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les structures anthropologique de l'imaginaire

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l'anthropologie symbolique

Lanthropologie symboliqueTextes et rfrencesLe professeur Gilbert Durand, n le 1er Mai 1921, est le fondateur, au 20me sicle, du courant universitaire de l'anthropologie symbolique. On lui doit de nombreux ouvrages et articles tablis autour des notions de trajet anthropologique et de structures anthropologiques de l'imaginaire.Aujourd'hui, le rseau international des centres de recherches sur l'Imaginaire (GRECO CRI), autrefois combattu par l'officialit, plus souvent maintenant par l'ignorance et l'incurie, est prsent sur tous les continents et compte plus de 70 centres et groupes de recherche regroupant de nombreux chercheurs et tudiants. Des revues, colloques, publications et sminaires rendentpriodiquement compte de ses travaux qui interrogent la fois Tradition et Modernit dans une perspective comprhensive et hermneutique..

Mythes et trajet anthropologique.

1- La socio-anthropologie symbolique. (Gilbert Durand, Michel Maffesoli et al).

Lanthropologie symbolologique (ou symbolique), se fonde elle-mme sur la psychologie des profondeurs de Jung,la philosophie des images de Bachelard et la philosophie des formes symboliques de Ernst Cassirer. Gilbert Durand en propose une ample synthse fondatrice et met laccent, dune faon tout fait complmentaire, sur une philosophie du mythe et du symbole dans leurs manifestations dcelables au travers du systme. Simone Vierne en Littrature, Yves Durand pour la psychologie, Simone Vierne pour la littrature, et Michel Maffesoli pour la socio-anthropologie en proposeront des thorisations opratives auxquelles nous avons nous mme abondamment puis.

- Symboles > Schmes > Structures.

Les symboles y sont des formes intrieures, des signes nigmatiques qui font entendre ce qui dj nexiste plus, ils sont eidolo-moteurs (reprsentatifs et efficaces), ils organisent lhomognit du signifiant et du signifi au sein dun dynamisme organisateur et comportent une composante rationnelle/relle tisse avec une composante imaginaire et affective. Ils tablissent une relation, sont la fois langage et synthse (Marie-Madeleine Davy).Dans cette optique, les schmes sont des gnralisations dynamiques et affectives de limage, des trajets incarns dans des reprsentations concrtes, ils rendent prsents des gestes et des pulsions inconscientes alors que les structures sont des protocoles normatifs de reprsentations imaginaires, bien dfinies et relativement stables, groupesautour des schmes originels. Pour Gilbert Durand, la structure implique un certain dynamisme transformateur.

2- Le mythe, qui organise lensemble en rcit social, est donc une forme structurante. Elle reste disponible aprs stre autonomise de ses lieux de production lis, on la vu aux rcits fondateurs, la cosmologie, etc, et Gilbert Durand nous a appris en reconnatre les figures permanentes luvre dans le social-historique en mme temps que leur animation au flux et reflux des avatars de lhistoire. Ceci implique une certaine varit dans lordonnancement des mythmes constitutifs du mythe.Gilbert Durand en identifie trois possibilits non exclusives les unes des autres :- une, interne, est celle de la drivation hrtique, tout mythme tant potentiellement gros dune hrsie, elle fonctionne par accentuation, soit exagration dun trait au dtriment des autres, - une, externe, ou syncrtique qui tend capter le mythe, lorsque quun mythe, dans une aire historico-culturelle donne est confondu avec dautres traves mythiques ,- une troisime thique, lorsquun ensemble historico-culturel donn ignore un mythe ou le minimise, le dnonce, le limite. La pense symbolique rend de fait possible, dans lexercice de la pluralit, la circulation travers tous les niveaux du rel. Elle dbouche sur une hermneutique indispensable son traitement.Dans cet esprit, Michel Maffesoli insiste particulirement sur le fait, dj soulign par Durkeim,que les hommes marchent parce quil faut marcher , ce qui lamne considrer que les constructions intellectuelles sont secondes par rapport lexistence elle-mme. La vie, dans son obscnit, avons-nous constat, avane toujours au pas redoubl tandis que les modles sont, en dpit de leur utilit de reprage, obsoltes aussitt qumis.Le mythe, dans ce sens, garde, pour Michel Maffesoli toute sa force, comme facteur dinterpntration des consciences. Il est un tre noologique qui ossde ceux qui le possdent. Sacr, Ame, Temps sont des Institutions ou formes de lImaginaire social, soit des faons de penser en commun imposes aux individus par les puissances sociales,la tradition, le langage, des rgles de pense. Le fond intime de la vie sociale est un ensemble de reprsentations (lon voit bien que les mythes y tiennent la place majeure) et la sociologie est ainsi une psychologie mais distincte de la psychologie individuelle.De fait les formes du groupe influent sur les reprsentations collectives qui rtroagissent elles-mmes sur les formes du groupe social dans un schma: - Formes Sociales >> Reprsentations >> Formes Sociales.Ainsi, comme la bien vu Franis Laplantine , la connaissance anthropologique jaillit de la rencontre, non seulement de deux discours explicites, mais de deux inconscients en miroir, qui se renvoient une image dforme. Elle est le discours sur la diffrence (et sur ma diffrence) fonde sur une pratique de la diffrence qui travaille sur les limites et les frontires. Se confrontent alors deux discours:* celui de la normalit,* celui de la ralit hallucine ou dviante.Ceci nous renvoie la remarque de Jean-Paul Sartre qui estimait du ressort de lanthropologie le droit dtudier un homme ou un groupe dhommes ou un objet humain dans la totalit synthtiques de ses significations et de ses rfrences la totalisation en cours.. retrouver lhomme partout o il est, dans son habitat, dans la ville.. .Nous rangerons galement dans cette cole, mme si son auteur prend des voies souvent opposes, car plus historiciste que les lves de Gilbert Durand, les travail sur lInstitution Imaginaire de la socit de Cornlius Castoriadis lequel est loin de ngliger le travail incessant des formes mythiques dans le monde contemporain. De fait, pour lui, la socit sinstitue en instituant un monde de significations, lmergence du social-historique tant mergence de la signification et de montrer, en prenant lexemple de Dieu, que cette signification est la fois cratrice dun objet de reprsentations individuelles et lment central de lorganisation du monde dune socit monothiste, puisque Dieu est pos comme la fois source de ltre et tant par excellence norme et origine de la Loi, fondement ultime de toute valeur et ple dorientation du faire social .Nous avons ici les lments constitutifs de toute mythologie. De ce point de vue, mme si sur les applications de cette structure lintelligence du social Castoriadis, accordant la place prpondrante au social-historique dans la formation sociale, diffre de Gilbert Durand, chez qui la forme et lespace sont premires, (le symbole chappant au temps lespace est le sensorium gnral de la fonction fantastique), nous voyons bien ici apparatre les donnes fondamentales du trajet anthropologique dcrit par Gilbert Durand. Il est en effet produit des impratifs bio-psychiques(appeles par Castoriadis les significations individuelles ou encore Imaginaire Radical, soit ce qui senracine dans la psych-soma) par les intimations du milieu (significations imaginaires sociales ou ImaginaireSocial).Le symbole, le mythe ont bien aussi une base personnelle (libidinale ou archtypale) et viennent galement se couler dans le lit social et Cest bien dans cette rencontre que se forment les complexes de culture . De ce point de vue, nous nous trouvons bien, quand nous abordons une mythologie, devant une matrice de significations. Et Castoriadis dinsister: cest bien parce quil y a des significations institues (nous pouvons les appeler mythes puisque originelles), que la socit sinstitue dans ses complmentarits, et ceci renvoie au magma de significations qui sous tend et oriente linstitution de la socit considre . GEORGES BERTIN. (Thse d'HDR 1999, Universit Paris 5- Sorbonne, extrait).

Bibliographie restreinte de Gilbert Durand .

Durand Gilbert, LImagination Symbolique, Paris, PUF, 1968.Durand Gilbert, Lme tigre, les pluriels de psych, Denol, 1980.Durand Gilbert, Science de lHomme et Tradition, Paris, Berg/LIle Verte, 1980.Durand Gilbert, La Foi du Cordonnier, Denol, 1984.Durand Gilbert, Les Structures Anthropologiques de lImaginaire, Paris, Dunod, 1985, 10me dition.Durand Gilbert, Beaux Arts et Archtypes, Paris, PUF, 1989.Durand Gilbert, Champs de lImaginaire, Ellug, 1996.

Relire Gilbert DURAND: Les structures anthropologiques de limaginaire par Magali Humeau (UPPA et CRAI)Cet ouvrage pourrait tre class parmi les textes fondamentaux des sciences de la cognition, conues comme sciences de lesprit. En effet, que fait Gilbert Durand sinon mettre jour "la marque originaire de lesprit", quil nomme fonction fantastique? Bien qu notre connaissance Durand ne se rfre pas aux sciences de la cognition, cest bien de cela dont il sagit: une anthropologie de lesprit, lanthropologie tant "lensemble des sciences qui tudient lespce homo sapiens" et limaginaire sa marque originaire. La premire dition de ce livre (1960) suit de peu la premire cyberntique, environ une dcennie, et est contemporaine des premiers travaux des sciences cognitives dites "computationnelles". Malgr tout ce qui les spare, nous observons une certaine convergence des projets scientifiques par cette recherche relative aux fondements de la pense humaine. En recourant lanthropologie, Gilbert Durand entend dvoiler les universaux de la pense. Ceci tant dit, les prsupposs de ces deux courants divergent: si les sciences de la cognition se sont appuyes sur la pense logique pour modliser la cognition, en revanche le modle de Durand englobe la pense rationnelle dans une pense de limaginaire bien plus vaste et premire ontologiquement. Ce dsaccord essentiel concerne la prise en compte du "sens", de laspect smantique de la reprsentation: nous allons voir que si cette composante de la reprsentation a t maintenue dans lombre par les cogniticiens, Durand en fait le cur des structures de limaginaire, faisant primer le contenu sur la forme, allant galement lencontre du structuralisme ambiant des annes cinquante et soixante.

De ce livre dense et riche, nous souhaitons retenir plus particulirement deux caractristiques de limaginaire: limportance du sens que nous venons de souligner et aussi la dynamique propre aux symboles. Nous nous arrterons au passage sur la mthode hermneutique dveloppe par Gilbert Durand.

I. La smantique

Nous allons prciser limportance de la smantique pour les structures de limaginaire dcrites par Durand. En effet, cela semble un aspect crucial de son approche. La smantique est relative au sens des units linguistiques. Cest l'tude scientifique du langage du point de vue du sens. Toutes les difficults scientifiques propres cette notion sont assez bien rsumes dans lintroduction de larticle qui lui est consacr dans lEncyclopdia Universalis: ""La smantique, ou comment sen dbarrasser": jusqu une poque rcente, ltude du sens tait volontiers considre comme constituant pour la linguistique une sorte de rejeton indsirable, au nom sans doute de ce ralisme naf "qui porte ignorer tout ce qui ne peut pas se montrer ou se toucher du doigt" (Pierre Bourdieu)."

Et il semble que cet effort de rejet soit aussi ralis par le cognitivisme. En effet, ce dernier poursuit la sparation dj opre depuis fort longtemps par la logique entre la forme et le fond, entre le symbole et le sens. Il semble que le sens propre aux symboles cognitivistes nait rien voir avec le sens commun des choses. Il sagit dun sens logique, portant sur les relations entre oprations, dbarrass de tout contenu plutt que sur le sens attach au langage: quel est le sens attribu la pomme rouge pose l devant moi? Selon le cognitivisme, son sens renverrait son rangement dans la classe des fruits ppins, puis dans la classe plus large des fruits, etc. Mais la pomme rouge renvoie mon apptit du moment, mais aussi au fruit dfendu et la sorcire du conte clbre, bref aux structures de limaginaire du Rgime Nocturne que Durand nomme "mystiques" et sans doute galement des symboles des structures synthtiques avec le ppin qui contient larbre qui donne le fruit, etc. Sa valeur nest plus du tout binaire, cest--dire soit vraie ou fausse comme pour la pense logique, mais multiple et ambigu. La pomme comme symbole participe des constellations dimages structures smantiquement. Les symboles sont relis par les homologies de sens. Ainsi, la pomme peut tre relie dun ct moisissure, pourriture, putrfaction, mort, vieille femme et de lautre ppin, terre, miniature, germe, croissance, arbre, gigantisme, etc.

Ces sens-l, nous nen sommes pas ncessairement conscients mais nous pouvons les amener notre conscience. Ce sont des sens ouverts. Tandis que pour le cognitivisme, le sens est un sens logique, ferm, qui repose sur deux valeurs (vrai ou faux) et qui ne peut tre conscientis.

Cette question du sens renvoie celle de la sparation du signifi et du signifiant. Pour Piaget, tout processus mental, perception, image ou reprsentation, a deux aspects: "la matire sensible apparat comme l'lment servant de signifiant tandis que les mouvements et leur organisation (sous les espces de schmes d'assimilation sensori-motrice) engendrent les rapports signifis eux-mmes."

Le signifi est du ct du sens, et selon Piaget de laction du sujet sur les objets, des oprations logiques qui se structurent progressivement, sur le plan sensori-moteur puis sur celui de la pense. Ces mouvements, aspects signifis, correspondent au ple assimilation, cest--dire aux actions du sujet sur son environnement.

Le signifiant est du ct de la matire sensible, du symbole, de ce qui vaut pour lobjet reprsent, de la perception, de limage, du langage. Cet aspect signifiant correspond au ple accommodation, aux transformations de lenvironnement sur le sujet, elle permet au sujet de modifier sa conduite sous l'emprise des choses extrieures lui.

C'est sur la relation entre ces deux aspects signifiant/signifi que Piaget distingue perception et reprsentation. Sur le plan de la perception, "c'est partir du moment o apparat la fonction symbolique, c'est dire o se diffrencient les "signifiants", sous forme de symboles (images) ou de signes (mots), et les "signifis", sous forme de rapports pr conceptuels ou conceptuels, que la reprsentation se surajoute l'activit sensori-motrice." Sur le plan de la reprsentation, les signifiants comprenant par exemple les images mentales et les signifis sont actions intriorises mais actions tout de mme. Ce qui permet de distinguer ces deux plans, c'est prcisment la diffrenciation signifi/signifiant. Tandis que selon Durand, le propre des symboles de limaginaire est de maintenir colls le signifiant et le signifi, indissociables. "Dans le symbole constitutif de limage il y a homognit du signifiant et du signifi au sein dun dynamisme organisateur et que, par l, limage diffre totalement de larbitraire du signe."

Cela se comprend plus aisment lorsquon saisit lorigine du sens selon Durand. "Pour quil y ait symbole il faut quexiste une dominante vitale." Plus prcisment, il part de lhypothse suivante: trois dominantes rflexe constituent les matrices sensori-motrices dans lesquelles les reprsentations vont sintgrer. Ces dominantes sont issues de la rflexologie:

Dominante de position: redressement, verticalit

Dominante de nutrition: digestive, succion, labial

Dominante copulative: sexuelle et cyclique, sous le signe du rythme.

Elles sont constitutives des schmes, sortes de symboles moteurs, squelettes dynamiques de limagination. Et Durand souligne que le corps entier par sa motricit participe la formation de limaginaire. Ainsi, les images font sens lorsquelles sont en lien avec ces schmes premiers. Une hypothse proche a t nonce par Mark Johnson et reprise par Varela qui affirme que les tres humains "possdent des structures cognitives trs gnrales, nommes schmes dimages kinesthsiques: par exemple, le schme du rcipient, le schme de la partie et du tout, et le schme de la source, de la voie et du but. Ces schmes soriginent dans lexprience corporelle () et peuvent tre projets mtaphoriquement de manire structurer une large palette de domaines cognitifs." Il serait tout fait intressant de poursuivre cette mise en parallle du modle de Durand et cet autre modle cognitiviste Nous voyons donc que le sens attribu un symbole de limaginaire na rien darbitraire, il est intimement li sa forme, son usage, mais aussi son histoire et la culture ambiante.

Durand propose un autre passage du niveau sensori-moteur au niveau de la reprsentation que celui de Piaget. La reprsentation propre limaginaire conserve cette indistinction du signifiant et du signifi, comme les schmes moteurs. Et ceci ramne ce que Piaget nomme justement les oprations infralogiques, antrieures la logique, parce quelles ne peuvent se dfaire totalement de limage, mi-chemin entre la pense intuitive et la pense rationnelle.

I. Vers une hermneutique

Cest sans doute cette primaut accorde au sens qui mne une hermneutique, cest--dire une dmarche dinterprtation des symboles. Il sagit de donner du sens au sens. Commentsaisir le sens autrement? Nous sommes donc loin du positivisme qui "exige, en premier lieu, que la science parte de faits observables et dfinis relativement un observateur"

Les "objets" tudis par Durand sont les croyances, les cosmogonies, les mythes, les rituels, les rcits de toute sorte (pomes, romans, etc.) mais aussi les images dessines, peintes, issus de toute culture. Il est clair que le smantisme de ces documents ne peut tre abord autrement que par le sens, cest--dire linterprtation. "Cest ce sens primitif quil sagit de dchiffrer." Durand recherche le sens premier dans le fourmillement des significations plus ou moins explicites.

Prenons un exemple: le livre dbute sur les images thriomorphes. Durand passe au crible mythes et contes de toute culture et il en repre des invariants sur le plan des images puis du sens. Ainsi, il dgage de 250 contes et mythes deux thmes thriomorphes sous-jacents: la terreur devant le changement et devant la mort dvorante. Cette terreur est symbolise tantt par une agitation grouillante, chaotique, tantt par une bouche caverneuse animale ou ogresse, tantt par cheval des tnbres, etc. "Le thme de la mort et de laventure temporelle et prilleuse reste sous-jacent tous ces contes dans lesquels le symbolisme thriomorphe est si apparent." Ce sont des invariants de sens que Durand repre par linterprtation pour constituer des constellations dimages convergeant autour dun noyau stable.

Durand utilise pour cela la mthode dite de "convergence" qui consiste "dlimiter les grands axes de ces trajets anthropologiques que constituent les symboles". Le mot "convergence" renvoie la recherche dun noyau fixe autour duquel des images "homologues" gravitent, bougent sans cesse. Ces constellations forment des paquets de sens et cest par leur isomorphisme smantique que les symboles convergent, ils sont semblables par leur sens."Nous verrons que les symboles constellent parce quils sont des dveloppements dun mme thme archtypal, parce quils sont des variations sur un archtype." Durand place cte cte des images et symboles provenant de toute culture, de tout domaine de pense, de lpistmologie scientifique aux symptmes des maladies mentales en passant par la biologie et la philosophie. Cette dmarche est proprement anthropologique: "Lanthropologie serait donc au sommet de la pyramide des sciences humaines, car elle impliquerait la recherche de cette unit de lhomme, de ce "substrat universel" commun toutes les cultures, qui se manifeste, avons-nous vu, soit dans leur inconscient, soit dans leurs structures mentales." A ct de cet universel, limaginaire apparat en mouvement, ayant des dynamiques propres que nous allons maintenant dcrire.

II. La dynamique de limaginaire

Durand voque plusieurs reprises la cinmatique du symbolisme. Nous avons repr que cette caractristique majeure de limaginaire peut tre situe trois niveaux.

Un premier niveau de mobilit a t identifi par Bachelard qui avait dj vu que limage se donne et se vit avant tout par son mouvement. Elle est motrice. La mthode phnomnologique permet daccder cette dynamique: "En refusant de sparer la conscience imageante des images concrtes qui smantiquement la constituent, nous optons dlibrment pour une phnomnologie contre le psychologisme ontologique de type rflexif." Cest une phnomnologie descriptive pour approcher les images par leur contenu qui est lui-mme dynamique. Donc les images sont en elles-mmes dynamiques, ainsi le symbole du sceptre renvoie au rflexe du redressement donc dun mouvement de verticalit, de monte. Ce mouvement de limage provient dune troite relation entre la motricit corporelle et la reprsentation.

Durand reprend les concepts dassimilation et daccommodation pour dsigner le trajet anthropologique, autre dynamique propre aux symboles: "cest--dire lincessant change qui existe au niveau de limaginaire entre les pulsions subjectives et assimilatrices et les intimations objectives manant du milieu cosmique et social." Ces dernires correspondant la face accommodation. Cette seconde dynamique est une oscillation du geste pulsionnel lenvironnement social et matriel. Elle implique une transversalit anthropologique, procdant par allers et retours entre la psychologie et le social. Limaginaire est donc trajet.

La notion de structure telle que Durand la dfinit implique elle aussi un jeu de dynamiques multiples qui sont passages dun symbole lautre, et pour un mme symbole dun sens lautre mme contradictoires. Contrairement Levi-Strauss, Durand ne pense pas que limaginaire puisse tre rduit un jour des structures logiques. Les structures de limaginaire sont instauratives de significations qualitatives, elles correspondent "un certain dynamisme transformateur", des "manires" dchanger et mettre les images en mouvement et en relation les unes avec les autres. Ainsi, Durand dgage trois types de structures de limaginaire: schizomorphes, synthtiques et mystiques. Le redoublement et la persvrance sont un exemple de structure mystique qui opre un renversement des valeurs diurnes. Le procd est le suivant: une image ngative du rgime diurne, par exemple la mort, se trouve euphmise par son propre redoublement: le ngatif par le ngatif donne du positif (+ x + = -). Invoquer la mort contre la mort elle-mme permet de sympathiser avec elle. Ces structures oprent par redoublement, embotement et donc inversion des valeurs dimages intolrables. Les terreurs se trouvent ainsi adoucies voire mme bonifies.

Ces dynamiques multiples de limaginaire montrent que le sens est moteur et mobile par nature et que la raison, entendue comme capacit mettre en rapport, tablir des relations, na donc rien de stable, mais conserve quelque chose de fluctuant provenant des matrices sensori-motrices de limaginaire. Cela met en cause toutes les tentatives actuelles de mutualisation de ressources pdagogiques observes en sciences de lducation que nous interprtons comme des essais de stabilisation du savoir entendu comme produit et non comme processus instable. Si le savoir est une formalisation de la connaissance, il nous semble important de prendre en compte, dans les situations de formation, son aspect dynamique et instable.

Durand considre limaginaire comme instauratif du psychisme et de la culture. On ne peut prtendre chapper absolument aux images et symboles. Mme une pense qui se dit indpendante de toute imaginaire, comme le positivisme appartient un registre de limaginaire. Ainsi limaginaire est le fondement de la pense mais aussi de la culture. Cette approche vient, depuis plusieurs dcennies dj, contre courant des modles de la cognition toujours de vigueur dans les sciences de lducation, courant qui se sont dsintresss de la question du sens pour ne travailler que la cognition entendue comme processus de traitement de linformation. Cette question du sens rejoint celle des savoirs, donc aussi de la didactique en ducation. Certainement que cette place faite limaginaire devrait bouleverser le rapport aux savoirs, les pistmologies propre aux disciplines comme les pistmologies scientifiques.

Repres bibliographiques:

DUPUY Jean-Pierre, 1994, Aux origines des sciences cognitives, Paris, La dcouverte.

DURAND Gilbert, 1960, Les structures anthropologiques de limaginaire, Paris, Dunod, 1992, 535 p.

DURAND Gilbert, 1964, L'imagination symbolique, Paris, PUF, 1998, 132 p.

DURAND Gilbert, 1994, Lalogique du mythe, in Religiosiques, N10, automne 1994, pp. 27-47.

GRAWITZ Madeleine, 1986, Mthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz.

PIAGET Jean et INHELDER Brbel, 1947, La reprsentation de l'espace chez l'enfant, Paris, Presses Universitaires de France, 581 p.

RICUR Paul, 1986, A l'cole de la phnomnologie, Paris, Librairie philosophique Jean Vrin, 1998, 295 p, pages 7-20.

VARELA Francisco J., 1988, Invitation aux sciences cognitives, tr. Fr., Paris, Seuil, 1996, 126 p.

VARELA Francisco J., THOMSON Evan, ROSCH Eleanor, 1993, L'inscription corporelle de l'esprit, Paris, Seuil.

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