la lettre de la franchise
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Editorial
La clause d’astreinte peut se révéler particulièrement utile
dans les contrats pour inciter le débiteur d’une obligation à
l’exécuter. Compte tenu de son importance pratique, nous
avons choisi de faire un focus sur cette clause dans le libre
propos de ce mois qui présente les spécificités de cette
clause et son contenu.
En droit des sociétés, vous retrouverez le commentaire de
trois arrêts relatifs au domaine d’application de l’expertise
de l’article 1843-3 du code civil, à la responsabilité des
experts-comptables rédacteurs d’actes et à la contestation du
calcul de la partie variable du prix de cession de droits
sociaux.
L’actualité du droit des entreprises en difficulté est marquée
par la décision du Conseil constitutionnel qui vient
d’affirmer l’inconstitutionnalité de la possibilité pour un
Tribunal de commerce de se saisir d’office afin d’ouvrir une
procédure de redressement judiciaire.
En droit social, nous avons retenu trois décisions relatives à
la condamnation d’un salarié pour injures à l’encontre de
son employeur sur le réseau Facebook, la sanction au titre
de la faute inexcusable d’un employeur à raison de la
politique interne de l’entreprise, et la prohibition de
l’interdiction générale et absolue dans un règlement
intérieur de la consommation d’alcool.
La Lettre du Cabinet
N°12/2012
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Sommaire
Libre propos 2
Corporate et Droit des sociétés 3
Entreprises en difficulté 4
Contrats civils et commerciaux 5
Concurrence et Distribution 6
Social et Ressources humaines 7
Immobilier 8
Propriété intellectuelle 9
Droit de la santé 10
Personnes et Patrimoine 11
Procédure civile et voies d’exécution 12
Actualité du Cabinet 13
L’actualité juridique de l’ensemble de nos autres domaines
d’activité est également commentée dans les rubriques
dédiées au droit des contrats, de la concurrence et de la
distribution, de l’immobilier, de la propriété intellectuelle,
de la santé, des personnes et du patrimoine.
Bonne lecture.
Jean-Charles Simon François-Luc Simon
Avocat associé Avocat associé
LIBRE PROPOS
Focus sur la clause d’astreinte dans les contrats
La clause dite « d’astreinte », encore appelée « astreinte
conventionnelle », peut être insérée dans tout contrat afin
d’inciter le débiteur d’une obligation à respecter les termes
de son engagement dans les délais convenus.
Elle s’apparente ainsi, comme la clause pénale, à une
sanction pécuniaire qui s’applique à l’encontre du débiteur
défaillant dès lors qu’il ne satisfait pas à ses obligations dans
le délai prévu, sans qu’il soit nécessaire d’obtenir une
décision de justice, à la différence de l’astreinte judiciaire. Ce
faisant, il convient d’envisager successivement ses
spécificités et son contenu.
1. Spécificités de la clause d’astreinte
Si la clause d’astreinte et la clause pénale sont souvent
comparées, en particulier par la jurisprudence (Cass. civ.
3ème, 6 novembre 1986, pourvoi n°85-10.809), celles-ci sont
cependant bien distinctes, notamment du fait de leur finalité
respective.
En effet, si la clause pénale, définit par la Cour de cassation
comme « la clause d’un contrat par laquelle les parties
évaluent forfaitairement et d’avance l’indemnité à laquelle
donnera lieu l’inexécution de l’obligation contractée » (Cass.
civ. 1ère, 10 octobre 1995, pourvoi n° 93-16.869), remplit une
fonction indemnitaire et comminatoire, la clause d’astreinte
ne poursuit quant à elle aucune fonction indemnitaire et
constitue un simple moyen de pression exercé sur le
débiteur d’une obligation.
A cette première différence s’en ajoute une autre : le
montant de la clause d’astreinte ne peut pas, contrairement
à la clause pénale, être révisé par le juge. Autrement dit, la
somme prévue par les parties dans la clause d’astreinte
s’impose tant aux parties qu’au juge (CA Paris, 10 septembre
2008, Juris-data n° 2008-371740), le rôle du juge se
limitant en définitive à contrôler que les conditions
d’application de la clause sont remplies.
Au regard des conséquences que son application emporte, il
est important que la clause d’astreinte soit rédigée avec
précaution et précision.
2. Contenu de la clause d’astreinte
Concernant le contenu de la clause, il est possible de prévoir,
soit une somme forfaitaire que le débiteur de l’obligation
devra régler s’il ne satisfait pas à une ou plusieurs de ses
obligations dans les délais impartis, soit une somme fixe et
une somme variable, qui augmentera en fonction du retard
pris par le débiteur (cette seconde alternative étant
particulièrement recommandée car elle se révèle être plus
efficace).
L’insertion d’une clause d’astreinte dans un contrat peut
notamment être prévue en cas de rupture du contrat, et
s’appliquer quel que soit le motif de la cessation des
relations entre les parties.
En effet, dès la fin du contrat, il est fréquent que les contrats
prévoient un certain nombre d’obligations telles que, par
exemple, la restitution de certains objets remis pour
l’exécution du contrat, la cessation de l’utilisation des signes
distinctifs, de matériels, etc.. Ainsi, il peut être
particulièrement utile d’accompagner le respect de ces
engagements d’une clause d’astreinte, laquelle pourra
s’appliquer, soit à compter d’une date d’échéance fixée par
les parties, soit à compter de la mise en demeure adressée au
débiteur.
Si ce dernier ne respecte pas ses obligations, la clause
d’astreinte s’appliquera automatiquement et le débiteur
devra s’acquitter du montant prévu dans la clause, sans qu’il
soit tenu compte de la bonne ou mauvaise foi du débiteur
dans l’inexécution de ses obligations, ni de l’importance de
ses ressources. L’application de la clause d’astreinte est par
ailleurs indépendante des dommages et intérêts qui sont
susceptibles d’être accordés au créancier, en raison
notamment du retard pris par le débiteur dans l’exécution de
ses obligations. Enfin, il est également à noter que le juge de
référés, juge de l’évidence, est compétent pour accorder une
provision à valoir sur le montant de l’astreinte
conventionnellement liquidée (Cass. civ. 2ème, 19 mars 2009,
pourvoi n° 07-16.272).
François-Luc SIMON
Avocat - Associé
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Novembre 2012 – Page 2
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Décembre 2012 – Page 3
CORPORATE ET DROIT DES SOCIETES
Du nouveau sur le domaine d’application de l’expertise de l’article 1843-4 du Code civil ?
(Cass. com., 4 décembre 2012, pourvoi n°10-16.280)
Le débat portant sur le domaine d’application de l’article
1843-4 du Code civil n’est pas prêt de se tarir. Ce texte
prévoit l’intervention d’un expert en cas de contestation de
la valeur de droits sociaux faisant l’objet d’une cession. La
difficulté d’application de ce texte réside depuis quelques
années dans sa rédaction qui dispose que la possibilité de
désigner un expert s’applique « dans tous les cas où sont
prévus la cession de droits sociaux ». Le texte, depuis
longtemps applicable aux contestations de cession de droits
sociaux intervenant dans un cadre légal, pose une difficulté
quant à son application à des cessions de droits sociaux
conventionnelles. La Chambre commerciale de la Cour de
cassation semble, dans cet arrêt du 4 décembre 2012, vouloir
admettre une application de l’article à une cession
conventionnelle pour laquelle les parties n’ont pas prévu de
recourir à l’article 1843-4 en cas de contestation.
Un expert comptable peut, à titre accessoire, exercer des
activités juridiques et être en conséquence amené,
généralement pour le compte de petites entreprises, à
rédiger un acte de cession de droits sociaux. En cette qualité
de rédacteur d’actes, il est tenu non seulement de s’assurer
de l’efficacité de l’acte mais également d’informer de
manière exhaustive les parties sur les conséquences de
l’opération projetée. Les experts-comptables sont, de la
même manière que d’autres professions libérales, soumis à
un devoir de conseil.
Un expert-comptable est responsable de l’acte de cession de droits sociaux qu’il établit
(Cass. com., 4 décembre 2012, pourvoi n°11-27.454)
En l’espèce, les cédants, qui s’étaient portés caution de la
société, postérieurement mise en liquidation judiciaire,
furent poursuivis par un établissement de crédit. La cession
des droits sociaux n’avait pas éteint leur engagement de
caution mais l’expert-comptable conseil des cédants n’avait
pas attiré leur attention sur ce point et sur l’éventualité
d’une mainlevée des cautionnements au moment de la
cession. La haute juridiction condamne l’expert-comptable,
à qui il appartenait d’informer les cédants de la persistance
de leur engagement de cautions malgré la cession.
Contestation du calcul de la partie variable du prix de cession de droits sociaux
(CA Versailles, 2 octobre 2012, R.G. n°11/02711)
En l’espèce, un salarié titulaire d’actions au titre d’un plan
d’épargne d’entreprise s’était engagé, dans le cadre de son
adhésion à une charte des associés du groupe, à céder toutes
ses actions au moment de son départ de la société. Le salarié,
à l’occasion de la cession de ses droits sociaux, a contesté la
méthode de calcul du prix de cession et sollicité l’application
de l’article 1843-4 du Code civil. La Cour d’appel de Paris
avait considéré que cet article était inapplicable à un tel cas,
les parties ne l’ayant pas prévu dans leur convention. La
Chambre commerciale a censuré la Cour d’appel indiquant
que l’article 1843-4 du Code civil, d’ordre public, aurait
vocation à s’appliquer en cas de contestation sur la valeur
des droits sociaux faisant l’objet d’une cession, à toutes les
cessions sans distinguer qu’elles soient institutionnelles ou
conventionnelles et ce, que les parties l’aient ou non
expressément prévu.
Des associés d’une société anonyme cèdent la totalité des
actions de la société sauf une, conservée par un des cédants
qui demeure président du conseil d’administration. Le prix
de cession prévoyait une partie variable calculée sur les
résultats des quatre exercices suivant la cession. Le cédant
demeuré actionnaire décida de contester le résultat du
dernier exercice pour des raisons comptables. Les
acquéreurs ont cependant considéré que le cédant avait
renoncé à contester les comptes.
En effet, le cédant, en tant que président du conseil
d’administration avait établi et présenté les comptes à
l’assemblée et, en tant qu’actionnaire minoritaire, les avait
approuvés. Ce raisonnement n’est pas entériné par la Cour.
S’il est vrai que le cédant a approuvé les comptes en sa
qualité d’actionnaire, il n’en demeure pas moins, qu’en tant
que cédant, il conservait le droit de contester les comptes,
inexacts en l’espèce. La Cour a donc condamné les
acquéreurs à verser un complément de prix rectifié.
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Décembre 2012 – Page 4
ENTREPRISES EN DIFFICULTE
Forme du recours contre l’ordonnance fixant la rémunération de l’administrateur judiciaire
(Cass. com., 27 novembre 2012, pourvoi n°11-23.465)
Par cet arrêt, la Cour de cassation confirme la régularité par
voie de télécopie d’un recours contre l’ordonnance fixant la
rémunération de l’administrateur judiciaire.
En effet, l’article R. 663-39 du code de commerce dispose
que « la demande de taxe peut être faite dans le délai d'un
mois à compter de la communication ou de la notification
prévue à l'article précédent, oralement ou par écrit au
greffe du tribunal de grande instance ou de la cour
d'appel ».
En l’espèce, l’administrateur judiciaire de la société placée
en redressement judiciaire avait demandé la fixation du
montant de sa rémunération au titre de sa mission à laquelle
une ordonnance du magistrat délégué au Premier président
de la Cour d’appel avait fait droit. La société en
redressement avait alors formé un recours contre cette
ordonnance par voie de télécopie.
Le Premier président de la Cour d’appel ayant déclaré le
recours de la société recevable, l’administrateur, invoquant
l’irrecevabilité dudit recours, a formé un pourvoi en
cassation contre la décision d’appel.
La chambre commerciale de la Cour de cassation, par l’arrêt
rendu le 27 novembre 2012, rejette le pourvoi, précisant
qu’ « en l’absence d’autres formalités prévues par l’article
R. 663-39 du code de commerce, un tel recours peut être
formé, dans ce délai, par voie de télécopie ». Ainsi, la seule
condition posée pour la recevabilité d’un tel recours apparait
être le respect du délai d’un mois, la forme du recours étant
indifférente.
L’art ic le R . 663-39 s ’appliquant éga lement aux
commissaires à l’exécution du plan, aux mandataires et aux
liquidateurs judiciaires, cette interprétation libérale ne se
limite pas aux seuls administrateurs judiciaires.
Inconstitutionnalité de la saisine d’office aux fins d’ouverture du redressement judiciaire
(Cons. const., 7 déc. 2012, n°2012-286 QPC)
Par cette décision attendue, le Conseil constitutionnel
déclare non constitutionnelle la possibilité pour un tribunal
de commerce de se saisir d’office afin d’ouvrir une procédure
de redressement judiciaire.
En effet, l’article L. 631-5 du code de commerce dispose :
« Lorsqu’il n’y a pas de procédure de conciliation en cours,
le tribunal peut se saisir d’office ou être saisi sur requête du
ministère public aux fins d’ouverture de la procédure de
redressement judiciaire ». Cette faculté existait déjà sous
l’empire de la loi du 25 janvier 1985. Par un arrêt en date du
16 octobre 2012 (n°12-40061, 12-40062, 12-40063, 12-
40064 et 12-4006), la Cour de cassation avait renvoyé au
Conseil constitutionnel la question prioritaire de
constitutionnalité suivante: « La saisine d’office par le
tribunal de commerce, en application de l’article L. 631-5
du code de commerce, est-elle conforme à la Constitution
alors même qu’en vertu des droits de la défense et du droit à
un recours juridictionnel effectif, l’on ne saurait, à la fois,
être juge et partie ? ».
Le Conseil constitutionnel, par sa décision du 7 décembre
2012, déclare les termes « se saisir d’office ou » figurant au
premier alinéa de l’article L. 631-5 précité contraires à la
Constitution, considérant qu’ « aucune […] disposition ne
fixe les garanties légales ayant pour objet d’assurer qu’en
se saisissant d’office, le tribunal ne préjuge pas sa position
lorsque, à l’issue de la procédure contradictoire, il sera
appelé à statuer sur le fond du dossier au vu de l’ensemble
des éléments versés au débat par les parties ». Selon les
Sages, les dispositions susvisées méconnaissent les
exigences découlant de l’article 16 de la Déclaration des
droits de l’homme et du citoyen de 1789 posant le principe
d’impartialité de l’exercice des fonctions juridictionnelles.
Le Conseil ajoute que cette déclaration
d’inconstitutionnalité prend effet à compter de la
publication de la décision et qu’elle est par conséquent
applicable à tous les jugements d’ouverture d’une procédure
judiciaire rendus postérieurement à cette date.
Cette décision jette bien sûr le doute sur la validité des
autres dispositions légales autorisant le tribunal à se saisir
d’office, notamment en matière de liquidation judiciaire
(C. com., art. L. 640-5) ainsi qu’en cas d’échec d’une
procédure de conciliation (C. com., art. L. 631-4).
CONTRATS CIVILS ET COMMERCIAUX
La responsabilité du maître de l’ouvrage engagée par le sous-traitant
(Cass. civ. 3ème, 21 novembre 2012, pourvoi n° 11-25.101)
En l’espèce, la société B. (maître de l’ouvrage) confie à la
société F. (entrepreneur principal), la construction d’un
immeuble. Cette dernière sous-traite la réalisation des
travaux à la société R. Le sous-traitant devait être réglé
directement par le maître de l’ouvrage, lequel avait
néanmoins conditionné le paiement du sous-traitant à la
just i f icat ion, par l ’entrepreneur pr incipal , d’un
cautionnement bancaire. Bien que cette condition n’ait pas
été respectée, la société B. a tout de même réglé le sous-
traitant, avant de cesser ses règlements, l’entrepreneur
principal ayant été mis en redressement. Le sous-traitant a
alors assigné le maître de l’ouvrage sur le fondement de
l’action directe, afin d’obtenir le paiement du solde qui lui
était dû, et à titre subsidiaire, sur le fondement de la
responsabilité civile. L’article 14-1 de la loi du 31 décembre
1975 prévoit en effet que le maître de l’ouvrage peut être
Des meubles d’une valeur supérieure à 1.500 euros sont
déposés par Mme G. chez son frère, M. A. Celle-ci se plaint
cependant du fait que l’intégralité des meubles ne lui aurait
pas été restituée, ce que M. A. conteste. Le déposant assigne
alors le dépositaire en restitution des meubles. Les juges du
fond déboutent le déposant ; Mme G. introduit alors un
pourvoi devant la Haute Juridiction. Le déposant se fonde
sur l’article 1348 alinéa 1er du Code civil qui prévoit, par
exception à l’article 1341, qu’en cas d’impossibilité morale, le
dépôt volontaire pour une somme supérieure à 1.500 euros
et, à travers les besoins de sa vie commune avec elle, a
réceptionné sur son propre compte bancaire le prêt octroyé
et tiré profit de celui-ci ». La Cour de cassation revient sur
cette position, au visa de l’article 1202 du code civil qui
dispose « la solidarité ne se présume point ; il faut qu’elle
soit expressément stipulée ». Le fait que M. X. connaissait
les agissements de sa concubine et ait profité du prêt, est
donc insuffisant pour en déduire l’existence d’une solidarité
passive.
La preuve du dépôt volontaire
(Cass. civ. 1ère, 14 novembre 2012, pourvoi n°11-24.320)
peut notamment être prouvé par témoignage, à défaut de
preuve littérale. Selon Mme G., l’article 1348 C. civ., du fait
des liens familiaux l’unissant au dépositaire, a donc été
méconnu. La Cour déboute le déposant, relevant que l’article
1924 C. civ. - qui prévoit que lorsque le dépôt excède 1.500
euros et n’est pas prouvé par écrit, le dépositaire est cru sur
sa déclaration - exclut l’application de l’article 1348 C. civ.
Ainsi, les attestations produites par le déposant n’ont pas de
poids face aux déclarations du dépositaire qui prétendait
avoir restitué l’intégralité des meubles confiés.
La solidarité ne se présume pas
(Cass. civ. 1ère, 7 novembre 2012, pourvoi n° 11-25.430)
condamné au paiement de dommages et intérêts si, du fait de
son inaction, il peut priver le sous-traitant d’une chance
d’être payé. Les juges du fond ont débouté le sous-traitant,
considérant que le maître de l’ouvrage avait mis en demeure
l’entrepreneur principal de fournir un cautionnement
bancaire du sous-traitant et avait conditionné l’agrément du
paiement direct à cette justification, le sous-traitant en ayant
été informé. Ainsi, en cessant de régler la société R., le
maître de l’ouvrage a pris, à l’encontre de l’entrepreneur
principal, les mesures coercitives suffisantes et n’a commis
aucun manquement. La Haute Cour revient sur cette
position considérant « il appartient au maître de l’ouvrage
de veiller à l’efficacité des mesures qu’il met en œuvre pour
satisfaire aux obligations mises à sa charge par l’article 14-
1 de la loi du 31 décembre 1975 », sous peine d’engager sa
responsabilité délictuelle envers le sous-traitant.
La société L. prétend avoir consenti un crédit à Mme Y. et à
M. X., lesquels vivent en commun. La société L. les assigne
en remboursement. Le tribunal accueille la demande de la
société L. considérant que, si la solidarité légale de l’article
220 al. 1er du code civil n’est pas applicable car Mme Y. et
M. X. sont de simples concubins et ne sont soumis aux
règles du mariage, « le concubin, qui conteste son
engagement, connaissait néanmoins l’imitation de sa
signature par sa concubine sur les documents contractuels
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Décembre 2012 – Page 5
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Décembre 2012 – Page 6
CONCURRENCE ET DISTRIBUTION
L’impossibilité d’interdire la vente par internet dans un réseau de distribution
(Adlc, 12 décembre 2012, décision n°12-D-23)
Une entreprise notoire dans le secteur des produits
électroniques grand public s’est vue condamnée à une
amende de 900.000 euros le 12 décembre dernier par
l’Autorité de la concurrence, pour avoir interdit aux
distributeurs de ses produits de les vendre en ligne.
Les autres entreprises qui avaient fait l’objet d’une
procédure devant le Conseil de la concurrence avaient
proposé des engagements en 2006 pour remédier aux
problématiques de concurrence soulevées par les limitations
à la vente en ligne imposées à leurs réseaux de distribution.
L’entreprise condamnée par la décision commentée avait
fait le choix de ne pas proposer d’engagement et la
procédure contentieuse a été poursuivie à son encontre.
Résiliation pour non-paiement des redevances
(CA Paris, 28 novembre 2012, R.G. n°10/06796)
La résiliation du contrat pour non-paiement des redevances
en vertu d’une clause résolutoire est l’une des plus difficiles
à remettre en question, ainsi que l’illustre l’arrêt commenté.
En l’espèce, le franchiseur avait, après l’échec de
négociations, résilié le contrat de franchise pour défaut de
paiement des redevances. Le mandataire du franchisé, placé
en redressement judiciaire, tentait de remettre en question
la régularité de la résiliation et l’obligation du franchisé de
payer les redevances échues.
L’Autorité de la concurrence considère que l’interdiction de
vente en ligne mentionnée dans les contrats de distribution
viole à la fois les règles françaises et communautaires
d’interdiction des ententes anticoncurrentielles (article 101
du TFUE et article L. 420-1 du code de commerce).
L’interdiction de vente en ligne est en effet prohibée dans un
système de distribution sélective, dans lequel les
distributeurs doivent pouvoir vendre à tous les clients
finaux, y compris sur internet. Outre l’importante amende,
l’Autorité de la concurrence a également prononcé une
injonction imposant à la société condamnée de modifier ses
contrats de distribution dans un délai de 3 mois, pour y
inclure l’autorisation expresse de vente par internet.
Le mandataire évoquait l’inexécution de ses obligations par
le franchiseur, qui ressortait selon lui des mauvais résultats
du franchisé. La Cour, rappelant que seul le manquement à
une obligation essentielle du franchiseur aurait pu justifier
le non-paiement des redevances, a rejeté cet argument.
La Cour a également écarté l’exception d’inexécution tirée de
la suppression du franchisé de l’Unité du système de
réservation, cette suppression étant une sanction
contractuelle du non-paiement des redevances.
Manquement à l’obligation d’information précontractuelle et réparation du préjudice
(CA Paris, 28 novembre 2012, R.G. n°11/14949)
La sanction du manquement du franchiseur à l’obligation
d’information précontractuelle prévue par l’article L. 330-3
du code de commerce ne se résume pas à l’annulation du
contrat : le franchisé peut se contenter de demander la
réparation de son préjudice. Conformément aux principes
de la responsabilité, il doit alors prouver la faute (c’est-à-
dire le manquement du franchiseur à l’information
précontractuelle), son préjudice et un lien de causalité, ainsi
que le rappelle la décision commentée.
En l’espèce, la demande du franchisé est rejetée, faute pour
ce dernier d’apporter la preuve de la faute qu’il évoquait
(faute dans le choix de l’implantation idéale du magasin)
ainsi que de la réalité de son préjudice. La Cour relevait au
surplus qu’il ressortait des preuves apportées par le
franchiseur que le franchisé avait laissé son contrat initial,
d’une durée de cinq ans, se renouveler pour une durée
indéterminée, sans émettre de réserves quant au choix de
son implantation commerciale.
SOCIAL ET RESSOURCES HUMAINES
Condamnation d’un salarié pour injures sur Facebook
(CA Reims, 24 octobre 2012, R.G. n°11-01249)
L’employé d’un salon de coiffure qui avait saisi le Conseil de
Prud’hommes aux fins de voir prononcer la résiliation
judicaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur et
d’obtenir le paiement d’heures supplémentaires avait tenu
des propos désobligeants à l’encontre de sa supérieure sur
des pages accessibles à tous du réseau social Facebook.
Pour la Cour d’appel, les propos tenus par le salarié sur ce
réseau social auquel ont accès nombre d’internautes sont
manifestement insultants, le salarié s’étant prêté aux
commentaires désobligeants de ses correspondants.
Une politique génératrice de stress sanctionnée au titre de la faute inexcusable
(Cass. civ. 2ème, 8 novembre 2012, pourvoi n°11-23.855)
Un rédacteur en chef depuis 18 ans dans la même société de
presse et d’édition a été victime d’un infarctus du myocarde
reconnu constitutif d’un accident du travail. Il a par la suite
été licencié pour inaptitude physique et a attaqué
l’employeur en reconnaissance d’une faute inexcusable en se
prévalant d’une surcharge de travail représentant 70 heures
par semaine et résultant de la politique de réduction des
coûts menée par la Direction.
Pour sa défense, l’employeur a invoqué l’absence de
conscience du danger, le salarié ne s’étant jamais plaint et
ayant toujours été déclaré apte lors des examens médicaux.
Les juges du second degré ont considéré que cette attitude
incompatible avec les obligations d’un apprenti dans le
cadre de son contrat était fautive et causait nécessairement
un préjudice à l’employeur. En conséquence, la Cour a
condamné le salarié à verser 500 € de dommages- intérêts à
l’employeur qui sollicitait réparation à hauteur de 2,000 €.
Par ailleurs, faute de manquements graves et réitérés de
l’employeur, la Cour a rejeté la demande de résiliation
judicaire du contrat d’apprentissage aux torts exclusifs de ce
dernier.
Cette argumentation n’a pas été retenue par la Cour d’appel
qui a jugé qu’un employeur ne peut ignorer ou s’affranchir
des données médicales afférentes au stress au travail et à ses
conséquences pour les salariés qui en sont victimes. Cette
affirmation est reprise par la Haute juridiction.
En l’espèce, les facteurs de risques ne pouvaient être ignorés
par l’employeur du fait de l’accroissement du travail patent
sur les années précédant l’infarctus et la politique de
surcharge et d’objectifs inatteignables. L’employeur n’a pas
pris les mesures propres à préserver le salarié, manquant
ainsi à son obligation de sécurité de résultat.
La consommation d’alcool au travail ne peut être interdite de façon générale et absolue
(CE, 12 novembre 2012, n°349365)
Une entreprise avait stipulé dans son règlement intérieur
que la consommation de boissons alcoolisées était interdite
au travail y compris dans les cafétérias pendant les repas et
lors de toute autre manifestation organisée en dehors des
repas. L’inspecteur du travail, à qui le projet de règlement
intérieur avait été communiqué, avait exigé le retrait de cette
disposition au motif que le code du travail prévoit une
tolérance pour certaines boissons alcoolisées (vins, bière,
cidre, poiré).
Certes, l’employeur est tenu à une obligation de sécurité de
résultat mais lorsque le règlement intérieur apporte des
restrictions aux droits des personnes et aux libertés, il doit
préciser en quoi elles sont justifiées par la nature de la tâche
à accomplir et proportionnées au but recherché. En l’espèce,
n’était pas précisé dans le règlement intérieur, ce qui aurait
pu caractériser l’existence d’une situation particulière de
danger ou de risque liée à la prise d’alcool. L’interdiction
générale et absolue est donc censurée par le Conseil d’Etat.
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Décembre 2012 – Page 7
IMMOBILIER
La notion d’acquéreur non professionnel en matière de vente immobilière
(Cass. civ. 3ème , 24 octobre 2012, pourvoi n°11-18.774)
Suivant promesse synallagmatique de vente notariée en date
du 23 juillet 2008, une société civile immobilière (SCI) a
acquis une villa mais a refusé de réitérer ladite promesse au
motif qu’elle n’avait pas bénéficié du délai de rétractation
prévu par l’article L271-1 du Code de la construction et de
l’habitation. N’ayant pas obtenu la restitution de l’indemnité
d’immobilisation séquestrée entre les mains du notaire, la
SCI a assigné le vendeur à cette fin, lequel a sollicité le
versement de cette indemnité à son profit. Les juridictions
du fond ont débouté la SCI de sa demande. Un pourvoi a
alors été formé par cette dernière reprochant à la Cour
d’appel d’avoir déduit le caractère professionnel de la
promesse de l’objet social statutaire de la société sans
s’attacher à son activité réelle.
Information de la commune exerçant son droit de préemption
(Cass. civ. 3ème, 7 novembre 2012, pourvoi n°11-22.907)
Une commune a exercé, au prix indiqué dans la déclaration
d’intention d’aliéner, son droit de préemption sur des
immeubles vendus par deux sociétés civiles immobilières. La
commune, ayant refusé de signer l’acte de vente, invoquant
un problème de pollution du terrain, les venderesses l’ont
assignée en réitération de la vente, paiement du prix et
réparation de leur préjudice. La commune forme un pourvoi
en cassation reprochant à l’arrêt d’appel de l’avoir déboutée
de sa demande en réduction du prix et en indemnisation du
préjudice subi en raison de la pollution des sols. La Cour de
cassation rejette son pourvoi, reprenant l’argumentation
développée par les juges d’appel.
Or selon la SCI, la finalité poursuivie était l’acquisition
d’une villa par un particulier à des fins d’habitation
personnelle. La Cour de cassation n’a pas suivi cet
argumentaire en confirmant l’arrêt de la Cour d’appel au
motif qu’une SCI dont l’objet social était l’acquisition,
l’administration et la gestion par la location ou autrement
de tous immeubles et bien immobiliers meublés et
aménagés, n’est pas un acquéreur au sens de l’article L271-1
précité dès lors que l’acte d’acquisition était en rapport avec
cet objet social. Cette motivation pour définir le non-
professionnel s’inscrit dans la jurisprudence consumériste,
le critère du « rapport direct » entre l’activité du contractant
et l’acte ayant été adopté en matière de clause abusive
depuis un arrêt de 1995.
Elle estime que l’acquéreur initial avait été informé de la
pollution du terrain par un rapport annexé à l’acte sous
seing privé de vente et qu’aucune obligation n’imposait aux
venderesses d’annexer ce «compromis» à la déclaration
d’intention d’aliéner. Elle ajoute également que la commune
disposait de services spécialisés et de l’assistance des
services de l’Etat. La commune qui s’était contentée des
documents transmis ne pouvait se prévaloir d’une réticence
dolosive ni de l’existence d’un vice caché et devait en
conséquence régler le prix mentionné à la déclaration
d’intention d’aliéner et réparer le préjudice subi par les
venderesses.
Soumission à permis de construire de travaux relevant en principe d’une déclaration préalable
(CE, 12 novembre 2012, requête n°351377)
Une société, exploitant un parc aquatique, avait obtenu
un permis de construire, puis un permis modificatif, en
vue de la construction de trois toboggans, d’un bassin de
natation et de diverses autres installations. Elle a ensuite
déposé une déclaration préalable en vue de l’installation
de deux nouveaux toboggans. Toutefois, le maire s’est
opposé à ces travaux. Ladite société a alors saisi le
Tribunal Administratif afin d’obtenir l’annulation pour
excès de pourvoir de la décision du maire. Cette demande
a été rejetée.
Le Conseil d’Etat a jugé que « des travaux qui relèvent en
principe, en vertu des articles L421-4 et R421-9 du Code de
l’Urbanisme, du régime de la déclaration préalable, doivent
cependant être autorisés par un permis de construire, le cas
échéant modificatif, dans les cas où, soit ils forment avec une
construction déjà autorisée par un permis de construire en
cours de validité et dont la réalisation n’est pas encore
achevée un ensemble immobilier unique, soit en l’absence
même d’un ensemble immobilier unique, ils modifient une
construction déjà autorisée et en cours d’achèvement. »
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Décembre 2012 – Page 8
PROPRIETE INTELLECTUELLE
L’incidence de la législation sur la publicité en faveur des produits alcoolisés sur les marques
(Cass. com., 20 novembre 2012, pourvoi n°12-11.753)
La publicité en faveur des produits du tabac et des boissons
alcooliques est très strictement encadrée. L’article L.3323-3
du code de la santé publique prévoit en effet les conditions
dans lesquelles la publicité, directe ou directe, en faveur de
ces produits peut être effectuée. Dans cette affaire, une
société ayant pour activité la fabrication de bougies
parfumées et d’eaux de toilette assigna une autre société qui,
sous une marque identique, commercialisait des boissons
alcoolisées. L’action, qui est fondée sur l’atteinte à la marque
renommée et l’atteinte à ses marques antérieures sur le
fondement de l’article L3323-3 du code de la santé publique,
vise à libérer le titulaire de la marque seconde qui subit, de
fait, les restrictions liées à l’usage de la marque seconde.
Dans le cadre de l’action en référé contrefaçon, le Président
du TGI saisi peut ordonner des mesures destinées à prévenir
une atteinte imminente ou à empêcher la poursuite d’actes
argués de contrefaçon si les éléments rendent vraisemblable
qu’il est porté atteinte aux droits ou qu’une telle atteinte est
imminente (art. L.716-6 CPI). Le juge des référés est
traditionnellement présenté comme le juge de l’évidence ;
en matière de contrefaçon, il en va de même ce qui implique
de soumettre au juge des éléments suffisants pour établir la
contrefaçon. En l’espèce, une société agissait en référé à
l’encontre d’une autre à qui elle reprochait la reproduction
de sa marque, tant sur le site internet que dans son nom de
domaine, et des actes de concurrence déloyale en raison
d’une prétendue ressemblance entre ce site et celui qu’elle
La Cour d’appel prononça la nullité de la marque contestée
et l’interdiction de commercialisation des boissons
alcooliques sous ladite dénomination. En effet, en raison
de ce dépôt et de l’usage du signe, le titulaire de la marque
première perdait, en raison des dispositions de l’article
L.3323-3 du code de la santé publique, la possibilité de
promouvoir librement ses produits (même différents) dès
lors que cela risquait d’être perçu comme une publicité
indirecte en faveur de produits alcoolisés tombant sous le
coup de l’article précité. La Cour de cassation approuve la
décision considérant que le dépôt d’une marque identique
et la commercialisation de produits sous celle-ci créaient
une entrave à la libre utilisation de la marque première.
exploite dédié à la vente de pièces détachées automobiles. Le
juge des référés, approuvé par la cour d’appel, rejette
l’action. Selon la cour la similarité des produits offerts
générait nécessairement des similitudes fonctionnelles
(requête par type de véhicule, année, etc.), les thèmes et
présentations générales des sites relevant de choix
différenciés justifiant ainsi l’absence de concurrence
déloyale. Quant à la contrefaçon, sa vraisemblance n’est pas
retenue, ni en première instance ni en appel. Selon les juges,
à l’issue d’une comparaison des signes en présence, aucun
risque de confusion n’en ressortait. Pour cette raison
également, il est décidé que la similarité des noms de
domaine n’est pas établie. On le constate, avant d’agir en
référé, il est essentiel de bien affuter ses armes.
Le référé et l’évidence
(CA Paris, 13 décembre 2012, R.G. n°12/03190)
Appréciation de l’impression d’ensemble des signes
(CA Paris, 7 décembre 2012, R.G. n°12/00584)
mentionnée une dénomination. Selon la Cour, la partie
figurative de la marque, qui reprend les caractéristiques des
stickers, est purement descriptive tandis que la partie
verbale est fortement distinctive. Or, cet élément verbal
n’étant pas repris, la cour juge que l’impression d’ensemble
entre les signes exclut tout risque de confusion.
Le titulaire d’une marque, créant et vendant des stickers
pour carte de crédit, agissait en contrefaçon à l’encontre de
l’une de ses concurrentes qui, ayant la même activité, s’était
selon lui rendue coupable de contrefaçon de marque. Il
s’agissait en l’espèce d’une marque figurative reproduisant la
forme d’une carte bancaire avec des trous sur laquelle était
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La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Décembre 2012 – Page 10
DROIT DE LA SANTE
Les contours du préjudice spécifique de contamination
(Cass. civ. 2ème, 22 novembre 2012, pourvoi n°11-21.031)
Mme X a subi en 1984 une opération de chirurgie cardiaque
au cours de laquelle elle a reçu des transfusions de produits
sanguins. Plusieurs années après cette intervention, des
examens ont révélé qu’elle avait été contaminé par le VIH et
le virus de l’hépatite C. Mme X, décédée en 2009, a été
maintenue durant 25 ans dans l’ignorance de la nature
exacte de sa pathologie par sa famille. Les ayants droits de la
victime, exerçant l’action successorale, ont sollicité auprès
de l’ONIAM une demande d’indemnisation du préjudice
spécifique de contamination de la patiente qui a été rejetée.
La CA de PARIS a également rejeté la demande des ayants
droits au motif que la reconnaissance du préjudice
spécifique de contamination est liée à la connaissance de la
Contamination transfusionnelle et perte de chance professionnelle
(Cass. civ. 1ère, 28 novembre 2012, pourvois n°11-24.022 et 12-11.819)
Un patient, atteint d’une forme sévère d’hémophilie s’est vue
prescrire depuis l’enfance divers produits sanguins. En
1990, des examens révèlent qu’il a contracté le virus de
l’hépatite C. Il a été place en invalidité par la CPAM. Pour
évaluer la perte de chance du patient, à hauteur de 25%, de
poursuivre une carrière professionnelle normale et d’en
percevoir les gains, les juges du fond ont relevé que, selon le
rapport de l’expert, le placement en invalidité n’était pas
uniquement lié à la contamination. En effet, d’après la Cour
contamination par la victime. Les juges du fond ont rappelé
que le préjudice spécifique de contamination est un
« préjudice exceptionnel extrapatrimonial caractérisé par
l’ensemble des préjudices tant physique que psychiques
résultant de la réduction de l ’ espérance de vie, des
perturbations de la vie sociale, familiale ainsi que des
souffrances et de leur crainte, du préjudice esthétique et
d’agrément ainsi que de toutes les affections opportunes
consécutives à la déclaration de la maladie ». La Cour de
Cassation a approuvé la motivation de la Cour. En effet, elle
a considéré que la victime, tenue dans l’ignorance de sa
contamination par le VIH et l’hépatite C, n’avait pas pu subir
de préjudice spécifique de contamination.
d’appel cette invalidité était principalement liée à
l’hémophilie. La Cour de cassation a censuré ce
raisonnement. En effet, la Haute Juridiction considère que
viole l’article L.1221-14 du CSP, une cour d’appel qui, pour
retenir la perte de chance d’un patient de poursuivre une
carrière professionnelle, « fait ressortir, en excluant
l’existence d’un quelconque aléa, que l’admission en
invalidité de ce dernier résultait, fût-ce partiellement, d’une
contamination transfusionnelle ».
Les effets de la substitution de l’ONIAM à l’EFS en cas de contamination par l’hépatite C
(Cass. civ., 1ère, 28 novembre 2012, pourvoi n°11-23.990)
Une patiente a contracté l’hépatite C lors de son
accouchement au cours duquel elle a été transfusé. Elle a
donc recherché la responsabilité de l’EFS qui a appelé en
garantie son assureur. Les juges du fond ont condamné
l’ONIAM, intervenu volontairement, à payer à la patiente
certaines sommes en réparation de ses préjudices et dit que
l’Office serait garanti de ces condamnations par l’assureur
de l’EFS. Par ailleurs, l’EFS et son assureur ont été
condamnés in solidum envers la CPAM et l’hôpital. L’arrêt
est cassé partiellement par la Cour de Cassation. Sur la
garantie, la Cour estime que la substitution de l’ONIAM à
l’EFS, dans les instances en cours à la date du 1er juin 2010,
n’opère pas transfert à l’ONIAM des créances de l’EFS
envers les assureurs de ce dernier. Sur la condamnation in
solidum, la Cour considère que l’EFS doit être mis hors de
cause à l’égard de la victime et des tiers payeurs, car l’arrêt
de la Cour d’appel daté de 2008, n’a pas statué de manière
irrévocable sur l’indemnisation des préjudices de la victime.
PERSONNES ET PATRIMOINE
L’opposabilité aux héritiers du prêt par le parent quasi-usufruitier
(Cass. civ. 1ère , 5 décembre 2012, pourvoi n°11-24.758)
Le prêt effectué par le quasi-usufruitier est opposable aux
héritiers. C'est ce qu'a affirmé récemment la Haute
juridiction au visa des articles 587 et 1122 du Code civil.
En l'espère, une mère détenait en pleine propriété 94 parts et
en usufruit 94 autres parts d'une SCI. Ses six enfants
détenaient la nue-propriété de celles-ci. La SCI a vendu un
immeuble. Par acte sous seing privé, la mère a prêté à l'un de
ses enfants une somme égale au prix de vente de l'immeuble,
remboursable sans intérêts. La mère est décédée et a laissé à
sa succession ses six enfants. L'un des héritiers a assigné
l'héritier emprunteur en inopposabilité du prêt.
La Cour d'appel a fait droit à la requérante en décidant que
le prêt lui est inopposable à compter de la date du décès de la
défunte. Elle a ainsi renvoyé les parties devant le notaire en
charge des opérations de partage de la succession aux fins du
calcul du montant de la créance de la succession sur l'héritier
emprunteur en application du prêt litigieux et de la part du
prix de vente qui doit être restitué à chacun des héritiers du
fait de l'extinction de l'usufruit. Pour motiver sa décision, la
Cour d'appel relève que par la convention de prêt, la défunte
a, à titre personnel, prêté à son fils l'intégralité de la somme
L’importance des sentiments exprimés par le majeur protégé dans la désignation d’un curateur
(Cass. civ. 1ère, 5 décembre 2012, pourvoi n°11-26.611)
Les sentiments exprimés par un majeur protégé, sur la
désignation judiciaire de son curateur, ne peuvent être
écartés sans motivation.
En effet, une femme placée sous curatelle renforcée avec la
nomination d'un mandataire judiciaire, a formé un recours
contre cette décision en demandant que sa nièce soit
désignée comme curateur si la mesure était maintenue.
La juridiction d'appel a rejeté cette demande au motif que la
désignation de la nièce n'était pas opportune compte tenu de
l'importance de la vulnérabilité de la majeure protégée. Au
soutien de cette décision, elle relève que cette dernière s'est
dessaisie de ses économies, qu'il ne lui reste plus que sa
maison, que lorsque celle-ci sera vendue, il conviendra que
les fonds soient placés dans son intérêt pour pourvoir dans
l'avenir à son entretien puisque ses ressources mensuelles
ne lui permettent pas d'équilibrer son budget et encore
moins d'assurer un hébergement en maison de retraite si
son maintien au domicile de sa mère était remis en question.
La Cour de Cassation a censuré la position des juges du fond
au visa des articles 449 et 450 du Code civil, considérant que
ces derniers auraient dû préciser ce qui interdisait, malgré
les sentiments exprimés par la majeure protégée, de confier
la curatelle à sa nièce.
provenant de la vente de l'immeuble de la SCI, y compris la
part correspondant à l'usufruit des 94 parts sociales
provenant en nue-propriété à tous les héritiers et qu'il
existait un quasi-usufruit sur la partie du prix de vente
correspondant à la valeur des 94 parts dont la propriété
était démembrée. Les juges du fond relèvent également
que la mère pouvait utiliser les fonds provenant de la vente
à charge pour elle d'en conserver la substance et de les
restituer, que l'usufruit ayant pris fin le jour de son décès,
les héritiers ont retrouvé la pleine propriété de ces 94
parts; que c'est à cette date que les sommes sur lesquelles
portaient l'usufruit devait être restituées l'usufruitière et en
l'occurrence par l'héritier possesseur de la somme
empruntée; qu'en conséquence, la requérante n'est pas
tenue de respecter la convention de prêt consentie par la
défunte puisque qu'elle n'avait que l'usufruit et dont
l'échéance de remboursement à une date postérieure à
l'extinction de l'usufruit.
La Cour a censuré la position des juges du fond au motif
que « le prêt était opposable aux héritiers, ayant causes à
titre universels de la mère, quand même aurait-il porté
sur des deniers dont elle n'avait que le quasi-usufruit. »
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Décembre 2012 – Page 11
PROCEDURE CIVILE ET VOIES D’EXECUTION
Atteinte à la vie privée et filature
(Cass. civ. 1ère , 31 octobre 2012, pourvoi n°11-17.476)
M. X. a été indemnisé des préjudices consécutifs à l'accident
de circulation dont il avait été victime en 1995. Suite à
l'allégation d'une aggravation de son état de santé, un
nouveau rapport d'expertise judiciaire a été déposé le 22
septembre 2009 aux termes duquel l’expert conclu à la
nécessité d'une assistance permanente en raison de la perte
d'autonomie de M. X. et de son besoin d'être stimulé et
accompagné dans des promenades et autres sorties.
M. X. a alors assigné en référé-provision Mme Y.,
responsable de l'accident, et la société Garantie mutuelle des
fonctionnaires.
Par arrêt en date du 20 janvier 2011, la Cour d’appel d’Aix en
Provence, relevant que les constatations opérées par un
huissier de justice qui avait, à la requête des défendeurs,
suivi et filmé l'intéressé, le montraient conduisant seul un
véhicule, effectuant des achats, assistant à des jeux de
boules, accompagnant des enfants à l'école, en contradiction
Juge de l’exécution et modification de la décision qui sert de fondement aux poursuites
(Cass. civ. 1ère, 13 décembre 2012, pourvoi n°11-12.158)
Conformément aux dispositions de l’article 8, alinéa 2, du
décret du 31 juillet 1992, le juge de l’exécution ne peut
modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de
fondement aux poursuites.
Agissant sur le fondement d’un arrêt de la cour d’appel de
Reims qui avait condamné la société Axa à lui payer une
certaine somme, provision déduite, avec intérêts au taux
légal, M. X. a fait procéder, le 31 juillet 2009, à une saisie-
attribution à l’encontre de la débitrice qui a saisi un juge de
l’exécution pour en demander la mainlevée.
avec les conclusions de l'expertise judiciaire, a retenu
l'existence d'une contestation sérieuse faisant obstacle à la
demande de provision.
M. X. a alors formé un pourvoi en cassation pour atteinte à
la vie privée au visa des articles 8 de la Convention de
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales, 9 du code civil et 9 du code de procédure
civile.
Par arrêt en date du 31 octobre 2012, la Cour de cassation a
rejeté le pourvoi au motif que la cour d'appel a retenu que
les atteintes portées à la vie privée de M. X., sur la voie
publique ou dans des lieux ouverts au public, sans
provocation aucune à s'y rendre, et relatives aux seules
mobilité et autonomie de l'intéressé, n'étaient pas
disproportionnées au regard de la nécessaire et légitime
préservation des droits de l'assureur et des intérêts de la
collectivité des assurés.
Considérant qu’il existe une contradiction entre les calculs
qu’il convient d’interpréter en retenant une provision
différente, la cour d’appel de Paris a dit nulle et de nul effet
la saisie-attribution pratiquée par M. X..
La Cour de cassation relevant que la cour d’appel a modifié
le dispositif de la décision servant de fondement aux
poursuites, clair et dépourvu de toute ambiguïté quant au
montant de la condamnation prononcée et de la provision
déduite, a cassé et annulé l’arrêt de la cour d’appel de Paris
pour violation du décret du 31 juillet 1992.
Rejet d’un document écrit en langue étrangère
(Cass. com., 27 novembre 2012, pourvoi n°11-17.185)
Par arrêt du 27 novembre 2012, la Cour de cassation a
précisé que si l’ordonnance de Villers-Cotterêts d’août 1539
ne vise que les actes de procédure, le juge, sans violer
l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales, est fondé, dans
l’exercice de son pouvoir souverain, à écarter comme
élément de preuve un document écrit en langue étrangère,
faute de production d’une traduction en langue française.
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Décembre 2012 – Page 12
ACTUALITÉ DU CABINET
Évènements
Mécénat Culturel
Le 13 décembre 2012 le cabinet SIMON ASSOCIES a organisé le vernissage de l’exposition de l’artiste Zokatos, jeune peintre abstrait parisien, dans ses locaux.
Cet événement s’inscrivait dans l’action de mécénat culturel entreprise par le Cabinet SIMON ASSOCIES pour
mettre en lumière de jeunes artistes.
Trophées du Droit
Lors de la 12ème édition des Trophées du Droit qui s’est tenue le 29 novembre 2012, le Cabinet SIMON ASSOCIES a été récompensé dans les catégories :
- Firme montante en droit de la distribution - Firme nationale multi-bureaux
Plus d'informations dans la rubrique Évènements de notre site.
Publications récentes de Simon Associés
Jean-Charles SIMON, « Comment affronter les situations complexes » Revue Pratique du Froid – Décembre 2012
Jean-Charles SIMON, « Les Chinois s’intéressent à l’Europe », La Croix – 5 novembre 2012
François-Luc SIMON, « Les réseaux multi-enseignes - Plusieurs cordes à son arc »
Le Nouvel Economiste – 15 novembre 2012
Pour recevoir l’actualité du Cabinet, les numéros précédents de notre Lettre :
www.simonassocies.com
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Décembre 2012 – Page 13