la standardisation du traitement de la douleur cancéreuse

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La standardisation du traitement de la douleur cancereuse Table ronde du 23 juin 1988 organis6e par Douleur et Analg~sie (Sponsor : Mundipharma Pharmazeutika AG) Un comit6 r6duit d'une cinquantaine d'invit~s de Douleur et Analg6sie se sont pench~s sur le probl~me du standard dans le traitement de la douleur du cancer. Une introduction fut d'abord faite par le Dr R. G. Twy- cross. Celle-ci fut suivie par une intervention de Mine N. Teoh (Unit6 du cancer, OMS, responsable: Dr J. Stjernsward). La position de rOMS fur pr6cis~e, que ce soit au travers de ses sch6mas de traitement, qu'au ni- veau de ses efforts d'informations, par des publications notamment (Cancer Pain Relief, WHO, Geneva). De nombreuses interventions furent ensuite faites, aussi bien par les animateurs de la table ronde que par les in- vit6s. Ci-dessous on trouvera les extraits les plus impor- tants des discussions de cette journ6e ainsi qu'une tra- duction d'une grande partie de la conference du Pr Twycross. Le Pr Twycross commen(;a par se pr6senter et indi- quer son cadre de travail habituel en Grande-Bretagne. II insista ensuite rapidement sur le fair que d'apr~s lui il est donn6 trop d'importance ~ la physiologie de la dou- leur et que ron n'insiste pas assez sur les aspects psy- chologiques et sociaux qui raccompagnent. Pr R. G. Twycross : (...) La douleur est une exp6rien- ce somato-psychique. Elle peut prendre son origine dans un ph6nom~ne nociceptif. Je suis d'accord qu'il y a composante sensorielle, mais celle-ci est toujours mo- difi6e par le psychisme. Nous voyons ceci sans cesse, particuli~rement dans les cas de douleurs chroniques canc6reuses (...). II est plus important de comprendre la psychologie de la douleur canc6reuse que sa physiolo- gie. En d'autres mots, la douleur est une exp6rience qui est modul6e par rhumeur du patient, son moral et le sens que la douleur prend pour lui (...). Si nous cherchons ~ contr61er non seulement la dou- leur, mais aussi les naus6es, la toux, la s6cheresse de la bouche, les d6mangeaisons, etc., nous aurons aussi un effet direct sur rhumeur et le moral du patient et par consequent sur sa sensibilit6 & la douleur. II est aussi bien vital de s'informer sur le sommeil du patient que d'6couter attentivement son entourage (...). Je ne suis pas d'accord d'administrer un cocktail & tous rues patients, c'est-~-dire un peu d'analg~siques, un peu d'anxiolytiques, un peu d'antid6presseurs, mais la m6dication doit 6tre planifi6e de mani~re individuelle. Selon notre module somatopsychique, certains patients n6cessitent des anxiolytiques, d'autres des antid6pres- seurs. Je dirais 1 0 ~ 1 5% des patients pour chacune de ces deux cat6gories (...). Toutes les douleurs du patient canc6reux ne sont pas dues au cancer. A Oxford nous avons 6tudi~ 100 can- c6reux et nous avons trouv6 que chez 41 de ceux-ci, rensemble des douleurs 6tait caus~ par le cancer seul. 80% de ces 100 patients avaient des douleurs multi- ples. Dans 9 cas aucune des douleurs 6tait due au can- cer lui-m6me. Nous avions donc 1 O0 patients canc6reux avec ((300 douleurs)). Quand on analyse la cause de ces douleurs, on volt que moins des 2/3 sont caus6s par le cancer lui-m~me (...). Le traitement de la douleur est multimodal, et sou- vent, sinon toujours, multidisciplinaire, notamment avec des infirmi~res sp~cialis6es (...). On pense souvent que les douleurs tr~s s6v~res de cancer n6cessitent de la morphine. Cela n'est pas tou- jours vrai. Parmi les algies les plus importantes j'ai sou- vent vu des spasmes musculaires qui ne r6agissent pas aux narcotiques (...). On parle de plus en plus souvent de douleurs r~sistantes ou sensibles aux narcotiques, un peu par analogie aux antibiotiques. En fair on devrait dire que les douleurs sensibles aux opiac6s sont celles qui en devenant plus s~v~res r6pondent bien ~ une augmentation de la codeine et de la morphine (...). II existe des douleurs qui sont narcotiques sensibles et qui dans la pratique r6agissent comme des douleurs narco- tiques insensibles parce que les m~decins ne tiennent pas compte des implications psychologiques. Dr P. Dayer : M. Twycross vous a present6 rindivi- dualisation psychosociale. Depuis une dizaine d'ann6es, les pharmacologues cliniques essaient de montrer qu'il faut aussi une individualisation th6rapeutique. Pour cette raison, quand j'entends le mot standardisation, qui est le th~me de ce matin, j'accepte la standardisation des attitudes mais absolument pas celle des th6rapeu- tiques. Je vais vous rillustrer par un ou deux travaux tir6s de notre laboratoire. Prenons rexemple typique de la cod6ine qui est propos6e par I'approche de rOMS comme un analg6sique ((doux)). Je vais essayer de vous montrer que c'est soit un analg~sique fort, soit un anal- g~sique inefficace selon les circonstances et que la standardisation a ses limites. II existe une s~rie d'6vi- dences exp6rimentales montrant que le principe actif de la cod6ine est la morphine puisque la codeine est d6- m6thyl6e au niveau h6patique et que 1 0% de la dose fi- nit ainsi. Nous nous sommes int6ress6s aux facteurs gouvernant cette activation pour voir dans quelle me- sure cela pourrait jouer un r61e dans I'activit6 de la co- d6ine. Dans notre banque de tissu h6patique humain nous avons ~tudi6 la production in vitro, darts I'~prou- vette donc, de morphine en fonction de la concentration de codeine (...). Dix pour cent de la population euro- 179

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La standardisat ion du t ra i t ement de la douleur cancereuse

Table ronde du 23 juin 1988 organis6e par Douleur et Analg~sie

(Sponsor : Mundipharma Pharmazeutika AG)

Un comit6 r6duit d 'une cinquantaine d'invit~s de Douleur et Analg6sie se sont pench~s sur le probl~me du standard dans le traitement de la douleur du cancer. Une introduction fut d 'abord faite par le Dr R. G. Twy- cross. Celle-ci fut suivie par une intervention de Mine N. Teoh (Unit6 du cancer, OMS, responsable: Dr J. Stjernsward). La position de r O M S fur pr6cis~e, que ce soit au travers de ses sch6mas de traitement, qu'au ni- veau de ses efforts d' informations, par des publications notamment (Cancer Pain Relief, WHO, Geneva). De nombreuses interventions furent ensuite faites, aussi bien par les animateurs de la table ronde que par les in- vit6s. Ci-dessous on trouvera les extraits les plus impor- tants des discussions de cette journ6e ainsi qu'une tra- duction d'une grande partie de la conference du Pr Twycross.

Le Pr Twycross commen(;a par se pr6senter et indi- quer son cadre de travail habituel en Grande-Bretagne. II insista ensuite rapidement sur le fair que d'apr~s lui il est donn6 trop d' importance ~ la physiologie de la dou- leur et que ron n'insiste pas assez sur les aspects psy- chologiques et sociaux qui raccompagnent.

Pr R. G. Twycross : (...) La douleur est une exp6rien- ce somato-psychique. Elle peut prendre son origine dans un ph6nom~ne nociceptif. Je suis d'accord qu'i l y a composante sensorielle, mais celle-ci est toujours mo- difi6e par le psychisme. Nous voyons ceci sans cesse, particuli~rement dans les cas de douleurs chroniques canc6reuses (...). II est plus important de comprendre la psychologie de la douleur canc6reuse que sa physiolo- gie. En d'autres mots, la douleur est une exp6rience qui est modul6e par rhumeur du patient, son moral et le sens que la douleur prend pour lui (...).

Si nous cherchons ~ contr61er non seulement la dou- leur, mais aussi les naus6es, la toux, la s6cheresse de la bouche, les d6mangeaisons, etc., nous aurons aussi un effet direct sur rhumeur et le moral du patient et par consequent sur sa sensibilit6 & la douleur. II est aussi bien vital de s' informer sur le sommeil du patient que d'6couter attentivement son entourage (...).

Je ne suis pas d'accord d'administrer un cocktail & tous rues patients, c'est-~-dire un peu d'analg~siques, un peu d'anxiolytiques, un peu d'antid6presseurs, mais la m6dication doit 6tre planifi6e de mani~re individuelle. Selon notre module somatopsychique, certains patients n6cessitent des anxiolytiques, d'autres des antid6pres- seurs. Je dirais 1 0 ~ 1 5% des patients pour chacune de ces deux cat6gories (...).

Toutes les douleurs du patient canc6reux ne sont pas dues au cancer. A Oxford nous avons 6tudi~ 100 can-

c6reux et nous avons trouv6 que chez 41 de ceux-ci, rensemble des douleurs 6tait caus~ par le cancer seul. 8 0 % de ces 100 patients avaient des douleurs mult i- ples. Dans 9 cas aucune des douleurs 6tait due au can- cer lui-m6me. Nous avions donc 1 O0 patients canc6reux avec ((300 douleurs)). Quand on analyse la cause de ces douleurs, on volt que moins des 2 / 3 sont caus6s par le cancer lui-m~me (...).

Le traitement de la douleur est mult imodal, et sou- vent, sinon toujours, multidisciplinaire, notamment avec des infirmi~res sp~cialis6es (...).

On pense souvent que les douleurs tr~s s6v~res de cancer n6cessitent de la morphine. Cela n'est pas tou- jours vrai. Parmi les algies les plus importantes j 'ai sou- vent vu des spasmes musculaires qui ne r6agissent pas aux narcotiques (...). On parle de plus en plus souvent de douleurs r~sistantes ou sensibles aux narcotiques, un peu par analogie aux antibiotiques. En fair on devrait dire que les douleurs sensibles aux opiac6s sont celles qui en devenant plus s~v~res r6pondent bien ~ une augmentation de la codeine et de la morphine (...). II existe des douleurs qui sont narcotiques sensibles et qui dans la pratique r6agissent comme des douleurs narco- t iques insensibles parce que les m~decins ne t iennent pas compte des implications psychologiques.

Dr P. Dayer : M. Twycross vous a present6 r indiv i - dualisation psychosociale. Depuis une dizaine d'ann6es, les pharmacologues cliniques essaient de montrer qu' i l faut aussi une individualisation th6rapeutique. Pour cette raison, quand j 'entends le mot standardisation, qui est le th~me de ce matin, j 'accepte la standardisation des attitudes mais absolument pas celle des th6rapeu- tiques. Je vais vous r i l lustrer par un ou deux travaux tir6s de notre laboratoire. Prenons rexemple typique de la cod6ine qui est propos6e par I 'approche de r O M S comme un analg6sique ((doux)). Je vais essayer de vous montrer que c'est soit un analg~sique fort, soit un anal- g~sique inefficace selon les circonstances et que la standardisation a ses limites. II existe une s~rie d'6vi- dences exp6rimentales montrant que le principe actif de la cod6ine est la morphine puisque la codeine est d6- m6thyl6e au niveau h6patique et que 1 0% de la dose fi- nit ainsi. Nous nous sommes int6ress6s aux facteurs gouvernant cette activation pour voir dans quelle me- sure cela pourrait jouer un r61e dans I'activit6 de la co- d6ine. Dans notre banque de tissu h6patique humain nous avons ~tudi6 la production in vitro, darts I'~prou- vette donc, de morphine en fonction de la concentration de codeine (...). Dix pour cent de la population euro-

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p~enne, anglo-saxonne, genevoise ne produisent pas de morphine pour une simple raison g~n~tique (mauvais m~taboliseurs).

L'enzyme responsable de la conversion m~tabolise prat iquement t o u s l e s b~ta-bloquants lipophiles, prati- quement tous les antid~presseurs tr icycliques que vous utilisez couramment. Cette enzyme est en quantit~ li- mitre, elle ne peut pas 6tre augment~e dans le foie.

Malheureusement pour vos patients, I'affinit~ de ces m~dicaments pour I 'enzyme est ~ peu pr6s 10 fois su- p~rieure ~ celle de la codeine. En d'autres termes, partir du moment oQ un patient re(~oit un b~ta-bloquant, un antid~presseur, un antiarythmique, I 'enzyme va s'occuper de ce m6dicament et ne pas faire de la mor- phine (~ partir de la codeine). II y a donc a priori non seulement 10% de r~sistance pour des causes g~n~ti- ques, mais il y a aussi 20 ~ 30% de r6sistance pour des causes d' interaction m~dicamenteuse. Vous allez me di- re que ceci est de la cin~tique, que cela se passe in vitro, je vais vous montrer que cela a une traduction clinique.

Le Dr Desmeules a mis au point chez nous un test du seuil de la douleur d~velopp~ & Paris par J, C. Wyler. Ce test est bas6 sur I 'apparition d'un r~flexe douloureux par stimulation ~lectrique du nerf sural. On enregistre I'in- tensit~ ~lectrique n~cessaire pour d~clencher le r~flexe. Cela correspond tr~s exactement & I 'apparit ion de la douleur. Nous avons fair une ~tude contr616e en double aveugle et randomis~e avec des sujets bons m~taboli- seurs. IIs ont rec~u du placebo et dans les deux heures qui suivent la prise du placebo on constate que le seuil ne bouge pas. IIs ont ensuite res de la codeine et on note qu'avec 100 m g l e seuil s'~l~ve de 56% en moyenne (de 20 ~ 84%). Donc la cod6ine a un effet tout

fait net sur le seuil par rapport au placebo. On observe une augmentat ion & peine significative du seuil de la douleur chez ces m6mes sujets, s'i ls avaient res aupa- ravant 50 mg de quinidine (...). Vous voyez que cela suffit pour bloquer totalement cette enzyme. Cela repr6- sente ce que I'on aurait vu si un b6ta-bloquant, un anti- d~presseur tr icyclique ~tait donn~ & doses th~rapeuti- ques. Chez des sujets mauvais m~taboliseurs, le place- bo, la quinidine + cod6ine ou la cod6ine route seule n'affectent pas le seuil de la douleur. En d'autres ter- mes, la codeine est un antalgique tr~s efficace chez cer- tains individus, pas du tout chez d'autres.

M. Twycross a parl~ des antid~presseurs (...), I& aussi il peut se poser des probl6mes de m~tabolisation, soit par d6ficience, soit par interaction m~dicamenteuse. Ce probl~me peut se poser par exemple avec I'Anafranil | (clomipramine). Le Nozinan | (l~vom~promazine) trans- forme les bons en mauvais m6taboliseurs par interaction m~tabolique (...).

En d'autres termes, oui ~ la standardisation des atti- tudes, non & la standardisation des sch6mas th~rapeu- t iques pr6cis et en particulier posologiques.

Dr P. Rosatt i : Est-ce que tu veux dire que le schema de I 'OMS, avec la cod6ine comme narcotique faible, devrait 6tre abandonn6 ?

D r J . Bruxel le : Dans le sch6ma de I 'OMS on propose ~ventuellement des adjuvants, les analg~siques vont donc ~tre plus ou moins efficaces.

Dr P. Dayer : Tout ~ fait. Je consid6re que la codeine est un tr~s bon m~dicament, par exemple en Afrique, od

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I'on sait qu' i l y a moins de 1% de d~ficients g~n6tiques et puis en pratique ambulatoire oQ il y a moins de risque d'interaction m~dicamenteuse. Mais dans le monde oc- cidental en Europe, dans nos h6pitaux, en particulier en raison de la mult im~dication de nos patients, je pense que ce n'est plus 10% mais 30 & 50% de nos patients chez qui c'est un m~dicament inefficace. Dans notre consultation de la douleur, nous ne I'util isons pratique- ment plus, personnellement je favorise les m6dicaments type bupr~norphine en premier stade, avant de passer la morphine.

Dr J. M. Besson : (...). Je sais bien, comme le dit M. Twycross, que si la morphine est bien donn~e heures fixes, il n 'y a pas de ph~nom6ne de tolerance, mais il est bien connu au niveau international que les effets de tolerance varient consid6rablement entre les diff~rentes ~quipes, m6me au sein d'un m~me h6pital, j 'aimerais que I'on discute cela.

Dr P. Dayer : II n 'y a pas de doute que la tol6rance pharmacologique est toujours I&, apr6s deux ou trois jours de traitement d6j~. II faut adapter la dose apr6s quelques jours, quelques semaines, quelques tools. II ne faut pas confondre tol6rance pharmacologique et phar- macod6pendance. Ce sont deux choses fondamenta- lement diff~rentes. Je crois que s'il y a une r~gle, dans les douleurs qui r~pondent & la morphine, comme celles d6finies par M. Twycross, c'est celle de ne pas h~siter suivre en augmentant les doses. La plupart des casque nous voyons arriver ~ I'h6pital en raison de soins im- possibles ~ domicile r~pondent tr~s rapidement & une adaptation des doses, en tout cas sur les douleurs no- ciceptives. Par contre dans la douleur neurog~ne, ou de d~aff~rentation, il ne sert ~ rien de donner de la morphi- ne, elle est d 'une part pratiquement inefficace, et c'est le meilleur moyen de cr ier une toxicomanie.

Dr J. M. Besson : Et bien (~a d'accord. Mais pourquoi les douleurs de d~aff~rentation r~agissent mal & la mor- phine ? On peut tr6s bien imaginer qu'i l y air une action spinale de la morphine, on salt qu' i l y a des r~cepteurs au niveau de la moelle ~piniere, on sait qu' i l y a des r~- cepteurs opio'ides dans de nombreuses places dans le cerveau (...).

Dr J. Bruxel le : Nous avons fait une 6tude, pas en- core publi~e, avec la nalbuphine, un agoniste-antago- niste. Nous avons eu un effet significatif par rapport un placebo dans des douleurs de d~aff6rentation p~ri- ph~riques, mais cela n'a pas ~t~ fair en administration de Iongue dur6e.

Dr P. Dayer : Au d6but de cette ann6e est paru un ar- ticle parmi les meil leurs publi~s ~ ce jour sur la douleur de d6aff6rentation. II s'agissait de patients qui souf- fraient de douleurs post-zost6riennes, la moyenne d'~ge 6tant de 70 arts. Ces 40 patients ont res de mani~re contr61~e, en double aveugle, soit du placebo, soit 600 mg d' ibuprofen, soit 100 mg de codeine, soit 0,2 mg de clonidine. L'ibuprofen, un AINS, n'a eu strictement aucun effet diff6rentiable du placebo, 100 mg de codeine ont eu un tout petit impact, et la cloni- dine a eu un effet tout ~ fair net, mais malheureusement avec un certain hombre d'inconv~nients. Donc je crois qu' i l y a des ~vidences cliniques et exp~rimentales pour

montrer que les AINS n'ont pas d'effets et que les nar- cotiques ont un tres mauvais effet, largement insuffi- sant, et que c'est dans d'autres classes th~rapeutiques qu' i l nous faut chercher des solutions.

Dr J. M. Besson : Chez le rat les ~tudes montrent que I'effet de la morphine sur la transmission du message nociceptif au niveau spinal est deux fois moins impor- tant chez I'animal d~aff6rent6 que celui qui ne I'est pas.

C o m m e n t a i r e s sur la tab le ronde

II apparait que les actes techniques (neurochirurgie, blocs, etc.), sont de moins en moins indiqu~s. II est vrai que ceux-ci sont de plus en plus precis et de moins en moins destructeurs, mais une approche bio-psycho-so- ciale coh~rente et bien men~e permet d'assurer un maximum de confort au patient avec un soulagement important des douleurs en util isant des solutions m~- dicamenteuses simples. Finalement peu de m~dica-

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ments restent vraiment indispensables et si la codeine est une substance trop impr~visible pour offrir un vrai

Dr A. Michaud : J'ai une question au Dr Twycross. Celle du sevrage. II 6voque avoir res des patients re- cevant des doses tr~s fortes de morphine, soit 3-4 g par jour, et qu'au bout de 5 jours les doses ont pu 6tre bais- s~es ~ 30 mg. Est-ce que ces patients n 'ont pas eu des effets de sevrage ?

Pr R. G. Twycross : No problem ! Les doses ont 6t~ baiss6es sur plusieurs jours. Un article de Lasagna, dans les ann6es soixante, sugg~rait que la dose qu 'un patient prend n'est pas la m6me que la dose n6cessaire pour pr~venir les effets du sevrage si un patient est physi- quement d#pendant. II sugg~re qu'un quart de la dose analg~sique est n~cessaire pour pr~venir les effets de sevrage. Si par exemple on proc~de ~ un bloc neuroly- tique ou fi une chirurgie antalgique chez un patient sous morphine, nous diminuerons automatiquement la dose fi un quart apr~s I ' intervention (...).

Dr J. Bruxelle : Quelle est la fr6quence, M. Twycross, d'uti l isation de catheters m~dullaires de morphine ?

Pr R. G. Twycross : Nous ne les util isons pas souvent (...).

Pr V. Ventaffrida : (...). Nous utilisons peu de tech- niques destructives, c'est-~-dire dans moins de 1 0% des cas. D6s le moment off I 'administration de morphine a ~t~ faite clans le cadre d 'une strat~gie de soins continus, son efficacit~ a ~t~ meilleure. C'est une grave erreur de vouloir se centrer uniquement sur la douleur, le traite- ment de la douleur est seulement une partie du traite- ment palliatif. II faut se pr~occuper aussi du contr61e des autres sympt6mes et notamment des probl~mes psy- chosociaux (...). Dans la litt~rature on ne tient pas assez compte de la qualit~ de vie.

Pr J. Gybels : J 'aimerais demander au Pr Twycross quelle est son attitude avec des patients qui ont une es- p6rance de vie Iongue, par exemple 5 ou 6 ans.

avantage, la morphine garde sa place de choix, que ce soit la forme aqueuse ou le MST Continus | (en France: MS Continu|

L'approche dolt 6tre mult imodale et mult idiscipl inai- re, les aspects psycho-sociaux sont primordiaux. La pre- sence d' inf irmi~res sp~cialis~es est indispensable, I ' im- plication de I 'entourage familial est importante. On peut f inalement dire qu 'une standardisation th~rapeutique n'est pas possible, dans ce sens le schema de I 'OMS (AINS, narcotique (<doux)~ puis fort) ne convient pas aux pays occidentaux (mais a une valeur d 'enseignement dans les pays du tiers-monde), par contre une standar- disation des attitudes est souhaitable.

Un dernier commentaire doit encore 6tre fait ~ propos des chiffres, souvent cites dans ce type de r6union, et les attitudes que I'on en fair d6couler. II est ind6niable qu'un hospice r~serv~ fi des patients canc6reux pourra pr~tendre avoir un succ~s th~rapeutique sur le plan de I'algie voisinant les 85, 90, voire plus de 95%. Le con- traire serait surprenant, voire inqui~tant. Le probl6me est de savoir ce que deviennent les 5 ~ 1 5% restants. Ce sont en g6n~ral ces patients-Ifi qui sont adress~s aux consultations sp6cialis~es. L~ on peut leur faire b~n6fi- cier de techniques un peu plus sophistiqu~es (blocs, ca- theters intrarachidiens, etc.). On comprendra ais~ment que selon le contexte dans lequel on se situe, les statis- tiques avanc~es seront tr~s diff6rentes, les interventions ~galement.

On ne peut que regretter une certaine impression de clivage, que les chiffres symbolisent, entre les oncolo- gues, les algologues, les psychologues, etc. Aussi bien la douleur ne doit pas 6tre trait~e comme un sympt6me que I'on isole, de m6me le cancer ne devrait pas #}tre consid~r~ seulement comme une prolif6ration maligne de cellules ind~sirables. II a ~t~ dit avec beaucoup d'& propos qu' i l ne fallait pas proposer une standardisation des sch6mas th6rapeutiques, mais celle des attitudes. Malgr~ cela, prat iquement rien n'a 6t~ dit sur le contexte th~rapeutique, car c'est bien I& que se forgent les atti- tudes.

Pr R. G. Twycross : II n 'y a pas de probl~me. S'ils ont une douleur sensible aux narcotiques, ils doivent rece- voir des narcotiques pendant 4 ou 5 ans (...). P. Rosatti

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