agefiph.fr
Site « préjugés et stéréotypes, De la naissance des stéréotypes à leur internalisation, SCHADRON G, et, la menace du stéréotype, GABARROT F. Consulté le 8.07.2012 http://www.prejuges-stereotypes.net
129
Liste des figures, tableaux et graphiques
Liste des figures
Figure 1 : Evolutions des représentations du handicap – A.Relandeau
Figure 2 : Les modéles du Handicap – A.Relandeau
Figure 3 : La construction de biais décisionnels – G. Tisserant
Figure 4 : Stéréotypes et autres mots associés – A.Relandeau
Figure 5 : Caractéristiques et fonctions du Stéréotype – A.Relandeau
Figure 6 : Modèle de construction du savoir – JP. Astolfi
Figure 7 : Organigramme de la direction SEDI – A.Relandeau
Figure 8 : Caractéristiques des stéréotypes sur les personnes handicapées en entreprise –
A.Relandeau
Figure 9 : Les 15 étapes de notre enquête, 1 à 8 – A.Relandeau
Figure 10 : Les 15 étapes de notre enquête, 9 à 15 – A.Relandeau
Figure 11 : Notre échantillonnage – A.Relandeau
Liste des tableaux
Tableau 1 : Taux de financement obligatoire des entreprises par type d’action – P Le douaron
Tableau 2 : Les 7 catégories d’adjectifs PH – Q10 – Cadres
Tableau 3 : tableau de comparaison des réponses Q10 suivant la pondération
Tableau 4 : Liste des 10 adjectifs principaux PH par catégorie – Q10 – Cadres
Tableau 5 : Les 7 catégories d’adjectifs TH – Q11 – Cadres
Tableau 6 : Liste des 10 adjectifs principaux TH par catégorie – Q11 – Cadres
Tableau 7 : Récapitulatif des taux d’accord et désaccords de quelques adjectifs – Q13 – Cadres
130
Tableau 8 : Les types de handicap les plus proposés et son graphique attaché – Q16 - Cadres
Tableau 9 : Les types de handicap les plus proposés et son graphique attaché – Q17 – Cadres
Tableau 10 : Comment attirer l’attention d’une personne malentendante et son graphique attaché –
Q18 – Cadres
Tableau 11 : Proportion PH en France et son graphique attaché – Q19 – Cadres
Tableau 12 : Taux légal TH en France et son graphique attaché – Q20 – Cadres
Tableau 13 : Caractéristiques sociodémographiques de notre échantillon
Liste des graphiques :
Graphique 1 : Taux d’accord/désaccords par affirmation –Q12 – Cadres
Graphique 2 : quelques notes moyennes par affirmation – Q12 – Cadres
Graphique 3 : Notes moyenne par adjectifs positifs et négatifs – Q13 – Cadres
Graphique 4 : Notes moyenne comparatives par affirmation et type de handicap – Q14 – Cadres
Graphique 5 : Comparatif des taux réels Th en emploi pour la France et Air Liquide – Q21 et 22 –
Cadres
Graphique 6 : Comparatif des notes moyennes obtenues aux Q12 et Q15 par affirmation
Graphique 7 : Comparatif des adjectifs cités pour les PH et TH, par groupe d’échantillon –
Q10 et Q11
Graphique 8 : Comparatif des accords/désaccords et quelques notes moyenne par adjectif et
par groupe d’échantillon – Q13
Graphique 9 : Comparatif des notes moyenne par affirmation et type de handicap et
par groupe d’échantillon – Q14
Graphique 10 : Comparatif des notes moyenne par affirmation et par groupe d’échantillon – Q15
131
TABLE DES MATIERES
I. L’INSERTION PROFESSIONNELLE DE TRAVAILLEURS HANDICAPES EN FRANCE ........................3
I.1. LES REPRESENTATIONS DU « HANDICAP » ....................................................................................3
I.1.1. De la négation de l’humanité à la défense des Droits de l’Homme........................................... 3
I.1.2. Le modèle théorique : Approche par la « situation de handicap » ............................................ 5
I.2. LE SYSTEME FRANÇAIS POUR L’INSERTION PROFESSIONNELLE DE TRAVAILLEURS HANDICAPES 7 I.2.1. Un cadre juridique incitatif........................................................................................................ 7
I.2.1.1. Principes ................................................................................................................................ 7
I.2.1.2. La loi de 2005 ........................................................................................................................ 8
I.2.2. Mais une difficile mise en œuvre en Entreprises ....................................................................... 9
I.2.3. Un acteur clé : L’Agefiph et ses actions .................................................................................. 10
I.2.3.1. Généralités ........................................................................................................................... 10
I.2.3.2. L’appui de l’Agefiph aux entreprise : l’accord Entreprise ............Erreur ! Signet non défini.
I.2.3.3. Le « diagnostic conseil approfondi », dans le cadre d’un accord Entreprise....................... 12
I.3. LES POLITIQUE DE FORMATION ET POLITIQUE HANDICAP : LIENS ? .......... ERREUR ! SIGNET NON
DEFINI. I.3.1. La politique de formation professionnelle continue en France................................................ 14
I.3.1.1. Approche et définition de la FPC ........................................................................................ 14
I.3.1.2. Les acteurs de la FPC .......................................................................................................... 15
I.3.1.3. Les modalités de mise en œuvre de la FPC en entreprise.................................................... 17
I.3.1.4. Le système de financement de la FPC ................................................................................. 18
I.3.2. L’articulation entre la FPC et la politique handicap en entreprise .......................................... 19
I.4. PREMIERS QUESTIONNEMENTS ..................................................... ERREUR ! SIGNET NON DEFINI.
II. DES CONCEPTS POUR ECLAIRER ET PRECISER NOS QUESTIONNEMENTS..................................23
II.1. NOTRE RECHERCHE DANS LE CADRE DE L’INGENIERIE DE FORMATION....ERREUR ! SIGNET NON
DEFINI. II.2. ANALYSE DES BESOINS ..............................................................ERREUR ! SIGNET NON DEFINI.
II.2.1. Des besoins de formation ?...................................................................................................... 24
II.2.2. L’analyse en question .............................................................................................................. 25
II.2.3. Comment la mettre en œuvre ?................................................................................................ 26
II.2.3.1. Par l’indispensable approche systémique ........................................................................ 26
II.2.3.2. Par la nécessaire analyse du travail ................................................................................. 26
132
II.2.3.3. Et par une participation active recherchée....................................................................... 27
II.3. DE LA REPRESENTATION SOCIALE AU BIAIS DECISIONNEL FACE AU HANDICAP EN ENTREPRISE
ERREUR ! SIGNET NON DEFINI. II.3.1. Représentations sociales .......................................................................................................... 29
II.3.1.1. Généralités ....................................................................................................................... 29
II.3.1.2. Le concept du noyau central et les conditions d’évolution d’une représentation sociale 31
II.3.1.3. Le champ des représentation sociales sur le Handicap................................................... 33
II.3.1.4. Réalités des représentations sociales sur le handicap ..................................................... 34
II.3.1.5. Poids des représentations sociales du Handicap dans l’Entreprise.................................. 35
II.3.2. Stéréotypes et attitudes ............................................................................................................ 36
II.3.2.1. Généralités ....................................................................................................................... 36
II.3.2.2. Effets de l’activation des stéréotypes sur les personnes ................................................. 39
II.3.2.3. Les stéréotypes sur le handicap en entreprise.................................................................. 41
II.3.2.4. Attitudes .......................................................................................................................... 43
II.3.3. Les biais décisionnels .............................................................................................................. 43
II.4. SENSIBILISATION : DE QUOI PARLE T ON ? ..................................ERREUR ! SIGNET NON DEFINI. II.4.1. Action de sensibilisation ? ....................................................................................................... 44
II.4.2. Sensibilisation : Parle t on de savoirs et connaissances ? ........................................................ 47
II.4.2.1. Connaissances.................................................................................................................. 47
II.4.2.2. Savoirs ............................................................................................................................. 47
II.4.3. Ou parle t on plutôt d’ « Aptitudes », de « capacité » et/ou « compétenceS ? ....................... 49
II.4.3.1. Aptitudes.......................................................................................................................... 49
II.4.3.2. Capacité ........................................................................................................................... 49
II.4.3.3. CompétenceS ? ................................................................................................................ 49
III. NOTRE APPROCHE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE……………………………….…53
III.1. TERRAIN DE L’EXPERIMENTATION .............................................ERREUR ! SIGNET NON DEFINI. III.1.1. Mission : L’ADAPT ................................................................................................................ 54
III.1.2. Terrain : Air Liquide................................................................................................................ 55
III.1.2.1. Le groupe......................................................................................................................... 55
III.1.2.2. La Mission Handicap d'Air Liquide ................................................................................ 55
III.2. LA PROBLEMATIQUE ET SES HYPOTHESES...................................ERREUR ! SIGNET NON DEFINI. III.2.1. L’étude de référence sur les stéréotypes sur le handicap en entreprises.................................. 58
III.2.2. Problématique de la recherche................................................................................................. 61
III.2.3. Hypothèses .............................................................................................................................. 62
III.3. NOTRE METHODOLOGIE D’ENQUETE ..........................................ERREUR ! SIGNET NON DEFINI. III.3.1. Choix de notre méthode d’enquête .......................................................................................... 62
133
III.3.2. Limites méthodologiques ........................................................................................................ 65
III.3.2.1. Adaptation d’une enquête existante, limite de comparaison ........................................... 65
III.3.2.2. Problème d’échantillon : ajustement de la problématique............................................... 65
III.3.2.3. Attention aux zones muettes ............................................................................................ 67
III.3.2.4. Quelques biais d’analyse ................................................................................................. 69
III.3.2.5. Question de représentativité ............................................................................................ 69
III.3.3. Notre enquête en 15 étapes ...................................................................................................... 71
III.3.3.1. De la conception à la validation de la méthodologie et de son outil -questionnaire........ 71
III.3.3.2. De la diffusion à l’analyse des résultats .......................................................................... 74
IV. ANALYSE DE NOTRE PROBLEMATIQUE………………………………………………………...76
IV.1. RESULTATS DE L’ENSEMBLE DU QUESTIONNAIRE POUR NOTRE ECHANTILLONERREUR ! SIGNET
NON DEFINI. IV.1.1. Description des variables sociodémographiques et de proximité avec le handicap de notre échantillon ............................................................................................................................................... 78
IV.1.2. Résultats des différentes mesures du stéréotype sur les personnes handicapées en entreprise ……………………………………………………………………………………………………………………………………….…..79
IV.1.3. Résultats de la mesure du niveau de connaissances des 131 cadres ........................................ 90
IV.1.4. Vérifier les jeux de masquage ................................................................................................. 94
IV.1.5. Synthèse de notre analyse........................................................................................................ 96
IV.2. QUEL IMPACT DU MANAGEMENT SUR LES STEREOTYPES DES CADRES? ...ERREUR ! SIGNET NON
DEFINI. IV.2.1. Constitution des groupes de cadres managers et cadres non managers ................................. 975
IV.2.2. Comparaison des questions 10 et 11........................................................................................ 98
IV.2.3. Comparaison de la question 13................................................................................................ 99
IV.2.4. Comparaison de la question 14................................................................................................ 99
IV.2.5. Comparaison de la question 15.............................................................................................. 102
IV.2.6. Synthèse de nos hypothèses................................................................................................... 103
V. CONCEVOIR LA REPONSE-ACTION DE NOTRE PROBLEMATIQUE............................................103
V.1. SYNTHESE DES PRINCIPALES PRECONISATIONS ISSUES DE NOTRE RECHERCHE – ACTION
ERREUR ! SIGNET NON DEFINI. V.1.1. En amont des actions de sensibilisation : .............................................................................. 105
V.1.2. Concernant les actions de sensibilisation en elles mêmes ..................................................... 105
V.1.3. En complément aux actions de sensibilisation ...................................................................... 106
V.2. NOTRE ACTION DE SENSIBILISATION POUR LES CADRES MANAGERS D’AIR LIQUIDE ....ERREUR !
SIGNET NON DEFINI. V.2.1. Proposition du cahier des charges ......................................................................................... 107
134
V.2.2 Proposition de réponse pédagogique ............................................................................... 1108
CONCLUSION…………………………….…………………..……………...…..…..……………119
BIBLIOGRPAHIE…………………………………………………………………………………………121
LISTE DES FIGURES, TABLEAUX ET GRAPHIQUES…………………………………………………………125
TABLE DES
MATIERES………………………...……………………………..……………………………………….….127
ANNEXES……………………………………………………………………………………………………..I