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Glissements de tâche et responsabilité

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Glissements de tâche et responsabilité

Définition

Glissement de tâche = un acte réalisé par un professionnel qui n’en a pas la compétence règlementaire.

La référence est donc le diplôme et pas la compétence effective de la personne. L’habitude n’est pas nécessaire et ne justifie pas le dépassement.

Exemples -  Une infirmière de bloc qui recoud la peau.

-  Une infirmière de SSPI qui décide seule des retours en chambre

-  Une infirmière aux urgences qui prescrit les radios et bilans biologiques

-  Une aide-soignante qui change les perfusions

-  Une aide-soignante qui fait un dextro

-  Un manip radio qui travaille sans prescription

-  Une sage-femme qui pose une ventouse….

Nos constats

Ø  C’est une réalité qui se retrouve tant dans l’hospitalisation privée que publique, faisant l’objet aujourd’hui d’une banalisation.

Ø  Les professionnels de santé connaissent mal leur champ de compétence, et encore moins celui des autres professionnels avec lesquels ils sont sensés collaborer (nous recevons quotidiennement des questions : ai-je le droit de…).

Ø  La structure de la règlementation est complexe et il est effectivement parfois difficile de déterminer les actes autorisés et leurs conditions de réalisation.

Nos constats

Ø  Cette problématique est encore plus aigüe la nuit, par exemple dans les EHPAD.

Ø  Il existe de nombreux protocoles de service qui prévoient des glissements de tâche, sans pour autant les rendre légaux…

Ø  On retrouve de nombreux « faisants fonction » alors que la réglementation ne prévoit que les faisants fonction d’interne (art. R. 6153-41 CSP) ou faisants fonction de cadre (décret du 31/12/2001).

Les différentes responsabilités

�  amiable

�  civile Indemnisation de la victime

�  administrative

�  CRCI

�  pénale Répression du coupable

�  disciplinaire Sanction professionnelle

Cumul possible

0

10

20

30

40

50

plaintespénales

plaintesordinales

Proc. Civiles réclamations CRCI

1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 20032004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

% personnes non satisfaites

DECLARATIONS DOMMAGES CORPORELS (1995-2012)

La victime doit prouver :

Une faute = manquement aux bonnes pratiques professionnelles

Un dommage : préjudice certain, direct et personnel

Un lien de causalité entre les deux

La responsabilité indemnitaire

La responsabilité pénale

" La responsabilité pénale est toujours personnelle : « nul n’est pénalement responsable que de son propre fait » (art. 121-1 CP)

" Plusieurs soignants peuvent être condamnées simultanément

(ex.: AS/IDE ; IDE/médecin…)

" Elle peut être retenue…même s’il n’existe aucun préjudice pour le patient

L’élève est responsable pénalement

TGI de Cherbourg 4 décembre 2001 Faits : Un homme de 88 ans est décédé des suites d’une injection par intraveineuse directe de 4 gr. de chlorure de potassium réalisée par une élève infirmière

Décision : L’élève est reconnue coupable d’homicide involontaire pour avoir administré par négligence le produit qui provoqua la mort – condamnation à une peine de 8 mois d’emprisonnement avec sursis.

L’IDE est condamnée à 12 mois avec sursis pour défaut de surveillance des actes d’administration médicamenteuse réalisés par l’élève.

Actes professionnels infirmiers (art. R 4311-1 à 15 CSP)

- Définitions de l’exercice de la profession

- Soins relevant du rôle propre

- Participation à la vaccination

- Santé mentale

- Soins effectués sur prescription médicale, seul

ou avec un médecin pouvant intervenir à tout moment

- Participation à la mise en œuvre par le médecin

- Activités effectuées prioritairement par l’IBODE

- Cadre spécifique de l’ IADE

- Activités effectuées prioritairement par l’IPUER

- Conduite à tenir en cas d’urgence

- Actions en adéquation avec les besoins de santé identifiés

Article R. 4311-4 CSP

Lorsque les actes accomplis et les soins dispensés relevant de son rôle propre sont dispensés dans un établissement ou un service à domicile à caractère sanitaire, social ou médico-social, l’infirmier peut, sous sa responsabilité, les assurer avec la collaboration d’aides-soignants, d’auxiliaires de puériculture ou d’aides médico-psychologiques qu’il encadre et dans les limites de la qualification reconnue à ces derniers du fait de leur formation.

Cette collaboration peut s’inscrire dans le cadre des protocoles de soins infirmiers.

Référentiel d’activité Aide-Soignant (annexe IV) (arrêté du 25 janvier 2005)

"   Dispenser les soins d’hygiène et de confort de la personne

"   Observer la personne et mesurer les principaux paramètres liés à son état de santé

"   Aider l’infirmier à la réalisation des soins

"   Assurer l’entretien de l’environnement immédiat de la personne et la réfection des lits

"   Entretenir des matériels de soin

"   Transmettre ses observations par oral et par écrit pour maintenir la continuité des soins

"   Accueillir, informer et accompagner les personnes et leur entourage

"   Accueillir et accompagner les stagiaires en formation.

PRINCIPAUX TEXTES QUI REGISSENT LA PROFESSION de MANIP RADIO

" Art. L. 4351-1 à L. 4353-2 du Code de la Santé Publique

" Décret du 17 juillet 1984 fixant les catégories de personnes habilitées à effectuer des actes d’électroradiologie médicale

" Décret du 19 Novembre 1997 relatif aux actes professionnels et à l’exercice de la profession de manipulateur d’électroradiologie médicale (modifié par le décret du 6 juin 2000 puis du 20 juillet 2005)

" Circulaire DGS/DHOS du mois d’août 2002 relative à l’exercice de la profession de manipulateur d’électroradiologie médicale

MISSIONS DES MANIPULATEURS Décret du 20 juillet 2005

Ø Les compétences des manipulateurs sont définies par le code de la santé publique (art R. 4351-1 à R. 4351-6):

Ø Une contribution à la réalisation (art R.4351-1 )

- des examens nécessaires à l’établissement d’un diagnostic

- des traitements

Ø Actes sous la responsabilité et la surveillance d’un médecin en mesure d’en contrôler l’exécution et d’intervenir immédiatement (art R. 4351- 2 et 3 )

- Imagerie médicale, sauf échographie

- Radiothérapie

- Électrologie

Ø Prescription de protocoles ( art R. 4351-4 )

MISSIONS DES MANIPULATEURS Décret du 20 juillet 2005

Article L. 4351-1 CSP

Est considérée comme exerçant la profession de manipulateur d'électroradiologie médicale toute personne qui, non médecin, exécute habituellement, sous la responsabilité et la surveillance d'un médecin en mesure d'en contrôler l'exécution et d'intervenir immédiatement, des actes professionnels d'électroradiologie médicale, définis par décret en Conseil d'État pris après avis de l'Académie nationale de médecine. Les manipulateurs d'électroradiologie médicale exercent leur art sur prescription médicale.

Coopération entre professionnels de santé Art L. 4011-1 CSP (art. 51 loi HPST, modifié par la loi du 10/8/2011

Par dérogation aux articles …les professionnels de santé peuvent s'engager, à leur initiative, dans une démarche de coopération ayant pour objet d'opérer entre eux des transferts d'activités ou d'actes de soins ou de réorganiser leurs modes d'intervention auprès du patient. Ils interviennent dans les limites de leurs connaissances et de leur expérience ainsi que dans le cadre des protocoles définis aux articles L. 4011-2 et L. 4011-3.

Le patient est informé, par les professionnels de santé, de cet engagement dans un protocole impliquant d'autres professionnels de santé dans une démarche de coopération interdisciplinaire impliquant des transferts d'activités ou d'actes de soins ou de réorganisation de leurs modes d'intervention auprès de lui.

UN EXEMPLE :

L’AFFAIRE DE L’HOPITAL TROUSSEAU (Paris)

film IDE délégation

Olivier, 19 mois

1-02-99 soirée

2-02-99 12 h 30

- Admis à l'hôpital Trousseau pour bronchiolite (Sce Pneumologie). - Retour à domicile - Réhospitalisé pour gastro-entérite aiguë - Transfert en pneumologie (absence de place en gastro-entérologie) Prise en charge par R … (résidente)

Hôpital TROUSSEAU

26-01-99

29-01-99

3-02-99 11 h

12 h 30

13 h

- Vu par R … . diminution du volume des perfusions . reprise alimentation orale . prescription d'une radiographie pulmonaire - Retrait accidentel de la perfusion IV en Radiologie Arrêt de la perfusion (décision de R … sans avoir revu l'enfant) - R … (souffrante) quitte l'hôpital sans donner de consignes de surveillance (notamment, de peser l'enfant) - Selles abondantes . Enfant non vu par l'interne de contre-visite , ni par le chef de clinique de garde

après-midi

Hôpital TROUSSEAU

3-02-99 soirée

4-02-99 5 h 30 5 h 45

10-02-99

- prise en charge d'Olivier par une aide soignante (les 2 infirmières de nuit ayant choisi de se partager les 18 lits … avec elle) - la mère, après avoir demandé en vain la venue d'un médecin, quitte le service à 23 h 30 - Appel de l'interne de garde - Arrêt cardio-circulatoire (25 minutes) Transfert en réanimation - Décès des suites d'une anoxie cérébrale prolongée

Hôpital TROUSSEAU

Hôpital TROUSSEAU

Enquête administrative de l'AP-HP : février-juillet 1999 (1/2)

- Prise en charge de l'enfant par un praticien avec une expérience insuffisante - Evaluation et encadrement insuffisants du chef de clinique - Insuffisance de connaissances et manquement de l'IDE de garde - Non respect de la réglementation de la profession d'IDE par l'équipe de nuit - Insuffisance d'encadrement des équipes soignantes - Défaut d'organisation du service - Refus du personnel de nuit de participer à une formation continue

Hôpital TROUSSEAU

Enquête administrative de l'AP-HP : février-juillet 1999 (2/2)

En mai 1999, à la suite d'une visite inopinée dans le service de pneumologie, l'Inspection Générale de l'AP-HP, constate que les 3 agents de veille le jour du drame avaient, de nouveau, organisé leur service de telle manière que l'aide soignante assurait seule la prise en charge d'un nourrisson alimenté par sonde gastrique et d'un nouveau-né admis le soir même, en urgence, pour une bronchiolite tandis que les 2 IDE avaient, chacune en charge, 3 autres enfants.

Expertise

- La cause probable de l'arrêt cardiaque est la déshydratation aiguë - L'hospitalisation dans un service de gastroentérologie aurait été préférable, mais il ne s'agit pas d'une faute de la part de l'hôpital - L'interruption de la perfusion sans avoir revu l'enfant aurait dû être suivie d'une surveillance plus précise des pesées

Hôpital TROUSSEAU

Expertise

- L'effectif paramédical était suffisant bien qu'un débat existe quant à la définition d'un effectif suffisant. - Un défaut de surveillance des infirmières de nuit et un glissement de délégation des tâches des infirmières vers les aides soignantes a existé. - Il n'est pas dans les missions d'une aide soignante de surveiller les malades car elle n'a pas été formée pour cela et n'en a pas les capacités.

Hôpital TROUSSEAU

Reconnu coupable de

Emprisonnement avec sursis (mois)

Amende (euros)

IDE de garde Cadre infirmier de nuit IDE de nuit A-soignante de nuit

- HI - HI - Mise en danger d'autrui (MDA) - Complicité d'exercice illégal de la profession d'IDE (CEIPI) - HI - MDA - CEIPI - HI - MDA - EIPI

4 4 4 3

1 000 1 000 1 000 1 000

Tribunal correctionnel de Paris, 3 septembre 2003

Hôpital TROUSSEAU

CAUSES DES ACCIDENTS

Deux causes cumulées se retrouvent dans la majorité des accidents médicaux :

- Une erreur humaine (dans le domaine de compétence de l’agent)

- Un défaut d’organisation (matériel et/ou humaine) qui n’a pas permis d’éviter les conséquences de l’erreur

Une autre erreur de dosage…

Tribunal Corr. de Pontoise 26/01/2012 (1/2)

Une infirmière exerçant à l'hôpital (2 ans de DE), en service de pédiatrie, prend en charge un enfant de 8 ans souffrant d’une encéphalopathie congénitale profonde, tétraplégique et épileptique.

Il est admis le 1er décembre pour une dégradation de l’état général avec œdème généralisé et détresse respiratoire.

L’infirmière demande à la mère quel est le traitement antiépileptique habituel et la mère aurait répondu 4 gouttes de Rivotril® (=0,4mg) (clonazépam) le soir. L’infirmière a compris 4 mg et n’a pas réussi à joindre le médecin du service pour confirmation. Elle administre 2 comprimés de 2mg écrasés dans la sonde gastrique, soit 10 fois la dose, à 20h15.

L’état respiratoire de l’enfant sera précaire dans la nuit.

Le lendemain matin l’enfant est très somnolant et peu réactif. L’erreur est découverte à 13h, annoncée clairement aux parents et il est décidé (oralement) avec les parents de ne pas le transférer en réanimation pour une assistance respiratoire. Il décède à 22h30 suite à une insuffisance cardio-respiratoire majeure.

Tribunal Corr. de Pontoise 26/01/2012 (1/2)

Selon le rapport d’autopsie, « le décès serait consécutif à une insuffisance respiratoire avec œdème pulmonaire chez un enfant atteint de lissencéphalie » Longue discussion sur le lien de causalité entre le surdosage en Rivotril® et le décès. « Il est clairement établi, malgré le mauvais état de santé général de l’enfant, que le surdosage en Rivotril® a contribué à la réalisation du décès de l’enfant et le Lien de causalité pour être indirect n’en est pas moins certain ». Condamnation de l’infirmière à 1 mois d’emprisonnement avec sursis car elle a tout de suite reconnu les faits, sans inscription au casier judiciaire. L’infirmière, très affectée par ce décès n’a pas été sanctionnée sur le plan disciplinaire et a demandé sa mutation du service de pédiatrie.

RÉGULATION PAR UNE IDE

TC de Meaux : Régulation par une IDE

Enfant de 9 mois conduit par sa mère aux urgences.

L’interne de garde établit le diagnostic de déshydratation et recommande de revenir à l’hôpital si la diarrhée persiste ou si l’enfant refuse de boire. Dans la journée la fièvre demeure importante et les Vomissements persistent.

Durant la nuit, la mère lui donne un bain pour faire tomber la fièvre mais le trouve pâle, tremblant de froid, les lèvres bleues, la peau marbrée et réagissant peu.

Elle contacte le service par téléphone (1h30 du matin) : appel reçu par l’infirmière de garde.

TC de Meaux : Régulation par une IDE

L’infirmière lui donne des recommandations : La pâleur, les frissons et extrémités froides sont normales ; il est normal que la température baisse puis remonte ; ne pas s’inquiéter de la persistance de la diarrhée si l’enfant prend la solution de réhydratation et ne la vomit pas. La mère rassurée continue durant le reste de la nuit à Lutter contre la fièvre.

Le lendemain la température chute brutalement. La mère contacte de nouveau le service par téléphone. Eu égard aux symptômes décrits, l’infirmière demande à la mère de venir immédiatement.

Elle patientera dans le service durant plus d’une heure avant qu’un pédiatre ne remarque l’état de l’enfant, moribond. Emmené en urgence en salle de déchoquage, il décède le jour même.

Infection chez un nouveau-né

Une aide-soignante se voit confier par son employeur la réalisation de tests de Guthrie.

Une sage-femme apprend à l’A.S. à réaliser ces tests.

Suite à l’un de ses gestes, un enfant présente une infection.

Cassation 25 octobre 2004 « Le test de Guthrie à l’origine de l’infection a été pratiqué par une aide-soignante non qualifié pour effectuer un tel acte médical. La faute est en relation causale avec le préjudice dès lors qu’il existe une relation certaine entre la pratique du test de Guthrie et l’infection à staphylocoque dont a souffert l’enfant. »

TC de Meaux : Régulation par une IDE

Rapport d’expertise : La seule manière de juguler la déshydratation aurait été de perfuser l’enfant pour compenser les pertes à partir du moment où les signes de choc sont apparus (dans la nuit).

« Ce retard fatal dans la mise en œuvre des soins trouve sa cause dans l’attitude de l’infirmière qui, trop sûre d’elle-même, a commis une grave imprudence en s’immisçant dans des fonctions de régulation médicale excédant sa qualification ».

Infirmière condamnée pour homicide involontaire (4 mois d’emprisonnement) ainsi que le CH (amende de 20 000 €).

Cour d’appel Amiens, 7 janvier 2009

Un IDE prodige des soins à domicile sur un patient atteint d’une rétinite et procède à des injections de Cymevan par perfusion sans que l’ordonnance précise la posologie. Lors de la demande de renouvellement, il s’est aperçu avoir injecté 3 flacons en 10 jours au lieu d’1 et demi. Le médecin s’inquiétant pour son patient envoie alors à son domicile une autre infirmière laquelle constate sur place une succession de fautes. Elle en réfère alors au directeur du CHU lequel diligente une enquête.

Même si le patient ne souffre d’aucune séquelle suite aux soins, ceux-ci l’ont été dans des conditions critiquables : erreur sur la posologie quotidienne du produit, mauvaise conditions de conservation et risque infectieux par manipulations inappropriées.

Cour d’appel Amiens, 7 janvier 2009

« Le prévenu a bien commis une succession de fautes dans la préparation et l’administration d’un médicament spécifique, s’affranchissant à cette occasion des obligations de prudence et de sécurité qui s’imposaient à lui, en sa qualité d’IDE, pour prodiguer lesdits soins, lesquels, en raison de leur nature ne pouvaient être dispensés que par un infirmier. Les conditions de précarité technique et sanitaire dans lesquelles a été administré le traitement étaient bien de nature à causer un risque grave de mort ou de blessures de nature à entraîner une infirmité permanente ».

Condamnation pour mise en danger de la vie d’autrui :

Interdiction d’exercer durant 18 mois + 800 € de DI.

10 cours du Triangle de l’Arche | 92919 LA DEFENSE CEDEX France | T. 01 71 14 32 33 macsf.fr