kadath chroniques des civilisations disparues - 025

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COMITE DE REDACTION :

ivan verheyden, rédacteur en chefpatrick ferryn, secrétaire de rédaction jean-claude berck, robert dehon, jacques gossart, jacques victoor

AVEC LA COLLABORATION DE :

 jean bianco, jacques dieu, jacques keyaerts,christine piens, édith pirson,albert szafarz, nicole torchet

ECHANGES AVEC LES REVUES :

bres (j.p. klautz et a. gabrielli, la haye)nouvelle école (alain de benoist, paris)question de (louis pauwels, paris)

MAQUETTE DE GERARD DEUQUET

Au sommaire— notre cahier atlantide

— l’atlantide en méditérranée, Jacques Victoor……..……….……...…..… 

— y aurait-il eu deux atlantides ? Jacques d’Arès...…………………...….. 

— l’archipel indonésien, du pithécanthrope à borobudurJean-Claude Berck ………………………...…. 

— les vestiges vitrifiés, Robert Dehon………….......……………………...…… 

— le fragment m-160 : la boussole olmèque avant les chinois ?Ivan Verheyden……………....………………...……...

— enquête sur les contacts transpacifiques (2), Patrick Ferryn….....……….. 

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A la recherche

De kadath

Perseverare diabolicum... Etalant partout son ignorance dans tous les domaines, Jean-Pierre Adamest de ceux qui persévèrent. Il ne rate plus aucune occasion de donner sa propre définition de grou-pes tels que le nôtre. Ainsi dans Science et Vie (avril 1977) nous traitant de « secte », il nous attribue« la théorie de la race supérieure des « Grands Anciens occidentaux » ! Dans les Cahiers Rationalis-tes (août 1976), il s’inquiète même de ce que « ça prend une très mauvaise tournure dans certainsmouvements comme le mouvement GRECE, comme le mouvement KADATH belge, qui cherchent àrestaurer la théorie raciste d’Allemagne nazie, et ils ne s’en cachent même pas, d’ailleurs ». Pauvrelecteur, vous n’aviez donc pas remarqué ? Suite à notre droit de réponse, ledit Adam, avec l’humourirrésistible qui le caractérise, fait amende honorable : « Les Grands Anciens dont KADATH recherchel’Héritage après l’Ahnenerbe n’étaient pas blonds aux yeux bleus, nous nous étions grossièrementtrompés : ils étaient de petite taille et avaient la peau verte » (Cahiers Rationalistes, juin-juillet 1977).Parlant de nazisme, M. Adam oublie de citer son maître, le Dr. Goebbels, lorsqu’il préconisait (à la

suite de Voltaire, il est vrai) : « Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose ». Mais, à l’inten-tion de gens pareils, nous préférons Schiller disant que « contre la stupidité, les dieux eux-mêmesluttent en vain ».

Le groupe Atlantis fut bien sûr gratifié du même traitement — bien qu’il n’atteigne jamais la virulencequi nous est allouée. Il avait eu le malheur de ne pas non plus avaler les couleuvres du livre d’Adam,contrairement à l’Union Rationaliste, qui lui avait décerné un prix. En lisant notre cahier Atlantide, lelecteur verra qu’une controverse peut être conçue de manière positive. A titre de comparaison, voici,démonté par François Dupuy-Pacherand, le mécanisme mental de J.-P. Adam vis-à-vis de la question(Atlantis n° 290, septembre 1976 — voir aussi le n° 292, mars 1977) : « Après avoir cité dans le plusgrand désordre, et très brièvement, diverses hypothèses en cours (dont quelques-unes assez contes-tables) sur les rapports qui ont pu exister entre l’Atlantide, l’Europe ancienne, et le continent améri-cain, M. J.-P. Adam écrit ensuite (page 60) : « Toutes ces propositions, on s’en doute, relèvent de lafantaisie la plus totale et le lecteur sensé est assuré d’y trouver autant de sujets d’hilarité que dans lalecture du meilleur Allais. Le danger existe cependant et il est dû à l’extrême variété des hypothèsesémises ; à supposer qu’un jour la preuve soit fournie de la relation entre l’Amérique et une civilisationoccidentale, la crétoise par exemple, il se trouvera toujours un glorieux énergumène pour se dresseren criant : Je vous l’avais bien dit ! ». Cette citation mérite qu’on s’y arrête car elle résume et démontreadmirablement l’incroyable partialité de l’auteur, et on peut s’en montrer stupéfait. Que parmi les nom-breuses hypothèses actuelles l’une d’elles puisse se révéler exacte, dans l’avenir, et M. Adam s’endéclare par avance exaspéré. Ce qui tendrait à montrer : 1° que notre auteur n’est pas tellement cer-tain de la solidité éternelle de ses propres négations ; 2° que pour lui, une éventuelle vérité, parcequ’elle pourrait le contredire, devient une pensée tellement insoutenable qu’elle en devient à ses yeux« un danger » ... On peut encore remarquer que celui qui pourrait s’écrier, dans le cas décrit parM. Adam : « Je vous l’avais bien dit », ne saurait être légitimement qualifié d’ « énergumène » puisqueses vues seraient en principe vérifiées. Le côté déplaisant et tendancieux de cette façon d’argumenterest tellement anormal qu’il prétend ridiculiser d’avance, et de façon quasi-injurieuse, des chercheursqui pourraient cependant avoir raison dans le futur. Est-ce ainsi que l’on peut prétendre défendre l’ar-chéologie de « l’imposture », et se réclamer d’une école scientifique et rationnelle ? ».

KADATH

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CIVILISATIONS EFFONDREES 

Le premier éditeur du « Timée » de Platon futCrantor, vers —300 : il croyait à l’Atlantide. Cran-tor fit même des vérifications en Egypte, où lesprêtres lui affirmèrent que la relation de cette his-toire existait encore « sur des piliers ». Aristote,par contre, considérait l’Atlantide comme un my-the. Platon étant le seul à en parler, il considéraitque ses affirmations étaient invérifiables (cfr Stra-bon, II, 102 et XIII, 598). Et l’autorité intellectuelled’Aristote fut telle dans notre culture que, jusqu’auXVIème siècle, l’Atlantide ne suscita qu’indiffé-rence. Il fallut attendre les grandes découvertes deColomb et consorts, pour que l’intérêt renaisse àl’égard du mystérieux continent englouti. FrancisBacon émit l’idée que l’Atlantide était l’Amérique.Peu avant lui, Guillaume de Postel y avait déjàpensé, mais ce fut Abraham Ortelius, savant fla-mand mort en 1598, géographe de Philippe II, quidéfendit cette idée avec le plus de conviction. De-puis cette époque, les thèses concernant l’Atlan-tide ont foisonné, et une bibliographie complèteremplirait un numéro entier de KADATH ! Les hy-

pothèses de localisation les plus variées ont étéproposées. Les plus étranges aussi, voire les plussaugrenues : certains ont même situé l’Atlantide...au nord-ouest de la France ! Parmi tous les tra-vaux que l’Atlantide a suscités, il faut saluer aupassage la très bonne revue française Atlantis, quipublie des études intéressantes sur le sujet de-puis... un demi-siècle. Il va sans dire que je n’aipas l’intention de clore définitivement le sujet enquelques pages. Après avoir résumé les principa-les données du problème, je vous présenterai monpoint de vue en laissant la porte grande ouverteaux hypothèses passées, présentes et à venir : ici,plus que jamais, le constat d’incomplétude est de

rigueur.

Histoire approximatived’un hypothétique continent.Vers —570, Solon, dictateur d’Athènes, venaitd’achever une série de réformes économico-politiques. Afin que ses mesures puissent prendreeffet en son absence, et aussi pour se reposerquelque peu des affaires épuisantes de l’Etat,Solon décide de prendre des vacances en Egypte.Il part donc pour Saïs, dans le delta du Nil. Jus-qu’à Solon, l’histoire de la Grèce avait connu decatastrophiques interruptions causées par desdéluges, sécheresses et autres désastres. LaGrèce n’avait donc pas d’archives historiques :tout au plus des mythes et des traditions impréci-ses. L’Egypte par contre, qui n’avait pas souffertdes catastrophes en question, possédait des ar-chives et des traditions d’une remarquable conti-nuité, et les prêtres de Saïs avaient tout à appren-dre à Solon. C’est donc avec un petit complexed’infériorité (« Ah ! Solon, Solon, vous autresGrecs êtes toujours des enfants... ») que Solonentend pour la première fois la tragique histoire de

l’Atlantide. Les Athéniens, cependant, y avaient joué un rôle de premier plan, puisqu’ils sont cen-sés avoir sauvé l’Egypte de l’invasion atlante !Solon n’en revient pas ! Les prêtres qui lui ra-contèrent l’histoire et le guidèrent pendant sonséjour en Egypte furent probablement Psenophisd’Héliopolis et Sonchis de Saïs ; ils étaient forthellénophiles et réservèrent à Solon un accueilchaleureux, en souvenir du grand service rendu jadis à l’Egypte par les mercenaires grecs.

Rentré à Athènes, Solon confie le récit qu’il vientd’entendre à un personnage qui nous est inconnu,ou bien rédige des notes. Nul ne sait en réalité ce

qu’il fit exactement. Solon meurt vers —558.

1. L’ATLANTIDE ENMEDITERRANEE ?

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Critias l’Ancien (—530 —440), neveu de Solon,prend connaissance de cette histoire, soit grâceaux notes de son oncle, soit de la bouche de l’in-termédiaire inconnu. Lorsque Critias l’Ancien at-

teint l’âge canonique de 90 ans, soit très peu detemps avant sa mort, il raconte l’épopée de l’Atlan-tide à son petit-fils Critias le Jeune (—450 —403)qui est à ce moment un enfant de 10 ans... Enfin,devenu adulte, Critias le Jeune rassemble sessouvenirs et en fait profiter son neveu Platon (—429 —347), qui les consigne par écrit. Près de170 années se sont écoulées depuis le voyage deSolon à Saïs... Et c’est dans le « Timée » et dansle « Critias » (incomplet) qu’en quelques brèvespages Platon nous transmet ce qu’il sait de l’Atlan-tide. En écrivant ces deux dialogues, Platon s’estdonc trouvé dans la position inconfortable del’homme qui a vu l’homme qui a vu l’homme qui a

vu l’homme qui a vu l’ours ! !

Platon, fondateur de l’Académie d’Athènes, quidura de —385 à +529, est certes un personnageillustre, respectable et digne de foi. Il fit certaine-ment de son mieux pour transmettre le plus fidèle-ment possible l’histoire de l’Atlantide à la postérité.On peut donc le croire lorsqu’il affirme à quatrereprises dans son récit que l’histoire de l’Atlantideest une histoire vraie. L’Atlantide n’est pas un my-the. Mais qui oserait soutenir que les souvenirs deSolon sont parvenus intacts à Platon ? La plupartdes spécialistes de l’Atlantide, précisément, lesoutiennent, et pensent qu’il faut prendre le textetel quel, en bloc et au pied de la lettre. Je consi-dère personnellement que des erreurs ont dû seglisser dans ce récit, quelle que puisse être labonne foi de ses narrateurs successifs. Platon lui-même émet d’ailleurs des réserves dans sontexte, lorsqu’il fait dire à Critias : « ...après si long-temps mes souvenirs n’étaient pas assez nets »,ou lorsque, prudent, il déclare : «...il est difficile decroire que... il faut cependant répéter ce que nousavons ouï dire... ». En vertu de ce qui précède,mon attitude à l’égard du récit de Platon est doncnuancée : un témoignage précieux, mais malheu-reusement unique, incomplet, et probablementapproximatif.

La fin de l’Atlantide.Voici, en résumé, ce qu’on peut lire dans le« Timée » et le « Critias ». Neuf mille ans avant levoyage de Solon, il y avait un continent nommé Atlantide, dans l’océan Atlantique, en face descolonnes d’Hercule (le détroit de Gibraltar). Letexte précise que la Méditerranée est comparableà « un port dont l’entrée est étroite », tandis quece qui est au-delà du détroit « forme une véritablemer ». Platon distingue deux capitales : « l’antiquemétropole » située sur une petite île ronde, et « laplaine royale » sur une grande île rectangulaire. Il

en donne même les dimensions ; nous aurons

d’ailleurs l’occasion de revenir sur ce point. Les Atlantes dominaient toute la Méditerranée, puis-qu’ils étaient « maîtres de la Libye jusqu’àl’Egypte, et de l’Europe jusqu’à la Tyrrhénie ».

Leurs visées impérialistes amenèrent les Atlantesà menacer directement l’Egypte et la Grèce. Les Athéniens réagirent et les refoulèrent, sauvantainsi l’Egypte en même temps. C’est à cette épo-que qu’il y eut « des tremblements de terre et desinondations extraordinaires, et, dans l’espace d’unseul jour et d’une seule nuit néfastes, l’île Atlan-tide, s’étant abîmée dans la mer, disparut ». L’ar-mée athénienne fut anéantie à l’occasion dumême cataclysme. Le texte nous apprend aussiqu’il y avait en Atlantide des éléphants, des par-fums et des fruits en quantités infinies. Le pourtourde l’île de l’antique métropole était fait de pierresblanches, noires et rouges. Afin de ne pas alourdir

inutilement cet article, je ne cite pas le texte dePlaton in extenso. Il est cependant souhaitable delire au moins une fois ce récit dans son entier. Jerenvoie donc le lecteur à la bibliographie s’il veutse procurer le « Timée » et le « Critias ».

Le monde selon Platon.

Quelques exemples de localisations. A partir de données aussi ténues, les imaginationsse sont débridées. A un point tel que, très vite,l’Atlantide est devenue un symbole empreint deromantisme : celui du Jardin d’Eden, de la civilisa-tion-mère fabuleusement éloignée dans le tempset merveilleusement organisée, le paradis perdudétruit par un cataclysme épouvantable. La réalitéest pourtant plus prosaïque, et l’étude du pro-blème est dominée par deux grandes questions :l’Atlantide était-elle réellement située dans l’océan Atlantique, et à quelle époque a-t-elle vraimentdisparu ? Je vais essayer de répondre successive-

ment à ces deux questions.

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L’Atlantide atlantique, chère à Paul Le Cour, est-elle possible ? A l’Ecole des Mines de Paris estconservé un fragment de tachylite (lave vitrifiée),trouvé en 1898 par 3000 mètres de fond à 900 km

au nord des Açores, dans l’Atlantique. Si cettelave s’était formée au fond de l’océan, elle seraitcristalline, et non vitrifiée. S’agit-il d’un morceaud’Atlantide ? C’est loin d’être sûr. La tachylite a puêtre apportée par un iceberg ou, ce qui est plusprobable, par un courant de turbidité. Il s’agit decourants à haute densité coulant sur le fond del’océan : c’est ainsi que l’on trouve fréquemmentau fond de l’océan des débris organiques terres-tres. La tachylite peut aussi provenir d’un volcansous-marin qui aurait temporairement émergé : lalave se serait ainsi solidifiée à l’air, avant de s’en-foncer sous les eaux. Il y a cinq exemples connusdans les Açores. Enfin, cette tachylite est extrême-

ment ancienne, et a dû se former bien avant ladisparition de l’Atlantide. Selon l’observatoire géo-logique Lamont aux USA., l’étude de la répartitionau fond de l’océan des fossiles de foraminifères(de type « chaud » : spirale à gauche, de type« froid » : spirale à droite) indiquerait que l’Atlanti-que se serait brusquement réchauffé il y a 10.000ans. Peut-être l’effondrement de l’Atlantide a-t-ilbrusquement permis au Gulf-Stream de passer ?Mais ce n’est là qu’une fragile supposition, car onpense généralement que la formation du Gulf-Stream date de la disparition du pont continentaltransatlantique, soit d’il y a 60 millions d’années.Encore une fois, on est loin de l’Atlantide.Les partisans de l’Atlantide atlantique invoquentégalement à l’appui de leur thèse les similitudesgéologiques, biologiques, anthropologiques etlinguistiques entre l’Europe et l’Amérique. Ils l’ex-pliquent par la présence de l’Atlantide en tant quelien entre les deux continents. Il ne faut cependantpas oublier que :— si les anguilles, tant européennes qu’américai-

nes, se précipitent chaque année vers la merdes Sargasses pour y pondre et mourir, cen’est pas parce qu’elles vivaient jadis en Atlan-tide. Elles font cela depuis une époque bienantérieure à l’ère tertiaire...

— les oiseaux volent et les graines sont portéespar le vent.

— le cheval fut introduit en Amérique par lesconquistadores.

— l’agave et le cactus ont été importés en Eu-rope.

— les Mongols ont jadis franchi le détroit de Be-hring.

— les contacts par mer entre l’Europe et l’Améri-que, entre l’Asie et l’Amérique, à une époquehistorique ou préhistorique, ont été beaucoupplus fréquents qu’on ne le pense générale-ment.

— la plupart des géologues sont d’accord pouraffirmer que le fond de l’océan Atlantiqueexiste sous sa forme actuelle depuis environ

un million d’années...

Malgré tout ceci, les tenants de l’Atlantide atlanti-que nous proposent les localisations suivantes :1) Un territoire qui aurait recouvert l’actuelle merdes Sargasses, plus les Açores, Madère, les Ca-

naries et les îles du Cap-Vert. Ces îles seraient enquelque sorte les « mâts de l’épave », le toit del’ancienne Atlantide. Mentionnons cependant queles algues flottantes qui recouvrent la mer desSargasses ne sont pas un indicateur de hautsfonds : les algues sont amenées de Floride par lescourants, et la profondeur de l’océan y est de5000 mètres.2) Un pont continental transatlantique. J’ai dit plushaut que celui-ci a sans doute disparu il y a quel-que 60 millions d’années.3) La dorsale atlantique médiane. Il s’agit d’unechaîne de montagnes sous-marine orientée nord-sud qui va de l’Islande à Tristan da Cunha. Elle

rejoint l’arête centrale de l’océan Indien pour en-cercler ensuite l’Afrique. Formée il y a 15 millionsd’années à l’air libre, elle est actuellement recou-verte par 3000 m. d’eau et occupe vraisemblable-ment le fond de la mer depuis au moins 280.000ans. On y trouve cependant des sédiments ré-cents, mais ceux-ci datent d’un minimum de30.000 ans.4) Un continent situé dans la partie orientale del’Atlantique. Mais les sédiments meubles qu’ontrouve dans cette région sont tous antérieurs auPléistocène, et la croûte terrestre continentale »,composée de silicate d’alumine, qui doit faire nor-malement 10 km d’épaisseur pour tout continentqui se respecte, n’y atteint que 3 km (Université deCambridge).5) La région de Tartessos, à l’embouchure duGuadalquivir, au nord de Cadix. Mais le premierrécit de Platon précède la destruction de Tartes-sos par les Carthaginois...6) Un continent situé à l’emplacement actuel de laManche, soit au nord-ouest de la France. C’estimpossible, car la formation de la Manche résulted’un phénomène nommé « transgression flan-drienne », qui commença en —18.000 et évoluatrès lentement. Un exemple de la transgressionflandrienne est la lente submersion du golfe duMorbihan.

Je ne m’étendrai pas longtemps sur les hypothè-ses farfelues, car il y en eut beaucoup : par exem-ple celle qui situe l’Atlantide au Chott-el-Djerid enTunisie (il s’agit là au contraire de l’émersion d’unezone de sable !), ou les mythiques destructions,avec ou sans collisions planétaires, du Gondwanaou de la Lémurie. Ce sont là des hypothèses deconversation tout juste bonnes à égayer les lon-gues soirées d’hiver... En fin de compte, si la loca-lisation atlantique de l’Atlantide n’est pas rigoureu-sement impossible, je la considère néanmoinscomme très peu probable. Il est possible que denouvelles découvertes nous apportent un jour lapreuve de l’existence d’un continent englouti dans

l’océan, mais dans l’état actuel des connaissances

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rien ne permet de l’affirmer. Je laisse néanmoinsla porte ouverte à cette possibilité puisque Platonlui-même affirme que l’Atlantide était située dansl’Atlantique. Mais, comme je l’ai dit plus haut, Pla-

ton a pu se tromper en toute bonne foi. Il faut sa-voir que l’océan Atlantique fut baptisé ainsi parHérodote une génération avant Platon. Celui-ci adonc pu y placer son continent par souci de logi-que, d’autant plus que les dimensions qu’il nousdonne pour la plaine royale sont trop grandes pourque cette plaine puisse trouver place en Méditer-ranée. Mais nous verrons que ces dimensionssont probablement erronées. Il est aussi possibleque, ne sachant pas grand-chose à ce sujet, Pla-ton ait placé l’Atlantide dans l’océan dans un sou-ci... de symétrie. Ainsi, le vaste empire terrestredes Perses, à l’est, était contrebalancé par levaste empire maritime des Atlantes à l’ouest.

Enfin, dernier argument mais non le moindre, iln’est pas du tout invraisemblable qu’au long des170 ans de transmission du récit, un des intermé-diaires ait mal lu ou mal compris un mot-clé : ilfaudrait lire alors « à mi-chemin entre la Libye etl’Asie » (mezon)  au lieu de «  plus grande que  laLibye et l’Asie » (meson)  ; ce qui, non seulementsituerait l’Atlantide en Méditerranée, mais en ré-duirait notablement les proportions. A ce propos, je développerai plus loin une autre hypothèse, que je considère personnellement comme la bonnedans l’état actuel de nos connaissances. Il s’agitd’une Atlantide méditerranéenne, dont « l’antiquemétropole » serait Santorin en mer Egée, et dontla « plaine royale » serait la Crète. Ceci nécessited’amples explications, mais avant cela il nous fautencore discuter de la véritable ancienneté de lacatastrophe atlante.

Neuf mille ans avant Solon ?Est-ce possible ? Pourrait-il s’agir d’un colossalanachronisme ? Force nous est en tout cas dereconnaître qu’en —9600 il n’y avait « ni Egyp-tiens pour consigner les événements, ni Grecspour accomplir les exploits qui leur sont attri-bués » (Spiridon Marinatos). Il est très peu proba-ble que les Magdaléniens aient pu organiser uneinvasion navale de l’Egypte prédynastique, et en-

core moins probable que d’hypothétiques pré-Grecs, qui devaient encore se trouver dans leslimbes de l’Histoire, aient pu se trouver là poursauver l’Egypte in extremis ! Alors, où est l’er-reur ? Selon Eudoxe de Cnide, au lieu de lire« 9000 ans avant Solon », il faut lire 9000 mois...,soit 750 ans, ce qui ramènerait la disparition del’Atlantide aux environs de —1350. C’est possible,mais je penche plutôt pour une erreur d’interpréta-tion beaucoup plus subtile. Par une erreur de lec-ture ou de compréhension du langage égyptien,Solon aurait écrit « mille » chaque fois qu’il s’agis-sait de « cent ». Ce n’est pas aussi biscornu qu’il yparaît. C’est ainsi qu’en anglais, un billion vaut un

million de millions, alors qu’en américain le même

mot n’a qu’une valeur de mille millions. Un traduc-teur français risque donc d’y laisser sa bosse desmaths... et d’altérer considérablement le sens dutexte ! Nous verrons que si l’on admet cette erreur

à propos des dimensions de la « plaine royale »,on retombe sur les dimensions de... la Crète ! Detoute manière, en tenant compte de cette éven-tuelle bévue de Solon, la date du cataclysme quidétruisit l’Atlantide est ramenée à 900 ans avantSolon, soit vers —1500.  Nous allons voir qu’enadoptant cette solution, le récit de Platon devienttout-à-coup très plausible.

Un bref rappel historique.

Vers —4000 apparaissent sur la scène de l’His-toire les premiers Crétois. Venus du nord, cesproto-Grecs envahissent la Grèce néolithique,descendent en mer Egée dans les îles Cycladeset poussent jusqu’à l’île de Santorin, la plus méri-dionale des Cyclades, où ils fondent leur premièreet antique métropole, jetant les bases de leur futurempire marin. A ce moment, l’Egypte est au stadeprédynastique.Vers —3000, ayant inventé les navires à quille,

nos proto-Grecs s’embarquent, depuis Santorin,pour l’île qui va devenir leur plaine royale, laCrète. C’est l’époque du Minoen Ancien I : le roiMinos fait démarrer la civilisation crétoise. LaGrèce est toujours au néolithique, l’Asie mineurevoit naître la première Troie, l’Ancien Empireégyptien démarre sous l’impulsion du roi Ménès.Curieuse ressemblance de date et de noms : —3000, Minos-Ménès ! Vers —1750, la Crète abeaucoup progressé ; on est au stade MinoenMoyen III, deuxième palais de Cnossos. La Grècevoit déferler sur ses terres d’autres nordiques, lespré-Grecs ou Achéens, futurs fondateurs de Mycè-nes et de Tirynthe. L’Egypte est en pleine période

intermédiaire avec les pharaons hyksos.

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Vers —1500, la Crète est à l’apogée de sa puis-sance maritime et économique. C’est le stadeMinoen Récent II. La Crète domine toute la Médi-terranée, y compris la Grèce mycénienne qui est

alors en plein essor. Les Crétois entretiennentavec l’Egypte de fructueuses relations commercia-les.Vers —1400, une catastrophe raie de la carte lacivilisation crétoise. Le commerce avec l’Egyptecesse brusquement. C’est l’époque de la guerrede Troie. Mycènes est à l’apogée de sa puis-sance, et les Mycéniens profitent de la situationpour envahir la Crète et en devenir les nouveauxmaîtres. Après un moment d’interruption, le com-merce reprend avec l’Egypte, mais les Egyptiensdécouvrent que la Crète a changé de mains. Touten continuant à acheter à la Crète la résine demousse de chêne, la résine de pin et le bois de

cèdre, les Egyptiens s’empressent de reconnaîtrepolitiquement les nouveaux maîtres de la Crète.C’est ainsi que les peintures représentant les Mi-noens avec leur étui pénien sont retouchées afinde transformer le vêtement en jupe mycénienne !Un bel exemple en est la tombe de Rekmirê, où ilsemble bien que la retouche ait eu lieu entre —1470 et —1460, ce qui situerait la catastrophe quidétruisit la Crète aux environs de —1470.Vers —1250, les « peuples de la mer » (des pré-Vikings ?) balaient la Méditerranée, et notammentles Mycéniens-Crétois décadents. La Grèce voitenfin arriver les vrais Grecs à l’occasion des inva-sions doriennes. L’Egypte est sauvée des peuplesde la mer grâce à l’appui efficace de mercenairesgrecs.En résumé, si les Crétois sont les Atlantes, ce que je vais essayer de prouver, la fin de l’Atlantide apu se situer vers —1470, soit environ 900 ansavant Solon. L’épisode de la guerre entre lesGrecs et les peuples de la mer, 200 ans plus tard,a pu prêter à confusion, et être assimilé par lasuite à une guerre des Grecs contre les Atlantes.Voyons maintenant ce qui a bien pu détruire bruta-lement la civilisation crétoise-atlante vers —1470.

La catastrophe de Santorin.Santorin ou Théra, ex-Kallistê (la très belle), ex-

Strongylê (la circulaire), est la plus méridionaledes Cyclades. Aujourd’hui, elle a la forme d’uncroissant, dont les extrémités semblent vouloirbroyer comme le ferait une pince l’îlot de Therasiaet le minuscule rocher d’Aspronisi. Le lac intérieurrenferme deux autres îlots : Palea Kameni et NeaKameni ; ce dernier porte le volcan qui causa etcontinue de causer périodiquement les malheursde l’île. Santorin est à 110 km de la Crète. Lespetits bateaux n’aiment pas se rendre à Santorinlorsque le vent souffle, car le goulot d’accès au lacintérieur est étroit et le risque de se fracassercontre la falaise est réel. En arrivant à l’île partemps maussade, l’impression générale est

sinistre.

On est écrasé par la hauteur des falaises qui bor-dent l’intérieur du croissant (250 mètres) et onfrissonne quelque peu en songeant que la profon-deur des eaux du lagon varie de 200 à 400 mè-

tres, ce qui interdit tout ancrage : les bateaux s’ac-crochent à des ancres flottantes. L’ensemble dupaysage évoque à juste titre une gigantesque ca-tastrophe passée, qui n’a laissé de la belle îleronde qu’un amas de débris.

Il y a dix millions d’années, un continent reliait laGrèce actuelle à l’Asie mineure. Il était chaud etfertile, on y trouvait des singes et des éléphantsnains. Au quaternaire eut lieu un effondrementgigantesque qui donna lieu à la formation des îlesde la mer Egée et de la Crète, avec un foyer vol-canique central très instable. Survint alors unelongue période d’accalmie sismique, qui permit le

peuplement humain. Santorin s’appelait alorsStrongylê, l’île ronde. Vers —1500, le volcan del’île se réveilla et les habitants crétois connurentplusieurs périodes éruptives successives qui setraduisent sur le terrain par un dépôt de plusieursmètres de pierre ponce. L’éruption paroxystique,celle qui allait donner naissance à l’histoire del’Atlantide, eut lieu vers —1470 et laissa un dépôtde 30 mètres de cendres nommées tephra. Latephra contient 97 % de verre volcanique, ce quipermet de fabriquer un excellent ciment : Ferdi-nand de Lesseps l’utilisa pour la construction dePort-Saïd, et les cimenteries d’Athènes l’exploitenttoujours. L’éruption fut d’une violence inouïe, que

l’on peut chiffrer à environ cinq fois celle du Kraka-

Maquette de Santorin, faite à Athènes d’aprèsune carte de l’Amirauté britannique.

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toa en 1883 ! En quelques heures, le volcan deSantorin vomit 60 km3 de matière, ce qui eut poureffet de créer sous l’île une gigantesque cavité autoit fragile. Bientôt, sous la pression colossale des

gaz contenus dans cette cavité, la voûte explosa.Une grande partie de l’île s’effondra alors de 500mètres, créant un trou monstrueux, une caldera de83 km2. Aspirée, la mer se précipita avec une vio-lence accrue dans la caldera, pour rejaillir ensuiteau centre de celle-ci, créant un raz de marée dan-tesque, un tsunami  dévastateur de 200 mètres dehaut qui déferla sur la mer Egée. Ce tsunami , as-socié ou non à des tremblements de terre, fut vrai-semblablement à l’origine de la destruction de lacivilisation crétoise. Il détruisit d’un coup toute laflotte crétoise, et aussi les villes. Les retombéesde cendres volcaniques anéantirent la végétationpour plusieurs années. La Crète, ruinée, paraly-

sée, dévastée, devenait une proie facile pour lesMycéniens à l’affût...

Les traces de l’éruption. A Santorin, elles sont évidentes. De l’île ronde, ilne reste qu’un croissant et quelques îlots. Le la-gon est la caldera. Les dépôts de pierre poncesont impressionnants, et permettent de reconsti-tuer l’histoire volcanique de l’île. Spiridon Marina-tos y a même découvert une autre Pompéi, à sa-voir la cité d’Akrotiri, accrochée au bord du préci-pice et entièrement recouverte de cendre volcani-que. Les habitants ont eu le temps de fuir la ville,puisqu’on n’y retrouve ni cadavres ni objets pré-cieux. Mais les ustensiles de cuisine, les jarres oùl’on stockait les aliments, les objets usuels, s’yretrouvent quasi intacts sous la cendre. J’ai visité Akrotiri, et c’est émouvant. On a l’impression quela vie y fut brutalement suspendue. Du seuil d’unemaison, j’ai vu une tasse intacte, à moitié enfouiesous la cendre. Elle était tombée de son étagèresous la violence de l’explosion... L’île d’Anaphi setrouve à 24 km à l’est de Santorin. Trois dépôts depierre ponce y témoignent de la violence du cata-clysme. Sur la côte ouest d’Anaphi, on trouve dela pierre ponce en abondance à 350 mètres de lacôte et à 50 mètres d’altitude ! Sur la côte nord-

est, deux dépôts : l’un à 750 mètres à l’intérieurdes terres et à 160 mètres d’altitude, l’autre à1700 mètres de la côte et à 250 mètres d’altitude !Cela dépasse l’imagination... Les recherches deNinkovich et Heezen de l’observatoire Lamont(Université de Columbia) ont consisté en 21 prélè-vements d’échantillons du fond de la mer Egée, jusqu’à 3700 mètres de profondeur. Deux couchesdistinctes de tephra  ont ainsi été découvertes :leurs indices de réfraction sont différents. La cou-che inférieure concerne une autre catastrophe quieut lieu il y a 25.000 ans (période würmienne). Lacouche supérieure, qui concerne le cataclysme quinous occupe, s’étend sur une zone de 900 km de

long et 300 km de large, au sud-est de Santorin...

Cette orientation permet de déterminer que l’érup-tion eut lieu en été puisque ce furent les vents dusud-est qui véhiculèrent la cendre.

Les traces de raz de marée.Le papyrus égyptien d’Ipuwer, « Admonitions d’unsage égyptien », mentionne l’interruption brutaledu commerce avec Keftiu (la Crète, Caphtor dansla Bible). Manéthon associe le règne de Thoutmo-sis III (—1490 —1436) au Déluge de Deucalion(ceci est rapporté par le Syncelle en +800). Dequoi s’agit-il ? D’une tradition vivace au cap Sou-nion (pointe méridionale du Péloponnèse) qui évo-que une inondation catastrophique présentéecomme le résultat d’une rivalité entre Athéna etPoseidon. La même tradition existe en Argolide oùil s’agit cette fois d’une lutte entre Poseidon etHéra. A Trézène et au golfe de Salonique, Euri-

pide mentionne la vague envoyée par Poseidonpour noyer Hippolyte, une vague monstrueuse quisurvint à la suite d’un bruit terrifiant...(« Hippolyte », 1198 à 1212). En Lycie, Plutarque(« Moralia », 248 a-b) décrit une énorme vaguequi inonde la plaine ; en Troade, Strabon (I,58)parle d’une vague de fond qui inonde Troie aprèsun séisme ; à Rhodes, Diodore (V, 56-57) racontel’inondation catastrophique de Rhodes qu’il imputeà une grande « marée montante ». Enfin, à Samo-thrace, Diodore (V, 47, 3-5) parle d’autelsdisposés en cercle le long d’une ligne qui fut at-teinte par le front des vagues lors d’une grandeinondation venue de la mer.

La caldera de Théra : la bande horizontale

sombre est une coulée de lave.

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Dans la légende des Argonautes, il faut épinglerl’épisode du géant Talos, alias le volcan :— il est présenté comme le garde redoutable des

approches septentrionales de la Crète. Les

premiers marins mycéniens fréquentaient cetterégion avec prudence.

— il projette les rochers (bombes volcaniques ?).— il s’affaisse « en repos » quand son sang s’est

écoulé « comme du plomb fondu ».— quand la caldera est formée, il reste un grand

œil aveugle (Cyclope).— son talon est fragile (allusion au volcan subsi-

diaire de Santorin, celui du cap Mavrorachidi?).— la fiancée du fils de Talos se nomme Kleisithé-

ra, la « clé de Théra » ou clé de Santorin.— le fils de Talos est Leukos (la cendre blan-

che ?).— après l’explosion, des ténèbres terrifiantes

s’abattent sur les Argonautes et Jason fuit...vers Anaphi !! Le tsunami  passe sous son vais-seau et le nuage volcanique amortit le bruitdes explosions ultérieures. C.Q.F.D.

Après la catastrophe. A Santorin, lorsque le volcan se réveille, la merprend une teinte laiteuse quelques jours avantl’éruption. Les habitants sont donc avertis de sonimminence. L’absence de cadavres et d’objetsprécieux dans les rues et dans les maisonsd’Akrotiri indique que les habitants ont eu le tempsde fuir. Mais ont-ils pu fuir assez loin pour échap-per aux bombes volcaniques et au tsunami  ? C’estmoins sûr, quoiqu’en mer le danger inhérent auraz de marée soit moins grand que dans un port :la lame de fond peut passer sous le bateau sansle faire nécessairement chavirer (témoin l’aventuredes Argonautes). Il a donc pu y avoir quelquessurvivants. En Crète, le tsunami   fut probablementaccompagné de secousses sismiques résultant del’explosion de la montagne à Santorin. L’ensembledut être fort dévastateur, mais les survivants furentprobablement nombreux.

L’invasion mycénienne en a sans doute fait fuir ungrand nombre. Empruntant les quelques bateauxrestants de la fière flottille crétoise, ils se dispersè-

rent, selon toute vraisemblance. A l’époque classi-que, il existait une tribu d’ « Atlantes » en Tunisie.Les Philistins de Palestine sont-ils d’anciens Cré-tois ? Le prophète Amos semble le suggérer(Amos, 9, 5-7) puisqu’il écrit vers —800 que lamigration des Philistins est liée à des phénomènesvolcaniques et à des inondations. Il nomme laCrète (Caphtor)... Y eut-il des réfugiés en Egypte,dont le récit parvint à Solon 900 ans plus tard ?Toute référence égyptienne à la Crète (Keftiu)cesse sous Aménophis II, soit vers —1450. Cer-tains survivants se réfugièrent aussi dans la partieoccidentale de la Crète et dans le Péloponnèse(en Messénie). Les Mycéniens, pour leur part,

assimilèrent la civilisation crétoise, dont l’écriture

« linéaire A » devint le « linéaire B » à cause desvocables grecs archaïques qu’il fallut assimiler. LaCrète dut les impressionner très favorablement,puisqu’on retrouve le détail suivant dans l’architec-

ture de la porte des lions à Mycènes : les lionsroyaux de la maison d’Atrée s’appuient sur unpilier de type minoen ; ce pilier est lui-même dres-sé sur un autel minoen !

Certains auteurs pensent que les ténèbres cau-sées par l’éruption furent une des plaies d’Egypte. Auquel cas, le passage de la mer Rouge parMoïse aurait eu lieu à la faveur du tsunami   ! Eneffet, lorsqu’un raz de marée se prépare, il estbien connu que la mer commence par se retirerdurant un laps de temps plus ou moins long(Moïse passe...), puis elle revient avec violence(Pharaon est englouti...). C’est presque trop beau

pour être vrai, et Moïse aurait eu alors une sacréeveine ! De toute manière, cela ne cadre pas tout àfait avec les dates que je proposais pour l’Exodedans KADATH n° 20. Si l’Exode s’est produit enmême temps que la catastrophe de Santorin, soitvers —1470, cela donne le pharaon ThoutmosisIII. Alors que je penche pour Aménophis III, vers—1408. Il y a donc trois possibilités :— l’Exode n’a rien à voir avec la catastrophe de

Santorin.— la destruction de Santorin a eu lieu plus tard

qu’on ne le pense.— l’Exode se serait produit plus tôt que prévu,

sous Thoutmosis III.Je m’abstiens de trancher.

La Crète pourrait-elle être l’Atlantide ?Platon distingue nettement dans son récit les deuxparties de l’Atlantide : l’ « antique métropole », unepetite île ronde, et la « plaine royale », sur unegrande île rectangulaire et montagneuse. Les di-mensions de l’antique métropole sont : 50 stadesde rayon, soit une île d’un diamètre d’environ 20km. Ceci est compatible avec les dimensions del’antique Strongylê, dont les débris constituentactuellement Santorin. Quant à la plaine royale,elle mesure, nous dit Platon, 3000 stades sur2000 ! Elle est entourée d’un fossé de 10.000 sta-

des, et Platon ajoute qu’il doute fort que l’hommeait pu creuser un tel fossé. Il n’est donc pas sûrdes chiffres qu’il avance, mais il rapporte ce qu’onlui a dit. J’ai dit plus haut, à propos de la date ducataclysme, qu’il était fort probable qu’à un stadede la transmission du récit, peut-être au stade deSolon lui-même, on a dû confondre les milliers etles centaines. Toujours en vertu de cette impres-sion, je réduis donc les dimensions de la plaineroyale à 300 stades sur 200, ce qui donne 54 kmsur 37. Ceci est très compatible avec les dimen-sions de la plaine de Cnossos... Dès lors, tentonsd’interpréter le texte en fonction d’une Atlantideméditerranéenne dont les deux foyers seraient

Santorin et la Crète :

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10 

●  Timée, 25, A : de l’Atlantide on peut se rendresur des îles qui permettent d’atteindre ensuitele continent qui se trouve au-delà de ces îles.Je traduis : de Crète, on peut se rendre dans

les Cyclades, et de là, en Europe continentale.●  Critias 113c, 116a, 115c-d : le palais se trouve

sur une colline à l’intérieur des terres, prèsd’une plaine fertile située à mi-chemin de l’îlele long de la côte. Le palais de Cnossosconvient très bien.

●  Critias 117c, 118b : la description qui est faitedu pays évoque la côte méridionale de laCrète, c’est-à-dire la côte la plus familière auxEgyptiens.

●  Critias 119d-e : dans la tauromachie atlante,les taureaux sont chassés à la massue et aunœud coulant, puis offerts en sacrifice. Cecicorrespond point par point aux scènes de

l’arène de Cnossos représentées sur les cou-pes crétoises de Vapheio.●  Critias 117a-b : la description des palais et des

sanitaires évoque ce que l’on sait du palais deMinos.

●  Critias 115a : les herbes et les aromates. C’é-tait l’essentiel du commerce entre la Crète etl’Egypte !

●  Critias 114e : les éléphants. Les Crétois chas-saient probablement l’éléphant en Afrique duNord ; l’ivoire crétois était fort apprécié.

Comment, me direz-vous, intégrer dans tout cecile fait que les « Athéniens », en refoulant les Atlantes, auraient sauvé l’Egypte de l’invasion ?Je pense qu’il s’agit là d’un épisode postérieur dedeux siècles, qui a été accolé à la légende de ladisparition de l’Atlantide. En effet, vers —1250(période de déclin des Mycéniens de Crète et deGrèce), les « peuples de la mer », des Suédois,Danois, Allemands, Tyrrhéniens, Siciliens, Sardeset Corses, ont déferlé sur la Méditerranée et me-nacé sérieusement l’Egypte de Ramsès III. A cetteoccasion, des mercenaires grecs ont sauvé l’em-pire égyptien affaibli. Il semble que beaucoup deces Grecs se soient ensuite établis à Saïs, ce quiexpliquerait les sentiments amicaux des Saïtes àl’égard des Grecs en général et de Solon en parti-culier, et aussi l’intégration de l’épisode dans l’his-

toire de l’Atlantide racontée par les prêtres deSaïs. Cet épisode est connu grâce aux inscriptionsdu temple égyptien de Medinet-Habou. Il est pres-que certain que les Atlantes étaient des Indo-Européens. C’est Paul Le Cour qui m’en apportela preuve. Minos est à rapprocher de Ménès(Egypte), Manou (Inde), Manus (Germanie), Menu(triades bardiques), Manitou (Algonquins), Men(Breton), Man (langues germaniques), Moine(Français). L’ensemble dérivant du sanscrit Mouni.

Conclusion.L’Atlantide atlantique me paraît peu probable. Jepense que Platon a parlé, sans le savoir, de San-

torin et de la Crète. J’ajouterai qu’au cap Matapan

(Péloponnèse), les promontoires de Ménare et deMalea sont aussi nommés « Colonnes d’Hercule »car c’est là qu’Hercule descendit aux enfers... Mesarguments essentiels sont :

— 170 ans se sont écoulés entre le voyage deSolon et le récit de Platon.

— rien ne permet de dire qu’il y a un continentenglouti dans l’océan.

— il faudrait lire mezon », « à mi-chemin de » (etnon meson, « plus grande que »).

— quand Platon écrit « mille », il faudrait lire« cent ».

— Santorin a fort bien pu s’engloutir en 24 heu-res, et entraîner la Crète dans sa ruine.

— les descriptions que fait Platon pourraient trèsbien convenir à propos de la Crète.

Ceci dit, notre point de vue est-il différent de celui

de notre illustre consœur, la revue Atlantis ? Je nele pense pas. Pour feu Paul Le Cour et pour l’ac-tuel rédacteur en chef Jacques d’Arès, l’Atlantideest engloutie dans l’océan et on la retrouverapeut-être un jour, et la Crète en est une coloniequi a résisté au temps.Mon avis est que l’Atlantide et la colonie ne fontqu’un…

JACQUES VICTOOR

Bibliographie succincte.

 Archeologia n° 102, janvier 1977.

 Atlantis n 284, juillet-août 1975 et n 285, septembre-décembre 1975.

 A. Bessmertny : « L’Atlantide », Payot 1949.

Col. A. Braghine : « L’énigme de l’Atlantide », Payot1939.

F. Butavand : « La véritable histoire de l’Atlantide »,Ed. Chiron, Paris 1925.

E. Cayce : « Visions de l’Atlantide », J’ai Lu 1973. R.Dévigne : « L’Atlantide, sixième partie du monde »,G. Crès et Cie, Paris 1923.

1. Donnelly : « Atlantis, the antediluvian world », R.Steiner publ., N. Y. 1971.

Maitland A. Edey : « Antiques civilisations égéen-nes », Ed. Time-Life 1975.

 A. G. Galanopoulos et E. Bacon : « L’Atlantide, lavérité derrière la légende », Albin Michel 1969. W.Ley et Sprague de Camp : « De l’Atlantide à l’Eldora-do », Plon 1957.

J. V. Luce : « L’Atlantide redécouverte », Tallandier1973.

Spiridon Marinatos : « Some words about the legendof Atlantis », Athènes 1971.

Platon : Sophiste - Politique - Philèbe - Timée - Cri-tias, Garnier-Flammarion 1969.

Otto Silbermann : « Un continent perdu, l’Atlantide »,Ed. Genet, Paris 1930.

 Andrew Tomas : « Les secrets de l’Atlantide », Laf-

font 1969.

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Dans son préambule, Jacques Victoor rappelleque pour Aristote, l’Atlantide était un mythe ; et ilsouligne avec raison l’autorité intellectuelle d’Aris-tote au cours des siècles. Si le lecteur permet que je me cite moi-même, je dirai qu’Aristote« constitue un sommet   qui pratiquement ne sera jamais dépassé. Symboliquement, tout sommetcomporte deux faces, l’une ascendante, l’autredescendante. Pour Aristote, la première est repré-sentée par sa formation platonicienne. Lui-même

se situe au sommet, tandis que la seconde facecorrespond à tout ce qui découle depuis plus dedeux mille ans des principes aristotéliciens ».(Encyclopédie de l’ésotérisme, tome 2 : religionsnon chrétiennes). Hélas, Aristote est à l’origine dumatérialisme et de la spécialisation, de telle sorteque personne n’est plus capable de considérerqu’un mythe plein de signification profonde peutêtre en même temps un récit historique, même sice dernier comporte quelques erreurs. Et sur ceplan, je suis tout à fait d’accord avec Jacques Vic-toor pour considérer que le récit de Platon encomporte quelques-unes. Mais il n’est pas éton-nant de constater la difficulté à discerner quelles

sont ces erreurs quand on observe, par exemple,les versions contradictoires de l’histoire de la der-nière guerre mondiale, malgré l’abondance dedocuments... et la proximité de l’événement.

Platon, dit-on, était le seul à parier de l’Atlantide,ce qui permettait à Aristote de considérer les affir-mations du fondateur de l’Académie comme invé-rifiables. Voilà bien une preuve de l’étroitessed’esprit aristotélicien, car il y a lieu de faire desrapprochements entre la « civilisation atlanti-que » (je dirai plus loin pourquoi je préfère cettedénomination plutôt que « Atlantide atlantique »)et divers textes ou traditions occidentales, notam-

ment l’Odyssée et l’Argonautique qui ne pouvaient

être inconnus d’Aristote. Au surplus, je remercieJacques Victoor d’avoir rappelé « que l’océan Atlantique fut baptisé ainsi par Hérodote une gé-nération avant Platon ». Mais je me permettrai dene pas être d’accord avec la conclusion qu’il entire. Je dirais même au contraire, car Platonconnaissait bien évidemment les travaux de celuique l’on appelle « le père de l’Histoire », et il meparaît impensable que l’auteur du « Critias » aitemployé à plusieurs reprises l’adjectif

« atlantique ».. pour qualifier une partie de la Mé-diterranée toute proche de lui (voir Timée, 24, e :« du fond de la mer atlantique ». Cfr. égalementCritias 114 : «A tous, il imposa des noms : le plusancien, le roi, reçut le nom qui a servi à désignertoute cette île et la mer qu’on appelle atlantique,parce que le nom du premier roi qui régna alors fut Atlas »). Et Platon insiste, dans Timée (25, a),lorsqu’il dit que l’on pouvait « gagner tout le conti-nent sur le rivage opposé de cette mer qui méritaitvraiment son nom ». On pourrait même presquedire qu’Hérodote a implicitement parlé de l’Atlan-tide en parlant de l’océan, qu’il a sans doute bapti-sé ainsi parce qu’il connaissait peu ou prou l’exis-

tence ancienne de « l’île Atlantide ». D’ailleurs, J.V. Luce, dans son livre « L’Atlantide redécou-verte », auquel se réfère Jacques Victoor, rappellequ’Hérodote avait également entendu parler d’un« peuple atlante » qui vivait autour d’un oasis dudésert, très loin à l’ouest de l’Egypte. Outre quenous sommes très loin de Santorin et de la Crète,un tel argument me paraît, de toute manière, plusplausible qu’un simple « souci... de symétrie ».Pour moi, si le récit de Platon ne doit pas être prisau pied de la lettre dans tous ses éléments, c’estun témoignage précieux sur le passé, non seule-ment sur le plan de la géographie physique, maiségalement sur celui de l’importance des civilisa-

tions pré- ou protohistoriques.

11 

2. Y AURAIT-IL EU

DEUX ATLANTIDES ?

Le défenseur de l’Atlantide atlantique que je demeure, dans le sillage de mon maître Paul Le Cour, sepermet de considérer que l’étude de Jacques Victoor sur « L’Atlantide en Méditerranée ?» est particulière-ment bien étayée. Il est incontestable que, parmi les localisations les plus variées qui sont proposées de-puis quelques siècles, celle de Jacques Victoor, à la suite des travaux du Professeur Spiridon Marinatos,est de loin — avec la localisation atlantique — la plus plausible, encore qu’il ne faille pas, à mon avis, reje-ter sans examen — à titre de colonie — l’hypothèse d’Heligoland défendue par le pasteur Jürgen Spanuth. Ainsi que m’y a invité très aimablement la rédaction de KADATH, je vais donc me permettre de commen-

ter l’étude de Jacques Victoor sur quelques points et d’y ajouter certaines considérations susceptibles dedéboucher sur une autre optique.

Jacques d’Arès,rédacteur en chef de la revue Atlantis

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En ce qui concerne la localisation, JacquesVictoor se demande si l’Atlantide atlantique, chèreà Paul Le Cour, est possible. Je crois qu’une re-marque préliminaire s’impose. Dans ce domaine,

comme dans beaucoup d’autres d’ailleurs, quel-ques découvertes toutes récentes remettent tota-lement en cause certaines données acquises, etles écoles de spécialistes s’affrontent, sans quel’on puisse avoir des certitudes dans un sens oudans un autre. Il convient donc d’être très prudentavant de rejeter ou d’admettre tel élément du pro-blème. Au demeurant, pour bien apprécier lesdifférents arguments, il faut se souvenir que Pla-ton parle d’un groupe d’îles plus ou moins impor-tantes, et non pas d’un continent au sens où nousl’entendons. Jacques Victoor énumère, en lesréfutant, quelques-uns des arguments des tenantsde l’Atlantide atlantique. Il cite au passage l’obser-

vation très intéressante — que je ne connaissaispas — d’un laboratoire géologique U.S. selon le-quel l’Atlantique se serait brusquement réchauffé ily a dix mille ans. Je me permets de m’étonner quemon confrère en atlantologie n’oppose à cetteconstatation fragmentaire mais capitale que ladate incertaine de la formation du Gulf-Stream etde la disparition... il y a 60 millions d’années dupont continental transatlantique. (J’avoue, au pas-sage, avoir toujours été ahuri de la facilité aveclaquelle on date, par exemple, de 60 millions d’an-nées un tel événement, alors que l’on est incapa-ble, à mille ans près, de savoir à quelle date a eulieu le déluge de Noé, il y a environ 6000 ans,pour prendre un autre exemple. Et que s’est-ilpassé durant les 59.994.000 ans qui séparent lesdeux événements ?!) Et je ne parle pas de la théo-rie de Wegener sur la dérive des continents et dela « tectonique des plaques », qui sont en contra-diction avec la disparition du pont continentalatlantique et qui, non seulement n’interdisent pasl’hypothèse de l’Atlantide atlantique, mais la confir-ment (Cf. Atlantis, n° 287, article de William Fon-sèque).

Que le lecteur veuille bien me pardonner cettedigression ; j’en reviens au réchauffement del’Atlantique il y a dix mille ans environ. Comment

ne pas rapprocher ce fait et cette date, en premierlieu de l’époque donnée par Platon pour la dispari-tion de l’Atlantide ; en second lieu de la fin de ladernière période glaciaire connue (c’est-à-dired’un réchauffement !) ; en troisième lieu de la finde la transgression flandrienne ayant formé laManche et la mer du Nord, d’une part, et provoquél’envahissement par les eaux du « plateau conti-nental », d’autre part, aussi bien sur les rives d’Eu-rope que sur celles de l’Amérique du Nord ; enquatrième lieu de la découverte extraordinaire, il ya quelques années du « mur des Bahamas » dontles données géologiques et la datation au car-bone-14 appliquée à des tourbières submergées

voisines permettent de dire que ce « mur » remon-

terait à au moins dix mille ans (découverte notam-ment mise en valeur par Pierre Carnac, membredu comité de KADATH) ; en cinquième et dernierlieu, de la récente découverte, non pas d’une mais

de deux pyramides submergées près du mêmesite, fait qui m’a été confirmé il y a quelques moispar un éminent membre du CNRS français.

 A tous ces faits, s’ajoutent quantité d’autres détailsvenant les confirmer, dont j’ai énuméré quelques-uns dans le livre « L’Atlantide atlantique », encomplétant, par une mise à jour en 1971, la 3eédition du livre de Paul Le Cour « A la recherched’un Monde perdu : l’Atlantide et ses Traditions ».S’y ajoutent également un certain nombre de dé-couvertes plus récentes dans des domaines va-riés. Sans doute convient-il de dire également quel’hypothèse de l’Atlantide atlantique, si elle était

définitivement vérifiée, permettrait de résoudrequantité d’énigmes archéologiques et historiques,au nombre desquelles on peut citer : l’origine desGuanches et des Basques, l’origine des Egyptienspré-pharaoniques, l’origine des constructions mé-galithiques, etc... Si cette hypothèse ne tient pas, iln’y a plus de réponse à ces questions ! Mais, je nevoudrais pas abuser de l’aimable hospitalité de larevue KADATH, tant il est vrai que ce problèmenécessiterait, pour être exposé clairement et aussicomplètement que possible, plusieurs volumes.Je me permets simplement de reprendre laconclusion de Jacques Victoor et ses argumentsessentiels pour que l’Atlantide atlantique soit trèspeu probable et que Platon ait parlé, sans le sa-voir, de Santorin et de la Crète.

1. D’accord, « 170 ans se sont écoulés entre levoyage de Solon et le récit de Platon ». C’est toutle problème de la transmission de la traditionorale. Beaucoup d’exemples nous prouvent quece n’est pas un écueil.2. « Rien ne permet de dire qu’il y a un continentenglouti dans l’océan ». Un continent au sens ha-bituel, d’accord. Par contre, un groupe d’îles dontcertaines ont pu être importantes, a très bien puexister. N’oublions pas à ce propos les nombreux« bouleversements terrestres » actuellement àpeu près prouvés, mais difficilement admis parce

qu’ils remettent totalement en cause la théorietransformiste et matérialiste de l’évolution linéairede la Terre et de l’humanité.3. « Il faudrait lire mezon, à mi-chemin de, et nonmeson, plus grande que ». Cette éventuelle fauted’orthographe n’a aucune valeur en elle-même,sauf de permettre une interprétation, contreditepar l’essentiel de tout le reste du texte.4. « Quand Platon écrit « mille », il faudrait lire« cent ». On ne peut que répondre de la mêmemanière. Je crains qu’il ne s’agisse d’interpréta-tions gratuites.5. « Santorin a fort bien pu s’engloutir en 24 heu-res, et entraîner la Crète dans sa ruine ». J’en suis

tout à fait persuadé, mais je considère que la ca-

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tastrophe de Santorin — incontestable — ne faitqu’expliquer la disparition brutale de la civilisationcrétoise, sans avoir de rapport avec l’Atlantide dePlaton.

6. « Les descriptions que fait Platon pourraienttrès bien convenir à propos de la Crète ». Pouraccepter cette hypothèse, il faut au préalable ré-pondre favorablement aux postulats 3 et 4 ci-dessus... pour la plupart des descriptions. Pourquelques-unes d’entre elles, cela est possible,notamment dans l’ordre culturel, mais il n’y a làrien d’étonnant si l’on considère la Crète commeune « colonie » atlante ayant échappé au désas-tre, l’apport « atlantéen » en Crète correspondantau toujours énigmatique (sauf avec l’hypothèse del’Atlantide atlantique) envahissement du bassinméditerranéen par un mystérieux « peuple de lamer » ayant apporté la civilisation du bronze.

Depuis plus de cinquante ans, à travers les 294numéros de la revue Atlantis, nous avons accumu-lé nombre de réflexions et de matériaux prouvantl’existence d’une « civilisation atlantique » qui au-

rait englobé, grosso-modo, pour m’en tenir à l’as-pect européen et nord-africain, l’Ethiopie (qui a étéappelée Atlantie), le Sahara avant qu’il ne soitdésert, le pays entourant l’Atlas, le plateau conti-nental dont les bords sont notamment marquéspar les îles du Cap-Vert et les Canaries (que l’onn’hésitait pas, à la fin du siècle dernier, à appelerofficiellement « débris de l’Atlantide » sur les car-tes de géographie), le même plateau, avec biensûr l’arrière-pays, s’étendant au large des côteseuropéennes, englobant Manche, mer du Nord etmer d’Irlande, et surtout un certain nombre d’îlesplus ou moins importantes, dont deux des som-mets sont constitués par les Açores et par les îlots

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« Hyperborée » et « Atlantide ».

L’emplacement de l’Atlantide, d’après Paul Le Cour. Cette carte fut établie d’après un document du ser-vice hydrographique de la Marine, faisant apparaître le plateau sous-marin ou « dorsale atlantique », etl’emplacement des anciens rivages, avec les profondeurs respectives du plateau et des fosses océani-ques qui l’entourent. L’auteur s’est seulement permis d’ajouter, avec un point d’interrogation, les mots

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« Formigas » photographiés par Paul Le Cour en1935, et dont les autres sont seulement à quel-ques dizaines de mètres sous la mer, au beaumilieu de l’océan Atlantique, comme le révèlent

des documents très récents. Mais, d’autres« bouleversements » plus partiels et d’originesdiverses sont intervenus depuis lors, de telle sorteque les pistes sont un peu brouillées, Cependant,les preuves ressortissent à tous les domaines, etl’on s’aperçoit que c’est presque toute l’Histoire del’humanité qu’il faut réécrire !

Jacques Victoor termine son article en écrivant :« Mon avis est que l’Atlantide et la colonie (laCrète) ne font qu’un... » Je me permettrai de nepas être de son avis. A moins de conclure commeJ.-A. Foëx dans un article de Science et Vie de1970 que j’ai signalé dans « L’Atlantide atlanti-

que » : rapportant une phrase prononcée en 1967par un membre de l’Académie des Sciences del’URSS, « peut-être n’aurons-nous pas à attendrela fin de ce siècle pour que l’hypothèse de l’Atlan-tide vienne à se vérifier » nos auteurs ajoutaient :Il ne s’agit peut-être pas de l’Atlantide de Platon,puisque des découvertes récentes permettent dela situer à Santorin ? Mais il s’agit quand mêmed’une Atlantide ».Y aurait-il eu deux Atlantides ? C’est une simplequestion de terminologie ! 

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QU’EST -CE-QUE ATLANTIS ?L’association « Atlantis » a été fondée à la Sor-bonne le 24 juin 1926, sous le nom primitif de

Première Société d’Etudes Atlantéennes, par unhomme extraordinaire, Paul Le Cour (décédé en1954), surnommé dans la presse « l’Homme del’Atlantide ». Autodidacte audacieux mais pru-dent, il a consacré sa vie à rechercher et à tenterd’expliquer les grandes lois qui régissent l’évolu-tion du monde et de l’homme.

 A sa suite, une équipe de chercheurs, provenantdes horizons les plus divers mais nourris de saméthode libérale, défriche des terrains variés,presque totalement inexplorés par un trop grandnombre de savants et d’universitaires bien qu’ils’agisse de connaissances susceptibles d’êtrecomprises, non pas seulement de spécialistes,mais de toute personne ayant conservé le « bonsens » que lui donne l’étincelle de l’Esprit.

Partie de l’hypothèse scientifique de l’existence, ily a de nombreux millénaires, de la célèbre Atlan-tide — vestige le plus lointain de notre civilisationoccidentale — à travers les textes de Platon etde nombreux autres documents méconnus, l’As-sociation Atlantis tente de retrouver par les voiesde l’archéologie scientifique et traditionnelle etpar les lois d’analogie, notamment celle contenuedans le symbolisme, ce que toutes les civilisa-tions anciennes ont appelé la Tradition.● L’archéologie est « scientifique » lorsqu’elleétudie les civilisations anciennes grâce aux mo-numents figurés et aux objets qui en restent. Elleest « traditionnelle » lorsqu’elle étudie les mêmescivilisations à travers tous les autres vestiges etnotamment les textes sacrés, les mythes, légen-des et les symboles.● La Tradition, « paradosis » en grec, d’où vientnotre mot paradis, correspond aux grandes Loisde l’Harmonie universelle, remarquablementrésumées dans la célèbre formule attribuée àHermès Trismégiste, que tous le monde énoncemais que presque personne n’explique et n’appli-que : ce qui est en bas est semblable à ce qui esten haut, et ce qui est en haut est semblable à cequi est en bas pour accomplir les miracles d’uneseule chose.● Les traditions de tous les peuples connus fontallusion, à travers leurs symboles et leurs légen-des, à des connaissances très étendues qu’au-raient eues leurs ancêtres. Ces connaissancesen partie occultées, ont été conservées et sesont transmises à travers les manifestations les

plus diverses de la vie de l’homme au cours dessiècles. Ce sont elles, dégagées de leurs trans-formations successives, qu’il s’agit de retrouver.La revue illustrée « Atlantis » dont chaque numé-ro spécialisé est axé autour d’un thème de ré-flexion, paraît tous les deux mois sous la direc-tion de Jacques d’Arès. En dehors des grandsarticles de fond, elle rend compte des rechercheset des travaux de l’Association et annonce l’en-semble des manifestations. L’abonnement peutpartir de n’importe lequel des six numéros d’uneannée, correspondant aux période de parution :

 janvier-février, mars-avril, mai-juin. etc. L’adhé-sion part de la même date. L’adresse d’Atlantis :30, Rue de la Marseillaise - F 94300 Vincennes.Tél. 328.31.95. 

Bibliographie sommaire.Jacques Victoor voudra bien me pardonner si je mepermets de considérer que sa bibliographie est in-complète quant à certaines données essentiellespour comprendre l’ensemble du problème de l’Atlan-tide. Aux titres qu’il propose au lecteur, et avec les-quels je suis tout à fait d’accord, je me permets doncd’en ajouter quelques-uns parmi beaucoup d’autres.Paul Le Cour : « A la recherche d’un Monde perdu :l’Atlantide et ses traditions ». Leymarie, Paris 1931.Paul Le Cour, Jacques d’Arès, Doru Todériciu :

« L’Atlantide atlantique ». Diffusion Dervy, 1971.Marcelle Weissen-Szumlanska : « Les origines atlan-tiques des anciens Egyptiens ». Omnium Littéraire,diffusion Dervy 1965.Pierre Carnac : « L’Histoire commence à Bimini ».Laffont 1973.Immanuel Vélikovsky : « Les grands bouleverse-ments terrestres ». Stock 1957.Jacques d’Arès : « Encyclopédie de l’ésotérisme ».Jean-Pierre Delarge, Paris 1974 (plus particulière-ment les deux premiers volumes).Jean Phaure : « Le cycle de l’humanité adamique ».Dorvy 1973.Revue Atlantis dans son ensemble ; parmi les arti-cles récents, plus particulièrement les numéros 265,

274, 275 et 287.

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LE PASSE PRESENT

De l’avion venant des Indes, le voyageur qui asurvolé l’Asie du Sud-Est et ses plaines fertilesdécouvre brusquement de nouveaux horizons. Eneffet, dès que l’on dépasse la péninsule de Malac-ca, la toile de fond du paysage change. Un chape-let d’îles apparaît. Celles-ci nous font découvrir,tantôt une savane proche, tantôt une forêt denseet frémissante. Des cônes volcaniques surgissent.L’Indonésie se révèle à nous comme un vastearchipel de quelque trois mille îles. Situé entrel’Asie du Sud-Est et l’Australie, cet archipel s’é-tend d’ouest en est sur cinq mille kilomètres et dunord au sud sur deux mille kilomètres. Il est géné-ralement admis que le terme d’Indonésie, employépour la première fois et dans une acceptation plus

large au XIXème siècle par l’ethnologue allemand Adolf Bastian, recouvre uniquement le territoire del’actuelle République d’Indonésie, c’est-à-dire lesgrandes îles de la Sonde : Sumatra, Java, Kali-mantan (Sud-Bornéo), Sulawési (Célèbes) ; lespetites îles de la Sonde qui s’alignent de Bali àTimor ; les Moluques et l’Irian Barat (NouvelleGuinée occidentale). Situées de part et d’autre del’équateur, les plus grandes îles de l’Indonésie ontun climat équatorial. Toutefois, Java, qui com-prend les deux tiers de la population, et les petites îles de la Sonde ont un climat tropical, plus chaudet humide. Les îles sont généralement monta-gneuses et les volcans sont innombrables. Qua-

torze volcans javanais dépassent trois mille mè-tres, ainsi que sept volcans sumatranais. Si lesplateaux de grès et les pitons calcaires sont nom-breux, les grandes plaines, elles, sont plutôt rares.Voie de passage entre l’océan Indien et le Pacifi-que, l’Indonésie, le pays des épices, du poivre etdes clous de girofle, a été au cours des âges uncentre d’attraction du commerce international etun lieu de rencontre de civilisations. Et cependant,ses ressources naturelles paraissent, encore au- jourd’hui, illimitées : du riz, du thé et même ducafé, au caoutchouc, à l’étain et au pétrole. Lepays compte actuellement 137 millions d’habi-tants. La variété de sa nature et les divers groupes

humains qui le composent, rendent l’étude de cet

archipel immense extrêmement complexe. Malgréun brassage perpétuel de cultures et de nombreuxapports extérieurs, les différents peuples de cetterégion du monde ont su, cependant, créer chacunleur civilisation propre. Dès que l’on croit avoircompris un problème, aussitôt on observe, onapprend quelque chose qui remet tout en ques-tion.

La préhistoire en Indonésie commence avec ladécouverte de restes osseux en 1891, par le mé-decin militaire hollandais d’origine huguenote Eu-gène Dubois. Une calotte crânienne, quelquesdents et un fémur constituèrent l’essentiel de cettemise au jour à Trinil dans le centre de Java. Ces

fragments de l’humanité la plus primitive se trou-vent aujourd’hui au musée de Haarlem aux Pays-Bas. Dubois les attribua à un hominien, intermé-diaire entre l’homme et le singe, qu’il baptisa en1894, « Pithecanthropus erectus ». Faute d’argu-ments décisifs, la controverse fut vive. De nom-breuses hypothèses furent envisagées. Plus tard,ce Pithécanthrope de Java, aux traits similaires àceux de l’homme préhistorique continental du Sudasiatique, fut apparenté au Sinanthrope découvertprès de Pékin. C’était le début d’une ère de dé-couvertes et d’études de plusieurs sites préhistori-ques en Indonésie. De nombreux ossements fu-rent retrouvés dans le centre et l’est de Java, prin-

cipalement entre 1936 et 1941. Toutefois, on n’apas trouvé, jusqu’à présent, d’instruments dechasse de l’époque du Pithécanthrope(pléistocène moyen, de 400.000 à 120.000 avantJ.-C.). Cet hominien subvenait probablement àses besoins, uniquement par la cueillette. Leséléments à tranchant unique retrouvés, lui suffi-saient-ils pour survivre ?

De 120.000 à 20.000 avant J.-C. (pléistocène su-périeur), on voit apparaître en terre indonésienne,des types humains plus évolués. Dans un premiertemps, se manifeste l’ « Homo Soloensis » (dunom de la rivière javanaise Solo) apparenté à la

race néanderthalienne en Europe. A la fin de cette

L’ARCHIPEL INDONESIEN, DUPITHECANTROPE A BOROBUDUR

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époque, apparaît l’ « Homo Wajakensis », à carac-téristiques australoïdes, première forme del’ «Homo Sapiens» dans ces régions. Nous sa-vons que la chasse était pratiquée et que l’outil-

lage était dominé par des instruments lithiques surlames. De nombreux outils paléolithiques ont étéretrouvés dans la région de Patjitan, au sud-est deJava. On les attribue généralement à ces popula-tions primitives qui se succédèrent des Néander-thaloïdes de Solo aux Proto-Australoïdes de Wa- jak. Il est à remarquer que l’Indonésie est à la foisune partie du continent asiatique et un pont natu-rel reliant l’Indochine à l’Australie. A l’époque gla-ciaire, le niveau de la mer était sensiblement plusbas que de nos jours, de sorte que Sumatra, Javaet Kalimantan étaient reliées au continent asiati-que par le plateau de Sunda, qui émergeait alorsde l’océan, ce qui permit le passage de nombreu-

ses populations. Ce n’est qu’à la fin de l’époqueglaciaire, et à la suite de plissements et d’effon-drements que l’archipel prit son aspect actuel. Leniveau de la mer s’élevant, la plate-forme de laSonde, la plus vaste du monde, fut couverte d’unemince couche d’eau (moins de 55 mètres enmoyenne ; certains fonds marins atteignent cepen-dant les dix mille mètres). Néanmoins, malgré leschangements géologiques, l’archipel resta lié aucontinent.

Les industries de pierre et d’os indonésiennesconnues pour le mésolithique (environ 10.000 à2000 avant J.-C.) se rapprochent fort de l’outillageet des ossements humains trouvés dans la pénin-sule indochinoise, notamment dans les sites deBac-Son et Hoah-Binh, au Viêtnam. Les préhisto-riens ont été longtemps d’accord pour soutenir lathéorie selon laquelle la plupart des populationsoccupant à présent le sol de l’Indonésie auraientune origine continentale. De là, l’idée d’une pre-mière vague de « Proto-Indonésiens » d’origineindochinoise, qui a précédé plusieurs vagues d’In-donésiens de type mongoloïde. D’autres auteursparlent de « Proto-Malais » qui auraient été refou-lés à l’intérieur de l’Indonésie par des « Deutéro-Malais » plus évolués. Ces « Proto-Malais » sontrestés jusqu’au XXème siècle en marge des

grands courants d’échanges. Je pense plus spé-cialement aux Batak de Sumatra, aux Dayak deKalimantan et aux Toraja de Sulawési. Ces diver-ses théories, largement répandues, ne reposent,en fait, que sur l’examen hâtif de quelques sites,mal fouillés. Ce schéma devra probablement êtrerévisé à la lumière des découvertes qui se conti-nuent aussi bien en Indochine, en Australie qu’enIndonésie. Des fouilles importantes de sites néoli-thiques, commencées il y a dix ans sous la direc-tion du Professeur Soejono, sont toujours en coursà Java et à Bali.

S’appuyant sur des critères linguistiques, le philo-

logue Dyen estime, lui, qu’il faudrait rechercher le

foyer originel indonésien en Mélanésie et non pasen Chine méridionale, comme on le croit habituel-lement. Ne faudrait-il pas apparenter les premiershabitants de l’Indonésie aux aborigènes de l’Aus-

tralie et de certaines îles du Pacifique ? Il y a dansles îles de la Sonde et même en Irian (notammentchez les Papous) des groupes humains qui leursont proches. Il ne faut, cependant, pas oublierque la race noire est minoritaire en Indonésie. Actuellement, ses habitants sont pour la plupartdes Malais, sans qu’on puisse d’ailleurs définirexactement ce qu’est un Malais, tant les différen-ces physiques sont nombreuses. En fait, il n’y apas de race malaise. Les Malais résultent desmétissages les plus divers : une vingtaine d’eth-nies de cultures et de langues différentes peuplentcette Insulinde qui se cherche encore une âme.« Bhinneka Tunggal Ika », (« une et diverse à la

fois ») telle est bien la devise du pays, que formulaMpu Tantular dans le poème javanais Sutasoma.Comme on le voit, le peuplement de l’archipel estun problème qui fait encore l’objet de bien desconjectures.

C’est au mésolithique qu’apparaissent en Indoné-sie les espèces humaines dites modernes. Cesnouveaux types, qui ont occupé l’archipel avantl’arrivée des Malais, peuvent être classés en Aus-traloïdes (qui survivent dans les tribus australien-nes), Négritos et surtout Veddas. Si on ne ren-contre les Négritos, noirs de petite taille, que dansles montagnes, les Veddas, eux, plus grands et àla peau claire, se retrouvent un peu partout dansl’Insulinde. La culture primitive du mésolithique,fondée sur la cueillette et la chasse, a subsisté, jusqu’à nos jours, chez les Punan de Kalimantanet les Kubu de Sumatra, populations habitant dansdes régions montagneuses couvertes de forêtsvierges. Le trait commun de ces groupes est lenomadisme qui implique l’absence d’un habitatpermanent. Le passage du mésolithique au néoli-thique (à partir de 2500-2000 avant J.-C.) se tra-duit à la fois par l’usage d’outils en pierre polie etpar l’essor de l’agriculture. La population se nourritde plantes à tubercules et de fruits tropicaux. Ellecommence à cultiver le riz, dont le point de départ

doit être recherché aux confins du Viêtnam et dela Chine. Les cultures agricoles du néolithiquesont caractérisées par deux outils principaux : lahache à coupe transversale quadrangulaire et lahache cylindrique. La hache quadrangulaire, laplus courante, se retrouve dans toute la péninsuleet surtout à Java. En ce qui concerne les techni-ques, on peut affirmer l’existence de poterie. Denombreux débris de céramique découverts offrentune décoration à caractère géométrique. De plus,il est à peu près certain que la technologie actuellede la céramique chez les Toraja, remonte à cestraditions reculées. Elle consiste en un procédé debattage : la motte d’argile, façonnée en forme de

vase, est frappée au moyen d’un battoir en bois

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 jusqu’à ce que la paroi ait acquis l’épaisseur vou-lue. Le vase est ensuite séché et soumis à la cuis-son sur feu ouvert.

Vers la fin du néolithique, un changement se pro-duit dans les civilisations de l’Asie du Sud. Onassiste à la construction de vastes monuments depierre, qui ont donné à l’époque et à sa culture lenom de mégalithique. Ce mégalithique préhistori-que a laissé des traces un peu partout en Indoné-sie. De Java, on connaît des sarcophages enpierre, ornés de motifs géométriques ou de figureshumaines et animales, des dolmens, des statuesde grandes dimensions et des cistes en pierre.Bali nous offre également des sarcophages enpierre, mais aussi des « sièges des esprits »sculptés, dressés aux carrefours de routes. Kali-mantan possède des urnes cylindriques, utilisées

comme tombeaux, et de nombreuses statues dontles figures ont presque toujours un caractère fron-tal. Le territoire le plus riche en monuments méga-lithiques est Sumatra. On y a retrouvé des sarco-phages en pierre remarquables et des dolmens.Ils étaient généralement bâtis sur les hauteurs.Des terrasses à étages soutenaient de petitespyramides, qui elles-mêmes servaient de supportsà ces « sanctuaires ». Ceux-ci, bien que situésprincipalement à Sumatra, se retrouvent égale-ment à Java, notamment sur les pentes du montYang. A l’heure actuelle, on trouve encore descultures mégalithiques vivantes à Sumatra : dansle nord, chez les Batak et dans les îles de Samosiret de Nias ; dans le sud à Pasemah. Quelquesfoyers subsistent aussi dans le centre de Sulawé-si, chez les Toraja et dans les îles Florès etSumba.

 A Sumatra, en dehors des menhirs disposés enligne droite ou en cercle, ce sont surtout les sta-tues en pierre qui méritent l’attention. Une partied’entre elles sont statiques, les autres sont dyna-miques à figures humaines et animales (buffles,éléphants...). De nombreuses statues représen-tent des guerriers casqués et portant l’épée. Lesartistes s’intéressaient souvent au modelage de latête : les yeux étaient globuleux et la mâchoiresaillante. Grâce à une pierre très malléable, sou-

vent d’origine volcanique, ils en tiraient des effetsspéciaux. Comme le mégalithique a survécu enIndonésie jusqu’en ce XXème siècle, il n’est pastoujours aisé de dater ces pierres. C’est de cettemême époque mégalithique que datent leschamps d’urnes qui furent mis au jour à Java, Su-matra et Kalimantan. Ces urnes renfermaient, soitdes morts ensevelis en position accroupie, soitdes crânes. Ces poteries funéraires étaient ornéesde dessins géométriques et de figures humaines àtête triangulaire.

Dans la seconde moitié du premier millénaire denotre ère, apparaît la métallurgie. Venant de la

Chine du Sud (site de Shi-Chau Shan dans le

Yunnan) et de l’Indochine (site de Dongson auViêtnam), le travail du métal se répandit en Indo-nésie. Ces populations connaissaient aussi l’art dutissage. Les vestiges indonésiens de cette époqueoffrent des analogies remarquables avec les civili-sations du bronze et du fer du sud-est de l’Europe.Ce fait s’explique par des migrations européennesqui atteignirent, notamment, le Yunnan et le nord-est de l’Indochine. La technique de la fonte dubronze était connue dans les îles importantes.Pour les objets de petit format, on employait leprocédé de la cire perdue, tandis que les objets

plus grands étaient coulés dans des moules enpierre. Cet âge du bronze est très bien représentéen Indonésie. De superbes haches d’apparat et denombreux tambours de bronze ont été découverts jusque dans les îles orientales. Il existe plusieurstypes de tambours de bronze. Le manteau du typeprincipal est souvent orné de motifs géométriquesou de guerriers et barques stylisés représentantun oiseau. Le tympan, lui, comprend de huit àseize pointes représentant le soleil. Ces tambourssont les principaux instruments d’un culte animistelié au cycle agraire. Le plus beau spécimen, « lalune de Bali », est encore vénéré au temple Pana-taran Sasih de Pejeng. C’est un tambour immense

(diamètre 1 m 60, hauteur 1 m 86) orné de huit

17 Elément de la partie supérieure d’un sarcophageen pierre (2000-1500 av. J.-C.), découvert à Su-

matra (Musée ethnographique de Budapest). 

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grands visages humains stylisés. Ces tambours,par la technique et le décor, sont à rapprocher desobjets découverts en Indochine, au Yunnan etaussi en Malaisie. Cette similitude de travail per-

met d’affirmer que l’archipel a été touché par lacivilisation de Dongson, qui se serait étendue àpartir du IIIème siècle avant l’ère chrétienne. Dèscette époque, l’histoire de l’Indonésie est liée àcelle de la péninsule indochinoise et du sud de laChine. Les mers de Java et de Florès jouent lerôle de mers intérieures facilitant le commerce etles rapports entre les peuples. Mais, plus encoreque le sous-continent chinois, c’est l’Inde qui mar-quera de son empreinte indélébile ces peuplesdits malais.

Les premiers contacts avec l’Inde ont dû être trèsanciens. La légende javanaise d’Aji Saka a, sans

doute, un fondement historique. Ce prince indienaurait appris aux Javanais l’écriture et l’astrono-mie. En tout cas, au début de l’ère chrétienne, uncourant continu porte les Indiens vers les îles.L’Indonésie, tout comme l’Indochine, a assimilé àson propre fonds divers éléments indiens(langues, structures sociales...). L’Inde leur ap-porte principalement les grandes religions, le brah-manisme et le bouddhisme, ainsi qu’une cultureartistique déjà élaborée. Les petites principautésagricoles, qui pratiquaient l’irrigation et qui avaientdéjà une structure sociale, seront touchées lespremières par la culture indienne. Par contre, latradition indonésienne se maintiendra dans le peu-ple avec une persistance très nette de l’animisme.On peut, dès lors, parler d’une civilisation indo-malaise. Elle est florissante dès le début du Vèmesiècle. Les immigrants venus de l’Inde sont d’a-bord brahmanismes, ensuite bouddhistes. Lesfoyers essentiels demeurent Sumatra et Java. ASumatra, il existe deux royaumes indo-malais : aucentre, celui de Malayu (actuellement Jambi) peuimportant, et au sud celui de Srivijaya(actuellement Palembang). Ce dernier étend sonautorité, du moins à certains moments, sur leCambodge, le Siam, Sri Lanka, une partie de Javaet de Kalimantan, et les Philippines. La puissancede Srivijaya repose surtout sur l’activité maritime.Ce royaume est maître de la mer du Vème siècle

au Xème. A Java, qui est déjà l’île la plus peupléeet la mieux cultivée, l’organisation des royaumesest plus confuse. Au VIIIème siècle, c’est la mêmedynastie, celle des Sailendra, qui règne dans leroyaume de Srivijaya et au centre de Java. Lasuprématie alterne alors entre les cités marchan-des de Sumatra et les centres agricoles de Java.En tout cas, c’est une époque de haute civilisation.Une architecture remarquable se développe aucentre de Java. Ainsi s’élève, par exemple, sur leplateau de Dieng, un ensemble de constructionsremarquables d’une grande simplicité. C’est aussiet surtout, parmi les autres édifices, Borobudur,dressé au sommet d’une colline qui domine la

vallée.

 Après l’effondrement de l’empire Srivijaya auXIIIème siècle, il y a un recul de la civilisation in-donésienne. Son premier âge d’or est terminé.Vers 1300 se constitue un nouvel empire, celui de

Modjopahit. Son extension territoriale est considé-rable. Il s’identifie presque à la République indoné-sienne actuelle. Les contacts avec l’extérieur, etplus spécialement la Chine, se multiplient. Denombreux Chinois s’implantent également dansl’archipel indonésien. Les grandes îles nouent desrelations commerciales avec l’Arabie, la Perse etl’Europe. Puis, c’est l’Islam. Après s’être infiltré àSumatra dès le XIIIème siècle, il prend véritable-ment pied à Java vers 1400. Toutefois, Bali estrestée, pratiquement jusqu’à nos jours, fidèle à saculture indianisée qui, malgré son évolution, sur-tout par voie de syncrétisme, est toujours recon-naissable. A vrai dire, il s’agit d’un syncrétisme où

l’hindouisme se mêle aux traditions animistes. Actuellement, 85 % des Indonésiens sont musul-mans. Sur le plan économique, cette apparition del’Islam en Insulinde coïncide avec un essor ducommerce mondial. Grâce aux marchands indienset arabes, les épices indonésiennes sont bienconnues en Europe, au XVIème siècle. D’où latentation de mettre la main sur les îles à poivrierset girofliers. Autrement dit, la phase coloniale del’Indonésie peut commencer. Elle ne s’achèveraque le 17 août 1945.

Les arts qui se développent dans les royaumesindianisés d’Indonésie sont essentiellement reli-gieux. Il reste peu de monuments à Srivijaya, l’em-pire maritime florissant, rival des royaumes java-nais, établi à Sumatra. Et, si à Kalimantan les tra-ces d’indianisation sont très anciennes, elles res-tent cependant isolées. En fait, c’est à Java queces arts ont connu leur plus bel épanouissement,entre le VIIème et le XVème siècle. Les sommetsde cet art s’édifièrent entre 700 et 900 après J.-C. Aussi, je ne retracerai que les grandes lignes decette période. On parle d’art indo-javanais ou ditde Java central, parce que c’est là que se trouventla plupart des monuments qui s’y rattachent. Cetart indo-javanais correspond aux candi   (temples)édifiés successivement sous les règnes des San-

 jaya (hindouistes), des Sailendra (bouddhistes) etdes rois de Mataram (hindouistes). A Java central,les grands sites sont, dans le nord, le plateau deDieng et le mont Ungaran, dans le sud, la plainede Kedu et, à l’ouest de celle-ci, la région dePrambanan. Sur les dix-huit emplacements desanctuaires hindouistes repérés sur le plateau deDieng, il n’y a plus que huit temples bien conser-vés. Ces huit sanctuaires sont le groupe d’Arjuna(Arjuna, Semar, Srikandi, Puntadewa, Sembadra),le Darawati, le Gatotkaca et le Bhima. Ces candi  çivaïtes sont de forme carrée (cinq mètres de cô-té) ; les blocs sont posés les uns sur les autres,sans mortier. Au sommet de la porte et des niches

figure une tête de kala  (monstre), d’où descen-

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dent, le long des deux côtés, des rinceaux termi-nés par des têtes de makara (monstres mythologi-ques mi-poisson, mi-éléphant). Ce motif décoratif,caractéristique de l’art indo-javanais, symbolise

l’arc-en-ciel qui relie le monde des hommes à celuides dieux. A l’est du plateau de Dieng, sur le montUngaran, se trouvent les neuf petits groupes desanctuaires de Gedong Sanga, comparables àceux du groupe d’Arjuna, mais possédant un dé-cor sculpté beaucoup plus riche.

 Au sud de Java central, dans la plaine de Kedu,se dresse le célèbre Borobudur, « la MontagneCosmique », le monument le plus remarquable del’art bouddhique. Pour l’atteindre, il faut quitterJogyakarta, la ville chérie de Java, et emprunter,pendant 32 km, une route qui serpente à traversune des plus fertiles campagnes du monde. Le

Mérapi, tout proche, dresse son cône superbe,plus haut encore que les nuages. Pour prestigieuxqu’il soit, Borobudur était, il n’y a pas si longtempsencore, menacé de tomber en ruine. L’humidité etles précipitations avaient, au fil des ans, endom-magé le monument. La colline artificielle qui luiservait de support s’affaissait. Les pierres, tailléesdans la lave du Mérapi, étaient rongées ou recou-vertes d’une mousse noirâtre. Heureusement, afind’interrompre cet inexorable processus de désa-grégation, les autorités indonésiennes, en collabo-ration avec l’UNESCO, ont entrepris depuis 1975une gigantesque opération de restauration. On a,en effet, décidé de démonter la quasi-totalité dumonument et de le remonter ensuite. Autrementdit, il faut consolider la colline avec de nouvellesfondations et traiter chimiquement 300.000 pierrespour arrêter l’oxydation et l’érosion provoquéespar des micro-organismes. Le coût de l’entreprise,qui devrait être terminée en 1982, s’élèvera à cinqcent millions de francs belges.

Borobudur a été édifié à la fin du VIIIéme siècle etau début du IXème siècle après J.-C., par les Sai-lendra. Le Borobudur est, comme tel, le monu-ment typique du monarque absolu. Il est, pourl’essentiel, une pyramide étagée construite surune colline semi-artificielle et formée de six terras-ses carrées de taille décroissante et de quatre

terrasses circulaires. L’édifice mesure 113 mètresde côté à la base et si on tient compte des saillies,123 mètres. Sa hauteur originale était de 37 mè-tres (42 mètres en tenant compte de certains ajus-tements). Actuellement, il s’élève à 31,5 mètres dusol. La large terrasse inférieure était utilisée pourles processions. Les cinq autres terrasses carréesont une paroi interne et une paroi externe, cettedernière constituant la paroi interne de la terrassesituée immédiatement en dessous. Sur les terras-ses circulaires sont disposés en cercle de petitsstupa  creux (sortes de gros bulbes aux murstroués, en losanges ou en carrés, et surmontésd’un clocheton). Il y en a successivement 32, 24

puis 16, au fur et à mesure que l’on monte. Ces 72

stupa renferment chacun une statue du Bouddha.Tout en haut, sur la dixième terrasse, un immensestupa central d’un diamètre de 15 mètres, cou-ronne l’édifice. Il est fermé et vide ; il symbolise

l’inaccessible Vérité, l’Absolu que nul n’atteindra jamais. On a, cependant, extrait de cet ultime stu- pa  un bouddha inachevé, probablement plus tar-dif, qui soulève bien des controverses. Certainsprétendent même, qu’à l’origine ce stupa  renfer-mait une statue en or de 13 kilos. Quatre voléesd’escaliers disposées dans la ligne médiane descarrés conduisaient à ce stupa supérieur.

Jadis, les moines bouddhistes venaient à Borobu-dur pour méditer. Les trois principales parties dutemple, de la base au sommet, représentent lesgrandes étapes de cette méditation. La base(Kamadhatu) symbolise l’influence de la matière ;la deuxième partie (Rupadhatu) est composée dequatre galeries qui illustrent la recherche de laspiritualité. Enfin, les quatre dernières terrasses,circulaires et non plus carrées, représententl’étape de la rupture avec la vie humaine, l’appro-che de la béatitude ; cette dernière partie s’appelle Arupadhatu. Seuls les initiés avaient accès auxterrasses supérieures. Des niches disposées aux

parties supérieures des murs des terrasses car-

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rées abritent des statues de Bouddha. Celles-ci,au nombre de 432, présentent des positions demains (mudra), différentes sur les diverses facesdu monument. Ces mudra, au nombre de cinq,

diffèrent selon les quatre points cardinaux et lezénith.

 Autant que par son architecture, Borobudur estcélèbre par ses bas-reliefs. Dans l’ensemble, ilssont bien conservés. Il y a, sans compter le sou-bassement, 1300 reliefs et 1472 éléments décora-tifs. Mis bout à bout, ces divers reliefs formeraientune fresque de cinq kilomètres. En fait, la décora-tion varie fort d’un étage à l’autre. Les terrassescirculaires sont dépourvues de tout ornement. Lapartie inférieure, elle, est richement ornée, poursymboliser la différence entre les sens (terrassescarrées) et l’âme (terrasses circulaires). Les 160

reliefs se trouvant sur la large base, représententle fonctionnement du karma  (récompense desbons et châtiment des mauvais). Les 120 reliefsde la première galerie sont consacrés aux princi-paux événements de la vie de Bouddha et deslégendes qui s’y rattachent, tandis que sur lesmurs des galeries suivantes, on voit des scènestirées de la vie des différents Bodhisattva (espritsparvenus à un tel degré de perfection qu’ils peu-vent devenir eux-mêmes des bouddhas). La sta-tuaire de Borobudur se caractérise par une grandedouceur du modelé.

La figure humaine est traitée dans un style fait deplénitude souriante et d’harmonie. En plus de leurimportance pour l’histoire des religions et des arts,de nombreuses scènes du Borobudur nous don-nent, par leurs détails, des renseignements surl’agriculture, la navigation et le costume de l’épo-que. Il semble certain que le Borobudur, dans ses

milliers de bas-reliefs, reflète les trois sphères du

cosmos (le monde du désir, le monde des formeset le monde vide de formes), selon la doctrine duMahayana ou Grand Véhicule, qui considère leBouddha non plus comme un personnage histori-

que exemplaire mais comme une émanation duprincipe divin.

Cette « Montagne Cosmique » symbolise le pro-cessus au cours duquel l’âme atteint l’absolu in-carné par le stupa supérieur. Par sa forme, le Bo-robudur est unique, en ce sens qu’il unit en unseul ensemble des terrasses carrées et circulai-res, créant ainsi un immense stupa dont la coupetransversale est la seule de son genre. Il n’est pasimpossible que, comme l’affirme Sutjipto Wirjosu-parto, il s’agisse là d’une combinaison de la pen-sée religieuse indienne et de l’ancienne religionindonésienne. Le Borobudur serait une pyramide

en terrasses d’un type remontant à l’époque mé-galithique, en rapport avec le culte des ancêtres ;mais, en même temps, le monument symboliseraitles dix degrés de l’état de Bodhisattva. Ce grandstupa  devint l’expression de l’idéal bouddhiqueclassique. La fonction du monument était double :un pèlerinage devait permettre d’atteindre et lacommunion avec les ancêtres et le nirvana. Afind’être complet, notons que, non loin du Borobudur,se trouvaient deux petits temples, le Candi Men-dut, plus ancien et le Candi Pawon. Ce dernierservait, sans doute, de halte purificatrice au pèle-rin avant de gravir la montagne sacrée.

C’est à l’est du groupe du Borobudur, dans laplaine de Prambanan, que l’on trouve le plusgrand nombre de monuments de la période deJava central. Citons parmi les temples bouddhis-tes du IXème siècle, le Candi Kalasan et le CandiSari, le Candi Sewu et le Candi Plaosan. Le CandiSewu était un immense ensemble architectural de240 templions, disposés en carrés concentriqueset entourant un sanctuaire qui abritait une entitésuprême, le Vairocana, entourée de ses hyposta-ses ou émanations. Cet ensemble, presque com-plètement ruiné, formait un mandala  (forme géo-métrique renfermant des divinités) architectural,un peu à la manière du Borobudur, mais entière-ment réalisé au niveau du sol.

 Au milieu du IXème siècle, les Sailendra furentrelégués à Sumatra. Le pouvoir en Java centralrevint aux mains de la dynastie hindouiste de Ma-taram. Pour faire contrepoids au Borobudurbouddhique, ces rois se firent construire un monu-mental ensemble de temples, le « Prambanan »,du nom du village voisin situé aujourd’hui à 15kilomètres à l’est de Jogyakarta. Ce majestueuxgroupe de Prambanan, correspondant hindouistedu Borobudur, est le plus vaste et le plus bel en-semble de l’art indo-javanais. Il date de la fin duIXème siècle : le çivaïsme a remplacé le boudd-hisme Mahayana. Ce monument est aussi appelé

le Candi Lara Jonggrang (« la mince jeune fille »),

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Le Bouddha dans le geste de l’appel de la terreen témoignage (Bhumi-sparsa mudra).

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du nom de la statue de la déesse Durga, sœur deVichnou et sakti  (épouse) de Çiva, trouvée dans letemple principal. Cet ensemble est formé de troisenceintes quadrangulaires successives, mesurant

respectivement 110, 220 et 390 mètres de côté.Les principaux temples se trouvent au centre desdeux clôtures intérieures, elles-mêmes situéesdans l’angle sud-ouest de la grande courintérieure.

Celle-ci comprend trois grands temples et troispetits qui se font face, plus deux autres petits tem-ples. Le bâtiment central, qui est le plus grand(d’une hauteur de 47 mètres sur une base de 30mètres de côté), est consacré à Çiva, celui au sudà Brahma et celui au nord à Vichnou. Sur l’airesituée entre les deux enceintes intérieures, il yavait autrefois 224 templions tous semblables de14 mètres de hauteur. Un seul n’est pas en ruine.

Le sanctuaire principal, celui de Çiva, fut entière-ment remonté par anastylose. Plus que les autres,il annonce l’art ultérieur de Java oriental, par l’im-portance du soubassement et l’étirement en hau-teur du temple terminé en pointe. Par sa verticale,il préfigure même les constructions d’Angkor(XIIème siècle). Il est à noter que la restaurationde ce complexe çivaïte ne fut terminée qu’en1953, après quatre-vingts ans d’efforts. Les Servi-ces Archéologiques indonésiens, faute demoyens, n’arriveront peut-être jamais à restaurerl’ensemble de ces bâtiments, dédiés à la Trinitéhindouiste. Tous ces temples sont construits sur lemême modèle, quoique différents de taille. Ils

consistent en une haute base qui se termine en

galerie, déterminant une plate-forme sur laquelles’érige le temple à deux étages. Ces derniers sontséparés par un entablement horizontal et le se-cond étage est surmonté par un toit à étages suc-

cessifs. Toutefois, seuls les trois grands templespossédaient un plan carré complexe et un escaliermenant au templion-porche et à la galerie. Leursbalustrades étaient ornées de panneaux à reliefs.Ces derniers, dans les temples de Çiva et deBrahma, représentaient des scènes tirées de l’his-toire de Rama, alors que ceux du temple de Vich-nou relataient des épisodes de la vie de Krishna.En ce qui concerne leur conception artistique, cesreliefs ressemblent beaucoup à ceux du Borobu-dur. Toutefois, l’art se fait plus réaliste. Ainsi, dansles 42 panneaux du Candi Lara Jonggrang quiillustrent le Ramayana, les attitudes des personna-ges se différencient nettement. L’art devient dyna-

mique : danseurs, animaux et végétaux prennentvie. On trouve davantage d’éléments empruntés àla vie familière. La composition est plus variée etmoins compartimentée qu’à Borobudur. L’art té-moigne d’une connaissance approfondie de l’ana-tomie. Les artistes cherchent visiblement à réaliserun équilibre entre la représentation figurative et ledécor ornemental. Je terminerai en mentionnantune particularité étonnante de ce complexe deLara Jonggrang. Le point d’intersection des diago-nales du carré intérieur ne se trouve pas dans lesanctuaire du temple principal, mais à gauche del’escalier oriental. Et c’est précisément, à cet en-droit qu’on a mis au jour, lors de la restauration,une urne remplie de cendres. Le temple servait,sans doute, en même temps de sépulture auxprinces. L’archipel indonésien, qui est loin de nousavoir révélé toutes ses richesses et ses mystères,demeure une des régions les plus passionnantesdu monde.

JEAN-CLAUDE BERCK

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Le temple de Çiva à Prambanan.

Bibliographie A.J. Bernet Kempers : « Ancient Indonesian art »,

 Amsterdam 1959. « Borobudur, Mysteriegebeu-ren in steen, Verval en Restauratie Oudjavaansvolksleven », Servire B.V. Wassenaar 1973.

T. Bodrogi : « L’Art de l’Indonésie », Editions Cercled’Art (traduit du hongrois), Paris 1972.

J. Bruhat : « Histoire de l’Indonésie », CollectionQue Sais-je ? n° 801. PUF, Paris 1958.G. Coedes : « Les Etats hindouisés d’Indochine et

d’Indonésie », de Boccard, Paris 1964.L. Frédéric : « Sud-Est Asiatique - ses temples, ses

sculptures », A.M.G. Flammarion, Paris 1964.V. Monteil : « Indonésie », Collection Petite Planète,

n° 44. Ed. du Seuil, Paris 1972.R. Soekmono : «New lights on some Borobudur

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S. Suleiman : « Concise Ancient History ofIndonesia », Jakarta 1974.

J.D. Wickert : « Borobudur » (traduit de l’allemand)

P.T. Intermasa, Jakarta 1975.

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MYSTERIEUSE CELTIE

« Nous vous raconterons la découverte de tellesruines, leurs controverses, la fiction et l’utilisation pseudo-scientifique qu’elles procurèrent, et les progrès de l’archéologie vers la solution que lesénigmes présentèrent »(L. Sprague de Camp : « Citadels of Mystery »).

Les vestiges vitrifiés sont, dans leur ensemble,des constructions qui, à l’époque de leur utilisa-tion, furent sévèrement atteintes par le feu, si bienque certaines structures en pierre montrent destraces de fusion et de vitrification. Rêve et frisson,car si du granite a fondu, il vient immédiatement à

l’esprit que la chaleur développée devait être parti-culièrement importante : de l’ordre de 1200 à 1500°C selon le type de granite. Comment atteindreces températures ? C’est là, sans doute, l’aspectle plus sensationnel de l’énigme, d’autant plus quele public a une vague idée de la vitrification par lebiais des expériences atomiques qui provoquentaussi des liquéfactions minérales. Et nous avonsles acteurs de la pièce qui entrent en scène :d’une part, les tenants de l’emploi d’une méthodequelconque permettant de très fortes températu-res, d’autre part, les partisans de multiples solu-tions normalisées en ce sens que le hasard sertplus la combustion qu’autre chose : deux écoles

après tout. Et deux aspects de la question qui sontambigus parce que se profilent, pour les uns, unetechnologie qui n’est pas en rapport avec l’état dela civilisation du moment, et pour les autres, unréductionnisme que nous connaissons. Le mal-heur est que le regain d’intérêt de la part du publica été rehaussé de thèses proposant une interven-tion extérieure faisant appel à une technologieextraterrestre dans toute l’acceptation du terme.Pour moi, il s’agit là d’une recherche intensive dela facilité et, comme je le disais plus haut, de rac-crocher la vitrification à quelque cataclysme atomi-que : d’une pierre deux coups. On apporte unesolution en prouvant cette fameuse, fumeuse dans

ce cas, intervention extraterrestre.

Bel exemple de test de Rorschach. Pourtant il nefait aucun doute que le problème subsiste et de-meure équivoque, la distribution géographique descas de vitrification étant peut-être le premier termede l’équation. Aussi, vais-je essayer de vous résu-mer l’énigme, et pour ce faire je découperai cetarticle en diverses sections : 1) ce que constitueun vestige vitrifié, 2) la distribution géographique,3) ce qu’en disent certains auteurs, 4) quelles fu-rent les premières recherches, 5) quelles sont lesdernières hypothèses. Le lecteur considérera cetarticle comme un rapport, et je crois qu’il pourra sefaire une idée nette de la situation. J’ajouterai en-core que si l’énigme des vestiges vitrifiés perd en

sensationnalisme, elle y gagne par la connais-sance architecturale, par la motivation des peu-ples qui utilisèrent les constructions et les métho-des de « mise à feu » telles que nous pouvons lesimaginer actuellement.

Les camps retranchés.Il est certain qu’une région volcanique sera richeen vestiges vitrifiés, la population autochtoneayant employé le matériau le plus abondant. Il vasans dire que les vitrifications qui nous occupentsont celles apparues après la construction d’unouvrage quelconque. Il se fait que ces édifications

se regroupent essentiellement en installations detype militaire : fortifications, camps protégés, etc.L’aspect général se présente sous la forme d’unebutte qui peut être artificielle, ou d’un promontoirechoisi pour ses facilités de défense. Le sommet durelief est renforcé par des murailles dont l’aspecttactique est évident. Du simple contour par mu-rets, on peut passer aux enceintes doubles, enétage si nécessaire, jusqu’aux ouvrages plus com-pliqués faisant appel à des retranchements an-nexes ou à des systèmes de murs intérieurs for-mant ce que je pourrais appeler des lignes deretraits. Il ne fait donc aucun doute que la destina-tion en était la défense contre toute attaque

humaine.

LES VESTIGES VITRIFIES 

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La construction proprement dite apparaît commeétant faite de terre rapportée, d’armature de boiset de pierre. La surface du retranchement varie dequelques dizaines à plusieurs centaines de mètrescarrés, la complexité suivant le rapport de superfi-cie. Disons aussi que le terme anglais« hillfort » (fortification de colline) visualise parfai-tement le type d’aménagement. Les différentssites que nous survolerons ne sont plus que desépaves, ils sont accessibles sans difficulté, si cen’est que des fouilles archéologiques peuvent yavoir lieu, d’où restriction compréhensible. D’autrepart, de nombreux châteaux-forts du Moyen Age,des villes romaines fortifiées, des burghs  saxons

sont bâtis sur d’anciens sites qui nous intéressent,

vous cornprendrez aisément quel travail subsiste.Bref, « un camp retranché (hillfort) est un fort, quipossède des défenses artificielles crées parl’homme dans le but de le protéger, mais aussiexploite le terrain pour donner un avantage dehauteur sur ceux qui approcheraient le site » (1).Pour en revenir aux vitrifications, il n’est pas dou-teux que ce sont les forts de pierres qui nous atti-rent le plus. Ces derniers sont toujours constitués

23 

Le tort vitrifié de Dun Lagaidh en Ecosse : vue générale de l’ouest, et plan général du site (niveaux en pieds, échelle 1/545).

(1) Je ne peux que proposer un seul livre, maisremarquable « Hillforts, Later Prehistoric Ear-thworks in Britain and Ireland » édité par D.W.

Harding, Academic Press, Londres 1976.

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de pierre sèche non cimentée, les murailles peu-vent être relativement épaisses, jusqu’à deux mè-tres, ou encore tout simplement graciles, alors dessoutènements apparaissent. Les structures inter-

nes des murs sont soit des agencements de pierresèche, soit des armatures en bois, le tout étantnon cimenté. Nous ne nous étendrons pas plussur les multiples façons d’étançonner des murs àl’aide de madriers, je préfère que le lecteur seréfère au livre « Hillforts » cité en référence. Re-marquons tout de même que la construction àl’aide de blocs de pierre ou de moellons — sansmortier — permet à l’oxygène de passer dans lesinterstices, quand bien même l’ensemble seraitsoutenu par des madriers en bois : nous verronspar la suite l’importance que revêt cet assemblageen cas de feu.

De manière générale le camp retranché est doncvoué quasi exclusivement à un usage militaire.Dans certains sites, de grande superficie, il appa-raît une structure interne qui dénote l’occupationsociale : abris rangés (rues), accès poternés ; desrecherches récentes montrent des activités« industrielles », telles le tissage ou la fabricationd’outils. Ces investigations suggèrent encore queles occupations furent intermittentes ; il y a créa-tion du camp, désertion de celui-ci et réoccupationplus tard. Seule compte la faculté de refuge pourla population. En ce qui concerne les camps sis enGrande-Bretagne, Michael Avery précise les rela-tions entre différents sites : « Trois aspects sont àconsidérer : premièrement, les relations spatialesentre forts, deuxièmement, les relations entre lesforts et les sites non-fortifiés, troisièmement, l’utili-sation de ressources disponibles par les habitantsdu fort, surtout au point de vue nourriture... ». Il està préciser que l’extrait ci-dessus concerne unique-ment le sud de l’Angleterre, mais nous pouvonsfacilement y voir un contexte qui permet de sefaire une idée de l’environnement des camps re-tranchés : des recherches couvrent actuellementles hinterlands possibles des forts, et pourront parla suite définir s’il y avait une inter-influence, nefut-ce que du fait de la superficie gérée par unsite.

Nous en arrivons alors à l’étude des datations,celles-ci vues uniquement sous l’éclairage desoccupations successives, ceci étant revu par leradio-carbone (inutile de voir l’évolution des data-tions, ce serait se lancer dans l’histoire de l’ar-chéologie britannique). Et toujours nous suivonsles investigations d’outre-Manche : la premièrefourchette de dates couvre la période de 750 à500 avant J.-C. mais peut probablement être ajus-tée à —1000. La construction de certains forts seprolongea sur des durées relativement longues,parfois une centaine d’années, et nous pouvons

aisément le comprendre par les occupations suc-

24 

Diverses méthodes externes :

 A.

B.

C.

D.

Pieux plantés dans le sol.

Pieux plantés dans une structure artificielle,surplombant un fossé.

Muraille de moellons consolidant la terreramenée, en surplomb d’un fossé.

Structure de pierres et de bois, avec unearmature sous forme de charpente en bois,tant frontalement que longitudinalement(« timber-framed »), et surplombant un fosséou une pente naturelle. Il va sans dire quec’est ici que nous retrouverons les vestigesvitrifiés.

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cessives qui engendrèrent des modifications sinondes reconstructions partielles. Les contrôles au C-14 permettent à M. Avery de proposer une pro-gression géographique : « La construction de

camps peut probablement avoir débuté au nord-est du Pays de Galles, s’être étendue au sud del’Angleterre, au Yorkshire et à l’Ecosse centrale, etseulement après au nord de l’Angleterre et au sudde l’Ecosse ». Ceci concernant les îles britanni-ques uniquement, la progression sur le continentest à ce jour inconnue, du moins selon les sourcesque je possède : un groupe de recherche s’estconstitué à Guéret (France) mais aucune nouvellene nous est parvenue depuis 1976. Certainscamps retranchés sont pourtant contemporains dudernier stade de l’Age du bronze et furent occupésou réoccupés au début de l’Age du fer, si toutefoisnous nous tenons à la datation européenne. En

clair, les forts apparaissent entre 1100 et 1000avant J.-C. et leur construction s’étage jusqu’à —500. Une dernière chose doit être précisée : lesoppida (du latin, oppidum, ville muraillée) quenous connaissons dans nos régions sont posté-rieurs aux forts et s’en distinguent par le fait qu’ilsont, en dehors de la fortification, une destinationindustrielle et commerciale, tandis que les campsretranchés n’affectent que la sécurité d’un groupesocial, l’unique activité en dehors de la défense,s’ordonnant sur la seule subsistance. Disons aussique l’épopée des forts est étrange eu égard à ceque nous savons de la vie durant le premier millé-naire avant J.-C. ; nous y rencontrons une struc-ture de préservation de communautés agrairesface à des dangers physiques : ceci révèle uneattitude de bon sens, d’ingéniosité (art militaire àtout le moins) et de désir de survivre. Gageonsque les amateurs de cataclysme nucléaire serontravis.

Je ne veux pas assimiler toutes les vitrificationsaux camps retranchés, nous verrons quelquesexemples où il n’y a pas de fortification, mais l’es-sentiel du problème est constitué par des ouvra-ges militaires. Que ce soit en ouvrages importantsou secondaires, l’Angleterre est particulièrementbien fournie, le sud, sud-est et l’est sont des

concentrations remarquables. Au nord, citonsl’Ecosse, son pourtour côtier et surtout la zone desHighlands du sud. L’Irlande possède quelquesgrands forts sur ses côtes ainsi que dans le Leins-ter. Les îles Orcades sont également représentées— île Sanday — où des cairns portent des tracesde fusion de roches. J’aurai l’occasion plus loin devous citer les lieux. En France, une pénétrationsud-est se révèle (ce n’est évidemment pas limita-tif, tout reste à faire), Bretagne, Orne, Vienne,Mayenne, Creuse, ce dernier département sem-blant être le plus intéressant. En Centre-Europe,des vestiges vitrifiés paraissent exister en Bohème(aucune documentation véritable), et, pour être

complet, la Turquie propose des ruines de ville à

Hattousa, où selon l’archéologue allemand Bittel,des briques sont fondues en une masse rougetrès dure et des pierres réfractaires furent trou-vées brisées sous l’effet de la chaleur. Jusqu’à

preuve du contraire, il me semble que l’on s’éloi-gne du concept de vitrification pur et simple. Donc,nos sources nous forcent à étudier essentielle-ment les cas français et anglais, là même où inter-vient la fusion des roches les plus dures comme legranite ; corollairement les températures à attein-dre seront aussi les plus élevées. Cette entrée enmatière donne une petite idée du décor, nousallons maintenant parcourir, en un premier temps,les opinions très diversifiées d’auteurs qui ont misen exergue les vestiges vitrifiés, ensuite, nousnous attarderons sur les travaux de deux archéo-logues qui, à un siècle d’intervalle, menèrent desinvestigations intensives sur le terrain.

Un sujet brûlant.Charles Fort, dans son « Livre des Damnés », estsans doute le premier à attirer l’attention du grandpublic sur le phénomène de la vitrification ; pour lemoins, il ne le fait pas avec un égal bonheur. Sonhypothèse correspond au catastrophisme de bonaloi : il fait intervenir la colère divine, Azuria, etexplique la peur des hommes dans leur retraitesur les collines ; la construction de forts est le der-nier espoir de défense de la gent humaine et Fort,malicieusement, remarque que l’Homme s’esttoujours tourné vers des solutions de suicide demasse : l’ennemi, pour Fort est aérien, pourquoialors se nicher sur le sommet des collines ? Lechâtiment est pervers, c’est l’électricité qui fondles roches ; de nos jours, on pourrait parler deplasma téléguidé, par laser pour être au fait del’actualité. Fort ajoute qu’il y a crime « au senslocal » : comprenne qui peut ces fantasmes quiseront repris au fur et à mesure de la progressionde l’édition. Robert Charroux, dans « Le livre dupassé mystérieux » (un best-seller de l’époque),s’attarde aussi sur le sujet et s’interroge sur lamystérieuse civilisation qui a édifié les forts vitri-fiés. Il ne s’écarte pas trop des thèses de Fort,reprenant l’intervention du dieu Azuria et flattantson public qui ose s’intéresser au passé de la

France. Ose, dit-il en prenant ses distances ettraitant, à juste titre, les idées de Fort commeétant saugrenues. Poursuivant, Charroux posebien la situation : « De prime abord, on peut pen-ser que des brasiers ardents ont été allumés aupied des murailles pour fondre le granite de façonà assurer une meilleure cohésion des éléments.L’explication devient peu convaincante quand ellese rapporte à l’intérieur qui seul a été vitrifié, alorsque les faces externes, parfois épaisses de un àdeux mètres, sont construites en pierre parfaite-ment naturelle ».

Reprenons ces phrases : assurer une meilleure

cohésion — étanchéité ? — du rempart. Peu vrai-

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semblable : l’assise granitique n’y gagne en rienmême si elle est fondue. Et encore si c’était vrai,quel intérêt pour les défenseurs ? On se place tropsouvent dans l’esprit d’un combattant actuel, une

charge creuse tirée d’un tank n’aurait sans doutepas les effets escomptés sur un solide vitrifié, necomparons pas une carabine automatique et un javelot, jusqu’à preuve du contraire ces armesn’étaient pas utilisées. Quant à la fusion interne dumur, nous verrons plus loin ce qu’il faut en penser,Charroux n’avait pas tous les éléments pour yrépondre. Il rappelle, d’autre part, les hypothèsesde Edmond Coarer-Kalondan et de Gwezenn-Dana ; ces derniers, dans leur livre « Les Celtes etles Extraterrestres » imaginent des correspondan-ces entre les traditions et des armes offensivesultramodernes tels le lance-flamme, la « nuéeatomique » (je suppose que c’est l’effet calorifique

dont il est question, pas de souffle ni de radia-tions ?), de la matière isolante vitreuse (qui, elle,évite les rayons laser, sans doute), bref un arsenalà faire rêver le Pentagone. Si le scénario imaginétient au récit de la tradition, le mystère des fortsvitrifiés n’en est pas débrouillé pour autant. Iln’empêche que Charroux est vraisemblablementle premier à porter l’existence de forts vitrifiés enFrance à la connaissance du grand public. De cesquelques exemples de la littérature, tellement pa-rallèle qu’elle diverge un rien, nous ne pouvonsretenir qu’un aspect globalement négatif : ou vousvous précipitez dans l’archéologie-fiction ou vousrestez parfaitement logique. Les termes s’annu-lent. Il y a donc d’autres explications sinon des

pistes plus franches. Je vous convie à me suivredans ce dédale de vitrifications, où j’espère queles avis fusionneront.

Un pionnier, James Anderson.James Anderson est un antiquaire, comme ondisait à l’époque, et écrivait dans la revue« Archaeologia ». Ses rapports concernant lesvestiges vitrifiés sont certainement une des meil-leures références qui subsistent à ce sujet. Il étaitaidé par un certain John Williams, géologue deson métier. L’article, paru en 1777, étudie les gé-

néralités concernant les « hillforts » et nous faitdécouvrir le site de Knock-serrel, près de Dingwal(Rossshire) : le camp est de forme allongée, per-ché sur une colline et entouré d’un mur de coupetriangulaire. Le versant extérieur s’aligne sur lapente et est fortement atteint par le feu : il portedes traces de vitrification, et surtout les blocs leconstituant sont scellés par une matière qui a fon-du. La paroi intérieure est, elle, formée par desmoellons et de la terre. Anderson propose unesolution pour l’amalgame de pierres et de matièrefondue : le nord de l’Ecosse est riche en un mine-rai de fer terreux qui se vitrifie très vite : les cons-tructeurs remplissaient alors les interstices des

blocs avec le minerai terreux, recouvraient la paroi

extérieure d’un bûcher et la température surchauf-fait à la fois la pierre et faisait fondre le minerai.Williams, de son côté, fit une coupe dans le mur,et put ainsi vérifier les assertions d’Anderson :

« Tout le pourtour du mur est couvert d’une croûted’à peu près deux pieds d’épaisseur, consistant endes pierres noyées dans une matière vitrifiée ;certaines des pierres sont à moitié fondues là oùla chaleur fut la plus élevée, et toutes ont souffertde la chaleur considérable. » Anderson expliquaitégalement que, dans la masse du mur, une pierrepouvait être, à une extrémité, fondue et scelléedans le substrat vitrifié, et de l’autre côté êtrevierge de toute action du feu. Pour lui, il ne faisaitaucun doute que le foyer était agencé à l’extérieur,et cela après construction de la paroi. Selon l’anti-quaire anglais, l’existence de forts où les pierressont très fortement attaquées par le feu, au point

de ressembler à des scories, mais sans présenterde trace de cimentage vitrifié, provient du fait quele minerai de fer terreux ne se rencontre pas danstoutes les régions ; les constructeurs écossaisfurent simplement copiés par d’autres peuplades,ces dernières ignorantes de la qualité particulièredu minerai de fer terreux. Dans un deuxième arti-cle, paru dans Archaeologia en 1780, Andersonoffre une suite à ses démarches ; ce sont des dé-tails de structure qui n’apportent rien de plus à ceque nous connaissons déjà.

Un autre gentleman intervient après la parution dutexte, Daines Barrington (Archaeologia 1780). Il

présente un rapport au sujet du fort de Dunagoyle, île de Bute ; la discussion s’étend sur les motifs deconstruction et sur les facultés de vie lors d’unsiège, à ce sujet nos antiquaires anglais ne man-quent pas d’humour et je ne puis résister à vousen faire part dans cet article aride : « (concernantles réserves d’eau), il nous informe qu’il y a descuvettes asséchées à l’intérieur de ces forts. Enréponse à quoi j’observe qu’un abri contre les in-tempéries est aussi nécessaire au sommet exposéd’une colline écossaise, tandis que le whisky (ouun succédané) serait plus nécessaire que la seuleeau ». Mais Barrington soulève un autre lièvredans la conclusion de son rapport : « Je conclurai

ces observations, en suggérant, que si la vitrifica-tion répond au but du cimentage, il est vraimentextraordinaire que les anciens habitants d’Ecossene l’appliquèrent pas aux maisons ou aux huttesdans lesquelles ils vivaient, mais réservèrent ceprocédé dispendieux et incommode seulement àdes fortifications qui ne furent peut-être pas uneseule fois attaquées sur un siècle de temps. » Lesvestiges vitrifiés étaient très étudiés par les anti-quaires anglais et nombreux furent les articles etautres lettres ; citons encore Robert Riddel, Ar-chaeologia 1790. Si toute la lumière n’était pasfaite sur l’énigme, affirmons, dans le langage del’époque, qu’ils exécutèrent « a very elegant

work », et les recherches tombèrent dans l’oubli.

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Forts de France.Le centre de renseignements reste le musée deGuéret dans la Creuse. En effet, plusieurs vesti-ges prétendus vitrifiés cernent la région : Château-

vieux, au nord de Guéret, Ribandelle, Thauron, St.Georges-de-Nigremont, etc. Ajoutons encore Tho-rus et Château-Larcher, en Vienne, Argentan dansl’Orne, et Sainte-Suzanne en Mayenne. Cette listeest loin d’être exhaustive, j’ai déjà dit plus hautque des investigations sont en cours, mais quetrès peu d’informations me sont parvenues. D’au-tant plus que ce qu’on connaît paraît assezénorme ! Par exemple M. de Nadaillac rapporteque « l’espace entre deux parois est rempli parune nappe de granite fondu, large de quatre mè-tres, épaisse de soixante centimètres et reposantsur un lit de tuf. On ne trouve pas de trace de mor-tier ». Il s’agissait du fort de Châteauvieux qui

épouse une forme ovale, de 128 m de long et dontles remparts mesurent 7 m à la base pour 3 m ausommet ; nous souhaitons des renseignementssupplémentaires car une « nappe de granite fon-du » semble tirée par les cheveux. La Ribandelle-du-Puy-de-Gaudy, appelée aussi Fort de Chabriè-res, près de Guéret, est un de ces grands campsretranchés puisqu’il couvre une superficie de 13hectares et a un périmètre de 1500 mètres. Il futoccupé par les Celtes (?), les Romains et les Wisi-goths ; la vitrification extérieure ne dépasse pas 2cm d’épaisseur, tandis que l’intérieur des paroissemble avoir été consolidé par des coulées degranite ; on dit également que la masse vitrifiéeest divisée en sections de 3 m de large, ce quilaisserait croire qu’il y a eu des opérations succes-sives : attendons de plus amples informationsavant de nous exciter. A Thauron et au su de cequi précède, on peut se rappeler qu’il y a eu erreurlors de l’essai de vitrification, en effet les pierressont tellement cuites — calcinées — qu’elles res-semblent plus à de la lave qu’à autre chose. Rienne dit que ce ne sont pas des blocs de lave, nom-breux dans le Centre, qui furent utilisés commematériau de base.

Le camp de Péran ou « les Pierres Brûlées »,dans la commune de Plédran près de Saint-Brieucmesure 134 m de long sur 110 m de large ; trois

caractéristiques de vitrification se chevauchent, ondit que les pierres formant le mur sont liées parfusion et non par mortier. Robert Charroux prétendque c’est du verre fondu qui cimente les murailles,et dans « Bretagne mystérieuse » de Le Scouëzec(Guide Noir Tchou), il est écrit : « ...la route deSaint-Julien laisse sur la gauche les vestiges d’unoppidum gaulois, construit à l’époque de l’indé-pendance. Il est connu sous le nom de camp dePéran. Le mur est double et des traces d’incendiey sont relevées. Il est probable que les poutres desoutènement brûlèrent en même temps que lesouvrages de bois : de là proviendrait la vitrificationconstatée à l’intérieur des talus actuels. » Ils di-

sent « à l’intérieur des talus » ? Bizarre, bizarre.

Mais dans l’état actuel de l’information il m’estdifficile de trancher pour l’une ou pour l’autre ; enFrance, je crains, les vitrifications resteront nim-bées de mystère ou s’attarderont encore dans

« l’époque fantôme du bronze », expression deRobert Charroux que j’apprécie. Pour être com-plet, j’ajoute qu’un certain M. de Cessac fit uneétude touchant les forts vitrifiés de la Creuse :malgré les recherches — les fouilles ! — de notrecollaboratrice Christiane Piens, il fut impossible demettre la main sur une quelconque référence.Comme vous vous en apercevez, on ne peutconclure quoi que ce soit. Jusqu’au jour où unarticulet de Stanley Thomas parut dans le NewScientist traîtant du livre de D. W. Harding. Celivre, épais, regroupe divers articles ou étudesrédigés par des archéologues anglais ; le sujetcerné étaient les camps retranchés, qu’ils soient

vitrifiés ou non. Nous avons déjà suivi quelquesparagraphes de Michael Avery, nous allons suivretrois autres collaborateurs du livre : W. J. Varley,James Dyer et, plus précisément dédié aux vitrifi-cations, Euan MacKie.

Création ou destruction ? Avant tout, nous devons remarquer que la termi-nologie anglaise marque une différence essen-tielle entre « forthill » et « timber-framed forts » ; lepremier est une appellation générique tandis quela seconde est spécialisée, elle signifie que lesmurailles, de portée verticale ou en pentes, sontconstituées de deux matériaux essentiels : lespierres et le bois qui charpente l’édifice. Les ma-driers sont internes, imbriqués si je puis dire, et ilssont finalement recouverts par les moellons. C’estlà que le problème va se décanter. Dès 1935, V.G. Childe de la Society of Antiquities of Scotland,suggérait que la vitrification était une technique deconstruction, mais en 1938 revirement d’opinion,c’est la thèse accidentelle qui prévaut : des expé-riences prouvent que des murailles charpentéesde bois auxquelles on boute le feu, développentassez de chaleur pour vitrifier la blocaille. Onpourrait croire que tout est dit, toutefois si l’on suitMacKie, on ne peut que respecter sa prudence :« Il est évident que les seules conclusions quipeuvent être tirées directement de ce genre d’évi-

dence (mis à part la distinction entre le mineraivitrifié et les scories de métal) sont 1. que le roc afondu et 2. que la composition de la fusion va indi-quer la température atteinte. Les analyses chimi-ques, par elles-mêmes, ne vont pas nous direcomment la chaleur fut obtenue, et encore moinsquels furent les motifs sociaux et les activités despeuples du fort lors de l’incendie.» MacKie met lelecteur en garde : « Il est nécessaire d’exposercela, à cause des conclusions générales qui sui-vent les descriptions des analyses chimiques,lesquelles peuvent être prises au pied de la lettrepar le lecteur peu averti ». Je dois ajouter quedans toute la littérature que j’ai parcourue, c’était

un pas que pas mal avaient franchi. MacKie conti-

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nue : « Les efforts pour créer expérimentalementde la roche vitrifiée (telle qu’elle se trouve sur lessites, NDLR) par des feux sur chaque côté et surle sommet de tas de moellons, ont été effectués

sans succès par le passé. » De nos jours égale-ment d’ailleurs, seule l’armature en bois permetune fusion. L’archéologue anglais note encore ladifficulté que, si on désirait s’attaquer à une coupedans une forte concentration vitrifiée, il faudrait yaller aux pains de plastic. Comme lui, je vois malles autorités acquiescer.

Il n’empêche que les fouilles opérées sur les quel-que 70 vestiges vitrifiés d’Ecosse permettent detirer des conclusions, sinon absolues, parfaitementvalables : (a) la vitrification est incomplète sur laplupart des sites ; (b) même sur le fort le plus sé-vèrement vitrifié (Rahoy et Inverpolly), la masse

de fusion ne dépasse pas 1 m 20 à 1 m 50 dehaut ; (c) les traces de vitrifications apparaissent leplus souvent sur des parois verticales de pierresèche, les soubassements étant protégés par leséboulements ; d’ailleurs les zones vitrifiées sontminimes par rapport aux énormes travaux effec-tués par moellonnage et remblais, et MacKieajoute avec justesse : « Il est grotesque de main-tenir qu’un mur épais, massif et défendable, de-vrait être construit pour ensuite être délibérémentdétruit par le feu et la fusion »; (d) les stratifica-tions observées dans chaque excavation de fortvitrifié et les trouvailles qu’on y fit, rendent parfai-tement clair que le foyer et la vitrification se passè-

rent toujours à la fin de l’utilisation du fort, commeun procédé de destruction qui causa cette fin ; (e)les expériences de V. G. Childe ont montré qu’unmur de pierres sèches avec charpente de bois,

brûlé dans de bonnes conditions, produit tous lesphénomènes observés dans les forts vitrifiés. W.J. Varley, au sujet des excavations faites au fortde Castle Hill, Almondbury, explique une reconsti-tution avec des éléments obtenus in situ : la pierrepeut changer de couleur dès 400° C, et le mêmemarquage de la pierre par le feu se retrouvaitaprès une exposition de 10 minutes à 800° C. Ace sujet, il faut dire que ce sont certains élémentscontenus dans le minerai qui s’en échappent sousforme de gouttelettes, ce qui a fait dire à un auteurque cela ressemblait à des tectites lunaires...

Si de nombreux points d’interrogation subsistent

dans l’affaire des vestiges vitrifiés, on peut, malgrétout sérier les problèmes et être certain que lesvieilles thèses appelant une intervention extérieuresont à rejeter absolument. Personnellement jesuppose que les recherches qui sont, ou serontmenées en France s’aligneront sur les constata-tions apportées par les archéologues anglais.MacKie commentait acidement : « Pourtant il estun fait que la théorie de vitrification créative (enopposition à destructive, NDLR) continue à vivre,toujours expliquée — telle est mon expérience —par ceux qui ignorent la masse de preuves issuesdes excavations. »

ROBERT DEHON28 

 Abernethy, Pertshire (Ecosse) : face intérieure de la muraille, avec les emplacements des solives. 

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PIECES A CONVICTIONS

Notre vieille Europe semble avoir eu ses premiè-res notions de magnétisme au VIème siècle avantJ.-C., puisque Thalès de Milet faisait allusion aux« pierres d’aimant ». A partir de là, il fallut deuxmille ans pour acquérir la notion de déclinaisonmagnétique, c’est-à-dire l’écart entre le nord ma-gnétique et le nord vrai, astronomique. On mesurel’effort. Les Chinois avaient connaissance d’unmagnétisme nord-sud, à l’époque des Han, soit auIIème siècle avant notre ère, et ce grâce à la« cuillère pointant au sud », dont on retrouve desallusions dans les textes. Mille ans après seule-ment, à l’époque T’ang, ils disposaient de la bous-sole géomantique à trois cercles : l’un pour indi-

quer le nord-sud astronomique, les deux autrespour les repères à 7½ ° de part et d’autre, soitprécisément la déclinaison magnétique. Il semblebien pourtant que les Olmèques de San Lorenzoau Mexique précédèrent tout ce beau monde deprès d’un millénaire. C’est en 1967 que P. Krosterde l’Université de Yale, au cours d’une campagnede fouilles dirigée par Michael D. Coe, découvrit àSan Lorenzo (Veracruz) un objet en oxyde de fer,long de 34 mm, et qui fut répertorié comme frag-ment M-160 (M pour Université de Michigan où ilest entreposé). L’artefact provenait d’une couchestratigraphique ne contenant aucun résidu plusancien que l’époque dite « Early Formative », et

remontant à —1400 jusque —1000. Coe plaçal’objet sur un morceau de liège, qu’il mit à flotterdans un baquet en plastique rempli d’eau. L’arte-fact semblait bien fonctionner comme un instru-ment de pierre aimantée, s’orientant géomagnéti-quement. Une boussole.

Il y a boussole et boussole.Outre la taille de trônes et de sarcophages mas-sifs, de têtes colossales, d’objets rituels en jade eten serpentine (voir KADATH n° 21), les Olmèquesse sont montrés très habiles dans le travail desoxydes de fer. Trois types d’objets ont été retrou-vés ainsi :

— des miroirs plans, grands comme l’ongle du

pouce, et polis sur une seule face, ce qui suggèrequ’ils furent utilisés en incrustation (1).— des perles polies et percées de plusieurs trous.— des miroirs concaves plus grands, ayant jusque10 cm de diamètre, de forme circulaire ou ellipti-que, et à surface de haute qualité optique d’uncôté, l’autre face restant inachevée. Ils ne présen-taient aucune trace d’un adhésif quelconque, ni depeinture ou d’incrustation. Ces miroirs concavesétaient paraboliques, c’est-à-dire que leur rayonde courbure augmente lorsqu’on s’éloigne du cen-tre de l’axe de symétrie. Eux aussi étaient percésde trous, sans doute pour être suspendus par unecorde, comme pendentifs ou pectoraux, ainsi

qu’on peut le constater sur une figurine olmèque.

Le gisement des oxydes de fer dont sont faits cesmiroirs a été découvert en 1966 par Flannery àSan José Mogote, dans l’Etat d’Oaxaca. Parl’étude des céramiques associées, on a pu daterl’exploitation du site à —1400 —1000, même épo-que donc que le « Early Formative » de San Lo-renzo, où les miroirs étaient en usage. Ceci impli-que un commerce s’étirant de la côte pacifiquevers la côte atlantique du golfe du Mexique, doncsur plusieurs centaines de kilomètres.

Les Olmèques étaient donc d’habiles artisans

dans la taille et le polissage des objets en oxydesde fer. Nul doute dès lors qu’ils en aient observéles propriétés attractives. En polissant la magné-tite, on constate aisément que les fines granula-

LE FRAMENT M-160 :LA BOUSSOLE OLMÈQUEAVANT LES CHINOIS ? 

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(1) Albert Szafarz, spécialiste en appareils d’opti-que, nous fait remarquer qu’un petit miroirplan est, dans nos télescopes modernes detype Newton, ce qu’on appelle le « diagonal »et sert à focaliser l’image du miroir concavevers un oculaire. L’autre face de ce miroir neservant évidemment à rien, il n’est pas néces-saire de postuler que sa surface « devait

être » incrustée.

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tions et la poussière de fer s’y agglutinent. Ainsi,en polissant leurs miroirs en oxydes de fer, lesartisans olmèques observèrent-ils que la pierreaimantée — tout minerai de fer avec magnétisme

rémanent — attirait d’autres morceaux de fer. Lepremier pas est ainsi franchi vers la découverte dela boussole. Grosso modo, on peut schématiserpour celle-ci trois étapes, selon la qualité des pro-priétés que l’observateur aura pu mettre enévidence.

1. La boussole d’ordre zéro. C’est la connaissancede la polarité magnétique et de propriétés d’orien-tation géomagnétique de la pierre aimantée. Ensuspendant l’aimant a un filament à l’abri des cou-rants d’air, ou bien en le déposant sur un flotteurdans l’eau ou le mercure liquide, on peut le voirs’orienter dans une direction particulière, n’importe

laquelle. Ce n’est pas une véritable boussole,puisque l’expérimentateur peut ignorer que laTerre agit comme un gigantesque aimant, avecses pôles nord et sud correspondant approximati-vement au nord et au sud célestes. Néanmoins, lapolarité magnétique peut être constatée directe-ment en notant la réaction de deux pierres aiman-tées l’une sur l’autre, ou en voyant se matérialiserle champ magnétique dans de la poussière demagnétite ou de la limaille de fer.

2. La boussole de premier ordre. C’est la connais-sance de la réelle orientabilité des pôles vers lenord et le sud des points cardinaux. Ici aussi, lapolarité devient apparente, une extrémité pointant

toujours vers le nord (ou le sud, peu importe). Unelongue barre ou une aiguille aimantée aura ten-dance à présenter ses pôles magnétiques auxextrémités, en s’orientant d’elle-même nord-sud.Cette tendance, il faut le remarquer, peut être in-dépendante de la connaissance qu’en aurait l’arti-san. Il pourrait, en effet, avoir taillé à dessein sonéchantillon dans un dépôt de minéral natif orientéprécisément nord-sud. Mais il pourrait le calibrerou le compenser de manière à ce qu’il s’oriente delui-même dans cette direction. A noter aussi que

l’utilisateur ignore encore la déviation magnétique,c.-à-d. le fait que sa boussole pointe au nord ma-gnétique et non au nord vrai.

3. La boussole de second ordre. C’est la connais-sance de la polarité magnétique aussi bien que dela déviation géomagnétique, et le fait aussi quecelle-ci varie avec le temps et selon les diversendroits de la Terre. Cette compréhension estbien plus sophistiquée, et ne fut découverte qu’auXVIIème siècle, bien que les causes et l’origine ensoient encore mal connues. Cette connaissanceest indispensable pour élaborer la boussole denavigation.

La boussole géomantique des Chinois.L’ancêtre des cadrans-boussoles chinois est le shi  ou table divinatrice de la période des Han. Il est

cité durant tout le millénaire comme « aiguille dusud », et malgré qu’on n’ait jamais trouvé de cuil-lère aimantée, on peut être sûr que ce dispositif abien existé. Il pouvait être en bronze ou en boispeint. Le shi  est fait d’un plan terrestre, une plan-che carrée indiquant les points cardinaux, surmon-té d’un plan céleste, un disque rotatif montrant leciel avec, au centre, la Grande Ourse, constella-tion très importante dans l’astronomie polaire chi-noise. Le nord est au-dessus, et l’extrémité de laGrande Ourse devient un pointeur azimutal, imi-tant le circuit diurne en désignant les 24 pointsazimutaux successifs de la boussole. Par la suite,le plan céleste fut remplacé par une cuillère enbois, pierre ou poterie, la Grande Ourse étant aus-

si appelée la « Cuillère du nord ». Vers le premiersiècle avant notre ère, on façonna des cuillèresaimantées en magnétite, taillées et équilibrées demanière à pivoter librement en réponse au champgéomagnétique sur la plaque terrestre en bronze,poli au maximum. La poignée indiquait le sud.Pour les Chinois en effet, c’est le sud qui était leplus important : l’empereur représentait l’étoilepolaire et, assis sur son trône face au sud, ilréglait toutes choses dans leur parfait accomplis-sement.

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Ce n’est que bien plus tard, à partir du Xème siè-cle, que la boussole fut employée pour la naviga-tion. Au Moyen Age, rivières et canaux intérieursprévalaient sur les parcours océaniques. Maisdans le contexte terrien et agraire qui était celui dela Chine, les magiciens impériaux ne concevaientla boussole que dans un but de divination : la géo-mancie taoïste, la plus raffinée et la mieux enraci-née dans la culture chinoise. C’était l’art d’adapterles résidences des vivants et les tombes desmorts, en harmonie avec les courants locaux de la

respiration cosmique. La cité était un « symbolecosmo-magique » (Wheatley), plus particulière-ment un microcosme cosmologique orienté selonles quatre points cardinaux. Elle était aménagéeselon les principes du feng shui , la « science desvents et des eaux » : les vents, souffle de la circu-lation terrestre à travers les veines et les vais-seaux du macrocosme terrestre, et les eaux allantet venant hors de la vue, charriant les impuretés etdéposant les minéraux. Needham fait remarquerque cette conception des choses n’est pas empiri-que, mais plutôt la théorisation d’une action à dis-tance.

Le contexte terrien et agraire était analogue pourles Olmèques. Mais en allait-il de même pour euxdans l’orientation de leurs centres cérémoniels ?

Il est vrai que les plates-formes, les complexestumulaires étaient constamment orientés à 8°ouest ; même les offrandes de jade ou de serpen-tine étaient disposées sur ou en rapport avec la

ligne centrale traversant l’axe du site. C’est le caspar exemple pour le complexe principal de LaVenta (à l’exception du groupe Stirling), à Lagunade los Cerros, et la structure de Huitzo à Oaxaca.Le plateau de San Lorenzo a probablement ététaillé artificiellement, et son centre complexe detumuli est pratiquement orienté nord-sud. MichaelCoe parvint même à mettre à profit cette orienta-tion constante, pour découvrir d’autres monu-ments enterrés. Néanmoins, il faut faire une dis-tinction, car « les archéo-Mayas ne s’intéressaientguère aux points cardinaux. Leurs points de réfé-rence du ciel étaient avant tout la croix obliqueformée par les lignes des solstices. Bien sûr, ils

suivaient dans la même mesure l’axe de passagedu soleil au zénith. D’où l’on peut conclure qu’ilss’intéressaient au nord et au sud, mais guère àl’ouest et à l’est » (R. Camby).

Le fragment M-160 de San Lorenzo.Le fragment M-160 est une petite barre d’héma-tite, soigneusement taillée et polie, de forme rec-tangulaire et de section trapézoïdale. Elle fait 34 x9 x 4 mm. Sur une des faces, une rainure hémicy-lindrique de 2 mm de diamètre court presque pa-rallèlement aux côtés, mais formant néanmoins unangle de 2° avec l’axe central de la barre. Le mi-néral est dur et cassant, ce qui implique unegrande habileté et beaucoup de temps de la part

des artisans. Toutes les faces ont un poli optiqueimpeccable, obtenu selon une technique incon-nue. Peut-être la barre fut-elle travaillée avec unecorde trempée dans l’eau puis dans un composé àpolir. Toujours est-il que, pour le moment, l’objetest unique en son genre, du moins pour la Mésoa-mérique. C’est malheureusement un fragmentd’une pièce plus grande. D’après les dimensionsdes plus grands morceaux d’oxydes de fer qu’onait découverts, et compte tenu de l’extrême fragili-té du minéral, on pense que la barre originale nedevait pas dépasser les 10 cm. Fin 1973, John B.Carlson, professeur d’astronomie à l’Université duMichigan, soumit le fragment M-160 à des analy-

ses physiques, dont les résultats furent présentésau 41ème Congrès des Américanistes à Mexico,en septembre 1974, et que voici résumés en bref.

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La technique du spectroscope de Môssbauer per-met de déterminer la composition minérale ainsique la structure des différents minerais de fer, etceci afin d’en situer l’origine archéologique. On

distingue ainsi la magnétite (Fe3, O4,), l’ilménite (TiFe O3,) et l’hématite (Fe2, O3,). D’après le pour-centage de ces divers constituants, Wheeler Pi-res-Ferreira, assisté de B.V. Evans, a pu noter lessimilitudes géologiques entre les miroirs de SanLorenzo et les centaines de morceaux d’oxydesde fer trouvés à San José Mogote dans l’Etatd’Oaxaca. Pour le fragment M-160, ainsi que deuxautres miroirs plans, la meilleure ressemblanceest à rechercher du côté de Cerro Prieto à Te-huantepec, dans la même région. Mais on ne peutprouver formellement que l’objet vient de là. Tou- jours est-il qu’il se compose d’hématite pure, diteaussi « maghématite ». Cet oxyde contient un

ferromagnétisme parasitaire relativement fort etstable.

Les expériences de Carlson consistaient à placerle fragment sur une natte de liège flottant surl’eau, ou directement sur du mercure liquide, l’ob- jet étant protégé des courants d’air par une boîtede petri d’un diamètre de 9 cm. Le mercure liquideest facile à obtenir en chauffant le cinabre orangecourant (HgS). On en a retrouvé des quantitéssubstantielles chez les Mayas, à Copan, Quiriguaet Paraiso. Le fragment M-160 était mis à flotteravec la rainure vers le haut, et des relèvementsétaient faits en visant le long de la rainure une tigeplacée à plus de 30 mètres de distance. Les vi-sées étaient comparées à celles d’une boussolemagnétique. C’est ainsi qu’on a pu, grâce au frag-ment M-160, aligner la tige à ½° près. L’orientationmoyenne était de 35°5 à l’ouest du nord magnéti-que. La persistance des orientations indique quele champ magnétique interne était suffisammentfort pour répondre rapidement au champ géoma-gnétique, et ceci même en cas de vibrations et deperturbations du support un jour de vent violent.

Les expériences sur le magnétisme même sonttrop techniques que pour prendre place dans lecadre de cet article. Disons simplement que desspectres ont été pris selon deux plans perpendicu-

laires, et ils indiquent que le moment magnétiquerémanent est largement dans le plan de la ligne deflottaison, et donne, pour le vecteur, une magni-tude totale de 1,1 emu. L’arc tangent donne unazimut géomagnétique de 35°7, ce qui est dans lalogique des expériences de flottaison. Ces mesu-res ont été faites au laboratoire de paléomagné-tisme de l’Université d’Oklahoma, à l’aide d’unmagnétomètre à spin. Une expérience non prévueconfirma les premiers résultats. Accidentellement,le fragment M-160 a été fracturé à un centimètrede son extrémité. L’analyse séparée des deuxmorceaux révéla une variation interne très subs-tantielle du vecteur de moment magnétique. Réas-

semblés, le vecteur original total était récupéré.

Le fragment M-160 est donc bien une boussolemagnétique. Il faut d’ailleurs reconnaître qu’il n’arien d’un supposé objet du culte et, pour une fois,personne n’avait suggéré pareil usage. Le mor-

ceau manquant aurait modifié le vecteur de mo-ment magnétique, et on sait que plus long est l’ob- jet, plus grand est l’effet : les lignes de champmagnétique se rapprochent alors du grand axe.Dans ce cas, elles s’orienteraient de plus en plusvers le nord magnétique. On calcule que si l’objetoriginal était double du fragment en question, soit6-7 cm, il se serait aligné très près du nord. Restela rainure hémicylindrique. Vu le soin du travaildes artisans olmèques, ils auraient pu aisément lafaire parallèle aux côtés. Au lieu de cela, elle faitun angle de 2° avec l’axe de la barre. Ceci estvisiblement intentionnel, et était probablementl’étape finale de calibration en vue d’une orienta-

tion désirée, le nord en l’occurrence. Dans ce cas,nous aurions bien affaire à une boussole de pre-mier ordre, et non d’ordre zéro. En calculant en-core les modifications de vecteur magnétique pro-voquées par cette rainure, Carlson estime devoirconclure à une longueur originale de 7 cm pourl’objet complet. Or, nous l’avons vu, la fragilité dece minerai n’a pas permis aux Olmèques d’arriverà façonner des miroirs d’oxyde de fer de plus de10 centimètres.

Mille ans avant les Chinois, les Olmèques dispo-saient donc de la boussole. Est-elle à l’origine deleur obsession à aligner les centres cérémoniels à8° ouest, voilà une autre question. Ou bien leurscience était-elle exclusivement astronomique ?L’archéologue M. Hatch a défendu la thèse selonlaquelle La Venta serait orienté sur l’azimut ducoucher de la Grande Ourse, entre —1000 et —500. Nul besoin alors de boussole. On l’a dit, lefragment M-160 est pour le moment unique en songenre.

IVAN VERHEYDEN

BibliographieJohn B. Carlson : « Lodestone compass : chinese or

olmec primacy ? ». Science, vol. 189 n° 4205,septembre 1975.

K.V. Flannery in Dumbarton Oaks Conference on the

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M. Hatch in Papers on Olmec and Maya Archaeology. Archaeological Research Facility, University ofCalifornia, Berkeley 1971.

Joseph Needham : « La science chinoise et l’Occident ».Ed. du Seuil, Paris 1973.

J. Wheeler Pires-Ferreira : « Formative Mesoamericanexchange networks ». Thèse à l’Université du Michi-gan, 1973. - Wheeler and B.J. Evans : « Môssbauerspectral analysis of Olmec iron ore mirrors », présen-té au IXème  Congrès de Science Anthropologique,Chicago 1973.

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ANCIENS ROIS DE LA MER

« Alors que l’Europe en était encore à l’Age de lapierre, il y avait en Equateur une civilisation ».C’est ce que déclarait en 1862 Sir Roderich Im-paey Murchison devant la très sérieuse RoyalGeological Society de Londres, suite à la décou-verte de figurines d’or et de céramique par JamesS. Wilson en Equateur. Ces objets, aujourd’huidisparus, avaient en effet été trouvés dans descouches sous-jacentes de terreau végétal quiavaient été recouvertes d’une épaisse couverturede dépôts marins. Cela témoignait que la côte del’antique royaume de Quito, après avoir été oc-cupée, s’était enfoncée dans la mer d’où elleémergea plus tard. Sans doute Roderich Murchi-

son surestima-t-il quelque peu cette culture lors-qu’il la compara à l’Europe, mais toujours est-ilque cette terre de l’Equateur fut longtemps pourcertains le berceau de la plus ancienne cultureamérindienne connaissant l’art de la céramique.Nous verrons plus loin qu’elle semble d’ailleursl’être toujours et représente sans doute le point dedépart des hautes civilisations du Pérou et peut-être aussi de Mésoamérique.

Valdivia et les pêcheurs du Jômon.Il fallut attendre l’automne de 1956 et un de cesbienheureux accidents auxquels l’archéologie doittant pour en savoir plus. A Valdivia, petit  pueblo 

de l’embouchure du rio Valdivia, en bordure duPacifique (province de Guayas, au nord-est deGuayaquil), un archéologue amateur, Emilio Estra-da, prospecte des amas coquilliers lorsqu’il trouveparmi les déchets des tessons de poteries. Puis,de tombes creusées à même le sol, il exhume desossements, des outils, des poteries et des figuri-nes de pierre et de terre cuite. Il reconnaît là lestyle et la technique de décoration présents dansla céramique de Guanape, la plus ancienneconnue à l’époque sur le littoral péruvien, et quiremonte à 2000 ans avant notre ère. Mais bientôtdes fouilles en bonne et due forme sont effectuéesavec l’aide d’archéologues américains de la

Smithsonian Institution de Washington, Betty J.

Meggers et Clifford Evans. Ces travaux révélerontdes sites plus protégés livrant une poterie mieuxpréservée, près de la partie moderne du village deValdivia. Ces trouvailles sont analysées par laSmithsonian Institution et le carbone-14 confirme-ra que les découvertes sont plus anciennes qu’onne l’avait supposé ; elles remonteraient en effet àenviron 3000 ans avant notre ère ! Ceci constituadéjà un événement dans le monde des américa-nistes, puisque l’apparition de la céramique sevoyait soudainement catapultée dans le temps deprès d’un millénaire. Cette période dénomméedepuis « Valdivia », s’étend sur près de 2000 anset se divise en quatre phases dont on rencontre

des témoins également dans les alentours : à SanPablo, Punta Arenas, Buena Vista, Guangla, ElMalte, Sabana et Real Alto. Une population primi-tive avait donc occupé cette côte, vivant de pêcheet de cueillette mais, semble-t-il, dans l’ignoranceau début de l’agriculture et de la céramique.L’étude anthropologique des squelettes révélaqu’à Valdivia les crânes de la couche inférieureétaient dolichocéphales ; or, les pêcheurs du litto-ral péruvien, de type dolichocéphale, ignoraient lacéramique ; tandis que la couche supérieure rece-lait des crânes brachycéphales, plus nombreux. Ilparut donc probable que deux types humains vi-vaient conjointement à Valdivia, le second ayant

apporté la céramique et peut-être aussi l’agri-culture. Hormis les nombreux et variés tessons depoteries et les haches en pierre provenant de celieu et des environs, Estrada, Meggers et Evans,puis d’autres encore par la suite, découvrirent unemultitude de figurines en terre cuite de quelquescentimètres de hauteur, représentant pour la plu-part un personnage féminin fortement stylisé, à lalourde coiffure enveloppant pratiquement toute latête. Cette abondance de statuettes féminines, lespetites « Vénus » de Valdivia, laissa supposer uneculture matriarcale et serait l’expression d’un cultede la fécondité coïncidant avec l’apparition del’agriculture dans le monde. Ces découvertes

éclairèrent donc d’un jour nouveau l’histoire des

ENQUETE SUR LES CONTACTSTRANSPACIFIQUES (2ème partie) 

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premières cultures amérindiennes mais de plus,produisirent également l’effet d’une bombe dansles milieux intéressés : en effet, notre trio, Estrada,Meggers et Evans, dans leur quête des causes decette brusque apparition de la céramique à Valdi-via, remarqua qu’un groupe d’individus vivait àcette époque dans des conditions similaires, sousun climat identique, utilisant les mêmes instru-

ments de pierre, d’os et de coquillage, mais... auJapon ! En outre, et c’est là l’élément majeur deleur thèse, les poteries de Valdivia sont très sem-blables et présentent exactement les mêmes ca-ractéristiques que celles de la culture du jômon(en japonais : jômon = dessin de corde) (1).

Les poteries de Valdivia, modelées à la main, seprésentent principalement selon les modèles-types suivants : les jarres et cruches aux formesanguleuses ou aux formes arrondies. Les vasessont souvent recouverts d’engobe rouge et repo-sent fréquemment sur quatre pieds. Les cols des jarres sont parfois ondulés et les bords des cru-

ches sont quelquefois munis d’un anneau exté-rieur d’argile. Pour la décoration de leurs cérami-ques, les Valdiviens utilisèrent différentes techni-ques fort variées, tout au long des quatre phases :gravures faites à l’aide d’un coquillage ou d’un osde chien, incisions en ligne fine, le « peigné », le« sillon » fait par le doigt, la « ponctuation » faitepar l’ongle, etc... Les motifs sont géométriques :des lignes obliques formées de minces colombins

s’entrecoupent et dessinent des croisillons, descréneaux, des décors en dents de scie, des che-vrons... Des excisions permettent de mettre enrelief un motif, comme par exemple des demi-

sphères. Et même le fameux décor typiquement jômon de la corde imprimée dans l’argile est pré-sent à Valdivia. Grâce à la générosité d’une fonda-tion nationale, Betty Meggers et Clifford Evanss’envolèrent vers le Japon où ils visitèrent les sites jômons et étudièrent longuement leur productionde céramique. Cet examen leur prouva que lamajorité des techniques décoratives et des motifscaractéristiques des débuts de la poterie de Valdi-via, sont également représentés dans les sites àcéramiques de Kyushu, datant de la période tran-sitoire entre le jômon ancien et le jômon moyen,soit vers 3000 avant notre ère. Ce sont surtout lessites d’Ataka, de Sabata et d’lzumi, dans l’île de

Kyushu, qui présentent le plus de similitudes avecValdivia ; on y retrouve effectivement les amascoquilliers ainsi que des fragments d’os et depierre mélangés aux tessons. Le contexte dans

34 

(1) Pour on savoir plus sur les Jômons, voir l’arti-

cle d’Edith Pirson dans KADATH n° 9.

let qui décore les tessons du haut).

Tessons de poteries, jômones à gauche, valdi-viennes à droite. (A noter l’empreinte d’un osse-

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lequel furent découverts ces témoins archéologi-ques est donc semblable à celui de Valdivia. PourEstrada, Meggers et Evans, il ne faisait dès lorsaucun doute que ce furent des naufragés du jô-

mon qui introduisirent l’art de la céramique (etpeut-être de l’agriculture) chez les primitifs valdi-viens de la côte équatorienne. Et nous voici à nou-veau plongés dans les controverses concernantles relations transpacifiques ; en effet, si cettethéorie fit grand bruit il y a une dizaine d’années etparaissait inattaquable, emportant l’approbationd’un grand nombre, il semble aujourd’hui qu’il faillela considérer avec beaucoup de circonspection.C’est du moins ce qui ressort des quelques tra-vaux récents qui abordent la question. Mais unefois encore, comme c’est le cas pour la plupart deces sujets touchant aux contacts, on assiste ici àune lutte ouverte entre partisans et adversaires du

diffusionnisme.Retenons cependant les faits suivants :● Les plus anciennes céramiques connues auJapon sont signalées par L. Frédéric ; elles pro-viennent de Fukui, près de Nagasaki, et dateraientde —7450. La culture jômon s’étale, elle, entre —5000 et —3000 et près de 75.000 sites archéologi-ques en produisirent des témoins. Rappelons lesphases du jômon :

● Alors que la céramique est déjà connue et utili-sée de longue date au Japon, de l’autre côté duPacifique, les Amérindiens l’ignorent toujours jus-qu’en —3000 où surgissent les premières terrescuites de Valdivia.● A l’époque des travaux d’Estrada, Meggers etEvans, ce site fournit la plus ancienne datation decéramique pour le continent américain.●  La période dite de Valdivia est elle-même divi-sée en quatre phases :

● Enfin, signalons également qu’aux similitudesentre les céramiques de Valdivia et celles du jô-mon, nos trois archéologues ajoutèrent, pour étof-fer leur théorie, d’autres éléments tendant à prou-ver des relations transpacifiques avec l’Asie. Ilsfirent observer que de chaque côté de l’océan onretrouve les mêmes modèles réduits en terre cuitereprésentant des habitations. Ces maisonnettessont rectangulaires, les murs sont épais et surtout,le toit est double rappelant la forme d’une selle : lefaîte est incurvé, les extrémités remontent en s’ef-filant. Elles proviennent, en Equateur, des sites deLa Tolita, de Bahia de Caraquez, de Jama et de

fouilles en Esmeraldas et au nord de Manabi.

En Asie, on les rencontre dans le Sud-Est, en In-donésie, à Sumatra, en Nouvelle-Guinée, dans les îles Carolines, à Java, en Thaïlande, et Heine-Geldern en découvrit aussi une représentation sur

un tambour en bronze du Tonking. Il y a égale-ment une forte ressemblance (que certains esti-ment plus probante) entre les modèles équato-riens et des maisonnettes indochinoises de la pé-riode des Han. Les antidiffusionnistes quant à euxdisent que l’aire de répartition de ces modèles esttrop vaste (on en trouve même dans la culturetrypolienne entre —3500 et —1900, et en Bulga-rie) et qu’il y a trop d’écart chronologique... EmilioEstrada attira aussi l’attention sur l’utilisation depart et d’autre du Pacifique : — du repose-tête rectangulaire, concave, à base

plate, en forme d’être anthropomorphe ou zoo-morphe, avec une, deux ou trois colonnes cen-

trales ; — de poids rectangulaires en céramique servant

aux filets de pêche ; — de flûtes de pan aux tuyaux plus longs aux

extrémités et s’en allant raccourcissant gra-duellement et symétriquement vers le milieu del’instrument ;

 — de figurines assises en tailleur, dont les jam-bes ne sont pas croisées, mais reposent l’unesur l’autre parallèlement, et dont les mainssont posées sur les genoux. Elles portent enoutre une coiffure cônique, de lourds orne-ments cylindriques passés dans le lobe del’oreille, des bracelets et un collier au ras ducou. Ces caractéristiques sont visibles sur unbouddha de Campa (Annam) et sur une figu-rine de Bahia en Equateur ;

 — de la navigation sur radeaux à un ou plusieurs« gouvernails » que l’on utilise encore en Amé-rique du Sud, au Viêtnam ou à Taiwan. Il y enavait en Chine dès le Vème siècle avant notreère.

Mais revenons à présent aux céramiques de Val-divia et aux modèles jômons qui les auraient inspi-rées. On opposa principalement deux arguments àEstrada, Meggers et Evans : primo, les caractéris-tiques de l’artisanat de Valdivia sont trop simplis-tes  et reflètent plutôt les premiers pas des pre-

miers céramistes. Il paraît évident que n’importequel individu voulant décorer de manière  primitiveun objet en argile utilisera inévitablement du maté-riel simple tel qu’un bâtonnet, un petit caillou poin-tu ou un coquillage, puisqu’il y en avait à profu-sion, ou encore les doigts eux-mêmes, ainsi quedes incisions faites au moyen de l’ongle. Il n’estdonc pas nécessaire d’invoquer un contact pourarriver à cela. Certains ont même poussé très loin— trop loin à mon avis ! — les comparaisons, enallant jusqu’à objecter qu’en mettant en parallèledes motifs apparemment identiques sur des pote-ries valdiviennes et jômones, le motif japonaisaurait été dessiné à l’aide de toute la surface de

l’ongle tandis qu’en Equateur, tenez-vous bien,

—————

 jômon archaïque jômon antique jômon moyen jômon tardif jômon final

—5000 à—3700 à—3000 à—2000 à—1000 à

—3700—3000—2000—1000— 250

————

période Apériode Bpériode Cpériode D

—3000 à—2300 à—2000 à

après

—2300—2000—1500—1500

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seule la tranche de l’ongle incisa l’argile ! On n’estévidemment pas près d’en finir avec de tels argu-ments ! Il me faut cependant signaler deux faitsimportants au niveau de la forme des récipients :

si dans la plupart des cas les poteries du jômonont le fond plat, dans la céramique de Valdiviacette caractéristique ne se retrouve pas ; tous lesfonds sont arrondis. De plus, les Valdiviens fabri-quaient des vases tétrapodes qu’on ne trouve paschez les Jômons. Secundo, on argua que s’il sem-blait y avoir une similitude, l’océan à lui seul cons-tituait une barrière trop importante pour être fran-chie par ces populations primitives. A cela je rap-pellerai un fait qui ne cesse de m’étonner et que jecitais déjà dans notre n 13 de KADATH (« Racesextracontinentales en Mésoamérique ») à proposdes premiers peuplements du continent améri-cain : les thèses officielles n’hésitent pas à songer

à une vague de peuplement par des  piroguiers venant du nord de l’Asie, par la chaîne des îles Aléoutiennes, sur de fragiles canots et ce, à l’épo-que mésolithique soit environ entre —10.000 et —5000 ! Or, on sait que les Jômons pratiquaient lapêche en haute mer et possédaient certainementdes embarcations munies de balanciers... De plus,dans les eaux situées au sud de l’île de Kyushu serencontrent des courants parmi les plus violentsde tout le Pacifique, et qui se déplacent vers lenord-est le long des côtes du Japon d’environ 45 à65 kilomètres par jour. Il faut ajouter à cela qu’ausud du Japon sévissent de nombreux typhons quisuivent ensuite la direction de ces courants. Pournous qui avons perdu tout contact avec la nature

et les éléments, une telle croisière fortuite est im-pensable et les chances de survie seraient mini-mes ; mais ces populations côtières primitives(prenons par exemple les peuples de Micronésie),rencontraient sur mer un environnement familier,et pouvaient parfaitement subsister durant unepériode plus ou moins longue. Les courants au-raient ensuite amené nos pêcheurs jômons versles côtes de l’Amérique du Nord qu’ils auraientlongées ; d’autres courants prenant le relais lesauraient portés vers la zone de l’Equateur, particu-lièrement proéminente vers l’ouest dans la confi-guration de l’Amérique du Sud, point de conver-gence de différents courants océaniques venant

du nord et du sud pour former ensuite le courantéquatorial vers l’ouest. Evoquant ce genre de péri-ple, le sinologue Joseph Needham précise quedurant le XIXème siècle, des jonques de l’Estasiatique s’échouaient sur les côtes américainesau rythme d’une tous les cinq ans ! De tels naufra-ges furent par ailleurs si fréquents dans des tempsplus reculés, qu’ils allèrent jusqu’à constituer lasource d’approvisionnement en fer et en cuivred’une tribu d’Indiens de Colombie britannique !Enfin, hormis des tentatives volontaires telle quecelle d’un jeune Japonais de 23 ans qui atteignit labaie de San Francisco en août 1962 sur un ra-deau de quelque 5 mètres de longueur, j’ajouterai

encore que la revue « Overland Monthly » de San

Francisco publia en 1875 une liste de quinze casde jonques chinoises et japonaises qui vinrents’échouer sur les rivages américains depuis lesdébuts du XIXème siècle ! A ceux qui se deman-

deraient si le voyage fortuit était possible en sensinverse, J. M. Goedertiers mentionne le cas d’ungalion espagnol qui quitta le Mexique en 1609dans le but de rallier Manille et qui dériva jusqu’auJapon (« A dictionary of Japanese History », NewYork, 1968). Cet obstacle formé par l’océan nesemble donc pas si insurmontable que certainsveulent le faire croire. Que l’on m’explique donccomment ont fait les piroguiers du mésolithique...

Plus ancien que Valdivia.Qu’il y ait eu contacts ou pas, il fallut bien considé-rer que la céramique était apparue en premier lieu

à Valdivia. Par la suite, certains ayant mis en reliefdes traits communs entre ces cultures formativesde l’Equateur (et particulièrement durant les pha-ses dites de Machalilla puis de Chorrera, qui sui-vent celle de Valdivia) et les premières hautescivilisations du Pérou et de Mésoamérique, 1000 à1500 ans plus tard, Valdivia fut considérée commele berceau de ces hautes civilisations. Mais ceciest une autre histoire, et là aussi les sujets dedésaccord sont nombreux. Cependant, voilà qu’àPuerto Horminga, au nord de la Colombie, Hen-ning Bischof a retrouvé depuis des poteries que leradiocarbone fait remonter à 3910 et 3840 ansavant J.-C. Valdivia ne détiendrait donc plus lerecord de l’ancienneté pour la céramique. Entre-

temps cette ancienneté avait été portée à —3100par de nouvelles découvertes à Loma Alta, un peuà l’est de Valdivia, puis entre —3400 et — 3300 àReal Alto. Enfin, en 1971, Julio Viteri Gamboadécouvrit des poteries qu’il qualifia de pré-valdivia,ou style de San Pedro. Ces poteries, qui parais-sent plus anciennes, sont différentes du style deValdivia et n’offrent plus aucune ressemblanceavec les céramiques jômones. Mais, et c’est Do-nald W. Lathrap qui le souligne, « le matériel deSan Pedro n’est pas l’ancêtre de celui de Valdi-via », et « les faits nous forcent à considérer l’exis-tence d’un minimum de deux traditions distinctesde l’art de la céramique et ce à une époque anté-

rieure à 3000 ans avant notre ère : San Pedro etLoma Alta (Valdivia) ».

Il est selon moi bien malaisé de trancher cetteépineuse affaire des céramiques de Valdivia, dumoins pour l’instant en l’absence d’autres élé-ments. Suivant que vous lirez des auteurs diffu-sionnistes ou non, Valdivia sera, ou ne sera pas,une preuve de contacts transpacifiques. Plusieursadhérents aux théories d’Estrada, Meggers etEvans, pensent, plus d’une décade après la publi-cation de leurs travaux, que l’origine de ces céra-miques n’est plus à rechercher au-delà des mers,mais bien en Equateur même, comme semblent

l’attester les poteries plus anciennes découvertes

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dernièrement. En outre, les datations faites par leradiocarbone sont à présent remises en question,et il y a de fortes présomptions pour que la datede —3100 (Loma Alta) doive en fait signifier envi-

ron —4000 ; c’est du moins ce qui fut annoncé àl’occasion d’une importante exposition itinérantesur l’Equateur, montée par le Field Museum ofNatural History de Chicago en 1975, et qui prit finen juillet 1977. Rangeons donc Valdivia parmi les« indécidables », et attendons...

L’origine asiatique des Olmèques.Betty Meggers fit à nouveau parler d’elle il y a plusde deux ans, et provoqua une fois de plus l’ire desantidiffusionnistes, en publiant un article dans larevue « American Anthropologist » sur la possibleorigine transpacifique de la civilisation olmèque.

Elle y expose les similitudes qu’elle remarque en-tre cette culture olmèque et celle des Chang (pourquelques précisions sur ces cultures, je vous ren-voie à notre n° 12 où j’ai parlé des Chang ainsiqu’à notre cahier consacré aux Olmèques dansKADATH n° 21). Je vous rappelle brièvement quel’on fait démarrer la culture olmèque vers —1200(—1500 selon certains) dans l’aire de la Mésoa-mérique, tandis que la culture Chang s’étale de —1700 à —1028, et marque pour la Chine le débutdes temps historiques. Précédant la période olmè-que, on connaît de petits établissements de com-plexes du type village-ferme, sans religion domi-nante ni structure sociale bien établie, ni même depoterie standardisée. On associe cette période au

style « Ocos » qui définit cette céramique. Puis,soudain surgit la civilisation olmèque : une sociétéparfaitement structurée, une religion élaborée, uncalendrier précis, une écriture, des édifices monu-mentaux et un art fabuleux... Bref, une très grandecivilisation dont l’influence s’étend rapidement aureste de la Mésoamérique. Parallèlement, enChine, mais bien plus tôt, la culture des Changtransforme tout aussi radicalement la société néo-lithique, établissant une dynastie, des structuressociales, un rituel élaboré, des métiers spécialiséset apportant l’écriture et la métallurgie. Certainsspécialistes tels que Kwang-chi Chang et WilliamWatson ne manquent pas non plus de s’étonner

de cette brusque évolution.

Voici quelques parallèles mis en évidence parBetty Meggers :●  Les Chang, tout comme les Olmèques, possé-

daient un calendrier, une écriture, une struc-ture sociale capable de diriger et de procurerdu travail à une large couche de population etce pour des ouvrages considérables ; leur reli-gion élaborée était administrée par une castede prêtres ; ils mirent sur pied un réseau struc-turé permettant d’acheminer une grande varié-té de matériaux bruts des limites des territoires jusqu’aux centres administratifs ou cérémo-

niels ; dans les deux cultures, la masse de la

population vivait en petites communautéséparpillées, dont le labeur des habitants four-nissait la nourriture, les biens de luxe et autrescommodités à l’aristocratie occupant les

grands centres.●  Les principales structures cérémonielles des

Chang et des Olmèques sont formées de pla-teformes rectangulaires en terre, surmontéesd’un édifice, et orientées suivant le même axenord-sud (voir à ce sujet « Les ultimes demeu-res des Fils du Ciel » dans KADATH n° 12).Ces centres sont en outre équipés d’un sys-tème de drainage.

●  Des documents de l’époque Chang expliquentque l’empereur, ainsi que ses vassaux, fai-saient usage de lames de jade en tant quesymbole de leur rang et de leurs fonctions ; or,des bas-reliefs olmèques semblent nous mon-

trer le même genre d’attributs.●  Le jade possédait curieusement une impor-

tance énorme dans ces deux cultures et futconsidéré comme le matériau le plus précieux,supérieur à l’or lui-même et des vertus magi-

37 

scène de la stèle 3 de La Venta.

En haut : types de lames en jade utiliséescomme symbole de rang sous la dynastie desChang. En bas, à gauche, un personnageolmèque portant un bâton semblable, avec lamême incision au sommet. A droite, une

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ques et divines lui étaient attribuées. Alors quele jade est connu et travaillé depuis les tempsnéolithiques en Chine (voir « Jade et immortali-té dans l’Empire du Milieu », KADATH n° 17),

les plus anciens spécimens découverts enMésoamérique proviennent de sites datant de1000 ans avant notre ère. Or, la beauté et laprécision de la taille de ces objets dénotentune grande maîtrise et, par conséquent, il doity avoir là une longue tradition dans le travail dece matériau particulièrement dur... D’où vient-elle donc ?

●  Les deux cultures vouaient une dévotion parti-culière au félin : le tigre pour l’une, le jaguarpour l’autre. Le tigre était un motif ornant leplus fréquemment des haches en jade et sou-vent aussi, le masque du tigre était dépourvude mâchoire inférieure. Ceci se retrouve d’une

manière identique pour le jaguar chez les Ol-mèques.

●  Il semble que dans la Chine ancienne, on aitgardé le souvenir d’une déformation crânienneassez curieuse : sur les représentations despremiers souverains mythiques, on peut en

effet observer la forme effilée du crâne maisavec deux proéminences, comme si une enco-che avait été faite au sommet du crâne ; unesemblable entaille est figurée sur de nombreu-ses figurations du jaguar olmèque et peut sevoir également sur le masque en bronze dutigre chinois.

●  Tout comme le félin, l’oiseau et le serpent sontdes animaux extrêmement importants dans lesdeux religions, et l’iconographie des deuxcultures nous offre plus d’une représentationde la combinaison de ces deux animaux enune seule divinité.

●  Betty Meggers note encore l’importance accor-

dée par les Chang et les Olmèques aux mon-tagnes, auxquelles ils associent des divinitésde la pluie.

De même que ce fut le cas pour Valdivia, lacontre-attaque ne se fit pas attendre, et l’un desprincipaux reproches que l’on fit à Betty Meggersfut de vouloir envisager une filiation entre la Mé-soamérique et la Chine par-delà un océan, alorsqu’on est encore loin d’avoir prouvé qu’il y ait euune relation entre Chavin et la Mésoamérique, surle même continent et à une distance relativementpeu longue...

Sur les traces de Heine-Geldern :Paul Shao.Puisque je me suis attaché à vous soumettre desidentités culturelles relevées de part et d’autre duPacifique, je ne peux passer sous silence un ou-vrage récent paru en 1976 (« Asiatic Influences inPre-Columbian Ancient Art »), et que je trouvepersonnellement assez étonnant. J’ignore l’accueilqui lui fut réservé dans le milieu des américanis-tes, et je ne sais s’il a fait à l’heure actuelle l’objetd’une contre-argumentation mais gageons quecela ne saurait tarder ! Quoi qu’il en soit, j’estimeque cette étude originale abondamment illustrée

est une pièce importante à verser au dossier, etqu’elle s’inscrit en droite ligne dans les idées deRobert Heine-Geldern. Son auteur est le Profes-seur Paul Shao, natif de Canton, qui enseignel’architecture au Design Center de l’Iowa StateUniversity. Certes, ne manquera-t-on pas de luireprocher, s’il est à la fois diplômé des universitésde l’Ohio, du Kansas et du Massachusetts, ainsique du Great China Art College... il n’est pasarchéologue et dès lors, diront d’aucuns, méfianceet circonspection !

Pour Paul Shao, les traits communs les plus mar-quants entre la Mésoamérique et l’Est asiatique se

rencontrent entre le IIIème et le IXème siècle de

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que du jaguar de la niche de l’Autel 4 à La Venta.

En haut, a et b : haches olmèques de La Venta,ornées du masque du jaguar. — Au milieu : ha-ches de l’époque Chang (a : en jade, b : enbronze); elles sont décorées du masque d’unfélin dépourvu de mâchoire inférieure. — En bas,a : masque en bronze de style Chang, et b : mas-

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notre ère, et plus précisément encore, au cours dela période classique des Mayas (soit entre 600 et900) et de la dynastie chinoise des T’ang (de 618à 907). Après avoir parcouru les plus grands mu-

sées et les plus importantes collections d’Améri-que, d’Europe et d’Asie, Paul Shao s’attarda — dumoins dans l’ouvrage dont il est ici question — àl’étude des similitudes entre les positions cérémo-nielles et les parures de prêtres, de hauts dignitai-res ou de divinités, dans des chefs-d’œuvresmayas et asiatiques ; il compara les différentsmotifs des multiples têtes superposées dont sontaffublés certains personnages ; un nombre d’attri-buts iconographiques distincts d’autres personna-ges représentés en position assise ; une série degestes rituels que montre la statuaire, etc... Choi-sissant parmi quelque 300 illustrations de ce livre, je vous soumets les exemples que voici. Il sera

d’abord question d’une étude comparative concer-nant plus particulièrement les célèbres stèles deCopan au Honduras, un des sommets du baroquedans l’art maya, et des peintures ou des statuesde dignitaires ou de divinités chinoises.

Du point de vue vestimentaire, on peut ainsi voirqu’un général de l’ancienne dynastie Wei, ChangSun Sung, dont on attribue le portrait à ChenHung sous la dynastie des T’ang, est coiffé d’une

tête de monstre emplumé dont le masque est dé-pourvu de la mâchoire inférieure, tout comme surles stèles C et H de Copan, et sur la stèle 6 dePiedras Negras (Peten, Guatemala) où la ressem-blance est plus frappante encore. Outre la positiondes pieds et des mains qui est presque identique,il porte comme sur la plupart des stèles de Copanainsi que sur la stèle 24 de Naranjo (Peten) et surle linteau nord de la Maison L de Yaxchilan (Chia-pas, Mexique), une ceinture nouée sur le devantde la taille et dont les pans retombent presque jusqu’aux chevilles. L’endroit où elle est nouée setrouve juste en-dessous de la gueule d’un monstredépourvu de mâchoire inférieure comme sur la

coiffe. Un bodhisattva  de la dynastie des Sui(Chine, VIème siècle) et des Rois-Gardiens de ladynastie des Ming (XIVème siècle) portent uneceinture identique. Les poignets des manches deChang Sun Sung sont ornés d’une tête de mons-

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lement visible sur le croquis des stèles A et N.

La stèle C de Copan (photo et dessin) et un dessin du Général Chang Sun Sung. Similitude entreles coiffures couvre-chefs, les ornements des épaules, des poignets et des ceintures. Ceci est éga-  

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tre de la gueule ouverte duquel sortent les mains ;ce genre d’ornement est présent à Copan. Il a deplus à la hauteur des genoux et sur les épaules,un autre masque de monstre, toujours dépourvu

de mâchoire inférieure, comme sur les stèlesmayas.

Tous les personnages de Copan portent, reposantau creux des bras, une sorte de sceptre horizontald’aspect tantôt rigide, tantôt flexible, qui s’achèveaux extrémités par une gueule de serpent ouverte.Son usage demeure inconnu, mais l’on supposequ’il s’agit d’une parure cérémonielle ; sur plu-sieurs bas-reliefs de la dynastie des Han et dansl’iconographie tibétaine du IXème siècle on peutvoir de longs « sceptres » maintenus horizontale-ment dans le creux des bras... Ces doubles gueu-

les de monstres jointes par le corps sont d’autrepart fort semblables aux jades et aux bronzes desChou, dont la gueule se termine par une lèvresupérieure plus longue et recourbée vers le haut(ce qui n’est pas sans rappeler le masque du ma-kara et les serpents emplumés de Copan que j’aimontrés dans la première partie de cette enquête,KADATH n° 23). Une autre particularité curieuse :sur un linteau de Chiapas (Mexique) on peut voirune de ces gueules de serpent à l’extrémité d’unsceptre, dont la mâchoire inférieure porte une lon-gue et fine barbiche à la Ho Chi-Min, et qui estégalement un des attributs communs des dragonschinois. Toujours à Chiapas, un dieu au nez en

trompe est affublé de la même barbiche.

Quittons à présent Copan. A Calakmul(Campeche, Mexique), à Chichen Itza (Yucatan)et à Naranjo existent quantité de stèles et de bas-reliefs montrant un personnage debout sur un

esclave, un captif ou un démon gisant au sol. Ceciest très courant à la fois au Japon et en Chine. Oùcela devient plus étrange, c’est lorsqu’on regardeattentivement la position et le visage du person-nage foulé aux pieds sur un relief du Temple desJaguars et du Temple des Guerriers à ChichenItza : les victimes sont représentées de face ; onn’en voit donc que la tête, les épaules et les brasployant sous le poids de celui qui se tient deboutsur son dos. On retrouve identiquement la mêmereprésentation sur des tombeaux des Han, avecen plus le point commun suivant : tout commechez les Mayas, de la bouche distordue par ladouleur sort une longue langue qui pend jusqu’à

terre puis se sépare en deux pointes qui remon-tent en se recourbant vers la gauche et vers ladroite !...

Les éléphants mayas.Paul Shao consacre un chapitre de son livre à cetépineux problème qu’on ne se lasse pas d’évo-quer à propos des contacts transpacifiques ; cer-tains affirmèrent — et affirment toujours — avoirreconnu dans l’iconographie maya, et ailleurs en-core sur le continent américain, des figurationsd’éléphants ! Le premier à mentionner ce fait estJohn Lloyd Stephens dans son fameux livre« Incident of Travel in Central America, Chiapasand Yucatan » en 1841 : il remarqua au sommet

de la stèle B de Copan, deux éléments qu’il asso-cia à des trompes d’éléphants. Plus tard, AlfredMaudslay se rendit sur les lieux et put voir la stèleen question, encore intacte alors, car elle fut de-puis mutilée. Il proposa quant à lui d’y voir destètes de tapir au museau allongé plutôt que d’élé-phants. Vers 1909, c’est G. B. Gordon qui, dansun article, identifie les deux têtes d’animaux à cel-les d’un oiseau local au bec fortement recourbé. Ilest soutenu par Alfred Tozzer du Peabody Mu-seum et par le grand spécialiste de l’art maya Her-bert Spinden. Une féroce bagarre s’engagea alorsà coup de livres et d’articles, car un ardent diffu-sionniste anglais, le Dr Elliot Smith, prit la défense

de l’éléphant, si j’ose dire ! Et de clamer partoutque si l’on rejetait aussi catégoriquement cettehypothèse, c’était parce qu’elle remettait tout sim-plement en question toute l’histoire de l’évolutiondes anciennes civilisations d’Amérique. Paul Shaovoit également de possibles figurations d’élé-phants sur certains monuments mayas, et en par-ticulier sur la stèle M de Copan, dont le person-nage porte une coiffure où il est en effet possiblede voir les oreilles et les défenses de l’encombrantanimal. Une vaste cavité est visible à l’endroit oùselon Shao se trouvait la trompe, ce qui tendrait àprouver qu’il y avait là un appendice important, àen juger par la trace de la mutilation. Et ce ne peut

être, ajoute-t-il, le masque d’un tapir ni d’un oiseau

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Chung Sun Sung.

Détail de fresque du linteau nord de la Maison Là Yaxchilan : à noter, la ceinture ornée du mas-que d’un félin, dépourvu de la mâchoire infé-

rieure, tout comme sur le portrait de

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en raison des défenses... On retrouve d’ailleurs auJapon un personnage nommé Yaksa, dont la têteest surmontée d’une coiffure représentant le mas-que d’un éléphant avec les défenses sur le côté

(période Kamakura, vers 1200). Ce personnage ala même pose que celui de la stèle M : les piedsécartés en V et les mains jointes, ce qui est l’atti-tude typiquement orientale d’un être en adoration.Quant aux créatures de la stèle B, Paul Shao es-time qu’il s’agit d’êtres hybrides, mélange de l’oi-seau cher aux opposants de Smith, et de l’élé-phant. Il croit donc à une influence asiatique.

Fréquemment on a associé le nez en trompe dudieu de la pluie, Chac, avec la trompe de l’élé-phant. Il y a bien sûr maintes théories à ce pro-pos ; on a même dit que la forme particulière du

nez de Chac figurait la trombe d’eau... Shao, sebasant sur une céramique figurant Chac, songe làégalement à une trompe d’éléphant, car l’on peutdistinctement voir les défenses sortant de la bou-che. Pour les diffusionnistes, cet attribut de Chacest peut-être à assimiler au masque du makaraasiatique dont j’ai déjà parlé. Heine-Geldern avaitproposé, suite à la découverte au San Salvadord’une statue de pierre, d’établir un parallélismeavec le dieu hindou Ganesha, au corps d’hommeet à tête d’éléphant. Il faut cependant préciser quecette statue du San Salvador est très grossière etpeu convaincante.

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tête mutilée d’un éléphant. 

Détail de la Stèle M de Copan : le personnage porte une coiffe, dans laquelle Paul Shao voit la

Détail de la Stèle B de Copan, avec les deux têtesd’éléphants.

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En guise de conclusion.Il serait possible d’accumuler durant des pagesentières encore, les analogies recensées par diffé-rents chercheurs dans le but d’établir qu’il y a bel

et bien eu des relations transpacifiques ; mais celamènerait trop loin et déborderait du cadre d’unebrève enquête. Je me suis donc limité à des faitsque j’ai jugés importants pour un survol de laquestion. Ces faits constituent-ils une évidence ?Détient-on une preuve formelle ? Jusqu’à présentl’archéologie, sur base des critères de contactsqu’elle a fixés, répondrait par la négative, car elleexige des fouilles et des intermédiaires, ainsi que je l’ai dit dans la première partie. Au niveau descomparaisons pures, elle les refuse pratiquementtoutes en vertu de certains postulats. Il s’agit deconditions qui ont été fixées et qui doivent êtreremplies, afin de pouvoir établir si des similitudes

culturelles sont le fait d’inventions séparées oud’une transmission :1) les éléments culturels comparés doivent être

du même âge ;2) une longue période d’évolution doit pouvoir

apparaître pour l’élément culturel dans la so-ciété donneuse et à l’opposé, une soudaineapparition du stade terminal doit avoir lieudans la culture receveuse ;

3) l’aire de répartition de l’élément diffusé dans laculture receveuse doit être plus réduite quedans la culture donneuse. Cependant, si ladiffusion est ancienne et fut populaire, l’aire derépartition peut être égale ;

4) la possibilité d’une diffusion est d’autant plus

grande que le caractère des éléments compa-rés s’éloigne de l’aspect fonctionnel. En effet,deux objets semblables peuvent être l’aboutis-sement d’une série de caractères liés à unmode de vie, à un climat, à un environnement,à des besoins, au matériel disponibleidentique ;

5) il y a plus de chance qu’il y ait eu des contactssi l’on retrouve des similitudes entre les com-plexes plutôt qu’entre les simples élémentsque l’on compare. Un style de céramique, un jeu compliqué, sont des exemples de com-plexes formés d’éléments simples.

Voilà donc fixées les règles du jeu ; mais voyonscela de plus près.1) Ainsi donc, si les éléments comparés sontcontemporains, ils peuvent être retenus pour unehypothèse de contacts... Je suis quelque peuétonné, et me demande pour quelle raison ils de-vraient nécessairement être du même âge. Jereprendrai un argument d’Heine-Geldern : soit unmodèle-type ayant cours quelque part en Inde, quise transmet lentement et atteint même des ré-gions fort éloignées du Sud-Est asiatique aprèsune longue période ; puis, poursuivant sa route, ilva, après un laps de temps plus long encore,influencer des cultures établies dans des îles du

Pacifique.

Supposons à présent que quelques siècless’écoulent et que le modèle-type ait toujours lafaveur des populations. Un beau jour, des naviga-teurs quittent ces îles et, soit volontairement, soit

fortuitement, atteignent les rivages du continentaméricain où ils réussissent à introduire le modèlequi leur est familier. Ne perdons pas de vue qu’en-tre-temps, le modèle de base a peut-être été com-plètement abandonné par ses promoteurs et ce,depuis peut-être fort longtemps, et même a puêtre détruit sans laisser aucune trace. Supposonsaussi — pourquoi pas ? — que les modèles inter-médiaires  aient à leur tour disparu pour l’une oul’autre raison ; ou aussi, que nous ne les ayonspas encore retrouvés. On ne pourrait nier qu’il y acependant eu contact, et pourtant, en vertu dupoint 1 cet exemple ne pourrait être retenu ! Il fautajouter à cela la difficulté de dater avec précision

certains éléments ; j’ouvre un livre au hasard et jetombe sur une statuette mexicaine que l’on date probablement   du post-classique, soit de 900 à1521 de notre ère ... Cela fait une marge  probable de 621 ans ! Etant donné que de l’autre côté duPacifique, une autre statuette que je déciderais decomparer daterait  probablement   du VIIème, duVIIIème ou du IXème siècle (et si cela se trouveson origine exacte serait en plus inconnue,comme c’est souvent le cas !) la tâche ne seraitpas aisée ! Pour en terminer avec ce point 1, jesignale encore que dans bien des cas, les datessont sans cesse reculées ; reportez-vous à ce que je disais au sujet des datations nouvelles propo-sées pour Valdivia...

2) Quant à cette « longue période d’évolution »dont il est question au point 2... encore faut-ilqu’on en retrouve des traces. Et si ces traces fu-rent détruites à l’époque ? Combien de fois uneculture n’a-t-elle pas fait table rase des produc-tions de la société qu’elle a supplantée ? Les chro-niqueurs de la conquête espagnole attestent àsuffisance de la quantité considérable de trésorsculturels qui furent purement et simplement effa-cés par les conquérants. On est aussi en droit desupposer qu’elles demeurent toujours ignorées,faute d’avoir été découvertes par nous : cela signi-fierait-il qu’elles soient inexistantes ?3) Le troisième point suggérerait que les aires

concernées auraient livré tous les témoins archéo-logiques sans exception : comment le savoir ?4) Peut-être est-ce, selon moi, le quatrième pointqui paraît le plus curieux en regard de la plupartdes similitudes proposées à ce jour ; bien sûr, je leconsidère comme hautement valable pour touteune catégorie d’éléments. Par exemple, si de partet d’autre du Pacifique, l’on retrouve des récipientsen céramique à trois pieds, je ne m’étonnerai pasoutre mesure et je n’invoquerai pas de relationsculturelles. En effet, le potier a dû rapidement serendre à l’évidence qu’un vase tripode était plusstable, et s’il aura préféré le tripode au tétrapode je ne sursauterai pas non plus face à cette coïnci-

dence, car il est tout bonnement bien plus facile

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de faire un vase à trois pieds qu’à quatre ! Noussommes là en présence de contingences pure-ment fonctionnelles ; mais lorsqu’il est question del’utilisation de miroirs ronds en bronze ou en pyritecomme ceux que je montrais dans la premièrepartie de cette enquête, je m’étonne ! Non pas àpropos de leur petite taille ni de leur forme circu-laire — c’est là simplement une implication prati-que —, mais bien en constatant qu’ils sont ornésau Mexique comme en Chine de triangles ajouréssur tout le pourtour de leur circonférence ; cela n’aplus rien à voir avec le côté fonctionnel de l’objet !

De même, pour l’absence de mâchoire inférieure àla tête de la créature décorant la coiffe, les épau-les, les genoux et la ceinture des stèles de Copanet du général Chang Sun Sung, je crois qu’il estexclu d’invoquer l’aspect fonctionnel ou un proto-type naturel !

5) Ces derniers exemples tombent d’ailleurs dansla catégorie du cinquième point : il ne s’agit pas làen effet d’éléments simples, mais bien d’un com-plexe ornemental. C’est également de l’étude deplusieurs complexes, dont il fut question dans l’a-nalyse des armes et des instruments aratoires quefit Daniel Randall Beirne (voir première partie) :

chaque objet retenu était classé en fonction dessix techniques de base pour l’emmanchement, etde dix-sept caractéristiques spécifiques de cha-cune de ces méthodes ! Il y a donc bien plus quel’aspect fonctionnel de ces objets qui entra enligne de compte, il y a un complexe de dix-septcaractéristiques spécifiques... Parlant de com-plexe, l’exemple de la représentation du lotus en Amérique et en Asie me semble assez convain-cant (voir également la première partie) : chez lesMayas et chez les Indiens, on figure la fleur dulotus, la tige et aussi le rhizome, alors que ce der-nier n’est en principe pas visible puisque enfouidans la vase ; des figurations humaines empoi-

gnent la tige de la plante ; ces personnages sont

assis ; il y a des animaux aquatiques aux extrémi-tés de ces frises comportant des lotus ; ils sem-blent dévorer la fleur de la plante ; cette fleur etses feuilles sont représentées de manière natura-liste ; le rhizome est, lui, stylisé et de plus sertd’arabesque, etc... Ce qui nous fournit une bellesérie de coïncidences exagérées ! Et bien quechaque élément puisse être de nature toute simpleet aisément réinventable  par différentes cultures, je pense qu’il n’en demeure pas moins que leurschances de se combiner de la même manièreentre eux, pour former des complexes identiques

des deux côtés de l’océan, sont plutôt maigres !Dans la même optique, il y a aussi le problème del’usage des jades funéraires, sur lequel j’avaisdéjà attiré l’attention lors d’articles précédents : enChine comme en Mésoamérique, des objets en jade étaient placés près des défunts. Le dignitairedu tombeau de Palenque portait un masque fait defragments de jade ; en Chine, il y avait des lin-ceuls de jade pour préserver la dépouille ; desperles de jade étaient quelquefois placées sur lalangue du défunt, tout comme en Chine, et pluscurieux encore, ces jades étaient parfois taillés enforme de cigale ! Ce n’est pas tout : les jades fu-néraires étaient aussi fréquemment saupoudrés

de cinabre... En outre, le jade est particulièrementdur à tailler et est relativement rare et difficile àtrouver ; à tel point que les Indiens tout comme lesChinois avaient des collecteurs de jade profes-sionnels, qui gardaient jalousement le secret per-mettant de découvrir et d’identifier ces pierres àl’état brut.

Le Professeur Gordon Ekholm disait à propos descontacts transpacifiques : « ...On soupçonne, on al’intuition ; un peu comme le policier qui se trouvedans une pièce où flotte une odeur de sang, oùdes impacts de balles sont visibles mais où, hélas,le cadavre a disparu ainsi que l’arme du

crime !... ».

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Relief en pierre de Borubudur (an 800) et détail de la stèle I deQuirigua, (an 800 aussi !) : des personnages assis en tailleurdans une niche surmontée du masque d’un démon dépourvu demâchoire inférieure, avec au bas, une autre gueule d’animal « àtrompe ». Similitude fonctionnelle ?

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Je terminais mon premier article par un constatd’incomplétude ; je ne pense pas qu’il s’agissed’une forme d’échec, au contraire, je pense que ceconstat permettra de poursuivre l’enquête et de

retrouver « le cadavre et l’arme du crime» dontparle Ekholm. Le grand américaniste Paul Rivetétait opposé à la théorie diffusionniste car, repro-chait-il à Heine-Geldern, notamment, « il est stu-péfiant dans ce cas, que les Indiens n’aient pasutilisé la roue ou la technique de la vraie voûte...».J’ai signalé dans la première partie que les Indiensconnaissaient parfaitement le principe de la roue.Reprocher que la roue n’ait pas été adoptée etutilisée couramment dans la vie pratique, signifie-rait qu’un trait de culture primordial pour notresociété aurait dû avoir la même importance dansun autre contexte culturel. Or, l’histoire des explo-rations et des colonisations européennes en Afri-

que, en Asie et en Amérique nous a maintes foisprouvé que les apports culturels transmis n’étaientpas toujours acceptés en bloc, mais parfois re-poussés net par défaut de contexte socioculturel,politique, religieux ou autre, ou repris partiellementaprès transformations. Quant à la non-connaissance de la vraie voûte, il semble que cesoit erroné : en effet, L. Satterthwaite mentionnesa présence dans une longue chambre du sitemaya de La Muneca et, précise-t-il, « ils savaientexactement ce qu’ils avaient construit là ! ». Jecrois, pour terminer, que ce n’est pas tellement lemanque d’éléments qui fait défaut, car s’il faut encroire les différents chercheurs dont je vous aiprésenté les théories, l’Amérique (et principale-

ment la Mésoamérique, car c’est là que des simili-tudes sont le plus souvent relevées) semble avoirété plus d’une fois contactée par le Sud-Est asiati-que, puisqu’on y retrouve des traces d’élémentsprésents chez les Chang, les Chou, les Han, lesT’ang et même dans les cultures prébouddhiquesde l’Inde. Sans doute n’est-ce pas par hasard sic’est dans cette zone que les diffusionnistes ren-contrent le terrain le plus propice à leurs thèses ?Il serait opportun selon moi, de reposer le pro-blème à la lumière de toutes les données acquisesà ce jour et de faire la synthèse d’une étude ex-haustive. Ceci ne serait pas une mince affaire,faut-il le dire, et représenterait une œuvre de titan.

Mais seule cette tâche, accomplie par une équipede spécialistes bien documentés, pourrait êtremenée à bien et permettrait d’y voir plus clair, carpour l’instant, il faut le reconnaître, malgré l’abon-dante littérature existante, il règne un grand désor-dre parmi toutes les théories avancées.

PATRICK FERRYN

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Source des illustrations : Lucinda Rodd d’après Friedländer, p. 4 — Parfitt Mills Ass., p. 6 —A. G. Galano-poulos, p. 7 —D. F. Goodrick, p. 8 — d’après Paul Le Cour, p. 13 — Petite Planète, p. 17-21 — Fred D. Awuy et Yazir Marzuki, p. 19-20 — Albert Szafarz, p. 19 — Academic Press London, p. 23-28— © KADATH - R. Dehon, d’après Avery, p. 24 — Joseph Needham, p. 30-31 — J. B. Carlson, p. 31 —Jean Roudillon, p. 34 — d’après Betty J. Meggers, p. 34 — d’après Ling, Laufer, Pina Chan, Covarrubias etH i 37 d’ è B i L f t O t N d l 38 Th P F 39 P l Sh