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Directeurdelapublication:ThierryWalrafen

CompositionetpublicationélectroniqueMauryImprimeur

M

Dépôtlégal:janvier2016ISBN:9782916920894

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SOMMAIREInmemoriam

JeanSaint-Geours

Innovation,technologieetfinanceIntroduction

BERTRANDLAVAYSSIÈREPartner,Ares&Co

IVANODONNATAdjointaudirecteurgénéraldesopérations,BanquedeFrance

Laconduiteduchangementtechnologique

Banqueetnouvelletechnologies:lanouvelledonne

OLIVIERKLEINProfesseurd’économieetfinance,HEC;directeurgénéral,BRED

Histoired’unetransitionnumérique:SociétéGénérale

FRANÇOISEMERCADAL-DELASALLESDirectricedesressourcesetdel’innovation,SociétéGénérale

Technologie et transformation des services bancaires : l’exemple de TechnoVision deCapgemini

ANDRÉCICHOWLASVice-président,Capgemini

Desmodèleséconomiquesàrepenser

Lesmodèleséconomiquesbouleversésparledigital

BERTRANDLAVAYSSIÈREPartner,Ares&Co

Innovation, concurrence et réglementation pour la fourniture de services bancaires enligne

MARIANNEVERDIERCentrederecherchesenéconomieetdroit(CRED),universitéParis2Panthéon-Assas;Centre

d’économieindustrielledeMinesParisTech(CERNA)

Latarificationetlebigdata:quellesopportunités?

JEAN-MARCBOYER

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Anciendéléguégénéral,Fédérationfrançaisedessociétésd’assurances(FFSA);président,AssurancesConseilÉtudesBoyer(ACEB)

Transformationdesinstrumentsetdeslieuxdetransaction

Lesmoyensdepaiement,quelleinnovation?

JEAN-YVESFORELDirecteurgénéralenchargedelabanquecommercialeetdel’assurance,BPCE

Bitcoinpourremplacerlesdevises?

FRANÇOISR.VELDEBanquedeRéservefédéraledeChicago

Darkpoolsettradinghautefréquence:uneévolutionutile?

FANYDECLERCKToulouseSchoolofEconomicsetToulouseSchoolofManagement

LAURENCELESCOURRETESSECBusinessSchool

Liquiditédesmarchésobligatairesetinnovationtechnologique

MARIE-LAUREBARUT-ETHERINGTONChefduservicedegestiondesréservesàlaDirectiongénéraledesopérations,BanquedeFrance

DENISBEAUDirectiongénéraledesopérations,BanquedeFrance

Maîtrisedesrisquesetrégulation

Latechnologieestlemeilleurgarantdelagestiondesrisquessurlesmarchésfinanciers

GERARDHARTSINKSenioradvisor,CLSGroup;presidentduconseild’administration,GLEIF

Nouvellestechnologiesetprotectiondesépargnants:l’actiondel’AMF

MAJDIDEBBICHAutoritédesmarchésfinanciers(AMF)

GÉRARDRAMEIXPrésident,Autoritédesmarchésfinanciers(AMF)

Quellerégulationpourlesnouveauxentrantsdansl’industriedespaiements?

OLIVIERGUERSENTDirecteurgénéral,Stabilitéfinancière,servicesfinanciersetuniondesmarchésdecapitaux(FISMA),Commission

européenne

Institutionsfinancièresetcybercriminalité

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ÉDOUARDFERNANDEZ-BOLLOSecrétairegénéral,Autoritédecontrôleprudentieletderésolution(ACPR)

RecensionNouvellestechnologiesetservicesfinanciers

PIERRESIMONPrésident,Paris-ÎledeFranceCapitaleéconomique

Chroniqued’histoirefinancièreMonnaiedespauvres,monnaiedesrichesauXIXesiècle

PATRICEBAUBEAUUniversitéParisOuestNanterreLaDéfense;SciencesPo

ArticlesdiversLa couverture des catastrophes naturelles et nucléaires : une source d’inspiration pourl’assurancedesdépôtsbancaires

GEOFFROYENJOLRASCNRS,CERAG(Centred’étudesetderecherchesappliquéesàlagestion),universitéGrenobleAlpes

MATHIEUGATUMELIREGE(Institutderechercheengestionetenéconomie),universitéSavoieMontBlanc

PHILIPPEMADIÈSCNRS,CERAG,universitéGrenobleAlpes

OLLIVIERTARAMASCOCNRS,CERAG,universitéGrenobleAlpes

Lerôleetlepouvoirdesagencesdenotationont-ilschangéaufildesaccordsdeBâleI,BâleIIetBâleIII?

JEAN-GUYDEGOSUniversitédeBordeaux,centrederechercheIRGO(Institutderechercheengestiondesorganisations)

OUSSAMABENHMIDENESSCASchoolofManagement

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TABLEOFCONTENTSInmemoriam

JeanSaint-Geours

Innovation,TechnologyandFinanceIntroduction

BERTRANDLAVAYSSIÈREPartner,Ares&Co

IVANODONNATAdjointaudirecteurgénéraldesopérations,BanquedeFrance

Themanagementoftechnologicalchange

BanksandNewTechnologies:TheNewDeal

OLIVIERKLEINProfesseurd’économieetfinance,HEC;directeurgénéral,BRED

SociétéGénérale:ADigitalTransitionStory

FRANÇOISEMERCADAL-DELASALLESDirectricedesressourcesetdel’innovation,SociétéGénérale

Technology and Transformation of Banking Industry: The Case of Capgemini’sTechnoVision

ANDRÉCICHOWLASVice-président,Capgemini

Reconsideringbusinessmodels

DigitalImpactonEconomicModels

BERTRANDLAVAYSSIÈREPartner,Ares&Co

Innovation,CompetitionandRegulationintheMarketforOnlineBankingServices

MARIANNEVERDIERCentrederecherchesenéconomieetdroit(CRED),universitéParis2Panthéon-Assas;Centre

d’économieindustrielledeMinesParisTech(CERNA)

WhataretheOpportunitiesofBigDataforPricingApproaches?

JEAN-MARCBOYERAnciendéléguégénéral,Fédérationfrançaisedessociétésd’assurances(FFSA);président,AssurancesConseil

ÉtudesBoyer(ACEB)

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AlterationinInstrumentsandTransactionPlaces

PaymentsIndustry,WhatInnovation?

JEAN-YVESFORELDirecteurgénéralenchargedelabanquecommercialeetdel’assurance,BPCE

CanBitcoinReplaceCurrencies?

FRANÇOISR.VELDEBanquedeRéservefédéraledeChicago

DarkPoolsandHigh-FrequencyTrading:AUsefulEvolution?

FANYDECLERCKToulouseSchoolofEconomicsetToulouseSchoolofManagement

LAURENCELESCOURRETESSECBusinessSchool

BondMarketsLiquidityandTechnologicalInnovation

MARIE-LAUREBARUT-ETHERINGTONChefduservicedegestiondesréservesàlaDirectiongénéraledesopérations,BanquedeFrance

DENISBEAUDirectiongénéraledesopérations,BanquedeFrance

Riskscontrolandregulation

TechnologyIstheMajorEnablertoManageRisksinFinancialMarkets

GERARDHARTSINKSenioradvisor,CLSGroup;presidentduconseild’administration,GLEIF

NewTechnologiesandProtectionofInvestors:TheRoleofAMF

MAJDIDEBBICHAutoritédesmarchésfinanciers(AMF)

GÉRARDRAMEIXPrésident,Autoritédesmarchésfinanciers(AMF)

WhichLegislationfortheNewcomersonthePaymentsMarket?

OLIVIERGUERSENTDirecteurgénéral,Stabilitéfinancière,servicesfinanciersetUniondesmarchésdecapitaux(FISMA),Commission

européenne

FinancialInstitutionsandCybercrime

ÉDOUARDFERNANDEZ-BOLLO

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Secrétairegénéral,Autoritédecontrôleprudentieletderésolution(ACPR)

SurveyNewTechnologiesandFinancialServices

PIERRESIMONPrésident,Paris-ÎledeFranceCapitaleéconomique

FinancialhistorycolumnMoneyforthePoor,MoneyfortheRichin19thCenturyFrance

PATRICEBAUBEAUUniversitéParisOuestNanterreLaDéfense;SciencesPo

ArticlesThe Systems Covering Natural and Nuclear Disasters: An Inspiration to the DepositInsuranceSystem

GEOFFROYENJOLRASCNRS,CERAG(Centred’étudesetderecherchesappliquéesàlagestion),universitéGrenobleAlpes

MATHIEUGATUMELIREGE(Institutderechercheengestionetenéconomie),universitéSavoieMontBlanc

PHILIPPEMADIÈSCNRS,CERAG,universitéGrenobleAlpes

OLLIVIERTARAMASCOCNRS,CERAG,universitéGrenobleAlpes

Did the Role and the Power of the Credit Rating Agencies Change over the Basel I,BaselIIandBaselIIIAgreements?

JEAN-GUYDEGOSUniversitédeBordeaux,centrederechercheIRGO(Institutderechercheengestiondesorganisations)

OUSSAMABENHMIDENESSCASchoolofManagement

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INMEMORIAM

JeanSaint-Geours,un«hommeauxtalentsmultiples»,ainsil’aqualifiélejournalLeMonde. Parmi ces talents, il en est un qui nous touche particulièrement : sa proximitéphilosophique avec laRevued’économie financière (REF). Jean Saint-Geours aurait puêtreleparraindelaREF,etce,pourdeuxraisonsaumoins.

D’abordparcequelafinance, lemoinsquel’onpuissedire,c’estqu’il laconnaissait.En tant qu’acteur avant tout : par ordre chronologique, leCrédit Lyonnais (en tant quedirecteur général adjoint, puis directeur général), le Crédit National (en tant queprésident), leCrédit Industriel etCommercial (CIC), laLyonnaise deBanque, leCréditIndustrield’AlsaceetdeLorraine(CIAL),laBanquedel’UnionEuropéenne(BUE),sansoublier la Banque Européenne d’Investissement (BEI) (en tant qu’administrateur) :finalement, il y a bien peu de banque, aumoins en France, qui aient pu échapper à sagouvernance… En tant qu’acteur donc, mais aussi en tant que régulateur puisqu’il aprésidélaCommissiondesOpérationsdeBourse(COB)àunepériode(1989-1995)oùlaFrancedécouvraitlescharmes,maisaussilesrisquesdesmarchésfinanciers.

Mais JeanSaint-Geours a été aussi, et peut-être encoreplus, compagnonde route (etparfoisdelutte)delaREFparcequ’ilaimaitsincèrementetintimementl’économie.Celas’est traduitpardenombreux livresaux titres–etauxcontenus–parfoisprémonitoirescomme,parexemple,Pouvoiretfinance(1979),L’impératifdelacoopérationNord-Sud(1981) ou L’éthique aux énarques (1997). Mais cela s’est encore plus traduit par savolontédemettre l’analyseéconomiqueaucœurduministèrequiétait lesien,celuidesFinances.PatronincontestéduServicedesÉtudesÉconomiquesetFinancières(SECF)delaDirection du Trésor, il a tout fait pour que celui-ci se transforme enDirection de laPrévision,Directionquialongtempsapportéàceministèreunelégitimitéscientifiquequedenombreuxéconomistes,detousbordsetparmilesmeilleurs,regrettentaujourd’hui.

Et puis Jean Saint-Geours, cela a été aussi une carrière de haut fonctionnaire à fairepâlird’envietousceuxquiluiontsuccédé.Neserait-cequemembreducabinetdePierreMendès France àMatignon et membre du Club de Rome : qui n’en aurait pas rêvé ?S’ajoutentàceladeuxpassionsmoinsmédiatiques,mais toutaussisincères :celledelaprospective,donttémoignesaprésidencedelarevueFuturibles,etcelledeladéfensedelalanguefrançaise.Quisait?Peut-êtrequesansJeanSaint-Geours,laREF,dontilaétémembre du conseil d’orientation de décembre 1989 à mars 2008, serait aujourd’huipubliéeseulementenanglais.Cequiseraitbiendommage…

Enapparence,iln’existequ’uneseulepassionquiaitpuéloignéJeanSaint-GeoursdelaREF:c’estsapassionpourlecinémadonttémoigne,entreautres,saprésidencedelaCinémathèque française de 1991 à 2000.Mais,mêmedans ce « jardin secret », il étaitparvenu à concilier la culture et la finance en présidant pendant de nombreuses annéesl’IFCIC, la légendaire sociétéde financementdesarts cinématographiquesà laquelledenombreusescréations,aujourd’huiinscritesdansl’Histoireducinéma,doivent,sicen’esttout,aumoinsbeaucoup.Finalement,mêmedanscedomaine,ilestparvenuàrapprocherautant que faire se peut culture et finance, ce qui, aujourd’hui, sonne d’un timbre si

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particulier…Ilnerestedoncplusqu’àlaREFdeconsacrer,àlamémoiredeJeanSaint-Geours,trèsviteunnuméroàcethème.

Àtouscestitres–etnousenoublionssûrement–,laREFs’enorgueillitd’avoireuJeanSaint-Geourscommeami.LaRevued’économiefinancière

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INTRODUCTIONBERTRANDLAVAYSSIÈRE*1

IVANODONNAT**2

Ce numéro de laRevue d’économie financière est consacré aux interactions entre latechnologie, l’innovation et les systèmes financiers. Il s’agit ici d’éclairer par quelquestémoignagesetanalysesnoslecteurssurlestransformationsencoursetleursimplicationstant pour les modèles d’affaires des institutions financières que pour l’action desrégulateurs.Loindenousdeprétendrefaireunexamenexhaustifde laquestion,carsescontours sonten renouvellementconstant ; il s’agitplutôtdeproposerun«point sur lasituationetsesperspectives».

Nousprocédonsenquatrechapitrescombinantlespointsdevued’universitairesetdepraticiens.Lepremierchapitreestconsacréàlanouvelledonnecrééeparla technologietant au plan stratégique qu’au plan managérial. Le deuxième chapitre s’intéresse auxtransformations qui en résultent pour le positionnement commercial et les modèleséconomiquesdesinstitutionsfinancières.Letroisièmechapitreportesurlesmodificationsdesmarchésdetransactionsdemassecommelespaiementsetlestitres.Enfin,ledernierchapitreabordelesaspectsrelatifsàlamaîtrisedesrisques,notammentsystémiques,etaurôledelarégulation.

Decetterevueémergentcinqgrandsthèmes,quifournissentunegrilledelectureetderéflexionpérennepermettantd’anticiperlesdéformationsfuturesdupaysage.

– Les technologies « nouvelles » stricto sensu apparaissent et existent bien avantqu’ellesnepuissenttransformerlesmarchésetleshabitudes.C’estleurdiffusionlargequicrée les ruptures. Par exemple, le protocole internet existe depuis 1973. Au titre desconditionsd’unediffusion efficace et réussie des innovations, les articles de cenuméromettentclairementenévidencelanécessitédecombinerunevisionstratégique,desactesmanagériauxfortsetuneappropriationdeméthodesprécises.Certainsauteurssoulignentleseffetsamplificateursdela«bouledeneige»technologique:mieuxuneinstitutionestpréparéeàintégrerdesinnovations,plusviteellepeutentirerlesbénéfices.

–Lesmodificationslesplusprofondessontlarésultantedequatrefacteursintervenantdefaçonpresqueconcomitante:(1)lamaturitéd’uneinnovation,caractériséenotammentparunetechnologiestableetsonappropriationparungrandnombredeproducteurs,(2)l’émergencedenouvellesréglementations,(3)l’apparitiondeconcurrencesinéditeset(4)l’adoptionpardesutilisateurs.Ainsisedéfinissent,progressivement,denouveauxcadrespourl’exerciced’unmétiertraditionneloud’unnouveaumétier.Lesquatreélémentssontnécessaires pour assurer une masse critique aux nouveaux marchés et leur bonfonctionnement,maisl’initiationdestransformationspeutprendresasourcedansunseuldes quatre facteurs, sans ordre particulier pour le processus d’initialisation. Les articlesmontrent à l’envie que les ruptures correspondantes dans lesmodèles d’affaires offrentautantd’opportunitésdedéveloppementquederisquesd’obsolescence.

–Les ruptures, voulues ou involontaires, nécessitent, pour être créatrices de valeur à

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moyenterme,unecollaborationétroiteentrelesintervenantsdemarchéetlesrégulateurs.Unretarddelapriseencomptedel’innovationparlaréglementationcréedesinefficacitésde marché, profitables à certains, dommageables pour d’autres, et entraîne souvent undélaisupplémentairepourintroduiredesadaptations,voiredescorrections.

– Mais comment le régulateur peut-il trouver le bon équilibre entre, d’une part,favoriseraprioritouteinnovationet,d’autrepart,garantirlasécuritédestransactions,laliquiditédesmarchésetlamaîtrisedesrisquessystémiques?Quelquesexemplesillustrentla réalisation de ce dosage fin entre réglementation et innovation, qui passe par undialogueentrelesdifférentsacteursetrequiertparfoisundegrésuffisantdenormalisation.

– Un dernier thème apparaît en filigrane : alors que les maîtres-mots pour lesintervenants demarché et pour les régulateurs deviennent agilité, rapidité, adaptation etadoption, les interdépendances liées à la mondialisation sont aujourd’hui un facteur decomplexité, parfois de lenteur, pour la concrétisationdesbénéficesdes innovations.Parexemple,des technologiesnouvelles,commelachaînedeblocs (blockchain),pourraients’accompagner d’une difficulté à identifier et localiser les régulateurs compétents ou àcoordonnerleursactions,aumoinsdanslesmétiersdetransaction,étantdonnélanature«transhumante»duteneurdemarché.

Enconclusion,ilsemblequel’énergiecréatricedetouslesacteursdusystèmefinanciers’accompagne toujours du mouvement de « destruction créatrice », si cher à JosephSchumpeter,créantundécalageaveclesrégulateursqueceux-cichercherontàréduire.

Comment faciliter la diffusion de l’innovation dans un système financier dont larégulation se renforce ? La clé pourrait être l’application stricte des règles de bonneconduitefinancière(financialconduct)coordonnéesparleConseildestabilitéfinancièreetvisantàassureruntraitementéquitableauclient,éviterdessituationsd’abusdemarchéetpromouvoiruneéthiquedesaffairesàtouslesniveauxdusystèmefinancier.

Idéalistes?

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LACONDUITEDUCHANGEMENTTECHNOLOGIQUE

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BANQUEETNOUVELLESTECHNOLOGIES:LANOUVELLEDONNEOLIVIERKLEIN*1

UNERÉVOLUTIONCOMMERCIALE

Lesnouvellestechnologiesengendrentpourchacununnouveaurapportaumonde,unenouvelle façon de penser le temps et l’espace, une autre manière de concevoirl’information,lesconnaissancesetl’autonomied’action.Defait,ellesinduisentunesériederévolutionsenchaînedansnotreviequotidienne,commedansl’entreprise.

La première est une révolution commerciale qui bouleverse les rapports entre lesproducteurs,lesdistributeursetlesclients.Cesderniersvoientleurpouvoirtrèsrenforcépuisqu’ils sont aujourd’hui plus libres d’agir, plus avertis, disposent de plusd’informations,peuventcomparerlesprixetbénéficientainsid’uneplusgrandelibertédechoix. C’est ce que nous appelons la « révolution client ». Elle est devenue le centred’intérêtdesentreprises.C’estlaraisonpourlaquellebeaucoupd’entreellesdéveloppentdepuis quelque temps des discours orientés clients, comme si la préoccupation étaitnouvelle.

Les rapports de pouvoir se trouvent donc inversés au bénéfice du client.Mais, dansnombre de secteurs économiques, ce phénomène est également perceptible dans lesrapportsentrelesproducteursetlesdistributeurs,lapositiondecesdernierss’entrouvantpotentiellement renforcée. La prise de pouvoir du client met fin à la hiérarchietraditionnelle, née au XXe siècle, reposant sur la capacité du producteur à imposer sesproduitsauxdistributeursqu’ilachoisisetsurcelledudistributeuràimposercesmêmesproduits auxconsommateurs.Dorénavant, leclient a lepouvoir.Ainsi, si ledistributeurdispose d’une bonne connaissance de ses clients, s’il sait utiliser ses big data et s’ildéveloppe un customer relationshipmanagement (CRM) pertinent, s’il parvient ainsi àanticiperlesbesoinsdechacund’entreeuxetàlessatisfaire,s’ilconsidèreenfinleclientcomme un « consom’acteur » capable de rechercher avec lui la bonne combinaison deproduits et de services, alors il trouve les solutions adéquates pour chaque client et lefidélise.Leserviceprendd’ailleurslepassurleproduitlui-même.Nousnesommesplusdans une économie conduite par lamise en avant du produit, mais dans unmonde oùl’usage, le service, devient plus important que la détention du produit lui-même. Lesapplicationssontplusimportantesqueletéléphonelui-même.Labicyclettepeutselouerpourletrajetàeffectueret,deplusenplus,l’automobileelle-mêmesuitlemêmechemin.Lecloudrendprogressivementdésuetlapossessiondegrosordinateurs…Laqualitédelarelation avec son commercial, son conseiller, et la possibilité de trouver les bonnessolutionsadaptéesàchacun,c’est-à-direlebonservice,prennentdonclepassurleproduitentantquetel.Cefaisant,ledistributeurpeutainsiprendrelepouvoirsurleproducteur,en le mettant naturellement en concurrence avec d’autres producteurs pour chercher lameilleure combinaison, en prix comme en qualité, de produits et de services quicorrespondentlemieuxauxbesoinsduclientindividualisé.

Un bouleversement des rapports de force historique est donc en train de voir le jourdansnombredesecteursentreproducteurs,distributeursetconsommateurs.Àl’évidence,

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cela contraint le distributeur à une excellente gestion des clients. Si le distributeur, enrevanche,n’estpascapabledecomprendrelesclientsetdelesfidéliser,ils’entrouvetrèsfragilisé,d’autantqu’ilestaujourd’huiégalementpossiblepourleproducteurdevendreendirect. Le défaut de qualité du conseil et l’incapacité de proposer les meilleurescombinaisons de produits et de services adaptées à chacun conduisent tout droit à lanumérisationtotaledelarelationclient-fournisseuretàladisparitiondurôleéconomiquedu distributeur. Avec l’apparition d’une relation directe producteur-client, lorsque celas’avèrepossible,ouavecl’apparitiondepureplayersInternetdeladistribution,formedelowcostdelarelationclient.

Autre conséquence pour l’entreprise, ce sont les changements de comportement dessalariés. La révolution technologique positionne les collaborateurs au centre del’entreprise,avecdesimpactssurl’organisation.Aujourd’hui,parexemple,lescadresnesontpluscrédibles–etsontincapablesd’entraînerleurscollaborateurs–s’ilsnefondentpas leur autorité sur la valeur ajoutée qu’ils apportent à leurs équipes, et non sur ladétention d’informations qui circulent désormais librement et gratuitement dans toutel’entreprise.

D’autant que les collaborateurs expriment un besoin accru d’autonomie, soutenu etrenforcéparcettemêmerévolutiontechnologique.Développerl’espritd’entreprendreestdevenuunvéritableenjeupourlesgrandesentreprises.Aujourd’hui,lesindividus–ettoutparticulièrement les salariés des sociétés – aspirent à comprendre le sens de leurcontribution à l’entreprise : ils souhaitent en partager la stratégie et le choix du moded’organisation,pouryadhérerplusnaturellement.

REVOIRLESORGANISATIONSTRADITIONNELLESBienévidemment,lesorganisationstrèshiérarchisées,verticales,néesdesannées1950

et 1960, si elles n’ont pas su se moderniser, sont devenues moins efficaces et plusdifficilesàgérer :ellesmobilisentmoins,car laproximitémanagérialeestpluscrucialequejamais;plusrigides,moinsflexibles,ellesnesontplusenphaseavecunmondeetunenvironnement de plus en plus complexes et mouvants. A contrario, les entreprisesorganisées en réseau – entre les différentes parties de l’entreprise ou entre différentesentreprises–sontplusadaptables,plusagiles,absorbentmieuxleschocsetgèrentmieuxlacomplexité.

Le facteur sociétal enfindoit aussi être traité très sérieusement, car la sociétédevientune véritable partie prenante de l’entreprise, Internet et réseaux sociaux obligent. Laresponsabilité sociétale des entreprises (RSE), l’engagement sociétal et leur réputationsontdevenusdesfacteursimportantsdeleurréussite.

Iln’yadoncpasd’autre issuepourse faireentendredanscenouveaumondequedesuivreou,plutôtmême,d’anticiperlesusagesdesgens.Carc’estbiendecelaqu’ils’agit:il n’y a pas d’un côté le digital et d’un autre côté la vie comme avant. Les nouvellestechnologiesontchangénosfaçonsd’agiretnotrerapportaumonde.

DÉVELOPPERLABANQUESANSDISTANCE

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L’entreprise-banque – plus spécifiquement la banque commerciale – n’échappe pas àcesbouleversements,bienaucontraire,étantaucœurdel’activitééconomique.D’autantqu’apparaissent de nouveaux acteurs, comme les start-up de la finance digitale, lesFinTech qui, en réinventant le parcours client ou en développant des savoir-faire surcertainesdes activitéshistoriquesdesbanques,viennent les aiguillonner et lesobliger àaccélérerleurmutation.

Qu’il s’agisse de la banque en ligne, du mobile banking, du paiement et, plusgénéralement,delarelationentrelabanqueetsesclientsparticuliers,l’accélérationdelarévolutionnumériquepousseinévitablementàsedemanders’ilyaencoredelaplacepourdesagencesbancairesaucoindelarue.Selonnous,laréponseestpositive.

Il faut bien se rendre à l’évidence : les nouveaux outils numériques ont altéré deuxparamètres,lefacteurtempsetlefacteurdistance.Larelationentreleclientetsabanqueestdevenueimmédiateetl’achatdeproduitsoudeservicesbancairessefaitmaintenantàdistance.Leclientpoussedemoinsenmoinslaportedesonagencebancaire,saufpourtraiterdesesprojetsdeviesignificatifs.Etc’estbienlà,lecœurduréacteur.

Dansuncontextededéfianceaccruedesconsommateurs,lesbanquesdoiventrépondreaux nouvelles exigences de leurs clients, qui expriment une forte attente de proximité(quelque soit le canalutilisé), depraticité, commedepertinenceet depersonnalisationaccrues du conseil apporté. Praticité : les clients veulent une banque plus simple, pluspratiqueàutiliseretàjoindre.Lapraticitésedéclinetantentermesd’accueil,d’horaires,decanauxderelationavecsonconseillerpour,lecaséchéant,nepasavoiràsedéplacer,quededisponibilitéetdestabilitédeleurinterlocuteur.Pertinenceduconseil:lesclientssontégalementdemandeursdeconseilsaccrusetdeplusenplusappropriés; ilsexigentainsi une vraie personnalisation de la relation, donc, ici encore, une stabilité de leurconseiller.

Labanquedoitdoncseréinventersansperdredetempsetapporterlanouvellevaleurajoutée indispensableattenduepar leclient.Mais il convientdebien faire ladistinctionentrelespratiquesdépasséesetlespratiquesquirestentindispensablesparcequ’ellessontl’essencemêmedumétier.

Deux invariants sont les piliers de la banque commerciale. D’une part, la demandebancaire ne diminue pas en volume : elle s’exprime différemment, avec de nouvellesexigences. Les gens n’ont ainsi pasmoins besoin de banques. D’autre part, la relationintuitu personae reste un élément fondamental dumétier de banquier de proximité. Eneffet, la banque n’est pas un métier de production de produits ; elle est un métier derelationshumaines, fondésur lacapacitéàproposer lebonconseilet lebonservice,aubonmoment,quelquesoitlecanalproposé.Elletraitedesprojetsdevieetd’entreprise–du temps long–etce traitement impliqueune relationpersonnaliséeetdurableavecunconseillerbancairepertinent.Cesontlesclientsquil’affirment,tantautraversdesétudesréaliséesquedesréclamationsreçues.

Selon nous, la seule issue passe par la réinvention de la banque de proximité. Larelationpersonnelleentreunconseilleretsonclientn’estpasnégociable,surtoutdansungroupebancairecomposédebanquesrégionalesdeproximitédontlaforcerésidedansla

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capacité à promouvoir ce que nous pouvons appeler la « banque sans distance », pardifférence avec la notion de « banque à distance », qui fait l’hypothèse qu’une banquecomplètepeutsepassertotalementd’unréseaud’agences.

Que recouvre ce concept ? Tout naturellement, ce qu’exigent les clients avec larévolution technologique, sans couper court avec une relation personnalisée forte, c’estplus de praticité et de valeur ajoutée. Conserver un relationnel fort avec son conseillerbancaire,mais par le canal de son choix, téléphone, email ou rendez-vousphysique, enfonction du sujet que l’on veut traiter, dumoment de la journée, etc.Mais ce conceptrecouvre aussi une meilleure réponse au besoin d’un conseil encore plus avisé, pluspertinent, plus approprié. Fini les produits que les banques cherchaient à vendre par lebiais d’une succession de campagnes indifférenciées. Il serait en outre particulièrementdangereuxdeproposeràdesclientstrèsinformésdesconseillersquiensauraientparfoismoinsqu’eux-mêmes.

Pourvuqu’ellesoitplusagile,plusinterconnectéeetplusproactive,labanquederéseauatoutenmainpourpréserversarelationfondamentaleavecsesclientsencroisantsaforce–laproximité–aveclesnouveauxoutils–Internet,tablette,smartphone,encombinantauseindechaqueagencelemeilleurdelabanquetraditionnelleetlemeilleurdelabanqueenligne.

Concrètement, dans chaque agence, chaque conseiller devient ainsi le porteur dumulticanal.Cequirevient,commenousledisions,àoffrirauclientlapossibilitédetraiter,selon son choix, les sujets d’importance avec son conseiller attitré face à face, partéléphoneouparemail,sanssedéplaceret,surtout,avectoujourslemêmeconseiller.Lereste, c’est-à-dire labanqueauquotidien, se traiteévidemment sur téléphonemobileouvia les guichets automatiques.On peut en outre parfaitement développer, parallèlementauxagences,desbanquesenligneavecdesconseillersattitréspourlesclientstrèsmobilesoutrèspeudisponibles.

Un tel modèle de « banque sans distance » engendre automatiquement des coûtssalariauxplusélevésqueceuxd’unebanqueàdistancedetypelowcost.Celaconduitlabanqueà concentrer ses ressources–à commencerpar sescollaborateurs– sur l’apportd’unevaleurajoutée,pourjustifierlarémunérationduserviceproposéet,partant,àmisersurlecapitalhumain,seulvéritablefacteurdedifférenciationdanslabanque.Lesproduitsnefontpasladifférence.Deparlaréglementationetlatrèsgrandefacilitéàêtrecopiés,ils sont le plus souvent très semblables dans toutes les banques. Le vrai facteurd’avantages compétitifs résidedans la qualité de la relationpersonnalisée, doncdans lefacteurhumain,d’oùlecaractèrecrucialdelacapacitédemobilisationetdelapertinencedes équipes de conseillers. La compétence, la réactivité et la proactivité sont clés.L’explosion des données, conséquence de la digitalisation, et le développement destechnologiespermettantdelesanalyserouvrentdenouvellesperspectivesencoredifficilesà appréhender. Il est cependant acquis qu’une utilisation intelligente et non intrusived’outilsdeCRMdedernièregénération,fondéesuruneanalysefinedesbigdata,permetnonseulementdefaciliterleparcoursclient,maisaussiderépondreetsurtoutd’anticiperles besoins de chacun. Les conseillers sont alors enmesure de répondre aux nouvelles

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attentes de leurs clients, de développer avec eux des solutions parfaitement adaptées etpertinentesoudelessolliciteràbonescientpourleurpermettredemenerleursprojetsdevie.

UNETRANSFORMATIONENPROFONDEUR

La banque doit aussi profiler les réseaux pour les rendre plus agiles, en répartissantmieux lesexpertisesetenarticulantde façonoptimisée lephysiqueet lenumérique,enoptimisantsanscesselarépartitiondesforcesvivesauseindesagencesetsurl’ensembledu territoire couvert. Un travail d’industriel de la distribution est ici indispensable. Leréseau d’agences n’est pas mort, loin de là, mais il doit fusionner dorénavant deuxconcepts, le numérique et le physique, c’est-à-dire le meilleur de la modernité et lemeilleurdelatradition.Poursortirparlehaut,leréseaud’agencesdoitêtreplusmobile,plusalerteetsanscesseoptimisé.

Enoutre,lanumérisationestunechanceégalementpourlesbanquesetnonuniquementune contrainte. Cette nouvelle orientation implique ainsi plusieurs autres chantiers delonguehaleine:réétudierlesoutilspourmieuxaiderlescommerciauxouencorerevisiterles process en utilisant le numérique pour revoir les parcours clients, du front-officejusqu’au back-office. Il s’agit, par exemple, de faciliter la vie des clients et descollaborateursdelabanquetoutenmaîtrisanttoujoursmieuxlescoûts,defaireparticiperlesclients,quiytrouverontavantage,àl’élaborationmêmedescontrats,dedévelopperlasignatureélectronique,etc.Unevéritableréformeorganisationnelleestenmarche.

C’est aussi ce que peuvent permettre les nouvelles technologies. Elles ne sont pasqu’unemenace car dans un environnement où le revenu bancaire a tendance à baisserindéniablementmacroéconomiquement,ledéfimajeurd’untelmodèleeststratégique.Sinousn’étionspasà lahauteurdesattentesduclientet sinousnesavionspasutiliser larévolution numérique pour revoir nos propres modes d’organisation, le client iraitnaturellementversdespuresbanquesenlignemoinschères,sansétatd’âme.

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HISTOIRED’UNETRANSITIONNUMÉRIQUE:SOCIÉTÉGÉNÉRALE

FRANÇOISEMERCADAL-DELASALLES*1

Société Générale a lancé sa transformation digitale. Tous les métiers et toutes lesimplantationsgéographiquesdecegroupeinternationalde148000personnesontprislamesuredelaprofondeévolution,«révolution»,descomportementsetdesexigencesdesclientsàl’èredel’utilisationmassivedesnouvellestechnologies.

LesréseauxdebanquededétaildeSociétéGénéraleenFranceetCréditdunordsesontengagésdansuneprofondemutationquirenforcera larelationavec leursclientsgrâceàl’alliancedelabanque«humaine»etdesoutilsdigitauxmisenplace.Moinsd’agencescertes,maismieuxàmêmederépondreauxexigencesdequalitéduconseildemandéparlesclients.

Despointsdecontactaveclabanquecoordonnésetconnectéspourfaciliterlarelationentre la banque et ses clients : agence, Internet, centres d’appels, application mobile,capablesdecommuniquerentempsréelpourfaciliterl’accèsàlabanque.

LabanqueenligneBoursoramaestentêtedesbanquesdigitaleseuropéennes,fortesdeses 700 000 clients (+20 % de croissance en 2015). Marque rupturiste et laboratoired’innovationsFinTech,elledéveloppedespratiquesinnovantes(parexemple,ledispositifd’accèsàunconseillerparchat)etseplaceainsiàlatêtedesbanquesfrançaisesentermesderecommandationsclients2.

EnAfrique,trèsprésentedepuisplusdecentans,dansdix-huitpays,SociétéGénéraleaégalement pris la mesure de l’évolution des besoins et de l’attrait pour 1 milliard deconsommateurspotentielsd’unebanquesimple,accessiblepartout,enmobilité,àmêmedelesaccompagnerdansleurviequotidienneetledéveloppementdeleurséconomies.

EnEuropedel’Est,elles’appuiesurdesfilialestellesqueKomercniBanka,troisièmegroupebancairetchèque,etlaBRD,deuxièmebanquedeRoumanie,quisontrésolumententrées dans des démarches d’innovation alliant digitalisation massive et offre denouveauxservices.

La banque de financement et d’investissement est également concernée. Avec unpositionnement de multispécialiste dans trente-huit pays, elle capitalise sur sonpositionnement de leader sur les produits structurés pour enrichir la relation avec lesclients.

Les métiers spécialisés dans l’assurance, le financement d’équipements lourds ou leleasingsesonttouséquipésdesinterfacesdigitalesquileurpermettentdedématérialiserlargement la relationavec leurs clients, en réservant la relationhumaineaux sujetspluscomplexes.

Démarrerun telmouvementdansuneentrepriseaussivaste,vieilledecentcinquanteans,disperséedanssoixante-seizepays,servanttrentemillionsdeclientsdanslemonde,forte de processus et de hiérarchies bien établis, dans un contexte économiquemondialdifficileettroubléetdansuncontexteréglementaireenprofondemutationàlasuitedela

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crisefinancièrede2008,n’étaitpastrivial.

COMMENTMOBILISERLESCONSCIENCESAUTOURDECETTETRANSITIONÀL’ŒUVRE?La transition est peu visible du cœur d’une entreprise occupée en priorité à se

reconstruireaprèslesdifférentescrisesquelesecteurbancaireatraverséescesdernièresannées et à répondre aux exigences nouvelles d’une institution de régulation bancaireeuropéenneenconstructionetdéfinissantàtâtons,moisaprèsmois,denouvellesrègles,denouvellesconsignes.Avecpourprioritéderecentrerlebusinessmodelchahutédanslenouveau contexte économique mondial, Société Générale se réorganise, s’industrialise,lance la mutualisation et la localisation de ses ressources, le pilotage renforcé de sesprocessus. Toute la panoplie de l’optimisation des coûts est mise en place à la mêmeépoquepourcontribueraurenforcementdelasoliditédelabanque.Lesclientssontbiensûraucœurdespréoccupationsetilsconstituentcommetoujourslafinalitédesonaction.

Dès2010,FrédéricOudéa,devenuprésident-directeurgénéraldeSociétéGénérale,luifixeunobjectifmajeur : « devenir la banque relationnelle de référence».Mais, à cetteépoque,lapromessen’apasencorevraimentpriscorps.

Ilfautréussiràattirer l’attentionsur lenouveauphénomèneencours : la«relation»que les clients souhaitent établir avec la banque est en train de profondément changer.Nous sommes entrés dans l’ère numérique. Comprendre profondément le phénomène àl’œuvre et utiliser ses principaux leviers pour faire bouger l’ensemble de l’entrepriseserontdèslorslastratégiesimpleetpersévérantequepoursuivralegroupe.

COMPRENDRED’ABORDUnenouvellefaçondefairesociété

ParcequelesdirigeantsdelabanquenesontpastousdelagénérationY,ilnousfautaccepterdedécalernotreregardpourobserverquelesadolescentsetlesjeunesadultesontadopté depuis quelque temps déjà (lancement du premier iPhone en 2007) descomportementsindividuelsetdescomportementssociauxbiendifférentsdeleursaînés.Etque ce qui change finalement, au-delà de tout le reste, c’est notre façon à tous d’êtreensemble,defairefamille,voisinage,defairesociété.

C’estMichelSerres,àquijeveuxrendreiciunhommageappuyé,quinousouvrelesyeuxavec lespremièresconférencesqu’ildonneàSociétéGénéraleendécembre2010.Grâce à sa Petite poucette (Serres, 2012) nous comprenons que le smartphone,quintessencedel’Internetmobile,c’esttoutelaconnaissancedumondedanslapaumedelamaindesestroismilliardsd’utilisateursdanslemonde3.

Commel’inventiondel’écritureavaitfaitentrerl’humanitédanssonHistoire,commel’imprimerieavaitouvertlavoieàl’èreindustrielleetsesconsidérablestransformations,l’Internetmobileouvre lavoied’unenouvelle transitionanthropologiquede l’humanité.Riendemoins…

Lamaîtrisedusavoirestdemoinsenmoinslapropriétédequelques-uns.Lesavoirsepartage,secommuniquemassivement,demanièrevirale,àunevitesseparfoisahurissante.

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Larelationà tout typed’autoritéqui tirait sapuissancede lamaîtrisede l’unou l’autresavoirenestprofondémentbouleversée.

Ainsi, la relationde l’étudiant aumaître connaît un choc sansprécédentquand, alorsqu’ildistillesoncoursdansl’amphi,desdizainesdejeunesconnectéssurfentsurInternetpour trouver la faille dans son discours, les thèses contradictoires, etc. À quoi sert lemaître se demandeMichelSerres ?Comment doit-il envisager cette nouvelle relation ?Quelleestsavaleurdanscenouveaucontexte?

La relation du patient à son médecin est de la même façon profondément modifiéequandlepatientapuconsultertroissitesmédicauxsurInternetavantsonrendez-vousetque, soudain, ce que le médecin lui raconte cesse d’être parole d’évangile. Commenttransformer,trouverunenouvellevaleuràcetterelationparticulière?

Bien sûr, la relation des citoyens à leurs institutions, quelles qu’elles soient, subit lemême choc.Qu’il est difficile aujourd’hui d’être juge, parlementaire, hommepolitique,syndicaliste !Toutesces institutionssontdécriéesparnoscontemporainsqui les jugent,lescomparent,lesmettentaudéfiderépondreàleurspréoccupationssingulières.

Enfin,évidemment, la relationquenous tous,consommateursdebiensetdeservices,entretenonsavecceuxquilesfabriquentetnouslesproposent(distributeursdetoutesorte,banque, assurance) est également bouleversée. Sans oublier la relation que chacunentretientavecsonpropreemployeur.

Bref, à l’èrenumérique, la relationentre leshommeschangeparceque la relationausavoirdésormaismédiatisédemanièrelarge,simpleetpeucoûteuseachangé.

«L’èredelamultitude»

Colin et Verdier (2012) théorisent intelligemment cette évolution. Ces auteurs ontcompris avant beaucoup d’autres la nouvelle ère relationnelle dans laquelle nous a faitentrer cette utilisation massive et accélérée des nouvelles technologies, l’ère de lamultitude.Danscettenouvelleèrerelationnelle,chaqueindividupeutréellementjouerunrôle,l’horizontalitédescommunautésremplaceprogressivementou,toutaumoins,doubleleshiérarchiesorganisées.

Danscettenouvelleère, laconnaissancesediffusedifféremment,parcapillarité,dansdes organisations réticulaires au sein desquelles chacun a droit de cité, sur un pied detotaleégalité.

Danscettenouvelleère,lamultitudedes«gens»,citoyens,consommateurs,employés,existedésormaisetpeut fairepencher labalancedansunsensoudans l’autreselondesphénomènes de transmission inconnus jusque-là dans leur ampleur et leur rapidité, leurinstantanéitéparfois.

Certainesentreprisesréussissent,d’autresmeurent

Gilles Babinet, alors président du premier Conseil national du numérique, présentefinement, dans son livre L’Ère numérique, un nouvel âge de l’humanité, l’évolutionincroyable que sont en train de subir tous les secteurs de notre vie collective (Babinet,2014).

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Les entreprises, en particulier, vivent ces chocs de plein fouet.De nouveaux acteurs,énormes, tels que Google, Apple ou Amazon, des pure players nés avec le web,bousculent tous lesmarchés. Leur agilité se fondemoins sur leurs propres innovationstechnologiques(Applen’apasinventélesmartphone,nilatablette)quesurleurhabiletéremarquable à capter la valeur créée par les clients eux-mêmes (parmi les900000applicationsquifigurentaucataloguedel’AppStore,trèspeuontétécrééesparApple, la plupart sont réalisées par son écosystème externe) et à inventer les nouveauxmodes du management (transversalité, communautés créatives internes, liberté,autonomie,etc.)quileurontpermisd’attirerlestalentsdudigital,delesrecruteretdelesgarder.Leurscapitaux,colossaux,fontlereste…

Desentreprisesbienplusanciennes,bienancréessurdesproduitsphysiquesréussissentcependant, elles aussi, à opérer lemouvement et se retournent vers leurs communautésclients.NestléavecNespressonevendplusducafé,maisunartdevivreetdeconsommerautrement, etmêmeMichelin, pionnier et leader, ne vend plus seulement des pneus degrandequalité,maisuneexpérienceduvoyageplusagréable (l’applicationViaMichelinorganiseenlignetouslesaspectsdudéplacement:itinéraire,hôtels,traficentempsréel,météo, etc.).Lesentreprisespubliquesne sontpas en reste, laSCNF, laRATP,pourneciter qu’elles, font de considérables progrès.Monter dans son TGV sans billet (papiers’entend !), consulter son trajet demétro sur son écran, être informé en temps réel dutrafic. Air France et La Poste ne sont pas en reste… Ces entreprises décalentprogressivement leurs dispositifs d’innovation du produit vers l’expérience client.C’estl’expériencesensorielleprocuréeparleproduitquienfaitdésormaislaréussite.

D’autres entreprisesmeurentden’avoir riencompris.Kodak,marquemythiquede laphoto,adéposélebilanen2012fautedenepasavoirentendulanaturedisruptivedelatransition en cours. La Fnac, après avoir raté le virage de la dématérialisation de lamusiqueetlaisséAppleoccupercecréneau,serelèveheureusement.L’industriedulivre,lapresse,lesmédiastraditionnelssontmenacés.

Comprendre donc qu’il faut bouger, vite, et que nul secteur ne sera protégé. Etcomprendre que cette transition numérique est peut-être plus une opportunité qu’unproblème, qu’elle permettra demultiplier et resserrer les liens avec les clients, avec lescollaborateurs,aveclasociétécivile,sinoussavonsbiennousyprendre.

Oui, mais comment ? Par quel « bout » commencer ? Comment peut-on conjuguerautonomie et contrôle, innovation et pilotage des risques, ouverture et sécurité,transversalitéethiérarchie,ancienssystèmesetnouvellestechnologies?

LETEMPSDEL’ACTIONC’estuneidéefinalementtrèssimplequisurgit.Puisquenoussommesentrésdansl’ère

numérique, utilisons ses propres leviers pour effectuer nous-mêmes notre transition.Utilisonslaforcedelamultitude,commecelledelawebgénération,libéronslacréativitédenotre«multitude»,outillonsl’intelligencecollective,offronsdeslieuxàdenouvellescommunautés,pourqu’ellesportentcesgrandschangements.Donnonslesmoyensàtouslescollaborateursd’être,demanièrelargementdécentralisée,lechangement.

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PourSociétéGénérale,ledébutvisibleetsymboliquedelatransformation,ceseraPEPS,laparoleàsamultitude

PEPS(projetexpérimentalparticipatifetstimulant),unvraidéficulturel,managérialettechnologique, au pays de Descartes et de Vauban (pour ne pas citer Louis XIV etNapoléon!),àl’heuredel’hyperrégulationbancaire,unecontradictiondanslestermes!

148 000 collaborateurs, c’est finalement un bon début demultitude !En tout cas, cemoteurpuissantaucœurdel’organisation,vivant,dynamique,trèsattachéàl’entreprise,aura pour la première fois la possibilité d’exprimer demanière totalement libre et sansfiltre sa vision de l’avenir de la banque dans cette nouvelle ère digitale, aumoyen duréseausociald’entreprise(RSE),SGCommunitiestoutrécemmentmisenplace.

Trivial?Pasdutout.Noussommesalorsen2013.Ilfautunpeud’audacepourleverlesbarrières du passé qui surgissent à la première tentative : « Mais que vont dire lesmanagers?» ;«Quevontpensernosorganisationssyndicales?» ;«Mais imaginelesplaintesetlesrécriminationsdecescollaborateurslibérés?».

Unepoignéedevolontairesvisionnairesetcourageux(quejeremerciedufondducœurpour avoir tenté cette aventure avec moi) y croit cependant et monte cette premièreopération de coconstruction directe. Elle se déroulera pendant un mois, par remontéed’idéessurleRSE,selontroisgrandsthèmes,«client/team/tech»(commentlatransitionnumériqueimpacte-t-ellelarelationànosclients?commentimpacte-t-ellelesrelationsdetravail au sein de l’entreprise ? comment doit évoluer notre technologie à l’èrenumérique ?), sera animée par des community managers qui dégagent du temps pourl’opération.

C’est un vrai succès. Il y a tout juste quelques milliers d’abonnés sur le RSE aucommencement de l’opération.Nous réussissons à en attirer jusqu’à 15 000 pendant laduréedePEPS.Ilssontaujourd’huiplusde60000surleRSEdelabanque.

Desmilliersdeposts,delikes,autotalplusde1000idéesquiillustrentbienl’imagequenoscollaborateurs se fontde labanquededemain :unebanquesimple,agile,dansunecommunicationfacileettransparenteavecsesclientsetcapabledelaissers’exprimerenpermanencelacapacitéd’innovationdesescollaborateurs.

Aucune appréhension n’a été exprimée à l’occasion de ce challenge. Il n’a pas étébesoinderégulerlesdébats.Aucontraire,ontétéconstatésdesvisionsclaires,beaucoupde maturité, de responsabilité et d’engagement dans les prises de parole, beaucoupd’exigencesetbeaucoupd’enthousiasmeaussi.

Un événement, présidé par la direction générale, clôt PEPS et lui donne toute sonimportance symbolique. La banque est entrée « officiellement » dans la transitionnumérique. Ses collaborateurs ont non seulement fait la démonstration qu’ils avaientcomprislestransformationssociétalesàl’œuvre,maisaussietsurtoutqu’ilsvoulaientenêtredespartiesprenantesfortesettrèspositivementcontributives.

Puisvientledéploiementaucœurdel’entreprisedesnouvellestechnologiespourtous,leprogrammeDigitalforall

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L’intelligence collective, ça marche donc ! Il faut continuer de « jouer » avec lesphénomènesencours,nageraveccenouveaucourantplutôtquedelecontrer(«Laissonstomber la boxe… choisissons le judo, dis-je àmes équipes. », une autre façon de dire«Faitesl’amour,paslaguerre…»!).Latransitionnumérique,c’estlacapacitédonnéeàtousdes’exprimer,decoconstruire,d’échangerauxtraversdesnouveauxoutils.Unvrairêvedepost-soixante-huitard…

Maispourquecetteintelligencedelamultitudepuisses’exprimer,illuifautlesoutils!Difficile d’accélérer la transition numérique tant que les collaborateurs restent équipésd’ordinateurs fixes, prisonniers d’applications lourdes et anciennes, interdits d’accès àInternet pour des raisons de sécurité, donc privés de réseaux sociaux et de l’incroyablesourcedeconnaissancesqu’estdevenuleNet.CommentprétendreresterdanslacourseduXXIe siècleavec lesGAFA(Google,Apple,Facebook,Amazon)etautresstart-updecemondeencontinuantàlutteraveclesoutilsdusiècleprécédent?

Digital for all, c’est le nouveau pari que tente Société Générale en 2014. Alors quel’entreprise s’apprête à fêter ses cent cinquante ans, la direction décide d’équiper lamajoritédescollaborateursdugroupedetablettestactiles,formessymboliquespuissantesdufutur.

C’estunerévolutionmanagériale,ausenspropredutermequenousenclenchons,sansquetousréalisentlaprofondeurduchangementquicommence,unvéritableretournementculturel.Lemessageque l’entrepriseadressedésormaisàsescollaborateursestceluidel’ouvertureaumondeduNetetdesréseaux,quandl’accèsleurenétaitinterditjusque-là.Nonseulementlescollaborateursontledroitdésormaisdenaviguerpendantlesheuresdebureau,maisaussiilsenontmêmeledevoir!Quelchangement!

C’est une gageure technologique aussi ; ces tablettes devront permettre auxcollaborateurs d’accéder à la fois au monde protégé de Société Générale et au mondeouvert de l’Internet, sans mettre en danger la sécurité de l’entreprise. Aucun outil, niaucun grand ponte de l’informatique mondiale ne savent encore proposer ce type desolutionsurétagère.Alorsl’entrepriseinnoveenconstruisantdanscepetitobjetlesocletechniquequivaluipermettrededonnercorpsàuneambition:unaccèsàlafoisouvertsurlemondeettotalementsécuriséàl’entreprise.

Danslafouléeestmisenplacelestoreinternedanslequelsontencoursdedéploiementparlescollaborateurseux-mêmesplusd’unecentained’applicationsàcejour.Lewifiestdéployédans l’ensembledes implantations.SociétéGénéraleconstruituncloud interne,backbone d’infrastructure incontournable à la digitalisation des entreprises. Elletransformesesméthodesinformatiques,lesméthodesagiles, lesméthodesdecontinuousdeliverygagnentlargementduterrain;elleapprendlesarchitecturesouvertes(labankasa platform et le mode saas4), les nouveaux outils de big data et bientôt l’intelligenceartificielle, le deep learning, la technologie blockchain ; le cœur technologique del’entreprisedoitbouger…vite.

C’est une prouesse en matière de gestion du changement ! Pour avancer, il fautconvaincre, convaincre les financiers des retours potentiels, convaincre les juristes, les

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régulateurs,rassurerlesmanagers,travaillerlesressourceshumaines,travaillerleterrain,expliquer,montrer,démontrer,raconter…unénormetravaildegestionduchangement…leplusexaltantdetouslesjobs.

Cetravailestconduitparunepetitecellulequi,àl’instardecequenousobservonsdansles start-up, fonctionne en pizza team. Y sont regroupées des compétencescomplémentairesen termesdebusiness,de technologiesde l’information,demarketing,d’innovations,dejuridique,decommunication.Lesmembresdelacelluleprennentleursbâtonsdepèlerin,sur le terrain,dans l’ensembledugroupeetconvainquentpetitàpetitquecetoutilnouveau,décriépar lesuns«parcequecen’estpasApple»,pard’autresparcequ’«onn’enapasbesoin»,pard’autresencore«parcequec’esttropcher»pourfinalementouvrirlavoie.

90 000 des collaborateurs du groupe seront équipés d’ici à la fin de 2015. La petitetablette a fait du chemin. Elle a fait tomber beaucoup de barrières mentales auchangement.Désormais, lesmétiers accélèrent ledéploiementd’outilsplus sophistiquéspour leurs conseillers qui sauront échanger demanière plus efficace avec leurs clients,utilisantlesmêmesoutilsqu’eux,dansunmode«côteàcôte»plutôtque«faceàface».Désormais, l’utilisation du réseau social en mobilité est possible et nos collaborateurscommencent à trouver sérieusement le chemin de communautés collaborativeshorizontalesquimarquentledébutdudésilotagedel’entreprise.

Demain, le«Bring your own device » sera la règle dans l’entreprise et gageons quenous ouvrirons notre store aux clients, qui créeront avec nous le monde dont ils ontbesoin,etpourquoipasàlamultitudequiserasourcedecritiquesetd’idées…

Etlecœurphysiquedel’entreprise?

Il faut observer à quel point la relation numérique amodifié la relation physique autravail. Celle-ci demeure nécessaire, mais elle change profondément de sens. Venir aubureau lematinpourseplonger la têtedans l’ordinateuret travaillerau traversdecettemachine,installéseulderrièresatableou,pire,aumilieud’unopenspacesansâme,n’aplusdesens.

Cetravailaveclamachinepeutêtrefaitdésormaisden’importeoù,àn’importequelleheure, dans les conditions qui conviennent le mieux à chacun. Il est possible decommuniqueravectouteslesapplicationsdumondeetaveclemondeentier,sansbougerdechezsoi.Mieuxmême,sanspolluerlaplanète…

Venir au bureau doit procurer autre chose. Ce besoin de chaleur, d’échange, decoopération, ce sont les nouveaux lieux de travail qui y répondront. Pour SociétéGénérale,ceseraLesDunes,àl’estdeParis.5000collaborateursytravaillerontd’iciàlafinde2016.Ceseraletechnopoledugroupe.

Cet immeuble«organique»et sonarchitecturehorizontale,quicontrasterontavec laverticalitédestoursdeLaDéfense,favoriserontavanttoutlesespacesdecoopération.Cesera un lieu de vie où l’onvient pour travaillerensemble, un lieu où ces communautéshorizontales,multihiérarchies,multicompétences,pourronts’assembleretsedésassemblerfacilement à l’occasion de chaque nouveau projet, où, espérons-le, le temps perdu à la

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lutte territoriale, propre à toutes ces grandes organisations humaines, l’affrontement dessilos,céderalepasàl’intelligencecollective.

Pour relever le défi d’un tel changement, le pilotagemême de ce projet gigantesque(200 000m2 de bureaux) intègre les concepts et les méthodes de l’ère numérique : lacocréation,lacollaborationetlacoopération.

Lesutilisateursfutursdubâtimentontétéplacésaucentredelagouvernanceetontmisenplacedescommunautésquiontdessinéaufildesmoisl’espritetl’organisationdulieu.Duzoningaudesigndesespacesenpassantparlechoixdeséquipements,toutestpasséparleursmains,unprocessuscertesunpeudéstabilisantpourlesmaîtresdel’immobilier,habituésàplusdehiérarchiedanslaprisededécisions,maisinfinimentcréatif.

Cet immeuble, totalement connecté, est en traindeprendre formeàValdeFontenay.Nouslevoulonsavanttoutchaleureux,parsonaménagement,sescouleurs,latexturedesmatériauxquisontchoisis,avecdeslieuxdevieoùl’onéchange,desjardinsoùl’onpeutsepromener,del’espacepourjoueretsurtoutpourinnover,1000m2dédiésauxstart-upinternesetexternesquiviendronts’yinstaller.

RESTERÉVEILLÉSParce qu’une formidable vague d’innovations continue de déferler, il est tout à fait

probable que ce que nous avons déjà vu de la transition numérique ne soit rien encomparaisondecequenousverronsdemain.Nousdevonsresterattentivementéveillés.

L’innovation,c’estuneobsessiondel’entreprisedepuistoujours.C’estdansl’ADNdeces entrepreneurs fondateurs de Société Générale en 1864. Mais l’innovationd’aujourd’hui n’est pas celle d’hier. Ses leviers ont changé, l’innovation se déporte, duproduitversl’expérienceclient,del’innovationincrémentaleàl’innovationderupture,del’innovation introvertie à l’innovation ouverte et partagée. Surtout, l’accélération del’innovationestfascinante.Ilfauts’adapter.

FrédéricOudéaenfait«unecausenationale»pourlabanqueetseratrèsclairtoutaulong de ses interventions « innover ou mourir ». Nous mettons en place en 2014 undispositif d’open innovation, une innovation ouverte qui permet à chacun, au cœur del’entreprise,deresterconnectéàl’évolutiondumonde.

Lechallengeiciest important.Lesgrossesorganisationsontunpenchantnaturelàneregarderqu’àl’intérieurd’elles-mêmes,àseconsidérerimmortelles,supérieures.SociétéGénérale n’échappe pas à ces travers. Le dispositif multiforme qu’elle met en placeconsisteàdonneràsescollaborateursl’opportunitéd’échapperàlapuissancedeladoxainterne.

Enl’espacedequelquesheures,dequelquesjours,dequelquesmois,nousvoulonsleurdonner la possibilité de penser sous d’autres angles, de se décaler, d’innover. MichelSerresencore,danssontoutdernier livre,ditquepenserc’est innover(penservraiment,pasreproduire…)(Serres,2015).Nouscherchonsdoncàpenser.

Grâceàdes lieuxdifférents, à l’instardupremierquenousavons investi, lePlayerà

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Paris,aucœurde laFrenchTech,associéàdes think tanksd’unnouveaugenrecommel’Institut des futurs souhaitables ou des artistes numériques sans pinceaux, ni papiers,commeBright,nousnousentraînonsàpenser.

Grâceàl’implantationdanslesgrandsécosystèmesmondiauxd’innovation,laSiliconValleyévidemment,Israëletsurtoutl’Indeàl’effervescencetechnologiqueincroyable,oùnous sommes implantés depuis longtemps (effervescence d’une jeunesse hyperactive ettrèsbienformée,start-upquipullulent,jeunessedel’Indequiaideranotrevieuxmonde).

Grâceauxcommunautés transversesquenousencourageonssur les sujetsdedemain,blockchain,bigdata,deeplearning,etc.

Nous nous entraînons à penser.Grâce à l’ensemble de ces dispositifs, nous espéronsdiffuserdusavoir,desidées,maissurtoutdonnerconfianceàtouslescollaborateursdansleurcapacitéàinnover,àtransformernotremonde.

L’aventurebiensûrnefaitquecommenceretnecomportepasquedupositif

Commedisent lesAnglo-saxons, ilexisteaussidesdownsides.Aucunchangementnese fait sans abandons.Pour labanque, cesdeuils successifs dupassé, c’est une relationphysique aux clients, dans l’intimité des agences, qui se conjugue désormais aunumérique ; ce sont des modes de fonctionnement internes très hiérarchiques, maisfinalement très rassurants parce que simples et lents, qui se transforment en des liensmultipolaires,horizontaux,hyperrapides;cesontdesmilliardsd’eurosinvestisdansdessystèmes d’information, ces dernières années, qui ont apporté les réponses aux besoinsd’hier,maispasàceuxdedemain.

Cettetransitionpeutêtrevécuedifficilementetêtresourcedequestionnementsetnousdevrons en tenir compte. Certains métiers évolueront drastiquement ; des compétencesdurement acquises des années durant devront être enrichies de nouvelles compétences,qu’il faudra acquérir parfois difficilement. Le bureau fermé, que l’on n’aura plus, latranquillité d’espaces privés perdue par la liaison permanente avec son universprofessionnel, ces outils qui changent chaque jour, ces réseaux sociaux auxquels il fautconsacrer du temps, en plus de tout le reste, dans une compétition mondiale que cesmêmesoutilsrenforcent.

L’adaptation peut sembler extrêmement dure. C’est pourquoi la responsabilitémanagériale est immense, responsabilité de montrer la ligne d’horizon, le chemin, etd’accompagnerl’ensembledescollaborateursdanscestransformations.

Nousdevonsavoirconfianceenlajeunesse,aumonde,auxhumainsquenoussommespourfairequecequiseconstruitsoitbeau,plutôtquelaid.Notreaventurenumériquenefaitquecommencer.

Libérerl’intelligencecollective,ladoterdesoutilsd’aujourd’hui,luioffrirdenouveauxespaces demain, lui permettre d’innover, il a fallu tout cela et de nombreuses autresinitiativesencorepourlancerSociétéGénéraledanssatransitionnumérique.Maiscelle-ciestdésormaistrèslargementengagée.

Société Générale est une vieille organisation pleine d’avenir, forte de la puissance

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collective de ses collaborateurs, du soutien toujours énergisant de ses clients et de sesactionnaires.Elleestunorganismevivantquiafaitlechoixdecomprendre,d’accepterlesnouveaux défis et de se transformer profondément parce qu’elle est convaincu de sonutilitésociale.C’estsonhistoire…

BIBLIOGRAPHIEBABINETG.(2014),L’Èrenumérique,unnouvelâgedel’humanité,LePasseurÉditeur.

COLINN.etVERDIERH. (2012),L’Âgede lamultitude,ArmandColin, (2e édition en2015).

SERRESM.(2012),Petitepoucette,LePommier.

SERRESM.(2015),LeGaucherboiteux,LePommier.

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TECHNOLOGIEETTRANSFORMATIONDESSERVICESBANCAIRES:L’EXEMPLEDETECHNOVISIONDECAPGEMINI

ANDRÉCICHOWLAS*1

LESSERVICESBANCAIRESÀLACROISÉEDESCHEMINS:RUPTUREETDÉSINTERMÉDIATIONLe secteur bancaire a rencontré des défis sur de multiples fronts. Côté métier, les

banquessontaffectéespardesfacteursmacroéconomiquesetdesexigencesencapitauxetcôtétechnologique,parunenvironnementenconstanteévolutionaveclaproliférationdenouvelles technologies.Cesdéfisn’ontpasseulement impactélepotentieldecroissancemétierdesbanques,maisilsontaussientraînédeschangementsdanslamanièredontlesinteractionsontlieuentrelesbanquesetleursclients.

SelonleWorldRetailBankingReport2015,laqualitédel’expérienceclientstagneetlafidélitéde laclientèlesedétériore,cequiaun impactdirect sur le résultatdesbanques(CapgeminietEfma,2015).Deplus,lepourcentagedeclientsayantvécuuneexpériencenégative a augmenté dans chaque région. Pour la première fois, l’Europe de l’Ouestaffiche les plus hauts niveaux d’expérience négative. Les banques luttent pour seconformerauxattentesgrandissantesdesclients,lesquellessontsuscitéespardenouveauxentrants,banques,entreprisesdetechnologieetFinTech.

Dans leurévolution, lesbanquesont intégrédifférentes technologiespourfairefaceàl’évolutiondeleurenvironnement.Cependant,cestechnologiesétantlargementdenaturestratégique,ellesontmenéàl’accumulationdesystèmesaudétrimentdel’agilité.Faceàuneconcurrenceagiledansdifférentsdomainesbancaires,particulièrementlespaiementset lesprêts, lesbanquesnepeuventplussereposersurleurtaillepoursedémarquer.Lamenaceestamplifiéepar leschangementscomportementauxdesclients,quirecherchentdesoffresintuitiveset innovantes,etparl’importancecroissanteaccordéeàl’innovationetàlatransformationdusecteurparlesrégulateurs.Enréalité,quatredirigeantsdebanquesurcinqperçoiventleursclientscommeétantdéjààl’aisepourtraiteravecdesentreprisestechnologiques ou des acteurs d’Internet pour leurs services bancaires (Capgemini etEfma,2015).

Lesinnovationsetlesrupturestechnologiquesavancentàgrandspas;ceschangementsrapidesnécessitentuntravailderéflexionenprofondeuretréguliersurl’introductiondenouvellestechnologies.Pourrépondreàceschangements,ilestnécessaired’évaluerleurimpactsurl’entreprise,cequirequiertnonseulementunrepositionnementdel’entreprise,maiségalementuneréorganisationpourqu’ellecorrespondeets’adapteàl’environnementbancaireenconstanteévolution.

Avec la prolifération des technologies, les « technologies de l’information » sontdevenues très recherchées sur le marché. Nous y sommes tous confrontés de la mêmemanière. Les clients sont de mieux en mieux informés, de plus en plus connectés etresponsablesgrâceaux terminauxetauxapplicationsqu’ilsutilisentauquotidien.De lamêmemanière,lesentreprisesseconvertissentaunumériqueetlesentreprisesspécialiséesdans la technologie utilisent une vaste gamme d’outils, de plates-formes et autres

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technologiespourproposerdessolutionsnouvellegénération.

Comme nous devenons de plus en plus familiers avec la technologie à traversdifférentes facettes de nos vies professionnelles, personnelles et publiques, les banquessontobligéesdeprendreencomptelatechnologieauseindeleursstratégiescommercialesetd’enfaireusagepourconserverleursclients,leursconsommateurs,leurspartenairesetleurs employés. À l’ère du numérique, il est désormais essentiel de concevoir desprogrammesetdessolutionssolidesetpertinentspours’adapteraumonderéeletréussirl’intégrationtechnologique.

Àmesurequelabanalisationdessolutionsaugmentedanslesecteurbancaireavecdesrégulateurs se concentrant sur la standardisation, la différenciation concurrentielles’estompe rapidement. Les tarifs sont toujours un facteur dominant, mais ils sontsusceptibles de perdre leur importance aux yeux des clients. De plus, la compétitioncroissanteaveclesFinTechetlesentreprisestechnologiques(lesdigitalnatives)auxcoûtsstructurelslargementinférieursetauxpratiquesessentiellementorientéesversleclientestsusceptibledeporteratteinteaumondedesbanques,larelationàlaclientèlemenantàunedésintermédiation dans la chaîne de valeurs bancaires. Cette compétition oblige lesbanques à adopter les technologies numériques pour soutenir leurs processus detransformation, avant que les FinTech et les entreprises de technologie n’atteignent unpointcritiquedeperturbation.

Tandisque lesbanques s’efforcentde se transformerpourprospéreraucœurdecetterévolution numérique, elles doivent également disposer des bons outils et ne pas secontenter de se familiariser avec la technologie, mais comprendre les changementstechnologiquesetleurimpactsurl’entreprise.

TECHNOVISION:VECTEURDELATRANSFORMATIONDESSERVICESBANCAIRESTechnoVision répond aux besoins des leaders en technologies métier. C’est une

ressourcenonsectorielledeCapgemini,quifournitlesoutilsetlesconseilsnécessairesàlatransformationnumérique.LestechnologiesabordéesparTechnoVisionsontstructuréesen sept groupes, lesquels sont ensuite divisés en éléments constitutifs pour aider lesleaderstechnologiquesàbâtiruneentreprisenumériqueefficace.

Schéma

StructuredeTechnoVision

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Source:CapgeminiTechnoVision.

Lepremiergroupe,«conceptionnumérique»,estutilisépourexpliquer l’écosystèmenumériqueenpleineévolutionquiestsocial,ouvert,axésurleserviceetdanslecloud.Cegroupe présente l’environnement dans lequel les applications et les systèmesd’aujourd’huisontconçus,développésetexécutés,fournissantseptprincipesàsuivreparles banques pour la conception de leur technologie. Les six autres groupes, de natureessentiellement opérationnelle, aident les entreprises à passer de la conception àl’exécutionetsontregroupésentroistandems.Ilspeuventêtrevisualisésdupointdevuedu système ou des individus. Ils fournissent une structure et assurent la pérennité auxprestataires de technologies et aux banques pour relever les défis d’un monde enperpétuelleévolution.

Laconceptionnumérique

Àmesure que les banques adoptent les technologies numériques pour répondre auxbesoinsdesclientsouàleurspropresbesoins,ellesabordentlatransformationnumérique.Cependant,raressontlesbanquesquiréussissentàchangerl’approchedeleurtechnologieafindelimiterlenombredeprojetsouprogrammesabandonnésetnonpertinentsdansunpaysage technologique et métier évoluant rapidement. Le groupe « conceptionnumérique»estcomposédeseptprincipesdeconceptionnormatifssurlesquelslabanquedevrait s’appuyer pour concevoir ses technologies et se convertir totalement aunumérique. Compte tenu de l’importance de la technologie et de la transformationnumérique au sein des entreprises, ce groupe est devenu le thème prédominant denombreuses discussions. Individuellement, ces sept principes ont du sens pour lesentreprises,maisensemble,ilsleurpermettentdechangerradicalementleursperspectivesencequiconcernel’activité,lesclients,lesapplicationsetl’intégrationtechnologique.

À l’heure où les clients adoptent les canaux numériques et gagnent en usage, il estessentielpourlesecteurbancaired’améliorer l’expérience.Deplus,aveclaconcurrencecroissantedelapartdesacteursnontraditionnels(lesdigitalnatives), lesexigencessontde plus en plus élevées en matière de service client, ce qui peut avoir un impactconsidérable pour les banques en matière de rentabilité. Au regard des défis querencontrentlesbanques,ilnesuffitplusd’opérerdeschangementsprogressifsadhoc, ilest essentiel de repenser la stratégie et l’intégration technologiques afin de fournir une

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meilleure expérience client, de rationaliser les activités et, dans certains cas, de seréinventer.

Tableau1

Élémentsconstitutifsdelaconceptionnumérique

Source:CapgeminiTechnoVision.

Encadré1Laconceptionnumériquedanslesecteurbancaire

Intensitédunumérique

Citibankpossèdeunmoteurdeveilleéconomiquedequalitésupérieure,quipermetauxclientsd’exploiterlesrapportsstandardsdeCitioudecréerdesrapportspersonnalisés.Labanque a également développé un cloud interne pour permettre des requêtes en libre-service, leur fourniture et leur facturation automatisées. Elle utilise également sa pageFacebookpouraccroîtresonactivité(Maitreyeetal.,consultéenoctobre2015).

Quelleestvotrehistoire?

Knab, une banque uniquement en ligne, a l’intention de placer le client au centre detoutes ses activités grâce à des capacités numériques avancées. Elle a intégré desfonctionnalités numériques complètes, des médias sociaux et des outils de gestionfinancièrepersonnelspourrendrelesclientsplusautonomes(JegheretGreer,2015).

Businessmonamour

mBankestunebanquenumériquemobile,dotéed’unebonneconnaissancedesclientsetd’outilssociauxaucœurdesastratégie.Parailleurs,elleanumérisésesprocessussous-jacentspourassurerl’automatisationetlasimplificationdesinteractionsenligneaveclesclients(Marous,2015;mBank,2014).

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Bonriskappétit

UniCreditdéveloppeunmodèlesolidepourgérerd’importantsvolumesdedonnéeslorsdesesopérationsdegestiondesrisques.L’entrepriseutiliseunlogicield’aideàladécisionet d’analyse prédictive de Fico pour analyser d’importantes quantités de données, afind’améliorerlesdécisionsdeprêtauxclientsetl’optimisationducapital(JegheretGreer,2015).

Dutrainauscooter

mBankasubiunprogrammedetransformationagileenutilisantuneapprocheitérative,progressiveetàmultiplesversions.Elleadécidédelancerdesservicesdebanquedirecteavecuneapprochedemiseenmarchécentréesurlenumérique(Edmondson,2015).

Plate-formen°3

BBVA, via sa structure d’innovation ouverte, collabore avec des entrepreneurs, desdéveloppeurs, des étudiants, des clients et des employés. La plate-forme ouverte estconçuecommeunepasserelledecollaborationpourpermettreàdestiercespartiesdecréerdenouvellessolutionsdemarchéoud’élaborerdenouveauxproduitsetservicespourlabanque(developers.bbva.com,consultéenoctobre2015;Jimenez,2014).

Piratermonmodèled’entreprise

LBBWs’estassociéàKfWpourélaborerunenouvelleplate-formenumériqueappelée« on-lending online 2.0 ». Il s’agit d’une plate-forme de financement bonifié. Ainsi,LBBW,aveclesautresbanquesparticipantes,auraunaccèsbienplusrapideetfacileàdesprêtsbonifiésdelapartdeKfW(KfW,2015).

Premiertandem:lesfondationsdel’entreprise

Le premier tandem concerne les groupes « infostructure invisible » et « applicationslibérées ». Ce tandem aborde les technologies sur lesquelles s’appuient les entreprisessouhaitantlancerleurtransformationnumérique.

Legroupe« infostructure invisible » concerne le développement d’infrastructures, cequinécessiteuneréflexionminutieuseetappropriéeetoffreunaccèsfiableetsécuriséauxdonnées et aux services d’application dans les nouveaux et les anciens modèles dedéploiement. De plus, il assure de pouvoir fonctionner de façon homogène avec lestechnologiesinnovantesetexistantesaucoursdesannéesàvenir.Ils’agitdedévelopperuneinfostructurequiestinvisiblepourleséquipesinformatiques,impliquantdegommerlacomplexitétechnologique,toutenrestantcohérenteetenayantlapossibilitédefournirdes informations pertinentes, l’accent étant donc toujours mis sur les résultatsopérationnels,cequicompteleplusdansl’organisation.Lesecteurbancaireestl’undesexemplesprincipaux,soulignantlebesoindeseconcentrersurl’infostructureinvisible.IlconviendraitdecitericilesinitiativesCloudFoundrydanslemondebancairepermettantd’utiliser des logiciels libres en toute sécurité. De même, une technologie dite de« container » émerge qui autorise, d’une part, à construire des applications enmicroserviceset,d’autrepart,àleslibérerdessystèmesd’exploitationenstandardisantàl’extrêmelesadhérencesaveclesressourcesplate-forme.

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Avec les systèmes existants et l’utilisation continue de nouvelles technologies, lesbanquesontcrééunempilagedesystèmeschronophagespourlesemployésetonéreuxdupointdevuemaintenance.Selon les estimationsde Jegher etGreer (2015), lesbanquesconsacrentplusdestroisquartsdeleurbudgetIT(informationtechnologies,technologiesdel’information)totalàlamaintenance(Finextra,2015).

Tableau2

Élémentsconstitutifsdel’infostructureinvisible

Source:CapgeminiTechnoVision.

Encadré2«Infostructureinvisible»danslesecteurbancaire

LEGOvirtuel

BankofAmericaexploredenouvellespistesconcernantlareconceptiondesescentresdedonnéesenutilisantunearchitecturecloudprivée.Parexemple,labanquepeututiliserdes ordinateurs génériques contrôlés par logiciel qui peuvent être configurés pour agircomme appareils de stockage de données un jour et comme serveurs le lendemain, sinécessaire(Murphy,2014).

Optonspourlephysique

LaStateBank of India utilise des capteurs pour gérer à distance ses distributeurs debillets surveillant les lecteurs de cartes, le stock d’espèces et l’alimentation électrique.Touslesincidentssontimmédiatementnotifiéspourrésolution(Vaitheesvaran,2015).

Développer,produire,exploiter,recommencer

Union Bank a adopté une approche DevOps pour son développement logiciel etdésormais,labanqueestcapablederéaliserdeuxàtroisfoisplusdetestsdanslamêmepériodeetderéduirede80%lecoûtpourchaquetest(Greengard,2014).

Uneorchestrationsimple

INGDirectamisenplacele«systèmezerotouch»,quia transformé labanque tout

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entièreenuneplate-formecloudprivée, flexibleetautomatique.Lasociétéaconçuunesolution d’orchestration en collaboration avec de multiples fournisseurs pour unfonctionnementsansheurtsurlecloud(DimensionData,2014).

QueferaitAmazon?

Bankinter, une banque d’entreprises en Espagne, a utilisé Amazon Elastic ComputeCloud(AmazonEC2)pourréalisersonapplicationdesimulationderisquedecrédit.Cetteplate-forme possède une puissance informatique souple et illimitée et est donc parfaitepour le processus de simulation de risques complexes de la banque (aws.amazon.com,consultéenoctobre2015).

Le groupe « applications libérées » concerne la rationalisation des applicatifs d’uneentreprise qui s’est largement normalisée et automatisée. Cela permet aux banques decréer une différenciation concurrentielle en gagnant en agilité, en perspicacité et enréactivitéauxpointsclésdesmétiers,etautantquenécessaire.Cependant,c’estrarementle cas avec les sociétés, et notamment les banques, qui ont créé des applications poursatisfairedesexigencesmétierenperpétuelchangement.Lepatrimoineapplicatifatteintun volume limite et avec l’émergence des technologies de rupture ou nécessaires àl’innovation, il est urgent pour les banques de prendre des mesures radicales pourstandardiseretsimplifierleursapplicatifs.

Tableau3

Élémentsconstitutifsdesapplicationslibérées

*Applicationprogramminginterface(interfacedeprogrammationd’application).

Source:CapgeminiTechnoVision.

Encadré3«Applicationslibérées»danslesecteurbancaire

Toutdansuncatalogue

WellsFargoamisenplaceunnouveauCRMcloudoffrantàsesemployésunevisionunique du client et favorisant la communication interéquipes afin d’harmoniser

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l’expérienceclient(salesforce.com,consultéenoctobre2015).

Renouveaugrâceaucloud

National Australia Bank (NAB) a commencé la migration de toutes ses anciennesapplicationssurleclouddanslecadredesonplandemodernisationsurdixansafindeseconvertiràsanouvelleplate-formebancairenextGen.Elleaaussichangésonportailenligne NABConnect pour adopter une solution cloud privée fonctionnant à partir dunouveaucentrededonnéesDigitalRealtydelabanque(Coyne,2014).

Entrepriseélastique

Le noyau bancaire deMetro Bank fonctionne sur unmodèle de logiciel en tant queservice,danslequelsesapplicationssonthébergéesparunfournisseurtiers.Celaapportede la flexibilité à la banque pour accroître ses capacités en fonction de la demande etdévelopper rapidement de nouveaux services en utilisant une architecture ouverte(temenos.com,consultéenoctobre2015).

ÉconomieAPI

La banqueFidor a développé un logiciel bancairemodulaire appeléFidorOperatingSystem,qui fournitdesAPIauxdéveloppeursd’applicationsetdeservicesetpermetdeconnecteretdedévelopperdenouveauxproduits.Labanquepeut intégrerdesoffresdetierces parties en fournissant une infrastructure ouverte et développer des offresnumériquesinnovantespourdiversesactivitésbancaires(Skinner,2015).

Applissansapplis

BNPParibasachoisiZendsolutionspourdévelopper l’intranetde labanque, lessitesinternetdesdivisionsetplusdeseptcentsapplicationsdeservicesbancairesetfinanciersenunefractiondutempsetducoûtquiauraientéténécessairesenutilisantdessolutionsprécédentes(zend.com,consultéenoctobre2015).

Deuxièmetandem:lierlessystèmesetlesindividus

Cetandemtraitedestechnologiesrequisespourcréerdespasserellesentreleslogicielset les systèmes, d’une part, et les utilisateurs finals, d’autre part. Il est composé desgroupes«exploiterlesdonnées»et«processusàlavolée».

Le groupe « exploiter les données » traite de l’exploitation des données demanièreoptimale, pour obtenir des informations pertinentes génératrices d’opportunitéscommerciales.Àmesurequelesentreprisesadoptentlestechnologiesnumériques,lesfluxdedonnéesaugmentent : ellesdoiventdonc s’assurerdepouvoirgérer cesvolumes.Laplupart des sociétés se rendent déjà compte de la valeur des données et font de latransformationdesdonnées l’unede leursprioritésnumériques absolues.Cependant, ungrandnombredecesinitiativesnevoientjamaislejourounepermettentpasd’exploiterlesdonnéesdemanièreoptimale.

Les banques disposent déjà de quantité de données considérables, qui ne fontqu’augmenteravecl’adoptiongrandissantedescanauxnumériquesetl’arrivéedesmédiassociaux. Cependant, très peu de banques ont réussi à exploiter tout le potentiel des

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analyses pour créer de la valeur ajoutée.Ce défi revêt une importance cruciale, car lesbanques font face à de nouveaux entrants qui, eux, utilisent les données pour créer demeilleurs produits et services tout en proposant un niveau de service supérieur, ce quiconduit à une importante différenciation concurrentielle. Les banques doivent modifierleurdynamiqueetpasserde la collecte à l’exploitationdedonnéespour enextrairedesinformations.Celarequiertnonseulementdesetournerverslesanalyses,maiségalementde gagner en agilité et d’établir des relations étroites entremétier et informatique.Destechnologiescommel’analysedubigdataontpermisdetransformerlamanièredontlesbanquesutilisentlesdonnéespouraméliorerlesrésultatsdel’entreprise.

Tableau4

Élémentsconstitutifsdel’exploitationdesdonnées

Source:CapgeminiTechnoVision.

Encadré4«Exploiterlesdonnées»danslesecteurbancaire

C’estmoiquiailaplusgrandebasededonnées

L’équipe d’analyse de KeyBank analyse ses données de transaction pour mieuxcomprendrelesclientsetleuroffrirdesconseilsdifférenciésetciblésquicorrespondentàleurs besoins. Des décisions stratégiques ont été prises en se basant sur les résultatsanalytiquesetlabanqueaéconomisé35M$enl’espaced’unan(Groenfeldt,2013).

Entempsvraimentréel

Bank of China contrôle le flux de clients des agences en temps réel, pour dévier defaçonproactivelesclientsverslesagencesvoisinesmoinsoccupées.Labanqueenregistreles comportements des utilisateurs de manière anonyme à partir de tous les médiasinteractifsdel’agenceetlesanalysepourentirerdesinformations(Bilick,2014).

Maintenanttumevois

LafilialeaméricainedegestiondupatrimoinedeRoyalBankofCanadaaremplacéuneapplicationd’analysededonnéesinterneetpropriétaireparTableau.Tableautransmetaux

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responsables les importantsvolumesdedonnéesconcernant lasatisfactiondesclientsetlesperspectivesd’activité.Celapermetdevisualiserlatendancedecesdonnéesaucoursdesannéesprécédentes,dansunformatfacilementlisible(DeGuerre,2013).

Desdonnéesdistinctesréunies

RoyalBankofScotlandacollaboréavecleréseaudeluttecontrelafraudepeer-to-peerd’Ethoca,quicollectelescoordonnéesdesclientsàpartirdebanquesetdecommercesenligne,notammentlesinformationsdecartebancaire,lesadressesIPetlesadressesemail.Il analyse toute activité frauduleuse à partir des données collectées, par exemple unfraudeuràlacartedecréditquiutiliseconstammentlamêmeadresseIP(Clark,2008).

CognitoErgoSum

Utilisant des applications de services financiers basés sur l’informatique cognitive,ANZ Bank (Australie) et CaixaBank (Espagne) fournissent des propositions et desconseilsd’investissementà leursclients,eneffectuantdes recherches rapidesauseindeleursdizainesdemilliersd’investissementspotentielsetensuggérantlesoptionslesplusappropriées en fonction des aspects du profil du client, à savoir l’âge, la situationfinancièreetlatoléranceaurisque(Henschen,2015).

Legroupe«processusàlavolée»détaillelesprocessusàmettreenœuvrepourobtenirla flexibilité nécessaire pour répondre aux contraintes réglementaires de l’organisation.Les tendances et les moteurs du processus à la volée reposent sur l’alliance dudéveloppement logiciel personnalisé et des processus, des règles et des technologies degestion des événements en créant une plate-formede traitement proposant de nouvellesméthodes de travail optimisées. Cet aspect est essentiel pour le secteur bancaire : lesbanques cherchent en effet à fournir des services personnalisés à leurs clients dans unenvironnementréglementairestrict,à l’heureoù lesFinTechproposentdesservicesplusintuitifsetsimplesàutiliseretsontenpassederedéfinirleserviceauclient.

Tableau5

Élémentsconstitutifsduprocessusàlavolée

Source:CapgeminiTechnoVision.

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Encadré5«Processusàlavolée»danslesecteurbancaire

Touteunegammedeprocessus

EnTurquie,Ișbankalancéunprogrammedetransformationd’entreprisepouraméliorerplusdecinqcentsprocessusopérationnels.Àtraversceprogramme,labanqueaaméliorél’efficacitédesprocessusde30%à50%(pega.com,consultéenoctobre2015).

Leprocessusestlanouvelleapplication

ChangHwaCommercialBank a déployéMisysFusionRisk pour renforcer sa gestiondes risques de crédit. En l’espace de quelquesmois seulement, la banque a accéléré leprocessus de comptabilité de fin demois pour les unités opérationnelles de 50% et aréduitdetroisheureslaproductionderapportsVaR(valueatrisk),passéededixheuresàseptheures(misys.com,consultéenoctobre2015).

Co-processus

La communauté Barclaycard Ring permet aux clients de donner leurs idées sur lesproduitsetlesprocessus.Lesavisdelacommunautésontégalementintégrésauprocessusdedécisiongrâceàunsystèmedevotes(barclaycardring.com,évaluéenoctobre2015).

Antisilos

LegroupeANZarécemmentchoisidemettreenplacedessolutionsquipermettentderéduireletempsnécessairepourcalculercertainesopérationsdeprêt,passantdeplusieursheuresàmoinsdetrenteminutes.Libéréesdecestâches,leséquipespeuventseconsacrerauxclients(misys.com,évaluéenoctobre2015).

Pasdeprocessus

L’intelligence artificielle est utilisée dans les processus de traitement des espèces desDAB (distributeurs automatiques de billets) et de détection des fraudes.Le système estalorsutilisépouroptimiserlesressourcesetdéciderdesactionsàprendre(rbrlondon.com,consultéenoctobre2015).

Troisièmetandem:lafacevisibledestechnologies

Letroisièmetandemtraitedestechnologiesutiliséesauquotidiendupointdevuedesindividus.Cetandemestcomposédedeuxgroupes:«expérimentez»et«collaborons».

Legroupe«expérimentez»concernelestechnologiesquinouspermettentdetravailleret de vivre différemment. Avec l’arrivée des smartphones, les clients ont pu bénéficierd’unepuissance,d’uneconvivialitéetdefonctionnalités inégalées.Cebouleversementanonseulementtransformélesinteractionsentrelesclientsetlesemployés,maiségalementleurfaçond’agir.Pourlesentreprises,l’objectifn’estplusd’accomplirunesimpletâche,maisdeproposerdesservicespersonnalisésauclientenfonctiondesasituation.Deplus,lesterminauxmobilessoustoutesformessontdésormaisclés:ilspeuventeneffetaiderlesorganisations à interagir avec leurs clients en temps réel et leur fournir desdonnéesqu’ellespeuventexploiterpourproposeruneexpérienceclientoptimale.Dans lecasdu

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secteur bancaire, les clients se rendent de moins en moins dans les agences. Lestechnologies mobiles permettent donc aux organismes financiers de renouer avec leursclientsetdeleurproposeruneexpériencepersonnalisée,spécifiqueàchacun,pertinenteetconviviale,toutens’alignantsurleschoixdesconsommateursenmatièredenumérique.Celaconcerneégalementleséquipesdesbanquesquigagnentenrapidité,enproductivitéetenconnaissancespouraméliorerlefonctionnementdel’entrepriseauquotidien.

Tableau6

Élémentsconstitutifsdugroupe«expérimentez»

Source:CapgeminiTechnoVision.

Encadré6«Expérimentez»danslesservicesbancaires

Sansclavier

WellsFargodéveloppeactuellementsafonctionnalitédeclick-for-carepourmobilequipermet aux clients de cliquer sur une icône dans l’application et d’êtremis en relationdirecteaveclecentred’appel(wellsfargo.com,consultéenoctobre2015;Samuely,2015).

Objetdedésir

LabanqueenlignedeCapitalOnepermetauxutilisateursdevérifierleursolde,payerleurs factures, déposer des chèques et échanger des points de fidélité. L’applicationpossède une fonctionnalité appelée « SureSwipe » qui permet aux utilisateurs des’identifier à l’aide d’un schéma de déverrouillage tactile (Bryant, 2015 ;Wisniewski,2013).

Changezdevie

EnLettonie,CitadeleBankutiliseune solutionGDR(globaldepositoryreceipt)poursécurisersesemailsetsesdocumentssurlesappareilsAppleetAndroid,proposantainsiàsesemployésunaccèsauxdonnéesdelasociété24heuressur24(MobileIron,2013).

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Utilisateurfinal,producteurfinal

CitibankarécemmentouvertsesAPIauxdéveloppeurspourleurpermettredecréerdessolutions. En février 2015, elle a collaboré avec IBM pour travailler avec desdéveloppeursetélaborerlaprochainegénérationdetechnologiesfinancièresdanslecadreduCitiMobileChallenge(Berlind,2014;Crosman,2015).

Individualiténumérique

L’application Quick Balance de Scotiabank sur la gamme de montres-braceletsSamsungGearpermetauxclientsdevérifierleursolded’unsimpleglissementsurl’écrandeleurmontre(scotiabank.com,consultéenoctobre2015;marketwired.com,consultéenoctobre2015).

Le groupe « collaborons » explore la puissance de la collaboration sur les réseauxsociaux entre les clients et le personnel de la banque.Avec la prolifération des réseauxsociauxcommeFacebooketTwitter,lesclientspassentdavantagedetempsdanslemondevirtuel.Pourlesentreprises,celaimpliquedecollaboreraveclesutilisateursauquotidiendepuis cesplates-formes.En interagissant avec leurs clients sur les réseaux sociaux, lesorganisationspeuventmieuxcomprendrecequimotivelesconsommateursetproposerparconséquent une meilleure expérience client. De plus, si cette pratique est adoptée parl’entreprise dans son ensemble, cela peut avoir un impact positif sur ses processus etcontribuerauchangementculturelàmesurequelesattentesdesclientssetournentverslesenvironnements connectés. En réalité, l’innovation sociale a récemment permis detransformer les modèles d’entreprise. Face à la concurrence grandissante entre lesfournisseurs de service peer-to-peer et les FinTech qui exploitent l’aspect social, lesbanques ont commencé à exploiter les mêmes plates-formes. Certaines banques ontcommencéàfournirdesservicesenutilisantlesréseauxsociaux,notammentFacebooketTwitter.Cependant,sil’ontientcompteducaractèreouvertdecemédiaetdesexigencesréglementaires sur lesdonnéesprivées, il est essentiel que lesbanques comprennent leséléments constitutifs du groupe « collaborons » pour pouvoir exploiter pleinement lepotentieldusocial.

Tableau7

Élémentsconstitutifsdugroupe«collaborons»

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Source:CapgeminiTechnoVision.

Encadré7«Collaborons»danslesservicesbancaires

Lesocialcommenouveaupétrole

BankofAmericapossèdeuneéquiped’analysedesréseauxsociauxdédiée,quiproduitenvironmille rapports analytiques dumarché par an basés sur les données des réseauxsociaux(Bell,2015).

Egosystème

Labanque espagnoleBBVA récompense les utilisateurs pour l’utilisationde la plate-formeenligne.Lesutilisateurspartagentdeplusenplusdedonnéessurlesplates-formesen ligne, ce qui permet àBBVAde lancer des défis et des récompenses ciblés, tout enanalysant le comportement des clients en matière de dépenses, d’épargne etd’investissements(Camhi,2015).

Travailleurssociaux

Commonwealth Bank of Australia, qui possède plus de 1 100 agences et plus de48 000 employés, utilise le réseau social Chatter pour ses équipes, afin d’améliorer lacollaborationinterne(salesforce.com,consultéenoctobre2015).

Pasdetravail

Barclaysaintroduitunprogrammede«Partage»,danslecadredeBarclaycardRing,qui vise à récompenser les clients activement apporteurs de nouveaux comptes(misys.com,consultéenoctobre2015).

Nosamieslesmachines

BankofAmericaetNationwideutilisentlatechnologiedetéléprésencedeCiscopourlimiterlenombredeconseillersspécialisésprésentsdanslesagences.Aucoursdesdeuxansd’essai,BankofAmericaa réaliséplusde10000entrevuesclientspar lebiaisdesdispositifsdeconférenceCTS500etEX90deCisco(Baldwin,2014).

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DENOUVEAUXOUTILSPOURPRENDRELEVIRAGEDUNUMÉRIQUE

Encettepériodecharnièrepourlesecteurbancaire, lesdéfis telsqueleschangementsdes préférences et les typologies des clients, la concurrence accrue, les contraintesréglementairesstrictesetlesévolutionstechnologiquestoujoursplusrapidessontlégion.Lesméthodeset lesapprochesprécédemmentadoptéespar lesbanquesnesuffisentpluspour faire faceà lamenacede ruptureauseindesdifférentes facettesde leursactivités.Ces menaces sont réelles et imminentes, les banques étant confrontées à une pressionimportanteauniveaudeleursrevenusetdeleurrentabilité.

Si lesbanques reconnaissent cesmenaces, seulesquelques-unesontmis enplacedesinitiatives pour prendre une longueur d’avance, poursuivant leurs efforts et serepositionnantelles-mêmescommelesvraisleadersdusecteur,permettantunecroissanceaccélérée du chiffre d’affaires et un avantage concurrentiel significatif.Compte tenudurôle grandissant de la technologie dans les activités, l’approche traditionnelle traitant latechnologiecommeunaspectséparédumétierdanslatransformationdesactivitésestenpasse de devenir obsolète. Les banques l’ont bien compris et accélèrent leur viragenumérique.Cependant,lesinitiativesdesbanquesenmatièredetransformationnumériqueont souvent été de nature tactique ou graduelle, fonctionnant de manière cloisonnée,limitantleurpotentielàpréserverlebusinessexistantetàgénérerdessynergies.

L’objectifdetransformationn’estplusstatique,maisévolueàlavitessedel’innovationet des changements technologiques. Les banques doivent élaborer des approches et desméthodesdurablespourrépondreàceschangementsaussirapidementquepossible.

Leschangementset lestransformations(soumisàdesdélaisdeconformitédeplusenpluscourts)sontenpassededeveniruneconstantedanslesecteurbancaire:lesbanquesdoiventagirimmédiatementpouréviterladésintermédiationetlarupture.

CapgeminiaaccompagnédenombreuxclientsdontplusieursétablissementsbancairesdanslaredéfinitiondeleurcibleSI(systèmed’information)etplandetransformation,enassociantfinementetsurunmodeitératiflesdécideursmétier.TechnoVisionafourniuncadreméthodologique partagé qui a permis dans certaines circonstances d’aller au-delàdesambitionsinitialesdumétier,tantenmatièredevaleurquedetiming.

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DESMODÈLESÉCONOMIQUESÀREPENSER

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LESMODÈLESÉCONOMIQUESBOULEVERSÉSPARLEDIGITAL

BERTRANDLAVAYSSIÈRE*1

«Digital»,cemotestmaintenantemployéà toutes lessauceset,utiliséseul, iln’estpas assez précis. Dans cet article, il est utilisé sous deux acceptions différentes etnéanmoinstrèsliées:

–ilsedéfinitd’abordcommelagénérationnouvelled’outilstechniquesetdeméthodesde traitement des données, de présentation de ces données et de leur transmission, ouautrementdit,l’apportdestechnologiesd’Internet(notammentlesstandardsW3C–WorldWideWebConsortium2)dansletraitementdel’information;

–ladeuxièmedéfinition,fondéepartiellementsurleseffetsdelaprécédente,regroupeles nouveaux instruments, interfaces/outils de communication physiques ou virtuelscommelessmartphones,lesX-blets(tablettesdedifférentesformes),lesréseauxsociaux,lesagentsintelligents,etc.

Pour entrer dans le vif du sujet, quatre cas, dans trois métiers différents et dans lafonctionfinancière,serontabordés.Ils’agitàtraverscesexemplesd’illustrerleproposdela transformation quasi génomique3 en cours.Dans une conclusion, les observations enseronttirées.

Les quatre exemples prennent des points de vue de départ différents : le cas«substitution»s’intéresseàlasubstitutiondesmoyensdepaiementtraditionnelsparleseffets conjugués des obsolescences de certains produits, des réglementations et desnouvelles possibilités offertes par la technologie ; le cas « banques privées » abordel’apport de la technologie pour répondre aux challenges liés aux changements desrèglements et des attentes des clients ; le cas « big data finance » illustre le leviertechnologiquesur lagestion interneetexterned’une institutionfinancière ;enfin, lecas« assurance-automobile » aborde par le prisme des changements sociétaux ettechnologiqueslamodificationpotentiellementprofondedesstructuresdemarché.

CAS«SUBSTITUTION»Il s’agit d’illustrer la transformation des usages des paiements de petits montants et

leursimpactssurlescomptesd’exploitation.

L’utilisationdesespècesenFrance,bienquefaible4,représenteenviron25milliardsdetransactions par an5 sur une estimation d’un total de transactions de l’ordre de45milliards.Lesautresmoyensdepaiementsontencroissance,sauflechèquequiestenérosionlente,maisconstante(cf.graphique1).

Graphique1

ÉvolutiondestransactionsparmoyendepaiementenFrance

(enmilliards)*

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*Horsretraitmonétique(DAB).

Sources:BanquedeFrance;Banquecentraleeuropéenne(BCE);analysesAres&Co.

Touslesjours,unebanque,unréseaudecartesdepaiementouuneFinTechannoncentune innovation en matière de paiements. Ces innovations, pas encore toutes rentables,concernent lesporte-monnaie électroniques, lespaiementsmobiles, les terminaux légerspour les commerçants, les agrégateurs, etc., sans parler de la volonté du gouvernementaffichéelorsdesAssisesdesmoyensdepaiementenjuin20156deréduirel’utilisationdesespècesendéveloppantnotammentl’utilisationdu«sanscontact»del’instantpayment.

L’impactsurlamodélisationdesrevenusdel’ensembledumarchédespaiementspeutprésenter des visages assez différents en fonction des hypothèses retenues.Nous avonsmodélisédesscénariosassezradicauxet,enparticulier,ledéveloppementdupaiementparlestéléphonesmobiles(cf.graphique2).Danslecontextefrançaisdelatarification,pasforcémentcomparableàceluid’autrespays,l’impactpeutêtremajeur.

Graphique2

Évolutiondesrevenusdespaiementsselontroisscénarios

(àgauche,scénariodemaintiendestendancesactuelles;aumilieu,scénariodeconcurrencetarifaire*;etàdroite,scénariodedécollageradicaldupaiementmobile**)

(enMd€)

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*Pressiontarifaireetréglementaire:baissedescotisationsde50%en2016,puisde50%en2018.

**Baissedescotisationsde50%en2016,puisde50%en2018,diminutionprogressivedunombredecartesàpartirde2016etbaissedelacommissionvariablecommerçantde50%en2016.

Remarque : les services à valeur ajoutée sont ceux liés à l’utilisation du mobile comme les outils marketing defidélisation,decouponing,depushd’offresenfonctiond’unegéolocalisation.

Source:analysesAres&Co.

L’impact sur le résultat brut d’exploitation (RBE) pour une activité de détail d’unegrandebanque françaisepourrait aller jusqu’à10%duRBEdes fluxetdespaiements,soitpotentiellement2,5%duRBEde labanque.L’effet est encoreplusmarqué si l’ondécomposelesrevenusdespaiementsducôtédespayeursoudeceluidespayés;sachantque peu de banques sont équilibrées entre les deux, cela créera une dynamique derepositionnementspécifiqueàchacune.

Cetexemple,certessimpliste,montre l’effetsystémiquedes innovationsdigitalesà lafois sur le « grignotage» des revenus des offreurs et sur la reconfigurationdumarché,pour les offreurs traditionnels, mais aussi les nouveaux entrants. En est pour preuvel’annoncerécented’Oranged’offrirdespaiementsmobiles.

Uneparfaiteillustrationdela«destructioncréatrice»chèreauxéconomistes?

CAS«BANQUESPRIVÉES»Lemondedelabanqueprivéeetdelagestiondefortuneestencomplèterestructuration

sousladoublepressiondesrégulateursetdudéveloppementdudigital.

Sur leplanréglementaireetsansêtreexhaustif,deuxdimensionsprincipalesaffectentlesbanquesdegestionprivées7:

– la « transparence » exigée illustrée notamment par le Foreign Account TaxCompliance Act (FATCA), les règles de l’Organisation de coopération et de

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développement économiques (OCDE) sur l’échange automatique d’informations(automaticexchangeofinformation–AEOI),ou lesdernières«amnisties fiscales»surlesrapatriementsoulesdéclarationsdefondsdétenusàl’étranger;

–lesdirectiveseuropéennes,britanniquesousuissessurl’interdictiondesrétrocessionssur lesplacementspour ladistribution(RetailDistributionReview–RDR–, incitations,MarketinFinancialInstrumentsDirective–MiFID28).

En simulant les impacts sur l’ensemble des banques d’un pays comme la Suisse, lerésultatestunedivisionparenvirondeuxdelarentabilitédesfondspropres(cf.graphique3ci-contre).

Demême,lasimulationsurlescomptesd’exploitationdesconséquencesdel’abandondes rétrocessions montre, dans une moyenne du marché, que cela réduit de moitié lesrevenus des banques privées. Les autres composantes de MiFID 2 sur une meilleureréalisation et unmeilleur conseil par rapport auxobjectifs du client imposent des coûtssupplémentairesauxbanquesetlesforcentégalementàrevoirleurtarification.

Certains grands noms ont pris ce sujet à bras-le-corps en transformant radicalementleurs relationsclients,notamment sur leplan tarifairepar lavalorisationduconseil.Parexemple,UBSarefondusatarificationsurlabased’unforfaitparcréationd’unserviceàvaleurajoutéebasésurl’allocationd’actifsdynamiqueetl’abandontotaldesrétrocessionspour la gestion sous mandat, en 2013, en Suisse. Cela a conduit notamment à laredéfinitiondelavaleurajoutéedumétier,c’est-à-direuneoffredegestionconseilléeaveclamise enœuvre de l’«UBSadvice », une vérification automatique et quotidienne duportefeuilledechaqueclientpours’assurerquel’allocationestcompatibleavecleprofilderisque.

Graphique3

Impactssurlarentabilitédesfondspropres

(ROE–returnonequity)

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Note:

–costincomeratio:C/I=78%en2012et87%en2018;

–lesimpactsdusàlaréglementationsontde5,2;lesfacteursmacroéconomiquessontliésàlacroissanceduPNB.

Source:Ares&Co.

Enparallèle,ladigitalisationdesclientsetlesnouvellesoffressurlemarchéd’acteurstraditionnelsoude start-up tendent fondamentalement àmodifier lamanière d’interagiravec les clients. Le tableau (infra)montre un état des lieux des outils standards et desoutilsavancés,présentsdanslemarché.

Tableau

Composantesdigitalesmisesàdispositiondesclientsetdesconseillers

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Source:Ares&Co.

Ensuite, en fonction des positionnements de la banque privée et de ses priorités, cesoutilspeuventêtreutiliséssoitpourréduirelescoûts,soitpouraméliorerlesrevenusetleserviceclient.

Schéma1

Importancedesoutilsdigitauxenfonctionduprofildelabanqueprivéeetdespriorités

Source:Ares&Co.

Ainsi, la réponse des banques privées devient fortement « digitale » même si, enfonction des segments de clientèle, l’importance de la relation privée avec unconseiller/banquierrestetoujoursprédominante.Danslessegmentsauxactifsinférieursà500000eurosd’actifsfinanciersdisponibles,desacteursnouveauxquasimenttotalement«àdistance»apparaissent,gagnentdespartsdemarchéetrémunèrentnormalementleursactionnaires :HargreavesLansdownauRoyaume-Uninotamment,ou traditionnellement

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CharlesSchwabauxÉtats-Unis,pourprendredeuxexemples.

Pourcertainesbanquesprivées,85%desrevenussontremodelésetlesinvestissementssignificatifs engagés dans le digital permettent de réinventer petit à petit lamanière defairedelabanque.

CAS«BIGDATAFINANCE»Certainsbanquiersvontjusqu’àproclamerouvertementquelavaleurdeleurbanqueest

celledesdonnéesdontelledispose.Lesdonnéesdansunebanquesontomniprésentesetconstituent lamatièrepremièrepourdenombreusesactivités : le tradingdesvaleurs, laconnaissancedesclients, lereporting financier interneetexterne,etc.,pourneciterquequelquesexemplestriviaux.Delààextrapolerendéclarantquetoutdépenddesdonnées,excluantlestalentsdelabanque,ilyaunpasquecertainsfranchissent.

Denombreuxprojetsd’entrepôtsdedonnéesontvulejouraufildesannées,maissouslapressionde l’harmonisationeuropéenne (BCE)etmondiale (InternationalAccountingStandardsBoard– IASB–,ComitédeBâle), ladéconnexiondesdifférentes sourcesdegénérationdedonnéesestdevenued’abordunfreinpoursetransformerpetitàpetitenunlevierdedéveloppement.

Cetteconjonctiondefacteurscréedoncunepressionsupplémentairepourlesbanquesversunecohérenceetunehomogénéitédesdonnéesà tous lesniveauxde traitementdel’entreprise, mais aussi entre la partie finance, la partie risque, la partie gestion dubilan/liquiditéetlesactivités,detellesortequecesdonnéessoientfacilementaccessiblesà toussuivant les règlesd’habilitationadhoc, etenfinqu’elles soientassezexhaustivespour permettre d’anticiper les besoins futurs, notamment en matière de gestion desrisques.

D’aprèsnotreexpérience,cesobjectifssontlouables,mais,aujourd’hui,lesinstitutionsfinancières sont confrontées à une tâche difficile, loin d’être néanmoins insurmontable.Pour l’illustrer, par exemple dans les fonctions finance et risque, les difficultés sont deplusieurs natures : non-disponibilité des données à la même fréquence de création,circulationdedonnéesagrégéesetnonélémentaires,définitionsincohérentesd’unmétieràunautre (parexemple,«client»ou«provision»),pistesd’auditnonhomogènespardirection, faible intégrationdes remontéesdedonnéespour certains reportingsavecdespartiesdetraitementmanuel,incohérencedessystèmesdeproductioncomptablesaveclesbasesréglementaires,etc.Enconséquence,ilarrivequelesreportingscomptables,fiscauxet réglementaires ne produisent pas les mêmes chiffres. Évidemment, parfois, lacomplexité et l’hétérogénéité des systèmes d’information tant dans leurs définitions desdonnéesquedans leurs architectures ajoutentunedifficulté aux refontes indispensables.Ainsi, au-delà des fonctions des directeurs des systèmes d’information, de nouvellesfonctionsapparaissentcommeleschiefdataofficers,lesdataowners,etc.

Les technologies nouvelles ne suffisent pas sans des définitions partagées, desprocessus de gestion et des « intelligences » de traitements. Néanmoins, les nouveauxstandards d’Internet, en particulier les standards d’indexation mis à disposition desbanques, sont un formidable levier d’accélération. Les informaticiens, traditionalistes et

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intègres intellectuellement, admettent facilement que leur enjeu est d’être sur toutes lesdonnéesaussirapidesqueGoogledansunerecherche,soitdel’ordred’unemilliseconde.

À ce jour, clairement, bien qu’à des rythmes différents par institution, deux étapesapparaissent:unepremièrede«remiseenordre»desdonnées,plusoumoinsmenéeenparallèleavec l’étapedecréationde leviers surcesdonnées.Pourdesgrandesbanques,ces projets peuvent atteindre des enveloppes d’investissement de l’ordre du milliardd’euros sur quelques années, et les retours sur cet investissement se font en quelquesannées.

Cette«normalisation», sansentrerdans lesdétails, seradans le futurune sourcedeproductivitédans tous lesdomainesaussibien la financeavec lagestiondesbilans,despositions, que le marketing avec les fameux segments of one ainsi que les offresspontanéesettemporaires.Et,au-delàdelarationalisationdel’existant,lagénéralisationdutempsréelimposéedefactoparceschangementspropulseralemétierdebanquierversd’autreshorizons, enparticulier lagestionde la relation client, la capacitéd’analyse entempsréeldesrisquesdecrédit,lespaiements,etc.

Ladonnéeestprimordiale,certes,maisunebanque,c’estaussidestalents,desproduits,desfinancementsadéquats,unbilan,etc.

CAS«ASSURANCE-AUTOMOBILE»L’assurance-dommages, pour l’automobile en particulier, en France est en faible

croissance depuis de nombreuses années. Les parts de marché bougent lentement enfaveur des banques-assureurs. Les clients sous le syndrome de la dissonance cognitive(«l’assurance,c’estimportant,maiscelanemefaitpasrêver»)sontpeuproactifs,àpartlafrangedeschercheursinvétérésdelameilleureaffaire.

Etsitoutcelaallaitêtreremisencausepardeschangementssociétauxetdesinitiativesnouvellesliéesàl’économiedupartage?Parexemple,dansleschéma2(ci-contre),desévolutionspossiblesdelamanièredeconsommerdutransportautomobilesontdécrites.

Schéma2

Évolutionspossiblesdel’usageautomobile

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Source:Ares&Co.

En toile de fond, le marché de l’assurance-automobile est aussi affecté par laconcentrationdespopulationsdanslescentresurbainsetlarecherchedesolutions,parfoisbrutalespourlesvéhicules,aucontrôledelapollution.

Avec l’hypothèse, évoquée par certains, que les consommateurs n’achèteront plus devoiture,maisunserviceextensifde transport, lesestimationsvarientd’uneréductiondumarché de 20% à 70% selon l’horizon de temps, soit une perte pour les assureurs del’ordrede4Md€à14Md€.

Un parallèle comparable peut d’ailleurs être fait, même s’il est moins spectaculaire,avec le logement (partage d’appartement, colocation, maison connectée). Les élémentsd’instantanéité,d’intégrationd’informationsexternesàl’assureurentempsréelreviennentcommedesleitmotive.

Lesassureurstraditionnels,tantmutualistesquesociétésprivées,commencentàmettreenplacedes solutionsnouvelles.Pour accroître la valeur ajoutée etmaintenir le chiffred’affaires,unepisteest le service9.Lacombinaisondecapacitésassurantielles,de leurssavoir-faire en termes d’assistance et demontage financier peut les inciter à passer desolutionsd’assuranceàdessolutionsdetransport.Enparallèleduchangementdemodèle,la mutation culturelle de l’actuariat vers le calcul de marge d’un service global, et del’indemnisationàlapréventionetauservice,estl’undesenjeuxclésdecettemutation.

CONCLUSIONCes quatre exemples illustrent, de manière rapide et partielle, les contraintes et les

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opportunitésliéesaudéveloppementdudigitaldanslesservicesfinanciers:

–unereconstructionplusoumoinsprofondedesstructuresderevenusetdescoûts;

–unerefonte,àterme,radicaledel’outil,desméthodesetdel’organisationdesventesetdelaproduction;

–unegénérationdenouveauxleviersdecréationdenouvellesactivités.

Au-delà de ces éléments, le point majeur est la transformation en profondeur desmétiers de la banque et de la finance.Non seulement le digital change lesmanières defaire, mais aussi il impose de réfléchir aux nouveaux styles/codes de management desinstitutions financières. La réussite de cette « mutation génétique » est aussi liée à lacapacitédesdirigeantsd’anticiperl’accompagnementhumainindispensable.

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INNOVATION,CONCURRENCEETRÉGLEMENTATIONPOURLAFOURNITUREDESERVICESBANCAIRESENLIGNE

MARIANNEVERDIER*1

SelonlaBritishBankingAssociation,enmars2015,lesconsommateursbritanniquessesontconnectés10,5millionsdefoispar jouràdesapplicationsdeservicesbancairesenligne, utilisant ce canal pour transférer 2,9 Md£ par semaine en moyenne. Ledéveloppementdesservicesbancairesenlignemodifieconsidérablementlesinteractionsconcurrentielles dans le secteur de la banque de détail2. En effet, ces services peuventaussi être proposés par des entrants non bancaires3. C’est le cas, par exemple, del’entreprise eBayqui offre depuis plusieurs années un service de paiement en ligneparl’intermédiaire de la plate-forme PayPal4. Dans le domaine des prêts, on peut citer laplate-forme Lendix quimet en relation sur Internet des entreprises cherchant du créditavecdesprêteursparticuliersetinstitutionnels.

Ce contexte de concurrence pour l’innovation5 entre entreprises bancaires et nonbancairesamèneàs’interrogersurleslienscontreconcurrenceetréglementationdanslesecteur de la banque de détail, en mettant plus spécifiquement l’accent sur laproblématique de la fourniture de services bancaires en ligne.Cet article se propose defaireunpointsurcesujet6.

Les banques proposent deux grandes catégories de services aux consommateurs : lesservicesassociésauxdépôtset lesservicesassociésauxprêts.Lesservicesassociésauxdépôts comportent le stockage d’unités monétaires, le retrait d’espèces, le paiement,l’offredeproduitsd’épargneainsique l’accèsàde l’information(sur lecompte, sur lesproduitsdisponibles, etc.).Les services associés auxprêts incluent l’information sur lestauxd’intérêt,l’intermédiationentredemandeursdefondsetprêteurs,lesassurances.Lapossibilité d’effectuer des opérations en ligne a rendu possible le développement d’uneoffredenouveaux services auxconsommateurs.Le tableau1proposeuneclassificationsimpledesservicesenligneinnovantsproposésparlesbanquesetlesentrants.

Tableau1

Servicesbancairesenligneinnovants

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Source:MariottoetVerdier(2015)pourlapartiegauche.

Lerestede l’articleestorganisécommesuit.Dans lapremièrepartie,nousanalysonsl’impact des innovations sur la structure dumarché, en présentant plus précisément lesbarrièresàl’entréedenouveauxacteurs.Danslasecondepartie,nousétudionsenquoilesinnovations entraînent une modification des stratégies des firmes en matière deconcurrenceetdecoopération.Ceschangementscomportentdesimplicationsenmatièredepolitiquedelaconcurrence.

L‘IMPACTDESINNOVATIONSSURLASTRUCTUREDUMARCHÉ:ENTRÉEETBARRIÈRESÀL’ENTRÉE

Lesfournisseursdeservicesbancairesenligneinnovants

Les servicesbancaires en ligne innovants sontproposés soitpar lesbanques, soitpardesstart-up,soitpardegrandesentreprisesdusecteurdestechnologiesdel’informationetde la communication (par exemple,Apple ouGoogle), soit par desmarchands (comme

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Starbucks).Latenued’uncomptededépôtnepeutêtreréaliséequeparunacteurquialestatutdebanque.Parconséquent,lorsqu’unacteurproposeunserviceinnovantassociéàl’usaged’uncompte (par exemple, la consultationdes comptes en ligneou lepaiementélectronique),ildoitnécessairemententrerenrelationaveclesbanques,neserait-cequepourréaliserl’interfacetechniquedesonserviceaveclesystèmed’informationbancaire.LaplupartdesacteursquioffrentuniquementdesservicessurInternet(lespureplayers)n’ont pas le statut de banque7. Ainsi, les banques en ligne qui proposent à la fois desservices de tenue de compte, d’épargne et de paiement en ligne sont généralement desfiliales de grands groupes bancaires (la Société générale pour Boursorama banque, leCréditmutuelpourFortuneo,leCréditagricolepourBforBank).Lescommissionssurlesopérationsenlignesontfaiblespourlesclients,cesbanquesserémunérantprincipalementsur les revenus issus de l’activité de transformation. Les acteurs non bancaires neproposent généralement que des services de paiement ou d’accès au compte. Certainesentreprises font le choix d’enrichir progressivement la palette des services destinés auxconsommateurs.Parexemple,PayPalacommencéparproposerdesservicesdepaiementenligneauxconsommateurs,puisaélargisonoffreàlafournituredeservicesd’épargneetdetenuedecompte,enobtenantlestatutdebanqueauLuxembourg.Récemment,AtomBank a obtenu un agrément de laBanque d’Angleterre pour devenir le premier prêteurproposantuniquementdestransactionsenligne.

Le portefeuille électronique constitue un bon exemple de service proposé par desacteursbancairesetnonbancaires.Ils’agitd’unservicefacilitantlestockagedesdonnéesde paiement des consommateurs, tout en leur permettant ensuite d’effectuer des achatsrépétés en ligne ou par mobile. Les portefeuilles électroniques se présentent sousdifférentes formes (en ligne comme PayPal ou par mobile comme Apple Pay) ets’appuientsurdestechnologiesdifférentes(parexemple,sanscontact,QRCode,cloud).Certains portefeuilles électroniques comme PayPal permettent au consommateur dedétenir un compte spécifique associé à son usage. Si le consommateur dispose d’uncomptespécifique,lepaiementpeuts’effectuerdirectementparuntransfertdefondsentrel’acheteur et le vendeur (par exemple, par chambre de compensation automatisée).Lorsque le consommateur ne dispose pas d’un compte spécifique (comme dans le casd’Apple Pay)8, le fournisseur de services de paiement sert d’intermédiaire entre lesbanquescommepourunpaiementpar cartebancaire.Danscecas, les commissions suropérations de paiement sont partagées entre les différents acteurs. De nombreusesentreprises non bancaires proposent des portefeuilles électroniques. Les marchandscomme Alipay ou Starbucks les utilisent pour combiner la gestion des transactions depaiement à celle des programmes de fidélité, ce qui leur permet d’acquérir desinformationssur leursconsommateursoudediffuserdespublicitésciblées.Lesgrandesentreprisesdusecteurdestechnologiesdel’informationetdelacommunication(Google,Apple) offrent cette fonctionnalité pour améliorer leur qualité de service par rapport àleurs concurrents9. Enfin, les banques (par exemple, la banque finlandaise OP-Group)proposent également des portefeuilles électroniques pour répondre à la concurrence desopérateursnonbancaires.Cesapplicationspermettent,parexemple,auxconsommateursdeconsulterlesfondsdisponiblessurleurcompteavantunachat.

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L’adaptationducadreréglementaire

Les récentes innovationsdans ledomainede labanqueen ligneont rendunécessaireuneadaptationde ladéfinitiondes conditionsd’entrée et d’opération sur lemarché.Eneffet, les régulateursdoiventarbitrerentreun renforcementdesbarrièresà l’entréepourprotégerlastabilitédusecteurbancaireetunassouplissementdesconditionsd’entréepourfavoriser le développement de l’innovation et de la concurrence10. L’industrie bancairecomportedenombreusesbarrièresàl’entrée.SelonlatypologiedeBain(1956),unentrantdoitfairefaceàdesbarrièreslégales,structurellesetstratégiques.Lesbarrièresàl’entréelégales comprennent l’ensemble des réglementations prudentielles et non prudentiellesimposées par le législateur aux banques. Ces réglementations répondent à différentsobjectifs qui ne sont pas toujours compatibles. Les réglementations prudentielles (tellesque l’assurance des dépôts, les exigences en capitalminimum fixe et variable) visent àprotéger le consommateur des risques spécifiques associés à l’activité bancaire. Ellesimpliquent nécessairement des restrictions de concurrence en augmentant les coûtsd’entréesurlemarché.Lesréglementationsnonprudentielles(tellesquelaprotectiondesdonnées personnelles, le taux sur les produits d’épargne réglementée) concernent laconduite de l’activité bancaire et peuvent aussi conduire à des hausses de prix pour lesconsommateurs.Parailleurs,lesautoritésdelaconcurrencepeuventintervenirexpostsurlemarchépoursanctionnerlespratiquesanticoncurrentielles.

Ledéveloppementdesservicesbancairesenlignearendunécessaireuneadaptationducadreréglementaireexistantafindefavoriser l’innovation, toutenpréservant lastabilitédu système financier (dilemmeentre concurrence et stabilité).Denombreux régulateursont choisi de favoriser l’entrée d’acteurs non bancaires, en allégeant les contraintes encapital et la procédure d’entrée pour les acteurs qui ne fournissent pas l’ensemble desservices bancaires. EnEurope, la directive sur les services de paiement (2007, 2015) ainstaurédenouvellescatégoriesdelicencespourlesprestatairesdeservicesdepaiementainsi que pour les établissements de monnaie électronique11. La création de licencesspécifiques pour des catégories d’acteurs non bancaires comporte l’avantage de placerceux-cisouslasurveillancedel’autoritédetutelledusecteurbancaire,afindelimiterlesrisquesrelatifsàleursactivités.AuRoyaume-Uni,laFinancialServiceAuthority(FSA)achoisi d’imposer aussi des exigences en capital plus faibles aux entrants qui opteraientpourunstatutbancaire12.

Parallèlement,lesrégulateursontaussiprisdesdécisionssusceptiblesderenforcerlesbarrièresà l’entréeafindeprotéger lastabilitédusystèmefinanciercontre lesdifférentsrisques associés à l’entrée d’acteurs non bancaires. Ce sont principalement des risquesopérationnels (fraude, sécurité des données) et des risques de réputation. Par exemple,lorsqu’unebanqueouvresonsystèmed’informationàdestiersnonbancaires,sonsystèmepeut devenir plus vulnérable à des attaques de piratage informatique si certainesprécautions ne sont pas prises. Une attaque sur le système informatique d’une grandebanque pourrait avoir un impact sur la réputation des autres banques, entraînant desmouvementssurlemarchédesdépôts.AuRoyaume-Uni,laFinancialConductAuthorityaffirme que le développement des services proposés par les agrégateurs de compte(collectantdesinformationssurlecomptebancaire)aétéralentiparlaprésencederisques

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relatifsàlasécuritédupartagedesdonnéesdesconsommateurs.LaFinancialConsumerAgencyauCanadaamisengardelesconsommateurscontrelesrisqueséventuelsassociésaupartagedeleursdonnéesbancaires.

Enfin,lechangementd’environnementtechnologiqueaconduitcertainspaysàmodifierl’architecture de leur système de réglementation et de supervision. En effet, différentesinstances sont susceptibles d’exercer une influence sur la conduite des banques et desentrants: lesrégulateurs(régulateurssectorielset/ousuperviseursouautresinstances)etlesautoritésde laconcurrence.Les régulateursou les superviseurset lesautoritésde laconcurrence disposent de différents pouvoirs pour discipliner les banques (comme leretrait d’agrément ou les sanctions pécuniaires). Afin de coordonner au mieux leursinterventions, certains pays ont choisi de créer des autorités de régulation sectoriellesspécifiques,commecellesquipeuventexisterdanslesecteurdestélécommunications.Parexemple, au Royaume-Uni, il existe depuis avril 2015 un régulateur sectoriel pour lemarchédesservicesdepaiement,lePaymentSystemRegulator,dépendantdelaFinancialConduct Authority, dont les objectifs consistent à encourager le développement de laconcurrence,favoriserl’innovationetprotégerlesintérêtsdesconsommateurs.

Lesbarrièresàl’entréestructurelles

Les barrières à l’entrée structurelles présentes dans l’industrie bancaire affectent lesincitationsdesentreprisesàinnoveretàentrersurlemarché.Cesbarrièressonttantliéesà la nature des coûts du côté de l’offre qu’aux caractéristiques de la demande desconsommateurs.Encequiconcernelescoûts,lesbanquespeuventréaliserdeséconomiesd’envergureeneffectuantàlafoislacollectedesdépôtsetdesopérationsdeprêt(Black,1975)13.Eneffet,lesbanquespeuventutiliserlesinformationsdescomptesdedépôtpourévaluerlerisquedecrédit.Lavaleurdecetteinformationestparticulièrementimportantepour les petits emprunteurs (PME etménages) n’ayant pas la possibilité de signaler laqualitédeleursignaturesurlemarché.Danscecontexte,lesacteursn’offrantpastoutelapalettedesservicesbancaires(parexemple,lesdépôtsetlescrédits)fontfaceàdescoûtsd’entréeplusimportants.Ilssontégalementplusdépendantsdesbanquespourobtenirdel’informationsurleursclients,cequicontraintlaqualitédesservicesinnovantsproposés.En outre, les entrants doivent atteindre une taille critique pour être en mesure deconcurrencer les banques, qui réalisent des économies d’échelle importantes grâce auvolumedeleursactivités.

Ducôtédelademande,lescoûtsdechangementetleseffetsderéseauconstituentuneautre forme de barrière à l’entrée. Les coûts de changement sont dus à l’existence derelationsdelongtermeentrelesbanquesetleursclients(Sharpe,1990;Rajan,1992)ainsiqu’auxcoûtstechniquessubisparlesconsommateursquandilschangentdebanque(Shy,2002). On peut avancer que le coût pour les consommateurs de passer d’une banquephysique à une banque en ligne (pure player) est principalement lié à la recherched’information sur la banque. En effet, les coûts d’ouverture d’un compte en ligne sontgénéralementfaiblesparcequelesdossierssontplusrapidesàremplir.Danscecontexte,l’absencederéputationpeutégalementconstituerunebarrièreàl’entréetrèscontraignantepourunentrant.Parexemple,lesacteursnonbancairessontsouventperçuscommeétant

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moins capables de résoudre les problèmes relatifs à la sécurité des données desconsommateurs(Deloitte,2015,p.34).AuRoyaume-Uni,laFinancialConductAuthorityaprisunemesurepourréduirelescoûtsdechangementsubisparlesconsommateurs,encréant le current account switch guarantee en 2013 qui permet aux consommateurs dechanger de compte bancaire en sept jours, tout en étant protégés d’éventuels risquesfinanciers.L’absenced’unréseauphysiqued’agencespeutégalementêtreperçuepar lesconsommateurscommeunfacteurderisquerelatifàlaqualitéduservice.Selonuneétuderéalisée parAccenture (citée dans le rapportDeloitte, 2015), 33% des consommateursbritanniquesneseraientpasprêtsàdevenirclientsd’unebanquesansagences.AuCanada,la banque en ligne Tangerine a choisi de rassurer ses consommateurs par une présencephysiquedansdescafés.

Enfin, pour fournir des services de paiement, les entrants doivent attirer une massecritiquedeconsommateursetdemarchandspourréussirlelancementdeleurservice.Unconsommateur n’ayant intérêt à adopter un service que si un nombre suffisant demarchands l’accepte (et viceversa), lemarché des services de paiement est qualifié demarché«biface»(Verdier,2006).Laprésencedecesexternalitésd’adoptionexpliquelefaitquedenombreuxentrants choisissentdedévelopperdes innovations s’appuyant surl’architecturetechniquedelacartebancaire,quiestdéjàtrèslargementdiffuséeauprèsdesconsommateursetdesmarchands.Parexemple,audépart,Applearencontrébeaucoupdedifficultés pour attirer des marchands sur sa plate-forme14. Finalement, l’entreprise aréussiàlancersonsystèmedepaiementparmobileauxÉtats-Unisgrâceàdespartenariatsaveclesbanques.

Parailleurs,ilestànoterqueledéveloppementdestechnologiesdel’informationetdela communication a entraîné une réduction des coûts d’entrée sur le marché pour lespetites banques.Les entrants peuvent en effet obtenir un avantage sur les banques déjàprésentessurlemarchéensedifférenciantparlaqualitédeleursystèmed’informationetla mise en place d’une architecture plus légère et moins fragmentée. L’existence desolutions«bankinabox»proposéespardesentreprisescommeFISetOracleréduitlescoûts d’entrée sur le marché, une banque pouvant désormais être rapidementopérationnellegrâceà l’externalisationde laconceptiondesonsystèmed’informationàuntiers15.

Lesbarrièresàl’entréestratégiques

Lesentrantspeuventfairefaceàdesbarrièresàl’entréeérigéesdefaçonstratégiqueparlesbanques,qu’ils’agissedesurinvestissementdansleréseau,deventesdeservicesliés,de standards de sécurité minimum oumême d’un refus d’accès à leurs infrastructures.Cettehypothèsepeutêtrenuancéepardeuxarguments.D’unepart,ilexistedesdécisionsréglementairesvisantàfaciliterl’accèsauxinfrastructuresbancaires.Onpeutciter,àtitred’exemple,ledispositifeuropéendeladirectivesurlesservicesdepaiement2concernantl’accèsaucomptebancairedesagrégateursdecompteetdesprestatairesde servicesdepaiement.Ladirectiveprévoitqu’unpayeurutilisantuncompteenlignepeututiliserunlogicieloudesdispositifsdepaiementfournisparuntiersautoriséetvoirsespaiementsexécutésensonnomparlefournisseur.Unebanquenepourraitrefuserl’accèsd’untiers

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au compte de paiement d’un payeur que pour des raisons de sécurité objectivementjustifiéesetattestéesquiauraientétésignaléesauxautoritésdecontrôle.D’autrepart,lesbanquesn’ontpas toujours intérêtàbloquer l’entréedenouveauxacteurssur lemarché.Parexemple,auxÉtats-Unis,laplupartdesbanquesontacceptédesignerunaccordavecApplepour le lancementdesonserviceApplePay,parcequ’ellesontétéattiréespar laperspective de partager les commissions avec Apple sur sa solution de paiement sanscontact16. En outre, les stratégies visant à dissuader l’entrée de concurrents sont plusdifficiles àmettre en œuvre dans une industrie oligopolistique, puisqu’elles nécessitentuneactioncoordonnéedetouslesconcurrents.

L‘IMPACTDESINNOVATIONSSURLACONDUITEDESENTREPRISES:ENTRECONCURRENCEETCOOPÉRATION

L’impactdesinnovationssurlaconcurrenceentrebanquesetentrants

Tant que les entrants ne proposent pas aux consommateurs de détenir des comptesbancaires, la concurrence avec les banques reste limitée à une offre de servicescomplémentaires et différenciés. Le développement des innovations par des entrantsreposedonc souvent sur lamise enplacede relationsverticales avec les banques, danslesquelles ces dernières fournissent l’accès à des inputs essentiels (compte bancaire,systèmedepaiement),tandisquelesentrantsoffrentdesservicessurlesmarchésenaval(paiement,accèsaucompte).Cettesolutioncomportel’avantagedepermettreauxentrantsd’économiserdescoûtsd’entrée,debénéficierdeseffetsderéseaux,toutenrassurantlesconsommateurssurlesrisques.Ainsi,l’entrepriseLevelUpauxÉtats-Unisproposedepuis2011unesolutiondepaiementparmobileaupointdeventequis’appuiesurunpartenariatavecBankofAmerica.Labanquereçoitunecommissionpour traiter les transactionsetstocker de l’information financière sur les clients. LevelUp a abandonné lemodèle detarification traditionnel selon lequel les marchands payent un prix par transaction, etretientunpourcentagesurlescouponsdesprogrammesdefidélité.Dansledomainedesagrégateurs, on peut citer la firme Simple aux États-Unis qui s’est lancée grâce à unpartenariatavec labanqueBancorp,dont lesdépôtssontgarantispar laFederalDepositInsuranceCorporation(FDIC),lefondsdegarantiedesdépôts.Lespartenairessesontmisd’accord pour partager les revenus issus de la transformation des fonds laissés sur lecomptecourantetlescommissionsd’interchangesurlespaiements.

L’existencederelationsverticalesentrebanquesetentrantspeutêtrefavorableàlafoisauxbanquesetauxentrants.Eneffet,lesprofitsdesbanquespeuventaugmenterviaunehausse des commissions sur les transactions17, un accroissement du volume de dépôtscollectésoudunombredetransactions.Lesentrantspeuventcouvrirleurscoûtsd’entréeen proposant des produits suffisamment différenciés en qualité (voir l’exemple de labanqueFidorenAllemagne)ouenpratiquantdesventesliées.Notamment,denombreuxmarchandsdisposantd’unlargeréseaudedistributionphysique(parexemple,Starbucks)proposent désormais des moyens de paiement privatifs permettant aux consommateursd’obtenirdesréductionsetdescouponsdefidélité.Cesoffresliéespeuventenrichirleurspossibilités de discrimination par les prix et donc augmenter leurs profits (Adams et

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Yellen, 1976).Dans le domaine des prêts, les plates-formes depeer-to-peer lending deprêtsentreparticuliersouentreparticuliersetentreprisessedifférencientdesbanquesparlasimplicitéetlarapiditédesmodalitésd’octroiducrédit,ainsiqueparlapossibilitépourleprêteurdechoisirsonemprunteur.

Laconcurrencepourraits’intensifierdanslesannéesàvenirsilesentrantsenrichissentla gamme des services proposés pour se rapprocher de l’offre des banques. Certainesentreprisesontcommencéàévoluerdanscettedirection.Parexemple,AmazonproposeàprésentdesprêtsauxPME, tandisqu’AlibabaenChine,uneentreprisedecommerceenligne,acrééunebanqueenligne(MYBank)aprèsavoirinitialementproposédesservicesde paiement. Il n’existe cependant à ce jour aucune étude économétrique permettantd’évaluerl’impactdel’entréed’acteursnonbancairessurlaprofitabilitédesbanques.Demême, les modèles théoriques de la littérature enmicroéconomie bancaire ne sont pasencore suffisamment riches pour rendre compte de la variété des contrats existant entrebanquesetentrants,etdesnouveauxmodesdeconcurrence.Parexemple,iln’existepasdemodèleétudiantl’impactsurlestauxd’uneconcurrenceentreunebanqueetunentrantquicollectedesdépôtssansproposerdesprêts(etviceversa).

Lerenforcementdelacoopérationentrelesacteurs

Les acteurs concluent fréquemment des accords de coopération pour bénéficier deseffetsderéseaurelatifsaudéploiementdes innovations.Ainsi,quandla technologiedesdistributeursautomatiquesdebilletsestapparuesurlemarché,lesbanquesontdûarbitrerentre ouvrir leur réseau à leurs concurrents pour augmenter la taille de leur réseau etfermerleurréseaupourretenirdesprofitssurlesretraitsréalisésparleursconsommateurs.MatutesetPadilla (1994)montrentque ladécisionde rendredes réseauxcompatiblesadeseffetsambigussurlaconcurrencesurlemarchédesdépôts.D’unepart,unréseaupluslarge augmente la concurrence (et donc le taux des dépôts). D’autre part, les banquesoffrentdestauxplusfaiblesquandleursréseauxsontcompatiblesparcequelesretraitsdebillets s’effectuent plus facilement (effet qualité). De façon similaire, au cours dudéveloppement de services innovants, les banques doivent arbitrer entre coopérer etbénéficier des effets de réseau, et développer des innovations propriétaires qui leurpermettent de se différencier. En présence d’effets de réseau, ces incitations dépendentgénéralementdelatailledesbasesinstalléesdeconsommateurs(KatzetShapiro,1986).Les banques disposant d’une base de clientèle importante sontmoins incitées à rendreleursservicescompatiblesquecellesquinedisposentpasinitialementdeconsommateurs.Quandellesdécidentdecoopérer,ellesdoiventégalementconsidérerlesrisquesrelatifsàunpartagedeleursinfrastructures(problèmederéputationencasdefraude,parexemple).Lacoopérationprésente l’avantagedeleurpermettrededéfinirdesstandardsenmatièredegestiondesrisquespourprotégerleurréputationencasd’incidentdesécurité.

Il existe de nombreux partenariats entre banques, ou entre banques et entrants18. Letableau2(ci-contre)donnedesexemplesdepartenariatsoudejointventuresentreplates-formesdepaiementetentrants.

Tableau2

Exemplesdepartenariats

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Source:d’aprèsl’auteur.

Lesbanquesontégalementconcludespartenariatsentreellesouavecdesentrantspourlancer de nouveaux systèmes de paiement. Par exemple, aux Pays-Bas, de nombreusesbanques ont constitué une joint venture pour lancer les paiements par mobile avec latechnologieNFCaupointdeventeen2013.

Lesconséquencesdelaco-opétitionenmatièredepolitiquedelaconcurrence

Ledéveloppementderelationsverticalesetl’existenced’alliancesdepartenariatsoudejointventures pourraient se traduireultérieurementpardesproblèmesdepolitiquede laconcurrence. Par exemple, en 2011, la Commission européenne a ouvert une enquêterelative au processus de standardisation des paiements sur Internet entrepris par leEuropean Payments Council19. Les régulateurs doivent arbitrer entre organiser uneinterventionexante qui favorise la coordination des décisions des acteurs et laisser lesautorités de la concurrence intervenir ex post pour sanctionner les pratiquesanticoncurrentielles. Une intervention réglementaire ex ante comporte toujours desavantages et des inconvénients. Si le régulateur n’intervient pas, l’incertituderéglementairepeutconstituerunfreinàl’innovation,lesacteursnedisposantpastoujoursde garanties suffisantes pour que leurs investissements en matière de coopération nefassentl’objetdesanctionsultérieures.Enrevanche,lerégulateurnepeutpassesubstituersystématiquement au marché pour choisir les technologies les plus efficaces, dans uncontexted’incertitudesurlavaleurdesinnovations.

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L’approche de la Competition and Markets Authority (CMA) au Royaume-Uni estinstructive en matière de politique de la concurrence. En 2014, la CMA a lancé uneenquête sur l’offre de services bancaires aux particuliers et aux PME, identifiant troisdommages potentiels liés à des dysfonctionnements de la concurrence dans le secteurbancaire. Premièrement, les consommateurs pourraient être empêchés de changer defournisseurdeservices,cequiréduiraitlesincitationsdesbanquesàinnoverouàsefaireconcurrenceenprixouenqualité.Deuxièmement,laconcentrationdumarchépourraitsetraduireparunehaussedesprixpour lesconsommateurs.Troisièmement, l’existencedebarrières à l’entrée pourrait également réduire l’offre de services, augmenter les prix etdoncsetraduireparunebaissedubien-êtredesconsommateurs.LaCMAvientderendreen octobre 2015 ses conclusions sur les remèdes potentiels à une concurrence jugéeinsuffisantedansl’industriebancaireauRoyaume-Uni.

CONCLUSIONLes récentes innovations proposées par les banques en ligne et les opérateurs non

bancaires conduisent les régulateurs à redéfinir progressivement les conditions d’entréesur lemarché de détail bancaire ainsi que lesmodalités de surveillance de ses acteurs.Différentscadressontenvisagés,tantenEuropequ’auxÉtats-UnisoumêmeauRoyaume-Uni.Dansquelquesannées,ilseraintéressantdequantifierparuneétudeéconométriquel’impactdesmesuresréglementairesvisantàfavoriserledéveloppementdelaconcurrencesur la diffusion des innovations, la profitabilité des banques et le bien-être desconsommateurs.

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LATARIFICATIONETLEBIGDATA:QUELLESOPPORTUNITÉS?JEAN-MARCBOYER*1

RAPPELSURLEBIGDATA

On connaît les « 5 V » des données massives (numériques ou not only SQL2) : levolume qui est le produit du nombre d’observations par le nombre de variables ets’exprimeenzettaoctet(soit1021octets),lavitesse(ouvélocité)définiecommelenombred’événementsparseconde,lavariété(complexitéounombredevariables),lavéracitéetlavaleur. L’important dans l’industrie financière, c’est l’exploitation des données renduepossibleparl’accèsauxdonnées(parlesréseauxInternetoudetypeneural),lescapacitésde stockage (cloud), le traitement (puissance de calcul, baisse des coûts des bandespassantes),lesaccès(tablettes,objetsconnectés),leslogicielsenopensourceplusfiablesetplussoutenus,leslangagesdeprogrammationouverts(R,Python)etleclusterHadoop(unframeworkenJavalibre,quipermetlestockageetletraitementdetrèsgrosvolumesdedonnées).

Cettepériodeestmarquéeparuneaccélérationdutemps(leschiffresdoublenttouslesdeux ans comme la loi de Moore concernant les puces et les coûts de traitementinformatique)etunecontractionde l’espace (onestàdeuxclicsduprésidentdesÉtats-Unis). C’est une révolution digne de la relativité générale pour les scientifiques. Nedevrait-ond’ailleurspasenvisagerun«congrèsSolvay»virtuelsurledigital?Maissila«toile»estsubie,l’Internetressemblera,pourlespluspoètes,aunénuphardespoumonsdeChloédansl’Écumedesjoursquiseréduitjusqu’àlafindumodedevieactuel.

QUELUSAGEDUBIGDATA?L‘EXEMPLEDEL’ASSURANCELe champ d’opportunités techniques dubig data est immense en ce qui concerne la

tarification (et lemarketing qui lui est lié)même si le big data et le digital modifientl’ensembledelachaînedevaleurs,deladésintermédiationàl’accélérationdelagestion.

Ainsi,lebigdatapermetunetarificationplusfineainsiqu’unmeilleurajustementdesgaranties, l’évitement des doubles garanties, mais aussi une estimation des risques enstockeninstantanédesurcroît(parexemple,dansledomainedelabancassurance,aveclacorrélation du retrait carte bleue le samedi soir et du risque automobile pour un jeuneconducteur).Letraitementdesdonnéesdemassepermetdeminorerlasélectionadverse(le risque est mieux connu) et les fraudes. Si l’on dispose de données fines, on peutaméliorerlezoning(parexemple,lerisqueincendieenfonctiondelavétustédusecteur)ouretarifer(pardesobjetsconnectésembarqués).Laseulelimitedelasegmentationestlanécessairemutualisation.

Le big data peut être utilisé pour l’estimation et la prévention des risquescatastrophiques(encasdepandémieoud’inondation,parexemple).Laprévisionnécessitecependantdessupercalculateurshorsdeportéedesassureurs.

Ilpeutpermettredesprestationsentempsréel(commedesindemnisationsguidéesparles photos du postier envoyées aux réseaux sociaux).Mais attention, dans certains cas

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commeaveclagénéralisationdutierspayantdanslecadredelaloiSanté,onpasseàunremboursementnonincitatifetaveugle.

Il permet la création d’écosystèmes en architecture ouverte (choix de couverturesd’assurancesparunintermédiaireouinversement,choixdesprestatairesparunassureur).Dans ce « saucissonnage » de la valeur apportée, les assureurs risquent une pressionconcurrentielleaccrue.

Ladétectionetlalimitationdesfraudesfontpartiedespotentialitésliéesaubigdataparladétectiond’activitéspourdesassurésàquil’onversedesindemnitésjournalières…

En marketing, le big data permet de connaître et même d’anticiper les besoins desclientsetdesprospects(lesréseauxsociauxnes’enpriventpas,pourrevendredesfichiersn fois) pour prédire les besoins non couverts. Cela implique une refonte des produits,compatibleaveccesnouvellestechnologies.

Engestiond’actifs,lebigdatapeutfournirdesenquêtessurlesinvestissementscibles.En quoi rebat-il les cartes de la tarification du risque de taux ? La tarification enassurance-vie(commefixerlecoûtdutauxgaranti,fut-ilàzéro,enenvironnementdetauxbas)dépenddupassif(lesengagements),maisaussidel’actif(allocationdeplacementsencouverture).Lasituationestsymétriqueauniveaudesbanques(tarificationdurisquedesignature,maisaussidurefinancementaupassif).Laréglementationestantiprudentielle(elle pousse à détenir des titres d’État en considérant le risque souverain nul) et anti-économique:valueatriskàunan,alorsqu’ilfautfavoriserl’investissementlong,commelerapportdeVilleroydeGalhau(2015)l’acompris.

En matière d’assurances, les risques cybernétiques de confidentialité et de sécuritéportentsur lespersonneset lesentreprises.Lescyberattaquessontautantderisquesqued’opportunités à couvrir par les assureurs. Mais attention à la confidentialité(cyberattaques oumême traces repérées parGoogle).On peut tarifer des risquesmêmequand leurs lois statistiques sont inconnues comme pour les cyberrisques. Grâce authéorèmecentral limitequiveutquesi l’onassureengrandnombre, laprobabilitédenvariablesindépendantesidentiquementdistribuéestendverslaloideGauss.

Latarificationdela«primepure»(produitdelafréquenceetducoûtmoyen)étantunedonnée partagée dans le monde entier, les assureurs devront faire la différence sur lereste : la résilience financière, l’efficacité de la gestion et des services et la fluidité durelationnel.Enamontdelatarification,lavaleurajoutéerésideradansl’identificationdesbesoins,lesrisquesdéjàassurésetledegréd’aversionselonlesrisques.L’enjeuestausside passer de l’indemnitaire à une combinaison de services et de prévention, et donc, àterme,de réinventerunepartiedu fonctionnement intrinsèquede l’assurance (ycomprisl’actuariel).

DESOPPORTUNITÉS

L’exempledelatarificationdurisque(enassuranceoupourlerisquedecrédit)

Lesentreprisesbancairesetd’assurancessontparessencegestionnairesdedonnées(qui

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est leur matière première) internes ou professionnelles historiquement (gestion de larelation client – GRC – avec le data mining – exploration de données) et désormaisglobales(bigdata).

L’interfaçageauxobjetsconnectés

Lesdonnéespeuventdésormaisprovenird’objetsconnectéscomme:

–leboîtierdescontratsautomobilesPayasyoudrive(onpeutainsivoirsedévelopperune assurance basée sur l’utilisation) ; avec des véhicules vraiment automobiles (sanschauffeurs, comme annoncé par Carlos Ghosn pour 2016), ce boîtier ne serait plus unmouchard puisque c’est le véhicule (Google Car, par exemple) lui-même qui seraitconnecté;

– l’utilisation de drones pour les sinistres catastrophes naturelles (comme l’assureurAIGauxÉtats-Unis);

–desphotosprisesparlespostierspourlerèglementdessinistres;

– lescapteursbiométriquesdeHealthApple, lebraceletPulsedeWithingsutiliséparAXA,leslentillesdecontactélectroniques,lescapteursintracomprimés,lesséquenceursdepoches(onpeutdécoderunADNpourmoinsde1000dollars)quipeuventidentifierquatre mille maladies génétiques, mais, aujourd’hui en France, les prédictions depathologiessontproscrites.

L’interfaçageavecledigital

Aveclescomparateurs

L’Associationdessites internetcommunautaires(ASIC)peuts’alarmerdesrisquesdelégislations contraignantes. Le Groupement des comparateurs d’assurance (GCA) a étélancé au début de 2015. Les sites évoluent à grande vitesse, comme avec lesnew bestactions (NBA) : proposer un produit en fonction de quelques clics d’utilisateurs. DeschartesdecomparateursontémergéàlasuitedesrecommandationsduComitéconsultatifdusecteurfinancier(CCSF,2012).

AvecInternet

Avecnotammentlescomparateurs,l’asymétried’informationentreclientetprestatairefinancier s’estompe, et le client est pratiquement aussi informé que l’assureur ou lebanquier.L’asymétried’informationpeutmêmeêtreinverséedanslecasd’unparticulierquidemandeundécodagedesongénomeaveclesprobabilitésdecontractertelleoutellemaladie,alorsquecelan’estpasaccessibleàl’assureur.

Aveclescyberrisques

ZurichReyvoitunmarchécolossal(plusde1%duPIBd’icià2020,àcompareraux200Md€ de chiffres d’affaires des assureurs en 2014 en France), mais les entreprisesn’ontpasleréflexedes’assurer.

Plus généralement, AXA et Microsoft lancent un « hackaton » (événement où desdéveloppeursseréunissentpourfairedelaprogrammationinformatiquecollaborative,sur

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plusieursjours)enFrance.

Avecl’«ubérisation»del’économie,c’estplusl’usagequelapropriétéquidevrontêtreassurés dans le cas d’un partage de véhicule (Uber, Blablacar, etc.) et aussi d’unehabitation(AirBNB,laplusgrandechaînehôtelièrevirtuelledumonde),etc.

L’exploitation des données demasse suppose unmaximum de variables (vingtmillevariables,parexemple),quitteàenajouter(parexemple,enconstruisantdesagrégatssurfenêtresglissantesdetempsoudezones).Ilvautmieuxunmodèlesimpleavecbeaucoupde données que l’inverse.Lemodèle se construit en deux échantillons, le premier pourl’apprentissageautomatique(machinelearning),puisledeuxièmepourlavalidationdelarobustessedelamodélisation(parexemple,polynomiale)desdonnées.

Ces opportunités nombreuses (objets connectés, interfaçage avec le digital«ubérisation»delasociété)supposentunpeudetechnologie,maisquelaFrancesembledévelopper (cursusbig data, investissements dans les start-up, haut niveau scientifiquemêmes’ilfautl’adapter,etc.).QuelssontalorslesfreinsquinousdistinguentdesSiliconValleys?

DESLIMITESMULTIPLES

Deslimiteséthiques

Sommes-nous dans la prévention (comme les détecteurs de fumée) ou dans lasurveillance(aveclerisqued’unesociétébigbrother)?Nousdevonsgérerleparadoxeentermesdeprotectionetd’expositionde lavieprivée :onvabeaucoupplussur Internet,maisonsouhaiteplusdeconfidentialitédesesdonnées.

Commentprendreencompteledroitàl’oubli(commelescancersdeplusdecinqansdanslaconventionAERAS–s’assureretemprunteravecunrisqueaggravédesanté)oumêmelerefusdesavoir(moratoiresurl’utilisationdugénomeenFrance)?

Laprédictibilitédespathologiespeutconduireàrefuserdesrisqueset, inversement,àrefuserdes’assurer(aléamoral).Cetteprédictibilitéestquandmêmeuneopportunitédeprévention. Des filles d’Asclépios, la France a préféré Panacée (le curatif) à Hygié (laprévention)parlobbyingdel’offresansdoute.

Quelles sont les contraintes juridiques (sous l’autoritéde laCommissionnationaledel’informatique et des libertés – CNIL) et ordinales (confidentialité prônée par le corpsmédical)?

Lapréservationdelaconfidentialitédesdonnées(etdelavieprivée)estmiseàmal.Lasupposée muraille de Chine entre les données contractuelles et la connaissance par leprestataireestplutôtunecloisondepapier,àlajaponaise.

Latarificationàlapersonne(l’hypersegmentation)estcontraireàlamutualisationdesrisques, mais cette segmentation peut avoir des vertus de prévention. Développer unemédecinepersonnaliséepourdesthérapiesplusefficacespermetausecteurdelasantéderéaliserdeséconomies.

Deslimitesétatiques

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LatentationenFranceestdesedoterd’unelégislationcontraignante(deuxloisMacronetLemaire3sontendiscussionsurlenumérique,auxquelless’ajoutelaloiValtier)aveclerisquedebriderunecréativitéqu’ilfaudraitaucontraireencourager.Leprincipedujardinà la française où il faut tout encadrer fiscalement par des taxes, des contrôles (parl’Autoritéde régulationdes communications électroniques et despostes–ARCEP– enl’occurrence), des cadres juridiques contraints : comparateurs classés courtiers, plates-formes de crowdfunding classées en conseillers en investissement participatif (CIP),prestataires en service d’investissement (PSI) ou intermédiaires en financementparticipatif(IFP)(ACPRetAMF,2014).

Entrent également en jeu les conditions administratives pour être fiscalementdéductibles(parexemple,concernantl’assurance-santé,lescontrats«responsables»).

Lesdirectiveseuropéennes interdisentdediscriminers’iln’yapasdebasestatistiquejustificative et parfois même quand il y en a, comme l’interdiction de discriminationtarifaire homme/femme, ce qui donne lieu à des absurdités telles que la hausse du tarifautomobileetdesrentespourlesfemmes.

On peut ajouter la tentation d’intervention des organismes parapublics commel’AFNOR(ISOauplanmondial)quiproduitunrapportsurlanormalisationenmatièrededonnéesmassives.

Uneautretentationfrançaiseconsisteàdemanderdesrapports(lerapportLemoineaugouvernement, lesplansprioritairesduministrede l’Économie, les rapportsde l’institutLouisBachelier,etc.)plutôtquedeprivilégierl’action.

Etalab fournit gracieusement une dizaine de milliers de fichiers en open source(www.data.gouv.fr),maiscertainesdonnéesrestentàdéverrouiller.

Deslimiteséconomiques

La révolution technologiquedudigital est«disruptive».DepuisSchumpeter,on saitquecettedisruptiontendàdétruirel’économieexistante(brickandmortarenl’occurrenceetprincipesactuarielsdemutualisation).Unassureurquiinvestitdansunestart-updonnel’impression de se tirer une balle dans le pied. En fait, il s’assure car en payant unemodesteprime(investissementdansuneAssurTech),ilseremboursedeladestructiondesonbusinessmodel si cette start-up devient une licorne (succès de plus de 1 Md$ decapitalisation).

Despressionsdemarché

Les banques auront un avantage concurrentiel encore accru, d’autant plus que labancassurance est une spécificité française. Non seulement un banquier peut suivre lesfluxfinancierssuruncompteetdoncproposerdesplacementsaubonmoment,maisaussiilpourrautiliser lesdonnéesbancairespouraffinersonestimationdes risquesduclient.Parexemple,siaudistributeurautomatiquedebillets,onconstatedesretraitsenliquidelesamedi soir, on peut supposer que le client sortira et sera un sujet à risque pour saconduite. LaBanque postale n’a pas tardé à avoir l’idée. L’histoiremontre aussi qu’unmauvaisrisqueassuranceestunmauvaisrisquecrédit,etviceversa.

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Despressionsréglementaires

Solvabilité II exige une analyse plus exhaustive et formalisée des risques, renduepossible avec le big data. Dans le domaine bancaire, l’approche bâloise exige uneestimationégalementpluspousséedesrisquesdecontrepartie.Aveclebigdata,onpeutadjoindreaucontenantdeséchangesdedonnées,l’analysemêmeducontenudesdonnées.

Ladirectivesurladistributiond’assurance4(DIA2)obligeàmieuxciblerlesbesoinsduclient(cequel’onpeutcernerpar l’utilisationd’unmoteurderecherche).Sigma(SwissRe Group) a produit à cet égard le rapport Digital Distribution in Insurance5. Cetteconnaissance du client s’étend de fait aux conseillers indépendants en gestion depatrimoine (qui subissent aussi lamise en œuvre de la directiveMarché d’instrumentsfinanciers2ouMIF2).Silatransparences’accroît,celalaisseespéreruneplusgrandepartde conseil versée en honoraires au détriment des commissions qui peuvent biaiser leconseil. Les directives MIF2 et DIA2 vont ainsi modifier le cadre législatif del’intermédiation (transparence, indépendance, interdiction ou non des rétrocessionssuivantlesversionsdel’AMF–Autoritédesmarchésfinanciers–transcrivantcellesdel’EuropeanSecuritiesandMarketsAuthority–ESMA).Siuncomparateuraunstatutdecourtier,ildoitseplierauxrèglesdel’intermédiation(livreVduCodedesassurances,ORIAS,devoirdeconseil,dépendanceounonàunassureurouàunorganisme,etc.).Onretombesurlaproblématiqueclassique:préconiserlemeilleurrapportqualité/prixoulameilleurecommission?

Lesbanquiersetlesassureurss’estimentprotégéspardesbarrièresàl’entrée(capitauxàmobiliser, agréments). En réalité, ils ne sont protégés que sur la partie de portage derisque. Pour la partie lucrative de la chaîne de valeurs (tenir le client), il suffit d’êtrecourtier,CIF(conseillereninvestissementsfinanciers)ouintermédiaireenopérationsdebanqueetdeservicesdepaiement(IOBSP).Parsaconnaissancedel’internaute,Googlepourrait donc déjà envahir le marché de l’intermédiation, mais risquerait de perdre leproduitactueldelaventedesconnexions.

Lesassureursserontchargésdel’identificationdesrisquesparleconceptd’exposome,àsavoirl’intégrationdel’ensembledesexpositionspourlavieentière.Ilconvientdeseréférer à la multiplicité des facteurs environnementaux (air, eau, sol, expositionsprofessionnelles, alimentation, comportements individuels) susceptibles d’avoir un liencausalavecledéveloppementdecertainespathologies.

L’AssurTechfigureparmilesFinTechencouragésparParisEuroplaceetunepartiedespouvoirs publics. La diffusion de l’AssurTech oscille entre mystérieux (Aztech ?) etindispensable(Hastech?).AXA(Kamet),Allianz(Riviera),MAIF(économiedupartage),SFEREN (innovation) ont démarré leur « incubateur », sans compter les data labs, lesfonds de private equity spécialisés, les partenariats avec les sociétés du digital, àcommenceravecleGAFA(Google,Apple,Facebook,Amazon).

L’économie de l’assurance s’est transformée (apparition des mutuelles sansintermédiaires,de labancassurance,explosionde l’assurance-vie, etc.),mais le tournantd’Internet (utilisé plus en consultation tarifaire qu’en souscription) n’a pas engendré de

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bouleversements. Si le big data des financiers ne révolutionnait pas l’écosystème, lesintervenantsdudigitals’enchargerait(Oranges’invitedanslesmoyensdepaiement).

Laformation

Pour poursuivre l’essor de cette révolution industrielle au sens de Schumpeter, laformation est indispensable, comme celle de data scientists (lancée cette année parl’Institutdesactuaires/InstitutduRiskManagement, l’Ensae,TelecomParisTech,HEC,Dauphine, etc.). Mais il reste toujours la possibilité de se former en ligne grâce auxnombreuxcoursenligneaccessiblesgratuitement.

LaFranceestaussienviéepoursesmatheuxquerailléepoursesbureaucrates.Maislesformations scientifiques sont à adapter (cryptage, anonymisation, logiciel open source,etc.). L’exploitation du big data suppose la conjonction de trois compétences :informatique,méthodesstatistiquesetconnaissancemétier.Àdéfaut,onpeuttravaillerenéquipe(pizzateam).

L’undesseulspostesoùlesassureursinvestissentsanscompter,c’estledigital(termevenantd’ailleursde«comptersursesdoigts»)ou,pluslargement,lenumérique,c’est-à-direlesnombresissusdel’arithmétiquedesGrecsquin’aimentpluscompter.

CONCLUSIONOnassiste àunchangementdeparadigme, impliquantune réingénieriedesprocessus

totaleetpermanente.Lebigdataetlarévolutiondigitalenesontpasunsimpleajoutàlamode,maisune refontede l’approchedes risques (doncduclient), de leur appréciation(comité des risques), de leur gestion (en digital et en temps réel) et de leurprovisionnement.Cette refontesupposeunchangementd’organisation,d’organigramme,moinsfréquentquelesannoncesd’unadjuvant(directeurdudigitalenplus,alorsquecesujet est transverse).Les services financiers sont plutôt dans leur phase d’apprentissagequ’enexcèsde traitements (overfitting).Le tempspresse,dansunchampdeprestationsmondialisées:lesÉtats-Unisdétiennentlesclésdudigitaletl’Inde,deuxièmemarchédel’Internet,seraleurrelais.

BIBLIOGRAPHIEACPR(Autoritédecontrôleprudentieletderésolution)etAMF(Autoritédesmarchés

financiers)(2014),S’informersurlenouveaucadreapplicableaufinancementparticipatif(crowdfunding), 30 septembre, https://acpr.banque-france.fr/fileadmin/user_upload/acp/Communication/Communiques%20de%20presse/20140930-Sinformer_sur_le_nouveau_cadre_applicable_au_financement_participatif.pdf.

CCSF(Comitéconsultatifdusecteurfinancier)(2012),«AvisduComitéconsultatifdusecteur financier pour renforcer la transparence et la qualité des comparateursd’assurances de dommages sur Internet », 10 mai, www.banque-france.fr/ccsf/fr/publications/telechar/avis_r/avis-du-comite-consultatif-du-secteur-financier-renforcement-comparateurs-assurances-dommages-internet.pdf.

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VILLEROYDEGALHAU F. (2015), Le financement de l’investissement des entreprises,rapportd’étapedeManuelValls,PremierministredelaRépubliquefrançaise,août.

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TRANSFORMATIONDESINSTRUMENTSETDESLIEUXDETRANSACTION

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LESMOYENSDEPAIEMENT,QUELLEINNOVATION?

JEAN-YVESFOREL*1

Par moyens de paiement, on désigne aujourd’hui plusieurs grandes familles deproduits : le chèque, les espèces, la carte bancaire, le virement et le prélèvement. Cesfamilles recouvrent des réalités différentes en termes de gestion tant sur le planéconomiquequ’industriel.

Sicettefamilledeproduitsaconnuenapparenceunegrandestabilitédepuistrenteans,elle est en réalité en perpétuelle évolution, obéissant à des cycles longs influencésnotammentpar l’innovationet leurusagepar lesconsommateurs.L’innovationconstituel’undecesprincipauxfacteursd’évolutionquifontdesmoyensdepaiementuneindustrievivanteetdynamique.

Durant les années 1960, les Français ouvrent des comptes bancaires et se voientproposerunchéquier.L’apparitiondelacartedepaiementen1965vapermettrederetirerde l’argent à un distributeur de billets, puis va changer la manière de payer dans lesmagasins.C’estalors l’interbancaritémiseenplacepar lesbanquesfrançaisesautourdece produit qui va permettre le développement de son usage du côté des particuliers, etl’universalitédesstandardsquivaconduireàsonacceptationlapluslargepossibledanslecommercedeproximité.

Schéma1

Chronologiedesmoyensdepaiement

Source:groupeBPCE.

DanslecadredusystèmedescartesbancairesenFrance,lacartes’estconsidérablementdéveloppée durant cette période, sous l’impulsion collective des banques, pourpromouvoir l’undesmoyensdepaiement leplus sécurisé sur labased’une technologieéprouvée.À partir des années 1980 débutent les travaux autour du paiement à distanceavec tout d’abord l’arrivée de la télématique, puis avec Internet qui permet l’essor ducommerceenligneetdupaiementélectronique.En1999, lesbanquesinnoventpour lespaiementsdepetitsmontantsavecl’expérimentationd’unporte-monnaieélectroniquesurunecarteàpuceprépayée,ils’agissaitdeMoneo.

ÉVOLUTIONRÉCENTEDESMOYENSDEPAIEMENTENFRANCE

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Le paysage des moyens de paiement a beaucoup changé pour accompagner lestendancesdeconsommationactuelle.Globalement,lesmoyensdepaiementscripturauxetfiduciaires ont tendance à décroître régulièrement au profit des moyens de paiementélectroniques.Maisilconvientd’entrerdansledétaildechaquefilièredepaiementetdesusagespourlesquelscesmoyensdepaiementsontutiliséspourcomprendreladynamiquedusecteur.

Aujourd’hui, plus de la moitié du nombre de paiements reste encore effectuée enespèces.Silaréglementationvientlimiterlemontantdestransactionsenespèces,celles-cirestent majoritairement utilisées pour les paiements de petits montants du quotidien.S’agissant des autresmoyens de paiement, l’utilisation de la carte bancaire ne cesse deprogresser, devenant depuis une dizaine d’années le moyen de paiement privilégié desFrançais.Elle devrait représenter en 2015près de 50%dunombre des paiements horsespèces (cf. tableau 1 ci-contre). Si le chèque est encore utilisé, la décroissance de sonusages’intensifie.Levirementreprésentaitprèsde18%destransactionsen2014etprèsde88%delavaleurdespaiements.Leprélèvement,quantàlui,s’estgénéralisépourlespaiementsrécurrents.

Pour bien comprendre ces chiffres, il convient de distinguer les paiements desentreprises entre elles qui comprennent de nombreux règlements à distance et une trèsgrandepartiedelavaleurdespaiementsdansnotrepays(principalementconcentréssurlevirement,leprélèvementetlechèque),despaiementseffectuésparlesparticuliersdanslecommerce(cartebancaire,chèqueetespèces)quisontbeaucoupplusnombreux,maisquireprésententunevaleurplusfaible.

Tableau1

Répartitiondunombredetransactionsparmoyendepaiement

(horsespèces),2008-2014

(enmilliard)

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*TMCA:tauxmoyendecroissanceannuelle.

Source:BanquedeFrance.

Tableau2

Répartitiondumontantdetransactionsparmoyendepaiement

(horsespèces),2008-2014

(enMd€)

Source:BanquedeFrance.

Uneestimation récentedunombred’occurrencesdepaiementmontreque lapart despaiements réalisés par les entreprises est faible. En revanche, le plus grand nombre depaiementsréaliséspardesparticulierssontenespèces,etce,dansuneproportionde60%(cf.tableau3).

Tableau3

Répartitiondestransactionsparmoyendepaiementpourlesparticuliersetlesentreprises,2014

(enmilliard)

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Source:étudeAres&copourBPCE.

On peut constater que depuis ces dernières années, une substitution naturelle s’esteffectuée surtout grâce à la maturité du paiement par carte. À ce titre, le nombre dechèquesencirculationabaisséde29%entre2008et2014.Lapréoccupationdesacteursdel’écosystèmedespaiementsdevradoncêtredemieuxpiloterlasubstitutiondesespècespardesmoyensdepaiementdigitaux.

L’innovation est-elle si bouleversante que l’on peut imaginer que ce panorama auraprofondément changé à l’horizon de 2025 ?C’est l’une des questions que l’on peut seposer. Le rythme auquel diminuera l’utilisation des chèques, la dématérialisation despaiementsdepetitsmontantsetladigitalisationdestransactionsparlesnouveauxsupportsmobilesconstituentlesprincipalespistesderéponses.

CONDITIONSDELARÉUSSITEDESINNOVATIONSENMATIÈREDEMOYENSDEPAIEMENTDepuisquelquesannées,lemarchédesmoyensdepaiementestentréeneffervescence.

Unvéritablefoisonnementd’innovationsetdeprojetss’estconcrétiséparlelancementdenombreux services que ce soit pour les particuliers ou les entreprises. Ce mouvements’intensifieaujourd’huiavecunnombretoujourscroissantd’acteursetd’investisseursquisepositionnentsurcedomained’activité.

Sicesinitiativescréentunevéritablerichesseetuneémulationsurlemarché,toutefois,ilestsouventdifficilededistinguercellesquiapportentuneréellevaleurajoutée–etquisontappeléesàsedévelopper–decellesquineréunirontpaslesconditionsd’uneréelleadhésion du marché. Cela renvoie à une question fondamentale : quelles sont lesconditionspourréussiruneinnovationdanslesmoyensdepaiement?

Tout d’abord, tout nouveau moyen de paiement doit être simple et facile à utiliser,pratique et sécurisé. Il doit avoir la confiance de son utilisateur. Ensuite, lesconsommateurs exigeants exercent une pression sur la tarification (quand le moyen depaiement n’est pas gratuit), ce qui créé des contraintes du point de vue du modèleéconomiqueetdesrevenusetdescoûtsd’exploitationduservice.

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Dans le cadre de son utilisation, le nouveau moyen de paiement doit égalementproposerdelavaleurajoutéeparrapportauxmoyensdepaiementexistants.L’attractivitédel’offreproposéeestdéterminante.

Enfin,etc’estprobablementlaconditionlaplusimportante,laréussitedesonadoptionparlesconsommateurspasseparuneorganisationspécifiquedesondéploiementdanslemarché.Dansunmarchétrèsparticulieràdeuxfacesoùl’ontrouvetoujoursunpayeuretunpayé,ilconvientdesynchroniserl’utilisationparlesdeuxpartiesdefaçonàcequ’ellesserencontrentettravaillentensemble,quellequesoitlabanquequiafournilemoyendepaiement.C’estcequel’onappellecommunémentl’universalitédumoyendepaiement.L’ensemble de ces conditions rend l’adoption de ces innovations par la clientèlerelativementlente.

Danslesfaits,lesoffresinnovantessontpresquetropnombreuses,cequilimiteaussilacapacitédecertainesd’entreellesàémergeretàsedévelopper.Desurcroît,ellestouchentl’ensemble de la chaîne du paiement : le support physique de l’offre, le procédé depaiement, lasolutionelle-même.Unproblèmedelisibilitéetdecompréhensionpourlesclientsparticuliersetlesentreprisesestclairementposé.

Ce terrain d’innovations suscite un vif intérêt de la part de nombreux acteurs – desstart-upetdesFinTechauxGAFA(Google,Apple,Facebook,Amazon)–quicherchentàsepositionnerauniveaudelarelationclientpoursediversifier,etparfoisavecdesintérêtstrèsdifférents:monétisationdesdonnées,servicesconnexesàvaleurajoutée,etc.

Schéma2

Endixans,lepaiementestpassédedeuxàquatremarchés

*Prestatairesdeservicesdepaiement.

Source:groupeBPCE.

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Le poids croissant des nouvelles technologies dans les paiements favorise égalementl’entréedanslemétierdutraitementdesfluxd’acteursnonbancaires,quiauraientcaptéun peumoins de 10% du volume des transactions dans lemonde. Ces acteurs qui sepositionnent entre les clients et les banques cherchent à élargir leur rôle actuel sur lachaînedevaleurs,àpartirdeleurexpertisetechniqueoutechnologique.

INTÉGRATIONDUPAIEMENTDANSL’ACTED’ACHAT:PAIEMENTSÉLECTRONIQUESETSANSCONTACTLeterraindejeudel’innovationleplusvisibleestlepaiementparlesparticuliersdans

lecommerce.Qu’ilsoitàdistanceouàproximité,lepaiementestappeléàs’intégrerdeplusenplusaucœurduprocessusdel’acted’achat.

Quelquesdonnéessurleshabitudesdeconsommationetd’utilisationd’Internetparlesconsommateurs permettent de mettre en perspective cette tendance et d’expliquer cephénomène:

–larecherche:66%desvisiteursd’uneenseignevisitentsonsiteweb(contre34%quinevisitentquelemagasin);

–l’évaluation:68%desmobinautesserenseignentenboutiquesurInternet;

–l’achat:ledispositifdigitalcontribueraitdirectementà44%desachatstotauxd’uneenseigne(contre10%pourlesventesenligne);

–lepartage:86%desinternautesfontconfianceauxavisenligne.

Tableau4

Sondagesurl’évaluationdue-commerceetducommercephysique

Source:groupeBPCE.

Plusieursnouvelles façonsdepayersesontdéveloppéesconcrètementdepuis2010ettirent profit de l’essor d’Internet et de certaines technologies. Ces nouveaux servicesvisentnaturellementàapporterdesfonctionnalitésenrichiesauxutilisateursdeservicesdepaiement.

Lapremièreinnovationn’estpasunnouveaumoyendepaiement,c’est ladéclinaisond’unetechnologiedanslesmoyensdepaiement,lesanscontact.Lepaiementsanscontactpermet de payer plus rapidement, sans saisir un code confidentiel, pour des petitsmontants,enapprochantunecarteouuntéléphonemobiled’unterminaldepaiement.Ilestappréciétantdescommerçantsquedesutilisateurscarilpermetdavantagedefluiditéen caisse et garantit un confort d’utilisation accru par rapport à un paiement par carteclassique. Sa croissance récente (cf. graphique) montre que les attentes desconsommateurs seront rapidement satisfaites sur les quelques secteurs d’achat du

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quotidien.

Graphique

Paiementsanscontactennombreetenvaleur,2012-2015

Source:GIECartesbancaires.

Lesanscontactsurtéléphonemobileenrichitlesfonctionnalitésetrenforcel’utilisationde lacartequiest«dématérialisée»dans le téléphone. Ilpeut transformer le téléphonemobile en support physique d’une offre de paiement pour payer dans desmagasins deproximité.

D’autres technologies adjacentes sont aujourd’hui expérimentées par le marché pourpermettrelepaiementdeproximitéaumoyend’unmobilecommelareconnaissanced’unsignal debeacons ou bien l’action de scanner des QRcodes. Il s’agit finalement d’uneaméliorationdesparcoursclientsquis’appuiesurlepaiementparcarteetledéveloppe.Lechiffred’affairesdum-commerceoucommerceavecunmobileétaitde4Md€en2014,enaugmentationde54%parrapportà2013(source:FevadiCM)(cf.tableau5).

Tableau5

Évolutionduchiffred’affaires(CA)due-commerceetdum-commerce

(enMd€)

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p:prévision.

Source:FevadiCM.

L’autreinnovationmajeurevientdupaiementenligne,incarnéeparunacteurmajeur:PayPal.Ils’agitd’unportefeuilleélectronique.Lesportefeuillesélectroniquespermettentd’effectuerdespaiementssurInternetrapidementetsimplement,sansavoiràressaisirlesnumérosdecartedepaiement,ladatedevaliditéetlecryptogrammevisuel.Cesdonnéesne sont en effet demandées que lors de la création du portefeuille électronique. Par lasuite,l’utilisateurdelasolutiondoituniquementsaisirsesidentifiants(parexemple,sonnumérodetéléphoneportableousonadressee-mail)pourréaliserdestransactions.

Compte tenude la croissance soutenued’e-commerce grandpublic – prochede 0 en1999 et supérieur à 70 Md€ en 2015 – et d’une porosité établie entre le commercephysiqueetlecommerceenligne,uneadaptationdelachaînedevaleursseranécessairepourrecréerdeladifférenciation.

Bonnombredeportefeuillesélectroniquesetd’innovationsengénérals’appuientsurunmodèle privatif dit « trois coins » où l’opérateur de la solution est, pour chaquetransaction,àlafoisémetteuretaccepteurdupaiement.Ledéveloppementdecetypedemodèle ne peut être généralisé à l’ensemble de l’écosystème qui perdrait ainsil’universalité.Cesmodèles«troiscoins»ontd’ailleursbesoindumodèleinterbancaireà«quatrecoins»,surlequelilss’appuient,pourfonctionneraujourd’hui.

Assurément, la source d’innovation dans les paiements chez les commerçants résidedansledigital,avecl’essordesservicesàtraversInternet,lestablettesetlessmartphones.L’intelligencedecessupportsvapermettrelacréationdeservicesàvaleurajoutéeautourdu paiement dans le domaine de la fidélité, de services marketing promotionnelpersonnalisésetcontextualisés,etdusuivietdupilotaged’activitépourlecommerçant.

Les supports digitaux permettent désormais de payer par tous les nouveaux canaux.L’enjeupour lepaiement est son intégrationdanscenouvel environnementomni canal,aveclanécessitédefavoriserleparcoursd’utilisationleplussimple,toutenapportantleniveaudesécuriténécessaire.Ledéveloppementdupaiementpar téléphonemobilepeutcontribuer à la création de nouveaux parcours clients et l’émergence de nouvellesexpériencesd’achat.Àcetégard,ildevraitassurerlaconvergenceentrelecommerceenligneet lecommercephysique,enpermettantdecommencerunachatouuneventeparInternetetterminerlatransactionenfaceàfaceaveclecommerçant.Lepaiementmobiledevraitêtre relancésur lemarchéen2016avec l’apparitiondesolutionsportéespar lesgrandsfabricantsdetéléphones,fondéessurdenouveauxsystèmesd’authentificationpartoken(jeton).

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Des expériences clients sont également refondées par les nouveaux modèlesd’intermédiation digitale comme les places de marché, les pots communs en ligne, lefinancementparticipatifet laconsommationcollaborative.Denombreusesplates-formesadoptent des positionnements innovants avec des solutions d’encaissement pour comptede tiers pour devenir intermédiaires d’un secteur ou d’un cas d’usage donné. Cesinnovationsouvrentunnouveaumonde,celuidespaiementsdesparticuliersentreeux.

INNOVATIONSDANSLESPAIEMENTSENTREPROFESSIONNELSETENTREPRISESS’agissantdespaiementsentreprofessionnelsetentreprises,lanaturedesfluxs’inscrit

plutôt dans le règlement à distance de factures et de prestations de plus en plusdématérialisées.Cesontdespaiementsparfoisdemontantstrèssignificatifsquitransitentpardescircuitstrèsstandardisésetindustrialisésdeboutenboutjusqu’auxchambresdecompensation.

L’européanisationdumarchédesmoyensdepaiementaveclacréationdelazoneSEPAad’oresetdéjànormélesproduitsdelafamillevirementetprélèvementtoutencréantungrandmarchécommunetuniqueàcetégardenEurope.Ainsi,onpeutdésormaispayertrèsfacilementparvirementouprélèvementdanstoutelazoneSEPA.

Schéma3

ÉchangesdedocumentscommerciauxenEurope

Source:SEPAmail.

Au-delà de l’extension de la zone géographique d’utilisation du virement ou duprélèvement, les banques innovent en rajoutant des services à valeur ajoutée.Ainsi, lesbanquesfrançaisesvontlancerunenouvellemessagerieinterbancaire«SEPAmail,»qui

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permettra à l’avenir le déploiement de plusieurs services et notamment, dès 2016, lepaiementdefacturesdématérialiséesparvirement.

Les entreprises pourront ainsi envoyer, via leur banque, une demande de paiement àl’un de leur client avec, en pièce jointe, la facture à régler. Les particuliers et lesentreprisespourrontrecevoirsurleurbanqueàdistancecettedemandederèglement,aveclafacture,etpayerparvirementenunseulclic.CettesolutionsimpleetrapidedevraitsesubstitueraupaiementparchèqueouTIPetpermettradedématérialiser lepaiementdesfactures.

Autre innovation qui se développe, le paiement par prélèvement sur les sitescommerçants en ligne ou dans l’espace client d’un créancier. La mise en place d’unmandatdeprélèvementdefaçondématérialiséeenlignepermetdepayerdesabonnementsoudesprestationsparprélèvementsansavoiràsignerletraditionnel«mandatpapier».

Enfin, pour les entreprises d’envergure nationale ou internationale, de plus en plusd’outilspermettentdegéreràdistanceleurcompteetleurtrésorerie.Ledéveloppementducash management en France et à l’international abolit peu à peu les distances et lesfrontièresetaccélèreladématérialisationdespaiementsetl’essorduvirement.

UNENOUVELLERÉGLEMENTATION…

LeParlementeuropéenaplusrécemmentadoptéunenouvelledirectivesurlesservicesde paiement (DSP2) qui va notamment structurer et normer le marché des paiementsélectroniques.

Cette DSP2 complète le texte de 2007 qui avait permis d’ouvrir le marché despaiementsàdenouveauxacteursnonbancairesetavaitfavorisél’émergencedenouveauxmodèles économiques. Sa vocation est de stimuler l’innovation et fluidifier laconcurrence.

Cette nouvelle directive crée ainsi une nouvelle catégorie d’acteurs appeléecommunément « prestataires de services de paiement tiers », qui pourront initier despaiementsdepuis la banquedu client et à la demandedupayeur, sansdétenir les fondsconcernés. Ces prestataires sont, par exemple, des agrégateurs de comptes. Loind’apporterdel’innovationtechnologique,elledevraitconduireàl’émergencedenouveauxmodèlesetposedenombreusesquestionssur lasécuritédelachaînedepaiementsainsicrééeetsurlepartagedesresponsabilitésentreplusieursacteursencasdepassationd’uneopération irrégulière sur un compte. S’agissant de l’ouverture à des tiers, ces nouvellesobligationspourraientfairecourirdesrisquesmajeursquantàl’accèsaucomptebancaireetauxdonnéespersonnellesdesclients.

Cette évolution desmodèles et les nouvelles formes de coopération entre les acteursdevraientmarquerlafindumotdepasseàusageuniqueservantàvaliderunpaiementenligne tel qu’il existe encore parfois aujourd’hui. Il s’agira désormais non seulement derenforcer les procédures d’authentification du payeur,mais aussi de générer unmot depasse pour chaque transaction (envoyé par téléphone, ou fourni par un appareilélectronique).C’estl’authentification«nonrejouable»quirenforcesignificativementlasécuritédupaiement.

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La question de l’authentification et celle de l’identité numérique seront au cœur deschantiersd’innovation,et lesdébatsqui sedéroulentsous l’égidede l’Autoritébancaireeuropéenne(ABE)vontamenercelle-ciàdéfinirdesnormestechniquestrèsstructurantesdanslamiseenœuvredecesnouveauxsystèmes.

Le domaine des paiements est, par construction, interbancaire et ne fonctionneefficacement que parce qu’il est régi par des règles et des normes qui assurent leséchanges de façon structurée et sécurisée, tout en garantissant leur facilité d’usage. Lepaiement est l’un des socles essentiels des transferts d’argent dans l’économie, etl’innovationdoitconforterdevraieslogiquesdecoopérationentreacteursquifontsens.Àcetégard,levrairisquedelaDSP2estbiendeperdrelasécuritéetdonclaconfiancesurlesquellescesystèmevertueuxestfondé.

CONCLUSION:L’ÉQUILIBREDESFILIÈRESDEPAIEMENTREMISENCAUSELamutationdesmoyensdepaiementpasseparl’innovationtechnologiqueconjuguéeà

unnouveaucontexte réglementaireetunnouveaucadreconcurrentiel,à la recherchedenouveaux modèles de solution. Si les moyens de paiement traditionnels représententtoujoursl’essentieldessupportsutilisés,denouveauxmoyensdepaiementsontapparusetcommencent à trouver leur place dans lemarché. La digitalisation des échanges et destransactions va catalyser leur développement et favoriser l’essor de nouveaux supportsphysiquesdel’offreetdenouveauxprocédésdepaiement,àl’instardestechnologiesdublockchainetdesesdéclinaisonsenbitcoins.

Au-delà du téléphone mobile qui pourrait s’imposer comme un nouveau support depaiement, l’intégration d’Internet dans les écosystèmes comme les objets connectéspourrait déboucher sur de nouvelles solutions de paiement.Une étudePanel ConsumerChoice estime que les ventes de nouveaux produits connectés tels que les montresconnectéess’élevaientà64M€en2013,qu’ellesdevraientêtreégalesà400M€en2015etcontinueràsedévelopperàunrythmetrèssoutenuau-delà.

Les banques devront compter avec une concurrence renouvelée faite autant decoopérations que de compétitions avec les nouveaux acteurs, tant sur l’émission denouvellessolutionsquesurletraitementdesopérations.

Enfin, la transformation des systèmes et des infrastructures de paiement, avec lacapacité à exécuter des transactions plus rapidement sur l’ensemble de la chaîne devaleurs, est susceptible de créer les conditions d’un paiement en temps réel, avec desdébitsetdescréditsimmédiatssurlescomptes.Lemondedupaiementinstantanépourraitchangerrésolumentladonnedanslesusagesauquotidienetbouleverserunpeuplusleséquilibresentrelesfilièresdepaiement.

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BITCOINPOURREMPLACERLESDEVISES?

FRANÇOISR.VELDE*1

Les dernières années ont vu l’émergence de ce que l’on peut appeler des monnaiesdigitalesouvirtuelles.Cetteinnovationestvenuedusecteurprivéetnulnesaitencoreoùelle mènera. Les banques centrales doivent-elles s’en inquiéter ? Quelles en sont lesconséquencesmonétairesetfinancières?

Danscetarticle,nousdécrironsBitcoin,quiestsansdoutelamonnaiedigitalelaplusnotoire.Une description précise est nécessaire pour bien comprendre la nature de cettemonnaie. Il faut aussi garder présent à l’esprit l’inspiration derrière Bitcoin, qui est derésoudre un problème : comment créer une monnaie fiable, mais décentralisée ?Quoiqu’onpensedeceproblème,lasolutionapportéealemérited’êtreinnovatriceetlaportéedecesinnovationspeutallerau-delàduproblèmeprécis.

DUPROTOCOLEDECOMMUNICATIONSURINTERNETAUMOYENDEPAIEMENTBitcoinestunprotocoledecommunication,c’est-à-direunensemblederèglesqueses

utilisateurs acceptent de suivre afin d’envoyer et de recevoir des données. Un autreexempledeprotocoleesthttpquigouvernelafaçondontlesserveursduwebetlesclients(c’est-à-direleslogicielscommeInternetExplorer,Chrome,Firefox,etc.)communiquententre eux. Ce préalable comporte plusieurs éléments. D’abord, Bitcoin est une formed’interactionsurInternet,qu’ilprésuppose.Ensuite,l’utilisationdeBitcoin,c’est-à-diredece protocole, est purement volontaire. Enfin, le bitcoin2, en tant que monnaie, est lerésultatdesinteractionsentrelesutilisateursdeceprotocole.

Lafaçon laplussimpledeprésenter leprotocoleestde ledécriredefaçonrécursive.Supposonsqu’Augustepossèdedesbitcoins,gérésparunlogicieldeportefeuille,etdésireles céder à Béatrice. Auguste donne à son logiciel l’adresse de Béatrice. Le logicielconstruit un message qui contient l’adresse d’Auguste, celle de Béatrice et le montantcédé,puisiltransmetcemessageauréseau.Chaquenœudduréseauquireçoitlemessageen évalue la validité. En particulier, il vérifie qu’Auguste est bien le propriétaire desbitcoins en consultant la liste de toutes les transactions passées (nous verrons bientôtcomment cette liste est constituée).Si lemessageestvalidé, lenœud l’ajoute à la zonemémoireavecd’autresmessagesrécemmentdiffusésetletransmetàsontour.Lemessageestainsipropagéàl’ensembleduréseauetfaitpartiedelamémoirecollectiveduréseauquicontientlestransactionsenattentedeconfirmation.

Lasuiteduprocessus,c’est-à-direlaconfirmation,sedéroulemaintenantsurleréseau,dontcertainsnœudsexercentuneactivitédite«minière».Celle-ciconsisteàprendreunensembledetransactionsenattenteàlaliste,enformerunblocetàl’ajouteràlalistedestransactions passées. La liste n’est pas gérée de façon centrale par une quelconqueautorité.Chaquenœuddétientunexemplairedecettelisteetlametàjourenajoutantunbloc.Maisunblocnepeutêtreajoutéauxblocsprécédentsques’ilpossèdeunepropriétéparticulière : il doit comporter dans son en-tête, outre le résumé des transactions qu’ilcontient,lasolutionàunproblèmemathématique.L’activitéminièreconsisteàchercherla

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solutionàceproblèmeetchaquenœudestlibredes’yemployer.

Leproblèmemathématiqueestaucœurduprotocoleetméritedoncd’êtredécritenplusdedétails.Ilreposesurcequel’onappelleunefonctiondehachage,àsavoirunefonctionquiprenduneséquencedelettresetdechiffresxdelongueurarbitraire,etentireuneautreydelongueurfixe.Lapropriétédesfonctionsdehachageestqu’ilestrelativementfaciledecalculeryàpartirdex,maisimpossiblederetrouverxàpartirdey,demêmequ’ilestdifficiledefactoriser(décomposerenunproduitdenombrespremiers)ungrandnombre,mais facile de vérifier qu’une factorisation est correcte. Le problèmemathématique estalorslesuivant:étantdonnél’en-têtedublocleplusrécentx,ilfauttrouverunnombren(dit«valeurdecirconstance»)telquelehachageydelaséquence{x,n}satisfasseunecertainecondition:parexemple,lesvingt-cinqpremierscaractèresdoiventêtredeszéros.Commeiln’estpaspossibled’alleràl’enversetdecalculern,laseuleméthodeconsisteàessayerdesnombresnlesunsaprèslesautres,jusqu’àcequel’ontrouveunyquirépondeàlacondition.

Chaquemineurs’attelledoncà la tâcheetchercheà trouver lenombren.Lepremierquitrouvelefaitaussitôtsavoirauréseau.Chaquenœudduréseaupeutfacilementvérifierquelasolutionproposéeestlabonneetajouterlebloc(avecsasolutiondansl’en-tête)àlachaînedesblocspassés.Maispourquoilesmineurss’évertuent-ilsàtrouverlasolution?Parcequelegagnantadroitàunerécompense.Danssonblocgagnant, il luiestpermisd’insérer une transaction très particulière (nommée coinbase), qui transfère un nombrefixe de bitcoins de personne à lui-même. C’est d’ailleurs la seule façon de créer desbitcoins.

Deux aspects du protocole régulent lesmineurs. Premièrement, la condition que doitsatisfaire le hachage change tous les 2 016 blocs. La nouvelle condition est ajustée enfonctiondu tempsqu’ila fallupourajouterces2016blocs :s’ilssontajoutés tropvite(parexemple,parcequedesmineurspluspuissantssontenlice),ladifficultéduproblèmeaugmente (par exemple, il faut 26 zéros au lieu de 25), de façon àmaintenir le tempsmoyen entre deuxblocs aux alentours de dixminutes. Par ailleurs, la récompense restefixejusqu’àceque210000blocsaientétéajoutés(cequiprendenvironquatreans),aprèsquoi elle diminue de moitié. Elle a commencé à 50 bitcoins, est actuellement de 25bitcoins et doit diminuer à nouveau courant 2016. Elle continuera ainsi à diminuer demoitié jusqu’à atteindre la limite de divisibilité du bitcoin (10–8). Puisque l’activitéminière est la seule source de nouveaux bitcoins, il s’ensuit que la quantité totale debitcoinscroîtdeplusenpluslentementet,commelaflèchedeZénon,approche,maissansjamaisatteindre,letotalde21millions.

Quesepasse-t-illorsquelarécompensedevienttroppetite?Ilexisteunautremoyenderécompenserlesmineurs.L’unedesrèglesdevaliditéd’unetransactionestquelasommedes bitcoins en entrée doit être supérieure ou égale à celle des bitcoins en sortie. Ladifférence, s’ilyenaune, rémunère lemineur.Ces rémunérationsprendront à terme lerelaisdelarécompensefixedanslamotivationdesmineurs.

On voit maintenant le rôle que joue la chaîne de blocs. Elle contient toutes lestransactionsdepuislecommencementdeBitcoin;elleestconnuedeetchoisiepartousles

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nœuds du réseau, qui accepte par convention la chaîne qui incorpore la plus grandequantitéd’efforts(c’est-à-dire,enpratique,lachaînelapluslongue)commeseulechaîneauthentique.

Siquelqu’unvoulait falsifier lachaînedeblocs, il lepourrait, àconditiondediffuserunechaînedeblocspluslonguequelavraie.Parexemple,silachaîneavaitunelongueurde908etqu’ilvoulaitlafalsifieràpartirdubloc903,illuifaudraitcréer6blocs(lesfauxblocs 904 à 908 et un bloc supplémentaire). Mais créer ces blocs prendrait du temps,puisqu’ilfaudraitrésoudresixfoisleproblèmedehachage,etpendantcetemps,leresteduréseaucontinueraitàallongerlachaîne,aurythmed’unbloctouteslesdixminutes.Lefalsificateurseraitengagédansunecoursecontreleresteduréseau.C’esticilaforceduconceptdeproofofwork:pourêtremalhonnête,ilfautfaireencoreplusd’effortscoûteuxquepourêtrehonnête.

Lesystèmen’estcependantpasinvulnérable.Eneffet,pourcréerunblocvalide,ilfautrésoudre le problème de hachage, qui ne peut se faire qu’en variant la valeur decirconstanceàl’aveuglette.Créerunblocestdoncuneloteriedanslaquellelaprobabilitéde gagner est proportionnelle à la part du mineur dans la capacité totale de calcul duréseau.Unmineurquiaurait51%decettecapacitéfiniraittoujourspargagnerlacourse.Ilpourraitmêmelagagneravecmoinsde51%.C’estlatactiquedu«mineurégoïste»qui lorsqu’il trouve un bloc avant les autres ne le révèle pas aux autres mineurs etcommencetoutdesuiteàtravaillersurleblocsuivant.Avec33%delacapacitétotale,ilpourraitconstruireensecretunechaîneplus longuequecellesur laquelle travaillent lesautres,etdoncimposerlasienneaumomentvoulu,puisqueleconsensusseportetoujourssur la chaîne la plus longue. Dans un cas comme dans l’autre, la chaîne sur laquelletravaillait le reste du réseau deviendrait une branche morte et les transactions qui yfiguraient, mais qui seraient absentes de la nouvelle chaîne créée par le falsificateur,seraientde faitannulées.Danscecas, le falsificateurpourraitdépenser lemêmebitcoindeuxfois:unefoisparunetransactionqu’ilauraitdiffusée,maisexcluedesachaîne,unedeuxièmefoisparunetransactionqu’iln’auraitpasdiffusée,maisinclusedanssachaîne.

Nous avons posé en détail les éléments du protocole. Il est maintenant possible demieuxcomprendrelanaturedeBitcoin.

Qu’est-cequ’unbitcoin?C’est,aufond,unechaînedetransactionsquicommenceparlecoinbased’unmineurchanceuxetquiaboutitàsonpropriétaireactuel.Demêmequ’unbilletdebanqueestidentifiéparsonnumérodesérie,chaquebitcoinestidentifiéparuneséquence,modifiéeàchaquetransaction,etlachaînesertdecadastre3.L’authenticitédelachaîne est assurée par la chaîne dans laquelle chaque bloc est relié à l’en-tête du blocprécédentpar savaleurdecirconstance.Lachaîneestprotégéede lacontrefaçonpar leprincipeduproofofwork.Ceprincipecréeuncoûtquiestcompenséparde lacréationmonétaire. Mais il faut bien voir que la raison d’être de ce coût est la nécessité degarantir l’authenticité de la chaîne et cette nécessité découle du refus de toute autoritécentrale.

Commentunbitcoinpeut-ilservird’instrumentmonétaire?C’estunbienquin’existeque sous une forme numérique, dont la quantité est limitée artificiellement et dont la

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propriété, par construction, se transmet facilement sur Internet. Ce n’est donc pas unmoyen de transférer d’autres actifs ou d’autres monnaies, dollars ou euros : c’est unevaleur en soi,mais qui n’est au passif d’aucune personne ou entité comme les valeursbancairesetquin’alasanctionoulaprotectiond’aucungouvernementousystèmelégalcomme les unités monétaires officielles. Aucun individu ou aucune organisation necontrôledirectementBitcoin.Leprotocolen’existepasetlesbitcoinsn’ontdevaleurquedanslamesureoùilssontutilisésparceuxquichoisissentd’enfaireusage.Cettedernièrecaractéristiqueesten faitaucœurduconceptdemonnaie. Jen’accepteunemonnaieenéchangedebiensoudeservicesqueparcequejepensepouvoirtrouverquelqu’und’autrequi l’acceptera à son tour. Ce quelqu’un d’autre peut être l’État qui désigne quellemonnaieilaccepteenpaiementd’impôtsouunepersonnecontrainteparl’Étatoulaloi,parexempleuncréancierrequisd’accepterlamonnaieenpaiementd’unedette.Maisonsaitquelaforcedel’Étatn’estninécessaire,nisuffisantepourdonnerunevaleurpérenneàunemonnaie.

UNSYSTÈMEDEPAIEMENT,MAISPASENCOREUNEMONNAIE

Commemoyendepaiement,Bitcoinadesavantagespotentiels,engrandepartiedusàsa structure décentralisée. Les paiements sont relativement rapides : une transaction estconfirméeenmoyenne auboutdedixminutes, encorequ’il est recommandéd’attendreque plusieurs blocs aient été ajoutés à la chaîne avant d’admettre un paiement commedéfinitif. Le réseau, étant décentralisé, est par nature robuste. Les paiements se font depersonne à personne et ne nécessitent pas d’intermédiaires, financiers ou autres – lesutilisateurs gardent le choix de passer par une « banque » ou un dépositaire pour gérerleursportefeuillesélectroniques.Lachaîne sur laquelle tout reposeoffreun témoignageinaltérable des transactions passées et peut servir de preuve. Les transactions sontirréversibles,cequiestàlafoisunavantageetuninconvénient,selonlesapplications.Lebitcoin étant divisible jusqu’à 10–8, il rend possible les micropaiements et donc lestransactionsquinesefontpasousefontmal.

Onasouventparlédel’utilisationdeBitcoinparlescriminels.C’estindéniable,commepour l’argent liquided’ailleurs.MaisBitcoinprésentede sérieux inconvénientspour lescriminels,puisquetouteslestransactionssontenregistrées.Ilestvraiquelesadressesdesportefeuillesseulesapparaissentdanslachaîneetilfautdesinformationssupplémentairespourlesrelieràdesindividus.Maissilajusticedisposedecesinformations(parexemple,parce qu’elle a saisi les ordinateurs des criminels), elle peut établir la preuve destransferts;l’affaireSilkRoadauxÉtats-Unisl’abiendémontré.

Celadit,Bitcoinabeaucoupd’obstaclesàsurmonteravantdesetransformerdemoyende paiement en véritable monnaie. Son utilisation comme moyen de paiement restemarginale et la demande de bitcoin est essentiellement spéculative, les investisseursfaisantunparisursonsuccèséventueletunfortgainencapitalenconséquence.Ils’ensuitque sa valeur d’échange contre les monnaies officielles (dollar, euro) fluctueconsidérablementetlesvendeursquiacceptentlebitcoinnelibellentguèreleursprixenbitcoins.Peuemployécommemoyendepaiementlimité,risquécommeréservedevaleur,

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inutilisécommeunitédecompte,lebitcoinestloind’êtreunemonnaie.Ilpourraitdevenirpluscommuns’ildevenaitmoinsrisqué,maissavaleurnesestabiliseraques’ildevientpluscourammentutilisé.

L‘AVENIRDEBITCOINETDESAUTRESMONNAIESDIGITALES

Bitcoin reste un protocole très complexe. Il est vrai que l’on n’a pas besoin decomprendre la dynamique des fluides pour prendre un avion, mais la technologie deBitcoinn’estpasencoremûre.Ilfonctionnedepuisplusieursannées,maisiladéjàconnudes changements et pourra en connaître d’autres bien plus importants.Les programmesqui appliquent le protocole sont à code source ouvert, ce qui veut dire qu’ilsn’appartiennent à personne et peuvent être librement examinés, voire copiés.Quand unchangementestnécessaireousouhaitable,toutepersonneestlibredeleproposeretc’estl’ensembledesutilisateursquidécideras’ilestaccepté.Pratiquement,lesmodificationsduprotocolesontentrelesmainsd’unpetitgroupedeprogrammeurs,maismêmeentreeux,iln’estpas toujoursfaciledeparveniràunaccordsur lamarcheàsuivre.Desscissionssont possibles au cours desquelles une partie des utilisateurs refuse d’adopter lechangementquel’autrepartieaaccepté,avecpourrésultatunebifurcationdelachaîneetunescissionmonétaire.

Un débat récent dans la communauté Bitcoin illustre ce problème. Il portait sur uneautre limitation de Bitcoin, à savoir sa capacité. La taille des blocs est limitée par leprotocole et se traduit par une limite d’environ sept transactions par seconde, capacitéclairementinsuffisantepourunréseauquisevoudraitglobal.Lapropositiond’augmenterlatailleasoulevédescontroversesetilestdevenumanifestequelacommunautéBitcoinn’apasencoredemécanismepour les résoudre. Il seraitdifficilede tolérer cegenredeblocagepourunemonnaielargementutilisée.

La nature du réseau Bitcoin peut aussi changer. La vision d’origine comportait desnœudségauxentreeux,validant les transactionsetminantenmême temps.Le réseauachangé, côté mineurs et côté nœuds. Le bitcoin ne valait à ses débuts que quelquescentimes,maisdepuisl’envoléedesonprixen2012,lesgainspourlesmineurs(fixesenbitcoins)sesontaussienvolés.Leprotocole,onl’avu,ajusteladifficultéfaceàlaruéedes mineurs, mais on n’avait pas prévu la course aux armements entre mineurs.Aujourd’hui,lesmineursconçoiventdescircuitsintégrésquineserventqu’àrésoudreleproblème de hachage et recherchent de par lemonde entier les sources d’électricité lesmoins chères (le coût marginal du mineur provenant entièrement de l’énergieconsommée). La concentration de l’industrie minière est forte : à ce jour, une demi-douzained’opérateursminentplusdesdeuxtiersdesblocs.Aucune«attaquepar51%»n’aeulieuàcejour,maislesrisquesdecetteconcentrationpourlemodèleBitcoinsontimportants.Ducôtédesnœuds,leréseauaaussichangéparcequelachaînedevenantdeplus enplus longue, il estpeupratiquepour chaquenœudde l’examiner enentierpourchaquetransaction,d’oùl’émergencedenœudssimplifiésquisecontententdedemanderàd’autres nœuds choisis au hasard de faire une partie du travail de vérification. Laproportiondenœudscompletsseréduitdonc,cequiposeunrisquedefragilité.

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Enfin,Bitcoinestloind’êtrelaseuletentativedemonnaiedigitale,encorequ’ilrestelaprincipale. La concurrence est libre et nombre d’expérimentateurs ont devisé desvariantes,s’inspirantgénéralementdeBitcoin,maisenlemodifiant.Est-cequeBitcoinoul’une de ces « alt-coins » remplacera les monnaies officielles ? Les enthousiastes despremières heures ont pu le croire, mais l’histoire montre que les États ont depuislongtemps inclus la monnaie parmi les prérogatives régaliennes et n’en ont cédé lecontrôle que quand ils ne pouvaient ou voulaient l’exercer. On connaît des épisodes,commeceuxdesmonnaiesdenécessité,oùl’Étatatoléréquelesecteurprivésuppléetelleportion du système monétaire et tout au plus, on peut supposer qu’une ou plusieursmonnaies digitales soient tolérées dans des emplois spécialisés.Mais si lamonnaie surpapierdoitconnaîtrelemêmesortquelelivresurpapier,c’est-à-direêtresupplantéeparunsupportplusmoderne,ilyafortàparierquelesÉtatsvoudrontsemettreàlapointeduprogrès.

Maislaquestionn’estpastoutourienetau-delàdesspécificitésdeBitcoin,ilconvientdes’interrogersurlaportéedecetteavancéetechnologique.

Bitcoin, au minimum, est une expérience grandeur nature qui a démontré commentassurerl’authenticitéd’uncadastrepublicdetransactionssanscontrôlecentral.Vusousunanglemonétaire, ilpermetde transférerdesunitésdont lenombre totalest fixe,mais lemécanisme pourrait être utilisé pour transférer autre chose. C’est déjà le cas : latransaction, dans son exécution technique, comporte un programme dont le but est devérifier aumoyen d’une clé cryptographique que c’est bien le propriétaire qui initie latransaction, mais qui pourrait aussi accomplir d’autres tâches. Le langage deprogrammationestassezlimité,maisilpermetd’imposerdesconditionssupplémentaires,parexempleenexigeantplusieurssignaturesouendistribuantlesbitcoinstransférésversdifférentsdestinatairessicertainesconditionssont remplies.Celanousmèneauconceptde«contratsintelligents»:lachaînedeblocspourraitdevenirlesupportdetransactionsplus complexes, portant sur des objets autres que le transfert de bitcoins. C’est un peucommesil’onutilisaitdesbilletsdebanquecommesupportspourécrireetexécuterdescontratssurd’autresavoirs.LeprojetEthereumestunetentativedereconstruirelebitcoindanscesens,enpermettantd’obtenirdesdonnéesextérieuresausystème(parexemple,latempératuredansunendroitdonnéouleprixd’unactif)etdeconditionnerlestransfertsàcesdonnées.

Il existe d’autres systèmes de paiement qui reposent sur une structure décentralisée,maisqui laissentde côté leproofofwork.Tel est le cas deRipple où la validationdestransactions se fonde sur l’obtention d’un consensus.Chaque nœud du réseau gère unelistedenœudsauxquelsilfaitconfianceetl’étatdelachaîneestmodifiélorsqu’onatteintunconsensus(80%desnœuds)àlasuited’unprocessusitératif.Rippleretientleconceptdemonnaie « indigène » au système, et ce, à des fins de sécurité : chaque transactionconsomme des unités de valeurs, assez faibles pour ne pas imposer de coût auxtransactionslégitimes,maisassezpourdécouragerunflotdefaussestransactions.

Onsaitquelesbanquesprivéess’intéressentdeplusenplusàlachaînedeblocs.Ilestencoretroptôtpoursavoiroùs’oriententcesrecherches,maisilsemblequel’idéed’une

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gestiondécentraliséedesbalances, permettant des transactionsdepair àpair, aumoyend’une chaîne à l’authenticité incontestable, comporte de grands attraits. Le protocoleBitcoinrésoutunproblèmequin’estpasceluidesbanques,àsavoirétablirunemonnaiefiable sans autorité centrale. Mais le succès (relatif) du protocole a mis en avant unensembledetechniquescryptographiquesetinformatiquesqui,siellesnesontpasneuves,n’avaientpasétéconsidéréesdansleurtotalité.L’enjeupourlesbanquescentralesnetientplusà leurfonctiondecréateursdemonnaie,maisplusà leurrôledans lessystèmesdepaiement,aussibiencommerégulateursquecommegarantesdelastabilitéfinancièreetcommedétenteursdumoyendepaiementultime,lamonnaielégale.Siunemonnaiedoitjouerunrôleclédanscessystèmesdécentralisés,ilseraitnaturelquelesbanquescentralesveillentàcequecettemonnaiesoitlaleur.

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DARKPOOLSETTRADINGHAUTEFRÉQUENCE:UNEÉVOLUTIONUTILE?

FANYDECLERCK*1

LAURENCELESCOURRET**2

Depuis les quinze dernières années, lesmarchés financiers connaissent unemutationtoujours plus profonde sous l’impulsion simultanée de la baisse sensible des coûtstechnologiques,maisaussidechangementsdans l’environnementréglementaireboursieretdel’internationalisationdesmarchés.

La rencontre entre acheteurs et vendeurs ne se fait plus physiquement autour d’unecorbeille, mais électroniquement dans un carnet d’ordres. Les courtiers interviennentdésormais à partir de terminaux reliés aux ordinateurs centraux des Bourses.L’automatisation et l’électronisation des échanges se sont également accompagnées denouvellesmanièresdenégocier:plusgrandevitessedanslepassageetl’appariementdesordres,plusgrandevitessedansladisséminationdel’informationfinancière,plusgrandesophisticationdes plates-formes, plus grand recours à l’automatisationdes processusdepassagedesordresvia le recoursàdesalgorithmes.Lesplates-formesdenégociationetlesparticipantsmajeursdumarchésonteffectivementdansunecoursevers la réductiondestempsdelatenceetdéploientdesréseauxinformatiquesetdessystèmesd’exécutionutilisantdesalgorithmesdetradingdeplusenpluscomplexesetrapides.

Parallèlement, l’environnement réglementaire (directivesur lesmarchésd’instrumentsfinanciersMIF1 enEurope en 2007 etRegNMSauxÉtats-Unis en 2005) a égalementfavorisé l’entrée d’une multitude de nouvelles plates-formes (système multilatéral denégociation–SMN)3.Cesdernièresexercentunepressionconcurrentielleet innovatriceforte,contribuantnotammentàlaréductiondescoûtsdenégociation.Cependant,l’entréedecesnouvellesplates-formesaégalementcomplexifié lepaysageboursier.Désormais,l’exécutiond’unordreestréaliséeenmoyennesurplusdedeuxplates-formesdifférentesenEuropeetsurplusdequatreauxÉtats-Unis4.L’unedesexécutionsasouventlieuhorsdes marchés réglementés (parfois appelés lit markets), sur des plates-formes moinsréglementées, comme lesdarkpools. Undark pool désigne une plate-forme alternativeprivéedontlacaractéristiquemajeureestl’opacitésurlesinformationstransmises,censéegarantir la confidentialité de l’exécution de l’ordre et donc minimiser l’impact de sonexécution sur les prix qui existerait si l’information était rendue publique. Opaques etconfidentiels sont également les algorithmes de passage des ordres des traders hautefréquence.Tradinghautefréquence(THF)etdarkpoolsconnaissentdesdéveloppementsétroitementliés,l’unétantsouventuneréponseàl’autre,commecetarticlelemontreci-après.

LESNOUVEAUXMARCHÉSBOURSIERSLeTHF

Le THF consiste en l’utilisation d’algorithmes qui sont optimisés afin d’analyser un

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fluxdedonnéesetprendredesdécisionsd’investissement,etce,leplusdiscrètementetleplus rapidement possible. Le but est d’observer l’information et de réaliser destransactionsavantlesautresopérateurs,d’être«lepremier»surlemarché.Ilnefautdoncpasêtrerapide,mais leplusrapide.Cettestratégiese traduitpar l’envoid’untrèsgrandnombre d’ordres de petite taille (de l’ordre de cent à deux cents unités), à une vitessetoujoursplusgrande,aujourd’huiprochede lananoseconde,soitunmilliondefoisplusrapidequelamilliseconde(ms),cequiimpliqueuntempsderéactionpouruneprisededécisionqu’unhommen’estplusenmesurederéaliser(clignerdesyeuxnécessite350mset il nous faut aumoins 650ms pour prendre une décision en fonction d’une situationdonnée). Parmi le million d’ordres passés dans une seconde, 95 % d’entre eux sontmodifiésou annulés.UnecaractéristiquemajeureduTHF,outre lavélocité, est donc letrèsfaibleratioentrelenombredetransactionsetlenombred’ordressoumis.

Cettecourseà trèsgrandevitesseà laquellese livrent lesopérateurshaute fréquence,dont seule celle de la lumière semble aujourd’hui la véritable barrière physique, exiged’investir dans des infrastructures de télécommunications pour relier leurs terminaux àleursserveurs,eux-mêmespositionnésàquelquesmètresdulieud’échangedelaBourse.Cettepossibilitéde«colocation»del’espaceestunservice(lucratif)crééparlesBourseselles-mêmespourlesbesoinsduTHF.Chaquecentainedemiles(160km)dedistancedulieu physique des échanges du carnet central ajouterait effectivement un millième deseconde, un laps de temps désormais suffisant pour qu’une transaction soit perdante.ProjectExpress,unnouveaucâbletransatlantiqueenfibreoptique,permet,parexemple,d’envoyer, depuis septembre 2015, un ordre entre Londres et New York en deux foismoinsdetempsqu’iln’enfautpourclignerdesyeux,c’est6msdemieuxquelescâblesconcurrents.Pourquelcoût?300M$pouruncoûtdelocationmensuelpourunopérateurestimé entre 110 000 et 350 000 dollars. L’utilisation des installations micro-ondes deMcKay Brothers entre New York et Chicago coûte aux intermédiaires financiers250000dollars par an pour gagner 0,5ms.Les sociétés deTHF investissent donc trèslourdement dans des technologies coûteuses (colocation, fibre, laser, accès direct aumarché,achatdedonnéesdigitalisées,etc.),ainsiquedansdesingénieursetdesanalystesquantitatifs (quants oudata scientists) pour concevoir des algorithmes surpuissants.Detels investissements ne sont pas possibles ou même souhaitables pour l’ensemble desopérateurs (Biaisetal., 2015a).De fait, il y a donc désormais une distinction entre lesopérateursultrarapidesetceuxdits«lents».

Quelle est l’importance économique de ces opérateurs ultrarapides ? On estimeaujourd’huiquelesalgorithmeshautefréquenceréalisentunetransactionsurdeuxsurlesmarchés actions américains.Mais leur part demarché est en recul depuis 2009 où elleculminaitàplusde60%,selonTabbGroup,unesociétéaméricainederecherchesurlesinfrastructures de marché. En Europe, le THF aurait environ 30% de part de marché(TabbGroup).

Ilestànoterqu’ilyauneabsencededéfinitionunivoquedecequ’estleTHF.Ainsi,l’autoritéderégulationeuropéennes’appuiesurl’article4(1)(40)deladirectiveMIF2:leTHFestunetechniquedetradingquiestcaractériséepar(1)uneinfrastructurequiviseàréduirelestempsdelatenceenutilisantaumoinslacolocationouunréseauàtrèsgrande

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vitesse d’accès aux marchés financiers, (2) un système de prise de décision, desoumission, de routage et d’exécution des ordres sans intervention humaine et (3) unnombreélevéd’ordrespassésetannulés.

Lerégulateuraméricainreprendcestroiscritères,maisenajoutedeux:(4)l’opérateurde marché doit agir pour compte propre et générer, chaque jour, un grand nombre detransactionset(5)ildoitporterdesquantitésdetitresenportefeuillesurdespériodesdetempstrèsbrèves,positionsdevantêtreleplusprochepossibledezérolorsdelafermeturedesmarchés.

Si la définition européenne est une définition légale, la définition américaine resteouverte à des évolutions futures ; dans les deux cas, cela ne facilite pas l’analyse del’impactdecetteformedetrading.

Enfin, du fait d’un puissant lobby défendant la stricte confidentialité des codesalgorithmiquesconçusparlesgrandesbanques(commeGoldmanSachsouBarclays),leshedgefunds(Citadel)oulesfirmesdeTHF(commeKCGouVirtu),trèspeudedonnéessont désormais diffusées dans le public, et notamment aux chercheurs académiques5,renforçantl’opacitéexistanted’uneanalyseglobaledel’impactduTHFsurlaqualitédesmarchésfinanciers.

Lesdarkpools

Les dark pools sont des plates-formes privées de négociation qui n’ont, jusqu’àmaintenant, aucune obligation de diffuser le prix des ordres, qui sont en attented’exécutiondanslecarnetd’ordresmaintenuparlesdarkpools(absencedetransparencepré-transaction). Ces plates-formes doivent toutefois publier les transactions effectuées(transparence post-transaction),mais bénéficient parfois d’un délai dans la diffusion decetteinformation.

Lespremiersdarkpools sontcréésdans lesannées1980etsontdesplates-formesdecourtageassezsimples,appeléesalorscrossingnetworks6:ilsapparientlesordresd’achatavec ceux de vente à certains moments définis de la journée en important les prixd’exécutiondumarchéprincipalréglementé(parexemple,laBoursedeNewYork)tenu,quant à lui, à une obligation de transparence pré- et post-transaction. Ce type de darkpools est d’abord exclusivement dédié et réservé aux besoins des investisseursinstitutionnelssouhaitantéchangerentoutanonymatdelargesmontants(blocsdetitres).Lemarché principal réglementé sur lequel l’entreprise s’est introduite demeure un lieud’échangesactifdesinvestisseursinstitutionnelsenraisondelaliquiditéimmédiatementdisponible,mais il fournitdésormais la liquiditéendernier ressortétantdonnésacherté(Menkveld et al., 2015). Chaque transaction effectuée sur un marché réglementétransparentestnotammentsoumiseàunecommission(exchangefees),quiestévitéesilatransactionalieuhorsdumarchéréglementé.

Pourtraitersurlemarchécentraltotalementtransparent,unblocdetitres(souventcentmille unités), de par son volume anormalement élevé, est en fait travaillé sur plusieursséancesboursièresencentainesd’ordresdepetitetailledemanièreàdissimulerauxautresinvestisseurs sa taille totale. Ce séquençage de l’ordre minimise ainsi l’impact de son

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exécutionsur lesprixquisedécaleraientsous lapressiond’exécutiondubloc,décalagepénalisant en termes de coûts de transaction. Toutefois, la montée des traders hautefréquencearalenti lesexécutionsdeblocsurlemarchécentral,étantdonnéqueceux-cidétectentaisémentledécoupagedesordresdegrandetailleenpetitetailleetessaientdetirer parti de cette information7.Afind’échapper aux traders haute fréquence, desdarkpools modernes, plus complexes, ont été lancés, certains mêmes avec un processus dedécouvertedeprixquileurestpropre.Faceàcesuccèsgrandissant,lesdarkpoolsonteubesoindetradersleuramenantplusdeliquidité.Certainsontdoncouvertl’accèsdeleurplate-formeauxtradershautefréquence,legroupedeparticipantsqu’ilsétaientsupposésexclure.Ceparadoxe et les questions de la transparence et de la légalité de l’accès desdarkpoolsauTHFontétéportésàlaconnaissancedugrandpubliclorsdelaparutiondulivre deMichael Lewis,Flash Boys, en 2014, qui dénonce la complexitémoderne desmarchés financiers et accuse le THF de manipuler les marchés. Les régulateurs(notamment, la Securities and Exchange Commission – SEC) ont rapidement réagi etlancé un grand nombre de poursuites judiciaires, notamment contre la Bourse de NewYork(amendede4,5M$),maissurtoutcontrecertainsopérateursdedarkpools,accusésdefavoriserlessociétésdeTHFaudétrimentdesautresparticipantsdumarché(20,3M$pour ITG, 14 M$ pour UBS, jusqu’à potentiellement 150 M$ pour Crédit suisse etBarclays).

Malgrécesréactions,lesdarkpoolsnecessentd’augmenterleurpartdemarchédepuisla fin des années 2000. Selon Rosenblatt Securities8 en juin 2010, ils représentaientenviron10%auxÉtats-Uniset2%enEurope.Enjuin2015,ilsreprésentaient18%auxÉtats-Uniset10%enEurope.Onendénombrequarante-cinqauxÉtats-Unisetplusdevingt en Europe (parmi lesquels BATS Dark, Liquidnet, POSIT, SmartPool, InstinetBlockMatch,UBSMTFouNordic@Mid).

De même que les traders haute fréquence sont difficiles à qualifier en raison de larichesse des stratégies de négociation (tenue demarché, arbitrage, trading directionnel,tradingfondamental,etc.)9,lesdarkpoolsontdesstructurestrèsdiverses,perpétuellementen évolution. Alors qu’à la manière de LiquidNet, certains dark pools, à vocationd’exécutiondeblocsdetitres,exigentunetailleminimaled’ordres(souventmilleunités)etsontpeuouvertsauxtradershautefréquence,lesdarkpoolsplusrécentsn’ontaucuneexigence de taille minimale et leur sont accessibles. Certains de ces dark pools sontdétenuspardesparticipantsmajeursdumarché(commeBarclaysLXLiquidityCrossparBarclays Capital, POSIT par ITG, ou Crossfinder par Crédit suisse), d’autres par lesBourseselles-mêmesquisouhaitentgarderleurpartdemarchéenlançantuneplate-formealternativemoinsréglementée(commeSmartPoold’Euronext).

UNEÉVOLUTIONUTILE?

LeTHFetlesdarkpools tendentàsedéveloppersurtouslessegmentsdemarchéoùles infrastructuresélectroniquessontdéployées(actions,obligations, futures,marchédeschanges).Toutefois, lesétudesacadémiquesoucellesdes régulateursanalysant l’impactduTHFetdesdarkpoolsseconcentrentàprésentsur lecompartimentdesactionspourlequellesdonnéessontplusdisponibles.

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Néanmoins, la trèsgrandemajoritédespapiersde rechercheanalysant leTHFreposesur des définitions endogènes des opérateurs ultrarapides (stock de titres faible, grandnombre de soumissions et annulations d’ordres, etc.) ou sur une variable indicatricerenseignée par le régulateur sur la base des informations trouvées sur les sitesweb desopérateursdemarché(BiaisetFoucault,2014).

Pourétudierl’impactdesdarkpools,leschercheursnedisposentbiensouventquedesdonnéesconcernantuneseuleplate-formeoude l’ensembledes transactionspasséessurtouteslesplates-formes,maispourunfondsd’investissementdonné.

Danslesdeuxcas,cesdonnéessontsouventaméricaines.

Malgré les limites importantes des bases de données disponibles, les étudesacadémiquesconvergentpourtrouverqueleTHFet lesdarkpools sontplusutiliséssurles titres les plus actifs et ne diminuent pas la qualité globale du fonctionnement desmarchés(toutaumoins,celuiaméricain).

Lafragmentation:unéterneldébat

Lacontroversesurl’impactdelamultiplicitédesmarchésetdelafragmentationdufluxd’ordres qui en résulte a débuté dans les années 1990 avec l’apparition des premièresplates-formes électroniques aux États-Unis (ECN-Electronic Communication Network).Pagano (1989)montre qu’il existe, du fait des externalités que génère l’existence d’unréseau, une tendance naturelle à la centralisation des échanges sur un seulmarché, carcelle-cifacilitelarecherchedecontrepartieetlaconcentrationdelaliquidité.Malgrécela,les marchés sont généralement fragmentés, souvent à l’initiative des régulateurs.Pourquoi?

La fragmentation favorisenotamment la concurrence entremarchés et l’innovation etdonclabaissedescoûtsdetransaction.FoucaultetMenkveld(2008)montrentainsiquel’introductiond’unenouvelleplate-forme(EuroSETS)surlemarchénéerlandaisaconduità une augmentation de la liquidité globale. Lescourret et Moinas (2015) analysent lesstratégies multimarchés des teneurs de marché sur Euronext et trouvent que lafragmentation peut renforcer la concurrence que ces derniers se livrent au sein et entreplates-formes, réduisant ainsi les coûts de transaction. Madhavan (1995) montre parailleurs que si les investisseurs institutionnels peuvent être crédibles lorsqu’ils signalentqu’ils ne sont pas informés et peuvent garder leurs transactions opaques (pas detransparence post-transaction), alors ils obtiennent des prix plus avantageux auprès desteneursdemarchédansunmarchéfragmenté.

Lesanalysesontensuiteétéétenduesaucasdesdarkpools.HendershottetMendelson(2000) ainsi queDegryseetal. (2009) démontrent que l’introduction d’une plate-formealternativegénèredeseffetsambigussurlebien-êtresocial.Butietal. (2015)constatentque l’ajout d’undark pool à unmarché lit permet d’améliorer le taux d’exécution desordresetd’augmenterlesvolumeséchangés,cequicorroborelesrésultatsdeButietal.(2011)surl’impactpositifdeséchangesdanslesdarkpoolssurlaliquidité.Degryseetal.(2014)ainsiqueGresse(2015)affinentl’analyseenétudiantl’impactdelafragmentationentreplusieursmarchésréglementésetplusieursdarkpools.Lesdeuxétudesobtiennent

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uneffetpositifdelafragmentationsurplusieursmarchéslit,maisobtiennentdesrésultatsopposéssurl’effetdelacoexistenceavecplusieursdarkpools.

Lesfraisdetransaction

Lespremières études empiriques sur l’impact des plates-formes alternativesmontrentquelescoûtsdetransaction,mesurésparl’écartentrelemeilleurprixoffertetlemeilleurprixdemandé,sontplusfaiblessurcesplates-formesquesurlemarchéprincipal(Conradet al., 2003), ce qui est corroboré par des analyses plus récentes traitant plusspécifiquementdesdarkpools(Menkveldetal.,2015).

Concernant l’impact spécifique du THF, Angel et al. (2015) notent une baissesignificativedescoûtsdetransaction(environ50%entre2003et2009)surlesmarchéslitaméricains,maisaussidelatailledestransactions(plusdemilleunitéspartransactionen2003, environ deux cents unités en 2013). Les auteurs observent également une fortediminutiondescommissionsdestroisplusgrandscourtiersaméricainsentre2003et2009(par exemple, la commission sur transaction prise par le courtier Schwab est passée de35 dollars à 10 dollars sur cette période).De façon parallèle, Lehalle et Burgot (2010)mesurentunebaissede30%entre2007et2009descommissionsexigéessurlemarchéréglementéfrançais.

Néanmoins,Angeletal.(2015)notent,surlapériodeplusrécentede2009à2013,unestabilitédescoûtsdetransaction,malgrélavitessetoujoursplusgrandedupassageetdutraitement des ordres. Ils mettent également en évidence l’explosion du nombre dechangementsdesmeilleursprixaffichéssurlemarchéàchaqueminute,quiestpassédequatorzemilleàtroismillionsentre2001et2011.

Leprocessusdedécouvertedesprix

Il existe plus de soixante plates-formes possibles aux États-Unis ou en Europe, sanscompter leséchangesbilatérauxdegréàgréet l’internalisationdesordrespratiquéeparcertainsgrandsopérateurs.Cette extrême fragmentationdu fluxd’ordres et l’opacité decertainesplates-formesn’affectent-ellespasleprocessusdedécouvertedesprix?

Lemodèle théorique deYe (2012) établit que la coexistence d’undark pool et d’unmarchélitdégradeleprocessusdedécouvertedesprix,alorsqueZhu(2014)montrequelarelationentrefragmentationetdécouvertedesprixestpositive,maisnonmonotone.

Demême,lalittératureempiriquen’estpasconcluante.Butietal.(2011)trouventqueleséchangesdanslesdarkpoolsontuneffetambigusur leprocessusdedécouvertedesprix. L’ordre en restant non visible dégrade en effet le niveau de transparence pré-transaction(PaganoetRöell,1996)et lecontenuinformationneldufluxd’ordres(Rosu,2013).

Hathewayetal. (2014) ainsi queComerton-Forde et Putnins (2015) trouvent que lestransactions qui se déroulent sur les dark pools sont non informées. Ce résultat est enaccordavecl’hypothèsedesegmentationdufluxd’ordresinformésetnoninformés(Zhu,2014).Eneffet,lesinvestisseursdoiventarbitrerentredescoûtsdetransactionplusélevéssurlemarchéprincipaletunrisquedenon-exécutionplusimportantsurlesdarkpools.Ce

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risquedenon-exécutionestd’autantplusgrandpourlesinvestisseursinformésquiserontplusprésentsdumêmecôté,soitacheteurs,soitvendeurs,dumarché.Lesdarkpoolssontdoncplusattractifspour lesnon-informés.Parconséquent, ilsdeviennentégalementdescentres d’exécution très profitables pour les opérateurs qui sont rapides à détecter lesordres non informés comme les traders haute fréquence, phénomène appelé cream-skimming.

Parallèlement, les études sur le seul THF soulignent que l’efficience des marchéssemble être meilleure, notamment en raison de l’activité d’arbitrage des opérateursultrarapides qui réduisent la moindre microanomalie existant entre les prix cotés surdiversesplates-formesousurdiversinstruments(voir,parexemple,Hendershott,2011).

Lamalédictionduvainqueur

Sur lemarchéprincipal, il existedes coûts àplacerdesordresvisibles, c’est-à-dire àafficherencarnet ses intentionsd’achatoudevente ; l’undecescoûts est le risquedemalédictionduvainqueur.Eneffet,entrelemomentoùl’ordreestsoumisetceluioùilestexécuté,lavaleurdel’actifpeutavoirchangédufaitdel’arrivéed’informationnouvelleetl’ordre peut être exécuté avant que le donneur d’ordre ait eu le temps de modifier oud’annulersonordre,etce,afortiori,sil’ordreestplacéparunopérateurpluslentqu’untraderhautefréquence.

LeTHFpourrait doncgénérer un risquedemalédictionduvainqueurpour les autresopérateurs présents sur le marché. Toutefois, les résultats empiriques de Biais et al.(2015b)montrent que si la vitesse est une variable pivotale pour le placement d’ordresdans un carnet, les opérateurs haute fréquence supportent au final, tout comme lesopérateurspluslents,unrisqued’antisélection.

Desvolumesprohibitifs?

Lesétudesacadémiquestrouventqu’unnombredetransactionsélevésurlesdarkpoolsdégradelaliquidité(Degryseetal.,2014;NimalendranetRay,2014;Weaver,2014),leprocessus de découverte des prix (Comerton-Forde et Putnins, 2015), voire les deux(Hatheway et al., 2014). Avec la prolifération actuelle des dark pools, les régulateurss’interrogentdoncnaturellementsurleseffetsqu’unfortvolumedenégociationssurcesplates-formes opaques, et son interaction avec le trading algorithmique, peut avoir surl’efficiencedesprix,questionnementquianotammentconduitàlarévisionactuelledeladirectiveMIF1(conçueen2003enl’absencedeTHFetdedarkpools).

CONCLUSIONNouveauxrisques

LeTHFet lesdarkpools génèrent de nouveaux risques. Il y a d’abord un risque dedistorsion de concurrence des marchés du fait même de l’inégalité d’accès entre lesopérateurs aux infrastructures de télécommunications, informatiques et algorithmiques.Ensuite, du fait de la complexité toujours grandissante des algorithmes, il s’ensuit desrisques de manipulations de marché difficilement détectables par les régulateurs (d’oùl’alliance récente de la SEC avec le FBI aux États-Unis). Ce risque est renforcé par

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l’absencedeconsolidationdesmeilleursprixenEuropeetparlapossibilitépourcertainsdark pools de transmettre leurs données de transaction seulement avec un délai10.L’absence de chiffres globaux (car difficilement réconciliables) sur les volumes detransactions passées dans les dark pools en Europe manifeste ainsi un manque detransparence problématique, notamment pour les régulateurs européens, qui ne peuventévaluer avec précision l’ampleur et l’impact desdarkspools sur la qualité desmarchéseuropéensetleprocessusdedécouvertedesprix.

Le fonctionnement des marchés semble également plus vulnérable au risque deliquidité, comme en attestent les phénomènes de crises épisodiques d’illiquidité11. Lesmarchéssontaussiexposésauxrisquesd’uncrashdubigdata,commelesoulignentleschercheursDavidEasley etMaureenO’Hara (FinancialTimes, 20mai 2013).Ainsi, le23 avril 2013, le Dow Jones a chuté de 100 points en dixminutes – perte estimée de195Md€–àlasuitedel’annoncepardeshackeursd’uncompteTwitterd’uneagencedepressed’unefaussebombesurlaMaisonBlanche(hashcrash).Lesdonnéesdesmédiassociaux (séries de tweets et retweets, par exemple) entrent effectivement commeparamètres desmodèles prédictifs de certains algorithmes haute fréquence (qui essaientd’enextrairelesentimentdumarché),maisnécessitentunbontraitement.

Enfin, il existe désormais un risque opérationnel et technologique important qui semanifesteparlapossibilitéd’erreursdecodaged’algorithmes,oudesincidentsentraînantla saturation des infrastructures pouvant altérer le bon fonctionnement desmarchés. Le23mars2012,unalgorithmeafaitdisparaître91M$decapitalisationboursièredeBATSlorsdeson introductionenBourseenseulement1,5seconde, soitmoinsde tempsqu’ilvousaurafallupourlirecettephrase.

SilapresserelaiequasiexclusivementlesdésavantagesetlesrisquesduTHFdesdarkpools,ilestindéniablequeceux-cisontdésormaisporteursdenouveauxrisquesmajeursquelesrégulateursentendentdésormaisencadrer.

Enjeuréglementaire

La Financial Industry Regulatory Authority (FINRA), le régulateur indépendant dusecteurfinancierauxÉtats-Unis,adécidédeveilleràl’intégritédumarchéenforçantlesopérateurs à plus de transparence (post-transaction). En mai 2014, elle a mis en placel’obligation pour tous lesdark pools de publier les volumes agrégés hebdomadaires detransactions par titre, ainsi que la taillemoyenne de transaction (FINRA’sRule 4 552).Elleprévoitdésormaisd’étendrecetteobligationàtouslesvolumesdegréàgré(avecundélai de deux à quatre semaines selon la liquidité), pour avoir une vision globale dumarché.Ils’agitd’avancéesmajeuresentermesdetransparence.Parallèlement,laFINRAobligedésormaiscentvingt-cinqsociétésdecourtagedontlaplupartsonthautefréquenceàs’homologuerauprèsd’elle,cequiluidonnedésormaisledroitd’accèsàleursregistresd’activitépourdesenquêtesdeconformitéroutinière.

EnEurope,larévisiondeladirectiveMIF(MIF2),prévuepouruneimplémentationen2017,prévoitdésormaisunplafondsurlevolumeglobalpassédanslesdarkpools(8%),ainsi qu’un plafond sur le volume passé pour un dark pool donné (4 %). L’Union

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européenne(UE)décidedoncdelimiterlevolumedirigédanslesdarkpools.Toutefois,certaines dispositions (par exemple, large-in-scale) pourraient permettre à certainsparticipantsd’échapperàlarègleduplafond.Parallèlement,certainspaysdel’UE(Franceet Italie)ontmisenplacedes taxespour limiter l’impactduTHF.Mais tantqu’ellesnesont pas implémentées auniveauglobal enEurope, ces taxes demeurent assez faciles àcontourner.

Dans l’industrie,onassisteégalementàdes initiatives intéressantes.Nasdaq-OMX, laBoursedunord,acommencéàimposerunratiominimumdetransactionsparrapportaunombre d’ordres passés (1/250 en 2011 et désormais 1/100) pour limiter l’activitéd’annulation des ordres. IEX, plate-forme alternative, impose un délai minimumd’exécutiondesordres(350ms).D’autrespropositionspourraientvoirrapidementlejourpourréduireleseffetsduprincipedu«winnertakesall»etfreinerlacourseduTHFàlavitesse(commeundélaialéatoirede0à10mspour tous lesordresréceptionnéssurunserveur, proposé par Lawrence Harris, un chercheur académique de la USC MarshallSchoolofBusinessetancienéconomisteenchefdelaSEC).

Enconclusion,mêmesilesmarchésn’ontjamaisétéaussipeuchersentermesdecoûtsdetransactionetaussirapides,leTHFetlesdarkpoolssontdespratiquescontroverséesétantdonnélasophisticationd’analysequ’ellesrequièrent.Biencomprendre leur impactestdoncunchallengecrucialpourlesrégulateurscommepourlesacadémiques,cequinepeutseréaliserqueparuneplusgrandetransparenceetmiseàdispositiondesdonnéesdetransaction.

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LIQUIDITÉDESMARCHÉSOBLIGATAIRESETINNOVATIONTECHNOLOGIQUE

MARIE-LAUREBARUT-ETHERINGTON*1

DENISBEAU**2

Confrontéaudéveloppementrapidedestransactionsélectroniques,quiad’abordaffectéles marchés actions et le marché des changes, le marché obligataire est en pleineévolution.Ceprocessusconcerneaussibienlerôleetlapratiquedel’intermédiationquela typologie et l’importance relative des acteurs, ce qui affecte notablement lescaractéristiquesdecemarché,aupremierrangdesquellessetrouvesaliquidité.

Celle-cisetransforme,voiresedégradeseloncertains,cequin’estpassansrisquepourla stabilitédusystème financier.Desmesurespertinentesde la liquiditédesmarchésdetaux n’étant pas aisées, ce sont les récents soubresauts du marché qui cristallisentl’attentiondesobservateursetgénèrentdesinterrogationssurleseffetsdeschangementstechnologiques en cours : la montée en puissance des plateformes de négociationélectronique entretient-elle une illusion de la liquidité qui disparaît en période detensions?contribue-t-elleàamplifierlescomportementsmimétiquesdesopérateurs?lesinnovations technologiques sont-elles à l’origine du problème ou bien peuvent-elles enconstituerunesolution?

Cetarticleproposedesélémentsderéponseàcesquestionsàl’appuid’uneanalysedesmutations de la liquidité des marchés obligataires et des effets des innovationstechnologiquesquilesaffectent.

LESMUTATIONSDELALIQUIDITÉDESMARCHÉSOBLIGATAIRESLescaractéristiquesd’unmarchéliquide

Lemarchéd’unactiffinancierestgénéralementconsidérécommeliquidedèslorsqu’iloffre la possibilité d’acheter ou de vendre à tout moment cet actif, pour des montantssignificatifsetsansquesonprixn’ensoitnotablementetdurablementaffecté.Laliquiditéa donc de multiples aspects qui ne peuvent être évalués par un seul critère, d’où lesnombreuxindicateursquisontutilisés.

Ceux-civisentàévaluerleniveauetlasoliditédelaliquiditéd’unmarchéàl’aidedemesuresdirectesouindirectesdesconditionsd’exécutiond’unordred’achatoudevente,entermesdeprix,dequantitéquipeutêtretraitéeàunprixdonné,dedélaid’exécutionetd’impactdelaquantitééchangéesurleniveaudemarché.Toutefois,ladisponibilitédecesindicateursest incomplèteet leurspériodicitésvariablesselon lessegmentsdesmarchésobligataires observés, du fait de la prédominance de la négociation de gré à gré « à lavoix».Mêmesil’onaassistéaucoursdelapérioderécenteàunfortdéveloppementdurecours aux plateformes de négociation électroniques, ce qui crée une traçabilité destransactions, laconstitutiondebasesdedonnéesnepeutse fairequ’auprixd’un travailcomplexeetcoûteuxd’agrégationdesdonnées.

Versunebaisseduniveaudelaliquiditéetunehaussedesavolatilité

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L’analysedes indicateursdeprixdu servicede liquidité traditionnellement assuré surlesmarchésobligatairespar les teneursdemarché (typiquement leursbid-offerspreads)suggèrequelecoûtpourleclientdelaliquiditédesobligationsd’Étatetdesobligationsémisesparlesecteurprivéaretrouvédesniveauxprochesdeceuxquiprévalaientavant2008(cf.graphiques1et2ci-contre).Lesépisodesdetensionslesplusmarqués,commela période de crise des dettes souveraines de la zone euro en 2011-2012 ou celle qui aaffectélemarchéaméricainaucoursdel’été2013(letapertantrum),n’ontpaslaissédetracesclaires,durablesetfortessurlesfourchettesdeprixaffichésparlesteneursdecesmarchés.

Graphique1

Obligationsd’Étataméricaines(UStreasuries–UST):bid-offerspreads

(enpointsdebase)

Source:CommitteeontheGlobalFinancialSystem(CGFS).

Graphique2

Obligationsd’ÉtatauJapon,enItalieetenAllemagne:bid-offerspreads

(enpointsdebase)

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Source:CGFS.

Enrevanche, les indicateursdevolumepointentplusclairementversunedégradationduniveaumoyendelaliquiditédisponible.

La taille unitaire moyenne des transactions ainsi que les montants associés aux prixaffichés par les teneurs demarché et qui permettent d’appréhender la profondeur de laliquiditéd’untitresontendiminution(cf.graphiques3et4infra),commel’indiquentlaplupartdesintervenantsdemarché,etdefaçonclairementmesurablepourlesjuridictionsdisposantdesdonnées.Lamoindreprofondeursemanifesteégalementparuneorientationà lahausse, au coursde lapériode récente, de la sensibilitéde l’évolutiondesprix auxquantitésdetitreséchangés3.Cephénomèneestd’autantplusnotablequ’ila tendanceàs’auto-entretenir.Eneffet,laréductiondelataillemoyennedestransactionsimpliquequetoutordred’unmontantsupérieur risqued’avoirun impact importantsur leprix,cequiconduit les intervenants à fractionner leurs ordres et les teneurs demarché à limiter lestailles pour lesquelles ils cotent en continu.Toutefois, il est d’une ampleur différenciéeselonlessegmentsdemarchéetleszonesgéographiques.

Graphique3

Taillemoyennetraitéesurladettesouveraine

(enmillionsendeviselocale)

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Source:CGFS.

Graphique4

Profondeurdescotations

(titressouverainsaméricainsà2ansenMd$etitaliensà5et10ansenM€)

Source:CGFS.

Il en résulte un effet dit de«bifurcation»de la liquidité, celle-ci se concentrant surcertainssegmentsdemarché,voiremêmesurcertainstitres,paroppositionàd’autres(parexemple,lesobligationssouverainesversuslesobligationsdusecteurprivé,lestitreson-the-runversus les titresoff-the-run4). C’est notamment le cas sur lemarché obligatairefrançais,pour lequel l’Autoritédesmarchés financiers (AMF)noteunebaissed’activitésurlesobligationsprivéesetuneplusgrandeconcentrationsurlestitressouverains.

Parallèlement, cette baisse de profondeur de la liquidité semble s’être accompagnéed’une plus grande fragilité. Cette conjecture est étayée notamment par deux épisodes

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récents de forte volatilité intrajournalière des prix et qui sont survenus sur lesmarchéspourtantréputéscommelesplusliquides,celuidesbonsduTrésoraméricain5etceluiduBund 6, malgré l’absence de nouvelles fondamentales susceptibles d’augmenterl’incertitudeoudeprovoqueruneviolenterévisiondelavaleurdecestitres.

Unemultiplicitédesfacteursàl’originedelatransformationdelaliquidité

Cettedynamiquedelaliquiditédesmarchésobligatairesestalimentéepardenombreuxfacteurs conjoncturels, tels que des politiques monétaires très accommodantes et unesituation économique et financière qui entretient une aversion au risque élevée, maiségalement par des facteurs structurels comme les changements technologiques etréglementairesquiaffectentàlafoisl’offreetlademandedeservicesdeliquidité.

Cesfacteursontpoureffetd’inciterfortementlesteneursdemarché,quisetrouventaucœurdestransactionsetjouentunrôleprimordialdanslafournituredeliquidité,àrevoirleur offre de services dans le sens d’une réduction et d’une plus grande sélectivité, enpesantsurleurcapacitéetleurvolontéàprendredesrisquesenabsorbantsurleurbilanlesdéséquilibresentrel’offreetlademandedetitres.

Cette transformation de l’offre de services des teneurs de marché se manifestenotammentparuneréductiondeleurstockdetitres,enparticulierd’obligationsdusecteurprivé7etreflèteunegestionplusstrictedeleursrisquesetdeleurbilan.

L’undespremiersvecteursderisqueétantceluiquirésultede lapertedevaleurd’unactif détenu en stock, les teneursdemarché tendent àdévelopper leur rôled’agents, ens’assurantdepouvoirretourner immédiatementdans lemarchéune transactionproposéeparunecontrepartieavantdelaconclureetéviterainsil’interpositionpourcompteproprequ’implique lemodèle traditionnelde fourniturede liquiditéenprincipal,où lapositionrésultantede la transaction initiale est conservéeet consommeducapital réglementaire,tant que les conditions favorables à son retournement ne sont pas atteintes.Aux États-Unis, par exemple, on observe que le niveau des stocks d’obligations du secteur privédétenusparlesprimarydealers8afortementbaissé,etce,defaçoncontinuedepuis2008.Lacontractiondesstocksestplusrécenteconcernantlestitressouverains(cf.graphique5infra).

Graphique5

Inventairesnetsdesprimarydealersaméricains

(enMd$)

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Source:CGFS.

Toutefois,lesfacteursquiinfluentsurl’évolutiondelaliquiditén’exercentpasquedeseffets restrictifs.Les innovations technologiques,enparticulier,ontpermis lacroissancetrès rapidedu trading électronique.Aprèss’êtredéveloppésur lesmarchésactionset lemarché des changes, le trading électronique s’est progressivement étendu auxmarchésobligatairesetimpacteaujourd’huitoutl’écosystème,acteurs,transactionsetliquidité.

LERÔLEDESINNOVATIONSTECHNOLOGIQUESL’«électronification»desmarchésobligataires

Depuis la fin des années 1990, les technologies de l’information ont profondémentmodifiélafaçondontlesordressontpassés,traitésetrégléssurlemarchéobligataire.

Le fonctionnement de gré à gré (dit aussi OTC pour over the counter)9 du marchésecondaire obligataire implique la rencontre bilatérale de l’offre et de la demande,généralementviauncourtierlorsqu’ils’agitd’uneopérationentredeuxteneursdemarché(interdealers) et par l’intermédiaire de la force de vente de la banque d’investissementlorsqu’il s’agit d’une transaction entre undealer et l’un de ses clients investisseur. Lespremières plateformes électroniques ont souvent été développées par des sociétés decourtageafindefavoriserlacollecteetladiffusiondesordresdeleursclientsteneursdemarché, l’écransesubstituantau téléphoneetpermettantdesimplifier,derationaliseretd’accélérer la transmission des cotations, la négociation des transactions et leurconclusion.Parallèlement, lesgrandesbanquesd’investissement, individuellementouenjoignantleursressourcespourdévelopperunproduitcommun,ontlancédesplateformesaccessiblesàleursclientspourqueceux-cipuissentdemanderunecotationettraiterplusrapidementet,danslecasdesplateformesmultidealers,interrogerplusieurscontrepartiesbancairessimultanément,augmentantainsileurschancesdebénéficierd’unprixattractifcarsoumisàunecompétitionplusforte.Celaacontribuéàautomatiserletraitementdesopérations pour l’investisseur et à améliorer la transparence, lui permettant ainsi dejustifieruneexécutionaumeilleurprix(bestexecution).

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Le développement de l’électronique a donc initialement donné lieu à une période deprolifération de différentes plateformes, suivie d’une phase de consolidation où seulescellesayantatteintunetaillecritiquesurvivent.Surlesmarchésobligatairessouverains,letradings’estainsiprogressivementconcentrésurquelquesplateformes(MTS,Tradewebou BrokerTec pour le marché européen), phénomène logique dans la mesure oùl’attractivitédesplateformesrésideaudépartdansleurcapacitéàréuniraumêmeendroitunmaximumd’acteursetdoncàconcentrerlaliquidité.

Mais l’intérêt des plateformes électroniques ne s’arrête pas là. Le développement deliens informatiques automatiques entre l’inventaire du teneur demarché et les outils devalorisation qu’il utilise pour déterminer ses prix, d’une part, et les plateformes surlesquellesil traite,d’autrepart, luipermetdecoterencontinuetdefournirdesprixtrèsrapidement et automatiquement (auto-quote) à ses clients, en ayantmême la possibilitéd’adaptersafourchettedecotationsenfonctiond’uneclassificationpréétabliedeceux-ci(client tiering)10. Ces connexions électroniques sont également capables de générerautomatiquement la couverture de la position induite par l’exécution d’un ordre (auto-hedge),réduisantletempsdelatenceentrelesdeuxetdonclerisquepourlabanque.

Par ailleurs, les plateformes offrant en général des possibilités d’interface avec lessystèmesinformatiquesutiliséspar lesbanquescommepar leursclients(buy-side),ellesont considérablement simplifié le traitement des opérations qui peuvent, dès leurconfirmation, arriver directement dans les systèmesde règlement livraison, sans aucuneintervention manuelle ni du front, ni du back office (straight-trough processing). Celafavorise la réduction du risque opérationnel et des ressources nécessaires dans lesbackoffices, facilite les déclarations statistiques et garantit une meilleure traçabilité desopérationsentermesd’audit.

Enfin, les transactions exécutées sur les plateformes viennent alimenter des bases dedonnées très prisées dans un marché traditionnellement opaque. Cela procure auxdifférentsintervenantslesmoyensdemesurerleursperformances(nombrederequêtesetprofil des clients, volume traité, hit ratio, etc.), mais est également utilisé par lesémetteurs,enparticulierlesagencesémettricesdedettepublique,commel’AgenceFranceTrésor, pour analyser le marché secondaire de leur dette et, de plus en plus, par lesrégulateursoulessuperviseurs.

Deseffetsimportantssurl’organisationetlefonctionnementdumarché

Ladiffusiondesplateformesélectroniquesdetradingapermisauxbanquiersdealersetaux investisseurs de démultiplier leurs accès au marché et à leurs contreparties, etd’accroître leurs capacités d’arbitrage et de couverture. Les intermédiaires comme lesclients finals ont également pu réduire leurs coûts de transaction ainsi que leur risqueopérationnelenutilisantdesprocessusautomatisésd’initiationetdetraitementdesordres,deleurconfirmationàleurdénouementdanslessystèmesdecompensation,derèglementlivraisonetdepaiement.

Il en est résulté une évolution profonde de la structure et du fonctionnement desmarchés obligataires qui ne se sont plus uniquement basés sur le modèle de relationsbilatérales« à lavoix», centré sur les teneursdemarché, etquiprévalait audébutdes

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années 1990.La part du volume traité sur les plateformes a, quant à elle, progressé defaçonmarquéeaucoursdesdernièresannéesetreprésentedésormaisplusdelamoitiédesvolumestraitéssurpratiquementtouslesinstrumentsdetaux(cf.graphique6).

Graphique6

Évolutiondelapartduvolumetraitéélectroniquementpartyped’instruments

CDS:creditdefaultswaps.

Sources:GreenwichAssociatesetMcKinsey&Company(2013);GreenwichAssociates(2015).

Ces évolutions ont conduit à l’apparition d’une organisation plus diversifiée qui afavorisé l’émergence de nouvelles formes de trading et de nouveaux acteurs cantonnésjusque-làauxmarchésdeschangesetauxmarchésactions(cf.schéma).

Schéma

Lastructuretraditionnelledumarchéobligataireaévolué…

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…pourincluredesintermédiairesélectroniquesetdenouveauxacteurs

Source:BanquedeFrance.

On a en effet assisté au développement du trading dit « algorithmique » ou«automatisé»,exercépardessociétésd’arbitragepourcomptepropre,dontleplacementdesordresetlesdécisionsd’exécutionsontautomatiquementgénérésparordinateursurlabase d’algorithmes. Ces algorithmes sont le reflet de stratégies d’achat et de venteimpliquantl’analysepermanenteetextrêmementgranulairedescarnetsd’ordresrecueillis

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par lesplateformesetdes tendancesqui s’endégagent,et répondentautomatiquementàdes«signaux»programmésdansleurmodèle.

L’expansion du trading algorithmique a été accompagnée, principalement sur lessegments des marchés obligataires les plus liquides, par la croissance de l’activité dutradinghautefréquence(THF)quirelèved’unesous-catégoriedutradingalgorithmique.Celui-civisel’arbitrageentrelesdifférentesplacesdecotationsd’untitre.Ils’appuiesurlaréductionmaximaledelalatencedanslatransmissiondesordres,cequiimpliqueunecolocationaveclesplateformes,etsecaractériseparuneduréededétentiondespositionstrès courte avec un impératif de dénouement en fin de journée et une forte proportiond’ordresannulés.

L’irruption de ces nouveaux acteurs sur le marché obligataire a été particulièrementrapide,surtoutsurlemarchéaméricain,leplusliquidedumonde,etquisertderéférenceàbeaucoupd’autres.Ainsi,à l’heureactuelle, ilneresteplusquedeuxbanquesparmilesdixintervenantslesplusimportantssurlaplateformeBrokerTec,quiconcentreàelleseuleplusdelamoitiédestransactionssurlesbonsduTrésoraméricain(RiskMagazine,2015).Leshuitautressontdesacteursnonbancairesdonttoutoupartiedel’activitérésulteduTHF. Les autorités américaines11 les désignent par le terme de PTF (principal tradingfirms).LestroispremièresPTFont,àellesseules,réalisé51%duvolumetraitépar lesdixplusgrosintervenantssurlesmoisdemaietjuin2015.

Cela ne signifie pas que sur les marchés liquides et dans cet environnement où latechnologiepermetunedésintermédiationmassiveetdiversifiée, le rôle traditionneldesbanquescomme teneursdemarchéaperdude sonutilité.Mêmesi les sociétésdeTHFagissent comme teneurs de marché inter-plateformes et génèrent un volume detransactionstrèsélevé,onnepeutconsidérerqueleurapportdeliquiditésoitéquivalentàcelui d’un dealer bancaire classique. Le risque opérationnel qui résulte de leur activitén’estpasclairementmaîtrisé,leurcapitalesttrèsfaibleauregarddeceluidesteneursdemarchétraditionnelspuisqu’ilsnesontpassoumisàuneréglementationprudentielleetnegèrent aucune relation suivie avec leurs contreparties. Surtout, ils ne conservent aucuninventairedetitrespuisqu’ilsdoiventterminerlajournéesanspositionouverte.Dupointde vue des investisseurs, la désintermédiation offre certes plus de degré de liberté et acontribué à réduire leurs coûts d’exécution,mais elle rend également leur activité pluscomplexe. Mesurer la fourchette moyenne ou la quantité moyenne ne suffit plus àquantifier l’apport des teneurs de marché à la liquidité. Il est désormais nécessaire demesurer sa«qualité»pendant lanégociationd’unordre important,puisque l’exécutionoptimaled’unetransactiondépendaussietsurtoutdelarésiliencedumarché,c’est-à-direlarapiditéaveclaquellelesprixreviennentàleurniveaud’équilibre.

Lafortecroissancedel’intermédiationélectroniqueaparallèlementcontribuéàréduirela présence des courtiers traditionnels à la voix (voice-brokers)12. Ceux-ci conserventtoutefoisunrôlecentraldanslesmarchésoùlestitressontmoinsliquides,pourlesquelsletraitement « surmesure»d’unordre reste déterminant et où la rapidité d’exécution estmoinsnécessairequesaqualité.Eneffet,silesplateformessontparticulièrementadaptéesauxopérationssurdesproduitsliquidesoustandardsetcontribuentd’ailleursàaccélérer

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la normalisation de certaines catégories d’instruments (dérivés de taux ou repos, parexemple),ellesrestentpeuadaptéespournégocierdesordresdontlescaractéristiquessontplusspécifiques,soitenraisondeleurtaille,soitenraisondel’instrumentsous-jacent.

Unimpactglobalambivalentsurlaliquiditédesmarchés

Le rôle croissant des plateformes électroniques et l’essor de nouveaux acteurs, enfavorisantuneautomatisationdeséchangesetuneconcurrenceaccrueentredesoffreursde liquiditéplusdiversifiés,ontgrandementcontribuéàréduire lescoûtsde transaction.Deplus,lesexigencesdecotationsimposéesauxteneursdemarchéetquigarantissentàun intervenant la possibilité de trouver un prix sont plus facilement contrôlables etquantifiablessurlesplateformes.

Maisl’importanceacquiseparlesfirmesdeTHFetlesautresintervenantsquiutilisentletradingalgorithmiquepeutégalementimpacternégativementlesconditionsdeliquidité.Très actives dans desmarchés stables, ces firmes ont tendance à retirer leurs ordres enpériodedefortevolatilité.Laprofondeurdumarchésecondairequ’ilsalimententestdoncversatile et artificielle, puisqu’ils n’ont pas les capacités à porter des positions au-delàd’unejournéedetrading.Enoutre,nombredeleursstratégiessontcorréléesentreelles,cequicréeunrisquedespiraleautoréalisatrice,déclenchéeparetalimentantdestransactionsencascade(effetdomino)quipeuventcontribuerauxkrachs éclairsdont la fréquenceaaugmentécesdernièresannées.

Certainsdeceseffetsnégatifspeuventêtrelimitéssiunediversitédestypesd’acteursestpréservéesur lesmarchésobligataires,dontnotamment lacoexistencedesPTFaveclesteneursdemarchétraditionnels.Lacapacitédecesderniersàtraiterenprincipalprendeneffettoutsonintérêtlorsquelemarchéestplusvolatil.Ilestnécessairepourcelaquecette capacité ainsi que leur volonté d’agir ne soient pas contraintes à l’excès, qu’ilsconservent des incitations à intervenir en continu et que la course aux progrèstechnologiquesn’aboutissepasàdéfavorisercettecatégoried’intermédiaires.Ilfautdoncveiller à ce que les conditions de concurrence soient équilibrées entre ces différentsparticipantsdemarché,quisontaujourd’huisoumisàdesniveauxderéglementationstrèsdifférents.

Lagestiondurisqueparlesplateformesélectroniquesconstitueégalementunélémentimportant pour que les innovations technologiques ne se traduisent pas par des risquesopérationnelsetfinanciersaccrus.Celainclut,parexemple,desdispositifspourlimiterlaprobabilité d’ordres erronés, notamment de gros montants, venant perturber lefonctionnementdesalgorithmes.Enoutre,certainsdesépisodesrécentsdefortevolatilitéont montré l’importance de disposer de mécanismes de coupe-circuit (circuit breaker)efficacesetbiencalibréspourcontenir l’apparitiondephénomènesd’emballementauto-entretenussurlesmarchés.

Enfin,ledéveloppementduTHFcréeundéfientermesdetransparenceetdetraitementdes données, notamment pour les autorités en charge de la régulation et de la stabilitéfinancière.Cedéfiprovientàlafoisdelamultiplicationdesplateformesdenégociation,qui rend nécessaire une agrégation efficace des données, et de l’énorme quantité deparamètresàtraiter,quinécessitedesinvestissementscoûteuxdansdesoutilsdetypebig

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data. L’accès à leurs bases est par ailleurs encore trop restrictif de la part de certainesplateformes qui considèrent leurs données comme « propriétaires ». Des solutionspourraientêtreenvisagées,permettantauxacteursdemarchéetauxautoritésdedisposerd’éléments précis et exhaustifs qui viendraient alimenter les analyses et le suivi desconditions de liquidité des marchés sous-jacents, comme la création d’un entrepôtcentralisé de données regroupant l’ensemble des transactions traitées sur les différentesplateformes.

CONCLUSIONIlestdifficiled’estimeraujourd’huiquelserafinalementl’impactsurlesconditionsde

liquiditédesinnovationstechnologiquesquiaffectentl’organisationetlefonctionnementdesmarchésobligataires.Enaccroissantlaconcurrenceetdoncendiminuantlesmargessur lesquelles se rémunèrent les intermédiaires, lamontée en puissance des plateformesélectroniques et de l’activité de nouveaux acteurs qui poursuivent des stratégiesparticulières, comme celles relevant duTHF, pourrait contribuer à réduire la portée desphénomènesdebifurcationetdefragilitédelaliquiditédemarché.Ilfautpourcelaqueleseffetspositifsdecetteévolutionl’emportentsurlesautres.

Danscetteperspective,ilimportequeleseffortsengagés,tantparlespouvoirspublics13que par le secteur privé, soient poursuivis. Ces efforts doivent viser à améliorer latransparence des marchés obligataires, à veiller à ce que les conditions d’accès et detradingsurcesmarchéspréserventladiversitédesintermédiaires,àrenforcerlescapacitésde gestion et d’absorption du risque de liquidité par tous les utilisateurs et à adapter laréglementation de façon appropriée pour tenir compte et encadrer, entre autres, ledéveloppementduTHF.

BIBLIOGRAPHIECGFS (Committee on the Global Financial System) (2015), Fixed Income Market

Liquidity,rapport,(àparaître).

GREENWICHASSOCIATES(2015),EuropeanFixedIncomeStudy,juillet.

GREENWICHASSOCIATESetMCKINSEY&COMPANY (2013),CorporateBond e-Trading:Samegame,NewPlayingField,août.

MARKETS COMMITTEE (2015), Electronic Trading in Fixed Income Markets, ReportsubmittedbyaStudyGroupestablishedbytheMarketsCommittee.

RISKMAGAZINE(2015),TopTenFirmsonBrokerTec,septembre.

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MAÎTRISEDESRISQUESETRÉGULATION

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LATECHNOLOGIEESTLEMEILLEURGARANTDELAGESTIONDESRISQUESSURLESMARCHÉSFINANCIERS

GERARDHARTSINK*1

Le trading, la compensation et le règlement d’instruments financiers ne sontaujourd’hui plus envisageables sans l’intervention de la technologie. Le trading desactions,desobligations,desdevises,desmatièrespremièresetdesproduitsdérivéss’est,dans une large mesure, transformé en trading algorithmique (ou algo-trading) sur lesmarchés boursiers ou lesmarchés de gré à gré et repose sur les données procurées pardivers fournisseurs.La compensation et le règlementde tous ces instruments requièrentd’importants investissements dans la technologie (capacités informatiques, réseaux etstockagededonnées)envuedepermettrelagestiondesrisquespourlesintervenantsdumarché et la gestion des risques systémiques pour les autorités de contrôle et desurveillance.Latechnologiefaciliteparailleursletraitementintégrédeboutenboutdestransactionsafinquelescoûtsopérationnelsdesactivitéspost-transactionetdesactivitésdesoutiensoientaussibasquepossibleparrapportauxcoûtsdetransaction.Toutefois,latechnologie seule ne suffit pas à créer une infrastructure de marché financier solide,conforme aux attentes des autorités de réglementation et des intervenants du marché,facilitantlagestiondesrisquesetgarantissantdefaiblescoûtsopérationnels.

Cet article décrit deux programmes axés sur la technologie créés par les autoritéspubliquesetplacéssousleursurveillance,leCLS,pourContinuousLinkedSettlement,etlaGLEIF,pourGlobalLegalEntity IdentifierFoundation, envued’atténuer les risquespour les intervenants sur les marchés financiers, et explique en quoi ces programmesaident les autorités de réglementation à éviter et atténuer des risques systémiques dansleurséconomiesrespectives.Lesobjectifsdechacundecesprogrammesnepourrontêtreatteintsquesi lesautoritéspubliqueset les intervenantsdumarchécoopèrentetmènentuneactionconcertée.

LESDEUXPROGRAMMESLeCLS

Le système CLS prévient le risque de règlement, à savoir le risque pour l’une descontreparties d’une opération de change d’avoir livré irrévocablement la devise venduesans recevoir en échange la devise achetée à l’autre contrepartie.Ce risque de perte decapital est largement reconnu comme le principal risque systémique sur le marché deschanges.Ilestégalementconnusouslenomde«risqueHerstatt»,dunomd’unebanqueallemande qui a fait faillite en juin 1974. Le système CLS n’est pas un système decontrepartiecentrale,maisunmécanismedepaiementcontrepaiement.

Enmars1996, leComité sur les systèmesdepaiementetde règlement (CSPR)de laBanque des règlements internationaux (BRI) a publié un rapport intitulé Risque derèglementdanslesopérationsdechange(rapportAllsopp),quipréconisait(1)lesmesuresàprendreparchaquebanquepourlimiterleurexpositionaurisquederèglementdanslesopérationsdechange,(2)lesmesuresàprendreparl’ensembledusecteurpourconcevoir

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desservicesmultideviseslimitantlesrisqueset(3)lesmesuresàprendreparlesbanquescentralespourmettrerapidementàcontributionlesecteurprivé.

LaréactiondusecteurprivéaconduitàlacréationdusystèmeCLS.Celui-ciadémarréses opérations en 2002 avec trente-neuf membres et sept devises. Le CLS atténue lesrisques et améliore la stabilité financière sur le marché international des changes.Aujourd’hui,ilassurelerèglementdesordresdepaiementdansdix-huitdevises.Cinqdesvingtprincipalesdevises(CNY,RUB,TRY,BRL,INR)2répertoriéesenseptembre2013dansl’enquêtetriennaledelaBRIencollaborationaveclesbanquescentralesnefontpasencore partie du système CLS (BRI, 2013). Le CLS collabore étroitement avec lesbanquescentralesdes juridictionsconcernéesafindedéterminerenquoi l’intégrationdeleurdeviseausystèmeCLSpermettraitderéduiredavantagelerisquederèglementdanslesopérationsdechange.

LaGLEIF

La GLEIF, fondation sans but lucratif, a été créée en vue d’attribuer un identifiantinternational unique (legal entity identifier – LEI) à toute entité juridique distincteparticipantàdestransactionsfinancières.

L’objectif de la GLEIF, défini dans l’article 3 de ses statuts, est de faciliter et desoutenir plusieurs objectifs de stabilité financière, notamment optimiser la gestion desrisques, mieux évaluer les risques micro et macroprudentiels, faciliter la résolutionordonnée,prévenir les abusdemarchéet lutter contre la fraude financière, améliorer laqualitéetlaprécisionglobalesdesdonnéesfinancières.

Lors du sommet duG20 àCannes en 2011, les chefs d’État et de gouvernement ontinvité le Conseil de stabilité financière (CSF) à prendre l’initiative de coordonner lestravaux de la communauté des régulateurs afin d’élaborer un cadre de gouvernanceapproprié,tenantcomptedel’intérêtgénéral,pourl’identifiantLEIinternational.

En2012,ausommetdeLosCabos, lesrecommandationsduCSFconcernantlecadred’élaborationd’unsystèmed’identifiantinternationalpourlesentitésjuridiques(GLEIS–Global Lei Entity Identifier System), qui identifie les contreparties aux transactionsfinancières,dansuncadredegouvernancemondial représentant l’intérêtgénéralontétéapprouvéesparleschefsd’ÉtatetdegouvernementduG20.LesministèresdesFinanceset les gouverneurs des banques centrales des pays duG20 ont reconnu la nécessité deconcevoir et de mettre en œuvre, dans l’intérêt général, un système GLEIS qui seraitutilisé(1)parlesautoritésdetoutejuridictionoudetoutsecteurfinancierpourévaluerlesrisquessystémiquesetpréserverlastabilitéfinancière,assurerlasurveillancedumarchéetgarantir l’application de la loi, superviser les intervenants dumarché,mener à bien lesplansderésolution,recueillirdesdonnéesfiablesetassurerd’autresfonctionsofficielles,et (2) par le secteur privé pour optimiser la gestion des risques, améliorer l’efficacitéopérationnelle, calculer de manière plus précise l’exposition au risque et répondre àd’autresbesoins.

LESSERVICES

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LeCLS

LeprincipalservicefourniparlesystèmeCLSestunservicedetypepaiementcontrepaiementpourlerèglementàladatedevaleurdesdeuxvoletsd’uneopérationdechange.La banqueCLSBank International détient un compte dans chaque banque centrale desdix-huitdevisesadmisesdansleCLS.Touslesparticipantsdirects(settlementmembers)disposentd’uncomptemultideviseschezCLSBankInternational.Ilsversentetreçoiventdesfondsdanschacunedesdix-huitdevisesparl’intermédiaireducomptedeCLSdétenudanslesbanquescentralesconcernées,vialeurproprecompteouviauncomptenostro.Àchaque date de règlement, le CLS règle simultanément chacun des deux ordres depaiement de l’opération de change. En procédant au règlement simultané au sein d’unmêmesystème, leCLSpermetdelimiter lapertedecapital.Lerèglementdesordresdepaiement et les paiements associés sont définitifs. Les opérations de règlement despositions nettes créditrices et débitrices sont effectuées selon un échéancier définiquotidiennement.

Enplusd’atténuer le risquede règlement, leCLSapporteuncertainnombred’autresavantagesàlafoisauxparticipantsdirectset indirects(tiers)ayantaccèsauCLS,parmilesquels une gestion efficace des liquidités et des lignes de crédit, l’élargissement del’éventaildecontreparties,l’efficacitédespaiementsparlebiaisdutraitementintégrédeboutenboutdestransactions(STP–stepthroughprocessing)ainsiquelatransparenceetlastandardisationdesprocessusetdesconfirmations.

LaGLEIF

Le principal service de la GLEIF a débuté en 2015. Son objectif est de mettregratuitement à disposition les identifiants LEI des entités juridiques pour tous lesutilisateurs des autorités publiques et du secteur privé via le site de la GLEIF3. Cesdonnées seront mises à la disposition de tout utilisateur sans inscription préalable,conformémentauxconditionsd’utilisationrelativesàlaconsultationetautéléchargementdesdonnéesLEIetLE-RD(legalentityreferencedataoudonnéesderéférencedel’entitéjuridique) depuis le site de laGLEIF. Celle-ci collecte quotidiennement les identifiantsLEIauprèsdesopérateurslocaux(localoperatingunits–LOU)auformatcommondatafile (CDF). En 2016, deux éléments supplémentaires seront ajoutés à ces données :l’inscriptionauregistredessociétésetlaformejuridique(normeISO20275)desentitésjuridiquesconcernées.Unmoteurderecherchepermetd’effectuerdesrecherchesauseindelabasededonnéesencombinantplusieurscritères.Ilestpossibledeconsulterenlignelesrésultatsdelarecherche,maiségalementdelestéléchargerdansplusieursformats.

OutrecerôleessentieldefournisseurdesdonnéesLEI, laGLEIFexerceunefonctiond’élaboration de règles en rédigeant, en publiant et en faisant appliquer dans lemondeentier des normes opérationnelles, juridiques et techniques communes, ainsi qu’unefonction de surveillance en s’assurant du respect par les opérateurs locaux et lesutilisateursdesnormesetdesprotocolesdéfinis.

En2016, laGLEIF lanceraunnouveau serviceportant sur les structuresdesgroupes(sociétés-mèresdirectesetultimesdesentitésjuridiques).Ceservicerépondraauxbesoinsspécifiquesdeplusieursautoritéspubliquestellesquelesbanquescentrales,lesautorités

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deréglementationdestransactionssurlesproduitsdérivésettitresetlesautoritésfiscales.Il bénéficiera en outre au secteur privé, notamment pour la gestion des risques, lapassationdesmarchésetlesactivitésd’audit.

Depuis le lancement du programme LEI, de nombreux intervenants du marché ontmanifestéleurintérêtpourlamiseàdispositiongratuitedesdonnéesfiablesdelaGLEIF.Unepremière rencontreaétéorganiséeà l’été2015avec lesprincipaux fournisseursdedonnées et entreprises de technologie, qui constituent des utilisateurs potentiels desdonnées pour leurs applications et services. Certains d’entre eux ont déjà commencé àintégrer les identifiants LEI à leurs services en 2015. La GLEIF est très favorable àl’utilisationdesdonnéesparcesentreprises,maisposeunecondition :ellesnesontpasautoriséesàfacturerdesfraissupplémentairesàleursclientspourcesdonnées.

LaGLEIFaorganiséunerencontredetravailàl’automne2015aveclesétablissementsfinanciers d’importance systémique au niveau mondial (G-SIB – global systemicallyimportantbanks) figurant sur la liste établie ennovembre2014par leCSF.Elle apu àcette occasion dialoguer avec de nombreux dirigeants de ces trente établissements. Laplupart d’entre eux reconnaissent l’intérêt des identifiantsLEI pour les responsables durisque, les directeurs des services financiers, commerciaux, techniques, les responsablesdessystèmesd’information,delaconfidentialité,etc.,nonseulementafinderépondreauxexigences réglementaires de déclaration, mais également pour la gestion du risque,l’applicationdelarègle«knowyourcustomer»,laluttecontreleblanchimentd’argentetlefinancementduterrorisme,lesactivitésdebanquecorrespondante,larentabilitéclient,etc.CesdirigeantsontindiquéqueseuleuneapprocheglobalepermettraitdetirerpartidesidentifiantsLEIpourréduirelescoûtsopérationnelsetaméliorerlagestiondesrisques.

LesidentifiantsLEIontparailleursattirél’attentiondesentreprisesquimettentaupointdes solutions commerciales basées sur la technologie blockchain dans les secteurs despaiements,desvaleursmobilièresetdufinancementducommerce.Lamiseàdispositiongratuitededonnéestransparentesetfiablesconcernantlesentitésjuridiquesappartenantàlachaîneprésentepoureuxungrandintérêt.

LESSTRUCTURESLeCLS

Le système CLS se compose de la banque CLS Bank International, des banquescentralesdesdix-huitdevisesde règlementetdessoixante-deuxparticipantsdirects,quicomprennent la quasi-totalité des trente établissements financiers d’importancesystémique au niveau mondial (G-SIB) figurant sur la liste publiée par le CSF ennovembre 2014. Par ailleurs, vingt-six participants directs proposent à leur tour lesservicesderèglementdusystèmeCLSàenviron18000tiers(participantsindirects).Lesystème CLS compte soixante-sept banques nostro et cinquante-sept fournisseurs deliquidité dans une ou plusieurs devise(s). Plusieurs fournisseurs de services tels queSWIFTetIBMsontdespartenairesessentielsaubonfonctionnementduprincipalserviceduCLS.LecomitédesurveillanceduCLSassuresasurveillance.

LaGLEIF

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LesystèmeGLEIScomporte,enplusdelaGLEIF,lesvingt-quatreopérateurslocaux,quisontdespartenaireshabilités,souscertainesconditions,àémettrelesidentifiantsLEIdansuneouplusieursjuridictions.Lesopérateurslocauxsont,parnature,enconcurrencelesunsaveclesautresauseindusystèmefédératifduGLEIS.Unemêmejuridictionpeutcompterplusieursopérateurslocaux.

Les opérateurs locaux, comme la GLEIF, opèrent sans but lucratif. Il peut s’agird’organismesprivésoupublics.Ilsontétémisenplaceauseind’organismesvariéstelsquedesBourses,desdépositairesde titrescentraux,des registresdesociétés,unbureaudes brevets, une organisation de normalisation, un fournisseur de données ou unorganismedestatistiquestelquel’InseeenFrance.

LeComitédesurveillanceréglementaire(RegulatoryOversightCommittee–ROC)estletroisièmepartenaireduGLEIS.Ilregroupeplusdesoixanteautoritéspubliquesdeplusdequarantepays4.Ilaétéétablienjanvier2013pourcoordonneretassurerlasurveillanceduGLEIS.

LESDEUXCADRESJURIDIQUESLeCLS

CLSBankInternationalestunesociétébancaireinternationalespécialiséeconstituéeenvertududroitfédéralaméricain(EdgeActCorporation),établieàNewYorketréguléeparlaFederalReserve (Fed)desÉtats-Unis.Elleest soumiseà la supervisionde laFederalReserve Bank of New York qui est la principale autorité de surveillance au sein d’undispositifdesurveillancecoopératifregroupantlesbanquescentralesdontlesdevisessontprisesenchargeparCLSBankInternational.Elleest l’unedessociétésdugroupeCLSGroupHoldingsAG, basé à Lucerne en Suisse, qui compte soixante-seize actionnairesdontsoixante-deuxparticipantsdirects.CLSServicesLtd,entitésituéeàLondres,fournitlesservicestechniquesetopérationnelsàCLSBankInternational.

Les services du CLS sont proposés aux participants directs dans le cadre d’uneconvention incluant les règles deCLSBank International, régies par le droit anglais etpubliéessurlesitedugroupeCLS.Cesrèglesincluentdesdispositionsdétailléesportantsurl’adhésiondesmembres,laresponsabilité,lesdevises,lasoumission,letraitementetle règlementdesordresdepaiement, le traitementdespositionsdébitricesetcréditrices,lesfacilitésdetrésorerie,larépartitiondespertesetlesmesurescorrectives.

LaGLEIF

LaGLEIFestunefondationsuissecrééeàBâleenjuin2014parleCSF.Elleestplacéesous la surveillance de l’Autorité fédérale suisse de surveillance des fondations. LeComité de surveillance réglementaire du LEI assure la surveillance du GLEIS, quicomprendlaGLEIF.TroisobservateursduComitédesurveillanceréglementaireduLEIassistent aux réunions du conseil d’administration. En octobre 2015, la GLEIF et leComité de surveillance réglementaire du LEI ont conclu un Mémorandum d’ententespécifiantlanaturedumodèledecoopérationencomplémentdesdispositionsdesstatutsde la GLEIF. Tous les documents relatifs à sa gouvernance, rapports annuels, procès-

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verbaux de son conseil d’administration, etc., sont publiés sur son site pour garantir undegréélevédetransparence.

Enoctobre2015,laGLEIFapubliélaconvention-cadre(enanglais)régieparledroitsuissedéfinissantsarelationjuridiqueavecchaqueopérateurlocal,entantquepartenaireduGLEIS.Cetteconvention-cadre inclutdesdispositionsdétaillées tellesque lemanueld’accréditation, les obligations contractuelles des opérateurs locaux envers les entitésjuridiques,lesconditionsd’utilisationrelativesàlaconsultationetautéléchargementdesdonnéesLEIetLE-RD, lesobligationsdevérificationannuelledes accréditationset lesobligationsrelativesauxservicesassuréspardestiers.

LESMODÈLESÉCONOMIQUESLeCLS

LeservicederèglementduCLScouvredix-huitdevises.L’ajoutdenouvellesdevisesauseinduCLSnécessitenonseulementl’approbationduconseild’administrationdeCLSBank International, mais également du comité de surveillance. Pour être admissible auCLS, une devise doit bénéficier de l’aval, du soutien et de la participation active de labanque centrale de sa juridiction. Les principaux critères d’admissibilité des devisesportent sur lespoints suivants : (1)notation souveraine (minimumBB-/Ba3), (2)aspectjuridique et conformité (caractère définitif des règlements et des paiements, respect dudroit,luttecontreleblanchimentd’argent),(3)devise(convertibilitésuffisanteetabsencedecontrôledeschangesrestrictif), (4)soutiennational (solideengagementde labanquecentrale et des autres autorités, fournisseurs de liquidité adéquats), (5) normesopérationnelles(systèmeadéquatderèglementbrutentempsréelparlabanquecentrale).LeCLSnedisposequedecapacitésdepromotionlimitées,lespointsdécisifsdel’ajoutdedevisesnerelevantpasduCLS.

GrâceàuneétroitecollaborationduCLSavecsesmembresparticipantsetlesbanquescentrales des devises de règlement concernées, plus de 65 % des règlements desopérationsdechangesefontparl’intermédiairedesservicesduCLS.L’accroissementdece volume dépend des mesures prises par les banques centrales et les ministères desFinancesdesjuridictionsconcernéespourintégrerleurdeviseauservicederèglementduCLSetatténuerlerisquederèglementetlesrisquessystémiquesliésàleurdevise.

Au premier semestre 2015, CLS Bank International a procédé au règlement d’unvolumefacturablequotidiende891000ordres,avecunevaleurderèglementquotidiennemoyennede4900Md$.Lerevenumoyenétaitde0,14livrepardollarréglé.Aucoursdecettepériode,2300000ordresontétérégléslorsd’uneseulejournée,soitunrecordde9200Md$.

LaGLEIF

LaréglementationdesautoritésestleprincipaloutilpermettantdefaireensortequelesidentifiantsLEIdeviennentunbienpublicaccessibleausecteurpublicetausecteurprivé,comme le prévoit le préambule des statuts de la GLEIF. Le CSF a indiqué dans soncommuniqué de presse du 30 juin 2014 que le LEI visait plusieurs objectifs financiers(améliorer la gestion des risques,mieux évaluer les risquesmicro etmacroprudentiels,

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faciliter la résolution ordonnée) et apporterait de nombreux avantages au secteur privé(réductiondesrisquesopérationnels,simplificationdutraitementintégrédeboutenboutdestransactions).

Un aperçu d’environ quarante règles et de la réglementation proposée dans denombreuses juridictions peut être consulté sur le site de la GLEIF. Sans uneréglementation et sans une action concertée du secteur public et du secteur privé,l’identifiantinternationalLEInepourrapasêtremisàdispositiondusecteurpublicetdusecteur privé, comme prévu par le CSF et requis par le G20. La GLEIF dispose decapacitésdepromotionlimitées.Selonl’article10desesstatuts,ellen’estpasautoriséeàinfluencerlalégislation,nilaréglementation.

Jusqu’ici, l’attention des autorités se porte principalement sur l’utilisation desidentifiantsLEIdanslecadredesexigencesréglementairesdedéclaration.Iln’existepourl’instant aucune étude générale portant sur les avantages potentiels des identifiants LEIpour les autorités publiques au-delà de leur utilisation dans le cadre des exigencesréglementaires de déclaration et de l’analyse statistique, notamment pour la gestion desgaranties par les banques centrales, la passation des marchés publics, la réduction descoûtsdegestiondel’identitédesadministrationspubliques,etc.

Lesmembresduconseild’administrationdelaGLEIFontcommencé,encollaborationavecleprésident,entantqu’ambassadeursduLEI,àexplorer lesdifférentespossibilitéspourl’adoptionduLEIparlesecteurprivé.Denombreusesentitésprivéesreconnaissentl’intérêt de la mise à disposition gratuite d’identifiants LEI internationaux de grandequalité. Les intervenants dumarché soulèvent des problèmes pratiques tels que « nousavons actuellement de nombreuses autres priorités » et « il est possible que nosfournisseurs et les acheteurs de nos biens et services ne soient pas intéressés par lesidentifiants LEI ». Dans certaines juridictions, les registres des sociétés envisagentd’utiliserlesidentifiantsLEIpourtoutesleursentitésjuridiques.

Sur une période relativement courte d’environ trois ans, un peu plus de400000identifiantsLEIémisont intégré lesservicesde laGLEIF.Ces identifiantsLEIont pour la plupart été émis dans le cadre d’exigences de déclaration imposées par lesautoritésderéglementation.Selonplusieurssources,ondénombredanslemondeentierauminimum200millionsd’entitésjuridiquesinscritesounonsurlesregistresdessociétés,toutesjuridictionsconfondues.LaGLEIFtravailleenétroitecollaborationaveclecomitédesurveillanceréglementaireet l’organismeISOafindefaireappliquer lanorme20275(forme juridiquede l’entité) dans toutes les juridictions.Cettemesurepourrait permetted’identifierplusprécisémentlatailledumarchépotentielpourlesidentifiantsLEI.

LesopérateurslocauxémettentlesidentifiantsLEI.Ilssontenconcurrencelesunsaveclesautresetleursactivitésnesontautoriséesquedansunbutnonlucratif.LaGLEIFnerecommande,nin’imposeaucunestructuretarifaireauxopérateurslocauxpourl’émissiondes identifiants LEI et leur vérification annuelle. Une telle pratique seraitanticoncurrentielle.LaGLEIFesttoutefoischargéedesurveillerquelesopérateurslocauxrespectentl’obligationd’exercerleursactivitéssansbutlucratif.

LaGLEIFreçoitunecontributionde20dollarsparLEIactifetparannéepourcouvrir

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ses coûts, tel quementionné dans l’annexe 7 (paiements) de la convention-cadre. Nonseulementsonbudgetdoitêtreapprouvéparleconseild’administration,maiségalementildoit,selonl’article31desesstatuts,êtreprésentéaucomitédesurveillanceréglementaireduLEIpour«consultationetrecommandations».Lacroissancedunombred’identifiantsLEIpermettraderéduiresignificativementlemontantdelacontribution.LadirectiondelaGLEIFn’estpas autorisée à influencer la réglementationdans les juridictions envued’augmenterlenombred’identifiantsLEIpourquelemontantdelacontributiondiminue.

LESINFRASTRUCTURES(FINANCIÈRES)Le concept d’infrastructure renvoie généralement aux systèmes de fourniture de

services fondamentaux par un ensemble d’acteurs sur un marché tels que lestélécommunications et l’électricité. Ce concept renvoie souvent uniquement à la partiephysique de systèmes interconnectés, dans de nombreux cas détenus par plusieursintervenantsdumarché,quifournissentlesservices.Sanscontratjuridiqueappropriéentrelesutilisateursetlepartenaire,l’infrastructurephysiquerisquedefailliràsamission.

Les principes pour les infrastructures des marchés financiers (avril 2012) de laBRI/CSPR et de l’OICV (Organisation internationale des commissions de valeurs)donnent une définition des infrastructures desmarchés financiers au point 1.8 : « Uneinfrastructure de marché financier désigne un système multilatéral qui réunit lesétablissements participants, y compris l’opérateur du système, utilisés aux fins de lacompensation,durèglementoudel’enregistrementdespaiements,destitres,desdérivésou autres transactions financières. Les infrastructures des marchés financiers instaurentgénéralement un ensemble de règles et procédures communes à l’intention de tous lesparticipants, une infrastructure technique et un cadre spécialisé de gestion des risquesadaptéauxrisquesencourus.»

LeCLS

Les services du CLS reposent sur une convention incluant les règles de CLS BankInternational,conclueentrechaqueparticipantdirectetCLSBankInternational.Enétroitecollaborationavec sespartenaires telsqueSWIFTet IBM,CLSServicesLtdassure lesservicestechniquesetopérationnels.

LaGLEIF

Les services de la GLEIF sont basés sur la convention-cadre qui lie les opérateurslocauxàlaGLEIFentantquepartenairesduGLEIS.LesidentifiantsLEIontétéconçuscomme un bien public accessible aux utilisateurs des autorités publiques et du secteurprivé.LesutilisateursdesdonnéesLEInesignentpasdecontratavecleGLEIS,maisilsdoivent respecter les conditions d’utilisation relatives à la consultation et autéléchargementdesdonnéesLEIetLE-RDdepuislesiteinternetdelaGLEIF.

SUPERVISIONETSURVEILLANCELeCLS

CLSBankInternationalestsoumiseàlasurveillanceprudentielledelaFederalReserveof New York, qui est par ailleurs la principale autorité de surveillance au sein d’un

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dispositifdesurveillancecoopératifregroupantlesbanquescentralesdontlesdevisessontprisesenchargeparCLSBankInternational.

LeCLSdécritdanssondocumentd’informationlamiseenapplicationdedix-huitdesvingt-quatre principes pour les infrastructures desmarchés financiers du comité sur lespaiementset lesinfrastructuresdumarchéet l’OICV.CLSBankInternationalatravailléavec le comité de surveillance du CLS pour rédiger ce document d’information de144pagesdisponiblesurlesiteinternetdugroupeCLS.

LaGLEIF

Selon l’article 2 de ses statuts, laGLEIF est placée sous la supervisionde l’Autoritéfédéralesuissedesurveillancedesfondations.

Conformémentàl’article30desstatuts,lecomitédesurveillanceréglementaireduLEIestchargéd’assurerlasurveillanceduGLEIS(laGLEIFetlesopérateurslocaux).Dansl’articleIVduMémorandumd’ententeducomitédesurveillanceréglementaireduLEIetde la GLEIF (disponible sur le site de la GLEIF), il est précisé que le comité desurveillance réglementaire assurera la surveillance de la GLEIF conformément auxprincipesdegouvernanceduGLEIS,auxstatutsde laGLEIFetaudroitapplicableauxfondationssuisses.LecomitédesurveillanceréglementaireduLEIet laGLEIFdoiventconsulterlecomitésurlespaiementsetlesinfrastructuresdumarchéetdel’OICVdanslecadredel’élaborationdepolitiquesrégissant lesactivitésdelaGLEIFet lasurveillanceduGLEIS.LaGLEIFétudie lameilleure façonde respecter lesexigencesducomitédesurveillance réglementaire du LEI pour faire de la GLEIF une solide infrastructure demarchéfinancier.

CONCLUSIONLes autorités publiques, représentées par la BRI, leG20, le CSF et l’OICV, ont pris

diversesmesurespouratténuer lesrisquessystémiquessur lesmarchésinternationauxetlimiterlesrisquesdanslesjuridictionsetpourlesintervenantsdumarchéconcernés.Cesorganismes ont recommandé d’inclure leurs politiques publiques à la législation et à laréglementation des autorités de chacune des juridictions. Ils ont par ailleurs pris desinitiatives en vue de mettre en place de nouveaux systèmes permettant d’atténuer lesrisques.LeCLSetlaGLEIFsontdeuxexemplesconcretsdesystèmesquiontvulejouràlasuited’uneinitiativedusecteurpublic.

Les services du CLS sont devenus très performants dans l’atténuation du risque derèglementpour lesdevisesprisesenchargegrâceàuneactionconcertée,conformémentaux recommandations du rapport Allsopp, et à la coopération intensive des banquescentrales impliquées avec les principales banques habilitées à effectuer des opérationsdanscesdevises.

LaGLEIFaétécrééeenjuin2014etadébutésesactivitésen2015.LesecteurpublicetlesintervenantsdumarchéindiquentclairementquelesservicesliésauxdonnéesLEIdegrande qualité (relatives aux entités juridiques individuelles, mais également auxstructures de groupes) pourraient apporter de solides avantages aux autorités commeausecteurprivé.Cen’estquedanslecadred’uneactionconcertéedesautoritésetdusecteur

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privéqueleLEI,identifiantinternationaluniquepourlesentitésjuridiques,pourradevenirun bien public mis gratuitement à la disposition des utilisateurs publics et privés,conformémentà lademandedeschefsd’ÉtatetdegouvernementduG20ainsiquedesministèresdesFinancesetdesgouverneursdesbanquescentrales.

BIBLIOGRAPHIEETSITESINTERNETBRI (Banque des règlements internationaux) (1996), Settlement Risk in Foreign

ExchangeTransactions,mars,www.bis.org/cpmi/publ/d17.htm.

BRI (2013), Triennial Central Bank Survey of Foreign Exchange and DerivativesMarketActivityin2013,13septembre,www.bis.org/publ/rpfx13.htm.

SitedugroupeCLS:www.cls-group.com/.

SitedelafondationGLEIF:www.gleif.org/.

Site du Legal Entity Identifier Regulatory Oversight Committee (LEI ROC) :www.leiroc.org/.

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NOUVELLESTECHNOLOGIESETPROTECTIONDESÉPARGNANTS:L’ACTIONDEL’AMF

MAJDIDEBBICH*1

GÉRARDRAMEIX**2

Lesménagesfrançaisviventaujourd’huiunepériodesingulière.L’innovationfinancièreetladiversitédescanauxdecommercialisationpermettentunedémocratisationinéditedel’accès à certains produits et services financiers jusqu’alors réservés aux investisseursinitiés ou fortunés. L’émergence de nouvelles technologies, en particulier sur Internet,contribuelargementàcettetransformationdespratiquesd’investissementdel’épargneenmettant à la portée de tous des produits plus risqués que les placements traditionnels(livrets d’épargne, assurance-vie, etc.) et en proposant des services, tels que le conseilautomatisé, devenus rentables pour les professionnels grâce à d’importantes économiesd’échelle.Cetteplusgrandevariétédeproduitsetdeservicesfinanciersquepermettentlesnouvelles technologies amène une concurrence accrue dans les circuits de distributiontraditionnelsetpeutcontribueràunmeilleurfinancementdel’économieenfavorisantuneallocation plus efficace de l’épargne. Néanmoins, la multiplication des acteurs et destechniques pose aussi de nouveaux enjeux en matière de régulation. Ces enjeuxapparaissent particulièrement importants dans un contexte global de désengagementprogressifdel’État-providenceetderesponsabilisationcroissantedesindividusquantàlagestiondeleurépargne,notammentpourlaretraiteetlasanté.

De manière plus conjoncturelle, l’environnement économique dans lequel nousévoluonsdepuis2008tendàmodifierlescomportementsdesépargnants.Larecherchederendements,exacerbéepardestauxd’intérêtàdesniveauxhistoriquementbas,incitelesménagesdésireuxde faire fructifier leurépargneà tirerpartidesnouvelles technologiespour s’engager sur des produits plus risqués, voire, dans certains cas, fortementspéculatifs.EnFrance,cesévolutionsinterviennentalorsmêmequelesenquêtesmontrentquelesménagespeinentàmaîtriserlesfondamentauxéconomiquesetfinanciersquileurpermettraient de prendre des décisions éclairées en matière de planification financière,d’accumulationpatrimonialeetdepréparationdelaretraite(Arrondeletal.,2013).

Enfin,lesménagesfrançaisdisposentd’uneépargnerelativementabondante3.

Cetriptyque(responsabilisationindividuelleaccruemalgrédescompétencesfinancièreslimitées,appétencepourlerendementetépargneabondante)placel’épargnantensituationdevulnérabilitéetd’expositionpotentielleauxabusdecertainsprofessionnelsfinanciers.C’estenparticulierlecasdesplates-formesdetradingsurlemarchédeschanges(forex–foreign exchange ou marché des changes), qui proposent aux épargnants d’investir enligneenpromettantuneforterentabilité,sanstoujoursinformerdesrisquesimportantsdeperte en capital.D’autres plates-formes proposent d’investir dans des produits auxquelslesparticuliersn’ont engénéral pas accèsdans les réseauxdedistribution traditionnels,notamment le capital-investissement via l’investissement participatif. Enfin, l’usagemassifdesmédias sociauxpar lesprofessionnels, lapuissancedesoutilsdeciblagedes

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listesdediffusionetleurcaractèreintrusifposentlaquestiondesmodalitésd’applicationdesrèglesrelativesauxmessagesàcaractèrecommercial.Danscecontexte,commentlerégulateur doit-il répondre aux défis inédits posés par les nouvelles technologies enmatière de protection des épargnants tout en créant un cadre concurrentiel équitable etunifiépourlesprofessionnels?

L’enjeuprincipalrésidedansledéveloppementexponentieldesactivitésenlignequi,àterme,pourrontjouerunrôlesignificatif,côtédemande,danslaréorientationdel’épargneet,côtéoffre,danslaconcurrenceentreprofessionnels.L’actiondel’Autoritédesmarchésfinanciers(AMF)pourmieuxmaîtriserlesrisquesetaccompagnerledéveloppementdesnouvellestechnologiessedéclineenunevariétéd’interventions:préventionaccrueauprèsdes investisseurs individuels, définition et promotion de bonnes pratiques auprès desprofessionnels et surveillance du respect du cadre réglementaire. Cet article traite del’actiondel’AMFàtraverstroisexemplesissusdestechnologiesenligne.

L‘INVESTISSEMENTSURLEMARCHÉDESCHANGES(FOREX)Uneexpansiondesplates-formesenligneetdesréclamationsreçuesparl’AMF

Lemarchédes changes représente aujourd’hui plusde5000Md$envolumemoyenquotidiende transactions4. Près de 3,5%de ces transactions sont le fait de particuliersnotamment sur des plates-formes de trading en ligne. En France, ce sont environ20 000 particuliers qui investissent de manière active sur le marché des devises. Lesplates-formes de trading en ligne proposent plusieurs instruments pour investir sur leforex : les CFD (contracts for difference)5 permettent à l’investisseur de gagner ou deperdreladifférenceentrelecoursd’achatetlecoursàlarevented’unedevise;lesoptionsbinaires donnent la possibilité de percevoir un gain déterminé à l’avance en casd’anticipationcorrecteet,àl’inverse,deperdrelamiseencasd’anticipationincorrecte;lesopérationsàreporttacite(rollingspotforex)6permettentd’intervenirdirectementsurlemarchéenachetantouenvendantunedevise.Lesoffresadresséesauxparticulierssurcesplates-formesdetradingproposentparfoisdebénéficierd’uneffetdelevierpouvantallerjusqu’à 400 chez certains prestataires, dans le cas des CFD. L’effet de levier permet àl’investisseur de démultiplier non seulement ses gains,mais aussi ses pertes, et c’est làl’undesdangersmajeursdecesplates-formespourlesparticuliers.Certainsinvestisseurspeuvent en effet perdre davantage que leurmise de départ. À titre d’exemple, pour uninvestissement initial de 100 euros, un levier de 400 peut engendrer une perte de4000eurospourl’investisseurencasdebaisseducoursdeladevisede10%etsiaucunmécanismeefficacedesécuritén’estmisenplace.

Les sites internet qui proposent aux particuliers d’investir sur lemarché des changesappartiennentàtroiscatégories: lessitesrégulésparl’Autoritédecontrôleprudentieletderésolution(ACPR),lessitesréguléspard’autresautoritéseuropéennesetlessitesnonautorisés.Lespremierssontautorisésàproposerleursservicesauxinvestisseursfrançais(soitenvertud’unagrémentoctroyéparl’ACPR,soitenlibreétablissementparlebiaisd’une succursale et du passeport européen), tandis que les deuxièmes agissent sur le

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territoirefrançaisenbénéficiantdupasseporteuropéenquileuroctroielalibreprestationde services. Les sites non autorisés constituent le plus souvent des escroqueries dontl’objectifestdedétourner l’argentdes investisseurs.Cesderniersprestatairesutilisent leplussouventdessitesclésenmainquipeuventêtredupliquésindustriellement,cequileurpermetdebasculeraisémentsurdenouveauxsitesdèsqu’ilssontrepérés.

Afindemieuxconnaîtrelesdifférentsacteursdumarchédel’investissementenligne,l’AMFeffectue,autraversdesaDirectiondesrelationsaveclesépargnants(DREP),uneveilledessitesdecesacteursetdespublicitéssurlesplacements.Ainsi,elleapuconstaterdenombreusespublicitésdiffuséessurdessitesgrandpublicetfaisant lapromotiondesinstrumentstrèsspéculatifssurlemarchédeschanges.Surlessixpremiersmoisde2015,unenouvellepublicitéinternetsurdeuxpourdesproduitsd’épargneconcernaitletradingspéculatif (rollingspot forex, CFD, options binaires). Ce constat est récurrent depuis ledémarrage, en 2011, de la veille des publicités à l’AMF. Par ailleurs, l’AMF amis enplaceplusieurscanauxdedétectiondesproblématiquesrencontréesparlesépargnantssurcessites.Ainsi,AMFÉpargneInfoServicerecueillelesquestionsetlesréclamationsdesépargnants ainsi que les interrogations des professionnels par téléphone et par courriel.Les statistiques d’Épargne Info Service mettent en évidence une augmentation, cesdernièresannées,desproblèmesrencontrésparlesinvestisseursindividuelssurlesplates-formes de trading en ligne sur le marché des changes et les options binaires (cf.graphique1).Enfin,unmédiateurindépendantofficieauseindel’AMFafinderésoudre,à l’amiable, les différends opposant les épargnants et les professionnels, dans un délairaisonnable. Le médiateur traite les dossiers en toute indépendance et fait unerecommandationnoncontraignanteàchaquepartie.

Graphique1

Nombredeplaintesrelativesaurollingspotforexetauxoptionsbinaires*reçuesparÉpargneInfoServiceentre2011et2014

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*Optionsdontlesgainssontprédéfinislorsdeleursémissions.

Source:AMF.

Desenquêtespourmieuxcernerlespratiquesdesplates-formes,descampagnesdepréventionàl’attentiondugrandpublicetenfindescontrôles

Pourcontrerlesactivitésdesprestatairesquiagissentdemanièrefrauduleuse,l’AMFamisenplace,conjointementavecl’ACPR,unelistenoiredessitesdeforexnonautorisésquicontinuentdedémarcherdesépargnantsenFranceainsiqu’unelistenoiredédiéeauxplates-formesdetradingsurlesoptionsbinaires.Lalistedessitesdeforexnonautorisésestrégulièrementmiseàjoursurlesitedel’AMFetfaitl’objetdecommuniquésdepressedanslecadredupôlecommundel’AMFetdel’ACPR.Parailleurs,afindemieuxcernerlesconséquencespourlesinvestisseursindividuelsdutradingenlignesurlemarchédeschanges, l’AMF a mené une enquête auprès d’établissements régulés couvrant unéchantillondeprèsde15000clientsparticuliersactifsentre2009et20127.Lesrésultatsde cette enquête publiés en 2014 ont montré que près de 90% des clients perdent del’argent sur la période étudiée. Ces clients sondés ont en moyenne perdu près de11000eurosetlerésultatmédianestunepertede1800euros(cf.graphique2infra).Surl’ensembledel’échantillon,lerésultattotalestnégatifetreprésente161M€.Cesrésultatsillustrent les risques encourus par les ménages qui investissent sur des instrumentsextrêmement spéculatifs. Lamajorité des clients perdent desmontants significatifs et ilapparaîtqu’iln’existeaucuneffetd’apprentissagesurlapérioded’observationpuisquelespertess’accroissentpourlesclientsquipersistentàinvestir.Lesplates-formesagissentsuruneformed’addictionaujeupourinciterlesclientsàinvestirdavantage.

Graphique2

Répartitiondesrésultatsdutradingenlignepourlesinvestisseursindividuels

(gainsetperteseneuros,enabscisse)

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Source:AMF.

Àlasuitedelapublicationdecesrésultats,l’AMFalancéunecampagnedigitalevisantàalerterlegrandpublicsurlesdangersduforex.L’objectifdelacampagneétaitdecapterl’attentiondesinternautesàl’aidedepublicitéssurdessitesgrandpublic.Lecontenudecespublicitésétaittrèssimilaireàceluidecellesgénéralementproposéesparlessitesdetradingsurlemarchédeschanges:mêmescodesetpromessesquelesannonceursvantantles mérites du trading en ligne pour les particuliers. En cliquant sur ces publicités,l’internaute était renvoyé vers le site de l’AMF sur lequel des contenus pédagogiques(vidéos crayonnées, infographies, articles) expliquaient le fonctionnement des sites deforexetlesrisquesliésàleurusage.Cettecampagneinéditeapermisdemettreengardeuncertainnombred’utilisateurspotentielsdesitesdeforexetdediffuserlesrésultatsdel’étude réalisée par l’AMF entre 2009 et 2012 sur le caractère inadapté du trading dedevisespourlesparticuliers.

Àlafinde2014,l’AMFalancésespremièresvisitesmystèresenligneafindemieuxcerner les pratiques de certaines plates-formes de trading et de commercialisation deproduitscomplexesnotamment8.Cette campagne en ligne aporté surdesplates-formesagissantenvertudupasseporteuropéenounedisposantd’aucunagrément.Elles’inscritdanslacontinuitédesvisitesmystèresenagencesbancairespratiquéesparl’AMFdepuisplusieurs années. L’échantillon de plates-formes considéré était constitué de vingt-neufsiteschoisispourleuractivitécommercialeenFrance.Cettecampagnedevisitesmystèresapermisdemettre en lumière lespratiques incitativesdesprestatairesquiproposentdebonifier les versements effectués par les investisseurs afin de les engager à investirdavantage et qui minimisent le risque encouru. Les pratiques de ces plates-formesapparaissent de très mauvaise qualité. Les questionnaires visant à identifier les

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caractéristiquesdesinvestisseursenmatièred’objectifsetd’appétencepourlerisquesontinsuffisantsdans laplupartdescas,et l’intérêtdesprestataires sembledavantage tournéverslesressourcesfinancièresdesinvestisseursqueverslapréventiondesrisques.Enfin,leretraitdesfondsinvestisapparaîtgénéralementimpossible.

Infine,ilapparaîtqu’unelargepartdesprestataires,proposantauxménagesd’investirsur lemarché des changes, tire parti des faiblesses des épargnants et n’apporte aucunevaleurajoutéeenmatièredeplacements.C’est la raisonpour laquelle, l’AMFconsidèrequ’il est nécessaire d’agir en informant le public que le forex, les CFD et les optionsbinairesnesontpasdesproduitsadaptésauxparticuliers.Lerégulateuragitdanslecadrede l’European Securities andMarketsAuthority (ESMA) pour l’exigence d’une qualitéégaledediligencessurl’agrémentdesprestatairesetdemandel’interdictiondelapublicitésurce typedeproduits.Enfin, l’AMFpeuteffectuerdescontrôlessur lesentitésqu’elleréguleafindevérifierquecelles-cirespectentbienleursobligationsprofessionnelles.Elleadéjàsanctionné,àcetitre,desplates-formesdetradingsurleforex.

Leviersjuridiquesetévolutiondelaréglementationeuropéennepourmieuxencadrerlespratiquesabusivesdesplates-formesdetradingenlignesurlemarchédeschanges

Tous ces constats ont amené l’AMF à agir pour une meilleure protection desinvestisseurs.Ellenepeut intervenirdirectementpourbloquer l’accèsàcertainssitesdetrading sur le marché des changes, parfois non autorisés à proposer leurs services enFranceetdontlespratiquesapparaissentabusivesàl’endroitdesinvestisseursindividuels.En revanche, sur demande de l’AMF, le tribunal de grande instance a déjà ordonné leblocagedel’accèsàplusieursplates-formesenligne.Cesdémarchesquiontvocationàsepoursuivre et à s’intensifier visent à limiter les risques auxquels s’exposent lesinvestisseurssurdesplates-formesnonrégulées.Parailleurs,l’AMFaproposéauministrede l’Économie et des Finances un dispositif juridique visant à interdire certainespublicités,notammentcellesparvoieélectronique.Lephénomèned’expansiondutradingaccessible en ligne pour les particuliers est en effet étroitement lié à des campagnespublicitaires très actives. Ces bannières restent le principal mode de recrutement d’unpublic dont le profil est en évidente inadéquation avec le type de produits proposés,complexes et risqués. Le projet de dispositif réglementaire serait limité aux contratsfinanciersnégociésdegréàgréprésentantdesrisquesélevésaveceffetdelevieroudontle rendement est difficilement compréhensible par unparticulier au regarddu risque.Àcourt ou moyen terme et une fois la base juridique obtenue, le règlement général del’AMFpréciseraitlescasconcernésetpermettraitainsidemieuxprotégerlesépargnants.

Auseindel’ESMA,l’AMFs’attacheaussiàpromouvoirdespratiquesdesupervisionplusrigoureusesauprèsdesautresrégulateurs.Lesplates-formesdetradingsurlemarchédeschangesquisontréguléespard’autresautoritéseuropéennesnepeuventeneffetfairel’objetd’uneinterdictionunilatérale.Aussi,encasdepratiquesabusivesconstatéessurleterritoirenationaldelapartd’uneplate-formeréguléeparailleurs,l’AMFrestetributairede l’actiondu régulateurqui a initialement agréé laplate-forme.L’entréeenvigueurau1er janvier 2017 du règlement sur les marchés d’instruments financiers (MIF) et de ladisposition « product intervention » pourrait simplifier ce processus. Le règlement

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permettra en effet d’intervenir directement en cas demenace sur lemarchéoupour lesépargnants.Cettedispositionviendrarenforcerl’arsenaljuridiqueàlaportéedurégulateurpourgarantirlaprotectiondesinvestisseursetréduirelespratiquesabusives.

LEFINANCEMENTPARTICIPATIFCOMMENOUVELLEFORMEDEPLACEMENTDEL’ÉPARGNEUnecontributionàlaréorientationdel’épargneetunealternativeaufinancement

bancairepourlesentreprises

Ledéveloppementsur Internetdeplates-formescollaborativesetdemédiassociauxapermis de faire émerger de nouvelles formes de placements pour les épargnants.Initialement dirigées vers le don, les plates-formes de financement participatif(crowdfunding) ont rapidement évoluépourproposer aux entreprisesde leverdes fondsauprès d’un large public de particuliers sous la forme de prises de participations(crowdequity) etdeprêts (crowdlending).Cette évolution répondaubesoin croissant definancement de certaines PME qui peinent à accéder aux sources de financementtraditionnellesouquisouhaitentdiversifiercessources.Leprocessusdesplates-formesdecrowdfunding permet aussi aux entreprises d’obtenir un financement dans un délai trèscourt(enmoyenne,troissemainescontretroismoispourlesprêtsbancaires).Encesens,lefinancementparticipatifpourraitapporteruneréellealternativeaufinancementbancairedontlesPMEsontencorefortementdépendanteset,danscertainscas,venirs’ysubstituer(Agrawaletal.,2013).

Dans un contexte d’abondance de l’épargne dont l’affectation en France est encorelargementenfaveurdeplacementspeurisqués,lefinancementparticipatifpeutaussivenirfavoriser la réorientation de l’épargne vers le long terme et, ce faisant, insuffler uneculture de la diversification des portefeuilles financiers et de la mesure de la prise derisque. À l’instigation de l’AMF, le régulateur s’est saisi très tôt de la question et unnouveau dispositif juridique est entré en vigueur aux côtés du statut de prestataire deservices d’investissement (PSI). L’ordonnance du 30 mai 2014 vise ainsi à réguler lesactivités de financement participatif et à protéger les investisseurs à travers lamise enplacedesstatutsd’intermédiaireenfinancementparticipatif(IFP),superviséparl’ACPR,etdeconseillereninvestissementparticipatif(CIP),régulépar l’AMF.Lamiseenplacede deux statuts distincts pour les activités de prêts et de dons, d’une part, etl’investissementenactionsouenobligations,d’autrepart,viseenparticulieràrenforcerlaprotection des investisseurs, en établissant des mécanismes de régulation appropriés àchaqueactivité,ainsiquedesobligationsd’informationetdecommunicationéquilibrées.

Desstatutsréglementéspourencadrerlespratiquesetprotégerlesépargnants

Délivréparl’ACPR,lestatutd’IFPencadrelesactivitésdeprêtavecousansintérêts.Pour inciter les épargnants à diversifier leurs investissements, la réglementation imposeunelimited’investissementparpersonnede1000eurosprêtésavecintérêts(4000eurossans intérêts) par projet et limite à 1M€ par projet le montant pouvant être empruntéauprèsdesparticuliers.Cettedérogationaumonopoleducréditbancairesur lesprêtsdemoinsde1M€constitueune avancée importantedans la diversificationdes sourcesdefinancementpourlesPME.Àcejour,presquel’intégralitédesfinancementsobtenuspar

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lesPMEl’estauprèsd’établissementsbancaires,mais,enpratique,lesentreprisespeuventconnaître des difficultés pour financer des projets dont lemontant est inférieur à 1M€(equitygap).Aussi,dansuncontexted’incertitudeexacerbéesurlesrendementsfutursdesinvestissements et d’exigences prudentielles plus marquées, l’accès des entreprises aufinancement participatif pourrait apparaître comme un complément pertinent au créditbancaire.

Alors que certaines entreprises n’atteignent pas la taille critique leur permettantd’accéder aux marchés financiers, l’investissement participatif peut de même être unealternativepour leverdes fondsauprèsd’investisseurs individuels.Lesplates-formesdefinancement participatif proposant des prises departicipations au capital des entreprisessontencadréesparlestatutdeCIPdontl’ORIAS9(etenamontl’AMFpourl’évaluationde la compétence professionnelle des dirigeants et du programme d’activité) gèrel’immatriculationetlesuivienattendantlacréationd’uneassociationagrééepourassurercerôle.CestatutestmoinscontraignantqueceluidePSIetpeutêtrecumuléaveclestatutd’IFP.Lestitresémisdoiventêtresimples(actionsordinairesouobligationsàtauxfixe),danslalimited’unelevéedefondsnedépassantpas1M€.LesentreprisesfaisantappelàdesCIPne sontpas tenuesdepublier unprospectusdétaillant les conditionsde l’offre,maisellesdoiventrépondreàdesobligationsd’informationauxinvestisseurscadréesdansun document d’information réglementaire synthétique (DIRS). Chaque plate-forme definancement participatif par souscription de titres est dans l’obligation de respecter desrèglesd’organisationetdebonneconduite,notammentdeproposerunaccèsprogressifàl’informationsuraumoinsdeuxprojetsafindegarantirauxinvestisseurslapossibilitédediversifier leur portefeuille. À ce jour, le nombre d’acteurs du financement participatifenregistrés sous le statut de CIP s’élève à vingt-neuf après une année d’existence dunouveaustatut.Ils’agitd’unefilièrejeuneencroissance.

Desrisquesàlamargequiappellentcependantàlavigilancedesépargnants

Concernantlesservicesd’investissement,lamiseenplacedustatutdeCIPetd’unlabel«plate-formedefinanceparticipativeréguléeparlesautoritésfrançaises»instituéparleTrésor permet de rendre visibles les plates-formes autorisées à opérer et d’informer lepublic que celles-ci sont bien soumises au nouveau cadre applicable au financementparticipatif.Cesplates-formes sont exclusivement celles qui sont inscrites sur le site del’ORIASousurleRegistredesagentsfinanciers(Regafi)pourlesPSIoffrantdesservicesdefinancementparticipatif.LaDirectiongénéraledelaconcurrence,delaconsommationetdelarépressiondesfraudes(DGCCRF)peutêtreamenéeàs’assurerdubonusagedulabel«plate-formedefinanceparticipativeréguléeparlesautoritésfrançaises».Unusageabusifounonconformepeutdonnerlieuàdespoursuitessurleplanciviloupénal.

L’AMF a récemment constaté que certaines plates-formes proposent de financer endirect des sociétés en nom collectif (SNC), des sociétés en participation (SEP) ou dessociétés civiles immobilières (SCI). Ces plates-formes se réclament de la financeparticipative, mais elles n’entrent pas pour autant dans le champ réglementé dufinancementparticipatifsousformedetitresfinanciers(crowdequity).L’AMFadoncmisen garde les investisseurs qui doivent les éviter : ces offres, qui sont par ailleurs

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susceptiblesd’êtreillégalesetdenatureàdonnerlieuàannulation,présententeneffetdesrisquesimportantspourlessouscripteursquipeuventengagerleursbienspropres,c’est-à-dire leur patrimoine personnel, si la société dans laquelle ils investissent fait défaut. Ilconvientdoncpourlesinvestisseursdedemeurervigilantsetd’examinerl’authenticitédesagréments présentés par chaque plate-forme en ligne. Aussi, les investisseurs doiventvérifier le bon enregistrement desCIP auprès de l’ORIAS lorsqu’ils souhaitent investirdans le crowdequity, et s’assurer que les entités ont fait l’objet d’un agrément et sontsuivies. L’AMF a par ailleurs imposé aux plates-formes de proposer des sites d’accèsprogressif afin que les investisseurs demeurent conscients du fait que le capital-investissementprésentedes risquesdeperte totaleoupartielle etd’illiquiditéducapitalengagé.

LESMÉDIASSOCIAUX:NOUVEAUCANALDECOMMUNICATIONPOURLESACTEURSFINANCIERSETNOUVEAUXENJEUXPOURLERÉGULATEUR

L’utilisationdesmédiassociauximpliquedepréciserlesrèglesquileursontapplicables

Les communications à caractère promotionnel des professionnels de la financeconstituentunautreenjeumajeurderégulationenmatièredeprotectiondesinvestisseurs.En particulier, les médias sociaux, c’est-à-dire l’ensemble des technologies permettantl’interaction sociale et la création de contenus collaboratifs sur Internet, occupent uneplace singulière dans l’éventail de canaux utilisés par certains professionnels. Ledéveloppement ces dernières années de l’usage massif des médias sociaux par lesinvestisseursindividuelsoffreuneforcedepénétrationetdediffusiondel’informationàmoindre coût pour les professionnels. En outre, ces outils innovants permettent uneexpérienceclientinéditeavecl’apparitiondenouveauxmodesdedistributiondesproduitsqui mêlent interactivité et possibilité de créer des contenus « sur mesure ». Ledéveloppementdecesnouveauxoutilsetlaprésencecroissantedesprofessionnelssurlesmédias sociaux s’effectuent en partie au détriment des supports traditionnels comme lapresseécrite.

La réglementation applicable à la production ainsi qu’à la diffusion derecommandations d’investissement à caractère général et d’analyses d’instrumentsfinanciers sur les médias sociaux est régie par le Code monétaire et financier et lerèglementgénéralde l’AMF.Enparticulier, au termedesprincipes issusde ladirectiveMIF, les PSI et les émetteurs doivent respectivement dispenser une informationcommerciale « claire, exacte et non trompeuse » et « exacte, précise et sincère ».Cependant, en pratique, la structure des médias sociaux contraint l’élaboration despublicationscommercialespardescodesd’utilisationquipeuvent compliquer le respectdes règles encadrant la publicité financière. Par exemple, les plates-formes des médiassociaux imposentunformatdepublication trèsconcis.Denouveauxenjeux10 sont ainsiposésaurégulateurfaceàcettenouvelleconfigurationdesmoyensdecommunicationdesacteurs financiers qui se doivent par ailleurs de respecter les règles qui leur sontapplicables,quelsquesoientlesformesetlesmodesdediffusiondel’information.

Desadaptationssontnécessairespouraméliorerlaprotectiondesinvestisseurs

Lesmédiassociauxsecaractérisentparlavisibilitépresqueillimitéequ’ilspermettent

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et qui rend difficile, pour une société de gestion, un émetteur ou un distributeur deproduits financiers, la sélection du public visé et la segmentation par typologied’investisseurs. En ce sens, l’utilisation massive des médias sociaux peut apparaîtredifficilement compatible avec certaines exigences de la directiveMIF. Il est néanmoinsimpératifquelesprofessionnelsprésententàdesinvestisseurs«nonprofessionnels»desinformationsdontlemessagecommercialn’estpasdéséquilibré.Eneffet,lacontraintedeconcision sur certains médias sociaux peut inciter les professionnels à segmenter leursmessages en regroupant les informations les plus attractives pour les investisseurs dansunepublicationetendiffusantlesrisquesassociésauxproduitsdansuneautrepublication.Danscecas,ladilutiondel’informationquepermettentlesmédiassociauxpeutconduireàladisparitiondumessaged’informationsurlesrisquesauprofitdumessagepluspositifquipourraêtrerelayéparlasuite.Ilapparaîtclairquecetypedesituationdanslaquellel’investisseurn’apasaccèsàuneinformationéquilibréen’estpassouhaitable.

Faceà la rapiditédediffusionde l’informationetdepossibilitédemodificationetdesuppression en temps réel des publications, le régulateur doit pouvoir contrôler aposteriori les communications commerciales. Aussi, dans le cadre de sa consultationpubliquesurlacommunicationàcaractèrepromotionnelsurlesmédiassociauxréaliséeàlafinde2015(AMF,2015c),l’AMFaengagéuneréflexionsurlamiseenplace,auseindessociétésdegestionetdesémetteurs,d’unsystèmed’archivagedesmessagespubliéssur l’ensemble des médias sociaux. Un tel dispositif pourrait être indispensable pourprévenirtoutediffusiond’informationrelevantdel’abusdemarchéetretracertouteformedemauvaisecommercialisationdeproduitsfinanciers.Enparticulier,cedispositifdevraits’appliquerauxmédiasproposantdedialoguerconfidentiellementaveclesinvestisseursàtraversdessystèmesdemessagerie.Lapolitiqued’archivagedechaqueentitédevraitêtreharmonisée, stable dans le temps et autoriser un temps d’archivage suffisamment long.Outre les publications propres à l’entité, l’archivage devrait intégrer les publications detiers qui auraient été relayées. Ces publications de tiers, relayées par un professionnel,devraientparailleursêtredenatureàengagerlaresponsabilitédecelui-cidanslecasoùlemessagetransmisneseraitpasconformeàlaréglementation.

Enfin,lapublicationd’avissurInternet,quiapparaîtcommeunetendancedefonddesmédiassociaux,doitavanttoutservirl’intérêtdesinvestisseursetnonêtremanipuléeaubénéfice de sociétés de gestion, d’émetteurs ou encore de distributeurs de produitsfinanciers.Certainsprofessionnelspeuventeneffetêtretentésd’améliorerleurréputationsur Internet en recommandant leurs produits ou au contraire en discréditant ceux desconcurrents.Cespratiquesconsistentàacheterouàdiffuserdesavisoudescommentairesfictifs sur des médias d’évaluation. En France, ces agissements peuvent relever desanctionspénalescarilss’apparententàdelapublicitédéguiséeetdonctrompeuse.Aussi,l’AMF envisage de rappeler l’interdiction de telles pratiques dans ses publications.L’objectifdelaconsultationsurlacommunicationàcaractèrepromotionnelsurlesmédiassociauxestinfinedeclarifierlesrèglesdecommunicationdanslesmédiassociauxafinderenforcerlaprotectiondesinvestisseursetlasécuritéjuridiquedesprofessionnels.

CONCLUSIONETPERSPECTIVES

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L’AMF souhaite accompagner l’usage des nouvelles technologies afin de préciser laréglementation qui leur est applicable et d’encadrer les risques auxquels pourraients’exposerlesinvestisseurscommelesprofessionnels.Enparticulier,desréflexionssontencours aux niveaux national et européen sur l’émergence de techniques d’interactioninnovantesentreinvestisseursetconseillersfinanciersousociétésdegestiond’actifs.

Ledéveloppementdurobo-advice(conseilautomatisé)fondésurdesalgorithmesqui,àpartir des informations fournies par les investisseurs, établissent des recommandationsd’investissement soulève plusieurs questions. Grâce aux économies d’échelle dont ilsbénéficient, ces outils permettent d’offrir à une clientèle de particuliers des services deconseil jusqu’alorsréservésàuneclientèleplusfortunée,endiminuant lesfraispour lesconsommateurs.Encesens,leconseilautomatiséapparaîtcommeuneinnovationmajeureet peut apporter une réelle valeur ajoutée à l’investisseur.Mais une automatisationmalcalibrée, délivrant une information non équilibrée peut aussi constituer une nouvellesource potentielle de risques. Le secteur est encore embryonnaire et la question de laréglementationapplicableàcettetechnologieresteensuspens.Enparticulier,dansquellescirconstances s’agit-il de conseil stricto sensu ? Le cas échéant, les modalitésd’applicationdes règlesde la directiveMIFà cesoutils doivent-elles sedifférencier decelles relatives au conseil physique ? C’est tout l’objet des discussions en cours. Lespréoccupations de l’AMF à cet égard ne sauraient cependant démentir son vif intérêt àl’endroitdesnouvellestechnologies.

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QUELLERÉGULATIONPOURLESNOUVEAUXENTRANTSDANSL’INDUSTRIEDESPAIEMENTS?

OLIVIERGUERSENT*1

Certains de nos lecteurs se souviendront sans doute que, plus jeunes et à de raresoccasions,nousnousrendionsdansnotreagencebancairepourdemanderauguichetierdebienvouloirtransférerdel’argentàtelleoutellepersonne.Cettepérioden’estfinalementpas si lointaine.Elledated’àpeinequinzeansetprécède ladémocratisationd’Internet,sonadaptationetsonintégrationàlabanquededétailetàlarelationclient.Uneépoquequi,vuede2015,s’apparenteplusàlapréhistoirequ’audébutduXXIesiècle.

En effet, aujourd’hui autour de nous, le nombre de personnes qui se rendentrégulièrementenagencepoureffectuerunpaiementsecomptesurlesdoigtsd’unemainquandlesautresnes’yrendentquedansdescastrèsexceptionnelscomme,parexemple,lorsde l’achatd’unappartement.Preuveenest la réductionet la réorganisationdu tissud’agencesàtraversl’EuropeaucoursdesdernièresannéesetnotammentenFranceoùlesagences elles-mêmes changent de rôle pour s’adapter au numérique et à la nouvellerelationclient.Encorerécemment,lessyndicatss’inquiétaientd’unepossiblefermeturedequatrecentsagencesdelaSociétégénéraled’icià2020,soitprèsde20%desonréseau.Silagénérationdenosparentsesttoujoursenclineàremplirunvirementpapier,cellesdedemainn’enverrontplusjamaislacouleur2!Ledernierpapierqu’ellesverrontestpeut-être celui des mandats de prélèvement SEPA (Single Euro Payments Area ou espaceuniquedespaiementseneuros)avantquecelui-cinedisparaisseàsontour,pousséverslasortieparlasignatureélectroniqueetl’identiténumérique.

L’industrie des paiements a connu en quinze ans une mutation que peu d’autresindustriesaurontexpérimentéeaussiintensément:lamonnaieuniqueaouvertlesportesd’une nouvelle ère, celle du SEPA ; le monopole bancaire s’est en partie effacé pourlaisser place à une myriade d’acteurs spécialisés (monnaie électronique, transfertsinternationaux,etc.)ougénéralistes;laréglementationeuropéenneafaitpressionsurlesacteurs demarché pour qu’ils fournissent un socle de services standardisés, à vocationeuropéenne et aumeilleur prix pour les utilisateurs ; la technologie et plus précisémentl’Internetmobile et les smartphonesontpermisd’ancrer lepaiement entre lesmainsduconsommateur,ausensproprecommeausensfiguré,alorsqu’auparavant,illepartageaitavecsabanque;lanormedanslatransmissiond’informationestcelledel’instantanéité.Si l’immédiatet l’ubiquiténe fontpasencore loipartoutenEuropedans lespaiements,nuldoutequ’ils’agitnéanmoinsdelaprochaine(r)évolutiondenotreindustrie,enfaitunerévolutiondéjàenmarche.

Ceschangements,d’autressecteurslesaffrontentdepuisquelquetempsavecdifficultéetpeinentàs’adapter(lavidéo,lamusiqueetlapresseselisentdésormaisenligneetplusvraiment sur support physique) et certains y font face maintenant (le tourisme et letransport urbaindeviennent des industries « collaboratives» et les plus affectés par ceschangementsbloquentlesrues).

Face à ces bouleversements, l’industrie des paiements a peut-être, bien que le

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qualificatif«assurément»mesembleplusindiqué,perduunepartiedesarentabilité.Leprixd’unvirement est devenudérisoire, qu’il soit domestiqueou transfrontalier, et toutparticulièrements’ils’agitd’unvirementeneurosauseindelazoneeuro.Pourrappel,en2003, il vous aurait coûté en moyenne 10,56 euros pour transférer 100 euros depuisl’Allemagneversunautrepaysde lazoneeuroet22,62eurosdepuis laFrancepour lamêmesomme.Neufansplustard,cesfraismoyensétaientdiviséspar100pourlaFrance(0,29 euros) et 1 000 pour l’Allemagne (0,01 euros), la gratuité étant même le plussouventdemise.Les frais liésauxcartesontpartiellementété réglementéset lesecteurbancaire s’est fait largement l’écho dumanque à gagner que le règlement sur les fraisd’interchange allait causer. Payer pour effectuer un paiement était un fait au début desannées2000.C’estaujourd’huiuneincongruité.

Pourtant, le nombre d’acteurs sur le marché des paiements reste stable commel’indiquent les statistiques de la Banque centrale européenne (BCE, 2015) quicomptabilisaient8742institutionsoffrantdesservicesdepaiementen2009et9079en2013. Ces statistiques n’intègrent par ailleurs pas encore les nouveaux types deprestataires que la deuxième directive sur les services de paiement (PSD2)3 légitime etintégrera au marché d’ici à 2018 en tant que prestataires de services de paiementréglementés : prestataires de services d’initiation de paiement (plus connus sousl’acronymeTPPpour thirdpartyproviders)etprestatairesdeservicesd’informationsurles comptes (ou agrégateurs). C’est aussi sans compter les prestataires techniques, lesopérateursdetélécommunications, lesmonnaiesvirtuelles, lesgéantsdel’Internetoudutéléphone (Google, Samsung,Apple), etc., tout un ensemble d’acteurs qui participent àl’industriedupaiementoueffectuentdespaiementspour lecomptedenosconcitoyens,maisquisontexclusducadrelégislatifouenattented’yêtreintégrés.

Graphique

Évolutionducoûtd’unvirementtransfrontalierde100€auseindelazoneeuro,1993-2012

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Note :moyennes calculées pour les paysmembres de l’UE à quinzemembres. En 1993, ilmanque l’Autriche et laFinlandeeten1999,laGrèce.

Source:Commisioneuropéenne(2006).

L‘ÉVOLUTIONDUCADRELÉGISLATIFQu’enest-ildelaréglementationquis’appliqueraàcesnouveauxacteursdel’industrie

despaiements?Enquelquesmots,lamêmeréglementationquecellequis’appliqueauxanciensacteursdel’industriedespaiementsvaudraégalementpourlesnouveauxentrants.C’estunequestiond’égalitédetraitementetdepréservationdelaconcurrence.

Dans le détail, c’est l’ensemble de la réglementation qui évolue pour s’adapter aunouvelenvironnementdespaiements.Nonpasque lapremièredirectivesur lesservicesdepaiement (PSD1)n’était pas adaptée à son temps,mais force est de constaterque ladigitalisation a permis d’ouvrir les portes du domaine des paiements et qu’enconséquence, il était temps pour la législation européenne d’accueillir, d’intégrer, maisaussideresponsabiliserceuxquelatechnologieaportéssurlemarché.Pourexemple,lesservices d’initiation de paiement n’existaient pas en 2007 et, pour cause, le commerceélectronique en était encore à ses balbutiements et l’on ne remettait pas en causel’utilisationdescartespourpayerenligne.Maisdestrublionsenontdécidéautrementencourt-circuitantlessystèmesdecartesauprofitdesvirements.Ilétaitdoncnécessaire,dumomentqueleurexistencen’étaitpasremiseencause,delesintégreraucadrelégal.

Sil’ons’attacheauxméthodesd’identificationdesclientsetàlasécuritédeleurscodesconfidentielsoudeleursmoyensdepaiement,certainesméthodesdites«unclic»ontvulejour,d’autresméthodesfondéessurlescodesconfidentielsdesclientssontapparuesetilétaittempsdeseposerlaquestiondeleursécurité.

Lesnouveauxentrants,qu’ils soientparmi lesnouveaux typesd’acteursouparmi lesacteurstraditionnels,vontdoncfairefaceàuneréglementationquiaévoluésousbiendesaspects.CesévolutionssontportéesparlaPSD2etlerèglementsurlesfraisd’interchange(règlement IF) (UE, 2015), adoptés par la Commission européenne aumilieu de 2013,revusetamendésparleParlementeuropéenetleConseileuropéenen2014,etadoptésetvotésparcesmêmesacteursen2015.

Danslecontexteducommerceenligne,lesporte-monnaieélectroniquesontgagnéenpopularité. La deuxième directive sur lamonnaie électronique (2009/110/EC – EMD2)établissait le cadre légal pour des acteurs tels que PayPal ou GoogleWallet. Ce cadresemble satisfaisant, mais quelques retouches pourraient être nécessaires à l’avenirlorsqu’onconstatelavitesseaveclaquelledenouveauxproduitssontlancéssurlemarchédupaiementenligne.

L‘EXTENSIONDUCADRELÉGISLATIFCommençons cette revue des évolutions du cadre réglementaire par la portée de la

législationquisevoitétenduepar laPSD2.Auparavantdotéed’unchampd’applicationréduit aux transactions intra-Union européenne (UE), la législation vise plus loin ets’attaque aux transactions où l’un des prestataires de service de paiement, qu’il soit

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émetteurourécepteur,estsituéauseindel’UE–cequel’onappellelestransactions«unebranche»ou«oneleg».Sontainsiparticulièrementviséslesprestatairesdeservicesdepaiement spécialisés dans les transferts internationaux. Les règles de transparences’appliqueront aux transactions partiellement réalisées dans l’UE avec, pour résultatattendu, une pression accrue sur ces mêmes prestataires et les prix qu’ils pratiquent.Certains axes de transferts depuis l’UE sont encore très, voire trop, chers pour desutilisateurssouventpeufortunésetpourlesquelslemoindregainfinanciersuruntransfertaunréelimpact.Pourmémoire,lecoûtmoyend’untransfertdefondsinternationaldecetypeestestiméà8%,soithuitcentsfoislecoûtmoyend’unvirementeneurosauseindel’UEdepuisl’Allemagne,pourpoursuivrelacomparaisonentaméeplushaut,etlecoûtdecesmêmes envois vers l’Afrique subsaharienne grimpe jusqu’à unemoyenne de 12%(Banquemondiale,2015).La réductiondecescoûts àunniveaumoyende3%d’ici à2030estl’undesobjectifsduG20.

La nomenclature des acteurs et des activités possibles sur le marché des paiements(annexe 1 de la PSD2) s’enrichit avec l’apparition des tiers prestataires de services depaiement et des agrégateurs. En effet, certains marchés européens ont vu de nouveauxprestataires apparaître, des intermédiaires qui font le lien entre le consommateur et lecommerçant (les TPP) leur assurant une certitude quasi instantanée de paiement etaccélérant ainsi les process du commerce électronique, en incitant notamment lebénéficiaireàlivrerlesbiensoufournirlesservicessansretardexcessif.D’autresacteurspermettent à nos concitoyensmultibancarisés d’avoir un aperçu de l’ensemble de leurscomptes.Jusqu’ici,cesprestatairesopéraientdanslevidejuridiquelepluscomplet,sansobligation réglementaire spécifique vis-à-vis de la protection du consommateur, desécurité et de responsabilité, de protection de ses informations personnelles etbénéficiaientpeut-êtred’unavantageconcurrentielliéàcetteabsencederéglementation.Ce vide juridique n’a, semble-t-il jusqu’à aujourd’hui, pas entraîné d’abus et aucuneplainte ou fraude de grande ampleur n’a été constatée avec ces nouveaux acteurs.Néanmoins,inexistantsen2007lorsdelapublicationdelaPSD1,leurémergencerapideaconduit à réformer le cadre législatif au grand dam des établissements bancaires quiauraientpeut-êtrepréféréleurdisparitionpureetsimple.

Seulegrandedifférenced’évidenceaveclesautresprestatairestraditionnelsdumarchédespaiements,dufaitquecesprestatairesn’entrentpasenpossessiondesfondsdeleursclients, la réglementationne leur imposepas des exigences de fonds propres. Ils seronttoutdemêmetenusdesouscrireuneassurancederesponsabilitécivileprofessionnelleouunegarantiecomparableafindefairefaceàleurresponsabilitésielledevaitêtreengagée.

Enfin, afin de garantir une concurrence saine et un niveau adéquat de protection del’ensembledelachaîned’acteurs,l’Autoritébancaireeuropéenne(ABE)estenchargedudéveloppementdenormesouvertesdecommunicationquelesprestatairesdeservicesdepaiement, gestionnaires de comptes et TPP, devront appliquer, garantissant ainsil’interopérabilitédessystèmes,l’identificationdesacteurs,latraçabilitédesopérationsetlasécuritédetous.

Compte tenu de la quasi-généralisation des smartphones et autres tablettes, les

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opérateursde télécommunicationsont aussipris leurpartdans lemondedespaiements,particulièrementcommeintermédiairespourlepaiementd’applicationsquiseretrouventfacturées, aumême titre que le forfait téléphonique, en fin demois. En 2007, lors desdiscussionsautourde lapremièrePSD, lebesoinne se faisaitpas sentirde réglementercetteactivité,étantdonnéquelesachatsd’alorsconsistaientprincipalementendutuningde téléphonevia le téléchargement de sonneries ou de fonds d’écran pour des sommesdérisoires. Mais les temps ont changé et les jeux ou les applications professionnelless’achètentàdesprixquipeuventatteindredesmontantsconsidérables.L’exemptionnesejustifiedès lorspluspourde telles sommes.Désormais, seuls lespaiements inférieursà50 euros continueront d’être exemptés. Et si leur valeur cumulée sur unmois venait àdépasser 300 euros, les opérateurs de télécommunications perdraient également cetteexemption,celadanslebutdeprotégerlesconsommateurs.

SÉCURITÉACCRUEETPROTECTIONDUCLIENTLes nouveaux entrants tout comme les acteurs établis verront leurs obligations en

termesdesécuritéetprotectionduconsommateur renforcées.L’authentification forteduclient devient la norme pour l’ensemble des paiements électroniques, mais aussi pourl’accès aux comptes de paiement en ligne. Pour mémoire, ce type d’authentificationrequiertl’utilisationdedeuxélémentsouplusparmilesélémentssuivants:

– laconnaissance,unedonnéequeseul l’utilisateurconnaît (parexemple,sonmotdepasseousoncodePIN);

– la possession, un élément que seul l’utilisateur possède (par exemple, sa cartebancaire);

– et l’inhérence, un élément qui fait l’identité de l’utilisateur (par exemple, sonempreintedigitale).

Ces éléments devront être indépendants en ce sens que la compromission de l’un neremetpasenquestion lafiabilitédesautres,demanièreàprotéger laconfidentialitédesdonnées d’authentification. Un grand nombre de méthodes de paiement qui ont coursaujourd’huietnesatisfontpasàcesexigencesdevrontsansdoutes’adapter.Danslecascontraire, lorsque le prestataire de services de paiement du payeur n’exigera pas uneauthentification forte du client, le payeur ne supportera d’éventuelles conséquencesfinancièresques’ilaagifrauduleusement.Côtébénéficiaire,sicelui-ciousonprestatairedeservicesdepaiementn’acceptepasuneauthentificationforteduclient,ilrembourseralepréjudicefinanciercauséauprestatairedeservicesdepaiementdupayeur.

Les sceptiques penseront alors que la réglementation est aveugle et ne fait pas ladifférenceentreuneopérationàplusieursmilliersd’eurospourlaquelle,effectivement,unhautniveaudesécuritéestnécessaireetuneopérationà1europourlaquellelesmesuresdesécuritésemblentdisproportionnées.Ceux-làserontravisdesavoirquelaPSD2prévoitquelesmesuresdesécuritédoiventêtrecompatiblesavecleniveauderisqueassociéauxservicesdepaiement.Pourcette raison, l’ABEsera responsable,aucoursdesprochainsmois,deladéfinitiondesexceptionsàl’applicationdesexigencesdesécurité.L’objectifici étant de favoriser le développement demoyens de paiement accessibles et faciles à

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utiliserpourlespaiementsprésentantpeuderisques.

L’émergence des TPP a aussi lancé un grand débat, ou plutôt une guerre, sur laréutilisation des codes confidentiels reçus par les consommateurs de la part de leursbanques pour leurs activités en ligne. Les craintes des banques seront levées par laréglementation.Lorsqu’unconsommateurferaappelàunTPP,l’authentificationforteduclientseraobligatoire.Lefluxd’informationsentreleconsommateur,sabanqueetleTPPpassera par des canaux de communication sécurisés pour lesquels l’ABE définira uncahierdescharges technique.Àaucunmoment, leTPPn’auraaccèsàceséléments.Saseule fonction serade commencerunpaiement spécifiquevia l’utilisationdecodesnonréutilisablesquilierontdynamiquementlepaiementàunmontantetunbénéficiaire.

Dernierpointmajeurdanslarelationentrelesclients,leursgestionnairesdecompteetles nouveaux acteurs de marché, en cas de paiement non autorisé, le prestatairegestionnairedecompteou,plussimplement,labanqueduclientrestelepremierpointdecontact même si, au final, il est établi que la responsabilité du paiement non autoriséincombaitauTPP.Contrairementàcequiaétélongtempsproclamé,lesprestatairestiersnesontpasrelevésdeleursdevoirsetleursresponsabilitésenversleconsommateuretsonteneur de compte. C’est en définitive unemesure proconsommateur qui s’explique trèsbienparlefaitquelecomptebancaireduclientetsabanquerestentl’élémentmajeurdansle processus de paiement et l’unique intermédiaire (à l’exception du marchandélectronique)avec lequel leconsommateurdisposed’unerelationprivilégiée, leTPPluiétantplusprobablementinconnu.

MARCHÉDESCARTES

Le domaine des cartes est sans aucun doute le plus touché par le nouveau cadrelégislatif.D’unepart, laPSD2interdit touteapplicationd’unsurcoûtpar lecommerçantlorsque le consommateur effectue un paiement par carte si celle-ci est couverte par lechapitre II du règlement IF (soit, pour simplifier, la quasi-totalité des cartes de débit etcartes de crédit). De plus, cette même législation met en place un ensemble de règlesvisantàlafoislespratiquescommercialesetlesfraisliésauxcartesquiserontappliquéesaux systèmes de cartes d’ici au milieu de 2016 (certaines règles étant déjà entrées envigueuràl’heureoùvouslirezceslignes).

Parmi ces règles, les plus commentées sont celles liées au plafonnement descommissionsd’interchange.CommeindiquédanslesconsidérantsdurèglementIF,«cescommissions appliquées entre les prestataires de services de paiement acquéreurs etémetteursdecartesappartenantàunschémadecartesdepaiementconstituentunepartieimportantedesfraisfacturésauxcommerçantsparlesprestatairesdeservicesdepaiementacquéreurspourchaqueopérationdepaiementliéeàunecarte.Lescommerçants,à leurtour,répercutentcescoûtsliésauxcartes,commetousleursautrescoûts,surleprixglobaldeleursbiensetservices.Laconcurrenceentrelesschémasdecartesdepaiementvisantàconvaincre les prestataires de services de paiement d’émettre leurs cartes entraîne unehausse,etnonunebaisse,descommissionsd’interchangesurlemarché,contrairementàl’effetattendusurlesprixquelaconcurrenceexercehabituellementdansuneéconomiedemarché».Pour résumer, lemarchédescartesétait inefficace : laconcurrenceentraînait

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unehaussedesprix,subieparlesconsommateurssurlesquelsétaientrépercutéslesfraisfacturés aux commerçants, aux bénéfices des émetteurs de cartes qui voyaient leursrevenuss’accroîtreàchaquehaussedesfraisd’interchange,commel’illustrel’exempledel’évolution des frais IF au Royaume-Uni (Commission européenne, 2013).L’augmentation en 2007 des frais d’interchange par Visa, le système le plus cher, adépossédéMastercarddesespartsdemarchéauRoyaume-Uni(cf.tableauci-contre).Uncomblepouruneéconomiedemarché!

Tableau

ÉvolutionduvolumedecartesdedébitauRoyaume-Unietdesfraisd’interchange

(2005-2011)

Source:Commissioneuropéenne(2013).

La grande diversité de ces commissions au sein de l’UE et leurs niveaux élevésempêchaientparailleursl’arrivéesurlemarchédenouveauxacteurs.Autantdebarrièresàl’entréepour toutnouvelacteurquisouhaiteraitprofiterdeséconomiesd’échelleoffertepar notre marché intérieur pour proposer des solutions moins chères. Incapables des’aligner sur les revenus attendus par les prestataires de services de paiement sur cesegment,leurssolutionsnetrouveraientpaspreneurs.

Les pratiques commerciales du marché des cartes sont également visées par lerèglement. Il signe la fin des règles imposant l’obligation d’accepter toutes les cartes,ouvre l’acquisition transfrontalière, instaure une séparation du schéma des cartes depaiement et des entités de traitement et interdit toute règle limitant le co-badgeage(l’inclusiondedeuxoudeplusieursmarquesdepaiementouapplicationsdepaiementdela même marque sur le même instrument de paiement lié à une carte) en rendant leconsommateurmaîtreduchoixdel’instrumentdepaiementqu’ilsouhaiteutiliser.

LaPSD2ouvrelaporteàdenouvellesopportunitésd’affairespourdesprestatairesdeservicesdepaiementquisouhaiteraientémettredescartesdedébitoudecréditsanspourautantêtrelesteneursdecomptedeleursclients.Celaexistaitdéjàdansledomainedescartes de crédit (cf.Amex),mais les cartes de débit n’étaient pas concernées, le risquefinancierétanticiplusgrand.Lenouveaucadrelégislatifouvrelavoieàlaconfirmationdeladisponibilitédesfonds.End’autrestermes,unebanque,surinterrogationd’unautreprestatairedeservicesdepaiementquiémetdesinstrumentsdepaiementliésàunecarte,confirmera immédiatement si la sommeàpayerestdisponible sur lecomptedupayeur.Leschaînesdesupermarché,desacteursexclusifsdudomainedescartes(telquePayfair)serontsansdouteintéressésparcettenouvellepossibilité.

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ACCÈSAUXDONNÉESBANCAIRESEnfin,concluonscesgrandsthèmeslégislatifsparlesujetdesdonnéesbancaires.Lebig

dataestavec ladigitalisation l’undesmots-clésdesprochainesannées.Si la législations’ouvre à de nouveaux acteurs, elle continue de protéger les données des clients, et ce,d’autantquelaréformedelalégislationrelativeàlaprotectiondesdonnéesesttoujoursendiscussion,àl’heureoùnousécrivonsceslignes,entreleParlementeuropéenetleConseileuropéen.

Lesprestatairesdeservicesd’informationsurlescomptesbénéficieronteneffetd’accèsaux comptesde leurs utilisateurs,mais cela sous réservedu respect d’ungrandnombred’obligationsvisantàassurerlasécuritédesdonnéesduclient.Ainsi,cesprestatairesnedétiendront à aucunmoment les fondsdupayeur, ils veilleront à ce que les identifiantspersonnalisés de l’utilisateur de services de paiement soient protégés, qu’aucune autreinformationrelativeàl’utilisateurdeservicesdepaiementetobtenuelorsdelafourniturede ces services ne filtre, ils s’identifieront auprès de la banque de leur client sans pourautant nécessiter de relation contractuelle et ne stockeront pas de données de paiementsensibles concernant l’utilisateur de services de paiement ou d’information sur lescomptes.

CONCLUSIONLe nouveau cadre législatif européen des paiements ouvre donc les portes à de

nouveauxacteurssurlemarchédespaiements.Ceux-cinebénéficientpasd’untraitementprivilégié.Au contrairemême, leur inclusion dans la législation les fait tomber sous lecoupdesobligationsdeprotectionduconsommateur,desécurité,ets’ilséchappentàuneforte mobilisation de fonds propres, logique à la vue de leurs activités, ils devronttoutefois s’acquitter d’une assurance professionnelle. Autant d’éléments qui n’entraientpasparlepassédansleursbusinessmodels,autantd’élémentsàchiffrerdonc.

TPPetagrégateursontdésormaislavoielibresurlemarchéeuropéenetbénéficientducadrenécessaireàleurdéveloppementpaneuropéen.Bankin,Linxo,Tink,Fintonic,pourlesagrégateurs,ouTrustly,SoFort,Ideal,pourlesTPP(parmitantd’autres),serontpeut-êtrelesprestatairesdedemainaubénéficedescommerçantsetdesconsommateursséduitspardenouveauxservicesetdescoûtsréduits.Encoreinconnudanscertainspays,ilnefaitaucundoutequecetétatdefaitnedurerapluslongtemps.Etmêmesil’entréeenvigueurdelaPSD2n’intervientpasavant2018,lesnouveauxacteursdéjàprésentssurlemarchépourront poursuivre leurs activités et prospérer… jusqu’à une prochaine mutation dumarchédespaiementsdéjàannoncéeparl’arrivéeimminentedespaiementsinstantanés.

Les grands absents de la réglementation, à l’heure actuelle, sont Apple, Google,Samsungetconsorts.S’il s’agitdenouveauxentrantssur lemarchédespaiements,seulApplePay est une réalité en Europe, et ce, uniquement dans un nombre limité d’Étatsmembres.Quel traitement leur sera réservé ?Comment lesÉtatsmembres confrontés àleur entrée sur leurs marchés réagiront-ils ? Licence d’établissement de paiement ?Simples prestataires techniques ? Les réponses viendront dans un premier temps despremiers pays ciblés par ces nouveaux acteurs. Chaque nouveau système devra être

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analyséendétailavantquelesautoritéspuissentseprononcer.

BIBLIOGRAPHIEBANQUEMONDIALE (2015), « Migration and Remittances: Recent Developments and

Outlook – Special Topic: Financing for Development »,Migration and DevelopmentBrief, n° 24, 13 avril,https://siteresources.worldbank.org/INTPROSPECTS/Resources/334934-1288990760745/MigrationandDevelopmentBrief24.pdf.

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UE(Unioneuropéenne)(2015),«Règlement(UE)2015/751duParlementeuropéenetduConseildu29avril2015relatifauxcommissionsd’interchangepourlesopérationsdepaiement liéesàunecarte»,Journalofficielde l’Unioneuropéenne, 19mai,http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32015R0751&from=FR.

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INSTITUTIONSFINANCIÈRESETCYBERCRIMINALITÉ

ÉDOUARDFERNANDEZ-BOLLO*1

Leconceptde«cybercriminalité»,utilisédeplusenplusfréquemmentbienqueparfoismal défini, renvoie en principe à une caractérisation pénale, qui n’est toutefois nispécifique,niuniformedanslesdifférentssystèmesjuridiques.Dansl’usagecourant,quiestcelui retenu ici, il sertàdésigner toutes les formesd’attaquesréaliséesaumoyenderéseauxinformatiquesoudesystèmesd’information,oulesayantpourcible.Lamenacequefaitpeser lacybercriminalitésur lesecteurfinanciersuscitedésormaisuneattentionélevéedelapartdessuperviseurs,partoutdanslemonde.Descyberattaquesretentissantessur des entreprises de réputation mondiale ou la révélation de programmes massifs desurveillance informatique ont amplifié les craintes que les fragilités inhérentes auxenvironnements informatiques puissent être exploitées à des finsmalveillantes.Dans ledomaine financier, c’est évidemment la crainte de détournements massifs, de vols dedonnées ou d’atteintes majeures à la continuité d’activité des établissements quipréoccupentlesrégulateursdesbanquesetdesassurances,demêmequelesconséquencessystémiquesquepourraientavoirdetellesattaques.

Lesuperviseurfinanciern’esttoutefoispasuneautoritéjudiciaireetn’apasvocationàtraquer les infractions pénales. Soucieux de la stabilité des banques et des organismesd’assurancesoussoncontrôle,demêmequedelaprotectiondesintérêtsdeleursclients,ilveilleàcequecesétablissementsprennent toutes lesmesurespréventives requisespourgarantir la sécuritéde leurssystèmesd’informationetnotamment leurcybersécurité.Cevocable nouveau, que l’Agence nationale pour la sécurité des systèmes d’information(ANSSI)définitcommeun«étatrecherchépourunsystèmed’information2luipermettantde résister à des événements issus du cyberespace susceptibles de compromettre ladisponibilité,l’intégritéoulaconfidentialitédesdonnéesstockées,traitéesoutransmiseset des services connexes que ces systèmes offrent ou qu’ils rendent accessibles », estdésormais employé pour désigner les actions de prévention et de remédiationmises enœuvrepourfairefaceauxcyberattaques.

L’enjeuestmajeurcar lesecteur financier joueunrôleclédans le fonctionnementdel’économie, au point que l’atteinte à un établissement pourrait avoir des conséquencesnéfastessur lesopérationséconomiquescourantesd’unpaysentier.Orlesmenacessontvariées et leur sophistication s’accroît (première partie). En application d’uneréglementation spécifique sur la sécuritédes systèmesd’information et en réponse àunenvironnementplusmenaçant, lesbanqueset lesassurancesadaptentet renforcent leurspolitiques de prévention des risques liés à la cybercriminalité (deuxième partie). Lessuperviseursdecesinstitutions,enparticulierl’ACPR(Autoritédecontrôleprudentieletde résolution)quicoordonnesonactionpour lapartiebancaireaveccellede laBanquecentrale européenne (BCE) au sein du Mécanisme de supervision unique (MSU),focalisentleurattentionsurlacybersécuritédesinstitutionssupervisées,avecunevolontéde coopération forte avec les autres acteurs impliqués (troisièmepartie).Enfin, l’ACPRmènerégulièrementdesactionsdecontrôlesurlesentitéssupervisées,quipermettentdetirer des enseignements concrets en termes de supervision et de préciser les points

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d’attentionprioritairespourl’avenir(quatrièmepartie).

LESCYBERATTAQUESREPRÉSENTENTDÉSORMAISUNEMENACERÉELLEPOURLESECTEURFINANCIERLesattaquesdirigéescontrelesinstitutionsfinancièresenEuropesontrestéesjusqu’ici

relativementlimitéesdansleurseffets,cequipeuts’expliquerparunemobilisationfortedes établissements tant dans le domaine de la prévention que dans celui de la réaction.Pourautant,lesecteurprésentedesspécificitésquirendentlesmenacesdecyberattaquestrèssérieuses,àlafoisentermesdeprobabilitéd’occurrenceetdesévéritépotentielledesimpacts. Les établissements financiers ont démarré très tôt l’informatisation de leursmétiers.Cesderniersreposentaujourd’huientièrementsurdesoutilsinformatiques,maisceux-cipeuventparfoisêtreanciensetmaladaptésfaceàdesnouvellesmenaces.Cesontaussi très souvent des systèmesmultiples, décentralisés, au sein de grands groupes quisont largement interconnectésetéchangentdenombreuses informationsavec l’extérieur,commepourlaréalisationdepaiementsoudanslecasdesbanquiersetdesassureursenligne.Cescaractéristiquesnepermettentpasdesereposeruniquementsurdesprotectionsclassiques,detype«protectionpérimètrique»,maisobligentàdévelopperintensivementdesmécanismesplussophistiquésdeprotectionetdedétectiondesattaques.

Denouvellestechniquesd’attaquesontmisesenœuvre,maisellesrenvoientàdesrisquesdéjàbienidentifiés

L’émergence récentedu terme«cybercriminalité»pourrait laisserentendrequenousassistons à un phénomène nouveau, à la fois dans sesmoyens et ses objectifs,mais enréalité, ce sont surtout les techniques d’attaque qui évoluent et se complexifient. Lesmotivations,quantàelles,demeurentlargementinchangées.

En ce qui concerne les techniques, il convient de distinguer deux grands typesd’attaques : les attaques de masse et les attaques ciblées. D’une manière générale, lesattaquesdemasseutilisentdestechniquesrelativementpeusophistiquées.Parmilesplusconnues,onpeutciterl’«hameçonnage3»(phishing),souventemployépourusurperdesinformationsnécessaires aupaiement.Uneautre attaque, fréquente et facile àmettre enœuvre, consiste à saturer les accès à un système par une attaque dite « distribuée »(distributeddenialofservice–DDoS),cequibloque,parexemple,laconnexionàunsiteinternet ou perturbe le service. Au contraire, les attaques ciblées visent des objectifsprécis,généralementsoigneusementchoisis.Leurmiseenœuvreserévèlebeaucouppluscomplexe, à la fois par la connaissance de la « victime » qu’elle requiert et par lestechniquesemployées.Cesattaquesreposentleplussouventsurl’infiltrationdelogicielsespionsoumalveillants(malware)4,quis’installentdansunsystèmed’informationpouryvolerdesdonnéesoulesdétruire.

Cependant, quels que soient la sophisticationdes attaques et le caractère novateur deleur mode opératoire, leurs motivations restent inchangées. Les objectifs visés sontessentiellement de trois types : (1) l’intérêt financier direct (fraude par vol oumanipulationdedonnéesbancaires), (2) la nuisance à l’établissement par l’atteinte à saréputation(sabotage,blocage,atteinteàl’imagevialadéfigurationdusiteinternet)ou(3)l’espionnage, qui peut être pratiqué par un concurrent ou une puissance économique

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étrangère. Quels que soient leurs objectifs, ces attaques menacent la confidentialité,l’intégritéouladisponibilitédesdonnéesinformatiques.Cestypesd’atteintesàlasécuritéinformatique sont identifiés depuis longtemps et constituent l’ossature de tous lesdispositifsdeprotection.Lesétablissementsfinanciers,lesbanquescommelesassurances,y sont fortement sensibilisés. L’effort à fournir consiste donc principalement en lanécessité de s’adapter aux nouvelles techniques d’attaques recensées et d’anticiper lestechniquesencoreplussophistiquéesquipourraientsuivre.

L’intensificationdesmenacesrequiertcependantunrenforcementdesmesuresdeprotection

Malgré l’absencede chiffres fiables concernant le recensement des cyberattaques, lesdifférentes sources existantes s’accordent sur leur augmentation.Enoutre, c’est aussi ladiversité des techniques utilisées qui retient l’attention.La fraude n’est plus le seul butd’attaque.Leblocagedessitesoulevoldedonnéesprennentdel’ampleur.

Depuis l’essor du commerce et de la banque en ligne au début des années 2000, lesfraudeurs ont tenté d’usurper des données d’identification et des mots de passe de laclientèle (cartes de paiement ou comptes bancaires), afin de réaliser à leur profit despaiements frauduleux.Desvolsmassifsdedonnéesdecartesontainsipuêtreobservés,notammentauxÉtats-Unis.L’usurpationdemotsdepassedebanqueenligneparphishings’est également intensifiée. Le montant de la fraude est toutefois resté jusqu’à présentplutôt contenu, notamment en Europe où le niveau de sécurité des techniquesd’authentificationaétéconstammentrelevé.

Les attaques destinées à bloquer les sites de banque en ligne se sont dans le mêmetempsdéveloppées.Depuis2012,lesattaquesdetypeDDoSn’ontcessédesebanaliseretsont désormais devenues courantes. Récemment, la plus retentissante de ces attaques avisélesgrandesbanquesfinlandaisesenjuillet2014.Cetyped’attaquesnerequiertpluscomme autrefois de grandes puissances informatiques,mais peut êtremenémaintenantavecdesimpleskitsdelogicielsvendusillégalementsurInternet.

Les attaquesportant atteinte à la confidentialité des données représentent aujourd’huiunemenace forte, tant pour les établissements bancaires (comme l’illustre le cas de labanque américaine JP Morgan en 20145) que pour les organismes d’assurance. Lesdonnées personnelles dont disposent ces derniers (informations médicales notamment,mais également données sur le patrimoine des clients) pourraient se révélerparticulièrement lucratives en permettant, par exemple, d’établir de fausses déclarationsd’assurance-santé. L’un des plus importants assureurs-santé américain Anthem a ainsiannoncé en février 2015 avoir été victime d’une attaque informatique touchant à laconfidentialitédesdonnéesprivéesdedizainesdemillionsd’assurés.

Désormais,lamenacelaplusgrandeesttrèssophistiquéeetfurtive,d’oùl’appellation« advanced persistent threat » (APT). Ce type d’attaques, combinant des techniquesavancées d’intrusion et d’usurpation de droits, pourrait permettre aux pirates d’accéderauxapplicatifsetauxbasesdedonnéeslesplussensiblespourlesinstitutions.Danslecasd’unebanque,ilpourraits’agir,parexemple,desapplicationsliéesàlatenuedescomptes,à la gestion des espèces dans les circuits de distribution ou aux flux de paiements de

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masse.Uneattaqueréussiedecetypepourraitentraînerdesdommagesconsidérablespourunétablissement,àlafoisfinanciersetderéputationsusceptiblesdefairepeserunrisquesur sa continuité d’activité, voire sur la stabilité financière. Des attaques de ce type(appelées « Carbanak »), lancées principalement contre des banques russes,mais aussicontrequelquesbanqueseuropéennes,ontétédécouvertesen2015.L’analysearévéléquede telles attaques permettaient à leurs initiateurs de prendre le contrôle à distance decertains systèmesdesbanques (en l’occurrence les automatesdedistributiondebillets),leurcausantunpréjudicefinancierimmédiatélevé6.Toutefois,cesimpactsn’auraientpasmisenpérillesinstitutionsfinancièrestouchées.

QUELLESSONTLESACTIONSENTREPRISESPARLESINSTITUTIONSFINANCIÈRES?

Laréglementationrelativeaucontrôleinterneetàlagestiondurisqueopérationnel

constitueuncadrederéférencetoujourspertinent

Lesexigencesdesécuritédusystèmed’informationconstituentunepréoccupationdéjàanciennedusuperviseurdanslesecteurbancaire,commeenattestentleLivreblancsurlasécurité des systèmes d’information dans les établissements de crédit publié par laCommission bancaire en 1996, puis le Livre blanc Internet, quelles conséquencesprudentielles?paruen2001.Dupointdevueréglementaire,sileterme«cybersécurité»n’estpasmentionnéentantquetel,lerisqueliéàlacybercriminalitéestnéanmoinsbienappréhendéd’aborddanslecadrepluslargedesexigencesqualitativesquis’appliquententermesdecontrôleinterne,puisdecellesrelativesàlapréventiondurisqueopérationnelquiontintégrédesexigencesquantitatives.

Eneffet,lesétablissementsdecréditfrançaisdoiventdepuislongtempsseconformeràdesexigencesdétailléesrelativesàlamiseenplaced’undispositifdecontrôleinterne.Lerèglement n° 97-02 du Comité de la réglementation bancaire et financière, datant defévrier1997,adonnétrèstôtausuperviseur–àl’époquedelaCommissionbancaire–unebasejuridiquepours’assurerdel’existenceauseindesétablissementsd’undispositifdecontrôledes systèmesd’information.Cesdispositionsont étéprogressivement enrichiespar la suite, en 2005 et 2007, avant d’être intégralement reprises par l’arrêté du3novembre2014relatifaucontrôleinterne,àlasuitedel’entréeenvigueurdeladirectiveCRDIV7.Lesamendementsde2005,enparticulier,ontintroduitdenouvellesexigencesrelativesàl’évaluationdelasécuritéinformatique(obligationderevuepériodiquedeleurniveau de sécurité par les établissements, obligation demise en place de procédures decontinuité d’activité) et ont ajouté les bases des contrôles de sécurité informatiquerelativesàl’intégritéetàlaconfidentialitédesdonnées.

En plus de ces exigences qualitatives imposées par la réglementation française, lesaccords de Bâle II, adoptés en 2006 et entrés en vigueur en France avec l’arrêté du20 février 2007 transposant la directive CRD III, ont introduit des exigences en fondspropres au titre du risque opérationnel, qui englobent notamment les pertes éventuellesrelativesàlacybercriminalité:lerisqueopérationnelviseeneffetexplicitementlescasdefraudeoudedéfaillancedessystèmes,incluantlerisqueinformatiqueetlesatteintesàla

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sécuritédessystèmesd’information8.

Parailleurs,danslecadredelatranspositiondesdirectiveseuropéennessurlesservicesde paiement et sur la monnaie électronique9, des exigences en matière de sécurité desmoyens de paiement, visant notamment à limiter les risques de fraude, ont été posées.Touteslesdemandesd’agrémentd’établissementsdepaiementetdemonnaieélectronique– et notamment celles qui concernent les start-up spécialisées dans les nouvellestechnologies, les FinTech – font l’objet d’une analyse approfondie des moyensmis enœuvre pour assurer cette sécurité. Un avis de la Banque de France, en charge, dans lecadredesesmissions,delasécuritédesmoyensdepaiement,estd’ailleursexplicitementrequis.Cesrèglesdesécuritéfont,ellesaussi,l’objetd’uneadaptationpermanentetenantcompte du développement des nouvelles technologies. En témoignent l’orientation del’AutoritébancaireeuropéennesurlasécuritédespaiementssurInternet,issuedestravauxdu SecurePay10, et les nouvelles exigences posées dans le cadre de la révision de ladirective sur les services de paiement (DSP2), qui intégrera dans son périmètred’applicationdenouveauxacteurstelsquelesagrégateursetlesinitiateursdepaiement.

Pourlesecteurdel’assurance,lesdispositionsrelativesaucontrôleinternepermettaientégalement au superviseurde contrôlernotamment lesdispositifsdemaîtrisedes risquespesantsurlessystèmesd’information.Désormais,lenouveaucadreprudentielSolvabilitéII, qui entrera en vigueur à partir du 1er janvier 2016, vise à ce que les organismesd’assurancemesurentplusprécisémentl’ensembledeleursrisques.Àcetitre,lesrisquesopérationnels liés aux systèmes d’information doivent désormais être mieux évalués etdavantageencadrés,commedans ledomainebancaire : lesorganismesdoiventdisposerd’unsystèmedegestiondesrisquesquipréserveenparticulierlasécurité,l’intégritéetlaconfidentialitédesinformations.

Lesbanquesetlesassurancesadaptentleursdispositifsdeprotectionetdéveloppentuneactivitédeveille

L’adaptationdesbanquesaurisquedecyberattaques

Enapplicationdelaréglementationbancaire,lesétablissementsontainsidûdéfinirleurstratégie informatique, sous la responsabilité de leurs instances dirigeantes, en tenantcomptedesexigencesdesécuriténécessairesàlaprotectiondeleurssystèmes.Ilsontdûétablir un cadre général de mesure et de réduction des risques, qui englobe le risqueinformatiqueetlasécuritédusystèmed’information.Leurresponsabledelasécuritédessystèmes d’information (RSSI) élabore des politiques de sécurité et recommande desmesures techniques (cryptage des données, gestion des accès, etc.). Des dispositifs decontrôle interne et de recensement des incidents ont été égalementmis en œuvre pourveilleràl’adaptationdesmesuresdestinéesàmaîtrisercesrisques.Enparallèle,desplansde continuité de l’activité ont dû être établis et régulièrement testés. Les quelquesétablissementsayantoptépourdesapprochesdemesureavancéedu risqueopérationnelontenoutrelapossibilitédespécifierdesscénariosderisqueafindemieuxquantifierleschargesencapitalnécessairesàlacouverturedurisquerésiduel.

Lamiseenplaceeffectivedecesdispositionsréglementaires,quiconstituentl’ossature

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des exigences prudentielles en matière de sécurité informatique, est généralement bienétablie.L’émergencedesnouvelles techniquesdecybercriminalitéconduitcependant lesbanques à devoir adapter et renforcer leurs dispositifs. De nouvelles politiques et denouvelles solutions doivent être élaborées en conséquence, visant en particulier lerenforcementde l’expertise et la sensibilisationde l’ensembledupersonnel ainsique lamiseenœuvrerégulièred’exercicesdecriseavecdestestssurlesdispositifsdegestion.

À cet égard, la participation des principales banques françaises à des tests de placeconstituel’unedesinitiativesconcrètesdansledomainedelapréventiondesrisquesliésàla cybercriminalité. L’exercice conduit en novembre 2012 avait permis aux banquesfrançaises d’évaluer l’impact d’une cyberattaque11 sur leurs processus critiques, en yassociant les grandes infrastructures demarché. Ce type d’exercice collectif permet devérifier que les différents plans de continuité offrent une cohérence d’ensemble et sontbienadaptésàdesmenacesenconstanteévolution.

Cependant, la mise en place de dispositifs de protection ayant pour objectifl’inviolabilité des systèmes n’est ni réaliste ni suffisante pour gérer adéquatement lesrisquesliésauxcyberattaques.C’estpourquoilesbanquesdoiventdésormaisadopterdesstratégiesdeprotectionproactivesquicomportentà la foisuneactivitédeveilleafinderepérer les cybermenaces dans l’environnement et une activité de préventionopérationnelle pour définir les moyens qui permettraient de contrer les attaques (cf.encadré1).

Encadré1Équipesdedétectionetéquipesderéaction

Faceàlacybermenace,ladétectiondesattaquesetlacapacitéàréagirrapidementsontessentielles. Ces actions de sécurité informatique se sont progressivement structuréesdepuislanaissanced’Internetetl’apparitiondespremiers«virus»informatiquesaudébutdes années 1990. Aujourd’hui, les administrations et les grandes entreprises dumondeentier s’organisent en interne et conjuguent aussi leurs efforts en partageant del’information sur les nouvelles menaces identifiées. Les principaux établissements dusecteur financier en France participent à ces réseaux d’échanges et disposent d’équipescapables d’intervenir. Ce type d’activité est également réalisé par des prestatairesspécialisés.Ilexistedeuxtypesd’équipes:

–lescentresopérationnelsdesécurité(COS)(securityoperatingcenters–SOC)sontchargés de la veille sécuritaire sur les plates-formes logicielles etmatérielles. Ils ont laresponsabilité de la détection des attaques et de toute anomalie pouvant conduire àreconnaître une action malveillante sur le système d’information. Pour une meilleureefficacité, ils comportent parfois en leur sein une équipe chargée de tester la sécurité(équipe dite d’« attaque ») et une équipe chargée de détecter au plus tôt les attaques(équipe dite de « défense »). Leur rôle est désormais crucial pour permettre uneinterventionrapideetcontrerlesattaques;

–leséquipesderéponseauxincidentsdesécuritéinformatique,plusconnuessousleur

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acronymeanglaisCSIRT(computersecurityincidentresponseteams),sont,quantàelles,chargéesd’intervenir encasd’incident.LesCSIRTexploitentdonc les alertesproduitespar lesCOS, ainsi que d’autres alertes reçues par d’autres canaux pouvant signaler desanomalies. Ils peuvent se faire reconnaître par des réseaux internationaux comme leFIRST (Forum for Incident Response and Security Teams), le CERT (ComputerEmergencyResponseTeams)ouleTF-CSIRTenEurope,afindedévelopperlescapacitésd’échange d’informations. Le CSIRT a la charge de l’analyse des alertes et lamise enœuvre d’une réponse appropriée. Au niveau national, l’ANSSI pilote le CERT-FR quiopère pour les administrations françaises et accompagne l’action duCERT des grandesentreprises(cf.encadré2ci-contre).

Encadré2Loideprogrammationmilitaireetrôledel’ANSSI

En France, la loi de programmation militaire du 18 décembre 2013 reprend lesorientationsduLivreblancsurladéfenseetlasécuriténationaleparueslamêmeannée.Afindeprendreencompte les risquespour lanationdescyberattaques, elledétaille lesdispositionsrelativesàlaprotectiondesinfrastructuresvitalescontrelacybermenace.

Cettelois’appliqueaux«opérateursd’importancevitale»(OIV),qu’ilssoientprivésoupublics,etquisontdésignéspourchaquesecteurd’activitéd’importancevitale(SIV)par arrêté du ministre coordonnateur (ministre de l’Économie et des Finances pour lesecteur financier). Elle oblige notamment les OIV à mettre en œuvre des mesures desécurité,àdéclarerimmédiatementtoutincidentaffectantlesystèmed’informationetàsesoumettre à des audits de leurs systèmes à la demande du Premier ministre (pas depériodicitéexplicitementimposée)parl’ANSSIouautreservicedel’État.

L’autoriténationalechargéedeladéfensedessystèmesd’informationestl’ANSSI,quiest placée sous l’autorité du Premier ministre. Ses missions ont été détaillées dans undécret du 27mars 2015 relatif à la sécurité des systèmes d’information des opérateursd’importancevitale(décretn°2015-351).Cedécret inclutnotammentdesprécisionssurlesrèglesdesécuritéàappliquer,lesmodalitésdemiseenplacedesystèmesdedétectiondes attaques au sein des OIV, la collecte des incidents de cybercriminalité et enfin lesmodalités de contrôle de la bonne application de ces règles. Elle prépare la stratégienationalepourlasécuriténumérique,miseàjourenoctobre2015.

L’adaptationdesorganismesd’assuranceaurisquedecyberattaques

Les organismes d’assurance n’ont pour l’instant pas été considérés comme une cibleprivilégiéepourlespiratesinformatiques,leuractivitéseprêtantmoinsnaturellementauxdétournements de flux financiers. Toutefois, les données gérées par ces organismesreprésentent une cible potentielle qui ne doit pas être sous-estimée, comme l’actualitérécente aux États-Unis a pu le montrer, de même que les actifs gérés sous forme deplacementsassurantiels.

D’unemanièregénérale,commepourlesecteurbancaire,lesdispositifsdesécuritédessystèmes d’information des organismes d’assurance doivent combiner approche

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préventiveetapprochecurative.Lesderniersrésultatsdel’enquêteannuellequel’ACPRréalise depuis 2011 sur l’état de préparation de la place à la nouvelle réglementationSolvabilité II soulignent la prise de conscience par les assureurs de l’importance de cesujetetmettentenévidencedesaméliorationsprogressivesdanscedomaine.Lesréponsesdes organismes font ressortir qu’une majorité d’entre eux disposent désormais d’unepolitiquedesécurité informatique,deplansdecontinuitéde l’activitéquis’appuientsurune cartographie des systèmes d’information et des procédures de gestion des risquesinformatiques. Ainsi, les actions de préparation à Solvabilité II ont contribué aurenforcement des dispositifs existants. L’attention portée à la sécurité des systèmesd’informationapparaîtenoutred’autantplusessentiellequelesecteurassurantielconnaîtd’importantes restructurations (rapprochements, fusions, acquisitions) qui impliquent demettreencommundessystèmesd’informationauparavantséparésetconstituentainsiunfacteurderisquesupplémentaire.

LAPRÉVENTIONDELACYBERCRIMINALITÉIMPLIQUEUNRENFORCEMENTDELACOOPÉRATIONENTREAUTORITÉS

Lerôledusuperviseurprudentielseconcentresurlevoletpréventif

Il n’entre pas dans la mission du superviseur de réprimer la cybercriminalité. Lespouvoirspublics(forcesdepolice,justice,agencesdesécurité)sontlesacteurschargésdeluttercontrelesactivitéscybercriminelles.EnFrance,laloideprogrammationmilitairedu18 décembre 2013 et le décret du 27mars 2015 confèrent en outre à l’ANSSI un rôlemajeurdanslaprotectiondesorganismesd’importancevitale(cf.encadré2supra).

Pour sa part, le superviseur veille à la préservation de la stabilité des établissementsfinanciers. C’est à ce titre qu’il se préoccupe de leur cybersécurité. L’attention dusuperviseur se porte donc principalement, commeon l’a vu, sur les volets préventifs etdéfensifsdelaréponseauxmenaces.Ildoitfaireensortedes’assurerquelesinstitutionsagissent à la fois sur la réduction de la probabilité d’occurrence d’un dommage et surl’atténuation de leur dangerosité en cas d’attaque réussie (limitation des impacts par lacapacitéde restaurer rapidement laqualitéd’un systèmeatteintouencorepossibilitéde« compartimenter » les systèmes d’information afin d’éviter que les infections sepropagent).

Comptetenudecesdifférentsrôles,lacoopérationetlacoordinationdel’ensembledesacteurs impliqués, établissements financiers eux-mêmes inclus, sont nécessaires pourassurerlacohérenceetlecaractèrecompletdesactionsdeluttecontrelescyberattaques,delapréventionjusqu’àlarépression.

Lecontrôledesdispositifsdecybersécuritéparlesuperviseurdoitpouvoirs’appuyersurdeséquipesspécialisées

Lesuperviseurprudentielveilleàcequelesétablissementssoussoncontrôle,banquescomme assurances, évaluent correctement leur niveau de risque et disposent d’unenvironnement sécuritaire adéquat au regard des risques que pourrait induire unecyberattaque,afindelimiteraumaximumlerisquerésiduelpourl’entrepriseetsesclients.

L’ACPRveilleenparticulieràcequelesdispositifsmisenplaceparlesétablissements

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– dispositifs de prévention, d’une part, et de gestion des risques avérés et des crises,d’autre part – soient suffisamment solides et efficaces en cas d’attaque. Des enquêtesciblées peuvent ainsi être menées, comme en 2013, sur les risques associés au cloudcomputing,quiaconduitàinterrogerplusd’unevingtained’entreprisesdessecteursdelabanqueetdel’assurance(ACPR,2013).Desmissionssurplacedédiéesàlathématiquedela sécurité des systèmes d’information menées par des équipes spécialisées sont ainsirégulièrement diligentées, tant du côté des banques que du côté des assurances. Leséquipesdecontrôlesurplacepeuventévaluertrèsconcrètement,àtravers,parexemple,leprocessusdevérificationdeshabilitationsauxapplicationslesplussensibles,sileniveaudeprotectionmisenplaceparl’établissementoul’organismeestadéquatencasd’attaque.

Ilestessentieldepréciserquecetypedecontrôleparl’ACPRpeutégalementportersurles prestataires de services informatiques auxquels les banques et les assurances ontrecoursdans le cadrede l’externalisationdecertaines activités (au-delàdoncde l’entitéjuridique assujettie au contrôle de l’ACPR), ce qui permet au superviseur d’avoir unevisionglobaledesdifférentes«portesd’entrée»delamenacedecyberattaques.

Comptetenudel’importancepriseparcesquestionspourl’ensembledesesdomainesd’action, le secrétariat général de l’ACPR a décidé de mettre en place un réseautransversal pour suivre de façon spécifique ce risque et mieux interagir avec sesinterlocuteursauplannational,européenetinternational.

Lesinstitutionsinternationalesontl’obligationdecoordonnerleurseffortsfaceàl’importancedelamenace

Les différentes autorités prudentielles européennes ont désormais toutes intégré lerisqueliéàlacybercriminalitédansleurcartographiedesrisquesdusecteurfinancieretleclassent généralement au rang de priorité élevé. Les analyses menées au sein duMécanismedesupervisionunique(MSU)depuis2014ontainsiévalué le risque liéà lacybercriminalité comme l’une des menaces les plus importantes en termes d’impactpotentiel pour les institutions financières. La BCE, en conséquence, a retenu ce risquecommel’unedesesprioritésdesupervisionpourl’année2015et,outreunquestionnaired’autoévaluationadresséauxbanquessignificativesdèslepremiersemestre,desmissionsdédiéesàce thèmeontétédiligentéesauprèsd’unéchantillondebanquessélectionnées,dontdesbanquesfrançaises.IlestimportantdenoterquelesinitiativesprisesparlaBCEs’inscrivent dans une démarche plus générale de redéfinition du risque dit« informatique » au sein du MSU et témoignent d’une volonté forte, d’une part, derenforcer la supervisiondans le domaine informatique et, d’autre part, d’harmoniser lespratiquesdesupervisionàtraversuneméthodologiecommune.

Au-delàduseulsecteurbancaire,lerisqueliéàlacybercriminalitédemeureunpointdevigilance comme le rappelle le rapport du joint committee des autorités de supervisioneuropéennes de mars 2015 sur les risques et les vulnérabilités du système financiereuropéen.Cerapportmetenexerguelebesoindecoopérationinternationalepourfaciliterla surveillance de ce risque avec des orientations convergentes. En effet, les initiativesinternationales renduespubliquesenmatièredecybersécuritésontpour l’heure limitées.On peut principalement relever les recommandations CPMI-IOSCO (BRI, 2014) en

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matièredecyberrésiliencepour les infrastructuresdemarchéfinancier,maisquinesontpasdirectementapplicablesauxbanquesetauxassurances.LaCommissioneuropéenneapubliéen2014unestratégiedecybersécuritépour lesmembresde l’Unioneuropéenne,dont l’évaluation des pratiques relatives à la protection des infrastructures essentiellesconstituel’élémentcentral.

Au-delà de la vision purement européenne, de nombreux régulateurs et superviseursétrangersontengagédesinitiativesdanscedomaine(cf.encadré3).

Encadré3Initiativesprisesparlesrégulateursétrangersetinternationauxpourprévenirlerisqueetcréerlesconditionsd’uneréponse

concertéeLes régulateurs nationaux comme les régulateurs européens et internationaux ont

intégrélaproblématiquedelacybercriminalitédansleurprogrammedetravail.Lamenacedecyberattaquesnes’arrêtantpasauxfrontières, ilestégalementnécessaired’avoiruneapprochecoordonnéeauniveauinternational.

AuxÉtats-Unis, les régulateurs se sont largement impliqués dans lemessaged’alertetransmis aux banques de prendre toute la mesure du risque informatique et de sesnouvellesformesetd’yconsacrerautantderessourcesquenécessaire.LaFederalRederve(Fed)adélivrécesdeuxdernièresannéesplusieursmessagesdesensibilisationdestinésàl’ensembledusecteurfinanciersurlerisquedecybercriminalitéetaelleaussi inscritcesujet au rang des priorités de son action de supervision. De son côté, l’Office of theComptrolleroftheCurrency(OCC)prévoitd’utiliserprogressivementlerésultatd’untestd’autoévaluationdanssonprogrammedecontrôledesbanquesqu’ilsupervise.Enfin, leFederal Financial Institutions Examination Council (FFIEC) a publié un guided’évaluationdelacybersécuritépourlesorganismesfinanciersenjuin2015.

AuRoyaume-Uni,plusieursexercicesdestress testsontétéconduitssous l’égidedesrégulateurs nationaux.D’une part, la Financial ConductAuthority (FCA), la PrudentialRegulationAuthority(PRA)etlaBankofEngland(BoE)ontorganiséennovembre2013unexercicedit«walkingsharkII»quiconsistaitàsimulerunefausseattaquecontrelesecteur financier afin d’évaluer le degré de résilience du secteur bancaire britannique.D’autrepart,untestd’évaluation(CBEST),fruitd’unecoopérationentrel’industrieetlesinstitutions financières (BoE, FCA et Trésor britannique), est proposé aux grandesinstitutions pour évaluer leur degré de préparation face à une attaque informatique. Laconsolidationdecesinformationspermetd’évaluerlerisqueauniveauglobal.

Enfin,lacybersécuritéestaussiunproblèmemondial:pourapporteruneréponseplusefficace,ilestnécessaired’instaurerunecoopérationàl’échelleinternationale.Danscetteperspective,différentsgroupesd’experts internationaux (auxquels l’ACPRparticipe)ontinscritlerisquedecybercriminalitéàleuragendadetravail.

PLUSIEURSENSEIGNEMENTSCONCRETSPEUVENTDÉJÀÊTRETIRÉSDESCONTRÔLESMENÉSPARLE

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SUPERVISEUR

Lescontrôlessurplacefontressortirdeuxpointsd’améliorationprioritaires:lagestiondesdroitsd’accèsetlesoutilsdedétection

Les contrôles effectués par les superviseurs font ressortir le besoin de renforcer lesdispositifsdeprotectionprioritairementsurdeuxaxes.

Le premier concerne la gestion des droits d’accès aux applications et aux bases dedonnées,ainsiquelagestiondescomptesàprivilèges.Laprotectiondecesdroitsesteneffet cruciale pour parer des attaques silencieuses comme lesAPT (advancedpersistentthreats)quipeuventpermettrederécupérerdesdonnéessensibles.Pourcefaire,lecodemalveillant de l’attaquant doit usurper des droits d’accès à ces données ou auxapplications qui les gèrent. S’il parvient à détourner ou à casser lesmots de passe desemployésdelabanquehabilitéssurunenvironnement,ilpeutbénéficierdeleursdroitsdegestionsurcetenvironnement(enlecture,enécriture,voireensuppression).L’attaquantpeut aussiviserdes comptesprivilégiés, qui sont ceuxquiont la facultéd’attribuerdesdroits aux utilisateurs ou aux informaticiens intervenant sur un environnement. Cescomptes privilégiés présentent un niveau de sensibilité encore plus élevé car leurusurpationparunattaquantpermettraitàcelui-cidegérerlesystèmeet,parexemple,decréerdesfauxcomptesutilisateurspourlui-même.Depuislongtemps,lagestiondesdroitsd’accèsetdescomptesàprivilègesestunsujetd’attentionpourlesuperviseuretpourlesresponsables de sécurité informatique des établissements. Pour autant, les mesuresrecommandéesétaientinspiréesàl’originepardesscénariosquiseconcentraientsurdesusurpations résultant d’une infiltration interne, par exemple par un salarié indélicat. Lamenaceliéeàlacybercriminalitéobligeàrepensercesmesurescarl’usurpationdesdroitspeut être réalisée par un attaquant externe ayant réussi à entrer dans le systèmed’information en bénéficiant des nombreuses connexions informatiques qui existentaujourd’hui.

L’ampleurdestravauxestconsidérableetseheurteàplusieursdifficultés:lessystèmesd’informationdesétablissementsdebanqueetd’assurancesontparticulièrementvastesetinterconnectés;certainscomposantssontanciensetgéréssurdestechnologiespermettantdifficilementunegestionindividuelledesdroits;l’infogéranceestunphénomènerépanduetilpeutêtredifficiled’obtenirconcrètementunniveauélevédesécuritésurdesélémentsdusystèmed’informationqui sontadministréspardes sous-traitants.Lespréconisationsque le superviseur peut être dès lors amené à formuler consistent principalement àrenforcerlesrèglesd’administrationdesdroitsd’accès,enprivilégiantuneliaisondirecteavec les systèmes de gestion du personnel et à mieux isoler d’Internet les postes desadministrateursinformatiques.

Le second point crucial, complexe techniquement, concerne le développement desoutils de détection. Les spécialistes de la lutte contre la cybercriminalité raisonnentdésormaissurlabasedupostulatquel’attaquantpourraprobablementréussiràentrerdansle système informatique ciblé et qu’il importera donc surtout de parvenir à détecter saprésenceenreconnaissantlecodemalveillantoudesactionsanormales.Depuislesdébutsdel’informatique,latraçabilitéétaitunepréoccupation,maisprincipalementpourassurer

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lapreuvedesopérationseffectuées.Désormais,elledevientunepréoccupationdestinéeàsurveiller les réseaux, les applications et les bases de données. Les codes malveillantsprésentent des caractéristiques typiques qui peuvent être reconnues par des sondes desurveillance.L’analyseetlacorrélationdestracespeuventpermettred’alerterleséquipesdesurveillanceetderepérerdesattaques.L’enjeuestdetaillepuisqu’ils’agitdésormaisdedévelopperdevéritablesstratégiesdesurveillanceetd’incluredanslechampdecelles-cilessystèmesapplicatifsetlesbasesdedonnéesdevantêtreprotégés.

L’ACPRorienteplusgénéralementsonactiondansquatredirections

Inciterlesinstitutionssuperviséesàs’organiserefficacementpourrépondreàlamenacedecyberattaques

Les solutions faceà lamenacedecyberattaquesdevraientd’abordémanerdu secteurfinancier lui-même.C’estpourquoi l’ACPRencourage les initiativesdesbanquesetdesassurancesen lamatièreet requiertaussidesmesurescorrectives lorsqu’elledétectedesinsuffisances.Lesétablissementsdoiventd’abordmettreenplaceuneorganisationinternerobuste : un positionnement adéquat et desmoyens suffisants doivent être garantis auxRSSI, dont l’action constitue un élément clé pour une bonne maîtrise des risquesinformatiques,notammentceuxliésàlacybercriminalité.L’autoritédecettefonctionn’esttoutefois pas encore suffisamment reconnue au sein des établissements et leurindépendance n’est pas systématiquement garantie par un rattachement hiérarchiqueapproprié.Lesétablissementsdoiventensuites’organiserenexterne,encollaborantavecleurs pairs dans l’identification des nouvelles menaces, en vue de l’adoption desmeilleurespratiquesenmatièrededétectionetdeprotection.

Améliorerl’identificationdelamenaceavecunrecensementcentralisédesattaquesauniveaueuropéen

Faceauxenjeuxposésparlescyberattaques,unaxedeprogrèsconsisteraitdanslamiseen place d’un recensement centralisé des incidents au niveau européen ainsi que leurcommunication aux autorités nationales compétentes, dès l’identification de lamenace,avérée ou potentielle, et dans des conditions de confidentialité à définir. Les donnéescollectées pourraient ainsi être utilisées à des fins microprudentielles, permettant auxautoritésdemieuxappréhender lacapacité individuelledesbanquesetdesassurancesàrépondre à ce type de menaces, mais également macroprudentielles, dans l’objectif derecueillirdesdonnéesstatistiquesafindemesurerl’évolutiondesattaquesetleursévéritéetaussid’éviterlerisquedecontagionencasdecriseimportante.Celapourraitégalementconstituerunmoyend’identifierlesmeilleurespratiquesentermesdeprotectionetdelespartageravec les institutions financières, afind’améliorer la résilienced’ensemblede lasphèrefinancière.

Adapterlesuividurisqueopérationnelpourmieuxtenircomptedesspécificitésdurisquedecyberattaques

Commenous l’avonsvu, lasupervisionprudentielleabordehistoriquement lasécuritéinformatiquesous l’angleducontrôle interneetde lagestiondurisqueopérationnel.La

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logiquedecontrôlepermanentdurisqueopérationneladoncéténaturellementappliquéeenmatièredesécuritéinformatique:aprèsl’élaborationd’unecartographiedesrisquesetlamiseenplacedecontrôlesciblés,unrisquerésiduelestévaluéetdesexigencesenfondspropressontcalculéespourcouvrirlesconséquencesfinancièreséventuellesd’unincidentopérationnel.

Laspécificitédescybermenaces,d’occurrencerare,difficilesàdétecter,maisàtrèsfortimpact,conduitaujourd’huiàs’interrogersurleslimitesdecetteapproche,mêmesielletient compte en partie de la qualité et de la sophistication des dispositifs de suivi desrisques,etsurlesmoyensdelarenforcer.Lasoudainetéetlanaturedecertainesattaquespourraient en effet gravement perturber une institution financière sans forcément causerunepertefinancière,rendantinopéranteuneapprocheprincipalementbaséesurlamesured’unechargeenfondspropres.Ilconviendraitdoncderenforcerlesdispositifsdecontrôleinternepardes exigences accrues en termesdecapacitédedétectiondesmenaces etdetraitementplusrapidedesrisquesdèsleuridentification.

Favoriserlacoopérationentretouslesacteurspublicsouprivés

Étantdonnélesrépercussionsqu’unecyberattaquedegrandeampleurpourraitavoir,ilest enfin nécessaire qu’une collaboration efficace s’installe entre les établissementsfinanciers, leurs superviseurs et les banques centrales et les autres autorités publiquesimpliquées, comme l’ANSSI enFrance.L’ACPR considère ainsi commeprimordiale lamise en œuvre d’une approche coopérative et coordonnée pour assurer en France larobustessedusystèmefinancier,bancaireetdel’assurance.EnlienétroitaveclaBanquedeFrance,elleencourage les initiativesdeplacevisantà tester leniveaudepréparationdes institutions financières face à desmenaces en constante évolution. L’accroissementdes interdépendancesmondialesdans ledomaine financier rendégalementnécessaire lacoordinationdesactionsauplaninternationalentrelessuperviseurs.

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Recension

NOUVELLESTECHNOLOGIESETSERVICESFINANCIERS

PIERRESIMON*1

LaRevued’économiefinancièreconsacrecenuméroauthème«monnaie, institutionsfinancièresettechnologies».Ilm’aétédemandé,dansunpremiertemps,d’effectuerunerecensiondetravauxacadémiquesconsacrésausujetdanslepasséetlestempsprésents.

Peut-êtreparmanquedesourcesdocumentaires2,peut-êtreaussienn’incluantpas lesÉtats-Unisdans lepérimètre,monconstatestqu’ilya fortpeude travauxacadémiquesqui ont analysé les conséquences des nouvelles technologies sur l’exercice desmétiersfinanciers.Sujet insuffisamment conceptuel ?Faible attrait pour lamicroéconomiedanssesaspectslespluspratiques?Jenesais.Jeleregretteetsouhaitequeleschosesévoluentcarlamatièrederechercheestconsidérable,notammentdanslapériodedemutationquenous traversons. Je constate cependant l’amorce d’une évolution avec des contributionsd’universitairesdansdescolloquesinternationauxetm’enréjouis.

Jemesuistournéverslesautressourcesdocumentaires.Là,leconstatestinverse.Lesréflexions, les interrogations, les prévisions d’avenir sont multiples, j’allais direpléthoriques. Elles débutent dès les années 1960, avec l’apparition et le développementdesordinateurs.Rappelons-nousLepari informatique publié en1968et écrit parPierreLhermitte, conseillerduprésidentde laSociétégénérale àpartir de1970,qui traitedes« conséquences prévisibles du développement de l’automatisation dans la gestion desentreprises»,enincluantlabanque.

EllessepoursuiventdixansplustardaveclerapportNora-MincàlaprésidencedelaRépublique,consacréàl’informatisationdelasociété.Ilprévoyaitunebaissede30%deseffectifsdanslesservicesetnotammentdanslabanque.

Pourl’essentiel,lescontributionsrecenséessontlefaitdeprofessionnels,praticiensouconseils. Certains pilotent des rapports officiels. J’ai moi-même commis un avis et unrapport au Conseil économique, social et environnemental en 2002 avec pour titreL’impactdesnouvellestechnologiessurlesservicesfinanciers.

D’autresprennentlaplumedansdesrevues,publientdeleurpropreinitiativedesétudesprospectives. J’ai pris connaissance d’études de sources diverses. J’en citerai quelques-unes,courantlerisqued’apparaîtreincomplet.

Il y ad’abord les travauxmenéspour le comptede clientspardes sociétésd’études,tellesqueForesterouGartner.Ilyaensuitelesétudesprospectivesrenduespubliquesparlesgrandscabinetsdeconsultingouceuxdetaillemoinsimportante,maisspécialisés.Ilyalesmultiplesarticlesrédigéspardespraticienspourlecomptederevues,notammentlaRevueBanqueetBanque&Stratégie.Enfin,ilyal’ensembledestravauxconduitsparlesbanquescentrales.

À tout cela, je dois ajouter des livres plus historiques, très utiles car ils aident à la

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lecture du passé. Souvent, ils sont édités à l’occasion d’anniversaires (Mounier-Kuhn,2013).

Monobjectifseradonc,enéclairagedesarticlesdecenuméro,chacunétantconsacréàun domaine spécifique d’application des nouvelles technologies pour aujourd’hui etdemain,dedécrirecequ’ontétélesgrandesétapes,depuisl’apparitiondel’informatiquebancaire, de l’immersion du secteur financier dans les technologies de l’information,autrement dit dans le digital. J’essayerai demontrer par quelles évolutions ces grandesétapessesonttraduites.

Dansceparcoursseposeralaquestiondesavoirsi,àchaqueétape,onavaitconsciencede ce que seraient les suivantes. Se posera surtout la question de savoir si les annéespasséessontporteusesdumondeàvenir.

Ma conclusion sera qu’il faut faire preuve d’une grande prudence dans toute visionprospective.

Enmême temps, force sera de constater que le digital, au cœur de l’évolution de labanquedepuisdesdizainesd’années,n’auracessédevoirson importances’amplifieretsonrythmes’accélérer.Sansdoutevit-onunchangementdeparadigme.

LESGRANDESÉTAPESDEL’IMMERSIONDUSECTEURFINANCIERDANSLATECHNOLOGIELesannées1960-1970:l’accompagnementdelabancarisationdelasociété

Latransformationquelabanqueauraconnuedanscesdécenniesestd’unetrèsgrandeampleur.Entre1965et1980,letauxdebancarisationestpasséde35%à89%,lenombredeguichetsaexplosé,l’unitédecomptedunombredemoyensdepaiementestdevenuelemilliard,contrelacentainedemillions.Parailleurs,desmoyensdepaiementsnouveauxsontapparus,aveclescartesouencorel’avisdeprélèvement.Enfin,lagammedeproduitsoffertss’estconsidérablementélargie, tantdans labanquecorporatequedans labanquededétail.

Sanslerecoursmassifàdesmoyensdetraitementdeplusenpluspuissants,lepassaged’une banque de classes aisées de la population à une banque pour tous aurait toutsimplementétéimpossible.

C’est dire que durant cette période, les investissements technologiques sontprioritairementaffectésà l’automatisationdesopérations,principalementdebackoffice.Certes,letraitementàdistanceapparaîtetsedéveloppedanslesannées1970.Onparledetéléprocessing,quiprendlerelaisduvélo-processing3,maispourl’essentiel,onrestedansle schéma de « gros ordinateurs centraux ». Ceux-ci monopolisent l’intelligenceinformatique.Ilsdoiventêtreentourés,pourlesalimenteretingurgitercequiensort,pardes effectifs de traitement nombreux. C’est l’époque des centres administratifs, desrecrutementsmassifsdepersonneld’exécution,quiexpliquentlesdépartsimportantsàlaretraitequelesecteurconnaîtdepuisquelquesannées.

Biensûr,paslamoindreinterrogationsurlaconcurrenceéventuelledesnon-banques.Ilfautgérerlacroissance,danstouslesdomaines.

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L’informatiquerelèvedelaresponsabilitéuniquedesdirectionsinformatiques.Elleestcentrée sur les opérations de back office, c’est-à-dire que la dimension stratégique,l’engagementdesdirectionsgénéralesrestentlimitésàl’engagementd’importantsbudgetsd’investissementsinformatiques,d’unepart,immobiliers,d’autrepart.

Notons cependant que les années 1970 comportent déjà en germe les apportstechnologiques qui vont profondément modifier le paysage bancaire. L’échange dedonnées informatisées (EDI) fait son apparition, notamment dans les relationsinterbancaires avec la mise en place d’ordinateurs de compensation. Ces apportsconduisent à l’interpellation du rapport Nora-Minc en 1978 sur les conséquences del’informatisation de la société. Ses auteurs concluent à une baisse prévisible d’effectifsde30%danslesservices.D’oùlestitresdelapressedel’époque:«Labanquesidérurgiede demain ». Cette prévision, jusqu’à aujourd’hui tout au moins, n’aura pas connu delendemain.J’yreviendrai.

Lesannées1980-1995:laprofessionnalisationdumarketingbancaire

Enrestant schématique,onpeutdirequedès ledébutdesannées1980, lesnouvellestechnologies sortent des grands centres de traitement et deviennent les instruments detravail quotidiens de la quasi-totalité du personnel. La mini-informatique, avec desserveurs gérant des grappes de postes de travail, eux-mêmes encore peu intelligents, sedéveloppe. Progressivement, la quasi-totalité des personnels bancaires sont équipés de« terminaux » connectés. C’est la période de constitution de grands réseauxtéléinformatiquesbancaires,permisparlamodernisationduréseautéléphoniquenational.

Les grandes sociétés de mini-informatique, concentrées à Boston, après une périoded’euphorie,disparaissentlesunesaprèslesautres,balayéesparlesordinateurspersonnels,lesPC,qui rapprochentencoreplus l’intelligencede l’ordinateurde l’utilisateur final etcommencentàluiconfierunecertaineautonomie.

Cette période est aussi celle de l’apparition et du développement massif du minitel,inventionfrançaisegéniale,quimetunoutil informatiqueentrelesmainsdemillionsdeFrançais. La banque à domicile fait sa première apparition. Le PC fera disparaître leminitel,maiscelui-ciauraeul’avantagedepermettreauxbanquesfrançaisesd’acquérir,avant beaucoup d’autres, une expérience de « banque à domicile ». Six millions deménagesaurontdisposéd’unepossibilitédecontactàdistanceavec leursbanquesavantmêmel’arrivéeduPC.

Cettepériodeestaussicelled’uneévolutionconsidérabledanslescapacitésdestockageetdetraitementd’informations.Degrandes«basesdedonnées»sontconstituées.

Elles vont permettre une évolution déterminante. Les traitements informatiques vontgérerdesclientsauxquelssontrattachésl’ensembledesproduitsquileséquipent.Jusque-là,lessystèmesconnaissaientdescontratsséparéslesunsdesautres,sansvisionglobaledes clients. Les banques grâce aux nouvelles technologies de l’information et de lacommunication (NTIC) professionnalisent leur marketing. La bancarisation étantlargement engagée, il s’agit de vendre plus etmieux à chaque client.Ainsi, la part descommissionsdanslePNBdelabanquededétailestpasséede20%audébutdesannées

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1990à40%-50%aujourd’hui.Deplus,l’ampleurdelacrisedudébutdesannées1990s’esttraduiteparuneffondrementdesrésultats.C’estl’époqueoùdenombreuxanalystespensaientquelabanquededétailétaitmorte,aubénéficedelabanqued’investissement.Ilfallait donc augmenter les recettes, tarifer les services, élargir leurs gammes ; en clair,engager un effort de marketing gigantesque. Celui-ci sera conduit avec succès ettransformera en faux prophètes ceux qui pensaient nécessaire d’abandonner la banquecommerciale.

Surcettepériode,enlienaveclesNTIC,troisremarquess’imposent.

Premièrement, l’informatique devient un enjeu stratégique, évoqué dans les conseilsd’administration, et les équipes de direction générale incluent des informaticiens. Elledevient beaucoup plus qu’un moyen de traitement, elle conditionne le développement,notamment commercial, dans tous lesmétiers.Mais les directions informatiques restentmaîtres à bord. Elles assument tout à la fois lamaîtrise d’ouvrage pour le compte desmétiersetsamaîtrised’œuvre.

Deuxièmement, le recoursmassif aux innovations technologiques a permis à certainsgroupesfinanciers,ensefocalisantsurdesmétiersfinanciersprécis,deprendredespartsdemarché,enanticipantsurlesgénéralistes.Sansleminitel,sanslestechniquesdescorerelevantd’outilsmathématiquestraitantdesmassesd’informations,lessociétésdecréditàla consommation n’auraient pas connu l’essor qui a été le leur. Sans des plates-formestéléphoniques hautement mécanisées, des fichiers de prospects traités par des logicielspointus,labanqueàdistance–jepenseàCortal4–n’auraitpasfaitsespremierspasdèslesannées1980.LesNTIContpermisàcesétablissementsdeconcurrencerlesbanquesgénéralistes.Maiscesgroupesdemeurentdesgroupesfinanciers,sesituantdanslecadredelaréglementationbancairegénérale.

Troisièmement, durant cette période apparaît un premier débat sur la concurrenceéventuelledenon-banques.Maispersonnenepense,biensûr,auxFinTech.Laquestionquiseposeestlasuivante:est-cequedegrandesmarquesquibénéficientdelaconfiancedeleursclients,quidisposentdegrandsréseauxnevontpasfaireconcurrenceauxréseauxbancaires traditionnels ? En clair était visée la grande distribution. Il y aura eu destentatives, mais force est de constater qu’elles n’ont jamais débouché sur desdéveloppements significatifs. Et puis rappelons-nous le qualificatif de « dinosaures »donnéparBillGatesauxgrandsréseauxbancaires.UnBillGatesqui,quandilpublielapremièreéditiondesonlivreLaroutedufutur,nevoitpasl’importanced’Internet.Ilenprendraconscienceen1993seulement,cequileconduisitàune2eéditiondesonlivre,en1995,profondémenttransformée.

Comme chacun sait, les dinosaures relèvent d’une espèce qui a été vouée à ladisparition.Orqueconstatons-nous:vingt-cinqansaprès,lesdinosauressonttoujourslà.

1995-2015:lechangementdeparadigme

C’est une banalité de dire qu’Internet associé auxPC, à l’explosion des capacités destockageetde traitement(cf. la loideMoore)ainsiquedecommunicationrévolutionnetouteslesactivités,remetencauselesmodèleséconomiques,transformelecomportement

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desclients,offredesopportunitésconsidérablesdenouveauxservices.

La lecture de ce qui a pu être écrit depuis lemilieu des années 1990 ainsi quemonexpériencepersonnellemeconduisentàquelquesremarques.

Enpremierlieu,lerêvedesbanquiers-informaticiens,j’enétais,du«touttempsréel»(mise à jour immédiated’une situationdès lorsqu’entreune informationquelconque lamodifiant)estdevenuréalité.Celatransformelaqualitéetlanaturedesservicesrendus.Toutedonnéeestdisponibleinstantanément,n’importeoù,n’importequand.

Endeuxième lieu, leprofessionnalismedeséquipes techniquesbancairesapermis lesdeux passages à l’euro sans incident. D’abord le big bang de l’ensemble des marchésfinanciers le 1er janvier 1999 et l’introduction de l’euro dans les activités de retail le1erjanvier2002.Lacontrepartieauraétélereportdedéveloppementsdequelquesannées.Il est, en effet, vite apparu trop risqué de saisir l’opportunité du passage à l’euro pourmuter les systèmes informatiques ; d’autant plus qu’entre-temps, il y avait le passage àl’an2000. Il fallait d’abord sécuriser le passage à l’euro, qui fut une réussite techniqueincontestable.

Entroisièmelieu,ledécalageenEuropeauraétéimportantentrelespossibilitésoffertespar Internet et leur appropriation par tous les acteurs. J’ai multiplié les voyages enCalifornieetsurlacôteestdesÉtats-Unis(Boston)entre1995et2000àlarecherchedesinnovations susceptibles de modifier l’exercice des métiers financiers et ceux de ladistributionengénéral.

Lesoutilstechniquesdelarévolutioninternetétaientdéjàdisponibles.Toutétaitdéjàengerme,plusieursexpériencesdepaiementsélectroniquesétaientlancées.PayPalétaitdéjàcréé. La maturation aura été longue, des opportunités sans doute perdues par desapproches«marketing»,parfoistroptechniciennes,ouparinterrogationsurleniveaudecoopération souhaitable entre banques. La prise de conscience que l’on vivait unerévolutionsourced’opportunitésmajeuresauraprisdutemps.Maisleséquipesbancairesn’aurontpascessédetravailler,d’avancer,d’emmagasinerexpérienceetcompétence.

Enfin, jenote,à liredesdocumentssurquinzeans,que lesdébatssur lesFinTech, lerisquepour lesbanquesd’être fortementconcurrencées,nonpluspard’autres financiersoudegrandesmarquesdedistribution,maispardesporteursde technologie,est récent.Jusqu’aumilieudesannées2000,laquestionportesurlesconséquencesd’Internetdanslagestion des banques, les relations avec les clients, l’évolution des réseaux, le niveaud’effectifsetlesservicesàrendre.

La lecture des articles et des études parus montre sur ces plans-là une grandeclairvoyance.Enrevanche, ledébatautourdudéveloppementdeFinTechsusceptiblederemettre en cause, dans le monde financier, les modèles économiques des acteurstraditionnels est récent. Tout se passe comme si plusieurs facteurs s’additionnaient, aumême moment, depuis trois ou quatre ans, pour interpeller sur une concurrence d’unnouveautypedenon-banques.

Ils’agitdel’explosionspectaculairedesapprochescollaborativesdansdiverssecteurs,durenforcementconsidérabledescontraintesprudentielles–elles-mêmesimpactéesdans

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leursuiviparlesNTIC–quiinciteà«sortir»dubilandesbanquescertainscrédits,enfindes capacités d’exploitation de big data qui peuvent donner un avantage concurrentielmajeuràceuxquilesdétiennent.Laconscienced’unchangementdeparadigmeestlà.

QUELSENSEIGNEMENTSPOURLEFUTURPEUT-ONTIRERDECESQUELQUESDÉCENNIES,DESCOMMENTAIRESETDESVISIONSPROSPECTIVESQUILESONTACCOMPAGNÉES?

L’analysedupassé,lesécartsentrecertainesprévisionsetlaréalitévécueincitentàunegrandeprudence,pournepasdirehumilité,danslesprojectionssurlefutur.

Enmêmetemps,ilyaconsensuspourconstaterque,pourdemultiplesraisons,dontlarévolutiondudigital,lesconditionsd’exercicedumétierdebanquierévoluentrapidementet fortement. Mais quelles en seront les conséquences ? La documentation consultée,d’hieretd’aujourd’hui,nouslaissefaceàdenombreusesincertitudes.

Desprévisionsdémentiesdanslepassé,maisunetrèsforteobligationdevigilance

L’humilités’imposeenmatièredeprévision.Jerappellequelquesprévisionsdupassé.Pourcertains, lesbanquesétaientcesdinosauresdestinésàdisparaître,balayéessoitpardesnon-banques, soit par la suppression, grâce auxnouvelles technologies, de leur rôled’intermédiation.

Avec le recul, que constatons-nous ? Les grands de la distribution ont renoncé, oupresque,àdistribuerdesproduitsfinancierspourseconcentrersurleursmétiersdebase.Ils sont au contraire les partenaires des banques pour vendre des produits fabriqués ettraitésdans leursusines(parexemple, lescréditsà laconsommation).Lesassureursquidisposaientd’unebasedeclientèleimportantesontrestésdesnon-acteursoudesacteursseconds dans la banque.Les établissements de crédit spécialisés qui ont eu la tentationd’élargirlagammedeleursservicessontaujourd’hui,pourlaplupartd’entreeux,entrésdanslegirondesgrandsréseauxbancairesàquiilsontapportéleurcapacitéinnovatrice.Ilssesontcentréssurleurmétierdebaseetleurfonctiond’usinepourlecomptedetiers.

Lesinitiativesdebanquesdirectesautonomes,crééesexnihilo,restentmarginales,saufcelles qui sont orientées vers une clientèle active en opérations boursières,mais qui, làencore,sedéveloppentdanslecadredegroupesbancaires.Quantauxgrandessociétésdeservicesen ingénierie informatique(SSII),quigèrentdepuisplusieursdizainesd’annéesunepartiedesmoyensdepaiement,ellessesontgardéesdes’éloignerde leurmétieretsontdemeurées lesprestatairesde servicesdesétablissementsbancaires.Ellesn’ontpascherchéàconcurrencerleursclients.

Lesraisonsdecettesituationsontmultiples.Certainestiennentàlaprisedeconsciencedesnouveaux acteurs de la complexité dumétier et du coût d’acquisitionde clients.Etpuis aussi à la mise en cause, pour certains, de leur propremodèle qui les incite à seconcentrersur leurmétier.Laréponsedesdinosauresyestpourbeaucoup.Aiguillonnésparcesnouveauxconcurrentspotentiels,ilsontréagi.J’yreviendrai.

L’apocalypseévoquéedès1978danslerapportMora-Minc,aveclaperspectived’unebanque«sidérurgiededemain»,nes’estpasproduitenonplus.Pourquoi?

Làencore,plusieursraisons.Lapremièretientàl’inertieducomportementdesclients.

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Ceux-ci ont mis du temps pour s’approprier le minitel, dont les services étaiententièrement nouveaux, puis Internet. Deuxièmement, les banques ont répondu par unénormeeffortdemarketing.Comme indiquéci-dessus, lapartdes commissionsdans lePNBdelabanquededétailaplusquedoublédepuisledébutdesannées1990.Enfin,lesbanquesontsuréduireleurscoûts.

Labaissemassivedunombred’agencesprévuedepuis la findesannées1970etsanscesse rappelée ensuite ne s’est pasproduitenonpluspour lesmêmes raisons.Ajoutonsque l’agenced’aujourd’hui, dans sondesign, dans sonorganisationn’a rien àvoir aveccelled’ilyaquelquesdécennies.

Mais une extrême vigilance s’impose parce qu’il y a consensus pour reconnaîtrequ’Internet, lesbigdata, les nouveaux supports d’accès à l’information, etc. bousculentles modèles économiques de nombre d’acteurs de l’économie traditionnelle et, danscertainscas,lesremettentencause.

Ce consensus, sauf exceptions, est récent. Dans les premières années du nouveaumillénaire,lesréflexionsétaientencoreconcentréessurlamanièrepourlesétablissementsexistantsd’intégrerlarévolutiondigitaleafind’améliorerleservicerenduauxclientsparlabanquemulticanal, de créerdenouveauxproduits et dedigitaliser lesprocess qui nel’étaientpasencore.

Laprisedeconscienceparlesauteursprofessionnelsconsultésdetoutel’ampleurdesconséquencesdesnouvellestechnologiesremonteseulementàquelquesannées.Ilapparaîtque la crise de 2008, les nouvelles régulations qui en ont découlé, les secoussesimmédiatessurlescomptesd’exploitation,lesévolutionsdecertainesactivités,liéesauxcontraintes de ratios prudentiels (je pense au transfert progressif vers les marchésd’encours de crédits), ont provoqué un choc qui a contribué à mettre encore plus enévidencelesconséquencespossiblesdunouveaumondedigital.

Ce choc est amplifié par son caractère général. Le digital concerne tous les secteursd’activité, remet en cause desmodèles économiques historiques, permet l’apparition deservices inconcevables sansnouvelles technologies.Lavigilance s’imposed’autantplusque le consensus, basé sur le constat, porte également sur la rapidité de diffusion, nonseulement des outils – pour l’essentiel, ils existent –,mais aussi des nouveaux servicesrendussurtoutsupport,PC,tabletteousmartphone,l’explosiondecedernierinterpellantavecvigueur.

Enfin,lesdangerssemblentvenirdenouveauxentrantsauxprofilsdifférents:dejeunesentreprises, les fameuses FinTech, lesmajors des télécoms, les GAFA (Google, Apple,FacebooketAmazon),d’aujourd’huietpeut-êtred’autresdemain.

Alors est-ce à dire que les mises en garde des décennies précédentes n’étaient quedécaléesdansletemps,quedesétablissementsquiontsutraverserlesdeuxgrandescrisesdu début des années 1990 et de 2008, sans coûter un euro au contribuable, sontaujourd’hui,dufaitdelatechnologie,condamnésaudéclin?

Unsolidehéritagedupassésuffisantpourreleverlesnouveauxdéfis?

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Sidesprévisionsapocalyptiquesdupassénesesontpasréalisées,c’estengrandepartiedufaitde laréactivitédesétablissementsfinanciersqui,ens’appuyantsur lesnouvellestechnologies,ontsuaugmenterleursrecettestoutenmaîtrisantleursrisquesetleurscoûts.

Ilyad’abordeuuneconcentrationmassivedusecteur,facilitéedanstouslesdomainesparlesorganisationsinformatiquesetgénératriced’économies.Àcesfusionss’estajoutéeuneoptimisationdesdéveloppementsinformatiquesparséparationdesfonctionsdemaîtred’ouvrage et de maître d’œuvre, et par un plus grand recours aux progiciels. Lesexploitationsontétéregroupées.Lesfonctionsquipouvaientêtreexternaliséesl’ontété.Ladissociationdesfonctionsdedistributionetdeproduction,notammentdansledomainedesfonds,adébutéet,pourlemoins,lerecoursàuneusinespécialisée,qu’ellefasseounonpartiedugroupe,s’estdéveloppé.Àtitred’exemple,citonslacréationtouterécenteparleCréditagricoled’uneusinedetraitementdechèquesoffrantsesservicesàtous.

Il y a eu, ensuite, la mutation d’organisations administratives en organisationscommerciales,recourantàunmarketingavancé.Lagammedesproduitss’estélargie,lesrecettesontdoncprogressé.Làoùunclientavaittroisproduits,ilendétientaujourd’huihuitouneuf.LesNTIContétécentrales,tantdanslaconceptionmêmedesproduits,dontbeaucoup sont à forte valeur ajoutée technologique, que dans leur distribution et laconnaissancedesbesoinsdesclients.

Puis,lesinnovationsd’établissementsspécialisésenpointeontétécopiées,avantmêmequecesétablissementsne soient intégrésdansdesgroupesgénéralistes, renforçant leurscapacitésconcurrentielles.

Enfin, laplupartdesmaisonsont su semettreenveille technologiquepermanenteenFranceetauxÉtats-Unis.Lemouvements’accélèreaveclamiseenplaced’incubateursinhousequi,notamment,accueillentdesFinTech.

Ces acquis culturels, cette capacité d’adaptation seront-ils aussi efficaces que par lepassépour faire faceàdenouveauxdéfis ?Le jeuestouvert, avecquelquescertitudes,maisavecautantsicen’estplusd’incertitudes.

Qu’ensera-t-ildel’évolutiondesréseauxd’agencesetdeseffectifs?Unecertitude:ilssontorientésà labaisse, àunebaisse significative,maisquelleen sera l’ampleur?Lesbanques sauront-elles et pourront-elles analyser et valoriser leur énorme gisementd’information ? Sauront-elles le garder en évitant qu’il soit détourné par d’autresintervenants ? Sauront-elles, comme dans le passé, être suffisamment créatives pourconcevoir de nouveaux services et produits impliquant le face à face avec le client etprendredespartsdemarché,commeellesontsulefairedansledomainedel’assurance?Bienmalinceluiquisauraitapporteruneréponseclaireetcertaineàcesquestions.

Qu’ensera-t-ilégalementdel’apparitiondenouveauxconcurrentsquisoitjouerontunrôledeplate-formeintermédiaireentrelesclientsetleursbanquesouoffrirontdesservicesse substituant à la monnaie fiduciaire (par exemple, des moyens de paiement), soit sesubstituerontpurementetsimplementaurôled’intermédiationfinaleens’appuyantsurlesmodèles économiques collaboratifs ? Ceux qui ont constitué et enrichissent degigantesques banques de données les exploiteront-ils avec détermination dans lemonde

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financier ? Les parts de marché de ces acteurs, pour l’instant modestes, peuvent-ellesdevenir significatives ? Là encore, le jeu reste ouvert. Quelles seront les réactions desinvestisseursprivéssidansunfondscollaboratifdeprêtsàdesPME,ilsperdentunepartiede leurmise?Quelsera l’équilibre réglementaireentre innovationetprotection (voir leprojetdenouvelledirectivesurlesservicesdepaiement),notrecultureétantdifférentedelacultureanglo-saxonne,ouencoreentretransparenceetrisqued’opacité?Lesbanquessauront-ellesintégrerdansleurgironlesstart-upinnovantesqualifiéesdeFinTech,mettreenœuvreavecdenouveauxserviceset/oudévelopperdesactivitésinnovantes?Quisauralemieuxgérerlacybersécuritéetfairefaceàdesrisquesmajeursd’attaquedessystèmes?Lalistedesquestionspourraitêtreallongée…

CONCLUSIONCeretourenarrièresurcequiapuêtreditetfaitsurlethème«servicesfinancierset

nouvelles technologies », disons digital, me conduit à une conclusion d’une grandebanalité:desrisquesetdesopportunités.Danslepassé,certainsauteursderenomaurontsurestimé les risqueset sous-estimés lacapacitédesétablissements financiers françaisàsaisir les opportunités. Peut-on projeter ce diagnostic pour le futur ? Peut-être que laréponseseradifférenteselonl’undestroisgrandsmétiersdelabanque,gestiondesflux,distribution du crédit et gestion de l’épargne. En tout état de cause, il serait imprudentd’êtreaffirmatifcommecertainsl’ontétédanslepassé.Oui,larévolutiondigitaleestlà,bienlà,provoquantdesévolutions,notammentculturelles,majeures.Maislejeuestplusque jamais ouvert. La situation dans dix ans sera fonction de la capacité créatrice, durythme de développement de l’innovation, de la souplesse d’adaptation, notammenthumaine pour gérer la diminution des effectifs, enfin de la maîtrise del’internationalisation,desétablissements.

En dernière conclusion, je réémets le souhait que des chercheurs académiques sepassionnentsurcesujet.

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Chroniqued’histoirefinancière

MONNAIEDESPAUVRES,MONNAIEDESRICHESAUXIXESIÈCLEPATRICEBAUBEAU*1

Lamonnaieincarnelebienfongibleparexcellence,celuiquiselaisselemieuxréduireàsonseulstatutdenuméraloud’incrément.Danscesconditions,lamonnaiedevraitêtrele « médium universel », doté d’une sorte de neutralité instrumentale, économique etsociale. Or cette monnaie pure reste une vue théorique : non seulement la monnaiedemeure jusqu’à aujourd’hui, comme l’ont bienmontré Zelizer (1994) et de nombreuxanthropologues2, un support de choix moraux et de rapports affectifs, mais aussi sonutilisationetsonaccèsmêmerestentdépendantdelasituationsocialedesesusagers.Àcetégard,lecasfrançaisauXIXesiècleestparticulièrementrévélateur(Baubeau,2012):voilàeneffetunpaysquiamisenplace–lepremier–unsystèmepurementrationneldepoidsetdemesures, lamesuremonétaireenétantunélémentcrucial,etquipourtantneparvient pas à unifier les usages professionnels, individuels et même régionaux de lamonnaie.Maiscettedisharmonieapparaîtmaximaleentrepauvresetriches…

Endécimalisantlesystèmedepoidsetdemesures,laRévolutionfrançaiseambitionnaitd’introduirelarationalitéscientifiquedanslequotidien,derompreaveclesusageslocaux,les variations intempestives, les conflits d’usage liés à la variété des instruments et desdénominations. Lamonnaie participait pleinement de cette réforme, puisque les étalonsmonétaires devaient être eux-mêmes décimaux et exprimés en grammes de métauxprécieux.C’estainsiquelefranc,définientre1791et1803,devintunemonnaiedecinqgrammes d’argent à 9/10e de fin. On en finissait ainsi avec les grains d’or, le systèmeduodécimaldelalivre,dusouetdudenieretsesvariationsrégionales.

Mais pour parachever cette transformation, il fallait que les mêmes principess’appliquent du haut jusqu’en bas de la hiérarchiemonétaire : billets de banque, piècesd’or et d’argent, monnaies de cuivre et de bronze devaient former les subdivisionsprogressivesdusystèmemonétaire,sanssolutiondecontinuité.

C’estlàqueleschosessecompliquèrent.D’abord,parcequelesinstrumentsmonétairesmanuelsdisponibles reflétaient l’extraordinaire inégalitédes fortunes.Ainsi,en1800, leplusgrosbilletdebanquedisponible,celuide1000francs,représentaitenvironunandesalaire d’un ouvrier parisien, ce qui correspondrait grosso modo dans la Franced’aujourd’huiàunecoupurede13600eurosenviron!Certes,cescoupuresd’unmontanténorme étaient destinées aux transactions marchandes et non aux échanges quotidiens.Mais l’autre coupurede laBanquedeFrance, lebilletde500 francs,n’étaitguèreplusaccessible.Etilenallaitdemêmedelaplupartdesinstrumentsmonétaires.Commel’écritThuillier (1959) : «Lamonnaie de cuivre a, commechacun sait, jouéun rôle essentieldans laviequotidiennede jadis : l’ouvrier, le journalier agricoleétait rarementpayéenmonnaied’argent;quantàl’or,iln’envoyaitpourainsidirejamais.»

AuXIXe siècle, lesmonnaies du peuple étaient donc bornées entre deuxmétaux. En

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haut, ilyavait l’argent, lapiècede5francs,souventqualifiéed’écuàpartirdesannées1820,paranalogieavecl’ancienécude6livres.Ilétait,d’aprèsBalzac,leprixde«tousles genres de prostitutions parisiennes » et l’instrument clé du règlement des salaires.C’estcetargentquiformelepéculeaccumulédumaçoncreusoisLéonardlorsqu’ilquitteParisen1842.Ilaalorsunephraserévélatricedesdénivellationssocialesdelamonnaie:« J’étais tellement novice dans les questions d’argent que je ne songeais même pas àchangermespiècesde100sous,soitenpiècesd’or,soitenbilletsdebanque.»(Nadaud,1895).Lapièce de 100 sous, c’est évidemment la pièce d’argent de 5 francs,mais vue«parenbas»,dupointdevuedeceluipourqui«unsouestunsou».L’or,iln’ypensepasetlebilletdebanquen’estpasencorepassédansl’usageetpourtant,4000francsenargent, cela représente unemasse de 20 kg ! 4 000 francs, c’est exactement la sommeperdue par Edgar Marc, le jeune héros de la pièce de Victor Hugo,Mille francs derécompense.Saufqueces4000francssontenbilletsetqu’ilscirculentévidemmentauseindelahautefinance,del’élitenégocianteparisienne–c’estd’ailleursleuréchappéedececircuitbien régléquinoue ledrame.Est-ce seulement l’inexpériencequi explique lechoix de Léonard, ou bien son désir de voir et de montrer sa richesse, cette « napped’argentd’uneblancheuréclatante»dontilcouvrelatablefamiliale?

Enfin,toutenbas,ilyalamonnaiedecuivreetdebronze.C’estlamonnaiedespetitsachatsquotidiens, lamonnaiedupeuple,maisaussicelledont laqualité laisse leplusàdésirer. Car cette petite monnaie est disparate : on y trouve de vieux liards de cuivre,convertisparlacoutumeencentimes,des«sousdecloche»,cespiècesfrappéespendantlaRévolutionavec lebronzedes clochesdes églisesdevenues«biensnationaux»,des«doublesdécimes»depoidsetd’apparencevariables.De1792à1852,unetrentainederéformessontenvisagéesouréaliséessansrégler leproblème.C’estque lamonnaiedespauvres coûte aux riches ! En effet, qui paye les impôts nécessaires pour financer larefonte ? Les riches. Qui vote le budget ? Les représentants des riches, en raison dusuffragecensitaire.C’estdonclegouvernementpopulistedeNapoléonIIIquimèneàbiencetterefonteetmetfinauxpénuriesrécurrentesdepetitesmonnaiesetauxrécriminationsconstantesdontleschambresdecommercesefontl’écho.

L’idéal unificateur de laRévolution semble alors bien près d’être réalisé. Les petitesmonnaies sont entièrement décimalisées et intégrées dans le système de poids et demesures:lapiècede1centimepèse1gramme,cellede10centimesenpèse10,etc.Puis,danslesannées1860,unevagued’ordéferlesurlaFrance:lenapoléon,cepetitsoleildelarichesse,estfrappéenquantitéinouïeets’accumuledanslesbasdelaine.Enfin,àpartirde1870,lebilletdebanque,dontlamoindrecoupureavaitétéréduitepardegréde500francs à 50 francs entre 1846 et 1864, connaît une rapide et profonde diffusion : lescoupures de 25 francs, 20 francs, 10 francs et surtout 5 francs viennent remplacer lespiècesdemétalprécieuxquisecachentpendantlaguerrefranco-prussienne.Vers1873,lesystèmemonétaire français semblepresqueunifié : tous les instrumentspeuvent figurerdanstouteslespoches.

N’yaurait-ilplusunargentdesrichesetunargentdespauvres?C’estcomptersanslaBourse, les titresfinanciersetsurtout lamonnaiedebanque,quiprendsonessoràcettemêmeépoque :dans la théorieéconomique, lamonnaiehomogénéise,maiscommetout

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phénomènesocial,elledistingueaussi…

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ARTICLESDIVERS

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LACOUVERTUREDESCATASTROPHESNATURELLESETNUCLÉAIRES:UNESOURCED’INSPIRATIONPOURL’ASSURANCE

DESDÉPÔTSBANCAIRES

GEOFFROYENJOLRAS*1

MATHIEUGATUMEL**2

PHILIPPEMADIÈS***3

OLLIVIERTARAMASCO****4

Les questions liées à la couverture des risques bancaires, et principalement celle desrisques encourus par les déposants, se posent toujours avec la même acuité quand lesecteurbancaireest en situationdecriseetquedesbanquesconnaissentou simplementfrôlentlafaillite.

Unsystèmed’assurancedesdépôtsatroisobjectifs.Lepremierobjectifviseàfairefaceàl’asymétried’informationexistantentredéposantsetbanquescarlesdéposantsn’ontpaslesmoyensd’évaluerlastratégieetlesrisquesinduitsdesbanques.Ledeuxièmeobjectifest d’éviter la « course au guichet » (Diamond et Dybvig, 1983) qui peut conduire unétablissementàlafailliteenraisond’uneliquidationtroprapidedesesactifs.Letroisièmeobjectif, majeur, est d’empêcher qu’une faillite individuelle ne se transmette à tout lesecteur bancaire en raison de la perte de confiance des déposants et qu’un risqueindividuelnedevienne systémique.C’est cette«paniquebancaire»qui a été évitéedejustesse lorsde ladernièrecrise,grâceà l’interventionmassivedesbanquescentralesetdesgouvernements.

Même si assurer les dépôts bancaires semble nécessaire pour limiter les crisesfinancières, les chercheursont relevédeuxpossibles effetsperversd’un tel système.Lepremier, souligné par Hazlett (1997), est qu’une trop forte couverture des dépôts rendinutile toute vigilance des clients vis-à-vis de leur banque. Le second est que si latarification des primes est identique pour toutes les banques, ces dernières vont êtreincitées à effectuer des investissements trop risqués dans lamesure où le coût de leursfinancementsendépôtsn’enserapasaffecté(Kane,1990;Flood,1993;Demirguc-Kuntet Detragiache, 2002). Ces constats ont conduit certains chercheurs à proposer destarificationsactuariellesdel’assurancedesdépôts(Merton,1977;RonnetVerma,1986;KerfridenetRochet,1993)etenontconduitd’autresàs’intéresseràl’organisationetàlaréglementationdecesystèmed’assurance(Buseretal.,1981;KimetSantomero,1988;CouppeyetMadiès,1997).

Cependant,troisgrandesquestionsnesontpasencoreentièrementrésolues.

(1)Peut-onévaluerlerisqueassociéauxdépôts?

Cette évaluation suppose non seulement de pouvoir déterminer la probabilité de laperte, mais aussi le montant de cette perte, en tenant compte à la fois du caractèresystémiquepossibledecerisqueetducoûtd’interventionéventueldesbanquescentralesetdesÉtats.

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(2)Peut-oncouvrirlerisquededépôts?

Il convient de s’attacher à discuter des conditions éventuelles d’assurabilité ou detransfert sur lemarchédu risque associé auxdépôts, en complément d’une interventionpubliqueadhocoudelamiseenplacedefondsderéserve.

(3)Quelleorganisationgénéraledoitêtremiseenœuvrepourprotégerlesdéposants?

Siellepeut s’appuyer surdesmécanismesassurantiels et financiers, la couverturedurisque de dépôts ne saurait s’affranchir de considérations organisationnelles danslesquelles toutes les parties prenantes, au premier rang desquelles les pouvoirs publics,doiventjouerunrôlemajeur.

Pourtenterd’apporterunéclairagenouveauàcesquestionsdelaplushauteimportancepourlagestiondurisquebancaire,nousprocédonsàuneanalogieentrecetypederisquesetlesrisquesmajeursquesontlescatastrophesnaturellesetnucléaires,phénomènesrares,imprévisibles et de très grande ampleur. Jusqu’à présent, chaque type de catastrophes(naturelle, nucléaire ou bancaire) a été traité de façon séparée, avec des instrumentspropres. Or des similitudes apparaissent, tant du point de vue des causes que desconséquencesdecesphénomènes.Dèslors,ilapparaîtpertinentdes’attacheràvérifiersilessolutionsapportéesenassuranceetenfinancepourcouvrirlescatastrophesd’originenaturelle ou humaine peuvent être mobilisées pour améliorer l’assurance du risque dedépôts. Évidemment, ces solutions ne sont pas elles-mêmes exemptes d’imperfections,maispeuventtoutdemêmeservirdesourcesd’inspiration.

Notrearticleestorganisécommesuit:unepremièrepartieanalyseralefonctionnementactueldusystèmed’assurancedesdépôts;unedeuxièmepartiedétermineralesdifférentescaractéristiquesdurisquededépôts ;enfin,grâceà l’expériencetiréedel’assurancedesrisques catastrophiques, nous définirons et discuterons dans une troisième partie lescontoursd’uneorganisationsatisfaisantedelagarantiedesdépôts.

FORMESORGANISATIONNELLESDESSYSTÈMESACTUELSDEGARANTIEDESDÉPÔTSBANCAIRESTendancesmondialesenmatièredesystèmesdegarantiedesdépôts:uneconvergence

versunmodèleunique

Selon l’International Association of Deposit Insurers (IADI), cent onze pays ontactuellement adopté un système explicite et obligatoire d’assurance des dépôts contredouze au début des années 1970. Pour autant, les systèmes implicites, volontaires,financéspardesappelsdefondsexpostsontenvoiededisparition.Ilconvientenoutredenoterquelemodèled’assurancepurementprivéen’existepas.

Lesystèmeexplicitedegarantiedesdépôtsestcaractérisépardeuxélémentsclés:

–sonfinancementestàlachargedesbanquesetdel’Étatdans63%descasetprendlaformedecotisationsverséesrégulièrementaufondsdegarantiepour85%despays.Lesménagesetlesentreprisessontavanttoutcouverts(avecuneindemnisationplafonnée),lesdépôtsinterbancairesétantassurésseulementdans18%despays;

– sa tarification tend à être actuarielle, c’est-à-dire dépendante du risque sous-jacent,

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même si à l’heure actuelle, seulement 25% des pays proposent des primes ajustées aurisque(essentiellementlespaysdéveloppés).

Le cas français illustre bien l’évolution qui vient d’être décrite. Historiquement, lepremier systèmed’assurancedesdépôtsaétémisenplacedemanièrevolontairepar laprofessionbancaire.Cesystèmedevientformellorsquele«mécanismedesolidarité»estcrééparunrèglementde l’Associationfrançaisedesbanques(AFB) le14 janvier1980.Jusqu’en 1995 (mise en conformité avec la directive européenne demai 1994), l’AFBs’engageait à intervenir dans certains cas et sous certaines conditions : plafondd’indemnisationde400000francs(article6),couverturedessinistresdansunelimitede200MFparan,avec lapossibilitéde faireappelauxcotisationsnonappeléesdesdeuxannées antérieures et à venir (article 3), etc. Comme le note Gavalda (1995), « l’AFBn’étaitpastenuededéclencheruneindemnisationàchaquedéfaillance(…).Ilenrésulteque cemécanisme était abandonné à sa propre appréciation ». Pour se conformer à ladirective européenne de mai 1994, il est devenu obligatoire. En ce qui concerne lesbanques mutualistes et coopératives, l’affiliation à un organe central leur a longtempsévité la mise en place explicite d’une garantie des dépôts dans la mesure où l’organecentral est chargé par la loi de veiller, en toutes circonstances, à la liquidité et à lasolvabilitédescaissesquiluisontrattachées.

Finalement, ce système dual de garantie (banques dites « AFB versus banquesmutualistes et coopératives », toutes regroupées d’ailleurs dans la Fédération bancairefrançaise–FBF–depuis2000)adisparuà lasuitede la loin°99-532du25juin1999relative à l’épargne et à la sécurité financière, qui a donné naissance à un système degarantie unique pour l’ensemble des établissements de crédit agréés. Il est devenu leFonds de garantie des dépôts et de résolution (FGDR) depuis la loi n° 2013-672 du26juillet2013deséparationetderégulationdesactivitésbancaires.Héritagedusystèmedegarantieprofessionnelmisenplaceparl’AFB,lesbanquesfrançaisessontenrevancheplusimpliquéesqu’auxÉtats-Unisdanslagestiondel’organismedegarantie:lefondsestune personne morale de droit privé où les pouvoirs sont répartis entre un conseil desurveillanceetundirectoireuniquementcomposésdereprésentantsdesétablissementsdecrédit.

Lerisquededéfaillancebancaire:leseulchoixdelacouverture?

Exposés à des risques bancaires de grande ampleur, de nombreux pays ont mis enœuvredesmécanismesdecouverturedesdépôts.Cechoixn’estpasévidentaupremierabordcarplusieursstratégiessontenthéoriemobilisablesfaceàunrisquededéfaillancebancaire:

– couvrir totalement le risque, ce qui semble difficile dans ce cas en raison de sapossiblenaturesystémique.Leprincipemonétaired’unmécanismedecouverturelerendeneffetpeurésistantàuneffondrementdusystèmebancaire;

– rester totalement exposé au risque soit parce qu’il est supportable, soit, par défaut,parcequ’onnesaitpas lecouvrir.Pour lamêmeraisonqueprécédemment, lapremièreoption n’apparaît pas réaliste, tandis que la seconde option pose la question de la

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constructiond’unsystèmedecouverturedédié;

– réduire le risque suppose d’agir sur ses origines, notamment par l’intermédiaire demesuresdeprévention.C’estlerôledelaréglementationprudentielledesbanquesquifaitl’objetd’uneharmonisationeuropéenne(directives)etinternationaleautraversduComitédeBâle;

–transférerlerisqueàuntiersgrâceàunsystèmedemutualisationparassurance.Cettepratiqueposecependantdesquestionsliéesàl’assurabilitéeffectivedurisqueassociéauxdépôtsbancairespourquelesystèmerestesoutenable.

Del’assurabilitéeffectivedurisquededépôtsbancaires

Pourcoutumierqu’ilsoitdanslespaysdéveloppés,lechoixd’assurerunrisque,ettoutparticulièrementunrisqueaussicomplexequeceluidesdépôtsbancaires,poseuncertainnombre de problèmes dont le premier est la définition du risque à couvrir (probabilitéd’occurrenceetconséquences).Unrisqueassurableestpardéfinitionunrisqueidentifiéetmesurable, de sorte qu’une mutualisation entre assurés soit possible (Kast et Lapied,2006). Ce risque doit également être indépendant et homogène entre les assurés : lethéorème de la limite centrale postule alors que la charge totale des primes et desindemnitéssupportéesparlesassuréstendversuneloinormale,cequioffreunemesuredu risqueauxpropriétés statistiquesappréciables. Indépendammentdece résultat, la loidesgrandsnombresgarantituncalcultrèsprécisdelaprimed’assuranceàmesurequelenombre des assurés croît. Il convient alors de vérifier que l’étendue de la couvertureproposéeestenrapportavecleniveaudesprimesdesortequ’unecommercialisationsoitréaliste.

Àpartirdecescritèresdebase,uneanalysesommairedurisquededéfaillancebancairefait apparaître un nombre potentiellement élevé d’assurés, que le risque soit traité auniveaudesclientsoudesétablissementsfinancierseux-mêmes.Lesmontantsdesdépôtssont également suivis de sorte que l’inconnue principale porte sur la probabilitéd’occurrence du risque et de sa propagation. Une distinction entre petits et grandsévénements semble pertinente dans le cas des dépôts bancaires. Les petits événementscirconscrits à un établissement apparaissent gérables par le système bancaire dans sonensemble.Cependant,lesgrandsévénementsposent,outredesproblèmesd’évaluation,laquestiondelagestiondescontagions,préjudiciablesàl’ensembledusystème.Enoutre,àsupposer qu’une couverture de type assurantiel soit envisageable, même de façonimparfaite(parexemple,aumoyend’unelimitationdesgarantiesoffertes),ilconvientaufinal de vérifier si un marché d’assurance des dépôts peut fonctionner en situationd’asymétried’information(RothschildetStiglitz,1976).

L’ensembledecesconsidérationsnousconduitdans lapartiesuivanteàeffectueruneanalogie entre le risque de dépôts bancaires et les grands risques.Nous illustrons notreproposaveclecasfrançais.

ANALOGIEDURISQUEDEDÉPÔTSBANCAIRESAVECLESGRANDSRISQUESÉtudedurisquededépôtsbancairesenFrance

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Illustratif des systèmesd’assurancedesdépôts auniveaumondial, lemodèle françaisprend la forme d’une assurance des dépôts publique financée par les banques (et nondirectement par les déposants) au moyen de primes ajustées au risque (fonction dumontantdesdépôtscollectésetdelaprobabilitédedéfaillancedelabanque).Ilexisteunplafonnementàl’indemnisation(100000eurosparclientetparbanque,surlesdépôtsetles titres) de telle sorte qu’un déposantmoyen est entièrement couvert. En pratique, leFGDR ne dispose pourtant que de 5 Md€ de réserves (dont 2 Md€ immédiatementdisponibles)pourassurer1600Md€dedépôts.Lesystèmedegarantienepeutdoncenthéoriecouvrirquedesrisquesdefaibleampleurcommelafaillitedepetitesbanques;ilapparaîtinefficaceàcouvrirlesplusimportants.

Depuis1999, lagarantiedesdépôtsestgéréepar leFGDR.Cetorganismeagità titrecuratif,maisilpeuteffectuerdesinterventionspréventivesafindelimiterlesdommages.Depuis1976,lesystèmedegarantiedesdépôtsaétémobiliséunevingtainedefoispourunmontantindemnisémoyende14,50M€(Madiès,2002).

Àces«petits»événements,ilconvientd’ajouterlesdeux«grandes»faillites.CelleduCrédit lyonnais,en1991,auracoûté14,7Md€à l’État françaisselonuneestimationduministère françaisde l’Économieen2013.La faillitedeDexia, survenueen2011,aétéévaluée à la fin de 2012 par laCour des comptes à 6,6Md€dus aux entités publiquesfrançaises. Gérée progressivement et avec une visibilité réduite de par les risquesencourus, cette faillite démontre le caractère limité de la prise en charge du risque dedéfaillancebancaire.En cela, les risques bancairesmajeurs semblent s’apparenter à desgrandsrisques,cequijustifieànouveauuneétudeparanalogie.

Analogiedesrisquesdedépôtsbancairesaveclesgrandsrisques

De façon générale, les grands risques, ou catastrophes, se caractérisent par desévénementsrares,associésàdespertesdegrandeampleuretcorréléesentreelles(Ferrari,2011). Leur survenance génère de lourdes pertes affectant directement les sociétés(individus, entreprises,gouvernements) etpar répercussion les institutions financières etlesÉtats.

Les occurrences des grands risques recouvrent une variété d’événementscatastrophiques, qu’ils soient naturels ou industriels (en excluant volontairement lesconflitsarmés),chacunprésentantdesurcroîtdescaractéristiquespropres.Ens’appuyantsur les risquesmajeurs recensés au cours du siècle dernier (Eshghi etLarson, 2008), leschéma1proposeuneapprochecroisant raretéde l’événement (supposémajeurdanssacatégorie)etimpactfinancierpotentiel.

Schéma1

Comparaisondurisquededépôtsbancairesavecd’autresrisquessuivantlagrilledelecturefréquence/impact

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Source:d’aprèslesauteurs.

Selonlalégislationfrançaise,unecatastrophenaturelleest«caractériséeparl’intensitéanormaled’unagentnaturel lorsque lesmesureshabituellesàprendrepourprévenircesdommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prises ». Le risqued’origine naturelle présentant le plus d’impact potentiel est la chute d’un astéroïde.Unobjetd’undiamètredeplusieurskilomètrespourraitanéantir toutevieensurfaceetcelaest déjà arrivé. D’autres risques plus communs comme les phénomènes telluriques(volcanisme, séismes) ou les phénomènes atmosphériques (cyclones, inondations) sontaussidenatureàprovoquerdesdégâtsconséquents.

À ces risques naturels s’ajoutent des risques technologiques.De tous les événementspossibles,ladéfaillancemajeured’unecentralenucléaireconstituel’aléaleplusimportantenraisondel’ampleurimmédiatedesdommages,deleureffetcontagieuxetdeleurtrèsgrandepermanencedans le temps.Les troisplus importantsaccidentsnucléairesconnussontceuxdeThreeMile Island (1979),Tchernobyl (1986)etFukushima (2011).Diversaccidentsindustrielsliésàl’explosiond’usineschimiquesoularupturedebarragessontàprendreencompte,maisleurscaractéristiqueslesrapprochentdavantagedescatastrophesnaturellesprécédemmentévoquées.

Notreétudeseproposederapprocherlescatastrophesnaturellesoutechnologiquesdurisque de défaillance bancaire. Le tableau 1 compare le risque de dépôts avec lescatastrophesnaturellesetnucléairessuivantuneapprochemulticritères.Ilressortquecesrisques partagent un grand nombre de caractéristiques : une étendue des pertes élevéeassociéeàuneprobabilitédesurvenancerareetàdeseffetsderuée.

Tableau1

Comparaisondurisquededépôtsbancairesavecdesgrandsrisques

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Source:d’aprèslesauteurs.

Quelquesoitlerisqueconsidéré,sonampleurpeutêtreaggravéepardesphénomènesdemasse.Lamédiatisationd’unrisquebancaireconduitàunepertedeconfiancequisetraduitparune ruéeauxguichets.Outre l’agitationsociale,cephénomènese traduitparune fermeture des établissements bancaires qui ne sont pas enmesure de répondre à lademandedesclients.Cettesituationelle-mêmecontribueàentretenirladéfiancevis-à-visdu système bancaire. Toutes proportions gardées, ce phénomène se rapproche desmouvements de masse constatés lorsqu’un risque naturel ou nucléaire est avéré. Sitôtconnue,l’occurrenced’unrisquesetraduitpardesmouvementsimportantsdepopulationalorsmêmequelesréseauxvitaux,notammentlescommunications,saturentrapidement.Ce faisant, les conséquences du risque sont aggravées : persistance de populations enzonesàrisque,accèslimitédessecourssurleszonesd’intervention,etc.Cesphénomènessontprévisibles,maispeuventdifficilementêtreanticipés,d’oùl’importancedecanaliserles flux comme l’ontprévu les autoritésdeNaplesqui ont construit un système radiantd’autoroutesautourduVésuveafindefaciliterlesévacuationsencasd’éruptionsubite.Lerisquenucléairepartagecescaractéristiquesetajouteunrisqued’effondrementdusystèmeélectrique.Lafermeturebrutaledel’ensembledescentralesnucléairesauJaponaprèslacatastrophe de Fukushima a conduit à des coupures d’électricité qui, à l’instar desfermeturesd’établissementsbancaires,fragilisentl’économie.

Analogiedelagestiondesdépôtsbancairesaveclagestiondesgrandsrisques

La gestion des catastrophes naturelles ou nucléaires bénéficie d’une attentionparticulière qui a justifié lamise en place de systèmes de couverture spécifiques. Leurétude est de nature à offrir des éléments permettant d’optimiser la gestion du risque de

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dépôtsbancaires.

Lesystèmedecouverturedes risquesnaturelsdiffèred’unpaysà l’autre.Lesystèmefrançaisimpliquetouteslespartiesprenantes,desassurésaugouvernementenpassantparlesassureurset les réassureurs.Seulunétatdecatastrophenaturelle,constatépararrêtéinterministériel,ouvre lesdroitsà indemnisationpour leshabitantset lesentreprisesdescommunesconcernées.Lesassureursontalorspourrôledegérerlesaspectsfinanciersdescatastrophes avec leur client. En contrepartie, tout contrat d’assurance prévoitobligatoirementdessurprimesde6%et12%afférentesauxgarantiesdesvéhiculesetdeshabitationscontrelesrisquesnaturels.Lesassureurssontprotégésàleurtourparl’Étatquioffreunegarantiepubliqueparl’intermédiairedelaCaissecentralederéassurance(CCR)auprès de laquelle les assureurs peuvent se réassurer. Cette garantie publique a étéinstauréeen1993etconfirméepar leConseild’Étaten2013.Si laCCRnedisposepasdesprovisionsnécessaires, l’État intervientendernierrecours,commelorsdestempêtesde 1999 (Bentoglio et Betbèze, 2005). L’État joue ainsi un rôle d’assureur en dernierressortsilescapacitésfinancièresdesassureursetdelaCCRserévèlentdépasséesparunévénement.Lesystèmes’apparentedès lorsàunepyramidequivoitmonterdesfluxdeprimesdesassurésversl’Étatetdescendredesfluxd’indemnitésdel’Étatverslesassurés(cf.schéma2infra).

Schéma2

FonctionnementfinancierdusystèmeCatNat

Source:d’aprèslesauteurs.

L’efficacité du système de couverture des catastrophes naturelles est discutable pourplusieurs raisons. Il convient tout d’abord de noter qu’en France, l’assurance des biens

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n’estpas,saufexception,obligatoire,desortequeseuleslespersonneset lesentreprisesassurées pour des risques courants sont protégées contre les catastrophes naturelles.L’indemnisation des autres dommages relève d’une aide publique exceptionnelle. Lesassureurs,quantàeux,nepeuventpasdiscriminerlesassurésenraisondeleurexpositionaux risques naturels. Au final, c’est l’État qui supporte le risque résiduel lié auxcatastrophes avec un engagement qui peut potentiellementmettre en péril son équilibrebudgétaire(Borenszteinetal.,2009).Lerisqueestd’autantplusavéréqu’unetendanceàla recrudescence d’un certain nombre d’événements catastrophiques est caractérisée parles réassureurs (Munich Re, 2014). À cela s’ajoutent une lenteur des procéduresd’indemnisation5 et une nécessité d’améliorer la prévention, de sorte qu’il est projetédepuisdenombreusesannéesderéformerlerégimedegestiondescatastrophesnaturelles.Lespistesenvisagéesportentsurunemodulationdutauxdeprimeenfonctiondumontantassuré (voire de la localisation), sur la fixation précise des périls assurés (nature etintensité)ainsiquesurlerenforcementdelaprévention.

Les risques technologiques ne relèvent pas du même régime que les catastrophesnaturelles. En particulier, les risques nucléaires font l’objet d’un système spécifique.L’exploitationciviledelapuissancenucléaireaconduitlesÉtatsconcernésàadopterlesconventionsdeParis(OCDE,1960,réviséeen2004)etdeVienne(ONU,1963,réviséeen1997)afinderéglerparanticipationlaquestiondesresponsabilitésetdesindemnisations.Les différentes conventions sont régulièrement révisées afin d’inclure de nouveauxaspects:àlapriseencomptedesdommagesimmédiatsauxbiensetauxpersonnessontdésormais ajoutées la prise en compte des dommages immatériels et la restauration del’environnementàpluslongterme.Encasdedéfaillances, l’exploitantdelacentraleestconsidéré comme pleinement responsable, mais cette responsabilité connaît des limitesfinancières et temporelles, de sorte qu’une assurance des exploitants peut voir le jour6.Compte tenu des dernièresmises à jour opérées, la responsabilité financière en cas decatastrophesestplafonnéeà1,5Md€dontunepremièretranchede700M€estassurableauprès d’assureurs (ces derniers se regroupent dans lepoolAssuratomepour répartir lerisque).Deuxautrestranchesconcernentsuccessivementl’Étatoùsetrouventlacentraleet le pool d’États membres signataires des conventions (Tetley, 2006). Ces montantspourraient convenir à l’indemnisation de petits incidents,mais ils laissent non réglée laquestiondesaccidentsmajeursgénérantdespertesdel’ordredeplusieursdizaines,voirecentaines,demilliardsd’euros(cf.schéma3).Danscecas,c’estàl’Étatoùestimplantéelacentralequ’ilrevientdeproposerunecompensationpourlespertesoccasionnées.Cettegarantied’unmontantnonmesurablepeutêtreconsidéréecommeimplicite.Elleestsanscoûtdirectpourlesdifférentesparties,notammentlesexploitants,desortequ’ellereposesurunfinancementparl’impôt.

Schéma3

Fonctionnementfinancierdusystèmed’assurancenucléaire

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Source:d’aprèslesauteurs.

Le tableau 2 (ci-contre) compare de façon synthétique les différents systèmesd’assurancedesdépôts,descatastrophesnaturellesetdunucléairesurlabasedescritèresétudiés. Ilmetenévidenceuncertainnombredepointscommunsentre lessystèmesdecouverture des grands risques, quelle que soit leur nature. Comme tous les risquesd’origineanthropique, laresponsabilité incombeàceluiquigénèrelerisque,quecesoitune banque ou un exploitant de centrale nucléaire. Cette responsabilité est par ailleursdéfinie au moyen d’accords internationaux afin de favoriser la résolution des litigespotentiellement de très grande ampleur. De plus, afin de limiter les asymétriesd’information, l’assurancedu responsable potentiel des sinistres est obligatoire.Dans lecas du risque bancaire, l’assurance est particulière puisque les assurés sont les clients,maisqu’ilsnecotisentpasdirectementpourobtenirunegarantiesurleursdépôts.

La mutualisation des risques s’effectue au niveau national qui constitue l’échelle deréférence.Cependant, des contraintesprudentielles internationalespèsent sur les acteurs(Bâle III pour les banques et Solvency II pour les assureurs). En raison de la naturesystématiquedurisquededépôtsbancaires, iln’existeaucunsystèmederéassurance,nide transfert de ce risque aux marchés financiers. Cette limitation majeure contraintfortement le système d’assurance et justifie pleinement l’intervention de la puissancepublique. S’agissant de risques majeurs, l’État apporte une garantie plus ou moinsexplicite.Lecoûtdelacouverturedanslespiresscénariosdepertesestdèslorssupportéparlecontribuableetnonplusparl’assuré.

Tableau2

Comparaisondelacouverturedurisquededépôtsbancaires

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aveclacouverturedesgrandsrisques

Source:d’aprèslesauteurs.

Lamiseenévidencedesdifférentspointsdecomparaisonévoquésprécédemmentnousamèneàproposerdespréconisationspouraméliorer lacouverturedes risquesde faillitebancaire.

PRÉCONISATIONSPOURLACOUVERTUREDESRISQUESDEDÉFAILLANCEBANCAIRE

Nousabordonsdanscettepartie lamanièred’améliorer lesystèmedegarantieactuel,lesmodalités demise en place d’une gouvernance globale des risques et les façons detariferlacouverturedanscesystèmeélargi.

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Correctiondespointsfaiblesdusystèmeactuel

Lesprincipauxpointsfaiblesdusystèmepeuventêtrerésumésainsi.

(1)Ladéresponsabilisationdesclientsdesbanquesquinepayentniprimed’assurancedirectementpourlacouverturedespetitsrisques,nideparticipationpourlacouverturedesrisquesmajeurs.Unesolutionimmédiatepeutconsisteràrendreobligatoirel’«affichage»explicitedelaprimed’assuranceeffectivementpayéeparledéposant–surlemodèledesCatNat –, ou à contraindre le déposant à s’assurer pour le risque pesant sur ses avoirs,dans lecadred’unedémarchevolontaire,auprèsdesabanqueoud’unautreorganisme.Cettedémarcheconstitueraitunchangementdeparadigmedanslacouverturedesrisquesbancaires.

(2) L’assurance obligatoire des banques neutralise tout effet d’antisélection, puisqueleurparticipationauxsystèmesdegarantieestobligatoire.Cependant, tout risqued’aléamoralnepeut être excludans le respectdesnormesprudentielles existantes. Il apparaîtdonc nécessaire de surveiller de façon plus prégnante et plus régulière (monitoring) lerisquededéfaut,parapplicationrapidede la réglementationprudentielledesaccordsdeBâleIII.

(3) La mutualisation au niveau d’un pool bancaire national suffit pour des risquesmoyens, mais elle apparaît insuffisante en cas de risquemajeur. Or la réassurance desrisques de dépôts n’existe pas formellement à un niveau européen ou mondial. Si unemutualisation des risques à ce dernier niveau permettait d’augmenter immédiatement lemontant des risques assimilables, une telle solution pourrait être accompagnée del’introduction d’une dose de réassurance sur lemodèle de FannieMae et FreddieMacpourlescréditshypothécairesauxÉtats-Unis.

(4) Le seul recours auxmarchés financiers pour traiter les problèmes de défaillancebancaire apparaît précaire étantdonné le caractère systémiquedu risquededépôtspourdes établissements mondialisés. Cet aspect n’autorise pas un traitement définitif duproblème,àmoinsdesanctuariserdesfondsréservésauxsituationsdecrise.

(5)L’engagement desÉtats en cas de risquemajeur est total. Il sematérialise par lepaiementd’aucuneprimed’assurancespécifique,d’oùun risquededéresponsabilisationdes établissements financiers. Il semble donc nécessaire de revisiter la structured’intervention en cas de crise systémique en mobilisant graduellement les États, lesalliances continentales comme l’Union européenne et les institutions internationalesreconnuescommeleFondsmonétaireinternational(FMI).

Le tableau 3 synthétise les points faibles du système actuel, ainsi que les solutionsenvisageablespermettantd’yfaireface.

Tableau3

Faiblessesdessystèmesactuelsdecouverture

desdépôtsbancairesetremèdespossibles

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Source:d’aprèslesauteurs.

Ces points faibles justifient la logique adoptée dans le cadre du Mécanisme derésolutionuniquequiaétédécidéauniveaueuropéen.Celui-ciprévoituneparticipationplusactivedescréanciersprivés(bailin),comprenantaussi lesdéposantssur leurpartienonassurée,etdelaprofessionbancaireauplandesauvetageafind’épargnerlesdenierspublics (bail out). Ainsi, un fonds de résolution, abondé par les banques, devra êtreconstituéenhuitans.Sonmontants’élèveà55Md€,maisdès la troisièmeannéedesaconstitution,en2018,ildevradisposerdéjàde70%decemontant.Enfait,cefondsserad’abord«compartimenté»,c’est-à-direquechaquepartieseraalimentéeparlesbanquesd’unÉtatetnepermettraderenflouerquelesbanquesdecetÉtat.Maiscescompartimentsdisparaîtrontprogressivementpouraboutiràunfondsuniqueauboutdehuitans,seulàmêmedepermettreunevraiemutualisationdurisqueauniveaueuropéen.

Gouvernanceglobaledurisquededépôtsbancaires

Lagestiondurisquededépôtsbancairess’inscritdansunprocessusorganisationnelàplusieursétages : (1)auniveaudesdéposantsde labanque, (2)auniveaude labanqueelle-même et du secteur bancaire à un niveau national ou régional (européen) et (3) auniveau national et international en matière de réglementation, de supervision etd’interventionpréventive(Unionbancaireeuropéenne,FMI).

Auniveaudesdéposants

Pourlesraisonsdéjàévoquées,seuls lesdéposants lesplusaviséspeuventadopteruncomportementpréventifenchoisissantavecprécaution leurbanque,endiversifiant leursinvestissementsdansd’autresactifsquelesdépôtsbancaires,maisaussienrecourantàdesdépôtsdansplusieursétablissements.Demanièregénérale,ils’agitpourlesdéposantsdemettreenœuvredesmesuresdeprévoyanceoud’autoprotection.Une solutionexpliciteconsisteraitenlamiseenœuvred’unfondsderéservepublicfinancéparunetaxesurlesdépôts et donc acquittée par les déposants eux-mêmes. Dans ce cas, cette solution deprévoyancedoitêtreprévueetrendueobligatoireparlaloi.

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Auniveaudelabanqueetdusecteurbancaire

Lesbanques françaiseset européennes sont soumisesà la réglementationprudentiellede Bâle III, supposée réduire leur exposition au risque de défaillance. Ce cadreréglementairedevraitêtrecomplétépardesmesuresfinancièresencasdedéfautbancaire.Commepourlesépargnants,lamiseenplaced’unfondsderéservesemblelaplussimpleà mettre en œuvre. Ce fonds serait abondé par l’ensemble des banques, de façonobligatoire afin d’éviter tout risque d’antisélection. C’est justement ce que l’accordeuropéendemars2014surlarésolutiondescrisesbancairesprévoit.Lesbanquesdevrontconstituerdansundélaidehuitansunfondsde55Md€.Cemontantrestetoutdemêmefaiblecomparativementauxmontantsenjeuencasdecrisebancaireeuropéenne.

Dès lors, il apparaît nécessaire de discuter d’instruments permettant un « transfertalternatif de risques » grâce aux marchés financiers (Kunreuther, 1996). Une premièrealternativeconsisteàconcevoirdes instrumentsdérivés sur lemodèledescredit defaultswaps(CDS).Ilestégalementenvisageabledes’inspirerdesinstrumentscrééspourgérerles conséquences financières des catastrophes naturelles (Cummins, 2012). Ainsi, uneadaptation des titres catastrophes (cat bonds) au risque bancaire représente uneopportunitéd’accroître lacapacitéfinancièrederéponserapideencasdesinistre.Sur lemodèle d’une obligation, ces derniers bloquent pendant plusieurs années une sommed’argentquirapporteunintérêtbonifié.Encontrepartie,toutoupartiedelasommepeutêtre liquidée en cas de survenance d’un sinistre prédéfini pendant la période desouscription. Lemarché des cat bonds connaît un intérêt croissant et présente l’intérêtmajeurd’accroîtrelacouverturedesgrandsrisquesparunemeilleureallocationdurisqueentrelesacteursdumarchéfinancier(NelletRichter,2004).

La mise en place de ces différents instruments se heurte cependant à une limitemajeure:danslecasd’unrisquesystémique,lesmarchésfinancierssontfaillibles;ilsnesauraientdoncconstitueruneéchappatoireparfaitepourcouvrirlesrisquesdedéfaillancebancaire.Enconséquence,ilconvientdevérifierlasanctuarisationdesfondsréservésàlacouverturedesrisquesbancairesaumoyend’instrumentsdemarché.

Auniveaunationaletinternationalpourlasupervisionetlesauvetageparlapuissancepublique

Afin de répondre à la défaillance potentielle de certaines banques et, par voie deconséquence,decertainsmarchés,lesgouvernementsjouentunrôled’assureurendernierressort.Seposedèslorslaquestionduniveauoptimald’assurancedesrisquesbancaires,notammentauseindel’Unioneuropéenne.Àl’heureactuelle,c’estl’échelonnationalquiprévautencasdecrisealorsquelesecteurbancaireestconcentréetquenombred’acteurssont internationalisés (trente-neuf banques déclarées systémiques par le Conseil destabilitéfinancière).

Cependant, lesprocéduresdedéfinitionetdemiseenœuvredesnormesprudentielles(côté préventif) font l’objet d’une harmonisation internationale (Comité de Bâle) eteuropéenne(directives).Dèslors,ilconvientd’envisagerdesmécanismesdecouvertureàcettemêmeéchellesupranationale(côtécuratif).Ledébatactuelsur l’organisationde lagarantiedesdépôtss’opèreauniveaueuropéen:outrelesdiscussionssurlacréationd’un

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éventuel fonds européen, le MSU des plus grandes banques européennes (zone euroélargie)parlaBanquecentraleeuropéenne(BCE)devraitêtreeffectifenoctobre2014ets’étendrepeut-êtreàtermeàtouteslesbanqueseuropéennes(dumoinscellesdelazoneeuro).

Étantdonné lanaturedu risqueétudié, ilne faut sansdoutepasse limiterà l’échelleeuropéenne.Lacrisearenforcélerôledel’acteurglobalqu’estleFMIetilfaudraitsansdouteprévoiruneévolutiondesesmissions.Le financementdescatastrophesnaturellesfait appel de façon symétrique à la Banquemondiale, principalement pour les pays endéveloppement.Sur cemodèle, unegouvernance élargiedes risquesbancairespeut êtreenvisagée sous une forme pyramidale qui partagerait les risques ainsi que lesresponsabilitésentretouslesacteursconcernés,toutenfavorisantlarésiliencedusystèmebancaire(cf.schéma4infra).

Schéma4

Esquissed’unegouvernanceetd’unpartagedesrisquesrenforcés

Source:d’aprèslesauteurs.

Tarification

Lerisquededépôtsétantunrisqueliéàladéfaillanced’unebanque,laquestionestdesavoir si la couverture de ce risque, quel que soit le mécanisme retenu (fonds, titrescatastrophes, etc.), doit être financée uniquement par les banques. Les déposants et lapuissancepubliquefinancéepeuventêtreaussiimpliquésdanslamesureoùlespremiersbénéficient directement de la couverture assurantielle et que la seconde est la seule àposséderlasurfacefinancièrenécessaireencasdecrisesystémique.

En outre, il convient de définir le bon mode de tarification de cette assurance. Unscénariodebaseconsisteraitàinstaurerunniveaudeprimesuniquementproportionnelaumontantdesdépôts couverts.Si elleprésente l’avantagede la lisibilité, cettemesureneprendpasencompteleniveauderisquedechaquebanque(individualisationdurisque).

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Pouréviterlefameuxprincipede«privatisationdesgainsetsocialisationdespertes»,ilseraitpréférablequelesbanques(génératricesdurisque)soientenpremièrelignepourle financement, lequeldevraitêtreobligatoireafind’éviteruneffetd’antisélection.Pourautant, leprincipederéalité imposeque lachargedefinancement reste raisonnableafinquelesbanquespuissent lasupporter.Lefinancementpublic interviendraitalorsau-delàd’un certain seuil de pertes mettant en péril l’activité opérationnelle des institutionsfinancièresconcernées.

Danslesystèmedecouverturedescatastrophesnaturelles,lachargedespetitssinistresrevientauxassureurs,puisauxréassureursetenfinàl’État.Celui-ciintervientvialaCCR(assureur100%public)entantquegarantdusystèmeCatNat.Ilassureégalementunrôled’assureurendernierressort.Pourlerisquenucléaire,lesexploitantsprennentenchargelespetits sinistres,puis lesassureurs (dans lepoolAssuratome)etenfin l’Étatconcerné(voirelesÉtatssignatairesdel’accorddeParis)prennentlerelais.Unetellestratégiedecouvertureàplusieursétagesestdéjàà l’œuvredans lagestiondu risquebancaire.Elleimpliquelesdéposants, lesbanques(seulesouorganiséesenpool)etlesgouvernements(seulsouavecl’appuidesinstitutionsrégionaleset internationales).Cependant, laprimed’assurancedudéposantet la réassurancedesbanquesn’apparaissentpasexplicitement,cequiconstitueunepistederéflexionpourl’améliorationdusystèmeactuel.

CONCLUSIONCetarticleproposeuneréflexionoriginalesurlessystèmesdecouverturedesrisquesde

dépôts. Leur amélioration constitue en effet un enjeu majeur dans le cadre de lamodernisation de la gouvernance des systèmes bancaires. L’analyse desmécanismes degestion existants révèle des imperfections dans la structure de gouvernance des risquesainsi que des lacunes dans le traitement financier des crises. Les déposants bénéficientainsid’uneassurancesurleursdépôtspourlaquelleilsneversentaucuneprimeexplicite.Demême,lesÉtatsaccordentunegarantieimpliciteillimitéeauxbanquesdedépôtalorsque celles-ci ne sont tenues à aucun mécanisme de réassurance. L’étude descaractéristiques des risques bancaires enFrance révèle la survenance de défaillances defaibleampleur àdeuxexceptionsnotoires, leCrédit lyonnais etDexiaquiontnécessitéune très forte intervention publique. La concentration du secteur bancaire et la récentecrise financière ont mis en évidence la présence d’un risque systémique susceptibled’aggraveràl’avenirlespertes.

Pour cette raison, nous avons pris le parti de comparer les risques d’origine bancaireavec les risques catastrophiques d’origine naturelle ou humaine (nucléaire). Les pointscommunsentrecesdifférentsaléasapparaissentnombreux : raretéet imprévisibilitédesévénements,ampleurdesperteseteffetsdecontagion.Or,loind’êtremisenrelation,lesmodes de gestion et de couverture financière des catastrophes naturelles, nucléaires etbancairessontgénéralementtraitésséparément.Pourtant,ilsassocientchaqueacteuràlagestiondurisque(assurés,assureurs,réassureurs,pouvoirspublics)toutendéployantunelargegammedepratiquesetd’instruments(franchisesetplafonds,assurance,réassurance,fondsdeprécaution,garantiepubliqueendernierressort)susceptiblesd’atténuerlerisqueetsesconséquences.

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Àpartirdecettecomparaison,nousproposonsd’insérerlesmécanismesàl’œuvrepourlacouverturedesrisquesnaturelsetnucléairesdanslecadreambiantdelaréformedelacouverturedesrisquesdedépôts,tantsurunplanfinancierqu’organisationnel.Unelargegamme d’instruments peuvent être mobilisés qui vont des traditionnels fonds deprécaution (mobilisables à différentes échelles) à des produits de transfert alternatifs(CDS,catbonds).Pourêtreefficaceet répondreauxenjeuxd’uneéconomieglobalisée,cette combinaison d’instruments doit s’inscrire dans un cadre institutionnel élargiimpliquant non seulement les acteurs traditionnels du secteur bancaire (déposants,banques, pouvoirs publics), mais aussi les assureurs et les réassureurs, les marchésfinanciersetlesinstitutionsinternationales.Commel’échelledesplusgrandesbanquesestrégionale et mondiale, la gouvernance du secteur bancaire et la couverture des risquesbancairesdoiventl’êtreégalement.

Dans la mesure où la garantie des dépôts est un facteur important de stabilité dusystème bancaire international, il convient d’affiner plus précisément certains aspectstechniquessoulevésparnotreanalyse.Enparticulier,lelienentregouvernancebancaireetinstruments de couverture est essentiel pour assurer le renouveau de la couverture durisque de dépôts. Les instruments doivent être définis par rapport au risque encouru àchaqueniveauderesponsabilité.C’estdanscecadrequ’intervientlechoixd’unmodedetarification adapté au risque subi par chaque acteur.Cesdifférents enjeuxdoivent enfinêtreexaminésàl’aunedeleurportéesociétalecarcesontlescitoyens,entantqueclientsdesbanquesetdescontribuables,quisontaufinalconcernés.

Au-delà, cette question de la garantie des dépôts doit être pensée dans le cadre pluslarge d’un processus de gestion des crises bancaires et des procédures dites de«résolution».Seposentalorslesquestionsdesliensdevantexisterentrelesuperviseuretlefinanceurdelarésolution,etdelanécessaireresponsabilisationdusuperviseurdanssesmissionsdecontrôleetdesurveillance.

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LERÔLEETLEPOUVOIRDESAGENCESDENOTATIONONT-ILSCHANGÉAUFILDESACCORDSDEBÂLEI,BÂLEIIETBÂLE

III?JEAN-GUYDEGOS*1

OUSSAMABENHMIDEN**2

LeComitédeBâle,quiapubliélesaccordsBâleI,BâleIIetBâleIII,estuneinstitutioninternationalecrééeen1974parlesgouverneursdesbanquescentralesdugroupedesdixpays du G10, après la faillite de la banque allemande Herstatt qui a mis en évidencel’existencedurisquesystémique.PeterCooke,directeurdelaBanqued’Angleterre,avaitprisl’initiativedeproposerlacréationdececomité3etaétésonpremierprésident.Pourrenforcer la sécurité et la fiabilité du système financier international, pour établir desnormes minimales de contrôle prudentiel, pour vulgariser les meilleures pratiquesbancairesetpourélargirlacoopérationbancaireinternationale,leComitédeBâleabesoind’informationsetd’opinionsfiables.Lesfournisseursmondiauxnesontpaslégionsdanscedomaineet,toutnaturellement,lesexpertssesonttournés,danslecadredefonctionssupport,vers lesagencesdenotationfinancière.LesaccordsBâle IetBâle IIvisaientàgarantir un niveau minimum de capitaux propres dans les institutions financières, afind’assurerlasurviefinancièredesbanques.BâleIIIavaitplusd’ambition,aprèslafailliteretentissante de la banqueLehmanBrothers.Depuis 1996, les agences de notation sontofficiellement référencées dans les réglementations bancaires. Elles ont accompagné, etaccompagnentencore,lestravauxdesaccordsdeBâle.Cesaccordsdéterminantetfixantle capital réglementaire des entités font un large usage des notations4.Dans un universfinancier mouvant et instable, nous avons voulu analyser l’évolution du rôle et lamodificationdupouvoirdesprincipalesagencesdenotationimpliquéesexplicitementouimplicitementdanslesaccordsdeBâleIàBâleIIetàBâleIII.

LEHASARDETLANÉCESSITÉ:LESAGENCESDENOTATIONETLAMESUREQUANTITATIVEDELAQUALITÉDANSLESACCORDSDEBÂLE

Les principales agences de notation ont capitalisé plus d’un siècle d’expertise enmatièredefaillites,dedéfautsdepaiementetdelacunesfinancièresentousgenres,privésetpublics,surlescinqcontinents(DegosetBenHmiden,2011;Degosetal.,2010,2012et 2015). Les multiples connexions mondiales des systèmes bancaires ne peuvent plusfonctionnerauhasard,nepeuventplus induiredescrisesetdescatastrophesquel’onseborneraitàconstateraposterioridemanièrepassive.Lesdernièresdécenniesontrappeléqu’unsystèmefinancierestrobustelorsquedesvariationsmodestesduniveaudescash-flows, des taux de capitalisation ou des taux de crédit n’affectent pas notablementl’aptitudedes entreprises àpayer leursdettes financières.Maisun système financier estfaiblelorsquedefaiblesvariationsdesniveauxprécédentsmettentlesentitésfinancièresetnonfinancièresdansl’incapacitédepayer.Lessystèmesfinanciersdépendentaussidesconditionsextérieuresetlarobustesseoulafragilitéd’unsystèmefinancierestfocaliséesurplusieurséléments:lescaractéristiquesintrinsèquesdusystème,soncomportementen

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matièredecash-flow,lesconséquencesdelavariationducash-flowsurlafaçondontlesentités font face à leurs obligations financières. L’hypothèse d’instabilité financière(Minsky,1982et1986)postulequesurunepériodedeplusieursannéesconsécutivesdecroissance,lesrelationsdépendantducash-flowsubissentdesvariationstransformantunsystème initialement robuste en un système fragile. Pour apprécier les conditions depassaged’unsystèmerobusteetstableàunsystèmefragileetvulnérable,ilfautdisposerd’instrumentsdemesureetdepossibilitéd’arbitrageetdepolice.LatendancebiendécriteparMinskyestquelastabilitécréeunefaussesécuritéquiencouragelesspéculationsetquiabaisseleniveaudeprotectionetdegarantiecontrelescrisesfinancières.LeComitédeBâle,crééen1974,n’avaitpaslaprétentionderéglertouteslescrisespossibles,maisdepuis cette époque, il rassemble les banques centrales des plus grandes puissanceséconomiques. Les autorités prudentielles de ces puissances ont décidé d’instaurer unensemble de règles imposables aux banques afin de stabiliser le système bancaire. Cesaccords deBâle successifs visent à instaurer des normes internationales à respecter parchaqueétablissementfinancier,afind’éviterdescrisesdeplusenplusimportantes.Maissansinstrumentdemesurepertinent,cetteséried’accordsnepouvaitêtrequethéoriqueetinefficace. Les recommandations deBâle sont revues régulièrement pour devenir peu àpeudesobligationsqui concernent l’ensembledesbanques.DeBâle I àBâle II, puis àBâle III, les banques ont dû apprendre à respecter les contraintes imposées par laréglementationprudentielleafindenepasinduireprématurémentuneinstabilitéfinancièreredoutéequirevientdemanièrecyclique.

BâleIoulerôleimpliciteetnonindispensabledesagencesdenotation

Le Comité de Bâle a été créé par les gouverneurs des banques centrales duG10 en1974. Il avait pour objectif d’améliorer la stabilité du système bancaire international,garantdelastabilitédusystèmefinancierinternational,deplusenplusspéculatif,oùlesentités économiques et financières prudentes (hedge-finance unit au sens de Minsky),gérant efficacement leur trésorerie, devenaient plus rares que les unités de financesspéculatives, endettées et sensibles à la hausse des taux d’intérêt, ou que les unités dePonzi, financièrement déséquilibrées dans tous les cas et pour toutes les périodes.Initialement, il était indispensable de limiter le risque de faillite et il fallut analyser lerisquedecrédit.L’unedesfonctionsessentiellesdesbanquesestd’accorderducrédit.Sila banque, à la stratégie déficiente, subit des pertes sur les crédits accordés, ces pertesentraînent une perte substantielle de capital. Lorsque ses capitaux propres deviennentnégatifs, labanquenepeutsurvivrequ’enconsommantlecapitaldesesclientsetestenétatdefaillitevirtuelle.L’économiemondialenepeutpas fonctionneravecdesmodèlesrisquant à chaque instant des faillites virtuelles et l’une des possibilités, simple sinonsimpliste, estd’obliger chaquebanqueà avoirdes ressourcespropresqui luipermettentd’éviter le dépôt de bilan pendant une période et pour des montants définis. Il a falluquatorzeansauComitédeBâle,dontneufannéesdecalculexpérimentaldécidéesparleComitéconsultatifbancaire(1980-1988),pourquesestravauxdeviennentopérationnelseten1988,autermed’unepériodededéréglementationfinancièreoùlesbanquesonteuunecroissance chaotique et cancérogène, les autorités prudentielles ont ressenti la nécessitéd’encadreruneprofessionquipouvaitentraînerdesdésastresmondiauxirréversibles.Le

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premieraccord,BâleI,estunensemblederecommandationsdesbanquierscentrauxdespaysduG10,réunissousl’égidedelaBanquedesrèglementsinternationaux(BRI),pourgarantir un niveau minimum de capitaux propres, afin d’assurer la solidité financière.L’accorddeBâlede1988acentrésonanalysesurleratioCooke,dunomduprésidentduComitéalorsenfonction,quipréciseque le ratiodes fondspropres réglementairesd’unétablissement de crédit par rapport à l’ensemble de ses engagements ne peut pas êtreinférieur à 8%. Bâle I apportait des précisions sur les fonds réglementaires et sur lesengagementsdecrédit,sansdemanderàdesexpertstelsquelesagencesdenotationdelesauditeretdelescontrôler.Premièreétaped’unlongchemin,BâleInecontenaitquedesrecommandations,sommetoutemodérées.IlrevenaitàchaqueÉtatsouverain,membreounonduComité,etàchaqueautoritéderégulationdelestransposerendroitnationaletdelesfaireappliquer.Pour lespaysde l’Unioneuropéenne, l’accordBâleIaété transposédans leratiodesolvabilitéeuropéendéfinipar ladirective89/647/CEEdu18décembre19895. Dès janvier 1996, le Comité de Bâle a publié un amendement aux règles del’accordBâleIqui incluaitunepriseencomptedesrisquesdemarché(risquedebaissedes cours des titres financiers et hausse du taux d’intérêt des obligations). Et pour lapremière fois, le Comité de Bâle sur la supervision bancaire évoquait les agences denotation pour les emprunts qualifiés qui comprennent les titres de dettes émis par lesagents du secteur public et les banquesmultilatérales de développement, ceux qui sontnotésdebonnequalité(noteaumoinségaleàBaaparMoody’setBBBparStandard&Poor’s)paraumoinsdeuxagencesdenotationdésignéesparl’autoritédetutellenationale,ouceuxquisontnotésdebonnequalitéparuneagencedenotationdecatégorieaumoinségaleàtouteautreagencedenotationdésignéeparl’autoriténationale,sousréserved’unsuivi prudentiel ou sous réserve de l’approbation de l’autorité, ou ceux qui ne sont pasnotés, mais jugés de qualité comparable par la banque déclarante et à condition quel’émetteur en ait obtenu la cotation sur un marché organisé reconnu (Espagnac et deMontesquiou,2012).

Le recours systématique aux notations financières n’est apparu que dans les années1990 car jusque-là,Moody’s et S&Pétaient essentiellement présentes auxÉtats-Unis etn’avaient pas un développement international considérable. Comme le précisaientEspagnacetdeMontesquiou(2012):«PréalablementàlarévisionenvisagéedesaccordsdeBâle I, leComitédeBâle indiquaiten2000que lapresque totalitédespaysduG10ainsi que quelques pays hors G10 utilisaient les notations de crédit externes dans leurréglementation. Cette réglementation a été principalement établie sur le fondement desrèglesdeBâlesurlesrisquesdemarché.»

BâleIIoulareconnaissanceofficielleetinstitutionnaliséedesagencesdenotation

Année après année, l’instabilité monétaire s’est accrue, les banques et leursreprésentants sont devenus de plus en plus téméraires et l’approche par les risques aévolué.LeComitédeBâleproposed’abord,en2004,unsystèmepermettantd’évaluerlesrisques réels de manière plus réaliste. Il autorise les banques à déterminer leurs fondspropresréglementaires,soitavecunsystèmeinterned’évaluation,soitselonuneméthodedite«standard»,fondéesurlesnotationsémisespardesorganismesexternesd’évaluationdecrédit(OEEC),c’est-à-diredesagencesdenotationoudesorganismeséquivalents.En

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effet, lagrande faiblessedu ratioCooke,élémentcentraldeBâle I,est ladéfinitiondesengagementsdecréditprivilégiant lemontantducréditdistribué,maisnégligeant lefaitessentielquelerisquedecréditdépendplusdelaqualitédel’emprunteurquedumontantemprunté. Tirant les leçons de l’expérience, le Comité de Bâle a proposé en 2004 uneseconde version des accords qui définissent de manière plus pertinente la mesure ducrédit, tenant compte de la qualité de l’emprunteur. Cette qualité peut être déterminéeselon une méthode standard de notation financière, ou selon une méthode interneintrinsèquepourchaqueétablissement (internalrating-based).WilliamJ.McDonougharemplacé Peter Cooke et le nouveau ratio de solvabilité porte le nom du nouveauprésident, qui assure la promotion des trois piliers du nouvel accord : l’exigencerenouvelée d’un minimum de fonds propres (ratio McDonough), la procédure desurveillancedelagestiondesfondspropresetunedisciplinedumarchéplusimportantefondéesurunetransparenceplusgrandedanslacommunicationdesbanques.

Lerôledesagencesdenotationestreconnuetlégitimé,enparticulierparlacréationdessuperviseurs nationaux se reposant essentiellement, voire exclusivement, sur lesditesagences de notation (Levich et al., 2002). Les recommandations de Bâle II ont ététransposées en Europe par la directive du 14 juin 2006 sur les fonds propresréglementaires, entrée en application en 20086. Cette directive prévoit que lareconnaissanceOEECestaccordéeparlessuperviseursbancairesnationaux,cequiinduitinévitablementdesdivergences entre lespaysde l’Unioneuropéenne.Après l’entrée envigueur du règlement du 16 septembre 2009 sur les agences de notation, certainssuperviseurs considèrent désormais que toutes les agences de notation enregistrées etcertifiées dans l’Union européenne sont automatiquement classées OEEC. En France,conformémentàl’articleL511-44duCodemonétaireetfinancier,l’Autoritédecontrôleprudentieletderésolution(ACPR)7estchargéed’établirlalistedesOEECreconnus.Ellen’a pas exclusivement retenu les agences de notation enregistrées auprès de l’AutoritéeuropéennedesmarchésfinancierscarlalistefrançaisecomprendlaBanquedeFranceetla Coface, qui ne sont pas des agences de notation, et cinq agences sur les dix-septenregistrées sont reconnues OEEC : Fitch Ratings, Moody’s, Standard & Poor’s,DominionBondRatingService(Canada)etJapanCreditRatingAgency.LesaccordsdeBâle II utilisent les mesures du risque avant tout pour effectuer une pondération deséléments inscrits à l’actif du bilan des banques et pour déterminer le niveau quantitatifrequis par chacun de ces actifs. Le recours aux OEEC simplifie la procédure dans lamesureoùlapondérationpeutsefondersur lanoteémise,mais il fautconvertir lanoteémiseencalculantd’aborduntauxdedéfautetenassociantensuiteunepondérationàcetauxdedéfaut.LeComitédeBâlesurlasupervisionbancaireproposelestauxdedéfautcumulésindiquésdansletableauci-dessouspourStandard&Poor’setMoody’s.

Tableau

Tauxdedéfautcumulésselonlanotation

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Sources:ComitédeBâle;EspagnacetdeMontesquiou(2012).

Larelationaffichéeentrelestauxdedéfauthistoriqueset lesnotesattribuéesposeunproblèmedélicatcarlesagencesdenotationneconsidèrentpascestauxcommeunerègleimmuable pour l’avenir. Les notes sont des opinions sur les probabilités relatives dedéfautsvariablesetdesécartsontétéconstatésentrelesmodèlesquantitatifsd’évaluationdesrisquespubliésetlanotationattribuée(Jollineauetal.,2014).Lesagencesdenotationne sont pas légalement responsables des notes qu’elles publient, car celles-ci sontconsidérées comme des opinions. Elles traduisent une approche multicritères ou«universelle»quiviseàprendreencomptetouslesélémentsderisquepertinentsettousles points de vue dans chaque analyse de crédit. Le fait de noter des entités ou desobligationsdansunemêmecatégoriepeutnepasrefléterlesdifférencespossiblesdansledegréderisque.

LepassagedeBâleIàBâleIIagénéralisél’usagedesrésultatsfournisparlesagencesde notation qui sont devenues de ce fait des institutions incontournables. Cela a étéentérinéparleConseildestabilitéfinancièreduG20àLondresenavril2009,avecl’appuiduComitédeBâle,etaprèsexamenapprofondidel’utilisationdesnotations.Celles-cisontessentielles dans la réglementation bancaire déterminant le niveau exigé du capitalréglementaire.

Aprèslacrisedessubprimesetlaconstatationdesrisquessupplémentairesspécifiquesassociés aux produits titrisés, les accords deBâle II ont été complétées par l’accord deBâle2.5qui fait également référenceauxnotations (Moosa,2010).Après lamontée enpuissancedesagencesdenotation,lesbanquescentralesontsystématiquementrecoursàleurs services, avec un degré de collaboration variable en fonction des banques et desopérationsconsidérées.LerôledesagencesdenotationestfaiblepourlaFederalReserve(Fed)américaine,quiconsidèrepeud’actifspouvantservirdegarantiedanslecadredesapolitiquemonétaire. La Banque centrale européenne (BCE) et le Système européen debanques centrales (Eurosystème) ont recours aux notations pour déterminer l’éligibilitédes actifs acceptés en garantie. Le dispositif de l’Eurosystème d’évaluation de créditreconnaîtquatresourcesderéférences:lesagencesdenotationoulesOEEC,lessystèmesd’évaluationducréditdéveloppésparlesbanquescentrales(notammentleFIBENpourlaBanque de France), les modèles internes développés par les banques et les outils denotationdéveloppéspardesopérateurstiers.Lerecoursauxagencesdenotations’inscritdans le cadre réglementaire relatif aux fonds propres des banques,mais les agences denotation et leurs notes ne sont pas acceptées sans condition : l’Eurosystème exige desinformationssurlaprocédured’évaluationetdesélémentsdecomparaisonparrapportauxcritèresdequalitéqu’iladéfinis.Àlafinde2011,surles2017Md€degarantiesdéposés

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auprès d’Eurosystème, 75 % étaient admises sur la base de notations émises par desagences de notation. Les notations d’agences sont et restent encore aujourd’hui desréférencesincontournablespourlesinstitutionstellesquelesbanquescentrales.

BâleIIIoulesdangersd’unrisquesystémiqueentretenuparlesagencesdenotation

La crise des subprimes a montré l’ampleur systémique des risques due àl’interdépendance des banques (White, 2009). Les accords de Bâle III proposentd’augmenterfortementlaqualitédesfondspropres(toujours8%jusqu’en2015)avecdesfondsproprestier18à4,5%dès2013.Àterme,leratiodefondspropressurengagementpasserade8%en2015(dont6%detier1)à10,5%en2019,avectoujours6%detier1.DesnormessurlerisquedeliquiditésontégalementintroduitesparBâleIII.Lesbanquesdoivent sélectionner des actifs facilement cessibles sans perte de valeur, pour alimenterleur trésorerie en cas de difficulté à cause de retraits massifs de la clientèle ou del’assèchement du marché interbancaire. Il est également demandé aux banques depondérer leurs actifs selon la qualité du risque. Une augmentation du risque decontrepartieouledéveloppementdesactivitésdemarchédevrontêtrecompensésparunsupplément de fonds propres. Bâle III a pour vocation de devenir un référentielinternational, mais aujourd’hui, de nombreux pays n’appliquent pas encore laréglementationprudentielledeBâleII.Cenouveaucadreconceptueldoitêtreadaptéauxréformesgouvernementalesquimettent enplacedesmesuresdifférentesdans leur paysrespectif:lesÉtats-Unisinterdisentauxbanqueslaspéculation(trading)pourleurproprecompteetleRoyaume-Uniaintroduitlafilialisationdesbanquesdedétail.D’unemanièregénérale, les établissements financiers systémiques devront afficher une solidité plusimportante et des normes devront être modifiées dans ce cas. L’accord de Bâle est unchantierperturbéparl’ampleuretlafréquencedescrisesfinancièresquiontsuccédéàlacrise des subprimes. Les établissements bancaires anticipent ces normes définitives pardesstratégiesdifférentesdecompositiondeportefeuilleetdecessionsd’actifs.Ilsessaientaussidemodifierleurmodèleéconomiquepourdiminueràlafoisl’influencedesmarchésetlescontraintesdelaréglementation.

Danscenouveaupaysagefinancierentraindenaîtreetdesedévelopper,lepassagedeBâleIIàBâleIIIamaintenu,voirerenforcéprogressivement,ladépendanceàl’égarddesagences de notation. En offrant aux banques la possibilité de choisir soit uneméthodeexterne, soit uneméthode interne, leComité deBâle a annoncé9, le 7 janvier 2013, unassouplissement des règles de liquidité jugées trop restrictives par la plupart desprofessionnels du secteur bancaire qui reprochent un financement insuffisant del’économie et qui redoutent la paralysie de l’économie mondiale. Dans sa versionoriginale, les actifs liquides se limitaient à quelques titres de dettes notés auminimumAA– par les agences de notation. Avec la nouvellemesure (BRI, 2013), la palette desactifs inclut les obligations d’entreprises dont la notation est classée dans la catégoried’investissement,auminimumBBB–.Cetexempled’allégementdenormesentraîneuneutilisationplusétenduedesnotationsetmontrequeleurréductionouleurmiseà l’écartgénéreraitdescoûtsinsupportables.

LARECHERCHEDEL’ÉQUILIBREENTRELERISQUEETLEPOUVOIR

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Les agences de notation ont vu leur pouvoir s’accroître progressivement dans lesaccords de Bâle. Les tentatives visant à affaiblir leur position, en recherchant unealternativeauxnotationsexternes,n’ontpasconnulesuccèsattendu.Nousanalysonsainsideux aspects de l’implication réglementaire des agences de notation : d’une part, lepouvoirinhérentàladominancedeleurmodèle,conséquencedirectedel’absenceoudel’insuffisance de l’approche interne, et, d’autre part, la démarche réglementaire, facteuraggravantdurisquepourlesagencesdenotation.

Systèmesinternesgénéralisésd’évaluationducrédit:unsubstitutpotentielendifficulté

LaréglementationdeBâleviseàprotégerlesbanquesdeschocsrésultantdestensionsfinancières et économiques qui peuvent être provoquées par les acteurs du marché, ycomprisparlesagencesdenotation,etàrenforcerainsilarésiliencedusecteurbancaire(BRI,2010).Elleafficheclairementsonintentionàréduireprogressivementlerecoursauxnotationsexternes.Deuxgrandesmesuresontétéprises.Lapremièreconsisteàinciterlesbanquesàmettreenplacedessystèmesinternesdenotationpourmieuxrefléterlesrisquesbancairesréelsetrapprocherlecapitalréglementaireducapitaléconomique(BRI,2004).Le capital réglementaire est celui auquel les banques doivent se conformer, le capitaléconomiquecorrespondauxbesoinsetau fonctionnementeffectifd’unétablissementdecrédit. Ainsi, une utilisation rigoureuse d’une méthodologie interne après sa validationréglementaire conduit à assurer l’autonomie souhaitée tout en évitant de grands écartsentrelecapitalréglementaireetlecapitaléconomique.Ladeuxièmemesureviseàlimiterle recours aux agences de notation susceptibles de mesurer le risque de crédit. Cesdernièresdoivent satisfaire lescritèresdéfinispar lecodedeconduitede l’Organisationinternationaledescommissionsdevaleur(OICV)pourêtrereconnuescommeunOEEC.Des critères d’objectivité, d’indépendance, de communication, de ressources et decrédibilitésontàrespecter.

Lesmodèlesinternesadoptésparlesinstitutionsfinancièresontétélargementcritiqués.PourMoosa (2010), ils ont échoué à prédire les pertes subies durant la crise financièremondiale. Fondés sur le concept de VAR10, Danielsson et al. (2001) et Hubner et al.(2003) doutent de leurs utilités et démontrent leurs insuffisances et leur incapacité às’adapter àdes changementsbrusques et importantsdes conditionsdemarché,générantainsi une sous-estimation du risque. Par ailleurs, la mise en place d’une méthodologieinterneestcomplexeettrèscoûteuse,comptetenudufortvolumededonnéesmensuellesàobtenir(Samuels,2012).Elleestaussi,souvent, incomplète.Kaufman(2009)soulignel’insuffisance des modèles mathématiques qui font abstraction des facteurs humains ethistoriques. Seuls les grands établissements financiers sont enmesure, après validationréglementaire, d’investir dans des systèmes d’information pertinents et robustes. Lerecoursàdesévaluationsinternesdoittraduireunecapacitéd’analysedescréditssupposéesimilaire ou même supérieure à celle des agences de notation externes. Ces dernièressemblent tirer avantagede leurposition car, commenous l’avons souligné, l’historique,l’accumulation d’expériences et la standardisation des analyses apportent une valeurajoutéeévidenteàlaqualitédesnotes.

Uneautre contrainte liée à lagénéralisationdesmodèles internes est l’expositiondes

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banques à des risques de conflits d’intérêts. L’efficacité de ces modèles repose sur lafourniturededonnées financières, comptables et commercialesvalidées, etunproblèmedefiabilitéetdecrédibilitédedonnéespourraseposersi labanqueestconfrontéeàunclientpuissantetagressif.Cetterelationparticulièreentrel’entrepriseetl’établissementdecréditpourraitincitercettedernièreàsous-évaluerlerisqueeffectifounepasleréviseràlabaisse,dansl’objectifdefidélisersonclient.Moosa(2010)remarquequ’«enutilisantleurs propres modèles, les banques peuvent se montrer trop optimistes quant à leurexpositionaurisqueafindeminimiserlecapitalréglementaireetmaximiserleretoursurlescapitauxpropres.Encesens,Bâle IIcréedes incitationsperversesàsous-estimer lerisquedecrédit».

Les banques centrales sont aussi exposées au risque de conflits d’intérêts, l’exempled’évaluationde crédit des souverainsde la zone euro illustreparfaitement ceproblème.Mêmesilesautoritésdetutellesontlavocationdevaliderlesmodèlesinternesetsiellessontgarantesdeleurfiabilité,onpeutsedemandersiellessontcapablesd’orienterlamiseenplacedecesmodèlesetsiellesdisposentdel’expertisenécessairepourjugerdeleurefficacité. SelonWihlborg (2005), les autorités ont tendance à aligner les intérêts et lesobjectifsdesentreprisessurlesleurs.

Comportementdesagencesdenotationàl’égarddeleurinstitutionnalisationimplicite

Soucieusesdeleurréputation,lesprincipalesagencesdenotationdéclarentnepasêtrehostilesà l’accroissementde leursobligationsd’informationetde transparencevis-à-visdu public. En réponse aux attentes des investisseurs à propos de leurs méthodesd’évaluation, elles mettent en garde contre toute forme de standardisation etd’harmonisation de leursméthodes de notation.Dans le cadre du projet de réforme duratio Cooke, elles n’ont pas été consultées sur leur volonté de participer au nouveaudispositif (Davies, 2005). Rappelons que le Comité de Bâle a proposé aux banques lechoix entre une approche standard basée sur les notations émises par desOEECet uneapproche fondée sur la construction d’un système interne d’évaluation (IRB – internalrating-based system).Même si leur nouveau rôle pouvait leur apporter plus de clients,l’introduction de standards comme ceux qui sont prévus dans les recommandations deBâleestconsidéréeparlesagencesdenotationplutôtcommeunemenacequecommeuneopportunité car ces règles compromettraient l’indépendance des notations. Elles sontdangereusescarsusceptiblesdedécouragerl’innovation,enmatièred’analysedecréditetd’applicationdeméthodesd’évaluationdurisquededéfaillancedesentreprises.Selonlesagencesdenotation,lesnotationsnesontpasconçuespouruneutilisationconformeavecles procédures fixées par les autorités bancaires (Ellis et al., 2012). Pour Standard &Poor’s, les notations de crédit publiées sont des opinions et ne peuvent pas être unescienceexacte.Ellesnepeuventpasnonplusêtreconsidéréescommedesgarantiesdelaqualitédecrédit comme le suggère la réglementation (Farrelletal., 2014).Enfin, FitchRatingsrappellequesesnotationsnesontpasunemesureprédictivedelaprobabilitédedéfautspécifique(Ellisetal.,2012).

Néanmoins,enprenantl’optiondel’autorégulationdanslebutdesauvegarderlestatutprivilégiéquileurapermisdeconstituerunenichecommerciale,lesagencesdenotation

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ontdéveloppéunestratégiedecoopérationaveclesautoritésderégulation.Ellessesontdéclarées favorables à la mise sous tutelle de la SEC sur une base volontaire et ellessouhaitentavoirunestratégiedemiseenconformitéaveclespratiquesinternationalesens’engageant à réviser leurs procédures, en application stricte du code de l’OICV.Danscettedémarche,ellesreconnaissentimplicitementl’existencedeconflitsd’intérêtsetellesaffirmentdisposerdemécanismesetdeprocédurespermettantdelesgérer.Parexemple,ellespossèdentuneclientèletrèsdiversifiée,cequiaugmenteleurindépendanceàl’égardd’unmêmeclientoud’unsecteurparticulier.Parailleurs, elles rendent leurscritèresdenotation publics et leurs opinions transparentes, favorisant ainsi une meilleurecompréhension du raisonnement qui sous-tend les notes qu’elles décernent par lesinvestisseurs et les analystes. Elles dissocient les activités analytiques et commercialesassociées à chacune des notes attribuées afin de soutenir l’indépendance de leursappréciations.Larémunérationdeleursanalystesn’estpastributairedeshonorairesliésàla notation effectuée ; des comités sont chargés d’examiner et d’approuver les notesproposéesparlesexperts.Silesagencesdenotationontessuyédeséchecsretentissants,comme ce fut le cas pour la crise des subprimes en général et pour la banqueLehmanBrothers en particulier, notéeAAA jusqu’à son effondrement, ou encore pour laGrècenotéeA jusqu’en 2009, elles se sontmontrées désireuses de faire amende honorable etelles sont capables de tirer des leçonsde leurs erreurs, en affinant enpermanence leursméthodesdenotation.Eneffet,avantmêmelapublicationdéfinitivedesrecommandationsvisant à améliorer la transparence du processus de notation, Moody’s et Standard &Poor’s,quidominent lemarchéde lanotation,avaientpris l’initiatived’entreprendreuntravaild’autorégulationallantdans lesensdespropositionsde laSECetde l’OICV.Enjuin2003,Moody’sadiffuséunprojetdedocumentintitulé«PrinciplesofBusinessandProfessionalPracticeforCreditRatingAgencies»auprèsdeplusieursrégulateurs,allantdanslesensdespropositionsdelaSEC,del’OICVetdelaCommissioneuropéenne.Elles’est engagée depuis à adopter plusieurs de ces principes éthiques par le biais deprocédures internes qui ont été rendues publiques. L’agence Standard & Poor’s aégalementadopté,enoctobre2005,uncodedebonneconduite intituléTheStandard&Poor’sRatingServiceCodeofConductquiaremplacésonanciencodes’approchantducodepubliéparl’OICVen2004.Ilapourvocationderegrouperenundocumentuniquelesprincipesetlesméthodesappliquésparl’agencedenotationquipermettentdegarantirl’indépendance,l’objectivitéetlacrédibilitéduprocessusdenotation.Àlafindelamêmeannée,l’agenceFitchRatingss’estengagéesurlamêmevoieens’assurantquel’exercicede son métier est conforme aux principes de l’OICV. Le résultat de l’activité desprincipales agences de notation commence à se faire sentir : plusieurs établissementsbancairesenvisagentleretouràl’approchestandard.LesanalystesdeBarclaysResearch(2011)estimentqu’une tellemesurepourraitpermettrede réduire le ratiocore tier1de9,9% à 7,6%.Toutefois, un retour à une approche standard impliquerait une perte decrédibilitépourleComitédeBâleetseraitcontraireàl’objectifannoncédelasuppressiontotale de la notation externe permettant ainsi aux banques de construire leurs propresmodèlescomplexes.Parailleurs,sereporteraucodedeconduiteintégrépourengagerlesagencesdenotationàinstaurerdesmécanismesdesurveillancenesemblepassuffisantetnepermetpasd’éviterleurarbitrageetleurflexibilitédenotation.

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CONCLUSIONL’influencedesagencesdenotationsurlesmarchésfinanciersaconduitdesrégulateurs

locauxetinternationauxàintroduirelesréférencesauxnotationsdecréditexternesdanslecorpus réglementaire et parfois législatif (à titred’exemple, la règle américaine2a-7del’InvestmentCompanyAct,adoptéeen1992,quiaccordeuneexemptiond’enregistrementpour les produits titrisés bénéficiant d’une notation supérieure à BBB). Les notationsémises par les agences de notation sont devenues un outil indispensable, utilisé par lesinvestisseurs, mais elles n’ont pas été conçues pour jouer un rôle déterminant dans laréglementation des banques. Malgré l’utilité des historiques de défaut publiés par lesagencesdenotation,l’attenteduComitédeBâlesouhaitantuninstrumentdemesureexactde la probabilité de défaut ne semble pas réaliste car elle ne coïncide pas avec laphilosophiedesagencesdenotation.Ilestinévitabledeprendreenconsidérationlestatutde la presse financière dans toutes les tentatives de réglementation.Malgré les récentesdécisionsdejusticequimettentencauselecaractère«malintentionné»desméthodesdesagences de notation, eu égard au cas de la condamnation de Standard& Poor’s par lajustice américaine et australienne à indemniser des collectivités locales ayant perdud’importantessommesd’argentàcausedeproduitstoxiquestropbiennotés,lesagencesdenotationcontinuentàseréféreraupremieramendementdelaconstitutionaméricainequigarantitlalibertéd’expressionpubliquepourdéfendrecertainesdeleursnégligences,enparticulierdansledomainedel’informatiqueetdutraitementdesdonnéesstatistiques.

EntrelaréglementationdeBâleI,oùlaréférenceauxnotationsexternesétaitmineureetlerenforcementaccrudel’interventiondesagencesdenotationdansBâleIII,malgréuneorientationdifficile àmettre enpratiquevers la généralisationdes systèmesdenotationinterne,unéquilibredoitêtretrouvé.Rudin(2012)proposedemettreenplaceunconseilde surveillance neutre qui tiendrait compte des deux approches de notation et qui lescompléterait par une évaluation indépendante de la précision des résultats obtenus.Cesdeux modèles ont chacun des avantages et des inconvénients. L’approche de notationinterne avancée est complexe et ambiguë. Peut-être serait-il plus pertinent d’adapterl’approche standardà la fois simple et efficace.Paradoxalement, réduire l’influencedesagencesdenotationestdésormaisl’undesobjectifsaffichésparleComitédeBâle.Aprèsavoirconfortéleurpouvoiretassuréleursuccèsenlesprivilégiant,ilarécemmentouvertune consultation (BRI, 2014) en vue de réviser la méthode de notation. Le rôle et lepouvoirdesagencesdenotationontdoncchangéau furetàmesureque lesaccordsdeBâleévoluaient,maisleursituationcontingenteestloind’avoiratteintunétatdéfinitifetstabilisé.

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RÉSUMÉS

OLIVIERKLEIN

Banqueetnouvelletechnologies:lanouvelledonne

Les nouvelles technologies engendrent pour chacun un nouveau rapport aumonde etinduisent une série de révolutions en chaîne, dans notre vie quotidienne comme dansl’entreprise.Lapremièreestunerévolutioncommerciale,quibouleverselesrapportsentrelesproducteurs,lesdistributeursetlesclients,auxbénéficesdecesderniers.Larévolutiontechnologiquepositionneégalementlescollaborateursaucentredel’entreprise,avecdesimpacts sur l’organisation. Enfin, le facteur sociétal est désormais prépondérant, car lasociété devient une véritable partie prenante de l’entreprise, Internet et réseaux sociauxobligent.

L’entreprise-banque, et plus spécifiquement la banque commerciale, n’échappe pas àcesbouleversements,bienaucontraire,étantaucœurdel’activitééconomique.Labanquedoitdoncseréinventer,sansperdredetemps.Lesgensn’ontpasmoinsbesoindebanquesetlarelationintuitupersonaeresteunélémentfondamentaldumétierdebanquier.Selonnous, la seule issue passe par la réinvention de la banque de proximité capable depromouvoir ce quenous pouvons appeler « la banque sans distance» qui offre plus depraticité,depertinenceetdepersonnalisationduconseil.

ClassificationJEL:G21,L22,O33.

FRANÇOISEMERCADAL-DELASALLES

Histoired’unetransitionnumérique:SociétéGénérale

TouslesmétiersetlesimplantationsgéographiquesdugroupeSociétéGénéraleontprisla mesure de la « révolution » des comportements et des usages à l’ère des nouvellestechnologies. Société Générale a connu une profonde mutation basée sur l’alliance dudigitaletde l’humain,unevéritableopportunitépourdevenir labanque relationnellederéférencepourl’ensembledesespartiesprenantes.

S’appuyer sur les leviers de l’ère numérique, de l’ère de lamultitude, pour effectuercettetransformation,libérerl’intelligencecollectivedescollaborateurs,lesdoterdesoutilsd’aujourd’hui, leur offrir de nouveaux espaces demain, leur permettre de s’ouvrir àl’écosystèmedelacréativitédigitale,pourinnoveretêtreacteursdecettetransformationnumérique sont des actionsdésormais très largement engagées.La transitionnumériqueétant en continuelle évolution, l’innovation produit devient innovation de l’expérienceclient,delaruptureetdevientouverteetpartagée.

ClassificationJEL:G21,O31,O32.

ANDRÉCICHOWLAS

Technologieettransformationdesservicesbancaires:l’exempledeTechnoVisiondeCapgemini

Lesecteurbancairesetrouveàuneimportantecroiséedeschemins,suiteàlamenace

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grandissante de rupture et de désintermédiation engendrée par des acteurs nontraditionnels,notammentlesentreprisesFinTechetdenouvellesbanquesplussouples.Lesinnovations rapides et les avancées technologiques ont fait de la technologie une pierreangulairedansladifférenciationconcurrentielleet l’entretiend’unecroissanceprofitableetdurableenfournissantuneexpérienceclientetuneefficacitéopérationnellesupérieures.Ceschangementsobligentlesbanquesàplacerlatechnologieaucentredeleuridentitéetde leurs stratégies commerciales pour réussir leur transformation numérique. Il fautdésormaislaplaceraupremierplandel’entreprise.

TechnoVision fournit aux directions des systèmes d’information et aux experts entechnologie des banques une structure claire et des éléments constitutifs permettant deremodeler leurs entreprises pour réussir dans cette époque de mutation accélérée. Ellefournit également quelques pistes aux responsables des métiers desdites banques pourmieuxtirerpartidelatechnologiedansleurtransformation.

ClassificationJEL:G21,L10,L86.

BERTRANDLAVAYSSIÈRE

Lesmodèleséconomiquesbouleversésparledigital

Quatre exemples illustrent la manière dont le digital impacte différents métiers desinstitutions financièresdans lagénérationde leurs revenusmais aussidans la substancemême de l’activité. Au-delà de ces exemples, souvent indissociables des changementsréglementaires, l’auteur illustre les évolutions dans la génération de revenus, dans lagestiondescoûtsetlagestiondescomptesd’exploitationetdubilan.

ClassificationJEL:G20,L25,O33.

MARIANNEVERDIER

Innovation,concurrenceetréglementationpourlafournituredeservicesbancairesenligne

Le développement de services bancaires en ligne modifie les interactionsconcurrentielles dans le secteur de la banque de détail. De nombreuses entreprises nonbancaires (opérateurs de télécommunications, marchands, start-up, plates-formes)concurrencentdésormais lesbanquesenproposantdesservicesdepaiement,demiseenrelation entre prêteurs et emprunteurs, de collectes de données bancaires. Dans cecontexte,différentesinstancesréglementairesontadaptélecadrelégislatifenvigueurafindefavoriser lesentréessur lemarché, toutenprotégeant lesconsommateursdesrisquesassociés à ces activités. Cet article se propose de faire le point sur les liens entreinnovation,concurrenceetréglementationdanslesecteurdesservicesbancairesenligne.

ClassificationJEL:E42,G21,L96,O33.

JEAN-MARCBOYER

Latarificationetlebigdata:quellesopportunités?

Datascientist a été déclaré le travail le plus « sexy » duXXIe siècle par laHarvardBusinessReview.Enquoil’exploitationdesdonnéesdemassepeut-ellerévolutionnerles

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servicesfinanciersetleurstarifications?Quelssontlesfreinsaudéploiementdubigdataetquellessontlespressions?EndépitdenombreuseslimitesenFrance,desopportunitésapparaissent,qu’ilfautsaisiraujourd’hui.

ClassificationJEL:G20,L11,L86,L96.

JEAN-YVESFOREL

Lesmoyensdepaiement,quelleinnovation?

Après une longue période de stabilité, le monde des paiements doit s’adapter pouraccompagner les tendancesdeconsommationactuellesdansuncontexted’effervescenced’innovationsetderenforcementdelaconcurrence.Pourrépondreàcesdéfis,commentidentifierlesconditionspourréussiruneinnovationdanslespaiementsdansunelogiquede création de valeur ajoutée et de différenciation ? La porosité croissante entre lephysiqueetledigitalimposedenouveauxparcoursdepaiementspourcollerauxbesoinsdes consommateurs et des créanciers. Les banques répondent donc par de nombreusesinitiatives afin de réussir cettemutation et d’adapter les systèmes et les infrastructurespourresterlesacteurscentrauxdecemétieretéviterunedésintermédiationdestructricedevaleurpourleurécosystème.

ClassificationJEL:E42,G20,O33.

FRANÇOISR.VELDE

Bitcoinpourremplacerlesdevises?

Lesmonnaies digitales peuvent-elles remplacer les devises ? Un examen détaillé duprotocoleBitcoinmontrequecetteprouesseconceptuelleettechniqueestencoreloindepouvoir jouer le rôle de monnaie, mais qu’elle a suscité des innovations dans latechnologie financière qui pourraient avoir une grande portée dans les systèmes depaiement.

ClassificationJEL:E42,G20,L86,O33.

FANYDECLERCK,LAURENCELESCOURRET

Darkpoolsettradinghautefréquence:uneévolutionutile?

Les développements technologiques et réglementaires ont favorisé l’essor de deuxphénomènesmajeursassociésàplusd’opacité : le tradinghaute fréquence (THF)et lesdarkpools.UnetransactionsurdeuxestdésormaislefaitduTHF.Lesdarkpoolsattirentrespectivement 10 % du volume de transactions en Europe et 20 % aux États-Unis,notammentenraisondestradershautefréquenceciblantlesordresnoninformésquis’yéchangent.Lesétudesacadémiquesmontrentquelescoûtsdetransactionn’ontjamaisétéaussifaiblessouslapressionconcurrentielleduTHF.Ilssonttoutefoisstablesdepuis2009alorsmêmequelavitessenecessed’augmenter.L’efficiencedesmarchéss’estamélioréegrâce à l’activité d’arbitrage du THF. Cependant, plus le volume d’échange se déplacevers les dark pools, plus le risque d’une dégradation de la liquidité et de l’efficienceaugmente.Sil’onajoutelerisquededistorsiondeconcurrenceetlerisqueopérationnelettechnologique,lesrégulateursfontfaceàdesenjeuxdeplusenpluscomplexes.

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ClassificationJEL:D40,D53,D62,G14,G20,L10.

MARIE-LAUREBARUT-ETHERINGTON,DENISBEAU

Liquiditédesmarchésobligatairesetinnovationtechnologique

L’évolution actuelle du fonctionnement desmarchés obligataires s’accompagne de laperception d’une dégradation de leur liquidité, porteuse de risques pour la stabilité dusystèmefinancier.Laréalitéestplusnuancéeetlesindicateurstraditionnelsapparaissentparfoisencontradictionavecl’intuitiondesparticipants.L’altérationdelaliquiditésembleaffectersurtout lessegmentsquionthistoriquementpeudeprofondeurdemarché,et semanifeste davantage par une hausse de la volatilité et une réduction de la taille destransactionsquepardesvariationsdeleursprix.Cettemutationestdueàunevariétédefacteurs conjoncturels et structurels, au premier rang desquels se trouve l’innovationtechnologique. En favorisant la baisse des coûts de transaction et en démultipliant lesaccèsaumarché,ledéveloppementdu tradingélectroniqueaeuunimpactpositifsurlaliquidité.Mais il a également permis l’émergence de nouveaux participants et de leursstratégiesalgorithmiquesdontl’impactsurlaliquiditépeutêtredéstabilisant.Leseffortsengagésparlespouvoirspublicscommeparlesecteurprivédoiventdoncêtrepoursuivispourrenforcerlatransparencetoutenveillantàcequelesconditionsd’accèsetdetradingpréserventladiversitédesintermédiaires.

ClassificationJEL:G12,G23,G24.

GERARDHARTSINK

Latechnologieestlemeilleurgarantdelagestiondesrisquessurlesmarchésfinanciers

Le trading, la compensation et le règlement d’instruments financiers ne sontaujourd’hui plus envisageables sans l’intervention de la technologie. Toutefois, latechnologie seule ne suffit pas à créer une infrastructure de marché financier solide,conforme aux attentes des autorités de réglementation et des intervenants du marché,facilitant lagestiondes risquesetgarantissantde faiblescoûtsopérationnels.Cetarticledécritdeuxprogrammesaxéssurlatechnologie,créésparlesautoritéspubliquesetplacéssous leur surveillance (le CLS et la GLEIF) en vue de limiter les risques pour lesintervenants sur les marchés financiers. Il explique en quoi ces programmes aident lesautoritésàéviteretatténuerdesrisquessystémiquesdansleurséconomiesrespectives.Lesobjectifs de chacun de ces programmes ne pourront toutefois être atteints que si lesautorités publiques et les intervenants du marché coopèrent et mènent une actionconcertée.

ClassificationJEL:G10,G23,G24,G28.

MAJDIDEBBICH,GÉRARDRAMEIX

Nouvellestechnologiesetprotectiondesépargnants:l’actiondel’AMF

Les nouvelles technologies favorisent l’émergence de nouveaux canauxd’intermédiation financière afin de mieux orienter l’épargne vers les besoins desinvestisseurs et de l’économie, et de réduire ladépendancedes entreprisesvis-à-visdes

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financementsbancaires.Àtraverstroisexemples,cetarticleillustrelesenjeuxinéditsquiseposentaurégulateurfinancier.Ledéveloppementdesnouvellestechnologiesdoitêtreaccompagnéetencouragé,maisilconvientdepréveniretd’agircontretouteslespratiquesabusivesquipeuventfairesurfacedanslesillagedesoutilsenligne.Lesplateformesdeforexconstituentàcetitreunexempletyped’offrequin’estpasadaptéeauxparticuliers.À l’inverse, lamise en place de statuts réglementés et d’un label dédié au financementparticipatifcontribueàsécuriserunnouveloutildeplacementpourlesépargnantsqui,àterme, pourrait venir diversifier et compléter les sources traditionnelles de financementpour les entreprises.Enfincet article s’intéresseauxmédias sociauxen tantquenouveloutil de communication pour les acteurs financiers. Lesmédias sociaux permettent auxprofessionnelsdeproposerdesexpériencesclientparticulièrementrichesetinnovantes,etpeuvent contribuer à renforcer la qualité de l’information transmise aux investisseurs,pourvuqu’uncertainnombredebonnespratiquessoientrespectées.

ClassificationJEL:D14,D18,G28,L86.

OLIVIERGUERSENT

Quellerégulationpourlesnouveauxentrantsdansl’industriedespaiements?

L’industriedespaiementsestenmutation.Autrefoisréservéeauxseulesbanques,elles’estouverteaucoursdesdernièresannéesauxnouveauxacteursquesontlesprestatairesde services de paiements. L’innovation continue et la digitalisation de l’économiebouleversent une nouvelle fois ce marché. Non seulement de nouveaux concurrentscontinuent d’apparaître en s’appropriant des pans d’activités que les banquesmonopolisaient jusqu’alors, mais, en plus, de nouvelles technologies font évoluer lespaiements. Le paiement mobile, le peer-to-peer, les paiements instantanés sont autantd’innovationsquelemarchédevraintégreraucoursdesprochainesannées.Lecadrelégaldevaits’adapteretpermettreauxnouveauxacteursderentrersurcemarchépourlerendreencore plus compétitif. Le marché des cartes n’est pas en reste, visé lui aussi par lalégislation qui met en place un certain nombre de règles visant à le rendre plusconcurrentiel.

ClassificationJEL:E42,G28,L86.

ÉDOUARDFERNANDEZ-BOLLO

Institutionsfinancièresetcybercriminalité

Si les cyberattaques n’ont eu jusqu’à présent qu’une incidence limitée sur le secteurfinancier français, elles représentent néanmoins une menace sérieuse pour lesétablissementsbancairesetlesorganismesd’assuranceentermesdesécuritédessystèmesd’information,decontinuitéd’activitéetdeprotectiondesdonnées.L’émergencedecesnouveaux risques suscite une attention élevée de la part des superviseurs. Laréglementationsurlecontrôleinterneetsurlagestiondurisqueopérationnelconstituelesocle des dispositifs de prévention mis en place, qui doivent s’accompagner dudéveloppementd’uneveilleproactivepermettantderepérerl’évolutiondesmenacesetdedéfinir lesmoyensdeseprotéger.Lesaxesdeprogrèsprioritairesidentifiésparl’ACPR(Autoritédecontrôleprudentieletderésolution)concernentlagestiondesdroitsd’accès

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et les outils de détection des intrusions dans le système d’information. La coopérationentretouslesacteurs,publicsetprivés,apparaîtenoutreprimordiale,tantpourmenerdesexercicesdeplaceettesterlarobustessedesentreprisesquepouraméliorerl’identificationdesmenacespardeséchangesd’informationsaccrus.L’actiondu superviseurdoit enfins’inscrire dans un cadre européen et international afin de garantir la coordination desinitiatives.

ClassificationJEL:G21,G28.

GEOFFROYENJOLRAS,MATHIEUGATUMEL,PHILIPPEMADIÈS,OLLIVIERTARAMASCO

Lacouverturedescatastrophesnaturellesetnucléaires:unesourced’inspirationpourl’assurancedesdépôtsbancaires

Dansuncontextedefragilisationdusecteursuiteàlarécentecrisefinancière,cetarticles’intéresse aux systèmes de couverture des risques de défaillances bancaires, et plusparticulièrement au système de garantie des dépôts. Par leur nature même, ces risquesprésentent une forte analogie avec des « grands risques » tels que les catastrophesnaturellesounucléaires.Ceux-ci font l’objetdemécanismesdegestionetdecouverturedédiésaumoyend’instrumentsetd’unegouvernancespécifiques.Detelsprocédéssontdenature à s’insérer dans la révision actuelle des systèmes de couverture des risquesbancaires tant du point de vue organisationnel que financier.Nous considérons dès lorsl’opportunité de comparer explicitement risques bancaires, catastrophes naturelles etnucléaires. Cette comparaison nous conduit alors à des préconisations pour le systèmed’assurancedesdépôts.

ClassificationJEL:G21,G22,G28,L94.

JEAN-GUYDEGOS,OUSSAMABENHMIDEN

Lerôleetlepouvoirdesagencesdenotationont-ilschangéaufildesaccordsdeBâleI,BâleIIetBâleIII?

Danscetarticle,nousétudionslesrapportsentreunsystèmedenotationdéjàancienetdevenu incontournable, et un autre dispositif qui a besoin, pour assurer sa proprelégitimité, d’un système de mesure et de contrôle fondé sur des notes ou sur descomparaisons, les accords de Bâle. Les trois verrous traditionnels, intermédiation,réglementation, cloisonnement, qui servaient de garde-fou à la finance nationale etinternationale, ont fini par sauter, et la révolution des 3 D – désintermédiation,déréglementation, décloisonnement –, auxquels certains ont ajouté le quatrième D dedématérialisation, a permis un développement considérable de la finance globale. Lesgraves déséquilibres que celle-ci a provoqués ou entraînés ont rendu nécessaires unesurveillancesuivieetl’applicationderèglesprudentielles.Cesrègles,difficilesàmettreenplace et à imaginer ex nihilo ont bénéficié, dans de nombreux cas, de l’existence desagencesdenotation.Nousavonscherchéàdéterminerdansquellemesurelesagencesdenotation se sont développées et ont accru leur pouvoir grâce aux trois accords deBâlesuccessifs.

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ClassificationJEL:G24,G28.

ABSTRACTSOLIVIERKLEIN

BanksandNewTechnologies:TheNewDeal

Foreveryone,newtechnologiescreateanewlinktotheworldandbringaboutaseriesof consecutive revolutions, both in our daily lives and in business. The first is acommercial revolution that turnsrelationsbetweenproducers,distributorsandclientsontheirheads,forthebenefitofclients.Thetechnologicalrevolutionalsoplacesemployeesattheheartofthecompany,withanimpactonitsorganization.Thereisalsothesocietalfactorwhichisnowdecisive,associetyisbecomingarealstakeholderinbusiness,drivenbytheinternetandsocialnetworks.

The corporate bank, and more specifically the commercial bank, cannot avoid theseupheavals;onthecontrary,theyareattheheartofeconomicactivity.Thebankmustthusreinventitself,withnotimetospare.Peoplehaveasmuchneedofbanksandthepersonalrelationremainsafundamentalaspectofthebankingprofession.Accordingtous,theonlyway forward is reinventing local banks able to promote “instant banking”which offersmoreconvenient,relevantandpersonalizedadvice.

ClassificationJEL:G21,L22,O33.

FRANÇOISEMERCADAL-DELASALLES

SociétéGénérale:ADigitalTransitionStory

All thebusinessesandestablishmentsofGroupSociétéGénéralehaveunderstoodthe“revolution”inbehaviorsandpracticesintheeraofnewtechnologies.Aprofoundchange,which strengthens relationships thanks to the mix of human and digital, is a realopportunitytobecomethereferencerelationshipbankforallitsstakeholders.

Leveraging on the digital andmultitude era to carry out this transformation, SociétéGénéraleisreleasingthecollectiveintelligenceofitsstaff,providingthemwiththerighttoolstoday,offeringnewspacestomorrow,allowingthemtoopenuptotheecosystemofdigitalcreativityinordertoinnovateandbetheactorsinthisdigitaltransformation,whichis well underway. Digital transition is an ongoing process product innovation becomesopen and shared, innovation of client experience and disruption. Société Générale haschosentounderstand,toacceptthesenewchallengesandtochangedeeply.

ClassificationJEL:G21,O31,O32.

ANDRÉCICHOWLAS

TechnologyandTranformationofBankingIndustry:TheCaseofCapgemini’sTechnoVision

Thebankingindustryisatamajorcrossroads,duetotheexponentiallyincreasingthreatof disruption and disintermediation from non-traditional competition – notably FinTechfirmsandnewmoreagilebanks.Rapidinnovationsandtechnologicaladvancementshave

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made technology a cornerstone of driving competitive differentiation and drivingsustainable profitable growth – by delivering superior customer experience andoperational efficiencies. These changes require banks to integrate technology as part oftheirentirecorporateDNAandbusinessstrategiestodigitallytransformthemselves.Itisno longer sufficient to simply incorporate technology into “business as usual”, what isneededistoputtechnologyattheforefrontofthebusiness.

Capgemini’s TechnoVision provides bank executives and technologists with a clearframework and building blocks to re-shape their businesses for success in these moredynamic,fast-pacedtimes.Italsoprovidessomeguidancetobanksbusinessesleadersonhowleveragetechnologiesintheirtransformation.

ClassificationJEL:G21,L10,L86.

BERTRANDLAVAYSSIÈRE

DigitalImpactonEconomicModels

Four examples illustrate how digital impacts the operating model of financialinstitutions for their revenuegeneration streamsbut also the heart of the value creationitself. Beyond those examples, the author illustrates via examples the changes digitalgenerates, often concurrently with some regulatory changes, under way in the revenuegeneration mechanism, in the costs management and on the P&L and balance sheetmanagement.

ClassificationJEL:G20,L25,O33.

MARIANNEVERDIER

Innovation,CompetitionandRegulationintheMarketforOnlineBankingServices

The development of online banking services impacts competition in retail bankingmarkets. Several non-banks (mobile network operators,merchants, start-ups, platforms)have started to offer payment services, to act as intermediaries between lenders andborrowers or to collect financial data about consumers. Regulatory authorities havetherefore adapted the existing legal framework to encourage entry, while protectingconsumersfromthevariousrisksthatcouldemergeinthemarket.Thisarticlesurveysthelinks between innovation, competition and regulation in the market for online bankingservices.

ClassificationJEL:E42,G21,L96,O33.

JEAN-MARCBOYER

WhataretheOpportunitiesofBigDataforPricingApproaches?

Data Scientist was declared the “sexiest” job of the 21st century by the HarvardBusiness Review. By what means can the treatment of massive data disrupt financialservicesand itspricingapproaches?Whatarecurrently theopportunitiesand threatsofbig data ? Despite miscellaneous constraints, opportunities pop up that the financeindustrymustseizenow.

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ClassificationJEL:G20,L11,L86,L96.

JEAN-YVESFOREL

PaymentsIndustry,WhatInnovation?

Aftera longperiodofstability, thepayments industrymustnowdeeplychangealongwith the customer expectations in a context of innovation effervescence and increasedcompetition.Inordertomeetthesechallenges,innovationiskeytodrivebothadded-valueanddifferentiation.With the increasingporositybetweenphysical anddigital,onlynewpayment paths can meet the fast-changing needs of consumers and merchants. Bankstherefore take several initiatives in order to successfully achieve this mutation. Byreshapingtheirsystemsandinfrastructures,theystrivetoremainthecentralplayersinthepaymentslandscapeandavoidthelossofvalueduetodisintermediation.

ClassificationJEL:E42,G20,O33.

FRANÇOISR.VELDE

CanBitcoinReplaceCurrencies?

Candigitalmoneyreplaceexistingcurrencies?AdetailedexaminationoftheBitcoinprotocolshowsthatthisconceptualandtechnicalachievementisstillfarfrombecomingafull-fledged currency, but the innovations in financial technology that it spurred couldhaveimportantconsequencesforpaymentsystems.

ClassificationJEL:E42,G20,L86,O33.

FANYDECLERCK,LAURENCELESCOURRET

DarkPoolsandHigh-FrequencyTrading:AUsefulEvolution?

Technologicalinnovationandregulatorychangeshavefavoredthedevelopmentoftwogrowingphenomena associatedwith increasedopacity in financialmarkets : dark poolsandhigh-frequencytrading(HFT).OneoutofeverytwotransactionsnowemanatesfromHFT.Darkpoolsnowattract10%oftotaltradingvolumeinEuropeand20%inUnitedStates, due to high frequency traders’ attempt to profit from uninformed investorswhotradeinthesevenues.EmpiricalstudiesshowthattransactioncostsareathistoricallowsduetothecompetitivepressureofHTF.However,transactioncostshavebeenunchangedsince 2009 even though speed continues to increase. Market efficiency has improvedthroughHFT arbitrage activity.Nevertheless, asmore andmore trading volumemovesintodarkpools, theriskofdeterioration inmarket liquidityandefficiencywill increase.Thisevolutionalsohasimplicationsintermsofcompetitiondistortion,operationalrisks,andtechnologicalrisks.Overall,darkpoolsandHFTposesignificantchallengestomarketregulators.

ClassificationJEL:D40,D53,D62,G14,G20,L10.

MARIE-LAUREBARUT-ETHERINGTON,DENISBEAU

BondMarketsLiquidtyandTechnologicalInnovation

Fixed income markets are in a state of transition and this is accompanied by the

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perception of a decrease in liquidity and a risk for the financial system stability. Therealityismorenuancedandtraditionalindicatorssometimesappearincontradictionwithparticipants’intuition.Thechangeinliquidityprovisionseemstoaffectmostthosemarketsegments that are less deep than others, and is more visible through an increase involatilityandareductionofthetransactionsizes,thanthroughthevariationinitspricing.This evolution can be attributed to cyclical and structural drivers, one of the mostimportant being technological innovation. By reducing transaction costs and wideningmarketaccess,theriseofelectronictradinghashadapositiveimpactonliquidity.Butithasalsoallowedtheemergenceofnewcompetitorsandtheiralgorithmstrategies,whoseimpact on liquidity canhave adestabilizing effect.Authorities aswell as private sectorshould then pursue their efforts to enhance transparency, while ensuring that theycontributetoalevelplayingfieldandpreservetradingintermediaries’diversity.

ClassificationJEL:G12,G23,G24.

GERARDHARTSINK

TechnologyIstheMajorEnablertoManageRisksinFinancialMarkets

Trading, clearing and settlement of financial instruments are not possible any morewithouttechnology.Howevertechnologyaloneisnotsufficienttocreatearobustfinancialmarket infrastructure that meets the expectations of the regulators and the marketparticipants to manage risks and ensure low operational costs. In this article insight isgivenhowthepublicsectorinitiatedandisoverseeingtwotechnologyintensiveprograms-CLSandGLEIF-tomitigatetherisksofmarketparticipantsinfinancialmarketsandhowthe regulators are supported in their role to avoid and mitigate systemic risks in theireconomy.Inbothcases,publicsectorobjectivescanonlyberealizedifpublicauthoritiesandmarketparticipantscooperateinaconcertedaction.

ClassificationJEL:G10,G23,G24,G28.

MAJDIDEBBICH,GÉRARDRAMEIX

NewTechnologiesandProtectionofInvestors:TheRoleofAMF

Newtechnologiesfostertheemergenceofinnovativefinancialintermediationchannelsandallowabetterallocationofsavingsintheinterestofinvestorsandtheeconomyasawhole.Thesecanalsohelpcompaniesreducetheirbankfinancingdependence.Throughthreeexamples,thisarticledepictsnewissuesthefinancialregulatorisfacing.Theriseofnew technologies should be accompanied and encouraged but the regulator also has topreventandtakeactionagainstallabusivepracticesthatmaysurfaceinthewakeofonlinetools.Forextradingplatformsprovideatypicalexampleoffinancialproductsthatarenotsuitedto individual investors.Onthecontrary, the introductionofregulatedstatusandalabeldedicatedtocrowdfundinghelpsecureanewinvestmentvehicleforinvestorswhichmight diversify and supplement traditional financing sources for companies in the longrun.Finally,thisarticlefocusesonsocialmediaasanewcommunicationtoolforfinancialagents.Socialmediaallowprofessionalstoofferparticularlyrichandinnovativecustomerexperience,andcancontributetostrengtheningthequalityoftheinformationprovidedtoinvestorswhengoodpracticesaremet.

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ClassificationJEL:D14,D18,G28,L86.

OLIVIERGUERSENT

WhichLegislationfortheNewcomersonthePaymentsMarket?

Thepaymentsindustryischanging.Thisactivitythatwasstillreservedtobanksafewyearsagoopenedinrecentyearstonewplayers,thesocalledpaymentserviceproviders.Continuousinnovationanddigitizationoftheeconomyareonceagainshakingthemarket.Not only new competitors continue to appear on themarket by attacking activities thatbanks used to monopolize, but in addition, new technologies are changing payments.Mobilepayment,peer-to-peer,instantpaymentsarerevolutionsthatthemarketwillhavetointegrateinthecomingyears.Thelegalframeworkhadtoadaptandallownewplayerstoenterthismarkettomakeitevenmorecompetitive.Thecardmarketisnotleftapart,alsocoveredbylegislationthatsetsupanumberofrulestomakeitmorecompetitive.

ClassificationJEL:E42,G28,L86.

ÉDOUARDFERNANDEZ-BOLLO

FinancialInstitutionsandCybercrime

Althoughcyber-attackshavesofarhadalimitedimpactontheFrenchfinancialsector,theyrepresentaserious threat to ITsecurity,businesscontinuityanddataprotectionforbanking institutions and insurance companies. The emergence of these new risks is amatter of special attention for the supervisors. Regulations on internal control andmanagement of operational risk form the cornerstone of the prevention frameworksalreadyinplace,thathavetobecompletedbythedevelopmentofaproactivemonitoringallowingtoidentifytheevolvingthreatsandtodefinetheappropriateprotectiontools.TheACPRconsidersthatprogresshastobemadeinpriorityinimplementingmoreefficientaccessrightmanagementandITintrusiondetectionsystems.Cooperationbetweenpublicandprivate stakeholders iskey,both forconducting industry-wideexercisesallowing totest the companies’ robustness and for improving the identification of threats with anincreasedexchangeofinformation.Finally,theactionofthesupervisormustbepartofaEuropeanorinternationalframework,inordertoensurethecoordinationofinitiatives.

ClassificationJEL:G21,G28.

GEOFFROYENJOLRAS,MATHIEUGATUMEL,PHILIPPEMADIÈS,OLLIVIERTARAMASCO

TheSystemsCoveringNaturalandNuclearDisasters:AnInspirationtotheDepositInsuranceSystem

This article focuses on the systems covering the risks of banking failures, andmorespecificallythedepositinsurance,inthecontextofafinancialcrisis.Bynature,bankingdefault risks present a strong analogy with “large risks” such as natural and nucleardisasters.Theselatterrisksbenefitfromspecificmechanismsregardingtheirmanagementand financial coverage using specific instruments and governance. Such processes caninspirethecurrentrevisionofthebankingsystemsforhedgingriskattheorganizationalandfinanciallevels.Wethereforeconsidertheopportunitytocompareexplicitlybanking

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risks,naturalandnucleardisasters.Thiscomparisonleadstosomerecommendationsforthedepositinsurancesystem.

ClassificationJEL:G21,G22,G28,L94.

JEAN-GUYDEGOS,OUSSAMABENHMIDEN

DidtheRoleandthePoweroftheCreditRatingAgenciesChangeovertheBaselI,BaselIIandBaselIIIAgreements?

Inthispaper,westudytherelationshipbetweenthelong-standingratingsystemofthecredit rating agencies that has become essential overtime, and another system, whichneeds to ensure its own legitimacy with controls based on ratings or comparisons, theBasel agreements. The three traditional locks – intermediation, regulation,compartmentalization–whichservedtosafeguardnationalandinternationalfinance,havedisappeared and the 3 D revolution (disintermediation, deregulation, de-compartmentalization)togetherwithdematerialization,ledtoadramaticincreaseofglobalfinance. The ensuing serious imbalances have required ongoing monitoring andenforcement of prudential rules. These rules, difficult to build from scratch and toimplement, benefited from the existence of rating agencies. In this article we seek todetermine how rating agencies have developed and increased their power through theestablishmentofthesuccessiveagreementsBaselI,BaselIIandBaselIII.

ClassificationJEL:G20,G28.

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1*Partner,Ares&Co.Contact:[email protected].

2** Adjoint au directeur général des opérations, Banque de France. Contact :

[email protected].

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1* Professeur d’économie et finance, HEC ; directeur général, BRED. Contact :

[email protected].

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1* Directrice des ressources et de l’innovation, Société Générale. Contact :

[email protected].

2Boursorama,labanquelaplusrecommandéeenFranceselonleBrandAdvocacyIndex

duBostonConsultingGroup.

3Internetmobile:tabletteetsmartphone.

4Lemodesaas(softwareasaserviceoulogicielentantqueservice)estunmodèleoù

leslogicielssontinstalléssurunserveurdistantplutôtquesurlamachinedel’utilisateur.

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1*Vice-président,Capgemini.Contact:[email protected].

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1*Partner,Ares&Co.Contact:[email protected].

2W3Cdésigneunorganismedestandardisationdestechnologiesduweb.

3Lagénomiqueétudielefonctionnementd’unorganisme,d’unorgane,d’uncancer,etc.

àl’échelledugénome,aulieudeselimiteràl’échelled’unseulgène.

4Lemontant des espèces retirées aux guichets automatiques des banques, qui ne tient

donc pas compte des espèces distribuées directement dans les agences, représente enFrance6,6%duPIBen2014,contreenviron12%enmoyennepourl’Unioneuropéenne.

5Source:Assisesdesmoyensdepaiement(2015).

6Stratégienationalesurlesmoyensdepaiement,octobre2015,ministèredesFinanceset

des Comptes publics,www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/Strategienationale_sur_moyens_de_paiement_102015.pdf.

7Leterme«banquedegestionprivée»couvrevolontairementunspectrelarge.Ils’agit

de la gestion de portefeuille pour des particuliers allant de 150 000 euros à plusieursmillions d’euros d’actifs investissables ; les impacts varient en fonction despositionnements.

8Les directives sur la gestion d’actifs (Undertakings for Collective Investments in

Transferable Securities –UCITS etAlternative Investment FundManagers Directive –AIFMD)affectentaussiindirectementlesbanquiersprivés.

9LeLABAssurances,«LeServ’Assureest-ill’avenirradieuxdel’assurance?»,janvier

2015.

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1* Centre de recherches en économie et droit (CRED), université Paris 2 Panthéon-

Assas ; Centre d’économie industrielle de Mines ParisTech (CERNA). Contact :[email protected].

2Freedman(2000)définitlabanqueenlignecommelafournituredeservicesd’accèsau

compte(viadesautomatesoudesordinateurs)etdesmoyensdepaiementprépayés.Nousajoutonsàcettedéfinition lamiseen relationdesprêteursetdesemprunteurs.Pourunedéfinitionplusprécisedesservicesbancairesproposésenligne,cf.tableau1.

3PourunerevuedesentrantsnonbancairesdanslesecteurdespaiementsauxÉtats-Unis,

voirBradfordetal.(2003).

4LasociétéeBays’estscindéedePayPalen2014.

5FrameetWhite(2009)définissentune innovationfinancièrecommeunserviceouun

produitquiréduitlescoûts,lesrisquesouquiaméliorelasatisfactiondelademandedesparticipantsausystèmefinancier.

6Pourunpointplusdétaillésurlesservicesdepaiement,lelecteurpourraseréféreràla

contributiondeOlivierGuersentproposéedanscenuméro.

7PayPalfaitpartiedesexceptions.

8AppleadéveloppéApplePay,unservicedepaiementsanscontactaupointdeventesur

iPhone6quiesttrèsdiffuséauxÉtats-Unis.Ilestcompatibleaveclamajoritédescartesdecréditdanscepays.

9Amazon et PayPal ont commencé à proposer aussi des services de prêt aux petites

entreprises.

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10VoirCarletti(2008)ausujetdudilemmeentreconcurrenceetstabilité.

11L’Australie a révisé leBanking Act en 2014 pour créer un statut spécifique pour les

institutions autorisées à tenir des comptes de dépôt (authorized deposit-takinginstitutions). Aux États-Unis, une révision de la FinCEN en 2001 a rendu possible lacréationdesmoneyservicebusinesses.

12Voirledocumentpubliéenmars2013parlaFinancialConductAuthorityauRoyaume-

Uni.

13Lesbanques fontdeséconomiesd’envergureenproposantà la foisdesdépôtsetdes

prêtslorsquelecoûtmarginald’unprêtdécroîtaveclevolumedesdépôtscollectés.

14Voir l’article sur le site pymts.com «HowMany Consumers in Apple Pay’s Bushel

Basket?».

15Lessolutionsbankinaboxsontparticulièrementdéveloppéesdanslespaysnordiques

(voir lecasde labanqueSkandiabankenenSuède,unebanqueen lignepureplayerquidisposeseulementd’uneagenceàStockholm).

16Lesmarchands ne payent pas de frais additionnels à leur banque pour utiliserApple

Pay. Apple reçoit une remise de 0,2 % de la valeur de la transaction par rapport auxcommissions habituellement payées aux émetteurs de carte. En effet, ce chiffre a étécalculéententantcomptedufaitquecettesolutionréduitlafraudeaupointdevente.

17JamieDimon,lepatrondeJPMorgan,adéclaréquel’entréed’Applesurlemarchédes

transactionsdepaiementavecApplePayétaitunesituation«gagnant-gagnant»pourlesbanquesetpourApple.

18VoirBourreauetVerdier(2010)pourdesexemplesconcernantlepaiementparmobile.

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19VoirIP/11/1076.

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1* Ancien délégué général, Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA) ;

président, Assurances Conseil Études Boyer (ACEB). Contact :[email protected].

2NotonlySQLouNoSQL:systèmesdegestiondebasededonnéesquin’estpasfondée

sur l’architecture classique des bases relationnelles ; à l’origine, ces systèmes ont étéutilisés pour des bases de données géantes telles celles des sites internet de très grandeaudience.

3Voir le projet de loi pour une République numérique : www.republique-

numerique.fr/consultations/ projet-de-loi-numerique/consultation/consultation#opinion-type—titre-iii-l-acces-au-numerique.

4Voirlesite:http://ec.europa.eu/finance/insurance/consumer/mediation/index_fr.htm.

5Voirlesite:http://media.swissre.com/documents/sigma2_2014_en.pdf.

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1* Directeur général en charge de la banque commerciale et de l’assurance, BPCE.

Contact:[email protected].

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1*BanquedeRéservefédéraledeChicago.Contact:[email protected].

Les opinions exprimées ne sont pas nécessairement celles de la Banque de RéservefédéraledeChicagoouduSystèmedeRéservefédéral.

2Parconvention,Bitcoindésigneleprotocoleetlebitcoinl’unitémonétaire.

3Onparle souventde registreoudegrand livre,mais la chaînen’estpasorganiséeen

comptes (même si elle contient toute l’information nécessaire pour reconstituer lescomptesdetouslespossesseurs).

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1* Toulouse School of Economics ; Toulouse School of Management. Contact :

[email protected].

2**ESSECBusinessSchool.Contact:[email protected].

3UnSMNn’estpasuneBourse,maisuncourtier.Parconséquent, il fait faceàmoins

d’exigences réglementaires que les Bourses, qui ont notamment une obligation dediffusiondesmeilleursprixdeventeetd’offrequisontenattented’exécutionencarnet.

4Source:FidessaFragmentationIndex.

5Les échantillons de données régulièrement à disposition des chercheurs sont ceux du

Nasdaq et ceux du Nasdaq OMX. Récemment, les régulateurs canadien (IIROQ) etaustralienontégalementdonnél’accèsàdesdonnéesidentifiantanonymementlessociétésdeTHF.

6Instinet lanceen1986 lepremierdarkpool auxÉtats-Unis, appelé alorsAfterHours

Cross. Depuis, Instinet, racheté en 2011 par Nomura, détient plusieurs dark pools auniveaumondial (commeVWAPCross auxÉtats-Unis et enEuropeou InstinetBLXenAustralie).

7Àpartirdel’analysedesdonnéesducarnetd’ordres,lesalgorithmesessaientdeprévoir

les stratégies d’exécution des autres participants. Notamment, ils essaient de détecterl’exécution d’un bloc découpé (notamment par l’envoi d’ordre-test ou ping order). Ilstâchentensuite,parexemple,d’acheteravantlepassagedelaséquencedesordresd’achatdublocet revendent justeaprès l’exécutiondecettedernièreréalisantainsiunprofitdûuniquement à la pression temporaire exercée par les ordres sur le prix, une pratique(appeléefront-running)dénoncéeparplusieursinvestisseurs.

8RosenblattSecuritiesestuncourtieraméricainquipubliemensuellementunrapportsur

l’étenduedesdarkspoolsvis-à-visdesmarchéslit.

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9VoirlarevuedelittératuredeBiaisetFoucault(2014).

10Lesordresflash,lebluffing,lelayeringetlestuffingsontdenouvellesmanipulationsde

marchéreposantsurlavélocitédesalgorithmesàplaceretannulerrapidementdesordresdanslecarnet.

11Voir lacrise laplusmarquantedu6mai2010,appelée flashcrash,durant laquelle le

DowJonesaperdu1000pointsenquaranteminutes.

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1*Chefduservicedegestiondesréserves,Directiongénéraledesopérations,Banquede

France.Contact:[email protected].

2**Directiongénéraledesopérations,BanquedeFrance.Contact:denis.beau@banque-

france.fr.

3VoirCGFS(2015).

4EngénéralappliquéaumarchédesUStreasuries,letermeon-the-rundésignelestitres

les plus récemment émis pour chacune des maturités. Les autres titres sont désignéscommeoff-the-run et sont moins traités par les teneurs de marché. Lorsqu’un titre estémis,ildevientlenouveauon-the-runetlesprécédentssontreléguésprogressivementaustatutdeoff-the-run.

5FlashrallysurlemarchédesbonsduTrésor:le15octobre2014,letauxdubenchmark

àdixansaméricaina,entre9h33et9h45(heuredeNewYork),perdu16pointsdebase,puis a rebondi pour effacer intégralement cette baisse. Aucune cause évidente ne peutexpliquerun telmouvement, sansprécédentdans l’histoire récentedumarchédes titresd’Étataméricains.

6Le 7 mai 2015, dans un contexte de dépréciation du marché obligataire allemand

entamédepuisunequinzainedejours,letauxduBundàdixansestbrusquementmontédeplus de 20points de base avant de revenir sur ses niveauxd’ouverture.Là nonplus, iln’existepasderaisonspécifiqueexpliquantledéclenchementd’untelmouvementcejour-là.

7Comptetenudesrisquesdecréditetdemarchéenrèglegénéraleplusimportantssurles

dettesdusecteurprivéquesurlesdettessouveraines,laréductiondesinventairestouchecestitresenpriorité.

8Teneursdemarchéhabilitésàparticiperdirectementauxadjudicationsdel’émetteur(et

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doncaumarchéprimaire).

9Sur un marché de gré à gré ou OTC (over the counter), l’offre et la demande se

rencontrentbilatéralementalorsquesurunmarchéorganisé,lescontrepartiesnenégocientpasbilatéralement,maisplacent desordresd’achat et deventequi constituent le carnetd’ordres,viaunintermédiairedetypesociétédeBourseoucourtier.

10Ainsi,unclientdegrandetaillequitraitesouventpourrasevoircoterdemeilleursprix

qu’unclientoccasionneldepetitetaille.

11JointStaffReport:theUSTreasuryMarketonOctober15,2014,juillet2015.

12Mais on retrouve souvent de grandes firmes de courtage au capital de plateformes

(ICAPpourBrokerTec,parexemple).

13Letradingautomatisé,etplusspécifiquementleTHF,estaucentredespréoccupations

des régulateurs depuis plusieurs années, au niveau national comme au niveauinternational.UncadreharmonisévavoirlejourenEuropepuisquelarégulationduTHFa été l’un des objectifs de la révision de la directive MIF (marchés d’instrumentsfinanciers) parMiFID 2. Aux États-Unis, le Code de bonne conduite des dealers USTélaborépar leTMPG(TreasuryMarketPracticesGroup) a étémis à jour enavril2015(White Paper on Automated Trading in Treasury Market) pour y inclure desrecommandations spécifiques concernant le trading automatisé, à l’adresse desplateformescommedesdealers,etvisantàgarantirl’intégritéetl’efficiencedumarchéenlimitantlepotentieldisruptifdesstratégiesalgorithmiquessursonfonctionnement.

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1*Senioradvisor,CLSGroup ; président du conseil d’administration,GLEIF (Global

LegalEntityIdentifierFoundation).Contact:[email protected].

2CNYpourrenminbichinois,RUBpourroublerusse,TRYpourlivreturque,BRLpour

réalbrésilienetINRpourroupieindienne.

3Lessitesinternetsontprécisésdanslabibliographieenfind’article.

4Voir le site internet duLegal Entity IdentifierRegulatoryOversightCommittee (LEI

ROC).

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1*Autoritédesmarchésfinanciers(AMF).Contact:[email protected].

2**Président,Autoritédesmarchéfinanciers(AMF).

3Enmoyenne,15%durevenudisponiblebrut(d’aprèsl’Insee),contre12,7%dansla

zoneeuroen2014(d’aprèsEurostat).

4Source:Banquedesrèglementsinternationaux.

5Contract for difference ou contrat sur la différence : contrat entre deux parties, l’une

«acheteuse»etl’autre«vendeuse»,stipulantquel’acheteurencaisseraoudécaisseraladifférence entre le prix de l’actif au moment de sa vente et son prix au moment del’exécution du contrat. Si la différence est négative, c’est alors le vendeur qui encaissecettedifférence.

6Rollingspotforex:reportdepositionforexdujouraulendemain.

7Pourplusd’informations,voirAMF(2014)etAMF(2015b).

8Pourplusd’informations,voirAMF(2015a).

9Registreuniquedesintermédiairesenassurance,banqueetfinance.

10Ces enjeux ont fait l’objet d’une consultation publique lancée par l’AMF en octobre

2015surlacommunicationàcaractèrepromotionnelsurlesmédiassociauxeffectuéeparlessociétésdegestiondeportefeuilleetlesémetteursdetitresdecréances.

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1*Directeur général, Stabilité financière, services financiers et uniondesmarchés des

capitaux (FISMA), Commission européenne. Contact : [email protected].

Lesopinionsexpriméesdanscetarticlesontcellesdel’auteuretnepeuventenaucuncasêtreinterprétéescommecelledelaCommissioneuropéenne.

2VoircettecourtefictionécriteparPhilippeHerlindanssonblog(Herlin,2015).

3Voirlesite:http://data.consilium.europa.eu/doc/document/PE-35-2015-INIT/en/pdf.

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1*Secrétairegénéral,Autoritédecontrôleprudentieletderésolution(ACPR).Contact:

[email protected].

2On entend par système d’information (SI) l’ensemble des ressources, qu’elles soient

matérielles(serveurs,postesdetravail,etc.), logicielleset/ouinformationnelles(donnéesinformatiques,documentspapiers,etc.).

3Cettetechniquereposesurl’envoidespam,c’est-à-direl’envoimassifdecourrielsnon

sollicitésàungrandnombredepersonnes,afind’enabusercertainesquin’auraientpasuneprotectioninformatiquesuffisante.

4Logicielutilisépardes cyberattaquantspourporter atteinte à l’intégritéd’un système

d’information par la destruction, le vol ou l’altération de données contenues dans unsystèmed’information.

5Voldescoordonnéespersonnellesd’environ80millionsdeclients(personnesphysiques

etPME).

6Lesexpertsestimentquel’attaqueCarbanaks’estsoldéepardesretraitsfrauduleuxet

desvirementsd’unmontantcomprisentre300M$et1Md$,quionttouchéunecentainede banques dans trente pays. Par comparaison, l’attaque Anunak a concerné unecinquantainedebanquesrussesetcauséunpréjudicede25M$en2014.

7Directive2013/36/UEduParlementeuropéenetduConseileuropéendu26juin2013

concernantl’accèsàl’activitéetlasurveillanceprudentielledesétablissementsdecréditetdes entreprises d’investissement, dite en anglais « CRD IV » (Capital RequirementsDirectiveIV).

8Lerisqueopérationnelsedéfiniteneffetcomme«lerisquedepertesdécoulantd’une

inadéquationoud’unedéfaillancedesprocessus,dupersonneletdessystèmesinternesoud’événementsextérieurs,ycomprislerisquejuridique»(article4,point52,durèglement

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UE575/2013(CRR)).

9Les directives européennes sur les services de paiement (DSP) et sur la monnaie

électronique(DME),adoptées respectivementen2007eten2009et transposéesdans ledroitfrançaisen2009et2013,fournissentlecadrejuridiquenécessaireàlamiseenplaced’unmarchéeuropéenuniquedespaiements.Ellesvisentàinstaurerunensemblecompletetdétailléderèglesapplicablesàtouslesservicesdepaiementdansl’Unioneuropéenne.

10EuropeanForumontheSecurityofRetailPaymentsouSecuRePayestungroupede

travail précédemment piloté par la BCE, puis coprésidé avec l’Autorité bancaireeuropéennedepuisl’automne2014.

11Le scénario de cet exercice était une cyberattaque visant les plates-formes internes

utiliséespourlestransactionsfinancièresdesbanquesetaboutissantàuneparalysiedelaplacedeParis.

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1* Président, Paris-Île de France Capitale économique. Contact : psimon@cci-paris-

idf.fr.

2Mesrecherchesn’ontpasportésurlesaspectsjuridiques.

3Les supports informatisés (bandesmagnétiques) étaient transportés physiquement sur

leslieuxd’échange.

4ElleavaitétéprécédéeparSchwabauxÉtats-Unis.

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1* Université Paris Ouest Nanterre La Défense ; Sciences Po. Contact :

[email protected].

2Voir,parexemple,Hart(2015).

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1*CNRS,CERAG(Centred’étudesetderecherchesappliquéesàlagestion),université

GrenobleAlpes.Contact:[email protected].

2** IREGE (Institut de recherche en gestion et en économie), université SavoieMont

Blanc.Contact:[email protected].

3*** CNRS, CERAG, université Grenoble Alpes. Contact : philippe.madies@iae-

grenoble.fr.

4****CNRS,CERAG,universitéGrenobleAlpes.Contact:[email protected].

5Comme lemontrentMartinezPeria et Schmukler (2001) pour les pays émergents, la

question du délai d’indemnisation est aussi importante pour crédibiliser aux yeux desdéposants leur système d’assurance des dépôts et éviter des phénomènes de ruéesbancairesdedéposantspourtantassurés.Ainsi,dans l’Unioneuropéenne, ilaétédécidéque le délai d’indemnisation des déposants devait être inférieur à sept jours ouvrables(vingtjoursauparavant).

6La responsabilité de l’exploitant de la centrale sinistrée naît de la défaillance de sa

gestion.Pourautant, l’exploitantnesauraitêtremisenfaillitepuisqu’ilexploitesouventplusieurs autres réacteurs, lesquels nécessitent une attention spécifique et assurent lacontinuitédel’approvisionnementélectrique.Pourcetteraison,lasociétéjaponaiseTepco,exploitantedelacentraledeFukushima,poursuittoujourssesactivitésalorsmêmequesaresponsabilitéestlourdementengagéedanslacatastrophede2011.

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1*UniversitédeBordeaux,centrederechercheIRGO(Institutderechercheengestion

desorganisations).Contact:[email protected].

2**ESSCASchoolofManagement.Contact:[email protected].

3Actuellement,leComitédeBâlecomportetreizemembrescarilaétéélargi.

4SelonleConseildestabilitéfinancière,avril2009.

5Directive89/647/CEEduConseileuropéen,du18décembre1989,relativeàunratiode

solvabilitédesétablissementsdecrédit,Journalofficieldelacommunauté,n°L386du30décembre1989pp.0014-0022.

6Directive2006/49/CEduParlementeuropéenetduConseileuropéen,du14juin2006,

transposée en droit français par la loi n° 2007-212 du 20 février 2007 portant diversesdispositionsintéressantlaBanquedeFranceetparl’arrêtédu20février2007relatifauxexigences de fonds propres applicables aux établissements de crédit et aux entreprisesd’investissement.

7L’ACPR est l’organe de supervision français des banques et des compagnies

d’assurances. Ilaétécréépar l’ordonnancen°2010-76du21 janvier2010autorisant lafusion de la Commission bancaire, de l’Autorité de contrôle des assurances et desmutuelles (ACAM), du Comité des entreprises d’assurance et du Comité desétablissements de crédit et des entreprises d’investissement (CECEI). L’ACPR coopèreavecl’Autoritédesmarchésfinanciers(AMF)etTracfin(Traitementdurenseignementetactioncontrelescircuitsfinanciersclandestins).D’unemanièregénérale,ellereprésentelaFrancedanslesinstancesinternationalesdelabanqueetdesassurances.

8Rappelonsqueletier1estlapartielaplusfiabledescapitauxpropresdesinstitutions

financières. Il comprend le capital social, les résultats mis en réserve, les intérêtsminoritaires dans les filiales consolidées auxquels il faut retrancher les actions

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autodétenuesetlegoodwill.Letier1aétédéfinidanslesaccordsdeBâleI.

9LeComitédeBâlepublie laversion réviséede lanormeBâle III relativeau ratiode

liquiditéàcourtterme,communiquédepresse,ComitédeBâlesurlecontrôlebancaire,7janvier2013.

10Lavalueatriskestunindicateurquimesurelapertemaximalequipeutsurvenirsurla

valeur d’un actif ou d’un portefeuille d’actifs à une probabilité donnée et à un horizondonné.

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CouvertureSommaireTableofcontentsINMEMORIAMINTRODUCTIONLACONDUITEDUCHANGEMENTTECHNOLOGIQUE

BANQUEETNOUVELLESTECHNOLOGIES:LANOUVELLEDONNEHISTOIRED’UNETRANSITIONNUMÉRIQUE:SOCIÉTÉGÉNÉRALETECHNOLOGIEETTRANSFORMATIONDESSERVICESBANCAIRES:L’EXEMPLEDETECHNOVISIONDECAPGEMINI

DESMODÈLESÉCONOMIQUESÀREPENSERLESMODÈLESÉCONOMIQUESBOULEVERSÉSPARLEDIGITALINNOVATION,CONCURRENCEETRÉGLEMENTATIONPOURLAFOURNITUREDESERVICESBANCAIRESENLIGNELATARIFICATIONETLEBIGDATA:QUELLESOPPORTUNITÉS?

TRANSFORMATIONDESINSTRUMENTSETDESLIEUXDETRANSACTION

LESMOYENSDEPAIEMENT,QUELLEINNOVATION?BITCOINPOURREMPLACERLESDEVISES?DARKPOOLSETTRADINGHAUTEFRÉQUENCE:UNEÉVOLUTIONUTILE?LIQUIDITÉDESMARCHÉSOBLIGATAIRESETINNOVATIONTECHNOLOGIQUE

MAÎTRISEDESRISQUESETRÉGULATION

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LATECHNOLOGIEESTLEMEILLEURGARANTDELAGESTIONDESRISQUESSURLESMARCHÉSFINANCIERSNOUVELLESTECHNOLOGIESETPROTECTIONDESÉPARGNANTS:L’ACTIONDEL’AMFQUELLERÉGULATIONPOURLESNOUVEAUXENTRANTSDANSL’INDUSTRIEDESPAIEMENTS?INSTITUTIONSFINANCIÈRESETCYBERCRIMINALITÉRecensionNOUVELLESTECHNOLOGIESETSERVICESFINANCIERSChroniqued’histoirefinancièreMONNAIEDESPAUVRES,MONNAIEDESRICHESAUXIXESIÈCLE

ARTICLESDIVERSLACOUVERTUREDESCATASTROPHESNATURELLESETNUCLÉAIRES:UNESOURCED’INSPIRATIONPOURL’ASSURANCEDESDÉPÔTSBANCAIRESLERÔLEETLEPOUVOIRDESAGENCESDENOTATIONONT-ILSCHANGÉAUFILDESACCORDSDEBÂLEI,BÂLEIIETBÂLEIII?

Résumés/Abstracts