l'art de l'aquarelle n°11
DESCRIPTION
L'art de l'aquarelle rencontre les meilleurs artistes du moment : Bradley Hendershot, Trevor Chamberlain, Robert O’Brien, le portfolio de l'excellent Alexander Creswell, et l'époustouflante Keiko Yasuoka qui peint des natures mortes tout en contrastes. Et aussi : la rubrique savoir-faire vous apprendra à réaliser des portraits lumineux, et la leçon d'aquarelle s'intéresse à l'analyse d'une œuvre de lecteur.TRANSCRIPT
l’AquarelleL’A RT DE
LE MAGAZINE D’ART DES AQUARELL ISTES
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N°
11 N°11
DÉCRYPTAGE : DE L’IDÉE AU TABLEAU FINAL, COMMENT BIEN TRAITER SON SUJET
Et aussi…JOËLLE THIRIONMICHEL BERTRANDROBERT O’BRIENJULIAN FALATLINDA BAKERRICHARD HANSONEMMANUEL LANSYER
MARYSE DE MAYSa méthode pourdes portraits en fusion
KEIKO YASUOKANatures mortesen lumières et matières
LEÇON D’AQUARELLEL’équilibre des couleurs
20PAGESTECHNIQUES
BEAUTÉ RURALEBRADLEY HENDERSHOT,L’OBSESSION DU DÉTAIL
ALEXANDERCRESWELLLEDÉFI DE L’AQUARELLE
GRANDFORMAT
TREVORCHAMBERLAIN60ANNÉESDEPEINTUREAUTOURDUMONDE
EXTRAIT
4 AQUARELLE N°11 / DÉCEMBRE 2011-FÉVRIER 2012
Sommaire
6 ACTUALITÉSToute l’actualité française et internationalede vos artistes préférés.
13 ACTUALITÉS ENCHÈRES
14 ON Y ÉTAIT : BELÂBRERetour sur les 10e Rencontres du Val d’Anglin.
16 COURRIER DES LECTEURS
18 RÉVÉLATIONSJoëlle Thirion (Belgique), Lois Wolford(États-Unis) et Michel Bertrand (France).
20 BRADLEY HENDERSHOTLe peintre de la ruralité américaine.
26 GRAND ENTRETIEN : TREVOR CHAMBERLAINChantre de l’aquarelle anglaise, il est connu pour sespaysages capturés aux quatre coins du monde.
34 ROBERT O’BRIENSa passion : rendre la texture de véhicules abandonnésqu’il traque en pleine campagne.
40 ILLUSTRE INCONNUJULIAN FALATL’un des plus grands aquarellistes polonais naviguaentre réalisme et impressionnisme.
44 LINDA BAKERSes séries sur les pinces à linge ou les buildings new-yorkais explorent toute une gamme de jeux graphiques.
50 PORTFOLIOALEXANDER CRESWELLLumière et architecture sur des formats monumentaux.
60 RICHARD HANSONUn style photoréaliste au service d’une vision noire dela réalité sociale aux États-Unis aujourd’hui.
Imprimé en France/Printed in France -13, avenue du Cerisier Noir - BP 2286530 Naintré. Tél. : 05 49 90 37 64.E-mail : [email protected] -Directrice de publication : Édith CyrRÉDACTIONDirecteur de la rédaction : J.-Philippe MoineRédacteur en chef adjoint : L. BenoistSecrétaire générale de la rédaction : É. Blain.
Secrétaire de rédaction : M.-P. LévêqueDirectrice artistique : Janine GalliziaPremière rédactrice grahiste : Audrey Salé.Rédacteurs graphistes : Nadine Tillet,Hervé Magnin.Scannériste : Franck SellierOnt collaboré à ce numéro :A. Laguna-Chevillotte, T. Pelletier.Photographes : V. Merle, S. Portal.
PUBLICITÉ - Tél. : 05 49 90 09 19E-mail : [email protected] : Fredérik Favier, 05 49 90 09 19.Messagerie : MLP
ADMINISTRATION : Fabien RichardPrincipaux actionnaires : Megastar Groupe etCAP DÉVELOPPEMENTImprimerie : ROTOMEGA, 86530 Naintré
l’AquarelleL’A RT DE
Édité par DIVERTI Éditions - S.A.R.L. aucapital de 15000 € - 490317369 RCSPoitiers - 13, avenue du Cerisier NoirBP 22 – 86530 Naintré, FranceGérant : Jean-Paul Cyr
6 20 26
34 40 44
N°11
www.lartdelaquarelle.com
66 LIBRAIRIE
68 KEIKO YASUOKADans ses natures mortes se déploient une précisionet une minutie qui subliment le travail des lumièreset des valeurs.
78 SAVOIR-FAIREMARYSE DE MAYUn portrait lumineux en 6 gestes essentiels.
82 ABONNEMENTS
84 DÉCRYPTAGEJANINE GALLIZIALe traitement du sujet est souvent un point sur lequelachoppent les peintres. Voici comment vous en sortir.
88 LEÇON D’AQUARELLEComment équilibrer ses couleurs.
5AQUARELLE N°11 / DÉCEMBRE 2011-FÉVRIER 2012
L’envoi des textes ou photos implique l’accorddes auteurs pour une reproduction libre detous droits et suppose que l’auteur se soitmuni de toutes les autorisations éventuellesnécessaires à la parution. Tous droits réservéspour les documents et textes publiés dansl’Art de l’Aquarelle. La reproduction totale oupartielle des articles publiés dans l’Art del’Aquarelle sans accord écrit de la société
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Commission paritaire : 0912 K 90149.ISSN : 2103-2653.Dépôt légal à la date de parution.Trimestriel – N° 11 – Décembre 2011-Février 2012.Abonnement France (12 nos) : 75 euros.Ce numéro comporte deux encarts brochésp. 66 et p. 82.
L’Art de l’aquarelle is published quarterly,4 times a year (March, June, September,December) by Diverti Éditions c/o USACANMedia Dist. Srv. Corp at 26 Power Dam WaySuite S1-S3, Plattsburgh, NY 12901. PendingPeriodicals Postage paid at Plattsburgh, NY.POSTMASTER: send address changes toL’Art de l’aquarelle c/o Express Mag,P.O box 2769, Plattsburgh, NY 12901-0239.
90 CHEF-D’ŒUVRE AU MUSÉEEMMANUEL LANSYERSitués à Loches, en Touraine, l’ancienne maisonde ce peintre du XIXe siècle est devenue muséeen 1902 et accueille œuvres et matériel d’artiste.
94 SHOPPING NOËL
96 AGENDA MONDE
98 L’AQUARELLE EN IMAGES
50 60 68
84 9078
RENCONTREAVEC…
20 AQUARELLE N°11 / DÉCEMBRE 2011-FÉVRIER 2012
La présenceBradley
Light in the Woodshed. 52 x 45,7 cm.
21AQUARELLE N°11 / DÉCEMBRE 2011-FÉVRIER 2012
BRADLEY HENDERSHOTDÉPEINT AVEC UN BRIN DENOSTALGIE UNE RURALITÉQUI SE FAIT RARE DANSL’AMÉRIQUE D’AUJOURD’HUI.RENCONTRE AVEC UNARTISTE PAS SI TRADITIONNELQU’IL N’Y PARAÎT…
du passéHendershot
Morning Prayers. 118,1 x 78,7 cm.
HIS
TOIR
EDE
L’A
QUARELLE
40 AQUARELLE N°11 / DÉCEMBRE 2011-FÉVRIER 2012
ACCLAMÉ DE SON VIVANT COMME LE PLUS GRAND AQUARELLISTEPOLONAIS, JULIAN FALAT TÉMOIGNA DANS SA PEINTURE
DE L’ÉPOQUE CHARNIÈRE ENTRE LE RÉALISME ET L’IMPRESSIONNISME.FORMÉ AU NATURALISME MUNICHOIS, IL SUIVIT L’AIR DU TEMPSDE LA PEINTURE MODERNE AFIN D’EXPRIMER SON ATTACHEMENT
À LA NATURE DU SUD DE LA POLOGNE.
Un parcours versl’impressionnisme
Julian Falat
Vergers en fleurs à Bystra. 1915. Aquarelle sur papier, 95 x 134 cm. Musée de Bielsko-Biala – Villa Julian Falat à Bystra.
À partir de 1910, Julian Falat revient à la campagne. La région montagneuse qui entoure le village de Bystra devientalors l’inspiration première de ses investigations picturales. Ainsi, cette image traite le retour du printemps sur les coteaux
environnants. L’aquarelle est tout à la joie d’une première lumière éveillant les coloris frais et changeants.Librement, généreusement, le peintre fait fusionner de larges taches chromatiques à la faveur de la fluidité du médium.
41
L« Le paysage changeant selon les saisons […] formait masensibilité et mon amour de la nature […]. Si je me remé-morais les souvenirs de ma plus tendre enfance, revenaientles images qu’aujourd’hui seulement je peux véritablementappréhender. J’étais déjà appelé à être peintre de la nature[…] mais je ne pouvais pas le savoir, ni moi ni mes parents. »C’est en ces termes que Julian Falat se rappelle son enfancepaysanne, où rien n’aurait put présager de son avenir artis-tique. Pourtant, seul l’attrait de cette nature des confins orien-taux polonais, avec ses forêts profondes, ses étangs et sesprés humides, avec la neige à perte de vue, a suffit à forgerson destin de peintre. Né au milieudu XIXe siècle dans une famille pay-sanne, Falat a la chance d’être aidépar un de ses frères qui le place aucollège de Przemysl, dans le sud-estde la Pologne. C’est là que s’éveilleson talent de dessinateur. Son pro-fesseur de dessin l’oriente en 1869vers l’École des beaux-arts deCracovie. Falat choisit d’abord l’aquarelle par défaut, les cou-leurs à l’huile étant pour lui tout simplement trop chères.L’école cracovienne, à l’enseignement alors relativementlimité, formait de futurs professeurs de dessin et préparait àdes études académiques à Vienne, Munich ou Paris. Diplôméen 1872, Julian doit pourtant travailler avant de parfaire saformation de peintre. Il est employé en tant que dessinateurau service d’un archéologue puis d’un architecte, et enfinauprès des chemins de fer suisses. Ses expériences lui per-mettent de peindre à l’aquarelle et d’affirmer son attirance
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pour le paysage et la scène du genre. L’entrée à l’Académiedes beaux-arts de Munich, en 1877, ouvre au jeune peintrede nouveaux horizons. Munich est alors le deuxième centrede vie artistique en Europe après Paris et attire de nombreuxétudiants étrangers.
PEINTRE DES PETITES GENSET DE LA NATUREL’Académie et les artistes qui gravitent autour, connus sousle nom d’école de Munich, connaissent alors l’âge d’or d’unepeinture marqué par le naturalisme mis au service de l’his-
toire, du paysage, du portrait, desthèmes de genre et de la naturemorte, exemplifié dans l’œuvre deKarl von Piloty, son directeur. Julians’imprègne de l’art munichois mais,autant pour la technique que pourses thèmes favoris, il fait montred’une personnalité bien définie.Même s’il pratique l’huile et y excelle,
l’aquarelle reste le médium dans lequel il avoue se sentir véri-tablement à l’aise. De même, il n’est pas attiré par la spé-cialité munichoise, les grandes compositions historiques.Fidèle à la sensibilité de ses origines, il se laisse porter parl’univers des petites gens et la nature. Il finit son cursus en1880, récompensé par une médaille d’argent en dessin denature. Il prolonge l’apprentissage par une année à Rome.Ses compositions perdent alors toute rigidité académique et,sous l’influence des postulats de l’impressionnisme, Falats’ouvre à la lumière. Des aquarelles telles que Mercredi des
Même s’il pratiquel’huile et y excelle,l’aquarelle reste le
médium dans lequel ilse sent le plus à l’aise.
DATES CLÉS1853 Naissance à Tuliglowy, près deLviv, dans une famille paysanne.
1869-1871 Études à l’École desbeaux-arts de Cracovie.
1873-1880 Études successives àZurich et Munich (Polytechnique)puis à l’Académie des beaux-artsde Munich.
1881-1886 Nombreux voyagesen Italie, Espagne, en Extrême-Orient,Ukraine et Lituanie.
1886-1895 Cycle d’aquarellesillustrant les chasses du princeRadziwill valant à Falat le titre de« peintre à la cour de l’empereurGuillaume II à Berlin ». Ses aquarellessont primées à maintes reprises enEurope et aux États-Unis.
1895-1910 Directeur de l’écoledes Beaux-Arts de Cracovie.En 1897, il participe à la fondation dela Société des artistes polonais « Art ».
1910 Installation à Bystra, dansle sud du pays.
1914-1918 Falat est agréé« peintre de l’armée ».
1922-1923 Nommé directeurdu département de l’art auprèsdu Ministère de la Culture.
1929 Il meurt à Bystra.
Autoportrait au bureau. 1873.Aquarelle sur papier, 28 x 23 cm.
Musée de Bielsko-Biala – Villa Julian Falat à Bystra
Œuvre de jeunesse, cet autoportraitpréfigure la future liberté
et l’habileté du peintre dans sonapproche de l’aquarelle.
Elle annonce aussi une importanteactivité de portraitiste qui ponctua
toute la carrière de Falat. Illaissa plusieurs autoportraits,
portraits de ses proches et aussi depaysans, ses voisins à Bystra.
Il a aussi été engagé entant que portraitiste de l’arméepolonaise lors de la PremièreGuerre mondiale. Falat porte
sur ses modèles un regard incisifmais bienveillant, traduit à
l’aquarelle par un jeu subtil denuances fondantes qui concerne
particulièrement le visage,traitant souvent la silhouette et le
second plan avec des tachesde couleur libres et désinvoltes.
Engine 402.76 x 58 cm.
35AQUARELLE N°11 / DÉCEMBRE 2011-FÉVRIER 2012
Lumièreset textures
Robert O’BrienEnd of the line. 38,1 x 55,9 cm.
ON DIT QUE LA BEAUTÉ EST DANS LES YEUX DE CELUI QUIREGARDE. POUR ROBERT O’BRIEN, ELLE SE NICHE SOUVENT
DANS LES DÉTAILS DE LA CAMPAGNE DE LA NOUVELLE-ANGLETERRE, QU’IL MAGNIFIE DANS DES VUES RAPPROCHÉES.
SAVOIR
-FAIR
E
ON NE PRÉSENTE PLUS MARYSE DE MAY DONT LES ŒUVRESS’ÉPANOUISSENT SUR LES CIMAISES DES GRANDES EXPOSITIONSD’AQUARELLE EN FRANCE. ELLE NOUS LIVRE ICI SES ASTUCESPOUR LA MISE EN COULEURS – ET EN LUMIÈRE ! – D’UN PORTRAIT.
Maryse De May
UN PORTRAIT LUMINEUX
ESSENTIELSEN SIX GESTES
LE SUJETTout portrait, outre la ressemblancephysique qui est affaire de technique,est avant tout un portrait du caractèredu modèle : cette psychologies’acquiert par l’observation directeou indirecte, c’est-à-dire par le biaisde la photo. Je travaille surtoutd’après des clichés que je prendsmoi-même, ce qui me permetd’obtenir les lumières latérales fortesdont j’aime parer mes modèles.
LE DESSINLe dessin est reporté sur la feuillede papier aquarelle. Pour ce travaild’après photo, les cotes ont été prisesà l’aide d’un double décimètre.Ma méthode pour atteindre laressemblance consiste ainsi àenvisager le visage du modèlenon pas sous la forme de courbes,mais à en dessiner la structuresous-jacente à partir de lignesdroites ou quasiment droites.
MA PALETTEJaune transparentJaune indienOcre d’or (que j’utilise en lieu etplace de la terre de Sienne)Rose permanentTerre de Sienne brûléeViolet dioxazineTurquoise de phtaloBleu de manganèse.
Baignée de lumière.37 x 27 cm.
78 AQUARELLE N°11 / DÉCEMBRE 2011-FÉVRIER 2012
Il est essentiel d’adopterl’outil au geste – avec lesbonnes couleurs au bonmoment. Autrement dit,son outil, associé au bongeste, doit être choisien fonction de ce quel’on veut exprimer
sur la feuille.
Je retourne la feuille pour ne pas êtreinfluencée par la logique du dessin etraisonner en terme de lumières.Je ne mouille que les parties dansl’ombre : celles en pleine lumièrepréserveront la blancheur du papier.Afin d’éviter les tensions superficielleset les « cuvettes », j’absorbe l’eausuperflue. Il faut savoir parfaitementdoser l’humidité de son pinceau.
1
Je pose les couleurs du premierœil ; le second restant dansl’ombre, il sera suggéré par uncontraste de zones sombres etclaires (en levant les blancs).Une fois l’œil peint, je m’attaqueau nez, puis reviens sur le regard :la ressemblance passe par là.
3
J’entame la mise en couleur duvisage avec un lavis à base de terrede Sienne et de rose permanent.Les couleurs sont mélangées aussibien sur ma palette que sur lafeuille. Pour le relief, j’effectue deshachures rouges sur les lèvres etdes retraits sur l’arcade sourcilièreet l’aile du nez.
2
Je donne plus de corps aux lèvresen superposant des lavis de plusen plus foncés. Pour la chevelure,je mouille la partie concernéeavant de passer un lavis ocre d’or.À ce stade, je m’inspire plusdes croquis préalables que dela photo de référence.
4ASTUCEJe travaille parfois avec lafeuille à l’envers, afin de donneraux dégradés de couleursl’orientation que je souhaite ;cela permet aussi, dans unecertaine mesure, de ne pas selaisser influencer par le sujet,de manière à se concentreruniquement sur la peintureproprement dite.
GESTES CLÉSPOUR BIENRÉUSSIR UN ŒILJe cerne d’abord l’œil d’orangeafin de marquer le volume.La pupille est posée dansl’humide pour qu’elle fuseavec l’iris. La photo me sertde repère : j’ai effectué unagrandissement des yeux.Je donne de la profondeur àl’œil en dessinant d’un trait finau bleu de manganèse l’ombreportée de la paupière.
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CHEF-D’Œ
UVRE
AU
MUSÉE
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EEmmanuel Lansyer (1835-1893) fut unpeintre considérable. Dans le sens premierdu mot, c’est-à-dire tout a fait digne deconsidération. Chevalier de la Légiond’honneur, récipiendaire de trois médaillesdu Salon avant d’en devenir membre dujury, Emmanuel Lansyer commit la fauted’avoir été l’exact contemporain des im-pressionnistes. Bien qu’il les connut sansdoute, à défaut de les avoir côtoyés, sapeinture était néanmoins tout autre : deson passage dans l’atelier d’Eugène Viollet-le-Duc, il garda le goût du dessin, et decelui – de courte durée – dans l’atelier deCourbet, il trouva dans la nature son sujetde toute une vie. C’est au Salon desRefusés de 1863 qu’il fit une entrée re-marquée ; on parlerait aujourd’hui de Salon« off » pour désigner cette manifestationdestinée à accueillir les artistes non admisau Salon officiel. C’est en tout cas sous lemême chapiteau que le Déjeuner surl’herbe que Lansyer montra un paysagequi, à défaut d’être aussi iconoclaste quecelui de Manet, n’en demeurait pas moinsd’une honnête et belle facture.
UN MUSÉE AU CŒURD’UNE VILLE ROYALELa carrière d’Emmanuel Lansyer est mar-quée par de nombreux déplacements enFrance et aussi, à la fin de sa vie, en Italie ;chaque été durant près de trente ans, il
LOCHES, VILLE DU SUD DE LATOURAINE, EST CONNUE POURAVOIR ACCUEILLI AGNÈS SOREL,FAVORITE DU ROI CHARLES VII.ELLE ABRITE AUSSI LE MUSÉEDÉDIÉ AU PEINTRE EMMANUELLANSYER, QUI PRATIQUAITL’AQUARELLE AVEC UN TALENTCERTAIN. UN LIEU ÉMOUVANTÀ DÉCOUVRIR SANS TARDER…
Visite dumusée Lansyer
planta son chevalet sur les hauteurs sur-plombant la baie de Douarnenez – et, bienavant Gauguin, il peignit Pont-Aven. En dé-pit de toutes ses pérégrinations, Paris etLoches, dans l’Indre-et-Loire, restèrent sesdeux ports d’attache ; aujourd’hui, sa mai-son lochoise est devenue un musée, petitmais émouvant. On y accède par les ruellesqui serpentent depuis le centre-villejusqu’à la citadelle et le logis royal (quiabrita, en son temps, Agnès Sorel, favorite
de Charles VII), avant d’emprunter la judi-cieusement nommée rue Lansyer. Le bâti-ment lui-même est confortable, sans êtreostensiblement cossu : c’est une demeureen pierre de tuffeau, pierre calcaire blanchetypique de l’architecture ligérienne, avecun toit en double pente coiffant des fenêtresà meneau. Du jardin en terrasse qui jouxtela bâtisse, la vue sur l’ensemble de la villeest dégagée – la même, sans doute, à peude choses et à quelques enseignes publi-citaires près, que celle qui devait s’offrir aupeintre il y a plus d’un siècle. Dans le jardin,qui fut reconstitué d’après une aquarelled’Emmanuel Lansyer, l’on trouve notam-ment un sophora qui remplace celui quioccupait à l’origine le terrain du vivant dupeintre. Du jardin, enfin, on distingue leclocher de la collégiale Saint-Ours qui abritele tombeau en marbre d’Agnès Sorel.
LANSYER, UN PEINTREDE PAYSAGEEmmanuel Lansyer est né en Vendée. Samère habitait en revanche à Loches et,après sa disparition, les visites régulièresdu peintre laisseront la place à une instal-lation à demeure. À son décès, en 1895,Emmanuel Lansyer jouit d’une renomméeartistique certaine, et il lègue le contenu deson atelier et l’ensemble de ses collectionsà la ville dans le but de constituer unmusée. Ce dernier occupe les deux étagesde la maison et a gardé une atmosphèreparticulière… vivante, presque. « Commesi le peintre était sorti faire un tour au jar-din avant de revenir se mettre au travail »plaisante Pascal Dubrisay, adjoint au maireen charge de la Culture. Le fait est que
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DU JARDIN ENTERRASSE, LA VUE SURLA VILLE EST DÉGAGÉE.LA MÊME, À PEUDE CHOSES PRÈS,QUE CELLE QUI A DÛS’OFFRIR AU PEINTRE…
QUELQUES DATES CLÉS1835 Naissance d’Emmanuel Lansyer en Vendée.1857 Il entre dans l’atelier d’Eugène Viollet-le-Duc.1861 Il s’inscrit aux cours de Gustave Courbet avantde suivre ceux d’Henri Harpignies.1863 Il expose au Salon des Refusés.1865 Il reçoit une médaille d’honneur au Salon pourMatinée de septembre à Douarnenez et les Bordsde l’Ellée au Faouêt.1869 Il reçoit une médaille d’honneur au Salon pourle Château de Pierrefonds.1873 Il obtient une médaille du Salon pour deux marines.1881 Il est élu à la commission du Salon.1893 Emmanuel Lansyer décède à Paris et lègue à laville de Loches sa maison ainsi que sa collection.
Portrait de Lansyer.1875. Photographie.
La Mer à Tréboul. 1884. Aquarelle sur papier, 29,5 x 41 cm.
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