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  • 1

    Le Coran : texte rvl ou texte traduit ?

    Mohamed Ali ABDEL JALIL

    Universit dAix-Marseille

    [email protected]

    Les musulmans ont une foi solide dans lide que le Coran est un

    texte rvl au prophte Muammad par Dieu lui-mme mot pour

    mot et lettre pour lettre par lintermdiaire de larchange Gabriel .

    Cependant, les mots Dieu , rvl et archange sont des

    mots ambigus.

    Au point de vue ontologique, Dieu est le principe suprme de

    lexistence et de lactivit universelles : soit comme substance immanente

    des tres, soit comme cause transcendante crant le monde hors de lui,

    soit comme fin de lunivers (le moteur immobile dAristote).1 Les trois

    ides ci-dessus sont rsumes ainsi par VACHEROT : Dieu est ltre des

    tres, la cause des causes, la Fin des fins : voil comment il est le

    vritable Absolu. 2

    Au point de vue logique, Dieu est le principe suprme de

    lordre dans le monde, de la raison dans lhomme et de la correspondance

    entre la pense et les choses.3

    Au point de vue moral, Dieu est ltre personnel tel quil soit,

    par son intelligence et sa volont, le principe suprme et la garantie de la

    moralit.4

    1 LALANDE, Andr, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, Librairie Flix

    Alcan, Paris 1926, p. 162. 2 VACHEROT, tienne, Le Nouveau Spiritualisme, p. 389.

    3 LALANDE, Ibid., p. 163.

    mailto:[email protected]

  • 2

    Au point de vue matriel, Dieu est un tre personnel, suprieur

    lhumanit, qui donne des ordres et fait des promesses, auquel on

    adresse des prires et qui les exauce. Il est gnralement conu comme

    lalli et le protecteur dun groupe social auquel il se manifeste et qui lui

    rend un culte. (Anctre, chef guerrier, lgislateur, juge, librateur, etc.).

    Dans lantiquit, ce groupe est ethnique. (Ex. : Dieux grecs et dieux

    troyens, Dieu dIsral).5 Le concept de Dieu chez les musulmans est

    essentiellement du type matriel avec une lgre diaprure logique et

    morale. Dans ce sens, Dieu , comme abstraction du chef, peut parler

    son peuple considr comme khayr umma ukhrijat li-n-ns [la

    meilleure communaut jamais produite aux hommes] (trad. BERQUE)

    (verset III, 110). Il peut tre aussi limage intellectuelle qui gouverne une

    socit (Dieu social).

    En termes de psychologie analytique, Dieu , en tant

    quarchtype psychique hypothtique et quinconscient inconnaissable,

    peut dsigner linconscient collectif qui sindividualise dans linconscient

    personnel.

    Pour Carl Gustav JUNG (1875-1961), Dieu est la puissance du

    destin personnel. Je sais, souligne-t-il, que je me trouve, de toute

    vidence, en face dun facteur inconnu que jappelle Dieu en

    consensus omnium ( quod semper, quod ubique, quod ab omnibus

    creditur [ce qui est cru toujours, partout et par tous]). [] jappelle

    Dieu la puissance du destin sous son aspect positif comme sous son

    aspect ngatif et dans la mesure o son origine nest pas vrifiable ; cest

    4 LALANDE, Ibid., p. 165.

    5 LALANDE, Ibid., p. 164.

  • 3

    un dieu personnel puisque mon destin signifie surtout moi-mme,

    surtout lorsquil me parle sous la forme de la conscience comme une vox

    Dei avec laquelle je puis mme mentretenir et discuter. 6 Dieu est

    pour JUNG le symbole des symboles.7

    Au point de vue thosophique, Dieu peut tre conu comme la

    Conscience Une et Universelle non personnelle qui irradie dans tout ce

    qui existe. Ainsi, la thosophie rejette toute conception dun dieu

    personnel qui coute des prires et qui y rpond.

    Fondement des religions abrahamiques, la rvlation dsigne

    un acte pouvant sexercer suivant divers modes, par lequel Dieu ou la

    divinit, se manifeste lhomme et lui communique la connaissance de

    vrits partiellement ou totalement inaccessibles la raison .8 Ainsi, les

    croyants en une religion prtendent que les connaissances constituant leur

    religion manent dun tre transcendant et inconnaissable.

    Selon lusage coranique, ce concept de rvlation ( al-way ,

    du verbe wa , sens lexical : informer secrtement et rapidement ,

    inspirer ) couvre un champ smantique trs vaste. Il existe plusieurs

    types de rvlation :

    1- Inspiration instinctive lanimal : verset XVI, 68 ( wa aw

    rabbuka ila an-nali ani ttakhidh mina l-jibli buytan wa

    mina sh-shajari wa mimm yarushn [Ainsi ton Seigneur

    rvle-t-Il aux abeilles : Accommodez-vous des demeures

    partir des montagnes, des arbres et des ruchers] (trad. BERQUE)).

    6 E. A. BENNET, Ce que Jung a vraiment dit, Grard, 1973.

    7 JUNG, Carl Gustav, Essai dexploration de linconscient in Lhomme et ses symboles, Paris,

    Robert Laffont, 1964, 18-103. 8 Le CNRTL du CNRS (le Centre national de ressources textuelles et lexicales),

    http://www.cnrtl.fr/definition/revelation.

    http://www.cnrtl.fr/definition/revelation

  • 4

    2- Inspiration inne lhomme ( ilhm fir ) : verset XXVIII, 7

    ( wa awayn il ummi ms an arihi [Nous inspirmes

    la mre de Mose : Allaite-le] (trad. BERQUE)).

    3- Suggestion dun homme un autre : verset XIX, 11 ( fa-

    kharaja al qawmih mina l-mirbi fa-aw ilayhim an

    sabbi bukratan wa ashyy [Il se produisit hors du temple

    son peuple, auquel il fit entendre davoir exalter soir et matin

    la transcendance] (trad. BERQUE)).

    4- Tentation des diables lhomme : verset VI, 121 ( wa inna

    ash-shayna la-yna il awlyihim li-yujdilkum [Les

    satans inspirent leurs liges de vous porter la contestation.]

    (trad. BERQUE)).

    5- Rvlation par Dieu aux Aptres de Jsus : verset V, 111

    ( wa idh awaytu ila al-awryyna an min b wa bi-rasl

    [et que jinspirai aux aptres : Croyez en Moi et Mon

    envoy ] (trad. BERQUE)).

    6- Ordre donn par Dieu au rgne minral, aux plantes, au

    ciel : verset XLI, 12 ( wa aw f kulli samin amrah [et

    pour chaque ciel en inscrivit lordonnance] (trad. BERQUE)) ; et

    versets XCIX, 4 & 5 ( yawma-idhin tuaddithu akhbrah bi-

    anna rabbaka aw lah [ce Jour-l elle rapportera sa

    chronique car ton Seigneur lui fit rvlation.] (trad. BERQUE)).

    7- Ordre donn par Dieu aux anges : verset VIII, 12 ( idh y

    rabbuka ila al-malika [lors ton Seigneur inspire aux anges]

    (trad. BERQUE)).

    8- Rvlation du Coran par Dieu au prophte Muammad :

    verset XII, 3 ( nanu naquu alayka asana al-qaai bi-m

    awayn ilayka hdha al-qurna [Nous te narrons la

    narration la plus belle en te rvlant ce Coran] (trad. BERQUE)).

  • 5

    Larchange Gabriel (mot qui vient des termes hbreux

    [gabar], tre fort ou puissant, et [El], Dieu)9 est gnralement le Saint-

    Esprit selon lislam. Le Saint-Esprit ou lEsprit saint (concept proche de

    linconscient collectif) est, selon le christianisme, lEsprit de Dieu et la

    troisime personne de la Trinit. Il est aussi appel lAmour du Pre et du

    Fils. De ce fait, il peut tre compris comme un lien entre linconscient

    et lindividu ou le groupe. Ltymologie hbraque du mot Gabriel (le

    nom masculin [geber] signifie homme)10

    laisse entendre que cet ange

    est le symbole dun homme fort qui exerce le mtier dun facteur, qui

    transmet le courrier depuis linconscient jusquau conscient.

    Compte tenu de ce qui prcde, nous pouvons conclure que cette

    phrase gnrique et allgorique ( un texte a t rvl par Dieu un

    prophte travers un ange ) devrait tre interprte en tant que

    mtaphore.

    Dieu (chef) donne un ordre hirarchique, envoie un message

    (texte sacr) son messager (assistant, reprsentant) de manire

    secrte (rvlation) par le biais dun ange (facteur) pour que ce

    messager le transmette aux subordonns (peuple, arme). Cet ordre, ce

    message aurait t prpar auparavant par une quipe de spcialistes en

    fonction des considrations sociopolitiques partir dautres messages

    prcdents (aussi bien en langues autochtones quen langues trangres).

    Au point de vue linguistique, il est vident que le Coran est un

    texte et que tout texte est un produit humain par excellence. Et dun point

    9 Gabriel meaning, Gabriel etymology , site web Abarim Publications :

    http://www.abarim-publications.com/Meaning/Gabriel.html#.VWLp7vmUc1I. 10

    Ibidem.

    http://www.abarim-publications.com/Meaning/Gabriel.html#.VWLp7vmUc1I

  • 6

    de vue littraire chaque texte est unique 11

    . Le texte est toujours

    unique en son genre 12

    . Aussi les musulmans prtendent-ils que leur

    texte sacr est inimitable et le seul message divin authentique.

    Le statut du texte sacr, en loccurrence le Coran, en tant que texte

    sans auteur prcis et connu, ressemble au statut du folklore. Le folklore

    est le produit dun peuple. De mme, lauteur du Coran est le peuple

    arabe. Le Coran est lorigine la voix des Arabes en tant quethnie, et par

    la suite la voix dAllah (Dieu des Arabes). Lon se rappelle bien le vieil

    adage latin : Vox populi, vox Dei [La voix du peuple est la voix de

    Dieu].

    Ainsi, on peut considrer le Coran comme le produit dun groupe

    ethnique. Le texte arabe du Coran peut tre considr comme un texte

    traduit en arabe avec adaptation partir dautres langues diffrentes, pour

    plusieurs considrations.

    Il existe dans le texte arabe des traces (mots et locutions) dautres

    langues non arabes, ce qui indique, entre autres, que le texte a t traduit

    en sens descendant (traduction aval), dune (des) langue(s)

    dominante(s) vers une langue domine ou un idiome vernaculaire

    (larabe). La traduction en sens descendant est une traduction

    sourcire qui est plus fidle au texte original (par opposition la

    traduction en sens ascendant , vers lamont, la traduction cibliste, qui

    11

    PAZ, Octavio, Traduccin: literatura y literalidad, Barcelona, Tuskuets Editor, 1971, p. 9.

    12 RIFFATERRE, Michael, La production du texte, Paris, Seuil, 1979, p. 8.

  • 7

    est une traduction depuis une culture domine vers une culture

    dominante, o il ny a pas de trace du texte de dpart).13

    Les contemporains de Muammad dsiraient connatre les ides

    qui influenaient leur vie (nous trouvons cela dans les versets qui

    demandent aux Arabes, pour vrifier lauthenticit du Coran, de consulter

    les critures, et surtout apocryphes (textes de dpart), ainsi que les gens

    du Livre). Normalement cest le traducteur qui demande au lecteur de se

    rfrer au texte source pour vrifier lauthenticit de sa traduction. Mais

    la situation conflictuelle a exig de ne pas dclarer que le texte a t

    traduit. Si Muammad et son quipe avaient rvl ce secret, tout leur

    projet national aurait subi un chec. Lobjectif dlaborer le Coran tait

    de prouver aux Juifs et aux chrtiens bionites que les Gentils Arabes (les

    paens arabes, al-Ummyn) pouvaient avoir un livre sacr et tre ainsi sur

    un pied dgalit avec les deux autres religions monothistes. Srat ibn

    Hishm rapporte que les Juifs de Yathrib (actuellement Mdine), en tant

    que gens de Livre (dtenteurs dun livre sacr), narguaient les Arabes

    paens qui navaient pas de livre sacr et se moquaient de leur paganisme.

    Le complexe dinfriorit de la communaut paenne Arabe a donc

    pouss celle-ci, travers Muammad, imiter les gens du Livre (ahl al-

    kitb) en traduisant la tradition judo-chrtienne sans en avoir rvl la

    source pour ne pas susciter contre les paens plus de moquerie de la part

    des Juifs, pour ne pas donner aux Juifs le sentiment de fiert dtre

    lorigine et pour ne pas renforcer le complexe de supriorit chez les gens

    du Livre contre les Arabes paens.

    13

    BELLOS, David, Le poisson et le bananier : Une histoire fabuleuse de la traduction, traduit

    par : Daniel LOAYZA, Flammarion, 2012, p. 181.

  • 8

    Les Arabes contemporains du Coran, et mme les plus proches du

    Coran (comme Ab Bakr, Umar et Ibn Abbs, selon lItqn dAs-

    Suy), nont pas pu comprendre certains mots (les hapax legomenon

    [gharb] dont on ne connat quune seule occurrence), bien que le texte ait

    t rdig dans leur langue maternelle.

    Ces nouveaux mots hapax ntaient pas utiliss par les Arabes

    prislamiques ni les Arabes contemporains du Coran ; ce qui signifierait

    que cest le Coran qui les a emprunts ou les a mis en utilisation, cest--

    dire cest lui qui les a utiliss le premier en langue arabe. Lune des

    preuves que cest un emprunt tranger cest le fait quil peut se lire de

    plusieurs manires. Ex. : le mot () [des lieux de cultes] (verset XXII, 40) se lit selon 17 manires : alawt ; uluwt ; ilawt ; ulawt ;

    alwt ; ult ; ulta ; uluwath ; ulth ; ulawth ; ilawth ; ulb ;

    alt ; ull ; alth ; ulth ; ilwth (ilwth selon la lecture de

    Ikrima et Mujhid, selon Ibn Aya AL-ANDALUS dans Al-Muarrar

    al-wajz). Ainsi ce terme est vu par les exgtes anciens A-ABAR (m.

    923), al-Baghaw (m. 1116/1122) et al-Qurub (m. 1273) comme une

    transcription dun mot hbreu. Et ltymologie a disparu des exgses

    ultrieures ! Qui plus est, lun des plus fiables transmetteurs de hadiths,

    a-ak (m. aprs 719), aurait dit, selon al-Qurub, je ne sais pas si

    la consonne "d" est vocalise en fata ou en amma [ wa l adr a

    fatu -ad am ammuh ], i. e. il ne savait pas si ce mot se prononce

    alth ou ulth.

    Les mots nouveaux ne refltaient pas les milieux socioculturels

    mecquois et mdinois qui ont abrit le Coran et ne rpondaient pas aux

    besoins des Arabes (tels que istabraq, jahannam, sundus, firdas, ir,

    etc.), ce qui signifie que ce nest pas lusage de la communaut

  • 9

    linguistique qui les a introduits, mais cest la traduction dun ou des

    textes, traduction qui reflte la culture source.

    Le Coran lui-mme souligne quil est un livre mufaal (dcrit en

    dtail) (versets XLIV, 3 et 44) et muarraf (expliqu et clairci en arabe,

    dont la forme est transforme en une autre14

    ) (versets XVIII, 54 et XX,

    113) en langue arabe pour que les locuteurs arabes puissent comprendre.

    Le Coran souligne que son contenu se trouvait dj nonc dans les

    anciennes critures, les rouleaux dAbraham et de Mose (versets XXVI,

    196 et LXXXVII, 18 et 19).

    Muammad dit Uqba ibn mer (selon Musnad Amad) :

    Veux-tu que je tenseigne trois sourates dj nonces dans le Torah,

    lvangile, le Livre des Psaumes [Zabr] et le sublime Livre du

    discernement al-furqn [le Coran] ? Et Muammad lui fit lire les trois

    sourates courtes (CXII, CXIII et CXIV) : la sourate Al-Ikhls [la puret

    du dogme], la sourate Al-Falaq [laube naissante] et la sourate An-Ns

    [les Hommes].

    Les contemporains du Coran affirmaient continuellement lide que

    ce texte ntait labor qu partir des lgendes des anciens, quils les ont

    dj entendues et que sils le voulaient, ils en diraient autant (verset VIII,

    31).

    14

    Lisn al-arab: : . [arrafa qqc. : le mettre dans un autre aspect, comme sil tait dtourn dune forme pour en assumer une

    autre.]

  • 10

    Llaboration du Coran (munajjam : espac, tal dans le temps,

    squenc en 23 ans) est plus proche dune rdaction lente que dune

    rvlation rapide. Il sagit dune traduction, rdaction, rvision,

    correction, reformulation et adaptation du texte aux besoins des

    rcepteurs. Sinon, pourquoi la rvlation (qui est cense tre plus rapide

    que lclair) sest interrompue ou sest ralentie des moments critiques

    (lhistoire de ifk [les discours mensongers] ; la question de r [lme] ;

    le dfi des Arabes demandant Dieu quil fasse pleuvoir des pierres sur

    eux et quil leur inflige quelques terribles tourments si le Coran tait vrai

    (verset VIII, 32))15

    ? Ne pas pouvoir rpondre sur-le-champ des

    questions sur la nature de lesprit et attendre des jours ou des semaines

    pour donner une rponse qui ne dpasse pas une phrase, cela indique que

    le Coran est le rsultat dune recherche plus que dune simple rvlation.

    La fonction du Coran tait de contribuer lmergence et la

    reconnaissance de la langue arabe, fonction qui ressemble beaucoup

    celle de la traduction de la Bible en langues vernaculaires europennes

    pour la reconnaissance de ces nouvelles langues vernaculaires, ce

    quaffirment Pascale CASANOVA dans La rpublique mondiale des

    lettres16

    , Jean DELISLE et Judith WOODSWORTH, dans Les traducteurs

    dans lhistoire17

    , et Nol J. GUEUNIER dans Les traductions de la Bible

    15

    La rponse tardive du Coran ce vritable dfi, voque dans la sourate al-Anfl (32 et

    33), tait vasive, justificative, logiquement faible et contraire la loi karmique et dautre

    versets tels : (XCIX, 7 et 8 : Quiconque aura alors fait le poids dun atome de bien le verra ;

    et quiconque aura commis le poids dun atome de mal le verra.) ; (XXXIX, 7 : Aucune me

    ne rpondra des fautes dune autre me.) ; (LII, 21 : chacun deux tant tenu responsable de

    ce quil aura acquis.). Voici la rponse : Et ils disent aussi : Dieu ! Si cest l la Vrit

    que Tu nous envoies, fais pleuvoir sur nous des pierres, ou inflige-nous quelques terribles

    tourments ! Mais Dieu ne saurait les chtier tant que tu te trouves parmi eux ; de mme quIl

    ne saurait les punir tant quils demandent Son pardon ! 16

    CASANOVA, Pascale, La rpublique mondiale des lettres, ditions du Seuil, 1999, pp. 81

    sq. 17

    DELISLE, Jean, et WOODSWORTH, Judith, Les traducteurs dans lhistoire, Presses de

    lUniversit dOttawa, 1995.

  • 11

    et lvolution du malgache contemporain 18

    . Le Coran, comme tout autre

    nonc, a pour fonction de dire : Nous sommes l et nous ne sommes

    pas comme vous . Ce quaffirme David BELLOS19

    pour la langue en

    gnral en disant : Le langage est ethnicit. Lethnicit est la faon dont

    un groupe social se constitue et sidentifie. [La langue] laisse chapper

    un flot de messages sur son appartenance rgionale et sociale, une faon

    richement nuance de dire autrui qui vous tes. [] Toute langue dit

    votre auditeur qui vous tes, do vous venez, o vous vous situez. []

    Lun des buts fondamentaux, et peut-tre originels, de la parole est dtre

    un instrument de diffrenciation non seulement dindiquer sous forme

    distincte votre provenance, votre rang, votre clan, votre bande, mais de

    proclamer : Je ne suis pas vous mais moi. [] Lutilit premire de

    la parole humaine fut daffirmer la diffrence . Cest pourquoi, selon

    lItqn dAs-Suy, le Calife Umar affirme lide que Tout ce que lon

    dit dans le Coran est juste (awb) tant que lon ne substitue pas

    chtiment pardon [cest--dire tant que lon ne commette pas de

    contresens]. En dautres termes, le but du Coran, selon Umar (et selon

    le Coran lui-mme en insistant sur son caractre arabe et sur

    lintimidation), na pas t de communiquer un message autrui, mais de

    modifier les relations avec les autres, de modifier lquilibre des

    pouvoirs, daccder au centre, pour reprendre les termes de Pascale

    CASANOVA, de devenir dominant au lieu de domin. Voil ce que dit

    BELLOS : Le simple fait de la diversit linguistique suggre trs

    fortement que la parole nest pas apparue pour permettre de

    communiquer avec des membres dautres groupes de congnres. [] De

    mme, il ny a aucune raison particulire de croire que le langage ait

    18 GUEUNIER, Nol J., Les traductions de la Bible et lvolution du malgache

    contemporain , Revue Archives de sciences sociales des religions, ditions de lEHESS,

    juillet-septembre 2009, 54e anne, n 147, pp. 81-103.

    19 BELLOS, David, Le poisson et le bananier : Une histoire fabuleuse de la traduction, traduit

    par: Daniel LOAYZA, Flammarion, 2012, Op. Cit., pp. 356 et 357.

  • 12

    surgi pour favoriser la communication entre membres dun mme groupe.

    Car ils communiquaient dj entre eux avec leurs mains, leurs bras,

    leurs mimiques, leurs corps. De nombreuses espces procdent

    visiblement ainsi. [] Le bruit vocal tablit des liens entre personnes qui

    doivent ou dsirent tre en contact dune faon ou dune autre, pour une

    raison quelconque. [] Le but des actes de communication nest pas la

    transmission dtats mentaux de A B (et moins encore la transmission

    dinformation), mais ltablissement, le renforcement et la modification

    de relations interpersonnelles immdiates. [] Le langage est un mode

    humain de relation avec dautres tres humains. 20

    La ressemblance frappante entre le contenu, et parfois le style, du

    Coran et les textes sacrs prcdents aussi bien canoniques

    quapocryphes nous indique que ces derniers ont servi de source ou de

    texte de dpart pour laborer le texte coranique.21

    Voici un exemple sur la ressemblance flagrante entre le Coran et

    les anciennes critures. Le verset coranique XX, 12 est quasi identique

    avec le verset biblique 3 : 5 de lExode.22

    (21 ).

    Fa-khla nalayka innaka bi-l-wdi l-muqaddasi uw. (Coran, h, 12)

    20

    BELLOS, Ibid. pp. 354 et 355. 21

    AZZI, Joseph [Ab Ms AL-ARR], Le Prtre et le Prophte : aux sources du Coran,

    trad. de larabe (Qiss wa nab) par Maurice S. Garnier, Maisonneuve et Larose, Paris 2001. Lide que le Coran est luvre du prtre nazaren judo-chrtien Waraqa ibn Nawfal a t

    dveloppe par Joseph BERTUEL dans LIslam : Ses vritables origines (2008). 22

    AFAD, Muammad, Al-wd al-muqaddas uw wa al-lugha al-ibryya [ Le Val

    sacr uw et lhbreu ], site web Al-iwr al-Mutamaddin, n 2657, 25/05/2009,

    http://www.ahewar.org/debat/show.art.asp?t=0&aid=172923. SADW, Al, Al-wd al-

    muqaddas uw, khaa fi t-tarjama [ Le Val sacr uw, une erreur de traduction], blog

    Iktashif aqqat al-Islm, 2011, http://117n.blogspot.fr/2011/12/blog-post_17.html.

    http://www.ahewar.org/debat/show.art.asp?t=0&aid=172923http://117n.blogspot.fr/2011/12/blog-post_17.html

  • 13

    Retire tes sandales. Tu te trouves dans le Val sacr de Tuw* [NDT : Tuw,

    mot nigmatique] (Coran, trad. BERQUE).

    , - -- , - .23

    Shl nalkh mal rijlkh k hamkom ashr ata omd lf admt qodesh

    huwa.

    put off thy shoes from off thy feet, for the place whereon thou standest is

    holy ground. [] (Exodus Chapter 3)24

    te tes souliers de tes pieds, car le lieu sur lequel tu te tiens est une terre

    sainte. [] (Exode 3 : 5, trad. Louis SEGOND).

    Un hadith souligne lopration de la traduction de lvangile

    depuis lhbreu vers larabe ralise par Waraqa ibn Nawfal, le cousin de

    Khadija, la premire pouse du prophte de lislam, et probablement le

    matre spirituel de ce dernier, dautant plus que, selon AL-BUKHR,

    lorsque Waraqa est dcd, la rvlation sest tarie .25

    Le hadith

    rapport par AL-BUKHR dit26

    :

    "

    ]...[ .

    ".

    23

    Exodus Chapter 3 , site Mechon Mamre, http://www.mechon-

    mamre.org/p/pt/pt0203.htm. 24

    Ibidem. 25

    ai Al-Bukhr,

    http://library.islamweb.net/newlibrary/display_book.php?bk_no=0&ID=2&idfrom=1&idto=6

    &bookid=0&startno=2. 26

    ai Al-Bukhr, volume 4, livre 55, n 605.

    http://www.mechon-mamre.org/p/pt/pt0203.htmhttp://www.mechon-mamre.org/p/pt/pt0203.htmhttp://library.islamweb.net/newlibrary/display_book.php?bk_no=0&ID=2&idfrom=1&idto=6&bookid=0&startno=2http://library.islamweb.net/newlibrary/display_book.php?bk_no=0&ID=2&idfrom=1&idto=6&bookid=0&startno=2

  • 14

    Ensuite Khadija le conduisit chez son cousin du ct de son pre

    Waraqa ibn Nawfal ibn Asad ibn Abd al-Uzz ibn Quay. Celui-ci avait

    embrass le christianisme pendant la priode prislamique, et il avait pris

    lhabitude de transcrire lcriture hbraque. Il copiait toute la partie de

    lvangile des Hbreux que Dieu avait voulu quil transcrivit. Waraqa

    tait g et il a perdu la vue. [] Ensuite Waraqa ne tarda pas dcder

    et la rvlation se tarit .

    Un autre hadith attribu au plus important scribe de Mahomet

    montre les sources trangres ventuelles du Coran. Selon Zayd Ibn

    Thbit : LEnvoy de Dieu dit : Il me vient des crits [kutub], et je ne

    veux pas que tout un chacun les lise, peux-tu apprendre lcriture de

    lhbreu, ou bien il dit du syriaque ?. Je dis : Oui, et je lappris en dix-

    sept-jours !27

    Le glissement dune personne lautre dans un mme verset ou

    phrase (al-iltift [lnallage]) indique que le texte est ou bien compil

    partir dautres textes diffrents ou bien traduit de manire orale (ex. :

    versets XXII, 5, 8 et 10).

    On trouve dans le Coran lutilisation de plusieurs mots pour

    dsigner presque un mme sens (tarduf [synonymie]), un procd que

    dnie lislamologue rformateur et lexgte Syrien contemporain

    Muammad Sharr (n en 1938) qui prcise que la synonymie se trouve

    dans la posie et non pas dans le Coran, parce que la langue coranique

    fait la distinction entre les synonymes. Linguistiquement parlant, les

    champs smantiques de deux synonymes ne sont point identiques. Lide

    27

    Ibn Askir, Trikh Dimashq [I-LXXX, d. Muibb ad-Dn al-Amraw, Beyrouth, Dr al-

    Fikr, 1995-2000], XIX, p. 303. Voir aussi : A-abaqt al-kubr dIbn Sad et Musnad dIbn

    anbal, textes numriques.

  • 15

    que la synonymie nexiste pas dans le Coran signifierait que chaque mot

    est calcul selon des considrations sociolinguistiques. Ce procd se

    ralise le mieux lorsque le texte est traduit. Cest le traducteur qui pse

    ses mots avant de les choisir et chez lui la synonymie se trouve un degr

    minime.

    David BELLOS affirme que la norme langagire laquelle les

    traducteurs de romans anglais se conforment (consciemment ou non)

    nest pas identique lusage des romanciers francophones (2012 : 208).

    De mme, nous considrons que la faiblesse rhtorique (approuve par le

    Cheikh et le traducteur irakien Ahmed Hasan Ali AL-GUBBANCHI [AL-

    QUBANJI]) est due au fait que le Coran a t influenc par des textes et

    des cultures sources partir desquels il a t traduit et compil. Ce nest

    donc pas une faiblesse, mais cest plutt une traduction littrale souvent.

    La norme langagire laquelle les rdacteurs du Coran se sont conforms

    (consciemment ou non) nest pas identique lusage des Arabophones de

    lpoque de lapparition du Coran. Cela ne se fait que lorsque le texte est

    traduit.

    Lide que le Coran arabe est un texte traduit ne le dnigre pas,

    mais elle le remet dans sa bonne place en tant quuvre littraire et

    religieux archaque et unique en son genre qui sinscrit dans la ligne des

    livres sacrs prcdents.