l’avis de l’expert une maison en zone agricole heures... · 2018. 5. 24. · 8 immobilier 24...

1
8 Immobilier 24 heures | Mercredi 28 mars 2018 Immobilier Supplément paraissant le mercredi Rédacteur en chef responsable Claude Ansermoz Rédaction Laurent Buschini, tél. 021 349 43 82 [email protected] Courriel [email protected] Annonces immobilières Mélanie Cornaz, tél. 021 349 50 54 [email protected] Marché immobilier Didier Schütz, tél. 021 349 50 65 Impression: CIL Centre d’impression Lausanne SA à Bussigny Editeur: Tamedia Publications romandes SA, avenue de la Gare 33, CP 585, 1001 Lausanne; tél. 021 349 44 44; directeur Serge Reymond, une publication de Tamedia AG. Indication de participations importantes selon article 322 CPS: CIL Centre d’Impression Lausanne SA, Homegate AG, LC Lausanne-Cités SA, Société de Publications Nouvelles SPN SA Chronique Par Pierre Jacquot président du SVIT Romandie Effets de l’e-commerce sur l’immobilier L’e-commerce a enregistré en Suisse des taux de croissance bien différents de ceux du commerce de détail station- naire. Entre 2008 et 2015, la population helvétique a consommé par Internet 6,4% de plus en moyenne chaque an- née. De 2012 à 2015, cette croissance s’est même accélérée sous l’effet de l’entrée de Zalando sur le marché. En 2017, 72% des Suisses ont effectué un achat en ligne et les ventes issues de l’e-commerce vont encore s’accélérer. D’une part, parce que les seniors sur- fent de plus en plus sur Internet et, d’autre part, parce que les générations du numérique arrivent progressive- ment à l’âge d’un pouvoir d’achat plus important. Côté offre, des rumeurs per- sistantes annoncent l’arrivée d’Ama- zon, qui concurrencera AliExpress, le site détenu par le géant chinois Alibaba. Quelles sont les conséquences pour le secteur immobilier? Un effet direct et très visible de la pression de l’e-com- merce sur le commerce stationnaire est l’augmentation de surfaces vacan- tes dans les villes. La disparition de Yendi, Vögele ou Magro est un exem- ple. Un second effet est l’augmentation de la construction de surfaces de sto- ckage et d’entrepôts logistiques. CBRE a récemment estimé que, pour réaliser un chiffre d’affaires de 1 milliard de francs, le commerce stationnaire oc- cupe 250 000 m 2 de surfaces de ven- tes, alors que 32 000 m 2 des surfaces sont dédiées aux entrepôts logistiques. Pour réaliser le même chiffre d’affai- res, l’e-commerce utilise 100 000 m 2 de surfaces de dépôts, sans aucune sur- face de vente. Cette tendance s’est con- firmée en 2017 par un volume des in- vestissements record dans le segment des bâtiments dédiés à la logistique et à l’industrie. L’augmentation des flux de marchandises est par conséquent un défi pour les urbanistes qui doivent repenser l’organisation des villes. Des livraisons par drones ou par tunnels sont des solutions qui vont s’imposer dans un avenir pas si lointain… www.svit-romandie.ch «Un effet direct et très visible de l’e-commerce est l’augmentation de surfaces vacantes dans les villes» I maginons le cas d’un vendeur, non-agriculteur, désirant ven- dre la maison qu’il habite avec sa famille à un acheteur, non- agriculteur également, qui compte y constituer son logement principal, la vente étant conclue à un prix librement défini par les parties. Cas classique, à ceci près que la mai- son ainsi que le terrain environnant sont classés en zone agricole. La parcelle, pour autant qu’elle ait une surface supérieure à 2500 m 2 , est soumise à la loi sur le droit foncier rural (LDFR). Cette loi a notamment pour but d’encourager la détention des terres agricoles par des agricul- teurs, en fixant des règles visant à favoriser l’acquisition d’un tel terrain par celui qui exploite lui-même le sol, au détriment du simple investisse- ment financier ou de la spéculation immobilière. Dans cette optique, la LDFR fixe le principe que, sauf exception, seuls des exploitants à titre personnel peu- vent acquérir des biens-fonds agrico- les. Une autorisation administrative est généralement nécessaire pour procéder à la vente: c’est le moyen choisi par le législateur pour contrô- ler que les transferts immobiliers res- pectent le dispositif mis en place par la LDFR. L’autorisation n’est toutefois pas nécessaire dans certains cas, no- tamment si l’acquisition est faite par héritage ou par un proche parent. La délivrance de l’autorisation est soumise à deux conditions: la par- celle doit être vendue à un exploitant agricole et le prix ne doit pas être surfait. Si l’acquéreur n’est pas exploitant, un appel d’offres public destiné aux exploitants agricoles devra avoir lieu. Si un exploitant à titre personnel se manifeste, il empêche la vente d’avoir lieu; le vendeur est toutefois libre de refuser cette nouvelle offre, et ainsi conserver son terrain. La vente sera autorisée si aucun exploi- tant ne fait une demande. De surcroît, la parcelle ne pourra L’avis de l’expert Une maison en zone agricole être vendue qu’à un prix non surfait. Le prix est surfait lorsqu’il dépasse de plus de 5% le prix des immeubles com- parables vendus dans la même région au cours des cinq dernières années. Afin de remédier à ces restric- tions, et pour autant que la parcelle n’ait aucun usage agricole ni aucune utilité actuelle ou future pour l’agri- culture, il est possible de requérir une mention de soustraction à la LDFR qui, si elle est accordée, sera ensuite inscrite au Registre foncier. Ne confondons pas: l’inscription d’une telle mention n’équivaut pas à un passage en zone à bâtir. Les res- trictions de construction et de trans- formation propres à la zone agricole sont toujours applicables. En revan- che, elle permet de vendre son bien sans restrictions quant à l’acquéreur ni quant au prix, et sans devoir passer par la procédure d’autorisation. Pour en savoir plus et bénéfi- cier d’un premier conseil person- nalisé: la permanence des notai- res, tous les jeudis de 16 h à 19 h, sans rendez-vous, chez Roman- die Formation, rue du Petit- Chêne 38, 1003 Lausanne. www.notaires.ch/associations/vaud/ organisation/permanence/html La vente d’une maison en zone agricole est soumise à certaines restrictions, surtout si le propriétaire n’est pas exploitant. ALAIN ROUÈCHE Me Steven Kubler Notaire à Cossonay, membre de l’ANV

Upload: others

Post on 19-Sep-2020

2 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: L’avis de l’expert Une maison en zone agricole Heures... · 2018. 5. 24. · 8 Immobilier 24 heures | Mercredi 28 mars 2018 Immobilier Supplément paraissant le mercredi Rédacteur

8 Immobilier 24 heures | Mercredi 28 mars 2018

ImmobilierSupplément paraissant le mercrediRédacteur en chef responsableClaude AnsermozRédaction Laurent Buschini, tél. 021 349 43 [email protected] [email protected] immobilièresMélanie Cornaz, tél. 021 349 50 [email protected]é immobilierDidier Schütz, tél. 021 349 50 65Impression: CIL Centre d’impression Lausanne SA à BussignyEditeur: Tamedia Publications romandes SA, avenue de la Gare 33, CP 585, 1001 Lausanne; tél. 021 349 44 44; directeur Serge Reymond, une publication de Tamedia AG. Indication de participations importantes selon article 322 CPS: CIL Centre d’Impression Lausanne SA, Homegate AG, LC Lausanne-Cités SA, Société de Publications Nouvelles SPN SA

ChroniquePar Pierre Jacquotprésident du SVIT Romandie

Effets de l’e­commerce sur l’immobilierL’e-commerce a enregistré en Suisse des taux de croissance bien différents de ceux du commerce de détail station-naire. Entre 2008 et 2015, la populationhelvétique a consommé par Internet 6,4% de plus en moyenne chaque an-née. De 2012 à 2015, cette croissance s’est même accélérée sous l’effet de l’entrée de Zalando sur le marché. En 2017, 72% des Suisses ont effectué un achat en ligne et les ventes issues de l’e-commerce vont encore s’accélérer.D’une part, parce que les seniors sur-fent de plus en plus sur Internet et, d’autre part, parce que les générationsdu numérique arrivent progressive-ment à l’âge d’un pouvoir d’achat plusimportant. Côté offre, des rumeurs per-sistantes annoncent l’arrivée d’Ama-zon, qui concurrencera AliExpress, le site détenu par le géant chinois Alibaba.

Quelles sont les conséquences pourle secteur immobilier? Un effet direct et très visible de la pression de l’e-com-merce sur le commerce stationnaire est l’augmentation de surfaces vacan-tes dans les villes. La disparition de Yendi, Vögele ou Magro est un exem-ple. Un second effet est l’augmentationde la construction de surfaces de sto-ckage et d’entrepôts logistiques. CBREa récemment estimé que, pour réaliser

un chiffre d’affaires de 1 milliard de francs, le commerce stationnaire oc-cupe 250 000 m2 de surfaces de ven-tes, alors que 32 000 m2 des surfaces sont dédiées aux entrepôts logistiques.Pour réaliser le même chiffre d’affai-res, l’e-commerce utilise 100 000 m2 de surfaces de dépôts, sans aucune sur-face de vente. Cette tendance s’est con-firmée en 2017 par un volume des in-vestissements record dans le segmentdes bâtiments dédiés à la logistique et àl’industrie. L’augmentation des flux demarchandises est par conséquent un défi pour les urbanistes qui doivent repenser l’organisation des villes. Des livraisons par drones ou par tunnels sont des solutions qui vont s’imposer dans un avenir pas si lointain…

www.svit-romandie.ch

«Un effet direct et très visible de l’e-commerce est l’augmentation de surfaces vacantes dans les villes»

Imaginons le cas d’un vendeur,non-agriculteur, désirant ven-dre la maison qu’il habite avecsa famille à un acheteur, non-agriculteur également, qui

compte y constituer son logementprincipal, la vente étant conclue à unprix librement défini par les parties.Cas classique, à ceci près que la mai-son ainsi que le terrain environnantsont classés en zone agricole.

La parcelle, pour autant qu’elle aitune surface supérieure à 2500 m2, estsoumise à la loi sur le droit foncierrural (LDFR). Cette loi a notammentpour but d’encourager la détentiondes terres agricoles par des agricul-teurs, en fixant des règles visant àfavoriser l’acquisition d’un tel terrainpar celui qui exploite lui-même le sol,au détriment du simple investisse-ment financier ou de la spéculationimmobilière.

Dans cette optique, la LDFR fixe leprincipe que, sauf exception, seulsdes exploitants à titre personnel peu-

vent acquérir des biens-fonds agrico-les.

Une autorisation administrativeest généralement nécessaire pourprocéder à la vente: c’est le moyenchoisi par le législateur pour contrô-ler que les transferts immobiliers res-pectent le dispositif mis en place parla LDFR. L’autorisation n’est toutefoispas nécessaire dans certains cas, no-tamment si l’acquisition est faite parhéritage ou par un proche parent.

La délivrance de l’autorisation estsoumise à deux conditions: la par-

celle doit être vendue à un exploitantagricole et le prix ne doit pas êtresurfait.

Si l’acquéreur n’est pas exploitant,un appel d’offres public destiné auxexploitants agricoles devra avoir lieu.Si un exploitant à titre personnel semanifeste, il empêche la vented’avoir lieu; le vendeur est toutefoislibre de refuser cette nouvelle offre,et ainsi conserver son terrain. Lavente sera autorisée si aucun exploi-tant ne fait une demande.

De surcroît, la parcelle ne pourra

L’avis de l’expert

Une maison en zone agricoleêtre vendue qu’à un prix non surfait. Le prix est surfait lorsqu’il dépasse deplus de 5% le prix des immeubles com-parables vendus dans la même régionau cours des cinq dernières années.

Afin de remédier à ces restric-tions, et pour autant que la parcellen’ait aucun usage agricole ni aucuneutilité actuelle ou future pour l’agri-culture, il est possible de requérir unemention de soustraction à la LDFRqui, si elle est accordée, sera ensuiteinscrite au Registre foncier.

Ne confondons pas: l’inscriptiond’une telle mention n’équivaut pas àun passage en zone à bâtir. Les res-trictions de construction et de trans-formation propres à la zone agricolesont toujours applicables. En revan-che, elle permet de vendre son biensans restrictions quant à l’acquéreurni quant au prix, et sans devoir passerpar la procédure d’autorisation.

Pour en savoir plus et bénéfi-cier d’un premier conseil person-nalisé: la permanence des notai-res, tous les jeudis de 16 h à 19 h,sans rendez-vous, chez Roman-die Formation, rue du Petit-Chêne 38, 1003 Lausanne.

www.notaires.ch/associations/vaud/organisation/permanence/html

La vente d’une maison en zone agricole est soumise à certaines restrictions, surtout si le propriétaire n’est pas exploitant. ALAIN ROUÈCHE

Me Steven Kubler

Notaire à Cossonay, membre de l’ANV