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MÉMOIRESDE LA
SOCIÉTÉ HISTORIQUE.LITTÉRAIRE ET SCIENTIFIQUE
f# , i; l'A DU CHER
J
4K SERIE— 20E VOLUME
BOURGES
RENAUD, LIBRAIRE
PARISEMILE LEOHEVALIER, LIBRAIRE, 16, RUE DE SAVOIE
LE MUSÉE DE BOURGES.
SÛTES,DOCUMENTSET SOUVENIRS
SUR SA FONDATION ET SON HISTOIRE
PREMIERE PARTIE
Le Musée établissement départemental
(1834-1864)
« Le Muséede Bourges a été créé
» par la volonté, les efforts et l'âme
» d'un seul homme. » (Conseil Géné-
ral du Cher, séancedu27 amïM86<l.)
Le Musée de Bourges, fondé en 1834, a maintenant plus
de 70 années d'existence : aux artistes, aux archéologues,
à tous ceux que l'on appelait autrefois des curieux, de
dire si le temps écoulé a été bien employé! Dans tous les
cas, à une époque comme la nôtre, où les événements
marchent si vite et où les souvenirs s'effacent si rapide-
ment, il peut sembler utile de consigner dès maintenant
par écrit les faits et les circonstances d'une création
intéressante pour la conservation des vestiges de l'an-
cien Berry : c'est un chapitre de l'histoire locale contem-
poraine qu'il importe de sauver de l'oubli.
Quatre personnes ont coopéré à cette oeuvre, chacune
dans une mesure différente : Claude-Denis Mater, quien a été le fondateur certain et incontesté, Alphonse
190 LE MUSÉE OE BOURGES
Charmeil, qui lût son collaborateur puis son successeur,
Alphonse Mater et enfin celui qui écrit ces lignes, queles circonstances ont appelé à continuer ce qui aA'ait été
commencé par les chefs de sa famille.
Ce dernier peut-il, avec le nom qu'il porte et les liens
qui le rattachent aux ouvriers de la première heure,
essayer d'être l'historiographe du Musée, le lecteur en
•jugera, mais ce qui va suivre, s'il n'offre pas toutes les
garanties d'impartialité qu'exige l'histoire, aura son inté-
rêt à titre de document ou de mémoires personnels, en
fournissant des renseignements peu connus et souvent
inédits sur une institution, dont l'importance est dès
maintenant assez grande pour mériter que son passésoit retracé avec détail.
Malgré tout ce que pouvait avoir de téméraire de sa
part une pareille entreprise, il a semblé, et c'est là l'ex-
cuse de l'auteur, qu'il se trouvait par la force des choses,
dépositaire sur le Musée de Bourges de trop de docu-
ments, de souvenirs et même de traditions de famille,
pour qu'il ne fût pas de son devoir d'empêcher qu'ils ne
tombent entièrement en oubli. Et si on lui reprochaitd'avoir voulu en même temps élever un monument à la
mémoire de son aïeul, il accepterait volontiers une cri-
tique qui lui montrerait que l'on a compris le pieux et
filial sentiment auquel il n'a rien fait pour se soustraire,
lorsqu'il écrivit la présente notice.
Bourges, 20 juillet 1905.
DANIEL MATER.
I
Le Muséum de Bourges
(1791-1802).
La fermeture d'un nombre considérable d'églises et de
couvents, la saisie de tous les objets mobiliers qu'ils
renfermaient ou qui se trouvaient dans les palais et les
châteaux mis sous la main de la Nation, pouvaient per-mettre de former des collections merveilleuses, qui eus-
sent conservé à la France nouvelle les richesses artisti-
ques qui avaient jeté un si vif éclat sur la monarchie.
Mais le goût si répandu de nos jours des objets d'art et
de curiosité, existait à peine à la fin du xvme siècle, et
l'on n'envisageait guère l'utilité de la création de musées,
ou, comme on disait alors, d'un Muséum, que comme
une sorte d'accessoire à la constitution des bibliothèques
publiques, sur lesquelles se portaient surtout l'attention
des corps administratifs.
Il faut ajouter que les mesures législatives prises pourassurer la formation de collections artistiques étaient
mal conçues et se ressentaient de la nouveauté de la
question ; elles se heurtèrent à de nombreuses disposi-tions contraires, aux nécessités impérieuses du moment,
et, il faut le dire, à un mouvement général des esprits.On considérait alors comme un devoir patriotique de
détruire tout ce qui rappelait, suivant le langage du
temps, le despotisme ou le fanatisme, proscription qui
13
192 LE MUSÉE
arrivait à atteindre presque tout ce que la France ren-
fermait de beau et d'intéressant.
Il semble, en effet, difficile de concilier l'intention de
former des collections publiques d'objets d'art avec un
état d'âme, grâce auquel, pour ne citer que quelques
exemples, les chefs-d'oeuvre d'orfèvrerie religieuse de la
Cathédrale et de la Sainte-Chapelle étaient systématique-ment brisés pour être envoyés à la Monnaie ; les tombeaux
de Jean de Berry, du maréchal de Montigny et des Lau-
bespine, à la Cathédrale, étaient détruits et enfin, où,
pendant des mois, des ventes à vil prix dispersèrent
quantité d'objets précieux, meubles, tapisseries, ta-
bleaux, notamment des oeuvres de Jean Boucher, comme
le proclamait Grégoire, dans le rapport sur le venda-
lisme qu'il adressait à la Convention, le 24 frimaire an m,
rapport dans lequel il signalait la vente faite à Bourgesde nombreuses peintures du maître berruyer.
Il ne semble pas nécessaire de rappeler les diverses
mesures que prirent successivement le pouvoir législatifet les autorités locales, pour réaliser la formation, à
Bourges, d'une Bibliothèque et d'un Musée, destinés à
constituer un seul et même établissement : ces mesures
étant les mêmes pour les deux créations, on saura, en se
reportant à l'exposé très complet que M. Boyer en a lait
pour la formation de la Bibliothèque (1), comment, dans
la circonstance, on procéda pour former un Musée; les
résultats obtenus sont, à. vrai dire, plus intéressants à
connaître.
Un Inventaire des tableaux el gravures d'art ou science
déposés au district de Bourges, dressé le 13 frimaire an iv
(3 décembre 1795), par le citoyen Champion, gardien du
(1) H. BOYEII, Histoire des imprimeurs el libraires de Bourges, suivie d'une
notice sur ses bibliothèques, p. 69 et suiv.
DE BOURGES 193
Muséum (1), contient 45 numéros, comprenant en tout 100
objets : 84 gravures, 5 peintures, dont 2 de Jean Boucher
et 1 de Philippe de Champagne, 1 dessin original de Huet,
81 gravures, 3 boussoles, 2 lorgnettes, 1 lunette, 1 atlas
et 3 boîtes de remèdes, singulier amalgame, qui n'avait
rien de très artistique. Pour comprendre combien ce
résultat était pitoj'able, il suffit de se rappeler les cir-
constances véritablement uniques qui se présentaientalors pour la création d'un Musée. Malgré l'échec de la
tentative, dès ce moment certain, il est bon de conti-
nuer à la suivre jusqu'à la fin.
En 1795, on fonda à Bourges une Ecole centrale, éta-
blissement d'instruction qui procédait plutôt de la
faculté, telle qu'on la comprend aujourd'hui, que du
collège et autour de laquelle se groupaient une Biblio-
thèque et un Musée, en un mot tout ce qui pouvait faci-
liter les études, permettre à la jeunesse d'augmenter ses
connaissances et de développer son goût. Lalcanal, le
célèbre réorganisateurdu système d'éducation de la Répu-
blique, venu à Bourges le 26 floréal an m (13 mai 1795),
pour la formation du Muséum, adressa aux habitants
une proclamation, dans laquelle se trouve la plus éner-
gique condamnation que l'on puisse désirer du van-
dalisme révolutionnaire et qui, en même temps, faisait
ressortir l'utilité de la création à laquelle il venait pré-sider. Voici ce document :
Proclamation de Lakanal, représentant du peuple, chargéde l'exécution des lois sur l'Instruction publique, à ses
concitoyens du département du Cher :
« On vous a peint toutes les horreurs du vandalisme, il» s'agit aujourd'hui de réparer les dévastations. Quand le
(1) Arch. Cher : Q. 309. — L'Etat de l'an iv sera publié aux pièces justificatives.
194 LE MUSÉE
» seul asile où la liberté puisse se retrancher contre latyran-» nie a été battu en ruine, nous contenterions-nous de pleu-» rer sur ses débris ? Non, il faut qu'il se relève avec plus de» majesté et que la lumière qui en sortira vivifie à jamais nos» moeurs et la République française ?
» Quand l'incendie ou quelque événement imprévu avait» autrefois détruit un temple de l'erreur, avec quel zèle» chaque citoyen s'empressait d'en relever les amas et d'en» rétablir les splendeurs aux dépens de ce qu'il avait de plus» précieux. Le vandalisme, plus actif que la flamme, a dé-
» voré jusqu'aux débris des constructions qui servaient
» d'asile aux sciences. Eh bien ! que l'on voie s'allumer parmi» vous une généreuse émulation ! Quel est celui d'entre vous
» qui ambitionnera la gloire d'avoir posé la première pierre» de l'édifice auguste que nous allons construire.
» Les objets que nous réclamons languissent isolés dans
» l'enceinte de divers cabinets particuliers. Ge n'est que par» leur réunion qu'ils peuvent acquérir une grande utilité.
» Dans un établissement public, ils sont sans cesse exposés» aux regards du génie qui s'éveille à leur aspect, s'en empare» et par leur secours développe bientôt toutes les facultés.
» C'est dans un Muséum rayonnant de tous les chefs-d'oeuvre
» actuellement épars, que le jeune talent s'écrierait encore :
» Et moi aussi je suis peintre. »
ARRÊTE :
Le représentant du peuple, ouï le rapport de l'Administra-
tion du Cher, arrête ce qui suit :
Article I. — Les bâtiments et jardins de la ci-devant Inten-
dance sont affectés à l'Instruction publique, ils formeront à
l'avenir le Muséum national du département du Cher : en
conséquence, ils serviront à recevoir les collections scienti-
fiques et littéraires, qui doivent être formées près des Ecoles
centrales, en exécution de l'article IV du chapitre Ie'' de la
loi d'organisation de ces établissements.
Article IV. — Le représentant du peuple fera opérer le
transport dans le Muséum de tous les dépôts nationaux des
sciences et arts qui existent dans le département du Cher.
DE BOURGES 195
Article V. — Les amis des sciences, des lettres et des arts
sont invités à offrir à la Patrie, pour compléter le Muséum
national, les objets des sciences et arts qu'ils possèdent. Les
noms des donateurs serontinscrits sur les objets qu'ils auront
abandonnés à l'Instruction publique ; ces noms seront impri-més, envoyés par les représentants du peuple aux autorités-
constituées du département du Cher, au Comité de l'Instruc-
tion publique et à la Convention nationale.
Fait en séance, à Bourges, le 26 floréal, an me de la Répu-
blique française (13 mai 1795) (1).
Cette nouvelle organisation n'apporta aucune amélio-
ration à la situation du Muséum et ne réussit pas à lui
donner l'essort dont il avait besoin : les collectionneurs
restèrent sourds à l'appel qui leur était adressé et quant
aux dépôts nationaux des districts, ils renfermaient sans
doute bien peu de choses intéressantes, car on ne voit
pas que leur transfert au Muséum ait sensiblement aug-
menté celui-ci.
En l'an xi le Muséum n'avait même plus d'existence
propre, il était confondu ou plutôt absorbé parla Biblio-
thèque, à en juger par le libellé de la clôture du docu-
ment reproduit ci-après :
État des tableaux et gravures et autres objets du
Muséum, qui sont à la charge et garde du biblio-
thécaire.
(2) [I] 1<>Un grand tableau avec cadre doré, repré-sentant une fête donnée à Rome par le
feu Cardinal de La Rochefoucault alors
ambassadeur. 1
[V] 2° Une grande lunette d'approche avec son
pied. 1
(1) Arch. Cher : L. lsso715, indication qui n'est plus exacte par suite d'un nou-veau classsement dota série L qui a tout changé.
(2) Les chiffres placés entre crochets se réfèrent à l'Inventaire des tableaux. ..
déposés au district de Bourges, dressé le 13 frimaire an IV.
196 LE MUSÉE
[IX] 3° Un tableau sans cadre représentant un Cru-cifiment par Philippe de Champagne. —
Remis à la Cathédrale. j
[X] 4°. Un tableau représentant une Descente decroix avec cadre doré. — Remis à M. le
Préfet. 15° Un tableau avec cadre en bois blanc,
représentant des fruits et du gibier. —
Remis à Mgr l'Archevêque. j
6° Un tableau sans cadre représentant l'en-
trée de Charles-Quint à Naples. — Remisau propriétaire de la terre de Château-
neuf par ordre du citoyen Legendrc de
Luçay, préfet. 1
. 7" Deux tableaux encadrés, représentant, l'unune cuisine où sont déposés plusieurs
pièces de gibier et des fruits, l'autre une
jeune fille et un jeune garçon en conver-sation. — Par ordre du citoyen préfet,remis au propriétaire, le citoyen Gassot dela Vienne. 2
8° Un grand Christ peint en huile, garni deson châssis et cadre en bois, peint en
[VII] blanc, une Nativité, une Adoration des
Mages, une Assomption, une Annoncia-
tion sans cadre, une Nativité de Boucher,
[VIII] avec cadre doré, un Saint Jean-Baptistede Boucher, monté sur un simple châssis.— Ces tableaux remis aux commissairesdu culte de l'église Saint-Etienne parordre du citoyen préfet. 7
[XX] 9° Six gravures encadrées de Beauvarlet, re-
présentant l'histoire d'Hester (sic), avant
la lettre. — Remises à M. le Préfet. G
[XIX] 10° La malédiction paternelle, gravure cadre
doré, peinte par Greuze et gravée parGaillard, dédiée à l'abbé de Very. —
Remise à M. le Préfet. | 1
DE BOURGES 197
[XVII] 11° La demande acceptée, gravure avec cadre
doré, de Lépicier, et gravée par Bervic.— Remise à Msr l'Archevêque. 1
[XI] 12° Le fils puni, cadre doré, de Greuze et Gail-
lard, dédié à l'abbé de Very. — Remis à
M. le Préfet.'
-1
[XIX] 13" L'accordée de village, gravure avec cadre
doré, de Greuze, gravée par Flipart. —
Remise à M. le Préfet. 1
[XI] 14" La dame bienfaisante, gravure avec cadre
doré, de Greuze, gravée par Massard. —
Remise à M. le Préfet. 1
[XI] 15° Le paralytique servi par ses enfants, gra-vure avec cadre doré, de Greuze, gravée
par Flipart.— Remise à M. le Préfet. 1
[XII] 16° Troi s gravures avec cadre doré,représentantCharles 1°', roi d'Angleterre, et sa famille,
par Van Dyck. — Remises à M. le Préfet. 3
[XLI] 17° Conclusion de la campagne de 1781 en Vir-
ginie, dédiée à Lafayette, gravure avec
cadre doré. — Remise à la Mairie. 1
[XIX] 18° Le gâteau des roys, gravé d'après le tableau
de Greuze, avec cadre en doré (sic). —
Remis à M. le Préfet. 1
|XLI] 19° Le général Washington, gravure avec cadre
doré. — Remis à la Mairie. 1
[XXIII] 20° La mort du général Wolf, de West, gravée
par Woolett, avec cadre doré. — Remis à
la Mairie. 1
[XXV] 21° La lecture du ménage de campagne, de
Greuze, gravée par Jouetle, avec cadre
doré. — Remise à Msr l'Archevêque. 1
[XXII] 22° Le jardin d'amour, de Rnbens, gravé par
Lempereur, avec cadre doré. — Remis à
la Mairie. 1
[XVI] 23° Les baigneuses, de Vernet, gravure avec
cadre doré. — Remise à M. le Préfet. 1
[XXIX] 24° Jupiter et Calisto, du Poussin, gravureavec cadre doré. — Remise à M. te Préfel.\ 1
198 LE MUSÉE
[XXIX] 25° Vénus endormie, du Poussin, gravure avec
cadre doré. — Remise à M. le Préfet. f
[XLIII] 26° Un Mucius Scevola, par Rubens, gravureavec cadre doré. — Remise à la Mairie. l
[XXVIII] 27° Achille submergé, par le Xanthe, de Dé-
liais, gravé par Parizeau, avec cadre doré.— Remis à Mgr l'Archevêque. 1
[XIII] 28° Saint Ambroise refusant l'entrée de l'égliseà Théodose, de Rubens, gravure avec
cadre doré. — Remise à Mgr l'Archevêque. 1
[XXI] 29° Un Bossuet, de Rigaud, gravé par Drevef,avec cadre doré. — Remis à Mer l'Arche-
vêque. 1
[XXXI] 30° Les délices maternelles, peint et gravé par
Villeville, avec cadre doré. — Remis à
Mgr l'Archevêque. 1
[XV] 31° Moïse avec les tables de la loi, de Cham-
pagne, gravé par Nanteuil, avec cadre
doré. — Remis à Mer l'Archevêque. 1
[XXX] 32° Les soins maternels, par Ville et gravé parle même, gravure avec cadre doré. —
Remis à la Mairie. 1
[XLIV] 33° Le petit chien qui secoue l'argent, gravureavec cadre doré. 1
[XXXV] 34° Une Nativité, de Cosley, gravée par Hart,avec cadre doré. — Remise à Mgr l'Ar-
chevêque. 1
[XL] 35° Voltaire et Jean-Jacques Rousseau, deux
petites gravures avec cadres dorés. 2
36° Deux petites gravures représentant une
fête ou nopce de campagne et l'autre des
chasseurs, cadres dorés. — Remises à
Mgr l'Archevêque. 2
37» Cinq cavaliers peints en émail sur cuivre. 1
38° Une Annonciation et J.-C. au pied du Cal-
vaire, peinture à l'huile sur toile, sans
cadre. — Comprise au n° 8, erreur. 1
39° Deux coquilles de mer. 2
40° Deux vases remplis de fleurs et un chien,
le tout fait avec des coquilles. 2
DE ROURGES 199
41° Un cadran solaire, cylindre en bois. 1
42° Un grand vase en verre propre aux expé-riences physiques. 1
43" Un petit cadre doré, l'espérance nourrit
l'amour et la persévérance le couronne.— Remis à Mer l'Archevêque.
'!'-.
44° Les moineaux blancs, avec cadre doré. —
Remis à Mgr l'Archevêque. 1
[XXXIII] 45 Un Christ, de Mariet, gravé par Chauffard,
avec cadre doré. — Remis à Mgr l'Arche-
vêque. 1
46» Un militaire, avec cadre doré. 1
47° Deux petits oiseaux perchés sur une
branche, cadre doré.—Remis à Mgr l'Ar-
chevêque. 1
[XL] 48» Monument élevé à la gloire de Richard de
Montgomery, général des Etals-Unis, avec
cadre doré. — Remis à Msr l'Archevêque. 1
[XXXVI] 49» Tombeau de J.-.T. Rousseau à Ermenon-
ville, avec cadre doré. 1
[LXV] 50° Le couronnement de Voltaire fait par les
comédiens, cadre doré. 1
51° Projet d'une pyramide à élever portant
pour inscription : Legis martiribus (sic)et un tombeau portant pour inscription :
Tesserm tiranidis (sic), deux gravuresfond bleu, cadre en noir. 2
[LX] 52» Une gravure représentant des moutons,cadre doré. 1
[XL] 53° Le docteur Francklin couronné par la
Liberté, cadre doré. — Remis à Mgr l'Ar-
chevêque. 1
54» Vue d'une forest sur le bord de l'eau, cadre
doré. — Remis à Mgr l'Archevêque. 1
55° Un oiseau xoerché sur un tronc d'arbre,
cadre doré. — Remis à Mgr l'Archevêque. 1
56° Trois cadres ovales dorés contenant des
amours, en couleur. — Remis à Mer l'Ar-
I chevêqne. 3
200 LE MUSÉE
[XXXV111] 57» Une sainte Geneviève, de Vanloo, gravée
par Batelion, cadre doré. — Remise à
Mer l'Archevêque. \
[XXXIX] 58° Huit petites gravures de Teniers, repré-sentant des festes de village, cinq avec
cadres dorés et trois avec cadres pure-
ment bois. — Remises à la Mairie. 3
[XL] 59» Deux petits cadres dorés représentant des
ruines d'architecture.— Remis à Mgr l'Ar-
chevêque. 2
60° Un plat en forme de saladier, que l'on dit
être d'agate, réputé précieux. l
[XIV] 61o Une gravure représentant Agard renvoyé
par Abraham, gravée par Porporati
cadre doré. — Remise à M. le Préfet. i
[XVI] 62° Une tempête, de Vernet, cadre doré. —
Remise à M. le Préfet. 1
[XVI] 63» Un calme, de Vernet, cadre doré. — Remis
à M. le Préfet. i
[XVIII] 64° Une gravure représentant un ménage de
campagne, gravée par Junior, cadre doré.
— Remise à M. le Préfet. 1
[XXIV] 65° L'heureux âge, gravé par Green, doré. —
Remis à M. le Préfet. 1
[XXVI] 66» La mort d'Abel, gravée par Porporati, doré, t
[XXX] 61» Alexandre et la famille de Darius, de Le-
brun, gravée par Audran, doré. —Remise
à M. le Préfet. 1
[XXVII] 62° Deux confidences, de Vanloo, gravées par
Beauvarlet, doré. — Remises à M. le Préfet. 2
[XXXII] 63° Deux gravures enluminées, de Janinet,
cadres dorés. — Remises à M. le Préfet. 2
[XXXVII] 64° La mort de Marc-Antoine, de Battoni, gra-
vée par Ville, doré. —Remise à M. le Préfet. 1
[XI] 65° Le braconnier devant le seigneur, une gra-
vure, cadredoré.—RemiseàM.lePréfel(2). 1
(1) La numération reprend au n» 61, sans que l'on puisse s'expliquer la cause
de cette façon de compter.
(2) Les mentions en italique ont été ajoutées postérieurement sur l'Inventaire :
elles sont d'une autre encre et d'une autre plume.
DE BOURGES 201
66° Quatre bas-reliefs en marbre, que l'on dit
avoir été tirés de quelques mausolés de
la Cathédrale. 467° Le plan de la Bastille, appliqué sur une
pierre venant des cachots de cette forte-
resse.'
•!;
108
Aujourd'hui dix brumaire an xi de la République
française, nous, Louis-Edme Carré et Jean-Louis Ber-
nard, adjoints au Maire de Bourges, avons clos et arrêté
le catalogue ou inventaire des livres, tableaux et autres
objets de la Bibliothèque publique près l'Ecole Centrale
de ce département, auquel nous avons assisté, confor-
mément à l'arrêté du citoyen préfet du 23 floréal an x et
à nous présenté par le citoyen Jacques-Charles Cham-
pion, bibliothécaire, après l'avoir coté et paraphé par
première et dernière, avons signé le présent avec ledit
citoyen Champion ledit catalogue contenant 249 feuil-
lets, en observant...
CARRÉ, Adjoint. BERNARD, Adjoint (1).
Si maintenant on compare l'Inventaire de l'an ix à
celui de l'an iv, on constate qu'il comprend 65 numéros
avec 107 objets au lieu de 45 numéros avec 90 objets.
Comme on ne voit plus figurer dans le second Inven-
taire les 2 boussoles, les 3 lorgnettes, l'atlas et les 3 boîtes
de remèdes, la différence réelle se trouve être de
28 articles. Si l'on groupe les objets par genre, on remar-
que que le nombre des tableaux est monté de 5 à 14,
mais que celui des gravures est descendu de 78 à 78,
que, de plus, il est entré 5 émaux, 4 fragments de sculp-
(1) Bibliothèque de lîourges, manuscrit 327 (registre), fol. 247.
202 LE MUSÉE
ture, le précieux vase de jaspe de la Sainte-Chapelle (1)
qui n'y étaient pas auparavant, sans parler d'objetsdivers comme la lunette d'approche qui est toujoursmentionnée ou des curiosités nouvelles d'un médiocre
intérêt, telles que des coquilles de nacre, des vases à
fleurs, un cadran solaire et enfin l'inévitable plan de la
Bastille du citoyen Palloy; le résultat obtenu en huit
années, après le solennel appel de Lakanal, était donc
véritablement misérable.
Le catalogue du 10 frimaire porte d'ailleurs l'indica-
tion d'un fait plus grave : il s'agit de la dispersion de la
presque totalité des objets réunis au Muséum et par con-
séquent de la fin officielle de cette institution.
On était au moment de la rentrée de beaucoup d'émi-
grés, de la réorganisation des administrations publiqueset du rétablissement du culte. On restitua à certains
émigrés des tableaux qui leur avaient appartenu (nos 6
et 7 de l'état qui précède), et l'archevêque (2), le préfet (3),le maire (4), prirent dans le Muséum, traité comme un
simple garde-meuble, des oeuvres d'art destinées à
décorer leurs hôtels respectifs ; la Cathédrale reçut un
tableau (5) et les commissaires du culte catholique de
l'église de Saint-Etienne sept peintures (6). Dans cette
répartition, détail curieux, l'archevêque prend pour sa
part une gravure intitulée : l'Espérance nourrit l'amour
et la persévérance la couronne, ainsi que trois gravures en
(f ) D. MATER, Etudes sur le musée de Bourges : Bassin de Jaspe rouge de
la Sainte-Chapelle. (Méin. Antiq. du Centre, XXVIII, 201.)
(2) N°« 5, 11, 21, 27 à 29, 31, 34, 36, 43 à 45, 47, 48, 53 à 57 et 59.
(3) N»« 4, 9, 10, 12 à 16, 18, 23 à 25, et 61 à 65.
(4) N« 17, 19, 20, 22, 26, 30, 32 et 58.
(5) No 3.
(6) N» 8.
DE BOURGES 203
couleur représentant des amours (1), sujets qui n'étaient
peut-être pas à leur place dans le palais d'un prélat.
Quatorze objets (2) restèrent au Muséum ou plutôt à
la Bibliothèque, où on les retrouvera, accrus de quelques
autres, lors de la fondation définitive du Musée. . .
(1) N"s 4.3 et se.
(2) N»B33, 35, 37, 39 à 41, 1G, 49 à 52, 60, 66 et. 67.
204 LE MUSÉE
II
Création du Musée en 1834.
Pendant les trente années qui suivirent la fin du Mu-
séum, on vit disparaître à Bourges et dans le départe-
ment, au milieu de l'indifférence générale et sans qu'ilen soit presque rien resté, de nombreux monuments (1)et quantité d'objets curieux, qu'un Musée aurait pu con-
server dans la province ou dont, tout au moins, il aurait
pu recueillir quelques fragments. Personne cependantne paraît avoir compris l'utilité de l'existence d'un éta-
blissement de ce genre, et ce n'est qu'en 1834 que le
comte de Lapparent, préfet du Cher, en réalisa enfin
l'intéressante création.
A côté de cette fondation, M. de Lapparent institua
une Société d'études archéologiques, historiques et sta-
tistiques, pour faire connaître tout ce qui concernait le
Berry, son passé et ses richesses naturelles, comme la
première avait pour but d'en conserver les richesses
archéologiques et artistiques. Une circulaire adressée le
30 juin 1834 aux sous-préfets et aux maires, leur fit
connaître les projets et le but poursuivi par l'Adminis-
(1) 1807 : démolition de Nolre-l)ame-de-la-Comlale ;
1821 : démolition de l'Oflicialité ;
1822 : démolition de l'église de Montermoyen ;
1828 : démolition de l'église de l'abbaye de Saint-Ambroix ;
1831 : démolition de l'église des Cordeliers, etc.
DE ROURGES 205
tration préfectorale. On y disait, en ce qui concernait le
Musée :
« C'est un monument à élever en l'honneur du départe-» ment ; chaque commune se montrera désireuse d'y contri-
« huer de même qu'elle sera appelée à en jouir. Nous avons
» lieu de compter également sur la bienveillance des parti-» culiers ; quelques-uns ont déjà fait les offres les plus« généreuses
» Vous remarquerez qu'en provoquant des dons de la part» des communes, je n'entends parler que de choses qui sont
» susceptibles d'être déplacées sans nuire à leurs intérêts,» non plus qu'à la conservation ou au décor de leurs monu-
» ments J'espère que la plupart des communes tiendront
» à faire leur offrande. »
Après avoir parlé des collections d'histoire naturelle
et des collections artistiques du Musée, la circulaire
terminait en ces termes :
« Aujourd'hui il est peu de villes importantes qui ne pos-» sèdent un Musée et, comme conséquence nécessaire, une
» Société savante sous la sauve-garde de laquelle Pétablisse-
» ment est placé. J'ai pensé que le département du Cher ne
» devait pas rester en arrière sous ce rapport. Une Commis-» sion composée d'hommes honorables est chargée de pré-» sider à la formation du Musée départemental. La même
» Commission est chargée de tout ce qui intéresse les anti-
» quités, l'histoire et la statistique du département. Puissé-je,» avec son concours et le vôtre, Messieurs, parvenir à fonder» un établissement durable cl utile qui deviendra un nouvel» ornement pour la Ville de Bourges, ainsi que pour le
» département (1). »
Par deux arrêtés en date du même jour, 30 juin
1834, le Préfet établit à Bourges : 1" une Commission
pour les antiquités, l'histoire et la statistique du dépar-
lement du Cher; 2° un Musée départemental d'antiquités,
d'histoire naturelle et des arts.
(1) Bulletin de la Préfecture du Cher, n° 24 de juillet 1834, art. 63.
206 LE MUSÉE
Ce second arrêté ayant été la charte constitutive du
Musée de Bourges, il peut paraître convenable d'en
reproduire intégralement le texte :
« Nous, Préfet du département du Cher,
» Considérant qu'il n'existe dans ce département aucun dé-» pôt public consacré à la réunion des objets d'antiquités qui» méritent d'être conservés dans l'intérêt de la science et des» arts ;
» Que les grands et nombreux souvenirs historiques qui» se rattachent à l'ancienne province du Berry doivent faire» désirer à ses habitans de voir garder avec soin ces débris,» témoignages précieux de moeurs et d'usages si variés,» comme aussi d'événements mémorables et souvent glo-» rieux;
» Qu'une collection d'objets d'histoire naturelle et de pro-» duits des arts ne peut qu'ajouter à l'intérêt du Musée
» que nous nous proposons d'établir pour tout le départe-» ment ;
» Arrêtons :
» Art. Ior. _ H sera formé à Bourges un Musée départemen-» lai d'antiquités, d'histoire naturelle el des arts.
» Le dépôt provisoire des objets destinés à former ce
» Musée sera établi dans l'ancien hôtel Jacques-Coeur : il sera
» ouvert au public aussitôt qu'il aura atteint le degré d'im-
» portance convenable.
» Art. II. — La Commission d'antiquités, d'histoire et de
» statistique, instituée par notre arrêté de ce jour, est char-
» gée de concourir à la formation du Musée départemental.» Art. III. — Toutes les communes du département du Cher
» sont appelées à contribuer à la formation du Musée. Elles
» ne pourront néanmoins disposer d'objets en faveur de cet
» établissement que d'après le vote des Conseils municipaux» et sous notre approbation.
» Les objets concédés gratuitement par les communes, et
» même par les particuliers, recevront des numéros à leur
» entrée au Musée, avec l'indication des donateurs. Il sera
» dressé un bordereau détaillé de ces objets et donné récé-
DE ROURGES 207
» pissé au bas ; un double de ce bordereau sera remis au
» donateur, un autre restera déposé au Musée.
» Aucun objet concédé gratuitement ne pourra être ni
» vendu, ni donné ; il ne pourra même être échangé que du
» consentement du donateur ou de ses ayants droit, sur l'avis
» de la Commission et avec notre autorisation.
» On ne pourra non plus disposer, sans l'avis de la Com-
» mission et notre autorisation, des objets acquis pour le
» Musée au compte du département. L'autorisation du
» Ministre sera nécessaire en ce qui concernera les objets» accordés par le Gouvernement.
» En cas de suppression du Musée départemental, les objets» cédés gratuitement seront remis aux communes et aux par-» ticuliers donateurs ou à leurs représentais ; autrement, ils
» ne pourront, sous aucun prétexte, être retirés.
» Art. IV. — Par la suite, il sera nommé un Conservateur
» responsable du Musée.
» La nomination en sera faite par nous, sur la présentation» de la Commission.
» Art. V. — Un règlement spécial pour le Musée nous sera
proposé par ladite Commission. »
Le même jour, les membres de la Commission furent
nommés ; elle était ainsi composée de MM. :
Le Préfet, président-né ;
Le Maire de Bourges ;
Mater, premier président de la Cour royale ;
d'Haranguier de Quincerot, directeur du canal de
Berry ;
Egault, ingénieur en chef des Ponts-et-Chaussées ;
Dutens, ingénieur en chef au canal de Berry ;
Le Goube, conseiller à la Cour royale ;
Chupiel, chef d'escadron, sous-chef d'étal-major
de la division ;
de Narp, professeur de physique au Collège royal
de Bourges;
Fabre, membre de la Société d'agriculture ;
14
208 MÎ MUSÉE
Louis Raynal, substitut du procureur général ;
Lemoine, capitaine du génie ;
Chevalier, bibliothécaire ;
Benjamin Zévorl ;
Boischard, professeur de peinture ;
Juillien, architecte ;
Hazé, peintre d'histoire et de paysage, corres-
pondant du Ministère pour la conservation des
monuments historiques du département du
Cher.
La Commission fut définitivement installée par le
Préfet le 22 août suivant. Dans le discours qu'il pro-
nonça à cette occasion, M. de Lapparent lui retraça les
travaux qu'elle allait avoir à poursuivre et l'étendue de
la mission qui lui était confiée. Relativement au Musée,il faisait observer que si, au début, il devait être facile
de trouver un local suffisant pour abriter des collections
encore à l'état embryonnaire, il faudrait bientôt s'occu-
per d'un emplacement plus vaste, pour lequel le dépar-tement et la ville auraient à s'entendre, grave question
qui, pendant plus de cinquante années, allait provoquerd'incessants projets chaque fois ajournés.
Conformément à l'article 5 de l'arrêté de constitution
du Musée, la Commission se mit de suite à l'oeuvre pourla confection du règlement destiné à déterminer les con-
ditions du fonctionnement respectif de la Société et du
Musée. Ce règlement, qui comprend 47 articles, fut
approuvé par le Préfet. Voici quelles étaient ses princi-
pales dispositions :
La Société se composait d'un nombre illimité de mem-
bres résidant à Bourges et de membres correspondants
résidant au dehors (art. 4).
Au lieu de former de suite un Musée d'ores et déjà
constitué, la Commission devait d'abord réunir les élé-
DE ROURGES 209
ments d'un cabinet d'antiquités, beaux-arts, curiosités
et objets d'histoire naturelle (art. 9), appelé à se fondre
avec le Musée départemental, quand l'ouverture de ce
dernier serait décidée (art. 10).Les ressources pécuniaires nécessaires seraient obter ;
nues à l'aide : 1° de souscriptions particulières toujours
ouvertes (art. 14) ; 2° d'une cotisation personnelle de
10 francs imposée une fois seulement, mais susceptible,
en cas de besoin, d'être réclamée de nouveau (art. 17);
3° d'allocations à demander à l'Etat, au Conseil général
ou au Conseil municipal (art. 18).
Le bureau chargé de la direction se composait d'un
Président, qui était le Préfet, président-né, d'un Vice-
Président, d'un Secrétaire, d'un Secrétaire-Adjoint et d'un
Trésorier, les quatre derniers élus pour 5 ans et inéligi-bles sans limite (art. 19 et 21). Le Vice-Président était
spécialement chargé de tout ce qui concernait le Musée
(art. 25).Ces diverses dispositions n'étaient pas toutes heu-
reuses : ainsi il était fâcheux qu'à un Musée définitive-
ment fondé, on eût préféré un cabinet provisoire, et au
point de vue financier, que l'on n'eût pas arrêté de suite
un système susceptible d'assurer tous les ans des res-
sources fixes, car rien n'est plus dangereux que de se
mettre dans l'obligation de faire des appels de fonds ;
mais que dire de l'article 12, § 2 ! Il était ainsi conçu :
« Cependant les donateurs, ou leurs ayants droit, pour-» ront reprendre les objets par eux donnés, si dans un
» délai de 10 ans le Musée départemental n'était pas» fondé ou si le Musée n'étant pas fondé encore, les •
» objets donnés étaient déplacés du lieu où le dépôt» actuel est établi... » C'était, contrairement aux règlesétablies par l'arrêté préfectoral, poser en principe la dis-
solution facultative du Musée et accorder aux donateurs
210 LE MUSÉE
le droit d'en user dans deux hypothèses qui se réali-
sèrent l'une et l'autre.
La Commission forma aussitôt son bureau qui,avec le Préfet comme Président-né, se composa de
MM. Mater, comme Vice-président, Louis Raynal, Secré-
taire, Lebas, Secrétaire-adjoint, et Debassyns de Mont-
brun, Trésorier. Ce dernier, lorsqu'il quitta Bourges, fut
remplacé par M. Bérard, son successeur à la Recette
générale du Cher.
Pour étendre son influence et augmenter ses moyens. d'action, la Commission s'adjoignit un grand nombre
d'adhérents tant comme membres résidants que comme
membres correspondants, ces derniers atteignirent le
chiffre de 76. On trouvera à la fin de ce chapitre la
liste des membres correspondants, mais nous n'avons
pu découvrir celle des membres résidants. On s'honorait
alors de porter le titre de membre de la Commission du
Musée : on le retrouve inscrit sur divers livres du
temps (1).
Enfin, vers 1838, la date précise n'est pas connue, en
exécution de l'article IV de l'arrêté constitutif du Musée,
M. Mater fut nommé Conservateur et M. Charmeil, Con-
servateur-adjoint. Plus tard, MM. Henry Fournier, petit-fils par alliance de M. Mater, puis M. Antoine Cougny (2),
gendre de M. Charmeil, lurent également nommés Con-
ser vateurs-adj oints.
Si l'institution de la Société d'antiquités et la création
(1) Guide complet de l'Antiquaire el du Voyageur dans Bourges el dans
le département du Cher. Bourges, Just-Bernard, libraire-éditeur et membre de
la Société du Musée. — Mémoires pour servir à la statistique du département
du Cher, par M. Jean-Miclicl FAUNE, ancien ingénieur..., président de la section
de statistique de la Société du Musée du Cher.
(2) En février 1857 ; il a été impossible de retrouver aucun des arrêtés relatifs
à ces diverses nominations.
DE ROURGES 211
du Musée appartiennent incontestablement à M. de
Lapparent, il ne semble pas douteux qu'une influence
étrangère et amie ait eu une grande part à la détermi-
nation qu'il prit dans la circonstance.
M. Mater, alors premier président de la Cour royale,,
qui entretenait avec le chef de l'Administration départe-
mentale les rapports les plus étroits, avait un goût très
vif pour les antiquités, les médailles et enfin toutes les
curiosités, dont il avait réuni une intéressante collection ;
il rêvait de doter la ville de Bourges d'un Musée public
et était disposé, pour faciliter cette fondation, à lui faire
abandon de son cabinet particulier. C'est à cette inten-
tion, souvent exprimée, que M. de Lapparent faisait allu-
sion dans sa circulaire du 30 juin, quand il disait :
« Nous avons lieu également de compter sur la bienveil-
» lance des particuliers ; quelques-uns ont déjà fait les
» offres les plus généreuses. »
On a d'ailleurs sur l'action efficace que M. Mater
exerça à cette occasion sur l'esprit de M. de Lapparent,et sur le rôle très réel bien qu'indirect qu'il eut dans sa
décision de constituer un Musée, le témoignage d'un
homme considérable du temps, M. de Boissy, conseiller
général du Cher, bientôt pair de France puis sénateur (1),
que sa situation mettait à même d'être bien renseigné :
« L'heureuse idée conçue par vous, écrivait-il, le 25 sep-» tembre 1835, à M. Mater, de doter notre pays d'un éta-
» blissement déjà riche par votre générosité, doit être
» embrassée avec empressement par chacun de nous,» jaloux de voir la ville de Bourges faire enfin des efforts
» pour prendre le rang qui lui appartient. Aussi, Mon-
(1) Hilaire-Etienne-Octave Rouille, marquis de Boissy, 1798-1866, possédaitdans le Cher la terre de Castelnau. 11 fut conseiller général du Cher, nommé pairde France en 1839 et sénateur en 1853. Il avait épousé la comtesse Guccioli
connue par sa liaison avec lord Byron.
212 LE MUSÉE
.» sieur le premier président, mon vif désir est-il de me
» réunir à ceux de nos concitoyens qui veulent, à votre
» exemple, concourir au prompt développement en
» grand de l'établissement dont vous êtes le créa-
it leur (1). »
La presse locale apporta son appui à la nouvelle entre-
prise : on peut citer, dans les Annonces berruyères du
1er mars 1838, un article très pressant bien qu'un peu
tardif, dû sans doute à la plume de Chevalier (de Saint-
Amand) et surtout une étude fort intéressante, ayant
pour titre : Musée départemental, qui se trouve dans le
Joui'nal du Cher du 15juillet 1834, c'est-à-dire au lende-
main même des arrêtés pris par M. de Lapparent.
Ce dernier article, signé seulement d'un Z et qui pour-rait bien être de Benjamin Zévort, l'auteur des Tablettes
berruyères, mérite d'être reproduit ou anatysé ici, parce
qu'il montre comment à cette époque on envisageait la
tentative qui allait être faite.
On posait d'abord en principe qu'un Musée est à la
fois « un objet d'utilité publique et un objet d'agrément ».
Puis, mettant en parallèle d'une façon très judicieuse la
situation de Bourges à l'époque où l'on instituait le
Musée et celle qu'elle présentait au point de vue intellec-
tuel et artistique avant la Révolution, on disait : « Jadis
» le trésor de l'ancienne Sainte-Chapelle, le chartrier de
» l'Église cathédrale, le Palais archiépiscopal, les mo-
» nastères et les établissements publics de la ville de
» Bourges, contenaient une foule d'objets en tous genres,» que les amateurs se plaisaient à venir visiter ; le temps» et les Révolutions qu'il amène, ont tout fait disparaître,^) mais le temps peut aussi réédifier ce qu'il détruit. »
Le collaborateur du Journal du Cher, après avoir rap-
(1) Mes archives.
DE BOURGES 213
pelé les monuments remarquables édifiés successivement
à Bourges et dans le Berry par les Romains, au Moyen-
Age et à la Renaissance, faisait observer qu'ils auraient
offert « des richesses immenses à un Musée, s'il eût été
» établi quelques siècles plus tôt », en ajoutant que grâce,
aux mesures que le Préfet venait de prendre « les ama-
» leurs des sciences et des arts n'auraient plus l'impuis-
» sant regret de voir, tantôt détruits sans pitié, tantôt
» ravis à leur destination naturelle et exportés loin de
» nous, une foule d'objets antiques que le hasard fait
» découvrir chaque jour ».
Sans doute les travaux de l'archéologue, de l'érudit ou
du savant, peuvent, dans une certaine mesure, rappeler
le souvenir des objets disparus, mais des études de ce
genre ne sont pas en général accessibles à la grande
masse du public et ne sauraient d'ailleurs remplacer la
vue de l'objet lui-même, conservé dans une galerie spé-
cialement affectée à l'instruction et à l'agrément de tous,
où « il n'est personne, comme on le fait observer, savant
» ou ignorant, patricien ou plébéien, artiste ou homme
» de lettres, qui ne soit flatté de trouver réunie et expo-
» sée à ses regards une collection de richesses tenant
» aux arts cultivés dans son pays ou aux trois règnes
» de la nature, objets dont la vue seule intéresse si vive-
» ment tous les âges et toutes les conditions ».
Puis, à l'exemple de M. de Lapparent, une pressante
invitation était adressée à tous pour la réalisation de
l'oeuvre entreprise dans l'intérêt commun : on faisait
« appel à tous les genres d'amateurs et surtout à la no-
» blesse et aux grands propriétaires, plus que tous autres,
» peut-être, capables d'enrichir le Musée et d'obtenir
» par leurs offrandes des droits à la reconnaissance pu-» blique. Une circonstance heureuse pour le progrès de
» cette institution nouvelle, c'est qu'elle n'est point une
214 LE MUSÉE
» affaire d'opinion ou de parti ; elle intéresse la société
» tout entière; c'est une oeuvre toute nationale et qui-
» conque aime la province qui l'a vu naître, ou dans
» laquelle des liens d'état ou de famille l'ont fixé, doit
» être désireux et fier de contribuer par quelque offrande
» à la formation d'un Musée, qui avant peu sera sans
» doute l'une des principales curiosités de cette ville. »
En terminant, l'auteur de l'article faisait ressortir
les heureux résultats que l'on pourrait obtenir par
la création du Musée : « Il peut ranimer parmi nous ce
» goût de l'étude et des arts qui s'est éteint après avoir
» fleuri parmi les Berruyers dans des siècles plus heu-
» reux. Riche de produits agricoles, riche de moyens de
» prospérité, riche d'antiquités et de souvenirs, pour-
» quoi la capitale du Berry ne redeviendrait-elle pas un
» jour ce qu'elle était sous Philippe-Auguste, sous
» Charles VII et, plus récemment, sous l'immortel Cujas,
» alors que son Université célèbre y avait réuni dans
» une moindre enceinte 50,000 habitants. C'est au temps
» sans doute à produire cet oeuvre long et difficile, mais
» la génération présente, dût-elle n'agir que pour son
» intérêt personnel, recueillera des fruits certains dans
» cet établissement, qui se recommande assez de lui-
» même, en ce qu'il réunira deux avantages inappré-
» ciables pour le pays, l'utilité et l'agrément. »
Liste des Membres correspondants.
1. Allemoz, médecin à Sancoins, Cher.
2 Archambault des Chaumes, receveur parti-culier à Sancerre, Id.
3. Assigny (d'), à Nevers. Nièvre.
4. Aubertot, maître de forges à Vierzon, Cher.
5 Bastard(Augustede),capitained'état-major, Paris.
(5. Berriat-Saint-Prix, professeur à l'Ecole de
Droit, Id,
DE ROURGES 215
7. Bertholet, médecin à Saint-Amand, Cher.
8. Blondeau, ancien professeur de philoso-
phie, à Mehun-sur-Yèvre, Id.
9. Boissy (Comte de), à Castelnau, Id.
10. Bonnaire (Baron), ancien préfet, à Saint-
Amand, Id.'
.;;
11. Bottard-Lusy, préfet des études au Collège
Rollin, Paris.
12. Buchet-Martigny, consul général de France,
13. Bussière, à Saint-Amand, Cher.
14. Caubet, ingénieur du cadastre à Perpignan, Pyrénées-Orientales.15. Caumont(de), secrétaire de la Société des
Antiquaires de Normandie, Calvados.
16. Chavaudret, secrétaire de la Sous-Préfec-
ture, à Sancerre, Cher.
17. Chazereau, pharmacien à Aubigny, Id.
18. Chouet (Charles), capitaine de voltigeurs,à Sancoins, Id.
19. Clavier, propriétaire aux Aix-d'Angillon, Id.
20. Cuisinier, curé de Genouilly, Id.
21 Delaconr (Hermès), à Prunelles,* Id.
22 vDelaroche, propriétaire et maire à Vorly, Id.
23. Desbassyns de Montbrun, receveur généralà Besançon, Doubs.
24. Desnoyer (Jules), bibliothécaire du Muséum
d'histoire naturelle, Paris
25 Devaux (Léon), sous-préfet,26. Duvergier de Hauranne, député du Cher,
à Herry, Cher.
27. Escalier, pharmacien à Vierzon, Id.
28. Faiseau-Lavanne. à Vallenay, Id.
29. Ferrogio, architecte, professeur à l'Ecole
du génie, à Montpellier, • Hérault.
30. Fosset (Jules), curé de Level, Cher.
31. Galicher (Louis), ingénieur civil à Vallenay, Cher.
32 Goupil des Palières, médecin à Nemours, Seine-et-Marne,33. Grasset, percepteur à La Charité, Nièvre.
34. Guérin, médecin à Châtillon-sur-Indre, Indre.
35. Haignière, ancien entreposeur des tabacs,à Saint-Amand, Cher.
216 LE MUSÉE
36. Jaubert (Comte), député du Cher, à Cours-
les-Barres, Cher.
37. Lapparent (de), ingénieur de la marine, à
Cosne, . Nièvre.
38. Lebrun, notaire à Chârost, Cher.
39. Legoux (Camille), sous-préfet à Saint-
Amand, Id.
40. Lelièvre, médecin à Mehun-sur-Yèvre, Id.
41. Lemaître, capitaine retraité, à Vierzon, Id.
42. Leprevost, député de l'Eure,43. Louis, régent au Collège d'Issoudun, Indre.
44. Maugenest, médecin à Saint-Amand, Cher.
45 Méchin-Desquins, juge de paix à Sancoins, Id.
46. Mercier, pharmacien à Lignières, Id.
47. Mercier-Genetoux, notaire à Argenton, Indre.
48. Mérimée (Prosper), inspecteur des Monu-
ments historiques de France, Paris.
49. Meunier, préfet de la Corrèze, Corrèze.
50. Morellet, à Nevers, Nièvre.
51. Pascal, graveur à Paris, Paris.
52. Pelletier, ancien avocat à Bourges, à Saint-
Amand, Cher.
53. Pérémé, à Paris, Paris.
54. Petit-Sémonville, bibliothécaire à Orléans, Loiret.
55. Pillivuyt, à Foëcy, Cher.
56. Pinault-Capin, propriétaire à Bourges, Id.
57. Ponroy, avoué à Issoudun, Indre.
58. Pupier (Francisque), directeur des houil-
lères de Commentry, Allier.
59. Ragon, commissaire-voyer à Saint-Amand, Cher.
60. Rancourt (Achille de), propriétaire à Ivoy, Id.
61. Raynal (Paul), sous-intendant militaire à
Paris, Paris.
62. Rey, propriétaire à Coust, conseiller généraldu Cher, Cher.
63. Rhodier, médecin à Mehun-sur-Yèvre, Id.
64. Rochefoucauld (Marquis Gaétan de la),
député du Cher, à Paris. Paris.
65. Rochette (Raoul), membre de l'Institut, Id.
DE BOURGES 217
66. Rossi, premier médecin du roi de Sar-
daigne, à Turin, Italie.
67. Rostain, maire d'Argenton, Indre.
68 Saint-Thorent (de), juge de paix à Lury, Cher.
69. Sauge, receveur de l'enregistrement à
Aubigny. Cher:
70. Thabaud-Deshouillères, substitut du pro-cureur du roi, à Issoudun, Indre.
71. Tramblais (de la), conseiller de préfectureà Châteauroux, Id.
72. Tourangin (Charles), médecin à Issoudun, Id.
73. Tourangin (Victor), préfet du Doubs, à
Besançon, Doubs.
74. Vitet, inspecteur des monuments, à Paris, Paris.
75 Vogué (Marquis de), propriétaire à Ivoy, Cher.
76 Ysabeau, régent au Collège de Châteauroux, Indre.
77. Ysabeau (Louis), employé au Ministère de
la Justice, Paris.
§ 1. — Le Musée de 1834 à 1862. — Administration de
M. Mater. — Formation des collections.
De 1834 à 1862, M. Mater, d'abord en qualité de vice-
présideiit de la Société d'Antiquités, puis comme Con-
servateur, assuma l'administration du Musée : c'est la
période de création qui fut, comme il arrive souvent,
particulièrement difficile et semée d'obstacles sans cesse
renaissants, dont on trouvera le récit dans le présent
chapitre.
Pendant son administration, M. Mater eut, à partir de
1838, pour collaborateur dévoué, en qualité de Con-
servateur-adjoint, M. Alphonse Charmeil (1), professeurde dessin à Bourges, qui, dans la suite, devint bibliothé-
caire de la ville en remplacement de Chevalier de Saint-
Amand.
(1) Alphonse Charmeil (1801-1897),Notice nécrologiquepar D.M.vrEn,lue, le18 juillet 1897, à l'Association amicaledes anciensElèvesdu Lycée de Bourges.
218 LE MUSÉE
Des connaissances artistiques très développées, une
grande activité, et cette perspicacité spéciale pour dé-
couvrir les objets intéressants qui caractérise le véritable
collectionneur, le rendirent particulièrement précieux.Il suppléa M. Mater lorsque ses fonctions de député du
département du Cher(l), puis de conseiller à la Cour de
cassation (2), l'obligèrent à résider à Paris, enfin quand
l'âge et son triste cortège d'infirmités pesèrent sur lui.
Le rôle de M. Charmeil, sur lequel on reviendra plus
amplement dans la suite de cette étude, a été considé-
rable dès le début, et la reconnaissance publique ne
saurait dans la circonstance séparer son nom de celui
de M. Mater, dont il fut véritablement le second dans la
création artistique qu'est le Musée de Bourges.Il importe cependant de préciser ici un point d'his-
toire locale, oublié ou mal connu parfois de quelques
personnes, en déterminant, aussi exactement que pos-
sible, la part revenant à chacun dans la réalisation d'une
oeuvre si intéressante pour le Berry. Pour y arriver, on
ne saurait mieux faire que de recourir aux témoignagesde M. Charmeil et de son gendre, M. Cougny, qui, ainsi
qu'on l'a déjà dit. fut plus tard Conservateur-adjoint :
l'un et l'autre, avec la plus jDarfaile loyauté, proclamè-rent en maintes circonstances que le seul fondateur du
Musée était M. Mater. « Notre Musée, décrivait le premier» dans une lettre adressée le 10 décembre 1863 au Journal
» du Cher, au lendemain de la mort de M. Mater, notre
» Musée, qu'on ne doit qu'à la persévérance et au géné-» reux dévouement de son regrettable fondateur, aidé
(1 ) M. Mater a été élu député du Cher pour le collège de Bourges, extra muros.
les 5 mars 1839, 10 juillet 1842, et 4 août 1846; la Révolution de 1848 mit fin à
son mandat.
(2) M. Mater fut nommé conseiller à la Cour de cassation par décret du 26 juin1852 et mis à la retraite le i-'i novembre 1855.
DE ROURGES 219
» de mon faible concours. » — « Un homme », disait à
son tour M. Cougny dans un article publié en 1861 (1),
« un homme auquel notre pays devra une éternelle
» reconnaissance, a pris la généreuse initiative de réu-
» nir, autant qu'il a pu le faire, toutes ces chères reli-
» ques des siècles passés qui se trouvaient disséminées'
» dans toute la province et d'en doter notre ville.— Que
» d'actions de grâces ne doit-on pas à cet excellent
» citoyen, qui, magistrat des plus éminents, représen-)) tant de nos intérêts à la Chambre élective pendant de
» longues années, trouvait encore le temps, comme tous
» les esprits supérieurs, de s'occuper, dans le peu d'ins-
» tants que lui laissait le souci des affaires, du soin de
» fonder et d'organiser une collection, qui peut devenir
» une des plus riches de celles que l'on admire en pro-» vince. »
C'est que le dévouement le plus entier, une activité de
tous les instants, le désintéressement le plus grand,
pour éminemment précieuses que puissent être ces qua-
lités, seraient demeurées inrpuissantes à mener à bien
l'oeuvre entreprise et à triompher des multiples diffi-
cultés qui se présentèrent, si, par surcroît, les relations
étendues de l'ancien avocat, la grande autorité du chef
de la magistrature du ressort, enfin la haute influence
du député, réunies sur la même tête, n'avaient assuré
un succès inespéré.Abordant maintenant l'exposé des laits relatifs à la
longue administration de M. Mater, pour plus de
clarté, on s'occupera dans le présent chapitre de ce qui
concerne les collections, leur formation et leur dévelop-
pement; le suivant traitera des questions financières et
d'installation, toujours si importantes; enfin, dans un
(1) Les Beaux-Arts, revue nouvelle : 14-et 15 juin 1861 ; cet article a été
reproduit par le Journal du Cher, nosdes 20 et 27 mars 1862.
220 LE MUSÉE
autre, après avoir jeté sur la situation juridique du
Musée, au moment où l'administration de M. Mater
allait prendre fin, un coup d'oeil rétrospectif, on exa-
minera quel en était alors le A'éritable propriétaire.Deux collections d'inégale importance constituèrent
le premier fonds du Musée : le cabinet de M. Mater et les
objets curieux que la Ville de Bourges possédait déjà.Le cabinet de M. Mater se composait principalement
d'un médaillier renfermant 572 monnaies romaines, 241
monnaies royales de France et 78 baronales, 30 mereaux
ou jetons berruyers et enfin 575 monnaies étrangères,
parmi lesquelles se trouvaient nombre de j)ièces d'or ou
d'argent (1).Il y avait en outre environ 150 objets divers, parmi
lesquels on peut signaler une boîte à mouche en ivoire,un portrait de Jacques Deschamps, par Potron en 1644,
deux peintures de genre de Boischard, quatre gravuresde faits militaires de la campagne d'Italie de 1800, à
laquelle le donateur avait pris part, deux émaux, cinq
figurines antiques en bronze, des médaillons du sculp-teur bernryer Ysabeau, des armes antiques, du înoyen-
âge, orientales et exotiques, des pièces de céramique,des objets exotiques ou d'histoire naturelle (2).
(1) En donnant sa collection numismatique, M. Mater mit comme condition
qu'il lui serait tenu compte de la valeur intrinsèque des médailles d'or et d'ar-
gent qu'elle renfermait. Un état dressé par M. .luillicn-Boutin, alors bijoutier à
Bourges, constata que cette valeur s'élevait à 2,177 fr. 15. Cette .somme ne fut
payée qu'en 1865, après le décès de M. Mater.
(2) Catalogue [manuscrit] des objets contenus dans le Musée du départe-ment du Cher. — Objets donnés par M. Mater :
Argent, etc.: 1 et 2.
Cocos, etc.: 1 à 5 et 18.
Cartons, etc.: 1 et 4.
Mosaïques : 1 el 2.
Ivoire, etc.: 1, 3, 4, 15, 16, 40, 51, 56, 57, 60, 67 et 82.
DE ROURGES 221
La Ville de Bourges, pour laquelle la création d'un
Musée installé dans ses murs offrait un intérêt tout par-
ticulier, autorisa, le 15 janvier 1835 (1), la remise de ce
qui lui restait de l'ancien Muséum et de quelques autres
objets reçus ou acquis depuis la dissolution de ce der-.
nier. La Bibliothèque donna deux peintures sur cuivre,
une Sainte Aréronique et une Annonciation (2), un des-
sin de Huet*(3), deux gravures de scènes flamandes*(4),
cinq émaux, médaillons de héros grecs ou d'empereursromains
*(5), six fragments de sculpture des mausolées
du maréchal de Montigny et des Laubespine*
(6), à la
Peinture : portraits : 50.
— sujets divers : 7, 55 et 85.
Gravures, etc.: 26, 79, 80 à 82, 92 et 95.
Vitraux : 5.
Emaux, etc.: 6, 120, 122, 129, 130 et 196.
Verreries : 1, 33, 43, Ai et 45.
Bronze, etc.: 6 à 10, 13 à 21, 67, 75, 84 et 92.
Bois : 56, .57, 60, 83, 94, 95, 100, 101.
Fer, etc.: 1, AA à 49, 51 et 76.
Armes, etc.: 1 à 9, 21, 22, 24, 28, 29, 56, 84, 85, 121 à 123, 157 et 158.
Marbre, etc. : 48, 49, 80, 85, 91, 101, 111, 112, 120, 124 à 144-, 248 à
253, 260, 264, 271, 272, 299, 303, 307 et 317.
Tapisseries, etc.: 8 à 10, 12 et 36.
Histoire naturelle : 20, 27 à 31 et 37.
Une partie des objets portés sur celle liste ont certainement été donnés au
Musée postérieurement à l'année 1834, mais il est impossible de distinguer ce
qui fut déposé au Musée dès le début cl ce qui a été remis dans la suite.
(1) Mes Archives.
(2) Calai. [Mamis.] : Peinture, sujets divers, 29 et 30. .
(3) Ibid. : Gravures, n° 27. — Les astérisques indiquent les objets provenantdu Muséum et qu'il a été possible d'identifier.
(A) Ibid. : 1 et 2.
(5) Ibid. : Emaux, 5.
(6) Ibid. : Marbres, 1, 2, 3.
222 LE MUSÉE
Cathédrale, une Résurrection de Lazare (1), un cadran
solaire en bois* (2) et un modèle de colonne* (3).Les autres objets donnés par laVille de Bourges, sans
qu'il soit fait mention de la Bibliothèque comme indica-
tion d'origine, sont au nombre de vingt-neuf et consis-
tent en sept portraits à l'huile de Voltaire, Rousseau,
Mably, Cujas, Louis XVI, Marie-Antoinette, et surtout
un beau portrait de l'académicien La Chapelle, oeuvre
de Rigaud (4), deux gravures (5), cinq fragments de
vitraux (6), une galère, bas-relief en pierre provenantd'une cheminée de l'Hôtel Jacques-Coeur (7), une coupe
antique en jaspe ayant appartenu à la Sainte-Cha-
pelle (8), la figuration eh relief de ce dernier édifice,
exécutée en bois par Gabard en 1766 (9), la représenta-tion en relief de la Bastille avec son plan porté sur une
pierre provenant de cette forteresse (10), une cloche de
l'Hôtel Jacques-Coeur datée de 1652 (11), six matrices
d'anciens cachets de la Ville de Bourges (12), un cas-
que (13) et une tabatière.
On se souvient du pressant appel que, dans sa circu-
laire, M. de Lapparent adressait aux communes du
(1) Calai. [Manus.] :51.
(2) Ibid. : Bois, 66.
(3) Ibid. : 50.
(A) Ibid. : Portraits, 12, 29 à 31.et 45.
(5) Ibid. : Gravures, 8 et 90.
(6) Ibid. : 45.
(7) Ibid. : Marbre, 66.
(8) Ibid. : 7.
(9) Ibid, : Bois, 3.
(10) Ibid. : Pierre, 42 el 43.
(11) Ibid. : Bronze, 38.
(12) Grand registre, Dons : Bronze, 40.
(13) Calai, [Manus.] : Armes, 20.
DE BOURGES 223
Cher pour obtenir leur concours en laveur du Musée ;
en outre de la Ville de Bourges, dont on vient de voir la
contribution particulière, quatre communes seulement
firent des envois : Nançay donna un tabernacle en bois
peint venant de la chapelle de son ancien château- (1).;
Plaimpied une statue de la Vierge en bois (2) et l'effigietumulaire en pierre de Richard II, archevêque de
Bourges, au xie siècle (3) ; Saint-Amand un casque, une
cuirasse et un chanfrein, de cheval (4) ; enfin, Saint-
Satur six objets de décoration en fer repoussé : deux pan-nonceaux armoriés, deux couronnes et deux mitres (5).
Divers corps ou administrations publics tinrent à
honneur de prendre place parmi les bienfaiteurs du
Musée : le Tribunal civil de Bourges déposa le cachet
de }a Cour prévôtale de 1815 (6) ; le Tribunal de com-
merce, deux portraits, l'un de Louis XVIII, l'autre de
Jean Toubeau, l'auteur des Institutes consulaires (7);le Collège royal de Bourges, deux statues en pierre du
xne siècle, provenant de Saint-Benoît-du-Sault (8), les
boiseries gothiques d'un ancien autel de Jacques-Coeur (9)et un bas-relief en bois représentant la Cène (10).
Le Musée reçut encore de la fabrique de la Cathédrale,
le groupe d'anges en marbre qui accompagnait autre-
(1) Calai. [Manus.] : Bois, 39. — Mes archives : Lettre d'envoi de M. Ouin,
. maire de Nançay, du 12 mars 1839.
(2) Ibid. : 104,
(3) Ibid. : Marbre, 62.
(4) Ibid. : Armes, 116 à 118.
(5) Ibid. : Fer, 72.
(6) Grand registre : Bronze, 30.
(7) Calai. [Manus.] : Peinture, 34 et 35.
(8) Ibid. : Marbre, 44.
(9) Ibid. .-Bois, 91.
(10) Ibid. : 97.
15
224 LE MUSÉE
fois la statue de Notre-Dame-la-Blanche à la Sainte-
Chapelle, puis à Saint-Etienne, oeuvre remarquable du
xve siècle, due au ciseau de Jean de Cainbray (1), et un
Crucifiement attribué à Philippe de Champaigne (2) ; de
celle de Saint-Bonnet, les deux volets peints par Jean
Boucher, représentant d'un côté le portrait de cet artiste
et celui de sa mère, et de l'autre une Décollation de Saint
Jean-Baptiste en grisaille (3); des Hospices de Bourges,une peinture du Départ de la# Sainte Famille (4); enfin,de la Société d'agriculture, une planche en cuivre avec
le portrait gravé de Philippe-Jacques de Bengy de Puy-vallée.
Le Gouvernement ne pouvait manquer de favoriser
une oeuvre de cette nature. C'est ainsi que l'on voit figu-rer dans les inventaires les noms du comte Duchâtel (5)et de M. de Rémusat (6), ministres de l'Intérieur, de
Cunin-Gridaine, ministre du Commerce (7), de Guizot,
ministre de l'Instruction publique (8), et du comte de
Montalivet, intendant général de la Liste civile (9). Rap-
peler les noms des personnages politiques dont le patro-
nage éclairé favorisa les débuts du Musée, c'est acquitterune véritable dette.
Les libéralités des particuliers eurent, comme tou-
jours, la plus grande part dans la formation des collec-
rl) Mes archives : Lettre de M. de Lutbo, vicaire général, en date du 11 dé-
cembre 1844.
(2) Grand Registre : 24-3 el 62, par échange.
(3) Calai. [Manus.] : Peinture, portraits, 72 et 73
(4) Ibid, : Peinture, sujets divers, 48.
(5) Grand Registre : p. 165, 191, 194, 203, 246.
(6) Ibid. : p. 242, 243.
(7) Ibid, : p. 195.
(8) Ibid. : p. 189.
(9) Ibid, : p. 289.
DE BOURGES 225
lions ; mais ici, la liste des bienfaiteurs du Musée, même
restreinte à la période de son existence qui se termina
en 1862, ne comprendrait pas moins de 457 personnes,
dont la grande majorité avec plusieurs dons. Les citer
tous, en faisant connaître en détail les titres de chacun
d'eux à la reconnaissance publique, ne serait assuré-
ment que l'accomplissement d'un devoir, mais ce serait
en réalité entreprendre le catalogue d'une notable partie
des collections, c'est-à-dire dépasser les limites de cette
étude. La liste complète des donateurs de la première
période du Musée se trouvera d'ailleurs à la fin du pré-
sent chapitre, et l'on se bornera, pour le moment, à
signaler les libéralités les plus importantes, tant à rai-
son du nombre que de la valeur exceptionnelle des
objets donnés.
En première ligne, il convient de nommer M. Char-
meil, dont on a déjà dit le rôle considérable dans la fon-
dation du Musée. Ce qui entra par son entremise con-
siste, soit en objets donnés purement et simplement, soit
en objets cédés à prix d'argent, mais il faut ajouter de
suite, à des conditions telles, que les abandons dont il
s'agit procèdent plus du contrat à titre gratuit que de
l'acte à titre onéreux : situation particulière qu'expri-mait très heureusement le Grand Registre d'Inventaire
du Musée par cette mention spéciale qui accompagnait
chaque article : donné sous condition.
A la première catégorie des dons appartiennent trente
et un objets, intéressants sans doute, mais n'appelantaucune remarque particulière (1) ; la seconde, celle des
dons sous condition, comprend quatre-vingts objets envi-
ron, peintures, gravures, meubles, glaces, porcelaines,
(1) Grand Registre : p. 31, 44, 46, 53, 54, 62, 117, 138, 140, 144,183, 202,244 et 289.
226 LE MUSÉE
verreries, broderies et objets divers (1), parmi lesquelson remarquera le beau cabinet d'ébène bien connu des
visiteurs (2), une crédence en bois noir incrustée
d'ivoire (3), un bahut de noyer avec figures (4), un
bureau hollandais en marqueterie (5), une bibliothèquede Boule à deux corps avec incrustations de cuivre et
d'étain (6), deux consoles en bois doré (7), un bureau
Louis XVI décoré de peintures (8), une pendule dite
religieuse, de l'époque Louis XIII, à colonnes torses en
ivoire (9), une grande pendule Louis XIV et son socle
avec incrustations de cuivre et d'étain (10), une paire de
landiers en cuivre représentant deux satyres (11), nombre
de tableaux, de gravures, de pièces de céramique et de
curiosité, qui toutes comptent parmi les plus précieuses
que le Musée possède.
Après M. Charmeil, il faut citer d'un mot, avec l'indi-
cation de ce que le Musée a reçu de plus notable de
chacun d'eux :
Arraull, ancien graveur à Bourges, dont les dons sont
en partie, selon toute vraisemblance, l'oeuvre de son
habile burin : 4 planches de cuivre gravées (12), la griffe
(1) Grand Registre : p. 45, 107, 125, 162, 204, 243, 248, 256, 288, 350,
376, 378, 371.
(2) Ibid. : p. 4S-1.
(3) Ibid. '; p. 45-4.
(A) Ibid. : p. 45-6.
(5) Ibid. : p. 45-5.
(6) Ibid. :p. 371,87-1.
(7) Ibid. : 87-4.
(8) Ibid. : 87-6.
(9) Ibid. : p. 45, 49-9.
(10) Ibid. : p. 378, 110-3.
(11) Ibid, :p. 376.
(12) Ibid. : p. 47.
DE BOURGES 227
du Présidial de Bourges (1), le cachet et des planches de
cuivre de la Loge de Sainte-Solange de Bourges (2), enfin
trois fragments de vitraux (3) ;
Aubertot, propriétaire, des Forges de Vierzon : plusieurs
bustes en fonte coulés dans cette usine, intéressants
spécimens de la métallurgie berruyère (4) ;
Le baron E. Augier : une belle paire de pistolets signés
Ogier Leblanc, armurier à Vierzon (5) ;
Le comte Eugène de Barrai : objets faisant partie de
l'équipement d'un gauchos de la Plata (6) ;
Baille de Beauregard, conseiller à la Cour de Bourges :
un combat de cavalerie, peinture du Bourguignon (7) ;
Barberaud père, archiviste du département du Cher :
un ancien portrait sur bois de Jacques Coeur (8) ;
Bercier, principal du collège de Varzy : 2 bustes an-
tiques en marbre de Drusus et de Vespasien ; une tête
de Mercure également en marbre (9) ;
Bonnault de Villemenard (Camille de) : un portrait de
Denis Dodard, intendant du Berry, attribué à Largil-lière (10).
Bonsergent, commissaire-priseur à Bourges : un pla-teau décoré de pâtes, un émail, un soufflet à poudrer,une paire de pantoufles, des objets de verrerie et de
faïence, 3 fragments de vitraux, 2 planches à cartes en
(1, 2, 3) Grand Registre : p. 47, 48, 50 et 343.
(4) Ibid. : 147.
(5) Ibid. : 27.
(6) Ibid. : p. 27, 43, 61, 71, 123, 124, 141, 320 et 329.
(7) Ibid. /p. 241.
(8) Ibid. : p. 256.
•(9) Ibid. : p. 201.
(10) Ibid, : p. 242.
228 LE MUSÉE
bois, une peinture représentant le château de Mehun-
sur-Yèvre (1).
Bourdaloue-Martin, ingénieur, et dans la suite adjointau maire de Bourges : les diptyques consulaires de la
cathédrale de Bourges, précieux monument en ivoire de
l'époque romaine (2), une série d'objets antiques et
autres provenant du département du Gard et de
l'Orient (3).Chazereau el Desbans, négociants : un grand bahut à
colonnes détachées et panneaux sculptés représentantdes trophées et deux cariatides (4).
De..Clairambault, consul à Trébizonde : 2 médaillons
en cire représentant le conventionnel Barrère et sa
femme, 6 émaux de la Compagnie hollandaise des Indes-
Orientales, etc. (5).
Dardeau, greffier à Issoudun : une ancienne tapisserie
représentant un miracle de Saint Etienne (6).
Delorme, président du Tribunal de commerce de
Bourges : 4 gravures habillées où sont figurées des
scènes de la Révolution : Diogène et Marat, Charlotte
Corday et Marat, la Danse des Ordres, etc. (7).
Dubuisson, sellier : une planche de cartes à jouer, une
Sainte Solange, un émail représentant Saint Joseph,
plusieurs pièces de faïence dont un grand plat décoré,
(1) Grand Registre : p. 55, 105, 125, 139, 140, 141, 345, 351, 369 et 385.
(2) Ibid. : p. 22, 97, 147, 183 et 185. — J. DUMOKTET : Mémoire sur les
diptyques de la Cathédrale de Bourges, lu à la Sorbonne les 9 et 10 avril 1863.
(3) Ibid. : p. 45.
(4) Ibid, : p. 45.
(5) Ibid. : p. 107 et 235.
(6) Ibid. : p, 126. — D. MATEIÎ : Les anciennes tapisseries de la Cathédrale
de Bourges; — Pierre de Crosses. (Mém. des Antiq. du Centre, XXVIIe vol.,
329.)
(7) Ibid. : p. 263.
DE HOURGES 229
une aiguière en étain, 8 planches de cuivre gravées,
3 peintures et 4 fragments de vitraux (1).
Duchapt, conseiller à la Cour : 2 pleurants du tom-
beau de Jean de Berry, précieuses statuettes en marbre
de l'imagier Raoul Mosselmann et un verre de Bohême
armorié (2).Dumoutet jeune, salpêtrier : 10 objets, parmi lesquels
2 boîtes à mouches, deux portraits de Louis XV et du car-
dinal de la Rochefoucauld, archevêque de Bourges (3).Jules Dumoutet, sculpteur : un certain nombre de ses
oeuvres de début, en plâtre : 2 médaillons de Charles VII
et du violoniste Boucher, les bustes du colonel Marnier
et de Phelypeaux d'Herbaull, archevêque de Bourges,les statuettes en pied d'une Vierge couronnée, d'une
Vierge à la chaise, du colonel Marnier, de Schiller, de
la Fille de Jephté, une réduction du tombeau de Jean
de Berry (4), et une collection de vases antiques prove-nant d'Italie.
Le cardinal Dupont, archevêque de Bourges : un fal-
distorium, siège d'un évêque aux offices (5).
François Durand : la Tentation de Saint Antoine,
remarquable dessin à la plume d'après Callot et un grand
plat décoré (6).
Dutens, ingénieur : un émail de Petitot, le Repos en
Egypte, Jésus au Jardin des Oliviers et la Salutation
angélique, peintures de Gui Halle, la Chaste Suzanne,
gouache sur vélin, etc. (7).
(1) Grand Registre: p. 42, 48, 55, 103, 117, 137, 241, 255 et 343.
(2) Ibid. : p. 202 et 351.
(3) Ibid, : p. 137, 181 et 241.
(A) Ibid, : p. 204, 283 et 284.
(5) Ibid. : p. 370.
(6) Ibid. : p. 81 et 288.
(7) Ibid. :p. 103,245 et 261.
230 LE MUSÉE
Duvergier de Hauranne (Prosper), député du Cher : de
nombreuses monnaies ou médailles.
Gabard : 6 figurines habillées en cire, représentantdes Mexicains (1).
Le vicomte Gassot de Fussy,. ancien maire de Bourges,s'est défait, en faveur du Musée, de précieux souvenirs
de famille, notamment des portraits de plusieurs de ses
ancêtres, qui ont tenu une place importante dans l'his-
toire du Berry. Ce sont les portraits de Jacques Gassot,
seigneur de Deffens, d'Alabat, d'Isaïe Riglet et de Bris-
son de Plagny, tous anciens maires de Bourges, de
Catherine de Médicis, de Bourdaloue, d'Etienne Gassot,
du pape Benoit XIV ; il faut citer encore une curieuse
cuillère rapportée de Jérusalem par Jacques Gassot et
un équilibriste en ivoire (2).Madame veuve Girard : un beau plat de Nevers où sont
représentées les Amours de Thétis, etc. (3).
Grasset, qui avait constitué un musée à La Charilé-
sur-Loire et avec lequel M. Mater fit un certain nombre
d'échanges : une quinzaine d'objets exotiques, de céra-
mique et de verrerie, un petit portrait de Louis XV (4).
Hazê, conservateur des monuments du départementdu Cher : diverses antiquités trouvées à Drevant, telles
que bagues, bracelets, épingles, pointes de flèches en
bronze (5), une réduction de la colonne de Jean Goujon,
un dessin reproduisant la Cathédrale de Bourges, le pland'un tombeau antique découvert sur la place Séraucourt
(1) Grand Registre : p. 235.
(2) Ibid. : p. 97, 181, 243. 244, 246, 256 et 265.
(3) Ibid. : p. 140.
(4) Ibid. : p. 29, 33, 43, 138. 146, 231, 246 el 350.
(5) HAZÉ : Notices pittoresques sur les Antiquités el, les Momimens du
Berry. Bourges et Paris, 1834.
DE BOURGES 231
et un tableau représentant le château de Boisiramé (1).Hémeré : portraits de Louis XV, de Marie Leczinska
et du Dauphin (2).
Jacquet, employé de chemin de fer : une bonbonnière
en ivoire ajrant appartenu à Mlle de la Charolais (3).
Juillien, architecte : 4 pleurants du tombeau de Jean'
de Berry, un fragment de boiserie de la Sainte-Chapellede Bourges, un fragment de vitrail représentant une
Annonciation, deux médaillons en émail, Saint Luc et
Saint Marc, deux portraits de Maximilien de Béfhune-
Sully, prince d'Henrichement (1664-1712), et de M. A. de
Cambout, sa femme, du Grand Dauphin, fils aîné de
Louis XIV, de la duchesse d'Orléans, femme du Régent,etc. (4).
Lebon, juge de paix d'Issoudun : un Ecce homo en
bois, un grand chandelier en cuivre en forme de satyre,etc. (5).
Legoube, conseiller à la Cour de Bourges, et sa femme :
un étui à ciseaux ciselé et damasquiné, une figurine de
Saint Roch en ivoire, un portrait de l'abbé de Lisle,médaillon en terre cuite, un tableau représentant le châ-
teau de la reine Blanche, copie de M. Legoube, etc. (6).Lichtenstein (de) : un chanfrein de cheval où est figuré
l'Hydre et Hercule, un casque, un Saint Etienne, petitestatue en faïence, des objets antiques en bronze, etc. (7).
(1) Grand Registre : p. 41, 48, fil, 81, 143, 162, 181, 190, 221, 246, 251
et 268.
(2) lbid. : p. 242.
(3) lbid. : p. 184,
(4) lbid. : p. 201, 4-1, 343, 106, 245 et 242.
(5) lbid. : p. 370 et 377.
(6) lbid. : p. 145, 182, 255 et 325.
(7) Ibid. : p. 34, 141 et 378.
232 LE MUSÉE
Milord, huissier à Château roux : deux portraits de la
duchesse de Châteauroux et d'une de ses soeurs (1).Montbran (Debassyns de), receveur général : un très
beau sabre indien que lui avait donné le radjah de
Bénarès, et de nombreux objets exotiques, de curiosité
ou d'histoire naturelle (2).
Moussoir, greffier de la Justice de Paix de Bourges :
de nombreux objets de curiosité, exotiques, etc., notam-
ment un dessin original de Rembrandt, un beau portraitd'un membre de la famille Chabenat, attribué à Rigand,un petit bas-relief en albâtre représentant Jésus au Jar-
din.des Oliviers, plusieurs boîtes à mouches et autres
petites boîtes pour la toilette, en ivoire ou émail]ées,une tabatière en bois aux armes des Conti, deux boîtiers
de montre émaillés, des clefs ouvragées, un cachet d'ar-
gent, une roulotte de pâtissier, etc. (3).Marnier (Colonel), conseiller d'Etat : un fusil arabe,
une cartouchière et une poudrière, pris dans un combat
en Algérie par le baron Lepic; 6 tableaux où sont peintsles portraits d'Alciat, Doneau, Hotman, Duaren, Mérille
et Broé, célèbres professeurs de droit de l'Université de
Bourges (4).
Nicolay (Marquis de) : un vase en bronze trouvé prèsde Blet, qui contenait 3.400 monnaies romaines du
me siècle (5).
Pelletier, ancien conventionnel : portrait de la du-
chesse de. Chârost, pastel peint par Isabey (6).
(1) Grand Reyislre : p. 24!).
1.2) lbid. : p. 25, 31, 43, 190, 201, 319 et 320.
(3) Ibid. : p. 21, 4-2, U, 48, 54, 103, 104, 125, 137, 138, 148, 183, 202,
203,221, 243 et 268.
(4) Ibid. : p. 30, 44, 53, 125 et 202.
(5) lbid. : p. 51.
(6) Ibid. : p. 250.
DE BOURGES 233
Peneau (René), pharmacien : plusieurs vases de phar-macie et plats de faïence, l'Offrande à Cérès et l'Offrande à
l'Amour, peintures, les bustes de Sigaud de Lafond, de
La Fayette et de Mirabeau, des objets exotiques et d'his-
toire naturelle (1).
Perrot-Galbois : 3 épées et un coude de brassard en
fer, une gourde en faïence, un coffre en fer, une Adora-
tion des Mages et la Vision de Saint Bruno, peintures sur
cuivre de Sébastien Franck, une précieuse Annonciation,
de l'école de Lucas de Leyde et un vitrail représentantune Sainte Famille (2).
Pierquin de Gembloux, inspecteur d'Académie : le ca-
chet de Bailly, maire de Paris, un dessin original de
Vanni, un moule de hache en bronze, un plat de porce-
laine, une feuille de l'herbier de J.-J. Rousseau, etc. (3).
Picart, juge de paix à Levet : 3 portraits de la famille
du Tremblay (4).
Rapin (Madame), femme du conseiller à la Cour d'ap-
pel : une bourse ornée de deux émaux, une râpe à tabac
en ivoire représentant Vénus. (5).
Raynal, substitut, puis avocat général près la Cour de
Bourges : diverses curiosités exotiques, un portrait de
Saint François de Sales, deux miniatures sur ivoire, le
portrait du père Perussault, de l'ordre de Jésus (6).
Rossy, architecte : plusieurs objets trouvés lors de la
construction des forges à Auron, un buse de corset
(1) Grand Registre : p. 41, 61, 137 à 139, 241, 281, 282, 319, 321 et 350.
(2) Ibid. : p. 27, 32, "137, -146, 147, 241, 245, 247, 256, 268 et 344,
(3) lbid. : p. 52, 81, 283, 284, 288, 320, 350 et 370.
(4) Ibid. : p. 255.
(5) Ibid. : p. 106 et 184,
(6) Ibid. : p. 41, 61, 123, 162, 255 et 265.
234 LE MUSÉE
en ivoire de l'époque Louis XIV, un fragment de vitrailet diverses autres curiosités (1).
Robertet, maire de Sainl-Amand : un casque, une cui-
rasse, un chanfrein de cheval (2).Salle : un émail représentant la Passion et une brode-
rie de soie où Saint Paul et Sainte Barbe sont figurés (3).
Vauquelin, ingénieur : de nombreux objets exoti-
ques (4).
Viguier, armurier, député en 1848 : un canon de fusil
de rempart, un canon de carabine, un yatagan, une ar-
balète, une paire de pistolets de carrosse, fabriqués à
Vierzon par Desaintes, un fusil espagnol et un écusson
armorié en pierre (5).
Vogué (Marquis de) : deux pleurants du tombeau de
Jean de Berry (6).
Ysabeau, sculpteur : Cet artiste amateur lit don d'un
grand nombre de ses oeuvres parmi lesquelles on peutciter : en plâtre, un buste de Jacques Coeur, des médail-
lons de Poincinet, de Charlotte Cordaj', d'Ysabeau de
Bavière, de Louis XI et de Bourdaloue ; en bronze, une
collection de 70 médaillons représentant des illustrations
de l'histoire de la France (7). Ce dernier envoi fut portéà la connaissance du public par la lettre suivante qui fut
insérée dans le Journal du Cher du 25 juillet 1855 :
« M. Louis Ysabeau, employé au ministère de la justice,» vient de remettre au Conservateur du Musée du Cher 70» médaillons en bronze de diverses célébrités françaises.
(1) Grand Reyistre : p. 21, 22, 32, 53, 61, 138, 147, 182, 190, 238 et 343.
(2) lbid. : p. 33.
(3) Ibid. : p. 105 et 125.
(4) lbid. : p. 28, 33, 71, 203, 221, 281, 268, 326 et 375.
(5) Ibid. : p. 24, 25 et 267.
(6) Ibid, : p. 201.
(7) lbid, : p. 281, 282 et 287.
DE BOURGES 235
» En dehors de ses travaux, M. Ysabeau a, dans ses mo-
» ments perdus, pratiqué l'art du statuaire avec zèle et
» talent : c'est le fruit d'un long travail, dont il voulait doter
» sa ville natale, qu'il vient de déposer au Musée.
» Puisse l'exemple qu'il donne et qu'a déjà donné en plu-» sieurs circonstances M. Paul Bourdaloue, ingénieur,'être.» suivi par nos concitoyens amis des arts et de notre pays.
» Le Conservateur du Musée du Cher,
» D. MATER. »
Aux dons si nombreux dont on vient de lire une
nomenclature partielle, mais qui suffit pour témoigner
de l'intérêt qu'excita dans le public la création du Musée,
il faudrait ajouter celle des principales acquisitions
qu'effectuèrent ses administrateurs pendant le cours de
la même période, mais la question d'espace oblige ici
encore à restreindre les citations. On se bornera donc à
donner la liste des objets provenant de l'important cabi-
net, que Labouvrie avait formé pendant la Révolution,
dont il recueillit de nombreuses épaves. Ils furent achetés
lors de la vente de cette collection et quelques-uns sont
mentionnés dans son curieux livre sur la Relation de la
monstre des mystères des SS. actes des apostres et faits
divers.
Aroici les indications retrouvées à ce sujet sur le grand
registre du Musée et reproduites textuellement avec
quelques explications complémentaires :
P. 117 (1). « Petit triptyque en étain » pièce de style
byzantin.
P. 148. « Un druide portant le gui » (2), figurine en fer,
qui n'est que le cimier d'un heaume du moyen-âge.
(1) Les numéros donnés se réfèrent aux pages du grand registre du Musée sur
lequel les objets sont inscrits.
(2) LAUOUYHIU: Relation de la monstre..., etc.: pi. A-, n" 4,
236 LE MUSÉE
P. 202. « Quatre empereurs romains », pièces en
marbre polychrome d'une basse époque trouvées à
Néris (1).P. 203. « Masque d'une femme morte », que l'on croit
être le masque d'Agnès Sorel (2).Peintures sur toile :
P. 243. « Un tableau de famille de quatorze person-
nages », attribué à Jean Boucher (3).Id. « Cérès changeant Stellio en lézard » (4).Id. « La Vierge à genoux et l'Enfant Jésus ». Echangé
avec la fabrique de la Cathédrale contre un Cruciiiement
de Philippe de Champaigne (5).Id. « Jacques Coeur » (6).Id. « Procession de la ligue ». Curieuse peinture du
temps (7).Id. « Cérès et Bacchus ». Attribué à Natoire (8).Id. « Acis et Galathée ». Même attribution (9).Id. « Portrait de Mc Pierre Petit, nommé maire de
Bourges en 1662 à 88 ans ».
Pastel :
P. 253. « Portrait de Renaudon, avocat à Issoudun :
Costume de roi des Couards ». Attribué à Latour (10).
(1) LAnouvniE : Relation de la Monstre, etc. : p. 237 et pi. 4, nn 1.
(2; Vicomte ALPHONSE DISLA GLÈIIE : Un Masque de femme en marbre du
XVe siècle, conservé au Musée de Bourges.. [Mém, Aniiq. Centre, Xlll, 107.)
(3) Catalogue [imprimé] du Musée de Bourges : Peinture, 1869. N° 202.
(4) lbid,: n° 96.
(5) lbid.: 11° 30.
(6) lbid.: n" 178.
(7) Ibid.: n" 70.
(8) Ibid.: n<>92.
(9) Ibid.: n" 93.
(10) lbid,: n» 303.
DE BOURGES 237
Peintures sur bois :
P. 255. « Union du chien et du chat ». Peinture alle-
mande du xvue siècle (1).Id. « Deux grisailles ». Le Benedicite et l'Aumône de
Molenaar (2). .
Id. « Le char de la Mort ». Ecole d'Albert Durer (3).L'administration du Musée, pour se concilier la bien-
veillance de l'administration des Beaux-Arts, jugea bon
de donner cinq tableaux à la liste civile, pour le Musée
de Versailles, alors en formation : un portrait du mar-
quis de Châteaugontier, ministre d'Etat et chancelier de
France en 1643, qui avait été donné par M. Delaporte (4),et ceux de quatre ducs de Bourgogne : Philippe le Bon,
Philippe le Hardi, Jean sans Peur et Charles le Témé-
raire, les trois premiers donnés par M. Perrot-Galbon et
le quatrième entré par acquisition (5). Nul doute que,dans cette circonstance, il n'ait été procédé régulière-
ment, c'est-à-dire, avec le consentement des donateurs el
l'approbation préfectorale, conformément à l'article 3,
§ 3 de l'arrêté du 30 juin 1834.
Les objets entrés au Musée étaient inscrits avec exac-
titude sur deux registres, dont l'un était intitulé : Cata-
logue des objets contenus dans le Musée du départementdu Cher, et dont l'autre, bien que ne portant que ce
simple titre, Dons, renfermait en réalité aussi bien les
acquisitions que les libéralités. Jusqu'à un âge très
avancé, M. Mater tint lui-même ces deux registres au
courant : on trouve partout son écriture large et régu-
(1) Catalogue l'imprimé] du Musée de Bourges : Peinture, n" 56.
(2) Ibid.: n»* 51 et 52.
(3) Ibid.: n" 4,
(4) Grand registre : p. 241.
(5) lbid,: p. 256.
238 LE MUSÉE
lière, et ce n'est guère qu'à la fin de quelques chapitres
que l'on rencontre des mentions de la main de M. Char-
meil. Il n'est pas douteux que les deux registres, dont il
vient d'être parlé, n'appartiennent d'une façon généraleà l'administration de M. Mater, dont ils permettent d'ap-
précier les heureux résultats.
Pour le classement des collections, on n'avait pasalors pour guide, comme aujourd'hui, les savants cata-
logues dressés pour les grands Musées de Paris; l'orga-nisation des collections publiques était une science
nouvelle el non encore assise, aussi M. Mater adopta-t-ilun système rationnel, mais entièrement abandonné à
l'heure présente : la classification des objets d'après la
matière dont ils sont formés. On eut ainsi au Musée
de Bourges dix-neuf chapitres dont voici la nomencla-
ture, avec l'indication du nombre des numéros que
comporte chacun d'eux; il fout ajouter que souvent
chaque numéro comprend plusieurs objets :
DE BOURGES 239
ACQWSI-DONS TOTAL
TIONS
Objets en argent ou en or 19 9 28
Cocos, noyaux, calebasses 16 2 18'
Cartons, cartes 9 1 10
Mosaïque 4 4 8
Ivoire, os, écaille, corne, nacre, cireet pâte 59 36 95
Peinture : Portraits 71 11 82— Sujets divers 69 25 94
Gravures, dessins, livres, papiers. . 42 84 126
Vitraux 32 10 42
Emaux, faïences, terres de pipe, porce-laines 131 65 196
Verrerie : 30 19 49
Bronze, cuivre 73 71 144
Objets en bois 67 45 112
Fer, fonte, étain, plomb 60 22 82
Armes, instruments de chasse, de guerre,instruments tranchants 124 34 158
Marbre, pierre, plâtre, terre cuite,albâtre ... 178 70 .248
Tapisseries, broderies, tissus, cuir, jonc 45 14 59
Objets d'histoire naturelle 37 1 38
TOTAUX ..1.067 523 1.590
En outre des objets d'archéologie, d'art ou de curiosité,
dont on vient de parler, il existait certaines séries parti-culières constituant autant de collections spéciales :
ainsi il y avait une collection numismatique, une collec-
tion iconographique, une collection botanique, une col-
lection minéralogique, une collection d'oeufs (1), une
(1) Un inventaire sommaire indique que le Musée, du temps de M. Mater, pos-sédait 94 variétés d'oeufs.
16
240 LE MUSÉE
collection de coquillages, une collection d'insectes, une
collection de graines, une collection de fossiles (1) et
enfin une collection ornithologique (2).
Si quelques-unes de ces collections, encore à l'état
embryonnaire, ne méritent pas d'autre indication que la
simple mention qui précède, il en est certaines qui
appellent des explications plus détaillées.
La Collection numismatique avait eu, comme on le
sait, pour premier fonds le médaillier de M. Mater : son
importance s'était depuis notablement augmentée. Le
tableau qui suit fera connaître la composition de la
collection personnelle du fondateur du Musée au mo-
ment où elle fut donnée et sa situation quand prit fin
son administration :
(1) PIERQUIN DE GEMBLOUX : ouvr. cité, p. 370.
(2) Guide de l'Etranger dans la ville de Bourges. — Bourges, Vermeil, 1846,
p. 64.
£en
I ilAUGMENTATION SITUATION GENERALE
MFDA1T11FR TIF M MATFR ^e 'a co"ec^on numismatique de la collection numismatiquedu Musée pendant à la fin de
l'administration de M. Mater l'administration de M. Mater
Or Arg. Gr.br. M. br. P. br. Or Arg. Gr.br. M. br. P. hr. Or Arg. Gr.br. M. br. P. br.
Monnaies consulaires romai-nes 62 16 78 1
Monnaies impériales romai-
nes, carolingiennes et du
Saint-Empire 35 163 186 156 229 7 84 64 37 39 42 247 250 193 268
572 140 712
Monnaies royales françaises.. 10 169 51 23 70 2 33 239 53
Monnaies seigneuriales fran-
çaises 61 59 52 3 113 62
Monnaies étrangères 28 244' 189 20 46 7 48 290 196
Jetons et médailles 157 934 105 631 262 1.565
73 856 1.805 50 373 783 123 1.229 2.588
2.734 1.206 3.940
242 LE MUSÉE
Ainsi la collection numismatique du Musée, qui, lorsde l'abandon du médaillier de M. Mater, ne comprenait
que 2,734 pièces, s'était augmentée de 1,206 numéros,renfermant en tout, au moment où son premier admi -
nistrateur mourut, 3,940monnaies, médailles ou jetons.Le nombre des pièces d'or qui, à l'origine, n'était que de
73, atteignait 123, et celui des pièces d'argent ou de
billon était monté de 856 à 1,229.
Le catalogue descriptif de toute la collection, rédigé
par M. Mater et écrit de sa main, forme quatre volumes
in-folio, dont les deux premiers sont consacrés aux
monnaies romaines, le troisième aux médailles et jetonset le quatrième aux monnaies françaises royales et sei-
gneuriales et aux monnaies étrangères.La Collection botanique a été constituée par la réunion
de deux herbiers, celui de Lemaitre et celui du comte
Jaubert. Le capitaine René Lemaitre, originaire de Vier-
zon, vétéran des guerres de la République et de l'Empire,a consacré à sa ville natale un petit opuscule historiqueintitulé : Mémoires sur Vierzon (1). Il donna au Musée, à
la Société duquel il appartenait comme membre corres-
pondant, un herbier peu considérable, offrant surtout
de l'intérêt pour la flore vierzonnaise : M. Le Grand fait
l'éloge de cette collection, à laquelle était jointe un cata-
logue manuscrit, dont l'original est déposé à la mairie
de Vierzon, et dont une copie existe au Musée (2).L'herbier du comte Jaubert, composé d'environ 1,200
à 1,300 espèces, a pour titre : HERRARIUM FLOIWÎ CEN-
TRALE, ou Collection des espèces décrites dans la Flore du
Centre de la France, par M. le comte Jaubert, membre de
la Chambre des députés, et Casimir. Saul, inspecteur de la
(1) Bourges, Alanceron, in-16 de 173 pages.
(2) A. LE GIUND : Notices biographiques et bibliographiques pour VHistoire
de la botanique en Berrg. (Mém. Société historique... du Cher, 1891, p. 133.
DE BOURGES 243
navigation, lS'il. M. Le Grand, si compétent en pareille
matière, appréciait très favorablement cette collection (1).
Les éléments qui ont contribué à former la section de
minéralogie du Musée de Bourges sont très divers, ils
proviennent notamment de MM. Fabre et Aufrère, d.u
comte Jaubert, du Muséum de Paris et du Conseil géné-
ral du département du Cher.
Voici les renseignements qu'il a été possible de recueil-
lir à ce sujet, renseignements assez confus, qui se res-
sentent de la diversité d'origine des apports successifs
des échantillons minéralogiques : ils auraient le plus
grand besoin d'être fondus ensemble et d'une mise en
ordre, établie sur des bases scientifiques, ce qui leur a
manqué jusqu'à ce jour.J.-M. Fabre, savant distingué, ancien ingénieur-véri-
ficateur du département de l'Ombrone (Toscane), qui,dans l'organisation réglementaire de la Société du Musée,était président de la section de statistique, et, comme
tel, chargé de toutes les questions scientifiques, s'était-
tout particulièrement occupé de géologie et de minéra-
logie. De longue date il aA-ait exploré le département du
Cher (2) et réuni les éléments d'un travail qui fut publié
(1) A. Lu GiiANi). — Notice sur quelques botanistes et sur quelques anciens
herbiers du Berrg. (Mém. Soc. hist... du Cher, 1888, p. 191.)
(2) Voici, sur les travaux antérieurs de Fabre, une curieuse lettre du 8 janvier
1836, qu'il écrivait à M. Mater, Vice-Président de la Société d'antiquités.., lettre
qu'il parait intéressant de reproduire ici :
« MONSIEUR,
» Plusieurs de nos collègues m'ont fait part de l'objet mis en discussion dans» la séance du 4- de ce mois et de l'invitation qui vous a été faite par la Société de
» vous entendre avec moi sur le prix que je mettrais à mes travaux sur la des-
» cription physique du département.» L'un d'eux, M. Péncau, m'a demandé de voire part de vous faire connaître
» mes prétentions.» .l'ai l'honneur de vous dire qu'elles ne sont nullement établies dans un esprit
» de spéculation, surtout envers une Société dont je m'honore d'être membre el
244 LE MUSÉE
en 1838 sous le titre : Description physique du départe-ment du Cher et considérations géologiques sur le mode de
formation des terrains métazoïques ; il avait en même
temps recueilli de nombreux échantillons minéralogi-
ques, qui constituèrent le commencement de cette partie
» sur ce qu'elle a pour but d'être utile à notre département. J'aurais désiré que» ma position m'eût permis de lui faire l'hommage entier de mes recherches,» mais celles-ci ont exigé des déplacements onéreux dont je joins ici l'état.
» Dépenses pour courses géologiques et minéralogiques dans les arrondisse-
» ments de Saint-Amand, Bourges et partie de celui de Sanceire :
» Dans l'année 1824 65 70
• » 1825 102 »,
» 1826 208 »
» 1827 155 »
» 1828 42 45
» 1829 40 05
» 1830 84 75
» TOTAL 697 95
» II l'esté encore une grande partie de l'arrondissement de Sancerre à explorer» en détail. Je présume que deux cents francs pourront suffire aux frais de cette
» course. Il eût été à désirer qu'elle eût été faite l'été dernier. La Société aurait
» été à même de publier le premier chapitre de la statistique autant complet que» possible.
» Si la Société désire que je termine ce travail, je suis entièrement à sa dispo-» sition, jusqu'au 1«' juillet prochain. Je me permets de fixer cette époque parce
» que des affaires de famille m'obligeront à transporter ma résidence hors du
» département vers la fin de cet été.
» J'ai l'honneur d'être votre très humble serviteur.
» FAUHE. » (Mes archives).
On ignore les ternies de la réponse qui fut faite à M. Fabre par le Vice-Prési-
dent de la Société d'antiquités et qui lui fut adressée dès le 19 janvier suivant,
mais il est à croire que l'insuffisance de ressources, qui de tout temps pesa si
lourdement sur le Musée, et, pendant sa courte existence, sur la Société d'anti-
quités elle-même, ne permit pas, en fin de compte, de donner suite à un projet de
publication, onéreux en lui-même, et qui se présentait grevé de frais antérieurs,
dont on a vu le chiffre.
On trouve cependant, dans l'unique bulletin paru de la Société d'antiquités, un
article de M. Fabre, de 7 pages, intitulé : Aperçu général sur le département
pour servir d'introduction à la statistique; il existe également, imprimé sous
le couvert de la Société, une sorte de prospectus de 7 pages ayant pour titre :
DE BOURGES 245
des collections scientifiques du Musée (1). Le comte Jau-
bert contribua également à sa formation, le fait se trouve
affirmé dans un écrit contemporain dont l'auteur était
en mesure d'être bien renseigné (2).
Un officier, M. Aufrère, capitaine adjudant-major au
34e régiment d'infanterie, qui ne semble avoir eu avec
le Cher d'autre lien que la présence de son fils au col-
lège de Bourges, désireux d'être agréable à M. Mater (3),
lui envoya successivement pour le Musée, en juillet 1843,
une collection de fossiles et d'ostracites provenant du
Maçonnais, au mois d'avril 1844, une caisse de 450 échan-
tillons et enfin au mois de juillet suivant plus de 500
échantillons expédiés d'Auxonne.
A ces dons particuliers s'ajoutèrent, en 1840, un envoi
de 105 échantillons des roches du bassin de Paris, fait
par le Muséum (4). Enfin, en 1845, le Conseil général du
Cher vota les crédits nécessaires pour assurer le traite-
ment d'un Collecteur géologique, ayant pour mission de
Plan de statistique pour le département du Cher, avec cette mention : Jollet-
Souchois et Ci0, impr. de la Société. — Février 1835.
Le Musée possède deux catalogues manuscrits qui doivent, l'un et l'autre,
provenir de M. Fabre ; aucun doute n'est d'aillleurs possible pour l'un d'eux,
puisqu'il en porte l'indication expresse.
Le premier a pour titre : Distribution méthodique des substances minérales
du département du Cher par classes, ordres, genres et espèces, d'après Hauy,
par J.-M. Fabre, président de la Société de Statistique, de la Société du Musée
du Cher..., etc., et comprend 1,032 numéros.
Le second est intitulé : Description des minéraux de ma collection par nu-
méros d'ordre, commencé en octobre 1824 jusqu'au numéro 1,036. (3 cahiers
in-fol.).
(1) L'entrée au Aluséc de la collection minéralogique du Cher, réunie parM. Fabre, est affirmée dans la préface du Bulletin de là Société d'antiquités,d'histoire et de statistique du département du Cher, p. V.
(2) PIEUQUIN DE GEMBLOUX: Ouvr. cité, p. 371. — Guide de l'Etranger dans
la ville de Bourges, de 184S, p. 64.
(3) Lettres des 27 juillet 1843, 20 avril et 19 octobre 1844. -- (Mes archives.)
(4) Journal du Cher du 27 octobre 1840.
246 LE MUSÉE
réunir des échantillons d'un même modèle pour former
une collection géologique locale et une collection techno-
logique de marbres, pierres à bâtir et autres matériaux
pour les constructions et les routes (1). La collection quifut réunie par cet agent spécial existe encore au Musée.
De toutes les collections que M. Mater s'est complu à
réunir, il n'en est aucune où il ait mis plus de lui-même
que dans la Collection entomologique, pour laquelle il
fut à la fois chasseur, préparateur et naturaliste. Ce
goût, qui chez lui existait de longue date, lui procura en
1816 une cause de distraction bien opportune, lorsque,
après les Cent Jours, l'ancien président des Fédérés du
Cher fut envoyé en exil à Castelsarrasin. La conquêtedes innombrables espèces qui forment le monde des
insectes, fut plus tard le délassement dans lequel il
cherchait de préférence un repos parfois nécessaire aprèsles fatigues de l'audience ou de la Chambre. A Paris
même, il profitait de ses heures de loisir pour parcourirles environs de la capitale, en quête de captures nou-
velles. Mais il n'est pas de collection plus éphémère et
exigeant plus de soins continus qu'une collection d'in-
sectes. Celle du Musée de Bourges aentièrement disparusous l'action destructive du temps, et par suite de l'ab-
sence, parmi ses Administrateurs, de spécialistes aptesà en combattre les atteintes.
Collection conchyologique : elle se composait entre
autres éléments d'un legs de Pierre-Jean Dupond, capi-taine en retraite, consistant en une collection de coquil-
lages (2).
(1) Conseil général du Cher, session de 1845. Procès-verbal des délibéra-
tions, 77.
(2) Délibération du Conseil municipal de Bourges, registre XV111, n« 203.
— Détail curieux qui montre bien l'état d'incertitude qui régnait sur la situation
de rétablissement, c'est la Ville qui accepte le legs fait au Musée départemental.
DE ROURGES 247
II reste à signaler la Collection iconographique réunie
par M. Mater, qui se compose de 9.847 portraits, for-
mant 83 volumes in-folio, dont 8 de supplément, ayantune table pour chaque volume et une courte note bio-
graphique sur les divers personnages représentés,. le
tout de la main du conservateur du Musée.
Pour compléter ce qui vient d'être dit sur la formation
des collections, il serait intéresant de suivre leur déve-
loppement année par année, pour ainsi dire pas à pas, el
de connaître les démarches faites auprès des possesseurs
d'objets curieux pour les décider à s'en dessaisir, car
on sait combien sont rares les libéralités spontanées(l).Voici le peu de renseignements qu'il a été possible de
recueillir à cet égard :
Dans le Journal du Cher du 5 février 1835, on lit un
avis émanant de la Société d'antiquités, pour tâcher de
compléter la série des médailles de la redevance, que la
Ville de Bourges devait aux marquis de Châleauneuf-
sur-Cher et dont le Musée avait déjà onze exemplaires.Dans le numéro du 8 août de la même année, à l'occa-
sion del'entrée dans les collections d'un bustedeCujas et
d'un médaillon de Poincinet de Civry, oeuvres du sculp-teur berruyer Ysabeau, on donne sur le Musée lui-même
les indications suivantes : « La pensée de former un Musée
» départemental à Bourges, due aux Autorités de la
(1) Pour stimuler la bonne volonté des personnes qui pouvaient faire des dons
au Musée, on avait inséré dans le Règlement un article 11 ainsi conçu : « Pour
la formation aussi prompte que possible du Cabinet, chaque membre ou cor-
respondant offre, dans les trois mois du présent Règlement ou de son ad-
mission, un ouvrage relatif aux travaux de la Société ou un objet d'art,
d'antiquité ou d'histoire naturelle d'une valeur indéterminée.
A en juger par le peu d'efficacité qu'eut cet article sur les travaux de la So-
ciété, on peut se demander s'il fut beaucoup plus utile pour la formation des col-
lections. 11faut cependant ajouter que beaucoup de donateurs appartenaient à la
Société comme membres titulaires ou comme membres correspondants.
248 LE MUSÉE
» Ville », ce qui, d'ailleurs, était inexact, « et conçue» il y a à peine un an, a déjà eu pour résultat d'amener
n la réunion, dans une des salles de l'Hôtel de Ville,» d'une grande quantité, de médailles, de tableaux et
» d'objets d'art, qui eussent été perdus sans l'heureuse
» idée du premier magistrat du département. Bientôt le• » local sera trop petit pour contenir ce que produiront
» d'ici quelque temps les recherches et les travaux des
» membres de la Société d'antiquités. Tout le monde
» connaît l'activité de M. le Premier Président, qui non
» seulement a enrichi notre Musée d'un des plus beaux
» médailliers qu'un particulier puisse posséder et d'une
» foule d'autres objets curieux, mais est encore à la
» recherche de tout ce qui peut intéresser l'histoire et
» en particulier celle dé notre pays et sa statistique» locale. »
Dans un ouvrage manuscrit qui a pour titre Antiquitésdu Berri et dont l'auteur s'appelait Blandon, on trouve
sur le Musée un article que nous, citerons en entier,
parce qu'il nous renseigne sur la situation et le carac-
tère de cet établissement, deux années après sa fonda-
tion, avec un ton de franchise particulièrement intéres-
sant (1) :
« Musée (novembre 1837).» Muséum ou plutôt Cabinet de la Société d'antiquités,
» de géographie et de statistique.» Le Musée, quoique institué par un arrêté du Préfet,
» n'est que le Cabinet dans lequel une Société a réuni
» sans classement, tout ce que les sociétaires ont réci-
» proquement donné, tout ce qu'ils ont obtenu de la
(1) Mes archives. — La franchise et l'indépendance de jugement que l'on ren-
contre dans cet article sont d'autant plus à remarquer, que le mémoire auquel
il est emprunté, était destiné à paraître dans le Bulletin de la Société d'antiquités,
chargée, comme on le sait, de fonder le Musée.
DE BOURGES 249
>) complaisance, du patriotisme des Berrichons, aussi le
» prétendu Musée n'est pas public : pour y pénétrer il
» faut y être introduit par un des membres.
» Un escalier étroit, dans un des moindres bâtiments
» de la mairie, conduit au premier. Ce n'est encore
» qu'une seule pièce, carré long d'une grandeur me-
» diocre, éclairée par deux petites fenêtres à chacun des
» deux bouts. Le peu de capacité du local n'en fait qu'un
» dépôt où rien n'a pu être classé, où tout est pour ainsi
» dire pêle-mêle, confondu, une vraie macédoine, du
» Chinois, du Romain, du Turc, échantillons de car-
» rières, médailles, sandales, bas-reliefs, des armes, des
» poissons dans des bocaux, mauvaises peintures,
» émaux, des coquillages, de la poterie peinte, beaucoup
» d'incrustations de la fontaine de Saint-Allyre.» Quand la Société aura pu se procurer un local d'un
» abord plus convenable, composé de plusieurs pièces,
» que les objets pourront être classés, étiquetés, avec
» indication de leur provenance, du donateur, cette col-
» lection sera très intéressante par sa variété.
» Il serait à désirer que les membres de la Société qui
» paraissent avoir beaucoup de zèle, dressassent dès à
» présent une notice succincte des objets qui composent» la collection pour apprendre aux Berrichons à con-
» naître leurs richesses et les réveiller de leur torpeur. »
Passant ensuite en revue les objets d'archéologie qui
l'intéressent plus particulièrement, Blandon signale,comme Antiquités égyptiennes, « une jambe avec le pied
'
» d'une momie d'enfant, — un manuscrit en papyrus,» en rouleau, — deux fragments de pierre blanche pré-» sentant en demi-relief chacun une tête égyptienne demi-
» nature, encore couverte en partie d'une couche de
» rouge qui s'étendait partout le morceau... [Antiquités]» romaines : une collection complète de médailles de
250 LE MUSÉE
» bronze, divers modules, de tous les empereurs ro-
» mains, un buste, ronde bosse, de Titus. — Moyen âge:» deux figures, demi-nature, fort relief en marbre blanc,» Vertus d'un tombeau inconnu (1),— 6 statuettes, ronde
» bosse, en albâtre blanc à filets d'or, pleureurs prove-» nant du tombeau du duc Jean de Bourges, moulées
» par Romagnesi jeune, rue du Coq-Honoré, qui en vend
» des épreuves en carton-pierre (2), — deux têtes en
» marbre blanc sortant de niches en coquille, provenant» de l'Hôtel des Lallemant à Bourges (3), — deux sta-
. » tues demi-nature en pierre ronde-bosse, engagées dans
» un fragment de pierre formant console, d'origine in-
)) connue (4), — un coffre de bois, orné d'arcades en
» ogive, — plusieurs fragments de menuiserie, mêmes
» ornements, — armes, haches d'armes, épées simples» et à deux mains, pertuisanes, piques, — la cloche du
» beffroi du palais de Jacques-Coeur, des fragments de
» verrière de la même maison où sont peintes les armoi-
» ries du maître, celles de la branche d'Orléans, — un
» gril travaillé avec soin et qui tourne sur son manche,
» trouvé dans les décombres du château de Mehun-sur-
» Yèvre, un vase de fayence assez grand travaillé tout à
» jour, également trouvé dans les souterrains et par un
» grand bonheur conservé sans la moindre écaille, un
» assez grand vase de fayence travaillé à jour et d'un
» goût tel que M. Brongniard, directeur de la manufac-
(1) Ces figures, qui accompagnaient le tombeau des de Laubépine à la Cathé-
drale, datent du xvn° siècle.
(2) Le fait du moulage et de la mise en vente des reproductions, mécontenta si
vivement l'un des donateurs des statuettes, qu'il ne voulut plus, dans la suite, donner
également, comme il l'avait promis, celles qui étaient restées en sa.possession.
(3) Ces médaillons ont été restitués à l'administration municipale et remis en
place dans l'hôtel.
(4) Proviennent de Saint-Benoît-dii-Sault (Indre).
DE ]) OU RUES 251
» ture de Sèvres, en a pris le dessin pour en faire exé-
» cuter un dans l'établissement royal. — Moderne : le
» buste, grandeur nature, de Jacques-Coeur, en plâtre» vernissé, — buste plus petit que nature, en plâtre ver-
» nissé, du littérateur Poinsinet, tableaux donnés par le
» Gouvernement, mais que le défaut d'espace force à
» laisser au grenier. »
En 1840, dans le Guide complet de l'antiquaire et du
voyageur dans Bourges et le département du Cher(l),
Pierquin de Gembloux consacra vingt pages au Musée
de Bourges, dans lesquelles on trouve sur les objets
déjà réunis dans le Cabinet, puisque c'était son nom
officiel à cette époque, d'intéressantes indications mêlées
aux fantaisies dont l'auteur était coutumier. C'est dans
cet écrit qu'il a imaginé, sur l'Annonciation italienne du
Musée, la légende qui a eu cours jusqu'à ce moment (2).Dans un autre Guide de l'Etranger dans la ville de
Bourges, paru en 1848 et en 1850, qui est l'oeuvre du
baron de Girardot et d'Hippolyte Boyer, se trouvent
condensés en deux pages les principaux renseignements
qui permettent de juger des progrès que le Musée avait
réalisés depuis 1840 (3).Pour rencontrer sur le Musée une nouvelle étude fai-
sant connaître sa situation générale et permettant d'ap-
précier les progrès réalisés depuis 1848, il faut descendre
jusqu'en 1861. A cette époque, M. Antoine Cougny,
(1) llourges, Jusl-Bernard, libraire-éditeur et membre de la Société du Musée,
1840, in-8". — Le chapitre du Guide relatif au Musée fut réimprimé la même
année, dans une brochure portant le titre de « Notice sur le Musée de Bourges »,
qui se vendait 1 franc chez l'éditeur, M. Just-Bernard, et chez le concierge du
Musée. C'était donc une sorte de Guide officiel du Musée et le premier qui ail
été publié.
(2) On trouvera dans le XXIXe volume des Mémoires de la Société des Anti-
quaires du Centre, non encore paru, une note sur celte question.
(3) Bourges, Vermeil, in-12.
252 LE MUSÉE
conservateur-adjoint du Musée, fit paraître un article
ayant pour titre Musée de Bourges, dans lequel il jetaitsur les collections déjà réunies un coup d'ceil rapidemais précieux, parce qu'il jugeait avec la compétenced'un critique et d'un artiste les progrès effectués depuis la
fondation de l'établissement dont il montre avec netteté
l'avenir et expose les besoins impérieux (1). L'auteur
concluait ainsi : « Vous voyez, par ces quelques lignes,» que le Musée de Bourges est déjà assez curieux pour» que l'on s'occupe de lui; aussi nous faisons des voeux
» pour qu'un local spécial et bien distribué soit bientôt
» ïhis à la disposition du conservateur d'une collection
» déjà si intéressante. Nous l'avons dit plus haut, nous
» savons qu'il y a de la bonne volonté chez'quelques-uns» de nos concitoj^ens. Qu'elle grandisse encore ! afin
» qu'on ne fasse rien de chétif, de mesquin, dans une
» entreprise qui préoccupe à un aussi haut point toutes
» les personnes intelligentes et à laquelle tous nos admi-
» nistrateurs doivent être fiers d'attacher leur nom. La
» tâche est grande, mais belle. Beaucoup de choses res-
» tent à faire ; espérons que nous ne les attendrons pas)) longtemps. L'élan est donné, le premier pas est fait, il
» faut le suivre. » Les souhaits et les espérances expri-mées par M. Cougny devaient sans doute se réaliser un
jour, mais près de trente années devaient s'écouler encore
avant cette heure, qui fut attendue avec bien de l'impa-
tience par les amis de l'art et des souvenirs berruyers.L'examen de la liste des donateurs qui terminera le
présent chapitre, suggère diverses observations. On
remarquera tout d'abord que la constitution du Musée
semble avoir été le résultat d'un mouvement général et
que toutes les classes de la société tinrent également à
(1) Les Beatix-Arls : ouvr. cité..., n"s des )«>• et 15 juin 1861.
DE BOURGES 253
honneur d'y contribuer. Sur la liste, à côté des noms de
représentants des anciennes familles du Berry, de la
vieille bourgeoisie locale, de magistrats, de fonction-
naires, d'officiers, souvent étrangers au pays, d'hommes
de loi et d'industriels, on trouve celui de négociants et
d'artisans, dont, pour plusieurs, les libéralités excédè-
rent notablement la mesure de ce que l'on pouvait rai-
sonnablement attendre d'eux.
La création du Musée fut accueillie par la jeunesse
avec une faveur toute particulière : on compte en effeti
parmi les donateurs, 5 étudiants (1), un élève de Saint-
Cyr (2), un collégien, qui fut dans la suite le colonel
Lichtenstein, attaché à la maison militaire du Président
de la République (3), et enfin un dernier que l'Inventaire
qualifie simplement de mineur (4).Le Musée de Bourges ayant eu la bonne fortune d'être
établi un des premiers dans le Centre, bénéficia de cette
situation pour glaner dans les départements limitrophes,
encore dépourvus d'établissements similaires. C'est
ainsi que vingt-quatre de ses donateurs appartenaient
au département de l'Indre (5) et quinze à la Nièvre (6).
Les nombreuses relations personnelles que M. Mater
(1) Bretheau (Grand registre, p. 269), Doit (Ibid., p. 32), Naudin (Ibid.,
p. 53), Pauron (Petit registre, p. 97), et Rbodier fils (Grand registre, p. 106).
(2) Chauchard (Ibid,, p. 34).
(3) Ibid., p. 34, 141 et 373.
(4) Rouzé (Ibid., p. 51).
(5) MM. Bergeron, Borget père,. Mme Borget, Auguste Borget, colonel Carraud,
M™* Carraud, Ivan Carraud, M™ Courant, Dardeau, Dargier, Dessiaux, Diart, Du-
coudray, Dudanjon, Gigot, Guilham, Lebon, Louis, Louriou, Martinet, Milord,
Pinard, Ponroy et Thabault-Deshoulières.
(6) MM. Bercier, Billebault, Emile Boigues, M" 10Emile Boigues, L. Boigues,
Bonvalet, Bouchot, Buteau, Demonferrand, Flamen d'Assigny, Frossard-Desrivières
fils, Grasset, Malcus, de Mieule, Née de La Rochelle et Piêcourt.
254 LE MUSÉE
avait de longue date dans l'un et l'autre de ces départe-
ments, furent, dans beaucoup de cas, la cause détermi-
nante de ces actes de libéralité. Il en est de même poul-
ies dons faits par M. de Stassard, président de la Chambre
haute des Pays-Bas (1), par un banquier de Naples qui
s'appelait Méricof (2), par le célèbre sculpteur Dantan (3)et principalement par Honoré de Balzac (4), l'auteur de
la célèbre Comédie humaine, qui tous eurent avec
M. Mater des rapports suivis.
Liste des bienfaiteurs particuliers du Musée (5).
Achet, avoué près la Cour royale de Bourges.
Anjorand (d'), propriétaire à Bourges.
Antonin, plâtrier à Bourges.
Archambault, secrétaire de l'Académie à Bourges.Arrault. ancien graveur à Bourges.
Asselin, serrurier à Bourges.
Aubertot, maître de forges à Vierzon.
Àuirère, capitaine au 34e régiment d'infanterie.
Augier (Baron), propriétaire à Bourges.
Aunier, ingénieur en chef à Guéret.
Baillache (de), substitut du procureur général près la Cour
de Bourges.Baille de Beauregard, conseiller à la Cour d'appel de Bourges.
Bailly, marchand chapelier à Bourges.Balzac (de), écrivain à Paris.
Barbarin, docteur-médecin à Bourges.
Barbereau, archiviste du département du Cher, à Bourges.
(1) Grand Registre, p. 190.
(2) lbid., p. 329.
(3) Ibid., p. 283,
(4) Ibid,, p. 377.
(5) On a copié textuellement et sans rien changer, les noms et les indications de
professions, tels qu'ils étaient portés sur les Inventaires : toute rectification à
cette distance eût exposé à des erreurs fâcheuses.
DE BOURGES 255
Barrai (Eugène de), propriétaire à Bourges.
Barrois, chapelain de l'Hôtel-Dieu, à Bourges.
Basset, percepteur à Levet.
Bataille, conseiller de Préfecture du Cher, à Bourges.
Baudouin jeune, à Bourges.Bauneau (Veuve), propriétaire à Bourges.
'• !
Bazenerye, procureur du roi, à Bourges.
Beraud, négociant à Bourges.
Berchon, commissaire-priseur à Bourges.
Berchon, horloger à Saint-Amand.
Bercier, principal du Collège de Varzy (Nièvre).
Bergeron, propriétaire à Issoudun.
Berry, procureur du Roi, à Sancerre.
Bertholet, docteur-médecin à Saint-Amand-Montrond.
Bertin, serrurier à Bourges.
Betoulat, propriétaire au Châtelet.
Billebault, propriétaire à La Charité (Nièvre).
Billette, marchand épicier à Bourges.
Bisson, trotteur à Bourges.
Blanpain, horloger à Bourges.
Boigues (Emile), propriétaire près de Nevers.
Boigues (Madame Emile), près Nevers.
Boigues (L.), à Fourchambault.
Boin, ex-député.
Boin, avocat à Bourges, — substitut à Saint-Amand-Montrond.
Boissy (de), à Castelnau.
Boivin, maître des requêtes à Paris.
Bonnaire, ancien préfet, à Saint-Amand-Montrond.
Bonnault (Camille de), propriétaire à Bourges.
Bonneville, aubergiste, maître de poste.
Bonnin, ecclésiastique à Bourges.
Bonsergent, commissaire-priseur à Bourges.Bonvalet (Alphonse), propriétaire à Nevers.
Borget, maître de forges à Crozon (Indre).
Borget (Madame), femme du précédent.
Borget (Auguste), propriétaire et artiste peintre, à Issoudun.
Bouchet, propriétaire à Dumphlun (Nièvre).
Bouchot, peintre à Paris.
Boudet, chirurgien-dentiste à Bourges.
Bouguet (Mademoiselle), libraire à Bourges.
17
256 LE MUSÉE
Bourdaloue-Martin, à Bourges.
Bout, vitrier, peintre-décorateur à Bourges.Boutroux (Madame Esther), libraire à Bourges.
Braquehaye, capitaine d'état-major, à Bourges.
Bretheau, étudiant en médecine à Bourges.Brisson, avoué au Tribunal civil de Bourges.Brochard, maître couvreur à Bourges.Brunet d'Anvault, conseiller à la Cour d'appel de Bourges.Bry (Jean de), sous-préfet de Saint-Amand.
Bûcheron, née de Lapparent (Madame), propriétaire à Tours.
Buteau, juge de paix à Château-Chinon.
Cadet-Devaux, propriétaire de l'arrondissement de Saint-"
Amand.
Caffln, bijoutier à Bourges.
Canterel, concierge du Musée.
Carelli, peintre de Naples.
Carpentier, propriétaire à Saint-Florent.
Carraud, colonel d'artillerie, à Issoudun.
Carraud, née Tourangin (Madame), propriétaire à Issoudun.
Carraud (Ivan), à Issoudun.
Carré, serrurier à Bourges.
Cassard, avocat à Bourges.
Caubet, arpenteur-géomètre à Bourges.
Cave, directeur des Beaux-Arts, à Paris.
Champeaux (de), avoué près la Cour d'appel de Bourges.
Charmeil, peintre à Bourges, conservateur-adjoint du Musée.
Charmeil fils, propriétaire à Bourges.
Chauchard, élève de Saint-Cyr, à Bourges.
Chazereau, négociant à Bourges.Chazereau et Desbans, négociants à Bourges.
Chedeau, sabotier à Bourges.
Chenon, propriétaire au Châtelet (Cher).Chertier (Alex.), de Paris.
Chérubin, sellier à Bourges.
Chérubin, serrurier à Bourges.Chevalier de Saint-Amand, bibliothécaire à Bourges.
Chouet, capitaine de voltigeurs, à Sancoins.
Chupié, commandant d'Etat-Major, à Bourges.Clairambault (de), vice-consul, — consul à Trébizonde.
DE BOURGES 257
Clamecy (Eugène), conseiller-auditeur à la Cour d'appel de
Bourges.
Clamecy (Victor), avocat.
Clavier (J.-B.), propriétaire à Bourges.
Clément-Grandcourt, propriétaire à Bourges.
Clément-Moyret père, propriétaire à Bourges.'
..V
Clergeau père, ex-employé à l'Etat-Civil.
Cluis, sous-chef aux Beaux-Arts.
Coincy (de), receveur particulier à Saint-Amand.
Colin, rentier et naturaliste à Bourges.
Commacre (de), propriétaire à Bourges.
Corbin (Adrien), conseiller à la Cour d'appel de Bourges.
Cormier, peintre en bâtiments à Bourges.
Cornet, inspecteur des Contributions directes à Bourges.
Courant (Madame veuve), propriétaire à Issoudun.
Cremnitz, chargé du remplacement, à Bourges.
Cuisinier, curé de Genouilly.
Cuny, peintre à Paris.
Dalligny, avoué près la Cour d'appel.
Damours, propriétaire à Bourges.Damours (Madame), veuve de M. Damours, avocat à Bourges.Damours fils, à Bourges.Dantan aîné, sculpteur à Paris.
Dardeau, greffier du Tribunal civil d'Issoudun.
Dargier, pharmacien à Issoudun.
Darondeau, ingénieur de marine.
Delacodre père, propriétaire à Orval.
Delaporte (Marquis), à Bourges.
Delaporte, propriétaire à Graçay.
Delaroche, maire de Vorly.
Delletery (Madame), propriétaire à Bourges.
Delorme, négociant, président du Tribunal de commerce de
Bourges.
Delorme-Sagordet.
Delouche, arpenteur-géomètre à Bourges.
Demnard, entrepreneur à Bourges.
Demonferrand, contrôleur des Contributions à Nevers.
Desbans père, propriétaire à Bourges.
Desbans, marchand épicier à Bourges.
258 LE MUSÉE
Desbrulés, inspecteur des Postes à Bourges.
Descolombiers, propriétaire à Bourges.
Déséglises aîné, négociant à Bourges.
Déséglises (Espérance), propriétaire à Bourges.
Déséglises jeune, propriétaire à Bourges.
Desfossés, pépiniériste à Bourges.
Desfougères, docteur-médecin à Bourges.
Desniault, instituteur à Vierzon.
Ûesrois, entrepreneur.
Dessiaux, professeur à Issoudun.
Dessoies, propriétaire au Châtelet.
Desvoies, aux forges de Vierzon.
Devoitine, coiffeur à Bourges.
Di'àrt, président du Tribunal civil de Châteauroux.
Ditterer (Gustave), négociant à Paris.
Doazan, conservateur des Eaux et Forêts, à Bourges.
Dodu, menuisier à Bourges.
Doit, étudiant en médecine, à Vierzon.
Domont, marchand à Bourges.
Dubois, président de chambre à la Cour royale de Bourges.
Dubrac, conseiller à la Cour royale de Bourges.
Dubuisson, sellier à Bourges.
Duchapt, conseiller à la Cour royale de Bourges.
Ducoudray, instituteur, — propriétaire à Issoudun.
Ducrot, ingénieur ordinaire des Ponts et Chaussées, à Sancerre.
Dudanjon, commissaire-priseur à Issoudun.
Dul'aud, conseiller de Préfecture.
Dulac, lieutenant-colonel de la Garde municipale.Dulac, négociant, — propriétaire à Bourges.
Duliège, président du Tribunal de l'e instance de Saint-Amand.
Dulin, receveur des Contributions indirectes, à Bourges.
Dumont, ancien notaire à Bourges.
Dumoutet, conseiller honoraire à la Cour royale de Bourges.Dumoutet jeune, salpêtrier à Bourges.
Dumoutet, employé à la Mairie de Bourges.
Dumoutet, fils du secrétaire de la Mairie de Bourges.Dumoutet (Jules), sculpteur.
Duplan, avocat à Bourges.
Dupont (Mg1), archevêque de Bourges.
Dupont, marchand de chevaux à Bourges.
DE BOURGES 259
Durand (François), propriétaire à Bourges.
Durand (Gabriel), à Bourges.Duron [de Marcilly], propriétaire à Marcilly.
Dutens, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, à Bourges.
Duvergier de Hauranne (Prosper), député du Cher.
Fabre, propriétaire à Bourges.
Fayet fils, fondeur, rue Mirebeau, à Bourges.Fer (Madame de), propriétaire à Bourges.
Ferragut, huissier à Bourges.
Festeau, employé au secrétariat de la Mairie, à Bourges.
Feuillet, greffier à la Cour roj'ale de Bourges.Flamen d'Assigny, ancien capitaine d'artillerie, à Nevers.
Fleury, huissier à Lury.Foucher (Vicomte de), officier d'Etat-Major à Bourges.
Fournier, avoué à la Cour d'appel,— juge de paix de Bourges.Fravaton, avocat à Bourges.Fravaton (Madame), femme du précédent.Froment, peintre à Paris.
Fronteau-Peyroulx, propriétaire à Bourges.Frossard des Rivières fils, à Cosne (Nièvre).
Fustier, négociant.
Gabard, propriétaire à Bourges.
Gabiot, marchand plâtrier à Bourges.Gabriel, facteur de la Poste.
Gaget, directeur de l'Assurance Mutuelle.
Gariel, négociant à Bourges.Gariel (Madame), marchande à Bourges.Garsault, négociant à Bourges.Gassot, vicomte de Fussy, propriétaire et ancien maire de
Bourges.
Gaudon, maître cordonnier à Bourges.Gaulmier (Madame veuve), propriétaire à Bourges.
Gayette ou Gaieta père, propriétaire à Bourges.
Gayette ou Gaieta fils, plâtrier.
Gaieta, peintre décorateur et plâtrier à Bourges.Geoffrénet de Fontblain, conseiller à la Cour royale de Bourges.Germain aîné, négociant à Bourges.
Gigot, ingénieur des Ponts et Chaussées, à Châteauroux.
260 LE MUSÉE
Gillon (Mademoiselle), rentière à Bourges.Girard (Madame), à Bourges.Girardin (Mademoiselle Julie-Irma), à Bourges.Girardot (Baron de), conseiller de Préfecture, à Bourges.
Gonsollin, avocat à Bourges, — juge.
Goupil, docteur-médecin à Nemours.
Grandfond, meunier à Bourges.
Granger, orfèvre à Bourges.
Grasset, percepteur à La Charité (Nièvre).
Gromet, propriétaire à Paris.
Gueheneuc (Madame de), femme du lieutenant général.Guérin, ingénieur à Bourges.
Guilham, vétérinaire à Issoudun.
Giiillery, rentier à Bourges.
Guillon, capitaine d'artillerie à Bourges.
Haigniéré, propriétaire à Saint-Amand.
Haranguier (d'), ingénieur en chef à Bonrges.
Hazé, conservateur des monuments et peintre, à Bourges.
Hémeré, propriétaire à Bourges.
Henri, propriétaire à Aubigny-sur-Nère.
Jaboin, concierge de la caserne.
Jaboin (Madame veuve), rentière à Bourges.
Jacquet, employé au Chemin de fer d'Orléans.
Jacquet fils, propriétaire à Bourges.
Jacquet fils, marchand tanneur à Bourges.Jaubert (Comte), député du Cher, ministre des Travaux
publics.Jaubert (Comtesse), à Givry (Cher).Jaubert (Mademoiselle Claire), à Paris.
Jeannet, ancien manufacturier à Vierzon.
Jollet (A.), imprimeur à Bourges.
Joly, chirurgien-major au la d'artillerie.
Josset, maire de Charenton (Cher).
Joubert, marchand boucher à Bourges.
Juillien, architecte de la ville de Bourges.
Jumigny (de), docteur-médecin à Bourges.
Labbé, propriétaire à Bourges.
DE BOURGES 261
Labonne, employé à la Mairie de Bourges.Labrosse, marchand chapelier à Bourges.Lacoste, opticien à Bourges.
Lagoutte, aubergiste à Bourges.
Lamy, chef d'escadron d'artillerie à Bourges.Landresse (de), sous-bibliothécaire à l'Institut.
Langlois, horloger à Bourges.
Lantony (de), colonel retraité à Bourges.
Lapparent (Comte de), préfet du Cher.
Lapparent (Comtesse de), femme du précédent.La Rochefoucauld-Liancourt (Gaétan, marquis de), député.
du Cher.
Laugardière (de), propriétaire à Bourges.Laval, capitaine retraité à Bourges.Lebas, docteur-médecin à Bourges.
Lebas, architecte â Bourges.Lebon, juge de paix à Issoudun.
Legoube, conseiller à la Cour royale de Bourges.
Legoube (Madame), veuve du précédent.Lemaître, propriétaire à Vierzon.
Lemoine, ancien orfèvre à Bonrges.Lemoine (Veuve), à Bourges.Lemoine, capitaine du génie à Bourges.Lemonnier aîné, propriétaire à Bourges.
Lemonier, tapissier à Bourges.Leredde, curé de Saint-Bonnet, à Bourges.Lescalier (Madame), marchande à Bourges.
Lescornel, tourneur à Bourges.Lichtenstein (de), élève au Collège royal de Bourges.
Loiseau, concierge de la Maison de Ville, à Bourges.Loiseau, pharmacien à Dun-le-Roy.
Loiseau, horloger à Bourges.
Louapt, capitaine de la garde municipale.Louis, négociant et propriétaire, à Issoudun.
Louriou, avocat à Issoudun.
Lubin, propriétaire à Bourges.
Luquet, marchand charcutier à Bourges.Lutho (de), 1er vicaire général, à Bourges.Luzarche, greffier du Tribunal de commerce.Luzarche (Auguste) fils, avocat à Bourges.
262 LE MUSÉE
Magdelaine, commissaire de police de Bourges.
Maignan, professeur de mathématiques, à Bourges.Malcus, percepteur à Lurcy (Nièvre).Manceron, imprimeur à Bourges.
Manceron, notaire à Vierzon.
Marandon, curé de Saint-Pierre, à Bourges.Maricot, négociant à Paris.
Marnier, colonel d'Etat-Major, à Paris.
Martial, greffier du Tribunal civil, à Bourges.Martin, maître menuisier à Bourges.
Martin, pharmacien à Paris.
Martinet, juge à Châteauroux.
Massé (Adolphe), avocat à Bourges.
Massé, aA'oué à Bourges.
Massicot, marchand coutellier à Bourges.
Massicot, de Paris.
Mater (Alphonse), procureur du Roi, à Cosne.
Maugues (Madame), marchande épicière à Bourges.
Mayet, huissier à Bourges.Mealin, propriétaire à Bourges.
Mechin, juge de paix de Sancoins.
Mège, capitaine retraité à Bourges.
Ménagé, secrétaire de la Mairie de Bourges.
Meneau, greffier de la Cour d'appel de Bourges.Mericoff (Auguste), banquier à Naples.Mérimée, inspecteur des Monuments historiques, à Paris.
Meunier, coiffeur à Bourges.Mieule (de), receveur général à Nevers.
Milhiet, propriétaire à Menetou-Salon.
Millet, marchand papetier et cartier, à Bourges.
Milord, huissier à Châteauroux.
Moitoret, employé.Montbrun (Debayssins de), receveur général du Cher.
Moreau, receveur de l'Enregistrement à Sancergues.
Moreau, vitrier et peintre à Bourges.
Moreau, bourrelier à Bourges.
Morin, serrurier à Bourges.
Morin, maître cordonnier à Bourges.Mornet (Mademoiselle Ermance), propriétaire à Bourges.
Moussoir, greffier de la Justice de Paix de Bourges.
DE BOURGES 263
Moyreau, ex-pharmacien à Bourges.
Narp (de), docteur-médecin à Bourges.
Naudin, étudiant à Bourges.Née de la Rochelle, ancien juge de paix de La Charité.
Nicolaï (de), propriétaire à Blet. .;.Normand, conservateur des Hypothèques de Saint-Amand.
Nouai! de la Villegille, à Paris.
Parent, secrétaire du Procureur général, à Bourges.Parnajon (Madame), entrepreneur de bâtiments, à Bourges.
Parnajon fils, entrepreneur de bâtiments, à Bourges.
Pascal, graveur à Paris.
Pascaud (Madame Charles), femme du Substitut.
Patureau (Madame veuve), propriétaire à Bourges.Pauron, étudiant.
Pelle, notaire à Bourges.
Pelle, percepteur à Sancergues.Pelletier, ex-député à la Convention.
Pelletier, ancien avocat à Bourges.Peneau (René), pharmacien à Bourges.Peneau (Madame R.), femme du précédent.
Perdrisat, marchand de fer à Bourges.Perrot-Galbois, propriétaire à Bourges.
Petitot, grammairien à Bourges.
Picard, ex-notaire, — propriétaire à Levet.
Piecourt, propriétaire à Nevers.
Pierquin de Gembloux, inspecteur d'Académie, à Bourges.
Pillivuyt père, directeur de la Manufacture de Foëcy.
Pinard, propriétaire à Vatan (Indre).
Pinault, propriétaire à Bourges.
Piozet-Lavalette, ancien notaire à Menetou-Salon.
Planchât, avoué à Bourges.Planchât (Madame), femme du précédent.Pointeau, maître sabotier à Aubigny.
Poisle-Desgranges, avoué près la Cour d'appel de Bourges.
Ponroy, ex-avoué et avocat, à Issoudun.
Popineau, serrurier à Bourges.
Popineau (Madame), femme du précédent.
Porcheron, notaire à Bourges.
264 LE MUSÉE
Poupat père, limonadier à Bourges.
Poupat père, coiffeur à Bourges.
Poupat, employé à la Mairie de Bourges.
Poupat (Mademoiselle Jenny), à Bourges.
Puget, employé à l'Administration des Domaines, à Bourges.
Rapin, conseiller à la Cour royale de Bourges.
Rapin (Madame), femme du précédent.
Raynal père, recteur de l'Académie de Bourges.
Raynal (Louis), substitut du Procureur général, puis avocat
général, à Bourges.
Raynal (Paul), sous-intendant militaire, à Paris.
Renauldon, préfet du Cher.
Renault (Madame Nicolas), propriétaire à Bourges.
Renault, négociant à Bourges.
Rey, architecte-voyer de l'arrondissement de Bourges.
Rey, directeur de l'Ecole Mutuelle à Bourges.
Rhodier, docteur-médecin à Mehun-sur-Yèvre.
Rhodier (Paul), fils du précédent, étudiant à Bourges, puis
greffier du Tribunal.
Riffault, juge de paix de Dun-le-Roy.
Riftault, juge de paix de Vierzon.
Robert, capitaine retraité à Bourges.
Robert, propriétaire à Vierzon.
Robert (Messieurs), héritiers de Madame Vallée.
Robert fils, employé des Postes à Bourges.
Robert-Chennevières, substitut.
Robertet, maire de Saint-Amand-Montrond.
Robin, maire de Saint-Amand-Montrond.
Rogeard, propriétaire à la Rongère, maire de Saint-Eloy.
Roger, propriétaire à Bourges.
Rossi, ingénieur à Bourges.
Rossi, femme du précédent.
Rossy, architecte à Bourges.
Rotili, marchand de musique à Bourges.
Rouen, ex-chef de bureau à la Préfecture du Cher.
Roulhac (Madame), femme du conseiller à la Cour royale de
Bourges.
Roux, voyageur de commerce à Bourges.
Roux, serrurier à Bourges.
DE BOURGES 265
Rouzé, propriétaire.Rouzé fils, enfant mineur à Bourges.
Rouzier, taillandier à Bourges.Rouzière (Madame veuve de la), à Bourges.
Rozé-Robin, marchand à Bourges.
Sagordet, propriétaire à Bourges.
Saint-Clivier, docteur-médecin, à Bourges.Saint-Thorent (de), juge de paix de Lury.Salle, propriétaire à Saint-Florent.
Sallonnier, juge suppléant à Bourges.
Sanc, limonadier à Bourges.
Saul, inspecteur de la Navigation.Scevole de Barrai, fils puîné, à Bourges.
Schirdewan, maître de musique, à Bourges.Schuiller, maître ébéniste à Bourges.
Senez, ancien cartier à Bourges.
Sifflet, agent de police à Bourges.
Simonet, serrurier à Bourges.
Sorbier, receveur des Contributions indirectes aux Aix-
d'Angillon.Soumard de Villeneuve, propriétaire à Villeneuve-sur-Cher.
Stassard (de), président de la Chambre Haute Royale des
Pays-Bas.
Talbot, propriétaire à Parassy.
Talbotier, juge de paix de Saint-Amand-Montrond.
Tassain, conseiller à la Cour d'appel de Bourges.
Tastayre, aubergiste à Bourges.
Terrasse, étudiant, propriétaire à la Brosse, près Château-
neuf-sur-Cher.
Texier, commissaire du Roi près la Commission des Beaux-
Arts.
Texier, orientaliste à Paris.
Thabault-Deshoulières, substitut à Issoudun.
Tixier de Ligny (Madame), veuve du conseiller à la Cour de
Bourges.
Torchon, pharmacien à Paris.
Tourangin (Auguste), propriétaire à Bourges.
Tourangin (Félix), ancien négociant à Bourges.
266 LE MUSÉE
Tourangin (Gustave), à Bourges.
Tourangin (Victor), préfet du Doubs.
Turquet, conseiller à la Cour de Bourges.
Turquet, receveur des Hospices à Bourges.Tussac (de), commandant d'Etat-Major.
Vacher fils, négociant à Paris.
Vallières (Mesdemoiselles de), propriétaires à Bourges.Valmore (Madame de), poète à Paris.
Varineau (Veuve), propriétaire à Bourges.
Vauquelin, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, à Bourges.
Vauquelin (Madame), femme du précédent.
Vauquelin (Mademoiselle), fille du précédent.Vautier, pâtissier à Bourges.
Vergne, notaire à Bourges.
Vermeil, libraire à Bourges.
Viguier, armurier à Bourges.Villeneuve (Mademoiselle de), propriétaire à Bourges.
Vilnat, propriétaire à Bourges, ancien plâtrier.
Vizentini, artiste de l'Opéra-Comique à Paris.
Vogué (Marquis de), propriétaire à Bourges.
Yel, directeur des Contributions à Bourges.YsabeaU père, propriétaire à Bourges.Ysabeau père, ex-employé à la Préfecture.
Ysabeau, médecin à Bourges.
Ysabeau, sculpteur à Paris.
Zévort, huissier à la Cour royale de Bourges.
§ 2. — Ressources financières du Musée. — Questionsrelatives à son installation.
Le Musée ne pouvait fonctionner sans ressources suffi-
santes pour subvenir à ses besoins et sans local appro-
prié pour loger ses collections : questions budgétaires et
questions d'installation toujours difficiles, qui se pré-
sentèrent à Bourges dans des conditions qui en rendirent
la solution particulièrement ardue, à cause de la situa-
DE BOURGES 267
tion incertaine de l'établissement artistique dont on
poursuivait la création.
Le Règlement constitutif du Musée, indépendammentdes souscriptions que le public était invité à verser (1),avait établi que chaque membre de la Société d'anti-
quités devrait, lors de son admission, payer une cotisa-
tion de dix francs, cotisation susceptible d'être réclamée
de nouveau les années suivantes, si la Société en déci-
dait ainsi (2). Enfin des demandes motivées d'allocation
devaient être adressées chaque année au Gouvernement,
au Conseil général ou au Conseil municipal, suivant les
besoins (3).Le Règlement du Musée ayant été, comme on l'a vu,
soumis et approuvé par le Préfet, c'était de la part de ce
magistrat une sorte d'engagement de lui faire voter une
subvention par le Département : une demande d'une
somme de 1,200 francs fut en conséquence présentée au
Conseil général, mais celui-ci la rejeta, échec personnelassez grave pour le comte de Lapparent, qui avait prisl'initiative de l'institution de la Société d'antiquités.
Un journal du temps, La Gazette du Berry, organe de
l'opposition légitimiste, disait à ce propos : « Le Conseil
» Général du Cher vient de refuser l'allocation de 1,200» francs que lui demandait M. le Préfet pour l'établisse-
» ment d'un Musée d'antiquités à Bourges. Ainsi l'arrêté
» pris par ce magistrat et la nomination des membres
» se trouvent tout naturellement révoqués. On ne con-
» çoit pas qu'un administrateur puisse prendre un ar-
» rêté, nommer une commission, avant d'avoir obtenu
» l'agrément du Conseil général qui, seul, dispose des
(1) Art. 14.
(2) Art. 17.
(3) Art. 18.
268 LE MUSÉE
» deniers départementaux (1) ». Par contre, dès 1836, le
Conseil municipal inscrivit au budget communal de la
ville de Bourges, une somme de 400 francs à titre de
secours pour le Musée départemental (2).La Société du Musée avait trop à coeur de doter
Bourges de collections historiques et artistiques dignesde son passé, pour considérer comme définitif le vote
du Conseil général et surtout pour accepter les conclu-
sions que l'on avait cru pouvoir en tirer. Elle continua
donc ses démarches pour s'assurer un accueil plus favo-
rable, mais en attendant elle fut obligée de recourir à la
faculté qu'elle s'était réservée dans l'article 18 du Règle-ment et de rendre annuelle la cotisation d'admission
qui avait été prévue (3).Il semble que la résistance de l'Assemblée départe-
mentale ait fait place, dès l'année suivante, à de meil-
leures dispositions, car une allocation de 1,000 francs
fut accordée au Musée, puis continuée dans les budgets
postérieurs. En résumé, pendant cette première période,les ressources financières du Musée se composèrent du
montant des cotisations, de l'allocation du Département,s'élevant à 1,000 francs, et de celle de la Ville qui était de
400 francs, sauf pour l'exercice 1838 où elle fut portée à
1,000 francs, sommes auxquelles s'ajouta à partir de 1838
un secours de l'Etat de 1,000 francs, que le Comte de
Montalivet accorda sur la demande de M. Mater (4).Ce secours fut continué au Musée pendant assez long-
(1) N° du 19 juillet 1834.
(2) Procès-verbaux des délibérations du Conseil municipal de Bourges,
tom. XV, budget de l'année 1836, art. 122.
(3) Ibid. : XVII, séance du 27 janvier 1838.
(4) Journal du Cher du 15 septembre 1836 et Omette du Bemj du 19 sep-
tembre de la même année.
DE BOURGES 269
temps et il en bénéficiait encore en 1849 (1). L'insuffisance
du local où les collections étaient installées, allait d'ail-
leurs être bientôt une cause d'augmentation de dépense.On se souvient que l'arrêté constitutif du Musée avait
décidé que le dépôt provisoire des objets qu'il recevrait,
serait établi dans l'ancien Hôtel Jacques-Coeur, où se trou-
vaient déjà la Mairie, la Cour d'appel avec tous les Tri-
bunaux, et qui allait ainsi contenir en plus le Cabinet
d'antiquités, d'histoire naturelle et des arts. Le Maire mit
en effet à la disposition de la Société d'antiquités une
salle de l'Hôtel Jacques-Coeur, devenue promptementinsuffisante et dont les dimensions restreintes empê-chaient d'ailleurs de recevoir des objets d'une certaine
grandeur. On était obligé de les placer dans les dépen-dances de la Cour d'appel, situation dont il n'est pasbesoin de faire ressortir les sérieux inconvénients.
La nécessité d'un local assez vaste pour contenir les
collections et approprié à sa destination, était apparuedès la première heure. M. de Lapparent, dans son dis-
cours d'installation de la Société d'antiquités, en avait
signalé le besoin en ces termes : « Aussitôt que le Musée
» aurait pris une certaine extension, il vous serait facile,
» je pense, d'obtenir que la Ville ou le Département fis-
» sent les frais nécessaires pour la construction ou l'ap-» propriation d'un nouveau local, où seraient conservés
» avec plus de soin les objets d'art, d'antiquités et d'his-
» toire naturelle, qui auraient pu être réunis par vous
» dans le local provisoire (2) ». On sait que le Musée a
dû attendre jusqu'en 1891, l'installation définitive dont
la réalisation paraissait si facile à M. de Lapparent.
(-1) La République de 1SAS, du 23 septembre 1849.
.(2) Discours prononcé par M. le Préfet du Cher à la séance d'installation
duS2 août 1834, p. 5.—Jollet-Souchois et Cie, impr. de la Société. Février, 1835,
in-8 de 10 p.
270 LE MUSÉE
Ce n'est pas qu'il y ait eu mauvais vouloir de la partde l'administration municipale en particulier, bien qu'ilse soit agi en réalité d'un établissement départemental,mais la complexité des problèmes à résoudre, le man-
que de ressources, paralysaient forcément ses bonnes
dispositions. Dès 1836, elle dénonçait la location faite à
la Cour et aux Tribunaux d'une partie de l'Hôtel Jac-
ques-Coeur, dont elle voulait recouvrer l'entière disposi-tion pour y placer la Bibliothèque et le Musée. (Délibé-ration du 3 décembre 1836) (1).
Aux observations présentées par le Préfet pour criti-
quer, au point de vue financier, le projet de la Ville et
conseiller la construction pour la Bibliothèque et le
Musée d'un édifice neuf, qui laisserait les Tribunaux
à Jacques-Coeur, le Conseil municipal répondit assez
justement que la construction proposée coûterait 140,000
francs, tandis que les dépenses d'appropriation de Jac-
ques-Coeur, pour l'objet indiqué,- n'excéderaient pas
15,000 francs, et il déclarait en conséquence persisterdans son vote antérieur. (Délibération du 15 juillet
1837) (2).Les négociations continuèrent lentement, sans faire
de progrès décisifs. On trouve encore en 1842, de la
part de l'Assemblée communale, une nouvelle confir-
mation de ses délibérations antérieures, pour arriver à
reprendre possession de Jacques-Coeur et à y installer
le Musée.
Il y a toutefois dans les projets de la Ville relativement
au Musée un changement important à partir de 1842 :
ce n'est plus à Jacques-Coeur qu'on veut le mettre, mais
dans l'Hôtel de Limoges, aujourd'hui détruit, qui en
(1) Procès-verbaux... XVI, n° 200.
(2) lbid. : XVII, n°* 11 et 12.
DE BOURGES 271
était contigu et le joutait du côté du midi. Dans les
délibérations municipales prises à cette occasion, on
relève une nouvelle critique des conditions défectueuses
de l'installation du Musée, « placé, est-il dit, dans des
salles basses et dont l'exiguïté ne permet pas d'exposer
les objets qui s'y trouvent déposés... » et on remarquait
que « la Ville payait tous les ans 600 francs pour la
location du Musée départemental ». (Délibération du
28 mai 1842) (1). Ces derniers mots se référaient à une
situation nouvelle que l'on va faire connaître.
Par suite du rapide accroissement des collections,
l'insuffisance de la salle de l'Hôtel Jacques-Coeur mise
à la disposition de la Société d'antiquités par la Muni-
cipalité, était devenue telle, qu'il avait été impossibled'attendre la réalisation du projet d'installation du Mu-
sée dont la Ville s'occupait. II avait donc fallu s'enquérird'un autre local, sans s'arrêter" à la possibilité du
retrait des objets donnés, que leur transfert dans un
lieu autre que celui primitivement choisi, pouvait faire
courir aux collections. Du reste, il faut ajouter de suite
que les craintes que l'on pouvait concevoir à ce sujet, ne
se réalisèrent pas et qu'aucun donateur n'usa des droits
qu'il tenait de l'article 12 du règlement.M. Juillien, architecte de la ville de Bourges et mem-
bre résidant de la Société d'antiquités, fut chargé de re-
chercher et d'examiner les locaux susceptibles de rece-
voir le Musée. Son rapport, qui porte la date du 18 dé-
cembre 1837 (2), constate qu'il eut à s'occuper surtout
des combles de l'Hôtel Jacques-Coeur et du premier
étage d'une maison appartenant à M. Pelletier, au-dessus
d'un ancien jeu de Paume, situé rue Jacques-Coeur,
(1) Procès-Verbaux... XVIII, n" 29.
(2; Mes Archives.
18
272 LE MUSÉE
en face du Théâtre. Le premier local n'aurait pas coûtéde loyer, mais outre l'inconvénient d'avoir à monter
81 marches pour y accéder, il exigeait, pour l'ouverture
de jours dans la toiture et l'établissement de plafonds,de parquets, de cloisons, etc., une dépense évaluée à
environ 7 ou 8.000. francs ; le second nécessitait peu de
travaux que, d'ailleurs, le propriétaire consentirait sans
doute à faire faire en partie lui-même, mais il compor-tait un prix de location à débattre : c'est ce dernier queM. Juillien recommanda à la Société et qui fut défini-
tivement choisi.
Comme Vice-Président, M. Mater passa avec M. Pelle-
tier, le 23 décembre 1837, un bail de six années, com-
mençant à courir du 24 juin 1838, moyennant un loyerannuel de 600 francs, pour le paiement duquel il adressa
au Maire de Bourges une demande de secours qui fut
favorablement accueillie. Le Conseil municipal décida,
en effet, que la Ville prendrait à sa charge le loyer du
Musée. (Délibération du 27 janvier 1830.) (1).En 1842(2), le Musée ayant eu à subir une augmenta-
tion du loyer qui lut porté à quinze cents francs, un nou-
vel appel à la Ville et au Département devint nécessaire,
mais cette fois l'administration municipale répondit parun refus motivé sur ce qu'il s'agissait d'un établissement
départemental, et que cette charge regardait avant tout
le Département (3). Les administrateurs de ce dernier le
comprirent et votèrent une augmentation de crédit de
500 francs, qui porta la subvention annuelle du Musée
(1) Procès-verbaux... XVII, n° 35,et lettre du Maire de Bourges à M. le Vice-
Président de la Société d'antiquités et de statistique, datée du 29 janvier 1838.
(Mes archives.)
(2) Bail du 10 septembre 1848.
(3) lbid... XVIII, budget de 1843, art. 85.
DE BOURGES 273
à 1.500 francs (1). Peut-être la rivalité politique quiexistait pour le siège de Bourges intra muros à la Cham-
bre des Députés, entre M. Mayet-Genetry, maire de
Bourges, et M. Mater, n'était-elle pas étrangère au mau-
vais accueil qui avait été fait à la demande de ce der-
nier, en qualité de Conservateur du Musée, pour obtenir
l'augmentation du chiffre de l'allocation que la Ville
accordait à cet établissement ?
En 1845, on vit apparaître un nouveau projet d'instal-
lation du Musée. Après avoir voté la démolition de l'an-
cienne église des Carmes, démolition qui ne fut pasexécutée à cette époque par la seule raison que les
adjudications tentées pour y parvenir n'aboutirent
pas (2), on se décida à la faire réparer pour l'affecter à
divers services publics. Dans le rapport présenté parM. Raynal, le futur historien du Berry, on relève le pas-
sage suivant : « Que d'un autre côté, il existe un Musée
)) qui s'enrichit chaque jour, qui, dès à présent, remplit» plusieurs salles et dont les collections d'histoire na-
» turelle, de médailles et d'objets d'art de toute espèce,» attirent de plus en plus l'intérêt des habitants et des
» étrangers ; — que ce Musée est placé dans une maison
» particulière dont la Ville paie le loyer et dont on sera
» forcé de sortir prochainement, le propriétaire ne vou-
» lant pas renouveler le bail ; —que l'ancienne église
» des Carmes présente assez d'étendue pour que l'on
» puisse y placer tout à la fois le Musée et la Biblio-
» thèque... »
Le Conseil municipal décida de consacrer 31.000 francs
aux réparations qui étaient nécessaires, mais en même
(1) Procès-verbaux des délibérations du Conseil général du Cher, année
1842, art. 15, p. 20.
(2) Journal du Cher des H et 21 mai 1844,
274 LE MUSÉE
temps il invita le Maire à faire étudier les moyens d'ap-proprier cet ancien édifice, d'y créer de vastes salles
susceptibles de recevoir le Musée et les établissements
publics qui pourraient y être réunis. (Délibération du1er août 1845. (1).
L'affaire revint l'année suivante devant l'Assemblée
communale. D'après le nouveau projet on proposait de
placer dans l'église des Carmes les Archives et le Mu-
sée, tous les deux établissements départementaux. Pour
ce faire, on construisait un premier étage, qui devait
être affecté en entier aux collections du Musée ; le
rez-de-chaussée était consacré aux Archives, sauf deux
travées réservées aux objets lourds du Musée, comme
les sculptures et les marbres.
Les travaux nécessités par la transformation de l'an-
cienne église étaient évalués à la somme de 70.000 fr.,
qui devaient rester à la charge exclusive du Déparle-
ment, ainsi que les grosses réparations d'entretien, quel'on estimait à 1.000 francs par an ; la part contributive
de la Ville se bornait donc à l'apport de l'immeuble,dont on fixait la valeur à 30.000 francs. Cette combinai-
son paraissait équitable, puisque les deux établisse-
ments, aux besoins desquels il s'agissait de pourvoir,étaient deux établissements départementaux et que la
construction d'un bâtiment neuf pour les recevoir serait
montée à un chiffre bien supérieur. (Délibération du
23 décembre 1846. (2). Quoi qu'il en soit, et comme il
arrive souvent, malgré les avantages incontestables de
la combinaison proposée, le Conseil général, désireux
d'obtenir mieux encore, refusa ce qui lui était offert.
La question de l'installation du Musée devenait cepen-
(1) Procès-verbaux... XVIII. n" 225.
(2) Procès-verbaux,.. XIX, n° 34.
DE BOURGES 275
dant de plus en plus pressante, le propriétaire du local
où les collections étaient placées, avait, dès 1844, fait
connaître qu'il n'entendait pas continuer la location, la-
quelle devrait en conséquence prendre fin au 24 juin 1848.
Le Conseil général, auquel le Conservateur du Musée
avait immédiatement fait connaître cette décision, s'était
borné à prononcer l'ajournement de la question (1).A la session de 1846, M. Mater rappela de nouveau au
Préfet que l'expiration du bail consenti au Musée s'ap-
prochait et qu'il faudrait déménager en 1848. Il faisait
remarquer que la nécessité de s'occuper de la question
était d'autant plus grande, que les collections n'étaient
pas seulement exposées à rester sans abri, mais que la
dissolution complète du Musée pouvait en être la con-
séquence, par application du malencontreux article 12
du Règlement, accordant, dans ce cas, aux donateurs le
droit de reprendre leurs libéralités.
Une discussion intéressante, que l'on trouvera plus
loin, reproduite eu entier, s'ouvrit alors ; on pourra sai-
sir sur le vif les hésitations et les préoccupations qui
empêchaient dans le sein de l'Assemblée départemen-tale les meilleures intentions d'aboutir. Voici le procès-verbal officiel de cette discussion :
« Le Rapporteur fait part au Conseil d'une communi-
» cation du Conservateur du Musée au Préfet : le local
» est affermé pour le 24 juin 1848 à un nouveau loca-
» taire ; il faut donc se pourvoir d'un nouveau local,» sinon prévoir l'application de l'article 12 des Statuts
» de la Société constitutive de cet établissement, ce qui» serait la dislocation des collections et l'anéantisse-
» ment d'un Musée déjà important.» La Commission propose d'ajourner et d'émettre le
(1) Procès-verbaux... Conseil général du Cher, session 1844, p. 51.
276 LE MUSÉE
» voeu que la Ville de Bourges s'occupe activement de» rechercher un local convenable pour une institution» que l'on verrait disparaître avec le plus grand regret.
» Un membre (1) observe que le Musée étant départe-» mental et non municipal, ce serait donc à lui à s'oc-
» cuper d'un emplacement. A la Ville cependant, à
» cause de l'intérêt que la Ville a à sa conservation, on
» s'est occupé avec le Conservateur de la question. Plu-
» sieurs projets ont été mis en avant, mais la Commis-
» sion nommée à cet effet n'a pu encore se réunir ; on
» va presser ses travaux.
» Un membre fait remarquer qu'il y a péril en la
» demeure; que le 24 juin 1848 il faudra évacuer le
» local actuel, et il propose d'inviter le Préfet: à s'en-
» tendre avec le Maire pour résoudre cette question.» Un membre dit qu'il a vu avec regret le déparie-
» ment fournir une subvention. Le Musée est une charge» inutile quand on ne peut subvenir aux besoins les
» plus urgents. Il repousse toute participation du dépar-» tement à l'installation du Musée et il est d'avis qu'on» laisse la Ville et les propriétaires du Musée s'arranger» entre eux.
» Un membre fait son meà cnlpà d'avoir au début voté
» le rejet des subventions du Musée, attache aujourd'hui» le plus grand intérêt à la conservation du Musée. Il
» demande qu'il soit déclaré départemental et que» chaque canton contribue à sa conservation. Il y a
» urgence, il faut nommer de suite une Commission.
» Un membre prétend que, d'après les Statuts de la
» Société, le Musée n'est pas départemental, qu'il n'est
» même pas fondé. Il n'en juge pas la nécessité et l'uti-
» lité dans une ville comme Bourges.
(1) Ne serait-ce pas M. Mayet-Génetry, maire de Bourges et conseiller général
du canton ?
DE BOURGES 277
» Un membre dit que l'on ne peut comparer le Musée
» de Bourges à ceux de Paris, qu'il a un caractère' local
» et à ce titre présente un grand intérêt.
» Un membre recommande très vivement l'installa -
» tion du Musée à l'Hôtel Lallemand, à cause de son
» caractère artistique qui cadrerait beaucoup avec les
» collections artistiques à loger, mais c'est une question» qui concerne surtout la Ville.
» Un membre regrette que l'on n'ait pas annexé au
» Musée un jardin botanique.» Une Commission chargée d'un prompt rapport est
» nommée et composée de MM. Bouzique, Duvergier de
» Hauranne, Maj'et-Génetry, Michel et de Vogué (1). »
Le rapport de cette Commission, présenté dans la
même session, se borna relativement à la continuation
du Musée, à affirmer que le Conseil général la voulait
presque à l'unanimité. Quant à la question d'emplace-
ment, le rapporteur examinait successivement les quatresolutions suivantes : construire un Musée neuf; — rat-
tacher la question à celle de la Bibliothèque et s'en-
tendre avec la Ville, lorsque celle-ci bâtirait un édifice
nouveau pour y placer sa Bibliothèque; — placer le
Musée dans l'Hôtel Jacques-Coeur, quand le Palais de
Justice projeté aurait été élevé; — enfin l'installer dans
l'Hôtel Lallemand. La Commission se ralliait à celte
dernière solution et invitait le Préfet à s'entendre avec
le Maire et le Conservateur du Musée pour lui présenterun projet définitif l'année suivante.
En voyant ajourner encore la question de l'installa-
tion du Musée et même rester sans solution ses dé-
marches pour qu'il fût reconnu officiellement comme
établissement départemental, M. Mater se sentit pris
(1) Procès-verbaux... du Conseil général du Cher, session 1846, p. 18 et s.
278 LE MUSÉE
d'un véritable découragement ; pour la première fois,il désespéra du succès de son oeuvre et il crut qu'il ne
parviendrait même pas à faire face à l'augmentation du
chiffre du loyer.Cet état d'esprit se manifestait dans une lettre
qu'il écrivait le 15 octobre 1846 au Maire de Bourges (1).« Si le Conseil Général, d'accord avec la Ville, ne prend» pas un parti définitif à sa première décision, je regarde» comme fort inutile de prolonger encore l'état provi-» soire du Musée ; en me conformant au Règlement,» j'exercerai les droits qui m'y sont réservés. » Fort heu-
reusement, ce mouvement de mécontentement ne fut
pas de longue durée, et le Conseil général et le Conseil
municipal ayant voté l'augmentation de crédit que né-
cessitait l'accroissement des dépenses, M. Mater n'eut
pas la profonde douleur d'être obligé de détruire lui-
même l'édifice qu'il avait eu tant de peine à élever.
L'urgence était du reste moins grande, car on venait
d'obtenir de M. Roger, architecte, devenu propriétairedu local de l'ancieti Jeu de Paume, une prorogation de
bail. Le prix du loyer subissait une augmentation de
500 francs par an et était ainsi porté à 2.000 francs, dont
le Département et la Ville se partagèrent la charge, ce
qui portait la subvention départementale au chiffre
annuel de 1.750 francs et celle de la Ville à 1.250 (2).Le Conseil municipal de Bourges, en acceptant celte
nouvelle dépense dans le budget de 1848, déclarait
n'avoir jamais pris d'engagement pour le paiement des
loyers du Musée, et qu'il consentait à y contribuer uni-
quement à cause de l'intérêt qui s'attachait à un sem-
blable établissement. II refusait d'ailleurs de participer
(1) Mes Archives.
(2) Procès-verbaux... du Conseil général, session 1846, p. 47.
DE BOURGES 279
aux dépenses que sa constitution et son installation dé-
finitives pourraient occasionner et qui ne sauraient à
aucun titre le concerner.
Les choses restèrent longtemps en cet état, sans aucun
changement, tant au point de vue du local occupé quedu prix du loyer, sans que l'on ait paru s'occuper de la
solution d'une question dont on proclamait l'urgence
pressante dès 1846, et successivement disparut la possi-bilité de réaliser plusieurs des installations projetées.C'est ainsi qu'en 1849 on concéda pour quatre années à
l'artillerie, pour y faire un dépôt de matériel, l'église des
Carmes. On limitait bien, comme il vient d'être indiqué,la durée de celle concession à cause du projet d'y placerle Musée et la Bibliothèque (1), mais on sait que l'Admi-
nistration de la guerre prolongea son occupation pen-dant de longues années, et que cet ancien édifice reli-
gieux ne redevint libre que pour tomber sous la piochedes démolisseurs, malgré les parties intéressantes qui le
recommandaient au point de vue artistique.En 1850, on recommanda, comme emplacement sus-
ceptible de recevoir la Bibliothèque et le Musée, l'an-
cienne égliseNolre-Dame-de-Salles, occupée aujourd'hui
par la Manutention militaire, solution qui ne semble pasavoir été favorablement accueillie par l'opinion pu-
blique (2).En 1856, la Ville vendit à l'État l'Hôtel Jacques-Coeur
pour y installer les différents services judiciaires, ce qui
l'obligea à envisager la nécessité de construire un Hôtel
de Ville comprenant une Mairie, une Bibliothèque et un
Musée. En effet, sans d'ailleurs qu'il y ait eu, ni dans l'acte
de vente, ni dans laloi qui l'autorisait, aucune obligation,
(1) Délibération du 30 août 1849. — Procès-verbaux... XIX, n» 228.
(2) Journal du Cher des 8 et 15 juin 1850.
280 LE MUSÉE
comme on l'a dit quelquefois, imposant à la Ville la
charge de pourvoir à l'installation du Musée, à partir de
ce moment la Ville se considéra comme tenue à cet
égard ; par suite il l'entrera, dans le sujet traité ici, de
mentionner les projets qui furent successivement pré-sentés jusqu'en 1862.
En 1859, après avoir voté le principe de la construc-
tion d'un Hôtel de Ville, le Conseil municipal eut à se
prononcer sur le choix d'un emplacement. Étaient pro-
posés : l'emplacement de la place de l'Arsenal (laSalpê-trière (1) et la maison Luzarche) (2),— celui des Hôtels
Aubertot (3) et de la Porte (4), —l'Hôtel Cujas avec les
maisons voisines sur la rue des Arènes et la rue Saint-
Médard, — sur la place Saint-Pierre (5), les maisons de
Quincerot (6) et Brunet (7), — les Carmes, comprenantl'ancienne église, le.coiwent et plusieurs maisons de la
rue de Paradis, — un emplacement en face Jacques-Coeur (8),— enfin l'ancien Oratoire, dans la rue des Armu-
riers (9). (Délibération du 7 décembre 1859.) (10). Aprèsmûr examen, l'emplacement de la place de l'Arsenal fui
adopté (Délibération du 15 décembre 1859) (11), mais à
peine cette décision était-elle isrise, que l'on s'effraya de
l'importance de la dépense à faire, tant à cause de la
(1 ) Aujourd'hui le n» 4 de la place de l'Arsenal.
(2) Aujourd'hui le n" 2 de la place de l'Arsenal.
(3) Aujourd'hui la Bibliothèque de la Ville.
(4) Aujourd'hui la Mairie.
(5) Aujourd'hui place George Sand.
(6) Aujourd'hui le n° 5 de la place George Sand.
(7) Aujourd'hui le n» 3 de la môme place.
(8) Place Jacques-Coeur, n°s 1 et 3, et l'emplacement des Nouvelles Galeries.
(9) Cour de l'Oratoire, ruo des Armuriers.
(10) Procès-verbaux... XXIX, nu 17.
(11) Ibid, : n° 20.
DE BOURGES 281
nécessité d'acheter d'autres immeubles, que de la diffi-
culté d'asseoir des fondations solides sur un terrain
bouleversé par de nombreuses substructions antiqueset on prononça l'ajournement de la question (Délibé-ration du 21 janvier 1860.) (1). . .
L'affaire revint en discussion l'année suivante et l'em-
placement situé en face Jacques-Coeur fut définitivement
choisi, celui de Cujas était écarté, bien qu'assurant la
conservation d'un édifice intéressant, à cause de la
difficulté de le compléter par des annexes indispen-sables sans altérer son caractère artistique (Déli-bération du 16 mars 1861.) (2).
Comme tant d'autres qui avaient précédé, ce dernier
vote du Conseil municipal resta sans résultat pratique.Il était bon de le constater ici, bien que la question du
Musée ait, à partir de ce moment, paru cesser de tenir
une grande place dans les préoccupations et les études de
l'Assemblée communale. Quant au nouvel insuccès
auquel on avait encore abouti, on ne saurait s'en éton-
ner, quand on voit que le Conseil général, dont le con-
cours paraissait au moins indispensable pour l'installa-
tion d'un établissement généralement considéré comme
départemental, n'être pas même consulté, et que lui-
même, oubliant la part prise par la Ville à la création du
Musée, se livrait à des études particulières, sans entente
préalable avec la municipalité.En effet, à la session de 1860, le Conseil général traita
à son tour cette insoluble question de l'installation du
Musée H dont les collections si précieuses, était-il dit,
» gisent entassées et sans art dans des locaux mal dis-
» posés, insuffisants, humides et dont on paye cepen-
(1) Procès-verbaux... XXIX, n° 25.
(2) Ibid. : n° 121.
282 LE MUSÉE
» dant un loyer considérable. Bourges s'honorerait en
» exhumant ces trésors aujourd'hui à peu près inconnus
» et en les offrant à la curiosité des étrangers dans un
» monument dont le caractère artistique en rehaus-
» serait les mérites » (1). Puis, après avoir examiné la.
valeur artistique de l'Hôtel Cujas et de l'Hôtel Lalle-
mant, il émettait le voeu que le Musée fût installé dans
ce dernier monument. Mais que dire et surtout que
pourrait-on ajouter au jugement si vrai dans sa sévérité,
que l'Assemblée départementale portait contre elle-
même, pour avoir laissé le Musée dans un local humide,où il était entassé sans art, et à celte expression énergique
qui se trouve dans le procès-verbal, qualifiant d'exhu-
mation un déplacement dont l'urgence était si manifeste.
La Société du Musée ne bornait pas ses travaux aux
soins et aux démarches sans cesse répétés que le
Musée nécessitait, elle étendait son action sur tout ce
qui touchait à l'art et à l'histoire dans le département.C'est ainsi qu'elle prenait l'initiative de l'érection de
divers monuments aux illustrations berruyères : voici
quelques détails sur cette partie de son rôle qui n'est passans intérêt.
Il fut d'abord question, dans le cours des années 1840
et 1841, d'élever une statue à Jacques Coeur. Le docteur
Lebas, membre de la Société du Musée, en fit le pre-mier la proposition, et une commission composée de
MM. Mater, Vice-Président de la Société, Berard, rece-
veur général et caissier, d'Haranguier, ingénieur en chef,
Peneau, pharmacien, et du docteur Lebas, secrétaire,
fut chargée de mettre ce projet à exécution.
Dantan aîné, un des sculpteurs les plus en renom de
l'époque, fut chargé du travail, qui devait consister en
(1) Procès-verbaux du Conseil général, session de 1800, séancedu 30 août.
DE BOURGES 283
une statue de sept pieds de hauteur et en deux bas-
reliefs pour le socle. Coulé en bronze, le monument eut
coûté 15 à 16.000 francs, chiffre dépassant la somme quel'on pouvait espérer réunir ; il fut en conséquence décidé
qu'il serait fait en fonte fine, l'artiste ne demandant,
pour la part du travail qui lui incombait, qu'unesomme de 8.000 francs.
La Municipalité et le Conseil municipal, jjressentis à
ce sujet (1), donnèrent leur assentiment, s'engagèrent à
contribuer à la dépense pour une somme de 1.000 francs
et décidèrent que la statue serait élevée dans la cour de
l'ancien Hôtel du célèbre argentier de Charles VIL (Dé-
libération du 21 août 1841.)On jugeait nécessaire, pour permettre de réaliser le
projet, la réunion d'une somme de 6.000 francs; une
souscription fut. ouverte à cet effet chez tous les notaires
du département (2). Mais les fonds recueillis restèrent
insuffisants, et le pieux hommage que l'on voulait rendre
à la mémoire de l'un des plus illustres enfants de
Bourges ne fut réalisé qu'en 1879, sous l'administration
municipale de M. Eugène Brisson.
Une manifestation plus restreinte, qui pour ce motif,
sans doute, réussit mieux, fut tentée de 1841 à 1843, en
l'honneur de Sigaud de Lafond. On décida que l'on se
contenterait d'un simple buste, dont l'exécution fut
confiée à Jules Dumoutet : il fut placé au Collège
roj'al, où Sigaud de Lafond avait professé et auquel il
avait légué son précieux cabinet de physique. La sous-
cription qui fut ouverte produisit 2.533 francs, et le mo-
nument fut inauguré en mai 1843. La dépense effectuée
ne fut que de 1.861 iï. 10 (3); il resta donc un reliquat
(1) Lettre de M. Mater au Maire de Bourges du 7 août 1841. (Mes Archives).
(2) Journal du Cher des, 15 août 1840, 10 août et 18 septembre 184-1.
(3) Dumoutet toucha 1.800 francs pour le buste et le socle.
284 LE .MUSÉE
de 671 fr. 80 que l'on voulait affecter à un second monu-
ment à élever au peintre berruyer Jean Boucher, mais
il semble qu'aucune suite n'ait été donnée à la décision
qui fut prise à cet égard (1).Il fut également question de rappeler la mémoire de
l'illustre jurisconsulte Cujas (2), et M. Mater obtint en
1844, du roi Louis-Philippe, une souscription de 300
francs pour permettre la réalisation de ce projet (3), en
faveur duquel la Ville vota également une somme de
600 francs (4).On n'entendit plus parler de ce projet pendant plu-
sieurs années, puis il en fut de nouveau question en
1851, à l'occasion de la donation au Musée d'un buste
plus grand que nature par le sculpteur Ristori, que son
auteur offrait d'exécuter en marbre. La Ville semblait
disposée à maintenir son ancienne souscription, la Cour
d'appel elle-même avait souscrit (5), et cependant cette
nouvelle tentative n'eut aucune suite.
§3. — Situation juridique du Musée. — A qui appartenait-il ?
Dans les chapitres précédents on a vu naître, puis se
développer peu à peu le Musée, on a assisté aux efforts
faits pour assurer son fonctionnement régulier, en lui
constituant un budget et une installation en rapportavec ses besoins ou l'importance croissante de ses col-
lections. Maintenant qu'il est âgé de plus d'un quart
(1) Journal du Cher des 15 mai, 9 et 18 septembre, 16 et 18 décembre 1841,
11 janvier, 3 mai et 28 juin 1842, 7 février et 16 mai 1843.
(2) Journal du Cher du 9 mars 1844.
(3) Journal du Cher du 4 juillet 1844-.
(4) Proc.-verb. Conseil municipal de Bourges, XVIII, Budget de 1845, n° 11 9.
(5) Lettre du sculpteur Ristori à M. Mater du 20 août 1851 et Lettre de
M. Planchai, maire de Bourges, à M. Mater du 28 août suivant. (Mes
Archives.)
DE BOURGES 285
de siècle et qu'il touche à la fin de la première périodede son existence, il est bon de jeter un coup d'oeil en
arrière pour examiner quel était en réalité le caractère
juridique de l'institution, à qui elle appartenait et l'ave-
nir qui lui paraissait réservé. • .
Si l'on se reporte aux termes de l'arrêté du 30 juin
1834, ordonnant l'institution du Musée départemental,on constate qu'il s'agissait d'une création ferme, dont
l'ouverture aux visiteurs était seule différée, jusqu'aumoment où son importance serait jugée assez grande.Le Règlement adopté par la Société et approuvé par le
Préfet, modifia entièrement ce caractère, en posant
en principe dans l'article 2, que la Société avait pour
mission de rassembler les éléments d'un Musée dépar-
temental et de provoquer toutes les mesures nécessaires
à la fondation ultérieure de ce dernier, ce qui impliquait
que les collections que l'on aurait réunies ne forme-
raient le Musée départemental, dont on poursuivait
l'établissement, qu'à partir du moment où ce dernier
serait déclaré définitivement constitué. Les articles 9
et 10 confirment celte interprétation, la première en
déterminant ce qui devait composer le Cabinet de la
Société, la seconde en décidant que le cabinet ferait
nécessairement partie du Musée, lorsque la fondation
de ce dernier aurait lieu (l). L'article 12 ajoutait qu'au
(1) Art. 2. — [La Société d'antiquités, d'histoire et de statistique pour le dé-
partement du Cher] a pour but :' 1° de rassembler les éléments d'un Musée dépar-
temental et de provoquer toutes les mesures nécessaiies pour arriver à sa fonda-
tion définitive.
Art. 9. — Le Cabinet se compose des objets d'art, comme médailles, antiqui-
tés, statues, fragments d'architecture, bas-reliefs, modèles en relief, tableaux, etc. ;
des objets d'histoire naturelle, comme collection de minéraux, de coquilles, d'ani-
maux empaillés, d'insectes, herbiers, etc. ; enfin, des ouvrages relatifs aux anti-
quités, aux beaux-arts ou à l'histoire naturelle.
Art. 10. — Quand la fondation d'un Musée départemental aura lieu, le Cabinet
en fera nécessairement partie.
286 LE MUSÉE
cas où cette fondation n'aurait pas été effectuée dans
le délai de dix années, les donateurs ou leurs ayants-droit pourraient reprendre les objets par eux don-
nés.
Comme on le voit, la fondation du Musée devait tra-
verser deux phases successives : d'abord la création, parla Société d'antiquités, d'un Cabinet qui était sa pro-
priété, puis la transformation de ce Cabinet en Musée
départemental, quand le Préfet le jugerait à propos, et
dans tous les cas, dans le délai de dix ans. En fait,
M, Mater ne put jamais obtenir la déclaration officielle
que le Musée était départemental et de son vivant aucune
décision de l'Administration préfectorale ne vint consa-
crer l'existence de l'oeuvre qu'il avait fondée et la mettre
à l'abri des divers cas de dissolution écrits dans l'ar-
ticle 12.
L'appellation de Musée départemental, que l'on ren-
contre souvent dans des documents émanant de l'admi-
nistration, ne saurait suppléer à l'institution officielle
dont la nécessité avait, été prévue, pas plus que les sub-
ventions accordées par le Conseil général ne pouvaientcréer des droits au Département en l'absence de la décla-
ration de propriété exigée ; s'il en était autrement, les
allocations fournies par la Municipalité de Bourges ou
par l'Etat, leur auraient également acquis sur le Musée
une sorte de co-propriété, à laquelle ils n'ont jamais pré-tendu : en résumé, toutes ces allocations étaient votées
à titre de secours ou d'encouragement, sans constituer
de droit au profit de ceux qui les accordaient. On trouve
du reste, à plusieurs reprises, la reconnaissance formelle,
de la part du Département, de la situation indécise quiétait celle du Musée. Dès 1840, dans le Conseil général,on invitait le préfet à fixer définitivement le caractère
de la position du Musée el on se demandait s'il élaif
DE BOURGES 287
départemental, communal ou particulier (1). En 1846,
dans une délibération qui a été reproduite précédem-
ment, on relève diverses déclarations qu'il est bon de
rappeler : un membre de l'Assemblée départementale
déclare repousser toute participation à l'installation du
Musée et émet l'avis qu'on laisse s'arranger entre eux la
Ville et les propriétaires du Musée; un autre conseiller
général demande que le Musée soit déclaré départemen-
tal; un troisième membre prétend enfin que, d'après les
statuts de la Société, le Musée n'est pas départemental,
qu'il n'est même pas fondé (2).Ces diverses discussions ne firent, du reste, faire au-
cun pas à la question de propriété du Département sur le
Musée, ni à celle de son installation, le Conseil général
se bornant à renvoyer l'affaire à une autre session,
(( toutes choses restant en l'état », et « sans la perdre
de vue », est-il ajouté, par euphémisme sans doute.
Elles constatent toutefois, d'une façon incontestable, que
l'établissement artistique dont on raconte ici les débuts
n'était pas encore fondé, qu'il n'appartenait pas au Dépar-
tement, et qu'il était resté la propriété de la Société qui
avait été chargée de sa création, propriété essentiellement
conditionnelle, qui devait disparaître au profit du
Département, dès qu'il conviendrait à celui-ci de faire
valoir les droits dont le principe lui avait été réservé.
Poursuivre la fondation d'un Musée, n'avait pas été
l'unique mission qui avait été confiée à la Commission
d'antiquités, d'histoire et de statistique du départementdu Cher, lors de son institution en 1834 ; elle devait, en
outre, étudier tout ce qui touchait à l'archéologie, à l'his-
toire et aux sciences du département, procéder audépouil-
(1) Procès-verbaux... Conseil général du Cher, session 1840, p. 31.
(2) lbid. : session 1840, p. 18 et s.
19
288 LE MUSÉE
lement et au classement des archives de la Préfecture et
des Communes, ainsi qu'à celui de la Bibliothèque publi-
que de Bourges, enfin veiller à la conservation des monu-
ments historiques, programme dont l'étendue et la com-
plexité devaient dépasser les forces de la Société, malgréla présence dans son sein de savants et d'artistes comme
Raynal, Girardot, Fabre et Hazé.
Au mois de février 1836 parut l'unique Bulletin qui ait
été publié, renfermant, avec un avant-propos, une lettre
de M. Vitet sur la date probable de la Cathédrale de
Bourges (sic), — une note sur les médailles romaines
de la collection d'antiquités du Cabinet, — une sentence
rendue en 1265 contre l'abbaye de Saint-Sulpice, docu-
ment extrait des Archives du Cher, — Nicolas Cathe-
rinot, sa vie, ses oeuvres, par Louis Raynal, avec la réim-
pression de deux de ses opuscules : les Antiquités ro-
maines de Berry et Bourges souterrain, avec des observa-
tions signées L. R. (Louis Raynal), enfin un Aperçu géné-
ral sur le département du Cher, pour servir d'introduction
à la statistique, par J.-M. Fabre (1).
La Commission avait reçu de plusieurs de ses membres
d'importantes communications ; elle-même avait com-
mencé à réunir les éléments d'une statistique monumen-
tale du département du Cher, dont l'exécution ne devait
être réalisée que longtemps après, par M. Alphonse Buhpt
de Kersers, qui a compté, dans la suite, parmi les mem-
bres les plus distingués de la Commission du Musée.
On possède sur cette partie des travaux de la Commis-
sion de 1834 deux rapports de M. de Girardot, des 1er et
5 août 1836 (2), qui témoignent que les matériaux ne fai-
saient pas défautpour continuer lapublicationduBulletin.
(1) In-4° de 15 pages d'introduction et 44 pages de texte, avec 2 planches dessi-
nées par Hazé.
(2) Mes Archives.
DE BOURGES 289
Sans rien affirmer, on peut croire que l'exiguïté de
ses ressources financières ne fut pas étrangère à sa dis-
parition. On a vu, à propos des travaux géologiques de
Fabre, qu'il ne fallait pas subvenir seulement aux frais
d'impression, mais encore payer les dépenses occasion-
nées par les recherches antérieures de ses collabora-
teurs, ce qui excédait incontestablement les facultés
budgétaires de la Société. Le Musée, d'un autre côté,
avait des besoins pressants ; il fallait opter entre ce
dernier et le Bulletin, or, ce fut le Musée, dont M. Mater
avait fait plus particulièrement sa chose, qui l'emporta.
Au fond, la prospérité et l'activité générale de la
Société étaient plus apparentes que réelles : le rapport
suivant, adressé le 9 septembre 1839, par son Vice-Pré-
sident au Ministre de l'Instruction publique, fait con-
naître la vérité à ce sujet :
« Monsieur,
» J'ai l'honneur, conformément à votre demande du
» 31 août dernier, de vous adresser :
» 1° La liste des membres titulaires de la Société d'an-
» tiquités, d'histoire et de statistique du Cher;» 2° La liste des membres correspondants.» Le grand nombre de membres titulaires donnerait
» à penser que cette Société se livre à de grands travaux
» scientifiques : il n'en est pas ainsi.
» On s'est d'abord occupé de fonder un Musée dans
» lequel se trouvent réunis des médailles et des mon-
)) naies, des statuettes, des meubles et autres objets» d'antiquité ou du moyen-âge trouvés principalement» dans l'ancien Berry.
» C'est à l'occasion de ce Musée que beaucoup de nos
» concitoyens sont entrés dans la Société, afin de con-
» tribuer avec les fondateurs à son accroissement.
290 LE MUSÉE
» Cependant, des Commissions ont été nommées pour» rechercher les. monuments anciens du pays, pour vé-
» rifier les faits historiques et pour réunir les matériaux» nécessaires à la statistique du département.
» Déjà, plusieurs monuments du moyen-âge ont été» décrits.
» Des restes de construction ont été reconnus et des-» sinés.
» Des laits historiques ont été réunis et des rapports» sur plusieurs parties de la statistique ont été lus à la
» Société.
» Tout fait espérer que cette Société parviendra à
» remplir la mission qu'elle s'est imposée en se for-
» mant, mais cette mission n'ayant d'autre but que les
>>recherches ci-dessus indiquées, aucun concours n'a
» été ouvert jusqu'à présent.» La Société vient de signaler à M. le Préfet du Cher
» un vandalisme qu'elle déplore, mais qu'elle n'a pas le
» pouvoir d'arrêter.
» Dans plusieurs églises, et notamment dans celle de
» Dun-le-Roi, arrondissement de Saint-Amand, les fa-
» briques, sous prétexte de restaurer l'intérieur, dé-
» truisent les bas-reliefs, les'sculptures, pour les rem-
» placer par des décorations nouvelles, de sorte que» dans peu d'années il ne restera pas de vestiges des
» ouvrages anciens. Tous les ans, ces fabriques deman-
» dent des secours au Gouvernement pour la réparation» des églises ; il serait convenable qu'elles s'attachassent
» à conserver dans leurs églises les ouvrages d'art au
» lieu de les détruire (1). »
Un fait certain se dégage de ce document : c'est la
préférence accordée par la Société à la partie de sa mis-
(1) Mes Archives.
DE BOURGES 291
sion concernant le Musée, préférence qui avait eu
pour effet de paralyser tout le reste, en absorbant dans
leur entier les modestes ressources dont elle avait la
disposition. Le succès qu'elle obtinl à cet égard peut
sans doute consoler de l'échec que la Société éprouva
pour toutes les autres branches comprises dans son
programme, mais il est probable que cette spécialisation
manifeste contribua à lui porter un coup, dont il lui fut
impossible de se relever.
En effet, parmi les membres de la Société d'antiquités,
d'histoire et de statistique du département du Cher, le
Musée avait sans doute des partisans qui considéraient
sa fondation comme présentant un intérêt primordial,,
mais il avait aussi des adversaires qui eussent mieux
aimé voir les autres questions dont on avait à s'occuper,
traitées au moins sur un pied d'égalité ; la direction
quelque peu exclusive qui paraît avoir prédominé,
dut provoquer des démissions ou des abstentions. A
cela vinrent s'ajouter les morts, les changements de
résidence, sans oublier l'effet produit par la nécessité
où l'on se trouva de faire de nouveaux appels de cotisa-
tions, toutes causes qui contribuèrent à amener le vide
dans les rangs d'une Société d'abord si nombreuse.
Avant de disparaître, elle subit une sorte de transfor-
mation, on pourrait dire de restriction. A partir de 1838,
dans les budgets de la Ville de Bourges, les allocations
accordées au Musée sont indiquées comme étant allouées
à la Société du Musée. Cette dernière elle-même cesse
d'être mentionnée vers 1845, sans que l'on puisse déter-
miner à cet égard une date précise, et dès lors il n'est plus
question de la Société d'antiquités et de ce qui paraît
lui avoir succédé ; l'une après l'autre elles s'évanouirent
sans bruit, et à la tête du Musée il ne subsista plus que
ses deux Conservateurs, MM. Mater et Charmeil.
292 LE MUSÉE DE BOURGES
On voit quelle était à ce moment la singulière situa-
tion du Musée : la Société à laquelle il avait appartenu
ayant cessé d'exister, les deux membres qui seuls
restèrent pouvaient être considérés comme ayant suc-
cédé ipso facto aux droits de leurs collègues, et par suite
en être devenus les propriétaires uniques. Assurément,
jamais M. Mater et M. Charmeil n'eurent une pareille
prétention, mais on voit combien était imprécis et incer-
tain l'état du Musée au point de vue juridique.Ces préoccupations attristèrent les dernières années
de M. Mater, qui mourut le 25 février 1862, à l'âge de
82 ans, avec la triste pensée que l'oeuvre à laquelle il
avait consacré 28 années de son existence, et dont il
avait voulu doter la ville de Bourges, allait disparaître
avec lui.
III
Réorganisation de l'administration du Musée :
il est appelé MUSÉE MATER et cesse d'être
départemental.
L'activité que déploya l'Administration préfectorale
pour réorganiser le Musée après le décès de son fonda-
teur, prévint heureusement les dangers de dislocation quel'on pouvait redouter ; elle eut également pour effet de
consacrer définitivement, bien qu'implicitement, sa con-
stitution comme établissement départemental restée
depuis si longtemps en suspens. Toutefois, cela ne veut
pas dire que les mesures prises fussent elles-mêmes à
l'abri de toute critique, car, ainsi qu'on le verra, elles
provoquèrent une crise, qui amena le Département à
renoncer à tous les droits qu'il avait sur lui.
Il semble que l'on ait eu d'abord le projet d'établir
pour le Musée une organisation analogue à celle qui fut
instituée en 1867 et qui, depuis lors, avec des concessions
réciproques, a fonctionné de la façon la plus profitable
pour saprospériié. Une Commission consultative de dix-
huit membres (1) aurait été chargée de l'administration,
sous la haute direction du Préfet et du Maire; la partie
executive était confiée à MM. Alphonse Mater, Conseiller
(1) La Commission était composée de MM. Berry, Bourdaloue, Boyer, Bussière,
Charmeil, Cougny, Dumoutet, Fabre, Fournira 1, Hiver, Juillien, Louriou, Mater
(Alphonse), Peneau, Romagnési, Rey, Royer etïarlier.
294 LE MUSÉE
à la Cour d'appel et fils aîné du fondateur du Musée,comme Administrateur, Charmeil, comme Conservateur,Henri Fournier, 1er Conservateur-Adjoint et Antoine
Cougny, 2e Conservateur-Adjoint (1).A ce projet M. Paulze d'Ivoy (2), alors préfet du Cher,
préféra une organisation plus compliquée, dont on trou-
vera les dispositions dans un arrêté qui porte la date
du 22 mars 1862. Voici ce document :
« Article 1. — Il est institué à Bourges une Commis-
» sion administrative et de surveillance du Musée dé-
» partemental.» Article 2. — Le Préfet et le Maire de Bourges sont
» présidents d'honneur de cette Commission composée» de douze membres, parmi lesquels est désigné le Direc-
» teur du Musée, qui est, comme la Commission elle-
» même, nommé par le Préfet.
» Article 3. — La Commission procède par voie élec-
» tive à la composition de son bureau. Il se compose» d'un Président, d'un Vice-Président, d'un Secrétaire et
» d'un Trésorier et se renouvelle tous les trois ans, le
» 31 décembre. Le premier renouvellement aura lieu le
» 31 décembre 1864. Les mêmes membres pourront être
» réélus.
» Cette opération est constatée par un procès-verbal» dont une copie est adressée au Maire et au Préfet.
. (1) Arch, Cher : T. 83.
(2) M. Paulze-d'lvoy était le petit-fils du général marquis Lapoype, qui prit
une part glorieuse aux guerres de la Révolution et de l'Empire. Fait prisonnier
en 1802, en revenant de Saint-Domingue, il rentra en France prisonnier sur pa-
role et ne fut échangé qu'en 1812. Ne pouvant, jusqu'à cette époque, servir contre,
l'étranger, il fut employé à l'intérieur et commanda, de 1807 à 1813, la division
de Bourges, où il devint très populaire. Ayant repris le service actif, il soutint en
1813, avec la plus grande vigueur, un siège célèbre à Witlemberg, contre les
armées de la coalition. M. Mater écrivit une ode, qui a été conservée, sur la
défense de Wiltemberg par le général Lapoype.
DE BOURGES 295
» Article 4-, — En cas de mutation, dans le courant de
» la période triennale, parmi les membres du bureau, il
» est pourvu immédiatement par la Commission à l'élec-
» tion de nouveaux membres pour le temps durant
» lequel ceux qu'ils sont appelés à remplacer devraient
» rester en exercice.
» Article 5. — Les délibérations de la Commission ne
» sont valables qu'autant que les deux tiers au moins
» des membres y prennent part.» Toutefois, à la seconde convocation, qui est faite à
» dix jours au moins d'intervalle, si les membres ne
» sont pas réunis en nombre suffisant, les délibérations
» de la Commission sont valables quel que soit le
» nombre des membres présents. Elles sont prises à la
» majorité des voix. En cas de partage la voix du Prési-
» dent est prépondérante.» Article 6. — Une copie des délibérations de la Com-
» mission est adressée au Maire et au Préfet, qui peu-» vent, après avoir entendu, s'il y a lieu, les observations
» du Directeur, en suspendre l'exécution.
» Article 7. — Dès que la Commission sera constituée,
» elle rédigera un Règlement administratif, qui déter-
» minera ses attributions et la nature de ses travaux.
» Ce règlement, qui sera soumis à l'approbation du
» Maire et du Préfet, déterminera également les attribu-
» tions des membres du bureau ainsi que celles du
» directeur.
» Article 8. — Le Préfet, sur la proposition du Maire,
» et sur une liste de trois candidats, nomme le Conser-
» valeur et le Conservateur-adjoint du Musée.
» Article 9. — Le Conservateur et le Conservateur-
» adjoint du Musée, dont la mission est définie par le
» Règlement administratif, ont dans le sein de la Com-
» mission voix consultative seulement. Leurs fonctions
296 LE MUSÉE
» sont incompatibles avec celles de membres de la Com-
» mission.
» Article 10. — L'arrêté du 30 juin 1834, qui créa une
» Commission pour les antiquités, l'histoire et la slatis-
» tique du département du Cher et les dispositions de
» l'arrêté du même jour, portant création d'un Musée
» départemental à Bourges, qui sont contraires à celles
» qui précèdent, sont rapportées. »
Un second arrêté du même jour désignait les membres
de la Commission. Furent nommés :
MM. Berry, Conseiller à la Cour Impériale ;
Bourdaloue, Ingénieur civil ;
Boyer, Archiviste-Adjoint du département;
Bussière, Architecte de la Ville de Bourges ;
Caillaud, Vicaire général et Président de la Com-
mission historique du Cher ;
Jules Dumoutet, Sculpteur ;
Fournier fils, Avocat ;
Louriou, Avocat ;
Mater (Alphonse), Conseiller à la Cour Impériale ;
Rhodier, Greffier du Tribunal civil ;
Romagnési, Membre de la Société historique;
Tarlier, Architecte du diocèse.
Enfin M. Dumoutet était nommé Directeur du Musée.
Le 17 avril suivant, M. Paulze d'Ivoy, assisté de
M. Planchât, maire de Bourges, procéda à l'installation
de la Commission du Musée et du Directeur.
Prenant la parole, « le Préfet exposa le but de la réu-
» nion et des motifs qui avaient provoqué une réorgani-» sation du Musée de Bourges. Le principal était la perte» que cet établissement avait faite de son ancien Direc-
» teur, en la personne de M. le Premier Président Mater.
» En quelques mots bien sentis, M. le Préfet rendit
» hommage au zèle de tout temps déployé par l'éminent
DE BOURGES 297
» magistrat, dont il rappela la mort récente, pour le bien
» du pays et notamment pour la prospérité de ce Musée
» qui fut en réalité son oeuvre et dont il doit être consi-
» dèré comme le véritable fondateur. Il demanda qu'en» souvenir de ce qu'il avait fait à cet égard, son' nom
» restât attaché à cette fondation qui s'appellerait» désormais MUSÉE MATER.
» M. le Maire s'associant pleinement à cet acte de
» justice, déclara qu'il était prêt à se charger avec plai-» sir du soin d'accomplir ce voeu qu'il croit répondre» à un désir général (1). »
Et le procès-verbal de la séance constate que la nou-
velle Commission, aussitôt après sou installation, adopta
par « un vote d'acclamation » la proposition du Préfet.
Hommage bien dû à la mémoire de M. Mater, quesa famille accueillit avec une profonde gratitude, mais
qu'elle eut la douleur de voir méconnaître et tomber en
désuétude par le fait même de ceux qui en aAraient prisl'initiative ou s'y étaient associés avec le plus d'empres-sement.
Aucun arrêté ne vint en effet sanctionner la décision
de la Commission, aucune mesure ostensible n'apprit au
public le nouveau nom du Musée et la correspondanceofficielle émanant, soit de la Préfecture, soit de la Mairie,
ne porte aucune trace de ce changement d'appella-tion. Si le Maire oubliait ainsi qu'il s'était sponta-nément chargé de l'exécution du voeu émis par la Com-
mission d'administration, un sentiment de réserve bien
naturel interdisait aux enfants du fondateur du Musée,
qui continuèrent son oeuvre à la tête de l'établissement,de ne rien faire à cet égard en son lieu et place ; c'est
(1) Journal du Cher du 19 avril 1862. — Registre des délibérations de la
Commission du Musée.
298 LE MUSÉE
grâce à ce concours de circonstances que l'on ignore
généralement, bien que ce soit un fait encore récent, à qui
Bourges doit de posséder un Musée digne de son passéet le nom que cet établissement devrait porter en souve-
nir de son fondateur.
La Commission, après avoir procédé à la compositionde son Bureau, qui fut formé de MM. Alphonse Mater,Président ; Louriou, Vice-Président ; Boyer, Secrétaire,et Rhodier, Trésorier, aborda de suite la question du
Règlement qu'elle avait à élaborer, pour déterminer,
comme l'indiquait M. Paulze dTvoy, ses propres fonc-
tions, celles du Directeur et du Conservateur.
La conciliation de ces divers organismes, et surtout
la détermination des fonctions du Directeur et de ses
rapports avec les autres personnes placées à la tête du
Musée, était le point délicat à fixer, elle allait dépendre
beaucoup de la personne même qui en était revêtue ;c'est donc le moment de parler de M. Jules Dumoutet et
de dire qui il était.
M. Dumoutet, à la fois artiste et archéologue, était
élève de Dantan aîné ; comme sculpteur, il a laissé des
portraits (1), quelques projets de monuments publics et
de nombreux travaux d'églises. Somme toute, c'était un
artiste habile, doué d'une grande facilité, qui fut sérieu-
sement aidé, dans le genre d'ouvrages auquel il con-
sacra principalement son ciseau, par ses connaissances
archéologiques, et qui obtint une notoriété honorable
sans être très étendue.
Comme archéologue il traita de nombreux sujets et en
effleura davantage encore, se dispersant trop pour pou-voir les approfondir suffisamment. Il a laissé, pour
(1) Les portraits qu'il a faits de M. Mater, un buste et une statuette, comptent
parmi ses meilleurs ouvrages.
DE BOURGES 299
accompagner les travaux archéologiques achevés ou
inachevés qui constituent son bagage scientifique,d'excellents dessins, qui méritent une mention particu-lière.
Malgré ces titres divers la nomination de M. Dumou-
tet causa une véritable surprise et, il faut le dire, fut
généralement mal accueillie. On se déliait de sa capa-cité comme administrateur et il parut qu'il n'avait pas
ce qui pouvait lui permettre de remplir la place queM. Mater avait tenue, mais avec une autorité personnelle
que son successeur ne possédait aucunement. M. Du-
moutet ne chercha même pas à ménager la transition,
ce qui lui eût été possible avec un peu de souplesse, et
dès l'abord il manifesta des prétentions autoritaires et
des tendances dominatrices inadmissibles de la partd'un nouveau venu, que l'on verra se produire dans la
discussion du projet de Règlement, dont la Commission
eut bientôt à s'occuper. Il voulait être le maître en
quelque sorte absolu, sans s'apercevoir qu'en instituant
à côté de lui une Commission administrative et de sur-
veillance, le Préfet avait clairement indiqué qu'il
n'entendait nullement l'investir de pouvoirs illimités et
le mettre au-dessus de cette Commission.
D'un autre côté, comment espérer que les membres
de cette Commission, dont beaucoup avaient une situa-
tion ou des titres artistiques ou scientifiques, qui ne le
cédaient en rien à ceux dont M. Dumoutet pquvait se
prévaloir, s'effaceraient volontiers devant sa personna-lité envahissante, sans parler du légitime mécontentement
que pouvaient éprouver ceux qui, comme MM. Char-
meil et Cougny, voyaient leurs services oubliés, et des
droits difficilement contestables, sacrifiés au profit d'une
personne étrangère jusque-là au Musée. La nouvelle
organisation, en ne tenant un compte suffisant, ni des
300 LE MUSÉE
droits acquis, ni des services rendus, ni des positions
de chacun, contenait donc le germe d'un désaccord qui
n'allait pas tarder à se produire.
Dès la séance d'installation, c'est-à-dire, dès la pre-
mière heure, M. Dumoutet émit la prétention d'être
chargé seul d'examiner, s'il y avait lieu d'ouvrir au pu-
blic les salles du Musée, pendant la durée du Concours
régional qui allait avoir lieu à Bourges, question d'un
bien petit intérêt, mais qui montrait bien quelles étaient
les intentions et les tendances du nouveau Directeur : la
Commission fut obligée de lui rappeler que, jusqu'à ce
qu'il en eût été décidé autrement, c'était à elle que la
plénitude des pouvoirs d'administration avait été attri-
buée par l'article l 01'de l'arrêté du 22 mars.
Les personnes qu'atteignait le plus le nouvel état de
choses, étaient MM. Charmeil et Cougny. Leurs ser-
vices et leurs droits sont établis et rappelés dans une
note non signée, remise au Préfet, et dans une lettre de
M. Cougny, adressée au même fonctionnaire (1). Voici
ces documents :
[Note : ] « Après la dissolution de la Société du Musée, qui» eut lieu en 1838, par suite de division et de refus successifs
» de paiement de la cotisation annuelle, M. Mater réclama de
» M. le Préfet une nouvelle organisation qui pût marcher à
» son but sans entraves.
» M. le Préfet, conservant la haute direction du Musée,» donna plein pouvoir à M. Mater, le nouveau Conservateur,» et M. Charmeil, Conservateur-Adjoint.
» Promesse fut faite et souvent répétée à M. Charmeil que» ses services gratuits et son désintéressement dans la
» recherche et l'abandon au Musée d'objets rares et précieux,» seraient reconnus par sa nomination à la place de Conser-
» valeur, lorsque cette place serait rétribuée par suite d'une
» organisation définitive.
(1) Arch. Cher : T. 83.
DE BOURGES 301
» Vingt années s'étant écoulées sans que cette promesse ait
» pu se réaliser, M. Mater lit nommer M. Cougny, gendre de
» M. Charmeil, second Conservateur-Adjoint, dans le but de» reporter sur lui les droits de M. Charmeil.
» M. Cougny, depuis- sa nomination qui a eu lieu en février
» 1857, a rendu également, tant à Bourges qu'à Paris, des
» services au Musée. Il existe au Ministère de l'Instruction
» publique des notes parfaites sur la capacité de M. Cougny,» comme professeur de dessin ; ses connaissances artistiques» et archéologiques le mettent donc à même de remplir hono-
» rablement les fonctions de Conservateur du Musée, et le
» titre de Conservateur responsable et par conséquent rétri-
» bué le.détermineront de suite à revenir à Bourges. »
La lettre écrite le 17 mars 1862 par M. Cougny au Pré-
fet du Cher était ainsi conçue :
« La mort de M. Mater, l'homme éminent qui, dans ses
» dernières années, m'a fait l'honneur de m'appeler son ami
» et de me traiter comme tel, a été pour moi un véritable
» deuil. Aussi la pensée de venir le lendemain vous parler» du titre qu'il me laissait en héritage ne m'est pas venue,» mais aujourd'hui j'apprends que des prétentions inquali-» fiables osent se formuler en lace de droits avoués, recon-
» nus non seulement du généreux fondateur du Musée, mais
» de toute sa famille.
» Je m'empresse donc, Monsieur le Préfet, confiant dans» votre esprit de justice bien connu et afin que votre reli-
» gion ne soit point surprise, de venir vous prier de consa-
» crer le principe de l'équité en me nommant Conservateur» du Musée de Bourges.
» Il y a 5 ans que j'ai eu l'honneur d'être nommé Conserva-» teur-Adjoint par votre prédécesseur ; depuis lors je n'ai
» pas cessé de m'occuper du Musée. Les recherches que j'ai» faites à Bourges comme à Paris pour notre grande collec-
» tion de portraits, les articles que j'ai publiés dans le Jour-» nal du Cher, ceux que j'ai publiés et que je publie encore
» sur les Beaux-Arts en général et principalement sur les» Musées de province dans une revue spéciale bien connue,» le catalogue dont je m'occupe depuis bientôt six mois, en
302 LE MUSÉE
» sont la preuve. Tout me fait espérer, Monsieur le Préfet,» que tant de travaux ne resteront pas sans fruit pour moi et» que des prétentions injustes ne prévaudront pas contre le» bon droit'.
» Que le Musée soit départemental ou municipal, ma posi-» tion reste la même : je suis Conservateur-Adjoint, je deviens» Conservateur en titre par la mort ou la démission de mes» supérieurs. C'est là, vous le savez, Monsieur le Préfet, la» marche ordinaire dans toutes les administrations. .
» Je vais très souvent à Bourges et je suis bien décidé à» m'y fixer définitivement, car tout m'y rappelle : mes inté-» rets et surtout mes plus vives affections. »
Pour toute satisfaction, et deux jours après la séance
d'installation de la Commission, c'est-à-dire le 19 avril,M. Charmeil fut nommé Conservateur du Musée et
M. Cougny Conservateur-Adjoint, ce qui les laissait en
dehors de la Commission et les plaçait sous les ordres
du Directeur : c'était mal récompenser tant d'années de
services gratuits et dévoués !
Une Sous-Commission, dont furent systématiquementexclus le Président et le Directeur, pour ne pas gêner la
liberté des membres qui la composaient, et qui étaient
MM. Berry, Bourdaloue, Boyer, Louriou et Fournier, fut
chargée de présenter un projet de Règlement. Elle se
mit activement à l'oeuvre et, dès le 7 juin suivant,
M. Louriou, son président et rapporteur, donna lecture
à la Commission de son rapport et du projet qu'elle
avait préparé.
Il paraît inutile d'étudier dans tous ses détails un tra-
vail qui était destiné à n'avoir qu'une existence éphé-
mère, puisque, moins d'un an après, il cessait d'être
applicable, par suite du changement de régime .quesubissait le Musée. On se bornera à quelques indications
sur la question des attributions du Directeur, parce quele désaccord qui s'éleva à cet égard, ne fut pas étranger
DE BOURGES 303
à la crise qui se produisit bientôt et amena le Conseil
général à renoncer à ses droits.
C'était, comme le déclarait le rapporteur de la Sous-
Commission, et comme on l'a déjà dit, le point délicat
de sa mission. D'après le projet, le Directeur devait être
l'intermédiaire entre l'autorité préfectorale et la Commis-
sion, — il était chargé de veiller à l'exécution des déci-
sions que l'une ou l'autre prendrait (art. 28J, — proposer
toutes les améliorations, changements et acquisitions
j ugés utiles (art. 29),—
préparer le catalogue et le sou-
mettre à la Commission (art. 30), — procéder avec le
Conservateur à l'inventaire et aux récolements annuels
(art. 31),— enfin présenter chaque année un rapport
sur les besoins du Musée (art. 32). Le rapporteur termi-
nait cette partie de son travail en appréciant en ces
termes la part d'attribution qui était faite au Directeur :
« Cette part est belle, elle est de nature à tenter l'esprit» même le plus ardent, et à satisfaire l'ambition même la
» plus vaste, dans la sphère où la Commission est appelée» à se mouvoir. »
M. Dumoutet souleva contre le projet de la Sous-Com-
mission de nombreuses critiques, qui toutes tendaient à
accroître son rôle et son autorité : il voulait avoir la
possibilité de tout régenter et de tout dominer.
L'article 1er du projet de Règlement attribuait le
pouvoir d'administrer à la Commission, qui avait été
qualifiée d'administrative ; M. Dumoutet demandait quecette faculté appartînt au Directeur et, par conséquent,voulait réduire la Commission à ne plus être qu'unComité consultatif, de telle sorte que cette Commission,
dont la fonction aurait dû être de surveiller le Direc-
teur, devenait pour lui un simple auxiliaire.
L'article 35 posait en principe que le Conservateur
était seul responsable et que, par voie de conséquence,
20
304 LE MUSÉE
il avait le droit de choisir les gardiens du Musée et de
présenter à la Commission des candidats pour le poste
de Conservateur-Adjoint, qui devait être son collabora-
teur. — M. Dumoutet protestait qu'on lui enlevait toute
action sur le Musée, il voulait être responsable et avoir
la nomination des agents subalternes, en un mot que le
Conservateur fût son homme.
Pour être juste, il là ut ajouter que si le désaccord, que
l'on vient de voir se produire, avait été aggravé par le
caractère autoritaire du Directeur, il avait pour cause
première l'antagonisme créé par l'arrêté préfectoral lui-
même qui instituait deux fonctions juxtaposées, dont
les titulaires ne consentiraient ni l'un ni l'autre à se
laisser diminuer. D'ailleurs, malgré cette résistance du
Directeur, la Commission adopta le 10 juin, sans modi-
fications appréciables, le projet qui lui était soumis et
qui fut immédiatement transmis à la Préfecture.
On trouve un nouvel et pieux hommage rendu à la
mémoire de celui auquel on devait le Musée, dans l'ar-
ticle 1er du Règlement qui portait : « Le Musée départe-
» mental du Cher prend le nom de MUSÉE MATER, en
» souvenir de M. le Premier Président Mater, son fonda-
» leur. » Et M. Louriou disait à ce sujet dans son rap-
port : « Nous n'avons eu garde d'oublier le voeu émis
» par M. le Préfet, appuyé par M. le Maire, acclamé par
» nous tous, que le Musée départemental du Cher prît
» le nom de MUSÉE MATER, en souvenir de son fonda-
» leur, et nous l'avons consacré dans l'article 1er du
» Règlement. »
Pendant que le projet de Règlement était soumis à
l'examen de l'Administration préfectorale, examen qui
se prolongea plus d'une année, l'existence du Musée se
poursuivit dans les conditions habituelles, c'est-à-dire,
que les collections s'enrichirent de nouvelles acquisi-
DE BOURGES 305
tions et que l'on chercha, une fois de plus, à résoudre
l'éternel problème de l'installation.
Un événement heureux pour les Musées des départe-ments se produisit à cette époque : il s'agit de la répar-tition qui fut faite entre ces établissements des doubles ;
ou des objets d'importance secondaire du Musée Cam-
pana. L'Empereur Napoléon III, qui avait acheté en
Italie cette précieuse collection, résolut de la partagerentre les Musées de Paris et ceux de la province. On
s'occupa activement à Bourges d'assurer au Musée de
cette ville une part satisfaisante dans cette distribution :
le Conseil général émit à ce sujet, dans la session du
mois d'août 1862, un voeu qui fut transmis à Paris (1),le Président de la Commission et le Directeur firent de
leur côté toutes les démarches nécessaires auprès de
ceux qui pouvaient avoir quelque influence dans la
répartition des lots, notamment auprès de MM. de
Longperier et de Niewerkerke, qui en étaient plus spé-cialement chargés.
De son propre chef, sans s'occuper de demander l'avis
de la Commission, M. Dumoutet, dans le but, disait-il,
d'assurer au Musée la bienveillance particulière de l'Ad-
ministration des Beaux-Arts, précieuse sans doute dans
la circonstance, offrit à cette dernière de céder au Musée
de Saint-Germain quelques-unes des stèles d'Alléan,
que M. Halloy, à qui elles appartenaient, avait données
au Musée pour conserver ainsi au Berry d'intéressants
monuments antiques de provenance locale (2). Messieurs
Boyer et Louriou s'élevèrent vivement dans le sein de la
Commission contre une proposition qui méconnaissait,
(1) Procès-verbaux des délibérations du Conseil général du Cher, année
1862, p. 62.
(2) Journal du Cher du 1er janvier 1857.
306 LE MUSÉE
d'une façon aussi manifeste, la volonté du donateur, et
la Commission s'associa entièrement à celle protesta-
tion, bien convaincue d'ailleurs du danger qu'il y a tou-
jours pour un Musée de province à entrer dans la voie
des échanges avec l'Etat (1). Ce sont ces procédés du
Directeur, le sans-gêne avec lequel il méconnaissait
aussi bien les droits de ses collaborateurs dans l'admi-
nistration du Musée, que le patrimoine intangible de cet
établissement, ainsi que les volontés sacrées des dona-
teurs, qui effrayaient à juste titre tous ceux que son ave-
nir intéressait.
Malgré cet incident, le Musée de Bourges reçut de la
collectionCampana une nombreuse série d'objets impor-tants en général. En voici la liste :
Peintures :
Martyre de Sainte Barbe, par Aniello Falcone.
La Vierge et l'Enfant Jésus, école de Masaccio.
Sainte Famille, attribuée à Van Dick.
Adoration des Mages, école d'Annibal Carrache.
Deux cadres l'enfermant des peintures de l'école bijsaniine.
« Vases étrusques.
» 1. — Grand pithos (dolium) cannelé, provenant des fouilles
de Cervetri. — Une longue rangée d'hommes et d'ani-
maux est représentée sur une frise circulaire. (Haute
antiquité.)
» Poterie de pâte noire. (Haute antiquité.)
» 2. 3. — OEnochoë.
» 4. 5. 6. — Scyphus à une anse.
(1) Les objets du Musée Campana donnés au Musée de Bourges furent envoyés
en deux fois : d'abord les tableaux, puis les objets antiques. Nous reproduisons
textuellement la note émanant du Ministère, qui accompagnait ces derniers.
DE BOURGES 307
» Vases peints de la décadence,
» 7. — OEnochoë : tête de femme.
» 8; 9. — Patères : têtes de déesse.
» Vases grecs.» Poteries d'ancien style.
» 10. — OEnochoë.
» 11. 12. 13. — Patères, dont une à ombilic.
» 14-21. — Bombylius. )» 22. — Aryballe. [ Style phenico-corinthien.
» 23-32. — Cotylisques. )
» Vases à figures noires.
» 33. — Amphore : (a) Hercule entre dans l'Olympe.— Apollon joue de la lyre.— (b) Déesse à cheval sous une treille.
» 34. — Amphore : Déesse ailée entre deux hommes drapés.
» 35. — Lecythus : Ephèbes.» 36. — Lepasté.
» Vases à figures rouges.
» 37. — Coupe : Éphèbes jouant au disque ou mettant la
cnemide.
» Poterie vernissée.
» 38. 39. —- OEnochoë.
» 40 à 45. — Patères.
» Terres cuites.
» 46. — Urne cinéraire étrusque : Echctlus armé d'un soc de
charrue combat les Perses à Marathon.
» 47. — Tête de Méduse (fragment d'un bas-relief).» 48. — Bas-relief : tête de Méduse.» 49. 50. — Tête de déesse.» 51. — Femme drapée.» 52. — Tête de chien (fragment de gargouille).
308 LE MUSÉE
» Marbres.
» 53. — Statue de la Fortune.•» 54. — Buste de Lucius Ver us. »
En outre de cet important dépôt de l'Etat, le Musée
fit l'acquisition de deux têtes en marbre d'Empereurs
romains, Drusus et Vespasien, vus de profil et exécutés
en demi-relief, travail de la Renaissance, provenant du
château de Castelnau (1).M. Dumoutet remit cinq écussons en pierre, sculptés,
peints et dorés, représentant les armoiries des Fradet et
provenant de l'église de Vignoux-sur-Barangeon, récem-
ment démolie. Le même membre donna en même temps,dit le procès-verbal de la séance, « un groupe tiré du
château de Baugy, et donné par M. Piffaut, maire de
Varzy », que l'absence d'explications suffisantes ne
permet d'identifier avec aucun des objets que possède le
Musée (2). M. Paultre, notaire, déposa également divers
objets de l'époque romaine ou médiévale trouvés à
Annoix (3).La question de l'installation du Musée était reprise,
de temps à autre, le plus souvent dans la presse locale.
On lit dans le numéro du Journal du Cher du 24 janvier
1863, sous la signature de Gustave Grandin, rédacteur
en chef de cette feuille, un article ayant pour titre: Un
Musée et une Bibliothèque à l'aide d'une loterie, qui con-
seillait de recourir à cette ressource suprême des admi-
nistrations, qui n'ont pas le courage de faire les dépenses
qui leur incombent.
(1) Registre des délibérations de la Commission du Musée, séance du
21 mars 1863.
(2) Ibid.
(3) Ibid, : Séance du... août 1863 (le quantième est restée en blanc)
DE BOURGES 309
Il est juste de dire cependant que le Conseil municipal
votait, à la date du 17 mars suivant, l'installation de la
Mairie dans les Hôtels Aubertot et d'Aubilly, de la
Bibliothèque à l'Hôtel Cujas et du Musée à l'Hôtel Lalle-
mant, vote purement de principe, on le sentait bien,
en ce qui concernait les deux derniers. On remarqueraà ce sujet un singulier détail, qui s'était glissé dans le
projet adopté. Comme on connaissait l'insuffisance de
l'Hôtel Lallemant pour recevoir toutes les collections du
Musée, on avait décidé de les diviser et de placer les
tableaux dans une galerie construite à cet effet à l'Hôtel
Cujas, qui lui-même était jugé trop petit.Dans un article paru quelques jours après, le 28 avril,
dans le Journal du Cher, et intitulé : L'Hôtel de Ville. —
Le Musée. — La Bibliothèque, M. Henri Fournier, discu-
tant le projet que venait d'adopter l'Assemblée munici-
pale, luisait observer que, puisque les deux Hôtels
étaient l'un et l'autre insuffisants, et qu'il fallait édifier
une galerie de tableaux, il serait plus rationnel, pourne pas diviser les collections, de la placer à l'hôtel
Lallemant.
La situation du Musée était à ce moment véritable-
ment étrange et bien faite pour inquiéter ceux qui s'in-
téressaient à son avenir : si son caractère d'établissement
départemental n'était plus douteux depuis les décisions
prises par le Préfet après la mort de M. Mater, c'était
cependant à la Ville seule qu'allait incomber, par suite
d'une sorte de consentement tacite et volontaire de sa
part, la charge de son installation définitive dans un local
approprié, installation dont le Département entendait
lui laisser entièrement le soin. De plus, la nouvelle orga-nisation qui venait d'être établie, avait été conçue dans
des conditions telles, qu'elle renfermait entre ses divers
rouages le germe de désaccords intérieurs qui se mani-
310 LE MUSÉE
lestaient déjà et qui étaient de nature à préjudiciel' gra-vement à son bon fonctionnement. Tout le monde
entrevoyait la nécessité impérieuse et urgente d'une
modification radicale dans ses conditions d'existence,
par l'attribution de tous les droits à qui allait avoir à
supporter les charges principales, de façon à permettreen même temps, sans avoir à lutter contre l'amour-
propre de celui qui en était l'auteur, de faire disparaîtreles fautes commises dans la nouvelle organisation éta-
blie pour cet établissement.
Ce sentiment se manifesta ouvertement dans le sein
même de la Commission, malgré la réserve que lui
imposait sa dépendance vis-à-vis du Département. Dans
une séance du 21 mars 1868, plusieurs membres expri-mèrent nettement leurs regrets que le Musée ne fût pas
purement municipal : l'un d'eux, M. Louriou, exposales avantages qui en résulteraient pour le Musée et fut
immédiatement contredit par M. Dumoutet, partisanconvaincu et intéressé du régime départemental, quis'attacha à démontrer les inconvénients d'un pareil
changement. L'incertitude dans laquelle la Commission
se trouvait par suite du retard apporté à l'examen du
projet de Règlement soumis à l'approbation du Préfet et
la gêne qui en était la conséquence pour l'administra-
tion du Musée, contribuaient à augmenter la lassitude
que tout le monde éprouvait.Le 12 août 1863, M. Paulze-d'Ivoy retourna enfin le
projet de Règlement notablement modifié. Dans la lettre
que le premier magistrat du Département joignait à son
envoi, il se plaignait de la Commission, parce qu'il esti-
mait qu'elle avait manqué aux égards qui lui étaient dus,
en insistant pour que l'on pressât l'examen du Règlemen l,
dont l'absence cependant la mettait dans l'impossibilité
de remplir sa mission. En terminant sa lettre, le Préfet
DE BOURGES 311
invitait la Commission à voter le projet tel qu'il lui était
renvoyé, ce qui indiquait très clairement qu'il n'y avait
plus à compter sur la possibilité de rien changer à la
rédaction qui avait été arrêtée. L'attitude prise par l'Ad-
ministration supérieure était donc entièrement en faveur
du Directeur et l'étude des modifications apportées au'
projet de Règlement montrerait qu'elles avaient été
principalement inspirées par le désir de renforcer l'au-
torité de ce dernier ; mais ce travail serait sans intérêt,
puisque les événements allaient frapper de caducité ce
Règlement avant même qu'il fût définitivement régu-larisé.
On se rappelle de la résistance que la création du
Musée rencontra, à diverses reprises, de la part de
quelques membres du Conseil général, qui pensaient
que c'était à la Ville de Bourges et non au Département
qu'il appartenait de poursuivre une entreprise de cette
nature. L'influence personnelle de M. Mater avait réussi
à triompher de ces obstacles et à protéger les débuts de
.la nouvelle institution, mais lui disparu, ce sentiment
défavorable qui subsistait toujours à l'état latent dans
le sein de l'Assemblée départementale, trouvant sa jus-tification dans les faits dont on vient de lire le récit, pritune force nouvelle qui allait amener inopinément la
solution que beaucoup désiraient. Il faut ajouter queles démarches personnelles de plusieurs membres
de la Commission auprès des Conseillers généraux
qu'ils connaissaient, n'y furent pas non plus étran-
gères.Le Conseil général, réuni pour la session du mois
d'août 1863, après avoir voté, dans la séance du 28 août,
le crédit habituel de 1,750 francs en faveur du Musée
(art. 15), exprima le regret que les ressources financières
du Département ne lui permissent pas de faire davan-
312 LE MUSÉE
tage. Le procès-verbal officiel contenait ensuite les
réflexions suivantes :
« Cette satisfaction ne sera entière que le jour où le
» Musée pourra être établi plus dignement dans l'un de
» ces antiques et admirables monuments de la Renais-
» sance que la Ville est heureuse de posséder, et alors,». sous quelque dénomination qu'il existe, soit comme
» Musée départemental ou municipal, le Conseil général» ne cesserait pas de s'intéresser au développement de
» cet établissement déjà si remarquable par ses richesses
» artistiques, qui doit fournir tant de sujets d'étude aux
» savants comme à tous ceux qui se vouent au culte des
» beaux-arts ou à l'exercice de quelque industrie. »
C'est à ce moment, en quelque sorte incidemment,
que la question se trouva posée :
« Un membre, dit le procès-verbal, lait les observa-
» tions suivantes : Le Musée de Bourges est l'oeuvre
» d'un homme auquel le Conseil a voulu témoigner sa
» sympajhie ; c'est donc dans ce sens qu'il faut inter-
» prêter les allocations successives qui ont été affectées
» au Musée de Bourges. Il faut s'abstenir de tout enga-» gement, autrement nous serions exposés à contribuer
» pour une quote-part dans la valeur des collections dé-• » posées dans cet établissement dont on exige le prix.
» D'autres membres pensent qu'il serait opportun de
» supprimer la qualification de départemental, qu'on a
» attribuée au Musée de Bourges ; ce serait un moyen» de rentrer dans la vérité. Cette résolution n'aurait pas» pour résultat de diminuer le secours que nous allouons,
» et dans l'avenir comme lé passé, il serait convenable
» de donner une marque de notre vive sympathie.» Se conformant aux observations qui lui ont été sou-
» mises, le Conseil décide que le libellé de l'article 15
» n'emploiera plus ces expressions : Musée départemental,
DE BOURGES 313
» mais on se contentera de dire : Musée de Bourges. (1)»Dans la délibération qui précède, on trouve, au point
de vue des faits, et surtout au point de vue des consé-
quences de droit qui en résultent, des appréciations qui
peuvent paraître très contestables. La situation du Mu-
sée n'était pas elle-même nettement tranchée ; le Dépar-
tement, s'il semblait peu disposé à rester propriétairedu Musée, ne renonçait pas cependant d'une façon posi-tive aux droits qu'il pouvait avoir ; et, à vrai dire, il s'agis-sait plutôt d'une velléité de se défaire de cette propriété,
que d'une volonté bien arrêtée, dont la réalisation eût
en réalité exigé des mesures plus formelles.
Pour se conformer à la délibération du Conseil géné-
ral, le Préfet, par un arrêté en date du 21 janvier 1864,
abrogea ses arrêtés antérieurs portant institution de la
Commission administrative et de surveillance du Musée
et nomination de ses membres, changea l'ancienne
appellation de Musée départemental en celle de Musée de
Bourges, et enfin remit l'administration de ce dernier à
l'autorité municipale.Dans le rapport que ce magistrat adressa au Conseil
général pour la session de 1864, après avoir parlé de
l'arrêté dont il vient d'être question, il s'exprimait ainsi :
« En prenant ces mesures, je crois être entré dans les
» vues du Conseil général. Toutefois, Messieurs, je n'ai
» point entendu faire acte de cession de propriété à la
» Ville de Bourges, j'ai réservé, au contraire, à cet égard
» les droits du Département.
» Veuillez remarquer, Messieurs, [que] la fondation
» du Musée résulte d'un arrêté pris le 30 juin 1834, par
» M. le comte de Lapparent, alors préfet du Cher. Cet
» établissement s'est formé, il a atteint son développe-
(1) Procès-verbaux.... Conseil général, année 1863, p. 33.
314 LE MUSÉE
» ment actuel, en grande partie, à l'aide des ressources
» que le Département y a consacrées et que l'on peut» évaluer à 40.000 francs au moins. Il est, en un mot, la
» propriété du Département. Si donc votre intention est
» d'en faire l'abandon à la Ville de Bourges, il sera né-
» cessaire que vous le déclariez formellement par une
» délibération spéciale. »
La question fut examinée par l'Assemblée départemen-tale dans la séance du 27 août 1864 (1). Le procès-verbalrelate en ces termes la discussion qui se produisit et la
résolution qui fut votée :
« Un .membre dit que la situation de la Ville de
» Bourges, relativement au Musée, est incertaine et doit
» être nettement définie. L'Autorité municipale admi-
» nistre le Musée, mais est-ce à titre de propriétaire ou
y>de dépositaire provisoire? Il serait temps que cette
» incertitude prît fin. Si elle était reconnue propriétaire,» la Ville prendrait des mesures" pour faire rentrer au
» Musée des objets qui en ont été retirés, l'augmen-» ter et améliorer ses collections.
» Un autre membre répond que le Musée a été créé par» la volonté, les efforts et l'âme d'un seul homme (2), l'un
» de nos concitoyens, dont le nom n'est pas encore en oubli.
» Les collections réunies, il a demandé une installation.
» La Ville a pris le Musée sous son patronage. Quant au
» Conseil général, il n'a jamais considéré que ce Musée
» fût une propriété départementale. Les subventions
» qu'il s'est toujours empressé de lui donner n'ont été
» que des témoignages de sympathie.» Le membre propose au Conseil général de prendre
» la résolution suivante :
(1) Procès-verbaux.... Conseil général, année Ï86'i, p. 100.
(2) Il était impossible de résumer d'une façon plus vraie l'oeuvre de M. Mater.
DE BOURGES 315
» Le Conseil général déclare n'avoir jamais eu Tin-
» tention de revendiquer aucun droit de propriété ou
» autre sur le Musée. En tant que de besoin, il renonce,
» au profit de la Ville de Bourges, à toute prétention à
» cet égard, se réservant d'ailleurs de continuer àT'ins-
» titution les témoignages de sympathie qu'il n'a cessé
» de lui donner. »
La Ville s'empressa d'accepter l'abandon consenti en
sa faveur, ainsi que le constate l'article 91 du budget de
1864 (1) :
(( M. le Maire expose que le Conseil général, dans sa
» séance du 27 août dernier, a adopté la résolution sui-
» vante qui explique et complète celle qu'il avait prise» dans sa session de 1863... (Suit le texte de la résolu -
» tion qui a été donné plus haut.)» La question de propriété du Musée étant ainsi com-
» plètement résolue, c'est à la Ville qu'il appartient» désormais de pourvoir à la gestion et aux dépenses de
» cet établissement, lesquelles dépenses seront atténuées
» du montant de l'allocation de 1,750 francs, faite par le
» Conseil général, et des subventions que la Ville pourra» obtenir de l'Etat. »
Ici se termine la première période de l'existence du
Musée : c'est à l'Administration départementale et au
Conseil général que revient l'honneur incontestable
d'avoir décidé sa fondation, puis, par son concours
fidèle, par son appui large et généreux, par la liberté
éclairée qui fut laissée à l'homme dévoué qu'une heu-
reuse fortune mit à sa tête, d'avoir facilité son dévelop-
pement et assuré son succès.
Dans cette oeuvre de patronage éclairé, qui fut le sien
vis-à-vis du Musée, longtemps le Département marcha
(1) Procès-verbaux.... XXV, n° 239.
316 LE MUSÉE DE BOURGES
côte à côte avec la Ville, puis quand il pensa que l'ad-
ministration d'un établissement de ce genre concernait
Bourges avant tout, et qu'une direction unique serait
préférable à l'espèce de condominium existant, ce ne
fut de sa part ni l'abandon d'une entreprise intéressante,ni la désertion d'une création due à son initiative. Sa
bienveillance, conformément à sa promesse, lui resta
largement acquise, et si dans la seconde partie de cette
étude le Département n'apparaît plus comme le maître
du Musée, celui-ci continuera, en tant qu'établissement
municipal, à recevoir de lui un aide financier précieuxet une protection morale toujours prête à se manifester,comme au temps où il était le Musée du département du
Cher.
PIECES ANNEXES
Inventaire des tableaux et gravures ou cadres et autres
effets d'art ou sciences déposés au district de Bourges (1).
1° Un grand tableau représentant une fête donnée à
Rome par le cardinal de la Rochefoucault, alors
ambassadeur du Pape [I].
2° Trois gravures encadrées, partie noire, partie dorée,
représentant l'une l'étude qui arrête le tems, l'autre
des Canadiens pleurant sur le tombeau de leurs
enfants, le dernier Erminie et le Berger.
3° Deux autres plus grandes représentant, l'une Péné-
lope et Ulysse, l'autre Coriolan et. Véturie.
4° Deux petites boussoles et trois lorgnettes.
5° Une grande lunette d'approche [II].
6° Un atlas,
7° Un tableau de la Nativité (de Boucher), 5 pieds de
haut [VIII].
8" Un autre représentant Saint Jean-Baptiste (du
même) [VIII].
9° Un autre représentant un Crucifiement, par Pli.
Champagne [III].
10° Un autre représentant une Descente de Croix [IV].
11" Quatre gravures encadrées de 20 pouces sur 24
représentant : la première, le Garde-Chasse [LXV],
la deuxième, le Fils puni [XII], la troisième, la
Dame bienfaisante [XIV], la quatrième, le Paraly-
(1) Arch. Cher, Q 309. Les chiffres romains placés entre crochets se réfèrent
à l'Inventaire de l'an xi.
318 LE MUSÉE
tique [XV], deGreuze, les trois dernières et le pre-mier de Benazech.
12° Trois autres de Van Dyck, représentant la famille
de Charles Ier, Roy d'Angleterre, gravée par
Strange(?), 15 pouces sur 9 [XVI].13° Une autre de Rubens, représentant Saint-Ambroix
et Théodose, gravé par Schinuros (?), 18 poucessur 12 [XVIII].
14° Une autre représentant Agard et Abraham de Dye (?),
gravé par Porporati [LXI].15° Un Moyse tenant les tables de la loi de Champagne,
gravé par Nanteuil [XXXI].
16° Une tempête |LXII], les baigneuses [XXIII] et une
vue de Vernet, gravée par Battechou (?), 28 poucessur 24.
17° La demande acceptée (de Lépicié), gravée par Bervic
[XI].
18° Ménage de campagne, Benasech, gravé par Junior
[LXIV1.
19° Le Gâteau des Rois [XVIII], l'Accordée de village
[XIII], la Malédiction paternelle [XIX], de Greuze,
gravés par Flipart,29° Six gravures de Beauvarlet, représentant l'histoire
d'Hester [IX].21° Un Bossuet de Rigaud, gravé par Drevet [XXIX].
22° Jardin d'amour de Rubens, gravé par Lempereur
[XXII].23° La mort du général Wolf, gravé par Woollett [XX].24° L'heureux âge de West, gravé par Green [LXV].25° La lecture du ménage de campagne de Greuze, gra-
vée par Pitre [XXI].26° La mort d'Abel de West, gravée par Porporati [LXVI].27° Deux confidences de Vanloo, gravées par Beauvarlet
[LXII].
DE BOURGES 319
28° Achille submergé dans le Xanthe de Déliais, gravé
par Parizeau [XXVII].
29° Jupiter et Calixto [XXIV] et Vénus endormie du
Poussin [XXV], gravés par Daullé.
30° Alexandre et la famille de Darius de Lebrun, gravé
par Audran [LXIhis]. — Le petit chien qui.. .
31° Les Délices [XXX] et les Soins maternels [XXXII],
peints et gravés par Ville.
32° Deux gravures enluminées et encadrées, de Janinet
[LXIII].33° Un Christ, de Moriet, gravé par Chauffard [XLV].
34° Lycurgue blessé dans une sédition, épreuve de Co-
chin avant sa réception à l'Académie.
35° Une Nativité de Cossley, gravée par Hard [XXXIV].36° Un tombeau de J.-J. Rousseau, par Moreau [XLIX].37° La mort de Marc Antoine, de Battoni, gravée par
Ville [LXIV].38° Une Sainte Geneviève de Vanloo, gravée par Baco-
tion [LVII].39° Dix petites gravures de Teniers, à peu près de huit
pouces sur six [LVIII].40° Un Franklin couronné [LUI], un Rousseau et un
Voltaire [XXXV], un dessin original de Huet [LU],
deux ruines de Demachy (LIX], une petite gravurede Parizeau, la mort du général Wolf par West
[XX], cinq cadres ovales contenant de petites gra-
vures, un tombeau de Rousseau [XLIX], un de
Mongomery [XLVIII,.41° Le généra] Washington [XIX], Conclusion de la
campagne de 1781 [XVII] de le Paon, gravés parLemire.
42° Lafayette en Virginie, idem.
43° Un Mucius Scevola d'environ 20 pouces sur 15
[XXVI].
21
320 LE MUSÉE DE BOURGES
44° Le petit chien qui secoue l'argent et les pierreries
[XXXIII].45° Le couronnement de Voltaire [L].Trois autres petites gravures encadrées.
Trois boîtes de remèdes envoyées par le Gouvernement.
Je soussigné, Gardien du Muséum, reconnais que les
effets désignés ci-dessus et des autres parts m'ont été
remis par le secrétaire du district de Bourges ; à l'excep-tion des articles deux et trois qui ont été remis aux héri-
tiers de C. Chevenon condamné. Dont décharge à
Bourges le treize frimaire de l'an iv de la République
(3 décembre 1795).
CHAMPION.