la revitalisation du quartier saint-roch; analyse d’une expérience locale de mobilisation

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1 La revitalisation du Quartier Saint-Roch Analyse d’une expérience locale de mobilisation Analyse présentée par : Krystel Doucet (E0230406) Gonel Joseph (E0228243) Mobilisation des acteurs locaux ENP-7009 Monsieur Serge Belley 30 avril 2010 Québec

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École nationale d'administration publiqueAnalyse présentée par :Krystel Doucet (E0230406)Gonel Joseph (E0228243)Mobilisation des acteurs locauxENP-7009Monsieur Serge Belley30 avril 2010Québec

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Page 1: La revitalisation du Quartier Saint-Roch; Analyse d’une expérience locale de mobilisation

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La revitalisation du Quartier Saint-Roch Analyse d’une expérience locale de mobilisation

Analyse présentée par :

Krystel Doucet (E0230406)

Gonel Joseph (E0228243)

Mobilisation des acteurs locaux

ENP-7009

Monsieur Serge Belley

30 avril 2010

Québec

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TABLE DES MATIÈRES Problématique....................................................................................................................... 4

Historique du Quartier Saint-Roch ...................................................................................... 5 Le processus de revitalisation du Quartier Saint-Roch......................................................... 5

Cadre théorique .................................................................................................................... 7 La revitalisation urbaine intégrée (RUI) - ou Approche territoriale intégrée .............................. 8 La gentrification...................................................................................................................................... 8 La mixité sociale ...................................................................................................................................... 8 La participation citoyenne..................................................................................................................... 8 Le capital social ....................................................................................................................................... 9 L’appropriation d’espaces urbains ...................................................................................................... 9

Méthodologie ........................................................................................................................ 9 Hypothèses.......................................................................................................................... 10

Analyse en lien avec le processus de revitalisation ............................................................. 10 Enjeux de la mobilisation..................................................................................................................... 10 Les acteurs impliqués ........................................................................................................................... 11 Les positions des acteurs ...................................................................................................................... 11 Les ressources des acteurs ................................................................................................................... 13 Leurs stratégies ..................................................................................................................................... 15 Financement et reddition de compte.................................................................................................. 16 Leurs effets sur le milieu (réels et attendus) ..................................................................................... 17 Difficultés rencontrées.......................................................................................................................... 19 Exemple de mobilisations locales réussies......................................................................................... 21 Suivi des résultats.................................................................................................................................. 21

Résultats globaux de l’analyse............................................................................................ 22 Qu’est-ce qui amène une mobilisation horizontale?........................................................................ 26 Relations de pouvoir (asymétrie)........................................................................................................ 27 En quoi la mobilisation a créé une valeur ajoutée à la revitalisation du quartier...................... 28

Conclusion.......................................................................................................................... 29 Bibliographie ...................................................................................................................... 30

Annexes .............................................................................................................................. 33 Annexe 1 L’appropriation communautaire...................................................................................... 33 Annexe 2 Le processus de mobilisation locale .................................................................................. 34 Annexe 3 Le logement social et communautaire dans Saint-Roch................................................ 35 Annexe 4 Synthèse de l’entrevue avec Pierre Maheux.................................................................... 37

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Annexe 5 Synthèse de l’entrevue avec Jean Pearson....................................................................... 38 Annexe 6 Synthèse de l’entrevue avec Éric Boulay ......................................................................... 39 Annexe 7 Synthèse de l’entrevue avec Marcel Landry ................................................................... 41

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« Une société unie n'est pas une société sans différences, mais une société sans frontières intérieures »

(Olivier Guichard, Un chemin tranquille)

Les décisions et orientations politiques ont toujours suscité une mobilisation des

acteurs concernés par les mesures qui en découlent. Quoiqu’ils ne fassent pas partie de la

sphère décisionnelle, ils ont toujours voulu prendre part à l’élaboration des différentes

politiques, soit par consultation ou par manifestation publique. La revitalisation urbaine peut

être un exemple type de mobilisation. Le Quartier Saint-Roch, bassin de mouvements

populaires, peut être un cas de mobilisation intéressant à observer. L’objectif d’analyser le cas

de la revitalisation du Quartier Saint-Roch consiste à démontrer l’exemple d’une mobilisation

d’acteurs locaux. Sous l’angle de la mobilisation, cette analyse dégagera les avantages et

inconvénients de la présence de plusieurs acteurs dans le processus de revitalisation du

Quartier Saint-Roch.

Problématique

La revitalisation urbaine a fait l’objet d’étude de plusieurs écoles (Morin; 1987, 2).

D’abord, il y a eu l’École de Chicago qui voyait l’espace urbain comme une source de

déséquilibre social. La revitalisation se voyait ainsi très physique, tangible. En opposition à

cette école, un courant, amené par Manuel Castells, a mis l’accent sur les déterminismes

économiques et politiques derrière la revitalisation urbaine, voyant plutôt le phénomène d’une

perspective constructiviste (Castells; 2001). Enfin, l’école néo-marxiste française a émis

l’importance d’apporter des perspectives historiques, économiques et politiques pour analyser

les phénomènes urbains afin d’en dégager les spécificités locales. C’est cette école que nous

privilégierons dans l’analyse de la mobilisation des acteurs locaux dans le Quartier Saint-

Roch. Dans le cadre de notre analyse, nous chercherons à dégager les enjeux et les acteurs

impliqués dans le processus de revitalisation du Quartier Saint-Roch, à travers les positions,

ressources et stratégies des acteurs concernés et des effets sur le milieu.

La revitalisation des quartiers attire l’attention sur la question du pouvoir local,

particulièrement sur le contrôle que les forces sociales, économiques et politiques entraînent

dans la sphère locale. Le Quartier Saint-Roch est particulièrement intéressant à analyser dans

le cadre de la mobilisation des acteurs locaux, car le pouvoir local possède un historique

marquant et une tradition d’action publique citoyenne. D’abord sous le leadership de

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Monseigneur Lavoie, les citoyens ont toujours su s’approprier de leur milieu. Par conséquent,

la revitalisation du Quartier Saint-Roch ne s’est pas faite unilatéralement par le palier

politique, mais a intégré, dans le processus, de multiples acteurs, chacun portant son champ

d’intérêt.

Historique du Quartier Saint-Roch

À l’aube du 20e siècle, le Quartier Saint-Roch fut un quartier très prospère de la Ville

de Québec. Véritable cœur commercial de la Ville, le quartier a su attirer les habitants, par

son architecture, son économie florissante et son dynamisme. Toutefois, après une période de

prospérité, le Quartier Saint-Roch a vécu un déclin économique vers la fin de la Deuxième

Guerre mondiale. En effet, le quartier a connu des difficultés en lien avec l’urbanisation

grandissante de la Ville et la venue des grands centres commerciaux. Ces événements,

conjugués à l’exode croissant des habitants du quartier, la dégradation des infrastructures et le

déclin économique d’après-guerre (Harvey, Nizeyimana; 2007, 11), auront eu pour effet de

mener le quartier à la décrépitude. À partir de ce moment, de multiples tentatives de relance

du quartier auront lieu. Dans les années 1970, on bétonne les berges de la rivière Saint-

Charles, on installe un mail extérieur, on ferme la rue Saint-Joseph aux voitures, on installe un

toit au mail, on tente d’embellir le quartier. Bref, on essaie de redonner souffle à l’ancienne

artère principale de la Ville de Québec. Toutefois, cette « revitalisation » se fait par le haut

avec de grands projets d’infrastructures (autoroute, complexe d’affaires) qui soulèvent

plusieurs mouvements contestataires.

Après plusieurs tentatives de revitalisation, qui ont abouti tantôt en succès, tantôt en

échecs, les élus municipaux et les acteurs sociaux ont décidé d’opter pour une nouvelle

approche (Dambroise; 2006, 3); la rénovation urbaine ne pouvant plus susciter une adhésion

populaire (Mercier; 2000, 249).

Le processus de revitalisation du Quartier Saint-Roch

« C’est les artistes qui ont lancé le bail du concept de revitalisation en s’impliquant dans le quartier, en amenant des projets comme Méduse, en éveillant la population sur la beauté de certains immeubles, comme la Fabrique », Jean Pearson, président

du Conseil de Quartier et Artiste fondateur du Complexe Méduse

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Élu en 1989, le Maire L’Allier décide de faire de la revitalisation du Quartier Saint-

Roch, une de ses priorités. L'enjeu principal de la campagne municipale a d’ailleurs été cristallisé autour du projet de la Grande Place du Quartier Saint-Roch (grand projet d’autoroute qui transcendait le quartier). Ce débat opposait Jean Pelletier et Jean-Paul L’Allier, deux hommes très différents idéologiquement et avec une vision distincte de Saint-Roch. Avec

L’Allier, dorénavant, on écoute la population afin que l’urbanisme de Saint-Roch se dote

d’une plus grande légitimité, « en opposition à l’urbanisme municipal, que l’on accusait de

servir avant tout l’intérêt des promoteurs, des gens d’affaires et des gouvernements »

(Mercier; 2000, 242). Il décide d’y aller avec un plan ambitieux, RevitalisAction, dont le but

premier est de redonner vie au quartier, tout en conservant les acquis du milieu; c’est-à-dire

en travaillant avec ses habitants. Ce point de départ dans la revitalisation de Saint-Roch se

déroule autour de plusieurs axes, mais surtout au niveau de la culture, de l’éducation, de

l’habitation et des nouvelles technologies. C’est ainsi que les locaux vides et les nouveaux

édifices prendront propriétaires avec la venue d’importantes entreprises et institutions, dont

l’ENAP, l’École des arts visuels de l’Université Laval, l’INRS, le complexe Méduse, Ubisoft,

etc. Ces organisations ont été un coup de pouce important à la revitalisation, en plus de

dynamiser le quartier. Mais avant tout, le projet RevitalisAction est articulé autour d’un pivot

principal, le citoyen. Effectivement, la Ville de Québec tente de conjuguer revitalisation et

qualité de vie de la population locale, en encourageant la prise de parole des organismes

communautaires et sociaux, notamment au niveau des tables de concertation sur l’itinérance,

des organismes d’hébergement et d’entraide sociale (Dambroise; 2006, 4). Les premiers

bénéficiaires du projet doivent donc être les citoyens. Cette manière de faire est certes plus

longue, « il n’en demeure pas moins que ces consultations publiques sont commodes pour

affirmer que l’urbanisme québécois est maintenant à l’écoute de la population de Saint-

Roch » (Mercier; 2000, 249). L’ère n’est plus à « faire la ville », mais bien à « faire avec la

ville » (Jacquier; 2005).

Plusieurs initiatives vont découler de ce projet. En premier lieu, le Jardin Saint-Roch

va faire son apparition et va devenir la plaque tournante du projet. De cette décision va en

découler plusieurs autres. Une partie du toit du mail sera retirée en 1998 et des avantages

fiscaux considérables consentis par le Gouvernement du Québec vont attirer plusieurs

entreprises nécessitant un large bassin de main-d'œuvre. L’implantation de plusieurs édifices

gouvernementaux va aussi raviver l’essor économique du quartier. La destruction des

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bretelles de l’autoroute Dufferin va aussi revitaliser le quartier et offrir une meilleure

architecture. Dans son plan Rebâtir la rue Saint-Joseph, la Ville de Québec confirme son

désir d’enlever la dernière partie du toit du mail et souhaite réaménager l’artère principale de

la rue Saint-Joseph. Elle opte pour une consultation publique afin de recueillir les avis de la

population locale. L’objectif de mixité sociale demeure dans les plans de la Ville, tout en

participant au renouveau du quartier. De plus, entre 1992 et 2007, c’est 377 millions de

dollars qui seront investis, par les secteurs public et privé dans la revitalisation, dont 84.4

millions en habitation (Rebâtir la rue Saint-Joseph, bilan de la phase 1; 2007, 9). Le grand

enjeu est de préserver l’équilibre entre l’habitat et les activités économiques.

Malgré les bonnes intentions du Maire L’Allier et des élus municipaux, la

revitalisation du Quartier Saint-Roch a entraîné certains effets néfastes non voulus au sein de

la population locale. En effet, plusieurs réussites découlent du projet RevitalisAction, mais

reste que certains endroits du quartier demeurent précaires et les signes de pauvreté sont

toujours présents. Même si le quartier a connu une hausse de revenu, il reste parmi les plus

défavorisés de la Ville de Québec, avec Saint-Sauveur et Limoilou. En outre, la destruction du

toit du mail, en 1998, a provoqué de vives réactions au sein des couches défavorisées de la

population du quartier, dont les personnes sans domicile fixe. La revitalisation du quartier a

amené des commerces luxueux et des restaurants coûteux, que la majorité des habitants ne

peuvent se payer. La partie du quartier située à l’extérieur de la rue Saint-Joseph, entre la rue

du Pont et de la Couronne, demeure dans un état d’extrême pauvreté à certains endroits. Des

tensions entre deux classes sociales différentes partageant un même quartier sont toujours

présentes. Bref, la revitalisation n’a pas eu que des effets positifs. C’est à se demander si le

« Nouvo Saint-Roch » a troqué la pauvreté pour la bourgeoisie depuis les dernières années. Il

sera ainsi intéressant, au cours des prochaines années, d’observer le tournant que prend ce

« Nouvo Saint-Roch » branché et luxueux.

Cadre théorique Plusieurs concepts seront utilisés afin d’illustrer les impacts de la mobilisation de la

revitalisation du Quartier Saint-Roch.

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La revitalisation urbaine intégrée (RUI) - ou Approche territoriale intégrée

Le Quartier Saint-Roch ne fait pas explicitement partie d’un projet de revitalisation

urbaine intégrée – ou Approche territoriale intégrée. Toutefois, les caractéristiques de sa

revitalisation convergent vers celles de la RUI et c’est pourquoi il est important de s’attarder à

ce concept dans l’étude de la mobilisation derrière la revitalisation du Quartier Saint-Roch.

Brièvement, la RUI est composée des 5M - Multisectorielle, Multiéchelon, Multisphère,

Multiniveau et Multipartenaire. Ainsi, la revitalisation urbaine intégrée vise « l’amélioration

des conditions socioéconomiques et le cadre de vie d’un territoire défavorisé donné » (Divay

et al; 2006, 17), à l’aide d’une vision globale, territorialisée et concertée. Elle dispose d’une

vision à long terme et fait intervenir la participation des citoyens.

La gentrification

La gentrification est l’exode de populations démunies au profit de ménages plus

nantis. Ce processus est lié avec l’augmentation de populations plus aisées, l’amélioration

physique du quartier et une transformation de la nature du quartier (Kennedy et Leonard;

2001). Dans cette perspective, il est intéressant d’analyser la revitalisation de Saint-Roch sous

l’angle de la gentrification, car bien évidemment, le développement socio-économique des

milieux n’anticipe jamais ce genre de phénomène. La revitalisation veut ainsi éviter à tout

prix la gentrification.

La mixité sociale

La mixité sociale est très importante dans le Quartier Saint-Roch, car elle représente

un des nombreux défis auxquels le quartier fait face. D’ailleurs, Saint-Roch, sous l’initiative

du groupe communautaire L’Engrenage, a offert un premier forum citoyen sur la mixité

sociale en mars dernier. On peut définir la mixité sociale comme l’envers de la ségrégation,

c’est-à-dire la volonté d’assurer la coexistence de plusieurs catégories sociales au sein d’un

même milieu, ici le quartier. Cette mixité sociale passe par « une offre appropriée de

commerces et de services, mais aussi par la cohabitation de différentes catégories

socioéconomiques » (Freedman; 2009, 412).

La participation citoyenne

La participation citoyenne est au cœur de la revitalisation du Quartier Saint-Roch.

Cette participation permet au citoyen de « contribuer à l’élaboration des politiques et au

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fonctionnement des organismes et des services publics » (Côté, Lévesque et Morneau; 2005,

3). Ce mode de gouvernance pluraliste se renouvelle constamment, allant de la consultation à

l’autogestion. Même si la participation citoyenne tend vers un regain de popularité, elle est

présente dans l’environnement québécois activement depuis les années 1960, avec les comités

de citoyens.

Le capital social

Le capital social peut référer à plusieurs éléments, mais en général, il s’agit de « la

capacité et la volonté de coopération inhérentes à un tissu social et englobant ainsi tout autant

l’aspect institutionnel que l’aspect individuel » (Côté; 2002, 353). Le capital social

convergerait vers la solidarité et la confiance qui règne dans une communauté. La

revitalisation urbaine de Saint-Roch a ainsi comme principal objectif de construire ce capital

social dans le milieu de vie du quartier (Divay; 2005, 80).

L’appropriation d’espaces urbains

On entend par « appropriation d’espaces urbains » les espaces investis par les

populations d’un quartier. L’analyse de la revitalisation du Quartier Saint-Roch interpelle ce

concept étant donné que le projet s’est fait grâce à l’appropriation qu’en ont faite les citoyens

et autres acteurs locaux. Ces derniers se sont sentis interpellés par l’augmentation de la qualité

de vie de leur quartier et y ont mis chacun un effort (Voir annexe 1).

Méthodologie

Dans le cadre de notre analyse, nous avons procédé par triangulation de nos données

théoriques avec celles empiriques. En effet, nous avons fait une revue de littérature portant sur

les recherches concernant le Quartier Saint-Roch et les projets de revitalisation urbaine. Nous

avons prêté attention aux études portant sur l’action publique dans le développement social

urbain. De plus, nous avons fait appel à plusieurs intervenants du milieu pour avoir un avis

d’expert de la revitalisation ayant eu lieu à Saint-Roch. Ainsi, nous avons eu quatre entrevues

avec les personnes suivantes : Marcel Landry, un citoyen actif du quartier, Jean Pearson,

l’actuel Président du Conseil de quartier de Saint-Roch, Éric Boulay, coordonnateur à la

Maison L’Auberivière et Pierre Maheux, ancien conseiller municipal. Ces entrevues semi-

dirigées nous ont permis d’avoir un avis de terrain, à l’abri des biais scientifiques.

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Plusieurs intervenants pertinents auraient pu être interrogés. Toutefois, les limites du

travail ont forcé la concentration des entrevues vers la disponibilité des intervenants.

Hypothèses

Plusieurs hypothèses peuvent être émises concernant la mobilisation des acteurs

locaux autour de la revitalisation du Quartier Saint-Roch. D’abord, une première hypothèse

concerne la participation et la légitimité du processus. En effet, les acteurs ayant été impliqués

formellement dans le processus de revitalisation auraient tendance à mieux percevoir ses

effets. Ensuite, en lien avec la nature mobilisatrice du projet, la présence d’intérêts divergents

dans le Quartier Saint-Roch, aurait amené les acteurs à se concerter. Finalement, les stratégies

des acteurs n’auraient pas été statiques tout au long du processus de revitalisation. À cet effet,

elles auraient évolué au même titre que les attentes des acteurs (effet de la concertation). Les

acteurs s’ajusteraient les uns aux autres pour assurer leur coexistence (Cloutier; 2009, 191).

Analyse en lien avec le processus de revitalisation

« Les transformations de la planification urbaine se font à la faveur de l’intégration des

dimensions sociale, économique et physique ainsi que des secteurs public, privé et

sociocommunautaire dans le processus de prise de décision » (Cloutier; 2009, 179). C’est ce

que l’analyse suivante tentera d’examiner, à savoir l’entier processus de mobilisation des

acteurs locaux dans le cadre de la revitalisation du Quartier Saint-Roch (voir annexe 2).

Enjeux de la mobilisation

Plusieurs enjeux ressortent derrière la revitalisation du Quartier Saint-Roch, À prime

abord, le projet vise l’amélioration du cadre de vie des habitants. En effet, on veut dynamiser

le quartier, installer du logement social pour les ménages à faible revenu et améliorer

l’environnement général du quartier. Par exemple, on veut diminuer la circulation automobile,

lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale, et rendre la ville plus attrayante pour ses

habitants. Ensuite, la sécurité est un enjeu important pour Saint-Roch. Ayant été témoin et

victime de la guerre des motards, le quartier mise sur l’augmentation de la sécurité pour faire

baisser le taux de criminalité. À cet effet, la revitalisation a eu raison des motards, car ils ne

sont plus du quartier. Pour la sécurité urbaine en général, la revitalisation vise une

augmentation de la tolérance, une présence policière plus accrue et une diminution des effets

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qui engendrent la criminalité (pauvreté, commerces, etc.). Aussi, une certaine mixité sociale

fait-elle partie de la volonté de plusieurs acteurs du quartier dans le cadre de la revitalisation

du Quartier Saint-Roch, en voulant éviter à tout prix des effets de gentrification, ou encore,

éviter la formation de ghetto.

En outre, la revitalisation du Quartier Saint-Roch vise l’embellissement du quartier.

On veut faire de Saint-Roch un milieu vivant et dynamique. Cet embellissement a aussi pour

but d’attirer de nouvelles clientèles et des touristes afin que Saint-Roch retrouve son statut de

centre-ville. « Pour revitaliser un quartier tu ne peux pas seulement penser aux gens en place localement, c’est un centre-ville, tu dois penser à amener des touristes » Éric Boulay, L’Auberivière L’aménagement du centre-ville est ainsi prioritaire afin que le quartier retrouve sa prospérité

économique d’autrefois. Puis, la revitalisation veut lutter contre la dégradation du cadre bâti

du quartier, notamment en améliorant les infrastructures. Cette amélioration matérielle du

quartier va de pair avec l’amélioration générale du quartier.

Les acteurs impliqués

Plusieurs acteurs sont concernés par la revitalisation du Quartier Saint-Roch et se sont

mobilisés à cette fin. En premier lieu, les citoyens — ou comité de citoyens – ont pris part à la

revitalisation qui touchait leur milieu de vie. En deuxième lieu, les organismes

communautaires ont mis la main à la pâte, étant touchés directement par la dévitalisation du

quartier. En troisième lieu, les entreprises privées sont concernées par la revitalisation,

notamment les commerçants, les associations de commerçants et les promoteurs. En

quatrième lieu, les institutions politiques, particulièrement la Ville de Québec et les nombreux

ministères provinciaux et fédéraux, sont intervenues dans le processus de revitalisation à

travers plusieurs programmes. En cinquième et dernier lieu, les institutions de développement

se sont mobilisées dans le développement du Quartier, comme la SDC, la CDEC, le CLSC et

le CLD.

Les positions des acteurs

Chaque acteur défend une position particulière dans la revitalisation du Quartier Saint-

Roch. D’abord, les citoyens défendent une amélioration de la qualité de vie et de la sécurité

dans leur quartier. Cette priorité constitue l’axe principal de leur intervention. En général, ils

souhaitent une mobilisation en respect de l’image du quartier; c’est-à-dire la préservation de

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la culture sociale du quartier. En outre, les citoyens veulent faciliter la cohabitation, que ce

soit entre citoyens ou avec divers intervenants (commerces, institutions, organismes). Ils

désirent s’approprier du processus de revitalisation. Il est à noter que l’éveil citoyen

concernant la revitalisation du quartier s’est fait autour des années 90, avec l’arrivée au

pouvoir de Jean-Paul L’Allier, du Rassemblement populaire. Depuis ce temps, ils participent

activement aux consultations citoyennes. Les artistes ont aussi eu un rôle à jouer au début en

stimulant la vie sociale et économique du quartier. D’ailleurs, sous l’initiative des artistes, le

Complexe Méduse est un symbole de la revitalisation et un bel exemple d’intégration moderne

du patrimoine bâti du quartier.

Ensuite, les organismes communautaires visent, tout comme les citoyens, une

amélioration de la qualité de vie et de la sécurité du quartier. En plus, ils désirent maintenir la

cohésion sociale en agissant bien souvent en tant qu’interlocuteurs entre leurs clientèles et les

acteurs locaux. La lutte à la pauvreté et à l’exclusion sociale fait aussi partie de leurs objectifs.

Leurs clientèles nécessitent des besoins particuliers et ils désirent participer activement à la

mobilisation dans le processus de revitalisation.

En outre, les entreprises privées visent des intérêts particuliers en lien avec les intérêts

commerciaux. Certains commerces ont comme objectif d’attirer de nouvelles clientèles, des

touristes, voire de transformer le Quartier Saint-Roch en destination par excellence pour le

magasinage. En général, les commerçants, associations et promoteurs désirent un

embourgeoisement commercial du quartier. Par contre, d’autres commerces, souvent de

proximité, veulent conjuguer développement économique et respect des communautés

locales. Ils s’assurent ainsi que les biens et services offerts correspondent à ceux des

populations environnantes. Néanmoins, les entreprises privées convergent toutes vers un

intérêt commun, soit assurer la prospérité économique du quartier. D’après les entretiens

réalisés, certains commerçants aimeraient tasser la pauvreté étant donné que certains de leurs

clients seraient embêtés par la présence de populations marginales et leur effet sur l’image du

quartier. À ce sujet, le promoteur GM Développement a fait quelques sorties médiatiques,

voulant que les itinérants nuisent à la prospérité économique du quartier, car ils font fuir les

acheteurs et touristes. Les associations et promoteurs de Saint-Roch ont ainsi le but principal

de défendre les intérêts du privé.

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De plus, les institutions politiques ont la mission explicite de servir les citoyens et voir

ce qui peut être fait pour améliorer le quartier et la cohabitation. L’embellissement du

quartier, l’amélioration des conditions de vie des habitants et assurer une sécurité maximale

font partie du grand nombre d’objectifs que ces institutions poursuivent. Ils veulent dynamiser

le quartier en assurant une diversité dans le quartier, en amenant de nouveaux types de

ménages (70% des ménages sont non familiaux (CDEC; 2004) et cela passe aussi en attirant

des institutions et de nouveaux acteurs. À cet égard, on peut noter la présence de l’ENAP,

l’Université Laval, l’INRS, Beenox, etc. La lutte à la pauvreté et à l’exclusion sociale fait

aussi partie d’une grande partie de la mission sociale politique.

Enfin, les institutions de développement désirent développer la prospérité du quartier,

et ce, en attirant de nouveaux agents sociaux et économiques, que ce soit des entreprises, des

organisations ou de nouveaux réseaux. Ces institutions veulent favoriser l’entreprenariat et

développer l’employabilité du quartier. De plus, plusieurs de ces institutions, comme la

CDEC, tentent de faire converger le développement social avec le développement

économique, par le biais de l’économie sociale par exemple.

Les ressources des acteurs

En premier lieu, les citoyens disposent comme ressource principale leur présence en

nombre. En effet, plus de 9 000 personnes habitent le quartier et la force du nombre peut être

une ressource redoutable en cas de mobilisation. Aussi, disposent-ils d’une expertise de

terrain, une expertise citoyenne qui leur permet d’être à vif de leurs besoins et de ce qu’ils

veulent. Cette expertise devient du même coup une « condition de l’appropriation par les

communautés de leur développement » (Bourque et Favreau; 2003, 301) et permet de mettre

de l’avant les valeurs et orientations des citoyens, ce que les institutions ne peuvent connaître,

à moins de s’en informer. Par conséquent, leur présence aux consultations citoyennes, les

dépôts de mémoires et leur participation citoyenne au niveau du Conseil de quartier, du

Conseil de ville et des comités citoyens font en sorte qu’ils disposent d’outils pour se faire

entendre.

En deuxième lieu, les organismes communautaires disposent aussi d’une certaine

expertise du quartier et de ses besoins comme ressources. Cette expertise de processus dans la

mise en place des programmes fait d’eux des ressources essentielles pour les administrations

gouvernementales. Les organismes communautaires de Saint-Roch sont fréquemment

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consultés par la Ville et par les gouvernements pour leur connaissance du milieu. De plus, ils

déposent fréquemment des mémoires lors des commissions parlementaires les touchant, lors

des consultations populaires, etc. Par exemple, l’Auberivière est souvent la ressource

principale en matière de lutte à l’itinérance dans la Ville de Québec, ayant acquis, au fil des

années, une certaine notoriété et du respect en la matière. Enfin, ils publient plusieurs

informations pour mobiliser les gens et informer, notamment des plans directeurs, des chartes,

etc.

En troisième lieu, les entreprises disposent du nerf de la guerre, à savoir le pouvoir

monétaire. En effet, l’entreprise privée dans Saint-Roch possède un poids économique

considérable, amplifié lorsqu’il s’agit de regroupements. En ce qui concerne les promoteurs,

les bâtiments commerciaux sont possédés à environ 75% par un seul promoteur : GM

Développement. Ce monopole dans la possession des infrastructures révèle un pouvoir

économique considérable qui peut vite s’avérer en un pouvoir politique du même coup. Ainsi,

GM Développement contrôle le développement économique du quartier en décidant qui vient

s’installer et qui ne vient pas s’installer, mais aussi, qui doit partir.

En quatrième lieu, les institutions politiques disposent de l’influence politique. Ils

détiennent la majorité du financement attribué à la revitalisation du Quartier Saint-Roch

(ressources financières). Les élus peuvent davantage influencer les décisions politiques. C’est

la remarque de Pierre Maheux, qui a vécu le chapeau d’agent communautaire et d’élu

politique : « la différence, c’est que comme conseiller, tu peux influencer ». De plus, les

institutions politiques disposent de ressources humaines dans l’élaboration de leurs politiques,

notamment leurs personnels administratifs. Ces derniers détiennent une expertise de contenu,

dictant bien souvent les définitions de problématiques et des politiques.

En cinquième lieu, les institutions de développement coordonnent des ressources

financières, les rendant essentielles dans le cadre de la revitalisation du Quartier Saint-Roch.

Elles disposent elles aussi de personnel attitré à l’élaboration de politique et mesure de

développement. Pour représenter le leadership de ces institutions, on peut mentionner la

technopole Angus qui, grâce à la forte implication de la CDEC de Rosemont-Petite-Patrie, est

passée de complexe industriel abandonnée à véritable complexe de haute-technologie et

d’économie sociale, au lieu de devenir un complexe de condominiums (Klein; 2003).

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Leurs stratégies

« Quand un quartier se développe aussi vite, il faut s’asseoir, et voir vers où on s’en va et qu’est-ce qu’on veut faire » Jean Pearson

D’abord, les citoyens ont comme principale stratégie se faire entendre, signaler leur

point de vue et inquiétude. Ainsi, ils doivent participer aux consultations publiques. Aussi,

participent-ils directement à la revitalisation à travers différentes initiatives individuelles. On

peut noter parmi ces initiatives, les tâches annuelles de corvée citoyenne; la participation à

l’embellissement du quartier (Îlot Fleurie) et diverses manifestations citoyennes.

Ensuite, les organismes communautaires participent à la mise en œuvre des

programmes et apportent une expertise dans l’élaboration de ces programmes. Leur stratégie

est de s’assurer que la revitalisation respecte les populations les plus marginalisées ou les plus

souvent mises à l’écart. Ils doivent s’assurer que le processus de revitalisation ne mette pas à

l’écart la pauvreté, mais agissent sur les facteurs menant à la pauvreté afin de l’enrayer dans

la mesure du possible. Dans ce dessein, ils participent régulièrement aux tables de

concertation (Rebâtir la rue Saint-Joseph par exemple) et favorisent la coopération à travers

différents partenariats avec les citoyens, les commerces et/ou les institutions. Ils prennent

souvent la parole en groupe ou agissent ensemble (Regroupement pour l’aide aux itinérants et

itinérantes du Québec, Fondation Saint-Roch, etc.)

En outre, les entreprises privées ont comme stratégie de développer le quartier pour en

faire un attrait, un lieu de destination par excellence pour les clients et touristes. Ils prennent

souvent la décision de se regrouper (SDC + Chambre de commerce) afin d’avoir plus de poids

dans leurs actions et revendications, par exemple, la demande en stationnement. Le promoteur

GM Développement a comme principale stratégie d’attirer des commerces de luxe pour

assurer sa sécurité financière. Certaines entreprises privées ont décidé de travailler pour la

revitalisation du quartier, notamment l’Intermarché qui facilite l’insertion au travail de

personnes marginalisées.

Aussi, les institutions politiques veulent-elles développer davantage de programmes

pour la revitalisation bien souvent dans le cadre de partenariat. Ils désirent alors avoir la

collaboration des organismes et institutions du quartier. Les institutions désirent le ralliement

des acteurs locaux au projet – via les consultations. (changement de culture entre le Maire

Page 16: La revitalisation du Quartier Saint-Roch; Analyse d’une expérience locale de mobilisation

16

Pelletier et le Maire L’Allier). Leur stratégie consiste aussi à s’approprier les succès pour

valoriser leurs interventions, au grand détriment des organismes communautaires. Ils agissent

aussi pour attirer de nouveaux acteurs sociaux et économiques d’importance. Par exemple, ils

ont construit de nouvelles infrastructures scolaires pour l’ENAP et l’INRS et ont fait de Saint-

Roch, une zone de priorité pour l’industrie de haute technologie (Beenox, Ubisoft, etc.)

Enfin, les institutions de développement participent aux tables de concertation et aux

consultations et collaborent avec les acteurs du quartier. Elles veulent développer le quartier

tout en préservant la culture sociale de celui-ci.

Financement et reddition de compte « Il y a de l’argent qui est disponible. Financièrement, le quartier ne manquera pas de fonds pour poursuivre, je ne crois pas. C’est un mouvement qui a été endossé par tel-

lement de gouvernements et d’acteurs… tout le monde est dans le coup. L’argent vient autant du privé que du domaine public » Jean Pearson

La majorité du financement provient du gouvernement québécois à travers plusieurs

enveloppes budgétaires. Par exemple, le gouvernement finance les organismes

communautaires à travers le budget dédié à la lutte à la pauvreté et à l’exclusion sociale. Ils

investissent aussi dans les infrastructures, par le biais des fonds (comme Chantiers Canada et

le Fonds de rénovation des infrastructures municipales). L’enveloppe budgétaire attitrée à la

culture finance les nombreux artistes de Saint-Roch et favorise l’émergence de nouveaux

artistes. De plus, le gouvernement a fait une grande part dans le processus de revitalisation à

travers ses efforts pour attirer certaines entreprises. Les baisses d’impôts accordées aux

entreprises de haute technologie venant s’installer dans le Quartier Saint-Roch ont favorisé

l’arrivée de cette industrie. La construction de nouveaux édifices pour l’ENAP et l’INRS a

aussi grandement encouragé leur venue.

Du côté des organismes communautaires, ils organisent annuellement des collectes de

fonds dans le quartier pour se financer. Ils retirent aussi leur financement du gouvernement, à

travers le budget attitré à cette fin. La Ville, quant à elle, ne finance pas ces organismes, mais

leur offre un soutien logistique et matériel dans leurs activités.

Dans le cadre de la revitalisation, chacun doit rendre des comptes. A priori, les

citoyens sont redevables envers eux-mêmes. Les organismes, quant à eux, doivent rendre des

comptes à leur conseil d’administration, composé de divers acteurs du milieu, à leurs bailleurs

Page 17: La revitalisation du Quartier Saint-Roch; Analyse d’une expérience locale de mobilisation

17

de fonds pour certains programmes spécifiques, et envers leurs clientèles. Les entreprises

privées sont redevables envers leurs dirigeants. Le personnel politique, lui, est redevable à la

population et les institutions de développement sont imputables envers leurs bailleurs de

fonds, mais aussi envers leurs clients (citoyens, commerces, organismes)

Leurs effets sur le milieu (réels et attendus)

Peut-on dire que la revitalisation a atteint ses objectifs? On ne peut pas encore le dire

certes, car la revitalisation n’est pas terminée, mais si on prend en compte les objectifs

généraux initiaux qui étaient l’amélioration de la qualité de vie et de la sécurité du quartier, on

peut dire que plusieurs objectifs ont été atteints et que du progrès a eu lieu en la matière.

Selon Jean Pearson, président du Conseil de Quartier, il y aurait encore du travail pour 25 ans.

Entre 1996 et 2001 :

Le revenu des ménages est passé de 15 937$ à 19 644$ (plus grande augmentation parmi les quartiers couverts par la CDEC de Québec)

Le taux d’habitant sans diplôme est passé de 44% à 33% Le taux d’emploi est passé de 36 à 48% Le taux de chômage a diminué de 12% Le revenu des familles monoparentales dont le parent est de sexe féminin est passé

d’environ 18 400$ à 25 200$ (Source : CDEC de Québec; 2004)

En ce qui concerne le sentiment d’appartenance des habitants du Quartier Saint-Roch,

on peut dire que la fierté et l’estime du quartier les a regagnés. Les citoyens sont désormais

fiers d’habiter le quartier. Ils sont fiers de l’embellissement de leur quartier, notamment par le

fleurissement de leur milieu de vie et la sécurité engendrée par le départ des motards. Par

rapport à ce dernier point, sans la revitalisation du quartier, les motards seraient probablement

encore dans le quartier et entretiendraient un climat de peur et d’insécurité.

En ce qui a trait à la lutte à la pauvreté et à l’exclusion sociale, il y a plus de ressources

qu’avant. Plusieurs ont craint les effets néfastes de la destruction du mail Saint-Roch sur les

itinérants, toutefois, on a créé des alternatives. On a aménagé le Rendez-Vous Centre-Ville

pour pallier les effets négatifs engendrés par la destruction du mail. De plus, à Saint-Roch, on

retrouve une des plus grandes concentrations d’organismes communautaires et de logements

sociaux, au Canada. Donc, la pertinence des organismes communautaires est réelle et elle

répond à des besoins bien précis.

Page 18: La revitalisation du Quartier Saint-Roch; Analyse d’une expérience locale de mobilisation

18

Pour ce qui est de la mixité sociale, la volonté des acteurs locaux est bel et bien là.

D’ailleurs, à cet effet, le groupe communautaire L’Engrenage a organisé le premier forum

citoyen sur la mixité sociale en mars dernier qui a interpellé des centaines d’acteurs. Le

Conseil de quartier possèdera sou peu une charte sur la mixité sociale. Bref, tous les intérêts

des acteurs convergent vers cette mixité sociale tant recherchée : « La mixité, ce n’est pas encore fait. On a une belle diversité, mais de là à arriver à la mixité, il y a encore du travail à faire, et c’est réalisable, par la volonté des acteurs », Éric Boulay, L’Auberivière. Toutefois, il peut avoir un décalage entre la volonté affirmée de mixité sociale et le

développement du quartier : « une contradiction se révèle par la disparition progressive des

commerces proposant de la marchandise bon marché (magasins, restaurants) et la volonté de

conserver une population diversifié dans Saint-Roch» (Freedman; 2009, 410). Si le

développement de Saint-Roch continu à miser sur les commerces de luxe uniquement, la

mixité risque donc d’être plus difficile à atteindre.

Côté amélioration physique, le quartier s’est sans aucun doute embelli; il y a

dorénavant plus de fleurs, plus d’espaces verts. Cette amélioration collabore du même coup

aux conditions de vie des habitants. Par exemple, l’aménagement du Jardin Saint-Roch et

l’Îlot Fleurie ont contribué à cette amélioration physique. De plus, plusieurs infrastructures

ont subi une cure de jeunesse, grâce à l’investissement des gouvernements.

Du point de vue de la tolérance, les objectifs n’ont pas encore été atteints, mais les

organisations communautaires travaillent d’arrache-pied pour y parvenir. La cohabitation

entre les citoyens et les commerces est parfois difficile. Les préjugés vont par contre dans les

deux sens. Les commerçants se plaignent de la présence de personnes incommodantes

(itinérants, personnes marginales) alors que les citoyens se plaignent de la trop grande

présence de commerces qui ne sont pas adaptés à leurs besoins. Un fait intéressant à ce sujet :

tous les commerces des quartiers s’arrachent les bancs devant leurs commerces. Il est bien vu

d’avoir un banc à proximité de son milieu d’affaires. Le Quartier Saint-Roch est le seul

endroit à Québec où les commerçants n’en veulent pas, ces bancs ayant comme preneurs des

itinérants. Un travail supplémentaire devra donc être fait pour améliorer la cohabitation d’une

diversité d’acteurs pour faire augmenter la tolérance.

Page 19: La revitalisation du Quartier Saint-Roch; Analyse d’une expérience locale de mobilisation

19

Les objectifs de diversité économique ont été réussis avec la venue d’entreprises de

haute technologie, de communication et d’institutions scolaires. Le quartier assure ainsi une

mixité économique. Toutefois, les citoyens seraient d’avis que le quartier devrait davantage

développer les commerces de proximité.

Est-ce que ces effets ont réellement été engendrés par la revitalisation ? De plus,

l’amélioration des conditions de vie dans le quartier est-elle redevable à la revitalisation, ou à

l’exode de ménages pauvres qui ont été remplacés par une population plus riche ? Seul le

temps nous le dira, car les méthodes d’évaluation sont très difficiles à court terme. Au cours

des prochaines années, plusieurs défis seront mis de l’avant : plus de tolérance dans le

quartier, davantage de familles avec enfants, une augmentation du développement des loisirs,

une diminution de la circulation automobile et, bien sûr, une mixité sociale.

Difficultés rencontrées

La revitalisation ne s’est pas faite - et ne continuera pas à se faire - sans difficulté. En

effet, quoique la revitalisation du quartier n’ait pas eu les effets dévastateurs de certaines

rénovations urbaines, comme à Los Angeles où les autorités ont dû détruire les logements

sociaux afin d’enrayer le phénomène de ghettoisation, elle a rencontré des obstacles. D’abord,

la cohabitation difficile entre les habitants et les commerçants est un grand défi pour la

coopération (il y a trop d’organismes communautaires vs frustration envers les commerces de

luxe). Cet acharnement envers les organismes communautaires consiste à un obstacle à la

bonne coopération de chacun. « Il faut arrêter les chicanes stériles. Il faut que les commerçants concentrent leurs efforts de manière

plus optimiste et positive » Pierre Maheux « Il y a un débat concernant les commerçants et le développement commercial. Il y a des préjugés aussi,

des vraies informations et des fausses. Il y a des gens d’affaires qui se sont faits promettre faussement des affaires appuyées par le politique. Il y a eu des déceptions de la part de certains » Jean Pearson

D’ailleurs, le fait que GM Développement détienne un monopole dans la possession des

infrastructures du quartier est problématique. Ce promoteur semble agacé avec le principe de

mixité entre le secteur commercial et celui communautaire.

Ensuite, la lutte aux préjugés et au refus de l’autre est un obstacle à la bonne

coopération. Les préjugés n’épargnent personne, car tous les acteurs sont susceptibles de

développer cette attitude, soit par ignorance soit par manque de tolérance. On a revitalisé le

quartier, sans toutefois réussir à changer la vision de plusieurs personnes, surtout extérieures.

Page 20: La revitalisation du Quartier Saint-Roch; Analyse d’une expérience locale de mobilisation

20

« Il y a du monde qui arrive dans Saint-Roch et qui n’a jamais vu du monde quêter, solliciter, des fous. Ils pensent que c’est du monde dangereux et quand tu n’as jamais vu ça, c’est un choc! » Pierre Maheux

Tant et aussi longtemps que ces stéréotypes véhiculeront dans le quartier, les partenariats ne

pourront fonctionner à leur état maximal.

De plus, il est évident que le démantèlement du toit du mail a suscité beaucoup de

craintes de la part des citoyens, des organismes communautaires et des populations

marginales. Toutefois, plusieurs intervenants communautaires croient que la revitalisation

n’aurait pu être faite sans cette étape fatidique. Malgré cette difficulté, on a créé des

alternatives et il a encore plus de services pour les personnes touchées par l’enlèvement du

toit du mail. Le mail n’offrait aucun service communautaire, par contre, le Rendez-Vous

Centre-Ville, lui, en offre.

En outre, une difficulté rencontrée dès le début du processus de revitalisation a été la

crainte des citoyens de Saint-Roch. Ils ont eu peur de se sentir exclus du processus. Avec du

recul, on peut affirmer que cette crainte s’est dissipée au fur et à mesure que le Maire L’Allier

les a inclus dans le processus de consultation. « Ça s’est fait avec beaucoup de difficulté. Ça a fait peur à beaucoup de monde. […] Ça s’est fait dans la douleur, mais quand la roue a commencé a tournée, on a eu plus confiance. Et là, il y a eu les bons coups… » Marcel Landry, citoyen. Par contre, les citoyens dénoncent certaines méthodes d’intervention douteuses

d’augmentation de la sécurité urbaine, associées au processus de revitalisation. En effet,

certaines interventions policières, disons musclées, ont entraîné des inquiétudes de la part de

la population : « Les policiers qui sont dans le quartier sont bien souvent en formation. Ils

viennent dans le quartier pour faire leur preuve, ce qui explique leurs interventions plus

dures » (Jean Pearson).

Enfin, la revitalisation du Quartier Saint-Roch a amené à une pression sur l’immobilier

qui s’est résultée en une hausse du prix des loyers. Cette hausse de prix a créé des

mécontentements, par contre, il est à noter que les prix des logements ont augmenté partout à

Québec. Néanmoins, cette augmentation a favorisé l’exode de certaines populations vers les

périphéries du quartier, et notamment à Saint-Sauveur et à Limoilou. On pourrait attribuer cet

impact au phénomène de gentrification qui peut s’être manifesté dans le processus de

revitalisation. (voir Annexe 3 ; logement social et communautaire dans Saint-Roch)

Page 21: La revitalisation du Quartier Saint-Roch; Analyse d’une expérience locale de mobilisation

21

Exemple de mobilisations locales réussies Au-delà des difficultés rencontrées, on peut noter une multitude d’actions réussies qui

a eu lieu dans le Quartier Saint-Roch. En premier lieu, l’épicerie L’Intermarché favorise

l’accès à l’emploi pour des individus en réinsertion sociale, en plus de leur offrir des

conditions salariales respectables. Avec le soutien du CLD et de la CDEC, le supermarché a

créé un fonds d’initiative culturelle pour les habitants du quartier. En effet, la Barberie offre

exclusivement une de ses bières artisanales, disponible à ce commerce et pour chaque bière

vendue, 1$ est versé au fonds. De plus, L’Intermarché contribue régulièrement dans les

activités communautaires du quartier, en offrant gratuitement de la nourriture. Par conséquent,

cette entreprise est un bel exemple d’action communautaire concertée (RQIS; 2007).

En deuxième lieu, l’Îlot Fleurie est né spontanément d’un mouvement de contestation

citoyenne. L’Îlot Fleurie a marqué l’histoire de la résistance populaire de Saint-Roch. Il s’agit

du même coup de la première intervention citoyenne avec des artistes en arts visuels. Il est

situé sous les bretelles de l’autoroute Dufferin. C’est donc un projet citoyen d’appropriation

de leur milieu de vie qui visait à créer un espace communautaire, un lieu de socialisation.

Malgré une réticence de l’administration municipale au départ, les citoyens ont eu l’appui des

autorités par la suite, notamment grâce à l’intervention du conseiller municipal à l’époque,

Jacques Fiset. Ce jardin a eu un effet très mobilisateur, sollicitant plus de 50 citoyens dont

certains ne s’étaient jamais impliqués socialement auparavant. Un certain respect a entouré ce

jardin, n’étant victime d’aucun vandalisme. À partir de ce moment, la Ville a commencé à

fleurir son centre-ville et à l’embellir de verdure.

En troisième lieu, plusieurs exemples démontrent la participation active des citoyens

dans leur cadre de vie. Des corvées de nettoyage sont annuellement organisées par les

citoyens eux-mêmes, afin d’embellir leur milieu de vie. En outre, les citoyens participent

activement à leur conseil de quartier, qui est lui-même très présent et actif dans la société.

Puis, les habitants du Quartier Saint-Roch participent aux tables de quartier, échangent entre

eux et participent à des forums citoyens. Bref, toutes ces initiatives favorisent le

développement de capital social. Suivi des résultats

Il est encore tôt pour évaluer adéquatement les impacts de la revitalisation. Toutefois,

diverses études font état de cette évaluation. En effet, il y a l’étude de l’impact de la

Page 22: La revitalisation du Quartier Saint-Roch; Analyse d’une expérience locale de mobilisation

22

revitalisation sur les artistes du Quartier Saint-Roch. Leurs conclusions sont qu’un processus

de gentrification a été enclenché et que la revitalisation, pour les artistes, agit autant comme

facteur de rétention, d’attraction que de répulsion (Boulianne et Fontanetti Aguiar; 2007).

Concernant le sort des femmes itinérantes, une étude conclut que le processus de revitalisation

a créé de l’exclusion territoriale et relate l’absence des femmes itinérantes dans le processus.

Une hostilité caractériserait le processus face à l’augmentation de la présence policière et le

phénomène de gentrification (Bourgeois; 2008).

Au niveau de la Ville, en 2006, le rapport des consultations publiques par rapport au

Plan directeur du quartier a mené à l’identification des points forts et des points à améliorer

du Quartier Saint-Roch. Parmi les points forts se trouvent les acquis culturels du quartier, le

patrimoine de proximité très riche, l’amélioration de la sécurité urbaine dans le quartier, le

potentiel de consommation du quartier, etc. Pour les points à améliorer, on peut trouver le

sentiment d’appartenance au quartier, la perception de la population externe au quartier en ce

qui a trait à la sécurité des lieux et le développement d’espaces verts.

Au niveau des organismes communautaires, ils font le suivi de leurs actions à travers

leurs rapports d’activités annuels. Par contre, peu d’organismes communautaires commandent

des recherches sur les impacts de la revitalisation.

Résultats globaux de l’analyse

Un constat général ressort de notre cueillette d’information et c’est que seules des

subventions n’auraient pu parvenir au degré actuel de revitalisation du quartier. Ce

financement a été nécessaire, mais une plus-value l’était encore plus et c’est dans la

mobilisation des différents acteurs locaux que la revitalisation a eu les résultats escomptés. Un

autre constat observé est que les acteurs ayant été impliqués dans le processus formel de la

revitalisation ont davantage de positivisme comparativement à ceux ayant été exclus du

projet. « La raison du succès est la concertation des acteurs. D’ailleurs, les acteurs concertés ont moins de

préjugés les uns envers les autres. C’est plutôt les commerçants et organismes qui n’ont pas été inclus dans le processus qui eux ne comprennent pas tout. Tant que tu ne fais pas parti du processus, c’est facile d’avoir des préjugés » Éric Boulay, L’Auberivière

La participation de chaque acteur aurait été primordiale à la revitalisation, « la seule

participation au processus de planification intégrée pouvant avoir des effets positifs tant pour

Page 23: La revitalisation du Quartier Saint-Roch; Analyse d’une expérience locale de mobilisation

23

les individus que pour la gestion de la vie urbaine » (Cloutier; 2009, 181). Par conséquent, les

tables de concertation, notamment Rebâtir la Rue Saint-Joseph, démontrent que toutes les

catégories de populations ont été des acteurs à part entière dans la revitalisation de Saint-Roch

(Freedman; 2009, 414).

Les stratégies des acteurs n’ont pas toujours été les mêmes. On a remarqué une

réticence au début vis-à-vis des organismes communautaires par rapport à la revitalisation.

Les organisations avaient une crainte envers le processus de revitalisation. Même la Ville ne

voyait pas toujours du bon œil les initiatives citoyennes (Îlot Fleurie). Mais quand les acteurs

ont convergé vers le même but, le même objectif, la coopération s’est faite.

Globalement, et historiquement, on peut dire que le quartier a changé physiquement.

Ce qu’on peut moins savoir, c’est au niveau social (enquête socioéconomique du quartier).

L’impact social pourra être vu dans plusieurs années. On pourrait dire qu’il y a eu beaucoup

de départs à cause des prix du logement, mais on ne peut pas confirmer, du moins, que c’est

une cause de la revitalisation. Il serait déloyal de condamner une initiative qui a apporté

beaucoup de positif que de négatif en créant un certain niveau de richesse.

Le processus d’évaluation de la revitalisation est difficile. Par exemple, on a de la

misère à expliquer pourquoi la zone de Langelier et Dorchester serait plus prospère malgré

l’absence d’investissement gouvernemental. On peut expliquer ce « succès » par la clientèle

différente de cette zone. C’est ce qui nous amène à séparer le quartier en deux zones pour

évaluer la réussite de la revitalisation. En effet, la zone Ouest, comprise entre Dorchester et

Langelier et la zone Est, située entre l’autoroute Dufferin et Dorchester, vivraient de manière

différente la revitalisation. C’est le constat observé par Jolyane Vigneau et Gabrielle Doucet-

Simard, dans une étude sur la gentrification dans Saint-Roch, commandée par la CDEC de

Québec, affirmant qu’un phénomène de gentrification aurait lieu dans la zone Est alors que

celle Ouest serait indifférente face à ce phénomène (Vigneau et Doucet-Simard; 2009).

L’évaluation de la revitalisation serait ainsi différente entre les zones Ouest et Est. De plus, le

processus d’évaluation devra tenir compte du volet participatif derrière la revitalisation. En

effet, les acteurs concernés par ce projet devraient eux-mêmes déterminer les objectifs à

évaluer, comme le propose l’empowerment evaluation (Chiasson; 1998,47).

Page 24: La revitalisation du Quartier Saint-Roch; Analyse d’une expérience locale de mobilisation

24

La coopération entre les organismes communautaires et les commerces est plus

difficile. Certains commerçants diront qu’il y a trop d’organismes communautaires, qu’ils

apportent la pauvreté et défendent les pauvres. Pour plusieurs des commerçants du Quartier

Saint-Roch, « les organismes communautaires sont le bouc émissaire et ils leur font assumer

leurs mauvais choix d’affaires » (Pierre Maheux). Donc, la communication entre les deux

acteurs n’est pas toujours bonne. « C’est correct d’avoir de l’habitation de luxe, un centre-ville avec du monde avec de l’argent, c’est correct, avec du monde de la classe moyenne aussi. Ce qui n’est pas correct, c’est la formation d’un ghetto » Jean Pearson

Quand les organismes n’ont pas le même poids, la coopération est plus difficile.

Certains commerçants font de la pression sur les organismes communautaires à cet effet.

Marcel Landry nous signalait à ce sujet que GM Développement aurait fait pression à

l’organisme Point de repère, qui procure des seringues aux toxicomanes, pour qu’il déménage

étant donné que leur clientèle ennuyait l’administration du commerce Benjo. La venue des

commerces de luxe ayant remplacé des commerces de moyenne gamme a amené à une rivalité

entre les citoyens et les commerçants. La cohabitation et la mixité, autant économique que

sociale, auraient un impact sur les relations entre les différents acteurs. « La mixité n’a pas changé, au grand déplaisir de certains commerçants qui font pluie et beau temps pour démoniser ces organismes », Marcel Landry, citoyen

Au niveau social, c’est plus la mobilisation citoyenne et communautaire qui a joué. La

Ville et les gouvernements ont agi comme bailleurs de fonds et comme soutien logistique et

matériel. Pour l’amélioration matérielle du cadre bâti et du dynamisme économique, c’est

davantage le leadership politique qui a joué un rôle (ENAP, BEENOX, INRS, etc.). Donc,

l’aspect économique a été dominé par le politique et le privé alors que l’aspect social a

largement été dominé par les groupes communautaires et les citoyens.

Certains acteurs du quartier dénoncent l’absence de grandes institutions dans le cadre

de la revitalisation du Quartier Saint-Roch. Au niveau économique, la présence des Caisses

Desjardins, de l’Industriel Alliance, de Cominar, etc., aurait été appréciée, notamment pour

éviter le monopole de GM Développement et ce n’est pas à défaut de ne pas avoir été invité à

collaborer. De plus, les acteurs locaux aimeraient une meilleure implication du milieu scolaire

dans le quartier. Ils auraient intérêt à mettre à profit leurs institutions au bien-être de la

communauté.

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25

« La présence de l’ENAP, de l’INRS, c’est bien, mais ils devraient plus s’impliquer dans le quartier. Ils devraient être plus innovateurs, ouvrir leur porte, être plus audacieux. Il faut qu’il fasse profiter le quartier de leur présence » Marcel Landry, citoyen En outre, les artistes de Saint-Roch, très nombreux, ne se feraient pas assez sentir dans la

dynamique du quartier. Le Quartier Saint-Roch a beaucoup investi dans la culture, toutefois,

les artistes ne se sont pas, de leur côté, investis dans le développement, sans toutefois négliger

leur grande participation lors des débuts de la revitalisation.

Les relations avec la Ville ont influencé le processus de mobilisation dans Saint-Roch.

En effet, sous le règne de Jean Pelletier, une seule consultation publique a eu lieu. Les acteurs

n’étaient donc pas invités – ou encouragés – à participer démocratiquement au processus de

revitalisation. Avec la venue de Jean-Paul L’Allier et du Rassemblement populaire, les

acteurs locaux ont été invités à mettre de l’avant leurs opinions et leurs initiatives. Ce nouvel

environnement général a mis fin à l’attitude technocratique de la Ville, le citoyen devenant au

cœur des préoccupations avec le Rassemblement populaire. Cependant, il est encore tôt pour

voir un changement dans la mobilisation des acteurs locaux avec l’administration Labeaume.

Les organismes n’ont pas eu à travailler beaucoup avec le nouvel exécutif, mais certaines

craintes sont véhiculées en lien avec le rapport qu’entretient le Maire Labeaume avec la

mobilisation citoyenne. Monsieur Labeaume aurait toutefois l’intention de faire du Quartier

Saint-Roch, un quartier Soho1, avec un univers créatif fort, notamment avec ses projets de

technoculture. « L’enjeu, c’est maintenir l’intérêt politique et des acteurs du milieu », Éric Boulay

L’idée de perception est très importante dans le cadre de l’analyse de la revitalisation

du Quartier Saint-Roch. En effet, il semblerait avoir un décalage entre l’image projetée et la

réalité du terrain dans Saint-Roch. L’avènement du « Nouvo Saint-Roch », amené par le

promoteur GM Développement, semble soulever la controverse. « L’idée que le quartier peut à la fois voir disparaître ses problèmes économiques et se construire une identité et une image positive autour d’une expérience urbaine attrayante et recherchée grâce à la revitalisation qui a été planifiée est plutôt inadaptée à la réalité [...] Autrement dit, lorsque le projet de quartier revitalisé manque de se référer à la réalité du milieu, il risque de devenir complètement utopique et inadapté. » (Cloutier; 2009, 189) « Quand tu t’installes dans un quartier et tu n’es pas capable de le nommer comme il faut… tu as un méchant problème de négation » Pierre Matheux

1 Le Quartier Soho est situé à New York et est un pôle culturel important. La revitalisation du quartier a été initiée par les artistes qui s’en sont appropriés.

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26

« Le Nouvo Saint-Roch, je combats ça. Le Nouvo, ça veut dire qu’il faut oublier l’autre? Au conseil de quartier, on n’utilise pas ça. C’est nier qu’il n’y avait pas de Saint-Roch. J’en connais pas beaucoup d’exemple dans le monde où ils ont fait ça. Partout, on utilise les vieux noms » Marcel Landry, citoyen Ce décalage entre ce que le promoteur GM Développement veut projeter et la réalité des

besoins du Quartier Saint-Roch illustre bien les intentions de plusieurs derrière la

revitalisation de Saint-Roch. En outre, cela démontre bien le refus d’intégration de certains

acteurs dans le quartier. Par conséquent, on ne peut développer un quartier en niant son

existence.

Qu’est-ce qui amène une mobilisation horizontale?

Plusieurs caractéristiques peuvent être des combinaisons gagnantes lors d’une

mobilisation horizontale. Sproule-Jones a identifié trois composantes essentielles dans l’étude

de la gestion publique horizontale : les réseaux et alliances, les institutions et la gouvernance

(Sproule-Jones; 2002). Ces trois axes doivent donc être pris en compte pour déterminer ce qui

conduit à une mobilisation horizontale. À l’aide de nos données empiriques et théoriques,

nous avons développé un certain nombre d’éléments favorisant la mobilisation horizontale

dans le cadre de la gestion publique. Une volonté doit ressortir de la part des acteurs pour

travailler en partenariat. Sans réelle volonté, le projet risque de mourir dans l’œuf. Ensuite,

l’écoute de la part de chaque intervenant est importante lors des consultations pour arriver à

des compromis viables. Il doit aussi avoir concertation d’un plus grand nombre d’acteurs

possibles afin que chaque intérêt soit pris en compte.

Le leadership d’acteurs clés a agi en tant que catalyseur de mobilisation citoyenne. Par

exemple, sans le leadership et le charisme de Jean-Paul L’Allier, la revitalisation du Quartier

Saint-Roch aurait pu prendre toute autre envergure. De plus, Jacques Fiset, conseiller

municipal du milieu de 1989 à 1997, et par la suite Directeur général du CLD de Québec a été

très présent au cours de la revitalisation. Des citoyens ont aussi pris un leadership fort,

notamment Marcel Landry, président fondateur du conseil de quartier en 2003. Réjean

Lemoine, aussi, premier conseiller municipal du Rassemblement populaire, dans le district

des Faubourgs a eu un impact important dans la mobilisation des différents acteurs. Sa

connaissance du milieu était si grande, que certains le nommaient « le maire de Saint-Roch ». « C’est le leadership de certaines personnes qui a fait en sorte que les gens se soient ralliés derrière l’idée de revitalisation. » Marcel Landry, citoyen

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27

Plusieurs citoyens prennent des initiatives importantes et marquent le cours de la

revitalisation. Selon Juan Luis Klein, c’est le leadership local qui permet la mobilisation, en

alliant trois composantes : leadership, gouvernance, territoire (Klein; 2010)

Les organismes ne doivent pas être vus comme des problèmes dans les tables de

concertation, mais bien comme des alliés. C’est pourquoi le respect doit prendre une large

place lors de ces consultations. Les acteurs doivent aussi accepter le partage de pouvoir entre

partenaires et assurer une certaine maturité. Chacun doit respecter les points de vue de l’autre;

ils savent qu’il y a des divergences d’intérêts, mais il doit y avoir quand même une volonté à

travailler ensemble, d’où l’importance des attitudes lors des démarches de partenariat. C’est

pourquoi l’«autre» ne doit pas être vu comme accessoire, mais bien comme indispensable

(Divay; 2008, 294). Il faut mettre fin aux chicanes stériles et concentrer les efforts des

manières plus optimistes et positives. La communication peut ainsi s’avérer la clé du succès

lors des mesures de mobilisation afin que l’enlignement soit partagé et que les actions soient

réellement concertées.

Relations de pouvoir (asymétrie)

On ne peut pas démontrer que la revitalisation a été réalisée au profit de certains

acteurs et au détriment d’autres. Par contre, certaines mesures permettent de croire que les

intérêts corporatifs ont parfois été pris en compte comparativement aux intérêts généraux.

Certains acteurs auraient donc eu une plus grande influence dans le cadre du processus. Par

exemple, la chasse aux bancs urbains par les commerçants a eu raison des itinérants. En effet,

il n’y a plus vraiment de bancs de parc au sein des rues du quartier, et cela rejoint la position

de la majorité des commerçants, mais pas des utilisateurs de ces bancs.

Plusieurs habitants qui étaient là il y a dix ans n’y sont plus. Pourquoi sont-ils partis?

Est-ce dû à un désaccord avec la revitalisation ? La hausse du prix des loyers ? Absence

d’écoute? Pur hasard? De plus, certaines méthodes d’interventions policières pourraient

laisser croire que certains acteurs entretiennent encore des préjugés envers certains habitants

qu’ils jugent dangereux, sans réelle preuve. Cette augmentation de la présence policière

démontre le manque de tolérance qui conduit à une source d’iniquité dans le quartier et

« préfigure un désir de repousser les populations hors du quartier » (Freedman; 2009). Est-ce

que cette présence policière renforce le processus de revitalisation ou le fragilise? Elle peut

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certes affecter la mixité sociale, car l’acharnement policier sur certaines catégories de

personnes peut les amener à quitter le quartier.

Toutefois, en général, les intérêts de chacun ont été pris en compte, grâce aux efforts

de concertation lors des nombreuses consultations. Des espaces publics ont été mis à la

disposition de tous les groupes pour faire valoir leurs points de vue et positions sur la

revitalisation, les nombreuses consultations publiques peuvent en témoigner. Mais, tous les

acteurs n’ont pas le même poids en fin de compte dans la balance.

En quoi la mobilisation a créé une valeur ajoutée à la revitalisation du quartier

Sans réelle mobilisation, le quartier ne serait pas ce qu’il est. Les impacts négatifs

auraient été beaucoup plus grands. L’argent investi dans le quartier aurait pu améliorer à court

terme l’état du milieu, par contre, la mobilisation a fait en sorte qu’un plus grand nombre

d’acteurs s’est joint au processus. Nous pouvons prendre comme exemple la démolition du

toit du mail qui a soulevé une grande mobilisation au sein de la population et des organismes

communautaires. En effet, cette action aurait pu avoir de graves effets, d’où le soulèvement

populaire, mais la mobilisation a interpellé l’Auberivière qui a pris la décision d’ouvrir un

centre de jour, pour récupérer les effets négatifs de l’enlèvement du toit du mail. La venue du

Rendez-Vous Centre-Ville a fait en sorte qu’on a offert un service aux personnes touchées par

la destruction. Ainsi, alors que le mail n’offrait aucun service aux populations démunies,

l’Auberivière a pris en charge ces personnes et a remplacé le lieu de socialisation qu’était le

mail. Par conséquent, si les organismes communautaires ne s’étaient pas appropriés de la

revitalisation, celle-ci aurait probablement eu pour effet la montée de la gentrification. La

mobilisation a permis la concertation; tout le monde sait ce que l’autre veut, pense.

Sans mobilisation, la revitalisation aurait pu être désordonnée. En effet, le nombre

d’expropriation aurait pu être plus grand, avec une prise en compte de l’aspect social plus

marginale. Les décisions auraient pu prises de manière plus verticale, sans consulter les

acteurs concernés et en optant pour un travail en silo. La prise en main de certaines

problématiques sociales par les organismes communautaires a permis une adéquation des

objectifs de la revitalisation avec les besoins du milieu. Sans la présence de certains

organismes aux tables de concertation, la revitalisation n’aurait pas eu la même finalité. De

plus, ces organismes ont pu apporter une expertise de terrain et mettre sur la table certains

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effets et idées par rapport à la revitalisation que seuls des élus politiques n’auraient pu penser.

Par conséquent, ils ont apporté une valeur ajoutée au processus.

Conclusion

Chaque projet soulève des argumentaires positifs et/ou négatifs. Dans cette

perspective, chaque acteur veut que son point de vue et sa prise de position soient entendus,

ce qui conduit à la mobilisation de ces derniers. Les acteurs les plus influents dans leur

sphère sectorielle n’ont pas toujours la même réussite lorsqu’il s’agit de travailler en

concertation avec d’autres acteurs d’horizons différents. Dans le cas du Quartier Saint-Roch,

cette mobilisation a soulevé des difficultés à rassembler un grand nombre d’acteurs. Les

acteurs ayant réellement participé à la mobilisation peuvent toutefois affirmer la prise en

compte de leur position dans le processus et ainsi, conclure à une réelle concertation. Pour en

arriver à ce consensus, ils ont dû adapter leurs stratégies en fonction des aléas du processus.

Bref, l’analyse d’un cas de mobilisation permet d’identifier le type de gestion favorisé, à

savoir une gestion horizontale ou verticale. Dans le cas de l’analyse du processus de

revitalisation du Quartier Saint-Roch, on peut affirmer qu’il y a apparence d’une gestion

horizontale, encourageant ainsi, la mobilisation des acteurs locaux et la concertation.

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Annexes

Annexe 1 L’appropriation communautaire

Source : Simard; 2000, 180

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Annexe 2 Le processus de mobilisation locale

Source : Klein; 2010

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Annexe 3 Le logement social et communautaire dans Saint-Roch

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Source : Le logement social et communautaire sur le territoire de la Ville de Québec. Portrait par Quartier. CDEC de Québec, mars 2009

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Annexe 4 Synthèse de l’entrevue avec Pierre Maheux

Entrevue avec PIERRE MAHEUX, Ex-conseiller municipal à la Ville de Québec

29 MARS 2010, 14H

Que pensez-vous de la mobilisation dans Saint-Roch?

La mobilisation du quartier Saint-Roch s’étend sur 40 ans (c’est une particularité).

En 1989, sous le règne de Jean-Paul L’Allier, il y a eu plusieurs consultations (pour l’aménagement du quartier, pour le processus de revitalisation, consultation auprès des citoyens pour Espace Saint-Roch (Jardin Saint-Roch). La première action fut un espace vert.

Lors de l’enlèvement du toit du mail, il y a eu 39 mémoires qui ont été produits. Sous L’Allier on était à l’écoute des citoyens qui disaient non à des futurs boulevards.

Quelle a été la participation des autres paliers de gouvernement?

Implication forte du gouvernement provincial. Zone de priorité pour la haute technologie. Financement pour bâtiment neuf abritant ENAP-INRSS-TELUQ. Développement haute technologie + subvention aux affaires culturelles (Bordée + Méduse)

Quels ont été les organismes invités? Financiers, communautaires, associatifs, gens d’affaires. Quels sont ceux qui ont participé? Les organismes communautaires, peu de gens d’affaires. Présence d’un promoteur ayant 75% des places d’affaires, création de monopole.

Quelle est la source de financement de l’aménagement au centre-ville? La ville de Québec.

Quels ont été les enjeux prioritaires ? Amélioration de la qualité de vie et sécurité pour les résidents du quartier; Renaturalisation des berges = réussite de L’Allier; Parc Victoria, parc Point-aux-Lièvres, jardin Saint-Roch, rues embellies…

La différence entre conseiller et agent communautaire? Comme conseiller, tu peux influencer. Avec quel type d’acteurs aviez-vous plus de difficultés? Les gens d’affaires.

Comment les organisations voient la revitalisation? Au niveau des organisations, la revitalisation est bien acceptée. Leur frustration concerne les boutiques de linge trop luxueux. Quel est le rapport avec la ville? Ils ont écouté; concertation avec les acteurs; beaucoup de mécanismes de dialogue.

Au delà des critiques, comment gérer les conséquences? Pertinence des organisations (réponse à des besoins). Plusieurs organismes sont propriétaires de leur bâtisse. Les organismes ne font pas partie du problème.

Comment est la vie dans le quartier? Logement seul; La Mixité sociale; L’enlèvement du toit du mail, il n’y a personne qui l’a remise en question.

Quels sont les effets de la revitalisation? Effets positifs? Amélioration de la sécurité; qualité de vie (espaces verts, espaces de détente); embellissement; variété; mixité

Effets négatifs ? Tolérance (pas faire le lien étranger = danger); augmentation du prix du logement; roulement élevé; Pas d’amélioration matérielle, et beaucoup de gens ont dû déménager. Peu d’investissement social et communautaire

La revitalisation a-t-elle atteint son objectif ? Non, car elle n’est pas finie (surtout en matière de mixité et de développement). Les rues commerciales sont fragiles. De Langelier à Dorchester, il n’y pas de plainte des commerçants par rapport aux pauvres.

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Annexe 5 Synthèse de l’entrevue avec Jean Pearson

Entrevue avec JEAN PEARSON, président du Conseil de quartier Saint-Roch

31 MARS 2010, 14H

Votre point de vue général sur la revitalisation du quartier Saint-Roch? Artiste fondateur du complexe Méduse; ce sont les artistes qui ont lancé le bail du concept de revitalisation en s’implantant dans le quartier, en amenant des projets comme Méduse en éveillant la population sur la beauté de certains immeubles, comme la Fabrique. La Méduse est inusitée au Québec. Je suis impliqué depuis le début dans le quartier, dans les mouvements spontanés. Le conseil de quartier est un aboutissement.

Comment évaluez-vous la participation des artistes aujourd’hui? Les artistes sont autosuffisants en terme d’organisation, ils font bande à part; ne participent plus aux manifestations, à la dynamique sociale du Quartier Saint-Roch.

Quel est le rôle du Conseil de quartier? Le conseil n’est pas un comité de citoyens. Il a une accréditation. Il est limité dans ses interventions. Il a des devoirs précis et fonctionne suivant une Charte qui présente en annexe : la charte de la mixité sociale.

Quel rôle a joué le Conseil de quartier dans la revitalisation? Pour la revitalisation, le conseil a joué un rôle important car cela fait partie de son mandat de consulter les gens sur les grandes orientations du quartier Saint-Roch pour le développement. Pendant plusieurs années, le développement s’est fait à la pièce (UQ, destruction du toit, démolition des bretelles de l’autoroute). En 2006, le conseil a tenu un très grand exercice sur le plan directeur du quartier pour déterminer les grands enjeux des prochaines années sur plusieurs axes (communautaire, affaires, stationnement, circulation, environnement, propreté, sécurité).

Comment voyez-vous les changements de régime politique à la ville? Lors des changements de régime politique, on est plus attentif. Labeaume a une autre philosophie et une autre manière de travailler. On a été sous le régime L’Allier pendant 20 ans. Quand le maire m’inquiète, je me rabats sur les conseillers et je me rassure. Monsieur Labeaume, je ne pense pas qu’il soit contre les conseils de quartier. Financièrement, le quartier ne manquera pas de fonds pour poursuivre ses projets. L’argent vient autant du privé que du public. C’est un mouvement qui a été endossé par tellement de gouvernement, tout le monde est dans le coup.

Qui sont vos partenaires? La Ville; les citoyens; les groupes communautaires ; YMCA

Quels sont les effets négatifs de la revitalisation? Les gens démunis ont eu très peur et c’est encore le cas, des individus qui se sentent exclus. Il y a des interventions policières intimidantes Quels sont les effets positifs? Amélioration de la qualité de vie; augmentation de la sécurité; développement d’un sentiment de fierté;

Quelles sont les perspectives pour les prochaines années? Pour les 5-6 prochaines années : un nouveau centre sportif communautaire (une des demandes du quartier qui va se réaliser); partenariat avec le YMCA; améliorer l’environnement du quartier; diminuer la circulation automobile; logement social; le logement social doit être construit en fonction des besoins sur place et non dans le but d’attirer un ghetto comme ça c’est fait souvent. C’est correct d’avoir de l’habitation de luxe, un centre-ville avec une classe d’affaires correcte. Ce qui n’est pas correct c’est un ghetto. Il y a un rééquilibrage qui est en train de s’amorcer. On parle d’aller chercher de plus en plus de commerces qui vont répondre aux besoins de la clientèle du quartier. Développer les loisirs, plus d’enfants, plus de verdures, transport en commun moderne et adapté. Un centre-ville vivant. Il reste du travail pour au moins 25 ans.

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Annexe 6 Synthèse de l’entrevue avec Éric Boulay

Entrevue avec ÉRIC BOULAY, Coordonnateur de l’Auberivière

7AVRIL 2010, 15H M. Boulay, quelle est la mission de l’Auberivière? Maison d’accueil pour adultes en difficulté (refuge pour homme/femme, dégrisement, réinsertion sociale, soupe populaire, etc.). 5000 personnes différentes par année à l’Auberivière. Deux fois par année, on fait une corvée de ménage dans le quartier. La Ville de Québec fournit les gants, les balais, les sacs. Les personnes de la rue balaient la rue Saint-Joseph. On montre qu’on est capable de prendre notre place comme il faut, contrairement aux préjugés. Quel est son rôle dans la Revitalisation du quartier Saint-Roch? Ouverture en 2000 du centre de jour (Rendez-Vous Centre-Ville) suite à la démolition du toit du mail. Les gens qui sont dans le mail, ils vont aller où ? Ça touchait à l’organisation plus que la revitalisation en tant que telle. Avec quels autres organismes aviez-vous travaillé? Nous avions participé à la table « Rebâtir la rue Saint-Joseph » avec : Forum jeunesse, Archipel d’entraide, CLSC Basse-Ville, Conseil de quartier, Ville de Québec, Fonctionnaires de la Ville, président de la SIDAC (ancêtre de la SDC), Regroupement pour l’aide aux itinérants. Quels étaient leur perception? Au début, ils avaient des craintes. Mais de cette concertation, est né le désir d’avoir des lieux pour les travailleurs de rue et où les gens pourraient continuer de se socialiser. Quel est votre point de vue par rapport à la revitalisation? Contrairement à bien des organismes, je suis pour la revitalisation. À l’époque, il y avait la guerre des Motards, et il y avait des bombes qui sautaient. C’était un quartier dangereux, surtout le soir. Maintenant, c’est un lieu où il fait bon vivre. Quels effets attribuez-vous à la revitalisation? Les loyers ont augmenté, mais ils ont augmenté partout! C’est juste une partie de Saint-Joseph et Charest qui a été plus revampée. Pour revitaliser un quartier, tu ne peux pas seulement penser aux gens en place localement, c’est un centre-ville, tu dois penser à amener des touristes. Plusieurs commerçants qui étaient là avant la revitalisation sont bien contents, mais il y a de nouveaux commerçants qui ont de la misère à prendre leur place (Hugo Boss). Les commerces de haute gamme, ce sont eux les pires, car ils vont faire faillite. La revitalisation a-t-elle atteint son but? On n’a pas voulu tasser les gens, on a voulu revitaliser, dynamiser le quartier. On a travaillé avec les gens pour revitaliser. Ils ont été inclus dans le projet. Les gens sont encore là, il y a encore des gens avec de la misère. Il y en a autant qu’avant. Ailleurs, les revitalisations ont eu des effets dévastateurs, pas à Saint-Roch. Il n’y a pas eu tant d’expropriation. Ça s’est fait mieux qu’à bien d’autres endroits. Nos gens ont autant de préjugés envers les commerçants (réciproque). C’est loin d’être un échec, la revitalisation, c’est agréable de s’y promener. Je ne vois pas d’autres façons, que de revamper un milieu. Le toit du mail créait un ghetto (vente de drogue). Si on tasse les gens dans un milieu, on leur envoie un message. Il y a des services pour les gens encore plus, il y a plus de moyens pour rejoindre les gens (ex. r-v centre-ville), l’achalandage a augmenté. Est-ce qu’il y a des acteurs qui se sentent dérangés? Ceux qui se plaignent sont ceux qui ne rejoignent pas les besoins du quartier. Beenox : ça ne lui dérange pas la présence d’itinérants. Pensez-vous qu’il y a trop d’organismes sociaux? Non, c’est important. Ils maintiennent l’ordre social, jouent un rôle d’éducation. On est la cohésion entre les commerçants, les citoyens et les exclus. Tous les centres-villes sont colorés! D’ailleurs, les acteurs concertés ont moins de préjugés les uns envers les autres (meilleure communication), c’est plutôt les commerçants et organismes qui n’ont pas été inclus dans le processus qui, eux, ne comprennent pas tout. Comment voyez-vous le quartier Saint-Roch maintenant? Présentement, ça va bien. L’administration L’Allier a délégué beaucoup de ressources pour la qualité de vie et l’animation urbaine. Je n’ai pas encore travaillé avec l’Administration Labeaume, j’ai envoyé des lettres et je n’ai rien reçu. Il y a beaucoup de préjugés dans Saint-Roch. Tant que tu ne fais pas partie du processus, c’est facile d’avoir des préjugés (rumeurs, médias). En quoi un commerce peut tasser des gens (les commerces sont à l’intérieur et les gens sont à l’extérieur). Les chicanes de

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couple ne doivent pas être là. Oui, il faut continuer la concertation et une grande sensibilisation est encore à faire. Sensibiliser les gens qui ont des préjugés au niveau des itinérants (ex. commerçants). Comment voyez-vous Saint-Roch dans le futur? L’enjeu c’est de maintenir l’intérêt politique et des acteurs du milieu. Le quartier a connu des hauts et des bas et s’est toujours relevé. Est-ce qu’il va avoir autant de souci de se préoccuper des pauvres avec l’administration Labeaume? Je ne sais pas! S’il n’y avait pas eu de revitalisation, les Motards seraient revenus. La mixité, ce n’est pas encore fait. On a une belle diversité, mais de là à arriver à la mixité, il y a encore du travail à faire, et c’est réalisable par la volonté des acteurs. Le travail de concertation doit rester, c’est le gardien de la cohésion sociale. L’équilibre est fragile.

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Annexe 7 Synthèse de l’entrevue avec Marcel Landry

Entrevue avec MARCEL LANDRY, Citoyen du Quartier Saint-Roch

15 AVRIL 2010, 14H M. Landry, comment aviez-vous vécu la revitalisation du Quartier Saint-Roch? En 1981, j’ai décidé de venir m’installer dans le quartier Saint-Roch. À cette époque, le quartier était mort. De 1981 à 1989, on n’a rien fait dans le quartier sinon des petits services à gauche et à droite. En 1988, quand le Rassemblement populaire a présenté L’Allier à la mairie, j’ai décidé de m’impliquer. On s’est rendu compte que le quartier était pire qu’on croyait. On voyait la démolition de maison, la pauvreté, la fermeture du mail. En m’impliquant dans la campagne de L’Allier, on a beaucoup discuté et j’ai découvert des groupes communautaires que je ne connaissais pas. En 1991, je me suis impliqué dans un projet appelé L’îlot Fleurie. Première intervention citoyenne avec des artistes en art visuel. Qu’est-ce qui vous a motivé dans le processus? Ma motivation pour venir m’installer à Saint-Roch était pour me reloger pas trop cher. Je ne suis pas venu dans l’idée de m’impliquer. J’ai été à l’origine du conseil de quartier (le 2e à Québec). J’ai occupé la présidence pendant 2 mandats. Comment s’est déroulé le processus de revitalisation? Il y avait le Comité sur la sécurité urbaine; le Comité sur la revitalisation de la rivière Saint-Charles et l’Observatoire sur la démocratie. La revitalisation a été radicale. Ça s’est fait avec beaucoup de difficultés. Pour certains, ça a très mal amorcé avec le jardin Saint-Roch. Les gens voulaient un vrai parc pour les enfants, pour l’activité physique. Mais ce ne fut pas le cas. Donc ça a été boudé, dénoncé par plusieurs personnes, mais pas ouvertement. Quels ont été les projets mis de l’avant? Un beau jour, il y a eu des projets de gros édifices de plusieurs étages. L’idée de Pelletier, c’était un grand boulevard bord en bord de la ville. Une urbaniste, Louise Quesnel, a réveillé L’Allier sur la non-recevabilité du projet. C’était plus l’accès au logement et la lutte à la pauvreté qui étaient les préoccupations des citoyens. Qu’est-ce qui vous a le plus marqué? Ce qui m’a le plus marqué, c’est la découverte des gens qui se sont impliqués pour peu de chose. Des personnes qui n’avaient jamais rien fait se sont impliquées dans l’Îlot Fleurie. Un jardin communautaire est devenu une merveille de l’aménagement. La Ville était contre le projet au début. C’est le conseiller municipal Jacques Fiset qui a convaincu L’Allier. En 1997, la Ville a démoli l’Îlot Fleurie avec l’accord des citoyens. Il n’y a jamais eu de vandalisme dans le jardin communautaire situé en plein centre de Saint-Roch. Peu longtemps après, la Ville a commencé à mettre des fleurs dans le quartier. Avant, c’était impossible, car le monde vandalisait. C’est le leadership de certaines personnes qui a fait en sorte que les gens se sont ralliés derrière l’idée de revitalisation. À Saint-Roch, il y a eu des mouvements de mobilisation très grande avec Monseigneur Lavoie. À cette époque-là, Saint-Roch était stable. Qu’est-ce qui faisait en sorte que les gens embarquaient? On a vécu la détérioration du mail. Les commerces fermaient. Alors, on s’est dit, on va enlever le mail, ça va enlever les itinérants du même coup. Le Conseil de quartier a demandé une consultation pour l’enlèvement du mail. Pendant 3 soirs, il y a eu consultation et une bonne partie des organismes était contre. Au Conseil de quartier, on ne croyait pas qu’en démolissant c’était pour être mieux. On a alors créé Rendez-vous Centre-ville. Les itinérants n’ont pas été obligés de s’exiler. Mais la mixité n’a pas changé, au grand déplaisir de certains commerçants qui font pluie et bon temps pour démoniser les organismes. Quelles ont été les difficultés de la revitalisation? Les commerçants contribuent à ce que le quartier ne se revitalise pas (GM Développement). Pour eux, le développement, c’est le commerce de luxe. De Langelier à Dorchester, les commerçants n’ont pas eu d’aide et ils se sont développés. Les gens savent faire du commerce là-bas. Les commerçants qui ne font pas d’argent, ce sont eux qui critiquent le plus. GM Développement a réussi à chasser Point de repère sous la pression de Benjo. Quels sont les effets positifs que vous voyez? Maintenant, les gens ordinaires sont plus fiers, il y a des fleurs, le quartier est beau Le quartier est devenu sécuritaire.

Page 42: La revitalisation du Quartier Saint-Roch; Analyse d’une expérience locale de mobilisation

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Que pensez-vous des promoteurs privés? La présence de l’ENAP, de l’INRS, c’est bien, mais ils devraient être plus impliqués dans le quartier, plus innovateurs et ouvrir leur porte, être plus audacieux. Il faut qu’ils fassent profiter le quartier de leur présence. Pour GM, sa sécurité, c’est d’avoir des commerces de luxe. Donc, on achète des gens, on leur donne un prix et on les tasse. Le Nouvo Saint-Roch, je combats ça. Le Nouvo, ça veut dire qu’il faut oublier l’autre? Au Conseil de quartier, on n’utilise pas. C’est Campeau qui utilise ça dans tous ses édifices. C’est nier qu’il n’y avait pas de Saint-Roch. Je ne connais pas beaucoup d’exemple dans le monde où on fait ça. Partout, on utilise les vieux noms. C’est nier les valeurs, c’est nier ce qu’est Saint-Roch. Campeau veut écraser la mobilisation citoyenne, ça l’emmerde royalement. Moi ça me fait penser à Rapaille. Comment voyez-vous le Saint-Roch du futur? On aimerait avoir des commerces plus appropriés sur Saint-Joseph. La mixité de commerce. Ce que je trouve malheureux, les artistes, on ne les voit pas. Ça ne transpire pas dans le quartier.